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GUSTAVE RUDLER
COLLECTION
VI. 1115 (\A-/\J
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TOME QUATORZIÈME.
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LES MCEURS, ET L'ESPRIT
DES NATIONS;
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LES PRINCIPAUX FAITS DE L'HISTOIRE,
DEPUIS
CHARLEMAGNE, jusqu'à LOUIS Xm.
TOME PREMIER.
M. Dca LXXV.
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A TRÈS-HAUTE
ET TRÈS-AUGUSTE PRINCESSE
CATHERINE lï,
IMPÉRATRICE DE TOUTES
LES RUSSIES,
PROTECTRICE DES ARTS
ET DES SCIENCESi
DIGNE PAR SON ESPRIT DE JUGER
DES ANCIENNES NATIONS,
COMME ELLE EST DIGNE DE GOUVERNER
LA SIENNE.
OFFERT TRÈS-HUMBLEMENT
PAR LE NEVEU DE l'aUTEUR.
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OXFORD
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L A
PHILOSOPHIE DE L'HISTOIRE.
Introduction.
VOus voudriez .que des philofophes euflent ^crit
rhiftoire ancienne, parce que vous voulez la lire
en philofophe. Vous ne cherchez que des vérités
utiles , & vous n'avez guère trouvé . dites -vous , quo
d'inutiles erreurs. Tâchons de nous éclairer enfemble ;
eiTayons de déterrer quelques mohumens précieux
ibus les ruiiles des Cécles.
Commentons par examiner fi le globe que nous ha*
bitons était autrefois tel q^u'ii eit aujourd'hui.
II (è peut que notre monde ait fubi auttnt de chan.
gemens que les Etats ont éprouvé de révolutiocis. U
parait prouvé que la mer a couvert des terrains im*
menfes chargés aujourd'hui de grandes villes & de
riches moiflbns. Il n'y a point de rivage que le tenis
n'ait éloigné ou rapproché, de la mer.
Les fables mouvans. de TAfriquc feptentrîonalc &
des bords de la Syrie voifins de l'Egypte , peuvent-ils
être autre chofe que les fables de la mer qui font dei-
meiu'és amoncelés quand h mer s'eft peu«^-petf retîi-
rée ? Hérodote qui ne ment pas toujours , nous dit
l^robablement une très grande vérité^ quand il raconte
que fuivant le récit des prêtres de TEgyptc , le Delta
I n'avait pas été toujours terre. Ne pouvons->nous pas
1 en dire autant des cpntrées toutçs f^bbaneûfes qui font
J^ Efaifur iesnmurs.&c.TomA. A
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2 Chanoemeks iP
; •
vers la mer Baltique? Les Cielades n'atteftent-clTes p^s
aux yeux même , par tous les bas fonds qui les entou*
rent ^ par les végétations qu'on découvre aifément
fous l'eau qui les* baigne, qu'elles ont fait partie du
Continent ?
Le détrok de, la Sicile, cet ancien gouffre deCaribde
& de Scilla , dangereux encor aujourd'hui poi^les
petites barques , ne femble-t-il pas nous apprendre
que la Sicile était autrefois jointe à l'Appulie , comme
l'antiquité l'a toujours cru ? Le mont Véfuve & le mont
Etna ont les mêmes fon démens fous la mer qui Jes
fépàre. Le Véfuve ne commença d'être un volcan dan-
gereux que quand l*Etna cefTa de l'être ; l'un des deux
foupîraux jette encor des flammes quand l'autre eft
tranquille. Une fecouffe violente abyma la partie de
cette montagne qui joignait Naples à la Sicile.
Toute l'Europe fait que la mer a englouti la moitié
de la Frife. J'ai vu il y a quarante ans les clochers
de dix-huit villages près du Mordik , qui s'élevaient
encor au- deflus de fes inondations , & qui ont cédé
depuis à l'effort des vagues. Il eft fenftble que la mer
abandonne en peu de tems fes anciens rivages. Voyez
Aiguemorte , Fréjus , Ravénne , qui ont été des ports
& qui ne le font plus. Voyez Damiette où nous abor-
dâmes du tems des croifades , & qui eft adtuellement
à dix milles au milieu des terres ; la mer fe retire
tous les jours de Rofette. La nature rend partout
témoignage de ces révolutions ; & s'il s'eft perdu des
étoiles dans l'immenfîté de l'efpace , fi la feptiéme des
Pléiades eft difparue depuis longtems , fi plufieurs au-
tre8>fe font évanouies aux yeux dans la voye ladée ,
4evons.nous être furpris que notre petit globe fubiffe
des changemens continuels.
Je ne prétends pas affurer quei la mer ait formé ou
même côtoyé toutes les montagnes de la terre. Quel-
j)ues coquflles trouvées prés de ces montagnes peu-
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|g^,f^' "rm^'- nr,t^
DAK8LE6L0BS. 3^
vent avoir été le logement des petits teftacées qui
habitaient des lacs ; & ces lacs qui ont dlfparu par
des tremblemens de terre , fe feront jettes dans d'au-
tres lacs inférieurs. Les cornes d Ammon , les pierres
étoilées , les lenticulaires , les judaïques , les glofTopé-
tres , m'ont paru des foffilcs terreftres. Je n'ai jamais
ofé penfer que. ces glofTopêtres puffent être des lan-
gues de chien marin , (a) & je fuis de l'avis de celui
qui a dit qu'il vaudrait autant croire que des milliers
de femmes font venues dépofer leurs coTtcar veneris
fur un rivage , que de croire que des milliers de chiens
marins y font venus apporter leurs langues. Ce que les
merç fans reflux & que les mers dont le reflux eft de
fix y fept ou huit pieds ayent formé des montagnes de
quatre cent toifcs de haut , que tout le globe ait été
brûlé , qu^il foit devenu une boule de verre , ces ima-
ginations deshonorent la phyfique. Une telle charla-
tancrie eft indigne de Thiftoire.
Gardons - nous de mêler le douteux au certain , &
le chimérique avec le vrai ; nous avons aflez de preu-
ves des grandes révolutions du globe , fans en aller
chercher de nouvelles.
La plus grande de toutes ces révolutions ferait la
perte de la terre Atlantique , s'il était vrai que cette
partie du monde eût exifté. Il eft vraifemblable que
cette terre n'était autre chofe que l'îfle de Madère dé-
couverte peut - être par les Phénidiens , les plus hardis
navigateurs de l'antiquité , oubliée enfuite , & enfin
retrouvée au commencement du quinzième fiécle de
notre ère vulgaire.
Enfin , pair Jl^jS oV-*ïicures de toutes les terres que
l'Océan baigne , par ces golfes que les irruptions de
la mer ont formées , par ces archipels femés au milieu
des eaux , il parait que les deux hémifphères ont perdu
C« ) Voyez ks chapitres Intitulés Ckriofités de la nature,
A ij t!
\
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&
e H A N G E M B N s , &C.
peut-être plus de deux mUle lieues de terrain d'un c6té ,
& qu*ils l'ont regagné de l'autre. Mais , la mer ne
peut avoir été pendant des fiécles fur les Alpes & fur
les Pyrénées ! Une telle idée choque toutes les loix de
la gravitation & Thydroftatique.
Dç^ DIFFÉRENTES RACES D'HOMMES.
Ce qui eft plus intéreffant pour nous , c'eft la diffé-
rence fenfible des efpèces d'hommes qui peuplent les
quaijre parties connues de notre monde.
11 n'eft permis qu'à un aveugle de douter que les
Blancs, les Nègres, les Albinos, les Hottentots , les
Lappons , les Chinois , les Américains , foient des races
entièrement diflFér entes.
11 n'y a point de voyageur înftruît qui en paflant par
Leide n'ait vu la partie du reticulum mucofum d'un
Nègre difféqué par le célèbre Ruisb, Tout le reftc de
cette membrane fut tranlportée par Pierre le grand
dans le cabinet des raretés à Pétersbourg. Cette mem-
brane eft noire , & c'eft elle qui communique aux
Nègres cette noirceur inhérente qu'ils ne perdent que
dans les maladies qui peuvent déchirer ce tiiîu , & per-
mettre à la graifle échappée de fes cellules de faire
des taches blanches fous la peau.
Leurs yeux ronds , leur nez épaté , leurs lèvres
toujours greffes , leurs oreilles différemment figurées ,
la laine de leur tête, la mefurc même de leur intelli-
gence , mettent entr'eux & les autres efpèces d'hom-
mes des différences prodigieu^s ; & ce qui démofttre
qu'ils ne doivent point cette <fl!ifreftc€ à leur climat , .
c'eft que des Nègres & des Négreffes tranfportés <lans
les pays les plus froids, y prbduifent toujours des
animaux de leur efpèce , & que les mulâtres ne font
qu'une race bâtarde d'un noir & d'une blanche , ou
d'un blanc & d'une noire.
1
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2
DiFFéREKTES RACES D'HOMMES. f |ff
Les Alhijnos font à la vérité une nation très petite
& très rare ;iIS habitent au milieu de T Afrique. Leur
faiblelTe ne leur permet guères de s'écarter des caver-
nes où ils demeurent; cependant les Nègres en attra-
pent quelquefois , & nous les achetons d'eux par cuiio-
lité. J'en ai vu deux , & mille Européans en ont vus.
Prftendre que ce font des Nègres nains , dont une
eipèce de lèpre a blanchi la peau , c'eft comme fi oq
difait que les noirs eux - mêmes font des blancs que
la lèpre a noirCis. Un Albino ne reflbmble pas plus
à un Nègre de Guinée qu'à un Anglais ou à un Efpa-
S loi. Leur blancheur n'eft pas la nôtre , rien d'in-
mat , nul mélange de blanc & de brun , c'eft une
couleur de linge , ou plutôt de cire blanchie ; leurs
cheveux, leurs fourcils font de la plus belle &-de la
plus douce foie ; leurs yeux ne reflemblent en rien à
ceux des autres hommes , mais ils approchent beau-
coup des yeux de perdrix. Ils rèCTemblçnt aux Lappons
par la taille , à aucune nation par la tête , puisqu'ils
ont une autre chevelure , d'autres yeux , d'autres
oreilles, & ils n'ont d'homme que la ilature du corps,
avec la faculté de la parole & de la penfée dans un
degré très éloigné du nôtre. Tels font ceux que j'ai
vus & examinés.
Le tablier que la nature a donne aux* Cafres , &
dont la peau lâche & moUe tombe du nombril fur
les cuiifes ; le mamelon noir des femmes Samoyèdes ,
la barbe des hommes de notre continent , & le men-
ton toujours imberbe des Américains , font des diffé-
rences fi marquées , qu'il n'eft guères poffible d'ima-
gingr que les uns & les autres ne foient pas des races
dilfêrentés.
Au relie , fi Ton demande d'où font venus les Amcrî-
cains ? il faut aufli demander d'où font venus les habi-
tans des terres Auftrales ? & on a déjà répondu que
la Çipvidence qui a mis des hommes dans la Nor-
vège' en a planté aufli en Amérique & fous le cercle
A ii j
1
I
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e.
6 DiFFJÊRENTES
polaire méridional , comme elle y a pla^jtc des arbres ,
& fait croître de l'herbe.
Plufteurs favans ont foupqonné que /luelques races
d'hommes , ou d'animaux approchans de l'homme 9
ont péri ; les Albinos font en fi petit nombre , fi
iaibles , & fi maltraités par les Nègres , qu'il eft à crain-
dre que cette efpéce ne fubfifte pas encore longtems.
Il eft parlé de Satyres dans tous les auteurs an*.
ciens. Je ne vois pas que leur exiftence foit impoifi*
ble ; on étouffe encore en Calabre quelques menftres
mis au monde par des femmes. Il n'efk pas impro-
bable que dans les pays chauds , des finges ayent
fubjugué des filles. Hérodote au livre II , dit , que
dans fon voyage en Egypte > il y eut une femme qui
s'accoupla publiquement avec un bouc dans la prc
vince de Mendès ; & il appelle toute l'Egypte en
témoignage. Il eft défendu dans le Lévitique au chap.
XVII. de s'unir avec les boucs & avec les chèvres. Il
faut donc que ces accouplemens ayent été communs ;
& jufqu'à ce qu'on foit mieux éclairci , il eft à préfu-
mer que des efpèces monftrueufes ont pu naître de
ces amours abominables ; mais fi elles ont exifté, elles
n'ont pu influer fur le genre - humain , & femblables
aux mulets* qui n'engendrent point , elles n'ont pu
dénaturer les autres races.
A l'égard de la durée de la vie des hommes , ( fi
vous faites abftracftion de cette ligne de defçendans
à* Adam confacrée par les livres juife , & fi longtems
inconnue ) il eft vraifemblable que toutes les races
humaines ont jouï d'une vie à-peu-près aufli courte
que la nôtre, comme les animaux, les arbres, & toutes
les productions de la nature ont toujours eu la même
durée, II eft ridicule de nous en excepter.
M ds il faut obferver que le commerce n'ayant pas r
toyjoqrs apporté au genrç- humain les prodùdliôns & | j
» »i$$tM
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tsm
Ri^CES D' HOMME
7 '
les maladies des autres climats , & les hommes ayant
été plus robuftes & plus laborieux dans la fimpltcité
d'un état champêtre pour lequel ils font nés , ils
ont dû jouir d'une fante plus égale, & d'une vie un peu
plus longue que dans la molleffe , ou dans les travaux
mal-fains des grandes villes ; c'eft-à-dir« , que (t
dans Conftantinople , Paris & Londres , un homme
fur cent mille arrive à cent années , il eft probable
que vingt hommes fur deux millions atteignaient au-
trefois cet âge. C'eft ce qu'on vit dans plufieurs en-
droits de l'Amérique où le genre-humain s'était con-
fervé dans l'état de pure nature.
La pefte , la petite vérole que les caravanes Arabes
communiquèrent avec le tems aux peuples de l'Afie
& de l'Europe , furent longtems inconnues. Ainfî le
genre-humain en Afie , S: dans les beaux climats de
TEurope , fe multipliait plus aifément qu'ailleurs. Les
maladies d'accident , & plufieurs bleflTures ne fe gué-
riiTaient pas à la vérité comme aujourd'hui , mais
l'avantage de n'être jamais attaqué de la petite vérole
& de la pefte « compenfait tous les dangers attachés
à notre nature; de force qu'à tout prendre il eft à
croire* que le gehre- humain dans les climats favo-
rables , jouïflait autrefois d'une vie plus faine Se plus
heureufe que depuis TétabliiTement des grands empi-
res. Ce n'eft pas à dire que les hommes ayent jamais
vécu trois ou quatre cent ans. C'eft un miracle très
refpeâable dans la Bible » mais partout ailleurs c'eft
un conte abfurde.
De l.'AHTIQ.UITÉ DES NATIOKS.
Prefque tous les peuples , mais furtout ceux de
l'Afie , comptent une fuite de fiéclcs qui nous effraie.
Cette conformité entr'eux doit au moins nous faire
examiner fi leurs idées fur cette antiquité étaient def^
tituées de toute vraifemblance.
A iiij
Digitizeq^by
Google
De l' antiquité
. Four qu'une nation (bit rafTemblée en corps de peu-
ple , qu'elle foit puiffante, agiierrie, favante , il cft
certain qu'il faut un tems prodigieux. Voyez TAmé-
riquc;il n'y avait que (Jeux royaumes quand elle fut
découverte , & encor dans ces deux royaumes on n'a-
yait pas inventé l'art d'écrire. Tput le refte de ce
vafte continent était partagé , & l'eft encor , en petites
fociétés à qui les arcs font inconnus. Toutes ces peu-
plades vivent fous des huttes , elles fe vétiffent de
peiux de béces dans les climats froids , & vont pref-
que nues dans les tempérés. Les unes fe nourriflent
de la chafTe , les autres de racines qu'elles pêtriflent.
Elles n'ont point recherché un autre genre de vîe ;
parce qu'on ne délire point ce qu'on ne connaît pas.
Leiir induftrie n^a pu aller au-delà de leurs befoins
prefTans. Les Samoyèdes , les Lappons , les habitans
8^ du. nord de la Sibérie , ceux du Kamshatka , font encor
moins avancés que les peuples de l'Amérique. La plu-
part dçs Nègres , tous les Cafres font plongés dans
la même ftupidité ; & y croupiront longtems.
Il faut un concours de cîrconftances favorables pen-
dant des fiécles pour qu'il fe forme uhe grande fociété
d'hommes rademblés fous les mêmes loix. Il en faut
même pour former un langage. Les hommes n'ar-
ticuleraient pas fi on ne leur apprenait à pronorrcer
dès paroles ; ils ne jetteraient que des cris confus ,
ils ne fe feraient entendre que par fignes. Un enfant
ne parle au bout de quelque tems que par imitation ;
& il ne s'énoncerait qu'avec une extrême difficulté
fi on laiffait pa^Ter fçs premières annçes fans dénQiief
fa langue.
Il a falu peut-être plus de tems pour que des hom^
mes doués d'un talent fingulier ayent formé & en-
feigné aux autres les premiers rudimens d'un langage
imparfait & barbare , qu'il n'en a falu pour parvenir
çnfuite à l'ét^bliffement de quelque fociété. Il y a mê-
I
I
ti^iHMH^^i '■ *mi
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Google
jfeg»j"i '^icp'^ 'i*<a^
N^^ • DES N A T 1 O K S; '9
me des nations entières qui n'ont jiiniais pu parvenir
à former un langage régulier & à prononcer diftinAe-
ment ; tels ont été les Troglodites au rapport de Pline $
tels font encor ceux qui habitent vers le Cap de Bonne-
Efpérance. Mais qu'il y a loin encor de ce jargon
barbare à l'art de peindre fes penfées ! la diftance cft
immenfe.
Cet çtsat de brutes où le genre -humain a été long-
teros , dut rendre refpèce très rare dans tous les cli-
mats. Les hommes ne pouvaient guéres fuffire à leurs
befoins, & ne's'entendant pas ils ne pouvaient fe re-
courir. Les béces carnafliéres ayant plus d'inftinét
qu'eux , devaient couvrir la terre , & dévorer une par-
tie de refpèce humaine.
Les hommes ne pouvaient fe défendre contre les
animaux féroces , qu'en lanqant des pierres , & eh
s'armant de groffes branches d'arbres ; & de là , peut-
être , vint cette notion confufe de Tantiquité , que les
premiers héros combattaient contre les lions & contre
les fangliers avec des maiTues.
Les pays les plus peuplés furent fans doute les cli-
mats chauds , où l'homme trouva une nourriture fa-
cile & abondante dans les cocos , les dattes , les ana-
nas, & dans le ris qui croit de lui-même. Il eft bien
vraifemblable que l'Inde , la Chine , lea bords de l'Eu-
phrate & du Tigre , étaient très peuplés , quand les au-
tres régions étaient prefque défertes. Dans nos cli-
mats feptentrionaux au contraire , il était beaucoup
plus aifé de rencontrer une compagnie de loups qu'une
fociété d'hpmmes.
De la connaissance de l'ame.
Quelle notion tous les premiers peuples auront-ils
eue de l'ame ? Celle qu'ont tous nos gens do cam-
pagne avant qu'ils ayent entendu le catéchifme , ou
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ïPlS«*«ta
.
itiéme après qu'ils l'ont entendu. Ilar n'acquièrent qu'u-
ne idée confufe, fur laquelle même ils ne réflechiflfent
jamais. La nature a eu trop de pitié d'eux pour en
faire des metaphyficiens ; cette nature eft toujours
& partout li même. Elle fit fentir aux premières focié-
tés qu*il y avait quelque être fupérieur à Thomme ^
quind elles éprouvaient des fléaux extraordinaires.
Elle leur fit fentir de même qu'il eft dans l'homme
quelque chofe qui agit & qui penfe. Elles ne diftîn-
guaient point cette faculté de celle de la vie; & le mot
à'ame ûgnifia toujours la vie chez les anciens , foît
Syriens, foit Caldéens, foit Egyptiens , foit Grecs, foît
ceux qui vinrent eoiin s'établir dans une partie de la
Phenicie.
Par quels degrés peut-on parvenir' à imaginer dans
notre être phyfique un autre être métaphyfique ? Cer-
tainement des homnes uniquement occupés de leurs Jl
befoins n'étaient pas philofophes. D
Il fe forma dans la fuite des tems des fociétés un
peu policées , dans lefquelles un petit nombre d'hom-
mes put avoir le loifir de réfléchir. Il doit être arrivé
qu'un homme fenfiblement frappé de la mort de fon
père , ou de fon frère , ou de fa femme , ait vu dans
un fonge la per fon ne qu'il regrettait. Deux ou trois
fonges de cette nature auront inquiété toute une peu-
plade. Voilà un mort qui apparaît à des vivans , &
cependant ce mort rongé des vers eft toujours en la
même place. C'eft donc quelque chofe qui était en
lui , qui fe promène dans l'air. C'eft fon ame , fon
ombre , fcs mânes ; c'eft une figure légère de lui-même.^
Tel eft le raifonnement naturel de l'ignorance qui
commence à raifonncr. Cette opinion eft celle de tous
les premiers tems connus , 6^ doit avoir été par con-
' féquent celle des tems ignorés. L'idée d'un être pu-
rement immatériel n'a pu fe préfenter à des efprits qui
ne connaîflaient que la matière. Il a falu des forgea '
rons , des charpentiers , des maqons , des laboureurs^
Digitized by
Google
9 D E l' A M E* II I f
avant qu'il fc trowrât un homme qui eût aflcz de loifir
pour méditer. Tous les arts de la main ont fans doute
précédé la métaphyGque de pluGeurs fiécles.
Remarquons en paiTant que dans Page moyen de
la Grèce , du tems d'Homère , l'ame n'était autre chofe
qu'une image aérienne du corps. Ulyjfe voit dans les
enfers des ombres , des mânes ; pouvait-il voir des
cfprits purs ?
Nous examinerons dans la fuite comment les Grecs
empruntèrent des Egyptiens l'idée des enfers & de
l'apothéofe des morts ; comment ils crurent , ainfi que
d'autres peuples , une féconde vie ^ fans foupqonner la
fpiritualité de Tame ; au contraire ils ne pouvaient ima-
giner qu'un être fans corps pût éprouver du bien &
du mal. Et je ne fais fi Pltiton n'eft pas le premier qui
aie parlé d'un être purement fpirituel. C'eft là peut-
être un des plus grands efforts de l'intelligence hu-
maine. Ëncor la fpiritualité de P/atoft eft très con-
teftée , & la plupart des pères de l'églife admirent
une ame corporelle , tout platoniciens qu'ils étaient
Mais nous n'en fommes pas à ces tems fi nouveaux ,
& nous ne confidérons le monde que comme encor
informe & à peine dégro(fi.
De la religion des premiers
HOMMES.
Lorfqu'après un grand nombre de fiécles quelques
fociétés fe furent établies , il eft à croire qu'il y eut
quelque religion , quelque efpèce de culte groffier.
I Les hommes alors uniquement occupés du foin de
foutenir leur vie , ne pouvaient remonter à l'auteur de
la vie ; ils ne pouvaient connaître ces rapports de tou-
tes les parties de l'univers , ces moyens , & ces fins
innombrables qui annoncent aux fages un éternel
archite^e. «^
S
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!
12 D E L A R E L I G I O N
. La connaiffancc d'un D I K U formateur , rémuiié*.
rateur & vengeur; eft le fruit de la raifon cultivée , ou .
de la révélation*
.Tous lés peuples furent donc , pendant des fiéclcs ,
de que font àujourH*hùi les habîtans de plpfieurs cAces •
méridionales de l'Afrique , cei^x de plufieurs ifles , &
la moitié des Anericains. Ces peuples n'ont nulle
idée d'un DiEO unique, ayant tout fait, préfent en
tous lieux, exiftint par lui-méne dans l'éternité. On
ne doit pas pourtant les nommer athées dans le fens
ordinaire ; car ils ne nient point TEtre fupréme ;11s
ne le connaiflcnt psis ; ils n'en ont nulle idée. Les^
Cafres prennent pour protedleur un infeéle , les Nè-
gres un ferpent. Chez les Américains , les uns ado-
rent la lune , les autres un arbre. Pluûeurs n'ont abfo-
lument aucun culte.
Les Péru.viens étant policés adoraîfent le foleil. Ou
Mango Capac leur avait fait accroire qu'il était le fils
de cct'aftre , ou leur raifon commencée leur avait dit
qu'ils devaient quelque reconnaifîance à l'aflre qui
anime la nature.
Pour favoir comment tous ces cultes ou ces fu-
perilitions s'établirent , il me femble qu'il faut fuivre
la marche de t'efprit humain abandonné à lui-même.
Une bourgade d'hommes prefque fauvages , voit pé-
rir les fruits qui la nourrilTent : une inondation dé-
truit quelques cabanes ; le tonnerre en brûle quelques
autres. Q)jî leur a fait ce mal ? Ce ne peut être un
de leurs concitoyens ; c^r tous ont également fouffert.
C'eft donc quelque puîflance fecrette ; elle les a maltrai-
tes , il faut donc l'appaifer. Comment en venir à bout?
en la fervant comme on fert ceux à qui on veut plaire ,
en lui faifant de petits préfens. Il y a un ferpent dans le
voifinage , ce pourait bien être le ferpent ; on lui offrira
du lait près de la caverne où il fe retire ; il devient j r
facré dès - lors ; on l'invoque quand on a la guerre . ^ *
&
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^{go^
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DBS FUilSIjeRS HOMMES.
13 ^
con^e la bourgade ¥oifme , qui de fon côté a cholfi un
autre protecteur.
D'autres petites peuplades fe trouvent dans le même
Cas. Mais n'gyant ckez elles aucun objet qui fixe leur
crainte & leur adoration , elles appelleront en général
l'être qu'elles foupc^onnent leur avoir fait du mal , ù
Maître , le Seigmur , le ^bef^ le Dominant,
Cette idée étant plua conforme que les autres à
la raifon commencée qui s'accroit & fe fortifie aveC
le temsv demeure dans toutes les têtes quand la na-
tion eft devenue plus nombreufe. Aînfi nous voyons
que beaucoup de nations n'ont eu d'autre Dieu quç
le Maître , le Seigneur. C'était Adouai c\\q% les Phé-
niciens , Baal^ Meikom , jidad , Sadai chez les peu-
ples de Syrie. Tous ces noms ne fignifient que le
Seigneur , le Purjfunt,
Chaque état eut donc avec le tems fa divinité tuté-
laîre , fans favoir feulement ce que c'eft qu'un Dieu ;
& fans pouvoir imaginer que l'Etat voifin n'eût pas
comme lui un protecteur véritable. Car comipient pen-
icr , lorfqu'on avait xiu Seigneur , que les autres n'en
enflent pas auffi ? 11 s'agiffait feulement de favoir lequel
de tant de maîtres , de feigneurs , de Dieux , l'em-
porterait quand les nations combattraient les unes
contre les autres.
Ce fut là, fans doute', l'origine de cette opinion fi
généralement & fi longtems répandue , que chaque
peuple était réellement protégé par la divinité qu'il
avait choifie. Cette idée fut tellement enracinée chez
les hommes , que dans des tems très poftérieurs , vous
voyez Homère faire combattre les Dieux de Troye
contre les Dieux des Grecs , fans laifl'er foupqonner
en aucun endroit que ce foit une chofe extraordi-
naire & nouvelle. Vous voyez Jephté chez les Juifs
qui dit aux Ammonites > 2^e pojfédez -vous pas de droit
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î^iiiF«rcar^^
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*
14 De la religion
ce que votre feigtieur Chatnos vont a donné ? Souf-
frez donc que nous pojfédions la terre que notre f eu
gneur Adon^ nous apromife.
Il y a deux autres palTages non moins forts , ce (ont
ceux de Jirémie & d'Ifàie , où il eft dit , Que/Ze rai-
fin a eu le feigneur Melkom pour s* emparer du pays
de Gad ? Il eft clair par ces expreffions , que Jes
Juifs , quoique fcnriteurs à'Adonài , reconnaiflaient
pourtant le feigneur Melkom & le feigneur Cbamos.
Dans le premier chapitre des Juges vous trouverez
que le Dieu de Juda fe rendit maître des montagnes ,
mais qu'il ne put vaincre dans les vallées. Et au
troifiéme livre des Rois vous trouvez chez les Syriens
l'opinion établie que le DiEU des Juifs n'était que le
Dieu des montagnes.
Il y a bien plus. Rien ne fut plus commun que
d'adopter les Dieux étrangers. Les Grecs reconnu-
rent ceux des Egyptiens , je ne dis pas le boeuf jqpis
& le chien Anubis » mais Ammon , & les douze grands
Dieux. Les Romains adorèrent tous les Dieux des
Grecs. Jérimie , Amos & St. Etienne , nous aflfurent
que dans le défert pendant quarante années, les Jui&
ne reconnurent que Moloc , Rempbam & Kium , qu'ils
ne firent aucun facrifice , ne préfentèrent aucune
offrande au feigneur Adonai « qu'ils adorèrent depuis.
Il eft vrai que le Pentateuque ne parle que du veau
d'or , dont aucun prophète ne fait mention ; mais ce
n'eft pas ici le lieu d'éclaircir cette grande difficulté :
il fuffit de révérer également Moife , Jirémie , Amos
& St, Etienne , qui Semblent fe contredire , & que l'on
concilie.
Ce que j'obferve feulement , c'eft qu'excepté ces
tems de guerre & de fanatifme fanguinaire qui éteignent
toute humanité & qui rendent les mœurs, les loix,
}a religion d'un peuple l'objet de Thorreur d'un au- ,
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DES PREMIERS HOMMES. I^
tre peuple , toutes les nations trouvèrent très bon que
leurs voifins euflent leurs Dieux particuliers , & qu'eU
les imitèrent fouvent le culte & les cérémonies des
étrangers.
Les Juifs mêmes , malgré leur horreur pour le reftp
des hommes , qui s'accrut avec le tems « imitèrent la
circoncifion des Arabes & des Egyptiens , s'attachè-
rent comme ces derniers à la diilinction des vian«
des , prirent d'eux les ablutions , les procefTions , les
danfes facrées , le bouc Hazazel , la vacbe roujffm
Ils adorèrent fouvent le Baai , le Be/pbegor de leufa
autres voifins ; tant la nature & la coutume l'empori»
tent prefque toujours fur la loi , furtout quand cette
loi n'eft pas généralement connue du peuple. Ainfi Jo-
cob petit-fils à^ Abraham ne fit nulle difiiculté d'époufer
deux fœurs , qui étaient ce que nous appelions ido^
làtres & filles d'un père idolâtre. Mdife même époufa
la fille d'un prêtre Madîanite idolâtre. Abrabam était
fils d'un idolâtre. Le petit-âls de Moïfe , EUazaty fut
prêtre idolâtre de la tribu de Dan idolâtre.
Ces mêmes Juifs qui criaient tant contre les cuU
tes étrangers , appellèrent dans leurs livres facrés
l'idolâtre Nabucodonofor , l'oint du Seigneur, l'ido-
lâtre Oyrut auffl l'oint du' Seigneur. Un de leurs pro-
phètes fut envoyé à l'idolâtre Ninîve. Elijee permît
a l'idolâtre Naaman d'aller dans le temple de Rem-
non. Mais n'anticipons rien ; nous favons affez que
les hommes fe contredifent toujours dans leurs mœurç
& dans leurs loix. Ne fortons point ici du fujel
que nous traitons ; continuons à voir comment les
religions diverfes s'établirent.
Les peuples les plus policés de l'Afie en-deqàde
TEuphrate adorèrent les aftres. Les Caldéens avant
le premier Zoroajlre , rendaient hommage au Soleil ,
comme firent depuis les Péruviens dans un autre
hémifphère. Il faut que cette erreur foit bien na-
turelle à l'homme , puifqu'elle a eu tant de fe<fta-
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l6 De XÂ RELIGION
teurs dans l'Afié ôc dans rAmérique. Une nation
j^etîte & à demi fauvagc n'a qu'un protecteur. De-
vient-elle plus nombreufe ? elle augmente le nombre
de fes Dieux. Les Egyptiens commencent par ado-
rer Lbetb ou Ifif , A ils finiflenif par adorer des chats.
Les premiers hommages des Romains agreftes font
pour Mars , cei^x des Romains maîtres de l'Eu-
rope font pour la Déeffe^^Ie Tadte du mariage , pour
le Dieu des htrines. (a) Et cependant Cicéron Se,
tous les philofophes & tous les initiés reconnaiffaîent
un Dieu fuprême & tout-puiffant Ils étaient tous
revenus par la raifon au point dont les hommes fau-
vages étaient partis par inftindl.
Les apothéofes ne peuvent avoir été imaginées
que très longtems après les premiers cultes. Il n'eft
pas naturel de faire d'abord un Dieu d'un homme
que nous avons vu naître comme nous , fouffrir com-
me nous les maladies i les chagrins , les miféres de
l'humanité , fubir les mêmes befoins humilians , mou-
rir & devenir la pâture des vers, lyiaîs voici ce qui
arriva chez prefque toutes les nations après les ré-
volutions de plufieurs fiécles»
Un homme qui avait fait de grandes chofes , qui
avait rendu des fervices au genre- humain , ne pou-
vait être à la vérité regardé comme un Dieu par
ceux qui l'avaient vu trembler de la fièvre , & aller
à la garderobe ; mais les entoufiaftes fe perfuadèrent
qu'ayant des qualités émînentes , il les tenait d'un
Dieu , qu'il était fils d'un Dieu : ainfi les Dieux firent
des enfans dans tout le monde ; car fans compter les
rêveries de tant de peuples qui précédèrent les Grecs ,
BaccbuT , Perfée , Hercule , Caftor & Pollux furent
fils de Dieu ; .Romulm fils de Dieu ; Alexandre fut
déclaré fils de Dieu en Egypte ; un certain Odin^
chez nos nations du Nord , fils de Dieu > Mangt) Ca*
foc.
( a } Bea pertmda , Dtusftefeutius.
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s Delarelioion.&c
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]>ar fils du Soleil au Pérou. L'hiftorien des Mogola
Abu/gazi rapporte qu'une des ayeules de Gengis-lia^
nommée Alanku , étant fille , fut grolTe d'un rayori
célefte. GengisAian lui-même pafla pour le fils de
Dieu. Et lorfque le pjpe Innocent IV envoya frère
Ajcelin à Batoukan petit-fils de Gengis , ce muine ne
pouvant être préfence qu'à Tun des vifirs , lui A\%
qu'il venait de la part du vicaire de Dieu : le minif-
trc répondit , Ce vicaire ignore-t-il qu'il doit des hom-
mages & des tributs au fiU de Dieu le grand J?a-
toukan Ton maître ?
D un fils de Dieu à un Dieu, il n'y a pas loin chez
les hommes amoureux du merveilleux. Il ne faut
que deux ou trois générations pour faire p irtager au
fils le domaine de fon père ; ainfi des temples furent
élevés avec le tems à tous ceux qu'on avait fuppofé
être nés du commerce furnaturcl de la ©ivinicé avec
nos femmes & avec nos filles,
On pourrait faire des volumes fur ce fujet ; maïs
tous ces volumes te réduifent à deux mots , c'eftque
le gros du genre -humain a été & fera très lohgtcms
infenfé & imbécille ; & que peut-être les plus infen-
fés de tous ont été ceux qui ont voulu trouver un
fens à ces fables abfurdçs , & mettre de la raifoa
dans la folie,
Des usages et des sentimens communs 4
PRESaUE toutes LES NATIONS ANCIENNES.
La nature étant partout la même ^ les hommes ont
dû néceflairçnient adopter les mênjcs vérités 65: les
mêmes erreurs dans les chofes qui tombent le plus
fous les fens , & qui frappent le plus rimagination.
Ils ont dû tous attribuer le fracas 8c les effets du
tonnerre au pouvoir d'un être fupérieur habitant dans
les airs. Les peuples voifins de l'océan voyant les gran-
des mirées inonder leurs rivages à la pleinç lune »
EJfaifur les mœurs , '^c, Toin. L B
><^^^i >i \MJk un. "W iJ^JftSi
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rS USAO B6 ET SENTIM ENS jf
ont dà croire que la lune était caufe de tout ce gui
ajrrivait dans le tems de fes différentes pbafes.
Dans leurs cérémonies religieufes , prefque tout fe
tournèrent vers Toricnt , ne fongeant pas qu'il n*y a
ni orient ni occident , & rendant tous une efpece
d'hommage au foleil , qui fe lei^ait à leurs yeux.
Parmi les animaux , le ferpent dut leur paraître
doué d'une intelligence fupcrieure , parce que voyant
muer quelquefois fa peau , ils durent croire qu'il ra-
jeuniflait. Il pouvait donc en changeant de peau fe
maintenir toujours dans fa jeuneffe ; il était donc
immortel. Aufli fut -il en Egypt« , en Grèce , le fym-
bole de l'immortalité. Les gros ferpens qui fe trou-
vaient auprès des fontaines empêchaient les hommes
timides d'en approcher. On penfa bientôt qu'ils gar-
daient les tréfors. Ainfi un ferpent gardait les pom-
mes d'or hefpéridcs ; un autre veili«ît autour de la
toifon d'or ; & dans les myftères de Baccbus on por-
tait l'image d'un ferpent qui femblait garder une grap-
pe d'or.
Le ferpent paflait donc pour le plus habile des
animaux ; & de - là cette ancienne fable indienne , que
Dieu ayant créé l'homme , lui donna une drop.ue qui
lui aflurait une vie faine & longue ; que Thomme
chargea fon âne de ce préfent divin , mais qu'en che-
min l'âne ayant eu foif , le ferpent lui enfeigna une
fontaine , & prit la drogue pour lui , tandis que l'âne
buvait ; de forte que l'homme perdit l'immortalité
par fa négligence , & le ferpent l'acquit par fon
adrefle. De- là enfin tant de contes de ferpens 6c
d'ânes.
Ces ferpens faifaient du mal ; mais comme ijs avaient
quelque chofe de divin , il n'y avait qu'un Dieu qui
eût pu enfeigner à les détruire. Ainfi le ferpent Python
^ fut tué par ^follon, Ainfi Opbionie le grand fei;pent , .
& i
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PES NATIONS KVÇltVmth 19
•
fit la guerre aux Dieux longtems avant qve les Greç^
cuflent forgé leur Apollon, Un fragment de Phirécide
rapporte que cette fable du grand ferpent ennemi dç$
Dieux était une des plui anciennes de la ffeénicie, '
Nous avons déjà vu que les fonges , les rêves dui^
rent introduire la même fuperftition dans toute la terre,
Je fuis inqujet pendant la veille de la fanté de ma
femme , de mon fils , je les vois mourans pendant
mon fbmmeil , ils meurent quelques jours après : il
n'eft pas douteux que les Dieux ne m'ayent envoyç
ce fonge véritable. Mon rêve n'a-t-il pas été acçom^
pli ? c'eft un rêve trompeur que les Dieux m'ont dé»
puté. Ainfi dans Homère^ Jupiter envoyé un fonge
trompeur au chef des Grecs Jgamenmon, Ainfi , ( au
m. livre des Rois , chap. XXII. ) le Dieu qui con,
duit les Juifs envoyé un efpriç malin pour mf ntir dans
la bouche des prophètes,
\
!!■
Tous les fonges vrais ou hux viennent du ciel. I^e$
oracles s'étabiiflent'de même par toute la teire,
Une femme vient demander à des mages (i fon mari
mourra dans Tannée. L'un lui répond oui , l'autre non,
Il eft bien certain que Tun d'eux aura raifon ; fi le
mari vit, la femme garde le iilence; s'il meurt , elle
crie par toute la ville que le mage qui a prédit cettç
mort eft un prophète divin. Il fç trouve bientôt dans
tous les pays ^es hommes qui prédifent l'avenir , &
qui découvrent les chofes les plus cachées. Ces hom,
mes s'appellent les Voyans chez les Egyptiens , com^
me dit Manétbon au rapport mêmç de Jofepb dans
fon difcours contre Appion.
Il y avait des Voyans en Caldée , en Syrie. Chaque
temple eut fes oracles. Ceux ^^ Apollon obtinrent un
fi grand crédit , que Rollin dans fon hiftoire ancienne
répète les oracles rendus par Apollon à Créfus, Le
Dieu devine que le roi fait cuire une tortue dans une
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argtf^ii* Il <I3I 4- '" ' -~^-^'»ftsSiM
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léâim.
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20 Usages E'çsENTiMEN s
tourtière de cuivre , & lui répond que fon règne finira
quand un mulet fera fur le trôhe des Perfes. RoUin
n'examine point fi ces présidions dignes de li^ofira*
dmnus ont été faites après coup. Il ne doute pas de
la fcience des prêtres à' Apollon ^ & il croit que Dieu
permettait q(\i ApoUon dit vrai. C'était apparemment
pour confirmer les Payens dans leur religion.
Une queftion plus philofophique , dans laquelle
toutes les grandes nations policées fe font accordées
depuis rinde jufqu'à la Grèce , c'éft l'origine du bien
& du mal.
Les premiers théologiens de toutes les nations du-
rent fe faire la queftion que nous faifons tous dès
rage de quirize ans , Pourquoi y a-t-il du mal fur la
terre ?
On enfeîgna dans Tlnde qu'Adimo fils de Brama
produifit les hommes juftes par le nombril du côté
droit , & les injuftes du côté gauche, & que c'eft de
ce côté gauche que vint le rral moral & le mal phyfiquc.
Les Egyptiens curent leur Typhon , qui fut Tennemi
â'OJiris, Les Perfans imaginèrent qu'Ariman perqa
l'œuf qu'avait pondu Oromafe ^ & y fit entrer le pé-
ché. On connaît la Pandore des Grecs : c'eft la plus
belle de tqutes les allégories que l'antiquité nous ait
tranfmifes.
L'allégorie de Job fut certainement écrite en arabe »
pbîfaue les tradudîons hébraïques ^ grecques ont
cônfervé plufieurs termes arabes. Ce livre qui cft d'u-
ne très haute antiquité , repréfente le Satan , qui eft
VAriman des Perfes , & le Typhon des Egyptiens , fe
promenant dans tonte la terre , & demandant permif-
fjon au Seigneur d'. ffliger Joh, Satan paraît fubor-
donné au Seigneur ; mais il réfuîte que Satan eft un
être très puilTT^nt , capable d'envoyer fur la terre des
maladies , 65: de tuer les animaux.
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Stg'aj-M»-
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DES NATIONS ANCIENNES. 21
Il 9s trouva an fond que tant de peuples fans le
favoir étaient d'accord fur la croyince de deux prin-
cipes , & que Tunive/s ^lors connu était en quelque
forte manichéen.' ^
Tous les peuples durent admettre les cxpintions ;
car où et lit l'homme qui n'eût pas commis de gran-
des fautes contre la fociété ? & où était l'homme à
qui l'inilindt de fa raifon ne fît pas fentir des remords ?
L'eau lavait les fouillures du corps & des vétemens ,
le feu purifi it les métaux ; il falait bien que l'eau &
le feu purifiaffent les âmes. Aufli n'y eut- il aucun
temple fans eaux & fans feux (alutaires.
Les hommes fe plongèrent dans le Gange , dans
rindus , dans l'Euphrate , au renouvellement de la
lune , & dans les éciipfes. Cette immeriion expiait
les péchés. Si on ne fe purifiait pas dans le Nil , c'eft
que les. crocodiles auraient dévoré les pénitens. Mais
ies prêtres qui fe purifiaient pour le peuple fe plon-
geaient dans de larges cuves , & y baignaient les cri-
minek qui venaient demander pardon aux Dieux.
Les Grecs dans tous leurs temples eutent des bains
facrés , comme des feux facrés , fymboles univerfels
chez tous les hommes de la pureté des âmes. Enfin
les fuperftitîons p^raiflcnt établies chez toutes les na^
tiens , excepté chez les lettrés de la Chine.
J) Ë S Sauvages.
Entcnde7-Vous far fauvages djes ruftres vîvans dans
des cabanes avec leurs femelle? & quelques animaux ,
expofés fans ceïfe à toute l'intempérie des faifonè ,
rtt connaiffant que 1i terre qui les nourrit , le mar-
ché où ils vont quelquefois vendre* leurs denrées ,
pour y acheter .quelques habillemens groflîers , par-
lant un jargon^ ^u*on n'entend pàs^dans les villes ^
ayant f)eu d*idécs , & par conféqué'nt peu d'expref-
B iij
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• •' -•••■"-• - -'
tiônÈ ; fournis^ (ané qu'ils fâchent pourquoi , à tlti hom*
hie die plume , auquel ils portent toUs les ans la moitié
tié ce qu'ils Ont gagné à la fuSur de leur front ; fe
taffemblant certains jours dans une cfpêce de grange
pour célébrer des cérémonies où ils ne comprennent
rien 4 écoutant un homme vêtu autrement qu'eux , &
^u^ils n'eniKindent point \ quittant quelquefois leur
Chaumière Iorfqu*on bat le tambour , & s*engageant à
t'aller feirc tuer dans une terre étrangère , Ô à tuer
leurs femblables [iour le quart de ce qu'ils peuvent
j|agner chez eux tn travaillant ? H y a de ces fau*
Vagés-là dans toute l'Europe. Il faut convenir , fur*
iout s que les peuples du Canada , & les Cafres , qu^il
nous a plu d'appeller fauvages, font infiniment fupé*
Heurs iu,x nôtres. Lt Huron , l'Algonquin ^ l'IIlinois ,
lé Cafre ^ le Hottentot , ont l'art de fabriq"uer eux*
tnémet tout ce donc ils ont befoin ; & cet art man-
<jue a nos ruftrés. Les peuplades d'Amérique Se d'A-
JFrique font libres , & nos fauvages n'ont pas même
d'idée de la liberté.
Les prétendus fauT^agéS d'Amérique font des foii-
^^erains qui reçoivent des ambaCTadeUrs de nos colo-
hies , que l'avarice & la légèreté ont tranfpla^ntés au*
J)rès de leur territoirCi Ils connaHTent l'honneur,
dont jamais nos fauvi^ges d^Éutope n*ont entendu
Jjarlert Ils ont une patrie, il* l*aiment , ils la défen*
dent ; jls font des traités ; ils fe battent avec cou-
fage, & parlent foUvenf avec une énergie héroïque,
Y a-tiil une plus belle réponfe dans les grands-hom-
mes de Plittarqtle , que celle de ce chef des Cana-
diens , à qui Une nation puropéane propofait de lui
èédèr Ton patrimoine? IfoUsfommes net fur cette terre ^
hùs pères y fo^tt enfevelis ; dirom-nom aux ojfemem de
hoT pères , levez - vo$ts , ^ vtnez avec hohs dans une
itrtè étrangère ? ,
Ces GanidJeni étaient ileé Sj:>artîateî en compa*
fairort de nos ruftres qui fégeteat dans nos fiU ^
ifia^h Un ijMfcmpiiii 1*111 fcppift&'Wf
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DesSavvagis. 23 r
lages , & des Sibarices qui s'énervent dans nos
viJJcs,
Entendez- vous par fauvages des animaux à deux
pieds 9 marchant fur les mains dans le befoin , ifolés ,
errans dans les forêts , Sahatici , Selvagi , s'accou-
plant à Tavanture , oubliant les femmes auxquelles
ils fe font joints , ne connaiflant ni leurs fils ni leurs
pères ; vîvans en brutes , fans avoir ni TinAinâ ni les
refTources des brutes ? On a écrit que cet état eft le
véritable état de l'homme , & que nous n'avons fait
que dégénérer miférablement depuis que nous l'avons
quitté. Je ne crois pas que cette vie folitaire attribuée
à nos pères foit dans la nature humaine.
Nous fommes , G je |ie me trompe » au premier
rang ( s*it eil permis de le dire ) des animaux qui
vivent en troupe , comme les abeilles , les fourmis ,
les caftors , les oies , les poules , les moutons , âl:c.
Si l'on renconcrp une abeille errante ^ devra-t-*on con-
clure que cette abeille eft dans l'état de pure nature ,
& que celtes qui travaillent en fodété dans la ruche
ont dégénéré ?
Tout animal n'a-t-il pas fon inftîndl irréfiftible au-
quel il obéit néceOTairement? Qu'eft-ce que cet înf-
tinéfe ? l'arrangement des organes dont le jeu fe dé-
ploie par le tems. Cet inftincft.ne peut fe dévelop-
per d'abord , parce que les organes n'ont pas acquis
leur plénitude.
Leur pouvoir eft cooftant » leur principe eft divin »
Il faut que Te nfant croifTe avant qa*il les exeioe 1
Il ne les connaît pas fous la main qui le berce.
Le moineau dans Tinllant qu'il a requ le jour.
Sans plumes dans Ton nid peut-il fentir Tamour ?
Le renard en oaiOant va-t-il chercher fa proie ?
Les infedes changeans qui nous filent la foie »
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HiLJUtjL
Des Savyages.
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Les cflT^ins bourdonnans de ces filles du ciel ,
Q,uî pétrifient la cire , & compofent le miel ,
Si-tôt qu'ils font éclos fotment-ils leur ouvrage ?
Tout s'accroil par le tems , tout meurit avec Tâge.
Chaque être a Ton objet , & dans TinHant marqué
Marche & touche à fou but par le ciel indiqflé*
Ne Voyons-nous paiî en êflfet que tous les animatijc^
aînfi que tous les autres êtres , exécutent invariable-
ment la loi que la nature donne à leur efpcce? L'oifeau
fait fon nid , comme \ts aftres fourniflent leur .cour»
fe , par un prindpe qui ne change jdm .is. /Comment
Thomme feu! aurait^il changé ? S*il eût été deftîné à
Vivre folît lîre comme les autres animaux carnaflîers ,
■aUrait-y pu coVitredire la loi de la nature jufqu*à vî-
\re en fjciétc? & s'il était fait pour vivre en troupe
,comme les animaux de bafTe^cour & tant d'autres ^
eût-irpu d^abord ^rverttr fa deftinte jufqu*à vivre
4)ierK)ai>t des fiéçles eo. folitaire 1 1l eft perfedUbîe ; &
4e la on a conclu qu'il s'eft perverti. Mais pourquoi
ijîen.pas conclure qi^'il s'eft pcrfîedtionné jufqu'au
point où la nature a marqué les limites de fa per-
fedîon t
. *fou8 les lîom0i^3 vivent en focîété : peut «on en
inferôr qu'ils n'y .ont pas vécu autrefois ? n'eft-ce pas
jComrae (i on concluiJ^ que fi les taureaux ont aujour-
d'hui , des cornes > c'eft parce qu'ils n'en ont pas tou-
jours eu î
L'hohîûié jcn génçral a toujours été ce qu'il eft t
tela ne veut pas dire qu'il ait toujours eu de belles
villes , du canofl <le vingt-quatre livres de balle , àcs
Opéra comiques à dés couvens de religîeufes ; mais
îl a toiijotjrs eu le même înftîn^ qui le porte à s'aimer
dans foi-méme , dans Ir compagne de fon phifir , dajis
fés enfafïs^ dans fes pètits-4ils , dans les œuvres de
fetnains.
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Des Sauvages.
2î f
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Voilà ce qui jamais ne change d*un bout de Tunivers
à Tautre, Le fondement de la fociété exiftant tou-
jours , il y a dont: toujours eu quelque fociété ; nous
n'étions donc point faits pour vivre à la manière
des ours.
On a trouvé quelquefois des enfans égarés dans
les bois , & vivans comme des brutes ; mais on y a
trouvé auin des moutons & des oies ; cela n'empêche
pas que les oies & les moutons ne foient deftinés à
vivre en troupeaux.
Il y a des faquîrs dans les Indes qui vivent feuls ^
chargés de chaînes. Oui ; & ils ne vivent ainfi qu'afin
que les paflans qui les admirent , viennent leur don-
ner des aumônes. Ils font par un fanatifme rempli
de vanité , ce que font nos mendians des grands che-
mins , qui s'eftropient pour attirer la compaffion. Ces
excrémens de la fociété humaine font feulement des
preuves de Tabus qu'on peut faire de cette fociété.'
Il efl: très vraifemblable que l'homme a été agrefte
pendant des milliers de fiécles , comme font eocor au-
jourd'hui une infinité de payfans/ Mais Thomme n'a
pu vivre comme les bléreaux & les lièvres.
Par quelle loi , par quels liens fecrets , par quel inf-
tind l'homme aura-t-il toujours vécu en famille fans
le fecours des arts ,.& fans avoir encor formé un lan-
gage ? C'eft par fa propre nature , par le goût qui le
porte à s'unir avec une femme ; c'eft par l'attache-
ment qu'un Morlaque , un Iflandois , un Lappon , un
Hottentot fent pour fa compagne , lorfque fon ven-
tre groffiflant , lui donne l'efpérance de voir naître de
fon fang un être femblable à lui ; c'eft par le befoin
que cet homme & cette femme ont l'un de l'autre,
par l'amour que la nature leur infpire pour leur pe-
tit dès qu'il eft né , par l'autorité que la nature leur
donne fur ce petit , par l'habitude de l'aimer , par l'ha*
n
«pr^lBfl
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Dbs Sauvages.
*^^
?
bitttde que le petit prend néceflaiVement d'obéir an
père & à la mère , par les fecoui-s qu'ils en reçoi-
vent dès qu'il a cinq ou fix ans , ]Dar les nouveaux en-
fans que font cet homme & cette femme ; c'efl enfin
parce que dans un âge avancé ils voyent ayec plaifir
leurs fils & leurs filles faire enfemble d'autres enfans
qui ont le même inftincîl que leurs pères & leurs mères.
Tout cela eft un afîemblage d'hommes bien grof-
fiers , je l'avoue ; mais croit-on que les charbonniers
des forets d'Allemagne , les habitans du Nord , & cent
^peuples de l'Afrique , vivent aujourd'hui d'une ma-
nière bien différente ?
Quelle langue parleront ces familles fauvages &
barbares 1 elles feront fans doute très longtems fans
en parler aucune ; elles s'entendront très bien par des
cris & par des geftes. Toutes les nations ont été
ainfi des fauvages , à prendre ce mot dans ce fens ;
c'eft-à^dîre, qu'il y aura eu longtems des familles erran-
tes dans les forêts , difputant leur nourriture apx au-
tres animaux , s'armant cofitr'eux de pierre^ . & de
groffes branches d'arbres ; fe nourrîffant de légumes
fauvages , de fruits de toute efpèce , & enfin d'ani-
maux mêmes.
Il y a dans l'homme un înftînd de méchanique que
nous voyons produire tous les jours de très grands
effets dans des hommes fort grofliers. On voit des
machines inventées par des habitans dts montagnes
du Tirol & des Vofges , qui étonnent les favans. Le
payfan le plus ignorant fait partout remuer les plus
gros fardeaux par le fecours du levier , fans fe dou-
ter que la puiffance feifant équilibre , eft au poids ,
comme la diftance du point d'appui à ce poids eft
à la difhnce de ce même point d'appui à la puifTance.
S'il avait falu que dette connaiflance précédât l'ufigfe
des leviers , que de fiécles fe feraient écoulés avant
qu'on eût pu déranger une groffe pierre de fa place !
^â^
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iieptMte
Érih
Des Sautagisi
— *Mfîfg
a?
Propofez à des enfàns de fauter un foflTé ; tons pren*
dront machinalement leur fecoufle , en fe retirant un
peu en arrière > & en courant enfuite. Ils ne fa vent
pas affurém^nt que leur force tn ce cas ^ le produit
de leur maffie multipliée par leur vitefle.
Il eft donc prouvé que la nature feule nous infpire
des idées utiles qui précèdent toutes nos réflexions.
Il en eft de même dans la morale. Vfous avons tous
deux fentimens qui font le fondement de la fociété ,
la commifération Se la juftice. Qu'un enfant voye dé-
chirer Ion femblable , il éprouvera des angoiffes fubi-
tes , il tes témoignera par fes cris & par fes larmes , il
fecourera s'il peut celui qui foufFre.
Demande2 à un enfant fans éducation , qui com-
mencera à raifonner & à parler , (i le grain qu'un hom-
me a femé dans fon champ lui appartient , & fi le
voleur qui en a tué le propriétaire , a un droit légitime
fur ce grain ; vous verrez fi l'enfant ne répondra pat
comme tous les légiilateurs de la terre.
Dieu nous a donné un principe de raifon univerfel*
le , comme il a donné des plumes aux oifeaux , Se
la fourrure aux ours ; Se ce principe eft fi conftant qu'il
fubfifte malgré toutes les paffions qui le combattent,
malgré les tyrans qui veulent le noyer dans le fang ,
malgré les impofteurs qui veulent l'anéantir dans la
fuperftition. C'eil ce qui f^it que le peuple le plus
grofiier juge toujours très bien à la longue des loix
qui le gouvernent , parce qu'il fent fi ces loix font
conformes ou oppofees aux principes de commiféra-
tiotl & de juftice ^ui font dans fon cœur.
Mais avant d'en venir à former une fociété nom-
breufe ^ un peuple , une nation , il faut un langage ,
& c'eft le plus difficile. Sans le don de l'imitation on
n'y ferait jamais parvenu. On aura fans d^ute corn-
mencé par des cris qui auront exprimé les premiers
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mim^
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mçsi^
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D«$ Sauvage
ï^««^.^
befoins ; cnfuite les hommes les plus ingénieux.,
nés avec les organes les plus flexibles , auront formé
<jaelqucs arricuUtions que leurs -enfaris auront répé-
jtécs ; les mères furtouf auront dénoué leurs langues
les premières. Tout idiome commentant a Pîfa été
compofé de monofyllabes , comme plus aifé à forijier
iSc à reteflir.
Nous Voyons en effet que les nations les plus an^
ciennes , qui ont confervé quelque chofe de leur pre-
mier langage , expriment encor par des monofyllabes
les çhofes les plus familières, & qui tombent le plus
fous nos fens : prefqqe tout le chinois eft fondé encor
aujourd'hui fur des monofyllabes,
Confultez Tâncien tudefque , & tous les idiomes du
TJord ; vous verrez à peine une chofe néceffaîre &
commune , exprimée par p4us d'une articulation. Tout
"feft monofyllabe ; zon , le foleil :, motin ^ la lune / zé ,
I \'à mer ; flus , fleuve ; mon , l'homme ; kof ^ la tête ;
Iboumif un arbre ; drink , boire ; march , marcher; sblaf^
dormir , &c.
C'eft avec cette brièveté qu'on s'exprimait dans
les forêts des Guules & de la Germanie, & dans tout
le Septentrion. Les Grecs & les Romains n'eurent des
^ots plus compofés que longtems après s'être réunis
Jcn corps de peuple.
! Mais par quelle fagacîté avons -nous pu marquer
les différences des tems ? Comment aurons-nous pu
exprimer lei nuances , ;> voudrais , fcairods voulu ,
les chofes pofitives , les chofes conditionnelles? Ce ne
peut être que chez les nations déjà les plus policées , -
jqu'on- foit parvenu avec le tems à rertdre fcnfibles
^r des mots compofés> ces opérations fecrettes dé
il'efprit humain. Auffi voit-on que chez les Barbares
.il n'y -a que deux ou trois tems. L^ Hébreux n'ex-
^rÏR^aient que le préfcnt & le futur. La langue fi-an-
=i»r^l^
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Des s a u t â g e s.
29
que fi commune dans les échelles du Levant , eft ré-
duite encor à cette indigence. . Et enfin , malgré tous
les efforts des hommes , U n'eil aucun langage qui ap-
proche de la perfedion.
De L'AMéRidUE.
Se peut-il qu'on demande encore d'où font venus
les hommes qui ont,peuplé l'Amérique ? On doit apu-
rement faire la même queftion fur tes nations des
terres Auftrales. Elles font beaucoup plus éloignées
du .port dont partit Chrijlopbe Colomb que ne le font
les ifles Antilles. On a trouvé des hommes & des
animaux partout où la terre eft habitable ; qui les
y a mis ? On l'a déjà dit , c'eft celui qui fait croître
l'herbe des champs ; & on ne devait pas être plus
furpris de trouver en Amérique des hommes que
des mouches.
If efl affez plaifant que le jéfuite Lafiieau prétende
dans fa préface de VMJhJre des Sauvages Américains %
qu'il n'y a que des athées qui puiffent dire que Dieu
a créé les Américains.
On grave encor aujourd'hui des cartes de l'anoien
monde , où l'Amérique paraît fous lé nom d'ifle At-
lantique. Les ifles du Cap-Ver d y font fous le nom
des Gorgades ; les Caraïbes fous celui des Hefpérî-
des. Tout cela n'eft pourtant fondé que fur l'an-
cienne découverte des iflies CanarieS , & probable-
ment de celle de Madère , où les Phéniciens & les
Carthaginois^ voyagèrent ; elles touchent prefque à
l'Afrique, & peut-être en étaient -elles moins éloi-
gnées dans les anciens tems qu'aujourd'hui*
LaifTons le père Lafiteau faire venir les Caraïbes
des peuples de Carie , à caufe de la conformité du
nom, & furtout , parce que les femmes caraïbes fai-
faîent la cuifme de leurs maris , ainfi que les fem-
frSi=
r^Wgfrw-
h'-
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ao b E l' A M é R t Q. y I. ii
mes cartcnnes ;lai{rons-le fuppofer que les caraïbes
ne naiflent rouges , & les négreffes noires , qu'à caufe
de rhabicude de leurs premiers pères de fe peindre
en noir ou en rouge.
Il arriva , dit*il,que les négrefTes voyant leurs
maris teints en noir , en eurent Timagination fi frap-
pée 9 que leur race s'en refientit pour jamais. La mê-
me chofe arriva aux femmes caraïbes , qui par la mê-
me force d'imagination accouchèrent d'enfans rou-
ges. Il rapporte l'exemple des brebis de Jacob , qui
naquirent bigarrées , par l'adrefle qu'avait eue ce pa«
tfiarche de mettre devant leurs yeux des branches
dont la moitié était écorcée ; ces branches paraiifant
à-peu-près de deux couleurs, donnèrent aulTi deux
couleurs aux agneaux du patriarche. Mais le jéfuite
devait favoir que tout ce* qui arrivait du tems de
L Jacob , n'arrive plus aujourd'hui. i
^ Si on avait demandé au gendre de ia^aw^pour- *
quoi fes brebis voyant toujours de Therbe ne faî-
faient nas des agneaux vérds , il aurait été bien em-
barrafle.
Enfin Lafiteau fait venir les Américains des an-
ciens Grecs , & voici fes raifons. Les Grecs avaient
des fables , quelques Américains en ont auifi. Les
premiers Grecs all^îlent à la chaffe , les Américains
y vont Les premiers Grecs avaient des oracles , les
Américains ont* des forciers. On danfaic dans les
fêtes de la Grèce , on danfe en Amérique* Il faut
avouer que ces raifons font convaincant^.
#
On peut faire fur les nations du nouveau monde
une réflexion que le père Lafiteau n'a point fuite ,
c'eft que les peuples éloignés des tropiques , ont tou-
jours été invincibles , & que les peuples plus rap-
prochés des tropiques , ont prefque tous été fournis
i à des monarques. Il en fut longtems de même dans
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iËbi
De L'AnéRiauE.
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31
notre continent. Mais on ne voit point que les
peuples du Canada folent allés jamais fubjuguer le
Mexique , comme les Tartares fe font répandus dans
l'Afie êc dans l'Europe. Il parait que les Canadiens
ne furent jamais en affez grand nombre pour envoyer
ailleurs des colonies.
En général , l'Amérique n'a jamais pu être auffi
peuplée que l'Europe & l'Afie ; elle eft couverte de
marécages immenfes qui rendent Tair très mal fain ;
la terre y produit un nombre prodigieux de poî-
fons: les flèches trempées dans les fucs de ces her-
bes yenimeufcs , font des plaies toujours mortelles.
La nature enfin avait donné aux Américains beau-
coup moins d'induftrie qu'aux hommes de l'ancien
monde. Toutes ces caufes enfemble ont pu nuire
beaucoup à la population.
Parmi toutes les obfervations phyfiques qu'on peut
faire fur cette quatrième partie de notre univers fi
longtems inconnue , la plus fingulîère peut-être , c*eft
qu'on n'y trouve qu'un feul peuple qui ait de la
barbe ; ce font les Efquimaux ; ils habitent au nord
vers le cinquante -deuxième degré , où le froid eft
plus vif qu'au foixante & fixiéme de notre continent.
Leurs voifins font imberbes. Voilà donc deux races
d'hommes abfolument différentes , à côté l'une de
l'autre , fuppofé qu'en eifet l'es Efquimaux foîent bar-
bus. Mais de nouveaux voyageurs difent quç les
Efquimaux font imberbes , que nous avons pris leurs
cheveux crafleux pour de la barbe. A qui croire ?
Vers l'îfthme de Panama eft la race des Darîcns
prefque femblables aux Albinos , qui fuît h lumière
&'qui végète dans des cavernes ; race faible , & par
conféquent en très petit nombre.
Les lions en Amérique font chétifi & poltrons ;
les moutons y font grands & fi vigoureux qu'ils fer- Jb
mçtm^
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m^
Uiém
32
De l*Améri(i.ue. fif
vent à porter les fardeaux. Tous les fleuves y font
dix fois au moins plus larges que les nôtres. Enfin
les productions naturelles de la terre ne font pas
celles de notre hémifphète. Ai^fi tout eft varié; &
la même providence qui a produit Télephunt , le rhi-
nocéros & les nègres , a fjît naître dans un autre
inonde des orignans , des contours , des pures qui
ont le nombril fur le dos , & des hommes d'un ca-
radère qui n'eft pas le nôtre.
De la théocratie.
Il femblc que la plupart des anciennes nations ayent
été gouvernées par une efpèce de théocratie. Com-
mencez par rinde , vous y voyez les Jbrames long-
tems fouverains; en Perfe les mages ont la plus gran-
de autorité. L*hiftoire des oreilles de Smndis peut
bien être une fable ; mais il en réfulte toujours que
c'était un mage qui était fur le trône de Cyrti^, Plu-
fieurs prêtres d'Egypte prefcrivaient aux rois jufqu'à
la mefure de leur boire & de leur manger , élevaient
leur enfance , & les jugeaient après leur mort, & fou»
vent fe faifaient rois eux-mêmes.
Si nous defcendons aux Grecs , leur hiftoire , toute
fabuleufe qu^elle eft, ne nous* apprend -elle pas que
le prophète CalcaT avait aflez de pouvoir dans l'armée
pour facrifier la fille du roi des rois ?
Defcendez encor plus bas chez des nations fauva-
ges poftérieures aux Grecs ; les druides gouvernaient
la nation gauloife.
Il ne paraît pas même poffible que dans les pre»
mîères (a) peuplades un peu fortes on ait eu d'autre
gouverne-
(fl) On entend par pre-
mières peuplades des hom-
mes raflemblés au nombre
de quelques milliers après
plu fleurs révolutions de ce
globe.
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De la THioGRATIE.
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gOM^rernement que 1^ théocratie; car dés qu'une nation
a choifi qn Dieu tutéiaire , ce Dieu a des prêtres. Ces
prêtres dominent fur refprit de la nation ; ils ne peu-
vent dominer qu'au nom de Ipur Dieu ; ils le font
donc toujours parler \ ils débitent fes oracles , Sç c'efl:
par un or4re exprès dç Dieu que tout s'exécu^ç,
Ceft de cette fourcc que font venus les facrîficçç
de fang humain qui ont fouillé prefque toute la terré.
Quel père , quelle mère aurait jamais pu abjurer la
nature au point de préfentér fon 'fils bu fa fille à un
prêtre pour être égorgés fur un autel , fi on n'avait
pas été certains que le Dieu du pays ordonnait ce
façrifice? ' ' " ' ' " ' '^
Nqn.feulement la théocratie a longtems régné , mais
elle a pouffé la tyrannie au plus horrible excès où )a
démence humaine puiflfe parvenir ; & plus ce gouv^i:^
nemènt fe difdit divin , plus il était abominabij:.
• Prefque tpps les peuplçs pnt facrifié des enfans |
Ipurs Dieux ; donc ils croyaient recevoir cpt ordrç
dénaturé de la bouche des Dieux qVil^ ado|:aient
Parmi les peuples qp'on appelle fi împropremjsnt cîyî*
liféç , je ne vois guères que les Chinois qqi n'ayent
pas pratiqué ces horreurs abfurde^. l^a Chine p& 1q
feul des anciens états connus qui n'ait pas été fou^
miç au facerdope ; car les Japonois étaient fous les
loix d'un prêtre fix cent ans avant notre ère. Pref-
que partout ailleurs la théocratie eft fi établie , fi epra*
dnée, que Içs premières hiftoires font celles des Dieu^
mêmes qgi fe font incarnés popr venir gouverner les
hommes. Les Pieux ,* diraient les peuples de Thèbes
& de Memphîs , pnt régné dqpze ipille ans en Egypte.
Cranta s'incarna pour régner dans l'Inde ; Sammonoj
eodom à Siam ; le Dieu Âdad gouverna )a Syr\e ; la
dëeffe Cibêlç avait été fouyeraine de Phrygie , JupU
ter de Crète , Saptemè de Grèce & d'Italie. Le mémç
éfprit pré|ide ^ tQutes ces fables ; c'efl: partout une
^ffaifur tesmœurs,^ç.Tom.\. ' "' ^' Ç" ' ^
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\\ 34 DELATHéoCRATIB.
'
1
confufe idée chez les hommes que les Dieux ftnt
autrefois defcendus fur ia (erre.
Des CALDéENs.
Les Caldéens , les Indiens , les Chinois , me paraif.
fent les nations les plus anciennement policées. Nous
^vons une époque certaine de la fcience des Caldéens ;
çlle fe trouve dans les dix-* neuf cent trois ans d'ol>-
fervations céleftes , envoyées de Babilone par Callip*
tbhte au précepteur, à^ Alexandre, Ces tables aftrono-
mic^ues remontent précifément à Tannée zz%^ avant
c^otr^ ère vulgaire. Il eft vrai que cette époque tou-
che au tems où ta vulgate place le déluge. Mais n'en^
trons point ici dans les profondeurs des différentes
chronologies de la vulgate , des Samaritains & des
Septante , que nous révérons également. Le déluge -
univerfel eft un grand miracle , qui n'a rien de com-
mun avec nos recherches. Nous ne raifonnons ici que
d'après les notions naturelles , en foumettant toujours
les faibles tàtonnemens de notre elprit borné aux lu«
mières d'un ordre fupérieur.
D'anciens auteurs cités dans George le Stncelle ^
difent que du tems d'un rot caldéen nommé Xixou»
trou , il y eut une terrible inondation. Le Tigre &
l'Euphrate fe débordèrent apparemment plus qu'à
l'ordinaire. Mais les Caldéens n'auraient pu favoir
que par la révélation qu'un pareil fiéau eût fubmergé
C 0 ) Notre fainte rcHgion
fi fupërieure en tout i nos
himieres , nous apprend que
k monde n*eft lait que de-
puis environ fix mHIe années
lelon la vulgate , ou environ
fept mille fuivant les Sep-
tante. Les ii>terpréte8^de cet-
te reliiîion ineflfàble nous en-
U\%ntntf\vî'Mam eut la fcien-
ce iijFiife , & que tous les arts
fe perpétuèrent à'AàamïNoé,
Si c'eft là en effet le fenti-
ment de réj^life , nous Tadop-
tons d'une foi ferme & conf-
tante , foumettant d'ailleurs
toiit ce que nous écrivons au
Jugement de cette fainte églî-
fe qui eft infeilliblc. C*eft vai^
nement que l'empereur Ju».
lien , d'ailleurs fi refpeftable
par fa vertu , fa valeur & fa
fcience, dit dans fon difcours
cenfuré par le grand & mode-
1^
-ipp
mâiil
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tffl»^
DkS CkLDÛtHi.
3f
toute la terre habit ible. Enoor une fois J6 n'examino
ici que le cours ordinaire de la nature.
II eft cliir que (i les Caldéent n'avaient exifté (b?
la terre que depuis dix-neuf cent années avtnc notr0
ère , ce court efpace ne leur eût pas fufii pour trouver
une partie du véritable fyftéme de notre univers ; no.
tion étonnante , à laquelle les Caldéens étaient enfin
parvenus. Arijiarque deSimos n«>us apprend que les
fages de Caldee avaient connu combien il eft impoflk
ble que la terre occupe le centre du monde plane,
taire, qu'ils avaient aflfigné au foleil cette place qui lui
appartient; qu'ils &ifaient rouler la terre & les autres
planètes autour de lui , chacune dans un orbe diCfércntt
Les progrès de refprit fqnt 6 lents , Tillufion des
yeux eft fi puilTante , l'aflerviiTement aux idées re<;ue8
fi tyrannique , qu'il n'eft pas poifible qu'un peuple
qui n'aurait eu que dix -neuf cent ans eût pu pir.
venir à ce haut degré de philofophie qui contredit les
yeux,& qui demande la théorie la plu» approfondie.
AufT] les Caldéens comptaient quatre cent foixante&diK
mille ans Encor cette connaifTance du vrai fyftéme du
monde ne fut en Caldée que le partage du petit nombre
des phiiufophes. C'eft le fort de toutes les grandes vé»
rites ; & les Grecs qui vinrent enfulte , n'adoptèrent quO
le fyftéme commun , qui eft le fyftéme dçs enfans.
(a) Quatre cefnt foixante & dht âiille ans , c^eft
féik. OfriUe , que foit qu'-<l-
imn eût la fcience infufe , ou
non , Dieu ne pouvait lui or-
donner de ne point.toiicher à
l*arbre de la fcience «lu bien
& du mal , que Dietï devnt
au contraire lui commander
de mander beaucoup de fruits
de cet arbre , afin de (è per«
feâionner dans la fcience in«
fufe s*il Pavait , & de Tac-
4uérir s*il ne Favait pas. Qn
fait avec auelle fagefie St. tym.
ritie a réfuté cet argument.
En un mot nous prévenons
toujours le lefteur que nous
ne toucbons en aucune ma*i
niére.aux choies facrées. Nous
proteftons contre toutes ks
fnufles interprétations , con«
tre toutes les induéHons ma-
lignes que Pon voudrait tirçf
de nos paroles.
c Ij
ŒBWipl^jljj^'J
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■^
t
i6 D B I. C.A iL /D é & N S.
beaucoup pour nous autres qui fommes d'hier ; mais
c'eft bien peu de çhofe pour l'ynivers entiçr. Je fais
bien que nous ne pouvons adopter ce calcul , que
Ciciron s'en eft moqué , qu'il eft exorbitant, & que
furtout nous devons croire au Pentateuque plutôt qu'à
S^cbonàaton & à Bér^ft s ^^^ encor une fois , il eft
impoffibie ( humainement parlant ) que les hommes
foient parvenus en dix ^ neuf cent ans à deviner çle
fi étonnantes vérités. Le premier art eid celui de pour-
voir à fa fubfiftance , ce qui était autrefois beaucoup
plus difficile aux hommes qu'aux brutes. Le fécond ,
de former un langage ; ce qui certainement demande
un efpace de %em8 très confidérable. Le troifiéme ,
de fe bàdr quelques huttes ; le quatrième de fe Tétir.
Enfuite pour forger le fer , ou pour y fuppléer, il
faut tant de hazards heureux , tant d'induftrie , tant
de fiédes , qu'on n'imagine pas menue comment les
hommes en font venus 9 bout. Quel faut de cet état
à l'aftronomie |
Longtems les Caldéens gravèrent leurs obfervations
& leurs loix fur la brique , en hiéroglyphes, qui étaient
des çar^f^ères parlans , ufage que les Egyptiens con-
nurent après plufieurs ficelés. L'art de tranfmcttre fes
penfées par de$ caradléres alphabétiques , ne dut être
inventé que très tard dans cette partie de TAfie.
Il eft à croire qu'au tems op les Caldéens bâtirent
des villes , ils commencèrent à fe fervir de l'alpha-
bet, Comment feifait-on auparavant ? dira-t-on ; com-
me on fait dans mon village» , & dans cent mille villa-
ges du mondç , où perfonne ne fait ni lire , ni écrire ,
^ cependant où l'on s'entend fort bien , où les 9rts
nccefl'aires font cultivés , & mémç qiielquefois ^veç
génie,
Babilone était probablement une tris ancienne
bourgade avant qu'on en eût fiait une ville îmmenfe
& fuperbe. Mais qui a bâti cette ville ? je n'en fais rien.
1
il &fupeibe. Mais qui a bâti cette ville? je n'en fais tien. ^
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ii(g1>J^' ' MlT^M-''*^
Des Caldéen
Eft-ce Sémiramis? cft-ce Èélus ? cft-ce Nabofiaffar? Il
n'y a peut-être jamais eu dans l'Afie ni de femme appel*
lée Sémiramis^ ni d'homme appelle Béius. {b) C'eft com-
me fi nous donnions à des villes grec()ues les noms
A' Armagnac & à*Abbevilîe. Les Grecs qui changèrent
toutes les terminaifons barbares en mots grecs , déna-
turèrent tous les noms afiadques. De plus , Thiftoire
de Sémiramis refTemble en tout aux contes orientaux.
2fabonaffar , ou plutôt 'Nabon^oÉor , eft probable*-
ment celui qui embellit & fortifia Babilone , & en fit
à la fin une ville fi fuperbe. Celui-là eft un véritable
monarque , connu dans l'Afie par l'ère qui porte fon
nom. Cette ère inconteftable ne commence que 747
ans avant la nôtre : ainfi elle eft très moderne par
rapport au nombre desfiécles néceffaire pour arriver
jufqu^à rétabliflement des grandes dominations. I^
parait par lé nom même de Babilone , qu'elle exilait
longtcms avant Nabonaffar. C'eft la ville du ^ère
BeL Bob fîgnifie pire en caldéen , comme l'avoue
d'Herbeiot. Bei c< nom du Seigneur. Les Orientaux
ne la connurent jamais que fous le nom de Babet\ la
ville du Seigneur ^ la viUt de &eu , ou félon d'autres »
la porte de Dieu.
Il nV à pas eu proi)ab1eiàent plus de yHnus fonda-
teur de Ninvah , nommée par nous Ninivè, que de
Bilus fondateur de Babilone. Nul prince afiatique ne
^i>orta un nom en iis.
Il fe peut que la circonférence de Babilone ait été
de vingt-quatre de nos lieues moyennes) maïs qu^un
liJinus ait bâti fur le Tigre , à quarante lieues feule-
ment de Babilone , une ville appellée Ninive ^ d'une
étendue aufli grande 9 c^eft ce qui ne parait pas croya-
ble. On nous parle de trois puii&ns empires qui fuk^
(A) le/ eft le nom de Dieu.
g G iij
a^iiiljiii H\m»hi liifjfcal
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1
^g De» Caldébks.
T '"ir'iiiTri riT- I - ■ '■ mmmÊi^mmiiÊiMtiàmm
fiftaient à la fois ^ celui de Babilonc , Celui d'Aflyrîô
ou de Ninîve ^ & celui de Syrie ou de Damas. La
çhofe eil peu vraifemblable ; c'eft comme fi pn dîfait
tjuil y avait à la fois d. ns une partie de la Gaule
trois puirtans empires , dont les capitales „Paris , Soif-
fons & Orléans , avaient chacune vingt-quatre lieues
de tour. B* lilleuts NiniVe n'était pas bâtie , ou du
moins étale fort peu de chofe au tems où il e(l dît
i^ue le prophète Jonas lui fut député pour Texhorter
& la péniteqce , & fut englouti en, ehemîn par un poif*
tbn qui 16 gàfd^ trois jours & trois nuits.
Le prétendu émpîre d*Affyrîe n'exift »ît pas même
encore dans le tems ou l*on place Jonas ,• car il pro-
phétîfu't, dît . on , fous le melk ou roitelet juif Joax s
& Phul qui eft regardé dans les livres hébreux com-
me le premier roi d^AfTyrie , ne régn:i félon eut qu'en-
tîro I dînqu<nte- deux ans après la mort de Joat.
C*eft .iînfi qu*en Confrontant toutes les dates on trouve
partout de la çontradkVon , & on demeure dans Pin»
certitude»
ïî eft dît dans lô lîiTre de f^as qu'il y avait à Ni*
ftîve eent vingt mille enfans nouveaux-nés ; cela fup-
poièrait plus de cinq nlillions d^habrtans : félon le
tilcul iflTe^ }ufte de ces dénomhremetts , fonJés fur
le nombre des e ifan» vi^ans , nés dms la même an-
née. Or cinq millions cf habitons dans une ville
qui n*tftpas encor bâtie, font quelque chofe d^affez
irarcw
J*atoue que je nt Comprends rien aux deux em*
pires de B4bflone Se d'AflFVrie. Plufîeurs favans qui
Ont voulu pjrcer quelques lumières dans ces ténè-
bres , ont affirmé que PAffyrie Se la CUdée n'étaient
t|Ve le même empire , gouverné quelquefois p:^r deux
S rinces , INjn réfidant à B ibîlone , Pautre à Ninive ;
: ce fentiment raifonnable peut être adopté , jufqu'à
tt qu'on tn trouve un plus i aiïbnnaUo encore»
i:
yg^ijIMin r ^r .
HPlftSlK
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r
Des CALDiBNs.
. Ce qui contribue à jetter une grande vraifemblance
furrandquité de cette nation , c'en cette fàmeuretour
élcrée pour obferver les aftres. Prerque tous les com-^
mentateurs ne pouvant contefter ce monument , fe
croyent obligés de fupporer que c'était un refie de
la tour de Babel , que les hommes voulurent élever
jufqu'au Ciel. On ne fait pas troo ce que les com-
mentateurs entendent par le ciel; eil-cela lune?
efU;e la planète de Venus ? il a loin d'ici4ii. Vod-
laient-ils feulement élever une tour un peu haute ?•
Il n'y a là ni aucun mal ; ni aucune difficulté i fup-
pofé qu'on ait beaucoup d'hommes , beaucoup d'in&
trumens & de vivres.
La tour de Babel , la difperfion des peuples , la con-
fufion des langues font des chofes comme on (ait , &èt
refpedables , auxquelles nous ne touchons point Nous
ne parlons ici. que de Tobièrvatoire , qui n'a rien de
common avec les hiftoires juives*
Si Nabonajfar éleva cet édifice, il ftbt au moins
avouer que les Caidéens eurimt un obfervatoireplus
de deux mille quatre cent ans ammt nous. Conce^
vez en(uite combien de fiécles exige la lenteur de
Pefprit humain , pour en venir ju^u'à drefli»- un tel
monument aux fcience^ ^
Ce fut en Caldée , & non en Egypte , qu'on inventa
le Zodiaque. Il y en a * ce me femble , trois preuves
aiTe^ fortes; la première, que les Càldéenis forent une
nation éclairée , avant que TEgypte , toèjours inondée
par le Nil , pût être habitable i la féconde , que tes
lignes du Zodiaque conviennent au climat de h Méfo-
potamie , & non i celui d'Egypte. Les EgypH^ns ne
{K)uvaient avoir le figne du taureau au mo^s d'Avril »
puifque ce n'eft pas en cette faifon qu'ils Idbeerent y
ils ne pouvaient au mois oue nous nommons ^où$ ,
figurer un iigne par éne fille chargée d'épis de bléd ,
poifquci ce a'eft pas en ce teins qu'ils &>nt te moiffonv
C Hij
I
mm
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49 , De s C AlLDÉ B NS.
Ib ne pouvaient figurer Janvier par une cntebe d'eau ,
pui(qu*il pleut très rarement en Egypte , & ^mais au
mois de Janvier. La troifiémerairon , c'eftqaeles fignea
anciens du Zodiaque caldéen étaient un der ardcles
de leur religion. Ils étaient fous le gouvernement de
douze Dieux fecondaires , douze Dieux médiateurs :
chacun d'eux préfidait à une de ces ccfhftellations ,
ainfi que nous apprend Diodore de Sicile au livre II.
Cette religion des anciens Caldéens était le Sabifine ,
(fe&â-dire, Tadoration d'un Dibu fupréme, &lavéné.
satiôn des adbes & des intelligences céleftes qui préfi*
dident aux aftres. Quand ils. priaient , ils fe tournaient
vers rétoile du nord : tant leur culte était lié à Taftro-
nomie.
1'
. Vitruoe dans fon neuvième livre , où il traite des
qadrans Iblaires , des hauteurs du foleil , de la longueur
dés ombres, de Vi lunûèfe réfléchie par la hme , cite
toujours les anciens Caldéens , & non. les Egyptiens.
C'eft , ce me femble , une preuve aflez forte qu'on re*
gndait la Caldéé , . & âoh pas TEgypte , comme le ber-
GMiidecette fcience; de forte que tien a^eft plus vrai
qoe cet ancien proverbe latin. -
Des Babilokiens devenus Persans.
A rarient de Babilone écaîent les Perfes. Ceux-ci
portèrent les armes & leur religion à Babilone » lors
que lùresb , que nous appelions Oyrui , prit cette
ville avec te fecours des Mèdes établis ati nord de la
Pcrfe. Nous avons deux fables principales fur Cyrus^
ceW^ à' HirQdots ^ & celle de À^WopAoji , qui fe con-
tredirent en tout , & que mUie écilvains ont copiées
infliffîéremtneàt.
, Hit.o4fètf fupp^l^ttii roi Mède> ^e^-à-dirc, un
roîr diHtrcaqie^: «s'il. «rcU^. 4^ûef d'un wni psc.
m^mv\ mm^
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I
;
DtS BAblLOKftNfi fiETEKUS PlRSANS.
41 %
Cet hireânien 4fi^^ commande de noyer fon petit-fils
€>yrm aa berceau , parce qu'il a vu en fonge (a fille
Maftdme mère de Cyrus^ fiprjicopieufetftent^ at^etiê
inonda toute tÂfie. Le refte de Pavanture eft a*peu-
fTrès dans ce goAt ; c^eft une faiftoire de Gargaafua
éêrke fériinirekncnc.
Xinofbon feit de la vie de Cyrui un roman moral ,
à - peu - près femblable i notre TiUmaquf. Il corn*
menée par fuppofer , pour fidre valoir l'éducation mftle
ft vigoureulè de fon héros , que les Mèdes étaient <les
voluptueux plongés dans lamoUefle. Tous ces peuples
vpifins de PHircàniie , que les Tartares alors nommés
Scy^és , avaient ravagée pendant trente années 9
é«uent-ils des SibaritesT
Tout ce qtfçn peut aflurer de Cyrus , c*eft qu'il fitt
ih) grand co|iqu.éraojt , par conféquent un fléau de la
terre. Le fonds de fon oiftoir^e eit très vrai ; les épU *
finies (ont fifdbuleux : il en eft aiijfi de toute hiftoirê.
Rome exiftadt du tems de Cyruî : elle avait un terri-i
toire de quatre à cinq lieues , & pillait tant qu'elle
pouvait fes voifins ; mais je ne voudras pas garantir
le combat des trois Horacet , & Tavanture de Lu*
frice ^ & les boucliers defcendus du ciel , & la pierre
coupée avec un rafoir. Il y avait quelques Juifs efcla-
ves dans la Bâbilonie & ailleurs ; mais humainement
parlant, onpourait douter que l'ange Rapb^ifl f&t de£>
cendu du ciel pour conduire à pied le jeune 7*061^
vers lIliroaaBe , afin de le fiure payer de quelque ar-
gent , ft de cfaaflEer le diable Afmodit avec la année
du foie d'un brochet
Je me garderai bien d'examiner id le ipman i^HL
rodote , ou le roman de Xénophon , concernant la vie
& la mort de Qyna ^ mais je remarquerai que les Sarf
fis ou Perfes pré^daient avoir eu parmi eux » il ^
^ avait &tmâ\ê ans 1 u»^ aacien «?i^A^ , jm p^cf>falte
&. 1
esSarf
>falte^ »
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^41 DBSBABtLOKIElïS.
qui leur avait appris it être juftes « & i révérer la foleil ,
comme les anciens Caldéens avaient révéré les étoiles
en les obfervant.
Je me garderai \ûen cl*4i£Brmer qtse ces Perfes ft
ces Caldéens fuflent fi juftes , & de favofr précifé*
ment en quel tems vint leur fécond J^erdufl qui reâifia
Inculte du foleU 5 & qui leur apprit à n'adorer que le
Dieu auteur du foleil 6c des étoiles. Il écrivit ou com«
menta , dit-on , le livre du Zend , que les Parfis dif-
perfés aujourd'hiM dans TAfie révèrent comme leur bi-
dIo : ce livre efl: très ancien j mais moins que ceux des
Chinois Se des Brames ; on le croit même poftérieur
à ceux de Sancboniaton & des cinq Kings des Chinois : il
eft écrit dans l'ancienne langue fiicréc des Caldéens ; &
Mr. ^yde qui nous a donné une tradndion du Sadder ,
nous aurait procuré celle du Zend , s'il avait pu fub*
venir aux frais de cette recherche. Je m'en rapporte au
• moins au Sadder , à cet extrait du Zend , qui eft le
catéchifme des Parfis. J'y vols que ces Parfis croyaient
depuis longtems un Dieu , un Diable, une réfurrec-
tion , un paradis , un enfer. Us font les premiers , fiins
contredit , qui ont établi ces idées ; c'eft le fyHéme le
plus antique , & qui ne (ut adopté par les autres na-
tions qu'après bien des fiëcles , puifque les pharifîens
chez les Jui(^ ne foudnrent hautement l'immortalité
de rame , & le dogme des peines & des récom-
penfes après la mort , que vers le tems du roi
Hérode.
Voilà peut-être ce qu'il y a de plus important dan»
l'ancienne biftoice du monde. Voilà une religièn utile ,
établie fur le dogme de l'immortalité de l'ame, &
fur la connaifTance de l'Etre créateur. Ne ceflbns de
remarquer par combien de degrés il falut que l'efprit
humain pafflt pour concevoir un tel fyftême^ Remar-
quons encore que le baptême , l'immerfion dans l'eau
pour purifier l'ame par le corps , eft un des précep-
tes du Zmd. ( porte 2çi. ) La foorcc 4e tous les rites
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omm
i
HBTEVUt PSRSA
N 8. 43 i
eft venue peut-être des Perfans & des Caldéens juf-
qu'aux extrémités de roccident.
Je n'examine point ici pourquoi & comment les
Babiloniens eurent des Dieux fecondaires en recon-
naifTant un DiEU fouverain. Ce fyftéme , ou plutôt
ce chaos ^ fut celui de toutes les nations , excepté des
tribunaux de la Chine. On trouve prefque partout
Pextréme folie jointe à un peu de fagefle dans les loix ,
dans les cultes , dans les ufages. Linftind plus que
la r^ffon conduit le genre*humain. On adore en tous
h'eux la Divinité , & on la deshonore. Les Perfes ré-
vérèrent des ftatucs dés qu'ils purent avoir des fculp-
. teurs ; tout en eft plein dans les ruines de Perfépo.
lis : mais aufli on voit dans ces figures les rymboles
de Timmorplité ; on voit des têtes qui s'envolent au
ciel avec des ailes , fymboles de Témigration d'une
vie pafTagère à la vie immortelle.
Paflbns aux ufages purement humains. Je m'étonne
qu'Hérodote ait dit devant toute la Grèce dans fon
premier livre , que toutes les Babiloniennes étaient
obligées par la loi de fe proftituer au moins une fois
dans leur vie aux éti^ogers , dans le temple de Milita
ou Venus. Je m'étonne encor plus que dans toutes
les hiftoires faites pour l'inftruâion de la jeunefle ^
on renouvelle aujourd'hui ce conte. Certes ce devait
être une belle fête & une belle dévotion , que de voir
accourir dans une églife des marchands de chameaux ,
de chevaux , de bœufs & d'ânes , & de les voir def.
cendre de leurs montures pour coucher devant l'au-
tel avec les principales dames de la ville. De bonne
foi , cette infamie peut-elle être dans le caractère d'un
peuple policé ? Eft-il poffible que les magiftrats d'une
des plus grandes vijles du monde ayent établi une
telle police? que les maris ayent confenti de profti-
tuer leurs femmes ? que tous, les pères ayent aban-
donné leurs filles aux palfreniers de l'Afie ? Ce qui
n'eft pas dan» la nature n'eft jamais vrai. J'aimerais
M^Or!^
>9prmSlll
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\ 44 Des Bàbilonibns ^
autant ttaht.Èion CaJJtus s qui afTure que les gravies
fénateurs de Rome propofèrent un décret par lequel
Ci^ar âgé de cinquante-fept ans aurait lé droit de jouir
de toutes les femmes qu'il voudrait.
Ceux qui en compilant aujourd'hui rhiidoire ancien-
ne , copient tant d'auteUrs fans en examiner aucun ,
n'auraient-iis pas dû s'appercevoir ou qu*Hérodote dé-
bitait des fables ridicules , ou plutôt que fan texte
était corrompu , & qu'il ne voulait parler que des cour-
tifannes établies dans toutes les grandes villes , &
qui même attendaient les pafTans fur les chemins^
J« we croirai pas davantage Sextùs Empiricus ^ qui
prétend que chc2 les Ptrfes la pédéraftie était ordon-
née. Quelle pitié ! Comment imaginer q^ les hom-
mes euffent fait une loi , qui , fi elle avait été exécu-
tée , aurait détruit la race des hommes ? La pedérat
tie , au contraire , était expreifément défendue dans
le Kvre du Zend , & c'eft ce qu'on voit dans l'abrégé
du Sadder , où il eft dit , (porte 9 ) quHlffy a poinf
de fins grand fécbé. ( a )
Strabon dit que les Perfés époufaient leurs mères ;
mais quels font fes garans ? des ouï-dire , des bruits
vagues. Cela put fournir une épigramme à Catulle :
Nom iHogus ex maire £sf nato nafcatur oporM,
Tout mage doit naître de rinceite d*une mère A d*un fils. *
Une telle loi n'eft f)as croyable ; une épigramme n'eft
pas ufiê preuve. Si on n'avait pas trouvé de mères
qui voululTeint coucher avec leurs fils , il n'y aurait
donc point eu de prêtres chez les ferles. La religion
( a ) Voyez les réponfes à
celui <|ui a prétendu que la
Îiroftitution était une loi de
'einpiré des Bxbiloniens , &
m que la pédérailie était établie
en Perfe dans le même pays.
On ne périt guères pouffer
plus loin rppprobre de la iit«
tératnre , nil plus caiomnier la
nature humaine.
l^f^^jw» ijliiaefcni II b^JUiS^
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DETENUS Persans. 4f
des mages , dont le grand objet était la population y
devait plutôt permettre aux pères de s'unir à leurs
filles , qu'aux mères de coucher avec leurs en&ns ^
puis qu'un vieillard peut engendrer , & qu'une vieille
n'a pas cet avantage.
Qj]e de fottifes n'avons-nous pas dites fur les Turcs 9
les Romains en difaijent davantage fur les Ferfes.
En un mot , en lifant toute Phiftoire , foyons tn
garde contre toute fable.
0 K LA S T R I fi.
Je vois par tous les«monumens qui nous reftent,
que la contrée qui s'étend depuis Alexandrette ou
Scanderon , jufqu'auprès de Bagdat , fut nommée tou-
jours Syrie , que l'alphabpt de ces peuples fut 0û*
jours fyriaque , que c eft là que furent les anciennes
villes de Zobah , de Balbek , de Damas , & depuis
celles d'Ancioche , de Séleucie , de Palmire. Balk était
il ancienne que les Perfes prétendent que leur Bram
ou Abrabam était venu de Balk chez eux. Où pou-
vait donc ^tre ce puiflant empire d'Aflyrie dont on
a tant parlé » fi ce n'ei^ dans le pays des. fables ?
Les Gaules tantôt s'étendirent jufqu'au Rhin , tan-
tôt furent plus reiTerrées ; mais qui jamais imagina
de placer un vafte empire entre le Rhin & les Gau-
les ? qu'on ait appelle les nations voifines de l'Eu-
phrate AiTyriennes , quand elles fe furent étendues
vers Damas ; & qu^on ait appelle AfiVriens les peur
pies de Syrie , quand ils s'approchèrent de l'Euphrate;.
c'eft là où fe peut réduire la difficulté. Toutes les
nations voifines fe font mêlées , toutes ont été en
guerre , & ont changé de limites. Mais lors qu'une
fois il s'dd élevé des villes capitales , ces villes étar
bliifent une différence marquée entre deux nations.,
Ainfi les Babiloniens ou vainqueurs ou vaincus , fur
»
':
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«I^S»*
Ha
rflh
îi
4(S
D B LA S T ft I E«
rent toujours difFérens det peuples de Syrie. Les
anciens oaraâères de la langue fyrkque ne fîirene
point ceux des anciens Cdldéeos.
Le culte , les fuperftidons , les toix , bonnes ou
mauvaifes , les ufages bizarres ne furent point les
mêmes. La Déefle de Syrie ff ancienne n'avait au-
cun rapport avec le culte des Caldéens. Les mages
caldéens , babilonîens , perfans , ne fe firent jamais
eunuques comme les prêtres de la Déefle de Syrie ;
chofe étrange , les Syriens révéraient la figure de ce
que nous appelions Priape , & les prêtres fe dépouil-
laient de leur virilité !
Ce renoncement à la génération ne prouve-t-îl pas
une grande antiquité , une population corfidérable ?
Il n'eft pas poffible qu'on eût voulu attenter ainfi
contre la nature dans un pays oà l'efpèce aurait
été rare.
Les prêtres de Cibiîe en Phrygie fe rendaient eu-
nuques comme ceux de Syrie. Encor une fois , peut-
on douter que ce ne fttc Teffet de l'ancienne cou-
tume de facrifier aux JDieux ce qu'on avait de plus
cher, & de ne fe point expofer devant des êtres
qu'on croyait purs , aux accidens de ce qu'on croyait
impureté? Peut- on s'étonner après de tels f:i orifices
de celui que l'on faifait de fon prépuce chez d'au.*
très peuples , Se de l'amputation d'un tefticule chez
des nations africarnes ? Les fables di^Atis & de Com^
bàbus ne font que des fables , comme celle de Ju-^
fiter qui rendit eunuque Suturne fon père. La fu-
perftition invente des ufages ridicules , & Tefprit ro*
manefque en invetite des raifons abfurdes.
Ce que je remarquerai encor des anciens Syriens,
€*eft que la ville qui fut depuis nommée la ville
fainte , & Hiérapolis par les Grecs , était nommée
par les Syriens Magûg. Ce mot Mag a un grand
\
«K»
'^^
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Dk LA Strie. 47
rapport avec les anciens mages ; il femble commun
à tous ceux qui dans ces climats étaient conîacrés
au fervice de la Divinité. Chaque peuple eut une
ville fainte. Nousfavons queThèbes en Egypte était
la ville de Dieu , Babilone la rille de Dieu ; Apa-
mée en Phrygie était auflt la ville de Dieu.
Les Hébreux longtems après , parlent des peuples
de Gqg & de Magog ,• ils pouvaient entendre par ces
noms les peuples de TEuphrate & de l'Oronte : ils
pouvaient entendre auffi les Scythes qui. vinrent ra-
vager TAfie avant Cyrus , & qui dévaftèrent la Phé-
nicie. Mais il importe foft peu de fa voir quelle idée
paflait par la tête d'un Juif quand il prononçait J!i^
gog ou Gog. .
Au refte je ne balance pas à croire les Syriens beau-
coup plus anciens que les Egyptiens , par la raifon
évidente, que les pays les plus aifément cultivables
font néceflairement les premiers peuplés , & les pre-
miers floriflans.
Des Phéniciens , et de Sanchoniaton.
Les Phéniciens font probablement raflemblés en
corps de peuple aufli* anciennement que les autres
habitans de la Syrie. Ils peuvent être moins anciens
que les Caldéens , parce que leur pays eft moins
fertile. Sidon , Tyr , Joppé , Berith , Afcalon , font des
terrains ingrats. Le commerce maritime a toujours
été la dernière reiïource des peuples. On a com-
mencé par cultiver & terre avant de bâtir des vai&
féaux pour en aller chercher de nouvelles au - delà
des mers. Mais ceux qui font forcés de s'adonner au
commerce maritime ont bientôt cette induftrie fille
du befoin qui n'aiguillonne point les autres nations.
Il n'eft parlé d'aucune entreprife maritime , ni des
Caldéens , ni des Indiens. Les Égyptiens même avaient t
èla mer en horreur ; la mer était leur Typhon^ un j?»
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i^ 4$ Dbs PnéNiciEirs
?f
être mal - feifant ; & c'eft ce qui fait révoquer en
doute les quatre cent vailTeaux équipés par Séjqfirir
four aller conquérir l'Inde. Mais les entreprifes des
héniciens font réelles. Carthage & Cadiz fondéps
{lar eux , l'Angleterre découverte , leur commerce aux
ndes par Eziongaber » leurs manufàâuces d^étofFes
précieufes , leur art de teindre en pourpre , font des
témoignages de leur habileté , & cette habileté fit
leur grandeur.
Les Phéniciens furent dans l'antiquité ce qu'étaient
les Vénitiens au quinzième fiécle , & ce que font
devenus depuis les lioll^qdais , forcé de s'çnrfchir par
Iççr induftrîc.
Le commerce exigeait néceffairement qu'on eât des
regiftres qui tinflent lieu de nos livres de compte ,
avec des fignes aifés & durables pour établir ces re-
giftres. L'opinion qui fait les Phéniciens aqteurs de
récriture alphabétique ef^ dqnc très yraifembl^ble.
Je n'attureraispas qu'ils ayent inventp de fels cara^
tères avant les Caldéens , mais leur alphabet fut certai*
nement le plus copiplet& le plus utile, puifqu'ils pei-
gnirent les voyelles que les Caldéens n'exprimaient
pas. Ge mot même Alphabeth , compofé de leurs deux
premiers caraétèr^ , dépofe ea faveur dps Phéniciens.
Je ne vois point que les Egyptiens ayent jamais
communiqué leurs lettres , lepr langue » à aucun peu-
ple : au contraire , les Phé.niciens tranfmirent leur lan-
gue & leur alphabet aux Carthaginois , qui les altérè-
rent depuis. Leurs lettres devinrent celles des Grecs.
Quel préjugé pour l'antiquité des Phéniciens !
Sanchoniaton Phénicien , qui écrivait longtems avant
la guerre de Troye , l'hiftoire des premiers âges , &
dont Eufèbe nous a confervé quelques fragmens , tra-
duits par Pbilon de Biblos ; SancboniçiSQn , dis-je , nous
ji apprend que les Phéniciens avaient facrifié de tems mm
çf immémorial ^
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iliP(Wi"ii I "inriiii^> ,111 iiijTjyg.
IÇT DP S^NÇHO NIATON. 43
i^nmémorial aux clémens & aux vents , ce qui cons
vient en effet à un peuple navigateur. Il voulut dans^
fon hiiloîre s'élever jufqu'à l'origine des chofes , com-
me tous les premiers écriviains ; il eut la même am-
bition que les auteurs du Zend & du Vidam » la
même qu'eurent Manétbon en Egypte & Héfîode ea
Grèce.
Ce qui prouve la prodigieùfe antiquité du livre de
Sfincbçniatqn ^ c'eft qu'on en lifait les premières lignes
dans les myftères d'ifif & de Cérès , hommage quç
les Egyptiens & les Grecs n'euffent pas rendu à un
auteur étranger , s'il n'avait pas' été regardé commç
pne des premières fpurces des connaifTances humaines.
• Sancboniaton n'écrivit rien de lui - même ; il con-
fulta toutes les archives anciennes , & furtout le prê-
tre JerombaL Le nom de Sancboniaton fignifie en
ancien phénicien , Amateur dé la yérifé. Porpbire ,
Tbéodoret , Èiifèbe l'avouent. La Phénicie était appel-
lée le pays des Archives , Kirjatb Sepber, Quand les
Hébreux vinrent s'établir dans une partie de cette
contrée , ils lui rendirent ce témoignage , ço'mn^e or^
le voit dans Jofué & dans les Juges.
Jçrombai confulté p^r Sancboniaton éfait prêtre du
Dieu fuprême , que les Phéniciens nommaient lao ,
Jeova , nom réputé facré , adopté chez les Egyptiens ,
fn enfuite chez les Juifs. On voit par les fragmens de
pe monument fi antique , que Tyr exiftait depuis très
iongtcms , quoiqu'elle ne fût pas paryeniie ^ncor i^
être une ville puiffante.
Ce mot Ei , qui défignait Dieu chez les premier^
Phéniciens , a quelque rapport à VA lia des Arabes ; Sç
il eft probable que de ce monofyllabe £i , les? Grecs
pompofèrent leur E^ios, Mais ce qui eft plus remarqua^
ble , c'eft qu'on trouye chez les anciens Phéniciens
le mot Eioa , Etpim , dont les flébteux fe feryirenj
.EJj'aifur ies mœurs , j&fc. Tom. I, P
'^^m I ipB.iWjKiiiniji
=«BS*Sl^
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I
;^
f fo Des PHéKiciEN
I
«sas»
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I
très lon^toms après , quand ils s'établirent dans le
Canaan.
C'eft de la Phénicie aue les Juift prirent tous les
noms qu'ils donnèrent a Dieu , Eloa , lao , Adondi ^
cela ne peut être autreiilient , puifque les Juifs ne
parlèrent longtems en Canaan que la langue phéni-
cienne.
Ce mot lao , ce nom ineffable chez les Juifs , &
qu'ils ne prononc^aient jamais , çtait fi commun dans
POrient , que Diodore dans fon livre fécond , en par-
lant de ceux qui feignirent des entretiens avec les
Dieux , dit que Minos Je vantait d^ avoir communiqué
avec le Dieu Zeus ; Zamolxis avec la déejfe Vefta , &f
te Juif Moïfe avec le Dieu lao , &c.
Ce qui mérite furtout d'être obfervé , c'eft que 5^^»-
eboniaton en rapportant l'ancienne cofmologie de fon
Eays , parle d'abord du chaos enveloppé d'un air téné-
reux , Cbautereb. L'Erèbe , la nuit d'Héfîode , eft
prife du. mot phénicien qui s'eft confervé chez les
Grecs. Du chaos fortit Mutb ou Motb , qui fignifie
la matière. Or qui arrangea la matière ? C'eft Coipi
lao , TEfprit de Dieu , le vent de Dieu , ou plutôt
la bouche de Dieu , la voix de Dieu. C'eft à la voix
de Dieu que naquirent les animaux & les hommes.
Il eft aifé de fe convaincre que cette cofmogonic eft
l'origine de prefque toutes les autres. Le peuple le
plus ancien eft toujours imité par ceux qui viennent
après lui ; ils apprennent fa langue , ils fuivent une
partie de fes rites , ils s'approprient fes antiquités &
les fables. Je fais combien toutes les origines caldéen*
nés, fyrîennes , phéniciennes , égyptiennes & grecques
font obfcures. Quelle origine ne l*eft pas ? Nous ne
pouvons avoir rien de certain fur la formation du
monde « que ce que le Créateur du monde aura dai-
gné nous apprendre lui-même. Nous marchons avec
I
^='!f^t^^
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ET DE SaMCHONI A TOIT. fl |f
î
fôretë jufqu'à certaines bornes : nous favons que Babi«
lone extftak avant Roni9 , que les villes de Syrie
étaient puiflkntes ayant qu'on connût Jérufalem , qu'il
y avait des rois d'Egypte avant Jacob , avant Abriu
bam i nous lavons quelles fociétés fe font établies les
dernières ; mais pour (avoir précifément quel fut lo
premier peuple , il faut une lévélation.
Au moins nous eil-il permis de pefer les probable
lités & de nous fervir de notre raifon dans ce qui
n'intérefle point nos dogmes facrés fupérieurs à (ou^q
taifon , & qui ne cèdent qu'à la morale.
Il eft très avéré que les Phéniciens occupaient de,
puis longtem^ leur pays avant que les Hébreux s'y pré»
fentaflent. Les Hébreux purent^ls apprendre la langue
phénicienne , quand ils er r tient loin de la Phénicie
dans le défert au milieu de quelques hordes d'Arabes ?
La langue phénicienne put- elle devenir }e langage
ordinaire des Hébreux î & purent -ils écrire dans
cette langue du tems de Jofui parmi des dévaftations
& des maflacres continuels ? Les Hébreux après Jb/W
devenus longtems efclaves dans ce même pays qu'ils
avaient mis à feu & à fang, n'apprirent -ils pas alors
un peu de la langue de leurs maîtres , comme depuis
ils apprirent un peu de caidéen quand ils furent efcla-»
vcs à Babilonel
N'eft-ii pas de la plus grande vraifemblance qu'un
peuple commerçant , induftrieux , favant , établi de
tems immémorial , & qui pafle pour Pinventeur des
lettres , écrivît longtems avant un peuple errant noo^
utilement établi dans fon voifinage, fans aucune fcien,
ce , fans aucune induftrie , (kns aucun commerce ,
fubfîftant uniquement de rapines ?
Peut» on nier • fédeufement l'autenticité des frag^
mens dp Sançbonmfon çonfervés par Eufèbe ? ou peut-^
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W^i-' -v-tm- •^'»m
1
f2 Des PHiS î € i e n s, &c.
' ' - 1 I ■■■ ,1.
on imaginer avec le favant Uuet que SancbomafoH
ait puifé chez Moïfe^ quand tout ce qui rette de mo-
numens antiques nous avertit que Sanchoniaton vivait
à -peu -près du tems de Mdife?'^ous ne décidons
tien ; c'eft au ledcur éclairé & judicieux à décider
^ntro tiuet & Vandaie qui Ta réfuté. Nous cherchons
la vérité & non la difpute.
Des Scythes , et des Gomeritbs.
Laiffohs Gomer prefqû'au fortir de Tarchc , aller
fubjuguer les Gaules & les peupler en quelques an»
nées. Laiflbns aller Tubal en Efpagne , & Magog dans
le nord .de TAllemagne , vers le tems où les fils de
Chctm faifaient une prodigieufe quantité d^enfans tout
noirs vers la Guinée & fe Congo. Ces impertinences
dégoûtantes font débitées dans tant de livres , que ce
n'eft pas la peiné d'en parler. Les enfans commen-
cent à en rire. Mais par quelle faiblefle , ou par quelle
4nalignité fecrette , ou par quelle affecflation de mon-
trer une éloquence déplacée , tant d'hiftoriens ont- ils
fait de fi grands éloges des Scythes qu'ils nç connaif-
faient paç ? .
Pourquoi Quinte - Curée , en parlant des Scythes
qui habitaient au nord dp la Sogdiane au - delà de
l'Oxus , ( qu'il prend pour le Tanaïs qui en eft à
cinq cent lieues ) pourquoi, dis ' }Q ^ Qiimie- Cur ce
met . il une harangue philofophique dans la bouche
de ces barbares ? pourquoi fuppofe-t-il qu'ils repro-
chent à Aiexandr£ fa foif de, conquérir ? pourquoi
leur fait-il dire qu^ Alexandre eft le plus fameux vpleur
de la terre , jeux qui avaient exercé Je brigandage dans
toute l'Afie fi longtems avant lui ? pourquoi eni>^ii
^Quinte - Ciirce peint - il ces Scythes comme les plus
juftes de tous les hommes ? I^a raifpn en eft quf ,
comme il place le Tanaïs du côté de la mer Cafpienne
en mauvais géographe., il parle du prétendu défin-
téreiTement des Scythes en déclamateur.
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I
Des Scythes et des Gomérites. 53
SI Hor aérien oppofant ks mœurs des S<>ythe$-à^
celles des Rotnsiins v fait en yers harmonieux le paaér
gyrique de ces barbares , s*ii dit , - _
Campefires melius Scythm ^
Quorum pkuiftra vagas rite trabmt domot ^
Vivunt £jf rigiH Gtta : • ^
Voyez les habîtans ile raffrenfe. Scythie
Qui vivent fur des chars.
Âv«e plus d'innocence ils confument leur ,vie -.
Que le peuple de Mars $ ,, .. ,
c'eft qu'Horace parlç en poète un peufatyrîque, quC
eft bien aife d'élever des étr^ng^rs aux dépens de*
fon pays. ' ^ . ' .. \' J
C'eft par la même raifon que Turiée s'çptiîfe à
louer les barbares Germains^ qui pillaient les Gaules
& qui immolaient des hommes à leurç abominables.
Dieux. Tacite , Quinte - Cnrce , Horme réiTemblcnt à
ces pédagogues , qui pour donner de rcmuktion à
leurs difciples , prodiguent en leur préfençe des louan-
ges à des enfans étrangers , quelques grbtliers qu'il»
puiflent être.
Les Scytlies.font Cj2s mènies barbares que nous avons
depuis appelIés^Tartares ; ce font ceux-là m ê.i»ès qui
longteips ^^XATït Alexandre yvàiem ravage plutkùrs fois'
l'Afie,,& qui ont été Içs, déprédateurs ^'uiie gnmJe
partie du continent. Tantôt fous le noni de JVl^jnguls „
ou de Muns y. ils ont aflervî la Chine & les Indes;
tantôt fous lé nom de Turcs * lU ont chiffé les Arabes
qui avaient conquis utié partie de l'Afie. C*elt dettes
vafles campagn^ ijue DatcirentL le^ Huns pour aller
jufqu'à Rome, voilà'ces hommes défintérefles & juf-
tes t'doot nos ^€mipilateurs^vatt|te9t.^ocor^«u}ppi<l-.hui
réquité quand ils copient Quinte- Ctirçe, C'çftamû.
qu'on nous accable d'hiftôires 9P4:;iennes fans ^oix Çi.^
' ' D iij
,!
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ms?^
S 4 t>ti SÈVTltE$ Et DES GôiaÉRttES.
fahs jugement ; on les lit à-peo.prés avec lé même
d'pric qu'elles ont éce faites ^ & on ne ft mefc dans
la tecé que des erreurs^
Lés RuflTes tiabitènt atijourd'huî Panclennc Scythîe
èuropeane ; ce font eux qui ont fourni à Thiftoire
dés vérités bien étonnantes. Il y a eu fur la terre
des révolutions qui ont plus frappé Tîmaginatlon; il n'y
l^n a pdS une qui fatisfaHe autant l'efprit humain &
^ui lui faffe autant d'honneur» On a vu des conqué-
l^ans & dés devait tiôns ; mais qu'un feul homme ait
en vingt années changé les mœufs , les loix , l'efprit
t)ù plus Vuile empire de la terre , tque tdus les arts
fuient venus en foule embellir des défert^, p'eft-là ce
qui èft admirable. Une femme qui ne favalt ni lire ni
éctire , perfcdtionna ^e que Pierre le grand avait com^»
mençç. Une autre femme ( Elifabeth ) étendit encot
ces noblts ctimmencemens. Une autre impératrice en-
core , e(t ^lliic pJus Itjîn que les deux autres ; fon génie
s'eft communiqué à fes fujets ; les révolutions dti palais
n'ont p s rétirîé <î'un ma ment les progrès de la féli-
cité rîe l'empire; on a vu en on demi ^ fiécle la cour
de Scythie plus ecidirée que ne l'ont été jamais la
<jrèce & R^itnc* i
Et ce qui eft plua admirable, c'eft qù*en i*;7o, temj
'auquel nous écrivons, Catherine /f pourfulten Europe
& çh A fie îes Turcs ftiy^ins devnntfes armées ^ Se les*
%h trembler ûdn^ Oinihntînopie. Ses foldats font
fiufîî terribles que f.i cour eft polie. Et quel que foit
l'évenemeot de cette grande guerre, la pollerité doit
admirer 1:* Thnmiris du nord. Eilc mérite de venger
la terre de ïa tyrannie turque, '
/Si ffeft.' .tft'curterix de iîi^ntimens tefc que ceu» de
lEél^P'^e , je ne crois pas qu'on doive les chercher
t* Arabie* ta Mecque fut , dit -on ^ bâtie vers le
'"'•iP»#l
"«^«ftSliK
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D B L' A H A B I s. 5Ç
tems ^ Abraham i mais eUe eft dans un terrain fi la-
blonneux & fi ingrat, qu'il n'y a pas d'apparence qu'elle
aie été fondée avant celles qu'on éleva près des fieu-
ves dans des contrées fertiles. Plus de la moitié de
l'Arabie eft un vafte défert , ou de fables , ou de pier-
res. Mais l'Arabie heureufe a mérité ce nom , en ce
qu'étant environnée de folitudes &, d'une mer ora-
geufe , elle a été à l'abri de la rapacité des voleurs
appelles conquérans jufqu'à Mahomet , ou pfutât elle
fut la compagne de fes viAoires. Cet àvanftage eft
bien au-deffus de fes aromates , de ibiii en^ns , de
bi cannelle qui eft d'une efpèce médiocre y & xsàsxat
de fon caffé qui fait aujourd'hui (a richeffe.
L'Arabk déloFte eft ce pays maiheuretx habité par
quelques Amalécttes , Moabites , Madianites ; pays
af&eux , qui ne contient pas aujourdfhui neuf à dix
mille Aeabes efrans & voleurs ^ & qw ne peut en
nourrir davantage. C'eft dans ces mêmes défet ts^ qu'il
eft dit que deï^x millions d'Hébreux pafleient qu»- »
rante années. Ce n'eft point la vraie Arabie ^ & ce j '
pays eft fonvent appelle défert de Syrie.
L'Arabie pctrée n'eft aînfi appeltée q,ue du nom
de Pkra. , petite fortereffe , à qui fûrement les Ara-
bes n'avaient pas donné ce nom y mats qui fut non»,
mée ainfi par les Grecs vers le tems à! Alexandre, Cette
Arabie pétrée eft fort petite, & peut être confondue ,
fans lui faire tort , avec l'Arabie déferte. L'une &
l'autre ont toujours été habitées par des bordes va-
gabondes. C'eft auprès de cette Arabie pétrée que fut
bâtie Jérufalem.
Pour cette vafte partie appellée heureufe , près de la
moitié confirte auffi en déferts \ mais quand on avance
quelques milles dans les terres , foit à l'orient de
JAoka , foit même à Torient de la Mecque , c'eft alors
qu'on trouve le pays le plus agréable de la terre. L'air \
y eft parfumé , dans un été continuel , de l'odeur des K
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fe.^
iJàâm,
éÊà,
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D E L' A ft A B 1 i.
1
plantes aromatiques que la haturc y fait croître fans
culture. Mille ruifle-ux defcendent des montagnes
Se entretiennent une fraîcheur perpétuelle , qui tem-
père Tai^deur du foleil fous des ombrages toujours
"Vcrdr.
C'èft furtout dani ces pays que le mot de jafdîn ,
Jiaradi^ , fignifia la faveur célefte.
Les jardins de Saana vers i\den , furent pliis &-
meux chez les Arabes , que ne le furent depuis ceax
yA'J.vikous chez les Grecs. Et cet Adcn ou Edcn',
était nommé le Heu des délices. On parle cncor d*ua
ancien Shedad , dont les jardins n'étaient pas moins
Tenommés. La félicii» dans ces climats brûlans était
l'ombryge; !
/ fce vafte pays de PYemen èft fi bcaii , fcs ports
font fi heureufement fitués fur TOcéan indien , qu'on
prétend qu^j^lexandre voulut conquérir l'Yemen pour
^n faire le fiége de fon empire , & y établir l'entre-
pôt du commerce du monde. Il eût entretenu Tani
cien canal des rois d'Egypte , qui joignait le Nilà la
jner Rdugc ; & tous les tréfors de l'Inde auraient paffé
d'Aden , ou d'Edcn , à fa ville d'Alexandrie. Un^
-telle entreprife ne reffemMe pas à ces fables infipît
ides & ablurdes dont toute hiltoire ancienne eft rem*-
plie. Il eût falu à la vérité fubjuguer toute l'Arabie.
Si quelqu'un le pouvait ., c'était Alexandre. Mais il
paraît. que ces peuples ne le craignirent point ; ils né
lui envoyèrent pas même des députés quaad il tenait
fous le joug l'Egypte & la Perfe,
tes Arabes défiendus p^r leurs déferls fi: pat leur
cdurage , n'ont jamais fubi le joug étranger. Trajait
ne conauît qu'un peu de l'Arabie pétrée. Aujourd'hui
Vnême ils bravent la puifTarice du Turc. Ce grand peu-
y)îea tçûjours été auffi Hbre qiie les Scythes , & plus
4nvilifi& qu'eux;
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De l' a r a b I e.
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11 faut bien Te garder de confondre ces anciens
Arabes avfec les hordes qui fe difent defcendues d'7/1
maif/. Lés Ifoiaiëlîtes , ou Agaréens , ou ceux qui fe
difaient enfans de Cethura , étaient des tribus étrangè-
res , qui ne mirent jamais le pied dans TArabic heu-
reufe. Leurs hordes erraient dans l'Arabie pétrée,
vers le pays de Madian ; elles fe mêlèrent depuis avec
les vrais Arabes du tems de Mahomet , quand elles
cmbraflerent fa religion.
Ce font les peuples de l'Arabie proprement dite-,
qui étaient véritablement indigènes , c'cft-à-dîre^ qui
de tems immémorial habitaient ce beau pays fans
mélange d'aucune autre i^tlon , fans ayoir jamais été
ni conquis , ni conquérans. Leur religion était la
plus naturelle & la plus fimple de toutes ; c'était le
culte d'un Dieu , & la vénération pour les étoiles »
qui femblaient fous un ciel fi beau & fi pur , annon<-
cer la grandeur de DiEU avec plus de magnificence
que lé refte de la nature. Ils regardaient les planètes
comme deis médiatrices entre D^u & les hommes.
Ils eurent cet^e religion jufqu'à Mabontet, Je crois
bien qu'il y eut beaucoup de fuperftitions , puifqu'ils
étaient: hommes ; mais féparés du refte du monde par
des mers & des déferts , poiTeffe^rs d*uh pays déli-
cieux, & fe trouvant au-deffus de tout ibefoîn & de
toute crainte, ils. durent être néceffaircment moins
méchans & moins fuperflitieux que d'autres nations* .
On ne les avait jamais vus ni envahir le bien de
leurs voifins comme des bêtes oarnaffières affamées^,
ni égorger les faibles ^ en prétextant les ordr^es delà
Divinité, ni fajre leur cour aux puiffans en les flattant
par de faux oracles. Leurs fuperftitions ne furent ni
abfurdes ni barbares.
On ne parle point d'eux dans nos hiftoîrcs unîver-
felles fabriquées dans nétrc Occident. Je le croîs bien ;
ils n'ont aucun rapport avec la petite nation juive
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Ds L'ÂRiLBIE.
qui eft devenue Tobjet & le fondement de nos hiftmres
prétendues univerfelles , dans lefquelles un certaku
genre. d'auteurs fe copiant les uns les autres, oublie
ks trois quarts de la terre.
De Bram»AbraM)Abrâham.
Il femble que ce nom de Bram\ Brama , Abranty ^
Ibrahim , foit un des noms des plus conununs aux
anciens peuples de l^AGe. Les Indiens que nous croyons
vta€ des premières nations , font de leur Brama un fils •
de Dieu , qui ei^eigna aux brames la manière de
Fadorer. Ce nom fut en vénération de proche en pro-
die. Les Arabes < les CaUtéens , les Perfans fe Tappro-
f^rtèrent , & les Jtrife le regardèrent comme un de
leurs patriarches. Xes Arabes qui trafiquaient avec les
Indiens ) eurent; probablement les premiers quelques
idées confufes do Brama , qu'ils nommèrent Abra'
ma , & dont enfuîte ils fe vantèrent d'être defcen-
dos. Les Caldéens l'adoptèrent comme un légiflateur.
Les Perfes appelaient leur ancienne religion , Jfi/-
lat Ibrahim $ les Mèdes Kish Ibrahim. Us prétendaient
que cet Ibrahim , ou Abraham^ était de la Ba<ftriane ,
&, qu'il avait vécu près de la ville de Balk. Us révé-
raient en lut un prophète de la religion de l'ancien
Zoroajire, Il n'appartient fans doute qu'aux Hébreux ,
puifqu'ils le reconnaiflent pour leur père dansleuts
livres facrés.
Ses favans ont cru que le nom était indien , parce
tpât les prêtres indiens s'appellaient brames , brach*
mânes , & que plufieurs de leurs infiitotions facrées
ont un rapport immédiat à ce nom , au-lien que chez
les Afiâtiques occidentaux vous ne voyez aucun établif-
fement qui tire fon nom d'Abram , ou Abraham. Nulle
fociété ne s'e# jamais nommée Abramiaue. Nul rite,
nulle cérémonie de ce nom- Mais poiiqtre les livres
]mk difent ^v^ Abraham eft la tige de« Hébreux , il
faut les croire fans difficulté.
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tgBSiÊgilBSiÊBBSiÊSSÊÈSËSSÈÈSt
Db BRjLM» ABRAM» ARUAfiA^M. 59
L'Alcoran cite , touchant Abraham , les ancieimes
hiftoires arabes ; maïs il en dit très peu de chofe. EUeg
prétendent que cet Abraham fonda la Mecque*
Les Juifs le font venir de Caldée , & non pas de
l'Inde , ou de la Badtriane ; ils étaient voifins de U
Caldée ; Tlnde & la Baétriane leur étaient inconnues.
Abraham était un étranger pour tous ces peuples , &
la .Caldée étant un pays dés loqgtems renommé pour
les (cîences & les arts , c'était un honneur t humai-»
nement parlant , pour une petite nation renfermée dans
la Paleftine , de compter un anciea fage réputé caldéei)
au nombre de fes ancêtres.
S^il eft permis d^examiner la partie hiftorique des
livres judaïques par les mêmes règles qui nous coa-
duifent dans la critique des autres hiftoires , il faut
convenir avec tous les commentateurs que le récit
des avantures à^ Abraham tel qu'il fe trouve dans le
1 * Pentateuque , ferait fujet à quelques difficultés , s'il
fe trouvait dans une autre luftoire.
La Genèfe dit qu^ Abraham tortlt d'Aran âgé de
foîxante & quinie ans , après la mort de fon père.
Mais la même Genèfe dit qne Tbaré (oti père
Payant engendré à foixante & dix ans, vécut jut
ques à deux cent cinq. Ainfi Abraham avait cent
trente>.cinq ans quand il quitta la Caldée. H parait
étrange qu'à cet âge il ait abandonné le fertile pays
de la lUéfopotamie , pour aller à trois cent milles
delà ^ dans la contr'ée ftérlFe & pterreufe de Stchem,
qui n'était point un Keu 4^ commerce. De Sichem
on le fait allef acheter du bled à Memphis , qui eft
environ à fix cent milles ;'& dès qu'il arrive , leroî
devient amoureujt de fa femme âgée de foixante &
quinze ans.
Je ne touche point à ce qu'Hy a de divin dans
% cette luftoire-; j^. m.'en tiens toujours aux recherches j ^
w^ftfPi» ' M iiMjii Mil Miiiam
'i
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$Q D ï' B a A-M, A 4 ff\A M.,i i |i
de Tantiquité. Il eft dît qu'Abraham réqut de graiîds
préfens du roi d'E^pte. Ce pays était dèsJors ub;
puiflant.état ; là monarchie était établie , les arts y-
étaient donc cultivés ^ le fleure avait été domté , on
avait creufe parébut des canaux pour' recevoir les
inondations , fans quoi la contrée n'eût pas été ha-
bitable.
Or je demande à tout homme fenfé , s'il n'avait pas
fâlu des fiécles pour établir un tel empire dans un
pays longtems inacceffible & dévafté p'ar les eaux
mêmes qui le fertififèrent ? Abram , félon la Oenèfe^
arriva en Egypte deux mille ans avant notre ère VuU-
gaire. Il faut donc pardonner aux Manétbom y wax
ilérodotes , aux Dîodores , aux Eratojlhènèi , & à tanfc
d'autres , la prodigfeufe antiquité qu'ils accordent
tous au royaume d'Egypte ; & cette antiquité devait
être très moderne en comparaifbn ' de celle des Çal-
déens'& des Syriens.
Qu'il foit pernits' d*obferver'un trait de l*hiftoire
d'Abrabinn, H eft.^;|epréfenté au- fgrtir de l'Egypte
jcçnnme.iiij p^fteu^, Nomade, :errant; entre le mont
Carmél & le lac Afphaltide ; c'eft le défert le plus
aride de i'Arabjc^pétrée , tout le territoire y eft bitumi-
neux ; l'eau y eft t^ç^rarcXe peu/qu'on y eji trouvj^
eft moins potable^ que celle de Ja jfnqr. Il y voi-
tpre fes teQtçs:.avé.Q trois' cent diic-Tvu.it ferviteurs,
5S fon neveu Lot gft, établi dans la. ville ou bourg
jdeSodome, JJ^i ,rqri d^ Babil oiie , un roi de Perfc ,
un roi de,Poi^t , /& u/i roi de pl^^eur^s. autres n^
/tions , fe liguent çnfemWe^.pom: . f^irç la guerre, ja
Sçdonie & à quatrç^ bourgades voifme^. Ils prennenjt
jcps boni;gs ;&!;Si9^qme. Jto^ ^eft Içjur- prifonnier. Il
jp^'t^ pasa^ copjnent cinq grands
rois il pûifians fe liguèrent pour venir ainlj attaquer
une horde d'Arabes dans un coin de terré fi fauvage,
j îii commenfeb^^rr^iznr: défit dejfîpjuiflkns monarques
j l «arec .trois cent .valets de campt'gne-^t^i'coàia^ent il
& .
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r
i
A B K 1 H A m: ,6.1
les pourfuivit jufques par-delà Damas. Quelques tra-
duifteurs ont, mis l)an pour Damas ,• mais Dan n^exit
tait pas du tems de Moife , encor moins du tems
à^ Abraham. Il y a de l'extrémité du kc Afphaltidc
où Sodome était fttuée , jufqu'à Damas , plus de trois
cetit milles de route. Tout ceU eft au-defluside
nos conceptions. Tout eft miraculeux dans l'hiftoire des
Hqbreux. Nous Tavons déjà dit , & nous redifons cri-
cote, que nous, croyons ces prodiges & fous les au-
tres , fans ai^cun examen.
D E L' I N D E. I
S'il eft permis de faire des conjcéturcs , les Indiens
vers le Gange font peut-être les hommes les plus
anciennement ra^emblés en corps de peuple. U efl
certain que le terrain où les animaux trouvent la
pâture la plus facile eft bientôt couvert de refpèce
qu'elle peut nourrir. Or il n'y a point de contrée
au. monde où refpèce humaine ait fous fa main des
alimens^plus fains , plus agréables & en plus grande
jibondance , que vers le Gange ; le ris y croit fans
culture ; l'ananas , le cocos , la datte , le figuier , prér
Tentent de tous côtés des mets délicieux ; l'oranger ,
le citronnier , fourniflent à la fois des bpiflbns ra-
fraîchiflantes avec quelque nourriture. Les cannes
de fucre font fous la main, Les palmiers , les figuiers
-à larges feuilles , donnent le plus épais ombrage. On
n'a pas befoin dans ce pays d'étorcher des troupeaux
pour défendre fes enfans des rigueurs des faifons ;
on les élève cncor aujourd'hui tout nuds jufqu'à la
puberté. Jamais on ne fut obligé dans ce pays de
rifquer fa vie pour la foutenir , en attaquant les
animaux , .& en fe nourriffant de leurs membres
déchirés , comme on a fait prefque partout aiU
leurs.
Les hommes fc feront raffemblés d'eux-mêmes en
fociété dans ce climat heureux ; on ne fe fera pdint
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iç^BttHlBMMftenesBeâaHÉs
i
6% D B 1' I V 0 E.
difputé un terrain wAàt pour y établir de maigres
troupeaux ; on ne fe fera point fait la guerre pour
un puitt , pour une fontaine , comme ont fait des
barbares dans TArabie pétrée.
Les l^rames fe vantent de pùfTéder les itiomiment
les plus anciens qui foîent fiir ia terre. Les raretés
les plus antiques que l'empereur chinois Cam*bi eét
dans fon palais étaient indiennes : il montrait à nos
miflionnaires mathématiciens d^antiennes monnoies
indiennes , frappées au coin , fort antérieures aux
monnoies de cuivre des empereurs chinois : & c'eft
probablement des Indiens que les rois de Perfe ap*
prirent Tart monétaire.
Les Grecs arant Pythagare voyageaient dans l'Inde
pour s'inftruire. Les fignes des fept planètes A des fept
métaux font encor dans prefque toute la terre ceux
que les Indiens inventèrent : les Arabes furent obli*
gés de prendre leurs chiflFres. Celui des jeux qui
fait le plus d'honneur à Tefprît humain nous vient
incontcftablement de l'Inde ; les cléphans auxquels
nous avons fubftitué des tours , en font une preuve.
Enfin , les peuples les plus anciennement connus i
Perfans , Phéniciens , Arabes , Egyptiens , allèrent de
tems immémorial trafiquer dans l'Inde , pour en rap.
porter les épiceries c^e la nature n'a données qu'à
ces climats , fans que jamais les Indiens allailent
rien demander à aucune de ces nations.
On nous parle d'un Baccbus 9 qui partît , dît-on ,
d'Egypte , ou d'une contrée de l'Afie occidentale ,
pour conquérir l'Inde. Ce Racchus quel qp'îl foît y
favait donc qn'il y avait au bout de notre continent
une nation qui valait mieux que la fienne. Le befoin
fit les premiers brigands ; ils n'envahirent l'Inde que
païce qu'elle était riche , & fûrement le peuple ri-
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De U I n d b.
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«3 «
che eft raiTemblé , ci?ilifé , policé , longtcms avant
le peuple voleur.
Ce qui me frappe le plus dans l'Inde , c'eft cette
ancienne opinion de la tranfmisration des aroes » ^ui
s^étendit avec le tems jufqu'à la Chine & dans l'Eu-
rope. Ce n'eft pas que les Indiens fuflent oe que
c'eft qu'une ame : mais ils imaginaient <{\it ce prin-
cipe , foit aérien , foit igné , allait fucceflivement
animer d'autres corps. Remarquons attentivement ce
fyftéme de philofophie qui tient aux mœurs. C'était
un grand frein pour les pervers que la Crainte d'ê-
tre condamnés par Vifnou , & par Brama , ï deve-
nir les plus vils & les plus malheureux des animaux.
Nous verrons bientôt que tous les grands peuples
avaient une idée d'une autre vie , jquoiqu'avec des
notions difFérentes. Je ne vois guères parmi les an-
ciens empires que les Chinois qui n'établirent pas
la doArine de l'immortalité de l'ame. Leurs premiers
légiflateurs ne promulguèrent que des loix mora-
les ; ils crurent qu'il fufiifait d'exhorter les hom-
mes à la vertu , & de les y forcer par une police
févcre.
Les Indiens eurent un frein de plus en embraf-
fant la dodrine de la métempfycofe ; la crainte de
tuer fon père ou fa mère en tuant des hommes &
des animaux , leur infpira une horreur pour le meur-
tre & pour toute violence , qui devint chez eux une
féconde nature. Ainfi tous les Indiens , dont les fa-
milles ne fe font alliées ni aux Arabes , ni aux Tar-
tares , font encor aujourd'hui les plus doux de tous
les hommes. Leur religion & la température de leur
climat , rendirent ces peuples entièrement fembla-
bles à ces animaux paiiibles que nous élevons dans
nos bergeries , & dans nos colombiers pour les égor-
ger à notre plaifir. Toutes les nations farouches qui
defcendirent du Caucafe , du Taurus , & de Tlm-
maûs pour fubjuguer les habitans des bords de Un-
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tf4 D E L' I K D E,
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^
de , de THidaQpe , du Gange i les afibrvirent en fe
montrant.
C'cft ce qui arriverait aujourd'hui à ces chrétiens
primitifs appelles Quakers , auffi pacifiques que les
Indiens ; ils feraient dévorés par les autrçs nations ,
s'ils n'étaient protégés par leurs belliqueux compa-
triotes. La religion chrétienne que ces fculs primi-
tifs fuivent à la lettre , eft aufli ennemie du fang que
la pythagoricienne. Mais les peuples chrétiens n'ont
jamûs obfervé leur religion , & les anciennes caftes
indiennes ont toujours pratiqué la leur. C'eft que le
pythagorifme eft la feqle religion au monde qui ait
fu faire de l'horreur du meurtre une pitié filiale &
un fentiment religieux. La tranfmigration des âmes
eft un fyftéme f\ fimple , & même fi vraifemblable
aux yeux des peuples îgnorans ; il eft fi facile de
croire que ce qui anime un homme peut enfuice en
ianîmer un autrç , que tous ceux qui adoptèrent cette
religion , crurent voir les âmes de leurs parens dans
tous les hommes qui les environnaient. Ils fe oru,
rent tous frères , pères , mères , enfans , les uns
des autres. Cette idée infpirait nécefTai rement une
charité univerfelle. On tremblait de blefler un être
qui était de la -famille.: en un mot l'ancienne reli-
gion de l'Inde , & celle des 'lettres à la Chine , font
les feules dans lefquelles les hommes n'ayent point
été b?rbares. Comment put-il arriver qu'enfui te ces
mêmes hommes qui fe faifaient un crime d'égorger
un animal , permlfTent que les femmes fe brulaffenç
fur le corps de leurs maris , dans la vaine efpcrance
de renaître dans des corps plus beaux & plus heu-
reux ? c'eft que le fanatifme &' les contradictions font
l'apanage de la nature humaine.
Il faut furtout confidérer que l'abftinence delà chair
des animaux eft une fiiite de la nature du climat.
L'extrême chaleur & l'humidité y pourrifTent bientôt
31 la viande , elle y eft une -très mauvaife nourriture.
& ^'^ .«
Sg^j^* PII Jr»w ' ■ ■ >^nsSiM
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P B J,' r K O 8.
«5
Les liqueurs fortes y font aufli défendues par la nar
ture qui exige dans Tlnde des boifTons rafraichiflant
tes. La métempfycofe pafla à la vérité chez nos na-i
tiens fcptçntrionales. Les Celtes crurent qu'ils renaî-
traient dans d'autres corps ; mats fi fes druides Rivaient
ajouté à cette do<^ine la dé&nfe de manget c^e i^
çbair , ils n'apraient pas été Qbéis^
Nous ne conoaiflious prefque rien des anciens rites
des brames confervés jufques à nos jours. Ils comy
muniqueut peu les livrés du Hanfarit qu'ils ont en?
cor dans cette ancienne langue facrée : leurs Vidanu^
leur Shafla ont été aulfi longtems inconnus que le Zeni
dps Perfes » & que Içs cinq K,ings des Chinois. Il
n'y a gi^ères que {w vingt ans quelles furopéaas eut
rent les premières potions dçs cinq Kmgs : Çc le Ze^i
n'a été vu que par le célçbre do<fteur Hide , qui n'eu^
pas de quQi l'acheter , & d^ qi^oi payer l'interprète,
^ par le marchand Chqrdin qui ne voMlqt pas en
donner le prix qu'on lui en demandait. N^ous n'eu*
mes que cet eiçtrait du Zim4 » çç ^^f^f^ dqnt j'af
parlé {ç>i% au long.
Un hazard pliis heureux a procuré à la bibliothèt
que de Paris , aa ancien livre; des brames. , c'eft
VEzQurvidam , écrit a^ant l'expédition à'Alexandn
dans l'Inde , avec un rituel de cous les anciens rite)
des bracmanes ^ inptulé le Çormo-Védam : ce ma?
nufcric traduit par: un brame , n'tîft pas à la vérité le
Féd^m luî-méme^ mais ç'jcft un réfumé, des, opi-t
nions & des ritea contenus dans cette loi. .Noua n'a?
Yons que dtpm $eu d'f^nnéo^Xç Sb^fia. Nous le de,
YQiï^aux iQins.&.àJL'éruditioa.dc Mx^HotvMll qui a
demeuré très longtems parmi les brames. Le Sbnjl(\
eft antérieur au Vidam de quinze cent années , félon
le palcul de ce favant Anglais. (<t) Nous pouvons
, ( a ) Voyez les Mélange;
de ^bi(Qfophie & é^'\\\SiQiïQ
EJfaifur Us mœurs , 6f r, Tom. I,
<)vi Terpit à 1^ fin d^
pueil.
r?3
?
if
1W
<wfl^l
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donc nous flatter (fa?oir anjôurdiitti quelque ctrn*
naifTance des plus andens écfits qui foieot au monde,
' Il faut défefpérer d'avoir- jamais rieii 4eî Egyptiens;
leurs livres font peréus y leor rdigJon s'c% an^an-
tie ; Ds n'entendent plus leur ancienne hmgue vul-
gaire , encor moins la (àQfée. Ainfî ce qui était plus
prè$ de nous , plus facile à conferver , dépofé dans
d^ bfbfiothèques immen&s , a péri pour jamais ;
& nous avons trouvé au bout du monde des monu-
mens non moins autent»|ue8 , que mont ne devions
pas efpérer de découvrir.
On ne peut douter die là vérité , de Tautcntieité
de ce rituel des bracmanes dont je parle. L'auteur
apurement ne flatte pa^ fa fedte ; il ne-oherdie point
à déguifer fes fùperftitions , à leur donner quelque
I vraifemblance par des explications forcées , à les m
^ excufer par des allégories. Il rend compte des ■
ioix les plus extravagantes avec la {implicite de la
Catd)E»UT. L'efprîtliitmain parait là danstoute fa mifère.
Si les brames obfervaient toutes les loix de leur Fé-*
dam , il n'y a point de moine qui voulût s'aiTujet-
tir à cet état. A peine te fils d'un braifae eft-il né,
qu'il eil l'efclave d^ cérémonies. On frotte fa lan»
gue avec de la poix réfine , détrempée dans de la
farine ; on prononce le mot Oxm : on invoque vingt
divinités avant qu'on Jui^it coupe le nombril ; mais
aiifli on lai Ait ^ -Viveti four commander aux bom-^
m^s ; & dè!s qu'il peut parler , on^lut fait fentir la
dignité de fon être. En effet, les bracmanes furent
lofigtems fouverains ^dîafls l'Inde , & la théocratie fut
établie dans cette ^afle contrée plus qu'en aucun
pays du monde.
, Bientôt on çxpofe l'enfant a k lune : ouprîe l'Etre
fuprême d'effacer les péchés que l'enfant peut avoir
cètnmis, quoiqu'il iie f6ît né que depuis huit jours : o»
adrelTe des antiennes au feu \ on donne à Fen&ht avec
a^^A^Pi^
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cent cérémonies \t^ nom dp CbtnifQ , <mi eft lo titrç
d'honneur des brames.
Dés qitc cet enfimt fMt oiardier , il pafTe ùl fie
à fe baigner & à rédler des prières. Il fait le (kcri?
fiœ des morts ; ft ce facrifiœ eft inftksé pour que
Brama donne à i'sme des ancsécres de V^nùait pue
demeore agréablç: dons d'ai^trf^ corps.
On fait des piières aux cinq vents qui peuvent
fortir par les cinq ouvertures du corps humain. Cela
n'efè pas (dus étrange que les prières récitées au
Dieu B^t par les bonnes TÎetlks dp Kome.
Nulle foiK^ion de la natui^ , nulle a^on chex
1^ brames fans prières. La première fois qu'on
1^ rafe la tête "et l'eaiBint , le pire dit au rafoîr dévo* l
tcsnent ^ Rafiér ; rJt/f mon fit eomtne Ut as raje h . 1
Soiêil ^ le Bie^ Indro. Il fe pourant après toot ft
que 'le Dkf» imbro eàt été autrefois rafë : maïs pour 1
le ibiell y cela n^eR: pas aifé i oomfvendre , à moins
que* les brames n'ayent eti notre JlpQliQn , que notrs
rept éTentôtts encor ùàs barbe.
Le réck dé tëutes ces cérémonies ferait aufii ^f
nuyeun qu'elles^ nous paraffTent Ridicules ; & dansf
leur aveuglement ils en difent autant des nôtres \\
mais il y a chez eux un myftère qui ne doit pas
être pafFé ibos liiehce : c'efr le- MatiHcba Macbom^
On fe donne par ce myftère fii nouvel être , unf
nouvelle vie.
L'amc eft fappolée être dana ia |K)itHiie , êc ç'e^
en effet te ftntiment de prefque toute ^antiquité. On
paffe la maîh die la' poitrine à la céte , en appuyant
fur le néff qu'on croît aller d'un de ces organps k
l'autre , & on conduit aînfî fon arme à fon cerv^u ;
quand on ^ ftt qàe fon ame eft bien montée , alors
le jeune homme s'écrie que fon ame A fon corps fonf
]|f|][j|ji,. WtfTTl — III II O'
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iÇS^fj/n^
s (58 D B ^' I -^ B Ei é
féunis à TEtre fuprômes & dit ; ^Je fnu moi - mime
une partie de la Divinité.
: * Cette opinibn acte eelle ctes phjs refpe(fhibîes phi-
lôfophes de. la Grèce v-de ces Stoïcien s 'qui ont élevée
la natore htrmaine au-dfiffos d*elle-inêin« , celle des:
àkv'tn^Antomm ,• & il fiiut avouer que lien n'était plui
capable d'înfpirer de grandes vertus. .Se, proire une;
partie de la Divinité , c'eft s4mpofer la loi de ne rien
foire qui ne foit digne de DiEU méniOv *
On trouve dans cette loi ,des iraomanes dix com-
mandemens , & ce font dix péchés à. évitçr. Ils font
divifés en trois efpèces , les péchés du corps , ceux
de b parole, ceux de Ja vojofftéi Frapper , tuer fon
prochain:, le .voler, violer les .femmes , ce -font le«:
péchés du corps ;.dHrtnw|er , jnsxï&t^ injâficr ,xe font
ks'î^échés de la|)ttiolei;iceux;dé la volonté confiflentî
àrfoyhaiter le ràal^ i regarder le bieç des Autres aveô
envie ; àrn'ctrc.pas .touché des mifères. d'awtrui. Ces
dix uomnianderaens. font pardonner îtous les rites ddi-
CBdcs. .On voit. évidemment queJaj'morale eft la mê-^^
me chez toutes les nationa civiJifées v&que les lifages:
les plus confacrés chez un peuple , paraiflent aux
a^k^egou extrav^âRS,Dti,haïSables. Les -rites établis
divjfent aujourd'hui Je. genre- humain „& la morale;
I^>réunit. > iv -•• , - .: ,., . • .
La fuperftiriott'Ji'empBcha jamais les briacmanestde
reconnaître un;DUEU.ajnique.-SifraZ'o« dans: fon quin-
zième livre dit qu'ils adorent un DiEU fupr^me, qu'ils:
gardent le fdence plufieurs années avant d'ofer par-
ler, qu'ils font fobiîes:, cbaft^', l^ftapéraTn s i, qu'ils vî-
\4tït dans la juftice,, <& qu'ils meur«i?^,.6nsf regret.
C'eft le témoignage quejçur t^nÛQnt St. Clément dfA-
kxandr^e, Apulée-, Porphire.» ffaliade ^ St. Ambroife.
ÎJ!oubliojis pas furtout qu'ils eurent 31 n paradis t^r-
relire , «Â.que les hommes ,qui abufère^ des bienfaits.
de<>DlEU furehtchaffés dp.ce jaaradû.^^, i^ -\ ,
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nç*
*«<*-
eSifel
I
D:e l' I -N.d b.
|:
. La chute -dt^ rfaomme dégénéré eff le fondement
de la théologie de prefque toutes les anciennes na-
tions. Le penchant naturel de Thorame à fe pl^ndre
du préfent , & à vanter le pafle , a fait imaginer par-
tout une efpèce d*âge d'or auquel' les fiécles de fer
ont fuccédé» Ce qui eft plus fingulier encore , c'eft
que le Vidam de9 anciens bracmanes enfeigne que
k premier homme fut Âdimo , & la première femme
ProcritL Adimo fignifiait Seigneur , & Procriti vou-
lait dire /a vie ,• comme Eva chez les Phéniciens & les
Hébreux fignifiait aufli la vie ou Uferfent. Cette coà-
fi>rmité mérite une grande attention.
Bk la Chine.
Oferons-nous parler des Chinois fans nous en rap-
porter à leurs propres annales ? elles font confirmées
par le témoignage unanime de nos voyageurs de diffé-
rentes feifles , jacobins , jéfuites , luthériens , calvinif-
tes, anglicans , tous intérefles àfe contredire. Il eft évi-
dent que Tempire de la Chine était formé il y a plus de
quatre mille, ans. Ce peuple antique n'entendit jamais
parler d'aucune de ces révolutions phyfiques , de ces
inondations , de ces incendies dont la faible mémoire
s'était coafervée & altérée dans les febles du déluge
àtDeucalion ^ & de la chute de Pbaéton. Le climat
de la Chine avait donc été préfervé de ces fléaux ,
comme il le fut toujours de la peûe proprement dite ,
qui a tant de fois ravagé TAfrique , TAfie & TEurope.
Si tjuelques annales portent un caradtère de certi-
tude , ce foQt celles des Chinois , qui ont joint , comme
on Ta déjà dit ailleurs , Thiftoire du ciel à celle de
la terre. Seuls de tous les peuples ils ont conftam-
ment marqué leurs époques par les éclipfes , par les
conjondtionsy des planètes ; & nos aftronomes qui ont
examiné leurs calculs , ont été étonnés de les trou-
ver prefque tons véritables. Les autres nations inven-
^ tèrent des fables allégoriques , & les Chinois écrivi-t
& E iij ^
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\\ '70
ja^j^^eé^^A
jmify fi
't'i^^
Dis LÀ CktiiTË.
lïi i ii^ I
Ttnl leur hiftoirc la plume & î'aftrolayè k la main ,
avec unefîmplidté dont on ne trouve point d'etemple
dans le refie de TÀ&à
Cbaqtie régné de léiîrs cmpèitnrs a été écrit pat
des conrcmporaing ; nnllie différente manière de comp-
ter parmi eux ; nulles chronol6giies qtii fe contredirent.
ths yoyagears miflionnai^es rapportent avec candeur
que lorfqu^ils parlèrent au fage empereur Cam-bi des
Variations confidérables dé la chronologie de la VuU
^a<te ^ des Septante , & des Samaritains , Cam-bi leur
répondit , EJlMpùJJiUé que ks Hfortstn fui vùêu crùyet
.fe combattent ? \
lès Chinois écrivaient (ur des tablettes légères de
bambou , quand lés Caldéens n'écrivaient encor que
ïur la bf ique ; & ils ont même encor de ces ancien-
nes tablettes que leurs vernis ont préTervées de la
potirrîture. Point dliiftoîre chçz eux avant cfellcs dé
leurs empereurs ; pteique point de fldions , aucun
prodige ^ nul bomme înfpirc qui fe difô demi-Dîeir
cfomme cbe^ les Egvptiéns & clieî les Grecs } dès que
te peuple é^rft ^ il écrit taîfonnablement
tï dîfftte fiirtout des autres nations , en ce que
itur hiftoîre ne fait aucune mention d*nn collège de
jprêtres qni aîfe jamais influé fut les loit. Lés Chinois
he remontent point jufqu*auit tems fauvages bu les
hommes eurent bcToîn é|u*on les trompât pour les con*
duîre. D'autres peuples commencèrent leur hîftoire
ptr l'origîné dti mûndé ; le ^end des Petrc» , le Sbafla
& le Vidam des lodSens , Sancb^nîaton , ManhboA^
^Bn , îufiju*à itéfiodè , lous retrtontent à Torigînc des
trhofts , i la fbTtnation de TuniVérs. Les Chinois n'ont
ï)0Tnt eu c^tte fcfie ; bût hîftoirt n'cft que celle des
tems Wftoïi'qoe^.
tVft ICI qtfil feut ftiltocrt aippiîqueîr notre grand
^incipe, qiB''Qaeiiati6n dont les prenâères dironiques
H
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DblaChimb. 71 if
tUe^çnt l'cTÙftence d'un vafte empire puiflant & fage >
doit avoir été raflemblée en corps de peuple pendant
des fiécics antérieurs. Voilà ce peuple qui depuis plus
de quatre mille ans écrit journeliement fes annales.
Encor une fois , n'y aurait-il pas de la démence à ne
PAS voir que pour être exercé dans tous les arts qu'exige
la fociété des hommes , & pour en venir non-feule-
ment jufqu'à écrire , mais jufqu'à bien écrire , il avait
falu plus de tems que l'empire chinois n'a duré , en
ne comptant que depuis l'empereur Fa4>i jufqu'à nos
jours ? Il n'y a point de lettré à la Chine qui doute
que les cinq Kings n*ayeat été écrits deux mille trois
cent ans avant notre ère vulgaire. Ce monument pré-
cède donc de quatre cent années les premières obfer-
vations babiloniennes envoyées en Grèce par Ca/Iijl
tbêne. De bonne foi fied-il bien à des lettrés de Paris
de contefter l'antiquité d'un livre chinois , regardé com*
me autentique'par tous les tribunaux de la Chine ? («)
Les premiers rudimens font en tout genre plus
lents chez les hommes que les grands progrès. Sou-
venons^nous toujours que prefque perfonne ne favait
écrire il y a cinq cent ans , ni dans le Nord , ni en
Allemagne , ni parmi nous. Ces tailles dont fe fervent
encor aujourd'hui nos boulangers , étaient nos hiéro-
glyphes & nos livres de compte. Il n'y avait point
d'autre arithmétique pour lever les impôts , & le nom
de taille ratteite encor dans nos campagnes. Nos cou-
tumes capricieufes , qu'on n'a commencé à rédiger par
écrit que depuis quatre cent cinquante ans , nous ap-
prennent aflèz combien l'art d'écrire était rare alors. Il
n'y a point de peuple en Europe qui n'ait fait en dernier
lieu plus de progrès en un demi-iiécle d^ns tous les
arts , qu'il n'en avait fait depuis les invafions des Bar-
bares jufqu'au quatorzième fiécle.
Je n'examinerai point ici pourquoi les Chinois , par^
venus à connaître & à pratiquer tout ce qui eïl utile
( a ) Voyez les lettres da favant jéfuite Parennin,
E iHj ^_
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De là Chine;
f
k
'
1
9. h foéiété , n'ont pas été auffl loin que nous allons
aujourd'hui dans les fciences. Ils font auffi mauvais
phyfjciens , je l'avoue, que nous Tétions il y a deux
cent ans , & que les Grecs & les Romains l*ont été ;
mais ils ont perfedionné la morale ^ qui eft la première
des fciences. »
Leuir vafte & f^oputeux empire était déjà gouverna
tomme une famille , dont le' monarque était le père ,
& dont quarante tribunaux de Icgiflâtion étaient re-
gardés commt les fVéres aines , ()uand nôos étions er-
rans en petit nombre dahs la forêt des Ardennes.
Leur religion était fimple , fage , àugufte , libre dé
toute fuperftttion & de toute barbarie , quand nous
n'avions pas même encor des Tentâtes à qui des drui-
des facriiiaient les enfans d^ nos ancêtres dans dé
grandes mannfcs d'ofiér*
Les empereurs chinois bAfraîént éiix-mémes au DlEÛ
tie l'univers , au Chang-ti ^ au Tien ^ au principe de*
toutes chofes , les prémices des récoltes deux fois l'an-
née ; & de quelles récoltes encor ? de ce qu'ils avaient
femé de leurs propres mains. Cette coutume s'eft fou-
tenue pendant quarante fiécles , au milieu même des
révolutions & des plus horribles Calamités.
Jamais la religion dés empereurs & àts tribunaux
he fut deshonorée par des impoftures , jamais trou-
blée par les querelles du facerdoce & de l'empire ,
jamais chargée d'innovations abfurdes qui fe combat-
te,nt les unes les autres avec des argumens auflî ab-
furdes qu'elles , & dont la démence a mis à la fin le
l:îOîgnard aux mains des fanaticjues conduits par des
f*dieux. C'eft par-là furtout que les Chinois l'em-
portent fur toutes les nations de l'univers.
Lriir àojtrûtzéé ^ que nous appelions Confie a us ^
hMmagina ni nouvelles opinions , ni nouveaux rites.
W^}^-^ ^ ■■ ■ ■>> Ju>> Akn ,w :i^'^ ■
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jirf^u
aÉK!
ÉË!
I
De la Chine.
U ne fit nf rînfpîré ni le prophète. C'était un magiftrat
qui enfeignait les anciennes loix. Nous difons quel-
quefois, & bien mal - à - propos , /a religion de Confu-
dus y il n'en avait point d'autre que celle de tous
les empereurs & de tous les tribunaux , point d'autre
que celle des premiers fages. 11 ne recommande que
la vertu ; il ne prêche |pcun myftère. Il dit dans (on
premier livre , que pour apprendre à gouverner il faut
paffer toiîs fes jours à fe corriger : dans le fécond ,
il prouve que Dieu a gravé lui-même la Vertu dans
le cœur de l'homme ; il dit , que l'homme n'eft point
né méchant , & qu'il le devient par fa faute : le troi-
fiéme eft un recueil de maximes pures où vous ne
trouvez rien de bas , & rien d'une allégorie ridicule.
Il eut cinq mille difciples , il pouvait fe mettre à la
tête d'un parti puiffant , & il aima mieux inftruire le»
îiommes que les gouverner.
On s'eft élevé avec force dans un Èffat fur tbif-
toire générale , contre la témérité que nous aVons eufc
au bout de l'Occident de vouloir juger de cette cour
orientale , & de lui attribuer l'athéifmc. Par quelle
fureur en effet quelques-uns d'entre nous ont-ils pti
appeller athée un empire dont prefque toutes les loix
font fondées fur la connaiffance d'un Etre fuprême ,
rémunérateur & vengeur ? Lts infcriptions de leurs
teifiples , dont nous avons des copies auten tiques ^
font : («) Au premier principe fanî commencement
ftff fans fin. Il a tofdt fait , il gmiverne tout. Il eji
infiniment bon , infiniment jujie ,• il éclaire , ilfoutientj
il règle toute la nature.
On a reproché en Europe aux jéfuîtes qu'on n'ai-
mait pas , de flatter les athées de la Chine. Un fran-
çais nommé :^a/gro^, évêquc de Conon , qui ne favait
pas un mot de àhinois , fut député par un pape pour-
f. (b) Voyez fcuîemeut les efli^mpes gravées dans la col-
^^ ledion du iéiuite Du Haide.
I
fH^m^
rip^iJali-iUi^i
'ippf
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«ÉftÉi
^^f^^i
De la Chine.
aller jugcf le procès fur les lîctix ; il traita Confucim
d'athée , fur ces paroles de ce grand -homme , le ciel
fn^a donné la vertu , Pbomme ne peut me mdre. Le
plus graml de nos faints n'a jamais débité de maxime
plus célefte. Si Confucîus était athée , Coton > & le
chancelier de VHêpital Tétaient auffl.
»
Répétons ici pour faire rougir la calomnie , que les
mêmes hommes qui foutenaient contre Bayle , qu'une
fociété d^athées était impoflible , avançaient en mê-
me tems que le plus ancien gouvernement de la terre
était une (bcié*-é d^athées. Nous ne pouvons trop nous
&ire honte de nos coatradidtions.
Répétons enCor que les lettrés chinois , adorateurs
d'Hn feul Dieu , abandonnèrent le peuple aux fuper&
titions des bonzes. Ils reçurent la feéte de Laokium
& celle de Fo & pluGeurs autres. Les magiftrats fenti-
rent que le peuple pouvait avoir des religions diffé-
rentes de celles de l'état , comme il a une nourriture
plus groffière ; ils fouffrirent les bonzes & les contin-
rent Prefque partout ailleurs' ceux qui faifaient le mé-
tier de bonzes avaient l'autorité principale.
Il efk vrai que les loîx de la Chine ne parlent point
de peines àc de récompenfes après la mort ; ils n*ont
point voulu affirmer ce quMls ne favaient pas. Cette
différence entr'eux 6S: tous les grands peuples policés
eft très étonnante. La doârine de Tenfer était utile ,
& le gouvernement des Chinois ne l'a jamais admifc.
Us fe conlentèrent d'exhorter les hommes à révérer
le ciel , & k être juftes. Us crurent qu'une police
cxa^îte toujours exercée , ferait plus d'effet que des
opinions qui peuvent être combattues , & qu'on crain*
diait plus la loi toujours préfente , qu'une loi à
venir. Nous parlerons en fon tems d'un autre peuple ,
infiniment moins confidérable , qui eut à-peu -près
la même idée, ou plutôt qui n'eut aucune idée , mais
Mfjjh^Mt mMÊBmi* 1 nt^^
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Db la Chiïts.
7Î I
qui fét conduit pair des voies inconnues aux autarel
hommes. > ^
RéAimons ici feulement que l'empire cbiaeis flibfif-
tait avec fplendeur quand les Caldcens commeoi^ient
le cours de ces dix -neuf cent années d'obfervations
agronomiques envoyées en Grèce par Cailifthine. Les
brames régnaient alors dans une partie de llnde ; les
Perfes avaient leurs loix ; les Arabes au midi , les Scy-
thes au feptentrion, habitaient (bus des tentes. L'Egypte
dont nous allons parler , était un puiiTant royaume.
De I' Egypte.
tl me parait Tenfible que les Egyptiens , tout anti-
ques qu'ils font , ne purent être raffemblés en corps ,
cîvilifés , policés , induftrieux , puiflans , que très long-
tems après tous les peuples qui ont paffé en revue.
La raifon en eft évidente. L'Egypte jufqu'au Delta
cft refTerrée par deux chaînes de rochers , entre Ict
quels Je Nil fe précipite , en defccndant d'Ethiopie
du midi au feptentrion. Il n'y a des cataraAes du
Nil à fes embouchures en ligae droite que cent foi-
xante lieues de trois mille pas géométriques , & la
largeur n'eil que de dix à quinze & vingt lieues jufqu'au
Delta, partie baffe de l'Egypte, qui embraffe une éten-
due de cinquante lieues d'orient en occident. A la droite
du Nil , font les déferts de la Thébaïde , & à la gaucl^e
les fables inhabitables de la Lybie jufqu'au petit pajfs
où fut bâti le temple à'Ammon.
Les inondations du Nil durent pendant des fiécles
écarter tous les tolons d'une terre fubmergée quâ-
tre mois de l'année ; ces eaux croupjffantes s'accu».
mulant continuellement , durent longtems faire tin
marais de toute PEgyptc. Il n'en eft pas ainfi des
bords de l'Euphrate , du Tigre , de Plnde , du Gange
& d'autres rivières qui fe débordent auffi , prefque
chaque année en été , à la fonte des neiges. Leurs
débordemcm ne font pas fi grands , & les vaftes plai-
n
ggft'j**.
■"=w«*Sl«
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HÇSMila
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De l' E g.y p t e.
***^
nés qui les envirotinent , donhent aDx cultivateurs
toute la liberté de profiter de la fertilité de la terre.
Ôbfervons ftrtout que la pefte , ce fléau attaché
^u genre animal , régne une fois en dix dns au moins
en Egypte ; elle devait être beaucoup plus deftru<^ive
quand les eaux du Nil en croupiflant fur la terre , ajou-
taient leur infe<ftion à cette contagion horrible ; &
ainfi la population de TEgypte dut être très faible
pendant bien des fiécles.
L'ordre naturel des chofes femble donc démontrer
invinciblement que l'Egypte fut une des dernières
terres habitées. Les Troglodites nés dans ces rochers
dont le Nil eft bordé , furent obligés à des travaux
aufifi longs que pénibles pour creufer des Canaux qui
reçuffent le fleuve , peur élever des cabanes & les
réhaufler de vingt -cinq pieds au-deflus du terrain.
C*e{t-là pourtant ce qu'il falut faire avant de bâtir
Thèbes aux prétendues cent portes , avant d'élever
Memphîs , & de fonger à conftruîre des pyramides.
Il eft bien étrange qu'aucun ancien hiftorien n'ait fait
une réflexion fî naturefle.
Nous avons déjà obfervé que dans le tenis où Von
place les voyages d* Abraham , l'Egypte était un puif-
fant royaume. Ses rois avaient déjà bâti quelques-unes
de ces pyramides , qui étonnent encor les yeux &
l'imaginatioo. Les Arabes ont écrit que la plus grande
fut élevée par Saurid^ plufieurs fiécles avant Abra-
ham. On ne fait en quel tems fut conftruite la fameufe
Thcbes aux cent portes, la ville de Dieu, DiofpoUs.
Il paraît que dans ces tems reculés les grandes villes
partaient le nom de villes de Dieu comme Babilone.
Mais qui poura croire que par chacune des cent portes
il fortait deux cent chariots armés en guerre , & dix
mille combattans ? Cela ferait vingt mille chariots, &
AMI million de foldata; & à un foldat pour cinq per-
sonnes ^ ce nombre fuppofe au n^oins cinq millions
T^«pr-
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I> fr L' E G y t T B.
2Î
de têtes pour une feule vfllc, dans un pays qui n'eft
pas fi grand que PEfpagne ou que la France , & qui
n'avait pas , félon Diodore de Sici/e\ plus de trois mil-
lions d'habicans , & plus de cent foixante mille foldats
pour fa défenfe. Diodore au livre premier , dît que
TEgypte était fi peuplée , qu'autrefois elle avait eu
jufqu'à fept millions d^abitans , & que de fon tems
elle en avait enoor trois millions.
Vous ne croyez pas plus au;t conquêtes de Sifoftris
qu'aux dix millions de foldats qui fortent par les cent'
portes de Thèbcs. Ne penfez-vous pas lire l'hiftoîre'
de Picrocoie, quand ceux qui copient Hérodote ^6u$
difent que le père de Séfojhis fondant fes cfpérance»
fur un fonge & fur un oracle , deftina fon ^s à fub*
juguer le monde ; qu'il fil élever à fa cour dans le
métier des armes tous les enfhns nés le même jour
que ce fils , qu'on ne leur donnait à manger qu'après
qu'ils avaifertt couru huit de nos grandes lieues, 0«)
& qu'enfin Sèfqftris partit avec fix cent mille hom-^
mes, vingt-fept mille chars de guerre, & alla con-
quérir toute la terre , deputaJ'Inde jufqu'aux extrê-
mités du Pont-Euxin , & qù^ fubjugua la Mingrélîe'
& la Géorgie- appellées alors la Colchide. Hiroddte
ne doute pas que Séfojhris n'ût laiffé des colonies. en
Golchidef, parce qu'il a vu à Colchos des homnies
bafanés , avec des cheveux crépus , reflemblans aux*
Egyptiens. Je croirais bien plutôt -que ces efpèces de-
Scythes des bords de la mer Noire & de la mer Caf-
pienne , vinrent rançonner les Egyptiens quand ils'-
ravagèrent fi longtems l'Afie avant le règne de Cjh^uf.
Je croirais qu'ils emmenèrent avec eux des efclaves
d'Egypte , ce vrai pays d'efclaves , dpnt Hérodote put'
voir , ou crut voir les defcendans en Colchide. Si cesi
Colchidiens Vivaient en effet la fiiperftition de fe faire
circoncire, ils avaient probablement retetiu cette cou-
(a) Quand un réduii^tt ces huit lieues à fix, on ne retranche-
; raie qu*un quart du ridicule. . ' -
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l
7^ ^ D ^ j: E G Y p •? «.
tume d'Egypte > comme iLardva prçfi|i^ toAJQuii owc
peuples du Nofd de prendre les rt(ff 4(e^ mooHS çiv4<-
Uféçs qu'ils ayaiçnt yamçues.
î
Jamais les Egyptiens dans les lem3 connut ne btent
redoutables ; jamais ennemi n'entra ehezeux qu'il ne
les fubjuguàt. Les Scythes oommenoèrent; après tes
Scythes vint Nabucodomfor » qui o^Hiqnit i'Egypte
fans réfiilance ; Cyrut n'eut qu'à y envoyer un de
fi^ lieuienans ; révoltée fous ùmb^f , il ne &Iut
qu'une campagne pour la foume^tr^ : (k ce Càmbyfi
eut tant de mépris pour les Egyptiens • qu'il tua
leur dieu J^pis en leur préfence. Ocèm redulift 1'^
gypte en province de fon royaume. AIexuf$dr£^ Cîfar ,
Aumfte 9 le calife Omtvr conquirent l'Egypte avec une
égale facilité. Ces mimes peuples de Colçhos fous le
nom de Mammelucs revinrent encor s'emparer de i'E^
gypte du tems des croifades ; enfin Silim I conquit j
l'Egypte en une feule campagne , comme tous ceuK &
qui s'y étaient prélentés ; il n'y a jamais eu que nos ^
feuls croifés qui fe foient fait battre par ces Egyp*
tiens 9 le plus lâche d^tous les peuples , comme on
l!a remarqué ailleurs 4 mais c'eft qu'alors ils étaient
gouvernés par la milice des Mammelucs de Qolchos^
n tSk vrai qu'un peuple humilié peut avoir été au«
trefois conquérant , témoins les Qreçs & les Romains*
Mais nous fopimes plus fi^rs ' de Tançienne gran^
deur des Romains & des Grecs que de celle de Sé-^
fafirù,
Je ne nie pas que celui qu'on appelle Sifojhii n'ait
pu avoir une guerre, beureufe çontxe quelques Ethio^
piens y quelques Arabes , quelques peuples de la fhé-^
nicie. Alors dans le langage des exagérateurs il aura
conquis toute la. terre. U n'y a point de t^ation foh**
juguée qui ne prétende en avoir autrefois fubjugué
d'autres. La vaine gloire d'une ancienne^ fupériorité
confole de l'humiUation préfente^
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I
D E t' E a Y p T E. 79 î?
Hérodote racontait ingénument aux Gtecs ce qw
les Egyptiens lui avaient die ; mais comment , en ne
lui pariant que de prodiges , ne lui dirent^ils rien des
femeufes plaies d'Egypte , de ce combat magique en-
tre les forciers de Pharaon & le nûniftife du Dieu
des Juifs y & d'une armée entière engloutie au fond
de la mer Rouge fous les eaux éleyéjesi conune des
montagnes à droite & à gauche , po^r UiCTer pafler
Ips Hébreux , lefquelles en retombant fubfnergèrent
les Egyptiens ? C'était apurement le plus grand évc«-
ilement dans l'hi&oire du monde : ni Hér^doU ^ ni
Manetbon , ni Ératojibénes , ni %uGun des Qtsai û
grands amateurs du merveilleux , & toujours «n toi-^:
refpondancc avec l'Egypte , n'ont parlé de ces mira-
cles , qui devaient occuper la mémoire de toutes les
générations. Je ne fais pas affurément cette réflexio»
pour infirmer le témoignage des livres hébreux , que
je révère comme je dois. Je me borne à m'étonner
feulement du filence de tou§ les Egyptiens & de tous
les Grecs. DiEU ne voulut pas fans doute qu'une
hiftoire fi divine nous fût tranfmilè par aucune main:
profane.
De la langue des Egyptiens, et db
LEURS SyMBOJiES*
Le langage des Egyptiens n'avait aucun rapport
avec celui des nations de J'Afie^ Vous ne trouvez
chez ce peuple ni le. mot H'Moni ou d' j^doma y ni
de Êal ou Èaal , termes qui fignifient le Seigneur ;
ni de Mitra y qui était le foleil che2 les Peifes ; ni
ât Melcb y qui fignifie roi en Syrie , ni de Sbak y qut
fignifie la même çhofe chez les Indiens & chez les
Perfans* Vous voyez au contraire que Pharao était
le nom qgyptien qui répond, à roj. Osbirtt iQfirif)
répondait au Jlitra des Perfans ; & le mot vulgatfe
Oh fi^ifiait le foleiU Les prêtres caldéens s'appel-
lajent Mag , ceux des Egyptiens (^oen y au rapport
de Diodore de Stc^e. Les hiéroglyphes , les cataxftèt-
\
^4
"•m^
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% 8o Langue et Symboles jf
tes alphabétiques d'Egypte que le tems a épargnés &.
que nous voyons ertcor gravés fur les obélifque»^
n'ont aucun rapport à ceux des autres peuples.
Avant que les hommes enflent inventé les hiéro,
glyphes , ils avaient indubitablement des iîgnesf repré^
fentatift ; car en effet, qu'ont pu faire les premiers
hommes finon ce. que nous feifpns quand nous fem-
mes à leur place ? Qu'un enfant fe trouve dans un
pays dont il ignore la langue , il parje par fignes;
fi on ne l'entend pas , il delîîné fur Un mu^ avec un
charbon les chofes dont il a befoin , pour peu qu'il
ait la moindre fagacité.
On peignît donc d'abord groflTiIrement ce qu'on
voulut feire entendre , & l'art de deflîner précéda fans
doute l'art d'écrire. Ceft ainfi que les Mexicains &
les Péruviens écrivaient ; ils n'avaient pas pouffé l'art
plus loin. Telle étsit la méthode de tous les pre-;
miers peuplés poHcés, Avec le tems on inventa les
figures fymboliques : deux mains entrelaffées fignifiè-
rent la paix ; des flèches repréfentèrent la guerre;
un œil fignifia la Divjfîté ; un fceptre marqua la
royauté ; & des lignes qui joignaient ces figures ex-
primèrent des phrafes courtes.
Les Chinois inventèrent enfin des caradlèrcs pour
exprimer chaque mot de leur langue. Mais quel
peuple inventa l'alphabet , lequel en mettairt (ous
les yeux les difFèrens {Jons qu'on peut articuler , don-
ne la facilité de combiner par écrit tous les mqt^
poffibles ? Qui put s^inù apprendre aux hommes à
graver fi aifément leurs penfées ? Je ne répéterai point
ici tous les contes des anciens fur cet art , qui éter-
nife tous les arts ; je dirai feulement qu'il a falu bien
des fiécles pour y arriver.
^ Les choen , ou prêtres d'Egypte, continuèrent long-
t^m? d'écrire çn hiéroglyphes , ce qui eft défendu par
W ^^
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DES EqYFTIÇNS. 3J
> - .
Ip fécond article de la loi Aps Hébreux \ & qpap^
l^s peuplées d'Egypte çyrent des caradèrej^ alphabe*
tiques , les choen en prirent de différens qu'ils apr
pellèrent facrés , afin de mettre toujours une barrière
entre eux & le petip}ef Les mages , les bran]es en
ufaient de même , tant Tart de le cacher aux hom?
mes $1 fcmblé néceffaire pour le^ gouverner., {fon-
feulement çps phojen avaient d.es caraifjtèrcs qpi n'apr
partenaient qp'à egx , mais ils avaient encor confer^
vé l'ancienne langue di^'Egypte , quand ie tems ayak
changé celle du vulgaiçc.
Manitbon cité dans Enfèbt parle de deux colotv
nés gravées p^r Tbaut , le premier Hernies , en car
raétères de la langue facrée. Mais qui fait en quel
tems vivait cet ancien Hermii ? Il eft très vraifem-
blable qu'il vivait plus de huit cent ans avant le
8 tems où Ton place Moife : car Sancboniaton dit avoir
lu les écrits de Thaut , faits ^ dit-iU il y a huit çet^t
ans. Or Sancbeniaton écrivait en Phénicie , pays voi-
iin de la petite contrée cananéenne , mife à feu &
à fang par Jofui , félon les livres juifs ; s'il avdit été
contemporain de Moife , ou s'il était venu après lui ,
il aurait fans dopte parlé d'un homme fi extr^ordî-
naire , & de fcs prodiges épouvantables ; il aurait
rendu témoignage à ce fameux légiilateur Juif, &
Eufèbe n'aurait pas manqyé d,e fe prévaloir dç; ayçu;|:
de SancbQnifi$ont
Quoi qu'il en foit , les Egyptiens gardèrent furtoijt
très fcrupuleufement leurs premiers fymboles. Ceft
une chofe curieufe de voir fur leurs raonumenç un
ferpent gui fe mord la queue , figuranjt les douze mois
de l'année j & ces doyze mois exprimés chacun pa|r
des animaux , qui ne font pas ceux du Zodiaque que
nous connaîflbns. On voit encor les cinq jours ajou-
tés depuis aux douze mois fous la forme d'un petit
ferpent;, fut lequel cinq figures font aflifes ; c'eft qn
épervier.nn hofnme^un chien, un lion & un ibis.
£jfdifuriesniœurf,i^é'c.T6m:h V ' ^
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9
8» Mo NU M E N s
On les voit deflinés dans Kirker d'après des mona-
mens confervée à Rome. Ainfi prefque tout eft fym-
bole & allégorie dans l'antiquité.
Des mokumens des Eotptisns.
1\ eft certain qu'après les fiécles où les Egyptiens
fertiiiférent le fol par les faignées du fleuve , après
les tem& où les villages commencèrent à être chan-
gés en villes opulentes , alorslks arts néceifaires étant
perfectionnés , les arts d'oftentation commencèrent à
être en honneur. Alors il fe trouva des fouverains
qui employèrent leurs fujets , & quelques Arabes voi-
fms du lac Sirbon , à bâtir leurs palais & leurs tont*
beaux en pyramides , à tailler des pierres énormes
dans les carrières de la haute Egypte , à les embar-
quer fur des radeaux jufqu'à Memphis , à élever fur
des colonnes maffives de grandes pierres plates fans
goût & fans proportions. Ils connurent le grand , &
jamais le beau. Ils enfeignèrent les premiers Grecs ;
mais enfuite les Grecs fiirent leurs maitres en tout
quand ils eurent bâti Alexandrie.
II eft trifte , que dans la guerre de Céfar , la moitié
de la fameufe bibliothèque des Ptolomeet ait été brû-
lée , & que l'autre moitié ait chauffé tes bains des
mufulmans , quand Omar fubjugua PEgypte. On eût
connu du moins l'origine des fuperftitions dont ce
peuple fut infeâé » le chaos de leur philofophie,^ quel-
ques-unes de leurs antiquités & de leurs fciences.
Il faut abfolument qu'ils euffent été en paix pen.-
dant plufieurs fiécles , pour que leurs princes éuffent
le tems & le loifir d'élever tous ces bàtimens prodi-
gieux , dont la plupart fubfiftent encore*
Leurs pyramides coûtèrent bien des années & bien
des dépenfes ; il falut qu'une nombreufe partie de la
nation avec des efclaves étrangers fut longtems em- |^
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I IJJÎ ^ Ç ^,Y,P T I E N 5. 83
ployéc à çp4 ^uvraeçs immçnfçs. Ils furent élevés pair
le deftatifme, là Vanlfé', ip fervîludé , & la fuperftiV
tion/Èn çfPft^^îI n'y avait gu'un i^oi defpotîque qu}
pût fpfcerV
eft î^iif
un roi
élever
La vaâJté f avaii part fana doute ; c'était che^ l^i
anciens roig d*Egypte à qui élèverait la plus belle pyrar
midç à fon père ou à lui-même ; la fervitude procura
la main-^-œuvre. Et quanti 1^ fuperftition , on fail
que ces pyramides étaient des tombeaux , on fait quo
les chochamatim ou choen d'Egypte , c'eftrà-dire le^
prêtres j avaient perfp^tdé 1^ nation que Tame rentre«
rait dans fon €ot^s au bout de mille années. On vouy
lait que le corps fût mille ans entiers à Tabri de tout(|
corruption t <?eft pourquoi on ^embaumait avec ui^
foin fi fcrupuîeux ; & pour le dérober aux accidena ^
on Renfermait dans une mafTç^d.e pierre fana iffuc^
]Les rois , les grands fe dreflfiiént des tombeaux danf
|a forme la moins en orSfe aux injures du temt. Leuri
corps fe (ont conferves au-delà des efpéranccs humait
nçs. Nous ^ydns aujourd'lnii des momies égyptiennes
de plus dt quatre mille années. Dps çadayres ont dv^xé
autant que des pyramides.
Cçj^te opinion d^une réOjrre^on après dix iiécles
pafla depuis chez les Grecs difciples des Egyptiens ,
& chez ips Romains iifciples des Grecs. On la re*
tropv^e dans le fixîéme livre de V Enéide ^ qui n'eft
Îue ia defcnptîon des myftères à'IJîs & de Çir^
^eujiné.
Jlas^of^ef M tm/le rotam volvere ^ér ifnnos
J^etff^fglff jd fiipùtm Dpus aàvocat agmine tn^fi
^lUa ut nunpres fufir9 £^ foti'ffPW revifanU
, Etfe V^ntrpiJuifrt jçnfyî^jb çkçi Us chrétiens , qui
g ^ItfWt te ,f q6l^ç df ^ j^\ > feôç des mille.
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idk— iMjiiaiii iu mÊiidUàiii,,.iii^ — i iw^fc
84 MONUMENS DES EOYPTIEKS.
1
naires Ta fait revivre jufqu'à nos jours. C'eft ainfi que
plufieurs opinions ont fait le tour du monde. En voilà
afTez pour faire voir dans quel efprit on bâtit ces py-
ramides. Ne répétons pas ce qu'on a dit fur leur archi-
teâure & fur leurs dimenjions i je n^xamine ^ue ThiC.
toire de l'efprit humain.
Des rites égyptiens, et de la
circoncision.
Premièrement les Egyptiens reconnurent-ils un Dieu
fupréme ? Si on eût fiiit cette queftion aux gens du
peuple , ils n'auraient fu que xépondre ; fi à des jeu*
nés étudians dans la théologie égyptienne, ils auraient
parlé longtems fans s'entendre ; fi à quelqu'un des
fages confultés par Pytbagore^ par Platon , pa^^P/«-
tarqtie , il eût dit nettement qu'il n'adorait qu'un
Dieu ; il fe ferait fondé fur l'ancienne infcriptîon de
la ilatue d'Ifis , Je fuit ce qui eft s & cette autre, Je
fuis tout ce qui a été ^ qui fera f nul mortel ne pour a
lever mon voUe s il aurait fait remarquer le globe
placé fur la porte du .temple de Memphis , qui
repréfentait l'unité de la nature divine fous le nom
de lùtef. Le nom même le plus facré parmi les
Egyptiens était celui que les Hébreux adoptèrent
T ha bo. On le prononce diverfement ; mais
Clément d'Alexandrie aiTure dans fes ftromates ,
^ue ceux qui entraient dans le temple de Sérapis
étaient obligés de porter fur eux le nom de i ba
bo , ou bien celui de i^ba bou^ qui fignifie le Dieu
étemel. Les Arabes n'en ont retenu que la fyllabe
bou , adoptée enfin par les Turcs , qui la prononcent
avec encor plus de refpeét que le mot allqff ; car ils
fe fervent à'allab dans la converfation , & ils n'em-
ployent bou que dans leurs prières. Difons ici en
paflant que quand l'ambafladeur Turc Said Effendi
vit repréfenter à Paris le Bourgeois Gentilhomme ^ &
içette cérémonie ridicule dans laquelle on le fait Turc ,
nv quand il entendit prononcer le nom facré bou avec
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I
iisstSmiika
?y^.^
1
R I TE S i OY P T I E k S ^ ^c. 85
dérifion & àvçc des polturës extravagantes , il regarda
ce divertif&tiftnt oomme la prôfimation la plQS àhù*
mînabk. ': - <. r
Revenons. Les prêtres d*Egypte nourrîflaîcnt un
bœuf facré , un chien fkcré , un crocodile faeré !
oui ^ & les Romains eurent auili des oies facrées ; ils
eurent des Dieux de toute efpèce ; & les dévotes
avaieilt parmi leurs pénates le Dieu de la chaîfe per-
cée , Dium Jierctaium , & le Dieu Pet , Deum crépie»
tum : mais en reconnaiflaient-ils moins le Deum opti^
mum maximum , le maître des Dieux & des hommes?
Quel efl le pays qui n'ait pas eu une foule de fuperf«
titieux & un petit nombre de fages ?
Ce quW doit furtout remarquer de TEgypte & de
^ toutes les nations , c'eft qu'elles n'ont jamais eu^d'o-
Spinions confiantes , comme elles n'ont jamais eu de
loix toujours uniformes , malgré l'attachement que. les
" hommes ont à leurs ancie^f ufiiges. Il n'y a d^immua-
ble que la géométrie ; tout lé refte eft une variation
continuelle.
Les favans difputent & d]Q)uteront. L'un aflure
que les anciens peuples ont tous été idolâtres , l'autre
le nie* L'un dit qu'ils n'ont adoré qu'un Dieu fans
fimulàcre , l'autre qu'ils ont révéré plufieurs Dieux
dans plu(ieurs fimulacres ; ils ont tous raifon ; il n'y a
\ qu'à diflinguer les tems &,les hommes qui ont changé ;
rien ne fut jamais d'accord. Quand les Ptolômits &
les principaux prêtres fe mSquaient du bœuf Apis , le
peuple tombait à genoux devant lui. \
' Juvenal a dît que le$ Egyptiens adoraient des bî-
. gnons : mais aucun hiftorîen ne l'avait dît. Il y -a Wen
de la différence entre un oignon facré & un oignon
Dieii ;?on tfadore pas tout ce qu'on place , tout ce
, que J'on confacre fur un autel. Nous lîfons dans Cici-
" ron que les hommes qui ont cpuifc toutes les fuperf-
_ F iij _
r
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fe I f E s lÊ G V I î I B N s ,
fcitions tte foDt poii;^ parvçnjqig i?nçor<» cdte ^e man-
kér leurs Dieux ^ & qùô c'cft la feule abfurdité quî
leu^ manque.
L^ ci<l$t)i)<iîflon î^f^ni-èîle'isies'Ëgyp tiens , dés Arabe?,
bu des JËthiopienfif ? Je .n'<«i. fais rien. Que peux qui
je faVent le difentt Tout çç q^ie je fais , c'eft que
.les pîêtrfes de l*antiquicé,s*îï»prwnaîent fur le corps
-des ifliarq^s de Iç^r tortfécratiôn , comme àjcpuis on
în trqua d'un fer afdeht la main des foldats Romains.
La dea.nicriftcateurs fe tailladaient le qprps , comme
-fieéîit depuis les prêtres de Bellone : ici ils fe faifaient
eunuques ^ comme les pr.étres de Cibèle,
' 'J6iè Vieli Tpbinît au tout par un principe de ftnté
quie leî? Ethiopiens , les Arabes , léi Egyptiens fe
• çirfconcÎTfent. On a dît qu'ils avaient le prépuce trop
lon^. Mais fi on 'peut juger. d^uhe natidrt par un în-
aividù ^ j'ai vu un jeiine Ètliiopîèft i, qiiî hé hors
-•de fa j^atHe n'avait point été circoncis ; jé peux
aflurer que fort prépuce était précifément comme les
hiàtresi
Je ne fais pas cj'uetle nation s'avîfa la première de
porter en procefïïon le Kttis & le PhaHum , c'eft-
a-dîie îa reprércntatîfjn des fifînes diftîntflîfs des anî-
maux mâles & fenselles ; cérémome aujourd'hui in-
décente , aucreffiTS facrée. Les Egyptiens eurent ceEte
coutume \ on oFErait 4ux Dieux des prémices , on
leur inimoLijt ce gu'ôn avaft de plus précieux. Il
pi Tint naturel & jutle que !es pt êtres oflFrtTfent une
légère purtîctde l'organe de la génération à ceux
par qvi tout s'en^endraît. Les Êthîopîêns , ïès Ara-
bes citGÔncîrent aulTi leurs Biles , en coupaftt une
très I^^ére partie des nymphes \ ce qui prouve bien
^que la fanté ni la netteté ne pouvaient ^tr'e la rai-
fan de cette cérérnonjc ; car afTurémeiit utife jfîilc
încîrconeife peut ctrô auïïi propre qu'aune citcbinciiTe,
"■iprwMU
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|<PN^
Quand .Içs rPCçtrçs d'Egypte curient confâcré cette
opération ,' leurs initiés Ta fubirent aufli ; maïs avec
le tdms on abandonna aux feuls prêtres cette mai^
que diftindive. On ne voit pas qu'aucun Ptoloméf
fe foit fait circpncire , & jamais les ayceurs Rom^int
ne flétrirent le peuple Égy^tîcii'du npm WAp^lla
qu'ils donnaient aux Juifs. Ces Juifs avaiené pris* I4
circoncifion des Egyptiens « avec une partie de leur^
cérémonies. îls l'ont toujours* ^nfcrvée , aînfi que
les Arabes & les éthiopiens. Les Turcs s'y font fou-
rnis , quoiqu'elle né foit pas ordonnée dans l'AlCp-
ran. Ce n'efl quhiti ancien uf^ge qui coihmen(;a pat
la fuperllitîon , & qui sf'eft côn|èrvc par la coutume. .
Des MYST'iitES dbs Égyptiens.
Je fiiis bien loin de favoîr quelle nation "învenU
la première ces myftéres , qui furçht n accréditée
depuis TEuphrate jtifqu'au Tibre. Les Egyptiens ne
nomment point l'auteur des myftéres d'/^x. ^oraa^'^
tre pafle pour en avoir établi en Perfe, Cadniks & Inà-
chus en Grèce , Orptée en Thrace , MmoT en Crète. 11
^eAcertaio que tous ces ;nyf(ères^nDonqaient4ine;vie
future ; car Ce/fe dit aux chrétiens (aï,, ^ous vous van-
tez de çrpire 4ifx peines iternéVes i^ tçus les minijiris
des myflères^ ne les unnoncèrent-ilspas aux initiés ?
LA Grecs qui prirent tant de chofes des Egyp-
,^t;îens , leur Tqrtharùtb dont ils firent leTartarc , le
lac dp n t i I5 : Ji rèn t ' VÂcbérQii , 1 e ba tel î cr Coron dont
ils firent [e noclier des morts , n^curent leurs fiimçux
joayftcres d'jLkufîne que d'après ceux à'Ifs* Mais que
les myftéres de ^ùroa/in^ n'ayent pas précédé ceux
.des Egyptiens , 't'êft ce que perfonne ne peut affir-
^mer* Les uns & les autres étaient de ia plus haute
^antiquité ; & tous les auteurs Grecs & Latins qut
; en ont ^uU , ponvicnnent que runité de Dieu ,
F lu]
f(9Îm
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MyàTiRÈs liEfe EbYipi'iÈNs.
i*immortaIité de Tamc , les peines & les récoriipèn-
Tes après la mort » étaient annoncées danâ ces cé-
ténionies facrçes, ., .
îi yii grapie apparence que les Égyptiens ayant
une fois établi ces myftèrés en confervèrent les rites ;
îciir malgré leiir. eîUrênie légèreté , ils furent conftans
dins la fupepft'itfon. .La prîçre que nous trouvons dans
^pu^ée quand Lnciuf eÔi initié aux mVftères d'i/?x ,
jijpit étr^fe Fanci^nne prière* Lei puiffances cilejles te
firvenù , ks ewers te font jhhthii.^fuiiîvers ioùrtie
foîu tu tnofji ^ tes pieds foulent le Tartgre ^ les ajlres
répondent à ta voix , les Jaîfons reviennent à iés or^
dres^ les.élfmens ^obiifjent\^ &c.
.. ,Peut-on avoir une plus forte pr«uyc iâ Tunîté
d'fn feul Dieu reconnu par les JEgyptieris , aii mi-
.lièu de toutes leurs fupérftitidhs mét)nfablès 1^
bas ÔRkcSi DE LEURS ANCIENS' DÉtUGES , tife
LEURS ALPHABETS, ET P£ LEUR OENtE.
' La ferècé éft un ^ttxi pa^s nlôntagneux énti^ecoupé
par la mer , à-péu-près de l'étléndue de la'Grâiidc-
Bretagnè. Tout attëfte dans cette contrée les révo-
lutions phyfiqiies qu'elle a dû éprouvei^. Les ides qui
Ptnvironnent montrent aflez,par les écueils continus
qiiï les bordent , par le peu de jrroibndéùr de la
mer , ^àï les lierbés & les taCiries' qui. croîffent foiis
les eatjJt , qu'elles ont été détachées du continent.
Le') gf>l plies de l'Eubéé , de Calcîs , d'Argos , de
C'*rmthe ^ d*Ac1ium , dé MéîTène , âppténhent aux
yeux que la mer s*cfl; fait dies jiaflaffes dans lés terres.
Lés éoguî liages dé iher donb fortt remplies les mon-
tngnefi qui renferment la Fameufé * vallée de Te*pé,
font des téftioigriagcs vifibleîî-d'thié ancîenhe îhoh-
djtion: & lés dcluges d^Ogigis '& de Dmcaliori ^ qui
ont fourni tant de fables , font d'une vérité hiilo-
rique. C'eft même probablement te qui fait des Grecs
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&
DétVQWSy ALPHABETS, &C 'S^
:
bn peuf)le fi nouveau. Ces grandes révolution^ les
feplongerent dans la barbarie « quand les nations de
TAfie & de TEgypIfe étaient floriflances.
Je laifTe à de plus favans qùé moi le foin de protiVer
que les trois enfans de Noi\ <\m étaient les feùts
nabltans du glote , le partagèrent tout entier , qu'ils
âlièrkilt chacun à deux ou trois mille liéùes l'un de
l'autre , fondet partout de puifTany empires , & que
Jùivan fon petit-fils peupla la Grèce en pafTant en
Italie : que c'cft de-là que les Grecs s'appellèrent
Ioniens , parce qu'/oir envoya des colonies fur les
fcôtes de l'Afie mineure ; qUe cet Ion eft vlfible-
hient JavoH , en changeant I en Ja ^ & an en van.
On fait de ces contes aux enfans , éb les enfans n'en
croyent rien :
. 2^ee Pueri crtâtml mfi qui nonâùm éerè lavantur, "m
Le déluge à*Ogîgêr eft placé coipmunémént envi,
ron douze cent années avant la première olympia*
de. Le premier qui en parte eft Acijîlas , cité par
Bujèbe dans fa Préparation ivangélique , & par George
le Sinceile. La Grèce , dît-on , refla prefquej déferte
deux cent années après cette irruption de la mer dans
le pays. Cependant , on prétend que dans le même
tems il y avait un gouvernement c«ibli à Sicionè,
& dans^rgos ; on cite mcmc les noms des premiers
magiftratf; de. ces, petites provinces, & oh leur donne
le nom de hajîleés , qui répond à celui de princes. Ne
perdons point de tern^ à pénétrer ces inutiles obf-
curîtés. - ;
Il y eut encor une autre inondation du tem^ de
t)eucalion fils de Promhhèe. La fable ajouta qu'il ne
refta des habitahs dé ces dimats que Deucalion ^^
Pirra , qui refirent des hommes en jéttant des ^îer-
rôs derrière eux entre leurs jambes^. Le genre-hutnaîn jî
^ fe repeupla beaucoup plus vite^^ qu^uhe garenne. ig
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I
If ^O DéLtfGES» ALPHABETS»
; Si Ton en croit d^ hommes tr^ judicieux , comme
FéfaH le jéfuite , un fed fiis de Noi produific une
race qui au. bout de de^ cent quatre-vingt-cinq
ans , fe montait à fix cent vingt-trois milliards ùx
xent 4ouze millions d'hommes. Le calcul eft un peu
iiprt Nous fommes aujourd'hui ailez malheureux
pour que de vingt-Gx mariages , U n'y tn ait d'or-
dinaire 4}ue quatre dont il relie des enfans qui de-
. viennent pères. Ceft ce qu'on a calculé fur les re-
levés -^ regiftres de nos plus grandes villes. De
mille lenfans nés dans une. même année ^ il en reflie
à peine fix cent au bout de vingt ans. Défions-nous
.de Pjftau & de fes femblables , qui font des enfans
k cqups de plume , au(fi-bien que ceux qui ont dit
;auç peucalion & Fma peuplèrent la Grèce à coups
de pierres.
;K La Grèce fut , cpmme on fait , le pays des fà- j
fl blés ,'& prefqûe chaque fable fut l'origine- d'un D
^ ' culte i d'u« temple , d'une fête publique. Par quel »
'excès de démence , par quelle opiniâtreté abfurde
'tant de conipibreurs ont-îb voulu prouver dans tant
àt volumes énormes , qu'une fête publique* établie
en mémoire d'un événement était on,é démonftra-
tîon de la vérité de' cet événement ? (^"oi i parce
qu'on célébraft dans un temple le jeune Bacchnf for-
tan t de la cuifîe de Jupièer , ce Jupiter avait en effet
gardé ce Buvcbus dans fa cuifTe ! Quoi , Cadmus &
fa fçfnme avaient été changés en ferpens dans la Béo-
tk 1 parce que les Béotiens en faifaient commémo-
ra^ton dans leurs cérémonies ! Le temple de Caftor
& de PûHux à Rome démoD trait-il que ces Dieux étaient
venus combattre en faveur des Romains ?
-^ Soyez fur bien plutôt , quand vous voyez une an-
;<:i.enne fête , un temple antique > q^u'Us font les ouvra-
. gcs. âe l'erreur. Cette erreur s'accrédite au bout de
.deux ou trois ifiécles ; elle devient enfin facrée ; &
on bâtit des teqiples à des cl>imères.
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f
^^l*ste
f^wfilf^
I
B t ft É HI B/^ t) B 8 <3 R 1 C S. 91
l)ans ks teMit hlft^iqoes, aa cbQtrairt ^ les jlm
nobles vérités trouvent peu de kéïittiM ; lei ^h*
çrands-hoâimes meumiit uns honneor. Lj» Tbiimft^
'cles^ les Vimms > 4es Miltiades , les ^^ifiidifs , tas
Pj&orioif j f(Wit perfècutés , taftdfe qiiie iV/îftf , Sêtetbm
& d'autres perfonnages fantaftiques ont des teiMptili^
On peut croire un |)euple fur ye qu'il ditdeluN
nuèmt à (on défavantage , quand fes récits font accom-
pagnés de vrâifemblahce , & quS'Is ne contredifent eh
rilea l'ordre orcSnaire de la nature.
Lés Athéniens qiii étaient épars dans un terrain très
^Jlérile, nous aj^rennent eux-mêmes qu'un Egyptien
nommé CicroPs chaffé de fon pays , leur donnt leurs
premières inftitutions. Cela paraît Aitprenant , puit
que les Egyptiens n'étaient pas navîjgateufs : mais il
fepeut que les tbénîciens qui voyageaient chez toutes
les nations , ayent -amerté ce Cecrjo^^/.dafts JîAètïquc.
Ce qai eft bien' fur , c^eil qtie les Grecs p'e prirent
point les lettïes égyptiennes , à qui tes leurs rte ret
fembient point du tout. Les Phériicieins lièur portè«
rent 'leur premier alphabet i qui. ne confiftait alorâ
qu'en feize caraftères . qui font évidethmcrit lésTn^
mes. Le^ ^énkiens -depuis y ^Jôulèréot li'ii^t autres
lettres 4u« les Grecs adoptèrent -èncdre.
Je regarâew^ alphajbet comme uh» monument in-
conteftable du:pays dont utie nation, a tiré fes pre-
mières cohnâiïrances. îl paraît' encoV bien probabfc
.que ces Phéniciens «iqpleitèrent.les^ mines ë'a^Fgent
qui étaient d^ns TA^tique, çctoàïp'îfcTravaÎHèfe'nt.à
. celles d'Êipagne., Dcs^arohîÉwls.fiiFenjt kis premiers
prèœpteurs/de ces mêmes Juf^ecs^.qujÇ cfepi^is Ihftruî-
firent tant d'autres nations,
Ûe 'petï()ïe tôUt "Bèrbate iju'îl éiAV^-Wip^^^^gù
'gèî , paraît iii avec d^ès îo^ahes ^hrt tïii^bfe^lèà at^
beaux arts que tous les autresf peuplée. Bs^>aknt dans
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1^
" Ci
$2 DiLVOBS, ALPHABETS,
-^
i
leur nature je ne fais quoi de ^ns fin & de plus délié ;
leur langage en eft un témoignage ; car avant même
qu'ils fuflent écrire on voit qu'ils eurent dans leur
langue un mélange, harmonieux de confonnes douces ,
& de voyelles qu'aucun peuple de l'Afie n^a jamais
eonnué
^ Certainement le nom de Knatb qui défigne les (hé«
hiciens félon Sânchoniatpn , n'eft pas fi harmonieux
que cAxxx à^HelleHos oU (Sraios. Argos , Athènes , La»
cédémone , Olimpie , fonnent mieux à l'oreille que
la ville de Reheboth. Sopbia , la fagefTe , eft plus doux
que Shocbematb en fyriaque & en hébreu. Bajtieus ,
roi , fonne mieux que JUeik ou Sbak. Compare^ les
iloms ai* Agamemnon , de Diomède , ^Idominh à ceux
de Mardokempad , Simordak , SobAjfducb , Viricaffo^
labjjar. Jofepb luî-méme dans fon livre contre Apfion
avoue que les Grecs ne pouvaient prononcer le nom
barbare de Jirufalem , (fe& que les ]mk prononçaient
/ Hersbalaim : ce mot écorchait le gofier d'un Athé-
nien ; & ce furent les Grecs qui changèrent Hersba-
laim en Jéruf aient.
Les Grecs transformèrent tout les noms rudes fy-
riaques , perfans , égyptiens. De Coresb ils firent Oy-
ruT i à'hbetb , Osbiretb , ils firent IJîs & OJtris ,• de
Mopb , ils firent Mempbis , & accoutumèrent enfin
les barbares à prononcer comme eux; de forte que
du tems dés Ptolomées , les villes 8c les Dieux d'E-
gypte n'eurent plus que des noms à la grecque.
Ce font les Grecs qui donnèrent le nom à l'Inde
' & au Gange. Le Gange s'appellait Sannottbi dans la
langue des brames ; Tlndus Sombadipo, Tels font les
anciens noms qu^on trouve dans le Védam. «
.' Les Grecs en s'étendant fur les côtes de l'Afie ti|i-
ineure y «menèrent l'I^^rnionie. Leur Bomire naquit
^probablement à Smyrne.
'
ftSrn
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r
ET oiKIE DS8 G «. £ O S. 93
La belle architedhire , la fculpture perfediontiée ,
la peinture , la bonne mufique , la vraie poëfie , ht
vraie éloquence , la manière de bien écrire Thilbire ,
enfin , la philofophie même quoiqu'informa & ob£.
cure , tout cela ne ^parvint aux nations que par les
Grecs. Les derniers yenus rtmportérent en tout fur
leurs maîtres*
L'Egypte n'eut jamais de belles Qatues que de la
main des Grecs. L'ancienne Balbek en Syrie , l'an-
cienne Palmire en Arabie , n'eurent ces palais , ces
temples réguliers & magnifiques , que lorfquc les fou-
veralns de ces pays appellèrent des artiftes de la Grèce.
On ne voit que des relies de barbarie , comme on
Ta déjà dit ailleuts , dans les ruines de Ferfépolis ,
bâtie par les Perfes ; & les monumens de Balbek &
de Palmire, font encor fous leurs décombres des chefs*
d'œuvre d'architeâure.
Des législateurs Grecs , de Minos , d'Or-
phée , DE l'immortalité DE L*AME*
Que des compilateurs répètent les batailles de Ma«
rathon & de Salamine , ce font de grands exploits aflez
connus; que d'autres répètent qu'un petit-fils de Noé
nommé Settim fat rpi de Macédoine , parce que dans
le premier livre des Maccahies , il eft dit ^xiAlexan^
dre fortit du pays de Kittim \ je m'attacherai à d'au-
tres objets.
Minos vivait à-peu-près au tems où nous plaidons
Moije s & c'eft même ce qui a donné au favant Huet
évéque d'Avranches Quelque faux prétexte de (butenir
que Minos né en Crète , & Moife né fur les confins
de l'Çgypte , étaient la même perfonne ; fyftéme qui
n'a trouvé aucun partifan , tout abfurde qu'il eft.
I
• Ce n*eft pas ici une fable grecque ; il eft indubî-
table que Minoî fut un roi légillateurir Les fameux
II
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I
tsÈà
\\ 94 Or?hé?,Minqs,
:
I
marbres de Faro^ , monument le plus précieux ic
l'antiquité (& que nous devons aux Anglais) fixent
fa naifÎGince quatorze cent quatre-vingt-deux ans avant
notre ère vulgaire. Homère Tappelle dans TOdyAce
le fage confidciH de Dieu. F/avim Jofeph ne balance,
pas à dire qu'il r^ut fes loix d'iih Dieu. Cela eft,
un peu étrange dans un Juif qui ne femblait pas der
voir admettre d'autre Dieu que le fien , a moins qu'il
ne penfôt comme les Romains fes maîtres , & comme
chaque premier peuple de l'antiquité , qui admettait
Fexiftence de tous les Dieux des autres nations.
Il eft fur que Minos était un légifiateur très févè^
re , puifqu'on fuppofa ()u'aprés fa mort il jugeait bs
âmes des morts dans les enfers ; il eil évident qu'alors
la croyance d'une autre vie était généralement répan-
due dans une aiFez grande partie de l'AGç & de
l'Europe.
Orphie eft un perfonnagc aufli réel que Minora \\
eft vrai que les marbres de Parus n'en font point men-
tion ; c'eft probablement parce qu'il n'était pas né
dans la Grèce proprement dite , mais dans la Thrace.
Quelques-uns ont douté de l'exiftence du premier Or^
jpbée , fur un paflage de Ciceron , dans fon excellent
livre fur la nature des Dieux. Cotta , un des interlo-
cuteurs , prétend qu^AriJiote ne croyait pas que cet
Orphée eût été chez les Grecs ; mais Ar\flote n'en parle
pas dans les ouvrages que nous avons de lui. L'opinion
de Cotta n'eft pas d'ailleurs celle de Ciceron, Cent
tuteurs anciens parlent d'Orphée, Les myftères qui
portent fon nom lui rendaient témoignage. Paufanias^
l'auteur le plus exa^ qu'ayent jamais eu les Grecs ,
dit que fes vers étaient chantés dans les cérémonies
religieufes , de préférence à ceux d'Homère qui ne vin(
que Longtems .après lui. On fait bien qu'il ne defcen^
dit pas aux enfers ; mais cette fable même prouve
que les enfeVs éuient un point de U théologie de ces
tems reculés..
f
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g- -*««
L'opinion yagpe de la permanence de Tame après
la mort , ame aérienne , ombre da corps , mânes , fooffle
léger , ame kiconnue , ame incompr^henfible , maii
exiftante , & la croyance des peines & des récom-
penfes dans une autre vie , étaient admifes dans toute
la Grèce , dans les Ifles , dans TAfie , dans l'Egypte.
^ Les Juifs feuls parurent ignorer abfolument ce myC
tère ; le livre de leurs loix n'en die pas un feul mot ;
on n'y voit que des peines & des récompenfes tem-
porelles. Il cft dit dans PExode , Honore ton pire &P
ta mère , afin ^Adonaï prolonge tes jours fur la terre >
& le livre du Zend ( porte ii ) dit , Honore ton pire
& ta mire , afin de mériter le ciel,
L'évêque Warburton , qui a démontré que le Penta-
teuque ne fait aucune mention de l'immortalité de l'a^
me « prétend que ce dogme n'était pas néceflaire dans
la théocratie. Arnauld , dans fon apologie de Port-
royal , s'exprime ainfi ; Qeli le comble de tignorance
de mettre en doute cette vérité , qui eji des plus conu
munes , Èf qtii eJi attejlée par tous les pires , que les
promejfes de l'ancien tejtament frétaient que tempO'
relies & terrejires , ^ que les Juifs f^ adoraient Dieu
que pour les biens charnels,
•
On a objedé que fi les Perfes ^ les Arabes ,^ les
Syriens, les Indiens, les Egyptiens ,les Grecs croyaient
Pimmortalité de l'ame , une vie à venir , des peines
& desrécompenfes éternelles , les Hébreux pouvaient
bien auIE les croire ; que fi tous les légiflateurs de
l'antiquité ont établi de fages loix fur ce fondement,
Moife pouvait bien en ufer de même ; que s'il igno-
rait ces dogmes utiles , il n'était pas digne de con-
duire une nation ; que s'il les faVait , & les cachait ,
il en était encor plus indigne.
I
On répond à ces argumens , que Dieu, dont J/o//i
était l'organe , daignait fe proportionner à la groflié-
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I
Sectes. p^E S Grecs.
reté des Juifis. Je n^entre point dans cette queftioa
^pineufe ; & refpeâant toujours tout cç qui eft divin,
je continue l'examen de Thiftoire de$ hno^nmes.
Des sectes des Grecs,
Il parait que chez les Egyptiens , chez les Ferfans ,
ehez les Caldéens , chez les Indiens , il n'y airaic
qu'une fe<fte de philofophie. Les précres de toutes ces
nations étant tous d^une race particulière, ce qu'on ap-
pellait ia fageffe , n'appartenait qu'à cette race. Leur
langue (acrée , inconnue au peuple , ne laiflait le dé?
f>ôt de la fcience qu'entre leurs mains. Mais dans
a Grèce plus libre Se plus heureufe , l'accès de la rai-
fon fut ouvert à tout le môide; chacun donna l'ef-
for à fes idées \ & c'eft Cfr qui rendit les Grecs le
peuple le plus ingénieux de la terre. C'eft ainii que
de nos jours la nation anglaife eft devenue la plus
éclairée , parce qu'on peut penf^r impunément: cjfic^
eUe.
L^es ftoïqyes admirent une ame unfverfelle du tpon-
d.e , dans laquelle les âmes de tous les êtres viyans
fe replongeaient. Les épicuriens nièrent qu'il y ei^):
une ame, & ne connurent que des principes phyfî-
quest Ils foutinrent que les Dieux ne fe mêlaient
pas des affaires des hommes ; & on laifla les épicu-
riens en paix comme ils y laiffaient les Dieux.
* Les écoles retentirent depuis T^alis jufqu'au fems
de Platon Se d^AriJiote , de difputeç philofophiques
qui toutes décèlent la fagacité & la folie de l'efprit
humain , fa grandeur & fa faiblefle* On argunjenta
prefque tpdjourç fans s'entendre , comme npus av.on$
fait depuis le treizième fiécle ou npi^s commençâ-
mes à raifonner,
La réputation qu'eyj; Platon ne m'étonne pas ; tous
les îphilofophes étaient inintelligibles ; il l'était au.tapt
que
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S 9 ç T B s DBS Grecs. $7 ijf
4)ue les autres , & s'expriitiait avec plus d'ébquence.
Mais quel fuccès aurait Platçn^ s'il paraiflaitaujouf-
.d'hui dans une compagnie de gens de boia.fens, &
s'il leur difait ces belles paroles qui font dans fou
Tîmée \ De la fubjtance indmjible & de la divipble^
Dieu compofa une troipéme ejfèce de fubjlance au mi*
lieu des deux , tenant de la nature du même ëf de
l'autre ; fitis gênant ces trois natures enfembk y il les
mêla toutes en une feuli forme , èf forga la ncâure
de Pâme à fe mêler avec la n^pure du méme^ & les
ayant mêlées avec la fubjiance , ^ de ces trois ayant
fait un fufpôt , il le divijùi.en portions convenables $
chacune de ces portions était piêlée du même Êï!' d'C
l'autre \ Êf de la fuhficmçe il jlt fa divi/ton.
Efifuîte il explique avec la même clarté le quateN
naire de Pytbagore. Il faut convenir que des hom-
me» raifonnables qui viendraient de lire VEntende-^
ment humain de Locke , prieraient Platon d'aller à
Ion école. - ' '• *
Ce galimatias du bon Platon n^empêche pas qu*il n'y
ait de tems en tems de très belles idées dan^&sou^
vages. Les Grecs avaient tant d'efprit qu'ils en abù-
fèrent. Majs ce qui leiir fait beaucoup d'honneur <
c'eft qu'aucun de leurs gouvernemens ne gêna [les
penfi^es des hommes. II n'y a que Socrate dqsiX, Jl
foit avéré que fes opinions lui coûtèrent la vijc.; 4
il fut encor moins la vfâime de fes opinions ;que;
celle d'^un* parti violent élevé contre lui- L^^f Athé-r
niens , à la vérité , lui firent boire de la ciguë ; maïs
on fait combien ils s'en repentirent ; on fait qi/ils
punirent fes accufateurs , & qu'ils élevèrent un temç
pie à ceîuî qu'ils avaient condamné. Athènes laiffa
une tibeïté entière , non - feulement à la philofo^feie ,
plais à tbutes les religions. Elfe recevait tous les
Dieux étrangers , elle aVatt même un autel dédié aux
j V Dieux inconnus. .
1^ £j[faiJiirlesm(BurSi&c:Tom.t ' G '
c
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r
i
;
98 Sectbsdés GkBcs.
./li eft inconteftable que les Grecs recônhainaientuii
Bieu fijprime , ainfi que toutes les nations dont noos
ivons parlé. Leur Zeuï ^ leur Jupiter , était le mai-
trè des Dieux & des hommes. Cette opinion ne chan-
gea jamais depuis Orpbè^ ,• on la retrouve cehl fois
dans ifo^rf : tous les autres Dieux font inférieurs.
On peut les comparer aux Péris des Pérfes ^ aux Gé-
nies des autres nations orientales. Tous les philofo-
ph^ i excepté les ftratoniciens Se les épicuriens ,
reconnurent Tarchitedte du monde , le Demiourgoj,
Nfe craignons point de trop pefer fur cette gran-
die vérité hiftorique , qliç la raifon humaine commen-
cée adora quelque puiflance , quelque être qu'on
croyait au - defTus du pouvoir ordinaire , foit le fo-
leil, (bit la lune , ou les étoiles ; que la raifon hu-
maine cultivée adora , malgré toutes fes erreurs , un
pieu fupréme maitre des élémens & des autres Dieux,
& que toutes les nations policées depuis Tlnde juf-
qu^au fond de l'Europe , crurent en général une vie
à venir , quoique plufieurs fedtes de philofophes euf-
fent une opinion contraire.
ÔeZalbiîcus et dé auEiauBs autres
LÉGISLATEURS.
/J'èf<?icî défier tous les moralîftes & tous les légif-
làtèbrs , '& je' leur demande à tous s'ils ont dit rien
de plWs 'beau & déplus utile que J'exorde deS loix
Bg Zàleuçus^^ qui vivait avant Pjytbagorè j & q\Jii fnt
lé prenHer magiftrat des Locriens.
THui citoyen doit être perfuade de Fexijléncè delà
ÎHtîtiiti. Ilfuffit ifobfer^e^ l'ordre gf f harmonie de
Punivéri ^ pour être convaincu que le bazard np peut
f'apùîr formé. On doit maitrifer fon ame , tckîuri-
Jm ; in écarter tout mal ^perfuade queJilzt nef eut
i être Mfnfervi par tes pervers , 6? qu'il ne reJfembU
2 point- aux miférabUs mortels qui Je laijfent toucher
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4 faire le bien , peuvent lui plaire. Qu'on cherche dont
•« être i4fl^ dans f es principes ^.dans la.pratiiue.
H>efi ùn^q^nfe rendra cher à M Diverse. Obmtd
dota craindre ce qtd mine à Nptominis , kèen plus
^e ce qsd .c^dtàs à ia punvreil U fwèt regmier
^ontsue U ntHllner dfqyéacekti qui nùandékne Ai/or-
^tUne peur hsfufiicvj thais cetae qufàw^sipajpànsviç.
tentes eMNânétt vers le mai , hommes .^ fimfàesu a-
^^)^eMs^ ifin^s heéitans , d^zfetit 4tre a^trtis de Te
ifouvenhrdes Dieux , Êf de fenfis* fmwmt ^m jJ^.
^mens.JMrésqaHls^ercvnt conPh kseoupai^s sqt/iis
asj^^U 4kvant 4es r^éux ^ heure de 4a sn^rt^ P heure /%-
^e qui nwï ^tèkd tims , ^akre'^ le Jimvekir des
fautes iùniHe les -remords y^ ie\vain repentir ^dt i^a^
^wrr pas fournis toutes fe^ aRhm -à H^êe^. . . r
Chacun doit dMc fi toMùîr'e i fôut y^stintént , é<fhu
mejt ce moment était le dernier de fa vie ^ mais Jî
un inâu^f ^Ùénie le porte tm c^iint , qifil fiiie' aux
pieds des taâèls , qïi'il prié le ciel d'écarter loin de M
ce Génie muhfuîpckt , auHl fi 'jette Jurtout entre les
biràs des gens de bien , doth lés coizfiils le i-Omtnh-bkt
a la vêftu ,pt hâfèpr^éntmi Ic^ hokté dt JhÉV &
fà vengeoHCç:
"Non , il E^^ a rieh dans tatltc Tantiquieé qu'on
çuiffc préférer à ce morct^ju fimplc & fAlîmc , diôé
par la raifoa &|>ar la vertu-, â^pouillé d'emouriafme
& «ie CHSS '*aûie» iJîganterque^ gUé le bon ïens d^- ^
Charondas ^ qui fui vit ZaleucUs , s'expliqua de m'é-
nje. Les Plat^m , les Cicerom , Ifè divins Antoninsi -
n'eurent point depuis à*autre tangage. C'eft ainfr que
•«VspKûût «Il cent enéroii^ ^ô ^Jttlie^ q«i ^t \t mal-
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nywag^ iii ■"«»' "- '"^Jgig
çi:po D B Z' 41 li B^ XX c /u i. ç
fit tant d'honneur i U naturelle \JuRèn le fcandale
4e notre eglife & la glpire de Tempire Romain.
. .\IÎ faut V dît-il , inftruire les ignorons , 6f ^o» /f/
\ punir. i les piaindre^& non les banr. Le devoir d'un
empereur ifi limiter Dl£U : Nnùter , c'ejl d'avoir le
mifÀni de befoins ^^ de f^ire le plus de bien qu'il eft
pojjlble, (^ue ceux donc qui infultent Tantiquité ap-
• prennent a la Connaître ; qu'ils ne confondent pas les
-iages légifïateurs avec des conteurs de fables ; qu'ils
'.fâchent diftinguer les loix des plus fages magiârats,
• les ^ ufages ridicules des peuples ; qu'ils ne difent
point , On inventa des cérémonies fuperititieufes , on
prodigua de faux oracles & de faux prodiges , donc
vtous les magiilrats de la Grèce & de Rome qui les
toléraient , étaient des aveugles trompés & des trom-
peurs ;.c'e& comme s'ils difaient^Il y a. des bonzes ft
8 a la Chine qui abufent la populace , donc le fage Con- S
fsidus était un mîférable impofteur. &
On doit dans un fiécle aulfi éclairé que le nôtre
rougir de ces déclamations que l'ignorance a fi fou-
vent débitées contre dés fages qu'il falait imiter , &
noknas calomnier. Ne fait- on pas que dans tout
pays le vulgaire eft îmbécîlle , fuperftitiéux , infenfé?
N'y a-t-il pas eu des convulfionnaires dans la patrie
du chancelier de V Hôpital , de Cbaron , de Montagne^
de la Motte le Vayer , de Defcartes , d^ Bayle , de
Fontenelle , de Montéfquieu ? N'y a-t-îl pas des mé-
thodiftes , des moraves , des millénaires , des fanati-
ques de toute efpèce dans le pays qui eut le bon-
heur de donner naiffance au chancelier Ba&on , à ces
génies immortels Neiofton & Locke , & à une foule
de grands-hommes ?
D E B A C C H U s.
Excepté les fables vifiblemcnt allégoriques ^ comme
3t celles des Mufes , de Vinus , des Grâces^ de l^ Amour t
&
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r
«a»
HÉbBB
an
D 1 B^A-'C-^ 41 U 8.
ÎOI il
I
de Zépbire&ie Flore , 8c qoclques-urtcs de ce genre ,^
toutes les autres font un ramas de contes qui n'ont
d'autre mérite que d'avoir fourni de beaux vers à
Ovide 6c à Quinault , & d'avoir exercé le pinceau de
nos meilleurs peintres ; mais il en eft une qui parak^
mériter l'attention de ceux qui aiment les recherches
de ^antiquité , c'eft la fable de Baccbus.
Ce Baccbus^, ou Bock ^ ou Backos , oU Dkmifiofy
fils de Dieu, a-t-il été un perfonnage véritable?
Tant de. nations en parlent alnfique d'JUercmh: on
a célébré tant d'Hercules & tant de Baccbus dlffî^
rens , qu'on peut fuppofer qu'en eifet il y a eu un
Baccbus ainfi. qu'un Hercule.
Ce qui eft indut)îtable , c'eft que dans l'Egypte ,
dans l'Afie & dans la Grèce » Baccbus ainfi qu'Her^
cule était reconnu pour un demi-Dieu , qu'on célé-
brait leurs fêtes , qu'on leur attribuait des miracles ,
qu'il y avait des myftères inftitués au nom de Bac-'
cbus avant qu'on connût les livres juifs.
On fait aflez que les Juifs ne communiquèrent
leurs livres aux étrangers que du tems de Ptohmie
Pbiladelfbe f environ deux cent trente ans avant no-
tre ère. Or avant ce tems l'Orient & l'Occident
retentiflaient des orgies de Baccbus. Les vers attri-
bués à f ancien Orphée célèbrent les conquêtes & les
bienfaits de ce prétendu demi-Dieu. Son hiftoire eft
fi ancienne , que les pères de l'églife ont prétendu
que Baccbus était Nei , parce que Baccbus & Noi
paflent tous deux pour avoir cultivé la vigne.
Hérodote , en rapportant les anciennes opinions ,
dît que Baccbus était un Egyptien élevé dans l'Ara*
bie heureufe. Les vers orphiques difent qu'il fut fauve
des eaux dans un petit coffre , qu'on l'appella Mifem
en mémoire de cette avanture , qu'il fut inftruit des
fecrets des Dieux , qu'il avait une verge qu'il chan-
G iij
,i
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^<9H î) e B-A >C C, H W Ô
1
1
g9ait en forpent quand il vôijailt, qu'Sl.ptifo.tjLjnfif
Jûuge à pied fec , çooim^ W^romlé^ p^flftjdc^it dani
^n gûbek£ le détroits de Q^pi & ii^h'Û9i^\ qneqnMiï
4 alU dans ks Indes ^ luv â;: Cptn^armér jouiflaiecit. d^
Iji clarté du foleîl pendant U puifc , qu'il tonslui do fk
baguette enGhanterede les. eaux- du fieiin Orctotei âi
-de rHidafpe , & que ces eauK a'écpulèrottl pmt hd
laifler un paflage libre. Il t& dit même qu^il arrêta
1^ cours di} fQleil & d[». la lune. . Il éothit ie&. tbix
é>f deux tabler de pierre. Il était ancimnoment i epro-p
(rnté avec des oojraes oju dea raiyons qui partaient de
Il'n'eft pas étonnant après cqla que; plqfiq^rs. (kv^nç
hommes , & furtout Bochart & Sluet dans nos der«
nler^ tems , ayent prétendu, 3^ que Baçch^s çft i^ne
copte de Moife & dç Jofué. Tout cpncoqrt à favo-
rifer la reOTeinblafice : car B.accbus si'appell^it chezJeç
Egypiiens Arfupà y & parmi Içs noms qne lès p^rç^
ont donnés à d^QiJ} on y troyv^, Qelui à^OJf^xpk^
Entre ces deux hiftoires qui paraiflent Temblables
QU taQt de points ^ il n'eft pas doqteux que €^U& de
iloife nç foit U vérité,, & que celle de Baçcbuf ne?
foit la fable. Mais il p^ait que cette fal^e était con-
nue.des nattions longtems avant que rhiftoire de Moift
fût parvenue jufqu'a elles. Aucun auteur Grec n'a cité
itoifi avant Longin qui vivait fous Tcmperçur AfitélUm,
& tows avaient célébiré Bacçbuf.
H parait inconteftable que les Grecs ne pucenl pren-,
dre l'idée de Baccbus. dans le livre de la ^oi juivCr
qu'ils n'entendaient pas , & dont ils n'avaient pas la
moindre connaiiTance ^ livre d'ail|.eurs.f;rai:e c}iC2>les
Juifs mêmes , que fous le roi Jojtaf on n'en trou fia.
qi; un fenl exemplaire ; livre prefqu'entiérement pQrdu*
pendant l'etclarage des Juifs tranlportés tt^ C^déc &;
dans le refie det'Afie ; Uvte reftauré enfuîte.pai; Eplrqn
djan^ Igf tems florKfanf 4'A^hàQe^, & dps^ ai^ti^es ^épn-r.
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D E B A C Ç H U s. 103
Uicjues do la Gfèce^ teins où lt$ myftères de Bsucbu»
étaient déjà ioftitues.
Dieu permit donc quel'efprit de menfonge di^Iguât
les abfurdités de la vie de Baccbus chez cent nations ,
avant que l'efprit de vérité fit connaître la vie de
Mdift^ aucunl|eupleyeioepté aux Juift.
Le favant évéque d'Avranches frappé de cette éton-
nante reffemblance , lie balança pas a prononcer ^ut
Mwfi était non . feolement Bttfdbus , mais le na$ifj
VQJtris des Egyptiens. II ajoute même (a) , pour allier
les contraires , que Moife était aufli leur Typhon ,
c'eft-à-dire , qu'il était à la fois le bon & le mau-
vais principe , le proteâeur & l'ennemi , le Dieu A
le Diable reconnu en Egypte.
Mdife , félon ce favant homme , eft le même que
Zoroaftrè. Il eft Efcuiape , Ampbion , Afollou , Fku-
* nus , Jamts , I^et^ , Komulur , Vertwnue , & enitn
Jdoms & Priape. La preuve qu'il était Adomit , c'eft
que Virgile a dit :
Eifirmqfus oves aâjktminu favit Adonis»
£t le bel Adonis a gardé las montoQs.
Or Mojfi garda les moutops vers l'Arabie. La preuvq
qu^il état Priape eft encor meilleure : c'cft que queU
quefois on rejpréfentait PriapA avec un âne , & qiie
les Juifs pafîerent pour adorer pn âne. Mueti ajoute
pour dernière confirmation , que la verge de Moije
pouvais fort bien être comptée au fceptre dç. Pria^
feCb). ' .
Sceptrm» Frif^ trtbuittfTy virga Jffofi,
Yoità ce que Hfiet appelle fa démonftration. Elle
n'eil pas à la vérité géométrique. ^ eft à croire qu'û
(a> Propeptîon IV , pag. 79 & «T.
« (b) Huet pag. iio.
& G iiîj
î
m
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I^g^rfrfi
D E 5 A c c H xr s. ff
en rou^t les dernières années de fk vîç , & qu'il fe
fouvenait de fa démonftration , quand il fit fon traité
dp la faibleffç de Telprit humain, & de^ rinçcrtîtudc
dç ifes çonnàifranccç.
Des métamorphoses çhez|les Grecs»
hecueillies par ovioe.
. L'opinion de la migration des âmes conduit liatu-
rellei^ent aux métam<Mrpho£es , comme nous l'avons
déjà vu. Toute idée qui frappe Timaginatton & qui
l'amufe , s'étend bientôt par tout le monde. Dès que
vous m'avez perfuadé que mon ame peut entrer dans
le corps d'un cheval , vous n'aurez pas de peine à
me faire croire que mon corps peut être changé en
cheval auffi.
Les métamorphofes recueillies par Ovide , dont nous
avons déjà dit un mot , ne dev^knt point du tout
étonner un pythagoricien , un brame , un Caldéen^ un
Egyptien. Les Dieux s'étaient changés en animaux
dans l'ancienne Egypte. Derceto était devenue poiffon
en Syrie ; Sémiramù avait été changée en colombe
à Babil one. Les Juifs dans des tems très poftérîeurs
écrivent que NabucQdonofor fut changé en bœuf , fanç
compter la femme de Lot transformée en ftatue de
fel. N'cft-ce pas même une métamorphofe réelle quoi-
que paffagère , que toutes les apparitions des Dieux
& (Jçs Génies fous la forme humaine ? .
Un Dieu ne peut guère fe communiquer à nous
qu'en fe métamorphofant en homme. Il eft vrai que
Jupiter prit la figure d'un beau cygne pour jouir de
Léda. Mais ces cas font rares ; & dans toutes les relî-
gions la Divinité prend toujours la. figure humaine
quand elle vient aonnér des -ordres. Il ferait diffi-
cile d'çntendre la voix des Dieux s'ils fé préfentaiçnt
à nous en p^rs pu en crocodiles.
^^^m^
-^FHÉÛh
m^
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r
I
mtm
7^^
MÉTAMOltPHOSES DES GEECS. lOf'
Enfin les Dieux fe m^tamorphofèrent prefque par--
toDt ; & dès que nous fumes inftruits des fecrets de
la magie , nous nous métamorpfaofanfies nous-mêmes. '
Flufieiirs perfonnes dignes de foi fe changèrent en
loups. Le mot de loup-garou attefte encor parmi nous
cette métamorphofe.
Ce qui aide beaucoup à croire toutes ces tranfinv-*
tations & tous les prodiges de cette efpèce , c^eft qu'on
ne peut prouver en forme leur impoflibilitè. On n'a
nul argument il pouvoir alléguer à quiconque vous
dira, Un Dieu vint hier chez moi fous la figure d'un
beau jeune homme , & ma fille accouchera dans neuf
mois d'un bel enfant que le Dieu a daigné lui faire.
Mon frère qui a ofé en douter a été changé en loup ;
il court & heurte adtuellement dans les bois. Si la
fille accouche en effet , fi Thomme devenu loup vous
affirme qu'il a fubi en effet cette métamorphofe , vous J i
ne pouvez démontrer que la chofe n'eil pas vraie. Vous' B
n'auriez d'autre reifource que d'aifigner devant Iw ' ^
juges le jeune homme qui a contrefait le Dieu , & fait'
l'enfant à la demoifelle , qu'à faire obferver l'onde
loup-garou , & à prendre des témoins de fon impof-
ture ; mais la famille ne s'expofera pas à cet examen ;*
elle vous foutiendra avec les prêtres du canton que'
vous êtes un profane & un ignorant ; ils vous feront
voir que puis qu'une chenille eil changée en papillon ,
un homme peut tout aufli aifémenfc être changé en
bête ; & fi vous difputez , vous ferez déféré à l'tnquî'*
fidon du pays comme un impie qui ne croit ni aux
loups -garoux , ni aux Dieux qui engroffcntles filles, -
De L' I D^O LATRIE.
Après avoir lu tout ce qu'on a écrit fur l'idolâtrie y
on ne trouve jien qui en donne une notion précife/
Il femble que Locke ibit Iç premier qui ait appris aux
hommes* a définir les mots qu'ils prononçaient , & à
ne point parler au hazard. te terme qui répond k
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OÊÊt
W 106( D « ]L' I D O L A T R I B.
içioUtrie ne fc ttoove dans aocmot l^ue ai^cienne ;
c'oil uc^ cxprelTion des Grecs des derniers âges , dont
oa ne s'était, jacnais fervi avant le fécond fiécle de
iV>tre ère. È\U fignifie adoration: d'images. C'eft un
t^rme de rep^rocKc , un mot injurieux. Jamais aucun^
peuple n'a pris la qualité d'idolâtre , jamais aucun
gouvernement n'ordonna qu'on adorât une image com-
mf l0 Dieu fupréme de la Nature. Les aiiciens Cal-
déeiM , les anciens Arabes , lea anciens Perfes > n'eu-
sent longtems ni images ni temples. Comment ceux
qd vénéraient dans le foleil , les aftres & le feu , les
emblèmes de la Divinité , peuvent • ils être appelles
idMâCres ? Ils révéraient ce qu'ils voyaient. Mais cer*
tasnemeot révérer le foleil & les aftres , ce n'eft pas
adorer use figure taillée par un ouvrier ; c'eft avoii»
im eulte.eironé, mais ce n'eft point être idolâtre.
il
Je fuppofe que les Egyptiens ayent adoré réellement «
le chien Ânubis , & le bœuf jfyis^ ^ qu'ils ayent été m
dSSkz fous pour ne les pas regarder comme des anî* >
maux confacrés à la Divinité , & comme un emblè«
me dn bien que leur Isbesb , leur IJlt , faifatt aux
hommes « pour croire même qu'un rayon célefte ani-
mkéCe bœuf & ce chien confiicrés , il eft clair que
ce n'était pas adorer une ftatue. Une bète n'eft pas
une idole.
Il eft indubitaDle que les hommes eorent des ob«
jets de culte avant que d'avoir des fculpteurs , &
il eft clair que ces hommes fi anciens ne pouvaieÂt
point être appelles idolâtres. Il refte donc à favoir
il ceux qui firent enfin placer des ftatues dans les
temples , & qui firent révérer ces ftatues. , fe nom-
mèrent adçrateurs de ftatuef , & leurs peuples ado-
i^teurs de ftatues. C'eft aSurémeat ce qu'on ne trou-
ve dans aucun monument de l^antiqui|é.
JJaîs en ne prenant poii^t le titre 4^idotttres Té-
t^iqnt-ils ei^ çftet ? çtait-il ordoj^né de croire que la
"smX^
à
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0 •
Q^ L'ID QI^A,T,R.||[^ 1P7
I
.
itApj^ de brpnz^ Wi r^éf<^taitla &^t fimtaftiqiif
4ç. j^/ à llaWoae était If m^ir^ , le TiiiU , le qté^
^\^ (to. iBonde ? la, figure é^ Jt^pif^ çtait-cllci Ji<».
_g^>4r m^e ? A'eft-qe p.^s ^ &'iL cft pernûs de cpnv
l^iiei les uJ&^ça de i^tre faintç rejllgio^ ^v^ les ufa<-
gçs wtiqye^ . w'el^nçe pa^i çcwp^ fi 9a diC*îC quç
noua. ^docQn? I9 figui;ei du Père éternel avec une h^^
be longue , la figure d'une femme & d'un enfiéint ,
1;^ figure d'une c^lonxbc»? ^e fc^nt ded oracmcna mn-
bténiati^ues dahsi n^s temples» Nom, lesi adorons fi
MU que quand ces ftatue^ font de bois on s'en ch;9uËi
W , dés qu'ellqç nourrifleut , on w érigé d'autreçii
e{Ie9 font d& fim|nes avertiffemens ^i parlent auiç
ycuic & i l'imagination. Les Turcs & les yçforroéa^
croyent que les catholiques font idolâtres « maïs lea
catholiques ne cefTcnt dç protefter contre cette în-
IX n'eft pas poffible qu'on adore réellement une
ftsitue, ni qu'on cro.ye que cette ftatue éft le JkW
fuprême, U n'y avait qu'un Jupiter , mais il y avait;
nMlledefesftatues. Or ce J«/^f/er qu'on croyait lançei;
la foudre , était fuppofé habiter les nuées , ou l^
mont Olimpe , ou la planète qui porte .fon nom.
5,^ figures ne }anqaient point la foudre » & n'étaient
i^ dan^ uQe planète , ni dan^ l^ nuées , ni f ur 1q
n^qnt Qlippe. Toute$ les prières étaient adreffées au»
*]^e^ immortels ^ ^ afTuréaiont lea ftatuea n'étaîenfe
pa^immorleUes.
Q«A fourbes , il eft viai , fif ent oioii e , & des fu^
pei^tieux crurent , que dte» ftatues aYaicsnt parlé.
Combien de fois nos peuples groffiers a'ont-ils pas
e« la mèmR crédulité 7- mais jamais chez aucun pei^
^ oea abfurdités ne furent la religion de Pétsft Quel-
que vieille imbécille n'aura pas diftingué la ftatue &
lie Dieu } ce n'eft pas une raHbn d'affirmer que le
g^iiivem^niii^ pen&it (Somme cette vieille. Les ski^
gijlrats voulaient qu'on révérât les repréfentations de»
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^ Vo§ D £ "l^IdVl AT R ï B.
Dieux adorés , & que rimaginatîûn du peuple fïH:
fixée par ces figues vifibles. C'eft préçifcraent ce qu'on
fait dans la moitié de TEurope. On a dçs figures qur
repréfcntent DlEO le père fous la forme d*un vieil-
lard , & on fait bien que DiEU n*efl;pas un vieillard. On
a des images de plufieurs faints qu'on vénère , &
on fait bien que ces faints ne font pas Dieu le père.
De même , fi on ofe le dire , les anciens ne fe
méprenaient pas entre les demi - Dieux , les Dieux , &
le maitre des Dieux. Si ces anciens étaient idolâ-
tres pour avoir des ftatues dans leurs temples , la
moitié de la chrétienté eft donc idolâtre auffi ; &
fi elle ne Tefi: pas , les nations antiques ne Tétaient
pat davantage.
il
En un mot , il n'y a pas dans toute l'antiquité un
feni poëte , un feul philofophe , un feul homme d'état
qui ait dit qu'on adorait de la pierre , du marbre y
du bronze , on du bois. Les témoignages du con-
traire font innombrables : les nations idolâtres font
donc comme les forcîers , on en parle , mais il n'y
en eut jamais.
Un commentateur a conclu qu'on adorait réelle-
ment la ftatue de Priape , parce qu'Horace en
feîfant parler cet épouvantail , lui fait .dire , J'étais
autrefois un trcmc , ^ouvrier incertain s'il en ferait '
un Dieu ou une efcabelle , prit le parti à^en faire un
Dieu , &c. Le commentateur cite le prophète Ba^
Yucb , pour prouver que du tcms âi^ Horace on regar-
dait la figure de Priape comme une divinité réelle.'
Il ne voit pas qu^Horace fe moque & du prétendu
Dieu & de fa ftatue. Il ft peut qu'une de fes fer-
vantes eh voyant cette énorme figure , crût qu'elle
avait quelque chofe de divin : mais affurément tous
ces Priapes de bois dont les jardins* étaient remplis
pour chaffer les oifcaux , n^'éîaient pas regardés corn-
me les créateurs^ du monde.
H^gigipi^-
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I
&
P B t'l;D O'i 4 T-KA E.
209
: Il cft dit que Jloiji , malgré la loi divine de ne
faire ^acuoe repréfentation d'hoinmes ou d'animaux,
érigea un ferpent d'airain , ce qui était une imiution
du ferpent d'argent que les prêtres d'Egypte portaient
en proceffion ; mais quoique ce ferpent fût fait pour
guérir les morfures des ferpens véritables ^ cependant
on ne l'adorait pas. Stdomon mit deux chérubins
dans le temple ; mais on ne regardait pas ces chéru*
bins comme des Dieux. Si donc dans le temple des
Juifs 61: dans les nôtres , on a refpeété des ftatnes
fans être idolâtres , pourquoi tant de reproches aux
autres nations ? Ou nous devons les abfoudre , ou ellei
doivent nous accufer. -^
Des 6 r a t l e s.
n cft évident qu'on ne peut favoir l'avenir , paccf
qu'on ne peut favoir ce qui n'eft pas ; mais il eft claif
auffi qu'on peut conjeâurer un événement •; ^
Vous voyez une armée nombceufe & difcîpliiw
conduite par un chef habile , s'avancer dans un ItCAl
avantageux , contre un capitaine imprudent fuivi dç
peu de 'troupes mal armées , mal poftées , & dont vous
favez que la moitié le trahit ; vou» prédifez que ce
capitaine fera battu.
Vous avez remarqué qu'un jeune homme & une
fille s'aiment épcrdument ; vous leS avez bbrerrés for-
tans l'un & l'autre de la maifon paternelle \ vous
annoncez qi^e.dans peu cette fille (èra encemte ; vous
ne vous trompez guère. Toutes les prédidlîons fe ré-
duifent au calcul des probabilités. Il n'y a donc point
de nation chez laquelle on n'ait fait des fr éditions
. qui fe font en effet accomplies. La plus célèbre^^ la
plus confirmée eft celle que fit ce traître Flavien Jo/epp
à Vefpajten & Titus fon fils , vainqueurs des Juifs, Il
voyait Vefpajten & Titus adorée de ss armées Tomaîiiès
dans l'Orient , & Tflérm détefté de tout l'empire^ 11
î
9i^m
^sm
^^
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i.
ifrni-itir- «ÉMi
^^^'^^^^
è(b, tyoli* gàgn«^ tes bbnin^s g^aûéli de F^^^jte ^lui
prédire au tiotn dti Diea de$ Jtii6 (a) qii^ loi & IImi
Ah feront empereurs. Us le fHfenc en effet ; mais il
» étîderit ^ue Jofepb ne rîfquaît rJett. Si VèJ^<i/ièk
Tncàoruhe un jôtn: en prétendant à Tempire , il ti'eft
î>te eft état de punit Jofepb ,• s'il eft empereur ^ il le
Kcèttipenfe , 8c tant qu'il ne i-égne pas il eQ)ère ré*
]ghfer. Vtfpafien feh dife à ce Jb/i^ que s^l eft propliiêtfe
fi défait avorr prédit la prife de Jotapat qu'il avait en
Vàîhifefendue <3onti^ l'armée romaine : Joftpb répond
^u'ieh effet il l'avait prédite ^ ce qui n'était pas bieri
Futta^eMairt. Quel commandant en foutenant un fiége
dans une petite place contre une ^nde armée ne
prédit pas que la place fera prife ?
Il n'était pas bien difficile de fentir qu'on pouvait
l^tfrer le ref^ed èc l'argent de la multitude en Fai-
Ibnt k propfhête ,* ^ que la créduiioé du peuple devait
être le revenu de «quiconque faurait le crcrroper. Il ^
eut partout des devins ; mais ce n'était pas affez de
ïie prédire qti'eh f»n propre nom , il Ériait parler au
«kùm de la Divinité : & depuis les prophètes de l'E-
^pte qui s'aippellaient les Voyons \, jufqu'i Vlpius
)>rophéte du mignon de l'empereur éàri^n devenu
Sieu « il y eiFt un nombre prodigieux de charlatans
facrés , qui firent parler les Dieux pout fis moquer des
hommes. On f^tit affez comment ils pouvaient réuffir ,
tantôt par une tëponffe am'bîgue qu^fls expliquaient
enfoîte comme ils voulaient , tatttôt en corrompant
des domeiîîque^ , tn s'infbrmant d*eux fecrétemertt
des avanturcs dW dévots qui venàfîettt 'les consulter.
Un îdîût était tout étontié qt'un Fourbe lui dît die
ia part d^ Dieu te ijutl avait feît de plus caché.
"Ces J)rôpliélteà "pâftkie'nt pour favdir le pafîé , îe
îpréfent & Tàvenîr \ b'éft l'éloge ({ix*Homire fait dé
VUlcas. Je h'àjotiteral tien ici à ce que le favant Vah-
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DÉS toRACtË*. 11^
dàie , & lé judicieux Ponteneffe'ton rédaâeàr , ont dft
tf^s ôtactes. Ils. ont dëyoilc arec fagacité des fiécfôs
xîe fotit-bèrîfe ; Se le |éfuitè Baltbui montra bien '^tu
'de fcns , ou beaucoup de malignrtc , quand il foutint
toutt^'eux la vérité des oracles pàyens , pat fes prîn*
dptes dfe h teligiohchrêtiênhe. Cétàft ré^emcnt &îrfe
à Dieu une injure , de prétendre que *ce Dieu tifc
iwmté & de yérké eût lâché îes dîabtes.tifc Tenfer,
pour venir faire fur la terre ce qu'il neîalt pas lui-
même , pour rendre des oracles*
Ou ces diables diTaient vrai , Sç en ce cas il était
împoffible de ne fes pas croire ;. & Dïcu lui - même
appuyant toutes lès fauiTes religions par des miracles
journaliers , jettaît liii-même l'univers etitre les bfas
de fes ennemis : Ou ils difaient faux ; !& en ôe cas ,
ï)îeu déchaînait lés diables pour tromper tous les hom-
mes. Il n'y a peut - être jamais eu d^opinioh plus ab-
fux'dc.
t'ôfâclé le plus fameux Tut celui de Delphes. Ôh
choiiit d'abord de jeunes filles innocentes , comme
plus propres que îes autres à être înfpirées , c*eft-â-
dîre , à proftïrcr dé bonne foi le galimadas que les
prêtres leur dkbîent. La jeune pythie montait fur un
trépied pofé dans Totiverture d'un trou dont il fortaît
une exhalaîfon prophétique. L'efpnt divin entrait fous*
la robe de la pythîe par un endroit fort humain ;
mais depuis qu'une jolie pythie fut enlevée par un
dévot , on prie des vieilles pour faire le métier : & je
croîs que c'eft la raîfon pour laquelle Poracle deBeU
phes commença à perdre beaucoup de fon crédit»
Les divinations , les augures , étaient des efpècqs
d'oracles, & font/ j« crois, d'une plus haute anti-
quité ; car il falait hlen des cçrémônies^, bien du tçi^
"pour achalahder ui^ oracle divin qui ne pouvait fe
"paîTér de temple éc dé prêtres ; à rien n'était pUu
aifé que de dire la bonne avanture dans les carrefours.
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i
Cet art fe fubdivifa en mille faqons ; on prédit par
le vol des oifeaux , par le foie des moutons , par les
plis formés dans la paume de la main , par deâ cer*
Icles tracés fur la terre , par Teau , par le feu ,. par deg
[petits cailloux , par des baguettes , par tout ce qu'on
.imagina , & fouvent même par un pur entoufiaûne
qui tenait lieu de toutes les règles. Mais qui fut celui
qui inventa cet art ? ce fut le premier fripon qui ren-
.contra un imbéçille.
La plupart des prédidions étaient comme celles de
l'almanach de Liège. Un grand mourra ^ il jy aura
des naufrages. Un juge de village mourait -il dans
Vannée ?^ c'était , pout ce village le grand dont là
mort était prédite : une barque de pêcheurs était-elfe
fubmergée ? voilà les grands naufrages annoncés. L'au-
'teur de l'almanach de Liège eft un forcier , foit que
Tes prédiftions foient accomplies , foit qu'elles ne le
'fbiem pas ; car fi quelque événement les fàvorife , fa
magie eft démontrée: fi les événemens font contraires,
on applique la prédiétion à toute autre chofe ,,& l'allé-
gorie le tire d'affaire.
L'ainftanach de Liège a dît qu'il viendrait un peu-
pie du Nord qui détruirait tout ; ce peuple ne vient
point ; mais un vent du nord fait geler quelques
vignes, c'eft ce qui a été prédit par Matthieu Lcms-
berge. Quelqu'un ofe-t-il douter de fon favoir? Auf-
fi-tôt les colporteurs le dénoncent comme un mau-
vais citoyen , & les aftrologues le traitent même de
petit efprit , & de méchant raifonneurr
Les fbmiites mahométans ont beaucoup employé
cette méthode dans l'explication du Koran àt Mahomet.
UétoWe jfldebaram avait été en grande vénération
-chez les Arabes , elle fignifie rœîl du tjauréau ; cela
voulait dire que l'œil de Mahomet ^ éclairerait les Ara-
'bes,^ qpe comme un taureau (1 frapperait fes en-
nemis de fes cornes. »
LHurbrè ^
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l
P fi^ Q R ^ C L 1 ^.
yarbre acacia était en vénération dans {'Arabie^
on en fiifait de grandes haies api préferyaient les^
moiflbns de l'ardeur du foleil j ^'^i^nie^ e0 Tacads
qui doit couvrir la terre de Ton ômbrç faiutaire. Leist
Turcs fenfés rient de ces bctîfes fubtîles ; les jeuiieit
femmes n'y penfent pas ;lç8 vieilles dévotes y croyerit:
& celui qiiî dirait publiquement à yn dçrvfche qu*ii
enfeigne des fottîfes , courrait rîfçîue d'être empalé, fl
y à eu des favans qui ont trouvé Phiftoirë de leur
tems dans riliadç & dans l'OdyfTée ; mais ces favàne
n^ont pas fait la même fortune que les com^tentateurs
dç l'Alcoran. ' ' • •
La plus brillante fonâion des oracles fut d'afTuret
la vidtoire dans la guerre. Chaque armée , chaque
nation avait fes oracles <\u\ lui promettaient def
triomphes. L'un dès deux partis avait reçu infailli-
blement un oracle véritable. Le vaincu qui avait
été trompé attribuait ùl défaite à quelque fiante com-
mife envers les Dieux après ' l'oracle rendu ; il ef7
pérait qu'une autre fois l-oracle s'accomplirait. Ainfi
prefque toute la terre s'eft nourrie d'illofion. Il n'y
eut prefque pqjnt de peuple qui ne çonfervât dan^
(es archives , ou qui n'eôt par la tradition ovale , quel->
que prédidion qui raflurait de la conquête du înon-^
de , c'eft-à^^ire > des nations voifines ; point de con-
quéranfr qui n'ait été prédit formellenient , aufli^tôt
après fa conquête. Les Jui6 mêmeç , enfermés dans
un coin de terre prefque inconnu entre l'Anti -Liban»
FArabie déferte , & la pétrée , efpérérent comme les
autres peuples d'être les maîtres de l'univers , foh-*
dés fur mille oracles que nous expliquons dans un
fens myftique , & qu'ils eftendaient dans le fens
littéfa}. ' * T
Dl^S SIBYLLES CHEZ LB$ GrRCS » E^ PB Ll^VR
INFLUENCE SUR LES AUTRES NâTIONS,
ï^orfque prefqi^e toute la ^erre était rempHp d'ora-
cles , il y eut de vieilles ^Ues qui fans être attacbéej^
EJfaifur les mœurs ^^c.TomA. H
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114 Sibylles CHEZ LES Grecs. g
à aucun temple s'a vi firent de prophétifer pour leur
coai.pte. On les appelUy%//^J , mat grec de la dia-
Icïte de Laconie , qui lignifie conleiij ^e Dieu. L'an-'
tiqoité en compte dix principales en, divers pays. On
fait affez le conte de la bonne femme qui vint appor-
ter dans Rome à l'ancien Tarquin ^ les neuf livres de
l'ancienne fibylle de Cumes, Comme Tarquin mar-
cïiandait trop , la vieille jetta au feu les fix premiers
livres 5 & exigea autant d*ar|ent des trois reftans,
qu*elle eu avait demandé des neuf entiers. Tarquin
les -paya. Ils Furent , dit-on , confervés à Rome, juf-
qu'au tems de Sylla , & furent confumés dans un in-
o^ndk du capitde.
. Mais conmeot fe paffer des prophéties des fibyl-
lefiil On envoya trois fénateurs à Erytre , ville de
Gr/ècc ou Toa gardait précieufement un miUier de
mauvais vers grecs , qui paflaient pour être delà fà(;on
de la fibylle Érytrit. Chacun eo voulait avoir des ço-
piei. La fibylle Erytru avait tout prédit. Il en était
cLe Tes pri>phétie8 comme de celles de Na/iradamus
parmi oou£. On nQ manquait pas à chaque événe-
ment de focger quelques vers grecs qu'on attribuait
àkfibylk.
Aâtgt^^ qui craignait avec raifon qu'on ne trouvât
dans cette rapfodie quelques vers qui autoriferaient
des confpirations , défendit fous peine de mort qu'au-
cun Romain eût chez lui des vers fibyllins ; défenfe
digne d'un tyran foupqonneux , qui confervait avec
adrefle un pouvoir ufurpé par le crime.
Les vers fibyllins furent refpedés plus que jamais
quand il fut défendu dç les lire. 11 falait bien. qu'ils
continffent la vérité , puifqu'on les cachait aux ci-
toyens.
Virgile y àzm fon églogiie fur la naiflance de PoU
lion , ou de Marcellus , op de Drufus , ne manqua pas
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m ta» 'I' . m
i
Sibylles cbbï lss Grjecs.
de citer l'autorité de la £bylle de Cumes , qui avait
prédit nettement que cet enfant qui mourut bient6t
après , ramènerait le iiécle d'or. I^^ fîbylle Érytrii
avait , difaitron alors ^ prophétifé auffi a Cumes. L'en^
fant nouveau né appartenant à Jnmfte , Qp à fon ht
vori , ne pouvait manquer d'être prédit par la fibyile.
Les prédirions , d^ailleurs , ne fon^ jamais que po^i
les grands , les petits n'en valent pas la peinç.
Ces orades des fibylles étant donc toujours en très
grande réputation , les premiers chrétiens trop env»
portés par un feux zèle , crurent qu'ils pouvaient fort
ger de pareils oracles , pou): battre les gentils par leur^
f propres armes. Hermas & St. Jujiin pafTent pour étrQ
es premiers qui eurent le malheur de foutenir cette
impofture. St. Juftin cite des oracles de la fibvlle dp
Cumes , débités par un chrétien qui avait pris le nom
d'IJiape > Se prétendait que fa fibylle avait vécu du
tems dij déluge. St. CMme^tt d'Alexandrie , dans fe^
ilromates , liv. VI , affure que l'apôtre St. Pa«/reçom<^
mande dans fes épitres ia leffurç dès JihylUs ^ qui ont
puanifeJiemeMt priait la nmjfance du fils de DiEUr
Il faut que cette épitre de St. Paul foit perdup ;
car on ne trouve ces paroles , ni rien d'approchant ,
dans aucune des épitres de St. Paul. Il courait dans
ce temS'là parmi les chrétiens , une infinité de liyre^
que nous n'avons plus , comme les prophéties de Jah
dabaft , celles de Setb , A^Bnoçb & de Çham ; la péni?
tence à* Adam , Thiftoire AtyZacharic père de St. Jean |
1* évangile des Egyptiens ; l'évangile de St. Pierre ,
à? André , de Jacques ; l'évangile d'jgW , Tapocalypfd
A' Adam , les lettres de Jesujs-Christ , & cent autres
écrits , dont il reile à peine quelques fragmens , eil-
fevelis dans des livres qu'on ne lit guère.
L'églife chrétienne était alors partagée en fpcîé^é
judaïfante^ & fodété non-judaiTante. Ces deux étaient
^ diyifées en plufieurs autres. Quiconque fe fpntait ui^ ^
& H ij ^iQÎ
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ii5 Sibylles CHEZ LES Grecs. |f
peu de talent , écrivait pour (on parti. Il y eut plus
de cinquante évangiles jufqu'au concile de Nicée ; il
ne nous en refte aujourd'hui que' ceux de la Vierge ,
de Jacques , de Y Enfance , & de Nicodéme. On for-
gea fuTtout des vers attribués aux anciennes fibylles.
Tel était le refped du peuple pour ces oracles fibyl-
lins » qu'on crut avoir befoin de cet appui étranger
pour fortifier le chriftianirme naiflant Non^feulement
on fit des vers grecs fibyllins , qui annonçaient Jesus-
Christ ; mais on les fit en acrofticbes , de manière
que les lettres de ces mots , Jefous Çhreiftos ïqî $Qter ,
étaient l'une après l'autre le commencement de cha-
que vers. C'eft dans cel poëfies qu'on trouve cette
prédi^on :
Avec cinq pMnt & clenx poiflTons ,
Il nourrira cinq mille hommes au dëfert , /
Et fXi ramaflTant les morceaux qui relieront »
Il en remplira douae paniers.
On ne s'en tint pas là ; on imagina qu'on pouvait
détourner en faveur du chriftianifme le fens des vers
4ç la quatrième églogue de Virgile :
UUima Cumm venitjatu carminis éetas:
Jam nova progtnies calo demittitur alto.
Les tems de la fîbylle enfin font arrivas :
Un nouveau rejetton defcend du haut des cieux.
Cette opinion eut un fl grand cours dans les pre-
miers fiécles de l'égltfe , que l'empereur Conftantin la
foutînt hautement. Quand un empereur parlait , il
avait fûrement raifon. Virgile pafla longtems pour
yn prophète. Enfin , on était fi perfuadé des oracles
des fibylles , que nous avons dans une de nos hym-
nes , qui n'eft pas fort ancienne , ces deux vers re-
marquables : fi
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i
i$m¥' iicin^^ ^>>^jggi8
D E s . s I B Y L L E s. Iiy *^
1
i^olvet faclum in /kviUa ,
Tefte Datfid^cumjibylh.
n mettra rnnivets en ccàdre^ »
Témoin U flbylle & David.
Parmi les prédîdb'ons attribuées aux fibyllcs , on feî-
fait fur tout valoir le règne de milk ans , que les pères
d^Téglife adoptèrent jafqu'au tems de Tbéodofe IL
Ce règne d^ Jesus-Christ pendant mille ans fur
la terre étf^ft fondé d'abord fur la prophétie de St.
Lttc , cil. XXI , prophétie mal entendue , que Jesus-
CôtllST viendrait dans les nuées , dans une grande
puiffance & dans unç grande majefli , otuant que la
génération préfente fût paffée. La génération avait
paffé ; mais St, Paul avaît dît auffi dans fa première
épitre aux ThefTalonîcîens , 'ch. IV.
Notis vous déclarons^ comme Payant appris du Sei»
gneur , ^Ue n'ouï qui vivons , & qui fommes réfervés
pour/on avènement , nous ne friviendtons point ceux
qui font déjà dans le fmnmeil.
Car aufli4ot que leJJgnal aura été donné par la voix
de r archange , èf par lefon de la trompette de Dieu ,
le Seigneur lui-même defcendra du ciel , 6f ceux qui
feront morts en JesOS» CHRIST rejfufciteront lés
premiers^
Puis nous autres qui fommes vivons , @f qui ferons
demeurés jufqu' alors , nous ferons emportés avec eux
dans les nuées , pour aller au devant du Seigneur au
milieu de tair^^ & airipnous vivrons pour jamais 4iveç
le Seigneur,
U eft Dien étrange çue Paul dife que <f eft le Sei-
. i;ncur lui-même qui lui avait parlé; car Pau/loin
2 d'avoir été un des difciples de Christ , avait été «k
6 Hiij I
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4Éa
Dés Sibylles.
:,
lohgtenis un de fes pétCécûteuh. Quoi qu'il en ptiifl[%
être , rApocaiypfe avait dit aiiffi chap. XX , que Icà
juftes régneraient fur la tnn fendant nUille ans avec
jESUS-CHRISt.
Dn s'attendait donc i ïomï Aiomént que jEStos-
Christ defcendirait du ciel pour établir Ton règne ,
& rebâtir Jérufalem ^ dans laquelle les chrétiens àt-
Vaiént Te réjouir avec les patriarches.
fcetté nouvelle Jcirufaleni était annoncée dans l*Ai
jpoCalypife : Moi Jean , }e vis la nouvelle jénifalem qui
defcendait du ciel tarte cônane une ipoufée..,. Elle
-avait une grande x^ haute muraille , douze portes ,
^ un ange à chaque forte douze fondemens où
font les noms d^s àfatres de F agneau Celui qui
me far lait avait une toife dor four mefurer la ville ,
ks fortes 6? l^ rnur aille, La ville ejl bâtie en quarri^
"tlle ejl de douze mille ftades ^fa longueur ^fa largeur^
& fa hauteur font igalesl Il en mejfura aujjila
muraille qui eji de cent quarante-quatre coudées., ..
tette mur édile était de jafpe , fS la ville était d!or , 6?^ •
Oh pouvait ft contiSBter de cette prédidion , liiai^
bn voulut encor avoir pour garant une fibylle , à qui
Fon &it dire à-peti-près les mêmes chofes. Cette per-
fuafion s'imprima ii forcement dans les efprits , que
St, Jujiin dans fon dialogue contre Triphon , dit qu'il
en eji convenu , èf que JESUS doit venir dans cette
^ttfalem boire 6f manger axfte fes difciplts.
it. ïréûie fe lîVra fi pleinement à cette opinion ,
tju'il aïtribire à St, Jean TévangeUftc ces paroles :
Dans la nouvelle Jérufalem chaque fef de vigne fro-
xLuira dix mille branches , 6f chaque branche dix
fhille bànrgeons , chaque bourgeon dix mille graffes ,
"chaque 'graffe dix mHft grains , chaque raijin vingt-
tinf ampboires de i>in. m quand un dés faintîs ven-
nfiSiB^i^
âsBlfi&âtts
ijffftBatmt
»««aî
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ss»^^^
flffa
Des SiBYLi.Es.
1^9 il
dangeùrt cutiUrra un raifin ^ It rt^fin voijùt iui dira^
Prends ' moi ^ je Juis meiiiiur qut kti («).
Ce n'ctait pis affe2 que la fibylle eèt prédk ces
merveilles , on avait été témoin de l'accomplifleoient.
On vit , au rapport de TertuiHen i la Jérufalem nou-
velle defcendre du ciel pendant quarante nttits coo-
fécutives.
Tertuïlien s'exprime aînlî : (a) Voms confeffhns que
le royaume nous eji promis pour mille ans en terré «
après la réfurreélhn dans la citt de JérufalefH appfHr*
tie du ciel ici-bas^,
C'eft aînfi que rameur du merveilleux & Tenvie
d'entendre & de dire des chofes extraordinaires , a
perverti le fens commun dans tous le* tems. Ceft
ainfi qu'on s'eft fervi de la fraude , quand on n*a pas
eu la force. La religion chrétienne fot d'ailleurs fou-
tenue par des raifons ff folfdes , Que tout cet amas
d'erreurs ne put Tébranler/ On dégagea l'or pur de
tout cet alliage , & l'églife parvint par degrés à l'état
où nous la voyons aujourd'hui.
DKS. MIRACLE S.
Revenons toujours à la nature de- l*homme ; il n'aî-
me que l'extraordinaire ; & cela eft fi vrai que fi-tôt
que le beau , le fublime eft commun , il ne parait
plus ni beau ni fublime. On veut de l'extraordinaire
en totit genre ; & on va jufqu'à Pimpoffible. L'hif-
toire ancienne reffemble à celle de ce chou plus grand
qu'une maifon , & à ce pot plus grand qu'unie églifil,
fait pour cuire ce chou.
Quelle idée avons-nous attachée au mot miracle^
^ui .d'abord figniiiait cbofe admirable ? Nous avona
î^
a) Irénée chap. XXXV. liv. V.
h ) Tert. contre Marcion liv. IIL
fitii»^
H iîîj
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■Jimm
i2b D k é M I R A c L E i
dît', c*eft ce <{\xt h nature ne peut opér^ , C'èft cfc
qui eft contraire à toutes (es loix. Ainli l'Anglais qdi
promit au peuple de Londres de fe mettre tout en.
^ier dan& ûn^ boutieille de deux pintes , annonçait
Ûii miracle. Et autrefois on n'aurait pas. manqué de
léj^endairofi quiàurafent affirmé racçompliflement dé
c« prodige ; 6'il en était reyenu qîielque chofe au
Couvent.
^. Noj!ks, croyons fan^ difficulté aux^ Vrais miracles %
Qpéfés danç notre fainte religion , & chez les Juift
4ont la religion prépara la^ nÂtre. Nous ne, parlons
ici que des autres nations , & nous ne raifQnhons
que fuivant les rég!«es du boii fens , toî&joùrs fourni*
fis à la Irévélatiom
, Quiconque n'eft;pas illuminé par la foi, ne peut
regarder un miracle que comme une contravention
.aux loix éternelles .de la nature.. Il ne lui parait j)^s
ppffible que DiEV dérange Ton propre ouvrage ; il fait
que tput ,e(l l.ié d^ns l'univers par des chaînes que
rien pe peut rompre. Il faié que Dieu étant immua-
ble , fes loix le font auiG , & qu'une roue de la ji;rande
machine ne peut s'arrêter , faut que la nature entière
foit dérangée.
Si Jupiter en cotochant avec Akmihe fait une nuft de
Vingt - quatre heures lorfqù'elle devait être de douze ,
il eftnéceflaire que la terre s'arrête dan* foh cours,
]& refte immobile douze heures entières. Mais cdm-
Vne les mêmes phénomènes du. ciel reparaiffent la nuit
•fuiVante ; il eft néceflaire aufC que la lune & toutes
teà planètes. fè foient arrêtées. Yoflà une grande ré-
.volution dans tous les orbes céleftes , en faveur d'une
femme de Thèbes en Béot}^.
Un moA rclflufctfe au bout àe quelques jours : il
^tapt que toutes les parties imperceptibles de fou corps
\}A s'étaient exhalées dans l'air , & que les vents
iHgè'^'' vr ■ Il 11 miùÉÊàsiif^imaiifsim
ilÉBÉBBMtti
"«i^iii
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lHS»jii»i T'y ■■y ^minn ■ -r Wfi^
Des miracles. 121
'
rniT-^
avaient emportées au loin , reviennent fe mettre cha^
cunè à Iéur,])lace , que les vers & lel oifeaux , ou
les autres aniniaux nourris de la fubftanee de ce cada-
vre , rendent chacun ce qu'ils lui ont prié. Les vers
engraifTés des entràilljes de cet homme ,auront été
mandés pat des hirondelles , ces hirondelles par des
pigriéches , ces pigriéches par des faucons , ces fau-
cons par des vautours. Il faut que chacun reftitue pré-
cîfément ce qui appartenait au mort : fans quoi ce ne
ferait plus la même perfonne. Tout cela n'eft rien to«
cor , fi Tame ne revient dans fon hôtellerie.
Si l'Etre éternel qui a tout prévu , tout arrangé »
qui gouverne tout par des loix immuables , deviient
contraire à lui-même en renverfant toutes fts loix 9
ce rie peut être que pour l'avantage de la nature en-
tière. Mais il parait cbhtradiâoiire dé fuppofer un cas
où le créateur & h maître de tout, puifTe changer
Tordre dû monde pour le bien du monde. Car ou il
a prévu le prétendu befoin qu'il ea aurait , ou il ne
l'a pas prévu. S'il la prévu , il y a mis ordre dès It
commencement ; s'il ne Ta pas prévu , il n'eft plus
Dieu.
On dit que cVft pour faire plaifir à une nation, ^
ùné ville , à une famille , que l'Etre éternel refTufcitè
Pé/opr , Hippoliu , Hérès , & quelques autres fameux
perfonnages ; mais il ne parait pas vraifemblable que
, le.maitre commun de l'univers oublie le foin de cet
tinivets en faveur de cet Hippolite & de ce Péiops.
Plus les miracles font incroyables ( félon les faibles
lumières de notre efprit ) ^ plus ils ont été crus. Cha-
que peuple eut tant de prodiges , qu'ils devinrent des
thofes très ofrdinaires. AuIB ne s'avifait-on pas de nier
ceux de fes voifins. Les Gifeqs difaient aux Egyptiens,
aux nations afiatiques , Les Dieux vous ont parlé quel-
quefois , ils nous parlent tous les. jours ; s'ils ont com-
battu Vingt fois pour rovls , ils fe font niis quarante
?
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<
% lit D B s M I R A C L £ ^. ^
fois à la tète dt nos arméts. Si tous ave2 des meta-
ttiorphofes , Hous en avons cent fois plus que vous^
Si vos animaut parlent , les nôtres ont fait de très
beaux difcours. Il n'y a pas même jufqu'aux Romains
chez qui les bétes n'ayent pris la parole pour pré^
dire Pavcnir. Tite^Live rajyporte qu'un bœuf s'écria
en plein marché, Rome éprends garde à toi, Pline dans
fon livre huitième dit qu'un chien parla lorfque Tar'
quin fut chaffé du trône. Une corneille , fi Ton en
crôft Suétone , s'écria dans le capitole , lorqu'on allait
affaffiner DomiPien ; FJlai panta kahs , c'eft fort bien
fait, tout eftbien. C'eft ainfi qu'un des chevaux d'-rf-
tbille nommé X4inte prédit à fon maître qu'il modrra
devant Troye. Avant le cheval à' Achille , le bclîcr
de PbryxHt avait parié , aufll-bien que les vaches
t!a mont OHmpe. Ainfi au -lieu de réfuter les fables,
on ertchériffâit fur elles. On ftifiit comme ce prati^
cien à qui on prodoifatt une faufle obligation ; il ne
s'amufa point à plaider , il produifit fur le champ une
faulTe quittance..
Il eft vrai que nous ne voyons guère de morts reffut
cités chez les Romains , ils s'en tenaient à des gué-
rifons miraculeufes. Les Grecs plus attachés àlamé-
tempfycofe , eurent beaucoup de réfurredions. Ils te-
naient ce fecret des orientaux , de qui toutes les fden-
ces & les fuperfl;itions étaient venues.
De toutes les guérifons mîraculetifes les plus attcf-
tées , les plus authentiques , font celles de cet aveugle
à qui l'empereur Vefpajien rendit la vue , & de ce
paralytique auquel il rencjit l'^ufage de fes membres.
C'eft dans Alexandrie que ce ce double mirncle s'opère;
c'eft devant un peuple innombrable, devant des Ro-
mains , des Grecs , des Egyptiens. C'eft fur fon tri-
bunal que Veffajîen opère ces prodiges. Ce n'eft pas
lui qui cherche à fe foire valoir par des prefttgcs , dont
un monarque aifermf n'a pas befoin. Ce font c« deux
malades eux - mêmes , qui profternés à fes pieds le
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r
DSS MIRACLES. I^?
eonîntent de les guérir : il rougit de leurs prières <
il s'en moque , il dit qu'une telle guérifon n'eft pas
au pouvoir d'un mortel. Les deux infortuniés infiftent :
Sérapis leur eft apparu ; Sérapis leur a dit qu'ils feraient
guéris par Vefpqfien. Enfin il fe laiffe fléchir , il les
touche fans fe flatter du fuccès. La Divinité favora^
Ue à fa roodeftie & à fa vertu , lui communique fon
pouvoir ; à l'inftant Taveugle voit & l'eftropié marche.
Alexandrie , TEgypte , tout l'empire applaudilTent à
Vefpajien favori du ciel. Le miracle eft configné dans
tes archives de Tempire, & dans toutes les hiftoires
contemporaine^. Cependant avec le tems ce mhracle
n'eft CTu de perfonnt , parce que perfonne n'a intérêt
dt le foutenir»
ISi Ton en croit je ne fais quel écrivain de nos fiéctes .
barbares , nommé Helgaut , le roi Robert fils de Hugues \
Capet guérit aufli un aveugle. Ce don des miracles JÊ
dans Robert fut apparemment la récompenfe de la cha- m
I rite avec laquelle il avait fak brûler le confèifeur de fa 1
femme & des chanoines d'Oriéans accufés de ne pas
croire l'infaillibilité & la puiflance abfolue du pape ,
& par conféquent d'être manichéens : ou fi ce ne fut
pas le prix de cette bonne a<ftion , ce fut celui de
l'excommunication qu'il fouffirit pour avoir couché
avec la reine fa femme.
Les philofophes ont fait des miracles comme les
empereurs & les rois. On connaît ceux A*Apoll9mos
de Thiane ; c'était un philofophe pythagoricien , tem-
pérant , chaflie , & jufte , à qui l'hiftoire ne reproche
aucune adion équivoque , ni aucune de ces faibkfies
dont fut accufé Socrate. Il voyagea jchez les mages
& chez les bracmanes , & fut d'autant plus honoré
partout , qu'il était modefte , donnant toujours de
(âges confeils , & difputant rarement. La prière qu'il
avait coutume de faire aux Dieux eft admirable : Dieutc
immortels , accor^dez - nous ce que vous jugerez con»
venabie , fS dont nous ne foyons pas indignes. U n'a-
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124 Des miracles.
▼ait nul cntoufiarme ; fcs diTcipIes en eurent : îTs lui
fuppofcrcnt des miracles qui furent recueillis pat Pér-
lùjhrate. Les Thianeens le mirent au rang des demi*
Dieux , & les empereurs Romains approuvèrent fon
apothéofe. Mais avec le tcms , rapothéofe A^Apallo^
nior eût le fort de celle qu'on décernait aux empe-
reurs Romains , À la chapelle à'ApoUonios fut aufli
déferte que le Sodtâiiion élevé par l^s Athéniens à
Socrate.
Les rois d'Angleterre depuis St% Edouard , jufqu'au
roi Guillaume III 9 firent journellement un grand mi-
racle , celui de guérir les ecrouelles que les médecins ne
pouvaient guérir. Mais Guillaume III ne voulut point
faire de miracles , & fes fuccefTeurs s'en font abftenus
comme lui. Si l'Angleterre éprouve jamais quelque
grande révolution qui la replonge d&ns Tignorance)
alors elle aura des miracles tous les jours.
Des t s vM p l e s.
On n*eut pas un temple fi. t6t qu'on reconnut vn
Dieu. Les Arabes , les Caldéens , les Perfans qui révé-
raient les aftres ne pouvaient guère avoir d'abord des
édifices confacrés; ils n'<t valent qu'à regarder le ciel,
c'était là leur temple. Celui de 6f/à B^bilone pafle
pour le plus ancien de tous ; mais ceux de Brama
dans l'Inde, doivent écre d'une antiquité plus recu*
lée ; au moins les brames le prétendent.
U eft dit dans les annales de la Chine que les pre-
miçrs empereurs fdcrifiaient dans un temple. Gehii
à! Hercule à Tyr ne p trait pas itre des plus anciens.
Hercule ne fut jamais chez aucun peuple qu'une divi-
nité fecondaire ; cependant le temple de Tyr eft très
antérieur 4 celui de Judée. Hiram en avait un ma-
gnifique lorfque Salomon aidé par Hiram bâtît le fien.
Hérodote qui voyagea chez les Tyriens , dit que de
(on tems les archives de Tyr ne donnaient à ce tem-
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P£3 TEMPLES I2f S
pie que deux mille trois cent ans d'antiquité. L'Egypte
était ren)pUe de temples depuis tpngceois. Hérodote dit
enc. r qu'il apprit que le temple de r«/c«i« à Memphis
avait été bâti pui M^nèi vers, le tems qui répond à trois
mille ans avant notre ère ; & il n'eft pas à croire que
les Egyptiens euITent élevé un temple i Vulceàu avant
d'en avoir donné Mn k Ifishut principale divinité.
Je ne puis concilier avec les mœurs ordinaires de
tous les hommes , ce que dit Hérodote au livre fé-
cond ; il prétend qu'excepté les Egyptieas & les
Grecs tous les autres peuples, avaient coutume de
coucher avec les femmes au milieu de leurs tem-
ples. Je foupqonne le texte grec d'avoir été corrom-
pu ; les honunes les plus fauvages s*abftiennent de
cette aâion devant des témoins. On ne s'eft jamais
avifé de carefTer fa femme ou fa maitrefle en pré-
fence de gens pour qui on a les moindres égards.
■i
Il n'eft guère podible que chez tant de nations
qui étaient relîjgicufes jufqu'au plus grand fcrupute ,
tous les temples euffent été des lieux de profticution.
Je crois qu^Hérodote a voulu dire que les prêtres
qui habitaient dans l'enceinte qui entourait le tem-
ple , pouvaient coucher avec leurs femmes dans cette
enceinte qui avait le nom de tempie , comme en
ufaieat les prêtres Juifs , & d'autres : mais que les
prêtres Egyptiens n'habitant point dans l'enceinte ,
s'abftenaîent de toucher à leurs fem^nes quand ils
étaient de garde dans les porches dont le temple était
entouré.
Les petits peuples furent très longtcms fens avoir
de temples. Ils portaient leurs Dieux dans des coffres ,
dans des tabernacles. Nous avons déjà vu que quand
les Juifs habitèrent les déferts à l'orient du lac Af-
phaltide,iîs portaient le tabernacle d^sDieu Renu
pban , du Dieu Molok^ du Dieu Kium , comme le di-
fent Jirénûe^Amos & St. Etienne.
^9mm
I
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^ ia« Dif TBMPtBS.
C'éft ainfi qu'en ufaient teutei les aotres petites na«
tions du défert. Cet ufsge dait étte le plus ancien
de tous , par la raifon qu'il eft bien plus aifé 4*ayoir
un çqffire que de bétir un grand édifice,
Çeft probablement de ces Dieux portatif que vint
la coutume des proeeffions qui fe firent chet tous les
peuples. Car il femble qu'on ne fe ferait pas avifé
d'ôter un Dieu de fa place dans fon temple pour le
promener dans la ville ; & cette violence eût pu par
raitre un {kcrilè|e , fi l'ancien ufage de porter fon
Dieu fur un chariot , ou fur un brancard , n'ayai^ pas
été d^ longtems établi.
1
î
La plupart des temples furent d'abord des cita^
délies y dans lefquellcs on mettait en fûrçté les cho-
fes facrées. Ainfi le palladium était dans la f<»^terefle
de Troye , les boucliers defcendys du ciel £p gardaient
dans le papitole,
Nous voyons que le temple des Juiffe était une mai<*
ton forte , capable de foutenir un aifaut. Jl eft dit
au troifiéme livre des Rois que Tédifice avait foixante
coudées de long , & vingt de large ; c'eft environ qua-r
tre - vingt; dix pieds de long fur trente de face. Il n'y
a guère de plus petit édifice public. Mais cette mair
fon étant de pierre & bâtie fur une montagne , pou-
vait au moins fe défendre d'une furprife : les fenêtres
qui étaient beaucoup plus étroites au d^ors qu'en
dedans , reffemblaient à des meurtrières.
Il eft dit que les prêtres logeaient dans des appentis
de bois adofles a la muraille.
Il eft diflScile de comprendre les dimenfions de
cette architeébure. Le même livre des Rois nous ap-
prend que fur les . murailles de ce temple il y avait
trois étages de bois : que le premier avait cinq cou«
dées de large , le fécond fix , & le troifiém^e fept. Ces
"Bprf|bS)'%
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I
D t î TEMPLES. 127 ||
proportioiis ne fbnt pas les nôtres; ces étages de bois
sauraient furpris Michel Ange & Brama^tte. Quoi qu'il
en foit 9 il faut confidérer que ce teiBplo était bâti
fur le penchant de la montagne Moria , & que par
eonféquent il ne pouvait avoir une grande profon-i
deur. Il (alait monter plufieurs degrés pour arrivei;
à la petite efplanade où fut bâti le fanduaire , long
de yingt coudées. Or un temple dans lequelJl faut
monter & defcendre eft un édifice barbare. Il était
i^eoommandable par fa fainteté ^ mais non pas par fon
atchîtedure. Il n'était pas néceâaire poui* les defleina
de DiiU que la ville de Jérufalem fik la plus magni*'
fique des vill^ , & (on peuple ie plus puiflant des
peuples ; il n'était pas nécefTaire non plus que fon
temple furpaflat celui des autres nations ; le plus beau
des temples eft celui où les hommages les plus purs
lui font offerts,
La plupart des commentateurs fc font donné la
peine de deffiner cet édifice chacun à fa manière. Il
eft à c/oîre qu'aucun de ces dcflSnateurs n*a jamais
bâti de maifon. On conçoit pourtant que ces murail-
les qui portaient ces trois étages étant de pierre , on
pouvait fe défendre un jour ou deux dans cette petite
retraite.
Cette efpèce de fortereffe d'un peuple privé de$
arts , ne tint pas contre Nabufardan , l'un des capi-
taines du roi de Babilone que nous nommons Nabu-^
çadonofor.
. Le fécond teippfe bâti par Nébémie fut moins grand
€c moins fomptueux. Le livre d'JEfdras nous apprend
que les murs de ce nouveau temple n'avaient que
trois rangs de pierre brute , & que le refte était de
iïmplie bois. C'était bien plutôt une grange qu'un tem-
ple. Mais celui qu'Hérode fit bâtir depuis fut une
- vra'!e fortereffe. Il fut obligé , comme nous l'apprend
9 Jofepb , de démolir le temple de Nébémie , qu'il ap-
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i2g Des t s m p l I s.
g
pelle le temple d*Aggie. Hérode combla n&e pa^e
du précipice au bas de la montagne Moria pour faire
une plate -forme appuyée d'un très gros mur fur le-
quel le temple fut élevé. Près de cet édifice était la
tour Antonia qu'il fortifia encore , dp forte que ce tem^
pie éui^ une vraie ciudelle.
En effet , les Juifs ofèrent s^y défendre contre Tar-
mée de Titus , jufqu'à ce qu'un foldat Romain ayant
jette une folive enflammée dans l'intérieur de ce fort ,
tout prit feu à l'inftant. Ce qui prouve que les bftti-
mens dans Penceinte du temple n'étaient que de bois
du tems d!J^ir.oie , ainfi que fous Nibimie & foys
Sahmon.
Ces bitimens de &pin contredifent un peu cette
grande magnificence dont parle l'exagérateur Jofepb,
Il dit que Tite étant entré dans le landualre Tad- i^
mira , & avoua que fa richefle paflait fa renommée. S
Il n'y a guère d'apparenpe qu'un empereur flopiain 1
au milieu du carnage , marchant fur des monceagiç
de morts , s'amufôt à confidércr ayep admiration pn
édifice de vingt coudées de long tel qii'était le fanpr
tuaire , & qu'un homme qui avait vu le capitole fût
furpris de la beauté d'un temple juif. Ce temple était
très-faint , fans doute ; mais un fandtuaire de vingt
coudées de long n'ayait pas été bâti par un Vitruve.
Les beaux temples étaient c%\i% d'Eph]èfe , .d'Alexan-
drie , d'A^thènes , d'Olimpie , de ^ome^
Jofeph dans fa déclamation contxt Appion\ dit qu'il
ne felait qv^un temple aux Juifs , parce qtCil tiy a
qu^un Dieu, Ce raifonnement ne parait pas concluant ;
car fi les Juifs avaient eu fept ou huit cpnt milles
de pays , comme tant d'autres peuples « i) aurait falu
qu'ils paflaffent leur vie à voyager pour aller facri-
fier dans ce temple chaque année. De ce qu'il n'y a
qu'un Dieu , il fuit que tous les temples du mond.e ne
doivent être élevés qu'à lui > mais il ne fuit pas que la
terre
fc^iHCT». . mxl^n
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i^^
D B s T £ M P LE s. 12^ »
te^e ne doive avoir qu'tin temple. La foperftitioii à
toàjoors une mauvaife logique.
- D'ailleers comment Jofepb peiit-il dire qu'il ne fa-
laic ((u'un temple aux Juift , lorfqu'ils avaient depuif
le règne de Ptolomii PbilanuPor le temple aiftz connu
de VQnion k Bubafte en Egypte ?
De £A magie;
Qu'eil-ce que la magie ? Le fecret de faire ce qdt
hé peut &lfe la #ature ; c'eft la chofe itnpoffibie ;
aufli a-t-on cru à la magie dans tous les tems< Le
mot eft venu des Mag , Magdim ^ ou Mages de Cal<^
dée.' Ils en favaient pltfs que les auéres ; ilâ recher-^
chaiént la caufe de la pluie & du beau tôms ; & bien-
tôt ils palTèrent pour fai^e le beau tems & la plaiej
Ils étaient aftronomes ; ks plus ignôrans & Us plus
hardis furent aftrologues. yn événement arrivait fous
la conjondion de deux planètes ^ donc ces deux pla-
nètes avaient caufé cet événement \ & les aftrologues
étaient les maîtres des planètes. Des imaginations
frappées avaient vu en fonge leurs amià mourans ou
morts \ les magiciens fai&ient apparaître les tàotx».
Ayant connu le ôours de la lune , il était tofut fim^
pie qu'ils fiflent defcendre la lune fur la terre. Ils dif-
pofaient même de la vie des homiiies , foit en faifant
des figures de cire ,* fo|t en prononçant )e nom dé
Dieu , ou celui du diable. Clément d'Alexandrie i
dans fes ftromatcs , livre 1er, dif que fbîvant uVl an-
cien auteur , Jd^e prononçai le nom de Ibabo , ou
Jebovab ^ d'une 'manière fi. efficace à l'oreille du roi
d'Egypte Pbara Nekefr , que ce roiren^ mourut fyr U
champ.
Enfin , depuis Jankir Se Mwkbrèf , qûî ééiteflf les
fereiers à brevet de Pifr^^rho»' ^ jufqu'à la maréchale
diAncrt qui fut brûlée îr Paris pour avoir tjiéuh do^
EJfiUfurlis mœurs , &c. Tom. Il ^
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i
smamaaBaBmguKmsBBSsaB
D 8* . L A M A O I K.
^^^min
I
blaoc datifi la pleine lime , il n'y « pas en un feul tems
fans fortilège.
La pythonifle d'Endor qyi évoqua l'ombre de Sa^
muel , eft affez connue ; il eft vrai qu'il eft fort étrange
que ce mot de Python qui eft grec , fût connu des
Juifs du tems de Scuih Pluficurs favans en ont con-
clu que cette hiftoire ne fut écrite que auandies Juifs
furent en commerce avjec .les Grecs aptes Alexandre ;
mais ce n'eft pas ce dont il s'agit ici.
Revenons à la magie. Les Juii^ ^n firent le métier
dès qu'ils furent répandus dans le monde. Le fabbat
des farciers en eft une preuve parlante ; & le bouc
avec lequel les forcières étaient fuppofées s'accoupler,
vient de cet ancien commerce que les Juifs eurent
avec les^boucs dans le défert , ce qui leur èft reproché
^8 le Lévitique , chap. XVU.
Il n'y a guère eu parmi nous de procès criminels
de forcielrs , fans qu'on y ait impliqué quelque Juif.
Les Romains , tout éclairés qu'ils étaient du tems
A^Augufie , s'infatuaient encor des fortilèges tout com<
me nous. Voyez Téglogue de Virgile intitulée Pbar»
maceutria :
Carmna veî œh pojitnt deduare iunam,
La vdx lie renchanteur fait deicendre la Innl.
His ego^fétpe bi^mferi S^fe çondereJUvis
Murim , ftpe aninm imis exire /efuj/aris.
Mosris devenu loup fe cadiait dans les Ih^s ^
i)ii creux de leur tombeau fai vu forttr les amts.
pn s'étonne que Virg^e paflc aujourd'hui à Naples
j)oui: un forcier. H n'en faut pas chercher la rdfon
ailiers que dans cette é^ogue.
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r
Db la magis.
181 f
Moract reproche à Sagana & k Camdia leurs hor-
ribles fortilèges. Les premières têtes de la républi*
que larenc ii&âées de ces imaginations funeftes. Sest^
tus ^\t^% du grand Pompii , immola un enËint dans
un de ces eachantemens.
1^ philtres pour Te f^ire aimer étaient une magie
plus douce ; les Juifs étaient en poiTeffion de les Ven-
dre ^flz dames Romaines. Qeux de cette nation qui
ne pouvaient devenir de riches courtiers , faifaient des
prophéties ou des philttes.
Toutes ces extravagances , ou ridicules , ou affret»>
Tes , fe perpétuèrent chez nous ; & il n'y a pas un
fiécie qu'elles font décréditées. Des miflionnaires ont
été tout étonnés de trouver ces extravagances au
bout dn monde ; ils ont plaint les peuples à qui le
démon les infpitaft. Eh mes amis , que ne refilez^
vous dans votre patrie*? vous n'y auriez pas trouvé
plus de diables , mais vous y auriet trouvé tout au^
tant de fottires.
Vous auriez vu des milliers de miférables aflez in-
fenfés pour fe croire forciers > & des juges aflez im-
bécilles & aflez barbares pour les condamner aux
flammes ; vous auriez vu une jurifprudence établie
en Europe fur la magie , comme on u des loix fut
le larcin & fur le meurtre ; jurifprudence fondée fiit
tes déciCons des conciles. Ce qu'il y avait de pis,
c'eft que ks peuples voyant que la magiftrature 6k
féglife croyaient i h magie , n'en étaient que plus
invinciblement perfuadés de fon exiftence ; par c5nw
féquent , pltis on pourfuivait les forciers , plus il s*en
formait. D'oû venait une erreur fi foneftc & fi géw
nérale? de l'ignorance ; ■& och prouve que ceux qui
détrompent les hommes font leurs véritables bien-
fidifkeurs.
On t dit q«^ le oonfentOBielit de totis les hom-
ma était um preuve de la vérité, %clle preuve 1
I îj
:
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»(S*
XÉêâ^
S «3*
«*«#»
De lamagie.
tous les peuples ont oru à la magie, à rafr.ologîc,
aux oracles , aux influences de la lune. Il eût falu
dire au moins que le confentemerit de tous les fa-
êes était , non pas une preuve , mais une efpèce de
probabilité. ' Et quelle probabilité encore ! tous les
ûges ne croyaient-ils pas avant Copernic que la terre
était immobile au centre du monde ?
Aucun peuple n'eft en droit de fc môquei^d'un
autre. Si Rabelais appelle Picatrix , mon révérend
père en diable , parce qu'on enfeignaît la magie à
Tolède , à Salamanque & à Seviile , les Efpagnols
peuvent reprocher aux Français le nombre prodigieux
de leurs forciers.
La France eft peut-être de tous les pays celui qui
a le plus uni la cruauté & le ridicule. 11 n'y a point
de tribunal en France qui n'ait fait brûler beaucoup
de magiciens. Il y avait da^s l'ancienne Rome des
fous qui penfaient être forciers ; maia on ne trouva
point de barbares qui les brûlaflent.
Des victimes humaines.
Les hommes auraient été trop heureux s'ils n'a*
valent été que trompés \ mais le tems qui tantôt cor-
rompt les ufages , & tant&t les reâifie , ayant fait
couler le fang des animaux fur les autels ', des pré^
très bouchers accoutumés au fang , palTèrent des
animaux aux hommes ; & la fuperitition fille déna*
turéede la religion s'écarta de la pureté de fa mère «
au point de forcer les hommes à immokr leurs pro-
pres enfans , fous prétexte qu'il &lait donner à DllU
«e qu'on avait de plus cher.
Le premier facrifice de cette natqfe , fi l'on en
croit les fragmens àt Sancbomaton ^î)àt celui dejie-
bud chez les Phéniciens , qui fut immolé par ion
père Hillu environ deux mille ans avant notre ère.
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BiPrMRINpi
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Des TixiXiiiKs humaiitis. 13$ '
^— ^M^it— âfc*^— — — — ^— I II— ■— ^— — ^i— ^
C'était ta Heibs aà les mhdt étittv éitidnt «UJt et»
blis , oà la Syrie , la CaTdée , TEgypIè éttkat tvit flob
riflkntes ; ât déjà, dit Hirodoêe , on myiltme fittè
dans la^ Nil , pour obtenir de ce fleure un pbfai d»>
bordement , qui ne ftt ni trop fort , ni trop MtAc.
Ces abominables holocauftes s'établirent dans preA
que toute la terre. Paufanias prétend que iMc^m
immola le premier des viâimes humaines en Grèce^
Il falait bien que cet ufàge ftt reçu du tems de I9
guerre de Troye , puis ({m^ Homère fait immoler par
AcbiUe douze Troyens à l'ombre de Patrocle. m*
mire eût-il ofé dire une chofe fi horrible ? n'aurait»
il pas craint de révolter tous fes ledeurs , fi de tels
holocauftes n'avaient pas été en u&ge ? Tout poêle
peint les mœurs de fon pays.
-,
Je ne parle pas du facrifice à^lpbigénie & de cèhsi
Sldamante fils &Iiominie : vrais ou faux ils prouvent
Pppînîon régnante. On ne peut guère révogocr en
doute que les Scythes delà Tauride immolaflcnt des
étrangers.
r Si nous ddcendons à des tems plus modernes , les
Tyriçns & les Carthaginois , dans les grands dangers ^
Ëicrifiaient un homme à Saturne. On en fit autant enlt*-
.Ue ; & lès Romains eux-mêmes qui condamnèrent cet
horreurs , immolèrent deUx Gaulois &tleiix Grecs pour
expier le crime d'une véftale. C'eft Pltatirque qui no88'
Fapprend dans (es queftions fur les Romains.
Les Gaulois , les Germains eurent cette horrible
coutume. Les druides brûlaient des viâimes humai-
nes dans de grandes figures d'ofier : des forcières^^
chez les Germains , égorgeaient les hommes dévoitéf
à la mort , & jugeaient de l'avenir par le plus ou le
moins de rapidité du fang^ui coulait de la bleiffire.
, |t^ crois bien que ces facrifices étaient rares : s'ils
1 avaient été fréquens , fi on en avait fait des féte$
I ^^^
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iàsg^
-annnellet ; fi chique Bimille avait eu condnoellemeiif
à craindre que les prêtres vinflent choifîr la plus belle
fille 9 ou le fils aine de la maifoa pour lui arracher
le cœur faintement fur une pierre con&çrée , on au*
rait bientôt fini par immoler les prêtres eux-mêmes.
Il eft très probable que ces faints parricides ne fe
commettaient que dans une néceffité prefTante , dans
les grands dangers où les homme.s font fubjugués par
la crainte , & où la fiiufTe idée de l'intérêt public
formait rintérêt particulier à fç taire,
~ Chez Içs brames « toutes les veuves ne fe brûlaient
pas tQÙjours fur les corps de leurs maris. Les plus
dévotes & les plus folles firent de tems immémorial «
'& font encor cet étonnant facrîfice. Les Scythes immo-
lèrent quelquefois aux mânes de leurs kans les ofiiciers
Içfi plus chéris de ces princes. Hirodqfe dit qu'on les
jempalait autour du cadavre royal ; mais il ne parait
ppint par l'hiftoire que cet ufage ait duré longtçms.
Si nous iifîohs Thiftoire des Jui& écrite par un au^
teur d'une autre nation , nous aurions peine à croire
qu*il y ait eu en effet un peuple fugitif d'Egypte ,
qui foit venu par ordre exprès de Dieu immoler fept ou
huit petites nations qu'il ne connaiifait pas , égorger
làns miféricorde toutes les femmes , les vieillards & .
les enfans à la mammelle , & ne réièrver que les peti*
tes filles ; que ce peuple (àint ait été puni de fon
Dieu quand il avait été aflez criminel pour épargner
QA feul homme dévoué à l'anathéme. Nous ne croi-
rions pas qy*un peuple fi abominable eût pu exifter
fur la terre : ipais comme cette nation elie-méme nous
rapporte tous çe^ faits dans fes livres (kints , il faut
}a croire.
Je ne traite pohrt ici la queftion fi ces livres ont
^té înfpirés. Notre fainte églife qui a les Juîfe^en
horreur , nous apprend <jue le? livres juifs ont été
1 ' di<^és par leDlEÛ créateur &père de tous leshom^
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t
rite
H
HUMAINE
2Î
mes; je ne puis en former aucun doute, ai me per^
mettre même le moindre raifonnement.
Il eft vrai que notre faible entendement ne peut
concevoir dans Dieu une autre fagefle , une autre
juftice , une autre bonté que celle dont nous avons
ridée ; mais enfin , il a fait ce qu'il a voulu ; ce n'eft
pas à nous de le juger ; je m'en tiens toujours an
fimple hiilorique.
Les Jttift ont une loi par laquelle 'Il leur eft ex-
preflement ordonné de n'épargner aucune chofe > aucuft
homme dévoué au Seigneur. On ne pourale racheter^
il faut qu^il meure , dit la loi du Lévitique au chapi-
tre XXVII. C'eft en vertu de cette loi qu'on voit Jepbti^
immoler fa propre fille , le prêtre Samuel couper en
morceaux le roi Agc^. Le Pentateuque nous dit que
<)ans le petit pays de Madian , qui eft environ de neuf
lieues quarrées , les Ifraêlites ayant trouvé fix cent
foixante & quinze mille brebis, foixante & douze mille
bœufs, foixante & une mille ânes, & trente-deux mille
filles vierges , Moife commanda qu'on maflaprât tous
les hommes , toutes les femmes , & tous les enfans ,
mais qu'on gardât les filles, dont trente -deux feule-
ment furent immolées. Ce qu'il y a de remarquable
dans ce dévouemeht , c'eft quç ce même ilf9(/> était
gendre du grand -prêtre des Madianites Jitbro ^ qui
lui avait rendu les plus fignalés fervices , & qui l'avait
comblé de bienfaits.
Le même livre nous dit que Jofui , fils de T^un ,
ayant pafTé avec fa horde la rivière du Jourdain à
pied fec , & ayant fait tomber au fon des trompettes
les murs de Jérico dévouée à l'anathéme , il fit périr
tous le$ habitans dans les flammes , qu'il conferva
feulement Rcéab la paillarde & fa famille , qui avait
caché les efpiens du faint peuple : que le même Jofui
dévoua à la mort douze mille habitans de la ville de
S^ tiaï , qu'il immola au Seigneur trente & un rois du
\3f I iiij a
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i^ M ICI» ^*! '^'fjglfelt
1^6 Des victimes humaines. *
pays , tous fournis à Vanathémc , ëc qui furent pen«
dus. Nous n'avons rien de comparable à ces aflaffinats
religieux dans nos derniers tems , fi ce n'eft peut-être
la St. Bafthelemi jt les mafîacrcs d'Irlande*
Gc qtt'U y a de trîfte , c'eft que plufieurs perfonncç
doutent que les Juifs ayent trouvé fix cent foixante
& quinze mille brebis , & trente - deux mille filles
pucelles dans le village d'un défert au milieu des
rochers , & que perfonne ne doute de là St. Barthe*
lemi. Mais ne ceffons de répéter combien les lumiè-
res de notrç raifon font impuiflantes pour nous éclai-
rer fur les étranges événemens de l'antiquité , & fur
les raifons que Dieu , maître de la vie & de la mort ,
iJ>ouvait avoir de choifir le peuple Juif pour ipxtermir
per le peuple Cananéen^
fi
Pk$ MysTiRE$ DE Cérès Eleusine.
Pans le chaos des fuperftitions populaires qui au*,
raient fait de prefque tout le globe un vafte repaire
des bétes féroces , il y eut une inftitution falutaire,
qui^çmpécha une partie du genre -humain de tomber
dans un entier abrutiffement ; ce fut celui des myflè-
res & des expiations. Il était impoiOble qu'il ne fe
trouvât des efprics doux & fages parmi tant de fous
crpels,& qu'il n'y eût des phHofophes qui tàchaffen^
d^ ramener les hommes à la raifon & à la morale.
Ces faces fe fçryirent de la fuperftition même pour
en corriger les abus énormes, comme on employé le
cœur des vipères pour guérir de leurs morfures ; on
mêla beaucoup de fables ayec des vérités utiles ^ ^ Içs
vérités fe foutinrênt par les fables.
On np connaît plus lets myftèrqs ifi Zaroofire, Qa
fait peu de chofe de ceux d'^x ,- mais nous ne pou^
yons douter qu'ils n'annonqaflent le grand fyftême
d'pnç m futpre -, car Çelfa dit ^ Qn^^ne , liyrp Vlllf,
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msmét^
Des MtsTèREs de Cérès. 137 «
Vouf vfnis vanpiz de croire des peiftes éternelles^ Sf
tous Ips tfiimjhres des myjiires ne les anncinçèrtfft''ils
pas (fux initiés ?
L'unité de D|EÇ était le grand dogn^e de tous les
ihyftçres. Nous ayons encor la prière dds prftreflïs
d'ifis confervée dans Apulée. Les puijfanees çélejies
te fervent ,• les enfers te font fournis ,• Vt^ivers to^rne
fous ta mains tes piçds foulent le Tartare $ les aftres
répondent à fa voix^ lesfaifons revieni$ent a fes çrdress
ffs f If mens fobiijfent,
^ Les cérémonies myftérîeufes de Céris furent une
imitation de celles à'Ifts, Ceux qui avaient commis
des crimes les confeflaient & les expiaient : on jeû-
nait , on fe purifiait , on donnait l'aumône. Toutes les
cérémonies étaient tenues fecrettes fous la religion
du ferment pour les rendre plus vénérables. Les myf-
tères fe célébraient la nuit pour infpirer une fainte
horreur. On y repréfentait des efpèces de tragédies ,
dont le fpedtacle étalait aux yeux le bonheur des juftes
& les peines des méchans. Les plus grands - hommes
de l'antiquité , les Platons , les Cicérons ont fait Té-
loge de ces myftères , qui n'étaient pas encor dégé*
néréf dp leur pureté première.
De très fevans hommes ont prouvé que le fixiéme
livre de V Enéide n'eft que la peinture de ce qui fe
pratiquait dans ces fpedlacles fi fecrets & fi renom-
més. 11 n^y parle point à la vérité du Demiourgos qui
repréfentait le créateur ; mais il fait voir dans le vefti-
bule , dans l'avant-fcène , les enfans que leurs parens
avaieht laiffé périr , & c'était un avertiflement aux
pères & aux mères :
Céntinu^ audits veces , vagUus gf ifsgens , Qfc^
Enfuite paraiflait Minos qui jugeait les morts. Les
méchans étaient entraînés dans le Tartare , & les juftes
conduits dans les champs Elifées. Ces jardins étaient
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BMtaBaElÉtf|9HHË&
13g Des m t s t è r fi s
tout ce qu'on avait iriTenté de mieux pour les boni-
me» ordinaires. U n'y avait que les héros demi-Dieux
i qui on accordait l'honneur de monter au ciel. Toute
religi.on adopta un jardin pour la demeure des juftes ;
& ihéme quand les efleniens chez le peuple Juif reçu-
tei(it le dogme d'une antre vie , ils crurent que les
bons iraient après la mort dans des jardins au bord
de la mer : car pout les pharifiens , ils adoptèrent la
métempfycofe , & non la réfurredUon. S'il eft permis
de citer l'hiftoire facrée de Jesus-Christ parmi tant
de chofes profanes , nous remarquerons qu'il dit au
voleur repentant , Tu feras aujourd'hui avec moi dans
le jardin (a). II fe conformait au langage de tous
les hommes.
ILes myftères d*Eiet(lhte devinrent les plus célèbres. .
Une chofe très remarouable , c'eft qu'on y Ii(ait le coin- r
mcncement de la théogonie de Sanchoniaton le Phé- H
nieîen ; c'eft ufie preuve que Sanchoniaton avait .an- ^1
~ Boncé un Dieu fupréme , créateur & gouverneur du
monde. C'était donc cette dodrine qu'on dévoilait aux
initiés imbus de la créance du polythéifine. Figurons-
nous parmi nous un peuple fuperftitteux qui ferait ac-
coutumé dès fa tendre enfance à rendre à la Vierge , à
St, Jofepb^dux autres faints le même culte qu'à Dieu
k père. Il ferait peut-être dangereux de vouloir les
détromper tout - d'un - coup ; il fçrait fage de révéler
d'abord aux plus modérés, aux plus raifonnables , la
diftance infinie qui eft entre Disu & les créatures.
C'eft précifément ce que firent les myftagogues. Les
participans aux mvftères s'affemblaient dans le temple
de Cérêfy & l'hiérophante leur apprenait qu'au-lieu
d'adorer Cérêj conduîfant Triptolime fur un char traîné
par des dragons , il falait adorer le Dieu qui nourrit
les hommes , & qui permit que Cirés & Triptolime
miffent l'agriculture en honneur.
< , . (b) Loo-ehap. XXIII.
Sftgtfs^^^'™ I iiipiimateiwt I ■ mmSà
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IWPi***^
m^H^
&
B X C £ R È 6.
139 ^
CeUf eft fi vrai que TUérophamte commenqait par
réciCer les vers de l'ancien Orphée , Marchez dam ia
voie de la juftsce , adore» le Jeulnuâtre de Funivert ;
il eft tm y il eftjeulfar bd^mime , totts les êtres lui doL
vent léser exijience $ il agit dans euse & par etiss^ il
voit tostt , & jamais il sfa iti tm des yen» mortels.
J'avQpe que je ne conçois pas comment Paufanîas
S eut dke que ces Tcrs ne valent pas ceux ^* Homère \
faut convenir que du moins , pour le fens , ils
valent beaucoup mieux que llliade & rOdyfTée
entière.
Il ^t avouer 09e Tévéque fFarbttrton , quoique
très injufte dans plufieurs de fes décifions audadeu-
fes , donne beaucoup de force à tout ce que je ^iens
de dire de la néceluté de cacher Iç dogme de l'u-
nité de DiffCJ à un peuple entêté du polythéifme.
Il remarque. d'après Plntaraue que le jeune Alcibia*
de ayant alTifté à ces myfteres , ne fit aucunç diffi-
culté d'infiilter aux ftatues de Merctire dans une par-
tic de débauche avec plufîeurs de fes amis , & que
le peuple en fureur demanda la condamnation d'i^f
(ibiade.
Il falait donc alors la plus grande difcrétion pour
ne pas choquer les préjugés de la multitude. Ali»
sandre lui-même ayant obtenu en Egypte de l'hié-
rophante des myfteres , la permiflion de mander à
fa mère le fecret des initiés , la conjura en même
tems de brûler fa lettre après l'avoir lue , pour ne
pas irriter les Grecs,
Ceux qui trompés par un faux zèle ont prétendu
depuis que ces myfteres n'étaient que des débauches
infâmes , devaient être détrompés par le mot même
qui répond à initiis $ il veut dire qu'on commen-
tait pne nouvelle vie.
=9^1;
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fl
lifta
'
140 Des mystères
^ ■— — ^— I I III I wmummifmmmmm
Vïie preuve emx>r ftns tépltqiie que ca mtRères
n'étaient célébrés qoé pour iûTpirer là vectu Kux hoÉnt-
mes , c'eft la formule par bquelle on congédiait Tail
■feinblée. On prononçait chez les Grecs .les dettt an-
ciens mots phéniciens lùjf ompbet , Veiliez &Jqyeg
purs. EnfiQ pout dernière, preuve » c'eft que l'empe-
reur Néron coupable de la mort de fa n\ere » ne put
être reçu à ces myftèrcs qjuand il voyagea dans la
Grèce ; le crime était trop énorme : & tout empereur
qu'il était , les initiés n'autaient pas voulu Tàdmeé-
tre. Zqfîme dit auili que Conjlantin ne put trouver
de prêtres payeris qui Voulurent te purifier S Tabfou-
dre de fes parricides.
n y avait donc en elFét chez tes peuples qu'on
noI^hle payehs , gentils , idolâtres , une religion très
purç 5 tandis que les peuples & les prêtres avaient
des u(àges honteux » des cérémonies puériles , dés
doctrines ridicules , & que même ils verfaient ouel^
quefois lé fang Humain à l'honneur de quelques Dieux
imaginaires , méprifés & déteftés par les £iges.
dette religion pure cohfiftâit dans l'aveu de l'exit
tènce d'iin DiÉù fupréme , de £1 providence & de
fàjuftice. Ce qui défigurait ces myftères, c'était, fi
l'on en crçit Tertullien , la cérémonie de la régéné-
ràtiôri. Il falait que Pinitié parût reflufciter ; c'était
le fynibolé du genre nouveau de vie qu'il devait éni-
brafler. On lui préfèntait une couronne, il la fou-
lait aux pieds ; l'hiérèphaiïte levait fur lui le cou-
teau fkcré : l'initié qu'on feignait de frapper feignait
àùfii de tombée moit ; après quoi , il paraiflait ireC-
fufciter. Il y a encor chez les francs-maqons un reOe
de cette ancienne ce rémonie.
Paufanias dans fes arcadiques nous apprend que
dans plufièurs temples d'£/f 1^1»^ tm- flagellait lespé-
hftens , les initiés ; coutume odîeufe , intitKloite loi^-
â( tems après dans plufieurs églilès chrétiennes. Je 9e *
^^jipii ' ' - \mm\ti\y\ ■■■■■! ffcsS
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4oute pa6 qae (^«iis tous ces myftères.^, dont le fonds
était fi fage & fi utile , il n'eotràt beaucoup de fu«
perftîtions condannables. Les fuperltitions conduifi*"
rent à la débauche , qui amena le mépris. Il ne
reAs en&i de tous ces anciens myftères que des trou-
par de gueux que nous avons vus fous le nom d'E-
gyptiens & de Bohèmes coucjr r£urope avec des caf-
tagnettes , danfer la danfe ies prêtres d^Ifis , ven-
dre du baume , guérir la galle , & en être couverts ,
dire la bonne avanture , & voler des poules. Telle
a été la fin de ce qu'on a eu de plus lacré dans la
moitié de la terre connue.
Des Juifs , au tems ou ils commencèrent
a être connus.
Nous toucherons le moins que nous pourons à ce
S* qui eft divin dans l'hîftoire des Juifs ; ou fi nous fem-
mes forcés d'en parler , ce n'efl: qu'autant que leurs
miracles ont un rapport eflentiel à ta fuite des événe-
hiens. Nous avons pour les prodiges continuels qui
fignalèrent tous les pas de cette nation , le refpeA
qu'on leur doit. Nous les croyons avec la foi raifonna-
ble qu'exige Péglife fubftituée à la fynagogoe ; nous ne
les examinons pas, nous nous en tenons toujours à
Phiftorique. Nous parlerons des Juifs comme nous par-
lerions des Scythes & des Grecs , en pefant les proba-
bilités & en difcutant les faits. Perfonne au monde
n'ayant écrie leur hifioire qu'eux-mêmes avant que les
Romains détruififlent leur état , il faut ne confulcer
que leurs annales. /
Cette nation eft des plus modernes , à ne la regar-
der comme les autres peuples que depuis le. tems
où elle forme un établifTement , & où elle {^ofTède
Îune capitale, tes Juifs ne paraifTent confid^rés de
leurs voifins que dû tems de Scdomon , qui était à-
peu-près celui à^Héfîode & ^l Homère , & des premiers L
archontes .d'Athènes. ft
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||g[t>i«i inwpit. ''MitM
i ^ 14s D A • J V I t ft. ff
le MA Je Srimtùk on AMphim^ dk ibvt cqpm
J»i orienta W ; mail ethii de Jiatni ne Vtk point ^
£iiè/ encor moint. Les Jbifà avant &M ne paraît
fent qn'yne horde d'Arabes du déftrt , fi peo poiffima
i|tte lea Plnhiclena let traitaient è^peu-prèa oobum
kf Lacédémonfens traitaient les Ilotes. C'étaient des
dTcia^ef auxquels il n'était pas permis d'avoir des ar-
mes. Ils n'avaient pas le droit de forger le fer » pas
n^tne cehii d^iguifer les fpcs de leurs charmes & le
trandiant de leurs cofgnées% Il fâlait qu'ils allafTent
k leurs maitres pour les moindres ouvrages de cette
efpèce;les Juifs le déclarèrent dans le livre de Sa*
muel , & ils ajoutent qu'ils n'avaient ni épée , ni ja-
velot , dans )a bataille que SM ft JonâtiAS donni-
rent à Béthaven , contre leè Phéniciens , ou PhiliiHns ;
journée ou il eft rapporté que Saul fit ferment d'im-
mokr m Seigneur celui qui aurait mangé pendant le
combat. i
II eft vrai qu'avant cette bataille gagnée fiins ar-
mes il eft dit au chapitre précédent ,( a) que Said
avec une armée de trois cent trente mille hommes
âéfit entièrement les Ammonites ; ce qui femble ne
fc pas^ accorder avec l'aveu qu'ils n'avaient ni jave-
lot , ni épée , ni aucune arme. D'ailleurs les plus grands
rois ont eu rarement à la fois trois cent trente mille
combattans effeâifs. Comment les Juifs qui femblent
errans & opprimés dans ce petit pays , qui n'ont pas
une ville fortifiée , pas une arme , pas une épée , ont-
Ds mis en campagne trois cent trente mille foldats t
il y avait là de quoi conquérir l'Afie & l'Europe. Laif-
fons à des auteurs ûivans & refpeâables le foin de con-
cilier ces conttadidtions apparentes que des lumières
fupérieures font difparaitre ; refpeâons ce que nous
fommes tenus de refpeâer , & remontons à Thiftoire
des JttfJ^ par leurs propres écrits.
(a) LRoisthaf.II.
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s^***
1
I
I
I
Juifs, en £ g t p t b. 145
Des Juifs e n E g t p t i.
Lt8 annales ût$ Juifs difent que cette nation habi«
tait fur les confins de l'Egypte dans les tems i^o-
rés i que fon féjour était dans le petit pays de Gofl
fen , ou Geflen , vers le inont Cafius & le lac Sirbon.
C'eil là que font encor des Atubes qui viennent «n
hiver paitre leurs troupeaux dans la baffe Egypte. Cette
nation n^était compofée que d'une feule famille, qui
tn deux cent cinq années produifit un peuple de
deux millions de perfonnes ; car pour fournir fix cent
mille conri>attans que la Geaèfe compte au (brtir de
l'Egypte , il faut au moins dettx millions de téfies.
Cette mtdtiplication contre Tordre de la nature , eft
un dés miracles que Dieu daigna faire en faveur des
J^fs.
C'eft en vain qu'une foule de favans hommes s'é<
tonne que le roi d'Egypte ait ordonné à deux làge»>
femmes de foire périr tous les enfàns mâles^des Hé*
bréux ; que la fille du roi qui dçmeurut à JVtemphis
foît v'enue fe baigner loin de Memphis dans un bras
do -NÛ où jamais perfonne ne fe baigne à caufe des
crocodiles. ÇcA en vain qu'ils font des objcAions
fur rage de quatre-vingt ans auquel Moije était déjà
parvenu avant d'entreprendre de conduire un peuple
entier hors d'efdavage.
Ils difputent fur les dix plaies d'Egypte ; ils dH^t
que les magiciens du royaume ne pou^tent fkire les
mêmes miracles que l'envoyé de DiBû ; & que fi 1>ibu
leur donnait ce pouvoir , il fimbtaft agir contre lui-
même. Us prétendent que M^Je ^yant changé tou-
tes les eaux en fang , il ne reftait plus d'eau pour que
les magiciens pu(£ent faire la même métamorpbofi^.
Ils demandent comment Pharaon put pourfuîvre
les Juifs aved une cavalerie nombreufe , après que
tous les chevaux étaient morts dans la cinquième
Mim^
■w
1
î
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fK<M
il
144 Juifs EN EoY F TE. ^'
& fixiéme plaie ? lU demandent pourquoi, fix c^t
mille combattanst ^'enfuirent ayant DieO à lûir té^e ,
$ pouvant combattre avec avantage des. Egyptieiis
dont tous les premiers-nés avaient été frappés de*
Qiort ? lis demandent enÉcor pourquoi Dieu ne donna
pas la fertile Egypte à fon peuple chéri , au-lieu de
le faire errer quarante ans dans dWreux déferts ?
On n'a qu'une feule téponfe à toutes ces obje^ons*
(ans nombre ; & cette réponfe efl i DiBU Ta voulu ;
réglife Ie«croit , & nous devons le croire/ C'eft en
quoi cette hiftoire diffère des autres. Chaque peuple
a fes prodiges « mais tout eft prodige chez le peuple
Juif; & cela devait être ainii , puifqu'il était conduit
par Dieu même. Il eft clair que l'hiftoire de Dieu
ne doit point reffembler à celle des hommes; C'eft
pourquoi nous ne rapporterons aucun de ces faits
furnaturels dont il n'appartient qu'à rEfprit faint de
parlet ; encor moins ofefrons-^nous tester de les ex-
pliquer. Examinons feulement le ped d'événemens qui
peuvent être fournis à la critique.
De Moïse coNsïDiRé siUvzHAtH't
comme chef D'UIOTE ii&TflOtl.
Le maître de la nature donne feul la force au braf
qu'il daigne choifir. Tout eft furnaturel dans Moife.
Plus d'un favantl'a regardé comme un polirique très
habile. D'autres ne voyfent en lui qu'un rofeau fei-
ble , dont la main divine daig^ie fe fefvir pour faire
le deftin des empires. Qu'eft-ce en effet qu'un vieil-
lard de quatre-vingt ans pour entreprendre de con-^
duire.pjEtr lui-même tout un peuple fur lequel il tt'a
aucun droit ? Son bras ne peut combattre ; & fa lan--
guc ne peut articuler. Il eft peint décrépit & bègue.
Il ne conduit fes fuivans que dans des folitudes af-
freufes pendant quarante années. H veut leur Aôfh-
fiet un etabliffement , & il ne leur en donne auôun.
A fuivre fa marche dans les déferts de Sur , de Sin,
d'Oreb,
I
jw nm»i. iniJHH
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■wMMAttâs
«t^iip^m
•
. Ss poi^raitrU qu'à T^e dç près de fixr vingt «ns^^
J(îiy/ê n'étant cpî^duit qpc par luUjn^injc , eût eia
■ "EJjTiîfur Us mœurs , Èfr/Tom. f/ ' K '
If De Motse chef de nation. 14c m
d'Oi^ , ^ de Sinaï , de Phaian , de Cadés-Barné , & 4
le, voir rétrograder jorques vers l'endroit d'où il était
parti , il ferait difficile de le regarder comme un grand
capâtaîfie. Il eft ji la tête de ftx cent mille cornet-
tans , & il ne pourroit n\ au vêtement ni à la fubfiC '
tance de &s troupes. Dieu fait tout , Dieo remé-
die à tout , il nourrit , il vêtit le peuple par des mi-
racles. Moifi n'eft donc rien par lui-même , & fon
ii^puilTance montrje qu'il ne peut être guidé que par
Iç bras du Tgut-puiffant ; auffi nous ne confidérons ,
en ]m f^pe lliomme, & non le miniilre de Di£U. Sa
periopne en cette qualité eft l'objet d'une recherche
plus fpblime.
Il vent aller an pa]r9 des Cananéens à L'occident do
Jourdain, dans la contrée de Jérico , qui eft^» dit-
on , un bon terroir à quelques égards ; & au-lieo de
prendre cette ropte , il tourne- à l'orient entre Efion-
gaber & la mer Motte , pays ISiuyage , ftérile , hérifie
de montagnes fur lefi^ttelles il ne cuûï pas un arbnfte,
& où l'on ne trouve point defootaine , excepté queU
(^lee petitt puits d'eau faléev Les Cananéens on Phé-
niciens 9 fur le bruit de cette irruption d^un peuple
étranger , iriennent le battre dans ces déftits vers-
Gadéot-Ban^é. Commentée laiiTe-t-il battre à la têto
de fix cent mille fqldats t dans un pays qpi rst- coi»«(
tient pas aujourd'hui trois mille habitans ? Au bout
de trenterneuf ans il rempo^ detix yidloires ; .mais
il ne r^iplit aucun o^jet de fa légiflation : Lui & foo:.
peâplis meurent avant qife d'avoir mis le pied dans
le pays qu'il vooUit fubjuguf r. .
Un légîfîateur félon nos nolîcfhs çommqnes doitfe
faire aiiiièr & craindre; mais il ne doit pas pouffer
la févérité jufqu'à la barbarie ; il ne doit pas , an- :
lieu dlhflîger par les miniftrés de la loi quelques
fuppittes aux coupables^ feite' égorger au bavard une'
grande partie de fà nation par ï^âutre.
^
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1^ 14^ DbMotse 9
i
t
fi inhumain , fi endurci au carnage , qu'il eàt com-
mandé aux lévites de mafiacter , fiins diftinâiôn , leun
frètes jufqu'au nombre de vingt-trois mille, pour la pré-
rarication de fon propre frère, qui devait plutôt
mourir que de faire un veau pour être adoré ? Quoi !
après cette indigne aétion fon frère eft grand-ponttfe ,
& vingt-trois mille hommes font maffacrés ?
Moïfe avait époufé une Madianite , fille de Jetbr^
grand-prêtre de Madian , dans TArabie pétrée ; Jf/i&r^
l'avait comblé de bienfaits ; il lui avait donné fbn fils pour
lui fervir de guide dans les déferts ; par quelle cruauté
oppofée à la politique ( à ne juger que par nos faibles no-
tions ) , JUo'tfe aurait-il pu immoler vingt- quatre mille
hommes de fa nation , fous prétexte qu'on a trouvé un
Juif couché avec une Madianite ? Et comment peut-on
dire , après ces étonnantes boucheries , que Moife était r
ie plus doux de tous les tommes ? Avouons qu humai- A
ntement parlant , ces horreurs révoltent la raifon & la ^
nature. Mais fi nous confidérons dans Mtlife le minii^
tre des defleins & des vengeances de DiBO , tout
change alors à nos yeux ; ce n'eft point un homme qui
agit en homme , c'eft l'inftrument de la Divinité , à
laquelle nous ne devons pas demander compte. Nous
ne devons qu'adorer & nous taire.
Si Moife avait inAitué ùl religion de lui-même ,
comme Zofoaflre , Thaut , les premiers brames , Vu»
nta , Mahomet , & tant d'autres , nous.pourions lui de*
mander pourquoi il ne â'efl: pas fervi dans fa religion
du moyen le plus efficace & le plus utile pour mettre
un frein à la capidité & au crime ? pourquoi il n'a
pas annoncé expreflement l'immortalité de Tame , les
peines & les recompenfes après la mort , dogmes re-
çus dès longtems en Egypte , en Fhénicie , en Mé-
fopôtamie » en Perle & dans llnde ? Vous a»e% iti
inlhrtUt j lui dirions-nous , dans iafagejfe des Egyptiens ,
vous êtes Ugislatettr , gf vous nigUgez abfolumeut ie
^ dognte prinapfd dés Egyptiens, ie dogme le plus ni^
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r
a»
^«^1
ç n t:f-uit U Aorct 0 N. f4i^
U t çueaQf^miéfvfis fy^^ twat, giiighmf qîiils iuiUttï^
font êMÙxaffifB hn^emi ^éip^s ',vua j ébL^mif ^ fu$
adoptai dà paMe'par iHpr êjfésmT^^hijliar^fçm^
CeHo oi§ja<flibfv aoeablatile oontrs un lieg UWténr on
dinaire « tombt iS: pisrd , çômfUe pn voffi , toute i^
force quand it>sf agi t^^iint 1^ cbnnét pdr DiBU^ny^
me , qui ay^nt i^^nè étoé te poi du peuple ^if , '}9
puniflkît éb li'Técoitiuanfaft tempdrelliÉmdnt , â: qi^
M voulak M PtfdfmUtonrtÀ^^mii^ rtmmoriaUr^
del'ame , & i«6 û^]9^Kc«» ^f nel^ de l'erifev 5 qiDe dané
lestems marqué» pàj^lë# d^e^éts. PTefque tout ëvèn^
ment fyurdNietU:'ht|iiiate ehet té' peuple JulFtKft4e com^
i>te di» IDoifFduir. Téu^ ce: qèi eft di^a eft aii-deOue
de nos faibles idées, j^'un & Tauarr Qopf^ HduiCçi^t
toiijovrs au filençe.
Il s'eft trouvé des hommes d^ine fctence pfofondo
qui qM pouffé le p^Trri^onifimî de Thiftoire jufqu'à
douter qu*il y uït eo an Moffe $ fe vie qui eft tmit$
prodigieufe dépoii fon berceau jufqu'à fon fôpulcrc/
leur a paru une imitation dea incieniaes ^bles arab^i
& parti ou lî^re aient de celle de l^ancien Bacckui'\aX
Ils ne favent m quel tems placer Mùifi ^ le noiirm^
ine du phafaro ou loi d'Egypte fous lequel on le fiii
vivre , eft incorïTiu* Nul mi^nument , nuUe tnice ne
fious reiîe du pays dans lequel on le fait voyager. Il
leur parak îviipolllble que Muife ait gouverné tleinc
ou ttok millio^ns d'h^^mime* pendant quï^rante ans dans
âes défefrts inhabNrriWes, (5« i"on trouve à peine aujoufT
d'hut deux ou trois -ht^nie^s vagabondes qui ne coin-
pafen* pas %tf>iï a qiiHtPc Riille honFimés, ^Nou^ fom-i
mt*i bhtf kjiu d*ad^cer ce-fentiment téméraire «fiii
fij^P©*aife' tdua|s» fe[Bdfei»?iîs dél'hiiloére ancig^nç dg
péu-gSe Jwifî'fsj^j.brrLy. •■ ■;
K ii
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S 14S D S M a jûs fi
"^
^ Nous n'adhérons pas non plut à l'opinion d*Àben
Efra , de Mahnonide.^ de Nugnis y çk l'auteur des
cérémonies judaïques ; quoique le doâe Le C^erc ^
Midieton , les fayans connus fous le titre de théolo-
^gicns de Hollande, & même le grand Nevpton , ayent
fortifié ce fentiment. Ces illuftres favans prétendent
que ni M6ifi\n\ Jofué ne purent écrire les livres qui
leur font attribués : ils dife^nt que leurs hiftoires &
leurs loix auraient été gravées fur la pierre» fi en eiFet
elles avaient exiilé ; que cet art exige. des foins pro-
digieux , & qu'il n'était pas poiFible de cultiver cet
art dans def déferts. Ils fe fondent , eohitne on peut
le voir ailleurs ^ fur des anticipations, fur des contra-
dUékioos apparfsntfi. . Nous embmflbns contre cetf
grands - hommes j Topinion commune « qui eft celle
de. la fynagogue, & de.fégUfe dont nous recoiinaif'
fons l'infaillibilité*
Ce n'eft pas que nous ofions accufer les Le Clerc ^ m
les Midletm , leè Vrmou d'impiété ; à Dku ne piaife ! '
Nous fomme&consraiiicus que fi les livres de Moife &
de JE^/W & le Fefte,daPentateuque ne leurparaHËdent
pas être de la main de ces héros Ilraillite^ « ils n'en
ont pas été moina pierfuadés que ces: livres font inf-
picé*- Uft r^wH^iifeni le doigt de I>ij;y k chaque
Ugfiedaiis laGeiièfexdfttis Ji^tté.udm$JSfti^fimiàstn$
Rufb. L^épriv^n, Jui£ n'a été , pour aiofi dire , que
le fecrétaîre de DlRUi;.c'eft Dieu ^i îi tout.di<àé.
Ifnv^oif.fansidioiite «'a pu Ipenftr ;wtrement , on Je
fentiafle^. Dieu ooMs \prékt¥ef.\^ t/^kfmhUx à cef
hyp0qri(es pervers qui faififlent |»ttS les prétcpctes df^Co
cufer jous Les;. grande -ihommçsd>'ictéli^Q: .» comi^f^
on lesj^cçi^l^it autffefois< de uiagie ! Nxtfi$ croirions
fiO)|.feu|ement ^gtr CQûtre la «probité y mais infulter
ectiellç(pçi>t. la religion ^hr4iienne , fi (lous étions zffed
ib^odqnnés. pcNur.vioiDlcilr pei:ftf|4e9 iHi public que les
plus favans hommes & les plus grands génîçf.dela terre
ne font pas de vrais chrétiens. Plus nous refpeâons
réglife à laquelle nous fomqies ibvmfs ^ plu« nous pen-
il :>{ • • ■
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fons que cette églife tolère les opinioiiu de ces farans
vertueux avec la charité qui fait ton caraâère.
Des Juifs après Moïse , jusqu'à Saui.
Je ne recherche point pourquoi Jofuab ou Jofui
^capitaine des Juifs , faifant pafler fa horde de l'orient
du Jourdain à l'occident vers Jerico , a befoin que
Dieu fufpende le cours de ce fleuve, qui n'a pas en
cet endroit quarante pieds de largeur , fur lequel il
écafc fi aifé de jetter un pont de planches , & qu'il
était plus aifé encore de pafTer à gué. Il y avait plik-
fieurs gués à cette rivière , témoin celui auquel les
Ifraëiîtcs égorgèrent les quarante - deux mille Ifraclî-
tes qui ne pouvaient prononcer Sbîboletb.
Jl Je ne demande point pourquoi Jériço tombe au fon JE
M des trompettes ; ce font de nouveaux prodiges que B
* Dieu daigne fjire en faveuf du peuple dont il s'eft ^
déclaré le roi; cela. n'eft pas du reflort de l'hiâoiie.
Je n^examine point de quel droit JoW venait détruire,
des villages qui n'avaient jamais entendu parler de
lui. Les JuiBs difaient , Nous defcendons à* Abraham /
Abraham voyagea chez vous il y a quatre cent qua-
rante années , donc votre pays nous appartienc ; &
nous devons égorger vos mères > vos femmes & vos
enfans»
Fabrichis & Holjlemus fe font fiiit Fobjeâi(m fui-
vante. Que. dirait -on fi un Norvégien venait en Alle-
magne avec quelques centaines de fes compatriotes,
& difait aux Allemands , Il y a quatre cent ans qu'un
homme de notre pays fils d'un potier voyagea près
de Vienne , ainfi l'Autriche nous appartient , & nous
venons tout, maflacrer au nom du Seigneur ? Les mê-
mes auteurs confidèrent que le tems de Jofui n'eft
pas le nôtre , que ce n'eft pas à nou4 à porter un
œil profane dans les chofes divines ; & furtout que k
» K iij t3
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l?f»É«"
par leà mâ^në ëefr j^î&t
Il eft (iit ^^^ peiné l^ictr eft faas cléfenfè , que
les Juifs immolent^ leur Dieu tous les habitans , vieiU
larik, femmes , filles , en£ans à la mammelle , & tous
Its animaux <, excepté Une JFémme ))ro(lituée , oui arait
gardé chez elle les elpions Ju16 ^ e{]prons draillcurs
inutij^s ) puiJTque les murs devaient tOïxxbcf au fo&
des trompettes. Pourquoi tUérauQî tous les' animaux
qui pouvaient (ervir 7
À régatci de cette jPémtnê qut la vuîgaté appelle
nieretrix , apparemment die meifa depuis une vie plus
honnête , puifqfii'elle fut une ayeule de David^ & même
du Sauveur dû monde. Tous ces événemens font des
figures , dés prophéties qui annoncent de loin la loi
tde E^ace. Ce (bnt éntàt une fois dès myitères aux- J|
quels noiis nfe {bûchons pa^. .M
Le \Htè de Jàfué rapporté qtfé Ce chétk^ètsût reridti
Hlaltre d'une partie du p2ifi de Canaan , fit pendre
fes rois aU nombre de trente & tiri , c'éft-à-diré,
trente & un chefs de bolirgadçs, qui avaient ofé dé-
fendre leurs foyers , leurs fertrtnès A. leurs em
Fans. ï! f-ruÉ fe profterner Ici de^âlit laf f rovidence ,
iqui chitfaJt les péchés dt ce^ ïois |>at ié ghive de
JoJuL
Il i^étt pu iî^n étMUalifc qtré leè ptbpïes vdfins
JTe réunifiât istftnre les Jiiif^i ^ qui ne pouvaient paiTer
que po«lr des brigaivdi exéo-able» dans Fefprit des
peuplés tfvévglés , & m>ft ^our i«8 inihumens facréâ
dé là v«tigïsa4ici» divine k èk futur ^ut db f^te*
humain. Us lk^0m i-éAttiis tiih è(bl«v&gb par €kçM re^
de Méfbpotamit. Il y a Mn ^ it «ft >^i , de. la M6^
fopotaMîé à Jiiri^; Il Ahitddno qùei Ckr/M eàt caiN
qbis là Syrie A une p^ute 4e la Paleftîne^ Qooi ^u^ll
en foit i il) (bnl efblaveft^liait aflAées , ft seftem tuxfoke
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«««N*
^mâ
î
fâxaattr &%leux ans fan^MtatKt.>Cb^loixaiite & deux
ans font une efpèce d'afliervifCniient y puif^u'U leur
était ordonné par la loi de .prendre tout le pays de£
puis la Méditerranée jufqu'à l'Euphrate, que tout ce
vafte pays (a) leur mit prfani»; & qnfaffiirémenïils
auraient été tentés dé t'en èflnparer^s'ili fvaieqt été
libres. Us font efclaves dix - huit apnées fous £g(on
roi des Moabites , alIkffiHé j^ Âoij^i fônt èitfàite
pendâM vingt années efdaves d'un peuple Cananéent
qu'ils ne nomment pas , jufqu'au tems où la prophé-
teffe gucfrfère Difedr* tes délivré. H^ font éhcbrc
efclaves pendant fept ans jufqu'à Gidiotu
Ils font efclaves dîx-huît ans des Phéniciens , qu^îls
appellent Philîftîns , jurqu'à Jepbti* lis font encor
efclaves des Phénîdens quarante années jufqu*à5Uii/.
Ce qui peut confondre notre jugement , c'eA qu'ils
ét^ent efclaves du tems même de 5am/ôii » pendant
qu'il fuffifait à Samfùn d'une lîmple mâbholie d*âné
pour tuer ihille Philiftîns , & que DlEU opérait par les
mains de Èamfan les plus étonnant prodiges.
Arrêtons-nous ici un moment pour obferver combien
de Mft furent extermines p^ léôrs pt^rés fr^tîï, pu
par l'ordre deDiïv même , dtf^nié^^U'îls etrâ^éht dà^
les défef ts jtffqtf au témS ou îlis ëureht^ toi rô( âtrpâl
ïefort.
i
Les lévites après Padoration du veap
a^or jéfté eh ftStc [^jh^ lé fife^ cfé Jlfcyî^,
é|ùTgehi . - . . a?j««gbift:.
Gonfutnféii par h^feik f ôur 1» réfèke
de Qarii . i ^ j «i0
igorgés pour la même rcvoïté. - W?? ,, ^ ^
Î79SO
(a) Genife chap. XV. v. iS. Deuter. chap. 1. v. 7*
K iiij
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iJ^IHm»
m.
If» Des J» JF.8 tiEPuis Moïsfi.
I
H
De rwtrc part i lYç^^Juifi*
. Egorgée jibur avoir coihmerce avec '
les filles Madiànûes. .^ i . i^oàô
. Egorgés âti gué du Jourdain, jx)ur n'a^
Voir «pas pu prononcer ^ifr/^o/â^i&. ^ 42000 ^
Tués par les Benjamites qu'on atta*
quait. i , i i * 4000a
Benjamites tués par les autres tribus. 45000
, Lorfque Parché fiit prîfe par les ÎPhî^
liftîns,& que Dieu pour les punir les
ayant aMigés d*héniorrhoïdes iU rame,
nèrent l'arche à Bethramès , & qu'iU
offrirent au Seigneur cinq anus d'or &
cinq rats d'or , les BethCamites frappé$r
de iQort pour avoir regardé l'arche , au
nombre de . • . 50070
Somme totale 239020.
I
Voilà deux cent trente-neuf mille vingt Juifs exter-
minés par Tordre de Diku même ^ ou par leurs guer-
ifCS civiles , fans cgnipter ceux qui périrent dans le dé*
fert , & ceux qui moururent dans les batailles contre
les Gananéens ^ &c.
Si on jugeait des Juifs comme des autres nations , on
ne pouraic concevoir comment Jes enfàns de Jacob
auraient pu produire une race afTez nombreufe pour
fupporter une telle perle. Mais Dieu qui les condui-
rait, Diiu qui- les éprouvait & les puniflait , rendit
Cette nation fi différente en tout des autres hommes ,
'qu41 Kutla regarder avec d'autres yeux que ceux dont
on^examine îé refte de la terre , & ne point juger de ces
événémens comme on juge des événemens ordi-
naires;
^mmm
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JHtgUaii, MIC» m ,
Des Juif 8 DEBîUis Saul. ifj É
r » ^^^nà'nïvr >| \ i ■ ■ i • -^t n i i F
bÈs JuiÈs httvis SaûL
Les Juifs ne paraifTent pas jouir d'un fort pluè
heureux foUs leurs rois que fous leurs juges.
Leur premier roi Saiii eft obligé de fe donner U
morti Islx^fetb & Mifbibofetb fes fils font aflaffinés.
David \ivit aux Gabaonités fept petits -fils de
Saûl pour être mis en croix. Il ordonne à Salomon
fan fils de fiiire mourir Admias fon autre fils , &
fon général Joab. Le roi Afa fait tuer une partie du
peuple dans Jérufaiem^ Baafa aflafline ï^adub fils
de Jéroboam & tous fes parens. Jébu affafline Jo-
ram & Ocbojtay , foîxante & dix fils à'Acbah , ^ua-
rante-deux frères d'OchqfiaSj& tous leurs amis. Atba»
lie aiïafline tous fes petits -fils , excepté Joas s elle
eft affaffinée par le grand - prêtre Joiadad, Joas eft
afTaffiné par fé§ domeftiques ; Am^fias^ eft tué ; Za-
vhariias eft aftafline par Selhem , qui éft aflaftiné par
Manatem , lequel Alimahem &tt fendre le ventre à tou«-
tçs les femmes groffes dan^ Tapfa. Pbacéia^fAs àt
Manab'em \ feft aftaffiné par Pbacie fils de RonUli ^
qui eft affaifiné par Ofie fils à'Ela. Manafe fait ttker
un grand nombre de Juifs , & les Juifs allaftihent
Amfmn fils de Manajfi » &c.
Au milieu de ces maifacres dix tribus enlevées
par Salmanafar roi des Babiloniens , font efclaves
& difperfées pour jamais , excepté quelques manœu»
vres qu'on garde pour cultiver la terre.
Il refte encor deux trii3us i qjui bientôt font efçla*
ves à leur tour pendant foixante & dix ans :; au
bout de ces foixante & dix ans , Içs deux tribut
pbtiennent de leurs vainqueurs Se de leurs maîtres. •
ra.permiffion de retourner à Jérufalem. Ces deux tri-
bus » ainfi que le peu de Juifs ^qfû peuvent étu-e ref*>
I
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r"
tés à* Samirie avec les novveauxhabitaar étrangers,
font toujours uijettes des rois de Perfe.
Quand Ali»ttMté s'emparfr de h Perfb > h Jadéè
eft comprife dans fes conquêtes. Après Alexandre les
juifs dwiictfilèrént fournis tahtôi aèx Siimddesfes fuo
cefleurs en Syrie -, tantAt aux Ptùlomieî fes fuccef*
fcurs ^n Egypte ; toujours affujettîs , & ne fe fou-
f&tttHitit que par le métier de^ôtirtiers qu'ils faifafent
dans TAfie. lis obtinrent quelques favetiridu roi d'E-
gypte Ptohiftée Epipbane, Un Juif , nùmmé Jofefb ,
devînt fermier général des impôts fur la baffe Sy*
rie & la Judée qui appartenaient à ce Ptohmêe, C'dft
là rétat le plus heureux des Joifis ; car c'eft alors
qu'ils bâtirent la trotfiéme partie de leur ville > ap«
pellée depuis l'enceinte des Maccabiet , parce que
lés Maccabies l'achevèrent
Du joug du roi Ptohmée ils repafleht à celui du
roi de Syrie Antiocbur h Dieu. Comme ils s'étaient
enrichis dans les feifuies , ils devinrent audacieux ,
& fe révoltèrent contre leur maître An^cbus. Géi
lé tems des MoicMes , dont les Juifs d'Alexandrie ont
célébré le courage & les grandes aétions ; mais les Mac*
tajbiis ne putent eibpécber que le général à'Antiocbut
Ettpatw fils d*Afaiocbus Efipbane , ne fie rafer les
murailles du temple , en laiftant fubfifter feulement
le fanâuaire , & qu^on ne fit trancher la tète au grand-
prêtre Oufox, regardé comme l'auteur delà révolte.
Jamais les Juifs ne furent plus inviolablement at-
tachés à leur loi que fous les rois de Syrie ; ils n^a*
dorèrent plus de divinités étrangères ; ce fut alors
que leur réfi|fîèft fbt irrévôcablcrtient fixée ; & ce-
pendant ils furent |Aus malheureux que jamais , comp^
tant toftjois^s (ir leur délivrance , fur lès promefTes
dé leunl prophètes , fut le fecours de leur Dieu «
\ \ tbais abandonnés par la Providence', dont les décrets K
Jl ne font pas conbès des hommes. K
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Dcrtjifc s k^L.
Mf
lis rèrpfrè^efit (jud^uè tënik piï lès' é^ieités MeÉ
ttne$ deé ïofs de Syrie. Mais bi<Mi6t leà Juifk mt^
inémes s'atmèréht les uns tdhOre lès aàf^es. CtHhlÉMf
ils h'àvatent poirtt de toi» , ft ()uè la dl^îté dé
grand ^ facrificateur était la |ïftmiètic , c'était tjàùt
l'obtenir qu'il s'élevait de yiolens partis : on n'était
grand - prêtre que les armes à là âiald . ft bn fi*&r-
rivait au fanclualre que fur les dada^rèS £fe left tifiMé
Hircéniy de la race des Maccabi^f ^ devenu grand-
prêtre t mais toujours fujét dés Syriens , fit ouvrir
le fépulcre de Èavid^à^m lequel l'exiigératètJ^ J6-
fepb prétend qu'on trouva trois mille talèns. C*éÉa(t
quand on rebâtiffait le temple fous Néfmmè ^u*U
eût falu chercher ce prétendu tl"éfor. Cet ffircoH dé-
tînt àfAntiocbut Sidétès lé droîè de battre inonnoié.
Maïs comnfe il n'y eut jamais de mûnîioie '}uUt , ît
y a grande apparence que le tréfor du tombëâu dtf
David n'aVÀîl pas été confidérabif «
il tft à MHUrqiM ^ue de grand • prêtre ^Tiff^f
était faduèéèn ^ & qu'il ne ero^aft ni à rimllier|aly:é
de l'ame , ni aux anges ; fujet neuvetu d« qiiert|il«
oui commençait à divifer les faducéens & les pha-
rifiéils. CetriE - A éèhfpIfîfSht' CMCHI BKM ^ ft f Mi-
lurent lè cotidérilhér à la p^îfeti k tû fbitôt It AT
vengea dieu* ^ & gdutètàa dé(^&tl<)u«âi«ât.
Soti âh ÀHjlobttk ôlà {^ îkirt ibï j^néhttt Ié9 îttm^
Mes de Syrie & d'Eg'^. G6 hl ùii t^tah f)ii« ùftiêl
^e tous ctxxt qui avaient àpj^riilié lè^pèbpfe Jtfî#^
ÀHJidbt^e, exaa à la Vértfé à ptîèt dttiji» lè tè^l^W^
& ne mangeant jamais de porc « fit raourirde fidm fa
ntère , & fit égorger Antigène foa l^ére. tl eût pour-
fiiC^Âeor oft nommé Jean ou Jeamté y attUfi méckant
iqué lui.
Ce Jeem^ , fouillé de criiffCS , fefflï d««5i. «s q«i
fe firent la guerre. Ces deux fils étaîèftt Atifioimh
•
It^ts^
'mii9&^
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«^
esiâlto
Iî<f
Des Juifs
ft Hircan, Jriftoimle chaffa fon frcre & fc fit roi. Les
Romains alors fubjuguaient l^Âfie. Pompée en paflant
vint mettre les Juifs à la raifon , prit le temple , fit
pendre les rédicieuY aux portes y Se' chargea de fer«
le prétendu roi Ariftfibule,
Cet AriJiohuU avait un fils qui ofait fe nommer
Alexandre. Il remua , il leva quelques troupes , &
finit par être pendu par ordr^-'dc Pompée.
' Enfin , Maxc^Amoine donna pour roi aux Juifs un
Arabe Idumeén , du pays de ces Amalécites tarit fnaa-
dits par les Juifi;. C'eit ce même Hérode que St, MaU
tbieu dit avoir fait égorger tous les petits enfans des
environs de Bethléem , fur ce qu'il apprit qu'il était né
un roi des Juifs dans ce village , & que trois mages
conduits par une étoile étaient venus lui offrir des
préfens.
Ainfi les Jui^ furent prefque toàjours fûbjugués bu
efclaves. On r.it comme ils fe révoltèrent contre les
Romains ; & comme Titus ^& enfuite Adrifn Ic^ firent
tous vendre au marché , au prix de l'animal dont ils ne
voulaient pas mangen
Ils elTuyèrent un fort encor plus funefle fous les
«empereurs Trajan & Adrien , & ils le méritèrent. Il y
eut du tems de Traian un tremblement de terre qui
engloutit les plus belles villes de la Syrie. Les Juifs cru-
rent que; c'était le fignal de la colère de Dieu contre
les Rom tins; ils fe raffemblèrent » ils s'armèrent en
Afrique & en Chypre : une telle fureur les anima , qu'ils
dévorèrent les membres des Romains égorgés par eux.
C a ) Voici ce au*on trouve
dans lune réponl^ à Tcvêque
Warburten , lequel pour juf-
tiBer la haine des Juifs contre
les nations, écrivit avec beau-
co<ip de haîaé & force in jn-
rss CQHtce Tauteur Français.
,9 Venons maintenant à la
haine invétérée que les If-
raëlites avaient conçue cèn-
, tre toutes les nations. Dt-
, tes - moi , fi on égorge les
, pires & les mères > les fils
> & les filles , les en£»ns à la
^s^.
Tmr*
^m
^
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I
mm
P E P V I S S AUX.
Mais bientôt tons les coupables Aourerent dans ksi
fupplîces. Ce qui reftait fut animé de la même rage
fous Adrien , quand Barcocbebas fe di&nt leur meffie
fe mit a leur tête. Ce &natifme fui étomSé ààus des
torrens de fang.
Il cft étonnant qu'il refte encor des Jcflft. Le fa-
meux Benjamin de Tudel-^ rabin trésfavânt qui voy»*
geadans l'Europe & dans l'Afie au douzième fiécle,
en comptait environ trois ceot quatre -vingt mille,
bnt Juifs que Samaritains : car il ne faut pas foire
mention d'un prétendu royaume de Théma yers le
Thîbet , où ce Benjamin , trompé ou trompeur fur cet
article , prétend qu'il y avait trois cent. mille Jùife des
dix anciennes tribus , raflembl^s fous un fouveraii).
Jamais les Juifs n'eurent aucun pays en propre depuis
^ffp^^n , excepté quelques bourgades dans les dé»
ferts de TArabje heureqfe vers la mer Rouée. Atabomet
fut d'abord oWigé de les métia^ér/ Mais à h fin il dc^
trùifit la petite domination qu ils avaient établie au
nord delà Mecque. C'eft depuis Mahomet qu'ils ont
ccffé réellement de cpmpofer un corps' de pçuple. *
En fuivant fimplemerft le fil hiftbrique de la pttite
nation juive., on voit qu'elle ne pouvait avoir une au-
tre fin. Elleie vante elle- même d^être fortie d'Egy|)te
comme une borde de voleurs , emportant tout ce
qu'elle avait emprunté des Egyptiens.; elle fait gloire
de n'avoir jamais épargné ni la vieillefle , ni le fexe $1
ni l'enfance , dans les villages & dans les bourgs dont
elle a pu s'emparer. Elle ofe étaler une haine irrécon-
ciliable contre ttmtes les autres nations ; (a) die fe
,9 maméielle'&fle^ animaux i » haine ? Relifcz tdu» Je*
mm
même (liiiibaïr?Si«n faom<
me avait 1 trtrft^é datis le
laaj^^ fe& imaln« déj^oû^
^ tarit«s ^ i&l a ct*«ncre ^
^ oferait - U ilfre qnMl aurait
^ aflaffidéûafi^iolèrê & fans
,y pafifages'dà il eÀWilomié
,', Kuk Juifs de ne pas laifiTer
\ „ une ame en vie , & dttet
,-, après cd? qu'il ne leur
„ était pâ^$ permis de ha ir.-
,-,i Ceft «top fetrbmper groC*
:
ii»r uï II II j»«i<oi|-(ir • ^ 'mi^^'Hti
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Ml
i
De5 tJvjfç IJE^UtS Saûl.
n
«évoU« contre loua ft s ii»itr«a ; toâjoipf s fapcf £ticteû(b >
toujours avide du bien d'^utiuî , toûioors.barl>4rç«
nmjp^x^t dzxks, le malheur » & inroIeDfee.dana Upi<o(;
yérit^ Voili ce iue furent les Jui& aux yeuic des
Grecs & des Romains qui purent lire, leurs livres :
mais aux yeux des chrétiens éclairés par la foi , ils
ont (été nos précurfeurs, ils nous oni prépare h voie.
t» Q9t été les hérauts de 1^ providence*
l Li^s deux autres nations qui font errance» comm^
ta juive dans TOxicnt , & qui comme elle ne s'allient
avec aucun autrt? peuple , font les Banians Sç, lès ParGs
nommés Guèbrcs, Ces Banians adonnés au commerce
ainfi que les Juifs, font les 4efcendans des premiersi
habîtans psifibles de llnde; ils n'ont jamais mélç leur
fang à un fang étranger , non plus que les bracmanes.
Les Parfis font ces mêmes Perfes , autrefois domina^
teurs de l'Orient , & fouverains des Juife. ps font
dîfperfes depuis Omar^Sc labourent en paix une par-
tie de ia terre où ils régnèrent , iidèles à èett<i anti-
que religion des.mi^çes v*dorant un (eul Dieu,.^ con-
fervant Te feu facté qu'ils regardent comme l'ouvrage
^. i'jçnil^lémc de la Dlvioité.
Je ne compte point ces reAes d'Egyptiens adora-
teurs fecrets d'^x y qui ne fubfifteat plus aujourd'hui
que d^ns Quelques trompes vaj^ahcaides , bientôt po^f
jamais anéanties/ / ' : li
^ fif^ei^ejQfc far la N^^i
„ c'eft un ufurier qui ne tait
„ pa^(9<DiiiBter.
„ QiMJ ! Qr4onn«r qu'oiji.
,j ne tofLùg^ pBs 4ai^ te piajt
^ dontuaétraflgçcs'eftfervî,,
„ 4e n^ pas toucl^r (Vsha-
M bits y ce q'çfi p^ 4^r4pnQej:
^ rave;fiQ9 pcpr 1^ éftan-
„ ne haïuaient que ridolâ-
,» jtrie , ^ttouf. If $! j^AWtor^s,;
M UiB jdiMJnm tigre rMfiifî^
y^ de caraAger,re9a0ntfa de/^
, ,3 brelm q,ai prJkeAit la Itii^e^
„. il cQM^^t, :apnè& elles ,, $:
M. b!U 4iti9i^ eQfim«Vi9H^
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\ I
y
D£s PROPHÈTES Juifs. 159
Des prophètes Juifs. * *
Noos nous prderons bien de confondre les Vabim^
les Robiim des Hébreux arecles in^pofieurs des autres
nations. On fait que Dieu ne fe communiauait qu'aux
Juifs , excepté dans quelques cas particulitrs , corn-
me , par exemple , quand il infpira Balaam prophète
de Méfopotamie , & qu'il lui fit prononcer le contraire
de ce qu'on voulait lui faire dire. Ce Balaam était le
prophète d'un autre Dieu, & cependant il n'eft point
dit qu'il fût un faux prophète (a). Nous avons déjà
remarqué que les prêtres d'Egypte étaient prophè*
tés & voyans. Quel (ens attachait-on à ce mot ? celui
d'infpiré. Tantôt l'infpiré devinait le paffé ; tantôt Ta-
venir ; fouvent il fe contentait de parler dans un flile
figuré. C'eft pourquoi lorfque St. Paul cite ce vers
d'un poëte Grec, Aratùs, Totavit dam DiEV^ tout fe
meut ^ tout refpre en DiEU , il donne à ce poète le
nom de prophète ( £ ).
Le titre , la qualité de prophète ét^t-elle une dignité
chez les Hébreux , un miniftère particulier attaché par
la loi à certaines perfonnes choifies , comme la dignité
de pythie à Delphes ? Non ; les prophètes étaient feu-
lement ceux qui fe fentaient ihfpirés , ou qui avaient
des vifions. Il arrivait de-là que fouvent il s'élevait de
faux prophètes fans miflion , qui croyaient avoir t'efprit
de Dieu , & qui fouvent cauferent de grands malheurs,
comme les prophètes des Cevenne^ au commencement
de ce fiéde.
r%
,» VOUS imaginez que je ne
„ vous aime point , vous
avez tort { c*eft votre bêle-
ment que je hais $ mais f ai
du goût pour vos perfon-
nes , & je vous chéris au
point que je ne veux foire
qu'âne chair avec vous ; je
m'unis à vous par la ch^r
I „ ftlefang. Je bois l'un, je
„ mange l'autre pour vous
„ incorporer à moi. Jugez fi
„ on peut limer plus inti-
^ mement.
( a ) Nombre chap. XXII.
Ih) Aâes des apètres ch.
XVIL
"»^
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ri«É&
Il était très difficile de diftjngucr le f^ox prophète
du véritable. C'eft pourquoi Manajfi roi de Juda it
périr. J^a» par le fupplice de la fcie. Le roi Sé^é-
cias ne pouvait décider entre Jérémie Se Âname
qtii prédiraient des çhofes contraires \ & il fit met*
tft Jértmie en prifon. Ézicbiel fut tué par des' Juîft
compagnons de fon efclavage. Micbie ayant, pro*
phétifé dés malheurs aux rois Acbab & Jofapbat\ un
antre prophète Tfedikia fils de Canaa (a) lui donna
un foufflet , en lui difant : L'erprit de l'Eternel a pafTé
par mia main pour aljèr fur ta joue. Ofile çhap. IX. dé-
clare que les prophètes fqpt des fous ^fiùhum profbe-
t'am\ infanumvirûmfphrifût^lem. t,es prophètes Te trai-
taient les uns les autres àç vifîonnaîres & de jnenteurs.
II n'y avait donc d'autre moyen de difçemer le vrai da
fîjux que d'attendre l'^ccom)[>Iifrement des préd|dtions.
J!iîfée étant alIéàD^mas en Syrie, le rpi qui était
nialade lui envoya quarante chameaux chargés de pré-
fens , pour favoir s'il guérirait ; EÙfée répondit , que
U roi pourrait guérir ^ mais quHl mourrait. \.t roi mo^-
rut en eff|?t. Si Elijée n'avait pas été un prophète du
"mi DlEy , on aurait pu le foupqonner de fe ménager
une évafton à tout évéheipent ; car fi le roi n'ét^ pas
mort , Èlifie avait prédit ta guérifon en dîlant qu'il
pouvait guériç ^ & qu'^l n'avait pas fpécifie le tems de
fa mort Mais ayant confirmé fa mifiion par des mira-
cles éclatans , on ne pouvait dçuter de fa véracité.
' Nbus ne rechercherons pas ici avec les commenta-
teurs , ce que c'était que l'efprit double q\x*EiiJSè reqnt
à' Elit , ni ce que fignifie le manteau qut lui 4oniia
BIi9 en n^antant au ciel dans un char de feu trainé
pi|r des chevaux enflammes ^ comme les Grecs figurè-
rent en poéfie le char d'Jfoihft. Nous n'approfondi-.
roQç point quel efl le type , ^uel ed le fens myflique
df c^ guarapte-deux petits en&ns , qui en voyant
■ . . , . " W^e^
(«) Paral^oménes chap. XVin. -
màm
<m
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Des ïiiopHitis JtiFsJ i€i
fil ... . ■ T - T - - - p
Elifiê dans le ck«min dbarpé qui conduit à Befth^l ^
lui dirent en riant , monte ^chauve , mojtte / & de la
vengeance qu'en tira le ptàiphéte * en faiCint yenU
fur le champ deux ours qui dévorèrent ces ini^ocç^tes
créatures* Les ^ts font connus ; & le iens peut e|;i
étretcachér^ . * : rj
II faut i)bfervcricî une coutume de FOrient , que
les Juîfe pouffètent à un point qui nous étonne» Cçt
nfkj^e étaft non - feulement de parier en allégories',
ni is^ d'exprimer pfir des aérions (ingulières leschofe^
qu'ofvvbulait (ignifier. Riéh n'était plus naturel alors
que;cei ufage^ car le^ hommes n'ayant écrit lon^temé
l^rs peofécB qu*^n hiéroglyphes , ils devaient prçndr^*
Fhafoittide de parler comme ils écrivaient»
Ainfi les Scythes ( fi on en croît Hérodote ) envoyé^
rent^ D^r^ib , ^uenous appeU<»Qi Bwriur , uit oife^ ,
uneXoum, i^ne grenpuille & çitiqSèthes ; cebrvom
lî^it djre quç ^^<«rwx nc^ç'çt^fyjWtt aufli idtc qu'un
oifeau , ou s'il ne fe cachait comme une fbpm :&
comme une grenouille , il périrait par leurs flèches.
Le conte peut n'être pas vrai, ii»ais i} efl «oûjoucs :un
^émoi^nage def efnt>lçme^^«n uiage. dans^ o^ t$m^
recules.' ^ " '. ^ ^ ^^ ..:,.; .
Lçs rois s'écifiyaient en énîgmps ; on en a^éles
exemples dans Hiratft^ danS|w^A;nio»., dans la reiiio
de Sa^Oy Targzwit le Ji^etb^ -çonfulté dans fon ju^
din par fon Als ïur > la. n|%niprç dqnt il f*iut ie coiu
^irir^ 2t,yec Ies"jGabiens>,ne répond, qu^cn -abattant
les pav^s qui $'éIçvaieni;^Mr.4ieflu$jdei. àiitres; fkutsi
U tiî^, aflez ^ entendra ffltvr'iiîj/îilaiÇ' extorqiiafer^ Icf
graîid^\ §: çparg;^e|r Je pejifll^ .b / ■■ '
* C?«ft; à ces hiéroglyphes^ ^tic! nbùs' devons lès fe^
blés )i|ut fcr^t :les premtors écrits des hommes: La
feble '^^b|ea^ plus ancte^t nqué PhStoiré,
EJfaifur if s tnp^^rs , &c, Tom. L L _
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(iT*^
iî
i6z Des PRQf ¥iT9$ Jviis.
»*ftna|i
l\ faut être un peu famili^ifé s^veç l'antiquité pour
n^étre point efFarouché des ^âiQns S^ ^» difcoun
çnigpi^tiquçs des prap^^ite& Juifs,
Ifàie veut faire entçndjre au tQi,4cbAS qu'il Ésra
délivré dans quelques années du roi de Syrie «& du
melk on roitelet de Samarie unis contre lui ; il lui
éh : Avmti quim e^fant foit en âg^ de difeerner le
mal Ê£? k bim , vous ferez déli^ri de ces deux rods^
Le Seigmur peuftr^t; w rajoir de lotia^ pour rafer
la têse\ le poil iiu pend (qui d^ figuré par les pieds)
gf lit ù^whf , ^c- Alors le prophète prend deux tém
moins, Zacbarie Sç Uriex il covchç çivec Ja pfophé»
teiï'e ; elle met au i[nonde un en&nt; le Seigneur lui
donne le nom de Maher-Salal-h^STl;>a$ , Parta^ezvite
les défouilles ,• & ce nom figniiic qu'on partagera Içs
dépouilles çlçs eo;ieDiis.
.'Je n'entre point dans le fens allégorique & tnfinif
ment refpeébabte qu'on donne à cette prophétie \ je
me borne à l'examen de ces ufages étonnans aujour-
d'hui pour nous.
' Le même Ifctie marche tout nud dans Jérufalcm ,
pour marquer que les Egyptiens feront entiérepiei^t
dépouillés par le roi de Babilpne.
Qiroi ! dira-t-on , èft-îl poflible qu'un hpnttnp mar-
che tout nud dans Jérûfalem fans être repris de juC
ticc ? Oui , (ans dbut^ : Diogiûe ne fut pas le feul
dans l'antiquité qui eut cette har^îrffe \ Strabon ,
dans fon quinzième livré, dit qu'il y ayak dans les
Iodes une fede de bracmanés qui auraient ïtéhon-
teôx de porter des vétemens, AujourdTiuî en cor on
voit des pénitens dans- Tlnde qui rfiarcKènt ntrds &
chargés de chaînes, avec un anneau de fer attaché
à la v«Lrge , pour çxpier les péchés: flupwple. Il
y çn a 4ans TAfriq^ei ^ ^ai»s la Tuiqui». Ces.mpeuM
ne font pas nba; n^a;ur^ » fc je ijeictpiftpas que da
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têar^ i^lfaie il y d^ un ftol ufii^e %\x\ rdTembiâl ayx
nôtres. . . . , . ,< oi
Jirimie n'araît que quatqrze ans quand îl fc^pt
PEfprit. Dieu étendît (à main & lui toucha h bpii*
che, parce qu'il ayait quelque difficulté de parler. 1)
yoit d'abord une chaudière bouillante tournée aij
nord ; cette chaudière repréfcntc les peuples qui vien-
dront du Septentricrn ;, & l?eau boufilante ^gure leé
ïXîtalheurs de Jérûfalem/ ■ ' * t
Il achète unit ceinture de Kn , la met fur fes reins ,
& va là ocher par Tordre de DiEU dans un troii
auprès de VEuphrate. Il retourne enfuite la prendrç'
& la trouve pourrie. Il nous (explique lui-même çettç
paraboLç en disant que l'orgueil de jèrufaiem pourrira.
Il (ç met des cordes au cqo^, il fe charge de chal^
Des , U met iin joug fur fes épaules ; il envoyé cè^
cordes , ç^s cbaines , & cie joug aux rois yoifins^
pour les avertir de fe (bumettre au roi de fiabiloné
Jfabucodonofor , en faveur duquel il prophétife.
EzecbieT pe.ut fi|rprçndre davantage ; îl prédît au^
li^ifs que les pères mangeront leurs enftns , & miç
les enF^ns njangçront leurs pères* Mats avant dW
yenîr à cette prédiftion , îl voit quatre animaux éfîn-
çelan^ de lumière, & quatre roues couvertes d'yeux;
^1 mange un yoluthè de parchemin ; on le He avec
des chaînes, ïï trace un plan de Jérufjlem fur une
brique ; il met à terre une pf^ëîe de fer i il couche
trois cent quatre- vingt diic jours fur le tète giu-
dvB , ^ quarante jours fur )e côté drojt. Il 'doit
mangeç du pain* de. froment , d'orge , de fèves , de
lentilles , de millet , & le couvrir d'excrémens hu-
mains. Ceft ai^/t, dît^U: , qne Hi enftm dltjfrt^élmqiij
gérant httr fcdif fiuiilé parmi les nattofit fhe^ kh
guelt^s ils feront cbajfis: Ijjais aprèf avoir mangé dj
fg<^^ -JU.. .1 .
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164 Des ? * oiphItbs Jtjifs.1 »
ce pain de .doule\îr , JXiEÙ. lui perisie( de ne le coa-
vrir que des excrémens de bœufs.
- Il -coupe feSj cheveux. & les,divife çn trgis parts;
il en mpt une partie au feu , "coupe la féconde avec une
4péeii%ltour de k viUe, & jette au vent la troifiéme.
Le. même jEieVi^/W a des , allégories encor plus fut-
prenàhtes. Il introduit lé Seigneur qui parle ainii,
chap. XVI. Quand ' tu naquis , on ne t[àvait point
coupé le nombril*^ tu t^ étais ni lavée ni falieW,, tu
es dcvf^nue grande ^f ta gorge s*^ /ôrWi? ^ ton poil a
parti. . . , J^(4i pnJI'é ^ foi connu que c^était le^ tems des
mnam. Je t\u couverte , ^ je me fuis iteHdu fur
ton ignominie. , ,. Je fai donné des chcaiffutes ^ des
robes de iolou , des bracelets , un collier , des pendons
d'oreîile. . , , jMais pleine de confiance en ta beauté tu fes
livrée à, la fornication,,,, & tu^as bâti un mauvais
lieu / tu t*es projiituée dans les carrefours ,• tii as ouvert
tes jambes à tous les pajjans', . • , tuai reébmbé les plus
robinet,,. On donne de f argent aux courtàfarniçs^
^ tu en as donné à tes amans , ^ç,
(fl) Oolla a forniqué fur mois elle a aimé avec fu-
reur fes amans , princes ^ magiflrats , cavaliers, , ., Sa
fœur 06\ib2L s^eji frojiituée, avec plus -ê emportements
Sa luxure a jf cherché cei{x qui avaient /f . . . , d'un
àffe^^ ^ qui^,^,^ càrnme /ff chevaux, (ô)
Ces expreffions iious' fertiblènè bien indécentes &
bien groffières ; biles ne Pétaient point chez les Juifs,
elles fignifiaient lés apoftafies de Jérufàlem .& de Sa-
marie.r Çes^ apo^lafies étaient reprëfentées très fou-
vent çôniipe une fornication , comme uti -adultère.
Il ne.f^aut pas , encor uiie fois , juger des- mœurs
dés ufages , des faqons de' parler anciennes, par le^
'CàyEaech. chap.XXriE ^ les Quefiùms^fnr rjEnçyclopé^,
( b),^ a très apptQfondv \ die , & da^s V^vis imfortan^
'I
cette matière dans ^ulieujs 1 de mylprd^Bpfîngbrokp.
livres nouvç?ux,5furtoiit dans ■ - "'
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VfJS^Sf^^
'^^i^^m
Des p r o
PHÊTÈs Juifs. i6ç if
n&tteis ; tlles ne fe reflemblcnt pas plus que la lan-
gue franx^aife ne teffemblc au c^ldécn & à l'arabe.
Le Seigneur ordonne d'abord au prophète Ofie
chap. I. de prendre pour fa femme une proftituée ,
Se il obéit. Cette proftituée Im donne un fils. Dieu
appelle oe fils Jefrajih'c^t^ un type de la maifonde
Jihu , qui périra , parce que Jibu avait tué Joram
dans Jefracl. Enfui te le* Seigneur ordonne à Ofie
chap. III. d'époufer une femme adultère qui foit ai-
mée d'un autre , comme le >Selgneur aime les enffins
d'Ifraël , qui regardent: les ï)ieux étrangers & qui
aiment te marc de raifin. Le Seigneur dans la pro-
phétie 'd'sÂmos chap. IV. menace les vachei de Sa-
Qi^rie de les mettre dans la chaudière. Enfin tout t&
l'oppcfé de nos mœurs & de notre tour d'efprit ; &
(i on examine les. ufages de^ toutes les nations orien-
tales , nous les trouverons également appofés à nos
coutumes, non-feafement dans les tenis reculés , ;nais
aujourd'hui même lorfque nous les connalfTons mieux.
De^prijèresdes Juifs. Vi\,
Il nous refte.peu de prières des anciens peuples.
Nous n'avons que deux où trôî« formules des my itè-
res, & l'ancienne prière à IJîs rapportée dans -^i>«/eV.
L^s Juifi ont confervé les leurs.
Si Ton peut conjeéturer le carataère d'une natlo^
par les prières qu'elle fait è DiEU , on s'appercevra
alfément que lés Julfi étaient un peuple fcharriél &
fanguinaire. Ils paraiffent darts leurs pfaùnies fou-
haiter la mort du pécheur plutôt que fa conyerfion ;
& ils demandent au Seîgnetot dafis le' ilile oriental
tous les biens terrcftres. • ^
{a) Tu arrqfer'aT les montagnes , ia terre fera raf
fafîée de fruits. \ ' , > '
(«) pf. Lxxxvin.
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ff Ï6é PkièiiBs ibBS JtJiFS.
^ {b) Tu p-odms /e foinpûur lei bêïeî , ^ Pberbe
four t homme. Tu fais fortir le pain de la terre ^
& le vin qui réjouit le cœur s tu dormes t'huile qid
répand la foie fuir le vijage,
(c) Jùda eji tine ^narmite reînplie de iiàndes ; là
montagne du Seigneur eJi une montagne coagulée^
une montagne graffe. Pourquoi regardez^vous les moH-
tagnes coagulées ?
Mab il faut ayotsar 4n« 1^ JuiFf maûdiftent leîrirt
'ennemis dané un iUle non moins figuré.
^ {d) Demande-moi ^ ^ je te donnerai en héritage
fbtttet les nations $ tù les régiras avec une verge deftr.
^^ Cf ) -^P»DtEO , traite}^ iHes ennemis félon leurs œiu
%res ^ félon leurs dejfeins înécbans , pkni[fe2-lef comntê
f fis le >râritent.
(/) j!^ mes ennemis impies fougiffèftt , IjuHlsfoiefà
'cbfiiidts dans lefépulcre.
r ik) Seigneur ^ prenes vos (armes ^ votre bouclier'^
tirez votre ipée , fermez fous lèspafjages § que mes en-»
àemis foient couverts de conftf/îon , qu'ils Jhient comme
ia poujfière emportée pixr le vent , qt^ils tombent dttiis
U piigè^
. <*) ilfi^ /« f^t Us^fiirpreme ^ qtiih defcénieàt
têia vivons dans la foje.
y
, (i) DiêU brifèrà leurs dents iaHs leur Infttcbe ^ U
inettra en poudre hs mâchoires de ces lions.
(*) pr. cm. , , mpcxxx,
te) Pf. cvii. I (ir) k XXXIV.
(<<) pr.ii. (fc)pf.Liv.
(e) Pf. XXVII. I </) Ff. ViVL
mum
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igift*!!. *»■" l'i^g^ms
î
P K I i R E $ D ES J lij 1 F S. I67
(è) Us Jhuffrifoni la fmm c^ntme des chiens , ils
fi dijferferont four chercher à manger , & nefereni
point rajjajîis.
(/) -Je m'aiùtinfferûi vers FIdttmie ^^ je la fouler
rai auk pieds.
(m) Jtéprimtz tes hites faupager , c^ffi une affenu
blie de peuples femblables à des taureaux & â des va*-
cbes. V» . . Fo/ pieds feront baignés dans lefang de vos
ennemis ^& là langue de> vos cbierts en fera abreuvée,
(n) faites fondre fttr eux tous les traits de votre
colère , qiiils foient expofis à votre fUreur » qUe leur
demeure & leurs tentes Jbient défertes.
(0) Répandez ahondanimettt votre coUre fur les peu»
pies à qui vous êtes inconnus,
ip) Mon Dieu , traitez-les comme les Madianites ,
rendez-les comme une roue qui tourne toujours , comme
la paille que k vent emporte , comme une forit brûlée
par le feu,
(^) Ajferviffez le pécheur 3. que le malin foit toit^
jours à fon côté droit, 1
f^uHlfoit toujours condamné quand il plaidera*
Que fa prière lui foit imputée à péché ,• .que fis
enfans foient orphelins , êf fi femme vêuor ,• que fis
enfans foient des mendions vagabonds ,• que Pufurier
enlève tout fon bien* ^ v '^ ..
/) Pf. LIX. 1 ( <> ) Pf. LXXX""
m) Pf. LXVII. <î) Pf. CVIU.
I in) pr,jLxvm
LXXXII.
CVIU.
L iiij
î
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ééiéfiiBcàiÉièttsâMPPM
PRlàKfiSJDtiJtJIUS.
, (r ) £e Seigneur jufte coupera leurs tètes : que tout
ies eimtmii de Sionjoient comme Fberbejècbe des toitsi,
(x)' Heurewâ celui qui iventrera tes petits enfans
encore \a la mammeile V & qui l^ icraféra contri la
pierre , &Cé
bn voit qve fi fiiBU avak exaucé toutes ks priè-
res de foii peuple^ il se ferait refté quedes Juifs fui
la terre ; car ils détenaient touter les nations ^
"^Is. en étaient déteftés ; & en demandant fans ceffe
que Dieu exterminât tous ceux qu'ils haïflaient , ils
iemblaîent demander la ruine de la terre entière.
Mais il faut, toujours Te foùvénir que noni-feulepient
fô Juifs étaient le peuple chéri de DiEV , maîs^l'inf-
trument de fes vengeances. C'était par lui qu'il pu-
hifTaît les péchés des autres nations ,, comme il pu-
fiTîfiiè foh peuple par elles. Il n*eft plus permis aur
jourd*hui de faire les mêmes prières, & de lui deman-
der qu'on éventre les mères & les en&ns encor à la
mammelle V& tju'on les éc'rafe cohtre la pierre. DîEU
étant reconnu potfr le père èommun de tous les honi-
\nes , aîiàun peuple ne fait ceS împréèatîons contre
fes voifms. Nous avons été aufli cruels quelquefois
Ique les Juifs ; mais en chantant leurs pfaumes , nous
n'en détotornoné ptfS le ftns tonlre les peùple's qui
nous font la guerre. C'eft un des grands avantages
ique la loi de grâce a fur la loi de rigueur. Et plût
à DifiO (\ùt fous une lô! ùAnte & avec dés jprières
divines , nous n'eulTions pas répandu le fang de nos
frères , & ravagé la terre au nom d'un DiEÙ de
Yhiféricorde<l
, On fie doit P9S s^étonner que Thiftoire de Flavien
^Jofepb/ttouvk des contradicteurs quand elle parut
<r) pf.cxxvrn. (o Pf. cxxxvt.
\
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De Flavien Joseph. 169 jj^
à Rome. Il eft vrai qu'il n'y en a^ait que très peu
d'exemplaires ; il falait au moins trois mois à un co-
pifte habile pour la tranfcrire. Les livres étaient très
chers & très rares : peu de Romains daignaient lire
les annales d'une chétive nation d'efclaves , pour
qui les grands & les petits avaient un mépris égal.
Cependant il parait par la réponfe de Jofepb à If/>-
pioH , qu*il trouva un petit nom*bre de ic(fteurs , &
l'on voit aufli que ce petit nombre le traita de men*
teur & de vifionnaire.
ÏI faut fe mettre à la place des Romains du tems
de Tifuf ^ pôui* Concevoir avec quel mépris mêlé
d'hprreur les vainqueurs de la terre connue & les lé-
giflateurs des nations devaient regarder Thiftoire du
peuple Juif. Ces Romains ne pouvaient guère favoir
que Jofepb avait tiré la plupart des faits des livres
facrés didés par le St. Efplit. Us ne pouvaient pas
être inftruits que Jofepb avait ajouté b^ucpup de
chofes à la Bible > & en avait paiTé beaucoup (bus fi-
lence. Ils ignoraient qu'il avait pris le fonds de quel-
ques hiftoriettçs dans le troifiéme livre d'Efdrat , &
que ce livre d'Bfdras eÛ un de ceux qu'on nomme
apocryphes.
Que devait penfer un fénateur Romain en lifant ces
contes orientaux? Jofepb rapporte liv. X. ch. XIL
que Darius fils à'Afliage avait fait le prophète Dcp^
niel gouverneur de trois cent foixante villes , lorf-
qu'il défendit fous peine de la vie de prier aucun
Dieu pendant un mois. Certainement l'Ëcriture ne dit
point que Djûtiel gouvernait trois cent foixante villcd^
Jofepb îemble tuppofer enfuite que toute la Ferfe
ic fit juive.
âLe même Jofepb donne au fécond temple des Juifs, j ;
rebâti par ZarùbabeL , une fingoliére origine. 4 *
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Db Flavien Joseph.
Zorohabtl^ à\t'\\ ^ était t intime ami du roi Oa^
riuf. Un cfclave Juif intime amî du roi des rois ! c'eft
à-peu-près comme (i ua de nos hiftoriens nous difait
qu'un fanatique des Cevennes délivré des galères,
était l'intime ami de Loui^ XIV,
Quoi qu'il en foit , félon Flavien Jofepb , Dariur
qui était un prince de beaucoup d'efprit , propofa
' à toute fa cour une queftion digne du mercure ga-
lant , favoir , qui avait le plus de force , ou du vin,
ou des rois , ou des femmes ? Celui qui répondrait
le mieux devait pour récompenfe avoir une thiare de
lin , une robe de pourpre , un collier d'or , boire
dans une coupe d'or , qoucher dans un lit d'or , fe
promener dans un chariot d'or , traîné par des che-
vaux enharnachés d'or , & avoir des patentes de cou-
fin du roi.
Darius s'aflit fur fon hànt d'or pour écouter lés
féponfcs de fon académie de beaux efprits. L'un dif-
fertà en faveur du vin , l'autre ftt pour les rois.
^orobabel prit le parti des femmes. Il n'y a rien
d6 {\ puifTant qu'elles , car jai vu , dit- il , Apamie
la maitrefle du roi mon feigneur , donner de petits
foufflets fur les joues de fa facrée majefté , & lui ôtcr
fon turban pour s'en coêfFer.
Darius trouva la réponfe de Zorobabeî fi comique ,
<}ué fur le cham^ il fit rebâtir le temple de Jérufalem.
Ce conte reffemble affez à celui qu'un de nos plus
îngénîeux académiciens a fait de Soliman & d'un nez
retrôuffé , lequel a fervi de caneVas à un fort joli
opéra bouffon. Mais nous fommes contraints d'avouer
que l'auteur du nez retroulTé n*a eu ni lit d'or, ni
carroflTe d'or , & que le roi de France ne l'a point appel-
lé mon couGn; nous ne fommes plus au temsdes Ùarius,
Ce$ réveties dont J(>fepb forchàrgeait les llvèes
ùix^ , firent tort fans doute, chez le» payens aux
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f
1
e
De Flayibk Joseph. 171 «
vérités que la Bible contient. Les Romains nè^ pou«
Vaient diftinguer ce qui avait été piiifé dans une
fource impure , de ce que Jofepb avait tiré d'une
fource facrée. Cette Bible , fad'ée pour nous , était
bu inconnue aux Romains, oti aufli méprifée d'eux
^^ue Jofeph lui-même. Tout îFut également l'objet det
railleries &. du profond dédain que leé leéteurs conçu-
rent pour j'hiiloire juive. Les apparitions des anges
aux patriarches, le paiTage de là mer Rougeoles dix
plaies d'Egypte , TinconceVable multîplicatlon du
peuple Juif en fi peu de temt , & dans un aufli pe-
tit terTiiin ; le foleîl & la lune s^arrétant en plein midi
pour donner le temsii ce peuple efclave de maffacrer
quelques payfans déjà exterminés par une pluie de
pierres ; tous les prodiges qui fignalèrent cett'e |ii*
don ignorée , fbrent traités avec ce mépris q\i'un
peuple vainqueur de tant de nations, un peuple foi,
mais à qui DIEU s'était caché , avait naturellement
pour un petit peuple barbare réduit en efclavage.
Jofepb fentaît bien que tout ce qu'il écrivait , ré-
volterait des auteurs profanes ; il dit en plufieurs éiu
droits , le ieffeur en jugera comme il voudra. Il craint
d'effaroucher les dprits ; il diminue autant qu'il le
peut la foi qu'on doit aux miracles. On voit à tout .
moment qu'il eft honteux d*étre Juif, lots même qu'il
s'efforce de rendre fa nation recommandable à fes
vainqueurs. ïl faut fans doute pardonner aux Ro-
mains , qui n'avaient que le fens commun , &. qui
n'avaient pas encor la foi , de n'avoir regardé l'hif- ^
torien Jofepb que comme un mlférable transfuge qui
leur contait des fables ridicules , pour tirer quelque
argent de fes maîtres. Béniffons Dieu , nous qui avons
le bonheur d'être plus éclairés que les Titus ^ les Tra- "
jaus , les Antonins , & que tout le fénat & les dhevalieri
Romains nos maîtres , nous qui éclairés par des lu-
mières fupérieures , pouvons difcerner les fables ab-
furdes de Jofepb & les fublimes vérités que la fainte
Ecriture nous annonce.
;
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172Î D'un ïiEtîSQNëÉ bE JoisEPH
D'Uîï MENSONGE DE FlAVIEN J'OSÈPH , CONCER-
NAiit Alexandre et les Juifs.
Lors (\\x* Alexandre élu par tous les Grecs comme
fon père , & comme autrefois Agamemnon , pour aller
venger la Grèce des injures de l'Afie , eut remporté
la vidtoire d'iffus , il s'empara de la Syrie , l'une des
Î)rovinces de Darab ou Darius ^ il voulait s'aflurer de
'Egypte avant de paffer PEuphrate & le Tigre , &
6ter à Darius tous les ports qui pouraient lui fournir
des flottes. Dans ce.deffeîn , qui était celui d'un très
grahd capitaine , il falut affiéger Tyr. Cette ville était
fous la protection des rois de Perfe & fouveraine de
la mer ; ^Alexandre la prit après un fiége opiniâtre de
fept mois „ & y employa autant d'art que de courage ;
la digue qu'il ofa faire fur la mer eft encer aujour-
cfhui regardée comme le modèle que doivent fuivre
tous les généraux dans de pareilles entreprifes. C'eft
en imitant Alexcatdre que le duc de Parme prit An-
vers , & le cardinal de Richelieu la Rochelle , s'il eft
Î'ermis de comparer les petites chofes aux grandes,
lollin à la vérité dit qu'Alexandre ne prit Tyr que
parce qu'elle s'était moquée des Juifs, Se queDiEO
,- voulut venger l'honneur de fon peuple. Mais Alexan*
are pouvait avoir encor d'autres raifons : il falait après
avoir foumis Tyr , ne pas perdre un moment pour
s'ehiparer du port de Pélufe. Aînfi Alexandre ayant
fair une marche forcée pour furprendre Gaza , il alla
d€ Gaza à iPélufe en fept jours. C'eft ainfi qu'-^mew ,
Qiiinte - Curce , Diodore , Paul Orofe même , le rap-
portent fidèlement d'après le journal d'Alexandre.
Que f dit Jofepb fcmv relever fa nation fu jette des
Perfes , tombée fous la puifTance d'Alexandre avec
toute la Syrie , & honorée depuis de quelques privi-
lèges par ce gratid - homme ? Il prétend qu'Alexandre
en Macédoine avaitvu en ibnge le grand-prêtre des
Juifs Jaddus ( fuppofé qu'il y eût en effet «n puétre
H^iSIdK^
3
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*j^(giu^' ' ■ ■" igaii " ^'^^Jl^H
.SUR Alexandre. 17g ; !
juif dont le nom finit en «j ) , que' ce prêtre TaVaît
encouragé à foa expédition contre les Pcrfesyque c'é-
tait par cette raifon qu'Alexandre avait attaqué TAfic.
Il ne manqua donc pas après le fiége de Tyr de fc
détourner de cinq ou iix journées de chemin pour all^
voir Jérufalem ; comme le grand • prêtre Jàddus ^railt
autrefois apparu en fongeà Alexandre^ il reçut auifi
en fonge urt oxdre dp Dieu d'aller fàlyer ce roi ; il
obéit , & revêtu de fes habits pontificaux , fuivi de
fcs lévites en furplis, il alla en proceflion au-devant
ii! Aiexfundre ; dès que ce monafrque vit Jaddus , il
reconnut le même homme qui l'avait averti er) fpng^
fept ou huit ans auparavant de venir conquérir la Per-
fe; & il le dit à Par^iénion. Jaddus avait fur fa, tête
Ton bonnet ôtné' d'une lame d^or , fur laquelle était
gravé un rfiot héfiréu y Alexandre qui fans douté
jBntendait rhébreli jiarfaitement , reconnut auffi - tôt
le nom Jehovab\^ &'fe profterna humblement, fâchant
bien que DïEU tie'po'uvaît' avoir que ce nom. Jaddui
lui montra jàiffî-tôt des prophéties qui dffaîent clai-
rement ç{\x* Alexandre s'emparerait de Tempire des Per-
fes , prophiéticsquî né furent jamais, feitcs après l'é-
^ériementï'Il le. flatta que DlEU l'avait choifi pour>.
^tèr à fon peuple chéri toute efpérâncc de régner fur
4a terre promifc.,* aitiii qu'il avàit'dipifi autrefois 2^
bucodonofor & Cyrus c[Ui avaicot pofledé la terre pr(fe.
jnife Tun après l'autre. Ce conte abfurde du roman«
cîer JofepJb ne devait pas , ce me femble, être copié
par.iïo///» , commr f'U était atteftépar un éciîvaiil
facré. . : j
_^-Maî& c'eft ainfi (^'on a écrit l'hiftoire anci^nijc,
_& bjen fojpycnt la moderne,
BeS PRÉjfUGès POPULAIRES AirXdtJEtS Ï^ES FCftïi-
VAINS SACRÉS ONT DAIGNE SE CÔNPÔRMEIt
PAR CQNDfiSCgNPANCE.
i
-n Les livres.&iots font faits poult enfeigniâr la moralf
& non la phyfique. . . t
.^^'^1^, Il iiiiii iiiijiiiiHiiii éHji ih I .11 «"''w'K^ill
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Iiifw<» 1.1 I -Mtti»! Il mimgfg
Ç 174 P E A J V o é s P o 1 U L A I H IS.
I — i— — ^— Mit
Le fi»f petit paflbie diins hintiqpit^ pour le plus ha?
bile de tous les animaux. L'auteur du Pentateuc^oè
veut bien dire que le ferpeht fut aflRiz fubtil pour
réduire Eve. On attribuait quelqiiefbrs la parole aux
bétcs : récrivain facré fait parler le ferpent > & Ti-
neiTe de Balaam. Piufieurs Juifs St pliiQeors doéteurs
chrétiens ont regardé cette htftoire comme une allé-
gorie ; mais foit emblème , foit réalité , elle eft égale*
ment refpedtable. Les étoiles étaient regardées com-
me des points dans les nuées : l'auteur divin fe pro-
portionne à cette idée vulgaire , & dit que la |qp^
fi^t faite pour pré^der aux étoilep.
L'opinion commune était que les deux étaient fbli-
des ; on les nommait en hébreu Rakiak , mot qui ré-
pond i la plaque de métal , à un corps étendu & fer*
me , que nous traduîfimes par firmament. Il portait
des eaux ^ lerquelles fe répandalçnt par des ouvertu-
res. L'Ecriture fe prpporfiqnne à ççtte phyfiqûe. •
\
Les Indiens , les C^ldéen^, les Pierfan^ imagHiaient
que Dieu avait forme le monde en fix tems. L-au.
teur de la Genèfe , pour ne pas efl^roocber la fai*
blefle des Juife , repréfente DistJ formant le mond^
en fix jours ^ quoiquhin mot & un infbnt fuififent è
fa toute - puf (Tance. Un jardin , des ombrages étaient
un très grand bonheur dans les pays &cs , brûlés du
foleil \ le divin aqteur place Ijs premitc homme dans
un jardin.
* On n- avait point d*idée d'un être poremeht impia-
tériel : Dieu eft toujours repréfente comme un hom-
me ; il fe promène à midi dans le jardin , \\ parle , iS:
pn lui parle.
Le mot ame , Ruah , fignifie le fouffle , la vie : l'a-
me eft toujours employée pour la vie dans le Penta«
teuque.
W
I
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^^(iW^^
PnijTJOés POPULAIRES- 17f \\
m'iii ui . . -
On croyait qu'il y avait des nations[ do géants , &
la Genèfe veut bien dire qu'ils étaient les enfaiis des
^ag^ S^ des filles des hommes.
On accordait aux brutes une efpèce dç raifon. Dieu
daigne faire alliance après le déluge avec l^s hrutei|
çomnie avec l(ss hon;mes.
Perfonne ne favait ce que c'eft qiie Farcren-ciel ,
Il était regardé comme une chofe rurnaturclle , &
Homère en parle toujours ainfî. L'Ecriture l'appelli;
l^arc de Dieu, le figne d'alliance.
Parmi beaucoup d'erreurs aûx;quelles le genre4iu«.
main a ét^ livré ypn croyait qu*pn pouyî\it Caire naiu9
les animaux de la couleur qu'on voulait , en préfen-
tant cette couleur aux mères avant qu'elles çon,9uf-
fent : Vauteur de la Genèfe dit que jfaçob ei|t de^ hrot
jbis Cachetées par cet artifice.
Toute l'antiquité fe fervait d^ç d^tme^ contre U
morfure des ferpens ; & quand la plaie n''était pas
mortelle « ou qu'elle était heureufement fucée par des
cljiàrlatans nommés PJWes , ou qu'enfin on avait app)ir
que avec fuccès des topiques convenables , on a#
doutait pas que les charmes n'euflent opéré. Moifi
éleva un ferpent .d'airain , dont la vue: guériflait ceuJ^
que les ferpens avaient mordus. Dieu changeait un^
ç;rreur populaire en une vérité nouvelle.
yne des plus, anciennes erreurs était l'opinion que
Pon pouvait faire naitre dss abeilles d'un cadavre
jppurri. Cet^ idée ét;ait fondée fur l'e^ipérience. jour^
çalière de voi^ des louches & des verraliTeaux cou»
vrir les corps morts des animaux. De cette expérience
qui trompait les yeux , toute l'antiguité avait conclu
que la corruption eft Je principe do la génération.
Pui(xj[u'on croyait qu'qn cort)s mort? produisit dts mou-
ckea , 00 fefigucàit queJe moyeniur de fe procurer de^
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17^ Préjuges Po*ut Aires.
1
i
abeilles , était de préparer les peaux fanglantes des
animaux de la manière requife pour opérer cette mé-
tamorphofe. On ne falfait pas réflexion combien les
abeilles ont d'averfion pour tovite chair coi:rompqe ,
combien toute infedionlein* eft contraire. La méthode
de faire naître des abeilles ne pouvait réuUir ; mais on
croyait que c'était faute de s'y bien prendre. Virgile
d^ns fon quatrième chant des géorgiques , dit que
cette opération fut heureufement faite par Arijlief
n^ais aqfli il aJQutp que c'eft un miracle ^ mirabi/e
monjhrum,
C'eft en re<ftiliant cet antique préjugé qu'il eft rap-
porté que Samfon trouva un efTain d'abetlle3 dans la
gueiile d'un lion qu'il ^vait déchiré de fes mains.
C'était ençor une opinion vulgaire que rafpic fc
bouchait les oreilles de peur d'entendre la voix dç
de l'enchanteur. Le pfalmifte fe préce à cette erreur
en difant pf. LVIII. Tel que rafpic fourd qui boHçbe
fes oreilles , 6? qui n^ entend point les encbantemens.
L'ancienne opinion que les femmes font tourner Je
vin & le lait , empêchent le beurre de fe figer , &
font périr les pigeonnaux dans les colombiers quand
elles ont leurs règles , fubfifte encor dans le petit peur
pie ) ai^fi que les influences de la lune. On crut que
les purgatiens des femmes étaient lés évacuations d'un
fang corrompu , & que fi un homtne approchait de
fa femme dans ce tems critique , il faiffiit nçceffiyre-
inent*des enfans lépreux & eftropiés : cette idée ava^
tellement prévenu les Juifs, que le Levrtiquè chapî-
■tre XX ^ condamne à mort l'homme. & l^ fempie
■qui fe feront rendu le devoir conjugal dans ce tems
critique. . .
Enfin l'Efprît faînt.vcut bien fe confiormcr telle*
jnent aux préjugés populaires , qUe le Sauveur luj-mè^
mp dit , qu'on ne met jamais dp vin ^«uveau. d^à$
de
m
--«p^l
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p-
:
FnéjUeÉS f QPUI^AII^CS. J77 1
de yieillcs fotaflies ^ & qu'il finit que le hUi poui-r
rifle pour meurir.
St. PafdAit aux Corinthiens, en voulant leur pçr-
fuader la réTurredion , Infenfis , ne fave2-vqus pa^
qu'il fauP (fue le grain meure four Je vivifier ? on fait'
b?en aujourd'hui que le grain ne pourrit ni ne mevirt
en terre pour lever ; s'il pourriffait , il ne lèverait pas ;
mais alors on était dans cçtte erreur ; & le St. E)f-
prit daignait en tirer des comparaifons utiles. CeO;
ce que 5iP. Jirème appelle parler par éçonomiç.
Toutes les maladies de convulfîons paflerent pour
des poiTeflions de diable , dès que la dodtrine des
diables fut admife. L'épilepfie chez les Romains com-»
me çhe? les Grecs fut appellée le malfacri. La mé-
lancolie accompagnée d'une efpéce de rage » fut encor
Sun mal dont la caufe était ignorée; ceux qui en étaient
attaqués erraient la nuit en hurlant autour des tom^
beaux. Us furent appelles démoniaques , lycantropes ,
chez les Grecs. L'Écriture admet dçs démoniaques qui
errent aiitoyr des tombeaux.
i
Les coupables chez les anciens Grecs étaient ft)u«
vent tourmentés des furies ; elles avaient réduit Qrejh
à un tel défefpoir , qu'il s'était mangé un doigt dan^
un zcQts de fureur ; elles avaient pourfuiyi A^cmion ,
Etéocle , & Polinice. Les Juifs helléniftes qui furent
inftruits de toutes les Qp^nions grecques , admirent en?
fin chez eux des efpèces de furies , des pfprits im^
mondes , des diables qui tourmentaient les homme$.
Il e(l vrai que le^ faducéens ne reconnaiflaient poinl
de diables ; mais Içs ph^rifîen^ les reçurent un peu ayant
le règne d*Hérode. Il y avait alors chez les Juîfi?
des cxorciftes qui chaffaîent les diables ; ils fe fer?
vaient d'une racine qu'ils mettaient fous le nez des
poiïedés , & employaient une formule tirée d'un pré-r
tendu livjre de Salomon^ Enfin ils étaient tellement
en po(|efi[iQn 4c çh^er les diablçs , qi^e notre ^au^
Effai fur le f mœurs ^&c.Tom.l^ IVJ
I
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S î7g Priêjugés f ôpul'Aîkes.
_______
TCtir luî-tnênie açcafé , felcm St. Matthieu^ de les
chafler par les enchantcmens de Belziimth y accor-
de que les Juifs ont le même pouvoir , & leur de-
mande fi c'eft par Èelzébutb qù*îls triomphent des
cfprits malins ?
Certes fi les mêmes Juifs qui firent mourir Jesus
aV^aient eu le pouvoir de faire de tels miracles , fi
les pharifiens chaffaient en effet les diables , ils feî-
faientdoncle même prodige qu'opérait le Sauveur;
ils avaient le don que Jfis US communiquait à (es diil
ciples ; & s'ils ne Pavaient pas , Jesus fe conformait
donc au préjugé populaire , en daignant fuppofer
que fes implacables ennemis, qu'il appellait race de
vipères , avaient le don des miracles , & dominaient
fur les démons. Il cft vrai que ni les Juife ni les
chrétiens ne jouiffent plus aujourd'hui de cette pré-
8« rogative longtems fi commune. Il y a toûjoqrs des .
exorcîftes , mais on ne voit plus de diables , ni de pof- m
a fédés : tant les chofes changent avec le tems ! 11 | ,
était dans Tordre alors qu'il y eût des poffédés , &
. il eft bon qu'il n'y en ait plus aujourd'hui. Les pro-
diges néceflaires pour élever un édiiice divin font
fnutilcs quand il eft au comble. Tout a changé
fur la terre ; la vertu feule ne change jamais : elle
eft femblable à la lumière du foleil , qui ne tient
prefque rien de la matière connue , & qui eft toû-
jours pure , toujours immuable , quand tous les élé-
mens fe confondent fans ccffe. Il ne fiaut qu'ouvrir les
yeux pour bénir fon auteur.
Des anges , des génies , t)ES diables , chez les
ANCIENNES NATIONS ET CHEZ LES JUIlFS,
Tout a fa fourcc dans la nature de Tefprit humain ;
tous les hom»nes puiflans , les magiftrats , les princes
avaient leurs meffagers ; il était vraiftmbbble que
ïes Dieux en avaient auffi. Les Caldécns & les Per,
wt fes femblent être les premiers qui parlèrent des anges ^
atgtf j ^> ' ^ MigatMié ■■■ ■ I II >^ tn^l
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!.. Tiiiy
Des AJsraBs, QéNm,DUQLEs, ^a 179
nj " •' »g
Qoi|ime de huifOcrs céleftes & de porteurs d'ordre,
Mais avant eux les Indiens, de qui toute efpèce de
théologie nous eft venue , avaient inventé les ange^
"& les avaient repréfentés dans leur ancien Uvre dv^
Shaftja comme des créatures immortelles , participan-
tes de la divinité , & dont un grand nombre fe rét
volta dans le ciel contre le créateur. ( Vpyez le cha^
pitre de l'Inde,)
Les Parfis ignicoles qui fubfiftent encor , ont çom?
muniqué à l'auteur de la religion des anciens Par-
fis (a) , les noms des anges que les premiers Perfei
reconnaiflaient. On ea trouve cent dix-neuf, parmi
lefquels ne font ni Rafhadl ^ ni GabrUl , que les Fer.
fes n'adoptèrent que longtems après. Ces mots font
caldéens ; ils ne furent connus des Juifs que dan|
leur captivité : car avant l'hiftoire dç Tobh on n%
voit le nom d'aucun ange, ni dans le Fentatçucjue^
ni dans aucun livre des Hébreux.
Les Perfes dans leur ancien catalogue qu'on trouva
au < devant du Sadder ^ ne comptaient que douze dia^
blés ; Se Arimane était le premier. C'était du moin^
une chofe confolante de reconnaître plus de génies
bienfaifans que de démons ennemis du genre humaii^
On ne voit pas que cette dodtrine ait été fpivie
des Egyptiens. Les Grecs au - lieu de génies tutelai,
res eurent des divinités fecondaîres , des héros &
des demirDîeux. Au r Heu de diables ils eurent Ati^
Erinnis , les Euménides, Il me femble que ce fut
Platon qui parla le premier d'un bon & d'un maur
vais génie , qui préfidaient aux adtions de tout mor^
tel. Depuis lui , les Grecs & les Romainç fe piqué-
rent d^avoîr chacun deux génies ; & le mauvais eut
toujours plus d'occifpations Ci de fuçc^s que (q|i
antagonifte.
C a ) Hiiie , ii vtligknt ^tterum ferfyrum.
M ij
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«IÇ«
180 Des anges» génies* diables,'
Quand les Juifs eurent enfin donne des noms à
leur milice céïefte , ils la diftinguèrent en dix daf»
fes : les faints , les rapides , les forts , les fiammes »
les étincelles , les députés , les princes , les fils de
princes , les images , les animés. Mais cette hiéraif-
chie ne fe trouve que dans le Talmud & dans le
Targum , & non dans Içs livres du canon hébreu.
Ces anges curent toujours la forme humaine , &
c^cft ainfi que nous les peignons encor aujourd'hui ,
en leur donnant des ailes, liapba'él conduîfit Tobie,
Les anges qui apparurent à Abrubam , à Lot^ burent
& mangèrent avec ces patriarches ; & la brutale fîi.
reur des habitans de Sodome ne prouve que trop que
les anges de Lat avaient un corps. Il ferait même
difficile de comprendre comment les anges auraient
parlé aux hommes , & comment on leur eût répondu ,
s'ils n'avaient paru fous la figure humaine.
Les Juifs n'eurent pas même une autre idée de
Dieu. Il parle le langage humain avec Adam & Eve $
il parle même au ferpent ; il fe promène dans le jar.
din d'Eden à l'heure de midi. Il daigne converfer
avec Abraham , avec les patriarches , avec Moife.
Plus d'un commentateur a cru même que ces mots
de la Genèfe , faifons thomme à notre image , pou-
vaient être entendus à la lettre ; que le plus parfait
des êtres de la terre était' une faible reflemblance
de la forme de fon créateur ; & que cette idée de*
vait engager l'homme à ne jamais dégénérer.
Quoique la chute des anges transformés en dia-
bles , en démons , foit le fondement de la religion
juive & de la chrétienne , il n'en eft pourtant
rien dit dans la Genèfe , ni dans la loi , ni dans
aucun livre canonique, La Genèfe dît exprefle-
ment qu'un ferpent parla à Eve & la féduifit. Elle
a foin de remarquer que le ferpent était le plus
^ habile , le plus rufé de tous les animaux ; & nous ^^
& S
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rilk
-«*»îl«
I
CHEZ LES ANCIENS ET CHEZ LES JUIFS.
181 f
r
1
avons obfervé que toutes les nations avaient cette
opinion du ferpent. La Genèfe marque encor pofi^
tivement que la haine des hommes pour les ferpens
vient du mauvais office que cet animal rendit au
genre humain; que c'eft depuis ce tems4à qu'il cher-
che à nous mordre , que nous cherchons à l'écrafer ;
& qu'enfin il eft condamné pour fa mauvaife adtion
à ramper fur le ventre , & à manger la poufTière de
la terre. Il eft vrai que le ferpent ne fe nourrit
point de terre ; mais toute l'antiquité le croyait.
Il femble à notre curlofité que c'était là le cas
d'apprendre aux hommes que ce ferpent était un des
anges rebelles devenus démons , qui venait exercer
& vengeance fur l'ouvrage de DiEU & le corrom-
pre. Cependant , il n'eft aucun paflage dans le Pen-
tateuque dont nous puiffions inférer cette interpré-
^on , en ne confultant que nos faibles lumières.
Satan paraît dans Job le maître de la terre , fiibor-
donné à Dieu. Mais quel homme un peu verfé dans l'an-
tiquité ne fait que ce mot Satan était caldéen, que ce
Sataff était VArîmane des Perfes adopté par les Cal-
déens , le mauvais principe qui dominait fur les hom-
mes ? Job eftrepréfenté comme un pafteur Arabe , vi-
vant fur les confins de la Perfe. Nous avons déjà dit que
les mots arabes confervés dans la tradudlion hébraïque
de cette ancienne allégorie , montrent que le livre fut
d'abord écrit par des Arabes. Flavien Jofepb , qui
ne le compte point parnii les livres du canon hébreu ,
ne iaîfle aucun doute fur ce fujet.
Les démons , ks diables chaffés d'un globe éhi
ciel , précipités dans le contre de notre globe , &
s'échappant de leur prîfon jpour tenter les hommes ,
font regardés depuis pliififurs fiécles comme les au-
teurs de notre damnation,. Mais èncor une fois , c'eft
une opinicm dont il n'y a aucune tracé dans l'ancien
Teftament. Ceft une vérité de tradition.
M iij
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fa) il faut poortaht qae
*àc livfe d'Enoch ait quelque
antiquité , car on le trouve
Cité prfufieurs fois dans !c tef-
tament des douze patriarrhes^
^utre livre juif , retouché par
y^i chrétien du premier fiécle:
^ ce teihAient des douze^s-^
triarches cft même cité par
Se. faut d^m fa première épi-
tre aux Thcflaloniciens , fi
c'eft citer un paflage que de
le répéter mot pour mot. Le
teftament du patrîarche-A?«Ae«
porte au chap. VI. Za colère
fdu Seigneur tomba enfin fur
1^ igâ Desàn&es, ëéiQiES, diables, m
Quelques commentateurs ont écrit que cfe palTigô
îà'Ifaïe , Comment es -tu tombé du ciel , ô Lucifer,
Çtti parailJ'ais le matin ? déÛgne la chute des anges ,
i& que fe*eft Lucifer qui fe déguifa en ferpent pour
faiiré manger la pomme à Ei)e & à fon mari.
Maïs en vérité , utie allégorie iS étrangère refleirt-
tle à ces énigmes qu'on faîfait imaginer autrefois aux
^jeunes écoliers dans lés collèges. On expofait , par
exemple , un tableau repréfentant un irieillard & une
Jeûne fille. L^un difait , C'eft l'hiver & le prlntems :
l'autre , C'eft la neige & le feu ; un autre , C*eft
la rofe & l'épine , oo bien , C'eft la force & la fai-
bleffe : & celui qui avait trouvé le fens le plus éloigné
du fujet , rapplicacion la plus extraordinaire , gagnait
ic prix.
\\ en eft précîiéméni: da même de cette appIiCa*
lion fingulîère de l'étoile du matin au diable. Ifaie
dans fôn quatorzième chap. en infultant à la mort
tl'un roi de Babilone , lui dit , A ta mort on a cbantt
à gorge déployée ; les fapins , les cèdres s*en font
rejouis. Il riefi venu depuis aucun exaSeur nous met-
tre à la taille. Comment ta hauteur eft^elle defcendue
Au tombeau malgré le fon de tes mûjettes ? comment
lef'tu couché avec les vers & la vermine ? comment
et'tu tombée du ciel i étoile du matin , Hélel , toi
ijui frej/ais lei nations , tu es abattue en terre !
Où a traduit dct Hilel en latin par Lucifer : on
^ dônâé d'èptsis ce nom au diable , quoiqu'il y ait
^^àn^
feèai
"iiiïfS^^
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tfgmnb
^itmm
'"^^f^M
CHEZ LES ANCIENS ET CHEZ LES JuiFS. l83
aflurémcnt peu de rapport cotre le diaWe & l'étoile
du matin. On a imaginé que ce diable étant tom-
bé du ciel , était un ange qui avait fait la guerre à
Dieu : il ne pouvait la faire lui feul , il avait donc
des compagnons. La fable des géants armés contre
les Dieux répandue chez toutes les nations , eft fé-
lon plufieurs commentateurs une imitation profane
de la tradition qui nous apprend que des anges s'é-
tatcnt foulevés contre leur maître.
Cette idée rcqut une nouvelle force de Tépkre de
St, Jude , où il eft dit : Dieu a gardé dmts les téni-
bres , encbcùnés jufqu'uLU jugement du grand jour ,
les anges qui ont dégénéré ^de leur orïgîJ^e , ^ qui
ont abandonné leur propre demeure Malheur à
ceux qui ont fuivi les traces de Caïn difqmls
Enoch feptiéme homme après Adam a propbètifi , en
difant^ Voici , le Seigneur ejl venu avec/es mJlions de
faillis , t^c.
On s'imagina ^\x^Fnw:h avait laifle par écrit Thif-
toîre de la cfaûte des anges. Mais il y a deux cho-
fes importantes à obferver ici. Premièrement , Enoch
n'écrivit pas plus que Seth , à qui les Juifs attri-
buèrent des. livres ; &. le faux Enoch que cite St,
'Jude , eft reconnu pour étve forgé par un Juif («).
Secondement , ce faux Enoch ne dit pas un mot de la
rébellion & de la chute des anges avant la formation
mx: & St. Paul dit prccifé-
ment les mêmes paroles. Au
refte , ces douze teftamens ne
font pas conformes à la Ge-
nèfe dans tous les fiiits. L'in-
oefte de Juiay par exemple,
n'y eft pas rapporté de la mê-
me manière. Juda dit qu'il
abutade'Xa bellâ-fitle étant
y vre. Le tea^mcnt de Ruben ,
a cela de particulier , qu'il
admet dans Thoranie fept or-
ganes des fens au - lieu de
cinq ; il compte la vie Se Taâe
de la génération pour deux
lèns. Au refte, tous ces pa-
triardies fe repentent dans ce
teftament d*avoir vendu leur
^itm^
M iiij
i
-wîfta^
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tiKtÊÊÊiÊÊÊÊÊÊÊÊmm
184 Des ÀitôËs , ôéïïiEs, diables,
^ ■ ■ ^
de rhommé. Voici mot-à-mot ce qu'il dit dant fes
Egregorù
Le nombre dès bontmes s* étant prodigiettfenunt ac^
cru , ils eurent de tris belles fiUes ,• les anges , les
veillans ^ Egregeri , en devinrent amoureux ^ &
jfurent entraînés dans beaucoup £ erreurs^ Us s^anhnè^
.rènt entr^eu» ,• ils fe dirent , Cboi/iffons-nous desfem*
mes parmi l&s filles des hommes dé la terre; Semîaxas
leur f rince dit , Je crains que vous tiojiez accomplir
un tel deffein , f^ que je ne demeure Jeul charge du
Mme. Tous fépoMireiit , t'aifôHs ferment d* exécuter
Hotre dejfein , Êf dév&uons-nous i rahatbêfneji nous
y manquons, ïls hmirent donc par ferment @ firent
dès imprécations. Ils étaient dewt cent len nombre.
Ils partirent énfeMble du tems de Jared , &? allèrent
fUr la moritagne àpp'etlèe Hctirionira à caûfe de let&
ferfneni. Voici lé nom des principaux» : Semîaxas ,
AtaVculph , Aradel , Chôbabicl Hofampfich , Zacicl
Parmar , Thaufaël , Samiei , Tirel , Sumiel.
Ëuie ^ les aiàres prirent des femmes tan bnze cent
Jbixante & dix de la création du monde. De ce com^
mer ce naquirent trois.genres d'hommes i, les géa^asUiL^
fh'dim ) &Ci
L'auteur de c6 fragment écrit clé ce ftile qui fcm-
hh appartenir aux premiers tems^ c'eft la même naï'-
,V:eté. Il ne manque pas de nommer les perfonnages ; il
n'oublie pas les dates ; point de réflexions , point de
maximes , c'eft l'ancienne manière orientale.
On Voit que èettè hilftoirè eft fondée fut h fixiez
taie chapitre de la Genèfe : Or en ce teins il y avait des
géants fi(r la terre ,• car les en/ans de Dieu ayant eu
commerce avec les filles des hçmmes , elles enfantèrent
4es puijfam du fiéch.
Le livré À' Enoch & h Géncie font entièrement d*ac*
fcoixl iwc l'accouplement dés anges awc les filles des
î
-■
«Nftft^
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CHEZ LES ANCIENS ET CHEZ LES JUIFS. l85
hommes , & fur la race des géants qui en naquit Mais
ni cet Éfiocb , ni aucun livre de Tancien Teftament ,
ne parle de la guerre des anges contre Dieu , ni de
leur défaite , ni de leur chute dans Tenfer , ni de leur
haine contre le genre- hum^n.
Il n'eft queftion des efprîts malins & du diable que
dans rallégorie de Job , dont nous avons parlé , lai-
quelle n'eft pas un livre juif, & dans l'aVanture de Tû^
bie. Le diable Afmodée , ou Sbammadey , qui étrangla
\qs fept premiers maris de Sara , & que Rapba'ei fit délo-
ger avec la fumée du foie d'un poiffon , n'était point
un diable Juif, mais Perfan. Rapha:el Talla etichaindr
dans la haute Egypte ; mais il eft confiant que les Juifs
n'ayant point d'enfer , ils n'avaient point de diables.
Us ne commencèrent que fort tard à croire l'immor*
talité de Pâme & un enfer , & ce fut quand la fe<fte
des pharifiens prévalut. Us étaient donc bien éloignés
de penfer que le ferpent qui tenta Eve fut un diable ,
un ange précipité dans l'enfier. Cette pierre qui fert
de fondement à tout l'édifice ne fîit pofée que la der-
nière. Nous n'en révérons pas moins l'hiftoire de là
chute des anges devenus diables; mais nous ne favonè
où en trouver l'origine.
On appdla AidblcsBe/zèbiitb^Belpbigor^Afiaroibf
mais c'étaient d'anciens Dieux de Syrie. Beipbigor
était le Dieu du mariage ; Belzibutb , ou BeUfe-butb ,
lignifiait le Seigneur qui ptéferve des infedes. Le roi
Ocbojtaî même l'avait confulté comme un Dieu , potit
favoir s'il guérirait d'une maladie ; & Eiif indigné dé
cette démarche avait dit , ITy o-tM poittt de Dieu eu
ïfrdël , fout aiier confulter le Dieu d'Accartm ?
Ajiarùth était la inné , ft la lune ne s'attendait pai
a devenir diable.
L'apétre Jude dit ehcor que k diable fe querella t
«&«r l'ange Micha^â au fujet au sorfs de Moïfc. Mais , fc
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^icfflij"' , *Miiirifi " >■!■' '>ffjgj^
[ i%6 Des anges > génies , diables , &a S
on ne trouve rien de femblable dans le canon des
Juife. Cette difpute de Micbael avec le diable n'eft que
Jans un livre apocryphe intitulé , Analipfes de Moifi ,
cité par Origène dans le troifiéme livre de fes prin-
cipes.
, Il.eft donc indubitable que les Juifs ne reconnurent
point de diables jufques vers le tems de leur capti-
vité à Babilone. Ils puifèrcnt cette dodrine chez les
Perfes qui la tenaient de Zoroajire.
IV n*y a que Tignorance , le fanatifme & la mau-
vaife foi qui puiflent nier tous ce3 faits ; & il faut
.ajouter que la religion ne doit pas s'effrayer des con-
féquences. Dieu a certainement permis que la croyan-
jce aux bons & aux mauvais génies , à Timmortalité
4e Tame , aux récompenfes & aux peines éternelles ,
ait été établie chez vingt nations de l'antiquité avant
de parvenir au peuple Juif. Notre fainte religion a
confacré cette do(îtçine ; elle a établi ce que ley^u-
^tres avaient entrevu ; & ce qui n*était chex les anciens
i^u'une opinion , cft devenu par la révélation une vé-
xité divine.
Si les Juifs ont enseigné les autres na-
tions , ou s'ils ont ÈTà enseignes par
elles.
Les livres facrés nVyant jamais décidé fi les Juifs
fiyaient été les maîtres ou les difciples des autres pcu-
fsles , il eft permis d^examiner cette queilion.
Pbilm dans fa relation de fa miffion' auprès d^
Caliguîa , commence pat dire qu'Ifrdel eft un terme
^aldéen , que c'eft un nom que les Caldéeas donnè-
rent aux juttes confacrés à D i E u^,qiî'//ra^/ fignifie
voyant Dieu. Il paraît donc prouvé par cela feul que
ieS Tr*^ *•>'>r^;^AtlAwÀr«l. X^^^U Til'»,yJ Qu'île AA ffi^ Hnn.
Juifs n'appellèrènt jiacob IJra'él , Qu'ils jae fe don-
■nèrcnt le nom à^IJrjuiitet , que lor^'ijs. curent a^eW
Mi&a^
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Si les Juifs ont ekseioké, &a 187 V
qne connaifTance du caldéen. Or ils ne porent avoir
connaifTance de cette langue que quand ils furent
efclaves en Caidée. Eft-il vralfemblable que dans les
déferts de l'Arable pétrée , ils euiTent appris déjà le
caldéen ?
Plavim Jùfepb , dans fa réponfe à Affion , i Lf^
maque & à Moion lîv. II. ch. V. avoue en propres
termes , que ce font les Egyptiens qui apprirent à d*au»
très nations à Je faire circoncire^ comme Hérodote le
témoigne. En effet, ferait -il probable que la nation
antique & puiflante des Egyptiens , eût pris cette
coutume d'un petit peuple qu'elle abhorrait , & qui
de fon aveu ns fut circoncis que fous Jofué ?
Les livres fkcrés eux-mêmes nous apprennent que
Moife avait été nourri dans les fciènces des Egyptiens,
& ils ne difent nulle part que les Egyptiens ayent
jamais rien appris des Juife. Quand Sakmon voulut
bâtir fon temple & fon palais, ne demanda -t -il pas
de« ouvriers au roi de Tyr ? il eft dit même qu'il
donna vingt villes au roi Hirant'^ pour obtenir des
ouvriers & des cèdres : c'était fans doute payer bien
chèrement , & le marché eft étrange ; mais les Tyriens
demandèrent -ils des artiftes Juifs?
Le même Jofepb dont nous avons parlé avoue que
fa nation , qu'il s'efforce de relever , n'ettt longtems
aucun commerce avec les autres nations , qu'elle fut
furtout inconnue des Grecs , qui connaijfaient les Scy*
thés ^ les Tartares, Faut -il s'étonner , ajoute - 1- il
liv» I. ch. V , que notre natkm éloignée de la mer ,
fef ne fe piquant point de rien écrire , ait étéjt peu
connue ?
. Lorfque le même Jofepb raconte avec fes exagéra-
tions ordinaires , la manière auiïi honorable qu'in-
croyable , dont le roi Ptolomée Pbiladelphe acheta
une traduAion grecque des livres juifs , faite par des
\
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mJT^'* " *!m^' ■'*ar^
[88 Si les Juijfs ont enseigné
¥ Il
&
Hébreux dans la ville d'Alexandrie ; Jofepb , dis - je ^
ajoute que Démétrius de Phalère , qui fit faire cette
tradudtion pour la bibliothèque de fon roi , demanda à
Tun des traducteurs, comntentilje pouvait faire qu'au-
cun bijiorien , aucun po'ete étranger n^eùt jamais parlé
des loixfuives ? le traduéleur répondit : Comme ces loix
Jont taupes divines , perfonne n*a ofé entreprendre d*en
parler , ^ ceux qui ont voulu le faire ont été châtiés de
J)ieu, Théopompe voulant en inférer quelque choft dans
fon bifioire , perdit tefprit durant trente jours s fuais
ayant reconnu dans unfonge qt^il était devenu fou pour
-avoir voulu pénétra dans les chofes divines , êf en faire
part aux prof ants , (a) il appaifa la colère de DiEU par
Jes prières , 6f renp-a dans fon bon fens.
Théodede poète Grec , ayant mis dans une tragédie
quelques pajfages quHl avait tirés de nos livres faint s ^
devint aujji-tbt aveugle , ^ ne recouvra la vue qi^a^
près avoir reconnu ja faute.
Ces deux contes de Jofeph indignes de l'hiftc^ ,
^ d'un homme qui a le (ens commun , contredirent
à la vérité les éloges qu'il donne à cette tradudion
grecque des livres juifs ; car fi c'était un crime d'en
inférer quelque chofe dans une autre langue , c'était
fans doute un bien plus grand crime de mettre tous
les Grecs à portée de les connaître. Mais au moins
Jofepb , en rapportant ces deux hiftoriettes , convient
que les Grecs n'avaient jamais eu connaiflance des
livres de fa nation.
Au contraire , des que les Hébreux furent établis
dans Alexandrie , ils s'adonnèrent aux lettres grecques ;
on les appella les Juifs hellénifles. Il eft donc indu^
bitable que les Juifs depuis Alexandre prirent beau-
coup de chofes des Grecs , dont la langue était de-
venue délie de l'Afie mineure , & d'une partie de
< « ) M^t^ hift. <ks Juifs y Uv. XII. ehtp. IL
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LES AUTRES NATION S. I89
l'Egypte , & que les Grecs ne purent rien prendre des
Hébreux.
Des Romains. Commbncemens de leur empi-
re ET DE LEUR RELIGION : LEUR TOLÉRANCE.
Les Romains ne peuvent point être comptés parmi
les nations primitives. Ils font trop nouveaux. Rome
n'exîfte que fept cent cinquante ans avant notre ère
vulgaire. Quand elle eut des rites & des loîx , elle
les tint des Tofcans & des Grecs. Les Tofcans lui com-
muniquèrent la fuperftition des augures , fuperQition
pourtant fondée fur des obfervations phyfiques , fur le
paflage des oifeaux dont on augurait les changemens
de Tatmofphère. 11 femble que toute fuperftition ait
une chofe naturelle pour principe , & que bien des
erreurs foient nées d'une vérité dont on abufe. *
Les Grecs fournirent aux Romains la loi des douze
tables. Un peuple qui va chercher' des loix & des
Dieux chez un autre , devait être un peupfe petit &
barbare ; auïïi les premiers Romains Tétaient-ils. Leur
territoire du tems des rois & des premiers confuls «
n'était pas fi étendu que celui de Ragufe. Il ne faut
pas fans doute entendre' par ce nom de roi, des mo-
narques tels que Cyrus & fes fuccefleurs. Le chef
d'un petit peuple de brigands , ne peut jamais être
defpotique. Les dépouilles fé partagent en commun y
& chacun défend fa liberté comme fon bien propre.
Les premiers rois de Rome étaient des capitaines de
ffibuitiers.
Si l'on en croit les hiftoriens Romains , cç peti^
Îieuple commença par ravir les filles & les bfens de
es voifins. Il devait être exterminé ; mais la féro*
cité & le befoin qui le portait à ce§ rapines , ren-
dirent fes injuftices heureufes ; il fe foutint étant
toujours en guerre ; & enfin , au bout de cinq
fiécles , étant bien plus aguerri que tous les autres
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i
190 D E s R O H A I N s.
■ 1 r -ii--i'--t:- r— ^ — I
peuples , il les foBmit tous les uns après les autres ,
depuis le fond du golphe Adriatique jufqu'à l'Eu<>
phrate.
Au milieu du brigandage , l'amour de la patrie
domina toujours jufqu*au tems de Sylla, Cet amour
de la patrie confifta pendant plus de quatre cent
ans , à rapporter à la mafTe commune ce qu'on avait
pillé chez les autres nations. C'eft la vertu des vo^
leurs. Aimer la patrie c'était tuer & dépouiller les
autres hommes. Mais dans le fein de la république
il y eut de très grandes vertus. Les Romains poli-
ces avec le tems , policèrent tous les barbares vain-,
eus , & devinrent enfin les légiflateurs de l'Occident.
Les Grecs paraiffent dans les premiers tems de leurs
republiques une nation fupérieure en tout aux Ro-
mains. Ceux-ci ne fortent des repaires de leurs fept |
montagnes avec des poignées de foin , moHipuli , I
qui leur fervent de drapeaux , que pour piller des
villages voifins. Ceux-là au contraire ne font occu-
pés qu'à défendre leur liberté. Les Romains volent
a quatre ou cinq milles à la ronde les Eques , les
Voîfques , les Antiates. Les Grecs repouflent les ar-
mées innombrables du grand roi de Perfe , & triom-
phent de lui fur terre & fur mer. Ces Grecs vain-
queurs cultivent & perfedlionnent tous les beaux arts ;
& les Romains les ignorent tous , jufques vers le
tems de Scifion l'Africain,
J'^obferverai ici (ur leur religion deux chofes impor-
tantes ; c'eft qu'ils adoptèrent , ou permirent les cul-
tes de tous les autres peuples , à l'exemple des Grecs ,
& qu'au fond le fénat & les empereurs reconnurent
toujours un Dieu fupréme , ainfi que la plupart des
philofophes , & des poètes de la Grèce, {f)
(a) Voyez Tartide \Z);ra dans les jQueJiions fur VEncyr
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iggtma»
Dbs Romains. I9'V
'
I
;
La tolérance de toutes les religions était une loi
naturelle , gravée dans les cœurs de tous les hom*
mes. Car de quel droit un être créé pourait-il for-
cer un autre être i pcnfer comme lui ? mais quand
un peuple cft raffemblé , quand la religion cft deve-
nue une loi de Tétat, il faut fe foumcttre à cette loi.
Or les Romains p'ar leurs loix adoptèrent tous les
Dieux des Grecs ^ qui eux-mêmes avaient des autels
pour les Dieux inconnus , comme nous l'avons déjà
remarqué.
Les ordonnances des douze tables portent ; fepa*
ratim nemo hahejjît Deos neve advenus nijî fublicè
adfcitôs : que perfonne n'hait des Dieux étrangers &
nouveaux fans la fandion publique. On donna cette
fanétion à plufieufs cultes ; tous les autres furent
tolérés. Cette aflbciation de toutes les divinités du
monde , cette efpèce d'hofpîtalité divine fut le droit
des gens de toute Tanciquité , excepté peut-être
chez un ou deux petits peuples.
Comme il n'y eut point de dogmes , il n'y eut point
de guerre de religion. C'était bien aflez que Tambî-
tion , la rapine verfaflent le fang humain , fans que
la religion achevât d'exterminer le monde.
Il eft encor très remarquable que chez les Ro*
mains on ne perféouta jamais perfonne pour fa ma*
nière de penfer. Il n'y en a pas un feul exemple
depuis Romultis jufqu'à Domitien , & chez les Grecs
il n'y eut que le feul Socrate.
Il eft encor inconteftable que les Romains comme
les Grecs , adoraient un DiEU fùprême. Leur Ju-^
. fiter était le feul qu'on regardât comme le maître du
tonnerre, comme le feul que l'on nommât le Dieu très
grand & très bon , Deus optimus maximum, Ain(i de -
l'Italie à l'Inde & à la Chine , vous trouvez le culte
'^frfftStitt
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; • 192
Des Romains.
1
cfun Dieu fupréme & la tolérance dans toutes les
nations connues.
A cette connaifTance d'un Dieu « à cette induU
Îieoce univerfelle , qui font partout le fruit de la rai<
on cultivée , fe joignit une foule de fuperftitions ,
qui étaient le fruit ancien de la raifon commencée
& erronée. On fait bien que les poulets facrés , Sç
la Déeffe Pntunda , & la Péeffe Çiçaçina , font
ridicules.
Pourquoi les vainqueurs & les légîflateurs de tant
de nations n'abolirent-ils pas ces fottifes ? C'eft qu'é-
tant anciennes elles étaient chères au peuple , ^
qu'elles ne nuifaient point au gouvernement Les
Scipio9ff , les Paul-Emiles , les Cicerons , les Céu
tons , les Céfars avaient autre chofe à faire qu'à
combattre les fuperftitions de la populace. Quand
une vieille erreur eil établie , la politique s'en fçrt
comme d'un mords que le vulgaire s'eft mis Iui-mé«
me dans la bouche , jufqu'à ce qu'une autre fuperf-
tition vienne la détruire • & que la politique pro-
fite de cette féconde erreur ^ comme elle a profité
de la première.
(Questions sur les conciuêtes des
Romains , et leur décadence.
Pourquoi les Romains qui n'étaient que trois mille
habitans , & qui n*avaient qu'un bourg de mille pa^
de circuit fous Romuluî , devinrent-ils avec le tems
les plus grands conquérans de la terre ? & d'où vient q ue
les Juifs qui prétendent avoir eu fix cent trente mille
foldats en fortant d'Egypte , qui ne marchaient qu'au
milieu des miracles , qui combattaient fous le Dieu'
des armées , ne purent-ils jamais parvenir à con*
quérir feulement Tyr & Sidon dans leur voifinage ,
pas même à être jamais à portée de les attaquer ?
Pourquoi ces Juifs furent-ils prefque toujours dans
^ l'efclavage ? ^^
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î
tgBf Wi H' <IMI
CONQ.UÊTBS DBS ROMAI^TS.
refdavage? Ils avaient tout i'eiitoiifiafine & touto-
la férocité qui devaient faire des conquérans ; le-
Dieu des armées était toujours à leur tête ; & ^e^,
pendant ce font les Romains éloipés d'eux de dix-^'
huit cent milles , qui viennçnt à la fin les (ubjiigiteç
& les vendrç au marché.
N'eft-il paà clair (humainement parlant & ne eon^
fidérant que les caufes fécondes) que fi les Juifs qui
efpéraient la conquête du monde , ont été prefque
toujours aflervis , ce fut leur faute ? Et fi les Ron
mains dominèrent , ne le méritèrent ^ ils pas par
leur courage & par leur prudence ? Je demande trè$
humblement pardon aux Romain^ de le$ çomp^r^f
un moment avec Içs Juifs.
Pourquoi les Romains pendant i^Ius de quatre centi
cinquante ans ne purent-ils conquérir qu'une étenduQ
de pays d'environ vingt-cinq lieues ? N'eft-ce point
parce qu'ils étaient eh très petit nombre , & qu'ils
n'avaient fuçceflivement à combattre que de petits
peuples comme eux ? Mais enfin , ayant incorporé
avec eux leurs voifins vaincus , 'ii& eurent aiTez de
force pour réfifter à PjyrrbuSf
Alors toutes les petites nations qui les entou-»
raient , étant devenues Romaines , il s'en forma un
peuple tout guerrier ^flez formidable poyr détruire
Carthage.
Pourquoi les Romains employèrent - ils fept cent
années à fe donner enfin un empire à^peu-près auffi
vafte que celui qu'Alexandre conquit en fept ou
huit années ? eft-ce parce qu'ils curent toujours i
combattre des nations belliqueutcs , & q^'4^ew»^»'Ç
eut à faire à des peuples amollis ?
Pourquoi cet empire fut-il détruit par des barba^
res ? Ces barbares n'étajjçnt-ils p^s pli^s rpbu(te?,
Ejfaifur les niœurs , 6? ^- Tom. I. N
11
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«s*
EU
î
I
194^ Q;U tlTTI OKI firiULES
^^flBi^aBÊ^m^mmm T n - 1 un n nu [Tum— t^^—
plùS' guerriers que k«> Ilt>ma&is amolHs i Iwr tooc
(bus Nùnêrins Sc foi» ftts focoefieurs ? Quihd les Cim*-
biws Tinrent menacer ricalie du tems de Murius ^
les Roms^ns durent prévoir que les Gînbares: , c'eftî*
èh^ire le9 peuples du Nord , dëchirendènc Tempire
lorfqu'il n'y aurait plus àt Mmus. -
La fàibleffe des ènif^eûts , les faétions de leurs
miniftires & de leurs eunuqties , la haine que Tancien-
w rdi^ion de l'empire portait à la nouvelle^ les que-
relles fbnglântes élevées dans le ohrlftfanifine , lee
difputes théologiques AibftituéeS' au maniement des
armes, & la mollene à la taleur , des multitudes de
moines rempla<;ant les: agriculteurs & les foldats ,
tout appellait ces mêmes barbares qui n'avaient pu
vaincre la république guerrière , & qui accablèrent
Rome: languifTante , fous des empereurs cruels, ef.
fëminés à, dévots.
Lorfque les Goths , les Hérules , les Vandales ,
les Huns inondèrent l'empire Romain , quelles me-
fures les deux empereurs prenaient-ils pour détour-
ner ces orages ? La différence de POmoqfîos à /*(>•
moujios mettait le trouble dans TOrient & dans
l'Occident. Les perfécutions théologiques achevaient
de tout perdre. Nèftarius patriarche: de Conftântî-
nople qui eut d'abimi un grand crédit fous Thiodo^
fe. fécond ^ obtint dé cet empereur qu'on perfécu-
tât ceux qui penfaient qu'on devait rebatifer les chré-
tiens apoftats repentans , ceux qui croyaient qu'on
devait célébrer la Pâque le 14 de la lune de Mars ,
ceux qui ne feifaîent pas plonger trois fois les bâti-
fés; enfin il tourmenta tant les chrétiens , qu'ils le
tourmentèrent à leur tour. Il appella la Ste. Vierge
j^ntrcpotokos s fes ennemis qui voulaient qu'on l'ap-
pellât Theotokoî , & qui fins doute avalent raifon ,
puifque le concile d'Ephèfe décida en leur faveur ,
lui fufcîtèrent une perfécution violente. Ces que-
telles occupèrent tous les éfprits. Mais pendant
1
sn^
'iâ
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y Ç ONaUÉTES P*E9 RoMAIlf s. ISff 11
qu^on dfrpntaft , Ie9 bftrtiaies {lartageatçnt l'EurQpe 4(
PAfrique. ....
Mais poprc^oi Aiaric qui au commenoeiiiiçnt dq
cinqtdéaie fiéclt marcha des bords du Danube vtt^
Rome , ne commeni^^t-il pat par' attaquer Confiant}-
nople , lorfqu'il était maître de la Tbrace ? Comment
hazarda*t-ii de fc trouver prefle entre Tempire d'Or
tient & celui d'Occident? EMl naturel qu'il voulût
paflTer les Alpes & l'Apennin , lorfque Çonftantinople
tremblante s'offrait à fa conquête ? Les bif^oiriens de
ces temsrià , auffi mai inftrutts qpe les peuples étaiient
mal gouvernés , ne nous développent point ce myC
tère ; mais il efl aifé de le deviner. Aiaric ^vsiit été
général d'armée fous Tbéodofe J j ptinct violent,
dévot & imprudent , qui perdit l'empire en confiant
ta défenfe aux Goths. Il yainquit atec eux fon çom<^
8^ pétiteur Eugène ; mais les Goths apprirent par-là qu'ilif
pouvaient vaincre pour eux-mêmes. Tbiodofe fou?
doyaît Aiaric & fes Goths. Cette paye devint un
tribpt , quand Arcadius fils de Thiodofe fut fur le
tr6ne de TOnent. Aiaric épargna donc fon tribu-
taire popr aller tomber fyx Honorius 6c fur Rome.
Honorîus avait pour général le célèbre Stilicon^
\p feul qui pouyait défendre l'Italie y St qui avait
déjà arrêté les efforts des barbares. Honorius fur d(;
fimples foupqons lui fit trancher la tête fans forme
de procès. Il était plus aifé d'afTaffiner Stilicon que
de battre Aiaric. Cet indigne empereur retiré à Ra^i*
yenne , laiffa le barbare y qui lui était fupérieur en
tout , mettre le fiége devant ^.ome. L'ancienne mal-
treffe du monde fe racheta du pillage au prix de
cinq mille livres pefant d'or , trente mille d'argent ,
quatre mille robes de foie , trois mille de pourpre ,
& trois mille liyres d'épiceries. Les denrées de Tln^e
fervirent à )a ranqon de Rome.
i Honorius ne voulut pas tenir le traité. |I envoya |
ij: quelques tro^ipes ^xx^A^çpric extermina. Il entra dasii ^
^ggS^ I . . J. l . -ipi mJ^\ iy . . i ■■ ' ' U '..^ ■■■ 1 i^^i
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196 Sur les conqjjbtïs deç Romains.. Û
Rome en 409, & un Gqth Y créa un empereur qui
devint fon premier fujet. L'année d'après , trompé
par Honorius , il le punit en faccageant Rome. Alors
tout l^empire id'Occident fut déchiré ^ les habitans
du Nord y pénétrèrent de tous côtés , & les empe-
reùrs d'Orient ne fe maintinrent qu'en fe rendant
tributaires.
C'eft aînfi que Tbeodofe II le fut d* Attila. L'Ita-
lie , les Gaules , rEfpagne , l'Afrique , furent la proie
de quîctonquc voulut y entrer. Ce fut là le fruit de
la politique forcée de Conjiantin , qui avait trans-
féré l'empire Romain enThrace.
1
N'y a-t-îl pas vîfiblement une deftînée qui fait Tac-
croiflement & la ruine des états ? Qui aurait prédit
à Augujie qu'un jour le capitole ferait occupé par
un prêtre d'une religion tirée de la religion juive» . ^
aurait bien étonné Augujle. Pourquoi ce prêtre s*eft. B
il enfin emparé de !a ville des Sapions & des Ci'
fars ? c'cft qu*îl l'a trouvée dans l'anarchie. Il
s'en cil rendu le maître prefque fans effort , comme
les évéques d'Allemagne vers le treizième fiécle de-
vinrent fûuverains des peuples dont ils étaient paf-
teurs.
Tout événement en amène un autre auquel on ne
s'attendait ^pas. Romultis ne croyait fonder Rome ni
pour les princes Goths^ni pour des évéques. Alexan-
dre n'imagina pas qu'Alexandrie appartiendrait aux
Turcs ; & Conflantin n'avait pas bâti Conftuntinoplc
pour Mahomet IL
Des premiers peuples qui écrivirent l'his-
toire , ET des fables des PREMIERS HIS-
TORIENS. *
Il eft inconteûable que les plus anciennes anna-
le les du monde font celles de la Chine. Ces annales
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l
S Premiers peuples aui ont écrit , &c. 197 < r
fe fuivcnt fans interruptîoa toutes cîrconftanciécs ,
toutes fages, fans aucuii mélange de merveilleux,
toutes appuyées fur des obfervations aftronomiques de.
puis quatre. mille cent cinquante-deux ans. Elles re«
montent encor à plufieùrs fiécles au-delà fans dates
précîfes à la vcTÎté , mais avec cette vraîfcrtibïance
qui femble approcher de la certitude. H eft bien pro-
bable que des nations puîfTantes , telles que les In-
diens , les Egyptiens , les Caldéens , les Syriens qui
avaient de grandes villes , avaient auiB des anngles. '
Les peuples errans doircnt toe* les derniers qui
ayent décrit , parce qu'ils. ont moins de moyen» que
les autres d'avoir des archives & de', les amierver^
parce qu'ils ont peu de befoîns , peu de loix , peu
d'évéïiemens ; qu'ilr fit font occupés que d'une fiib-
fiftance précaire , & qu'une tradition orale leur fuf&t.
Une botnrgade n'eut jamais d'hiftoire , un peuple ert
rant -enlcor moins , une fimple trille très rarement -
L^hiftoire d'une nation ne peut jamais être écrite
que fort tard ; on commence par quelques regîftres
très fommaires , qui font confervés autant qu'ils peu-
vent rêtre dans un temple ou dans une citadelle.
Une guerre malheureufe détruit fou vent ces annales ,
& il faut recommencer vingt' fois, comme desiFcmr-
mîs dont on a foulé aux pieds l'habitation ; ce n'èft
qu'au bout de plufieurs fiécles qu'une hrftoîrd uti
peu détailléepeutfuccédef à ces regîftres informée ',
& cette première Wftoîre éft toujours' mêlée ' if un
feux merveilleux , par fequel' on veut remplacer la
vérité qui manque. Ainfi les Grecs n'eurent leur
Hérodote que dans la quatre -vingtième Olympiade ,
plus de mille ans après la^pr^micèe époque rappor-
tée dans les marbrerde Parc^ JFabius Piàor , le plus
ancien hiftoricn des Roiiiau^s , n'écrivit que du tems
de la féconde çuerre contre Carthage , environ dn^
cent quarante ans après la^foAdadoA de Home..
' N îij
li
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Or fi ces dcui nations , les plus fpîritucHes de
lâ terre ^ les Grecs & les Romains nô$ maîtres , ont
conimencc fi tard leur hiftoîre , fi nos nations fep^
tentrionales n'ont eu aiictin Kiftorien avant Grégoire de
Tours , croira- 1- on dé bonne foi que des TartareS
vagabonds t|ui dorment îur la neige , ou dés Tro-
gloditês qu! fe cachent dans des cavernes , ou des
Arabes errans & voleurs , ^uî errent dans des mon-
tagnes de fable , aycnt eu des fhucidides &, ides Xi»
fiQpbom ? peuvent-ils fàvoît quelque chôfe "de leurs
ancêtre» ? peuvent «ils acquérir quelque connaiflance
Rivant d'xivbir eu des Villes , avant de tes avoir ha-
bi<(;é6s ') avant d'y avoir appelle toi^ lies arts dont il)
étai^t privés ?
Si lés Samoyèd^s ; ouïes Naiamôni^ « ob les it-
qûinfatix ^ venaient nous donner de^ annales antidatées
4é fd^ïi£evrs nédes , remplies des pliiis étonnans fait^
d'atmes , & d*one fuite continivelle de prodl^s qui
étonnent la nature , né fe moqueraît-on pas de ces
paurres fiiuvnges ? Et G quelques perfonnes amoui.
retifes du merveilleux ou incéreflees à lé faire cirolre ,
donnaient h torture à leur efpfit jpour fendre ces
rt>tnfes V rai femb labiés , ne fc môquéiraft-6n pas de leurs
efforts t & s1ls j^ngn^ient à leur abfurditc llnfolen*
ce, d'i^iïetfber du mépris pour tes favans , & la cru-
auté de perfecuter ceux qui douteraient, ne ifer^îent-
îls pas ies plus c.^ccrijbtes des hommes? 'Q.u*un Sîà-
tUQîs vienne me conter les métamorpliofes de Sam-
îmnàcodom , & qu'')! me menace de me brûler fi
je lui fais des cibjetftiônfi , comment *doÎ6-j.e en ufer
avec ce Siamois ? • .'
' bès'hîftôrien^^offialhS Viotfs Ôonfeh't à-la- Véffté , q\jè
le Dieu Mart fit detfx i eWfain? j une ^eftalè , danis
\m -ftédé où ITtâlîe h'av^aîl-pdirit de VéRi^ ;qti*uné
^ôuve nocrfrïc-ces deix erfftns^'au -^liéîi tîè lèsT déva-
>er , t(>mmé ^noàs-I*aVpnV'déja va ; t\Me 'VdJhr'^Sc
4^/f/&toinbâttnrrtt^^r"Jes'RotiTaîfts-, ^-^exà^kiï
^iti^n ■ "I I iiiiÉti if
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I
Q.U.I ONT i,C^;|3rifc'HlSTO^RE, J99
fe jetta dans un gouffre , ,&rfqnt k gouffre fe referma ;
mais Je fénat de Rom^ ne /condamna jamais à la mort
ceux qui doutèrent de tous ces prodiges : il fut permis
d'en rire dans le capitule.
n y-a â0f}$ ThiAdii^l^sMjaaine. des ^v^n^meçs très
poOTibUS) qm font très.pfeu vraifemblables. flufieu«s
îavansihçmmes ont déjaréy^o^ en doute Tavantune
des ims qui -fauvèrent Kome , S^- celle de Camilit^^qui
détruifit entièrement T^arniée dies Gaulois. I^a vidoif^e
it Caille brille beai^i^p^ ,i la' vérité;, d^S'Jv^.
, Live i mais Polybe plus ancien que Tite - Live , &
|jlus homme d'état , dit précifjunent le contraire ;
jl affure que les Gaulois craignant d'être attaqu|é&.par
les Vënètes y partirent de Rome chargés de.buiin^ ^p^|s
«voir î;^t la pdix s^vec les B^nûios. ^ qui croironl-
inous de Titf^Livê ou; de Polybt .''«au moîns noi^ |^
douterons. r -r. v. , . A
--■..•.-■■; 8
Ne douterons-iieiUS j^ jeQÇoc du fupplice de^ Ri- K
gulus qu'on fait enfermer dans un coffre armé eh w
dedans de pointes de fêr ? Ce genre de mott cil sf-
Xurément unique- Comment ce même Pol^bt pref-
que contempnrain ^ Polybe qui était fur les lieux ,
qui a écrit fi fupérieueement h guerre de Home &
de C£irthage,aurait-il palVé fous filence un fiiit aufli
extraordinaire, aufîl important , & qui auraic (i bien
}ùilific la mapvaire foi dont les Romains en ufércjït
avec les Carthaginois ? Comment ce peuple auraît-il
ofé violer fi burbarement le droit des gens avec JÎé^-
guiut ^ dans le tems que les Romains avaient entre
leurs mains plufieurs principaux citoyens de Carthage
fur iefquBds^jk uuTaieot^riervctogitf ? . T
•Enfin ^Ihoidr^deSiciie rapports dans un de Tes fra^
menSvique ies-enfanî deri?i^|nàrr^yant.fort maltraité
„ des priCnniAérs Carthii^hii>i&, ir-fénatrom^n les répri*
â manda y &iBt> valoir le difoit des gpens, N'aurait^hpas
permis uisr ejofte véngeancie j«pKcfil"s de JUgu^yû : i
N iiij ^3
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leur père aVaît été aïTaflîtié I Carthagé ? L'hîftoire
du fupplîce de Rigtdus s'iétablît avec \t tems , la hai-
ne contre Carthagé- lui donna cours ; Horace la chan-
ta, & on n'en douta plus.*
Si iioti jefc'totié le! yeux Tilr lés pfeiniei'S ttmi de
'notre hiftoîrc de France, tout en cft peut-être aufii
feux qu'obfcur & dégoûtant ; du moins il eft bien
difficile de croire ravant\ire de Cbilderic & d'une Ba-
%mf femme d'un Bazin , & d'un capitaine Romain
^lu roi des France qui n'avaient point encor de rois.
'ièrégùire de Tours cft notre Hérodote -, à cela ^rèô
%Sxt le Tourangeau eft moins amufant , moins élé-
gant qifè le Gfcc. Léi rhoîn'és qui écirivîrent après
Grégoire furent -ils plus^ éclairés & plus véridiques ?
^ prodiguèrent -ils pas^ quelquefois des louanges un
jpeu outrées à des altafTins qui leur avaient donné
des terres ? Ne chargèrent-ils jamais d'opprobres des
^princes fages qui ne leur avaient' rien donné?
, Je faîs bien que les Plranciè qui envahirent la Gati*-
!e furent plus cruels que les Lombards qui s'empa-
Tèreire de ITtaîie, &• î^be les Vifîgû^hs qui régnèrent
rn Eft>agtie. On voit autant de meurtres , autant
d'afT-ffmats dans les annales des Clovh , des Tbier^
rzj, des CM/debern , des Cbiip'erks 8c des ChtaireSiquû
^ms celles des rois de Juda & è'IfraaL Rien n'eft
afTtnéraent plu^? fauvage que ces tems barbares ; ce-
pendant , n^ell-il pas permis de déuter du fupplîce
dé Ik rdne Brunebiùa ? ,
Elle était àgée.d^ près-dp ^qùatre^vingtanis jqôand
elle mourut en 6i% ou 6i^. Fridegaire qui écrivait
far 3a fin du huitième fiécié , cent cinquante ans
après la morf de Brtàtebaut $ f & non pas dans le
feptiémé fiécle ^ comme il jeft dKt dans Tikbrégé chfo>>
nojogiqut pat une Suite di'impreflion ) Fridegaire ^
'ài$^ s nous affure. <$Be Je roi Clptme , f»inee très
■W
î
.1
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Q.UI ONT icïllt l'histoire. 20I «
pieux , très craignant DiBU , humain » patient , dé-
bonnaire ) fit promener la riine Brunebat^t fur un
chameau autour de fon camp , enfuite la fit attacher
par les cheveux , par un bras & par une jambe à
la queue d'une cavale indomtée , qui la traina vi-
vante fur les chemins , lui fracafTa la tête fur les cail-
loux , la mit en pièces , après quoi elle fut brûlée
& réduite en cendres. Ce chameau , cette cavale in-
domtée , une reine de quatre-vingt ans attachée par
les cheVeux & par un pied à la queue de cette ca-
vale , ne font pas des chofés bien communes*
tl eft peut-être difficile que le peu de cheveux d'une
femme de cet âge puilTent tenir à une queue , &
Ju'on foit lié à la fois à cette queue par l<qs cheveux
: pair un pied. Et comment eut-on la pieufe atten-
tion d'inhumer Brunehaut dans un tombeau à Au-
tun , après l'avoir brûlée dans un camp ? Les moi-
nes Frédegaire & Aimoin le difent ; mais ces moi-
nes font-ils des de Tbéu & des Mmnes ? .
^ ïl y a un autre tombeau érigé à cette reine au quln*»
zîéme fiécle daiis l'abbaye de St. Martin d'AutuQ
qu'elle avait fondées On a trouvé dans ce fépulcre
un refte d'éperon. C'était , dit-on , l'éperon que Toti
mit aux flancs de la cavale indomtée. C'eft domma«
ge qu'on n'y ait pas trouvé aufii la cerne du cha»
meau fur lequel on avait fait monter la reine. N'eft-
il pas poûible que cet éperon y ait été mis par inad-
Vertence , ou plutôt par honneur? Car , au quin-
zième fiécle , un éperon doré était une grande mar-
que d'honneur. En un mot , n'eft-il pas raifonna-
ble de fufpendre fon jugement fur cette étrange aran-^
ture il mal conilatée ? Il eft vrai que Pufqmer dit quie lsi
mort de BrwmbcaU avmk été $r éclate fa,r la Jibyilt. .
Tous ces fiécies de barbarie ft)nt des -fiéclesd'hor-
reurs & de miracles. Mais Faudra^t-il croire tout cet
que les moines.Qnt.é:crit ? Us it^ijaç^ pieÇqye les feuU ^
^>^ iijii i I wsÊmmu^^ ' M^i i^S^
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■«feg«a**
iiÉih.
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a02 pRXf^BUfi ^EVIPLBS Q][JI €NTiORIT,&a
-■ '
^ui fuflbit lire & écfire , lorfque Cbarlemagfte ne
favait pas figner fon nont^ Ils nous ont inftruit
de la date de quelques gtàiids événemens. Nous
croyons avec eux que Charles Martel battit les Sar-
razins ; mais qb^il en ait tué trois cent foixante mille
dans la bataille , en vérité c'eft beaucoup.
Ils difent que Cltrois , fécond du nom , devint
ftu ; la chofe n'cll pas impoflible \ mais que Dieu
arh tffBigé fon cerveau pour le punir d'avoir pris un
bras de 8t, Denis dans Téglife de ces moines pour le
mettre dans fon oratoire , cela n'elt pas fi vraifem^
ïlable.
Sî on n^Vak que de pareils contes à retrancher
de rhîttoire dfe France , ou plutôt deljhiftoire des
roh francs & de leurs maires » on pourrait s'dffbr.
cer de la lire. Mais comment fupporter les menfoin-
ges grôfGers dont die eft pleine? Ony affiége conti-
nuellement des villes & des fortereffes qui n'cxif-
taient pas. Il n'y avait par - delà le Rhin que des
bourgades fans murs , défendues -par des pàlffTades
de pieux , S: par des fbïfés. On fart ^ue ce n'eft
5ue Tous Henri fOifeleur , vers Tan ^to , que la Ger-
manie eut des villes mutées & fortifiées. Enfin , tous
les détails de ces tems^Ià font autant de fables , &
qui pis eft , de fables ennuyeufes*
Des tioisxATEURs q.xji ont parlé au
NOM Djss Dieux.
- Tout légîflateut profene qui i6fe'ftîndïe que la Di-
vinité lui avait ëi^é fes loix , éï^lt vifibleroent
un-blalphémateur, & un traître ; un bkfphématcur,
puifqu'il calomniait les Dieux ; un traître, puifqu'il
aflerviffait fa patrie k^ tes propres opinions. 11 y a
deux fortes de loix , les unes nalurôUes , commu*
nés à -tous , & utiles -à tous. Tu ne jvolems ni ve
mSMsam
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MHHte
t^nif^
Li(ofêLÂT£U1t5 QVt 09IT P^MIÉ^^. SOJ «
ft • • I I I 1 I I I I I r ■ • r f ■ ! ^
titerOt ton pruchain ; fii aitras *im foin rt^éSneuk
de xfeux qui font donné le fotrr ^ qtn ont élevé ton
-enfance ,• tu ne ravirat pas la Jenmre èèe ton frire $
ta ne mentiras pasfottr lui nuire j fu Taiikeras dans
fes tefainspoter mériter V^en itrt'fecouru là ton fonr:
voîlà les loix que fa nature a promtilguéts du (tmd
des files du Japon aux rivages de nottie Occident
Ni fhrpbée ^ nî Hermès \ ni Minos , tri lÀcurpie,^
ni 2^»ia , n'avaient befbîn (\ut Jupiter tînt au brrit
du tonnerre annoncer des vérités graréev dans tous
les cœurs.
Si je m'étais trouvé vis-à-vis de quelgu'un de ces
grands charlatans dans la place publique , je lui au-
rais crié , Arrête , ne compromets point ainfi la Di-
vinité ; tu veux me tromper , fi tu la &is deféen*
dre pour enfeigner ce que nous favoSs tous ; tu veut
fans doute la faire fervir à quelqu'autre ufage : tu
veux te prévaloir de mon confentement à des véri-
tés éternelles , pour arracl^er de moi mon confente-
ment à ton ufurpation : je te défère au peuple com-
me un tyran qui bUifphèmew
Lés autt^s loix font les politiques : loix purement
civiles , éternellement arbitraires , qui tantôt éta-
blifTpnt des éphores , tantôt des confuls , des co-
mices par centuries , ou des comioes par tribus , un
aréopage ou un fénat , i'ariftocratie , la démocratie
pu la monarchie. Ce ferait bien mal connaître le cœur
humain , de foupqonner qu'il foit poflible qu'un lé>*
giilateur profane eût jamais établi une feule de ces
loix politiques au nom des Dieux , que dan9 la vue
de fon intérêt. On ne trompe ainfi les hommes que
pour fon> profit.
Mais tous les légîflatenrs profanes ont- ils été des
fripons , dignes du dernier fupplîce ? Non ; de même
qu'aujourd'hui dans les affemblées des magiftrats , il
fe trouve toujours des âmes droites & élevées qui pro*-
l
il
I
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aC4 LÉQISLATEURS QUI ONT PARLÉ , &C
pofent des chofes utiles à la fociécé , fans fe vanter
qu'elles lui ont été révélées , de même auffi parmi les
légiflaceurs il s'en eft trouvé plufieurs qui ont inftitué
des loix admirables , fans les attribuer à Jupiter ou à
Minerve^ Tel fut le fénat romain qui donna des loix à
TËurope , à la petite Afîe & à l'Afrique , fans les trom-
per ; éc tel de nos jours a été Pierre le grand , qui eût
pu en impofer à fes fujets plus tellement qu'/Tenn^x
aux Egyptiens , AUnos aux Cretois , & Zamolxii aux
anciens Scythes.
11
• :2
%m
mmtÊm^
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i.
E s s A I
SUR LES MOEURS ET VESPRIT
DES KATIONS , ET SUR LES PRINCIPAUX
FAITS DE l'histoire , DEPUIS ChARLE-
MAGïiE jusQu'X Louis XIII.
A V ANT-P RO P O S,
1 i
2 Qui contient le flan de cet ouvi^age , avec le précis H
' I de ce qu^ étaient originairement les nations occi- \
dentales , Ç^ les raifons pour lefquelles on com^
mençe cet ejfaipar P Orient.
VOus voulez enfin furmonter le dégoût que vous
caufe rhiftoire moderne , (a) depuis la décadence
de Tempire Romain , âS: prendre une idée générale des
nations qui habitent & qui défolent la terre. Vous ne
cherchez tlans cette immenfité que ce qui mérite d'ê-
tre connu de vous ; Tefprit , les mœurs , lés ufages
des nations principales , appuyés des /lits qu'il n'eft
pas permis d'ignorer. Le but de ce travail n'ei); pas de
favoir en quelle année un prince indigne d'être connu
fuccéda à un prince barbare chez une nation groITière.
Si on pouvait avoir le malheur de mettre dans fa.tête
la fuite chronologique de toutes les dynafties , on ne
( fl ) Cet ouvrage fut corn- I Aucune des compilations iinî-
pofl en 1740 pour madame du I verfelles qu'on a vues depuis ,
ChàteUt , amie de Tantcur. 1 n*exiîlait alors.
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Z06 A ¥ A y T . t R O t O S.
■ I. -j. Il»
faurait que des^ mois. Autant qu-'M faut eomiàttre les
grandes adions des fouverains qui ont rendu leurs
peuples meilleurs- & plus keqreuoc , aumnt on peut
ignorer le vulgaire des rois , qui ne pourrait que char-
ger la mémoire. De quoi vous ferviraient les détails de
tant de petits intérêts qui ne fubfiftent fâv^s aiiîoor*
(fhui , de tant de familles éteintes qui fe (ont difputé
des provinces englouties enfuite dans de grand» royau-
mes ? Prefque chaque ville a aujoufd*hui fon. hiftoire
vraie ou faulTe , plus ample , plus détaillée que celle
d^ Alexandre. Les feufes annales d'un ordre monafH-
que contiennent plus de volumes que celles de Tem-
pire Romain.
Dans tous ces recueils immenfes qu'on ne peut
embraffer , il fout fe borner & choifir. C*efl: un vafte
magafin , où vous prendrez ce qui eft à votre ufage.
Î^ L'illuftre Bojpuet , qui dans fon difcours fur une A
partie de l'hîftoire univerfelle en a fuiû le véritable V
efprit , au moins dans ce qu'il dit de l'empire Ro- |
* main , s'eft arrêté à Charlemagne. C'eft en commen-
Îant à cette époque que votre deflein eft de vous
aire un tableau du monde ; mais il faudra fouvent
remonter à des tems antérieurs. Cet éloquent écrir
vain en di&nt un mot des Arabes qui fondèrent
un fi puiffant empire & une religion fi florifTante ,
n'en parle que comme un déluge de barbares. Il
parait avoir écrit uniquement pour infinuef que tout
a été fait dans le monde pour la nation Juive , que
fi Dieu donn^ l'empire de TAfie aux Bâbiloniens ,
ce fut pour punir les Juifs , Ç\ Dieu fit régner Cy-
rus ce fut pour les venger , fi Dieu envoya les Ro-
mains ce fut encore pour châtier les Juifs. Cela peut
être. Mais les grandeurs de Cyrus & des Romains
ont encore d'autres caufes ; & BoJJuet même ne Içs
9 pas omifes en parlant de Tefprit des nations.
Il eût été à fouhaîter qu'il n'eût pas oublié entîc*
j rement les anciens peuples de l'Orient , comme les
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||gii)*i l'igapiii tjf^jif
A T A «If T . t R O F O S. 207
r
Indiens & h$ Chinois qui ont été fi confidërables ,
avant que les autres nations fuiTent formées.
Nourris des produéUons de leur terre 9 vêtus de
leurs étofiFes , amufés par les jeux qu'ils ont in*
ventes , inftruits même par leurs anciennes fables
morales , pourquoi négligerions • nous de connaître
Fefprit de ces nations , chez qui les commerqans do
notre Europe ont voyagé dès qu^ils ont pu trouver uo
chemin jufqu'à elles?
En. vous inftruifant en phtlofophe de ce qui con*
cerne ce globe , vous portez d'abord votre vue fui
POrient , berceau de tous les arts , & qui a tout donné
à rOccident.
I^es climats orientaux voiiins du midi tiennent tout
de la nature , & nous dans notr^ Occident fepten-
trional nous devons tout au tems , au commerce , à
une induftrie tardive. Des forêts y des pierres , dés
fruits fauvages , voilà tout ce qu'a produit naturelle-
ment l'ancien pays des Celtes , des Allobroges , des
Pidtes , des Germains , des Sarmates , & des Scythes.
On dit que l'ille de Sicile produit d'elle - même un
peu d'avoine ; mais le froment , le ris , les fruits dé-
licieux çroiffdient vers l'Euphrate , à la Chine, & dans
llnde. Les pays fertiles furent les premiers peuplés ,
les premiers policés. Tout le Levant , depuis la Grèce
jufqu'aux extrémités de notre hémifphère , fut longtems
célèbre avant que nous en fuflions afifez pour con^
naître que nous étions barbares. Quand on veut
favoir quelque chofe des Celtes nos ancêtres , il faut
avoir recours aux Grecs & aux Romains , nations
encor très poftérieures aux Afiatiques.
Si , par exemple, des Gaulois voifins des Alpes joints
aux habitans de ces montagnes' , s'étant établis fur les
bords de l'Erîdan , vinrent jufqu'à Rome trois cent
foixante & un ans après fa fondation , s'ils affiégèrent
:
ii^âtf^^^
^Sïfr7<
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aOg AVANT-P.RO.POS.
le capitule» ce font les Romains qui nous Pont appris.
Si d'autres Gaulois environ cent ans apcès entrèrent
dans la Theflalie , dans la Macédoine y & paflerent
fbr le rivage du Pont-Euxin, ce font les Grecs qui
nous le difent, fans nous dire quels étaient ces
Gaulois , ni quel chemin ils prirent. Il ne refte chez
nous aucun monument de ces émigrations qui reflem-
blent à celles des Tartares. Elles prouvent feulement
que la nation était très nombreuse , mais non oivili*
fée. La colonie de Grecs qui fonda Marfeille fix cent
ans avant notre ère vulgaire , ne put polir la Gaule.
La langue grecque ne s'étendit pas même au-delà dç
fon territoire*
Gaulois , Allemands , Efpagnols, Bretons, Sarmates,
nous ne &vons rien de nous avant dix -huit fiécies ,
finon le peu que nos vainqueurs ont pu nous en ap-
prendre. Nous n'avions pas même de fables ; nous
n'avions pas ofé imaginer yne origine. Ces vaines
idées que tout cet Occident fut peuplé par Gemer (h
de Jafhet y (ont des febles orientales.
Si les anciens Tofcans qui enfeignèrent les premiers
Romains, {avaient quelque chofe de plus que les autres
peuples occidentaux , c'eft que les Grecs avaient en-
voyé chez eux des colonies ; ou plutôt c'eft parce
que de tout tems une des propriétés de cette terre
a été de produire des hommes de génie , comme le
territoire d'Athènes était plus propre aux arts que ce*
lui de Thèbes & de Lacédémone. Mais quels monu-
mcns avons - nous de l'ancienne Tofcane ? Aucun,
Nou8;ious épuifons en vaines conjecftqres fuf quel-
ques infcriptions inintelligibles , que les injures du
téms ont épargnées , & qui probablement font des
premiers fiécies de la république romaine. Pour les
autres nations de notre Europe , il ne nous relie pas
une feule infçrjption d'ellçs dans leur anciçn lanr
gage.
L'Efpagne
jyga'4^1 I .p, ii^aiMy» iTiiS^
!
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à V X » ï -p il a f ô'
8.
SO»
I
r
I
- L'Efpagne mariltme fut décoiiverjrc par les Phéni,
mains y trouvèrent tour-à-tour de quoi kf enrichir
dans les tréfdis que la terre produifart alorjs. Les C^r7
thaginois y. firent valoir des naines , n)ai$ mgins ri,
qhes que celles du Mexique & duTérop ; le tems les a
épuifées , comme il épuifera celles dû aouvegu monde,
Pline rapporte que tes Romains en tirèrent en neuf
ans , huit mille marcs d'or , & environ «vingt ^quatre
mille d'argent II faut avouer que ces prétendus def,
eendans de Gowtfr. avaient bien mal- profité des pré-p
fens que leur faifak la terre en tout genre , puîfqu'il^'
furent fubjugués par les Garthaginc^is , par les Ro,
mains ; par les Vandales , par lés Goths^ & par ïfg
Arabe»,
Ce que nous favons des Gaulbfîsl par Jules Cifar
& par les autres auteurs Romains , nous donne l'idée
d'un peuplé qui avait befoin d'être foumis par utie
nation 'éclairée. Les dialetftes du langage celtique^
étaient aifreufes. L'empereur Julien^ons qui ce lan^
gage fe parlait encore , dit daas {on mifopogon ^ qu'it
reffemblait au croaffement des corbeaux. Les mœur^
du tems de Céfitr étaient auffî bar^res que le langage.
Les druide$ , impofleuFS gro{&r« faits pour le peuple
qu'ils gouvernaient 9 immolaient des vidimes humai*
nés qiril* brûlaient dans dç grandes & hidetfTes fta*
tues d'ofier; Le^driiideiTes plongeaient des couteaux
dans le cœur à^ priibnniers , & jugeaient de ^avenir
i la manière dont le fang coulait. De grandes pierre^
un peu creufées ^qii'on a trouvées fur les confins de
la Germanie^ & de la Gaule , vers Strasboug, font",
dit-on , les autels où l'on faii'ait ces focrifices. Voila
tous les monumens de l'ancienne GaUle. Les habituns
des côtes ûÎ^Ma Bifc»3je & de la Gafcogn* s'étaiient
quelquefois noUCns de chair hum»ne. 11 feot détourner
les yeux de.fies dems ÛÉvage^ qui fxm^ la home df
lajiatuccu. . ." . ' i'.."'%il
EJfaifur les mœurs , &c. Tom, L * Q ^ ^ -^
■pp
■■■^^
Digitized bj VjOOQIC
7,10 AyAVT-Piioroa.
!i
Tl
Comptons parmi les folies 4e l'efprît humain , fi.
dée qu'on a eu de nos jours de faire defbendre lea
CeUes des Hébreux. Vb façrifiaient des hoçunes , dit-
on , parce que Jepbté avait immolé fa fiUe. Les drui*
des étaient v^tus 4ç blanc pour imites les prêtres
df;^ Jui& ; ils avaient comme eux un grand pontife.
Leurs druid^fles font des images de la ^ur de Moife
& de JDébora. Lç pauvre qu'on nourriflait k Marfeiile,
& qu'on immolait couronné de 4eurs , & chargé de
malédidipns » avait pour origine le ^oi<ff imiffaire^
On va jufqu'à trouver de la reflemblance entre troi#
eu quatre mots celtiques & hébraïques qu'on prononce
élément mal ; & on en conclut que les Juifs , & les
nations des Celtes font la même famiUe^ C'eft ainft
au'on infulte à la raifon dans deshi^pi^ea univer-
ielles , & qu'on étouffe fous un amas de conje<9:ures
forcées , le peu de connailfance que noua pourions
avoir de l'antiquité.
Xes Qermain^ avaient à'^peu-près les mèilies mœurs
^ue le$ Çaulois , lacrifiaient comme eux des viâii
mes^ humaines i décidaient comme eux leurs petits
di^érends particuliers par le duel 9 & avaient feule*
ment plus de gro(&éreté & moins d'induftrie. Qéf/v^
dans fei mémoires dqus apprend que leurs magicien*
nés réglaient toujours parmi eux le jour du combat*
Il nous dit que quand un de leurs rois » Ârimfti^ amena
cent pille de (es Germains errans pour piller les Gau^
les que Céfair voulait affervir plutèt que piller , il
^voya verf ce barbare deux olBoiers Romains pour
entrer en cofiférençe avec lui t qu^AriindJic les fit
charger de chaînes, qu'ils furent deftinés à être facri^
fiés aux Çieux des Germains, & qu'ils allaient l'étie
{orfqu'il le^ délivra par & viâoire.
Les fiimilles de tous ces barbares avaient en Ger.
manie pour uniques retraites des cabanes , où d'un
l^téi^ père, la mèpe,l^ feauestles frères, les en^
fans couchaiettt nuda fur la paille, & de l'antre côté
m
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lilaifMU: l«urs «pioaamc 4oflMfti««#«. C« fMfi là pourt
maltrt» 49 PLo9if * T^i^e UmP |09 m»«r<{ des Gett
mains i aMJ« $piM>f it^s^f ^^m^t^ «eÛei des iMft
Vires momé$ Pèt^ i l'uo * XUmc ignpment C9
qu'ils louaient » & ?0Qlaient feulement faire laf^yff
de Rome. |^e même Tacite^ ap milieu dç fes éloges ,
avoue Of qut tout Is moiuie ^ai( ^ qiif les Germainf
aimaienc mieux vivre de rasions, que du cultiver 1^
terre ; tk qiraprés avoir pi|le l^c^ voifins , ils relpyrt
naient ché| eu¥ manger & dornûr. Cependant ,^oi|
nit peut pa3 to^j^^^t viirrç de b^iganda^. Les #mp«»
rcurt Romains çon^nrent on fubjoguèrent ees fauf^r
ges > ils furent forcés «n tt^yail qi»'iis ij^^dai^llf 9onpt
mi^ un walh^vf.
Qlian4^ C^ paRf m AagUterns i Si trouve «cette
iile pks (kpyagjS f n^ore que h Cqrmanie^ Les babW
tans couvraient à pisint kiur nudité dç quelqujçs ptaut^
de loties. LfS femoMS d'un o^on y appartenaient in» ^
différemment i 0hs les liovmM du même <:aiiton^ |p
lueurs dimittres étaient des oabanes de roTeaux » ((f
leurs ornçmeftS des figjMrioa ^m ks hommes & les
femmes s'imprimaient fur h peàU Un y fk^t de^
piquûres , en y verfant le fuç des herbes , ainfi au;
\fi pratiqvfkit oiapt htê fi^fagef de f An^iqiief
Qwr b natoie humid|n# ai$ été plongée pendant
une loagne ^te de fiédes dans cet état fi appro^
ebant ck edui d^ frotte , Se infiirieur à plufieurs
éganb yc'eik ce qui »*€& qoe trop nai. Lé raifon en
eft y eonane on f a dte , qu'il tfùfi pas dans la nature
4i rftamflM de di^rer ce qti^on nt cmmaiP f^s* Il a
£ri« partout am- animent un e^ace de tems pro.
digiBaK^meto des tiremftano.^ henieuTes , poi^r quf
l'kueme s'ébWto ao-deffe» de la vie animal^.
Voas a;yc^donfigiraa4* raifon derouloir paffer toutr
d'un - oau» a^ii^iipai tl^ «W 4» fiivilifte 1^ prêt
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^^mstM
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smtÈSi
A V A K T • P R O > Ô à
1
mîères.^ Il, fe peut que tengtcins avant les empires de
h Chine , & des Indes , il y ait eu des nations inf-
truites , polies , puiflantes , Que des déluges de bar-
bares auront enîuîte replongées^ dans le premier état
d'ignorance & de groffiérçté qu'on appelle l'état de
pure nature,
La feule prîfe de Conftantînople a fufB pour anéan-
tir refprît de l'ancienne Grèce. Le génie des Romains
fut détruit par les Goths^ Les côtes de l'Afrique' au*
trefois fi floriflantes , ne font prcfque pltis que des
repaires de brigands. Des cbangemens encor plus
grands ont dû arriver dans des climats moins heu-
reux. Les caufes phyfiques ont dâ fe joindre aux eau-
fes morales ; car fi l'Océan n'a pu changer entièrement
fon lit , du moins il eft confiant qu'il a couvert tour-
à-tour , & abandonné de vaftes terrains. La nature
a dâ être expofée à un grand nombre de fléaux &
de viciffitudes. Les plus, belles terres , les plus ferti-
les de l'Europe occidentale , toutes les campagnes
baffes arrofées par les fleuves , ont été couvertes des
eaux de la mer pendant une prodigieufe multitude .
dé fiécles : c'eft ce que vous avez déjà vu dans la
phïlofophie de l'hiftoîre.
Nous redirons encor qu'il n'efl: pas fi fik. que les
montagnes qui traverfent l'ancien & le nouveau mon-
de, ayent été autrefois des plaines couvertes parles
mers ; car , i^. plufieurs de ces montagnes fpnt cli-
vées de quinze mille pieds & plus au- deffus de l'O-
céan. 2^. S'il eût été un tems o^ ces montagnes
n'cHifferit pas exifté ^ d'où feraient partis les fleuves
qui font fi néceffaires à la vie des animaux ? Ces
montagnes font les réfervoirs des-^eaux, elles ont
dans les deux hémisphères des- directions diverfes ;
ce font , comme dit Platon , Içs os de ce grand ani-
mal appelle la terre. Nous voyons que les moindres
plantes ont une ftrudture invariable. Comment la
terr^ feraiuelle exceptée de la loi générale?
ii
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À V À N.T- P R O F 0 8. ftl3 '
3^. Si les montagnes étaient fuppofccs avoir porté
des mers ^ ce ferait une contradidion dans Tordre
de la nature , une violation des loix de la gravîta*
tion & de l'hydroftatique. 4®. Le lit de l'Océan eft
I creufé , & dans ce creux il n'eft point de chaînes de
montagnes d'un p61e à Tautre , ni d'orient en occi-
dent ^ comme fur la terre ; il ne faut donc pas con-
ehire que tout ce globe a été longtems mer 9 parce
que plufîeurs parties' du globe l'ont ét^. Il ne faut
pas dire que^ l'eau a couvert les Alpes & les Cordi'
/ierox , parce qu'elle a couvert la partie bafle de la
Guule , de la Grèce , dt la Germanie , de l'Afrique
& de ilnde. Il ne &ut pas affirmer que le mont
Taurus à été navigable 9 parce que l'archipel des
Philippines & des Moluques a été un continent. Il
y a grande apparence que les hautes montagnes ont
été toujours à-peu-près ce qu'elles font. Dans com«
bien de livres n'a-t-on pas dit qu'on a trouvé une
'^ncre de vaiiTeau fur la cime des montagnes de la
SuifTe ! Cela eft pourtant aufli faux que tous les oon*
tes qu'on trouve dans ces livres.
N'admettons en phyfique que ce qui eft prouvé,
^ en hiftoire que ce qbi^eft de la plus graiîée pro-
babilité reconnue. II fe peut que les p^s monta-
gneux ayent éprouvé par les volcans & par les fe-
<;ou(rés de la terre, autant de chan'gemeofs que les
pays plats. Mais partout où il y a eu qes fources
de fleuves il y a eu des montagnes. Mule révolu-
tions locales ont certainement changé une partie du
globe , dans le phyfique & dans le moral ; mais nous
ne les connaiflbns pas ; & les hommes fe font avifés
fi tard d'écrire l'hiftoire , que le genre humain , tout
ancien qu'il eft , parait nouveau pour nous.
D'ailleurs , vous commencez vos recherches au
tems où le chaos de notre Europe commence à pren-
dre une forme après la chAte de l'empire Romain.
Parcourons donc enfemble ce globe. Voyons dans
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it4 A M
A|rï«^>«fei.
■MMWa
ttid état il Mi aioti , en l'^m^M»! df II même
liuuitère qu'il p^knïi av^^îr éti civiUfétf'<ift-à*dtf«,
depuis les ptys oritntaux jufon'auiE nô^g; & pof*
ions notrOf premîirit attention (W un p«<ipl# qui atait
Vtié hiftoire fuinie dans une langue déjà tk%éc ^ lûrt
que nous n'arion^ pa« eneor Tuttg^ 4e TécrkUre^
De la CbiH$idêfm aftùiquUi ^ de fv firces^dltfif
l9i» ^de J0S ùfagts & di fit Jhùftces.
L'Enipire dé la CUne dès^ori iàsit plus vafte que
cdui de CbaprUmagne , furtout en y comprenant
la Corée & le Tuiiquin , provinces alors tributaires
des Chinois Environ trente degrés en longitude
& vii^*quatte en htitudé i focmenk fon étenduev
Nous avons remarqué que le coipa de œt étal fub-
fifteavec fplendeur depuis plus de qtiatre mille ans,
ftos que les lois , lesmcéurs , le langage « la manière
niômi de s'iiabUlei i ajent {buffeti d'akératipii (tt^
Sml hiftetr« incooteftabte > & la feule qui (bit feiu
iiée fur d«s ob&rvatfoos cékftes , remonte , par la
totuMMiologie la plus fiire , jurqu*& une é6Up& obfec-
We deûv sMlie cent doquante-^nq ans avant noire
ère i^Qlgai^e ^ & vérifiée par les mathématiciens miit
fioiwatres , qui éàvoyés dans les derniers fiédes chez
cette nftioQ^ kieenmie , l'ont admirée & i'oni in£.
Iruite, ^ Le fèfie Çtmfml a ^Mminé une luite de ireoai-
liic éclipfés de folell , rapportées dans les livres de
Çonfùfiit / À ii fi'én a teouvé qùé deux fiiufifs &
deuic doi^teuÂs. Les donteufes font cotises mii on eSat
{but arrivées , ma^ qiri n'ont f^ii. étrti plHervées du
lieu 011 l'on fhpp^ l^obw ^lisiir % & c^ inilmi»e9oii-
î : iteuo
m>ÊtlfB
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fl^****
Db la ChiItb.
4if
ve qa'alor^ les ti&toMtneé Chlnoif tkknlsàeht lés
édipTàê y poifqu'ils fe trùmpèrenc éwné i€M cActAi.
Il cft vrai qu'AlexMâre avait envoyé de f abîfoWé
en Grèce les obfervations dc^ Caldéens , qui remoir-
taient tin peu plus haut que les obfenracfons dtf-
noifes ; & c'eft fans contredit le plus beau monU'
tnent de Pantiquhé : mais Ces dpliémérides de Ba*
bîlone flf'étaient point liées i Thiftoire der ftits : les
Chinois au Contraire ont joint FhHtoire du del à
celte de la terre , & ont ainfi juiUfié Tune par Fautre.
Ceux cent trente ans au-defà du jour de Véclfpfe
dont on a parlé , leur chronologie atteint fans in-
terruption , & par des témoignages autentfqiies , juf«
qu'à Pempereur Itiao , qui travailla lui-même à ré-
former Tadronomie , & qui , dans un règne d'envi-
ton qtiatre-vingt ans , chercha à rendre les hommes
éclairés & heureux. Son nom eft encore en vénérai
tion à la Chine y comme l'eft en Europe celui des
Tiûus y des Trajorts , & des Antonhts. S^9 fiit piour
fon tems un mathémadcien habile , cela feuf nioif.
tre qu'il était né che2 une nadon déjà très policée.
On ne ydit point que les ancfetis chefs des bourgat*
des germaines ou gauloifes ayent réformé Taflrono-
mit. Clavù n'avait point d'obfervatoiie.
Avant Jfirto^(flr>, on trouve encor fix roîis fi» pïéd^-
cefTeurs; màîs fa durée de leur rè|he eft âidertal.
ne. Je croisr qu'on ne peut ttîetix fiire Atm te fi-
lence de la chronologie y que tfe recourir k U, règle
de Tftwtcft^ qui ayant compore tint annétft commtf-
ne des années qu'ont régné Icfs rois de diflTérens pays ,
rédoit chaque règne & vfngfc^deux ans ou environ.
Suivant ce calcul , d'autant plus faUbnnaMIe qu'A eft
formtli ii*y »4.tt^ *ts eAtre ce
nom de Hto»^ & Ut Hiaoau^
Jeova du f nfoiciens & dtu
Esiftisds l otpeAdant gar-
ibm-Bo^ ie9fok€ qm sis
aoiade Hia^ùujtova vienne
deJaCMne.
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1
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ti^^i
i
^lus modéré , ces fix rois auront régné à-peu-prés
cent trente ans ; ce qui eft bien plus conforme à l'or-
dre de la nature , que les deux cent quarante ans
qu'on cbnne , par exemples aux fept rois de Ro-
me ; & que tant d'autres calculs , démentis par l'expé-
rience de tous les tems^
Le premier ie ces rois , iidmmé Pobi , régnait
donc plus de vingt-cinq fiécles avant l'ère vulgaire ,
au tems que les Babiloniens avaient déjà une fuite
d'obfervations agronomiques ; & dès-lors la Chine
obéiitait à un fouveraln. Ses quinze royaumes , réu-
nis fous un feul homme , prouvent que longtems
auparavant cet état était très peuplé , policé , par-
tagé en beaucoup de fouverainetés ; car jamais un
grand état ne s'eft formé que de plufièurs petits ;
c'eft l'ouvrage de la politique , du courage , Se fur-
tout du tems. U n'y a pas une plus grande preuve
d'antiquité;
Il e(t rapporté dans les cinq ÎCîngs , le livre de
la Chi'ie le plus ancien & le plus autorîfé , que fous
l'empereur Yo „ quatrième fuccefleur de Fobi , on
obferva une çonjondtion de Saturne , Jupiter , Mars^
Mercure & Vénus. Nos aflronomes modernes dîfpu-
tent entr'eux fur le tems de cette conjoiKflion , &
ne devraient pas difputer. Mais quand mënie on fe
terait trompé à- la Chine dans cette obfervation du
ciel , il était beau. même de fe trompet. Les livres
chinois difent expreffément que de tems iminémorîal
on fdvait à la Chine que Vénus & Mercure tournaient
autour du foleil/ U faudrait renoncer aux plus fim-
ples lumières de la raifon , pour ne pas voir que de
telles connaiflances fuppofaient une multitude de fié^
clés antérieurs*
- Ce qui rend furtout câ premiers livres refpcôa-
bles j & qui leur donne une fupérioritè reconnue fur
tous ceux qui rapportent l'origine des autres nations, £
^v*». . ,1, liai !i.t i Ml t'fcSi
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ife
B & L A C H I K E4
c'cft qu*on n'y voit aucun prodige , aucune prédîc*.
tion , aucune même de ces fourberies politiques que
nous attribuons aux fondateurs des autres états , ex-
cepté peut-être ce qu'on a imputé à Fobi , d'avoir
fait accroire qu'il avait vu ïes loix écrites fur le dos
d'un ferpent ailé. Cette imputation même fait Voir
qu'on connaiffaît l'écriture avant Fobi. Enfin , ce n'eft
pas à nous , au bout de notre Occident , à contefter
les ar<^hives d'une nation qui était toute policée,
quand nous n'étions que des fauvages.
Un tyran nommé Chi-Hoangti ordonna à la vérité
qu^on brûlât tous les livres ; mais cet ordre infenfé
& barbare avertiflait de les conferver avec foin , &
ils reparurent après lui. Qu'importe après tout que ces
livres renferment , ou non , une chronologie toujours
fùre ? Je veux que nous ne fâchions pas en quel
tems précifément vécut Cbarlemagne : dès qu'il cft
certain qu'il a fait de vaftes Conquêtes avec de gtan*
des armées y. îl eft clair qu^il eit né chez une nation
nombreufe , formée en corps de peuple par une lon-
gue fuite de lîéples. Puis donc que l'empereur Hiao ,
qui vivait inconteftablement plus de deux mille quatre
cent ans avant notre ère , conquit tout, le pays de la
Corée , il eft indubitable que fon peuple était de l'anti-
quité la plus reculée. De plus , les Chinois inventèrent
un cicle , un coniput qui commence deux mille fix cent
deux ans avant le nôtre. Eft-ce à nous à leur contef-
ter une chronologie unanimemçnt reque chez eux,
à nous qui avons foixante fyftêmes différens pour
compter les tems anciens , & qui ainfi n'en avons
pas un?
Répétons que les hommes ne multiplient pas aufll ai«
tément qu'on le penfe. Le tiers des enfans eft mort au
bout de dix ans. Les calculateurs de la propagation de
i'efpèce humaine ont remarqué qu'il faut des circonftan-
ces favorables pour qu'une nation s'accroîfle d'un ving-
tième au bout de cent années ; & très fouvent il ar«-
1^
v^
!¥!«-
^im&ilk
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D B i A C K t V t.
n
litre <)«é la peuplade âlmlntie ati-l|eu d'augmenter.
Be îkrzm chrôtioiogiftes ont (ispputé qrfme icole h*
mille après le déluge ^ toàjours occupée i peupler »
à fes etifatis «'étant occupés de même , il fe trou*
ya en deot cent cinquante ans beaucoup plus d'ka*
faftans que n'en contient aujourd'hui l'univers. Il s'en
Amt beaocoup que le Taîtnud & les Mille & une nuit
ayent intenté rien de plus abfurde. U a déjà été dit
qroit ne (ait point ainii des enfans à coups de
plume. Vovei: nos colonies , voyez ces archipels
immenfes ae TAfie dont il ne fort perfonne : les Mal*
(fites t les Philippines , les Moluques , n'ont pas
le nombre d'habitans néceffaire. Tout cela èft encor
one nouvelle preuve de la prodigieufe antiquité de
b population de la Chine.
CHe était au tems de Cbarl&fptagfti > comme long-
tems auparavant , plus peuplée encore que vafte. Le
dernier dénombrement dont nous avons eonnaiflan-
ce , hiî feulement dans les quinze provinces qui
compofent la Chine proprement dite , monte ju(l
Îu'à près de foixante millions dliommes capables
*aller à h guerre ; en ne comptant ni les foldats
vétérans , ni les vieillards au^deflos de (ôixante ans »
tA la jenneffe au^deflbus de vingt ans , ni les man*
darins , ni la multitude des lettrés , ni les bonzes ;
encore moins les femmes » qui font partout en pa-
reil nombre que les hommes ^ i un quinzième oa
feiziéme près , félon lei obfervations de ceux qui
ont calculé avec le plus d'exaAitude ce qui con-
cerne le genre-humain. A ce compte , il parait di&
ficile qu'il y ait moins de cent cinquante miHiontf
d'habitans à la Chine : notre Europe n'en a pas beau<*>
coup plus de cent millions , & compter vingt miU
Hons en France , vingt-demt en Allemagne , quatre
dans h Hongrie , dix dans toute ritdie jufqu'eix
Dalmatie , huit d!ans la Grande-Bretagne & dans l'If^
âhnde , huit dans l^EQyagne 6t le Portugal , (fîx ou |
douze dans h Roilier européane , fix dans ia Po» i
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D k L A C H I ïf bJ 9t^
lôgne i ailUnI dtns la Turquie (TEurope , dans h
Grèc6 & les Htot , quatre dan» la Suède , trois dan^ It
Norvège & le B^emarck , près de quatre dam h
lloliandf'ft leè fays*Baft voUins.
On ne doit dôac pas être foipria » fi ies Tilleadd^
noifes font immenfea ; fi Pékm> la nouvelle capital
le de l'empire ^ a près de fix de nos grandes Ueuea
de circonférence ^ âc renferme enviion trots itiiUians
de citoyens : fi Nanquin y ^ancienne nétropole « mk
avait autrefois davantage : fi une fimple bourgaée
nomnèe QuienAieng , oà l'os iabriqve la potceb^
Âe i contient environ tin million d'habitans.
te iotimal de l^empire CKiaois ^ ioUraal le plot
autentique & le plus utiH qu'on ait dans U moadt ,
puifqu'il contient le détait de tous U» befoins pubtic&t
des reiToùrcfts & des intérêt» de tous IcK ordres de
rétat Ce journal , di»-je , rapporte que Pan de na«
tre ère 1)2 ç ^ la femme que rempercur T<McbiM
déclara impératrice » fit à cette occafîon , félon un^
ancienne coutume , des Kbéralités aux pài^ez fenv*
mes de toute la CMne « qui paf&ient fiuxante & dit
sins. Le ioùrnal compte danii la feule province de
Kanton quatre-vingt dix-huà; milk deux cent vingt
femmes de foixante & dix ans qui reçurent cea pr^
fens y quarante mille huit cent quatre-vingt & treize
qui pafTaient quatre-vingt tins , & trois mille quatre
cent cinquante-trois qui approchaient de cent timéea.
Combien de femmes ne reçurent pas ce préfent 1 £n
voilà plbs de cent quarante-deuK mille qui le lecu-
rent dans une (ëule province. Ce nonahre eft de celios
qui ne font plus comptées parmi les petfonnes mtiles«
Quelle doit donc être fa population de Tétat? & fi
cnacune dédies requt la valeur de dix Kvres dana
toute rétendue de Tempite » à qmllea ibmmcs dut
monter cette libéralité t
1
les fbreea de^J'étarl oonfifttnt , ftlon les rékrtlofts
des .hommes leâ plus intelligens qui ayent jattata
ï
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220
O S L A C H I H B.
I
voyagé « dans une milice d'environ huit cent. milU
foldats bien entretenus : cinq cent fpixante & dix
^itle chevaux font nourris ou dans les écuries ou
dans les pâturages de renij^ereur , pour monter le$
gens de guerre , pour les voyages de la cour , & pour
les couriers publics. Plufieurs miiTionnaires , que Tem-
pereur Csing-bi dans ces derniers tems approcha de
fa perfonne par amour pour les fciences , rapportent
qu'ils Tont fuivi dans ces chafTes magnifiques vers
la grande Tartarie , où cent mille cavaliers & foixante
mille hommes de pied marchaient en ordre de ba-
taille : c'eft un ufage immémorial dans ces climats.
Les villes chinoifes n'ont jamais eu d'autres forti-
fications,que celles que I^ bon fens infpiraità tou-
tes les nnions avant l'ufage de rartillerîe ; un fofle,
un rempirt, une forte muraille & des tours ; depuis
même que les Chinois fe fervent de canons , ils n'ont
point fuivi le modèle de nos places de guerre : mais
au-lieu qu'ailleurs o i fortifie les places , les Chinois
ont fortifié leur empire. La grande muraille qui fé-
paraît & défendait la Chine des Tart<ires , bâtie cent
trente-fept ans avant notre ère , fubGfte encore dans
un contour de cinq cent lieues , s'élève fur des mon-
tagnes , defccnd dans des précipices y ayant prefque
partout vingt de nos pieds de largeur , fur plus de
trente de hauteur. Monument fupérieur aux pyra-
mideis d'Egypte par fon utilité , comme par fon im-
menfité.
• Ce rempart n'a pu empêcher les Tartares de pro-
fiter dans la fuite des tems des divifions de la Chi-
ne, & de la fubjuguer ; mais la conftitution dePétat
n'en a été ni affaiblie ni changée. Le pays des con-
quérans eft devenu une partie de l'état conquis ; &
les Tartares Mantchoux , maîtres de la Chine,
n'ont fait autre chofe que fe fommettre les armes à
la main aux loix du pays ^ dont ils ont envahi le
trône. »
âSïff^
-■lip
^çp
sQ^^ftd^
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ttfftf^ .i^^p»^. UMig^j^g
^ D B LA Chine; 221 j|
On trouve dans le troifiéme livre de C^nfutzie une.
particularité qui fait voir combien Tufage des cha^.
riots armés éft ancien. De foh teras , les vice^ois
ou gouverneurs de provii^ces étaient oblijgés de fouN^
nir au chef de Tétat où empereur mille chars de.
guerre à quatre, chevaux de front , mille qoadriges.^^
Homère qui fleurit longtems . avant le philofbphe)
Chinois , ne parle jamais que de chars à deux ou*
à trois chevaux. Les Chinois avaient fans doute
commencé 9 & étaient parvenus à fe fervir de. qua-
driges. Mais ni chez les anciens Grecs , du tems de
la guerre de Troye ^ ni chez les Chinois .». on m.
yx)it aucun ufage de la fimple cavalerie. Il parait»
pourtant inconteftable que la méthode de combat*
tre à cheval , précéda celle des chariots. Il efl; mar-
qué que les pharaons d'Egypte avaient de la cava«
lerie , mais ils fe fervaient au (Il de chars de guerre.
Cependant il eft à croire que dans un pays fangeux,,
comme TEgypte , &. entrecoupé de taàt de oanaiix , 5
le nombre dès chevaux fut toujours très.médiocce.; »'
Quant aux finances , le revenu ordinaire, de l'em-^
pereur fe monte , félon les fupputations les plus vraî-
fémblables ^ à deuk cent millions d'onces d'argent.
H eft à remarquer que- l'once d'argent ne vaut pas:
cinq livres franqaifes valeur intrinsèque , comme le:
dit l'hiftoirie de la Chine du. jéfuite: du Halde g car
il n'y a point de valeur intrinfèque numéraire ; mais
à prendre le marc de notre argent à cinquante (Je
nos livres de compte , cette fomme revient à douze
cent ciiiqiiante militons de notr^e monfl)oie*en 1740.
Je dis, en cç tems , car cette valeur arbitraire n'a que.
trop changé parmi nous, & changera peutrétre encore ;
c'eft à quoi ne prennent pas aflç? garde les écrivains y.
plus inflruits d<çs: litres que des affc^res, qui évaluent
fouvent l'argent étranger d'une (nanièrç très fautive.
* Ils ont eu des Inonnoies d*or-&'d'érgeht frappées
au marteau, longtems. avant que^Ueô dariques fuflene
t^fte
TW^
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1%% Delà Chine.
fabriquées en Perfe. L'empereur Cang-bi avait rafl^tn-
blé une fuite de trois mille de ces monnoiçs , parmi
lefqi^dies il y en avait beaucoup des Indes ; autre
preuve de Fancienneté de$ arts dans TAGe. IV^ais
depuis longtems Por n'eft plus unt mefure commune
à U Chine , il y eft marchandire comme en HoUan-
de ; l'arsent n'y rft plus monnoie ; le poids & le titre
en font le prix : on n'y frappe plus que du cuivre , qui
feul dans ce pays a une valeur arbitraire. Le gou«
yemement dans des tems difficiles a payé en papier,
comme on a fai^ depuis dans plus d'un état de l'Eu*
fope ; mais jamais la Chine n'a eu l'ofage des ban-
ques publiques , qui augmentent les ridiefTes d'i^ne
iiadon,en multipliant fon crédit,
. Ce pays &vorifé de la nature , polTède prefque
tous les fruits tranfplantés dans notre Europe , ât
beaucoup d'autres qui nous manquent Le bled , le
ris , la vigne , les légumes , les arbres de toute efpèqs
y couvrent la terre ; mais les peuples n'ont fait du
vin que dans les derniers tems , fatisfàits d'une li-
guei|ir affez forte qu'ils fiivent tirer du ris.
L'infeâe préeieux qui produit la (oie , eft origi-
naire de la Chine ; c'eft de -là qu'il pafla en Perfe
afles tard , avec l'art de faire des étoffes du duvet
qui U» couvre ; & ces étoiles étaient fi rares du
tems même de Juftime^ , que la foin Ct rendait en
Eurc^ au poids de l'or.
Le papier fin , ft d'un blane éclatant , était fobri*
que chez les Chinois de tems immémorial ; on en
ftifait avec des filets de bois de bambou bouilU.
On ne connait patf la première époque de la porce*
kine & de ce beau vernis qn'on commence à imiter
& à égaler en Europe.
Us favent depuis deux ngtiUe ans fabriquer le verre,
mais moins beau A moins trapfparentque le nôtr^
^samssgamsmfm
I
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ttQVi^Mli
ÉifaoBaiBB
D 9 l* A C H I y £• zti
i
L'imprim«ri« fyt iayentée par w% dtfi9 Ip méqi^
tems. On faU qpe cetta imprimerie «ft une gravprç
^fiir des plaAch^ç de bois , teU< %ut GuHtnbjn-g la pra*»
tiqua U premier à Mayenop au quinTl4me ftéçlc. yar«
de graver les caraétères fur le boia eft plut pe|^&*
tienne 9 la Chine ; nQtre méthode d'employer les oa^
ra<flères mobiles & de fonte , beaucoup fupéricaire
à la leur , n'a jpoînt encore été adoptée par eux ; tant
ils font atcachés & toutes leurs anciennes méthode»
L'ufa^e des cloches eft chex eux de lu plue haifte
antiquité. iNouf n'en ayons eu en Fnncf qu'au fiiUé^
me liécle de notre ère. Us ont cultivé la chymie )
& fans devenir jamais bons phyficiens , ils ont in«
venté la poudre ; mais ils ne s'en fervalent que dans
des fétcs , dans Tart des feux d'artifice 9 oà ils ont
furpailife les autres nations. Ce furent les Portugais
2ui dar^s ces derniers &écles leur ont enfèigné Yvh
ige de: l'artillerie ; & ce fotit les jéfultes qui leur
ont apfnris à fondre le canon. Si les Chinois ne s'ap*
pliquèrent à inventer ces inftrumens deftruâears , il
ne faut pas en louer leur verts y puif^ii'il^ n'en ont
pu moins fait la guerre.
Ils ne pouflirent Ipin Pafkronenif e qu'entant qu^eUe
eft la fcience dtes yeux & le fruit de I9 patietx^e.
Ils obftrvèrent le ciel aflid^ment 9 remarquèrent tous
ks|yhénomènes ^ & les tranfmireni à \% poiiérité. Ils
divifèrent , comme nous , le cours du foleil en trois
cent folxanle-cinq parties & un quart Ils connurent »
mais confufément , la préceffioii des équinpxes $ des
IbQUces. Ce qui méritf peut-ètrele plus d'sttention^
c*eft que de, tems {mmémorial ils partaient le mo^
en iémaines de fept jours, (.es Indtçns en u&ient
ainfi ; la Caldée fe conforma à cette méthode , qui
pailk dans le petit pays de la ^udéf { mais ^le né
fut point adoptée en Gréée.
On montre encore les jnfkrumens dont fe fervft
im de leurs Ameux afclonomes mille ans avant no-
(wp— "«"•"•■•■wifcfcii
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^.5«*^
224
dMf.
D E 'l'a C'h'i n e.
1
trc ère , dans Une Ville qui n'eft que du troîfiéme
ordre. Nanquîn \ l'ancienne capitale 5 conferve un
globe de bronze , qu« trois hommes ne peuvent em-
brafler , porté fur un cube de cuivre qui s^ouvre ,
& (fens lequel on fait entrer un homme pour tour-
ner ce globe ^ fur lequel font tracés les méridiens
& les parallèles.
Pékîn a un obfervatoire » rempli d'aftrolabes Se de
fphères armillaires ; inftrumens à la vérité inférieurs
âûX nôtres pour Texaétitùde , mais témoignages célè-
bres de la fiipériorité des Chinois fur les autre? peu-
ples d'Afie,
Jjà bouflble qu'ils connaifTaient , ne fervait pas à
fon véritable ufage de guider la route des . vaifleaux.
iUs ne navigeaient que près des côtes. FoiTefleurs
d'une terre qui fournit tout , ils n'avaient pas befoin
d'aller « C9mme nous, au bqut du-monde* La bouf-
fole , ainfi que la poudre à tirer , était pour eux une
iioyple curiolité , & ils n'en étaieqt pas plus 4 plaindre.
■ On eft étonné que ce peuple inventeur n'ait jamais
percé dans la géométrie au-delà dois éléméns. Il eft
certain qu'ils connaifTaient ces élément plqfieurs (ié-
çIqs avant (\\x^EucUde les eût rédigés chez les Grecs
^'Alexandrie. L'empereur Cang-hi affura de nos jours
au père Parennin , l'un des plus (kyans & des plus
fages miffionnaires qui ayent approché de qe prince ,
que l'empereur Tu s'était fervi des propriétés du trian-
gle rcdtangle pour lever un plan géographique d'une
province , il y a plus de trois mille ^Quf ceot .foixante
années ; & le père Parennin lui - même cite un livre
écrit onze cent ans avant notre ère , dans lequel il
eft dit que la fameufe dé;nonftratipn attribuée en Ocf
çident à Pythaswe , était depuis longtems au rang
des théorèmes les plus connus. ^
r On demande pourquoi les Chinois ayant «té fi loin
jdans des tems fi reculés , font toujours reftés à ce
terme ,
I
mittm
i
*««
"«f^ftdit
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f
De la Chine. s&zf ,
terme , pourquoi raftronomie cft chez eux fi ancienne
& fi bornée , pourquoi dfin§ la mufique il;5 ignorent
encore les demi -tons ? 11 femble que la nature ait
donné à cette cfpèçe d'hommes fi différente de la
nôtre , des organes faits pour trouver tout-d'un-coup
tout ce qui leur était nécefTaire , & incapables d'aller
au-delà. Nous au contraire , nous avons eu des oon-
naiffances très tard , & nous avons tout perfedionnc
' rapidement. Ce qui eft moins étonnant , c'eft la.crédu'
lité avec laquelle ces peuples ont toujours joint leurjB
erreur^ de l'aflrologie judiciaire aux vraies connaît
fances céleftes.. Cette fuperAition a été celle de tous
les hommes
fommes guéris ;
re- humain.
5S ; & il n'y a pas longtems que nous m
léris ; tant l'erreur femble faite pour le gen<«
cultivés fans interruption depuis fi longtems à la Chi<
ne , ont cependant fait fi peu de progrès , il y en {
peut-être deux raifons : l'une eft le refpcdl prodigieux
que ces peuples ont pour ce qui leur a été tranfinis
par leurs pères p & qui rend parfait à leurs yeux tout
ce qui eft ancien ; l'autre eft la nature de leur lari-»
gue , premier principe de toutes les conhaiitances;
L'art de faire connaître fes idées par Récriture ^
qui devait n'être qu'une méthode très fimple , eft
chez eux ce qu'ils ont de plus difficile. Chaque mo|t
a des caradtères différens : un favant à la Chine eft
celui qui connaît le plus de ces caradères ; quelques»
uns font arrivés à la vieilIeSe avant que de i^avoîV
bien écrire.
■ , . .' .' . . . . ' -' ,' * . '
.Ce qu'ils. ont le pju9 coftnû , le plus cultivé , le^
plus perfcélionné , c'eft la morale &' les loix. Le re^
pedt des enfans pour leurs pères eft le fondement du
gouvernement, chinds.. L'autorité, paternelle n'y eft
jamais affaiblie.: Un . fils ne peut plaider contre fon
père.qu'aveQ le confentemeqt de tous )esparens,det'
EJJaijur Ut mœurs , É?r. Tom. L P^
Si on cherche pourquoi tant d arts & de fciences^
cultivés fans interruption depuis fi longtems à la Chi- 1
né , ont cependant fait fi peu de progrès , il y en ai S
n«>iitAêtre deuY raifons : l'une eft le refbedl: nroHîpîeux \
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Î —
kâfib
«>s*8J*
Db la Chikb.
amis^ , & des magiftrats. Les mandarins lettrés y font
regardés comme les pères des Tilles & des provinces ,
& le roi comme le père de l'empire. Cette idée y
enracinée dans les cœurs , forme une famille de cet état
immenfe.
La loi fondamentale étant donc que Tempire eft
une famille , on y a regardé plus qu'ailleurs le bien
public comme le premier devoir. De -là vient l'atten-
tion continuelle de l'empereur & des tribunaux à
réparer les grands chemins , à joindre les rivières > à
creufer des canaux , à favorifer la culture des terres
& les manufaftures*
Nous traiterons dans un autre chapitre du gouver-
nement de la Chine. Mais vous remarquerez d'avance
que les voyageurs , & furtout les miffionnaires , ont
cru voir partout le defpotifme. On juge de tout par
l'extérieur ; on voit des hommes qui fe profternent ;
& dès -lors I on les prend pour des efclaves. Celui
devant qui on fe proflierne , doit être maître abfola
de la vie & de la fortune de cent millions d*hom-
mes , fa feule volonté doit fervir de loi. Il n'en eft
pourtant pas ainfi , & c'eft ce que nous difcuterons.
U fuffit de dire ici que dans les plus anciens tems
de la monarchie , il fut permis d'écrire fur une Ion*
gue table placée dans le palais , ce qu'on trouvait
de répréhenfible dans le gouvernement ; que cet ufa-
ge fut mis en vigueur fous le règne de Venti , deux
fiécles avant notre ère vulgaire, & que dans les tems
pàifibles les repréfentations des tribunaux ont toujours
eu force de loi. Cette obfervation importante détruit
les imputations vagues qu'on trouve dans VEfprit des
hix y contre ce gouvernement le plus ancien qui foit
au monde.
Tous les vices exiftent à la Chine comme ailleurs ,
i mais certainement plus réprimés par le frein des loix .
j parce que les loix font toujours uniformes. Le (avanc
î
:
«3««ii»
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'Ita
S^ DelaChinb. ^vj i
ftuteuf des mémoires de Tamiral AnfoH témoigne un
grand mépris pour la Chine , fur ce que le petit peu.
pie de Kanton trompa les Anglais autant qu'il le put.
jyiai^ doit -on juger du gonvernement d'une grande
nation par les mœurs de la populace des frontières ?
Et qu'auraient dit de nous les Chinois , s'ils euffent
fait naufrage fur nos côtes maritimes dans le tems où
les loix des nations d'Europe confifquaient les effets
naufragés , & que la coutume permettait qu'on égoi^
geât les propriétaires ?
Les eérémonîes cûfitinUetle^ , qiil chti les Chinois
gênent la fociété , & dont l'amitié feule fe défait
dans l'intérieur des maifbns ^ ont établi dans toute
la nation une retenue ^ une honnêteté qui donner
à la feis aux m^urs de la gfavité & de la douceu^^
Ces qualités s'étendent jufqu'aux derniers du peuple^
Des mifTionnaires racontent que fouVent dans les mar^
chés publics ^ au milieu de ces embarras & de ces
confiifions qui excitent dans nos contrées des cla<^
meurs fi barbares & des emportemenS fi fréquens &
fi odieux ^ ils ont vu les payfans fe mettre à genouX
les uns devant les autres félon la coutume du payi,*
fe demander pardon de l'embarras dont chacun s'ac-
oufait , s'aider l'un l'autre ^ & débatraSer tout avec
tranquillités
tJahô les autres pays les Joîjf ptfhiflent \èi crimes y
à là Chine , elles font plus ; elles récompènfent la
vertu, te bruit d'une aétiori génértrufe & rare fe ré-
pand-il dans ixnt province, te mandarin eft obligé
d'en avertir l'empereur ; & l'empereur envoyé uncf
marque d'honneur à celui qui l'a fi bien méritée. Ûans
nos derniers tems , un pauvre payfan nommé Cbicou i
trouve une bourfe Remplie d'or qu'im voyageur à per^
due , il la tranfporte jufqu'à la province de ce voyÎH
geur^ & remet la bourie au magiftrat du canton ^
fafis vouloir rien pour fe^ peines. Le làagiilrat , fcm^
peint d'éttt caffé^ étah obligé d^tix avertir le^ril^ii'
n
i
£
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û^méiÊ^
228 De la Chine.
nal fupréme de Pékin; le tribunal obligé d'tn avertir
l'empereur ; & le pauvre payfan fut créé mandarin du
cinquième ordre : car il y a des places de mandarins
pour les payfans qui fe diftinguent par la morale , com-
me pour ceux qui réufiifTent le mieux dans l'agricuK
ture. Il faut avouer que parmi nous on n'aurait diilin-
gué ce payfan qu'en le mettant à une taille plus forte,
parce qu'on aurait jugé qu'il était à fon aife. Cette
morale , cette obéïfTance aux loix , jointe à l'adoration
d'un Etre fupréme , forment la religion de la Chine ,
celle des empereurs & des lettrés. L'empereur eft dé
tertis immémorial le premier pontife : c'eft lui qui
facrifie au Tien , au Souverain du ciel & de la terre.
Il doit être le premier philofophe , le premier prédi-
cateur de l'empire : fes édits font prefque toujours des
inftruâions & des leqons de morale.
CHAPITRE SECON».
<De la relzgicn de la Cbine^ Que le gouvememem fiefi
point attee ^ane le cbHjHanifme n'y a point ite pri^
€bi au 7e. Jiiele^ De quelques feSes itablies dans
U pays.
DAns le fiécle pafle nous ne connaiffions pas aflez
h Chine. Voffùss radmîrait en tout avec exagé-
ration. Kenaudût fon rïval , & Tennemi des gens de
lettres , pouflait la contradidion jufqu'à feindre de
méprifer les Chinois, & jufqu'à les calomnier. Tâchons
d'éviter ces excès.
Confutiie , qwe nous appelions Confucïm , qui vi vak
il y a deux mille trois cent ans y un peu avant Py-
tbagore , rétablit cette religion , laqueMe confifte à
être jufte. Il l'enfeigna , & la pratiqua dans la gran- «
4eur t dan» l'abaiflemenc , tantôt premier miniftre d'un [
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Religion DE LA Chine. 229 \:
roi tributaire de l'empereur , tantôt exilé , fugitif ft
pauvre. Il eut de fon vivant cinq mille difciples ; &
après fa mort fes difciples furent les empereurs , le«
Co/ao , c'eft -à - dire , les mandarins , les lettrés , Se
tout ce qui n'eft pas peuple. Il commence par dire
dans fon livre , que quiconque eft deftiné à gouver-
ner 9 doit reHifier la raifen qu'il a reçue du ciel canu
me on ejfuie un miroir tertti , qu'il doit aujjîfe renoua
veller Joi-même , pour renouvelier le peuple par fon
eoèemple. Tout tend à ce but; il n'eft point prophète,
il ne fe dît point infpiré : il ne connait d'injpiratioa
que l'attention continuelle à réprimer fes paffiens ; il
n'écrit qu'en fage. Aufli n'eft. il regardé par les Chi-
nois que comme un ikge* Sa morale eft aufli pure ,
auili févère & en même tems aufli humaine que celle
à'Epmète. Il ne dit point, ne fais pas aux autres ce
Ique tu ne voudrais pas qu'on te fie ; mais ( fais au» \
autres ce, que tu veux qu'on te fajfe. 11 recommande i|
le pardon des injures , le fou venir des bienfaits , l'a- v
mitié , rhumilicé. Ses difciples étaient un peuple de
frères. Le tems le plus heureux & le plus refpeéU-
ble qui f^t jamais fur la terre , fut celui ou l'on fuivit
fes loix.
Sa famille fubfifte encore : & dans un pays où il n'y a
d'autre noblefle que celle des ferviçes aâuels , elle eft
diftinguce des autres familles en mémoire de fon fonda-
teur. Pour lui , il a tous les honneurs , non pas les hon-
neurs divins qu'on ne doit à aucun homme , mais ceux
que mérite un homme qui a donné de la Divinité les
idées les plus faînes que puiiTe former l'efprit humain
fans révélation. C'eft pourquoi le père le Comte & d'au-
tres miffionnairçs ont écrit que les Chinois ont connu le
z^af DigU , quand les autres peuples étaient idolâtres j
6f qu'ils lui ont frcrifii dans le plus ancien temple
de Punivers^
l
Les reproches d'athéïfine dont on charge fi libérale
ment dans notre Occident quiconque ne penfe pas com
P iîj
mmmmmmm
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■fflUt^rti I I I III tjjÉtfgaiMgfea III III iili'/JfgjH'
ajQ R E L I G I O N
ni^ nous , ont été prodigués aux Chinok. Il faut être
auffi inconfidérét que nous le fommes dans toutes
tkds difputes , pour avoir ofé traiter d'athée un gou-
vernement dont prefque tous les édits parlent (a)
4'H7t ètrefuprime pire des peuples , ricQmpenfaHt 6? pu-
nij/auf avec juJHce ^ qui a mis entre Phomme & lui"^
$me correfpoudance de prières & de bienfaits » d^ faur
ffs ^ de cbàtimens,
. Le parti oppofé aux jéfuites a toujours prétendu
ji|ue 1q gouvernement de la Chine était athée , parce
que les jéfuites en étaient favorifés. Mais il faut que
eette rage de parti fe taife devant le teftament de
Vémpereur Càngbi. \jt roicir
* Je fuis âgé de foi»ante ^ dise ans , fen ai rigui
fuixahte 6? un , je dois cette faveur à la proteSion
du ciel^ de la terre , de mes ancêtres , 8? an DlEy .
de toutes les récoltes de Pempire , je ne puis le^ ap» M
fribuer à ma faible vertu. »
Il eft vrai que leur religion n'admet pgint de pei-
n^s & de récompeufes éternelles ; & c'eft ce qui fait
voir cpipbien cette religion eft ancienne. Le Penta»
tîeùque ne parle point de l'autre vie dans (es loix.
Les faducéens chez les Juifs ne la crurent jamais ;
êé ce dogme n'a été heureufement conftaté dans l'Oc-
cident qpe p^r le maître de la vie & de la mort.
On a cru que les lettrés Chinois n'avaient pas unç
idée dîftinde d'un Dieu immatériel ; mais il efl in-
jufte d'inférer de -là qu'ils font athées. Les anciens
Egyptiens , ces peuples fi religieux , n'adoraient pas
Ips & OJtris comme de purs cfprits. Tous les Dieux
àç l'antiiquité étaient adorés fous une forme humair
(a) Voyç^ redit 4e Pemper. | dig^s p?^r le jéfuitc du ffalde.
renr Y^ntchin rapporté dans Voyez auffi le poënte 4e I'^t
}çt lî^^oJrçs de U Chine , ré, | pcrç|ir,^t^«/o?^.
i^ijiii.111 Pu.iiu. iiiiiii. j. . ^^ yé^tKf0(3tgi9BP^BÊmtmm^^^
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D B LA C H
— — «ï|
ne ; & ce qui montre bien à quel point les boou
mes font injufles, c'eft qu'on flétriflait du nom d'à»
thées chez les Grecs ceux qui n'admettaient pas cea
Dieux corporels , & qui adoraient dans la Ditinité une
nature inconnue , invifible , inacce{Ii|ble à nos fens.
Le tameux archevêque Navarette dit que félon
tous les interprètes des livres facrés de la Chine ,
famé efi une partie a'érée , ignée , qui enfefiparoftt du
corps Je réunit à la ful^ance du ciel. Ce fentiment
fe trouve le même que celui des ftoïciens. C'eft ce
que Virgile développe admirablement dans fon fixiéme
livre de l'Enéïde. Or certainement ni le Manuel d'£-
piSête , ni l'Enéide ne font infeâés de l'atihéï&ne.
Tous les premiers pères de Téglife ont penfé ainli.
Nous avons calomnié les Chinois , uniquement parc^
que leur métaphyfique n'eft pas la nôtre. Nous au*
8~ rions dû admirer en eux deux mérites » qui condamnent
à la fois les fuperftitions des payeos,^ les moeurs
des chrétiens. Jamais la religion des ^lettrés ne fnfjf
deshonorée par des fables , ni fouillée" par des que*
relies & des guerres civiles*
En imputant l'athéifme au gouvernement de ce
vafte empire , nous avons en la légèreté dç lui at«
tribuer Tidolâtrie par une accùfation qui fe contredit
ainfi elle-même. Le grand mal-entendu fur les rites
de la Chine eft venu de ce que nous avons jugé de
leurs u&ges par les nôtres : car nous portons au bout
du monde les préjugés de notre efprit contentieux,
Une génuflexion , qui n'eft chez eux qu'une rêvé-
rence ordinaire , nous a paru un aâe d'adoration :
nous avons pris une table pour un autel : c'eft ainû
que nous jugeons de tout. Nous verrons en fop tems
comment nos divifîons & nos difputes ont fait cha({er
de la Chine nés miffionnaires.
Quelque temsi avant Cètfucius , J^ittinar avait înr
l \ trodûit une (eAe , qui ^oit aux eljprits malins , aux
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/T^^?T' ' J .' . ■ '.' 'Wf^^JUlfh^
•vrr
Religion
cnchantemens , aux prcftîges. Une fedle femblable k
celle dEpicurè fi|t reçue & combattue à la Chine
cinq cent ans avant Jesus-Christ : mais dans le
j^remiêr fiécle de notre ère , ce pays fut inondé de
la fuperftîtion des bonzes. Ils apportèrent des Indes
l'idole de Fo ou de Foé^ adorée fous difFérens noms
par fes Japônois &* les Tartares , prétendu Dieu def-
cendu fur la terre , à qui on rend le culte le plus
rîdidûle , & par conféquent le plus fait pour le vul-
gaire» Gètt religion , née dans les Indes près de
inille ans avant Jesus-Christ , a infedté FAfie orien-
tale ; c'eft ce Dieu que prêchent les Bonzes à la Chi-
ne , les Tklapoim à Siam , les Lamas en Tartarie.
Ç'eft en fdn nom qu'ils promettent une vie éternelle,
& que des milliers de bonzes ponfacrent leurs jours
à deis exercices de pénitence , qui effrayent la na«
tùre. QuelqUes-uns paffent leur vie eiichainés ; d'au-
Ires portent un 'carcan de fer , qui plie leur corps
eh deux , & tient leur front toujour$ baiffé à terre.
Leuf fanatifrne Té fubdivHc à l'infini. Ils paffent pour
diaHer dés démons \ pour opérer des miracles ; ils
yendent au peuple la rémîffion des'péchés. Cette
fedte féduit quelquefois des mandarins ; & par une
fetalité ^^ùi montra que la même fuperftîtion eft de
tous l'es pays, quelques mandarins fefpntftitlondro
ch'b6n25es par piété. .. - ^
Ce font eux qui dans la Tartarie ont à leur tête le
Da!at/ania\ idole vivante qu'on adore, & c'eft-là
p'eqt-être }e triomphe* 'de la fdperftition humainç.
Ce Balailçtfna., fuccêfféur & vicaire du Dieu fo ^
Eaffe -pour immortel. Xes prêtres nourri ffênt toujours
n jeune X^wof ; défigné Tucceffeur fecret du fouve^
faîn pontife', qui prend fa place dès que celui-ci,
gu'on croit immortel , éft mort. Les princes JTarta»
res ne lui parlent qu'à genoux. Il décide fouverai-
ffemétK^ fôuV les points de Toi fur lefqueb lés Xo-
fptw^iotii divifésr Edfin ii s'çfl depuis quelque tema
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mjs^f^ »
mmamtlÈ^f^
DELA Chine.
233
fait fouveraifi du Thibet , à Poccident de la Chine.
L'empereur reqoi! fes ambaflkdeurs , & lui envoyé
des préfens confidérables»
Ces feétes font tolérées à la Chine pour Tufage du
vulgaire , comme des alimens groffiers faits pour le
nourrir ; tandis que les magiftrats & les lettrés , fé-
parés en tout du peuple , fe nourriiTent d'unç fubf-
tance plus pure , il femble en effet que la populace
ne mérite pas une religion raifonnable. Confucius
gémidàit pourtant de cette foule d'erreurs : il y avait
beaucoup d'idolâtres de fon tems. La fe<fte de Lao*
kiun avait déjà introduit les fuperftitions chez le peu-
ple. Pourquoi , dit-ii dans un dç fes livres , y Or
Uil plui de crime chez la populace ignorante quepar*
mi les leppréf? Ç*eji que le peuple eji gouverné far
les bon^^eSf
Beaucoup de lettrés font à la vérité tombés dans
le matérialifme ; mais leur morale n'en a point été
altérée. Us penfent que la vertu eft ii nécelTaire aux
hommes , & fi aimable par elle-même , qu'on p'a pas
même befoin de la xo^naiiTance d'un DiEU pour la
fuivre. D'ailleurs il ne faut pas croire que tous Jes
matérialiftes Chinois foietît athées ; puifque plufieuré
pères de l'églife croyaient DjEU & les anges coi*
portis*
Nous ne favons point au fond ce que c'eft que la
matière ; encor moins connaiiTons-nous ce qui eft
immatériel. Les Chinois n'en favent pas fur cela plus
que nous , il a fuffi aux lettré^ d'adorer un litre
fuprême , on n'en peut douter.
Croire Dieu & les efprits corporels t& une an-
cienne erreur métaphyfique ; mais ne croire abfolu-
ment aucun Dieq ce fer>ait une erreur affreufe en
morale , une erreur incompatible avec un gouver-
naient (âge. C'eft unp contradiction digne de nous
9
1^
I
■wr-
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wpw^i Mrp'^- ^^'.vm
234 RBX.XGION J§
de s'éierer ârec fureur , comme on a fait , contre
B^fe y fur ce qu'il croit pofQbie qlb'une fociété d'à-
tbées fubfifte ; & de crier avec la même violence
que te plus fage empire de l'univers eft fondé fur
FitthéiTme.
ht père Fouquet , jéfufte « qui avait paiTé vingt*
tànvi ans à la Chiné , & qui en revint ennemi des je-
fbftes , m^a dit ptufîeurs fois qu'il y avait à la Chine
très peu de pktlofophes athées. 11 en eft de même
parmi nous, r
i
On prétend que vers le huitième iiède v avant
Obarkmagne , la religion chrétienne était copilue à
la Chine. On affure que nos minfionnaircs ont trou-
vé dans ta province de Kingt-ching ou Quen-ftr,
une infcriptron en caradtères fyriaques & chinois. Ce
noniiment ^ qu'on voit tout au long dans Kirker ,
attefte qu'un faint homme nommé Olopûeft , conduit
par des nuées bleues y & obfervant la règle des vents >
vînt de Tactn à la Chine l'an 1092 de l'ère des Sé-
IcDcides , qui répond à Tan 6'^6 de Jesus-Christ;
q«i'aoflf}.t6t qu'il fut arrivé au fauxbourg de la ville
impériale , Tempereur envoya un colao au-devant de
lui ^ & lui fit bàtk une égtife chrétienne.
n eft évident par l'infcription même , que c'eft
une de ces fraudes pîeufes qu'on s|eft toujours trop
aifément permîfcs. Le fage T^avarette en convient.
Ce pays de Tacin , cette ère des Si/eucides , ce nom
jrOiopûen , qui eft , dit-on , chinois , & qui reffem-
He i un ancien nom efpagnol , ces nuées bleues qui
fervent de guides , cette égtife chrétienne bâtie tout-
d'un-coup a Péjîin pour un prêtre de Paleftinc qui
ne pouvait mettre le pied à la Chine fans encourir
b peine de mort ; tout cela fait voir le ridicule de
la ïbppofition. Ceux qui s'efforcent de la foutenir^
ne font pas réflexion que les prêtres dont on trou*.
ve les noms dans ce prétendu monument , étaieni
*gtfjii' I liiaftii. ' imffcTt'
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D E L A C H I N E. ^3f 1
des neftQricQs , & qu'ainfi ils ne combattent que pour
des hérétiques.
Il faut mettre cette inrcription trec celle de Jfo*
iabar , où il eft dit que Sf. Thomas arriva dans le
pays en qualité de charpentier avec une règle & un
pieu , & qu'il porta feul une grolTe poutre pour preu*
ve de fa miflion. Il y t tflez de vérités hiftoriqocs
(ans y mêler ces abfurdes menfong es»
11 eft très vrai qu'au tems de Cbarlemagne la re#
ligien chrétienne ( ainfi que les peuples qui la pro-
feflent) avait toujours été abfolument inconnue i
la Chine. U y avait des Juifs : plufieurs familles de
cette nation non moins errante que fuperftitieufe ,
s'y étaient établies deux fiécles avant notre ère vul-
gaire ; elles y exerçaient le métier, de courtier que
Içs Juifs ont fait dans prefque tout le monde.
Je mç réferve à jetter les yeux fur Siara , fur le
Japon , & furtout ce qui eft fitué vers l'orient & le
midi , lorfque je ferai parvenu au tems où TinduC
trie des Européans s'eft ouvert un chemin facile à
ces extrémités de notre hémifphère.
CHAPITRE TROISIÈME.
Des Indes,
EN fuivant le cours apparent du foleil^ , je trouve
d'abord l'Inde , ou Tlndouftan , contrée auffi vafte
que la Chine , & plus connue par les denrées pré-»
eieufes que l'induftrie des négocians en a tirées dans
tous les tems , que par des relations exadtes. Ce
pays eft l'unique dans le monde qui produife ces épi*
cerip3 , dont la fobriété de fes habitans peut fe paffer ,
>
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"" "^^.mn
I
Des Indbs.
9
ft qui font nécef&ires à la voracité des peuples fep-
tentcionaux.
Une chaîne de montagnes peu interrompue , fem-
ble avoir fixé les limites de l'Inde entre la Chine,
la Tjfurie & la Perfe ; le refte eft entouré de mers.
Llnde en-deqà du Gange fut longtems foumifc aux
Perfans ; & voilà pourquoi Alexandre , vengeur de la
Grèce & vainqueur de Darius , poufla fes conquê-
tes jufqu'dux Indes tributaires de fon ennemi. De-
Eiris Alexandre ^ les Indiens avaient vécu dans la
oerté & dans la molkfle qu'infpirent la chaleur du
climat & la richetfe de la terret
Les Grecs y voyageaient avant Alexandre pour y
chercher la fcience. C'eft-là que le célèbre Pi/pay
écrivit , il y a deux mille trois cent années , ces
Fables morales , traduites dans prefque toutes les lan-
gues du mondç. Tout a été traité en fables & en
dicgorîes chez les orientaux , & particulièrement chez
les Indiens. Pytbagore , difçiple des gymnofophiftes ,
ferait lui feul une preuve inconteftablc que les vé-
Htables fcrences étaient cultivées dans l'Inde. Un lé-
giflateur en politique & en géométrie n*eût pas refté
longtems dans une école où l'on n'aurait enfeigné
que des mots. Il eil très vraifemblable même que
Pytbagore apprît chez les Indiens les propriétés du
triangle redanglo , dont on lui fait honneur. Ce qui
était fi connu à la Chine , pouvait aifément l'être dans
l'Inde. On a écrit longtems après lui qu'il avait im-
molé cent bœufs pour cette découverte. Cette dé-
prnfe eft un peu forte pour un philofophe ; il eft
digne d'un fage de remercier d'une penfée heureufe
l'Etre dont nous vient toute penfée , ainfi que le
mouvement & la vie. Mais il eft bien plus vraifem-
blable que Pytbagore dut ce théorème aux gym-
Dofophiftes , qu'il ne l'eft qu'il ait immolé oent
i
^ I Doiopniites , qu u ne l eit qu u att immole oenc i
2 iKBUfs. *
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Des Indes. ityj
I
i
i
Xongtems avant Pilpay les fages de l'Inde avaient
traité la morale & la philofophie en fables allégori-
ques , en paraboles. Voulaient - ils exprimet l'équité
d'un de leurs rois ; ils difaient que les Dieux qui fri*
Jtdent aux divers ilémens^^ qui font en difcorde entre
eux , avaient pris- ce rôi pour leur arbitre. Leurs an-
ciennes traditions rapportent un jugement qui eft à-
peu -près le même que celui de Salomon, Ils ont une
fable qui eft précifément la même que celle de Jn-
piter & à' Ampbitrion i mais elle eft plus ingémeofie.
Un fage découvre qui des deux eft le Dieu , & qui
eft l'homme. Ces traditioms montrent combien ibat
anciennes les paraboles qui font enfans des Dieux let
hommes extraordinaires. Les Grecs dans leur mythe
logie n'ont été -que des difciples de l'Inde & de l'E-
Spte. Toutes ces labiés enveloppaient autrefois on
18 philofophique : ce fens a difparu^ & les &blet
(ont reftées. /
L'andquité des arts dans l'Inde a toujours été re-
connue de tous les autres peuples. Nous avons encore
une relation de deux voyageurs Arabes , qui allèrent
aux Indes & à la Chine un peu après le règne de
Charlemagne ^ ^ quatre cent ans avant le célèbre
Marco Paolo. Ces Arabes prétendent av'oir parlé à
l'empereur de la Chine qui régnait alors ; ils rappor-
tent que Pertipereur leur dit qu'il ne comptait que
cinq grands rois dans le monde , & qu'il mettait de
ce nombre , le roi des ilipbans 'ç^ des fndiens , fiv'our
appelle le roi de la fagejje , parce que lafagejje vient
originairement des Indes.
J'avoue que ces deuîf Arabes orit rempli leurs récîci
de fables ^ comme tous les écrivains orientaux ; maii
enfin il réfulte que les Indiçns paffaient pour lés pre^
miers inventeurs des arts dansrtout l^Orient , foit que
l'empereur Chinois ait fait cet aveu aux deux Arâbes,
m ibit qu'ils ayent parlé d'euit- mêmes.
&
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9k^S*^
2)8
lÊtmÈtÈmmitaat
II
Des Indes.
3
Il eft Indubitable que lei filds anciennes thédgo-
iiiet, furent inventées^hez les Indiens. Ils ont deux
livres écrits , il y a environ cin<^ mille ans dans leur
ancienne langue fgcrée , nommée le Hanfcrit ou le
Sanfcrit. De ces deux livres, le bremier eft le Sbajla^
jSc le fécond le Fidam. Voici le oommenoement du
Sbajia.
fy L'Etemel abforbé dans la coiitemplation de fcm
^ extftence , réfolut dans la plénitude des tems , de
„ former des êtres participans de fon eflence & de
n fa béatitude. . . Ces êtres n'étaient pas ; il youlot ,
^ & ils furent. ^
On voit afle^ que cet etorde véritablement fubiU
me & qui fut longtems inconnu aux autres nations,
n'a jamais été que fdblement imité par elles.
Ces êtres nouveaux furent les demi -Dieux , les
efprics eéleftes adoptés enfuite par les Caldéens,&
chez les Grecs par Platon. Les Juifts les admirent quand
lis furent captifs à Babilone. Ce fut là qu'ils apprirent
les noms que les Caldéens avaient donnés aux anges ,
ft ces noms n'étaient pas ceux des Indiens. Micbcûfl^
Gabriel^ Rafbàély tfraJêl même font des mots caldéens
qui ne furent jamais connus dans Flnde.
Ceft dans te Sbafla qu'on trouve rhiftoîVe dé la
cbAte de oes anges. Voici Comme le Sbafta s'exprimer
( tf ) Le ferpent dont il el!
p9x\i dans la Genêfe devint le
principal n^nvais ange. On
lui donna tantôt le nom de
Satan ^ qui eft un mot per-
iân , tantôt celui de tucifir
étoile dn matin , parce que la
valgate tradnifit le mot Hélti
par celui de LucifeTé Xfai'e ia«
fullant à la mort d^'un for de
Babilone, lui dit par une figu-
re de réthorique : comment «-
tu tombé du ciel , étoile du mâ-
tin , Lucifer ? On a pris ce
nom pour celui du diaMe &
on a appitiqué ce palTage à la
chute des anges. C^eft encor
le Smdesttni dm foifam de
m^
mm
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VS»i^^
Des Indes.
239
93 Depuis la création des Debtahg ( c'eft-JUlire dai
)) anges ) la joie & l'harmonie environnèrent loi^
,5 cems le trône de rSternel. Ce bonheur aurait Ami
9, jufqu'à la fin des tems ; mais Tenvie entra daos le
39 cœur de Moifaor & des anges fes fuivans. Ils te*
jy jettèrent le pouvoir de perfeAibilité , dont PEter*
n nel les avait doués dans fa bonté. Ils exercerait
}9 le pouvoir dlmperfeâioiu Ils firent le mal à la
,) vue de TEcernel. Les anges fidèles furent (aifis de
,) triftefle. La douleur fut connue pour la premt&ce
„ fois. "
Enfuîte la rébellion des mauvaif anges eft décrite.
Les crois miniftres de DiEU « qui font pet^t^ûre To-
rigina.1 de la trinité de PUUou , précipitent les aiast-
vais anges dans Tabime. A la fin des tems DiBU Icor
fidt grâce & les envoyé animer les corps des hommes.
n n*y a rien dans Tantiquité de fi majeftueux ft
de fi philofophique. Ces myftères des bracmanet pc»*
cèrent enfin jufques dans la Syrie. II falait qu'ils foC
fent bien connus , puifque les Juifs en entendireat pa^
1er do tems d'Hirode. Ce fut alors qu'on forgea fui-
vant ces principes indiens le faux livre à*Hinoc , dté
par l'apAtre Jude^ dans lequel il eft dit quelque chofe
de la châte des anges. Cette doArine devint depids
le fondement de la religion chrétienne.
Les efprits ont dégénéré dans PInde. Probablement
le gouvernement Tartare les a hébétés , comme le
gouvernement Turc a déprimé les Grecs & abruti Ict
Milton» Mais ATtUon eft bien
moins raifonnable que le
Sbafla indien. Le Sbafta ne
poufîe point Textravagance
jufqirà foire déclarer la guer-
re à Dieu par les anges fes
créatures & à rendre queU
que tems la viébire iadeeife.
Cet excès était râervé à Mi^
ton,
NB, ToDt ce meroeaueft
tiré prinipalement de Mr.
Holvpeîl qui a demeuré treate
ans avec les brames & qui en-
tend très bien leur uni
iacrée.
nguc
^im
•^mtiSm
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)^thÊk
OlMtBtmÊSm
i
240
Des Indes.
î
Egyptiens. Les fciences ont prefque péri de même
ehez les Perfes par les révolutions de Tétat. Nous
avons vu quelles fe font fixées à la Chine au même
point de médiocrité où elles ont été. ehez nous au
moyen âge , par la même cauf(^ qui agiflait fur nous \
c'eft-à-dire , par un refpeék fuperftitieux pour l'an-
tiquité , & par les réglçmens mêmes des écoles. Ainfi
dans tout pays , Tefprit humain trouve des obftacles
à fes progrès.
Cependant) jufqu'au treizième fiéclede notre ère,
Tefprit vraiment philofophiquc ne périt pas abfolù-
ment dans Tlnde. Pacbimère ^A^n% ce treizième fiécle,
traduifît quelques écrits d'un brame fon contemporain.
Voici comme ce brame Indien s'explique : le pai&ge
mcrhe attention.
9, J'ai vu toutes les fedes s*accufer réciproquement
99 d'impofture ; j'ai vu tous les mages difputer avec
.99 fureur du premier principe , & de la derniève fin.
59 Je les ai tou$ interrogés , & je n'ai vu dsins tous
99 ces chefs de fa^ftions qu'une opiniâtreté inflexible,
99 un mépris fuperbe pour les autres , une haine im-
99 placable. J'ai donc réfolu de n'en croire aucun.
99 Ces doâeurs en cherchant h vérité, font comme
jy une femme qui veut faire entrer foâ amant par
99 une porte dérobée , & qui ne peut trouver la
99 clef de la porte. Les hommes dans leurs vaines
99 recherches reifemblent à celui qui monte, fur un
99 arbrç où il y a un, peu de miel , & à peine en
99 a*t-il mangé , que les ferjpens qui font autour de
99 l'arbre, le dévorent.
Telle fut la manière d'écrire des Indiens. Leur efprît
jiaraît eiicor davantage dans les jeux de leur inven-
tion. Le jeu que nous appelions des échecs par cor-
ruption , fut inventé par tuX , & nous n'avons rien
^ qui en approche : il eff allégorîqqe comme leurs Ja-
S Bïes ; c'clt l'image de ht guerre. Les noms de Sbak
V ^"^
I
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fcfflU". , I II III
Des Indes.
241 «'
1
qui veut dire Prince^ & de phu qui {igm6e fo/dat ^
fe font cqnfervés encordans cette partie de TÛrient
Les chiffres dont nous nous fervons , & que les Ara*
bes ont apporté en Europe vers le tems de Charle*
magne ^ nous viennent de l'Inde. Les anciennes mé*
dailles , dont les curieux Chinois font tant de cas ^
font une preuve que plufieurs arts furent cultirés aux
Indes avant d'être connus des Chinois»
On y a de tems immémorial divifé la route an-*
nueile du foleil en douze parties. L'année des brac-
mânes, & des plus anciens gymnofophiftes, commença,
toujours quand le foleii entrait dans la conftellation
qu'ils nomment Jfq/r^ram & qui eft pour nous le bélier/
Leurs femaines furent toujours de fept jours : divifion
que les Grecs ne connurent jamais. Leurs jours por<>
tent les noms des fept planètes. Le jour du foleil eft
appelle chez eux Mitradinam : refte à lavoir fi ce mot
Mitra ^ qui chez les Perfes fignifie aufli le foleil , eft
originairement un terme de la langue des mages 1 ou
de celle des fages de l'Inde*
Il eft bien difficile de dire laquelle des deux nations
ienfeigna l'autre ; mais s'il s'agifTait de décider entré
les Indes & l'Egypte , je croirai toujours les fdenCes
bien plus anciennes dans les Indes* Ma conjecture
eft fondée fur de que le terrain des Indes eft bien
plus aifément habitable que leterrain voifin du Nil,
dont les débordemenS durent longtems rebutet lei
premiers colons avant qu'ils enflent dompté ce fleuve
en creufant des canaux. Le fol des Indes eft d'aiU
leurs d'une fertilité bien plus variée , & qui a ûû
exciter davantage la curiofité & l'induftrie humaine*
Quelques -uns ont cru la race des hon^mes origi-
naire de l'indouftan , alléguant que l'animal le plus
faible devait naitre dans le climat le plus doux , &
fur une terre qui produit fans culture les fruits les
plus nourriflans , les plus falutaires, comme les daUes
EJfaifur les mœurs , ^c. Tom. 1. Q.
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f
l
242 Des Ihdbs.
& ic8 COGM* Ceux-ci fortout donnent aifcment à l'hom.
me de quoi le noarrir , lev védr & le loger. Et de quoi
d'ailleurs a befoin un habitant de cette prerqu'ifle ?
Tout ouTrier y travaille prefque nud , deux aunes
d'étoile tout au plus fervent à couvrir une femme qui
n'a point de luxe. Les enfans reftent entièrement
nuds du moment où ils font nés jufqu'à la puberté.
Ces matelas , ces amas de plumes , ces rideaux à dou-
ble contour , qui chez nous exigent tant de frais 6c
de foins , feraient une incommodité intolérable pour
ces peuples qui ne peuvent dormir qu'au frais fiir la
natte la phis légère. Nos maifons de carnage , qu'on
appelle des boucheries ^ oiî l'on vend Unt de cada*
vres po«r nourrir le ntoe , mettraient la pefte dai»
le climat de Ilnde ; il ne fkut à ces nations que des
nourritures raftaichiiTantes & pures ; la nature leur
a prodigué des forêts de citronniers , d'orangers , de
Sfigoiera , de palmiers ^ de cocotiers , & des campa,
gnes couvertes de ris. L'inumne le plus robuile peut B
ne dépenfer qu'un on deux fous par jour pour fes
alimens. Nos ouvriers dépenfent plus en on jour
qu'un Malabare en un mois. Toutes ces confidérations
£emble«t fortifier l'ancienne opinion que le genre-
humain eft originahre d'on pays où la nature a tout
fiiit pour lui , & ne lui a kilTe prefque rien è fûre.
Hais cela prouve feulement que les Indiens font indi-
gènes , & ne prouve point du tout que les autres ef-
pèccs d'hommes viennent de ces contrées. .Les blancs
ft les nègres , & les rouges ^ & les Lappons , & les
Samoyèdes , & les Albinos ne viennent certainement
pas du même fol. La différence entre toutes ces efpè-
ces efl auffi marquée .'qu'entre les chevaux & les cha-
meaux ; il n'y a donc qu'un brame mal inftroit &
entêté , qui puiffe prétendre que tous les hommes
defcendent de Tindien Mim^ & de fa femme.
L'Inde au tems de Cbarfemagne n'était connue que
de nom ; & les Indiens ignoraient qu'il y eût un Char*
kmagne. Les Arabes feuls maîtres du commerce ma-
aiigai'Mii ■ iiii <qiw<wMMM»MMii^wpafcS>ii
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^fa
Des Indbs.
243 |f
ritime fourniflaient k la fois les denrées des Indes à
Confkntinople & aux Francs. Venife les allait déjà
chercher dans Alexandrie. Le débit n'en était pas
encor confidérable en France chez les particuliers ;
elles fiirent longtems inconnues en Allemagne , &
dans tout le Nord. Les Romains avaient fait ce com-
merce eux-mêmes dès qu'ils furent les maîtres de
l'Egypte. AInG les peuples occidentaux ont toujours
porté dans Ilnde leur or ft leur argent , & ont tou-
jours enrichi ce pays déjà fi riche par lui-même. De-
là vient qu'on ne vit jamais les peuples de l'Inde ,
non plus que les Chinois & les Gan^arides , fortii;
de leurs pays pour aller exercer le brigandage chez
d'autres nations , comme les Arabes , foit Juif^ , foit
Sarrafins , les Tartares & les Romains mêmes , qui
poftés dans le plus mauvais pays de l'Italie fubfiftè-
rent d'abord de la guerre > & fubfiftent aujourd'hui de
la religion.
Il eft inconteftable que le continent de l'Inde a été
autrefois beaucoup plus étendu qu'il ne l'eft aujour-
d'hui. Ces ifles , ces immenfes archipels oui Tavoifi-
nent à l'orient & au midi , tenaient dans les tems re-
cules à la terre ferme. On s'en appcrqoît encor par
1^ mer même qui les fépare ; fon peu de profondeur ,
les arbres qui croiflent fur fon fond « femblables . à
ceux des ifles ; les nouveaux terrains qu'elle laiOe
fouvent à découvert , tout fait voir que ce continent
a été inondé , & il a dû l'être infbnfiblement quand
r Océan , qui gagne toujours d'un côté ce qu'il perd de
l'autre , s'eft retiré de nos terres occidenules.
L'Inde dans tous les tems connus commer(;ante &
înduftrieufe , avait néçcflairement une grande police ;
& ce peuple , chez qui Pytbagore avait voyagé pour
s'inftruire , devait avoir de bonnes loix , (ans lerquel-
les les arts ne font jamais cultivés ; mais les hommes
avec des loix (âges ont toujours eu des coutumes in-
d| fenfées. Celle qui fait aux femmes un point d'hon-
& aij ^
1
t
â
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^ 244 D E iS lyN D E s.
neur & de religion de fe brûler fur le corps de leurs
maris , fubOftait dans Tlndc de tems immémorial. Les
philofophcs Indiens fe jettaient eux * mêmes dans un
bûcher, par un excès de fenatifme & de vaine gloi-
re. Calan ^ ou Ccdanus ^ qui fe briïla dtv ^nt Alex cm-
dre , n'avait pas le premier donné cet exemple ; cette
abominable dévotion n'eft pas détruite encore. La
[veuve du roi deTanjour fe brûla en 175 c fur le buchcsr
de fon époux. Mr. Dumas , Mr. Dupieix gouverneur
de Pondichéri , Tépoufc de Pamiral RuJJel , ont été
témoins de pareils facrifices ; c'eft le dernier effort
des erreurs qui pervertîfTent le genre - humain. Le
*plus auftère des derviches n'eft qu*un lâche en cora-
paraifon d*unc femme du Malabar. Il fembleraît qu*u-
ne nation chez qui les philofophes , & même les fem-
mes, fe dévouaient ainfi à la mort, dût être une na-
tion guerrière & invincible : cependant depuis l'ancien
Sézac^ quiconque à attaqué l'Inde, Ta aifémçnt vaincue*
U ferait encor difficile de concilier les idées fu-
blimes que les brarhîns coiifervent de l'Etue fuprême
avec leurs fuperftîtions & leur mythologie fabuleufe,
fi rhiftoire ne nous montrait pas de pareilles contra-
diâions chez les Grecs & chez les Romains.
Il y avait des chrétiens fur les côtes de Malabar
depuis deux cent ans , au milieu de ces nations iiJo-
lâtres. Un marchand de Syrie nommé Mar Thomas^
s'étant établi fur les côtes de Malabar avec fa famille ,
& fes fa(àeurs , au fixiéme fiécle , y laifla fa religion ,
qui était le ncftorianifmc ; ces fe^aires orientaux , s'é-
tant multipliés fe nommèrent les chrétiens de St, Tho-
mas : ils vécurent paifiblement parmi les idolâtres. Qui
ne veut point remuer eft rarement perfécuté. Ces chré-
tiens n'avaient aucune connaiflance de l'églife latine.
Ce n'eft pas certainement le chriftîanifme qui fleu-
rifTait alors dans l'Inde , c'eft le mahométifme. Il
s'y était introduit par les conquêtes des califes , &
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H(gTttii> ■»FCmni '^^ggjg
D E s I K D E s. ^45 fl
Aaron al Rachîld^ cet illuftre contemporain de Cbar^^
lemagne , dominateur de TAFrique , de la Syrie , de
la Perfc & d'une partie de l'Inde , envoya des mif-
fionnaires mufulmans des rives du Gange aux ides
de rOcéan indien , & jufques chez des peuplades de
nègres. ^ Depuis ce tems il y «ut beaucoup de mu-
fulmans dans rinde. On ne dit point que le grand
Aaron convertit à fa religion les Indiens par le fer Çl
par le feu , comme CbarUmagm convertit les Saxons.
On ne voit pas non plus que les Indiens ayent re-
fufc le joug & la loi à' Aaron al Racbild ..comme
les Saxons refuférent de fe foumettre à Charles.
Les Indiens ont toujours été aufli mous que nos
ftptentrionaux étaient agreftes. La molleffe infpirée
par le climat ne fe corrige jamais ; mais la dureté
s'adoucit,
•
En général les hommes du midi oriental ont requ
de la nature des mœurs plus douces que les peuples
de notre occident ; leur climat les difpofe à TabUi-
nence des liqueurs fortes & de la chair des animaux v
nourritures qui aigriflent le fang , & partent fouvent
à la férocité ; & quoique la fuperftition & les irrup-
tions étrangères ayent corrompu la bonté de leur
naturel , cependant tous les voyageurs conviennent
que le caractère de ces peuples n'a rien de cette
inquiétude , de cette pétulance & de cette dureté
qu'on a eu tant de peine à contenir ohez les na«
dons du nord.
Le phyfique de PInde différant en tant de chofej
du nôtre , il falait bien que le moral différât auifi.
Leurs vices étaient plus doux que les nôtres. Ilscher^
chaient en vain des remèdes aux déréglemens de
leurs mœurs , conime nous en avons cherché. C'é-
t it de tems immémorial une njiaxlme chez eux &
chez les Chinois , que le fage viendrait de l'occident.
jK L'Europe au contraire difait que le fage viendrait ig
& Q. iï j 3
WÇj^Uv ' I I' • H wiiBii pt'O'at
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î 046 DesIkdbs. »
de l'orient Toutes les nations ont toujours eu befoin
d'un fage.
il
CHAPITRE QUATRIEME.
t)es bracmtamis f dp Vidant , ^ de CEzowrvidam.
SI llnde de ^ui toute la terre t befoin , & qui
feule n*9 befoin de perfonne , doit être par cela
même la contrée la plus anciennement policée , elle
doit conféquemment a^ir eu la plus ancienne forme
de religion. U eft très vraifemblable que cette re*
ligion fut longtemé celle du gouvernement Chinois ,
& qu'elle ne confiilait que dans le culte pur d'un
Etre fupréme dégagé de toute fupe^tion & de tout
Sinatifme. *
Les premiers braçmanes avaient fondé cette- reli-
Î|ion (impie , telle qu'elle fut établie à la Chine par
es premiers rois. Ces braçmanes gouvernaient l'Inde.
Lorfque les chefs paifibles d'un peuple fpirîcuel &
doux , font à la tête d'une religion , elle doit être
fimple & raifonnable , parce que ces chefis n'ont pas
befoin d'erreurs pour être obeïs. Il ed fi naturel de
croire un Dieu unique , de l'adorer , & de fentir
dans le fond de £bn cœur qu'il faut être jufte , que
quand des princes annoncent ces vérités , la foi des
peuples court au-devant de leurs paroles. U faut du
teins pour établir des loix arbitraires ; mais il n'en
faut point pour apprendre aux hommes raffemblés à
croire un DiBU , « ï écouter la voix de leur pro-
pre c^ur.
Les premiers braçmanes étant donc à la fois rois
(kl pontifes , ne pouvaient guère établir la religio--
«ttf fur la raifon univerfeUct II n'en eft paji
igion 1 l'
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I<fiii^' ciiw ■■M v^wam
Des BRACMÀifgs. 247
î
même dans les pays où le pontificat n'eft pas uni à
la royauté. Alors les fondions religieufes qui appar*
tiennent originairement aux pères de famille, fof-
ment une profeflion féparée ; le^cuke de DiiU dc«
vient un métier « & pour faire valoir ce métier , il
Biut fouvent des prefiiges , des fourberies & des
cruautés.
La religion dégénéra donc chez les bcacfBtnes dit
qu'ils ne furent plus fouveraios*
Longtems avant Alexanétn ^\t% braemaiiis ne ré*
gnaient plus damllnde; mais leur tribu qu'on nomme
Cafte , était toujours la plus confidérée , comme elle
Teft encore aujourd'hui ; & c'eft dans cette même
tribu qu'on trouvait les fages vrais ou feux, que les
Grecs appellérent gymnofophiftes. Il eft difficile de
inier qu'il y eât parmi eux , dans leur décadence ,
cette efpéce de vertu qui s'accorde avec les illufions A
du 'fanatifme. Us reconnailTaient toujours un Dieu fi
fupréme à travers la multitude de divinités (iibalter» K
^ nés que la fuperftition populaire adoptait dans tous
les pays du monde. Strabon dit expreiTément , qu'au
fond les bracmanes n'adoraient qu'un feul DiEU. En
cela ils étaient femblables à Confucius , ï Orphie , à
Socrate^ à Platon^ à Marc-Aurile , à EpiSète , à tous
les fages , à tous les hiérophantes des myftères. Les
&pt années de noviciat c^z les bracmanes , la lot
du filence pendant ces fept années , étaient en vi«
gueur du tems de Strabon. Le célibat pendant ce
tems d'épreuve , l'abftinence de la chair des animaux
qui fervent Tiiomme , étaient des loix qu'on ne tran&
greifa jamais > & qui fubfiftent encor chesi les brg«
mts. Ils croyaient un Bisy créateur , rémunérateur &
vengeur. Us croyaient l'homme déchu & dégénéré » &
cette idée fe trouve che2 tous les anciens peuples. Aurea
frima fataejlstca eft la devife de toutes les nations,
ApuUe y Qmute^Curçe , Clvnent d'Alexandrie « Pbim
ktflraSi , Porpbire , Paliadi , s'accordent tous dans liBB'
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ȍ*
JjiéMm
248 Des bracmanes
:
éloges qu'ils donnent à la frugalité extrême des brac-
Twanes , à leur vie retirée & pénitente , à leur pau-
vreté volontaire , à leur mépris de toutes les vani-
tés du monde. Sù.^Ambroife préfère hautement leurs
tnoenrs à celles des chrétiens de fon tems. Peut-être
eft-ce une de ces e^iagératîens qu'on fe permet quel-
quefois , pour faire rougir fes concitoyens de leurs
défordres ; on loue les bracmanes pour corriger les
moines : & fi 5"/. Ambroife avait vécu dans l'Inde ,
il aurait probablemftit loué les moines pour faire
honte aux bracmanes. Mais enfin il réfuice de tant
de témoignages , que ces hommes finguliers étaieni^
en réputation de faintcté dans toute la tçrre.
Cette connaifTance d'pn Dieu unique dont tous
les philofophes leur favaient tant d« gré , ils la con-
fervent encore aujourd'hui au milieu des pagodes,
& de toutes les extravagances du peuple. Un de nos
poètes a dit dans une de fes épitres , où le faux do-
mine prefque toujours :
li^nde aujounrhui voit Tor^eilleu^ bracmsMie
Déifier « brutalement zélé ,
Le diable même ea bronze cifelé.
Certainement" des hommes qui ne croyent point
au dijble, ne peuvent adorer le diable. Ces repro-
ches abfurdes font intjolérables : on n'a jamais adoré
le diable en aucun pays du monde : les manichéens
n'ont jamais rendu de culte au mauvais principe :
on ne lui en rendait aucun danS la religion de Zo^
roqfire. Il eft tems que nous quittions l'indigne ufage
de calomniçr pûtes les feélçs , fi? d'înfuUcr toutes
les nations.
Nous avons , comme vous favex , VSzourvedant ,
ancien comment: ire compofé par Cbumontou y {ur et
Védam , fur ce livre frtcré que les brames préten-
dent avoir étç donné de D i £ V aux hommes. Ce
#s^aç^5Çi=«s
5SP«ÎSfeiW=
-i^^T
^it
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l^mf -^-inaiiMi "fJgir
' DU VÉDAM , ET DE l'EzOURVÉDAM. 249 |f
commentaire a été rédigé par un brame très favant,.
qui a rçndu beaucoup de fervices à notre compa*
gnie des Indes ; & il Ta traduit lui-même de la lan-
gue facrée en français, (a)
Dans cjttt Ezourvédam , dans ce commentaire , Cbu"
montou combat Fidolâtrie ; il rapporte les propres
paroles du Védam. C*^ l'Btre fuprime qui a tout
crié , le fenJtbU Ç«f FinfeTiJible s U y a eu quatre âges
diffirens ^ tout périt â la fin de chaque âge , tout ejl
fubmergç , ^ le déluge ejl un paj/'age d'un âge à
l'autre , &ç.
. Lors que Dieu exijiait feul ^ Êf ^«# ««/ autre être
n^exiJiaJt avec lui , il forma le dejfein de créer le
monde ,• il créa d'abord le tems , enfiàte Peau 6f la
terre : 6? du mêloJtge de^ cinq ilétnens , à f avoir , la
terre , l'eau , le feu , Pair &f la lumière , il en forma
les differens corps , éf ht^r donna la terre pour leur
bafe. Il fit ce globe que nous habitons en forme ovale
comme un œuf. Au milieu de la terre ejl la plus
haute de toutes les montagnes nommée Mérou , ( c'ejl
Plmmzûs, ) Adîmo , c^eji le nom du premier homme
forti des mains d<i DiEU. Procriti ejl le nom defon
époufe. D'Adimo naquit Brama , qui fut le législateur
des nations 6f l^ père des brames.
Que de chofcs curieufes dans ce peu de paroles !
on y appercjoif d'abord cette grande vérité , que DiBU
^ eil le créateur du monde ; on voit enfuite la fourcc
primitive de cette ancienne feble des quatre tiges.,
d'or , d'argent , d*airain , & de fer. Tou» les princi-
pes de la tbéologie des anciens eft renfermée dans
le Védam. On y voit ce déluge de Deucalion , qui
ne figure autre chofe que la peine extrême qu'on a
éprouvée dans tous les tems à deiTecher les terres ,
C a ) Ce mtiniifcrit eft à la bibliothèque du roi , où chacun
peut le confulter.
y
I
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9 350 D B 8 B H ▲ C M A K £ Si
11
i
-«^
qoe la négligence det hommes a laiffé longtema inon-
déet. Toutes les citations du FislMn , dans ce ma-
nufcrit , font étonnantes ; on y trouve exprefleraent
ces paroles admirables : Dl£U ne cria ituntdî ievia^
il ne peut en être tauteur. DiEU qm eft la fagejft
& la fainteii^ ne cria jamais que la vertu.
Voici un morceau des plus finguliers du Védam.
Le premier homme itant Jhrti des mains de DiBU i
kii dit i II y aura fur la terre différentes occupations^
tous ne feront pas propres à toutes $ comment les dif
tinguer entr'eux ? DiEU iui répondit ^ Ceuxquifont nés
avec plus £efprit ^ de goût pour la vertu que les
autres , feront les brames. Ceux qui participent le plut
du Rofogoun , ç*eji^à'dire , de Pambition\ feront les
guerriets s ceux qui participent le plus du Tomogun,
c^eji-à-dire^ de F avarice ^feront les marchands. Ceux
qui participeront du Comogun , c'efl-à-dire , qui feront >
robujles '^ bornés ^ feront occupés aux œuvres ferviles.
On reconnait dans ces paroles l'origine véritable
des quatre cailes des Indes , ou plutôt les quatre con-
ditions de la focîété humaine. En effet , fur quoi
peut être fondée l'inégalité de ces conditions , finoa
fur rinégalité primitive des talens ? Le Vidam pour-
fuît & dit : LEtre fuprime n'a ni corps ni figure ^ &
VEzourvédam ajoute : Tous ceux qui fui donnent des
pieds & des mains font des infenfés. Chumontou dte
enfuite ces paroles du Védam. Dans le tenu que
Dieu ^a toutes chofes du néant ^ il cria fipariment
UU individu de chaque efpèce , & voulut qt^il portât
dans lui fon germe , afin qu'il put produire ,• il efi le
principe de cbaqsu chafe : lefoleil n*eft qu'un corps fans
me ^ fans cmmaiffance , il q/i entre les mains de DlEO
çomnte une chandelle entre les mains d'un homme.
Après cela l'auteor du commentaire combattant Yo-
pinion des nouveaux brames , qui admettaient plu-
ilâflsw
ilP
mpiftSli
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DU VeDAM et de ]L'EZ0URViDàM.
•-mm
fieurs incaroations dans le Dieu Brama & dîna le
Dieu Vitjnou , s'exprime ainfi.
Di'fmi donc , bomnu étourdi & iitfenji^ qtitfi^t%
que ce Kochiopo ^ cette Odité » qui tu dis avoir domU
naijpmce à ton DiEU ? ne font -ils pas des hommes
comme les autres ? ^ ce DiEU atd eji fur de fa ua^'
ture Çcf éternel de fon effence ^Je fer ait M abaxjfijuf*
qtàà s^aniantir dans le Jein £une femme pour fy re»
vêtir d^une figure humaine ? ne rougis-tu pas de nous
prifenter ce DiEU en pofiufe de fuppliant devant um
de fes créatures ? as4u perdu rêjprit ? ou es-tu venu
à ce point if impiété de ne pas rougir de faire jouer à
FEtre fuprime le perfomtage de fourbe ëf Âe men*
teur ? .... Ceffe de tromper les hommes , ce n*ejl qu^à
cette condition que je continuerai à f expliquer le Mé*
dam ; car Jî tu r^es dans les minus fentimens ^tu es ^
incapable de t entendre , S^ ce ferait le projlituer que |
de te Penfeigner. \
Au livre )e. de ce commentaire , l'auteur Cbu-^
montou réfute la îAAt que les nouveau brames in-»
ventaient ùst une incarnation du Dieu Brama , qui
&lon eux parut dans Plodc fous le nom de Kopilo ^
c'eft*à-dire» de pénitent ; ils prétendaici^t qu'il avait
voulu' naître de Débobuti , fbnme d'un honume àê
bien nommé Xordomo.
S^il efi vrai , dit le commentateur , que Brama
fint né fur la terre , fourmoi donc, portait • il h
nom d* Etemel? celui qui ^ Jbmveraimmeta heteremx ,
& dans qui feul eJi notre bonheur , aurait^il voulu
fe foumettre a tout ce que fouffire un enfant ? &ç.
On trouve enfuite une defcripâon de Tenfer toute
iemblable à celle que les Egyptiens ft les Grecs ont
donnée depuis fous le nom de Tartare. Que faut*
il faire , dit-on , poser éviter ^ enfer ? Il faut aimer
Dieu , répond le commentateur Çhumontou : il faut
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$ 25Z Des bracmanes; ^
/luVf ce qui nout ejt ordoimi par le Védara , & le
faire de la façon dont il nous le prefcrit. Il y a ,
dit -il , quatre amours de DiEU. Le premier eft de
l'aimer pour lui-même , y««x intérêt perJonneL Le
fécond , de I*aimer par intérêt. Le troîfieme , de ne
Taimer que dans les momens ou l*on n'écoute pas fes .
pajpons. Le quatrième , de ne Paimer que pour ob^
tenir P objet de ces pajjîons même^ : & ce quatrième
amour ^en mérite pas le nom, (£p)
Tel eft le précis des principales fingularités du Vi-
iaw, livre inconnu jufqu'aujourd'huî à l'Europe , &
à prefque toute TAfi.ç.
\
%
Les brames ont dégénéré de piqs on plus. Leur
Cormovédam , qui eft leur rituel , eft un ramas dç
cérémonies fuperftitieufes , qui font rire quiconque
n'eft pas né fur les bords du Gange ou de Tlndus ,
ou plutôt quiconque n'étant pas philofophe s'étonne
des fottifes des autres peuples , & ne s'étonne point
de celles de fon pays.
Le détail de ces minuties eft îmmenfe, C'eft un
aflembldge de toutes \t$ folies que 1 1 vaine étude de
Taftronomie judiciaire a pu infpirer à des favans in-
génieux, /nais extravagans ou fourbes. Toute la vie
d'un brame eft confacrée à ces cérémonies fuperfti-
tieufes. Il y en a pour tous les jours de l'année.
Il femble que les hommes foient devenus faibles &
lâches dans l'Inde à mefure qu'ils ont été fubjugués.
II y a grande apparence qu'à chaque conquête les
fuperftitions , & les pénitences du peuple vaincu ont
redoublé. Sé^^ac ^ Madiès , les Affyricns , les Perfes ,
Alexandre , les Arabes , leS*Tartares , & de nos jours
Sba-'Sadir \i en venant les uns après les autres ra-
vager ces beau^ pays , ont fait un peuple pénitent
d'un peuple qui n'a pas fu être guerrier.
O) Le âhafta eft beaucoup plus fublime. Voyez les
Mélangea 4
wi^
4»yiiab^ni 'PiabSli
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1^" f ['
( ''ff?j)l
i
DU VÉDAM ET DE L'EzOURYÉDAM. .2^^ S
Jamais les pagodes n'ont été plus riches que dans
les cems d'humiliation & de mifére ; toutes ces pa-
godes ont des revenus confidérables, & les dévots les
enrichifTent encor de leurs offrandes^ Quand un raya
pafTe devant une pagode, il defcend de fon cheval , de
Ton chameau , ou de fon éléphant , ou de fon pa-
lanquin , & marche à pied jufqu'à ce qu'il ait pafle
le territoire du temple.
Cet ancien commentaire du Vidam dont je vien^
de donner ^extrait , me parait écrit a.vant les con-
quêtes à* Alexandre $ car on n'y trouve aucun des
noms que lès vainqueurs Grecs impcfèrent aux fleu-
ves , aux villes , aux contrées. L'I ide s'appelie Zonu
boudipo s le mont Immaiis eft Mérou ,• le Gange eft
nommé Zanoubù Ces anciens noms ne font »plus
connus que des favans dans la langue facrée.
L'ancienne pureté de la religion des premiers brac-
manes ne fubfifte plus que chez quelques-uns de
leurs phiiofophes : & ceux-là ne fe donnent pas la
peine d'iiiftruire un peuple qui ne veut pas être inf-
truit , & qui ne le mérite pas. II y aurait même du
rifque à vouloir le détromper ; les brames îgnorans
fe (buléveraîent ; les femmes attachées à leurs pa-
godes , à leurs petites pratiques fu perdît! eufes crie-
raient à l'impiété. Quiconque veut enfeigncr la raî-
fon à fes concitoyens , eft perfécuté , à moins qu'il
ne foit le plus fort ; & il arrive prefque toujours
que le plus fort redouble les chaînes de l'ignorance
au - lieu de les rompre.
La religion mahométane feule a fait dans l'Inde
d'itnmenfcs progrès , furtout parmi les hommes bien
élevés *, parcp que c'eft la religion du prince , &
qu'elle n'enfeigne que l'unité de Dieu conformé-
ment à l'ancienne dodrine des premiers bracmanes.
Le chriftianifme n'a pas eu dans l'Inde le même fuc-
cès, malgré l'évidence & lafainteté de fa dodtrîne ,
& malgré les grands établiiTemens des Portugais , des
'm^
Wl^
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2^4 Ois BRACMAlfES}
Fnnqtts , des Anghfo , des Holkndite ^ des Daftûis. C'eft
méme^e concours de cet nations fat e nui au pro^
grès de notre culte; Comme elles fe kalSent tou-
tes , ft que plufieurs d'entr'elles ffoftt fouvent la
Kerre dans ces climats , elles y ont iàit hair ce qu'et-
t eofeignent Leurs ufages d'ailleurs rérottent les
Indiens ; ils font feandalifés de nous vok boire du
idn & manger des viandes qu'ils abhorrent La con-
formation de nos organes qui fait que nous pronon-
çons fi mal les langues de TAfie^ eft encor un obf-
tacle prefque invincible ; mais le plus grand eft la
différence des opinions qui divifent nos mi(Gonnaires.
Le catholique y combat l'anglican , qui combat le lu-
thérien combattu par le calvinifte. Ainfi tous contre
tous voulant annoncer chacun la vérité , & accufant
les autres de menfonge , ils étonnent un peuple iimple
ftpaifible, qui voit accourir chez lui des extrémités
occidentales de la terre des hommes ardens polir fe dé-
chirer mutuellement fur les rives du Gange.
Nous avons eu dans ces climats comme ailleurs ,
des mlOionnaires refpeâables par leur piété » & aux-
quels on ne peut reprocher que d'avoir exagéré leurs
travaux & leurs triomphes. Mais tous n'ont pas été
des hommes vertueux & inftruits , envoyés d'Europe
pour changer la croyance de l'Afie. Le célèbre 2/jV
camp , auteur de Thiftoire de la miifion de Tranqoe-
bar , avoue , (c) Que les Portugais remfltrettt Ujemi^
noire de Goa de maifai3eurs amdanmis au bamtiffe^
ment ,• quHls en firent des ndJfionuaireS , 6f que ces
mijjiomioàres ti oublièrent pas leur frender métier. No-
tre religioil a fait peu de progrès fur les côtes , &
nul dans les états fournis immédiatement au grand
Mogol. La religion de Mahomet & celle de* Brama
partagent encor tout ce vafte continent II ri'y a pas
deux fiécles que «nous appellions toutes ces nations
la f agonit » tandis que les Arabes , les Turcs » les
3 ( c ) Preoiicr tome , page aa f •
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«fflW*"" "^
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DU Vi^KM ET DE L'EzOURVÉDAM. 2^5
Indiens ne nous conûaiffiUent que fooi le nom d'ido*
lâtres.
CHAPITRE CINaUIÉMEcv
Di lu Perfi , AU temt de Mahomet le prophète , 6f rfe
l^mnciemte religion de Zoroajhre.
EN tournant vers la Perfc , on y trouTe , un peu
av^anc le tems qui me fert d'époque , la plus gran*
de & la plus prompte révolution que nous connais-
Sons fbr la terre.
Une nouvelle dominatiorh, une religion & des mœurs
jufqu'alors inconnues , avaient changé la face de ces
contrées ; & ce changement s'étendait déjà fort ayant
en Afie , en Afrique & en Europe.
Pour me f ire une idée du mahométirme , qui a
donné une nouvelle forme à tant d'empires , je me
rappellerai d'abord les parties du monde qui lui furent
les premières fuumifes.
•
La Perfe avait étendu fa domination avant Alexan*
ire , de TEgypte à la Badriane , au - delà du pays oè
eft aujourd'hui Samarkande , & de la Thrace jufqu'an
fleuve de l'Inde.
Divifée & reflerrée fous les Séleucîdcs , elle avait
repris des accroiffemens fous Arfacef le Parthîcn, deux
cent cinquante ans avant notre ère. Les Arfacides n'eu-
rent ni la Syrie , ni les contrées qui bordent le Pont-
Euxin : mais ils difputèrent avec les Romains de l'em-
pire de rOrient , & leur oppofèrent toujours des bar-
rières infurmontables.
& ^
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2S6 DelaPerse. i
Du tems d* Alexandre Sévère , vers l'an 226 de notre
ire , un fimple foldat Ferfan , qui prît le nom (ÏAr-
taxare , enleva ce royaume aux Parthes , & rétablit
l'empire des Perfes , dont l'étendue ne différait guère
alors de ce qu'elle eft de nos jours.
Vdus ne ya\x\t± pas exatnider ici qtiels étaient les
premiers Babiloniens conquis par les Perfes , ni com-
ment ce peuple fe vantait de quatre cent mille ans
d'obfervations aftronomiques , dont on ne put retrou-
ver qu'une fuite de dix - neuf cent années du tems
ai Alexandre. Vous ne voulez pas vous écarter de votre
fujèt t>6uf vovii rap^ellef l'idée de la grandeur de Ba-
bilone , & de ces monumens plus vantés que^ folides
dont les ruines mêmes font détruites. Si quelque tefte
des arts afiatiques mérite un peu notre curiofité , et
font les ruines de Perfépolîs décrites dans plufieurs
lif fes , & copiées dans plufieurs eilampès. Je fais quelle
admiration infpirent ces mafures échappées aux flam-
beaux dont Alexandre & la courtifanne Tais mirent
Perfépolîs en cendre. Mais était-ce un chef-d'œu-
vre de l'art qu'un palais bâti au pied d'une chaîne de
rochers arides ? Les colonnes qui font cncor debout,
ne font affurément ni dans de belles proportions , lïi
d'un deffein élégant. Les chapiteaux furchargés d'oN
nemens grofliers ont prefque autant de hauteur que
le fuft même des colonnes. Toutes les figures font
aufli lourdes & aufTi féches que celles dont nos égli-
fcs gothiques font encor malheureufement ornées. Ce
font des monumens de grandeur , mais non pas de
goût ; & tout nous confirme que ^\ on s'arrêtait à
l'hiftoire des arts, on ne trouver lit que quatre fiécles
dans les annales du monde; ceux d Alexandre yà^ Au-
giifle , des Midicis & de Louis XIF,
Cependant les Perfans furent toujours un peuple
ingénieux. Lokman , qui eft le même qu'EJope , était
âné à Casbin. Cette tradition eft bien plus vraifembla- |
blc que celle qui Ijs fait originaire d'Ethiopie , pays I
où I
^
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r
m «^teattiriag "^W^
D B X A ' P B R S B. 3^7
9
on il «Y eut jamais de pUlorophes. Les dogmes de
rancien Zerit^ , appelle Zwoc^t par les Grecs ,
qui ont changé tols les. non» orientaux , fubfiftaient
encore. On leur donne neuf mille ans d'andquité ;
car les Perfans , ainfi que les Egyptiens , les Indiens ,
les ChiiÉoit, reculent Torii^e du monde autant que
d'autres la rapprockent» Un (econd Zoroaftre fons
Darius fils A'Èiftafpis , n'avak fait que perfeâionner
cette antique religion. C'eft dans ces dogmes qu'on
troQiw , âiafi que dansd'InA f VfanmortaUté de l'ame ,
ft une autre vie heurqife on malheoreure. C'eft-là
qu'on voit exprelTément un enfer. Zoroaftre. dans les
écrits rédigés dans le Sadder., tlit queDiBCJ lui fit
voir cet enfer , & les peines réfef vées aux méchans ;
il y voit plufieurs rois , un entr'autres auquel il man-
quait un pied ; il en demande à DiEU la raifon. DlS(j
lui répond : Ce roi pervers n*à fait qiCune aSitm de
bontienfavie. Il vit en alU^vt à' ta cbaffe $m drcma' A
daire qui était lié trop loin de fan àùge , t^ qt$i voulant ;
y manger ^ ne pouvait y atteindre. Il approcha F auge
iun coup de pied ; fai mis f on pied dans le ciel , tout
Je refle ^ ici. Ce trait . peu connu fait voir l'elpéce
de philofopfaie qui régnait dans ces tems reculés , phi-
lofophie toàjours allégorique , *& quelquefois très pro«
fonde. Nous avons rapporté ailleurs ce trait iingulier
qu'on ne peut trop faire connaître.
Vonsfare^ que les Babiloniens furent les priéniers
après les Indiens qui admirent des êtres mitovens en-
tre la Divinité & l'homme. Les Juifs ne donnèrent des
noms aux anges que dans le tems de leur captivité à
Babilone. Le nom de &i^aif.paraitpourla première fois
dans le livre dé Job $ ce nom eft per&n , & on prétend
que Job l'était. Le nom de RapbaJel eft employé par
l'auteur , quel qu'ilfoit > dcTobie , qui était captif à Ni-
nive , & qui écrivit en caldéen. Le nom d' (/raif/ même
était caldéen & fignifiait voyant Dieu. Ce Sadder eft l'a-
brégé du Zenda-Vefta ou dnZend l'un des trois plus
M anciens livres qui Ibient au monde , comme nous I'up
j^ EJfaifur les mœurs , 6fr. Tom. L R
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r.
^S^ Du S A B D E II.
IFOQS dit dans la philbfdphie de Phiftoife , Vi fat
.d'introdudtion à cet ouvrage. Ce mot ZendU'Vefta
fignifiait chez les Càldéens le culte du feu ^ le Aiidir
éft divifé en cent articles que leg orientaux appriiaient
^porUs ou fuifances : il eft important de le^ Krè , fi
Fou veut connattre quelle était la morale de cèsaa-
.^ens peuple^. Notre ignorante a:éduKté fe figure tôt-
^jours que nous zvons tout inventé , que-tout eft venu
;des Jutfe & de nous qui avons: fuocédé aux Juifs ; on eft
bien détronlpé quand on #uille<ua |>eu dans l'antiquité.
Yôici quelques-unes de.<:es portes qui rervirentimOQs
til-cr d'erreur.
1ère. Porté.
Le décret du très jùfté Piï;tJ éft que lés homincs
foibdt jÛRés par le biâi & le mal qu'ils auront fait
Leurs adions feront pelées dans les balàînces de l^équi-
èé: Les botis habiteront là lumière. La toi les délivrera
de Satan.
IL
Sî les vertus remportent fur les péchés , je ciel eft
toii partage : fi les péchés l'emportent , l'enfer eft ton
châtiment. .
, Cbû donne Taumàne eit véritablement m homme ;
c'euleplus grand méritedans notre faiâte religion» &&
V L ^ ^
• Célèbre quatrfe fois par jour Ife foleil ; célébré la lune
to commencement du moi^. '
" NB. 11 ne dit point , *Adore comme des Dieux k
fqlcil & la lune , mais* célébré le foleil 8t la lune com-
me ouyrsfges du créateur. Les anciens Pcrfes «'^étaient
î)ojntfçnicôles , maisdeircoles, comme le prouve invin-
ciblement Thiftorién Bfe'b tfelfgioh dès Perfes. -
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j
D y S A D D 1 K.
VÎI.
*r?
Di , Abmmmar A ^iU/n r«i£A , quand quelqu'un
éternue.
VB. On ne rapporte cet article que pour fkirç voir
de quelle prodigieufe antiquité eft l'ufage de faluer
ceux qui éternuent.
IX.
- 27 £. Vo^ le décalogiif»
R ij
Fui furtout le péché contre nature , il n'y c^ a
point de plus grand.
VB. Ce précepte fait bien voir combien Se»tu$
Empirzcus fe trompe , quand il dit que cette in&mie
était permiCe par iiM loix de FcgrfiB.
XI.
Aye foin d'entretenir le feu facrc , c'eft Tame du ft
monde , &c. ^
NB. Ce feu façré devint ui) des rites de plufieur^
nations.
XI I.
N'enfevelis point les morts dans des draps neufs Sec.
JSfB. Ce précepte prouve combien fe font trompés
tous les auteurs qui ont dit que les Ferfes n'enfevcr
lifFdient point leurs morts. L'ufage d'enterrer ou de
brûler les cadavres , ou de les expofer à l'air fur des
collines, a yarié fouvent. Les rites changent chez tous
liss peuples , la morale feule ne change pas^
XIII
Aime ton père & ta mère , fi tu veux yiyre à
jamais.^
ii|^|iig^j
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260 D r s A D D B R.
f
xv.
Qixclque chofc qu'on te pîcfcntc , béni« DiEU.
XIX.
Marie toi dans ta jcuncffc; ce monde n'cft qn*iin
paffagc ; îl faut que ton fils te fuivc, & que la chaîne
des élres ne foit point interrompue.
XXX.
n cft certain que Dieu a dit à Zwoajhe , Quand
on fera dans le doute fi une aftion eft bonne ou mau-
Taife , qu'on ne la feflfe pas.
VB. Ceci eft un peu contre la doârine des opi-
nions probables.
XXXIII.
<îue les. grandes libéralités ne foîent répandues que
fur les plus digues ; ce qui eft confié aux indignes eft
perdu.
XXXV.
Mais s'il s'agit du néceffaire , quand tu manges ,
donne auffi à manger aux chiens.
XL.
Quiconque exhorte les hommes à la pénitence , doit
être fans péché; qu'il ait du zèle, & que ce zèle ne
foit point trompeur ; qu'il nç mente jamais; que ton
caradtère foit bon , fon ame fcnfible a l'amitie , fon
cœur & fa langue toujours d'intelligence ; qu'il foit
éloigné de toute débauche, de toute injuftice , de
tout péché ; qu'il foit un exemple de bonté , de juf-
tice devant le peuple de Dieu.
'NB. Quel exemple pour les prêtres de tout pays !
& remarquez que dans toutes les religions de l'Orient
le peuple eft appelle le peuple de Dieu.
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I
XLI.
. Quand les Fervardagam viendront , fai les repas
d'expiation & de bienveillance , ceU eft agréable
au créateur.
l^B. Ce précq>te a quelque refliembknce aVec Ici
Aga$et.
LXVII.
Ne mens jamais , cela eft infâme y quand même
le menfonge ferait utile.
NB. Cette doftrîne eft bien contraire à celle du ^
menfonge officieux.
LXIX.
Point de familiarité avec les courtifannes. Ne cher-
che à réduire la femme de perfonne.
LXX.
Qu'on s'abftienne de tout vol , de toute rapine.
LXXL
i
res
Que ta main , ta langue &i ta penfée foient pu-
-^5 de tout péché. Dans tes afflidions offre à Dieu
ta patience ; dans le bonheur rends -lui des a^ons
de grâce.
XCI.
Jour & nuit penfe à faire du bien , la vie eft courte. .
Si devant fervir aujourd'hui ton prochain tu attends
à demain , fais pénitence. Célèbre les fjx Gabam^
bars ; car Dieu a créé le monde en lix fois dau^
l'efpace d'une année ,' &c. D^ns le tems des fix Gu"
bambkrs ne rcfufe perfonne. Un jour le grand roi^
Oiemsbid orionn^L au chef dp fes cuilines de don-*
ner à manger à tous ceux qui fe préfenteraient ; le
mauvais génie ou Satan fe préfenta fous la forme d'un
^ . R iij ^
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ili6i O # S A D D I K. à
s
i
1
Voyageur : quand il eut dloé > il demanda encor à
manger ^ Giemsbid ordonna qu'on lui fervît un bœuf;
Satan ayant matigé \t bofeuf ^ Gifmsbii lui fit rcrrir des
choraux ; SoMm en ëemanda etiôor d'autres. Alors
le jufteDiEU envoya l'ange Bebman^ qui chaffa le dia-
ble ; mais Taâian de Gienisbid fut agréable à DiEV.
. VB. On reconnaît bit n le génie oriental dans cette
allégorie.
Ce font li les principaux dogmes *des anciens Fef-
fes. Frefque tous font conformes à la religion na-
turelle de tous les peuples du monde ^ les cérémo^
nies font partout différentes ; la vertu eft partout la
même ; c'-eft qu'elle vient de Dieu , le refte eft àtB
hommes.
Nous remarquerons feulement qoe les Parfis eurent
toujours un batéme , & jamais la circoncifion. Le
batéme eft commun à toutes les anciennes nations de
rOrient ; la cîrconçîfion des Egyptiens; , des Arabes
& dfes Juife , éft Infiniment poiiérieure ; car rien
n'eft plus naturel que tle iè laver : Il a falq bien des
fiécles , avant d'imaginer qu^une opération contre la
jiature & contre la pudeur pût plaire i TEtire des
écrés.
Nous paffons tout ce qui concerne des cérém(K>
nies inutiles pour nous ^ ridicules à nos yeux , liées
à des ufages que nous ne connaiiïbns plus. Nous fup-
prîmons auffi ëoutes les ampKfications orîentaljps , &
^ùtes ces figures gî|;ftntel^ues Incohérentes & fauffes ,
•fi familières i totis ces peuples , che2 Içfqucls il n^y
'a peut-être jànfeîs ^eu que l'auteur des fkbles attribuées
"klEfife y qoi âîtécHt naturellement.
' Nous favotïs aRbz tjue le ton goftt n*a jamïiîs été
connu dans TOrîtent , pai'ce xpxt les hontmcs n*y ayant
jamais vécu tn fociété avec les femmes > A ayant
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«5*«^
riAa
De la Pek$8.
prefque toujours été dans la retraite -, n'eurent pas
les mêmes occafions de fe former TefprH , q^u'Cûrent
les Grecs & les Romains. Qtcz aux Arabes , aux Pcr-
fans , aux Juifs le foleil & la Iwie ^ les montagnes
& les vallées , les dragons & les badlics , il né leur
refte prefque plut de po4ffie.
Il fuffit de favoîr que ces préceptes dé Zoroaflre
rapportés dans le SacUrr , font de Tanthiulté la plus
haute ^ qu^il y eft parlé de rois dont Bfroje lui-mê-
me ne fait pas mention.
Noos ne favons pas quel était le prcmîjer Zoroaf»
tre , en ^uel tem? il vivait , fi c'eft le Br^fna des
Indiens , & V Abraham des JmJEs : mais nous favons
à n'en pouvoir douter , que fe reHgion ejnfeîgnaît
la vertu ;-c^eftiebut effenticl de^toytcs les .relîjpbns ;
elles ne peuvent jamais en avoir eu d'autre ; car îF
n'eft pas dans la nature humaine , quelque abrutie
qu'elle puifTe être > de croire d'abord à un homme
qui viendrait enfeigner le crime.
Les dogmes du Sadder nous prouvent encor ^uè'
les Perfes n^étaient point idolâtres. Notre ignorant^
1
mémcs d'idolâtres. Tous nos anciens livres italiens^>
français , efpaçncrls , appellent les majibmétant fflyjtns ,
&leur enipire hpaganie. Nous reffenAliôns dans ces
tems-là aux Chinpis , qui fecroyàîentiefeul peuple rai-
fonnable , $c qui n'accordaient pas auX autres hommes la
figure humaine. La raifon eft to]ijours venue t^rd ; c'eft.
une divinité qui n'eft appafue qu*à peu de pçrfortncs.
Les Juifs imputèrent aux chrétiens des repas de
TMeflê /& des noces 6^:Ûedîpe « le^ fArêtiçttt alix
payèns ; toutes les iiades f'ac0u(èpeat jnutiiellf pieut
des plus ^cand| crimes r- YiÉàucas^ s'çft «idotnnté. i
& R iiîj
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La dodtrine des deux principes eft de Zoroqjhe.
Orofmade ou Oromaze Tançien des jours , & Aru
fnane le génie des ténèbres , font l'origine du mani-
chcïfme. C'cft VOpris & \z Typhon des Egyptiens }
ç'eft la Pmdore àts Grecs , c'eft je vain effort de
tous les (âges pour expliquer Torigine, du bien & du.
maV Cette théologie des mages fut refpetftée dans
rOrient' fous tous les gourernemens ; èc au milieu
de toutes les révolutions , l'ancienne religion s'était
toujours foutenue'en Perfe. Ni les Dieux des Grecs,
ni aautreS divinités n'avaient prévalu.
: NousbirvoH ou- Cofroh lé grand , fur la fin du li-
xiéme fiécle , avait étendu fon empire dans une partie
dé l'Arabie pétrée , & de celle Qu'on nommait heu-
y:\xk* Il en avait cbaiTe les Abimns , demi-chrétiens
qui t'avaient envahie. II profcrivit , autant qu'il le
put , te chriftianifme de fes propres états , forcé à il
^ cette fevérité par le crime d'un fils de fa femme , S
qui s^étant fidt chrétien, {e révolta contre Iui< ■'
Les cnfans du grand Nousbirvan , indignes d'uii
tel père , défolaient la PerCe par des guerres civiles
& par des parricides. Les iuccefieurs du légillateur
JuJiinUn aviliffaient le nom de l'empire. Maurice
venait d'être détrôné par, les armes de Pbocas , &
par les intrigues du patriarche Cyriaque & de quel-
Îjues évcqi^es , que Pbocâs punit enluitc de l'avoir
ervi. Le fang ae Maurice & de fes cinq fils avait
coulé fous la main du bourreau ; & le pape &re-
goire le grand y çnntmi des patriarches de Conilan-
tinople , tâchait d attirer je tyran Pbocas dans fon
parti , en li;i prodiguant des louanges , & en con-
damnant la ^én^oire de Maurice ^ qu^il avait loué
pendant fa Vie.
L'empire de Rome en Occident était anéanti ; un
déluge de barbares , Goths , Hérules , Huns ^ Van-
P dales ) Francs , inondait l'Europe » quand Mahomet ^
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De la Pèrbb.
26%
jettait , dans Ité déferts dé l'Arabie , les fondeinena
de la religion & de la puiflanoe mufulmane*
I
8
CHAPITRE SIXIÈME-
be t Arabie , 6? de Mahomet.
DE tons les légîflateurs & de toiis les conquéralis ,
il n'en eft aucun dont la Vie ait été écrite avec
plus d'autenticité & dans un plus grand détail par
fe contemporains : ôtez de cette vie les (Prodiges
dont cette partie du monde fut toujours infatuée ,
le refte eft d'une vérité reconnue. Il naquît dans la ^
ville de Mecca , que nous nommons la Mecque , l'art
579 de notre ère vulgaire au mois d'Avril. Son père
s'appellaît Ahdala , fa mère Emtna : il n'eft pas doii*
tcux que fa famille ne fût une des plus confidétées
de la première tribu , qui était celle des Coracites.
Mais la généalogie qui le fait defcendre è! Abraham
en droite ligne , eft une de ces febles inventées par
ce déiir fi naturel d'en iitopofer aux homitoes.
Les mœurs & les fuperftitions des premiers âges
que nous connaiffons , s'étaient confervées dans l'Ara-
bie. On le voit par le vœu que fit fon grand-père
Abdala Moutaleb de facrifier un de fes enfàns. Une
prétrefle de la Mecque lui ordonna de racheter ce
fils pour quelques chameaux , que l'exagération arabe
fait monter au nombre de cent. Cette prétrefle était
confacrée au culte d'une étoile qu'on croît avoir été
celle de Sirius ,• car chaque tribu avait fon étoile
ou fa planète, (a) On rendait auflî un culte à^ des
génies , à des Dieux mitoyens ; mais on reconnaiffait
( « ) Voyez le Koran & la r avait demenrc|vingt*ciiiq ans
préface dn Koran , écrite par I eu Arabie.
je favant & judicic ux Sale qui I
^Sft^s*
'l^pilWyi
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I
-
266 De l'Arabib,
yprr ■ JimJgK&^^A I ■ i#^
un DiBU {upéneVLT ; &c'eft en quoi prefijue tous les
peuples fe font accordés.
AbdaJa MouiaJeb vécut t dit -on « cent dix ans;
fon petit-fils Mahomet porta les armes dès l'âge de
quatorze ans dans une guerre fur les confins de la
Syrie ; réduit à la pauvreté , un de fes oncles le
donna pour fadteur à une veuve nommée Cadisbi ,
qui faifait en Syrie un négoce confidérable ; il avait
alors vingt-cinq ans. Cette veuve épouCi bientôt fon
faâeur , 6^ Tonde de Mahomet qui fit ce mariage
donna douze onces d'or à fon neveu : environ neuf
cent francs de notre monnoie furent tout le patri-
moine de celui qui devait changer la ^e de la plus
grande & de la plus belle partie du monde. Il
vécut obfcur avec fa première femme Cadisbi , juf-
qu'à rage de quarante ans. Il ne déploya qu'à cet
igt les talens qui le rendaient fupérieur à fes com-
patriotes. Il avait une éloquence vive & forte , dé*
pouillée d'art & de méthode , telle qu'il la falait
à des Arabes ; un air d'autorité & d'infinuation , ani-
mé par des yeux perçans & par une phyfionomie heu*
reufe^ Tintrépîdité A^Jlexandre^ fa libéralité , &la
fobriété dont Alexandre aurait eu befoin pour être un
grand-homme en tout.
li'amour , qu'^jn tempérament ardent lui rendait
nécefTdire , & qui lui donna tant de femmes & de
concubines , n'affaiblit ni fon courage , ni fon appli-
cation , ni fa funté. C'eft ainfi qu'en parlent les con*
teiitporains > & ce portrait eft juftifié par fes adions.
Après avoir bien connu le caradtère de fes conci-
toyens , leur ignorance , leur crédulité & leur dif-
pofition à Tentoufiafme , il vit qu'il pouvait s'ériger *
en prophète. Il forma le deflein d'abolir dans fa pa-
trie le fabifme , qui confifte dans le mélange du culte
de Dieu & de celui des aftres , le judaïfme détefté
de toutes les nations , & qui prenait une grande fu-
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W^ti^
eta^
ET DE Mahomet. i6f \
périorité dans l'Aribie , enfin le chrîftianifme qu'il
ne connaiflaic que par les abus de plufieurt feébet
répandues aptour de (on pays ; il prétendait rétablir
le culte flmple d* Abraham ou Ibrahim , dont il fe
difait defcendu' y 6c rappdler les hommes à l^unité
d'un Dieu , dogme qu'il s'imaginait être défiguré
Kdans toutes les religions. Ceft en effet ce qu'il dé-
clare expreflement dans le troifiéme Sura ou chapi-
tre de fon Koran. Dieu conuaii , ^ vous ne con*
uaiffez pas. Abraham nUtait tu juif ni chrétien , mait
il &aif de ia vraie religion. Son cœur était réfigné à
Dieu ; il 9f était foint du nombre des idolâtres.
Il eft à croire que Mahomet comme tous lec en-i
toufiailes , violemment frappé de fes idées , les dé-
bita d'abord de bonne foi , les fortifia par des ré-
reries , fe trompa lui-même en tfx>mpant les autres,
& appuya enfin par des fi)urberies néceflaires une
dodrine qu'il croyait bonne. Il commença par fe
faire croire dans fa maifon ^ ce qui était probable-
ment le plus difficile ; fa femme & le jeune Aly
mari de fa fille Fatime furent fes premiers difciples.
Ses coflcitoycnfi s'élevèrent contre lui ; il devait biea
s'y attendre : fa réponfe eux menaces des Coradtes
marque à la fois ùin caradère & ta manière de s'eic-
primer commune de (à nation. Qfumd vous viendriez
à moi , dit41 , avec le fokii à la droite & la kme
à Ja gauche , je ne reculerai pas dans ma carrière.
Il n'avait encor que feîïe difciples , en comptant
quatre femmes , quand il fut obligé de les faire for-
tîr de la Mecque ou ils étaient perfécutés , & de les
envoyer prêcher fe religion en Ethiopie ; pour lui
il ofa refter à la Mecque , où îl aflFfonta fes enne-
mis , & ft fit de nouveaux profélytcs qu*il envoya encor
en Ethiopie au nombre de cent. Ce qui affermît le
plu« fa réHgfîon naîflGinte , ce fiit la conveffion è'Omeer
qui tavattlongternsperCcctité. Omar , qui depuis de-
vint un fi grand conquérant , sTécrta dans une^flem-
^^^êl¥^
k^ mjtm'
=îwîSfe&H«
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f ««
3
D« l'âràbi
I
bléc nombrcure ; J^attejie qt^ii f^^ a ^im DiEU ,
qu'il n'a ni compagnon , ni affocié , ^ que Mabo*
met eji fon ferviteur & fin fropbiteh
Le nombre de fes ennemis remportait èncor fur
fes partif^ns. Ses difciples fe répandirent dans Mé-
dine ; ils y formèrent une fadion conMérable. Ma^
bomet perfécuté dans la Mecque, & conŒimné à mort ,
s'enfuit à Médine. Cette fuite qu'on nomme Egire ,
devint Tépoque de fa gloire & de la fondation de Ton
tmpire. Defligitif il devint conquérant. S'il n'avait pas
été perfécuté , il n'aurait peut-être pas réufli. Réfugié à
Médine , il y perfuada le peuple & l'aflervit. Il battit
d'abord avec cent treize hommes les Mecquois
qui étaient venus fondre fur lui au nombre de mille.
Cette viAoîre , qui fut un miracle aux yeux de fes
fedtateurs , les perfuada que DtEU combattait pour
eux comme eux pour lui» Dès la première viâoi-
re , ils efpérèrent la conquête du monde. Mahomet
prit la Mecque ^ vit fes perfécuteurs à fes pieds ,
conquit en neuf ans , par la parole & par les ar-
mes , toute l'Arabie s psiys aufli grand que la Ferfe ,
& que les Perfes ni les Romains n'avaient pu con-
quérir. Il fe trouvait à la léte de quarante mille
hommes tous enyvrés de fon entouGafme. Dans fes
premiers fuccès , il avait écrit au roi de Perfe Cof^
rois fécond s à l'empereur Hiraclius , au prince des
Coptes gouverneur d'Egypte , au roi des Abiffins , à
un roi nommé Monàar , qui régnait dans une pro-
vince près du golphe Ferfique.
Il ofa leur propofer d'embraiTet fa religion ; & ce
qui eft étrange , c'eft que de tes princes il y en eut
deux qui fe firent mahométans ; ce furent le roi d'A-
biflinie & ce Mondar. Cofrois déchira la lettre de
Mahomet avec indignation. Hiraclius répondit par
des préfens. Le prince des Coptes lui envoya une
.fille qui paiTait pour un chef- d'oeuvre de la natu-
.re , & qu'on appcllait /« belle Marie,
il
-vpF
?^l
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7 etd^Mahovst. 969 i
Mabome$^ au bout de neuf ana fe croyaat ailes
fort pour étendre fes conquêtes & fa i:eligion chez
les Grecs & chez les Perfes ^ conimeni;a par attaquer
la Syrie foumife alors à Hiraclius , & lui prit quel-
ques villes. Cet empereur , entêté dç difputes mé*
taphyfiques de religion , & qui avait pris le parti
des monothélites , efluya en peu de tems deux pro-
pofitions .bien iingulières ; Tune de la part de Cof^
roès fécond , qui Pavait lon^cems vaincu , & l'autre
de la part de Mabonut. Cojrois voulait (\\x* Hiraclius
embraflât la religion des mages , & Mabonut qu'il
fe fit mufulman.
Le nouveau prophète donnait le choix à ceux qu'il
voulait fubjuguer , d'embralTer fa fe<fte , ou de payer
un tribut. Ce tribut était réglé par l'Alcoran à treize
drâgmes d'argent par an pour chaque chef de fa-
\ mille. Une taxe fi modique eft une preuve que les é ^
< [ peuples qu'il fournit étaient pauvres. Le tribut a aug- ' |
mente depuis. De tous les légiflateurs qui ont fondé
des religions , il eft le feul qui ait étendu la iienne
par les Xïonquétes. D'autres peuples ont porté leur
culte avec le fer & le feu chez des nations étran-
gères ; mais nul fondateur de feéte n'avait été con-
quérant. Ce privilège unique eft aux yeux des mu-
fulmans l'argument le plus fort , que la Divinité prit
foin elle-même de féconder leur prophète.
Enfin Mahomet^ maître de l'Arabie, & redouta-
ble à tous fes voifins , attaqué d'une maladie mor-
telle à Médine à Page de foixante & trois ans &
demi, voulut que fes derniers momens paruflenticeux
d'un héros & d'un jufte : Que celui à qui fat fait
violence ^ injuftice faraiffe , s'écria- 1- il , & je Juif
prêt de lui faire réparation. Un homipe fe leva , qui.
lui redemanda quelque argent ; Mahomet le lui fit
donner , & expira peu de tems après , regardé comme
gf un grand -homme par ceux même q^ui lavaient qi^'il jr^
» «
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&
%
2yo De Ï-' Arabie,
était un impofteur » Sç tévéxé comme un prophète
pac tout le relie.
Ce n*était pas fans doute un ignorant , comme
quelques-uns l'ont prétendu. Il falait bien même qu'il
filït très favant pour fa nation & pour fpn tems ,
puifqu'on a de lui quelques aphorifmes de médeci-
ne , 6c qu'il réforma le calendrier des Arabes comme
Céfar celui des Romains. Il fe donne k la vérité 4e
titre de prophète non lettré ; mais on peut favoir
écrire & ne pas s'arroger le nom de fayant. Il était
poëte ; la plupart des derniers verfets de fes chapi-
tres font rimes ; le refte eft en profe cadencée. La
poëGe ne fervit pas peu à rendre fon Alcoran rcf-
Eeétable. Les Arabes faifaient un très grand cas de
i poéfie , & lors qu'il y avait un bon poëte dans une
tribu , les autres tribus envoyaient une ambalTade
de féUcitation à celle qui avait produit un auteur
qu'on regardait comme infpiré , & comme utile. On
affichait les meilleures poëfies dans le temple de la
Mecque ; & quand on y afHcha le fécond chapitre
de Mahomet , qui commence ainfi , // ne f^ut point
douter , c^ejl ici la fcience des jujies , de ceux qui
çroyent au» myjiires , qui prient quand il le faut ,
qui donnent avec ginirqjiti , &c. alors le premier poëte
de la Mecque , nommé Ahid , déchira fes propres
vers affichés au temple , admira Mohomet & fe rangea
fous fa loi. (a) Voilà des mœurs , des ufages , des
faits fi différens de tout ce qui fe pafTe parmi nous ,
qu'ils doivent nous montrer combien le tableau de l'u-
nivers eft varié , & combien nous devons être en
garde contre notre habitude de juger de tout par
nos ufages.
Les Arabes contemporains écrivirent la vie de Ma-^
homet dans le plus grand détail. Tout y reifent la
fimplîcité barbare des tems qu'on nomme héroïques.
( a } Life? le commencement du Kormi il eft fublime.
^
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MÉB
«Ml
«feh
em
::
e
. Son contrat de mariage aveclk pfuyiière femme CûâUié
, eft exprimé en ces mots : Aittnàu que Cadishé ^
,am^M4rn^e de Mahomet , & Mahomet fareUitmet^
,ampureux d'elle. On voit quels repas Qpprétaient ^s
femmes: qn^ipprend le nom de fes épées ,, & de les
chevaux. On peut remarquer fiirtout dans (on peuple
des mœurs conformes à ceUes de» anciens Hébtetm ,
(je ne parle ici que des mesurs) (a même ardeur à
courir au combat au nom de4a Siviaité « la même Jbif
du butin t Iç même partage des dépouilles: v & ibilt fe
rapportant à cet objet
Mats. en ne confidécailt idqiiè lec diafes humaines,
& en fin&nt toujours afaAràidU»n. des jogooiené Se
DiBU , &. de Tes votes îùconnués ^ ^urquoi Mnbbnièf
& fes fm^ddOEeMt^^ <i^i ootnmendèreht kUrs conquê-
tes préciCement comme les .Imfs 41 firent-^ib de fi graâ.
detoht)&fe, & les Juifs de. fi pfetttJèsl Ne feratt^e ^xiitit
.parce que les mufuhnans euréht it plus grand fein
de foumettre lés vaincvs à. lomr. rel^ion , tantôt ^r
la force , tantôt par la perfuaGon ? Les Hébreux ou
contraire n'aiFocièrent guères les étrangers à leur culte.
Les aufiilonns Acabes incorpoIréDeiU à eta4e!iau!tres
nations; les Hébreux s'en tinrisntitoâjoutsfépacés. Il
parait en&n que les Arabes eureiit ud.enioufiafitie
plus courageux , une politsqiieplosTgéiiéfeufe&pliis
hardie. Lepo^çHébi^ avaii en hoireilr leseiltrbs
notions, ^ oaigoait toujours d^étve «pffervi. Le peok
pie Arabe au contraire voidut attii et tout à lui , #1:
4k crut fait pour dominer.
Si ces IGnaélites reflemblaient aux Juifs par l'en-
.toufiafme ^ par la foif du piUage, ils étaient ^bdi-
gieufement ûipérieurs par le courage , par ta gran-
deur d'ame , par la magnanimité : leur hiftoire , xni
vraie ou fabulcule avant Mahomet^ cft remplie d'exerti*
Eles d'amitié tels que la Grèce en inventa dans les fa-
les: te 1NM&& ^Orefie, de Thifei & de Pirri^
tmi* L%ift9it9 des Bantydctdes iiVft qu'une fmte èo
r
I
<ttUW'
mfm
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f^
272 Des premiers successeurs
générofités inouies qui aèrent Tame. Ces traits ctrac*
térifent une nation. On ne voit au contraire dan9 ton-
tM les annales du peuple Hébreu aucune aftion gé«
néreufè. Us ne connaiflfent ni rhofpitalité>nilalîbé«
ralité , ni la clémence. Leur fouverain bonheur eft
d'exercer Tufitre avec les étrangers ; & cetefprit
• d*ofiire , principe de toute lâcheté , eft tellement en-
raciné dans leurs cœurs, que c'eft Pobjet continuel
des figures qu'ils employent dans refpèce d'éloquence
qui leur eft propre. Leur gloire eft de mettre à feu &
à fang les petits villages dont ils peuvent s'emparer. Ils
égorgent les vieillards & les en&ns ; ils ne réfenrent
Îne les filles nubiles ; ils aOaiCnent leurs maîtres quand
s font efclaves ; ils ne fiivent jamais pardonner quand
ils font vainqueurs; ils font les ennemis du genre-ho-
main. Nulle politefle, nulle fcience, nul art perfec-
tionné dans aucun tems chez cette nation atroce. JHaii
dès le fécond fiécle de l'égire , les Arabes deviennent
les précepteurs de l'Europe dans les fciences & dans
les arts , malgré leur loi qui femble l'ennemie des
arts.
La dernière volonté At Mahomet ne fut point exé-
cutée. Il avait nommé Aty fon gendre , époux de Fa-
$ime , pour l'héritier de fon empire. JVUis l'ambition,
qui l'emporte (br le fànatifme même , engagea les chefs
de fon armée à déclarer calife , c'efli^-dlrc vicaire du
prophète , le vieux Abubikn fon beau-père , dans l'ef-
^pérance qu'ils pouraient bientôt eux-mêmes partager la
fucccffion. Aly refta dans l'Arabie , attendant le teffls
de (e fignaler.
Cette divîfion fut la première fcmence du grand fchif-
me qui fépare aujourd'hui les fedatcurs A^Omar &
ceux &Aiy , les Sunni & {les Chias , les Turcs & les
Perlans modernes.
. Abitbéker raflcmbla d'abord en un corps les ftwl-
,Ies éparfcs de l'Alcoran. On lut » en préfence d«
^fSmsssm
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DB Mahomet. 273
tous les chefs , les chapitres de ce lirfc , écrits les
uns fur des feuilles de palmier , les autres fur du
parchemin , & on établit ainfi fon autenticitc inva-
riable. Le refped: fuperftitieux pour ce livre alla
jufqu'àfeperfuader que Toriginal avait été écrit dans le
ciel. Toute la queftion fut de favoir s'il avait été écrit
de toute éternité , ou feulement au tems de Maho-
met. Les plus dévots fe déclarèrent pour Téternité.
Bientôt Abubiker mena fes mufulmans en Paleftîne ,
& y défit le frère d*HéracIius. Il mourut peu après
avec la réputation du plus généreux de tous les hom-
mes ^ n'ayant jamais pris pour lui qu'environ quarante
fous de notre monnoie par jour de tout le butin
qu'on partageait , & ayant fait voir combien le mé-
pris des petits intérêts peut s'accorder avec l'ambi-
tion que les grands intérêts infpirent.
Mubiker pafle chez les Ofmanîis pour un ^rand-
homme & ^ur un mufulman fidèle. C'cft un des
faints del'Alcoran. Les Arabes rapportent fon teftament
conçu en ces termes: Au nom àeDiEU tris miJerU
cordieux , voici le teflament rf'Abubéker , fait dans le
tems qu*il eji prêt à pajfer de ce monde à t autre ,
Âans le tems où les infidèles croyent , où les impies cef-
fent de douter , &f où les menteurs difent la vérité.
Ce début femble être d'un homme perfuadé. Cepen-
dant Abubéker , beau-père de Mahomet , avait vu ce
prophète de bien près. Il faut qu'il ait été trompé
lui-même par le prophète, ou qu'il ait été le com-
plice d'une impofture illuftre qu'il regardait comme
néceffaire. Sa place lui ordonnait d'en împofer aux
hommes pendant fa vie & à fa mort.
^mar , élu zçths lui , fiït un des plus rapides con-
quérans qui ayent défolé la terre. Il prend d'abord
Damas , célèbre par la fertilité de fon territoire, par
les ouvrages d'acier les meilleurs de l'univers , par
ces étoffes de foie qui portent encore fon nom. Il
EJfaifur les mœurs , îic Tom. L S
%
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\
I
i
274 Des Premiers successeurs )'
chaffe de la Syrie & de la Phénicie les Grecs qu'on
appellait Romains. Il reçoit à compofirion , après un
long fiége , la ville de jéi'uralem , prefque toujours
occupée par des étrangers , qui fe fuccédèrent les
uns aux autres depuis qye David Teut enlevée à fes
ancîerts citoyens : 6e quî mérite^ la plus grande atten-
tion , c'eft qu'il laîffa aux Juifs & aux chrétiens ,
hàbicans de Jérufalem, une pleine liberté de conf-
cience.
Dans le même tems les lieutenatis^ éi'Omar s'avan-
çàient en Perfe* Le dernier des roîs Perfans, qae
nous appelions Hormifdas IV ^ livre bataille aux Ara-
bes à quelques lieues At Madain , devenue la capi-
tale de cet empire. Il petd h bataille & la vie. Les
Perfes paffent fous la doinînatîon d^Ontar plus faci-
lement qu'ils n'avaient fubi le joug d'Alexandre.
Alors tomba cette ancienne religion des mages ,
que le vainqueur de Darim avait refpeétée ; car il
ne toucha jamais au culte des peuples vaincus.
Les mages , adorateurs d*un feuî Dieu, ennemis
de tout fimulacK , révéraient dans le feu qui donne
la vie à la nature , l'emblème de la Divinité, lis re-
gardaient leur relig^n comme la plus ancienne &
la plus pure. La conm^iffance qu'ils avaient des ma-
thématiques , de l'aftrortomie & de rkiftoire, augmen-
tait leur mépris pour leWs vainqueurs alors îgnorans.
Ils ne purent abandonner une religion confacrée par
tant de fiécles pour une fede ennemie qui venait de
naître. La plupart fe retirèrent aux extrémités delà
Perfe & de PInde. Ceft là qu'ils vivedt aujourd'hui
fous le nom de Goures ou de Guèbres , de Parfis ,
daignicoles ^ nt îe mariant qu'entr'eux , entretenant
le feu facré , fidèles à ce qu'ils connaiflent de leur
ancien culte ; mais ignorans , méprifés ♦ & , à leur pau-
vreté près , femblables aux Juifs fi longtems difper-
fes fans s'allier aux autres nations , & plus encore
m&am^
=«r9CK^
-»^
^i
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ÉÉÉÉMÉiÉiiiÉMii
D £ M A ir 6 M e; t.
ii^xBa^iu» > gui cte fbot étaBUi 9c dtrpéifél <fOè
dans rinde , & en Perfe/ Il relia un grand nombre'
de familles Guèbres ou Ignicoles k Ifpahan , jufqja'aii
tèftis dt Sbà-^Abbai qui les banïift, comme Ifafielie
chaffa les Juifs d'Efpagnc. Ks né forene tolérés dans
lès ftuxbourgs de cette flllè qiic fôti^ fes fuccefr
fèurs. Lés tgnkoles mai^dîflent dô>uis longéét^s dansi
leurs prières Aitxandré & Mabàmet. Il tft à cf oifè
qu'ils y ont joint Sira^AbbaSi
Tandis qu'un lidutéfnààt d'C^ir fubjugaeia fefe,
un autre cnlète l'Egypte eriticfe aux Romains , &
une grande partie de la Lybîé, C'cft dans cette con-
quête qu'eft brûlée la femeufe bibliothèque d*Ale3fan^
drie, monument des connailfarrcès & des erreurs des
hommes , commencée paf^ Ptolaméè Philadelpbe^ &
augmentée par tant de rols. Alors îes Sarrazins ne
YOuhîent de fciétice que f Alcoran j maïs ils fâifaieDC
déjà voir que leur génie pourvoit' s'étendre à tout
L'éntreprîfe de renouveller en Egypte Tancien Canal
treùfé par ïés fois , & rétabli enuïite par Trajan , &
cte f^joindre ainfi le Nîî à te jaéi Rouge , eft dïgnc
AS fiéclcs les plus é<^airéfc XJû gouvérn^ïiir d*E^ypte
entreprend ce^î'and tiîavàîf fous le califat d'àmar i
& en vient à Botit. Queftc différence entré le génie
des Arabes, & cèfciî' des furcs" f Ceux-cî ont laiffe
périr un ouvrage dwit la Cbhfervatîon valait mîeux
que la conquête d'une grande province.
Les aitiatWrs Àé Panfifcjufté , cétrf qui & piaifeht S
comparer les génies^ d^s natfobsl , i^étront avec plaî-
ft combîen les moeurs , \ts iifàgésr db tcms de Mabd-
met ^ A^Abubiker , A* Omar reffertiblaîent aui moÈfurSr
antiques dont Homère a été lé peindre fidèle. On voit
tes chcfif dciter à un combat {ftipAiët !eis cfteè ttinef
mis ; on lesf voit y'aVancer ïiors déû ran^ ^ comtonc-
tre aux yeux de^ dèu* armées fpedbatficéfe imraobtlé|.
Ih s'kittttoi^ëni l'un l'autre , îls^ fe darlcrtt i i$ ^l
^ bran^mil V Û» înfdqitréSné D r»v ?ifsM d^çri veiA* îtu*
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[' 27* Des .FREMISRS SUCCESSEURS é
mains. On livra plùfienrs combats fingulicrs dans ce
genre , au iiége de Damas.
Il eft évident que les combats des Amazones dont
parlent Homire & Hérodote , ne font point fondés fur
des fables. Les femmes de la tribu à'Inùar « de TA-
rabie heureufe , étaient guerrières , & combattaient
dans les armées d'Abubeker & d*Oi^nar. On ne doit
pas croire qu^il y ait jamais eu un royaume des Ama-
zones , où les femmes vécufTent fans hommes. Mais
dans les tems & dans les pays où Ton menait une vie
agrelle & paftorale , il n'eft pas furprenant que des
femmes aufli durement élevées que les hommes ayent
quelquefois combattu comme eux. On voit furtout
au fiége de Damas une de ces fenunes de la tribu
à^Imiar , venger la mort de fon mari tué à fes côtés ,
& percer d'un coup de flèche le commandant de la
ville. Rien ne juftifie plus^ YArioJie & le TéiJJe y qui
dans leurs poëmes font combattre tant d'héroïnes.
il
L'hiftoire vous en préfentera plus d'une dans les
tems de la chevalerie. Ces ufages toujours très rares
paraifTent aujourd'hui incroyables , furcout depuis que
l'artillerie ne laifle plus agir la valeur , l'adrefTe , l'a-
gilité de chaque combattant , & où les armées font
devenues des efpèces de machines régulières qui fe
meuvent comme par des r efforts.
Les difcours des héros Arabes à la tête des armées,
ou dans les combats fmguliers , ou en jurant des tré*
yes , tiennent tous de ce naturel qu'on trouve dans
Homire i mais ils ont incomparablement plus d'entou-
fiafme & de fublime.
Vers l'an ii de l'égire , dans une bataille entre l'ar-
mée d'HéracIius & celle des Sarrazins , le général ma-
hométan nommé Dérar cft pris ; les Arabes en font
.épouvantés. Kofi un de leurs capitaines court à eux^
* Qu'importe , leur dit-iï , que Dérar foit fris ou fnort ?
SÊJÇiffiv ipi<l>»M» f^t9^^
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:g»J*' '^ ■* !^' ' ^**<»M!
î
DE Mahomet. 977
, ,. ^ -.- ^
DiBU efi vivant ff^vauî regarde , com&4^rii ; it km:
fait tourner tête & remporte la vidtoire.
Un autre s'ccrîe , Voilà le ciel , combattez pour
Dieu , %f il ^ns donnera la terre.
lifi général Kaled prend dai^s Damas la fille d'ifr-
radius , & )a renvoyé, fans rançon ; on lui demandtf
pourquoi il en ufe ainii ; C'eA, dit -il, que j'elpèr^
reprendra j^ientôt la fil(e ayec le père dans Çqnftan.
tinople* . ,., > ., .'(
Quand le calife Mohavici prêt d'expioier , Van 6a ip
régire , fit aiTurer à fon fils- YefudM trône des cal^
fes , qui jufqu'alors était éleétif , il dit , Grand DlBP:t
Ji j'ai établi mon fifs dans le califat^ parce que je fm
ai cru digne ^ je te prie d'affermir mon fils fur le tréne ^
mais Jt je n'ai agi que comme pire ^ je te prie de fen
précipiter.
Tout ce qifi arrive alors , caraâérife un peuple fupé-i
rieur. Les fuccès de ce peuple, conquérant femblent
dâs encor plus à Tentoufiafme qui l'anime , qu'à fes
«ondudteurs : car Omar eft aflaflinc par un cfclave
Feffe l'an $5) de notre ère. Otman fon fuccefl^ur
l'eft en 6«i% dans une émeute. Aly ce fameux gendre
de Mahomet n'eft élu , & ne gouverne qu'au milieu
des troubles. Il meurt aflaffine afi bout de cinq ant
comme fes prédéceiTeurs, & cependant les armes mu<s
fulmanes font toujours heureufes. Ce calife jffy , que
les Pesfans révèrent aujourd'hui , & dont ils fiïfvent
les principes en oppofition à ceux d' O/nar, avait tranf.^
ïéré le fiége des califes de la ville de Médina > où Jtfa^^
bomet e(l enfeyeli , dans la ville de Confia , fur les»
bords de PEuphrate : à peine en refte-t-il aujourd'hui
ides ruines. C'eft le fort de Babilone , de Sélcucie ,
& de toutes les anciennes villes de U Caldée , qu4
i^'étaioi;. bàtiçs que dç briques. ^»
s iii 3
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ivl) q^^iftefi^ q<ie 1^. fcmt iu peuple v&csdbe jxm ^s
mouvement netf ^fi^on^^,^ ^<»l|t d« Ivi^méo^j^^lV
jdant prè^ de trois fiécles \ & reflembla en cela
^^^ séjuC' d^ ^ncien^ Romains. Ç'eft çn efFet finis
yalm^\^ moins gi^erri^r dçs calUes^ que fe ^ônt les
plus grandes conquêtes. Un de fes généraux étend
fpn .çmpjrf jijfqq'à ^^marl^aijde en J707. l^n çiuçrc atça-
qbê ^nf même * tems Ténipirc dès -Grecs^vers h. mer
!ît)îlre: Un iàutrç tri *^liJ^^^t d'Çgypte" en fifpagne,
Ibwimfd aîfément tour- a -tour par les* QlrtkàgHiôis ,
parties llomains y parler Goths & Vandales ^'& enfin
par cçs Arabes qu^on honime Maures, Us y établi*
rent d'abord le royaume de Cordoue, Le fultan d'E-
£vpté ifecbue i la vérité le joug âa g^and* daltfè de
Bàgdsrt: , & Àêdérame gouverneur de TSlpagne con-
^uîfetief^ortnaît plus le fultan d*Bgypte : cepeadfnt
ftout plie encor fous Içs arn^ mu&lmanes.
' Gt% Aùdirame y ^ttit'fiU du cdlïh. Hèsham y preni
Ips royaumes de Caftille , de Navarre , de Portugal ,
fi'Arragon. Il s'établit en Languedoc ; il s'empare de
l4Çuiônne,& du è6itôu;& fins Cbartef Murtei qui
lui èèa là yi^oire &^ h vie , la ^nce était uàeprot
fincc nïahqmëtanei r . ..
hr-' .. -.. ■■]'.■ _ ' ■
Après le règne de dîK -ntuf oaHfes di& la maîfon
des (h^miudes , commence h dynaftie des caUfes Abat
Mi^s yetnVm 7^a de notre ère, Abmgia^ Aiman-
^(fy, ftcond calife Abafflàè , fixa le-fiége de '6é g^and
f mpir<r à Bagdat au -dâtt 4e I'«uphrat0 èaLfi% la Caf^
déei Les Tutç« dîfoni éu'îl en jettai leô fondemens.
|Le8 Bék"fefts affurcnt qu*elle ëtaie très ancienne, ^
qVîhh^ fit que la réjîâfrér. C'eft cette ville qu'on apr.
peUe quelquefois B^bJlofne , k qui a été le fii|et ^i
pnàf^ ^tm ^titre'k Perfe ^ la Tui^quif
r ta' domination dés çàïifts dura flx cent eTn^^nte*
éhiq raasVdefpotfqùçs iiàtî.s' Ja reK^on v.dfthftiê Sans
je couyernçm|nî ^ il|- tf ÔtafetaÉ- poîtff aî^iêsf #fi q«^
(nte* I
Sans 1
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r
tfMttMite
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DlMAHOMBTk . Vff
1
le grand LaÉM , mais ifs avakiit unb ttttorité j^os
réeUe ; & dans* ie» tems aéme de leur décadence p
ils furent refpeâés des princes ^ui les perfi^utront;:
Tous ces foltans Turcs > Arabes , Tartares » re<{tirciit
Finveftitttre des califes , avec tden moins de contefu
tation , que plufieurs princes cbrédens ne ïom reqw
des papes. On né baifaic point let piedt du calife ,mai9
on fe proflernait fur le fesil de Ibn palais.
Si jamair pufflance a menacé toute la terre , c^efl!
celle de ces califes ; ear ils avaient le droit du trÂnte^
6c de l'autel , du glaive & de rentoufiafme. Leurs or-
dres étaient autant d'oracles , ft leurs foldats autant
de fanatiques.
Dès Tan ^71 ils afltégèrent Conftantino^le , qui
devait un jour devenir mahométane ; les diviiions ^
g ^efque inévitables parmi tant de dtefs audacieux^
I ^ n'arrêtèrent pas leurs conquêtes. Bs reflemblèrent en-
ce point auK anciens Romains, qui parmi leurs gufeiw.
res civiles avaient fubjugué PAfie mineure.
A mefure que les mahométans devinrent puii&ns ^
ils fe polirent Ces califes , toujours reconnus pour
fouverains de là religion »& en apparence de rcmpîire >
par ceux qui ne reçoivent plus leurs ordres de fi loin ^'
tranquilles dans leur nouvelle Babitone , y fbnt biaw
tôt renaître les arts. Aaron ai Racbild , contemporain
de Qbmriemapte , plus refôeâé i)ûâ fôs prédéceŒnils ,
& qui fat fe'feire obéïr jufqâ'en Èij^jtne & anx Iftdee ;
ranima les fciencet , fie fleurir les arti agréaUesi A
utiles , attira les geni de lettres^ cdmpolk des vsrr^
& fit fuooéder dans fés vaftoi ctatë là politeflerà^kr
barbarie. Sow lui ks Anbes^» qtii adoptaient d^a Je^
ohiSres'iiidiena ^ les f^^t^oftèfene en Eii^pe. Nous nr
comiQnlet en AUentàgnt & ta France Ir couia desi
y I a^es « quo parle m&yM de ces niéniies Arab'es; Lt> i
« naar feiU d^^hMusri' w^ eft eonte utk témoignage. a
& S iiij J|
^:
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i
5^ Des premiers successeurs
. L'abnàfefte de Ptoiomét fat alors tcadoit du grec
çn arabe par raftronome Ben^HoTiàin: Le calife AU
mention fiti mefarer géométriquement un degré du
méridien , pour déterminer la grandeur de la' terre :
opération qui n'a été faite en France que plus de neuf
eentans après fous Louir XI F. Ce même aftrono-
mQ.iieà^'ffonam pppfla fes obfcrvations affez loin,
reconnut ou que Piolomée avait fité la plus grande
déclinai Ton du foleil trop au feptentrion , ou que To-
blit^ijiité de l'écliptique avait changé. Il vit même que
la péjriodç die trente -fix mille ans qu'oq ^vait affi-
gnçe ay niQpvetnent prétendu de? étoiles fixes d'oct-
^entpn priant ^ deyaiç être beaucoup racçoiirciç,
Li chymie & la médecine étaient cultivées par les
Arabes. La chymie , perféfttonnée aujourd'hui par
nous , ne nous fut connue que par eux. Nous leur
devons de nouveaux remèdes , qu'on nomme les mi^
notàtifï , plus doux Se plus falutaires que ceux qui
étaient auparavant en ufage dans Fécole d'Hippocrate
Se de Galien. L'algèbre fut une de leurs inventions.
pe terme le montre encor affez ; foit qu'il dérive du
mot AlgLilhirixt. , foit plutôt qu'il porte Ip npn> du
fil?içiiK Arabe Geber. qqi jenfeîgnait cet art danç notre
huitième ilscle. Enfin , dès le fécond fiécle de 4/^a-
Bùmet ^ il falut que les chrétiens d'pçcjdent; s'inftriii^
ijjtçnt chez le§ n^iffvfln^an^/
n*- , ■ ■ . •
r/XJne preuve infaillible. de la fupériorité d'une nation
çlaws les arts de Teffrît, c'eft la culture perfeïftîonnée
dé la pocfie. Je ne parle pas de cette poëfie enflée
^Ifigatitefque , de-«'>ramas de licpx commqns infi-
pidés for le fpîcil , là^e Scies étoiles, les monta»
gnès. iS: les mers :> maisj de ^ette- poëûe fage & hardie ,
telle qu-el|lé fleurit du tems ^^Augujie ^ telle qu'on
l?a vu renaître fous Louis JÇ/F. Cette poëfie d'image
& de %itiment fut canmfcè du tcmsd'-^^aro» a/ Ra-.
fM^, ^h voici entr'autffcs exemples ua qui m'a fra^:
igKi *■■"■'. .!* !'g=î9W*PiWiP!Wg
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D & M AH O M £ T. ait H
- - - ■ - - - --
pé „ & que je rapporte îcî parce qu'il eft court. II
s'agic de la célèbre difgrace de Giafar le Barmécide.
Mortel , faible mortel , à qui le fort profpire
Fait goûter de fes dons les charmes dangereux ,
Connai quelle eft des rois la faveur paflàgère ,
Contemple Bam^icide^ & tremble d*étre beurenx.
Ce dernier vers furtout eft traduit mot à mot. Rien
ne me paraît plus beau que tremble àHtre heureux.
La langue arabe avait l'avantage d'être perfectionnée
depuis longtems ; elle était fixée avant Mahomet , &
ne s'eft point altérée depuis. Aucun des jargons qu'on,
parlait alors en Europe , n'a pas feulement laifle la
moindre trace. De quelque c6té que nous nous tour-
ni©ns , il faut avouer que nous n'cxiftons que-d'hicr.
Nous allons plus loin que les autres peuples en plus
d'un genre; & c'eft peut -être parce que nous fom-
mes venus les derniers.
1
CHAPITRE SEPTIEME.
Be tAlcoran Ç«f de la loi mufulmane. Examen Ji la reli^
gion mufulmane était la nouvelle , ^ Ji elle a iti
ferficutantç,
LE précédent chapitre a pu nous donner quelque
conn^iflance des moeurs de Mahomet & de fes
Arabes , par qui une grande partie de la terre éprouva
une révolution figrande & fi prompte. Il faut tracer
à préfent une peinture fidelle de leur religion. .
C'eft un préjugé répandu parmi nous, que le ma-
hométifme n'a fait de Ç\ grands progrès que parce qu'il
favorife les inclinations voluptueufes'. On ne fait pas
reflexion que toutes les anciennes religions de l'O-
rient ont admUla pluralité des femmes. Mahomet ré-'
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S %92 D f j}A L CORAN,
cfmik à quatre le nombre illimité jnfqu'alors. Il eft
die que JDavid avait dix -huit femmes , & Salonrn
trois cent avec fept cent concubines. Ces rois bu<
raient du vin avec leurs compagnes. C*était donc la
religion juive qui était voluptueule , & celle de JI/a-
iomet était févère,
Ceft un grand problème parmi les politiques , fi
la polygamie eft utile k la fodété & à la propagadon.
yOrient a décidé cette queftion dans tous les fiécles,
êk la sature eft d'accord avec les peuples orienuux»
dans prefque toute efpéce animale, chez qui plufieurs
fèmeUef n'ont qu'un mâle. Le tems perdu par les
groflefles, par les couches , par les incommodités no*
tsrdks auT femmes , femble exiger que ce tems foit ré-
Cé. Les femmes dans 1er climats chauds ceffent 4e
me heure d'être belles & fécondes. Un chef defàmii-
le, qui met fa gloire & fa profpérité dans un grand nom-
bred'enfiins , a befoin d'une femme qui remplace une
époufe inutile. Les loix de l'Occident femblent plos fa-
vorables aux femmes , celles de l'Orient aux hommes*
àrétat ; il n'eft point d'objet de légîflation qui ne poifTe
être un fujet de dispute. Ce n'eft pas loi la place
d'une difTertation ; notre objet eft de peindre les nom*
mes plutôt que de les juger.
On déclame tous les jours contre le paradis fenfoet
de Mahomet f mais l'antiquité n'en avait jamais condu
dtetre. Hmmie éprafa Hebè cbmt' le; ciel , peur re«
ceraptufe de» ptàties qu'il avait éprouvées (br la terre.
Les héros buvaient le neékar aveo les Dieux ; & P^
que l'homme était fuppofé roCTufcitei areo tbs fens i
il était naturel de fuppofer àufS quHI gpàterait , io«
dans un jardin , foit dans quelque autre globe , les
pjaifirs propres aux fi^s qui doivent jouïr, puif^u»^.
ffbfiftenfe, Celte créance même fat celle des pères.
d^ l'églif» du feçot)d & d« ^oiGéme fté<4e. Ceft œ^
qii*aftefte précifément S^. Jn/ik^' daw la feoond« Vf:
* ti%i^Ç^ diUoguw : Jmffalm v ^H'Jm. atc(mm
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ET PI I.A LOI HUSULiaiNï. }$$ K
9 ênpbeJIii , ^Jir tccepoir kfjaâar , fui jotàrouf fntm
dont mlU ont di tous Ut fla^firs des f$ns^
Ccot auteurs qoi en ont copié un , ont écrit qu0
G^était un moine neflorien qui ayak com|iofé FAlco*
K^a. Les uns ont nommé ce moine Sergius , les au^
très Bobeira. Mais H eft^ évident que les chapitres de
fAlconm furent écrits^ fuivant roccurrence, dans les
foyages d^ Jftémnet , & dans fes expéditions miU«
taires, Avait -il toujours ce moine avec lui ? On g
cru encor fur un paflage équivoque de ce livre , que
jitaiQi^çt a^ f^vait ni lire vi ecnrp.. Comment un
Ijoncjme qui syait fait le comiîierc© vjngt années , un
po^^, un npkéd^cin, pn légiflateur aurait - il ignorç
« 9?« les jj^qipdfçs enfons (le fa tyibu apprenaient ?
|> Kor/nn , Q.UÇ je nomme ici 4koran , pour me B
çpnforincr à lio^e vicieux ufige /veut dire, k livr^ A
9» la ie^mf'^^Çe n'çll poinÉ^i|n I^vré^hiftarique jlanç. ■
lequel on ait'^voulu imiter les livres des' Hébreux,^ K
i^os évangiles ; ce n'eft pas non plus un livre pure- '
mçnt de Joix conxjpe le ï<,évi;tique qu le Çeuteropo-
içç , ni un reçpp,^ çlç pfaqme? & dp cantiques , ni unç
vîfwn prQphétigu^ & ^Uçgodque d^n$ le goût de. l'A-r
pocalypfe. C'eft ur^ tpêlangç de tpus ces divers geivr
\ les , un aflçm|?îage de fermons daqs lefquels on trouva
i quelques faits lii^oriqucç , quelques yi(ions , des révé«
laçiqns , dçs loix religîepfes § civiles,
^ Le Koran eft devenu le code de la juriforudeace i
ainfi qye la loi canonique , chez toutes fes nations
mahométanes. Tous les interprètes de ce livre con-
tiennent que fé morate eft contenue dans ces paroles :
Re^berçffez qui vous chuffe ,• donnez à qui vota ote ,•
par dormez à qui vous offeHfe ,• fiùtes du bien à tous ,• ne
ç^niefltz ppint avec les i^orans^
n a^it dà b^n plutôt re^ommajoder de ne poi»l
difpi^tçr avec les fays^ns ; mais dans cette partie du
vx I I
^
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1
284 D B l'A l c o it a k,
monde on ne fe dootaît pas qu'il y eât ailleurs de
la fcience & des lumières,
Parmi les déclamations incohérentes dont ce livre
eft rempli félon le goût orienul , an ne laifle pas de
trouver des morceaux qui peuvent paraître fublimes.
Mahomet , par exemple , parlant de la ceifation da
déluge, s'exprime ainfi : Dieu dit ^ Terre ^ englotfti
tes eaux : Ciel , puife les ondes que tu as verfies : le ciel
6f la terre obéirent.
Sa définition de D 1 1 u eft d'un genre plus vérita-
blement fublimc. On lui demandait quel était cet Alla
qu'il annonçait; Cejl celui ^ répondit -il 9 ^ ^l^
titre defoi-nUme ♦ g^ de qui les autres le tiennent^ qtd
n* engendre point & qui n^efi point engendré , & aqui
rien n'eji femblable dans toute t étendue des êtres. Cette
fameufe réponfe confacrée dans tout l'Orient, fe trouve
prefque mot à mot dans Tantépénultiéme chapitre dq
Koran.
H çft vrai que les contradidions , les abfurdités,
les anachronifmes font répandus en foule dans ce livre.
On y voit furtout tinc ignorance profonde de la phy-
fiquc la plus fimple & la plus connue. C*eft-là la pierrede
touche des livres que les faufles religions prétendent
écrits par la Divinité ; car Dieu n'eft ni abfurdc , ni
ignorant; mais le peuple qui ne voit pas ces fautes,
les adore ; & les imans employent un déluge de pato-
les pour les pallier.
: Les commçntatoj^rs du Koran diftinguent toùjour*
le fens pofitif & l'allégorique, la lettre & Tcfprit. On
reconnaît le génie arabe dans les commentaires com-
me dans le texte ; un des plus autorifés commeata-
teurs dît , que le Koran porte tantôt une face d'bonh
nte , tantôt une' face de bête , pour figriifier rcfprît »
la lettre. .
^^psBs^BsaismagsiffiggggSi^
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lïf»^ ■ "«napi^i '^^li^
f E X D B L A L.OI Mtf.SVLMâKE. ^f
Une chofe qui peut furprendre bien des leâeurs ,
c*eft qu'il n'y eut rien de nouveau dans la loi de J/a.
bomef , linon que Mahomet était prophète de DlfiU^
En premier lieu « l'unité d'un Etre fupréme créa-
teur & confervateur était très ancienne. Les peines
& les récompenfes dans une ^utre vie , la croyance
d'un paradis & d'un enfer avaient été admifes chez
les Chinois , les Indiens , les Perfes ^ les Egyptiens ,
les Grecs , les Romains , & enfuite chez les Juift , &
furtout chez les chrétiens , dont la religion con&cra
cette doétrine.
L'Alcoran reconnaît des anges & des génies; & cette
créance vient des anciens Perfes. Celle d'une réfur-
redion & -d'un jugement dernier, était vifiblement
puifée dans le Talmud & dans le chriftianifme. Lt%
mille ans que Di£U employera , félon Mahomet , à
juger les hommes ^ & la manière dont il y procé-
dera ) font des acceflbires qui n'empêchent pas que cette
idée ne foit entièrement empruntée.' Le pont aigu
fur lequel les reffufcités palTeront , & du haut dUf-
quel les réprouvés tomberont en enfer , eft tiré de
ûdoârine allégorique des mages.
C'eft chez ces mêmes mages , t'eft dans leur Jan-
nat que Mahomet a pris l'idée d'un paradis , d'un
jardin , où les hommes revivans avec tous leurs fens
perfeAionnés , goûteront par ces fens mêmes toutes
les voluptés qui leur font propres , fans quoi ces
fens leur feraient inutiles. C'eft là qu'il a puifé l'i-
dée de fes Hourzs , de ces femmes céleftes qui fe-
ront le partage des élus , & que les mages appel-
laîent Hourani , comme on le voit dans le Sadder.
Il n'exclut point les femmes de fon paradis /comme
oh le dit fouvent parmi nous. Ce n'eft qu'une rail-
lerie fans fondement , telle que tous les peuples en
font les uns des autres. Il promet des jardins , c^eft
le nom du paradis ; mais- il promet pour fouveraine
ï^as^i^
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im?iw I mÊÊmÊÊmmOÊÊmï r n [Il ' • I- mn^
i^S D f ft' A £ C O R A H »
ptimt.
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te dogme de la lirédeftitiaddn abfolué & dé la
fkt^hté qui femble aujourd'hui oafaâéfifer le th^o-
tûéMati étak f opinion de toute l'antiquité ; eHeh*eft
JKTS moins claire dani Fltiaéte que dan^ fAIcoran.
A l*cgard de^ ordonnadôei légales ,» comme U âti
efoncifion , les ablutions , Us prières , le pèlerinage de
k Mecque , Mahomet ne fit qtie fe cfonfornlcr pon^
le fonds aux ufages requs* La circoncifion était prati-
quée de tems immémorial che^ les Arabes , chez les
tttcîens Égyptiens, chez les peuples de la Colchide ,
ft che2 les Hcbreux; Les alaiftitlon» futent toujours
recommandées daiïti TOrient cùmme un fymbole dé
la pureté de l'amer ^
Point dé religion fans pr ièi'es : la loi que Mab&i
met porta de prier cinq fois pat jour , était gênan-
te; & cc^te gêne même fut refpedteHe. Qui aurait
ofé fc plaindre que la créature foit obligée d'adorct
cinq fois pat jour fôn créateur ?
Qjiant ati pélériiiage de la Mecque ^ aux cérémomes
pratiquées dans le Kaa&a^ ât fur la piefre noire , peu
de perfonnes ignorent que cettie dévotion étanhi chère
9ui^ Arabes depuis un grand nombre de ftécles. Le
KMtèa paiTaic pour le plus ancien temple du mon-
de ; & quoiqu'on y vénérât alors trois 6ent Idoles «
il était principalement fandifié par la pierre noire ,
c^'on dîfeît être U tombeau ôfîfmaifL Loin d'abolit
ce pâérinage , Mahomet pour ft concilier les Arï-
tMfid , en fit un précepte pofttlf;
Le ieûne était établi chez: pinceurs petiples ^ |$a^
tabcidieccment chcz^ les Juîfr & chez les chrétfens.
Mahomet le rendit très févère , en l'étendant k un
mois lunaise,pcadaat lequd il n^cft pas permis df
Kffl^t,yin ^^^^»^^p^a^i|i^^^^>^» ' '^Hifti
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Iddm,
'* ^iTir ""
ET DE LA LOI MUSULMANE. ^%^
boire un verre d*eau , ni de fumer avant le coucher
du foleil ; & ce mois lunaîte arrivant fouvent au
plus fort de Tété , le jeûne devint par - là d*une fi
grande rigueur , qu'on a été obligé d*y apporter des
adouciflemens , furtout à la guerre.
H n'y a p©înt de religion dans laquelle on n'ait
recommandé l'aumône. La mahométane eft la feule
qui en ait fait un précepte légal , pofitif , indifpen-
fable. L'Alcoran ordonne de (lonner deux & demi
pour cent de fon revenu , foit en argent , foit en
denrées.
Dans toutes ces ordonnances pofitîvcs, vous ne trou-
vez rien qui ne foit confacré par les ufages les plus
antiques. Parmi les préceptes négatifs , c*eft-à- dire ,
cêljx qui ordonnent de s'abftenir , vous ne trouve-
rez que la défenfe générale à toute une nation
de boire du vin , qui foit nouvelle & particulière
au mahométifme. Cette abflinence dont les muful-
mans fe plaignent & fe difpenfent fouvent dans les
climats froids , fut ordonnée dans un climat brûlant ,
où le vin altérait trop aifément la lànté & la raifon.
Mais d'ailleurs , il n'était pas nouveau que des hom-
mes voués au fervice de la Divinité , le fuflent abf-
tenus de cette liqueur. Plufieurs collèges de prêtres
en Egypte , en Syrie , aux Indes , les nazaréens , les
récabites chez les Juifs s'étaient impofé cette mor-
tification, (a)
Elle ne fut point révoltante pour les Arabes : Mab^-
met ne prévoyait pas qu'elle deviendrait un jour prêt
que infupportable à fes mufulmans dans la Thrace ,
la Macédoine , la Bofnic- & la Servie. 11 ne favait
^as que les Arabes viendraient un jour jufqu'au mi-
( a ) Voyez dans les Qutftions fur P Encyclopédie l«s articles
Arot & MaroU
ifma^
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■» >fM^»5)St
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■■^lAt
288 De l'Alcqran,
lieu de la France , & les Turcs mahométàns devant
les baillons de Vienne.
Il en eft de même de la défenfe de manger du porc,
du fang & des bétes mortes de maladies ; ce font
des préceptes de fanté : le porc furtout eft une nour-
riture très dancereufe dans ces climats , aufli-bicn
que dans la Paleftine , qui en eft voifme. Quand le
mahométifme s'eft étendu dans les pays plus froids,
Tabftinence a ceffé d'être raifonnable , & n*a pasceBe
de fubfifter.
La prohibition de tous les jeux de hazard eft peut.
être la feule loi dont on ne puifle trouver d'exem-
ple dans aucune religion. Elle reflemble à une loi
de couvent plutôt qu'à une loi générale d'une nation.
Il femble que Mahomet n'ait formé un peuple qoe
pour prier , pour peupler , & pour combattre.
Toutes ces loix , qui à la polygamie près , font
fi auftères , & fa dodtrine qui eft fi fimple , attirèrent
bientôt à fa religion le refped: & la confiance. Le
dogme furtout de l'unité d'un Dieu , préfenté fans
myftère , & proportionne à l'intelligence humaine,
rangea fous fa loi une foule de nations; &jufqu'àdes
nègres dans l'Afrique , & à des infulaires dans fOcéan
indien.
Cette religion s'appella r/j/^miw , c'eft-à-dire,
réfignation à la volonté de Dieu ; & cefeulmotde-
^it faire beaucoup de profélytes. Ce ne fut point
par les armes que Vhlamim s'établit dans plus de la
moitié de notre hémifphère , ce fut par l'entoufiat
me , par la perfuafion , & furtout par l'exemple des
vainqueurs , qui a tant de force fur les vaincus. Maho-
met dans fes premiers combats en Arabie contre les
ennemis de fon impofture , faifait tuer fans miféri-
corde fes compatriotes rénîtens. 11 n'était pas alors
affez puifTant pour iaifler vivre ceux qui pouvaient
détniire
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l^Ç*^^^
=«*«»5fH
ET DE LA LOI MUSULMANE. 2g9
l
détruire fa religion naiflante. Mais fi. tôt qu'elle fut
affermie dans l'Arabie par la prédication & par le fer ,
les Arabes franchiffant les limices de leur pays dont
ils n'étaient point fortis jufqu'alors , ne forcèrent ja-.
mais les étrangers à recevoir la religion mufulmane.
Ils donnèrent toujours le choix aux peuples fubju-
gués d'être mufulmans , ou de payer tribut. Ils vou^
latent pilier , dominer , faire des efciaves , mais non
pas obliger ces efciaves à croire. Q^and ils furent
enfuite dépoifedés de l'Afie par les Turcs & par les
Tartares , ils firent des profélytes de leurs vainqueurs
mêmes ; & des hordes de Tartares devinrent un grand
peuple mufulman. Bar-là on voit en effet qu'ils ont
converti plus de monde qu'ils n'en ont fubjugué.
Le peu que je viens de dire , dément bien tout
ce que nos hiiloriens , nos déclamateurs & nos pré*
jugés nous difent î mais la vérité doit les combattret
Bornons-nous toujours à çé&c vérité hiftorîque ; le
légillateur des mufulmans , homme puiffant & terri-
ble , établit fes dogmes par fon courage & par fes
armes ; cependant , fa religion devint indulgente &
tolérance. L'iftftituteur divin du chriflianifme vivant
dans l'humilité & dans la paix , prêcha le pardon des
outrages ; & fa fainte & douce religion eft devenue
par nos fureurs la plus intolérante de toutes.
Les mahométans ont eu comme nous des fe^es ^^
des difputes fcholaftiques ; il n'eil pas vrai qu'il y ait
foixante & treize fedtes chez eux , c'eft une de leurs
rêveries. Ils ont prétendu que les mage^ çn avaient
foixante & dix , les Juifs foixante & onze , les chré-
tiens foixante & douze , & que les qiyfulmans , comme
plus parfaits , devaient en avoir foixante & treize.
Etrange perfection , & bien digne des fchplaftiques
de tous les pays !
Les diverfes explications de PAlcoran formèrent
chez eux les feétes qu'ils nommèrent orthodoxes « &
Effaifur les mœurs , ^c. Tom. L T
Win
!■
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I
290 De l' a l c o r a n , &;c«
celles qu'ils nommèrent hérétiques. Les o];thodoxe8
font les fonnites , c'efi-à-dire les traditioniftes , doc-
teurs attachés à la tradition la plus ancienne , laquelle
fert de fupplément à TAlcoran. Ils font divifés en qua-
tre fe<fte$ , dont Tune domine aujourd'hui à Confian-
(Inople , une autre en Afrique 9 une troifîéme en Ara-
bie , & une quatrième en Tartarie & aux Indes ; elles
font regardées comme également utiles pour le ùkl
Les hérétiques font ceux qui nient la prédeftinatiqn
abfolue , ou qui différent des fonnites fur quelques
points de l'école. Le mahométifine a eu fes pélagiens,
fes fcotiftes , fes thomiftes, fes moliniftes , fes jad&
niftes. Toutes ces fedes n'ont pas produit plus de
révolutions que parmi nous. Il faut pour qu'une fede
fafle naître de grands troubles , qu'elle attaque les
fondemens de la fede dominante , qu'elle la traite
d'impie , d'ennemie de Dieu & des hommes , qu'elle
ait un étendart que les efprits les plus greffiers puif-
fcnt appercevoir fans peine , & fous lequel les peu*
pies puiffent aifément fe rallier. Telle a été la fede
â'Jiy , rivale de la fede d'Omar ; mais ce n'eft que
vers le feiziéme fiécle que ce grand fdiifme s'eft éta-
bli ; & la politique y a eu beaucoup plus de part que
la religion.
CHAPITRE HUITIÈME.
De ritalie 6f de rigîife , avant ChARLEMAGNB.
Comment le cbrijiianifme s* était établi. Examen fil
a Souffert autant de ferfécutions qtion le dit.
Rien n'eft plus digne de notre curîofitc que la ma-
nière dont DiEU voulut que l'églife s'établit , en
faifant concourir les caufes fécondes à fes décrets éter-
nels- Laiflbfts xefpeâueufement ce qui eft divin à cens
Il mm\ ml -nttSil
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iQ«Mlfai
291 I !
Vu l'Italie et de l^libu , &c. 291
qxA «a (ont les dép^fkMxou , & tttaehoni-noMs uni*
quemene à rhiftoriquc. Des cBfcipIfS de J^oif s'éta*
blKTçnt d'abord dans Tirabie VQifine de Jéroffalem |
tnaif le9 difdples du Christ s'étendent partout Les
pbilofophes platonîciciis d'Alexandrie , où il y arait
tant d« Juifs > fe joignent aux premiers chrétiens ,
qui empruntent des expreflTions de leur philofophie ,
comiae celle du LogQf , fans emprunter toutes leurs
idées. U y arait déjà quelques chrétiens à Rome du
tems de Néron : on les confondait avec les Juifs ,
parce qu'ils étaient leurs compatriotes , parlant la mé»
me langue , s'abftenant comme eux des alimens dé»
fendus par la loi mofaïque. Piuûeurs même éuieot
circoncis , & obCervaient le labbat. Us étaient encor
fi obfcurs , que ni l'hlilorlen Jofepb , ni Philon n'en
parlent dans aucun de leurs écrits. Cependant on
voit évidemment que ces demi-juifs , demi-chrétiens
étaient dés le commencement partagés en pluGeurs
feâes , ébioniics , marcionites , oarpoor^tiens , valen*
tiniens , caïnites. Ceux d'Alexandrie étaient fort diiFé»
rcns de ceux de Syrie , les Syriens différaient des
Achaïens. Chaque parti avait Ton évangile, & les véri*
tables Juifs étaient les ennemis irréconciliables de tous
ces partis.
Ces Jxiïk également rigides & fripons étalent encor
dans Rome au nombre de quatre mille. U y en avait
eu huit mille du tems A'^ugujie / mais Tibère en (t
pafler la moitié en Sardaigne pour peupler cette ifle,
& pour délivrer Rome d'un trop grand nombre d'u-
furiers. Loin de les gêner dans leur culte .on les laif-
fait jouïr de la tolérance ou'on prodigu)Mt dans Ro-
me à toutes les religions. On leur permettait des fy-
nagogues & des juges de leur nation , comme ils en
ont aujourd'hui dans Rome chrétienne , où ils font
en plus grand nombre. On les regardait du même
œil que nous voyons les nègres , comme une efpèce
d'hommes inférieure. Ceux qui dans les colonies jui**
ves n'avaient pas allez de talent pour s'appliquer à
L ' T ij
^^iêtm
mmSm
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292 Christianisme naissant, f
quelque métier utile , & qui ne pouvaient coupef du
cuir & faire des fandales , faifaient des fables. Ils
favaient les noms des anges , de ia féconde femme
A' Adam , & de fon précepteur , & ils vendaient aux
. dames Romaines des philtres pour fe faire aimer. Leur
haine pour les chrétiens , ou gaUléens , ou naza«
réens , comme on les nommait alors , tenait de cette
rage dont tous les fuperftitieux font animés contre
tous ceux qui fe féparent de leur communion. Ils
accufèrent les Juifs chrétiens de l'incendie qui con-
fuma une partie de Rome fous Néron, Il était aufli
injufte d'imputer cet accident aux chrétiens qu'à l'em-
pereur. Ni lui , ni les chrétiens , ni les Juifs n'a-
vaient aucun intérêt à brûler Rome : mais il falait
appaifer le peuple qui fe foulevait contre des étran-
gers également haïs des Romains & des Juifis. On
abandonna quelques infortunés à la vengeance publi-
que. Il femble qu'on n'aurait pas dû compter parmi
les perfécutions faites à leur foi , cette violence paf-
fagère ; elle n'avait rien de commun avec leur reli-
gion qu'on ne connai0ait pas , & que les Romains
confondaient avec le judaïfme protégé par les loii
autant que méprifé.
i
i
S'il eft vrai qu'on ait trouvé en Efpagne des inf-
criptions où 2^éron eft remercié (V avoir aboli dans
la province une fuperjlition nouvelle , l'antiquité de
ces mbnumens eft plus que fufpedte. S'ils font au-
tentiqucs , le chrîftianifme n'y eft pas défigné : & fi
enfin ces monumcns outrageans regardent les chré-
tiens , à qui peut-on les attribuer qu'aux Juifs jaloux
établis en Efpagne , qui abhorraient le chrifiianifme
comme un ennemi né dans leur fein ?
Nous nous garderons bien de vouloir percer l'obf-
curité impénétrable qui couvre le berceau de l'églife
naiflante , & que l'érudition même a quelquefois re-
jdoublée.
iIffiJKi* we^i^m)^^
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^J^fte^iia
^alBgas^
«^^«
%
Point de papbs. 293
.Mais ce qui eft très certain , c'eft qu'il n'y a que
l'ignorance , le fenatifme , Pefclavage des écrivains
copiftes d'un premier impofteur , qui ayent pu comp-
Hr parmi les papes , l'apôtre Pierre , Lin , Clet , &
d'autres dans le premier fiécle.
Il n'y eut aucune hiérarchie pendant près de cent
ans parmi les chrétiens. Leurs aflemblées jçcrettes
fe gouvernaient comme celles des primitifs ou qua-
kers d'aujourd'hui. Ils obfervaient a la lettre le pré-^
cepte de leur maitre , les princes des nations dominent -^.^i
il n'en fera pas ainfi entre vous : quiconque voudra être
le premier fera le dernier^ Ln hiérarchie ne put fe former
que quand la fociété devint nombreufe , & ce ne fut
que fous Trajan qu'il y eut des furveillans epifcopoi,
que nous avons traduit par le mot à^évèque , des
presbiteroi , des pijioi , des énergumènes , des caté-
chumènes. Il n'eft (^ueilion du tejme pape dans au-
cun des auteurs des premiers fiécles. Ce mot grec
était inconnu dans le petit nombre de demi- juifs ,,
qui prenaient à Rome le nom de chrétiens.
1
ïlek reconnu par tous les vrais favans que Si'
mon Barjone , furnommé Pierre , n'alla jamais à Ro-
me. On rit aujourd'hui de la preuve que des idiots
tirèrent d'une épitre attribuée à cet apôtre , né en
Galilée. Il dit dans cette épitre qu'il eft à Babilone.
Les (euls qui parlent de fon prétendu martyre , font
des faboliftes décriés, un Hégejippe , un Marcel^ un
-^M/ax , copiés depuis- par Eufèbe. Ils content que
Simon Barjone & un autre Simon , qu'ils appellent le
milicien , dîfputèrent fous Néron à qui refTiifcite-
raic un mort , & à qui s'élèverait le plu$ haut dans '
l'air; que Simon Barjone fit tomber l'autre Simon ^
fàvotide Néron ^ & que cet empereur irrité fit cru-
cifier Barjone , lequel par humilité voulut être cru*
I cifié la tête en -bas. Ces inepties font aujourd'hui
[ méprifées de tous les chrétiens infixuits ; mais depuis^
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]
294 P o
IKTDB»APBS, ¥
I I I I I I I I w^mÊ^^^HU^^^
Cmjiantm elles furent atttoriféet jofqo'à la rensof-
fance des lettres & du bon fens»
Pour prouver que Pierre nt mourut point i Rome j
il n'y a qu'à obférver que la première bafilique bâ-
tie par les chrétiens dans cette capitale , c'eft eèlle
de St. Jean de Latran} c'eft la première églife latine;
Tiiurait'.on dédiée à Jean » fi Pierre avait été pape ?
La lifte frauduleu(b des prétendus premiers papet
eft tirée d'un livre apocryphe , intitulé ie ponHficai
de Damafe 5 qui dit en pariant de Lin , prétendu
fùccefTeur de Pierre ^ que Lin fut pape jufqu'à la
treizième année de l'empereur Néron. Or c*dl pré-
dfément cette année i) qu'on fait crucifier Pierre.
Il y aurait donc eu deux papes à la fois.
Enfin , ce qui doit trancher toute difficulté aux 1
yeux de tous ItÉ ohitétiens , c'eft que ni dans les S
aétes des apAtres » ni dans les épitres de Paul 9 il *
n'eft pas dit un feul mot d'un voyage de Simon Bar*
jone à Rome. Le terme de fîége , de pontificat , de
papauté attribué à Pierre , eft d'un ridicule fenfiblc.
Quel fiége qu'une aflemblée ineonnue de quelques
pauvres de la populace juive I
C'eâ: cependant fur cette fiihle que la puiiTance
papale eft fondée & fe foutient encor aujourd'hui
après toutes Tes pertes. Qu'on juge après cela com-
ment l'opinion gouverne lé monde , & comment le
menfbnge fubjugue l'ignorance.
G'eft ainfi qu'autrefois les annaliftes batbares de
l'Europe comptaient parmi les rois de France un Pba*
ramond , & fon père Marcomir , & des rois d'Efpa-
gne , de Suède , d'Ecofle depuis le déluge. U &ut
avouer que l'hiftoire ainii que la phyfique n'a com-
mencé à fe débrouiller que fur la fin du (feiziéme
T» fiécle. La raifon ne fait que de naître.
&
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"
m
Christianisme f£u FERcéauti* 29f
Ce qui eft encor certain , c'eft que le génie du fé'r
nat ne fut jamais de perfécuter perfonne pour fa
créance , que jamais aucun empereur ne voulut for-
cer les Juifis à changer de religion , ni après la ré»
volte fous yejpapen , ni après celle qui éclata fous
Adrien. On infulta toujours à leur culte ; on s'en
moqua ; on érigea des ftatues dans leur temple avânt
fa ruine ^ mais jamais il ne vint dans l'idée d'aucun
Céfar , ni d'aucun proconful , ni du fénat Romain ,
d'empêcher les Juifs de croire à leur loi. Cette feule
raifon fert à faire voir quelle liberté eut le chriftia-
nifme de s'étendre en fecret , après s'écre formé obf-
curément dans le fein du jud^dûne. '
Aucun des Cifars nMnquiéta les chrétiens jufqu'à
DomiHen. Dion Caffius dit qu'il y eut fous cet em-
pereur quelques perfonnes condamnées comme athées ,
& comme ânitant les^ mœurs des Juifs. Il parait
que cette vexation fur laquelle on a d'ailleurs fi peu'
de lumières , ne fut ni longue « ni générale. On ne
fait précifément ni pourquoi il y eut quelques chré-
tiens bannis , ni pourquoi ils furent rappelles. Com-
meiit croire TertulHen , qui fur la foi di Hégefîfft. rap-
porte férieufement , que Domitim interrogea les pe-
tits-fUs de l'apôtre ^. Jude de la race de David ^
dont il redoutait les droits au trône de Judée , &
que les voyant pauvres & miférables , il cefla la per-
fécufion ? S'il eût été poflible qu'un empereur Ro^
main craignit des prétendus defcendans de David
quand Jérufalem était détruite , fa politique n'en eût
donc vt^ulu qu'aux Juifs , & non aux chrétiens. Mais
comment imaginer que le maître de la terre connue
ait eu des inquiétudes fur les droits de deux petits-
fils de Su Jude au royaume de la Paleiline , & les ait in«
terrogés ? Voilà malheureufement comme l'hiftoire a
été écrite par tant d'hommes plus pieux qu'éclairés.
2>ferva , Vefpaflen , Tite , Trajan , Adrien , les An*
tfmins , ne furent point perfécuteurs. Trajan qui avait
T iiij _^
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i
renouvelle les défenfes portées par la loi des doii7e
tables contre les aiTbciatîons particulières , écrit à
Pline : Il ne faut faire aucune recherche contre les
ehrêtienSé Ces mots eflentiels , il ne faut faire cm^
cune recherche ^ prouvent qu'ils purent fe cacher , fe
maintenir avec prudence , quoique fouvent l'envie
des prêtres , & la haine des Juifs les traînât aux tri*
bunaux éS: aux fupplices. Le peuple les haïdait , &
furtout le peuple des provinces, toujours plus dur,
plus fuperftitieux , & plus intolérant que celui de la
capitale : il excitait les magiftrats contr'eux , il criait
qu'on les expofôt aux bêtes dans les cirques. Adrien
non -feulement défendit à Fondanm , proconfui de
l'Afie mineure , de les perfécuter ; mais fon ordon-
nance porte ;7?o« calomnie les chrétiens ^ châtiez fi-
virement le calomniateur*
C*eft cette juftice A^ Adrien qui a fait fi fauffement
imaginer qu'il était chrétien lui-même. Celui qui
éleva un temple à Antinous ^ en aurait-il voulu éle-
ver à Jesus-Christ ?
M'arc^Aurkle ordonna qu*on ne pourfuîvît point les
chrétiens pour caufe de religion. Caracalla , Héliogaba-^
le^ Alexandre^ Philippe^ (?«///>«, les protégèrent ou ver-
tement. Us eurent donc tout le tems d'étendre &
de fortifier leur églife nailTante. Us tinrent cinq con-
ciles dans le premier fiécle , feize dans le fécond ,
& trente^fix dans le troifiéme. Les autels étaient
magnifiques dès le tems de ce troifiéme fiécle. L'hif-
toire eccléfiaftique en remarque quelqueS'.uns ornés
de colonnes d^argent qui pefaient enfemble trois
mille marcSk Les calices faits fur le modèle des cou»
pes romaines, 6c les patènes , étaient d'or pur.
Les chrétiens jouirent d'une fi grande liberté , mal-
gré les cris & les perfécutions de leurs ennemis ,
qu'ils avaient publiquement dans plufieurs provinces ,
Jl des églifiîs élevées fur les débris de quelques temples
iiaai'ii.1. .pMWi-n» mi^M
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*l«b.
PEU PERSE CUTé. 297 il
tombés ou ruinés. Origène & 5if. Cyprien l'avouent ;
&, il faut bien que le repos de Téglife ait été long ,
puifque ces deux gcands-hommes reprochent déjà à
leurs contemporains .le luxe , la moîlejfe , Xhvarice ,
fuite de la félicité & de Tabondance. ■ St. Cyprien fe
plaint expreflement que plufieurs évéqoes imitant
mal les faints exemples qu'ils avaient fous leurs yeux ,
accumulaient de grandes fommes d'argent , s'enricbif»
/aient par Pufure , & ravijfaient des terres par la
fraude. Ce font fes propres paroles: elles font un témoi-
gnage évident du bonheur tranquille dont on jouïflait
Sous les loix romaines. L'abus d'une chofe en démontre
l'exiftence.
Si Dé dus , Maxîtnin , & Dioclitien pérfécutèrent
les chrétiens , ce fut pour des raifons d'état : Dicius ,
parce qu'ils tenaient le parti de la maifon de Philippe
foupt^nné , quoiqu'à tort , d'être chrétien lui-même :
Maximîn , parce qif ils foutenaient Gordien. Ils jouirent
de la plus grande liberté pendant vingt années fous
Dioclitien. Non - feulement ils avaient cette liberté
de religion que le gouvernement Romain accorda de
tout tems à tous les peuples , fans adopter leurs cul-
tes ; mais ils participaient à tous les droits des Ro-
mains. Plufieurs chrétiens étaient gouverneurs de pro-
vinces. Bufèbe cite deux chrétiens , Dorothée & Gor-^
gonius , officiers du palais , à qui Dioclétien prodiguait
fa faveur. Enfin il avait époufé une chrétienne. Tout
ce que nos déclamateurs écrivent contre 'Dioclitien ,
n'eft.donc qu'une calomnie fondée fur l'ignorance.
Loin de les perfécuter , il les éleva au point ^qu'il ne
fut plus en fon pouvoir de les abattre.
En 50 j Cifar Galirius qui les haîflait , engage Dio^
clitien à faire démolir l'églife cathédrale dé Nicomé-
' die élevée vis^-vis le palais de Tempereur. Un chrê- ,
tien, plus quindifcret déchire publiquement Tédit ;
on le punit. Le feu confume quelques jours après
une partie du palais de Galirius ,• on en accufe les
%^m
t&M
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298 Vraies et fausses
chrétiens : cependant il n'7 eut point de peine de
mort décernée contr'eux. L'édit portait qu'on brl^
làt leurs temples & leurs livres , qu'on privât leurs
perfonnetf de tous les honneurs.
Jamais Dioclitien n'avait voulu jufques^li les con-
traindre en matière de religion. Il avait après fa vie-
toire fur les Perfes donne des cdî^ts contre les ma-
nichéens attachés aux intérêts de la Ferfe , & fecrets
ennemis de Tempire Romain. La feule raifon d'état
fiit la caufe de fes édits. S'ils avaient été diâés par
le zèle de la religion , zèle que les conquérans ont«
il rarement , les chrétiens y auraient été enveloppés.
Us ne le furent pas ; ils eurent par conféquent viijgt
années entières fous Dioclitien mimt pour s^affermir,
& ne furent maltraités fous lui que pendant deux
années ; encor taSance , Eufibe , & l'empereur Cwfjf-
tantin lui • même imputent ces violences au feul Gaii-
rius , & non à Dioclitien, Il n'eft'pas en effet vrai-
femblable qu'un homnle affez philofophe pour renon-
cer à l'empire , l'ait été afle;^ peu pour être un per-
fécuteur fanatique.
. Dioeiitien n'était k la vérité quHin foldat de for.
tune ; mais c'eft cela même qui proifve fon extrême
mérite. On ne peut juger d'un prince que par fes
exploits & par fes loix. Ses aâions guerrières furent
grandes & fes loix juftes. C'eft k lui que nous devons
la loi qui annuUe les contrats de vente , dans lefqoels
il y a léfion d^)utre moitié. Il dît lui-même que Thu-
manité diâe cette loi , humanum eft.
Il fut le père des pupilles trop négligés , il voulut
que le» capitaux de leurs biens portaiTent intérêt
^ C'eft avec autant de fâgefle que d'équité qu'eii pro-
tégeant les mineurs , il ne voulut pas que jamais ces
mineurs puflcnt abufer de cette proteAion » en trom-
pant leurs débiteurs. Il ordonna qu'un mineur qm
:i
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PERSicUTIOVS.
aw
aurait ufé de fraude ferait déchu du bénéfice de la
loi. Il réprima les délateurs & les ufuriers. Tel eft
l'homme ^ue l'ignorance fe repréfente d'ordinaire com^
me un ennemi armé fans cefTe contre les fidèles ^ &
fon règne comme unt St. Barthflem continuelle, ou
comme la perfécution des Albigeois. C'eft ce qui eft
entièrement contraire à la vérité. L'ère des martyrs
qui commence à l'avènement de Dioclitien , n'aunde
donc dû être datée que deux ans avant fon abdica-
tion, puifqu'il ne fit aucun martyr pendant vingt ans. '
C'eft une fable bien méprifiible , qu'il ait quitte Tem-^
pire de regret de n'avoir pu abolir le chriftianiûtte.
S'il l'avait tant perfécuté , il aurait au contraire con^
tinué à régner pour tâcher de le détruire ; & s'il fut
forcé d'abdiquer , comme on l'a dit Çkta preuve , il
n'abdiqua donc pas par dépit & par regret. Le vain
plaifir d'écrire deschofes extraordinaires, & de groilir
le nombre dès martyrs , a fait ajouter des perfécutions
faufles & incroyables à celles qui n'ont été que trop
réelles. On a prétendu que du tcms de DiociitîeH en
287 ' Maxintien^HercuIe Céfar envoya au martyre ad^
milieu des Alpes une légion entière appellée Tbibai*
n€ , compoféede fix mille fit cent hommes ious chrê-
tiens , qui tous fe laiiliàrent maifacrer fans murmurer.
Cette hiftoire fi fameufe ne fut éarite que près de deuX'
cent ans après par l'abbé Euchêr , qui la rapporte fur
des ouï " dire. Mais comment Maximien ^ Utrculi au.
rait - il • comme on le dit ^ appelle d'Orient cette lé-
gion pdur aller appaifer dans les Gaitles une fédition
réprimée depuis une année entière? Pourquoi fe ferait^
il défait de fix mille fix cent bons foldats dont il avait
befoin pour aller réprimer cette fédition ? Comment
tous étaient 'ils chrétiens fans exception ? Pourquoi
lea égorger en chemin ? Qui les aurait maflacrés dana
une gorge étroite , entre deux montagnes près de St.
Maurice en Valais , où l'on ne peut mettre , quat^re
cent hommes en ordre de bataille , & où une légion
réfifterait aifément à la plus grande armée ? A quel
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Idâêm
«5»
3 300 Vraies et iausses FSRsécvTioNs.
*«!»ÎJi
1
I
pjopos cette boucherie dans un tems où Ton ne pcN
fécutait pas , dans l'époque de la plus grande tran*
quillicé de réglife*) tandis que fous les yeux de Lio^
clititn même , à Nicomédie vis - à - vis foa palais , les
chrétiens avaient un temple fuperbe ? La profonde
faioù ê? la liberté entière dont nous nous jouijlons ,
dit Eufèbe , nous fit tomber dans le relâchement. Cette
profonde paix , cette entière liberté s'accorde-t-elle
avec le maifacre de fix mille fix cent foldats ? Si ce
fait incroyable pouvait être vrai > ( a ) Eufèbe reût-il
f^aflc fous filence ? Tant de vrais martyrs ont fcellé
'Evangile de leur fang , qu'on ne doit point faire par-
tager leur gloire à ceux qui n'ont pas partagé leurs
foulFrances. Il eft certain que Dioclétien les deux der-
nières années de fon empire , & Galérius quelques
années encor après , perfécutèrent violemment les
chrétiens de TAfie mineure & des contrées voifines.
Mais dans les Efpagnes , dans les Gaules , dans l'An-
gleterre, qui étaient alors le partage de Confiance
Clore , loin d'être pourfui vis , ils virent leur religion
dominante , & Eufèbe dit que Maxence élu empereur
à Rome en 306 , ne perfécuta perfonne.
Ils fervirent utilement Confiance Clore qui les pro-
tegea , & dont la concubine Hélène embraifa publi-
quement le chriftianifme. Ils firent donc alors un
grand parti dans l'état. Leur argent , & leurs armes
contribuèrent à mettre Conflantin fur le trône. C'eft
ce qui le rendit bdieux au fénat , au peuple Romain ,
aux prétoriens , qui tous avaient pris le parti de Ma>'
xence fon concurrent à l'empire. Nos hiftoricns ap-
pellent Maxence , Tyran , parce qu'il fut malheureux.
Il eft pourtant certain qu'il était véritable empereur,
puifque le fénat , & le peuple Romain l'avaient pro-
clamé. /
(a) Voyez les éclairciflTemens fur cette hiftoire générale.
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^HïF^itt
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^gtj^ II' cw ■" '^fjfjim
Fausses LéoENDBs,&c. 301 il
CHAPITRE NEUVIÈME.
j^ let fauJTes légendes des premiers chrétiens if ont
point, nui a P et abiijf entent de la religion cbtîtienne.
JEsus -Christ avait permis que les faux évangiles
fe mélaflent aux véritables dés le commencement
du chriftianifme ; & même pour mieux exercer la foi
des fidèles , les évangiles qu'on appelle aujourd'hui
apocryphes précédèrent les quatre ouvrages facrés qui
font aujourd'hui les fondemens de notre foi ; cela eft
fi vrai que les pères des premiers fiécles , citent pref-
que toujours quelqu'un de ces évangiles , qui ne fub-*
fiilent plus. Ni Barnabe , ni Clément , ni Ignace , enfin
tous , jufqu'à Jujiin ne citent que ces apocryphes.
Clément , par exemple , dans le yill. chap. épit. IL
s'exprime ainfi : Le Seignetir dit , dans/on évangile $
Jî vous ne gardez pas le petit , ^ui vous confiera le
grand ? Or ces paroles ne font ni dans Matthieu , ni
dans Marc , ni dans Luc , ni dans Jean. Nous avons
vingt exemples de pareilles citations.
Il eft bien évident que dans les dix ou douze fedes
qui partageaient les chrétiens dès le premier fiécle ,
un parti ne fe prévalait pas des évangiles de fes ad-
verfaires , à moins que ce ne fut pour les combattre ;
chacun n'apportait en preuves que les livres de fon
partL Comment donc les pères de notre véritable
églife , ont -ils pu citer les évangiles qui ne font point
canoniques ? il faut bien que ces écrits fuflent regar-
dés alors comme autentiques & comme facrés.
Ce qui paraîtrait encore plus fingulier fi oh ne fa-
vait pas de quels excès la nature humaine eft capable ,
ce ferait que dans toutes les fedtes chrétiennes ré-
prouvées par notre églife dominante , ^ fe fût trouvé Jî
des hommes, qui euifent fouffert la perfécution pour %
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ioz Fausseslégendes I
leurs évangiles apocryphes. Cela ne prouverait que
trop que le faux zèle çft martyr de l'erreur , ainli
que le véritable zèle eft martyr de la vérité.
On ne peut dîflîmuler les fraudes pieufes » que mal-
heureufement les premiers chrétiens de toutes les fec-
tes employèrent pour foutenir notre religion fainte,
qui n*avait pas befoin de cet appui honteux. On fup-
pofa une lettre de Pilote à Tihêre , dans laquelle Pi-
la$e dit à cet empereur : ,, Le Dieu des Juifs leur
)3 ayant promis de leur envoyer fon faint du haut du
^ ciel ,,qui ferait leur roi à bien jufte titre , & ayant
yy promis qu'il naîtrait d'une vierge , le Dieu àt^
yy Juife Ta envoyé en effet , moi étant préfident en
yy Judée.
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On fuppofa un prétendu cdît de Tibère , qtaî met-
tait Je s u s au rang des Dieux ; on fuppofa des lettres
de Sinéque à Paul » & de Paul à Sénèque. On fup-
pofa le teftament des douze patriarches ^ qui paffa
très longtems pour autentique , & qui fut même tra-
duit en grec par St. Jean Cbr^ojiome. On fuppofa le
teftament de Moife , celui à'Enoc , celui de Jofefb :
on fuppofa le célèbre livre d'Emc que Ton regarde
comme le fondement de tout le chriftianifme ; pu'f-
que c'eft dans ce feul livre qu'on rapporte Thiftoire
de la révolte dés anges précipités dans l'enfer, &'
changés en diables pour tenter les hommes. Ce livre
fut forgé dès le tems des apôtres , & avant même
qu'on eût les épitres de St. Jude qui cite les pro-
phéties de cet Enocfeptiime homme après Adam.
On fuppofa une lettre de Jesus - Christ à un pré-
tendu roi d'Edeffe » dans \p tems qu'EdefTc n'avait
point de roi & qu'elle appartenait aux Romains (a).
(«) On domie i ce pré- I EtAbgare était le titre des
tendu roi le nom propre d*Ab- 1 anciens prince^ de ce petit
gare. Lcm iléf^ar^^jESUS. I pays.
«rflitf»^
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lÊÊÊM
DES PREMIERS CHRETIENS. 303
On fuppofa les voyages de St. Pierre , rapocalypfe
de St. Pierre , les ades de St. Pierre , les adcs de
St. Paul^ les aâes de Pilote f on falfifei Phiftoire de
Flavien Jofepb , & on fiit aiTez mai avifé pour faire
dire à ce Juif fi zélé pour fa religion juive que Jisus
était le Christ , le Meflie.
On écrivit le roman de la querelle de St. Pierre
avec Simon le magicien , d'un mort , parent de Ifi»
ron , qu^ils fe chargèrent de relTufciter , de leur corn-
bat dans les airs , du chien de Simon qui apportait
des lettres à St. Pierre , & qui rapportait les ré-
ponfes.
On fuppofa des vers des fibylles , qui eurent un
cours fi prodigieux qu'il en eft encore fait mention
dans nos hymnes :
Tejie David cumJtbyM.
' Enfin on fuppofa un nombre prodigieux de martyrs
que l'on confondit, comme nous l'avons déjà dit, avec
les véritables.
Nous avons encore les ades du martyre de St. An*
dri l'apôtre , qui font reconnus pour faux par les plut
pieux & les plus favans critiques , de même que les
aâes du martyre de St. Clément.
EuJtBe de Céfarée au quatrième fiécle recueillit une
grande partie de ces légendes. C'eft-là qu'on voit
d'abord le martyre de St. Jacques frère aîné de Jésus-
Christ, qu'on prétend avoir été un bon Juif, &
même récabite , & que les Juifs de Jérufalem appeU
laîent Jacques le jujfe. Il paflait les journées entières
à prier dans le temple. Il n'était donc pas de la reli-
gion de fon frère. Us le preCTèrcnt de déclarer que
fon frère était un impofleur , mais Jacques leur ré-
[ pondit : fâchez qu'il eft affis à h droite de la fou-
S ■ ' y
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304 Fausses légendes
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Tcrainc puîflince de Dieu y & qu'il doit paraître au
milieu des nuées, pour juger de -là tout l'univers.
Enfuite vient un Siméon^ coufîn germain de Jesds^
Christ , fils d'un nommé Cléophas , & d'une Ma^
^rie , fœur de Marie mère de Jésus. On le fait libé-
ralemenc évêque de Jérufalem. On fuppofe qu'il fut
•déféré aux Romains comme defcendant en droite ligne
du roi David ; qu'il avait un droit évident au rovau-
me de Jérufalem aufli-bien que St, Jude $ que Tra-
jan , qui craignait extrêmement la race de David , ne
fut pas fi clément envers Siméon ^ que Domitien Ta.
vait été envers les petits- fils de Jude , & qu'il ne
manqua pas de faire crucifier Siméon de peur qu'il
ne lui enlevât la Palelline. Il falait que ce coufin-ger-
main de Jésus - Christ fût bien vieux , puifqu'il
vivait fous Trajan dans la io7eme année de notrç
ère vulgaire.
On fuppofa une longue converfatîon entre Trajan
& St. Ignace à Andoche. Trajan lui dit:j^2£f es-tu,
efprit impur , dimon infernal ? Ignace lui répondit ;
Je ne m'appelle poin^ efprit impur. Je m'appelle pork-
JHeu. Cette converfatîon eft tout-à-&it vraifem-
blable.
Vient enfuite une Ste. Sympborofe avec fes fept en-
fans qui allèrent voir familièrement l'empereur -<^^r/V»,
dans le tems qu'il bàtiflaic fa belle maifon de campa-
gne à Tibur. Adrien , quoiqu'il ne perfécutàt ja-
mais perfonne , fit fendre en fa préfence le cadet
des fept frères , de la tête en - bas , & fit tuer les
fix autres avec la mère par des gg^res difFérens de
mort , pour avoir plus de plaifir.
Sti. Félicité & fes fept enfans , car il en faut tou-
jours fept, eft interrogée avec eux, jugée & con-
damnée par le préfet de Rome dans le champ de
Mars
ttim^
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^^^^i
DES PHElilERS CHKÈTÎEIÎS. |Of
Mars , oà on ne jtigeaic jamais pcrfonne. Le préfet ju-
geait dant le précoif e ; mais on n'y regarda pas de û
ptè$*
St, Pofycxrpi ^tant condamhé ai3 feu , on entcnii
une.yoix du del , qui lui dit: Courage , Po^ycarfe y
fois ferme i & aiaiTi-tôt le» flammes du bûcher fedi*
vifent & formem un beau dais fur fa tête » fant Jt
toucher.
ttncabaretier cttéÉien nommé $t. Tbiodûie , fêri^
cîitien. Ce pré ^ dit k légende reçu cil lie par le ré-
vérend père BoIIanJus , étaii d'un verd naijfant , re*
levé par les nuances àwerfes qui formaient les divers
coloris des fieurs- Ah / k beau pré , s'écria le St. ca-
baretier , pour y bâtir une cbapelit / Vota avez rai-
foH , dit k cure Fronton , mais il me faui des nli*
! qués. Allez , iiik% , reprit Théodore , je vous en four*
tarai. Il fdvak bien ce qui! difidt, H y ivaît dans
Ancyrc fept vierges chêtîenncs d^cnviron foixante &'
I douze ans chacune. Elles furent condamnées par'
I lé gouverneur à titt viofces par tous les jeunes gêna
I de la ville , félon les loix romaines ; car ces Icgen-
I des fuppQfcnt toujours qu'on f aï fait fouiFrir cefti^-^
tflicè à toutes les fiUea cKrétîênnes. ^^J ^
Il ne fe trouva lieufeufeméoÉ aucun jetlnë hommï
qui viïuïût être leur exécuteur , îl nV eut qu'un jeU.ne
yvrogne , qui e^it ofTez de courage pour s' attaquer.
d'abofd à Sîe, Tèmtfe^ la plus jeune de tnotea ^ qui
cfcaît dans fa foîxante & onzième année- Tèmfè fe
:, jcijta à fes pieds , lui montra la f eau fia f que de fis
cwjfes décharnées i Ëf toutes fis rides pleines de crap
fi i t^€, ,c^U défartna le jeune, hommii ; le gôiîViMV,
neuf indtgné ^ue les fept vieijlfd tfiiflenù confervé leué^
f pucelage ^ lefs. ^t fur 1^ champ pçéfereffes .de Dîmé
\ Effai/ur In rhœurs ^ &€. Tom- h V
' ,
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i&S . F A U S.S^S L i;6.B.N DES
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Sciàc Mfneru^^:^ & «Iles forent obUgées.de fervif
tontes i^uesiicxs deux déaefîes , dcttt poprtantiâi ïem-
mes n^approchaient jamais que voilées de la tétt.m
pieds.
' ,Xe cabarcjtîër Tï^o^o^Hes voyant aînfi tbutesnucS,'
& ne pouvant fouïfrir. jCet attentat fait ikur pu-
âeifr, firîa Dieu avec' larmes , qu'il: eût la bonté de
les faire mourir fur le champ ; aufii-tôt le gouver-
neur les fit jett^er ^diuis le lac d'An^cyre une pierre jia
'^ta bîenhcttfeirfe^2î5^^^p^arûtla niiîl''l^S. Tïéo-
rfbfî^ .5, VÔU8 'dormeîz V woii fils, lui dit-çlfe,fanî
55 paifer à noéS: "Ne' fouïFrez pas , .mon cher Tbio-
,) rfoife , qiie nos corps* fiaient' mangea par les tnri-
5i tes. ** Tbèodote rêva on jour; entier- à"-tçtte âp-
p;tfîtîon. ' • - ■ *. -^^ ^ •
* tliWt fùivatttcf;fl alfà^u lac avct: ijufïqifes-ijns
de Ç; sgarqoftsT 'Une himière^éclatadte' marchait dé-
tint eux, ^cependant la nuit"êta]c fbritVobfcçre. Une
ghiié épouvantable toihjja , & fit enfler (e* ko. Deux
vieillards dpHi ?escieifeux , ia Varie ^^ léf bdits
étaient b fanes comme de ia neige , lui à^^arUrejit alors ,
^ iui dit eut : Marchez ^ He craignez Y^eH\ iihici vn
Jîan^eau cilefle^ ^ vout trouvereiè auprès an lac y
un cavalier célejiè\ a^mi de ioutes'^ pièces qiii vôm
conduira.
^ J[Qfll.tÂt l'ôtage redoubla: L# cavdiérccâeffè fe pré-
f<antft tfvtc nine tance énorme* Ct càiràRer- kAt le
gtoriefi» martyr Sùzi^ndre loi-méÉnè /^* qtri DiBU
s^ait ordonné ie defcendre du (MÛit mi beau die-
yalpour cpiîdufre le cabarcticr. ïlpouffoivit les feotf-
neltes du lac la lance daris les^ reins, les feâtinelles
»Hm&}feDt. ' Tbiodâte trouva le lac k fec , ce qui
était l'effet dela^hii» ;' on^ciripôfta'fcSTÛîpt vle^
g«fry & les garqoï» tabare«Scr^lc« 'énierrtï^cjit*'
, vA
nmtsm^
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^ÉkM
D EB ^ H 1 M r ETC B ' c K«:i-,x IS ïî 'S. 3d7
> ' La i^ade ne manque |y?s th hippcsctec ieucr n>tas n
c'étaient &e. Técufe ^'Sife. Alexandre y Stt. PJbamiy
hérétiques^; & Ste. Claudiw,:Stè.?£Mfhrqfi€ « Stf.-Jian
tr^ne , & 5^«- /«/gre, catholiques 7 . r> ^ .. i
Dès qu'on fut dans la ville d'Ancyre que ces fept
pifccellea. jMr.ainftliiji^fy mfpnrijitf , ftaiirt ia yijle fut> e^
alIarmes'S en combulHon, commrvmrsie croyez biei).
Le gouverneur fit appliquer Tbéodote à la queftion.
Voyez ^4iifait «tÙéodotevyexiiiliïoi^iEkQ^QlltlST
confie fes fervitettrs y il nie donne le courage defùuffrit
la qutfiiofty &; bientôt jefen^i imlè-. 11 le &t en effets
]^ais.il.avaif promis des fp}iq«c?,açj.gurè JtrDnion
pour mettre dans fa chapeliç.i 4. ï'^'o^X»*^ ^*en avait
point. Fronton monta fur un âne pour aller cKer-
chcr fes reliques à Ançyre , & diargea fou âne dç
quelques bon teillçs d'excellent vîn , cax il s'agîlTaîtd'u^
çàbaTetier, Il reiicotitrii fies loldats qu'il Jic botfC,liÇ5
foltiats lui ractïntérenc Je m.irtjre de St. TbiùÀàttl
Us gardaient fon, corps, quoîixu'îl eût été rédàit en'
cendres* lî les enyvra fi bieii qa*il eu£ le tems d*éii^
lever le corps. Il l'èfjfeveik & bâtk fa chapeïle. ES
Ifien , lui dit-St, Théodote , fmmi^s vas tim^ M^
que tu QMtmi dts rehquer. .i .
\ Voilà ce que- Ic^ jt^fuîtes BùlU}fduî & VapfêrQri
rie rougirent pas de rapporter dans leur hhtoiredes
faints. Voilà ce ^qti^un ihoînè nommé Dom Rmfémi
a Finfolente imbëçrMné d^lnfércf dans fes adçs fti<
.^tarit
âigdûtanbes
. dt '^nne 'Tpiwe aotBétiqoe i ?[
toii^ai^^ trpoagçrJesiioixwiçsji
&\queUe fcblji|e|tlc, s'imagiaei^
'4u\irt lès tramée' rfujbiir^
3'ttiii^^^ ^- ^'^> ^ " '-^^
. _V ij
igiWi r^-T ifi^
Fuy>en-V«l», 4dlii8 iiUid^aftt>i^
itàt auRiisbltandèct'iiéysrvn
aigris ]4e ipart) cMouRç^pu-^
ion , &^ la vraj^Q t)^tl, Que^
ne dit -il anffî'^dféV^tifpué)?^
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308 F A U s s JB S L é 0 EN D B Si,0&P.
(bpt œitt années , n'ont pu &îre.eort à noM reU«
giorr. Elle «ft fana doute divine , puifque dix-fept
fiédes 4e friponnes. & d'inilïçcillités n'ont pu la dé-
truire , & nous révérons d'autant plu^ la vérité que
nous méprifons le menfonge.
C H A P i T a E D I X I É M E.
Suite 4â ^itahHJJ'êment du cbri/lianifme. Comment
^ ÇbNîTAKTTlN eu fit la religion dominante. Dica- ^
dencè de f ancienne Rome.
LE règne de Confiantin eft une époque glorieufe
pour la religion chrétienne , qu'il rendit triom-
phante. On nWaît pas befoîn (Ty joihdfe des pro-
dîgës , comme l'apparition du Labarum dans les nuées ,
fans qu'on dife feulement en quel pays cet étendart
apparut II ne falait pas écrire que tes gardes* du £â-
baruin ne pouvaient jamais ^tre blefles. Le bouclier
tombé du ciel dans l'ancienne Rôîne ;V Oriflamme z^
porté k St, Denis par un ange, toutes ces tmitatibn^
ùàylfaBadium 4e Troye ne fervent qu'à donner à la
yei^t^ l'air de la fable. De favans antiquaires ont fuffir
^iO^ment réfuté ces erreurs que la philofophie défa-
▼Gue^ &.que la critique flétruit. Actachbns-nous feule-
ment a voir conunent Rome cetia d'être Rome.
\ Pour développer Thiftoire del'efjprit humain chez
les peuples chrétiens ,11 falut remonter jufqo'à Conjian-^
tm,y& roémerau-deli. C^eft une. nuit (jans laquelle il
faut allumer tbi.méme lie f^mbeau dont on a befoln.
Ori devrait attendre de$ lumières: d'un homme tel
qu'Eufèùe évéquc de Céfarée , confident de Confiant
iiin^ ennemi à* Athanafê ^ homme d'état , homme de
lettres , qûrte premier jBfc l'hiftçïre ,de l^egHfe.
SKÇiàrw ■ ■■ ■ I II ■i,|yiKa»gw=gg=gg«gg=
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Ai
Ghkistiamisme; CaKSTkvtr».
Mais qu'on eft étonné quand on vaat t'inftraire dans
les écrits de cet homme d'état père de Tbiftoire ec-«
cléfiaftiquei
On y trouve , à propos de l'empereur Conjlantîn «
que 9> Dieu a mis les nombres dans fon unité , qu'il
^ a embelli le monde par le nombre de deux ,•& que
^ par le nombre de trois il le compolk de madère & de
yy forme ; qn'enfuice ayant doublé le nombre de deux ,
yy il inventa les quatre élémens : que c'eft une cbôfe
yy merveilleofe qu'en faifant l'addition d'un , de deux,
yy de trois & de quatre on trouve le nombre de dix qui
yy cft lafin , le terme & la perfeâipn de l'unité ; & que
yy ce nombre dix iî parfait multiplié par le nombre phis
» par&it de trois qui eft l'image fenfible de la Divinité ,
93 il en réfulte le nombre des trente jours du mois, (a)
C'eft ce même Eufibe qui rapporte la lettre dotit nous
avons déjà parlé , d'un Abgare roi d'EdefTe à jESUS-
Christ , dans laquelle il lui offre îà petite ville qui efi
Hffezp-opret & la réponfç de Jcsus- CHRIST au xçA
Abgare.
D rapporte d'après TertulNen , que fi-tôt que l'em-
pereur Tijbère eut appris par Pilote la mort de JESUS-
Christ, T/£r^rf , qui chaiTait les Juifs de Rome, ne
manqua pas de propofer au fénat d'admettre au nombre
des Dieux de l'empire , celui qu'il ne pouvait connaître
encor que comme un homme de Judée , que le fénat
n'en voulut rien faire , Se que Tibire en fut extrême-
ment courroucé.
B rapporte d'après Ju/Hn la prétendlie ilatue éle-
vée à ^m0n le magicien g il prend les Juifi théra-
peutes pour des chrétiens.
C'eft lui qui fur la foi d^HégeJippe , prétend que
les petits -neveux de Jésus -Christ par fon frère
(a) Bdltef pan^l^de C^ontôi, chap. IV& V.
V iij
ft^iw^- ■ jjiiTJiHli
V
l
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'^
$9^
'»^nair'><
3fïi Christianisme.
vengeance , lors même que leiir triomphe devait leur
hifpurer l'cfprit de pafaf. Ils maffacrèrcnt dans la Syrie
& dans la Paleftinc tous les magiftrats quî avaient (evi
contr'cux ; ils noyèrent la femmç &la fille de Maxinun ,
ils firent périr dans les tourmens fes fils & fes parens.
Les querelles au fujet delà Cmfubflantiabiiité dn Verbe
troublèrent le monde & l'enfanglantèrent. Enfin , Âm,
ntian Marctliin dît que îes cbrttims defon temsfe dé*
cbittàtfit tntr'eux comme des bêtes féroces. Il y avait de
grandes vertus cçctAmmian ne remarque pas : elles font
prefque toujours cachées , furtout à des yeux etoemi9 >
& les vices éclatent.
UégHft -ût Rome !ut préftrvée de ces crimes & de
ces rtialfattil-s ; elle )ie fut d'abord ni puiiTante , ni fouiU
lée ; fcHe refta longteiHs tranquille & fage au milieu d'un
fénat & d'un peuple qui la méprlfaient. H y avait dans
cette capitale du monde connu feptcent temples grands
ou petits dédiés aux Dieux majorum & minontm gen^
tium. Ils fubfiftèrent jufqu'à Tbiochfe ; & les peuples
de la campagne perfiftèrent longtems après lui dans
leur ancien culte. C'eft ce qui fit donner aux fedlateurs
de rântiènne reb'gîon le nom de Payens , Pagani , du
nom des bourgades appellées/^ogi, dans lefquellêson
faiffa fubfifter rîdolâtrle , jufqu'au huitième fiécle ; de
fbrte qufe le nom de payens ne ftgnifie que payfans ,
villageois.
, Onfaîtaflez fur quelle Impofture eft fondée la do«
nation de Conjlantin (à) s mais on ne fait point affez
combien cette impofture ^ été longtems accréditée.
Ceux qui la niaient, fiarent fduvent punis en Italie &
ailleurs. Qui croirait qu'en 14-78 il y eut des hommes
brûlés à Strasbourg pour avoir combattu cette erreur ?
4 ) Voyez le contenu de
^donation pr^tendné dans
lliiftbîre do chrîftîanirme pîâr
JaaUé, fiUe coihinenco pat
ces mots : ?/ous avec noifitra"
fes. Cet un monnment eu*
rîctix
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àèb^tSm
C09SVA.1ITIH.
Confiantin donna en efFet « nm au feul ëvéque de
Rome , mais i la cathédrale qui était l'églife de St.
Jean , mille marcs d'or , & trente mille d'argent , avec
quatorze miUe ibus de rente , & des tenes dans la Ca-
labre. Chaque empereur enfuite augmenta ce pat;rip
moine. Les évéques de Rome en ayaifsnt befoin. Les
midtons qu'ils envoyèrent bientôt dans l'Europe payent
ne , les évéques chafTés de leurs fiéges , auxquels ib
donnèrent un afyle , les pauvres qu'ils nourrirent , les
mettaient dans la néceffité d'être très riches, Le crédit
de la place fupérieur aux richefles , fit bientôt du pa£>
teur des chrétiens de Rome , Thomme le plus confidé-
rable de l'Occident. La piété avait ^ûjours accepté ce
minlfière ; l'ambition le brigua. On fe difputa la chaire;
S y eut deux antipapes dès le milieu du quatrième
fiécle , & le conful Prétextai idolâtre difait en 466 ,
Faites -moi ivique de Rome , 6? /> me fais chrétien.
• Cependant cet évêque n'avait d'autre pouvoir que
^lui que peut donner la vertu , le orédit , ou l'intrigue
dans des circonftances favorables. Jamais aucun pafteur
de l'é^ife n'eut la jurifdidion contentieufe , encor
tooins les droits régaliens. Aucun n'eut ce qu'on appelle
jus terrendi , ni droit de territoire , ni droit de pro*
noncer djo , dico , addic$. Les ^npereurs relièrent les
juges ii^rémes de tout , hors du dogme. Ils convoqué^
tent les conciles, CoufiaseHn à Nicée requt & jugea les
accufations que le» évéques portèrent lés uns contre les
autres. Le titre de Souverain Pontife reita même atta-
ché à l'empire.
CHAPITRE ONZIÈME.
Caufes de ia cbàte de t empire Romain.
SI qudqu'un avait pu raffermir l'empire , ou du
moins retarder fa chute , c'était l'empereur J«//>».
il n'étKît point un foldat de fortune comme les Dioclé*
I b^^CI^Ti* H*«<
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'^'«ai
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Causes de la chute
tiens & les Tbiodofes. Né dans la pourpre, ëlu par les
armées , chéri des foldats , il n'avait point de faétions
à craindre ; on le regardait, depuis fes vi<ftoircs eiv Aile-
magne , comme le plus ffrand capitaine de (on fiécle.
Nul empereur ne fut plus équitable & ne rendit la
juftice plus impartialement , non pas même Marc-
Aurèle. Nul philofpphc fte fut plus fobre & plus con^
tinent. Il régnait donc par les loix , par la valeur
& par l'exemple. Si fa carrière eût été plus longue , il
eft à préfiimer que l'empire eût moins chancelé après
fa mort.
Deux fléaux détruifirent enfin ce grand colofTe, les
barbares & les difputes de religion.
Quant aux barbares , il eft aufli difficile de fe fairç
une idée nette de leurs incurfions que de leur origine.
Procope , Jûrnandès nous ont débité des fables que
tous nos auteurs copient Mais le moyen de croire que
des Huns venus du nord de la Chine ayent pa(fé les
Palus • Méotides à gué & à la fuite d'une biche , &
qu'ils ayent cha(fé devant eux comme des troupeaux
de moutons des nations belliqueufes , qui habitaient
les pays aujourd'hui nommés la Crimée , une partie
de la Pologne , l'Ukraine , la Moldavie , la Valachie.
Ces peuples robuftes & guerriers , tels qu'ils le font
encor aujourd'hui , étaient connus dés Romains fous
le nom général de Gotbs, Comment ces Goths s'çn-
fiiirent-ils fur les bords du Danube dès qu'ils virent
paraître les Huns ? Comment demandèrent-ils à mains
jointes que les Romains daignalTent les recevoir ? Et
comment , dès qu'ils furent pafles , ravagèrent-ils tout
jufqufaux portes de Conftantinople à main armée ?
Tout cela reflemble à des contes d'Hérodote , &
à d'autr£S contes non moins vantés. Il eft bien plus
vraifemblable que tous ces peuples coururent au pil-
lage les uns après les autres. Les Romains avaient
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v6lé les .nations ; les Goths & les fiuna. 'vinrent to*
1er les Romains.
.' Atais pourquoi les Romains ne les exterminèfent-
ils pas comme Marins zvmt exterminé les Cimbres?'
C'eft qu'il ne fc troui^aît point de Marna , c'eft que
les mœurs étaient changées , c'eft que Tempire était
partagé entre les ariens & les athanafiens. On ne
s'occupait que dé deux «objets , les canrfes du cirque
&Lle$ trois hypoflafes. L'empire Romain avait alors*
plus de moines que de {oldats , & ces moines cou«»
raient ea troupes de vtllc en ville pour foutenir ov
pour détruire la confubftantialité du verbe. U y en
avait foixante & dix mille en Egypte,
Le chriftianifaie ouvrait le ciel , maïs il perdai£
l'empire : car noivfeulemait les fedtes nées dmns fou
iein fe combattaient avec le détire des qiierelies théô^
logiques ; mais toutes combattaient encore Pancienne
religion de l'empire ; reljgion fauffe s religion ridicule
{ans .doute , mais fous laquelle Rome avait marché
de vidtoire en vidoire pendant dix fiécles.
Les defcendans des Scipiom étant deve[nus des
contre vcrfiftes , les évéchés étant plus .brigués que
ne l'avaient été les couronnes triomphales , la cpn-
fidération perfonnelle ayant paffé des Hortenjhu &
des CidroTts aux Cyrilies , aux Grégaires y aux -^la-
hrmfes , tout fut perdu ; & fi Hon doit s'étonner de
quelque chofe , c'eft que l'empire Romain ait fub-^
fifté encor un peu de tem&
Tbioàofe , qu'on appelle le granà Tbiodofe^ , "paya
tan tribut au fuperbe Alarie fous le nom de pehfion
du tiéfbr impérial. Alark mit Rome à contribution
la première fois qu'il parut devant les murs , ^ la
féconde il la mit au pillage. Tel était alors l'avilif-
fement de l'empire , que ce goth dédaigna tl'étre roi
ùi Rome^ iandk que; jle niiférable ismpereilc iXkccu
4. iiiigfaSS
w^iêfim
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f^
BBsasseasâË^tfjll
yt6 Causes db la chutb
àtvxBmarim tremblait dans Ravetme oà il s'était
réfbgié.
Aiarîc fe dontfa le plaifir de créer dans Rome un
empereur nommé Attalt qui venait recevoir fes or-
dres d ins fon antîdiambre. L'hiftoire nous a con-
fervé deux anecdotes concernant Hùnorius qui mon-
trent bien tout l'excès de la tuq>itude de ces tenu.
La première , qu'une des caufes du mépris où Vxm*
fims était tombé , c'eft qu'il était impuilTant; la fé-
conde, c'eft qu'on propofa à cet AttaU empereur,
valet à^Alaric , de châtrer Howmus pour rendre ibn
ignominie plus complette.
Après Alaric vint Aniia qui ravageait tout de la
Chine jusqu'à la Gaule. II éuit ù grand & les em-
poreors Tbéodofey & ValetuMm III fi petits, que h
prînceffe Honoriaf fœur de Valentimen III ^ luipro*
pofa de l'épourer* Elle lui envoya fon anneau pour
gage de fa Foi ; mais avant q^'elle eût réponfe d^At-
tiia die était déjà groflc de la faqon d'un de fet
domeftiques.
Lors f^AttUa eut détruit la ville d'Aquilée, Uo*
évèqoe àt Rome vint mettre à fes pieds tout For
qu'il avait pu rccuetlltr des Romains pouf raditter
du pillage les environs de cette ville , dans laquelle
Femperenr Valextinien III imt càché. L'accord étant
condo , les moines ne manquèrent pa» d'écrire que
le pape Léon avait fait trembler Attila y qu'il était venu
â ce hun avec un air & un ton de maître , qu'il était
accompagné de St. Pierre & de St. Paul y armés tous
deux d'épées flamboyantes qui étaient vifiblemeat les
deux glaives de Tévéque de Rome. Cette manière
d'écrire l'hiftoire a duré chez les chrétiens jufqtt'aa
(eiziéme fiécle fans interruptiont
BtentAt après des déhiges - de barbares inondèrent
: de tous oàtes ce qui était échappé aux mains d'JPf^l^
Sa»..
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m
Que fiii£dent cependant les empereurs ? Us afiCeii-
blaient des conciles. C'était tantôt pour rancienae
querelle des partiÇins à^Atbanafe , tantôt pour ke
donatîftes ; & ces difputes agiuient^ rAfriooe quand
le Vandale Genferic la fubjugua. C'était ailleurs pour
les argumens de V^orius , & d« C^Ue , pour Ict
fubtilités à*Euticbis , & la plupart des articles de foi
fe décidaient quelquefois à grands çoupsi de bAton»
comme it arriva fous Tbiodofe II dans un condk
convoqué par lui à Ephèfe , concile qu'on appelle
éncor aujourd'hui le brigandage. Enfin pour bien
connaître refpiit de ces malheureux tems , fouvenons*
nous qu'un moine ayant été rebuté un jour par nio^
dofe II qu'il importunait , le mbine excommunia l'em-
pereur , & que ce céfar fut obligé de fe fSdre relè^
ver de rexcommunication par le patriarche de ConC
^tantinople. ^
Pendant, ces troubles mêmes les Francs envahît*
faient la Gaule ; les Vifigoths s'emparaient de l'Efpa-
gne; les Oftrogoths fous Tbiodofi dominaient en fta-
Oe, bientôt après i chafîés par les Lombards. L'em*
pire Romain du tems de Ciovis n'exîiïate plus que
dans la Grèce, l'Afie mineure 8l dans l'Egypte , tout
le refte était la proie des barbares j Scythes , Van-
dales & Francs fe firent chrétiens pour mieux gou*
verner les 'provinces chrétiennes affujetties par eux:
car il ne fetit pas croire que ces barbares fufTeût
fans politique , ils en avaient beaucoup , & en ce point
tous les hommes font à -peu- près égaux, Lintérét
rendit donc.chrêti'ens ces déprédateurs ; maîi ils n'en
furent q^e plus inhumains^ Le jéfuîte Dankl ^ hiil
torien français , qui déguife t^nt de chofes , n'ofe dif-
fimuler qpe C/ow.fut beaucoup plus fanguîrtaire^ &
fe fouilla de plus grands crimes aprè<ï fon batéme ,
que tandis qu'il était payen. Et ces crimes n'étaient
pas de ces forfaits héroïques; ^ qui éblouïffent l'imbé-
cillité humaine ) c'étaient des vols & des parricidçs.
Il fuboi^ un prince de polo^ne .qu| aflaf&na fon
m^
stfCiRI
PW!
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■âii
SâSBEâ9Bfe±â
$l8 CÂUfc^<Dtt LA CMUTBBE l'^MFIREs&C.
«ère , après 'qtïoî il fit maflacrcr lé fils , i& tna un
roitelet de Cambrai qui lui mottéraft fes tréfors. Un
CîtoYért moins coupable eût été ttâiné ao'foppHcc,
èb (Ji9vh fonda une monarchie. *
i
rr
; ; c H A p r t,R Ê D ou z il ^ e.
^ &£//^ ^^ Al décadence de r ancienne Rome.
QUarid les Goths s'emparèrent de' Rome après M
Hernies , quand Ip célèbre Tbiodoric non moins
pùifTant que f'ut depuis Cb'arîemagne ,. eut établi le
fié§;é de Ton empire à Ravenne au cômmeQcement
de notre fixiéme fiécle , fans prendre le titre d'em-
pereur d'Occident qu'il eût pu s'arroger i il cxercja
fiir les Romains precifément h, .même autorité que
les Cèfars , confervant le fénat , laiifrant ftjbfifter la
liberté de religion , foutaettant également aux loix
civiles , orthodoxes , àrichs , & idolâtres 5 jpgeant les
Goths par les Ipix gothiques, & les Romlâlnsparles
loiîC romaines , préfidant par fo comniiflairc^ aux
éledions des évéques' , défendant la* fimotiie , appai-
fant des fchifmes. t)eux papes fe difputaient la chaire
épîfcopale j il nomma le i^3L^t Sîmrttâuj(ue\& et pape
Simmaque étatitaçcufé , il le fit ' jujcr |)àr' fes î//^
DêminkL ' \ ..\ , ,.'.:.
^ Ataîaric fon petit-. fils téda les éteôlons des pa-
pes , & de tous les autres métropolitains de feb royau-
me^, par un é^it qUî fuf obfervé ; cdit rédigé par
CaJJîodore fon jtiîAîftre , qui depuis fe retira au Mont-
CaflTm, ^'embraffa la règte de St, BenoH ^lédit au-
qûelle pape Jecù^Uît foumit fans difficulté.
Qpand Bfea^rr vint en- Italie , & qu'il la remit
\ fous le pouvoir Impérial . on fait qfu'îl exila le pap^
j . SiiveriuT , & ^*^en cela H népaffa point les bornci
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ISttiM
iM
ntckStuat deK ù m e.
àe fea autdritéV^fl l^fra céflc^ de la juftîcc.^ jKJ
Iz2fazre , & enfuîte ^ar/ïf «yantWMrraché Rome itf
joug de Goths , d'autrçs barbares , Gépide^ , Erancs,
Germains 1, ihorifîèr^nt Htalie. - Tout Pempîrê ^i-
dental était dévafté & déchiré par des fauvag^s. tS
Lombards établirent leur dominadon .dans toûlsH^
talîe citérieuffe: -<^/f^ô«/« fondateur de -éetté^ôuvdl^
dynaftic,n'étaitqu^yn brigand barbare; mtis bien-
tôt l€8 vainqueUfs adoptèrent les mœurs , h p6\U
teffe , la religion des vaincus, C'cft ce qui n' était
pas arrivé aux prenriers Francs, aux Bourguignons,
qui portèrent dahsies €aules leur langage grofTîer,
éc leurs mteufs «ncor plus agrdles, La nadon Lôtn-
baïde était d'ahdrd^compofée de payens & d'arien*.
Leur roi Rotbàrit publia vers l*an 640 un^édît qui
domina la lîbetté de profefTer toutes fortes de rcïi-
gîons , de forte qnll y avait^ dans prefque joutes ks
villes d'Italie un évêque catholique , & unf cvéqué
arien , qui laiflaient vivre pïuiiblement les peuples
làoaimés icfiylikret^'f répandus cncor dans les villages.
. JLe royaume de^Lombardie ^^étehdît' depuis le Pîé-i
mont jufqu'a Brindes & à la terre d'Otrante jil rèni:
fermait Bénévent , Bari , Tarente ; mais il n'eut ni la
Pbuille ytkï^ Rt>me/liî^RàvenSe. Ces-p^ys- demeurè-
rent annexés au "^faible eftipire dIOrîent. L eglîfe to-
inaîne avait doua !*paffédelad(«tfinatîôfi deë^Gotkr
à cdlc des Grecs. Urî Exarque goivèMiait Âo*ie W
nom de IfeàipcMUt^ mais il n^ reMâit i^okit dans cette
yiile prefqu'atoandonnée à elle-rtiéinéa Serf fêjour éttfi^
a Ravenne !, tf oà $1 envoyait fes' oi»dres: ati duc lôtf
préfet de- Rome , S& aux fënatenrs'qu^on apfpeltailj
encor PeV^/ ^îo»^n>^.>L'appaf€h<îè'^u goureriieméirf
municipal fubfiftait toujours danc^-bétie ancienne eàS
pitale fi déchue , & les ftntimens républicains n'y fu-
rent jamais éteints. : Hs fe footcnaieur î>ar l'exetiiple
de Vcnife , république, fondée -d^bbfll par la crairitè
&4>ar la mifère, & bientôt élevée par le commerce
& par le courage. Venife étakdëj^ fi ptfKftftte^i ^^1 ^
*'<Sff wp iwah \ki
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DiCADEKCI is EOME.
îécablit au huitième fiéde racarv>^ SoUafiim qd
avait été chaflé de Ea?eime^
(^etle était îono aux feptiéme ft kuiticme fiéclei
la ficuadon de Rome ? Celïi d'une ville malheureufei
mai défendue par les exarques , continuellement ln^
oacée par les Lombards , & reconnaiilknt toujours les
empereurs pour fesmaitres. Le orédh des papes aog*
mentait dand la déroladon de la villcé Ils en étaient
fouvent les confolafieurs & les pères , mais toujours
fujets : ils ne pouvaient être confiicrés ^u'dvec la
permil&on exprefle de l'exarque. Les formules par
lefquelles cette permif&on était deinandée & accor-
dée , fubfiftent encore (a)^ Le (^ergé romain ixÂ^
vait au métropolitain de Ravenne , & demandait la
proteâion àmja. Béatitude auprès du gouverneur ; en*
fuite le pajpe envoyait à ce métropolitain Ci profiet
fiôn de foi.
. Le roi Lombard AJhîpbt s'empara tnfin de tout
Texarcat de Ravenne , en 75 z , & mit fin à cette yicc
toyaoté impériale qui avait duré cent quatre-vingt-
trois ans.
Comme le duché de Rome dépendait de l'exarcat ^t
Ravenne , Aftolpbt prétendit avoir Rome par le droit
de fa conquête. Le pape Etiema II feui défèofeur
des malheureux Rom<iins , envoya demander do fe^
cours à l'empereur Confiantin furnaamé CsprsK^*
Ce mîférable empereur envoya pour tout fecours «n
officier du palais avec une lettre pour le roi Lon»;
bard. C'eft cette faiblefle des empereurs Grecs qui
fut l'origine du nouvel empire d'Occident , & d* **
grandeur pontificale.
Vous ne voyez avant ce ttms aucun évéque qo^
9it afpîré à la moindre autorité temporelle, au moini'
(a) htmlt Diêrùm Ri
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DicADrENÇR ix^ JR.oj^E. gai .}
dre territoire. Comment l'auraient-îls oïe ? leur légîf-
lateur fut un pauvre qui catéchifa des pauvres. Les
fucceiTeurs de ces premiers, chrétiens furent pauvres.
Le clergé ne fit on corps que fbus' Confiantîn premier ,
mais cet empereur ne fouffrit pas qu'un évéque fût
propriétaire d'un fcul viHrfge* Ce ne peut être que
dans des tems d'anarchie que les papes ayent obtenu
quelques fejgneuries. Ces domaines furent d'abord mé-
diocres. Tout s'agrandit & tout tombe avec le tems.
Lorfqù'on pafle de Phiftoîre de Tempirç Romain à
celle des peuples qui l'ont déchiré dans l'Occident ,
pn reiTemble à un voyageur , qui ai^ fortir d'une ville
fuperbe fe trouve dans des déferts couverts de ron-
ces. Vingt jargons 1)arbares fuccèdent i cette belle
langue latine , qu'on parlait du fond de Tlllyrie au
mont Atlas. Au-lieu de ces fages loix qui gouvernaient
la moitié de notre hémifphére » on ne trouvé plus que
des coutumes fauvages. Les cirques , les amphithéa-
très élevés dans^ toutes les pravinces font changés en
mafures couvertes de paille. Ces grands, chemin^ ft
beaux , il folides , établis du pied du capitole jufqu'au
mont Taurus , font couverts d'-eaux croûpiffantes. La
même révolution fe fait dans les eCprits , & Grégoire
de Tours , le moine de St. Gai Frédegaire,^ font nos
Poiybes Se nos Tite-^Lives, L'entendement humain
«'abrutit dans les fuperftition^ les plus lâches & les
plus inlenfées. Cçs fuperftitions font portées au point
que des moines deviennent feigneur« & princes. Us
ont des efclaves , & ces efçlave^ n'ofent pas même
fe plaindre. L'Europe entière croupit dans cet avK*
lifTement jufqu'au Teiziéme fiéde , & n'en fort que
par des convuUions lïsrriblç^f
EJfaifur les mœurs '^ ^c. Tom. L X
»9^
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IBâte
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iZZ U s U R P A T I O N
=*^|
CHAPITRE TREIZIÈME.
Origine de la puijjance des papês. DigreJJJm fur k
facre des rois. Lettre de St. Pierre à Pépin , imrt
de France , devenu roi* Prétendues donations au St
Siège,
IL n'y a que trois manières de fubjuguer les hom-
mes, celle de les policer en leur propofant des loix,
Qclle d'employer la religion pour appuyer ces loit ,
celle eniirt d'égorger une partie d'une nation j)ôur
jiotivemer l'autre ; je n'en connais pas une quatrième.
Toutes les trois demandent des circonftances favo*
râbles. U faut remonter à l'antiquité la plus reculée
pour trourer des exemples de la première ; encor font*
ils fufpeds. Cbarlemagne^ Clovis^ Tkéodoric^ Albimin^
Alaric^ fè fervirent de la trôifiéme ; les papes em«
iHoyèrent la féconde.
Le pape n'avait pas otîjgînaîrèmeht plus de droit
for Rome , que St. Aumftin n'en aurait eu , par exem-
ple , à là fimverainete dé la petite Tille d'Hippqnc.
Quand même St. Pierre aurait demeuré à Rome ,
comme oh Ta dit * fur ce qu'uhé de lis épîtres ti
datée de Babiloifc , <juand même il eût été évêqué
At Rome, dans un tems ou il n'y avait certainement
aucun fiége particulier ^ ce féjour dans Rome ne pou-
vait donner le trône des Vifars ,• & nous avons vu
que les év4qu^ de Rome he fe regardèrent pendant
fept cent ans que comme des fljjetSi
Rome tant de fois faccagée par les barbares , -
donnée des enmereurs , preflea par les Lombards ^
incapable de rétablir l'ancienne république , ne pou-
vait plus prétendre à la grandeur. Il lui falait du re-
pos : elli; l'aurait goûté fi elle avait pu dès -lors être
riiffiif
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«Mfei
ET SACRE DE PePIN. JZJ | f
gouTcrnée par fati évèque , coinme le {ment depui»
tant de villes d'Allemagne ; & Tanarchie eût au moins
produit ce bien. Mais il n'était pas encor reçu dans
ropinion des chrétiens , quhin évèqne pût être fou-
veram , quoiqu'on eût dana l'bîâoire du monde tant
d'exemples de l'union do facecdoce & de l'empire
dans d'autres rdigions.
Le pape Grégoire III recourut le premier à la pro-
tection des Francs contre les Lombards , & concre
tes empereurs. Zacbarie fon fuccefTeur , animé du
même efprit , reconnut Pépin y ou Pipi» , maire du
palais ) ufurpateur du royaume de FraïKe , pour roi
légitime. On a prétendu que Pépin , qui n'était que
premier miniilre, fit demander d'abord au pape, quel
était le vrai roi , ou de celui qui n'en avak que lei
droit & le nom, ou de celui qui en avait l'autorité
êc le mérite ? & que le pape décida que le miniftre
devait être roi. Il n^a jamais été prouvé qu'on ait
joué cette comédie ; mais ce qui cft vrai , c'eft que
le pape Eiiemte III appella Pépin à fon fecours contre
les Lombards , qu'il vint en France fe jetter aux pieds
de Pépin , & enfuite le couronner avec des cérémo-
nies qu'on appellait Sacre. C'était une imitation d'un
ancien appareil judaïque. Samuel avait verfé de l'huile
fur la tête de Soûl. Les rois Lombards fe fàifaient auHi
facrer ; les ducs de Bénévent même avaient adopté
cet ufage. On employait l'huile dans l'indallation des
évêques ; & on croyait impr^ner un caradlére de fain-
teté au diadème ^ en y joignant une cérémonie épif.
copale. Un roi Goth , nommé Vantba , fiit facré en
Efpagne avec de l'huile bénite en 674. Mais les Ara-
bes vainqueurs firent bientôt oublier cette Cérémo*
nie , que les Ëfpagnols n'ont pas renouvellée.
Pépin ne fut donc pas le premier roi facré en Eu-
rope , comme nous l'écrivons tous les jours. Il avait
déjà rcqu rette on^flion de l'Anglais Boniface^ miflion^
naire en Allemagne, & évèqu^ de Mayence, qui ayant
tsr X ij
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'" na> ■"
3^ 324 Sacre de Pépin.
1
voyagé longtems en Lombardie^le facrafuivantrufage
de ce pays.
Remarquez attentivement que ce Bomfaee avait été
créé évéque de Mayence par Carioman , frère de Tu-
furpateur Pépin , fans aucun concours du pape , fans
Sue la cour romaine influât alors fur la nominatioa
es évéchés dans le royaume des Francs. Rien ne
vous convaincra plus que toutes les loix civiles &
eccléfiailiques font didées par la convenance y que la
force les maintient , que la faiblefle les détruit , &
que le tems les change. Les évéques de Rome pré-
tendaient une t^utoricé fuprême ^ & ne l'avaient pas.
Les papes fous le joug des rois Lombards auraient
laiffé toute la puiifance eccléfiaftique en France au
premier Franc qui les aurait délivrés do joug en Italie.
Le pape Etienne avait plus befoin de Pépin , que
Pépin n'avait befoin de lui ; il y parait bien , puifque
ce fut le prêtre qui vint implorer la protedion du
Î;uerrier. Le nouveau roi fit renouveller fon facre par
'évéque de Rame dans Péglife de St. Dpnis:cefait
parait fingulier ; on ne fe fait pas couronner deux
fois, quand on croit la première cérémonie fufiifante.
Il parait donc que dans l'opinion des peuples , un
évéque de Rome était quelque chofe de plus {aintt
de plus autorifé , qu'un évéque d'Allemagne ; que les
moines de St. Denis , chez qui fe faifait le fécond
facre , attachaient plus d'efficacité à l'huile répandue
fur |a tête d'un Franc, par un évéque Romain, qu'à
Fhuile rénandue par un miflionnaire de Mayence, ,&
que le fuccefTeur de St. Pierre avait plus droit qu'un
autre de légitimer une ufurpation.
Pépin fut le premier roi facré en France , & non
le feul qui l'y ait été par un pontife de Rome : car In-
nocent III couronna depuis , & facra Louis le jeune
à Rhcims. Clovis n'avait été ni couronné , ni facre roi
par l'évéque Rend, Il y avait longtems qu'il régnait
m^ia^s^
■«Pr«â^^
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afeg^M' "^i^Mi \iwm
1
Sacre d s s r o i s. 32^
quand il fut batifé. S'il arait reçu Tondion roysile ,
fes fuccefTeurs auraient adopté une cérémonie fi folem-
nelle , devenue bientôt néceflaire. Aucun ne ftit faccé
jufqu'à Pefin » qui lequt Tonâion dans Tabbaye de
Sl Denis.
Ce ne fut que trois cent ans après Clovis que l'ar-
chevêque de Rheims Hmcmar écrivit qu'au facre de
Clovis Vin. pigeon avait apporté du ciel une phiole
qu'on appelle la yà/»^^ ampoule. Peut -être crut -il
fortifier par cette fable le droit de facrer les rois ,
que ces métropolitains cpmmenqaient alors à exercer.
Ce droit ne s'établit qu'avec le tems , comme tous
les autres ufages : & ces prélats longtems après facrè-
rent les rois ^ depuis Philippe l jufqu'à Henri IV ^
qui fut couronné à Chartres , & oint de Tampoule
de St, Martin , parce que les ligueurs étaient mai-
8 très de l'ampoule de St. Rémi. J
Il eft vrai que ces cérémonies n'ajoutent rien aux i|
droits des monarques , mais elles femblent ajouter à
la vénération des peuples.
Il n*eft pas douteux que cette cérémonie du facre ,
auffi- bien que l'ufage d'élever les rois Francs , Goths
& Lombards fur un bouclier , ne vinffent de Conf-
tantinople. L'empereur C«if^«ç«/?we nous apprend lui-
même que c'était un ufage immémorial d'élever les em-
pereurs fur un bouclier foutenu par les grands offi-
ciers de Pçmpîre & par le patriarche ; après quoi
l'empereur montait du trône au pupitre de l'églife ,
& le patriarche faîfait le figne de la croix fur fa tête ,
avec un plumaffeau trempé dahs dç l'huile bénite;
les diacres apportaient la couronne. Le principal offi-
cier , ou le prince du fong impérial le plus proche ,
mettait la couronne fur la tête du nouveau céfar. Le
patriarche & le peuple criaient , // en eft digne. Mais
au facre des rois d'Occident , l'évêque dit au peuple :
Voulez-voïù ce roi ? Et enfuite le roi fait ferment au
& peuple après l'avoir fait aux évêques.
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Wfftti^
t
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^!2£ ORieiVE DE :LA FULSSâVCB
Xe pape EpUmte ii« s'en tint pas avec PtftM à cette
-cérémonie; il défendit aux Français , fous peine d'ex-
communication , de fe donner jamais des rois d'uae
autre jrace. Tandis que cet, éyéque , dhaiDé de fa patrie ,
& fuppliant dans une terre étrangère , avait le cpu-
rage de donner des loix , fa politique prenait une
autorité qui aflurait celle de Pépin ,• & ce prince »
^our mieux jouir de ce qui ne lui était pas dû , laifTait
?iu pape des droits qui ne lui appartenaient pas.
Hugues Capet en France , & Conrad en Allemagne ,
firent voir depuis qu'une telle excommunication n'eft
pas une loi fondamentale.
Cependant Popînion qui gouverne le monde , îm-
prima d*abord dans les efprits un fi grand refped pour
la cérémonie faîte par le pape à St. Denis , qu'Eginbart
fecrétaire de Cbarletnagne , dit en termes exprès , que
le r^i aUdiric fia Mpofé fiar ordre. du -pape JEùienm.
Tous ces événemens ne font qu'un ti(Tu d'injuftice^
de rapine , de fourberie. Le premier des domeftiques
^un roi de France d^mlbittfonmattâ'e Hildttic III ^
l'enfermait dans le couvent de St. Berdn , tenait en
prifon le fils de fon maître dans le couvent de Fan-
tenelle en Normandie ; un pape venait de Rome con-
-facrer ce brigandage.
On croirait que c'eft une contradiâion que ce pape
fikt venu en France fe profterner aux pieds de Pepin,^
& difpofer enfuite de la couronne : mais non ; ces
proftememens n'étaient regardés alors que comme le
font aujourd'hui nos révéri^ces. C'était l'ancien ufage
de l'Orient. On faluait les évêques à genoux ; les évé-
ques faluaient de même leç gouverneurs de leur» diocè-
fes. Charles fils de Pépin aviiit embraffé les pieds du pa-
pe Etienne à St. Maurice en Valais : Etienne embralTa
ceux de Pépin, Tout cela était (ans conféquence. Mais
^ peu-à-peu les papes attribuèrent ajeux feuk cette mai-
&^ _
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que de rcfpcCt On prétend que le pape Adrien / fut ce-
lui qui exigea qu'on ne parût jamais devant lui fans lui
bai fer les pieds. Les empereurs & les roJs fe fou-
rnirent depuis comme les autres à cette cérémonie,
qui rendait la rejigicm lamâine plus vénér»ble aux
peuples.
Oà^ nous dît que Pépin paffa les monts en 754 ,
![ue lé Lombard 4^Qiibe intimicjc par la feule pré-
ence du Fra^ip , céda aufti-tôt; au pape tout Texaicat
.de Raverme, que P^jiw repaffa les monts, & qu'à
peine s'en fgt-il retpurnc , quf'JJIoIphi au* lieu de
donner Ravenne au pape ^ mît le fiége devant Rome.
Xoutes les démarches de ces tcnis-là étaient fi kré-
gulières vS^'il fe ppurait à toute force que Pépin e^t
donné aux papes rexarcat de Ravenne qui ne Ici ap-
partenj|it point ,.& qu'il eût même fait cette dona-
tion finguliére du bien d'autrui ^ fans prendre aucune
mefure pour la faire exécuter. Cependant il elt bîe;i
peu vraifemblajl^le qu'un homme tel que P^p^n ^ q^ii
avait détrôné fon^j'oi , n'ait paffé en Italie avec ur^c
armée que pour y aller faire des prcfens. Rien n'eft
^l^^s- douteux qqe c^ite donation ^i^çef <j^ tiu;t de
.livrées. Le bibliothéc^re 4ni^^fe^ç{^i écrivait cei^it
'.quarante ans gpîè^,J'ie>xpéditiaft4^ Pwn , j^je.ftifp-
, mier qui parlç de ^e(te dQn^tiqn. Mille a^^j^uisi V^t
, citée s maîsJe? mçill^s ruWkifiesd'Alleiftagi^ç iarçeft-
tent a^jourd^bgi
Il régnait alors danç les efprits un mélange bizarre de
politique & de fimplicité , de grotTiercté & d'^rtfficc' ,
. qui caradérife bien laidécadence générale. Eiïmiu tei-
gnit une lettre de St, Pierre , adrefïée du ciel à Pépin §c
k fes enficins ; elle mérite d'être rapportée ; la voîci, ;
55 Pierre appelle apôtre par jEsys-CuRiST fUs 4"
Dieu vivant, &Ci. . . Comme par moi toute Tcglife
catholique apoftolique romaine , mère de toutes les
autres égltfes , eftïoiidée.fur la pîefrè , & afin qu'jfi-
tienne cvêque de cette douce égltfé romaine ,'&
aa&ii'jjM., -P^iirj^iv ..■■ . mi
3>
35
Î5
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328 OrIGI'NE'DÊ tA PUt^SANCB
5^ que la grâce & la vertu foîent pleinement accordées
55 du Seigneur notre Dieu pour arracher l'églife de
,5 Dieu des mains des perfécuteurs. A vous excellens
„ Pepiît • Charles , & Carloman trois rois , & à tous
55 faints évèques & abbés, prêtres &tndnes , & même
55 aux ducs , aux comtes , & aux peuples , moi Pierre
55 apôtre , &c. . . je vous conjure , & la vierge Marie
,5 qui vous aura obligation , vous avertit ,' ft Vous
55 commande , auflî -bien que les trônes , les domina-
„ tions. . . Si vous ne combattez pour moi , je vous
déclare par la Ste. Trinité & par mon apoftolat, que
vous n'aurez jamais de part au paradis. ^^ ( a)
5>
Là lettre eut Ton effet. Pepîn pafla les Alpes pour la
fecojide fois. Il affiégea PaVie , & fit encor la paix avec
4ftôiphe, Mais eft-il probable qu'il ait paffé deux fois
les monts uniquement pour donner des viUes^iu pape
Etienne? Pourquoi ?t, Pierre dans fa lettre ne parle-t-il
pas d'un fait fi important ? Pourquoi ne fe plaint-il
pas à Pépin de n'être pas en poflefltan de l'exarcat ?
Pourquoi nfc ïe. l'edemande-t-il pas expreflement ?
Tout ce qui eft vrai , c'eft que les Fi^ncs qui avaient
envahi les Gaules, voulurent toujours fubjuguer l'Ita-
- lie , objet de lia cupidité de tou« les barbares ; non que
-Fltalie foit eri effet un meilleur pays que les Gaules,
-^ais^ alors elle^tait mieux cultivée ; les villes bâties ,
accrues & embellies par les Romain», fubfiftaient; &
la réputation de l'Italie tenta toujours un peuple pau-
vre l inquiet & gû'éi-fîer. Si Pépin zvak pu prendre la
Lombardic ^ comme fit Cbarlemagne , il l'aurait prife
frins doute î & sll conclut un traité avec AJiolpbe ^
c'eft qu'il y lut obKgé. Ufurpateur de la France, il
n*y était pas affermi. Il avait à combattre des docs d*A-
quitaine ^ dé Gafcbgne, doutJes droils fur ces pays
valoient mieux que Éês fiens fur la France. Comment
tpi\jours^té fourbes , & qu*a.
lors , ils étaient fourbes &
groffiers;
(a) QomvçL%v^ aoçorder tant
• d'artifice .& taojt de.bêtife!
c*eft'que lès botnmes ont
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^ D E S P A F E S. 329 *•
donc aurait- il donné tant de terres anx papes , quand
il était forcé de revenir en France , pour y foutenir fon
ufurpation ?
Le titre primordial de cette donation n*a jamais pa-
ru. On eft donc réduit à douter. C*eft le parti qu'il
faut prendre fouvent en hiftoite comme en phîlofo-
phie. Lé St. Siège d'ailleurs n'a pas befoin de ces
titres équivoques ; le tems lui a donné des droits
aufli . réels fur fes états ^ que les autres, fouverains
de l'Europe en ont fur les leurs. Il efl certain que
les pontifes de Rome avaient dès -lors de grands pa-
trimoines dans plus d'un pays ; que ces patrimoinies
étaient refpedtés » qu'ils étaient exempts de tribut. Ils
en aitaient dans les Alpes > en Tofcane , à Spolette «
dans les Gaules ^ en Sicile, & jufques dans la Cprfe ,
avant que les Arabes fe fuflent rendus maîtres de cette
iile au huitième fiécle. Il eft à croire qu^ Pephi fit
augmenter beaucoup ce patrimoine dans le pays de
la Romagne,& qu'on l'appella le patrimoine de l'exar-
cat. C'eft i^obabiement ce mot de patrimoifte qui iîit la
fource de la méprife. Les auteurs poftérieurs fuppofé-
rent dans des tems de ténèbres , que les papes avaient
régné dans tous les pays où >ls avaient feulement pof-
fédé des villes & des territoires*
' Si qbetque pape fur la fin du huitième fiécle pré-
tendit être au rang des princes , il parait que c'eft
Adrien I. La monnoîe qui fut frappée en fon nom ( fi
cette monnoie fut en effet fabriquée de fon tems ) fait
voir qu'il, eut les droits régaliens ; & l'ufage qu'il in-
troduifit de fe faire baifer les pieds , fortifie encor
cette conjeélure. Cependant il recoiinut toujours Tem-
pereur Grec pour fon fouverain. On pouvait très bien
rendre à ce fouverain éloigné un vain hommage , &
s'attribuer une indépendai^ce réelle appuiçe de Tauto-
rite du miniltère eccléfiafUque.
Voyez par quels degrés la puîîTance pontificale de
Rome s'eft élevée. Ce font d'abord des pauvres qui ^
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l ' 33P Etat pe L'éausE znf Orient ,
il
inftruifent des pauvres dans les (buterrftins dt Rome;
ils font au bout de deux fiécles ^ I4 tête d'un trou-
peau confidérable. Ils font riches & refpedés fous
Conjlantin ; ils deviennent patriarches de TOccident ;
ils ont d'immenfes revenus & des tecrejs ; enfin ils
deviennent de grands ibuverains ; mais c'rà ainfi que
tout 8'eft écarté de fon origine. Si les fondateurs de
Rome , de l'empire des Chinois , de celui des caH-
fes 9 revenaient au monde , ils vemiient fiir leurs
trônes des Goths , des Tartares & des Turcs.
Avant d'examiner comment tout changea -en Occi-
dent par la tranflation de Tempire ^ Il âl néceflàire
de vous fàxït une idée de Péglife de rOrient Les
difputes de cette églife ne fervirent pas peu à cette
grande révolution.
CHAPITRE dUATORZlÈME.
E^at de féglife en Orient avant CHARLnfAAQïif.. Que-
relle pour les images. RémluUon de Rome com-
mencée.
QUe les ufages de l'églife grecque & de 1a latine
ayent été difFérens comme leurs langues ; que
la liturgie , les habillemens , les ornemens , laforme des
temples, celle de la croix n'ayent pas été les mêmes;
que les Grecs priaffent debout , & les Latins ji genoux,
ce n'eft pas ce que j'examine. Ces différentes cou-
tumes ne mirent point aux prifes l'Orient & l'Occi-
dent ; elles fcrvaient feulement à nourrir l'averfion
naturelle des nations devenues rivales. Les Grecs
furtoutqui n'ont jamais requ le batéme que par im-
merOon , en fe plongeant dans les cuves ^ bap-
tiftères , haïffaient les Latins , qui en feyeur des
chrétiens fcptentrîonaux introduifirent le hiatême par
Çr ■ _ «
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tg*."*' iiBB8aaBHl>MaP*fa— — ^I^^^Sfti
AVAVT Chaule V ào N e. 33<
^^'^'mi^mmmmmmmmÊÊmitmmmÊmmmmmmmÊaÊammÊmmmÊmmmiÊÊÊmmmÊmmÊmmmmÊmmm
afperfion. Mm ces oppoûtian« n'exeieèrent avouii
trouble.
La domination temporelle , cet éternel ibjct de
dîfcordc dans J*Occident , ftit Inconnue aux églifes
d'Orient. Les évéqucs fous les yeux du majtre reftè-
rent fumets ; mais d'autres querelles non moins fu-
nettes y furent excitées par ces difputes intermina-
bles , nées de l'elprit fophiftique des Grecs §^ de
leurs difputes. *
La (implicite des premiers tems difparut fous le
mnd nombre de queftions que forma U curiofit^
humaine ; car le fondateur d^ la religion n'ayant ja-
mais rien écrie , & les hommes Toulant tout favoir ,
chaque myftère fit naître 4ès opinioo^ , & Q^f^aquie
opinion coûta du fSuig,
C'eft une chofe très remarquable , que de près et
quatre-vingt fedtes qui avaient déchiré l'églîfe depuis
ia naiffanoe , aucune n'avait eu un Romain pour au-
teur, fi on excepte NovuMaji , qu'à peine encor on
t>6ut -regarder comme un hérétique. Aucun Romain
dans les cinq premiers fiéçles ne fut con>pté ni
jpaçmi les 43 ères de régJîfe, ni parmi les hcréfiar-
^ues. Il femble qu'ils ne furent que prudens. D-e
tous les évéques de Rome il n*y en eut qu'un feul qui
favorifa un de ces fyftcmes condamnés par i'églife ;
c'eft le papç Houorius L 0.n Taccufe encor toos les
jours d'avoir été monothélfte» On croit par -là flétrit
fa mémoire ; mais fi on fe donne la peine de lire fa
-fameufe lettre pa^orale , (ians laquelle II n'attribue
qu'une volonté à. Jes^s-Chb^ist ,«ii> verra un jioinnve
très fage. Nous confejf'ons , dit-il , une feule volonté
dans JesuS-Christ. Nous ne voyons point qne Us con-
ciles , fit récriture nous autorifent à penfer autrement :
mais de favoir Jt â caufedes œuvres de divinité Êf ^^'^-
manitéquifontenlui^ on, doit entendre une opération
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%)S^tkÊi*
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332 Etat db l'église en Orient, &a
OU deux , c^êjl ce que je laiffe aux grammairiens , ^
ce qui n'importe guères, (a)
Peut-être n*y a^-t-il rien de plus précieux dans
toutes les lettres des papes que ces paroles. Elles
nous convainquent que toutes les difputes des Grecs
étaient des difputes de mots , & qu'on aurait dû af-
foupir ces querelles de fophiiîes dont les fuites ont
été fi funeiles. Si on les avait abandonnées aux gram-
mairiens , oomme le veut ce judicieux pontife, réglife
eût été dans une paix inaltérable. Mais voulut-pnfavoir
$ le fils était confubftantiel au père., ou. feulement dé
même nature, ou d'une nature inférieure ? Le monde
chrétien fut partagé ; la moitié perfécuta l'autre, & en
fut perfécutée. Voulut- on favoir fi la mère de Jesus-
Christ était la ftière de DiEu , ou de Jésus ? fi
le Christ avait deux natures & deux volontés dans
une même perfonne , ou deux perfonnes & une vo-
lonté , ou une volonté & une perfonne ? Toutes ces
difputes ,' nées dans Conftantinople , dans Antioche,
dans Alexandrie , excitèrent des féditions. Un parti
anathématifait l'autre ; la fadion dominante condam-
nait à l'exil , à la prifon , à la mort , & aux peines
éternelles après la mort l'autre faétion , qui fe ven-
geait à fon tour par les mêmes armes.
De pareils troubles n'avaient point été connus dans
le paganifme ; la raifon en eft , que les payens dans
leurs erreurs groffières , n'avaient point de dogmes ,
& que les prêtres des idoles , encore moins les fe-
cuHers , ne s'aiTemblèrent jamais juridiquement pour
difputer.
Dans le huitième fiécle on agita dans les églifcs d'O-
rient s'il felait rendre un culte aux images. La w^
&
(a) En effet tontes les
miférables querelles des théo-
logiens n*ont jamais été que
des difputes de grammaire ,
fondées fur des équivoques,
fur des queftions abfordes
inintelligibles qu'on a mifes
pendant quinze cent ans à la
place de la vertu.
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QyERELLBS POUR LES IMAGES. 333 é
de Jfojfe l'avait cxpreffémcnt défendu. Cette loi n'a-
vait jamais été révoquée ; & les preiqiers chrétiens ,
pendant plus de deux cent ans , n'avaient même ja-
mais foufFert d'images dans leurs all'emblées.
Peu - à - peu la contume s'introduifit partout
d'avoir chez foi des crucifix. Enfuite on eut les
portraits vrais ou faux des martyrs ou des con-
feffeurs. Il n'y avait point encore d'autels éri-
gés pour les faints , point de mefles célébrées en
leur nom. Seulement , à la vue d'un crucifix & de
l'image d'un homme de bien , le cœur ^ qui furtout
dans ces climats a befoin d'objets fenfibles» s'exci-
tait à la piété.
Cet ufage s'introduifit dans les églifes. Quelques
évéques ne Padoptèrent pas. On voit qu'en 999 St.
Epipbane arracha d'une églife de Syrie une image
devant laquelle on priait II déclara que la religion
chrétienne ne permettait pas ce culte :'& (a févérité
ne caufa point de fchiûne.
Enfin cette pratiquepieufe dégénéra enabus, comme
toutes les chofes humaines. Le peuple , toujours
groffier , ne diilingua point DiEU & les images. Bien-
tôt on en vint jufqu'à leur attrribuer des vertus &
des miracles. Chaque image guériflait une maladie»
On les mêla même aux fortilèges , qui ont prefque
toujours féduit la crédulité du vulgaire. Je dis non-
feulement le vulgaire du peuple , mais celui des prin-
ces , & même celui des favans.
En 727 l'empereur Léon l'Ifaurien voulut , à la per-
fuafion de quelque évéques , déraciner l'abus ; mais ,
par un abus peut -être plus grand ^ il fit effacer toutes
les peintures. Il abattit les flatues& les repréfentatior»
^e JesusXhrist avec celles des faints; en ôtant ainfi
tout-d'un-coup aux peuples les objets de leur culte , il
I!
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334
Q.U E R E L L E s
1
I
les révolta ; on dérobéït : il perfécata ; il devint ty-
tan , parce qu41 avait été imprudent.
Il eft honteux pour notre fiécle qu'il y ait encor des
compilateurs qui répètent cette ancienne fable , que
deux Juifs avaient prédit Tempire à Léon , & qu'ils |
avaient exigé de lui qu'il abolit le culte des images ;
comme s*il eût importé à des Juifs que leS^ chrétiens
eufTentou non des figures dans leurs églifes. Les hit
toriens qui croyent qu'on peutainfi prédire l'avenir,
font bien indignes d'écrire ce qui s'eft pafTé.
Son fils , Conjiantîn Copronyme , fît pafTer en loi
civile & cccléfiaftique^ l'abolition des images. Il tint
à Conftantinople un concile de trois cent trente-huit
évéques ; ils profcri virent d'une commune voix ce
culte 9 requ dans plufieurs églifes , & furtout à Rome.
Cet empereur eût voulu abolir auffi aifément les
moines , qu'il avait en horreur , & qu'il n'appellait
que les abominables ; mais il ne put y réuffir : ces
moines, déjà fort riches , défendirent plus habilement
leurs biens que les images de leurs faints.
Les papes Grégoire II & IIIy& leurs fucceffeurs,
ennemis fecrets des empereurs , & oppofés cuver-
tement à leur dodlrine , ne lancèrent pourtant point
ces fortes d'excommunications , depuis fi fréquem-
ment & fi légèrement employées. Mais foît que ce
vieux refped pour les fucceffeurs des Céfars contint
encore les métropolitains de Rome , foit plutôt qu'ils
viffent combien ces excommunications , ces interdits,
ces difpenfes du ferment de fidélité feraient mépri-
fées dans Conffeintinople , où l'églife patrîarchale s'é-
galait au moins à oelie de Rome , les papes tinrent
deux conciles en 728 , & en 792 , où l'on décida
que tout ennemi des images ferait excommunié , fans
rien de plus , & fans parler de l'empereur. Ils fon-
gèrent dès4brs plus à négocier qu'à difputer. Gré-
Smm^
■»i mSté (kl
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i^s^
il
POUR LES IMAGES. 335
goire II fe rendit maître des affaires dans Rome ,
pendant que le peuple foulevé contre les empereurs
ne payait plus les tributs. Grégoire III fe conduifit
fuivant les mêmes principes. Quelques auteurs Grecs
pofiérieurs roulant rendre lés papes odieux , ont écrit
que Grégoire II excommunia & dépofa l'empereur,
éc que tout le peuple Romain reconnut Grégoire II
pour fon fouveraîn. Ces Grecs ne fongeaient pas que
les papes qu'ils voulaient faire regarder comme des
ufurpatèurs , auraient été dès-lors les princes les plus
légitimes. Ils auraient tenu leur puiffance des fuifrages
du peuple Romain : Ils eulfent été fouverains de Rome
à plus jufte titre que beaucoup d'empereurs. Mais il
n'eft ni vraifemblable , ni vrai , que les Romains me-
nacés par Léon l'Ifaurien , preffés par les Lombards ,
euHent élu leur évéque pour feul maître , quand ils
avaient befoin de guerriers. Si les papes avaient eu
dès-lors un *fi beau droit au rang des Céfars , ils n'au-
raient pas depuis transféré ce droit à Cbarîemagne.
CHAPITRE aUINZIÉME.
De CharleMAGNE. Son ambition , fa politique. Il
dépouille f es neveux de leurs états. Opprejfion 6?
converjîon des Saxons , f^c,
LE royaume de Pépin , ou Pipin , s'étendait de la
Bavière aux Pyrénées & aux Alpes. Kurl fon fils,
que nous refpedtons fous le nom de Cfoarletnagne ,
recueillit cette fucceflîon toute entière ; car un de
fcs frères était mort après le partage , & l'autre s'é-
tait fait moine auparavant au monaftère de St. Syl-
veftre. Une cfpèce de piété qui fe mêlait à la bar-
barîe de ces tems, enferma plus d'un prince dans le
cloître ; ftînfi Racbis , roi des Lombards , un Car^
iomaH , frère de Pépin , un duc d'Aquitaine , avaient
I
V
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Charlemaons. . !
pris rhabit de bénédidin. II n'y avait prefque alors que
cet ordre dans rOccident. Les couvcns étaient riches,
puiflans , refpeélés ; c'étaient des afyles honorables
pour ceux qui cherchaient une vie paifible. Bientôt
après ces afyles furent les prifons des princes dé-
trônés.
La réputation de Cbarkmagne eft une des plus
grandes preuves que les fuccès juflifient l'injuftice &
donnent la gloire. Pépin fon père avait partagé en
mourant fes états entre fes deux enfi^ns , Karlnm^
ou Carloman , & KarL Une aflcmblée (blemneUe de
la nation avait ratifié le teftament. Carloman vf^^
la Provence , le Languedoc , la Bourgogne , la Suiffc
& l'Alface , & quelques pays circonvoifins. IM ou
Charles jouïffait de tout le refte. Les deux frères fu-
rent toujours en méfintelligence. Carloman mourut
Sfubîtcment , & laifla une veuve & deux enftns en
bas âge. Charles s'empara d'abord de leur patrimoine.
- La mère fut obligée de fuir avec fes ehfans chez le
roi des Lombards Déjtdérius , que nous nommons Di"
dier , ennemi naturel de« Francs ; ce Didier était
beau-père de Charlemagne , & ne l'en haiffait pas
moins , parce qu'il le redoutait. On voit évidemment
que Charlemagne ne refpedla pas plus le droit natu-
rel & les liens du fang que les autres conquérans.
Pépin fon père n'avait pas eu à beî^ucoup près le
domaine direâ dé tous les états que pofTéda Cbar-
lemagne, L'Aquitaine , la Bavière , la Provence , h
Bretagne , pays nouvellement conquis , rendaient hom-
mage & payaient tribut
Deux voifms pouvaient être redoutables à ce vaftc
état , les Germains feptentrionaux & les Sarrazins.
L'Angleterre , conquifc par les Anglo-Saxons , parta-
gée en fept dominations , toujours en guerre avec
â l'Albanie qu'on nomme Ecoffe , & avec les Danois ,
était fans politique & fans puiffancc. L'Italie, feî-
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ii
||gttr>» M^apii iiifg^jl
Charlemagne. 337
ble & déchirée , n'attendait qu'un nouveau maitre
qui voulût s'en emparer.
Les Germains feptentrionaux étaient alors appelles
Saxons. ' On connaiiTait fous ce nom tous ces peuples
qui habitaient les bords du Véfer & ceux de l'Elbe»
de Hambourg à la Moravie , & du bas-Rhin à la mer
Baltique. Ils étaient payens , ainfi que tout le fep-
tentrion. Leurs mœurs & leurs loix étaient les mê-
mes que du tems des Romains. Chaque canton fe
gouvernait en république ; mais ils élifaient un chef
i)our la guerre. Leurs loix étaient fimples comme
eurs mœurs ) leur religion groflîére : ils facrifiaient ,
dans les grands dangers , des hommes à la Divinité >
ainfi que tant d'autres nations ; car c'cft le cara(ftère
des barbares , de croire la Divinité maifaifante : les
hommes font Dieu à leur image. Les Francs quoi-
que déjà chrétiens , eurent fous Tbiodebert cette fu-
perftition horrible : ils immolèrent des viâimes hu-
maines en Italie , au rapport de Procope , & vous
n'Ignorez pas que trop de nations , ainfi que les Juifs ^
avaient commis ces facriléges par piété. D'ailleurs
les Saxons avaient confervé les anciennes mœurs
germaniques , leur finiplicité , leur fuperftîtion , leur
pauvreté. Quelques cantons avaient futtout gardé Tef-
prit de rapine , & tous mettaient dans leur liberté
leur bonheur & leur gloire. Ce font eux qui fous
le nom de Cattes , de Chéruskes & de Bruyères ,
avaient vaincu Varus , & que Germanicus avait en-
fuite défaits.
Une partie de ces peuples vers le cinquième fiécle ,
appetlée par les Bretons infulaires contre les habitans
de l'Ecoffe, fubjugua la Bretagne qui touche à l'Ecoffe ,
& lui donna le nom d'Angleterre. Ils y avaient déjà
pafle au troifiéme fiécle ; & au tems de Conjlantin ,
les côtes de cette ifle étaient appellées les côtes Saxo-
niques.
Ejfaifur les mœurs , &c. Tom. L Y
^#^ I ■ ' I iwiJTj !■ riL&l
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i
33g Charlemagnë^
Cbarlemagne , le plus ambitieux , le pIUs politique,
& le plus grand guerrier de fon fiécle , fit la guerre
aux Saxons trente années avant de les aflujettir plei-
nement. Leur pays n'avait point encor ce qui tente
aujourd'hui la cupidité des Conquérans : les riches
mines de Goilar & de Friedberg , dont on a tiré tant
d'argent , n'étaient point découvertes ; elles ne le
furent que fous Henri foifeleur. Point de richeffes
a^amulées par une longue induftrie » nulle ville di-
gne de l'ambition d'un ufurpateur. Il ne s'agilTait
que d'avoir pour éfclaves des millions d'hommes
qui cultivaient la ttXtt fous un climat trille , qui
nourriraient kurs troupeaux ^ & qui ne voulaieot
point dé maîtres.
La guerre contre les Saxons avait commencé pout
un tribut de trois cent chevaux , & de quelques va-
ches que Pépin avait exigé d'eux > & cette guerre
dura trente années. Quel di^it les Francs avaient-
ils fur eux? Le même droit que ces Saxons avaient
eu fur l'Angleterre.
Ils étalent mal armes ; car je vois dans les capi-
tulaires de Cbarlemagne une défbnfe rigoureufe de
vendre des cuirafles aux Saxons. Cette difierence
des armes , jointe à la difcîpline , avait rendu les
Romains vainqueurs de tant de peuples : elle fit triom-
pher enfin Cbarlemagne.
Le général de la plupart de ces peuples était ce
fameux Vîtikind , dont on fait aujourd'hui defcendre
les principales maifons de l'empire : homme tel qu'iir-
mînius , mais qui eut enfin plus de faibleffe. Charles
prend d'abord la fameufe bourgade d'Eresbourg ; car
ce lieu ne méritait ni le nom de ville , ni celui de
fortereffe. Il fait égorger les habitans ; il y pille &
rafe enfuite le principal temple du pays , élevé au-
trefois au Dieu Tanfana^ principe univerfel , fi jamais
ces fauvages ont connu un principe univerfel. Q
^'gfl-jiM m«m\i^ jpif&St*
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«-*»îf«l
s AX ON s P £«. s é CUTi s. 339 |f
était alors dédié au Dieu Irrmnfid s &it que ce Dieu
fût celui de la guerre > Vôtres des Grecs , le Mars
des Romains , foie qu'il eût été confacré au célèbre
Hirmtm Artmnitu * vainqueur de Varus & vengeur
de la liberté germanique*
On y maflacra les prêtres fur les débris de Tidole
renverfée. On pénétra jufqu'au Véfeir avec l'armée .
viâorieufe. Tous ces cantons fe fournirent. Cbarlt"
magne voulut les lier à fon joug par le chriftianifme.
Tandis qu'il court ^ l'autre bout de fes états à d'au*
très conquêtes , il leur lai0e des miffionnaires pour
les perfuad^r , & des foldats pour les forcer. Fre&
que tous ceux qui habitaient vers le Véfer , fe trou*
vèrent en un an chrétiens , mais efclaves.
Vitikind , retiré chez les Danois , qui tremblaient
déjà pour leur liberté & pour leurs Dieux , revient
au bout de quelques années* Il ranime fes compa*
triotes , il les raffemble. Il trouve dans Brème , ca«
pitale du pays qui porte ce nom , un évéque , une
églife , & fes Saxons défefpérés y qu'çn traine à des
autels nouveaux. Il chafle 1 évéque ^ qui a le tems de
fuir & de s'embarquer. Il détruit le chriftianifme , qu'on
n'avait embralTé que par la force. Il vient jufqu'auprès
du Rhin , fuivi d'une multitude de Germains, U bat
les lieutenans de Cbariemagnc,
Ce prince accourt : il défait à fon tour Vitikînd$
mais il traite de révolte cec effort courageux de li-
berté. U demande aux Saxons tremblans qu'on lui
Livre leur général ; & fur la nouvelle qu'ils l'ont laiiTé
retourner en Dannemarck , il fait maffaçrer quatre
mille cinq cent prifonniers au bord de la petite lu
yière d'Aire, il ces prifonniers avaient été des fujets
rebelles , un tel châtiment aurait été une févérité hor-»
rible ; mais traiter ainG des hommes qui combattaient
& pour leur liberté & pour leurs ioix , c'eftPaélion d'un
ifgjiii <pi<Hii "Il iiiiftiTi'
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jBtg^j" "iin»M" '"^^m
340 Charlemagne.'
brigand , que d'illufires fûccès & des qualités bril-
lantes ont d'ailleurs fait grand-homme.
. Il falut encore trois vidtoires avant d'accabler ces
peuples fous le joug. Enfin , le fang cimenta le chrifl
tianifme & la fervitudc. Vitikind lui-même , lafTé de
fes malheurs , fut obligé de recevoir le batême , &
de vivre déformais tributaire de fon vainqueur.
Charles pour mieux s'affurer du pays , tranfporta
environ dix mille familles faxonnes en Flandre , en
France & dans Rome. Il établit des colonies de
Francs dans les terres des vaincus. On ne voit de-
puis lui aucun prince en Europe qui tranfporte ainfi
des peuples malgré eux. Vous verrez de grandes
émigrations , mais aucun fouverain qui établilTe ainfi
des colonies fuivant Tancienne méthode romaine ;
c^eft la preuve de la politique & de l'excès du de£^
potifme , de contraindre ainfi les hommes à quitter
le lieu de leur nailTance. Charles joignit à cette po-
litique la cruauté de faire poignarder par des efpions
les Saxons qui voulaient retourner à leur culte. Sou-
vent les conquérans 'ne font cruels que dans la guer-
re : la paix amène des mœurs & des loix plus dou-
ces. Charlemagne au contraire fit des loix qui te-
naient de Finhumanité de fes conquêtes.
Il inftitua une jurifdidtion plus abominable que
TinquiCtion ne le fut depuis. C'était la cour Veî-
mique , ou la cour de Veftphalie dont le fiége fub-
fifia longtems dans le bourg de Dortmund. Les juges
prononçaient peine de mort fur des délations fecret-
tes , fans appeller les accufés. On dénont;ait un Saxon
poffeffeur de quelques beiliaux , de n'avoir pas jeûné
en carême. Les juges le condamnaient , & on en-
voyait des aflaffins qui l'exécutaient & qui faififlaient
fes vaches. Cette cour étendit bientôt fon pouvoir
fur toute l'Allemagne : il n'y a point d'exemple d'une
^ telle tyrannie , & elle était exercée fur des peuples »
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Charlemàone. 341 jp
libres. Et Daniel ne die pas un mot de cette cour
Veimique ! 65: Véli qui a écrit fa féche hîltoîre n'a
pas été inftruit de c$ fait fi public ! & il appelle Char-
lemagne religieux monarque » ornement de Thu-
manité.
Ayant vu comment ce conquérant traita les Ger-
mains, obfervons comment il fe conduifit avec les
Arabes d'Ëfpagne. Il arrivait déjà parmi eux ce qu'on
vit bientôt après en Allemagne , en France & en Ita-
lie. Les gouverneurs fe rendaient indépendans. Les
émirs de Barcelone & ceux de SarragofTe s'étaient
mis fous la protection de Pépin. L'émir de Sarra-
gofle , nommé Ibnal Arabi , c'eft-à-dire , Ibnal TA-
rabe , en 778 vient jufqu'à Paderborn prier Cbarle-
magne de le fou tenir contre fon fouverain. Le prince
Français prit le parti de ce mufulman ; mais il fe
8 donna bien garde de lé faire chrétien. D'autres in- J
téréts , d'autres foins. Il s'allie avec des Sarrazins h
contre des Sarrazins ; mais après quelques avantages ^
fur les frontières d'Efpaene , fon arrière-garde eft dé«
faite à Roncevaux , vers les montagnes des Pyrénées,
par les chrétiens mêmes de ces montagnes , mêlés
aux mufulmans. C'eft-là que périt Roland fon neveu.
Ce malheur eft l'origine de ces fables qu'un moine
écrivit au onzième fiécle, fous le nom de l'archevê-
que Turpin , & qu'enfuite l'imagination de VArioJie a
embellies. On ne fait point en quel tems Charles
cffuya cette difgrace ; & on ne voit point qu'il ait
tiré vengeance de fa défaite. Content d'afTurer fes
frontières contre des ennemis trop aguerris, iln'em-
braife que ce qu'il peut retenir , & régie fon ambi-
tion fur les conjondures qui la favorifent.
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Charlbmâgke
mmamÊÊmmaÊÊi^mÊÊÊÊmmmÈÊmÊmmÊÊmÊmÊmÊÊÊÊKÊÊÊiÊmÊÊmmÊÊmmmmÊmÊÊam
•^^ ■ - - -, I .1.1-
CHAPITRE SEIZIÈME.
CharlemâgNB empereur d'Occident.
C^Eft à Rome & à Tempire d'Occident que cette
ambition afpirait. La puilTance des rois de Loin-
bai;die était le feul obftacle ; Téglife de Rome , &
toutes les églifes fur lefquelles elle influait ; les moi-
nes ) déjà puiflans , les peuples , déjà gouvernés par
eux , tout appellait Cbartemagne à Tempire de Rome.
Le pape Adrien^ né Romain, homme d'un génie adroit
& ferme ^ applanit la route. D'abord il l'engage à ré-
pudier la fille du roi Lombard Didier , chez qui l'in-
fortunée belle-fœut de Charles s'était réfugiée avec
fes enfans.
Les mœurs & léâ loiz de ce tems-là n'étaient pas
gênantes , du moins pour les princeà. Charles avait
époufé cette fille du roi Lombafd dans le tems qu'il
avait déjà , dit-on , une autre femme. II n'était pas
rare d'en avoir plufieurs à la fois. Grégoire de Toufs
rapporte que les rois Contran , Caribert , Sigebert^
Cbilperic avaient plus d^une époufe. Charles répudie
la fille dé Didier falls aucune raifon ^ fans aucune
foriqalité.
Le toi Lombard qui voit 6ette union fatale du roi
& du pape contre lui , prend un parti courageux.
Il veut furprendre Rome , & s'aiTurer de la perfonne
du pape ; mais l'évéqùe habile fait tourner la guerre
en négociation. Charles envoyé des ambafTadeurs pour
gagner du tems. Il rcdeittande au roi de Lombardie
fa belle-fœur &fes deux neveut. Non*feUlément />/-
dier refufe ce facrifice ^ mais il veut faire facrer rois
ces deux enfans ^ & leur faire rendre leur héritage.
Charlemagne vient de Thionvillé à Genève , tient dans
^ Gernèvc on de ces parlemens qui en tout pays fouf- ||
tf giâ'j h I II iii m}M' m 1 1 ■»! ittS'*
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ll]S«idÉi»
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S M p ï R p y ^.
34?
crivirent toujours aux volontés d'un conquérant ha-
bile. Il pafTe le Mont-Cenis , il entre dans la Lom-
bardîe. Didier après quelques défaites s'enferme dans
Pavie fa capitale ; Cbarlemagne Vy afliége au milieu
de l'byvcr. La ville , réduite à Tcxtrémité , fe rend
après un fiége de fix mois. Ainfi finit ce royaume des
Lombards , qui avaient détruft en Italie la puiiTance
Romaine , & qui avaient fubftitué leurs loix à celles
des empereurs. Didier , le dernier de ces rois , fot
conduit en France dans le monaftère de Corbie , où
il vécut & mourut captif & moine , tandis que foa
fils allait inutilement demander des fecours dans Conf-
tantlnople à ce fantôme d'empire Romain , détruit
en Occident par fes ancêtres. U faut remarquer que
Didier ne fut pas le feul fouvcrain que Cbarlemagne
enferma ; il traita ainfi un duc de Bavière & fes
enfans-
La belle-fœur ,de Charles & fes deux enfens furent
remis entre les mains du vainqueur. Les hiftoriens ne
nous apprennent point s'ils furent auffi confinés dans
un monaftère , ou mis à mort.
Cbarkmagne n'ofait pas encor fe faire fouveraîn
de Rome ; il ne prit que le titre de roi d'Italie ,
tel que le portaient les Lombards. U fe fii couronner
comme eux dans Pavie d'une couronne de fer , qu'on
garde encore dans la petite viile de Mon^a. La jufticc
s'adminiftrait toujours à Rome , au nom de l'empe-
reur Grec. Les papes recevaient de lui la confirma-
tion de leur élection. C'était l'ufagç que le fénat écri-
vit à l'empereur ou à l'exarque de Ravenne , quand
il y en avait un : Notts vous fitffliçns Xwàonner la
conjjscration de notre fère ê? pafteur. On en donnait
part au métropolitain de Ravenne. L'élu était obligé
de prononcer deux profcffions de foi. U y a loin de'
là à la thiare ; mais eft-il quelque grandeur qui n'ait
^ eu de faibles commencemens ?
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Hg^J"" ■
344 CHAIILEMA6NE
^— ■MW^ta— ^fc— ■ ■ ■ ——————
Cbarieniagne prit ^ ainfi que Pépin , le titre de Pa-
trice , que Thiodoric & Attila avaient auffi daigné
prendre ; ainfi ce nom d'empereur , qui dans fon ori-
gine ne défignait qu'un général d'armée , fignifiait en-
core le maître de l'Orient & de l'Occident. Tout vain
qu'il était , on le refpedait , on craignait de l'ufur-
per ; on n'afFeétaît que celui de Patrice , qui autrefois
voulait dire fénateur romain.
Les papes , déjà très puiiTans dans l'églife , très grands
feigneurs à Rome, & poiTefleurs de plufieurs terres ,
n'avaient dans Rome même qu'une autorité précaire
& chancelante. Le ptréfet , le peuple , le fénat , dont
l'ombre fubfiftait , s'élevaient fouvent contr'eux. Les
inimitiés des familles qui prétendaient au pontificat ,
rempliflaient Rome de confufion.
Les deux neveux A^ Adrien conspirèrent contre Um
III fon fuccefieur , élu pape félon l'ufage par le peu-
ple & le clergé romain. Ils l'accufent de beaucoup
de crimes ; ils animent les Romains contre lui : on
traîne en prifon , on accable de coups à Rome celui
qui était fi refpedé partout ailleurs. Il s'évade , il
vient fe jetter aux genoux du patrice Cbarlemagne
à Paderborn. Ce prince qui agiiTait déjà en maitre
abfolu , le renvoya avec une efcorte & des commif-
fdires jpour le juger. Ils avaient ordre de le trouver
innocent. Enfin Cbariemagne ^ maitre de l'Italie , com-
me de l'Allemagne & de la France , juge du pape , ar-
bitre de l'Europe , vient à Rome à h fin de Tan-
née 799. L'année commentait alors à Noël chez les
Romains. Léon III le proclame empereur d'Occident
pendant la meflTe le jour de Noèl en goo. Le peu- *
pie joint fes acclamations à cette cérémonie. Cbar"'
les feint d'être étonné. Et notre abbé Vili copiftc
de nos légendaires , dit , ^ue rien ne fut égal à fa
fttrprife. Mais la vérité eft que tout était concerté
entre lui & le pape , & qu'il avait apporté des pré-
fens immenfes qui lui affuraîent le fuffrage de l'évê-
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EMPEREUR. 34^
que & des premiers de Rome. On voit par des char-
tes accordées aux Romains en qualité de patrice,
qu'il avait dcja brigué hautement l'empire ; on y lit
ces propres mots , Nous efpérons que notre muniju
cence poura nous élever à la dignité impériale, (a)
Voilà .donc le fils d'un domeftîque , d'un de ces
capitaines Francs que Conjiantin avait condamnés aux
bêtes , élevé à la dignité de Conjiantin. D'un côté
un Franc , de l'autre une famille Thrace partagent
l'empire Romain. Tel eft le jeu de la fortune.
On a écrit, on écrit encore, que C&ar/pJ avant même
d'être empereur , avait confirmé la donation de l'cxar-
cat de Ravenne , qu'il y avait ajouté la Corfe , la
Sardaigne , la Ligurie , Parme , Mantouë , les du-
chés de Spolette & de Bénévent , la Sicile , Venife ,
& qu'il dépofa l'ade de cette donation fur le tom- A
beau dans lequel on prétend que repofent les cen- B
dres de St. Pierre & St. PauL »
On pourait mettre cette donation à côté de celle
de Conjiaiitin. {b) On ne voit point que jamais les
papes ayent pofledé aucun de ces pays jufqu'au tems
d'Innocent IIL S'ils avaient eu l'exarcat , ils auraient
été fouvcrains de Ravenne & de Rome } mais dans
le teftament de Cbarlemagne qu'Eginbart nous a con.
fervé , ce monarque nomme à la tête des villes mé-
tropolitaines qui lui appartiennent, Rome & Raven-
ne , auxquelles il fait des préfens. Il ne put donner
ni la Sicile , ni la Corfe , ni la Sardaigne qu'il ne
poffédait pas , ni le duché de Bénévent , dont il
avait à peine la fouveraineté , encore moins Venife
qui ne le reconnaiflait pas pour empereur. Le duc
de Venife reconnaiflait alors pour la forme l'empe-
reur d'Orient , 65: en recevait le titre i*Hippatos. Les
lettres du pape Adrien parlent des patrimoines de
Voyez l'annalifte rerum italiarum tom. IL
Voyez les écUirciflTemeos.
f^M ' m mJL^^4m^ «*F
nfibSl^A
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* 34«f
Chârlemaone
^
Spolette ^ & de Bénévent ; mais ces patrimoines ne
fe peuvent entendre que des domaines que les papes
poiTédaient dans ces deux duchés. Grégoire VII lui-
même avoue dans (es lettres que Cbarlemagne don-
nait douze cent livres de penfion au St. Siège. Il n*eft
gucfcs vraifcmbiable qu'il eût donné un tel fccours
a celui qui aurait polTédé tant de belles provinces.
Le St Siège n'eut Bénévent que longtems après , par
la conceffion très équivoque qu'on croît que l'cmp^
reur Henri lenoir lui en fit vers l'an 1047. Cette concef-
fion fe réduifit à la ville , & ne s'étendit point jut
qu'au duché. Il ne fut point quellion de confirmer
le don de Cbarlemagne.
Ce qu'on peut recueillir de plus probable au mi-
lieu de tant de doutes , c'eft que du tems de Cbar-
lemagne , les papes obtinrent en propriété une par-
tie de la marche d'Ancone , ootrç les villes , les châ-
teaux & les bourgs qu'ils avaient dans les autres pays.
Voici fur quoi je pourais, me fonder. Lorfque l'em-
pire d'Occident ferenouvella dans la famille des Otborts
au dixième fiécle, Otbon JJ/affigna particulièrement
au St. Siège la marche d'Ancone , en confirmant tou-
tes les concédions faites à cette églife : on prétend
que l'adte eft faux. Il parait donc que Cbarlemam
avait donné cette marche , & que les troubles iur-
venus depuis en Italie avaient empêché les papes d'en
jouir. Nous verrons qu'ils perdirent enfuite le do-
maine utile de ce petit pays fous l'empire de la mai-
fon de Suabe. Nous les verrons tantôt grands ter-
riens , tantôt dépouillés prelque de tout , comme
plufieurs autres fouverains. Qu'il nous fuffife de
{avoir qu'ils pofTèdent aujourd'hui la fbuveraineté re-
connue <i*un paya de cent quatre-vingt grands milles
d'Italie en longueur , des portes de Mantouë aux con-
fins de TAbbruzze le long de la mer Adriatique , &
qu'ils en ont plus de cent milles en largeur , depuis
Civita-Vecchia jufqu'au rivage d'Ancone d'une mer a
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EMPEREUR.
l'autre* Il a falu négocier toujours , & fou vent corn*
battre pour s'alTurer cette domination.
T^andis que Cbarltmagne devenait empereur d'Oc^
cident , régnait en Orient cette impératrice Irèm , &«
meufe par (on courage & par fes crimes , qui avait fîdt
mourir Ton fils unique, après lui avoir arraché les yeux.
Elle eut voulli perdre Cbarlemagne $ mais trop fiiible
pour lui faire la guerre, elle voulut , dit-on , l'époufer ,
& réunir les deux empires. Ce mariage eft une idée
chimérique. Une révolution chafle Irène d'un trône
qui lui avait tant coûté. Charles n^eut donc que l'em-
pire d'Occident. Il ne poiTéda prefque rien dans lea
Efpagnes ; car il ne faut pas compter pour domaine le
vain hommage de quelques Sarrazins^ Il n'avait rien
fur les côtes d'Afrique. Tout le reile était fous fa do-
mination.
S'il eût fait de Rbme fa capitale , fi fes fucceffeurs y
euffent fixé leur principal féjour , & furtout fi l'ulage
de partager fes états à fes enfans n'eût point prévalu
chez les barbares , il eft vraifemblàble qu'on eût vu
renaître l'empire Romain. Tout concourut depuis à
démembrer ce vafte corps , que la valeur & la fortune
de Cbarlemagne avaient formé ; mais rien n'y contri«
bua plus que fes defcendans.
il n'avait point de capitale : feulement Aix-la-Cha-
pelle était le féjour qui lui plaifait le plus. Ce fut là
qu'il donna des audiences , avec le fafte le plus impo-
fant , aux ambaifadeurs des califes , & à cetixde Conf-
tantinople» D'ailleurs , il était toujours en guerre ou
en voyage , ainfi que vécut Charles - Quint longtemt
après lui. Il partagea fes états , & même de (bn vivant,
. comme tous les rois de ce tèms-li.
Mais enfin, quahd de fes fils qu'il avait défignés pour
régner , il ne refta plus que ce Louis , fi connu fous le
nom de Diùwmaire , auquel il avait déjà donné le
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34^
Charlemagme
royaume d'Aquitaine , il Taffocia à rempîrc dans Aix-
la-Chapelle, & lui commanda de prendre lui-même
fur l'autel la couronne impériale , pour faire voir au
monde que cette couronne n'était due qu'à la râleur
du père & au mérite du fils , & comme s'il eût prelTend
qu'un jour les miniftres de l'autel voudraient difpofer
de ce diadème.
Il avait raifon de déclarer fon fils empereur de fon
.Vivant ; car cette dignité , acquife par la fortune de
Cbarlemagne , n'était point affurée au fils par le droit
.d'héritage ; mais en laiffant l'empire à Louis ^& en
donnant l'Iulie à Bernard fils de fon fils Pépin , ne
déchirait, il pas lui-même cet empire , qu'il voulait
conferver à fa poftérité ? N'était-ce pas armer néceffai-
rcment fes fuccefleurs les uns contre les autres ? Etait-
il à préfumer que le neveu roi d'Italie obéirait à fon
oncle empereur , ou que l'empereur voudrait bien
n'être pas le maître en Italie ?
Cbarlemagne mourut eh 8149 avec la réputation
d'un empereur auflTi heureux qu'Âugtifle , auffi guerrier
qu'Adrien , mais non tel que les Trajans & les Anto-
nins , auxquels nul fouverain n'a été comparable.
Il y avait alors en Orient un prince qui l'égalait en
gloire comme en puifTance ; c'était le célèbre calife
Aaron ai Racbild , qui le furpafla beaucoup en juiUce,
en fcicnce , en humanité.
~ J'ofe prefque ajouter à ces deux hommes illuftres le
pape Adrien , qui dans un rang moins élevé , dans une
fortune prefque privée , & avec des vertus moins hé-
roïques , montra une prudence à laquelle fes fuccef-
feurs ont dû leur agrandiflement.
La curiofité des hommes , qui pénètre dans la vie
privée des princes , a voulu favoir jufqu'au détail de
la vie de Cbarlemagne , & au fecret de fes plaifirs. On
^^Oi^
wr^ab
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EMPEREUR.
a écrit qu'il avait poufTé l'amour des femmes jufqu'à
jouir de fes propres filles. On en a dit auta&t d'^ic
gujie s mais qu'importe au genre-humain le détail de
ces faibleffes , qui n'ont influé en rien fur les affaires
publiques ? L'églife a mis au nombre des faints cet
homme qui répandit tant de fang, qui dépouilla fes ne*
veux t & qui futfoupqonné d'inccfte.
J'envifage fon règne par un endroit plus digne de
l'attention d'un citoyen. Les pays qui compofent au-
jourd'hui la France & l'Allemagne jufqu'au Rhin , fu-
rent tranquilles pendant près de cinquante ans , &
l'Italie pendant treize , depuis fon avènement à l'em-
pire. Point de révolution , point de calamité pendant
ce demi-fiécle , qui par-là eft unique. Un bonheur fi
long ne fuffit pas pourtant pour rendre aux hommes
la politefle & les arts. La rouille de la barbarie était
trop forte , & les à^es fui vans l'épaiflirent encore.
CHAPITRE DIX-SEPTIÉME.
Mœurs , gouvernement 8? ufages vers le tems de
Charlemagnb.
JE m'arrête à cette célèbre époque pour confidéret
les ufages , les loix , la religion , les mœurs qui ré-
gnaient alors. Les Francs avaient toujours été des bar-
bares , &* le furent encore après Cburîemagne, Remar-
quons attentivement que Charlemagne paraiflait ne fe
point regarder comme un Franc. La race de Clovis &
de fes compagnons Francs fut toujours diftinde des
Gaulois. L'Allemand Pépin & Cari fon fils , furent dif-
tin<^ des Francs. Vous en trouverez la preuve dans
le capitulaire de Cari ou Charlemagne , concernant fes
métairies , article 4. Si les Francs commettent quelque
délit dans nos pojfejjtons , qt^ils Joient jugés fuivant leur
loi. U femble par cet ordre que les Francs alors n'é-
USOr
<w^)l
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i'
}5o Mœurs et usages vers le tbms
talent p«s regardés comme la nation de CbMema^,
A Rome la race cartovingienne paifa toijours pour al.
lemande. Le pape Adrien IV ^ dans fa lettre aux ar-
chevéqucs de Mayence, de Cologoe & de Trêves,
s'exprime en ces termes remarquables, L'empire fut
ttansféri des Grecs aux Allemands , leur renne fut em-
pereur qt^Ufrès avoir été couronmpar le pape,,., tout
ce que ^empereur pojfède il le tient de nous. Et corme
ZâCHARIE donna ^empire Grec aux Allemands , nom
pouvons donner celui des Allemands aux Grecs,
Cependant en France le nom de Franc prévalut
toujours. La race de Charlemagne fut fouvent appellée
Fronça dans Rome même & à Conftantinople. La cour
grecque défignait même du tems des Otbons les em-
pereurs d'Occident par le nom d'ufurpateurs Francs,
barbares Francs ; elle affedait pour ces Francs un mé-
pris qu'elle n'avait pas.
Le règne feul de Charlemagne eut une lueur de
politefle qui fut probablement le fruit du voyage de
Rome , ou plutôt de fbn génie.
^ Ses prédéceflcurs ne furent illuftrcs que par des
déprédations. Us détruifirent des villes , & n'en fon-
dèrent aucune. Les Gaulois avaient été heureux d'être
vaincus par les Romains. Marfeille, Arles, Aututr,
Lyon, Trêves étaient des viUesfloriffaotcs qui jouif-
(aient paifiblement de leurs loix munic^>al& , fubor-
données aux (âges loix romaines. Un grand commerce
les animait. On voit par une lettre d'un prooooful à
Tbiodofe ^ qu'il y avait dans Autun vingt -cîùq vûÀWt
chefs ^e famille; mais dès que les Bourguignons, les
Goths , les Francs arrivent dans la Gaule , on ne voit
plus de grandes villes peuplées. Les cirques, les am-
phithéâtres conilruits par les Romains jufqu'au bord
du Rhin , font démolis ou négligés. Si la criminelle
^ & malbeureufe reine Brunebauf conferve quelques
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tmÊgtm
*«*»»
deCharlbmagne. 3fi je
lieues de ces grands chemins qu'on n'imita jamais ,
on en eft encor étonné.
Qui empêchait ces nouveaux venus de bâtir des
édifices réguliers fur des modèles romains ? Ils avaient
la pierre «le marbre , & de plus beaux bois que nous.
Les laines fines couvraient les troupeaux anglais & ef-
pagnois comme aujourd'hui. Cependant , les beaux
draps ne fe fabriquaient qu'en Italie. Pourquoi le refte
de l'Europe nefaifait-il venir aucune des denrées, de
l'Afie ? Pourquoi toutes les commodités qui adoucifTent
l'amertume de la vie , étaient -elles inconnues , finon
parce que les fauvages qui paffèrent le Rhin , rendi-
rent les autres peuples fauvages ? Qu'on en juge par
ces loix faliques , ripuiires , bourguignonnes que Char*
lemagne lui-même confirma , ne pouvant les abroger.
La pauvreté & la rapacité avaient évalué à prix d'ar-
gent la vie des hommes , la mutilation des membres ,
le viol, l'incefte , l'empoifonnement. Quiconque avait
quatre cent fous, c'eft-à-dire, quatre cent écus du tems
à donner, pouvait tuer impunément un évêque. Il en
coûtait deux cent fous pour la vie d'un prêtre , autant
pour le viol , autant pour avoir empoifonné avec des
herbes. Une forcière qui avait mangé de la chair hu«
maine , en était quitte p3ur deux cent fous \ & cela
prouve qu'alors les forcières ne fe trouvaient pas feu-
lement dans la lie du peuple , comme dans nos der-
niers fiécles , mais que ces horreurs extravagantes
étaient pratiquées chez les riches. Les combats & les
épreuve^ décidaient , comme nous le verrons , de la
pofleffion d'un héritage , de la validité d'un teftament.
La jurifprudence était celle de la férocité & de la fu*
perftitîon.
Qu'on juge des mœurs des peuples par celles des
princes. Nous ne voyons aucune adion magnanime.
La religion chrétienne qui devait humanîfer les hom-
mes , n'empêche point le roi Clavis de faire affaffiner
les petits Régas fes voifint & fes parens. Les deux
:
tiSa«
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M
i 3Î2 Mœurs et usages vers le tems
enfans de Clàdomir font maffacrés dans Paris en ç;;
par un Childebert , & un Clôt aire fes oncles , qu*on
appelle rois de France ; & Clodoaid le frère de ces
innocens égorgés , e(t invoqué fous le nom de Sl
Clùud , parce qu'on Ta fait moine. Un jeune barbare,
nomme Cbram^ fait la guerre à Clotaire fon père,
lièga d'une partie de la Gaule. Le père fait brûler fon
fils avec tous fes amis prifonniers en 599.
Sous un Chilperic y roi de Soîflbns en 5 62, les fu-
jets efclaves défertcnt ce prétendu royaume , laffés de
la tyrannie de leur maître , qui prenait leur pain & leur
vin , ne pouvant prendre l'argent qu'ils n'avaient pas.
Mn Sigehert^ un autre fô/7/>fr/c font affaffinés. Brîtne-
haut ^ d'arienne devenue catholique, eft accufécde
tnille meurtres ; & un Clotaire II non moins barbare
qu'elle , la fait traîner , dit-on , à la queue d'un cheval
dans fon camp , & la fait mourir par ce nouveau genre
de fuppHce en 616. Si cette avanture n'eft pas vraie,
il eft du moins prouvé qu'elle a été crue comme une
chofe ordinaire , & cette opinion même attefte la bar-
barie du tems. Il ne refte de monumens de ces âges
affreux que des fondations de monaftères , & un con-
fus fouvenir de mifère & de brigandages. Figurez-vous
des déferts où les loups , les tigres & les renards égor-
gent un bétail épars & timide ; c'eft le portrait de l'Eu-
rope pendant tant de fiécles.
Il ne faut pas croire que les empereurs reconnuffent
pour rois ces chefs fauvages ^ai dominaient en Bour-
gogne , à Soiffons , à Paris , à Metz , à Orléans. Jamais
ils ne leur donnèrent le titre de Bajtlees. Us ne le don-
nèrent pas même à Dagobert II qui réunifiait fous fon
pouvoir toute la France occidentale jufqu'auprès du
Véfer. Les hiftcilens parlent beaucoup de la magniii-
cence de ce Dagobert ^ & ils citent en preuve l'orfèvre
St. Ehy 4 qui arriva , dit-on , à la cour avec une cein-
ture garnie de pierreries , c'eii-à-dire, qu'il vendait des
•|. pierreries , & qu'il les portait à (a ceinture. On parle
6 '•« »
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I
DE ChâRLEMâGNË.
des édifices magnifiques qu'il fit conftruire. Où font-
ils ? La vieille églife de St, Paul n'eft qu'un petit mo-
nument gothique. Ce qu'on connaît de JÛagobertf c'eft
qu'il avait à la fois trois époùfes , qu'il ailemblait des
conciles , & qu'il tyrannifait fon pays.
Sous lui , un marchand de Sens nommé Samon , va
trafiquer en Germanie. Il pafTe jufques chez les Slaves ,
barbares qui dominaient vers la Pologne & la Bohême.
Ces autres fauvages font fi étonnés de voir un homme
qui a fait tant de chemin pour leur apporter les chofes
dont ils manquent , qu'ils le font roi. Ce Samon
fit 9 dit- on , la guerre à Dagobert $ & fi le roi des
Francs eut trois ^mmes ^ le nouveau toi Slavon en eut
quinze.
C'eft fous ce Dagobert que commence Pautorîté des
maires du palais. Après lui viennent les rois fainéans ,
la confufion , le defpotifme de ces maires. C'eft du tems S
de ces maires , au commencement du huitième fiécle, 1 ^
que les Arabes vainqueurs de l'Efpagne , pénètrent juf-
qu'à Touloufe, prennent la Guyenne , ravagent tout
jufqu'à la Loire , & font prêts d'enlever les Gaules entiè-
res aux Francs qui les avaient enlevées aux Romams.
Jugez en quel état devaient être alors les peuples ,
î'églife , & les loix.
Les évéques n'eurent aucune part au gouvernement
jufqu'à Pépin ou Pipin , père de Charles Martel^ &
grand - père de l'autre Pépin qui fe fit roi. Les évêques
n'afliftaient point aux affemblées de la nation Franque.
Us étaient tous ou Gaulois ou Italiens , peuples regar*
dés comme ferfs. En vain l'évéque Rémi , qui batifa
Clovis , avait écrit à ce roi Sicambre cette fameuft
lettre où l'on trouve ces mots : Gardez-vous bien fur-
tout de prendre la priféance fur les ivîques ; prenez
leurs confeils f tant que vous ferez en intelligence avec
eux , votre adminijlrationferà facile. Ni Clovis ni fes
fuccefieurs ne firent du clergé un ordre de l'état. Le
Effaifur les mœurs , ^c. Tom. L Z ^
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ri ^
JS4 Suite dbs usages
gouvernement ne fut que militaîrc. On ne peut le
mieux comparer qu'à celui d'Alger & de Tunis , gou-
vernés par un chef & une milice. Seulement les rois
confultaient quelquefois les évéques quand ils avaient
befoin d'eux.
Mais quand les majordAmes , ou maires de cette
milice , ufurpèrent infenfiblement le pouvoir , ils vou-
lurent cimenter leur autorité par le crédit des pré-
lats & des abbés , en les appeliant aux aiTemblées du
champ de Mai.
Ce fut , félon les annales de Metz , en 692 que le
maire Pépin I du nom procura cette prérogative au
clergé ; époque bien négligée par la plupart des hîf-
toriens , mais époque très confidérable , & premier
fondement du pouvoir temporel des évéques & des
abbés en France & en Allemagne.
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CHAPITRE DIX-HUITIÉME.
Suite des ufnges du tems de Charlemagne , & avanù
lui. S'il itidi deffotique.^ Êf le royaume héréditaire.
ON demande fi Charlemagne , fes prédécefTeurs &
fes fucceffeurs étaient despotiques , & fi leur
royaume était héréditaire par le droit de ces tems-
là ? Il eft certain que par le fait Charlemagne était
defpotique , & que par conféquent fon royaume fut
héréditaire , puifqu'il déclare fon fils empereur en
plein parlement. Le droit eft un peu plus incertain
que le fait ; voici fur quoi tous les droits étaient
alors fondés.
Les habitans du Nord & de la Germanie étaient
nk originairement des peuples chafleurs ; & les Gaulois, ^
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ifflWiWT , ■ ^tf m» '*
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pu TEMS DB ChARLEMAOKE. 3^^
fournis par les Romains , étaient agriculteurs, ou bour.
geoîè. Des peuples chafleurs , toûjfurs armés, doi*
vent néceffairement fubjuguer dçs laboureurs & des
pafteurs , occupés toute Pannée de leurs travaux coo«
tinuek & pénibles , & encor plus aifément des bour?
gcois paifibles dgms leurs foyers. Ainfi les Tartares
ont aflerri TAfie ; aîM les Gotbs font venus à Rome.
Toutes les hordes de Tartares & de Goths , de Huns,
de Vandales & de Francs , avaient des chefs. Ces
chefs d'émigrans étaient élus à la pluralité des voix',
^ cela ne pouvait être autrement ; car quel droit
pourrait avoir un voleur de commander à fes cama^
rades ? Un brigand habile , hardi > & furtout heureux,
dut à la longue acquérir beaucoup d'empire fur des
brigands Subordonnés , moins habiles , moins hardis ,
^ moins houreux que lui. Ils avaient tous égale^
ment part au butin ; & c'eft la loi la plps inviolable
de tous les premiers peuples conquérans. Si on avait
befoin de preuves pour faire connaître cette première
loi des barbares , on la trouverait aifément dans }'e,
xemple de ce guerrier Franc , qui ne voulut jamais
Sermcttre que Clovis ôtât du butin général un vafe
e l'églife de Rheims , & qui fendit le vâfe it coup^
de hache y fans que le chef ofât l'çn empêcher,
Clovh devint dcfpotîque à mefurc qu'il devînt puit
fant; c'eft la marche de la nature humaine. Il en fut
ainfi de Cbarletnagne ,• il était fils d'un ufurpateur. Lç
fils du roi légitime était rafé & condamné à dire fon bré*
viaire dans un couvent de Normandie. li était donc
obligé à de très grands ménagemens devant une nation
de guerriers affemblée en parlement. Nous vous averfifi
fins , ditril dans un de fes capitulaircs , qt^en confia
dfration de notre bwniliti & de notre obéijfance à
vos cmfeilf que nous vous rendons far la crainte de .
Dieu , vous nous conserviez tbonneur que DiEU nous
a accordé , comme vos ancêtres fonf fait à l^ égard df
nos oMcêtreTp
î r V Z ij ,§
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l\\Xlt I r^^Tir^''' ^Mpjll
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355 Suite des usages
Ses ancêtres fe réduiraient à fpn père , qui avait
envahi le royaume ; lui-même avait ufurpé le partage
de fon frère , & avait dépoiyHé fes neveu??* Il flat-
tait les feigneuirs en parlement : mais le parlement
diffous , malheur à quiconque eût bravé fes volontés*
Q^uant à la fueceffion , il eft naturel qu'un chef de
conqùérans les ait engagés à élire fon fils pour fon fuo
çeffeur* Cette coutume d'élire , devenue avec le tem«
plus légale & plus confacrée , fe maintient jufqu'à nos
jouts dans Tempire d'Allemagne. L'éleétion était fi
bien regardée comme un droit du peuple conqué-
rant , que iorfque Pépin ufurpa le royaume des Francs
fur le roi dont il était le domeflique , le pape Etienne^
avec lequel cet ufurpateur était d'accord , pronon(;a
une excommunication contre ceux qui ^liraient pour
roi un autre qu'un defcendant de la t^lqç de Pef in ^
cette excommunication était à la vérité un grand
exemple de fuperftition » Comme Pentreprife de Pépin
était un exemple d'audace. Mais cette fuperftition
piême eft une preuve du droit d'élire j elle iFait voir
èncor que la nation con(^uérante élifait parmi les def-
cendans d'un chef celui qui lui plaifait davantage*
Le pape ne dit pas , Vous élirez les premiers liés de
la m ai fon de Pépin , mais , Vous ne choifirez point
ailleurs que dans fa maifon.
Charlemagne dit dans un capitulaire : Si de twt
des trois princes mes enfans il naît un fils , tel qfif
la nation le veuille pour fuctéder à fon pire , nous
Voulons que fes oncks y conftntent. Il eft évident
par ce titre & par pluGeurs autres ^ que la nation des
Francs eut, du moins en apparence jle droit de Té*
ledtion. Cet ufagé a été d'abord celui de tous les
peuples ) dans toutes les religions , & dans tous \cê
pays. On le voit s'établir chez les Juifs ^ chez les
autres afiatiques , chez les Romains ; les premiers
fucceffeurs de Mahomet font élus ; les foudans d'E' »
gypte , les premiers miramolins ne régnent que par j |
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n
^ DU TEMS DB ChARLSMAONB. 357 Jf
ce droit ; & ce n'eft qu'avec le tems qu'un ëtat de-
vient purement héréditaire. Le courage , l'habileté
& U befoin font toutes les loix.
CHAPITRE PIX-NEUVIEME.
Suite des ufiiges du tems de Charlemaqke. Com-
merce ^finances ^fciences,
CHarles Martel , ufurpateuT & foutien du pouvoir
fupréme dans une grande monarchie , vainqueur
des conquérans Arabes qu'il repoufla jufqu'en Gaf-
cognç , n'eft cependant appelle que fous-roitelet , fub-
regulus , par le pape Grégoire II qui implore ft pro-
te(ftion contre les rois Lombards. Il fe dirpofe à aller
{jecourir Péglife romaine ; mais il pille en attendant
les églifes des Francs , il donne les biens des cou-
vens à fes capitaines , il tient fonroi Tbierri en cap-
tivité. Pépin fils de Charles Martel ^ de fubregulus
fe fait roi , & reprend l'ufage des parlemens Francs.
11 a toujours des troupes aguerries fous le drapeau ;
& ç'cft à cet établiffement que Cbarlemagne doit tou,
tes fes conquêtes. Ces troupes fe levaient par des
ducs gouverneurs des provinces , comme elles fe lè^
vent aujourd'hui chez les Turcs par les béglierbeys.
Ces ducs avaient été inftitués en Italie par Ifioclé-
tien. Les comtes, dont l'origine me parait du tems
de Tbéqdofe , commandaient fous les ducs , & affem-
blaient les troupes chacun dans fon canton. Les mé-
tairies , les bourgs , les villages fourniffaient un nom-
bre de foldats proportionné 9 leurs forces. Douze
métairies donnaient un cavalier armé d'un cafque &
d'une cuiraffe ; les autres foldats n'en portaient point:
mais tous avaient le bouclier quarre long , la hache
d'armes, le iavelot & l'épée. Ceux qui fe fervàient
de flèches , étaient obligés d'en avoir au moins douze
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ilfeaj i$i âm il ■■ ' ^mii^M
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5î8 LOiXETtSAGES
iii-iny ' Il 'iii iii-i • lin » I. I I U^fcMiw^^
dans leur carquois. La province qui fournlITait la
milice , lui diftribuait du bled & les provifîons né-
cedaircs pour fix mois : le roi en fourniflait pour le
refte de la campagne. On faifait la revue au premier
de Mars ou au premier de Mai. C'eft d'ordinaire dans
ces tems qu'on tenait les parlemens.
t)ans les Tiéges , on employait le bélier , la balifte,
la tortue 9 & la plupart des machines des Romains.
Les fcigneu^s nommés Barônt , Leuder , Ricbeomes 4
compofalent avec leurs fui vans le peu de cavalerie
Su^on voyait alors dans les armées. Les mufulmans
'Afrique & d^Ëfpagms avaient plus de cavaliers.
Charles avait des forces naVales, c*eft-à-dirc, dé
grands bateaux aux embouchures de toutes les gran-
des rivières de fon empire ; avant lui on ne les con-
haiflait pas chez les barbares ; après lui on les ignora
iôngcems. Par ce moyen & par fa police guerrière «
il arrêta ces in<>ndations des peuples du Nord : il les
Contint dans leurs climats glacés ; mais (bus (es fai-
bles defcendans ils fe répandirent dans l'Europe.
tes afihaifes générales fe réglaient dans des affenl^
Iblées qui repréfentaient la nation. Sous lui fes park-
mens n'avaient d'autre volonté que celle d'un maître
qui favait commander i& perftiadef.
' n
Il ^t éeurîr le commercé , parôc qu*il était le mai-
tre des mers \ a(infi leiu marchands des c6tes de Tôt
cane & ceux de Marfeille allaient trafiquer à Conftan*
Hnople chez les chrétiens , & au port d'Alexandrie
chez les mufulmans ^ qui les recevaient , Se dont ils
tiraient les richeffes de l'Afie.
Venife & Gènes , fi .pulflantès depuis par le négo»
tQi n'attiraient pas encore à elles les richeffes des^
hâtions ; mais Venife commençait à s'enrichir & à s'a*>
grandir». Rom^^^ Ravenne ) Milan i Lyon , Arles,
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Vt:}S!9i^
*^
f^^
I
&
DU TEMS DE ChARLEMAGNE. 3^^
Tours , avaient beaucoup de manufadturcs d'étoflFe«
de laine. On damafquinait le fer à l'exemple de l'Afie:
on febrîquaît le verre ; mais les étoffes de foie n'é-
taient tilTues dans aucune ville de l'empire d'Occident.
Les Vénitiens commençaient à les tirer de Conftan-
tinople ; mais ce ne fut que près de quatre cent ans
après Cbar/emagTte que les princes Normands établi-
rent à Palerme une manufacture de foie. Le linge
était peu commun. Sf, Bonifaçe dans une lettre à ua
évéque d'Allemagne , lui mande qu*il lui envoyé du
drap à longs poils pour fe laver les pieds. Probable-
ment ce manque de linge était la caufe de toutes ces
maladies de la peau , connues fous le nom de lipre^
fi générales alors ; car les hôpitaux nommés U^roferies
étaient déjà très nombreux.
La monnoie avait à «peu -près la même valeur que
délie de l'empire Romain depuis Conflaiitm. Le fou
d'or était le Jolidtmt romanum. Ce fou d'or équiva-
lait à quarante deniers d'argent. Ces deniers , tantôt
plus forts , tantôt plus faibles , pelaient , l'un portant
l'autre , trente grains.
Le fou d'or vaudrait aujourd'hui en 1740 environ
quinze francs , le denier d'argent trente fous de
compte.
Il faut toujours , en lifant les hiftoires , fe relTou-
venir qu'outre ces monnoics réelles d*or 65: d'argent ,
on fe fervait dans le calcul d'une autre dénomina-
tion. On s^cxprimaif (bu vent en monnoie de oompte ,
cionnoic fiAicc , qui n'était , coQime aujourd'hui ,
qu'une manière de compter.
. Les Afiatiques &le8 Grecs comptaient par mines
&par talens, les Romains par gi'ànds fefterces , (ans
qu'il y eût aucune monnoie qui valût un graiid fef-
terce ou un talent.
Z iii) ^
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mt^
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Éâàm
360 L O ï X B T U 8 A Q E s
La livre numéraire du tems de Charlemagn^ , était
réputée le poids d'une livre d'argent de douze onces.
Cette liyre fc divifait numéricjucment , en vingt par-
ties. Il y avait à la vérité des fous d'argent fembla-
bles à nos écus , dont chacun pefait la 20e , 22e on
24e partie d'une livre de douze onces : & ce fou fc
divifait , comme le nôtre , en douze deniers. Mais
Cbarlemagne ayant ordonné que le fou d'argent ferait
précifément la 20e partie de douze onces , on s'ac-
coutuma à regarder dans les comptes numéraires vingt
fous comme une Uvre^
Pendant deux fiécles les monnoîes reftcrcnt fur le
pied où Cbarlemagne les avait mifes ; mais petit à
Î)etît les rois , dans leurs befoins , tantôt chargèrent
es fous d'alliage , tantôt en diminuèrent le poids ; de
forte que, par un changement qui eft peut-être la
honte des gouvernemens de l'Europe , ce fou , qui
était autrefois ce Qu'eft à -peu -près un écu d'argent,
n'eft plus qu'une légère pièce de cuivre avec un ne
d'argent tout au plus ; & la livre , qui était le figne repré^
fentatif de douze ônçes d'argent , n'eft plus en France
que le figne repréfentatîf de vingt de nos fous de
cuivre. Le denier , qui était la deux cent vingt-qua-
trième partie d'une livre d'argent , n'eft plus que le
tiers de cette vile monnoie qu'on app.çlle un Uard.
Suppofé donc qu^une ville de France dût à une autre
cent vingt fous ou foHdes de rente , elle s'acquitte-
rgit aujourd'hui de fa dette en payant ce ^uc nous
appelions MU éçu de fix franco.
la livre de compte des Anglais , celte des HoUan-
dais , ont moins variée Une livre fterling d'Angle-
terre vaut environ vingt- deux francs de France, &
une livre de compte hollandaîfe vaut environ douze
ffancs de France ; ainfi les Hollandais fe font écar-
tés moins que les Franc^ais dç U loi primitive , & les
Anglais encore moins,
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|Ç«Mîfe
^HÈOtmiUÊ^
dutemsdeChaklbmagke. i6i
Toutes les fois donc que Thiftoire nous parle de
mpnnoîe fous le nom de livres , nous n'avons qu'à
examiner ce que valait la livre au tems & dans le
pays dont on parle , & la comparer à la valeur de la
nôtre. Nous devons avoir la même attention en lifont
l'hiftoire grecque Se romaine. C'pft , par exemple , un
très grand embarras pour le ledeur , d'être obligé de
réformer toujours les comptes qui fe trouvent dans
rhîftoiife ancienne d'un célèbre profefleur de l'uni-
vcrfité de Paris , dans l'hiftoire eccléfiaftique de Fleu-
ri, & dans tant d'autres auteurs utiles. Quand ils
veulent exprimer en monnoie de France les talens ,
les mines , les fefterces , ils fe fervent toujours de
l'évaluation que quelques favans ont faite avant la mort
du grand Çolbert, Mais le marc de huit onces , qui
valait vingt-fix francs & dix: fou$ dans les premiers
tems du miniilère de Colbert , vaut depuis longtems
quarante-neuf livres dix fols : ce qui fait une diSé^
rence de près de la moitié. Cette différence qui a été
quelquefois beaucoup plus grande , pourra augmenter ou
çtrç rédyite. II faut fonger à ces variations ; fans quoi on
aurait une idée très faufle des forces des anciens états,
de leur commerce , de la p<iye de leurs foldats , & de
toute leur économie.
Il paraît qu'il y avait alors huit fois moins d'efpè-
ces circulantes en Italie & vçrs les bords du Rhin y
qu'il ne s'en trouve aujourd'hui. On n'en peut guè-
res juger que par le prix des denrées néceffaires à
la vie ; & je trouve la valeur de ces denrées , du
tems de Cbarlemagne , huit fois moins chère qu'elle
ne l'eft de nos jours. Vingt -quatre livres de pain
blanc valaient un denier d'argent , par les capitulai-
res. Ce denier était la quarantième partie d'un fou
d'or , qui valait environ quinze à feize livres de
notre monnoie d'aujourd'hui. Ainfi la livre de pain
revenait à un liard & quelque chofe , ce qui
eft en effçt I4 huitiémç partie de notre prix ordi-
naire,
il
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»«•**!.
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ÉÊ^
il
353 Lois et usages
non
Dans les pays feptentrionaux l'argent était beau-
coup plus rare : le prix d'un bœuf y fut fixé , par
exemple^ à un fou d'or. Nous verrons dans la fuite
comment le commerce & les richefles fe font éten-
dues de proche en proche. .
Les fciences & les beaux arts ne pouvaient avoir
^ue des commenoemens bien faibles dans ces vaftes
pays tout fauvages encore. Eginbart fecrétaire de
Cèmr/emagne nous apprend , que ce conquérant ne
favait pas figner fon nom. Cependant il conçut par
la force de fon génie combien les belles-lettres étaient
néceflaires. Il fit venir de Rome des maîtres de granit
maire & d'arithmétique. Les ruines de Rome four-
niflent tout à l'Occident qui n'eft pas encor formé.
Alcuin cet Anglais alors éimetix , & Pierre de Pife
qui enfeignt un peu de grammaire à Cbarlemagne »
iraient tous deux étudié à Rome.
Ily arait des chantres dans les églifes de France;
& ce qui cft à remarquer , c'eft qu'ils s'appellaient
Chantres Geaiiois. La race des conquérans Francs n'a-
vait oukivé aucun art. Ces Gaulois prétendaient ,
comme aujourd'hui , difputer du chant avec les Ro-
mains. La mufiq^ue grégorienne , qu'on attribue à
8t. Grégoire furnommé le g;rani^ n'était pas fans mé-
rite , %i avait quelque dignité dans fa fimplicité. Les
chantres Gaulois , qui n'avaient point l'ufage des an-
ciennes notes alphabétiques , avaient corrompu ce .
chant , A prétendaient l'avoir embelli. Cbarlemagne
dans un de fes voyages en Italie les obligea de fe
conformer à la mufique de leurs maîtres. Le pape
Adrien leur donna des livres de chant notés ; & deux
mufidens Italiens furent établis pour enfcîgner la
note alphabétique , l'un dans Metz , l'autre dans Soif-
fons. Bfalut encor envoyer des orgues de Rome.
H n'y avait point d'horloge fonnantc dans les vil-
les de îbn empire , & il n'y en eut que vers lé trei-
I
»i ajt 111
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àÈÈOtÙt^ÊÊÊKtm
^^^mf»
btJTEMs DE Charlemagke. 3^3
2iëine fiécle. De là vient Pancienne coutume qui fe
conferve encor en Allemagne , en Flandre , en An-
gleterre , d'entretenir des hommes qui avertiflent de
Theure pendant la nuit. Le préfent que le calife
Aaron al Racbild fit à Cbariemagne d'une horloge
Tonnante ^ fut regardé comme une merveille. A Yé*
gard des fciences de l'efprît , de la faine philofo-
phie , de la phyOque , de Taftronomie , des principes
de la médecine , comment auraient-elles pu être con*
nues ? Elles ne viennetit que de naître parmi nous*
'On comptait encor par nuits , & de là vient qtfen
Angleterre on dit encor ^^ ««/Vx, pour {ignifierune
(tsmaine , êc quatorze nuits pour deux femaines. La
langue romance commen(;ait à fe former du mélange
du latin avec le tudefque. Ce langage eft l'origine
du français , de l'efpagnol , & de l'italien. Il dura
jufqu'au tems de Frédéric II, & on le parle encor
dans quelques villages des Grifons , & vers la SuifTe.
Les vètemens, qui ont toujours changé tn Occi-
dent depuis la ruine de l'empire Romain , étaient
courts , excepté aux jours de cérémonie , où la faye
était couverte d'un manteau fouvent doublé de pel-
leterie. On tirait comme aujourd'hui ces fourrures
du Nord , & furtout de la Ruffie. La chauiTure des
Romains s'e'tait confervée. On remarque que Char"
îemagne fe couvrait les jambes de bandes entrelafTées
en forme de brodequins , comme en ufent encor les
montagnards d'Ecofle , feul peuple chez qui l'habil-
lement guerrier des Romains s'eft canfervé.
CHAPITRE VINGTIÈME.
De la. religion du tems de CftARLEM AGNE.
SI nous tournons à préfent les yeux fur les biens
que fit la religion , fur les maux que les hommes
s'attirèrent quand ils en firent un inftrument de leurs
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S' 3^4 D fi LÀ RELIQI ON
paffioQS , fur les ufages confacrés , fur les abus dtati
ufages ; la querelle des Iconociajies & des Iconolatres
cft d^abord ce qui préfente le plus grand objet
L'impératrice Irène , tutrice de fon malheureux
fils Conjiantin Porpbirogénèùe ^ pour fe frayer. le ch^
min à Templre , flatte le peuple & les moines , à qai
le culte des images , profcrit par tant d'empereurs de-
puis Léon PIfaurien , plaifait encore. Elle y était
elle-même attachée , parce que fon mari les avait
eues en horreur. On avait perfuadé à Irène que pour
gouverner fon époux il fiilaît mettre fous le chevet
de fon lit les images de certaines faintes. La aédu-
lité entre même dans les efprits politiques. Lempe-
reur fon mari avait puni les auteurs de cette fuperfti-
tion. Irène ^ après la mort de fon mari, donne ua
libre cours à fon goût & à fon ambition. Voilà ce
qui aifemble en 786 le fécond concile de Nicéet
feptiéme concile œcuménique , commencé d'abord à
Conftantinople. Elle fait élire pour patriarche un laïc,
fecrécairç d*état , nommé Tarai fe. Il y avait eu au-
trefois quelques exemples de féculiers élevés ainfi à
révéché , fans palTer par les autres grades \ mais alors
cette coutume ne fubfiftait plue.
Ce patriarche ouvrit le concile. La Qondultc du
pape Adrien eft très remarquable. Il n'anathématifc
pas ce fecrétaire d'état ûul fç fait patriarche ; il pro*
tefte feulement avec modeftie dans fes lettres à /W«
contre le titre de patriarche unlverfel ; mais il infifte
qu'on lui rende les patrimoines de la Sicile. 1} ^
demande hautement ce peu de bien , tandis qu'il ar-
rachait , ainfi que fes predéceffeurs , le domaine utile
de tant de belles terres qu'il affure avoir été données
par Pépin & par Cbariemagne. Cependant le concile
oecuménique de Nicée , auqiiel prépdent les légats
du pape & ce miniftre patriarche 1 rétabDt Iç ^^^
des Images,
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DU TEMS IXE Ch ARL^EM AQNE. 36^ *
C'eft uAe chofe avouée de tous les fages critiques)
que les pères de ce concile , qui étaient au nombre
de trois cent cinquante , y rapportèrent beaucoup de
pièces évidemment fauftes ; beaucoup de miracles ,
dont le récit (candaii ferait dans nos jours ; beaucoup
de livres apocryphes. Ces pièces fauffes ne firent
point de tort aux vraies , fur lefqueiles on décida.
Mais quand il falut &ire recevoir ce concile par
Cbarlemagne & par les églifes de France , quel fut
l'embarras du Pape ? Charlei s'était déclaré haute-
ment contre lès images. Il venait de faire écrire les
livres qu'on nomme Carolins , dans lefquels ce culte
eft anatnématifè. Ces livres font écrits dans un latin
affez pur ; ils font voir que Cbarlemagne avait réuffi
à faire revivre les lettres ; mais ils font voir auffi
qu'il n'y a jamais eU dé difpute théologique fans in-
Vecftives. Le titre même eft une injure. Au nom de
notre "Seigneur Êf Sauveur ItSUS-Cn^lST! , commence
le livre de rUluJlriJfime ^ excellentijjîme Charles &q.
contre le fynode impertinent Ê? arrogant , tenu en
Grèce pour adorer des images. Le livre était attribue
^ar le titre aii roi Charlet , comme on mel fou3 le
nom des rois les édits qu'ils n'ont point rédigés :
il eft certain que tous les peuples des foyaumes dé
Cbarlemagne regardaient lés Grecs colmtâe dés ido-
làtreô.
- Ce prince en 794 aifembla un concile 4 Francfort ,
auquel il préfida félon l'ufage des empereurs & des
rois : concile compofé de trois cent évéques ou abbés
tant d'Italie que de France , ^ui rejetteront d'un con*
fentement unanime le fervice (fervkium) & l'adora*.
tion des images. Ce mot équivoque d'adoration était la
{burce de tous ces différends ; car fi les hommes dé-
finiflaient les mots dont ils te fervent , il y aurait moins
de difputes ; & plus d'un royaume a été bouleverfé
pour un mal-entenduk
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a^ ^66 De LARBLIQI09
41 , .^
Tandis que le pape Adrien envoyait et) France les
aAes du fécond concile de Nicée, il reçoit les livres
Carolins , oppofés à ce concile ; & on le preffeacnom
de Charles de déclarer hérétiques Tempereur de Conf.
- tantinople & {a mère. On voit afTez par cette coodoite
de Charles ,^ qu'il voulait fe faire un nouveau droit de
rhéréfîe prétendue de l'empereur , pour lui enleTei
Rome fous couleur de juftice.
Le pape , partagé entre le concile de Nicéc qn'J
adoptait , & Cbarlemagne qu'il ménageait, prit, me
femble, un tempérament politique , qui devrait fcrvir
d'exemple dans toutes ces malheureufes difputes qui
ont toujours divifé les chrétiens. Il explique les livres
Carolins d'une manière favorable au concile de Nicée,
& par-là réfute le roi fans lui déplaire ; il permet qu'on
ne rende point de culte aux images ; ce qui était très
raifonnable chez les Germains , à peine fortis de Tido-
latrie , & chez les francs encor groffiers , qui n'avaient
nifculpteurs ni peintres. Il exhorte enmêmetemsa
ne point brifer ces mêmes images. Ainfi il fatisfait
tout le monde , & laifle au tems à confirmer ou à abo.
lîr un culte encor douteux. Attentif à ménager les
hommes & à faire fervir la religion à fes intérêts , il
écrit à Cbarlemagne : 53 Je ne peux déclarer Irine &
„ fon fils hérétiques , après le concile de Nicée; mais
)) je tes déclarerai tels s'ils ne me rendent les biens
,, de Sicile. "
On voit la même politique intéreflec de ce pape
dans une di{pute encor plus délicate , & qui feule eût
fbfii en d'autres tems pour allumer des guerres civiles.
On avait voulu favoir fi le St. Effrit procède du ?ht
& du Fils , ou du Père feulement.
On avait d'abord dans rOricnt ajouté au premier
concile de Nicée qu'il procédait du Père ,• enfuitccn
Efpagne , & puis en France , & en Allemagne-, on
ajouta qu'il procédait du Père & du fils : c'était la
Mfari.,. »wi<My II. ntîtî
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««*»*
DU TfiMS DE GhARLEMAONE. 3^7
croyance de prefque tout l'empire de Charles. Ces
mots du fymbole attribué aux apôtres , qui ex pâtre
fiîioque procedit , étaient facrés pour les Français ;
mais ces mêmes mots n'avaient jamais été adoptés à
Rome. On prefle , de la part de Cbarlemagne , le pape
de fe déclarer. Cette matière éclaircie avec le tems par
• les lumières de Téglife , femblait alors très obfoure. On
citait des paiTages des pères , & furtout celui de St, Gré-
goire de Nice , où il eft dit ^qu'une perfonne eji caufe ,
If? t autre vient de caufe ; r une fort immédiatement de la
première , t autre en fort par le moyen du Fils ,• par
lequel moyen le Fils fe réferve la propriété d'unique ,
fans exclure FEfpritfaint de la relation du Père,
Ces autorités ne parurent pas alors afiez claires.
Adrien I ne décida rien : il favait qu'on pouvait être
chrétien fans pénétrer dans la profondeur de tous les
myftères. Il répond qu'il ne condamne point le fenti-
ment du roi , mais ne change rien au fymbole de Ro-
me. Il appaife la difpute en ne la jugeant pas , & en
laiflant à chacun fes ufages. Il traite , en un mot, les
affaires fpirituelles en prince ; & trop de princes les
ont traitées en évéques.
Dès -lors la politique profonde des papes établiiTait
peu-à-peu leur puiifance. On fait bientôt après un
recueil de faux aétes connus aujourd'hui fous le nom
de fauffes décrétales. C'eft , dit-on , un Efpagnol nom-
mé ifidore Mercator , ou Pifcator , ou Peccator , qui
les digère. Ce font les évéques Allemands, dont la
bonne foi fut trompée^ qui les répandent & les font
valoir. On prétend avoir aujourd'hui des preuves în-
conteftables qu'elles furent compofées par un Algeram
abbé de Senones , évéque de Metz ; elles font en ma-
nufcrit dans la bibliothèque du Vatican. Mais qu'im-
porte leur auteur ? Dans ces fauffes décrétales on
fuppofe d'anciens canons , qui ordonnent qu'on ne
tiendra jamais un feul concile provincial fans la per-
miffion du pape , & que toutes les caufes ecciéfiafti-
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qiies reflbrtiront à lui. On y fait parler Tes fuccêfTeurS
immédiats des apôtres ; on leur fuppofe des écrits.
Il eft vrai que tout étant de ce mauvais ftile du huitième
fiécl6 , tout étant pleiii de fautes contre l'hiftoire & h
géographie , l'artifice était grolTier ; mais c'était des
hommes groffiers qu'on trompait. On avait forgé dès
la naiflknce du chriftianifme , comme on l'a déjà dit,
de faux é^fangiles , les ve)rs fibyllins , les livres ^'Her-
mas , les conftifutions apojlàliques ; & mille autres
écrits que la faine critique a réprouvés. Il eft trifte ()ué
pour enféigner la vérité on iait fi fôUvent tihplo^é d^
ades àt JEaufTaire.
Ces fauflfes décrétâtes ont abufé les hommes pen-
dant huit fiécles ; & enfin , quand l'erreur a été r&*
connue , les ufages établis par elle ont fubfiAé dails
une partie de Péglife : l'antiquité leur a tenu lieu
(Tautenticité.
Dès ces t«ms les évéques d'Occident étaient des
feigneurs temporels , & polTédaient plufieurs terres en
fief; mais aucun n'était fouverain indépendant L^
rois de France nommaient fouvent aux evéchés;plus
hardis en cela & plus politiques que les empereurs des
Grecs , & les rois de Lombardie , qui fè contentaient
d'interpofer leur autorité dans les éleâions.
Les premières églifes chrétiennes s'étaient gouver-
nées en républiques fur Iç modèle des fynagogues.
Ceux qui préfidaient à ces aifemblées , avaient pris
infenfiblement le titre d'évêque , d'un mot grec , dont
les Grecs appellaient les gouverneneurs de leurs colo-
nies. Les anciens de ces affemblées fe nommaient
prêtres , qui fignifie en grec vieillard,
Cbarlemagne dans fa vieillefle accorda aux évê-
ques un droit dont fon propre fils devint la vidtime.
Ils firent accroire à ce prince que dans le code ré-
digé fous Tbéodofe , une loi portait que fi de deux
féculiers
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DUTBMS.DSC;H;AI|L£liA9l9E. |^
feculiers en procès , l'un prenait un évéque pour juge |
Tautre était obligé de fe (oumettre à ce jugeinent fa as
en pouvoir appellcr. Cette loi , qui jamais n'avîiît cte
exécutée, pafie chez tous les critiques pour fupppfcç,
C*eft la dernière du code Théodofien ; elle eft fans dite ^
fans nom de confuls. Elle a excite une guene en île
fourde entre les tribunaux de la juftîce & les niinîf-
tres du fan(ftuaire ; mais comme en ce ccms - là tout
ce qui n'était pas clergé j était en Occident d'une igno*
ranCc profonde , il faut s'étonner qu'on n'ait pas donné
encore plus d'empire à ceux qui feuls étant un peu inf-
truits y lemblaient feuls mériter de juger les hommes^
Ainfi que les évêques difputaient l'autorité aux féc!i<i
liers , les moines commençaient à la difputer aux évé*
ques^quîpourtant étaient leurs maîtres par les canons.
Cesmoines étaient déjà trop riches pour obéir. Cette
célèbre formule 4e Marcnlfe était déjà bien fouvent
mîfe en ufage : Moi , pot& k repos de mon amt , Sf
four rCître pas placé après nia mort parmi les boucs j
je donne à tei monajière , ^C, On crut dès le |î)re-»
mier fiécle de TégHfe que Ife rtionde allait fifiir^ dti
fe fondait fur un paflage àe Si. Luc, qui mét^dé^
paroles dans la bouche de Jesus-Christ. ,3 II y ïiurà
n des fignes dans le foleil , dans la lune & dans les
^ étoiles ; les natiohs feront cowfternées \ k' nttt &
33 les fleuves ferotit un grand brbit; les hommes féchéf
y^ ront deftayeor dansTaitente de la révolutiofi dd
33 l'univers , les puiffances des-icieu:^ feront ébeaiN
33 lées , & alors ils verront le iils de l'homme venant
3> dans une nuée avec une grande puîtTance & une
yy graiide majefté. Lorfqae vous verrez arriver ces
33 chofes 3 lâchez que le royaume de DxEt| eft pro*
j3 chë. Je. vous dis en vérité , en vérité', que cette
)3i génération ne'fihira point fans que céi,chûfes fuien^t
j> accomplies. /"- [
. Pluficurs' J)érfonrtages pîetjjè ayant tbiijoiit^S pfU -â
la lettre cette prédîâiôn non accomplie , cfn aétâfi
^ • EJfaifiij/'Us mœurr , &cr^^.^ '- -- Aa
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I ( J7O D E t A RELIGION
datent raccomplifTement : ils penfaient que l'univers
allait être détruit , & voyaient clairement le lugemeat
dernier , où Jésus - Christ devait venir dans Iw
nuées. On fe fondait aufli fur Tépitre de St, Paul à
ceiîx de ThefTalonique , qui dit : Nous qtd finîmes
iwdns nous ferons emportés dans Pair , au-devant de
JËstJS. De -là toutes ces fuppofitions de tantdepro*
igek âpperqus dans les airs. Chaque génération croyait
ftre telle qui devait voir la fin du monde, & cette
opinion fe fortifiant dans les fiécles fuivans, on donnait
fés terres aux moines , comme fi elles euffent du être
préfervées dans la conflagration générale. Beaucoup
de chartes de donation commencent par ces mots ,
Adventante mundi vefpero.
iDes abbés bénédidtins , longtems avant Cbarlema»^
gne , étaient affez puiffans pour fe révolter. Un abbé
d^ Fontenelle avait ofé fe mettre à la tête d'un parti
contre Charles Martel j & affembler des troupes. Le
hérps fit trancher la tête au religieux,; exécution qui
ne contribue pas peu k toutes ces révélations que
tant de moines eurent depuis de la damnation de
Charles Martel.
Avant ce tems , on voit un abbé de St; Rémi de
Rheirhs , & Pévéque de cette ville , fufoiter une guerre
civile contre C^V^^^^ au fixiéme^iîécie : crime qui
«(^appartient qu^aux hommes puiffatïs.
Lei cvéques & les abbés avaient beaucoup d'et
clafvès. Oh repi'oche à Fabbé Alcuin d'en avoir eu
Jufqu'à vftigt mille. Ce nombre n'eft pas incroyable:
Âlcùin poffédkît plufiturs abbayes , dont les terrei
Jjouvaient être habitées par vingt mîHc hommes. Cei
efclaves , connus fous le nom de ferfs \ ne pouvaîcflt
fe marier ni changer de demeure fans ]a permiffio»
àe ^r^bbf Ds étaient obligé? de marcher cinquante
lieues avea leurs dhia^rettes , quand il l'ordonnait Us
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11 û'éuit p9s permk 4c ie dire^sra &ns;r4tfî^i
4e porter la ton&re fans a|>partenk 9 w eVyêqm^.Q^
tels clercs &'appdTaknt>fc'f^i&a/ûf, On les p»Qiff^itc(«|i-
me va^ond^. On ignojak c§t ii^ aujourd'fajairfi
l tommun , qui n'eft ni fecuïier ni cccléfiaftigujp. %t
% K^ ii '
DU TEMS Ï>K ChAHLEMAONE. 371
travaMaieat pour lui trois jours deJa femaio« ,,& iP
partageait tous les fruits de la terre. ' ' / ;.
On nt pouvait à la vérité tcprocher à ces bçné-
dî^ins. de violer par leur<s ricbefles ,.leur vœj[x (^
pauvreté ; cat ils ne &nt point expreilçmenc ce y.œ^ ;
ils ne s'engagent , quand Us font requs dans Tordre ,
qu*à obéir à leur ahbé. On leur dO|t;uia mqne fop-
Vent des ter]:es incultes , au'^ défricîiècent d^ Je^çs
mains , & qu'ils firent eofulte cul^ver par d^s ferfs.
Ils formèrent des bourgades , des petites villes niême
autour de leurs monaUère^. Ils itu^iereirt ^ ils firent
les feuls qui conîervèrent les livres en les copiant ;
& 'Cniin dans ce» tems barbares où les peuplas ét;^«nt
fi mîférables , c'était une grande confolatîon de trou^
Ver dans les cloîtres une retraite affurée contre la
tyrannie. ' " ^ . ■ i " j
fen f'rancc & en Allemagne plus (Pun évêque allait
ftU combat avec fes ferfs. Ci6flr/f»?flg»e dans une .lettre
à Frajiade une de fés femmes , lili parle d'iin évêqlie
qui a vaillamment combattu auprès de lui , dans tine
bataille contre les Avares , peuples defcendus des Scy*
thés ^ qui habitaient vers le pays qu*on nomme i
préfent TAutriche. Je voîjs de Ton tems quatoryc ma-
iiaftèr es qui :doi vent fournir des foldats. Pour peu
qu'un abbé ftt guerrier , rien ne l'empêchait de les
conduire luî.-n;iémc> Il eft %'rai qu'en So 3 un parle-
ment fe plaignît à Cbarfemagm du trop grand nom-
bre de prêtres qu'on avait tue à la guerre.. lî fut
défendu alors ^rtiaîs înutilement , mxK mtniftrcs de
l'autel d'aîler aux combats.
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I
)
H
3^2 I3b la RELIÔIOÏI,&a
tîlirc d'aBbc,'qui fignific père, n'appartenait qu'wk
chefs des monaftères.
t^ abbés avaient dèè-lor^ le bàtoii paftoral que
ftortaîent lés évéques , & qui avait été autrefois la
marque dé la dignité pontificale à^ni Rome payènné.
Telle était la puiiTance dé ces abbés fur les moines ,
Qu'ils coiidamnaient quelquefois aux peines afBictives
les plus cruelles. Ils pHrènt le barbaie ufage des em-
t)ereur8 Grecs , de faiae brûler les yeux ; & il falut
qu'un condile leur défendît cet attentat , qu'ils com-
mençaient à regarder comme un droit.
■ ■ ■ i' ' ■ ' ' ,
. ^, ,#
' ^CHAPITRE VINGT. ÙNlÊMi
^ ; • Stiite des riUs religieux du tems de Charlemagke.
LA meife était différente cle ce qu'elle cft. aujour-
d'hui , & plus encore de ce qu'elle était dans lès
premier!! tems. Elle fut d*abord une cène, un fcftin
nocturne ; enfuitç la majefté du culte augmentant
avec le nombre dès. fidèles , cette aflemblée de nuit
fe changea en une affen^blée du matin : la méfie de-
vint k-peiuprès ce qu'pft la grand'meflc aujourd'hui.
Il nV eut jufqu'au cinquième fiéclè qu'une méfie
commune ^'^x^^ chaque églife. Le nom AtSynaxe qu'elle
a chez les Grecs , & qui fignifie ajfeniblée i les formu-
les qui fubfiftent & qui s'adreflenti cette aflemblée,
tout fait voir que les méfies privées durent être loû^-
lems înconnbes. Ce facrièce , cette affemBléc , cette
commune prière avait le nom de MiJJa chez les La-
fins y parce que félon quelques ^iinf On renvoyait , miu
'Mantur^lts t^éhiténs qui ne communiaient pas; &
tfelô^ d'autres , parce que la communion était en-
VbVéé i miffa trnt , à ceux qui ne pou^ent Veriîr à
'
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iismt^
lâH
RjTBS RELIGIEUX, &a
373 I
11 femble qifon devrait favoir la date prédfe des
établiiTemens de nos rites ; mais aucune n'eft connue.
On ne fait en quel tems commencja la mefTe telle qu'on
la dit aujourd'hui ; on ignore l'origine précife du ba*
téme par. afperfion , delà confeffion auriculaire, de
la communion avec du pain azime , & fans vin ; on
, ne fait qui donna le premier le nom de facrement
au mariage, à la confirmation, àl'ondion qu'on ad-
miniftre aux malades.
Quand le nombre des prêtres fut augmenté , on
fut obligé de dire des melTes particulières. Les hommes
puifFans eurent des aumôniers ; Agobard évêque de
Lyon s'en plaint au neuvième fiécle. Denis le petit
dans fon recueil des canons , & beaucoup d'au-
tres , confirment que tous les fidèles communiaient à
la mefTe publique. Ils apportaient de fon tems le pain
& le vin que le prêtre confacrait ; chacun recevais
le pain dans fes mains. Ce pain était fermenté com-
me le pain ordinaire ; il y avait très peu d'églifes
où le pain fans levain fût en ufage ; on donnait ce
pain aux enfans comme aux adultes. La communion
fous les deux efpèces était un ufage univerfel fous
Cbarlemagne i il fe conferva toujours chez les Grecs ,
& dura chez les Latins jufqu'au douzième iiécle. On
voit même que dans le treizième il était encor prati-
que quelquefois. L'auteur de la relation de la viâoire
que remporta Charles d'Anjou fur Mainfroi en 1264 ,
rapporte que fes chevaliers commun^tent avec le
pain & le vin avant la bat^lle. L'ufage de tremper
le pain dans le vin s'était établi avant Cbarlemagne:
celui de fucer le vin avec un chalumeau ou un fci-
phon de métal , né s'introdurfit qu'environ deux cenf
ans après , & fut bientôt aboli. Tous ces rites , toutes
ces pratiques changèrent félon la conjondure des
tems , & lelon la prudence des pafteurs , ou félon, le
caprice , comme tout change.
. L'églife latine était la feule qui priât dans une lan-
Aa îij
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I
§f 374 Rites keligibux
gué étrangère inconnue au peuple. Les inondations
des barbares qui avaient introduit dans l'Euro;pe leurs
idiomes , en étalent caufe. Les Latins étaient encor
les feuls qui conféraiTent le batéme par la feule afper-
fion ; indulgence très naturelle pour des enfahs nés
dans les climats rigoureux du feptentrion , & conye*>
nance décente dans le climat chaud d'Italie. Les céré*
monies du batéma des adultes ,* & de celui qu'on don-
nait aux enfans , n'étaient pas les mêmes. Cette' diffé-
rence était indiquée par la nature.
La confeQion auriculaire s'était introduite , dit -on ^
dès le fixiéme fiécle. Les évêques exigèrent d'abord
que les chanoines fe confeiTaiTent à eux deux fois
l'année , par les canons du concile d'Attigny en ytf ^ ,
'& c'eil la première fois qu'elle fut commandée expref-
fément. Les abbés fournirent leurs moines à ce joug ,
§& les féouliers peu-à^peu le portèrent. La oo^feffion ^
publique ne fut jamais en ufage dans l'Occident ; car B
lorfque les barbares embrafTèrent le chriftianifme , les
abus & les fcandales qu'elle entraînait après éHt , l'a-
Hraient abolie en Orient , fous le patriarche NeSaire ,
è la fin du quatrième iiécle ; mais fouvent les pécheurs
publics fiifaient des pénitences publiques dans les
eglifes d'Occident , furtout en Efpagne , où l'invaGon
des Sarrazins redoublait la ferveur des chrétiens hu-
miliés. Je ne vois aucune trace jufqu'au douzième
fiéde de la formule de la confeflion , ni des oonfef-
fiohtiux établie dans leséglifes , nfde la nécefTité préala^^
ble de fe Qonfefler immédiatement avant la communion.
Vôu^ obferverez que ta confeflion auriculaire n'é-
tait point recjue aux hûiriéme & neuvième fiécles dans
lès pays au - delà de la Loire , dans le Languedoc ,
âkns les Alpes. Alctdn s'en plaint dans fes lettres.
Les peuples de ces contrées femblent avoir eu tou-
jours quelques difpofidons à s'en tenir aux ufages de la
primitive églife ,& à rejetter les dogmes & les coutumes
quç l'églife plps étendve jugea convenable d'adopter.
'fitfywi*" * m
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MiMflMta
OU XEMS DE CHARIiftSIAOKB. 3?f
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• Aux huitième & néuYiéïkie fié^let il y avait trotf
carêmes . " " "
grecque
tcms de w.^o^,.^, ^„.
ne font biea connus qu'après le troiûéme ( a )i concile
de Latran en lai^ , impoférenc la néceŒité de faire
une ibis l'année ce qui femblait auparavant plus ar^
bitraire.
Au tems de Cbarkmagm il y avait des confeiTeurt
dans les armées. Charles en avidt un pour lui en titre
d'office ; il s'appellait raidon ^ '^ était abbé d'Angt
près de Confiance..
.U était permis de fe confefler à un laïque , & même
à une femme en cas de néceflité (b). Cette permiffion
dura très longtem& C^ft pourquoi Jointnlie dit qu'il
confeffa en A^ique un chevalier , & qu'il lui donna l'ab-
folution félon le pouvoir qu'il en avait. Cen^fflfat
tota-à-fait ftnfacrement , dit St. Thomas, mais (f^
comme facremenf.
On peut regarder la confeffion comme le plus grand
frein des crimes fecrets. Les fages de l'antiquité avaient
embraifé l'ombre de cette pratique falutaire. On s'était
confeiTé dans les expiations chez les Egyptiens , &
chez les Grecs , & dans prefque toutes les célébrations
de leurs myftères. Marc - Aurê/e en s'afTociant auK
myftères de Ciris Eieti/tne , fe confe(& à Vbiérof bouse.
Cet ufage fi Taintement établi chez les chrétiens ,
fut malheureufement depuis l'occafion de quelques
funeftes abus. La faiblefle du fexe rendit quelquefois
les femmes plus dépendantes de leurs confefTeurs que
de lèurfr'épouY. Prefque tobs ceux qui confeiorèrent les
reines 9 fe fervirent de cçt èmpbefeçret & facrépour
(a ) (ifit âVnit^M noament le qnatritoe.
Voy<t 1m MtàniSkmp»,
Aa iiij
mmmmm
^^^^^^^Wêkk^^
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' |7« -1 R I T * ^ R E L I G I E U X:
entrer 'dans les alSàkeé d'état. Lorfqu^nceligieiix do-
mina fur h çonfdencc d'un fouverain , tous £esJcon^
feèce^ s'en prévalurent , & plufieurs employèrent le
JBfédit du confefleur i^ur fe venger de leurs ennemis.
£nfin;, il .arriva que dans les divifioos entre les empe<*
leurs & les papes ^ dans les fadions des villes , led
{u^rôs ne donnaient pas l'abfolution à ceux qui n'e*
taient pas de leur parti. C'eft ce qu'on a vu ca France
du tems du roi Henri IV. Prefque tous les confeiTeurs
rcfuTaiejnt d'abfoudre les fu}ets qui reconnaiilaient leur
foi. La facilité de féduire les jeunes perfonnes , & de
If s ))Qrter au crime dans le tribunal même de la péni-
tence , fut encor un écueil très dangereux. Telle eit la
déplorable condition des hommes , que les;remèdes les
f>lil^ divins ont été toprn^^n poifon^
I
L JLatdîgîon chrétienne ne s'étaitpoint encor étendue
-an Nord plus loin qjue les. conquêtes de Çbarlemagnt.
La Scandinavie , le Dnnnemarok , qu'on app^Haic le
fardes Normand^., avaient un culte que nous appelions
ridiculcrpent idolâtrie. La religion des idolâtres ferait
celle qui attribuerait la puiffance divine à des figures ,
à(de^ images ; ce n'était pas t^elle des Scandioftvfis ; ils
«'avaient ni peintre ni fculpceur. Us adoraient Qdi^t >
& ils fc figuraient qu'après leur mort le bonheur de
l^Homme çonfiftait à boire dans la falle d'Orfm de U
hièrc dans le crâne de fes ennemis. On a encore de
Jeurs* anciennes chanfons traduites , qui expriment
.cette jdé.e. Il y avait Jongtenis que hs peuples da
Nord croyaient une autre vie. Les druides avaient
,enfeigné aux Celtes quHls^renaîtraient pour' combattre ,
& l^spr/êtres de la Scand/navie perfuadaient auj^ honw
|nç§ qu'ils bqiraiçnt .4e Ja bière après leur mou, .
La Pologne n'était pi moins barbare » ni tçpins
4lï«ffièr/ç.î Ces IVlofcovites , auffi fa^vageis-quélerefte
de la grande Tartarie , en (avaient à peine affez
pour être payeq^;:-4nais tous.ces.Reup)d« yi^ieçfcen
paix dans leur ignorance,;, 3vei^î<çipf\^'4tri? inçoç^gsà
■
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i|,<»^-l >W>i'i- MlH^g
i DU TEMs 0* Charlemagne. 87t \'
jani — ' ■ ■ *
Charlemagne , qui vendait fi chef la connaiflance du
chriftîanifmc !
Les Anglais commenqaîent à recevoir la religion
chrétienne» Elle y av^ît été apportée peu auparavant
par Confiance C/are , protedeur fecret de cette religion
alors perfécutée. EJlc n'y domina point ; l'ancien culte
•du pays eut le deffus encore longtems. Quelques mif-
fionnàires des Gaules cultivèrent grofTicremcnt un peth
nombre de ces infulaires. Le fameux Péiage ^ trop zélé
4^fejifeur de la nature humaine , était né en Angle-
terre ; mais il n'y fut point élevé , & il faut le compter
parmi les Romains.
L'Irlande qu'on appellait Ecqffe , & l'Ecoffe connujB
-alors fous le nom fX'Albame^ ou du pays des PiSes^
avait rec^n aufli quelques' femences du chriftîanifme ,
étouffées toujours par l'ancien culte , qui dominait. Le
moine Oùlomban , né en Irlande , était du fixiéme lié*
de ; mrâfs îF paraît par fa retraite en France , & par les
monaftères qu'il fonda en Bourgogne , qu'il y avait peu
à faire & beaucoup à craindre pour ceux qui cher-
jzhsÀtnt en Irlande & en Angleterre de ces établiffe-
mens riches & tranquilles , qu'on trouvait ailleurs à
l'abri de la religion.
Après une extinction prefque totale du chriftîa-
nifme Jans l'Angleterre , PEcofle & l'Irlande , la ten-
4refle conjugale l'y fit renaître. Etbelbort y un ^cs
Tojs barbares Anglo-Saxons de TEptarchie d'Angle-
-terre, qui avait fon petit royaume dans la province
de Kent , où eft Cantorbéri , voulut s'allier avec ua
roi de France. Il époufa la fille de Cbildebert roi
de Paris. Cette princeflc chrétienne , qui pafTa la
mef iM^ec un évéque de Soiflbns , difpofa fon mari à
recevoir le batéme , comme Clotilde avait foumis
Clovis, Le pape Grégoire le grand envoya Augujlin ,
que les Anglais nomment Auflin y avec d'autres moi-
^ nés Romains en 598. Ils firent peu de converfions ;
^SP(i0y[\\ ' ' I iippiiiBftiii^t Il ■ ipjj'tâ^
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I
:
ÉÉk
378 Rites R.E L I o I EU x,^.
car il faut au moins entendre ta langue du pays,
potir en changer la religion ; mais , favorîfés par la
reine , ils bâtirent un monaftère.
Ce fut proprement la reine. qui convertit le petit
tfPfiumt de Cantorbéri. Ses fujets barbares , qui n'a^
raiqnt point d'opinions , fuivirent aifément l'exem-
ple de leurs fouverains. Cet AnguJHn n'eut pas de
fieine à fe faire déclarer primat par Grégoire le grand.
1 eût voulu même Tétre des Gaules ; mais Grégoire
hiî écrivit qu'il ne pouvait lui donner de jurifdic-
tion que fur TAngleterre. Il fut donc premier ar-
chevêque de Cantorbéri , premier primat de PAogle^
terre. Il donna à Tun de fes moines le titre d'évê-
Qse de Londres , à l'autre celui de Rochefter. On
ne peut mieux comparer ces évéques^ qu'à ceux d'Ao.
tiocbe & deBabilone, qu'on appelle évéques in par--
tibus infidelium. Mais avec le tems , la hiérarchie
d'Angleterre fe forma. Les monailères furtout étaient
très riches au huitième & au neuvième fîécle. Ils
mettaient au catalogue des faines tous les grands fèi-
gneurs qui leur avaient donné des terres ; d'où vient
que l'on trouve parmi leurs ûints dc^ipe tems -Ht >
fept rois j fept reines , huit princes , ferze princefles.
Leurs chroniques difent que dix rois & onze reines
finirent leurs jours dans des ck)itres. Il efl croya-
ble que ces dix rois & ces onze reines fe firent feu-
lement revêtir à leur mort d'habits religieux , & peut-
être porter , k leurs dernières maladies , dans des coo-
vens , comme on en a ufé en Efpagne : mais non pas
qu''en effet Us ayent en fanté renoncé aux .a£Eaire8
puUiques , pour vivre en cénobites.
I
Miim^^
1
^5P^Wfc*i5S
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il
Suite dis usages, &a
CHAPITRE VINGT.ÛEUXLÉJXLE.
Sttite des ufagts du tenu de CharlemagkEw De Im
jujiice y des loix. Coutumes JinguUires. Efreuves»
D
^Es comtes nommés par le roi rendaient fommai.
rement la juftice. Ils avaient leurs diftriâs affi-
gnés. Us devaient être inftruits des loix , qui n'é»
talent ni fi difficiles ni fi nombreufes que les nôtres.
La procédure était fimple : chacun plaidait fa caufe
en France & en Allemagne. Rome feule , & ce qui
en dépendait , avait encore retenu beaucoup de loix
& de formalités de l'empire Romain. Les loix lom*
bardes avaient lieu dans le refte de l'Italie dtérieure.
Chaque comte avait fous lui un lieutenant , nom-
mé Viguier , fept afTefleurs , Scabini , & un greffier,
Notarius. Les comtes publiaient dans leur jurifdic-
tion Tordre des marches pour la guerre , enrôlaient
les foldats fous des centeniers , les menaient aux ren-
dez-vous , & laifiaient alors leurs lieutenans faire les
fondions de juge.
Les rois envoyaient des commiflaires avec lettres
exprefles , MiJJt Dominici , qui examinaient la con-
duite des comtes. Ni ces commiflaires , ni ces com-
tes ne condamnaient prefque jamais à la mort , ni à.
aucun fupplice ; car fi on en excepte la Saxe , oà
Charlemagne fit des loix de fang , prefque tous les
délits fe rachetaient dans lé refte de fon empire. Le
feul crime de rébellion était puni de mort , & les
rois s*en réfervaient le jugement. La loi falique^
celle des Lombards , celle dès ripuaires , avaient éva-
lué i prix d'argent la plupart des autres attentats,
ainfi que nous l'avons vu.
Leur jurifprudence , qui parait humaine , était peut-
être en effet plus cruelle que la nôtre. Elle laifiait
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OÊÊÈk
2$0 SUITB D.ES.USAGE S,&C.
la liberté de mal faire à qujconque pouvait la p^yer.
La plus douce loi efl celle qui mettant le frein le
plus terrible à l'iniquité , prévient ainfi le plus de
crimes ; mais on ne connaifTait pas encbr la queflion »
la tOTture , ufage dangereux qui , comme on fait , ne
fert que trop fouvent à perdce l'innocent , & à faa-
yer le coupable.
Les loîx falîqucs furent remifes en vigueur pat
Cbarlemagne, Parmi ces loix faliques , il s'en trouve
une qui marque bien expreffément dans quel mépris
étaient tombés les Romains chez les peuples barba-
ref. Le Franc qui avait tué un citoyen Romain , ne
payait que mille cinquante deniers ;& le Romainr
payait pour le fang d'un Franc deux mille cinq cent
deniers.
Dans les caufes criminelles indécifeS , on fe pur-
geait par ferment. Il falait non-feulement que la par-:
tie accufée jurât , mais elle^ était obligée de produire
Dti certain nombre de témoins qui juraient avec t\\e>.
Quand les deux parties oppofaîent ferment à fer-
ment , on permettait quelquefois le combat ; tantôt à
fer émoulu , tantôt à outrance.
(a) Ces combats étaient appelles , ïe jugement de
Dieu ; c'efl aufli le nom qu'on donnait à une des
£Ius déplorables folies de ce gouvernement barbare.
es accufés étaient fournis à l'épreuve de l'eau froi-
de , de l'eau bouillante ou du fer ardent. Le célè-
bre .E?/>»w^ Baluze a raffemblé toutes les anciennes
cérémonies de ces épreuves. Elles commençaient par
la mefle ; on y communiait l'accufé. On bénifîàit
Téau froide , on l'exorcifait. Enfuite l'accufé était
jette, garrotté , dans l'eau. S'il tombait au fond , il
était réputé innocent. S'il furnageait , il était jugé
coupable. Mr. de Fleuri dans fon bijioirè eccié/ta/H-
C f>} V/^^z If chapitre dçs dnds.
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!^
éÈt
Epreuves par le ppu.
me dit que c'était une manière fûre de fie trouver per«
fonne criminel. J'ofe croire que c'était une manière
de faire périr beaucoup d'innocens. Il y a bien des
gens qui ont la poitrine aflez large & les poumons
aiièz légers , pour ne point enfoncer , lorfqu'une greffe
corde qpî les lie par pluCeurs tours , fait avec leur
corps un volume moins pefant qu*une pareille quantité
d'eau. Cette malheureufe coutume , profcrite depuis
dans les grandes villes , s'eft confervée jufqu'à nos
jours dans beaucoup de provinces. On y a très fou-
vent affujetti , même par fentence de juge , ceux qu'ojçi
fkifait paffer pour forciers ; car rien ne dure fi long-
tems que la fuperftidon : & il en a coûté la vie à plus
d'un malheureux.
Le jugéméiit de Dieu par l'eau chaude s'exécutait
en faifant plonger le bras nud de Taccufé dans une
cuve d'eau bouillante. Il falait prendre au fond de la
cuve un anneau béni. Le juge , en préfence des prê-
tres & du peufJe , enfermait dans un fac le bras du
patient , fcèllait le faç de fon cachet ; & fi trois jours
après il ne palraiffait fur le bras aucune marque de brû-
lure ^l'innocencb était reconnue.
ïôus les hiftoriens rapportent Texanple de la reine
Teutberge , bru de l'empereur Lotbaire petit - fils de
Vharlemagné , àccufée d'avoir commis un incefte
avec fon frère moine & fous - diacre. Elle nomma
tin champion qui fe foumit pour elle à l'épreuve de
l'eau bouillante , en préfence d'une cour nombreufe.
Il prit l'anneau béni fans fe brûler» Il ef^ certain qu'on
& des fecrets .jpour foutenir Tadion d'un petit feu
fans péril pendant quelques fécondes. J'en ai vu des
exemples. Ces fecrets étaient alors d'autant plus com-
muns qu'ils étaient plus néceffaires. Mais il n'en ejl
point pour nous rendre abfoluinent impaffibles. U y
a grande apparence que dans ces étranges jugemens
on fallait fubic l'épreuve d^une manière plus ou moins
mitam
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§ga Epreuves fAR le feu.
rigoureufe feton qo^on voulait condamner ou A^
foudre.
CétW épreuve de Teau bouillante était dcftînét
particulièrement à la convidtion de l'adultère. Ces
coutumes font plus anciennes , & fe font étendues
plus loin qu'on ne penfe.
tes favans n^orent pas qu'en Sicile , dans le tem-
ple des Dieux Miques , on écrivait fon ferment qu'on
jcttait dans un bamn d'eau, & que fi le ferment fur-
nageait , l'accufé était abfous. Le temple de Trezène
était fameux par de pareilles épreuves. On trouve
encor au bout de TOrient dans le Malabar & dans
le Japon des ufages femblables > fondés for la fim*
pHcité des premiers tems , & for la fuperftîtion corn*
mune à toutes les nations. Ces épreuvec étaient ao^
trefois fi autorifëes en Phépîcîe , qu'on voit dans le
Pentateuque , que lorfque les Juifs «rrcrent dans b
défert , ils fatfaaent boire d'une eau mêlée avec de
la cendre à leurs femmes foupçonnées d'adultère. L^
coupables ne manquaient pas , Ëms doute , d'en cre-
ver , mais les femmes fidelles à leurs maris buvîdent
inipunément. Il efi; dit dans l'évan^le de St Jac^es
que le grand - prêtre ayant Eût boire de cette e;«i
à Marie & à Jofeph „ les deux épou3^ fc récond*
rltèrent.
La troifiéme épreuve était cdle xl'ime barre de fia
ardent, qu'il falait porter dans la main Tefpace de neuf
J>as. Il était plus difficile de tromper dans cette épreu-
ve que dans les autres ; auflî je ne vois perfonne qui
s'y foit foumis dans ces fiéclcs groifiers. On veut fa-
vôir qui de l'égUre grecque ou de la latine établit
ces ufages la première. On voit des exemples de ces
épreuves à Conftantînople jnCpi'au treizième fiécle ;
& Pacbimèfi dit qu'il en a été témoin..; U eft vraifém-
I
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qi^wwîiwifi^
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lÉËtai
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L O I X B T U S À G B S , &C. m
blable que les Grecs eommoniquérenc aux Latins ces
fuperftitions orientales.
A l'égard des loix civiles » voici ce. qui me parait
de plus remarquable. Un homme qui n'avait point
d'enfans , pouvait en adopter. Les époux pouvaient
fe répudier en juftice; & après le divorce il leur était
permis de pafler à d'autres noces. Nous avons dans
Marcuîfe le détail de ces loix.
Mais ce qui paraîtra peut - être plus étonnant , &
ce qui n'en efl pas moins vrai » c'eft qu'au livre deu-
xième de ces formules de Marcuîfe , on trouve que
rien n'était plus permis ni plus commun que de déro-
ger à cette fameufe loi falique , par laquelle les filles
n'héritaient pas. On amenait fa fille devant le comte ou
le commiflTaire , & on difait : » Ma chère fille , un
„ ufage ancien & impie ôte parmi nous toute por-
„) tîon paternelle aux filles ; mais ayant confidéré cette
„ impiété , j'ai vu que , comme vous m'avez été don-
,, nés tous de DiEU également , je dois vous aimer
53 de même ; ainfi , ma chère fille , je veux que vous
„ héritiez par portion égale avec vos frères dans tou-
tes mes terres , &c. '*
»
On ne cbnnaiffaît point chez les Francs , qui vivaient
fuivant la loi falique & ripnaire , cette diftindtion de
nobles & de roturiers , de nobles de nom & d'ar-
mes ) & de nobles ab avo , ou gens vivant noblement.
Il n'y avait aue deux ordres de citoyens , les libres
& les ferfs, a-peu-près comme aujourd'hui dans les
empires mahométans & à la Chine. Le terme nàbiHs
n'en employé qu'une feule fois dans les capitulaires
au livre cinquième , pour fignifier les officiers , les
comtes , les centeniers.
Toutes les villes d'Italie & de France étaient gou-
vernées félon leur droit municipal. Les trâ)uts qa'el
les payaient au fouveràtn , conûftaient en fodorum
t^èm
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H^IgMi^i' M
afeli!
ÉÊm
3S4 L o I X ET u s A<^ E s , &a
"1
f^ratam , manfionaticum , fouragcs, vîvrcs , meubles de
féjour. Les empereurs & les rois entretinrent longums
leurs cours avec leurs domaines , & ces droits payés
en nature quand ils voyageaient. Il nous refte un capi-
tulaire de Charlemagne concernant fes métairies. Il
entre dans le plus grand détail. Il ordonne qu'on lui
rende un compte exadt de fes troupeaux% Un des
grands biens de la campagne confiflait en abeilles.
Enfin les plus grandes chofes , & les pltrs petites de
5e tems-la nous font voir des loix , des mœurs, &
es ufages dont à peine 11 refte des traces.
CHAPITRE VINGT-TROISIÉME.
Louis le faible , ou le débonnaire , dépofé par fei m-
, fans & par des prélats,
L'Hiftoire des grands événemens de ce monde n'eft
guères que l'hiftoire des crimes. Il n'eft point de
fiécle que l'ambition des féculiers & des eccléfiafti-
ques n'ait rempli d'horreurs.
A p.eine Charlemagne eft-il au tombeau , qu^une
guerre civile défoie (a fomlUe & l'empire.
Les archevêques de Milan &'de Crémone allument
les premiers feux. Leur prétexte eft que Bernard y roi
d'Italie, eft le chef de la maifon Carlovin^enne , le
fils de l'ainé de Charlemagne. On voit allez la véri-
table raifon 'dans cette fureur de remuer , & dans
cette frénéfie d'ambition , qui s'autofife toujours des
loix mêmes faites pour la réprimer. Un évéque d'Or-
léans entre dans leurs intrigues ; l'oncle & le neveu
lèvent des armées. On eft prêt d'en venir aux mains à
Châldns fur Saône ; mais le parti de ^empereur gagne
par argent & par promefles la moitié de l'armée d'Ita-
» ,He.' On négocie > c'eft-à-dire » on veut tromper.' Le
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I6V*^
toi eiï ailbz imprudent pour veiiiV dans le camp dt(
fpn onde. Lom^ , qu'on a nommé le dééonuairf , parce
qu'il était fà'Me , & qui fut cruel, par faiblelTe , fait
crever les yeux à fon neveu , qur lui demandait grâce
à genoux/ Le malheureux , roi m^urt dans Içs tour*
inens du corps & de refprit, trois jours après cettQ
exécution cruelle. Il fut enterré à Milan , & on grava
fur fon tombeau : Ci gift Bernard de fuinte mémoire,'
Il femble que le nom de fai^^ en ce tems ^ là ne fut
qu'un titre honorifique. Alors IfOuis fait tonçlre &
enfermer dans un mdnaftère trois de fes &éres , dans
la crainte qp'un jour le fang de Cbarlemagne , trop
refpedté en eux , ne fufcîtât dés guerres. Ce ne fut,
pas tout. L'empereur feit arrêter tous les partîfans île
Bernard ^'CiMt ce roi avait rtommés fous Pefpoir dé
ft grâce. Ils éprouvent le même fup^lice que fc roi,
Les eccléfiaftiques font exceiptés delà fentence. Ott
les épargne ,<ùx qui étaient lés auteurs de la guerre,
La depolitîon ou l'exit font leur feul chAtiment. Louis
ménageait l'églife ; & Téglife lui' fit bientôt ftntir
qu'il e^t dû être mxAni cruel & plus ferme,
• Dés l'an 817 Xoii/x avait fuivî le mauvais exemple
de fon père , en donnant des royaumes à -fes enfans ;
& n'ayant ni le courage d'efprît de fon père , ni Tau»
torîté que ce courage donne, il sCexpofait à l'ingra-
titude. Oncle barbare â; frère trop, dur , il fut un
pèr« trop facik.
Ayant aflbcié à l'empire fon fils aîné <X(tfÂa/r^., don.^
né rAouitâine au fécond nommé Pépin , la Bavière à
ioirir.fôn troifiéme fils ,: il lui r^a4t un jeune enfknt
d'une nouvelle frmme. C'efft ce CharJes le chauve <^
qui fut depuis empereur. Il voulut après le partage *
ne pas luiTer. fans états cet çn&ni' d'un? f^mme qu'il
aimait» : >•
Une des fourcels dû mafliçur de Louis le faibk 1 Sç
de tant dé défâftres plus grands qui depuis ont affligé
Effaifur les mœurs , 6f c. Tôni. I. B b
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38^ L 0 V 1 1 L K E A I B t B
i
is«
PEurope , fut cet abiis ()a{ commençait & m|tre 4 d'ac
corder de U paiflance dans le monde à ceux qui ont
renoncé au monde.
Vola y abbé de Coîbie» fon pirent psr bàtardife,
commença oette fcène mémorable. C'était un hom-
me furieux par zèle ou par efprit de fâdtion , on par
tous les deux enfemble, Se l'un de ces chefs départi
qu'on à tu fi fouvent faire le mal en prêchant la
Ycrcu , & troubler tout par l'eTprit de la règle.
Dans un parlement, tenu en 829 à Aix-kt-Cha'
pelle , parlement où étaient entrés les abbes , parce
<}u'ils étaient feigneurs de grandes terres, ce Vak
reproche publiquement i l'empereur tous lesdéfor-
dres de l'état : „ C'eft vous » lui dit^jl , qui en êtes
,, coupable. ^ Il parle enfuite en particulier à cha-
que membre du parlement avec plus de fédltion. Il
ofe accufer l'impératrice Judith d'adultère. Il veut
prévenir & empêcher les dons que l'empereur veut
faire à ce fils qu'il a eu de l'impératrice. Il dés-
honore & trouble la AmiUe royale » & par coDféqaeat
l'état , fous prétexte du bien de l'état même.
Enfin l'empereur krité renvoyé VaJa dans fon mo-
naftère , dont il n'e4t jamab dûfortii; I) fe refont , pour
fatisfaire fa femme , à donner à fon HiM une petke
partie de L'Allemagne vers le Rhin , le pays des Suifles
& la Franche -Cooité.
Si dans l'Europe tes lotx avaient été fondées fur
la puififance paternelle , fi les efprtts euflisnt été pêne-
tfés de ia néceffité dn refpeét filial comme do pre-
mier de tous les devoirs , ainfi que je l'ai ttmvy^t
de la Chine; les trois enfans de Fempereur , qui avaient
reçu de lui des couronnes » ne^e feraient j^int ré-
voltés contre leur père qui donnait un héritage a
un enftnt du fécond lit.
»iii mtm
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ï
D'abord ils fe plaignifent i auffi> t6t l'abbé de Cor.
bie Éc jOHiC à Tabbé de Se» Denis , plus faâieu^ encor ,
& qui ayant le^ abbayes de St. Médard , de Soiâbns
& de St Germaîn-deS'Prés , pouvait lever des trou*»
pes , & en leva enfuite. Les évéques de Vienne , de
Lyon , d'Amiens, unis à ces moines , pouflent les pnnf
ces k la guerre civile , en déclarant rebelles à Di^y ,
& à réglife , ociix qui ne feront pas de Içur parti, Un
vain le Sébortnaire ^ uu Aieu d^aHembler des armées ,
convoque quatre conciles y dans lefquels on fait de
bonnes & d'inudies loix. Ses trois &Is prennent le^
armes. C'eft , ie crois , Ja première fois qu'on a vu
trois enfans foulevés enfemble contre leyr père. L'em-»
pereur ^yne à la fin. On voit deux csmps remplis
d'évéquw, d'abbés & de moines. Mais du côté des
princes cft le pape Griffât e J F dont le nom donne
un grand poids à leur parti. C'était déjà rintérêc des
papes d'abaiffer les empereurs. Déjà Etienne ^ prédé,
cefleur de Ôr^o/re , s^était inftallé dans la chaire pon*
tificale fans l'agrément de louis te délmmiaire. BrouîU
kr le père avec les enfans » fembhit le moyen de
s'agrandir fur^ leurs ruines* Le pape Grégoire vient
donc en France , & menace Tempereur de i*excom*
Biutder., Cette cérémonie d'excommunication n'em^
portait pas encor l'idée qu'on voulut Jui attacber
depuis. On n'ofait pas prétendre qu'un excommunié
dût être privé de Tes biens par. la feu(e excommunir
cation. M^s on croyait rendre un homme exécrable ,
ft rompre par ce^ glaive tovs ks liens qui peuvent
attacher les hommes i lui^ .
Les évéques du parti de l'empereur fe fervent d^
leur droit > & font dire eourageu&ment au pape : 5%
RXCOMMUlfICÂTURUÇ VENIET , EXCOMMUKXCA»
TUS ABIBIT ? S'il. viffi( fxmr excommunier , il retour^
nera e»contm9iWf Itéi-mim^. Us lui écrivent avec fer«
meté , en le traitant à la vérité de pa{^ , mais cq
Il même tems de frère. Grégoire , plus lier encore , leur
31 tS^d^ : » Le téanç 4e f r^& ftat trop Pégalité i t^ezr
& , ' jb^j
ggglUm un il Hpai ^ nii
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iiyi>M .imai! ipi nrj^
&'
!
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38S LOUISLE FAIBLE
iy vous-en à celui de pape ; reconnaiflez ma fapério'
iy rite : fâchez que Tautorité de ma chaire eft au-deflus
^y de celle du trône de Louùi ^^ Enfin il élude dans
cette lettre le ferment qu'il a fait à l'empereur.
La guerre tourne en négociation. Le pontife fç rend
arbitre. 11 va trouver l'empereur dans fon camp. Il
Y a le même avantage que Louis avait eu autrefois
fur Bernard. Il féduit fes troupes , ou il fouffre qu'el-
les foient ftiduites. D trompe Louis , ou il eft trompé
lui-même par les rebelles au nom defquels il porte
h parole, A peine le pape eft -il fortî du camp, que
ta nuit même la moitié des troupes impériales pafle
du côté de Lotbaire fon fils. Cette défertî«i arriva
près de Bâle , fur les confins de l'Alface ; &ia plaine
où le pape avait négocié , s'appelle encore le cbamt
du nunfouge. Nom qui pourait être commun à plu-
fieurs lieux où l!on a négocié. Alors le monarque
malheureux fc rend prifonnier à fes fils rebelles , avec
fa femme Judith , objet de leur haine. Il leur livre
fon fils Charles^ âgé de dix ans, prétexte innocent
de ta guerre. Dans des tems plus barbares, comme
fous Ciovu & Tes enfàns , ou dans des pays tels que
Confiantinopk , je ne ferais point furpris qu'on
eût fait périr Judith & fon fils , & même Tempereur.
Les vainqueurs fe contentèrent de faire rafer Tim-
pératrîce , de la mettre en prîfon en Lombardie , dé
renfermer le jeune Charles dans le couvent de Prum,
au mlHeu de la fbrét des Ardennes , & de détrôner leur
père. Il me femble , qu'en lifant le défaftre de ce
père trop, bon , pn reffent au moins une fatisfàâipn
fqcrette , quand on voit que fes fil$ ne furent guèfes
moins ingrats envers cet abbé Vola , le premier aU'
teur de ces troubles , & envers le pape qui les avait
ti bien foutenus. Le pontiftt retourna à Rome , mé-
prifé des Vainqueurs , & Vola fe renferma dans un
monaftère en Italie.
Lothaire^ d'autant i)lus coupable qfu'il était aflbcié ;
SB***
&
EN léNITB NC E.
389 ^'
à l'empire, traîne fori père prifomiier à C6inpiégn&
Il y avait alors un abus funeftè introduit dans Té-
glife , i)ui défendait de porter les armes , & d'exeroer
les fondions civiles pendant le tçms de la pénitence
publique. Ces pénitences étaient rares , & ne tom-
baient guères que fur quelques malheureux de la lie
du peuple. On réfolut de faire fubir à l'empereur ce
fupplice, infamant , fous le voile d'une humiliatioiv
chrétienne & volontaire , & de lui impofer une péni-
tence perpétuelle^ qui le dégraderait pour toujours.
Louis eft intimidé : il a la lâcheté de condefcendre
à cette propofition , qu'on a la hardiefle de lui faire.
■Un archevêque de Rheims , nommé Ebèon^ tiré de
•la condition fervile malgré les loix , élevé à cette
dignité p^r Louis même, dépofe ainfi fon fouverain
& fon bienfaiteur. On fait comparaître le fouverain ,
entouré de trente évéques , de chanoines , de moines ,
dans Péglife de Notre-Dame de SoiiTons. Son fils
Lotbaire préfent, y jouît de Thumiliation de fon père.
On fait étendre un cilice Rêvant l'autel. L'archevê-
que ordonne à l'empereur d'ôter fon baudrier , fon
épée , fon habit , & dé fe profterner fur ce cilice.
Louis ^ le vifage contre terre, demande lui-même la
pénitence publique , qu'il ne méritait que trop en s'y
Toumettant. L'archevêque le force de lire à haute
voix un écrit, dans lequel il s'accufe de facrilège &
d'homicide. Le malheureux lit pofémcnt k lifte de
fes crimes , parmi lefquels il eil fpécifié qu'il avait
fait marcher fes troupes en carême , & indiqué un
parlement un jeudi faint. On drefTe un procès verbal
de toute cette aétion : monument encorfubl] fiant d'în-
folence & de baffeffe. Dans ce procès verbal on ne
daigne pas feulement nommer Louis du nom d'em-
pereur : il, y eft appelle DOMINUS LUDOVICUS / nobU
bomme , vénérable bomme.
On tâche toujours d'appuyer par des exemples les
entpeprifes^ extraordinaires. Cette pénitence de Zoi^fx ig
Bb iij ^
^igaa'jii mm»im^ ■iH'A^Sa^
:
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1
IB t Bi
.î
ait aittontôe par le ionTetrir dHiiî cérhriii toi Vifigodi
nommé Vumba , qui Fegnait en Efpagne ta 6%i. Ç'cft
iè même qui avait été oint à {bu couronnement II
devint imbécille & ibtimis à la pénitence publi-
que dans un eondle de Tolède. Il s'était mis danft
^n doltre. Son foccefleur Hervique avait recon^
nti qu'il tenait fa Couronne des évé^es. Ce fait était
cité , comme fi un exemple pouvait juftifier un atten-
tat. On alléguait encore la pénitence de l'empereut
Tbéodàfe / mais elle fut bien différente. Il avait fait
maflacrer quinze mille citoyens à TheiTalonique, non
pas dans un mouvement de colère , comme on lé dit
tous les jours très fauffement dans de vains i^négy-*
Tiques , majs après une longue délAéradon. Ce crime
réfléchi , pouvait attirer fur lui la vengeance des peu»
pies , qui ne l'avaient pas élu pour en être égorgés.
^. Ambroife fit une très belle aâion en lui refofant
l'entrée de l'éJB;liCe , & Tbéedûfe en fit une très ùge
d'appaifer un peu la haine de l'empire , en s^abftenant
d'entrer dans Téglife pendant l^uît mois ; fiiible &
miCerable fatkfiiraoa pour le for&it le plus horrible ^
àioiït jamais un fouvetain fe fisit {biiillé*
touh fut enfermé un an dans une cellule du cou*
Vent de St. Médard de Soîflbns , vêtu d^ fac de péni-
ttnt , fans domeftiqties , fans confoiation , mort pour
le refte du monde. S'il n^avait eu qu^un fils , il était
perdu pour toujours ; mais fes trois enfaûs dilputant
Tes dépouilles , lent défunion rendit au père fa liberté
^ fa couronne.
transféré à St. Deais , deux de fes àis , Louis &
J^fiff» , vinrent le rétablir , & remettre entre fes bras
fa ftmmçA {onBsChmnkf. X'aiTemblée de Saiflons
eft anathématiféé par une. autre à Ti^ipnVJUe; mais
il n'en coûta à l'archevêque de Rheims que la perte
de fonfiége ; âncor lut- il jugé & dépoli dans U
facriiftie : remperéur l'avait été en pubUc m% pi0ds
m^n
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LOV I s Iil r A t IXE».
391
de PaoteL Qpdques évéqœs rarent àipolét voffu
L^mpereor ne put ou n'ofa les punir davantage»
Bientôt après un de ces mêmes enfans qui l'avaient
rétabli , Lmis de S^viêre , fe ;^volte encore. Le mal*
heureux père mourut de chagrin dana une tente au-
près de Mavence , en difant : Je f ordonne à Louis ,
fnais qvtil facbt quil nid dxmni la, mort»
Il confirma , dit-oA , folemnellement par fon tefta-
men( la donaiioo de Pefin & de Cbm-iemague k Vé*
glifo de Rome.
Les mêmes doutes s'éUvent fur cette confirmation ,
que fur les dons qu'elle ratifie. Il eft difficile de croire
que Cbariemague & (on fils ayent donné aux papes ^
Venife > la Sicile , la Sardaigne t & la Corfe , ^ys fur '
lefquelt ib n'avaient tout au plus que la prétention
difputée du domaine fupréme. £t dans quet tems
Louis eût*.il donné la Sicile qui appartenait aux em»
pereurs Grecs , & qui éuit infeftée par les defcentes
continuelles des Arabes ?
î
i
CHAPITRE VINGt-aUATRIÉME.
Etat de PEurope après la mort de LotïK ie dêbow-
noire y ou le faible. V Allemagne pour té&jours Jef a-
rie de^T empire Franc ou Frangais.
Après la mort du fils de Cbartemagne, fon em-
pire éprouva ce qui était arrivé à celui A^Alexan'
are y & que nous verrons bientôt être la deftînée de
celui des califes. Fondé avec précipitation, il s'écroula
de même : les guerres inteftines le divifèrent.
Il n'eft pas furpr^ant que des princes qui avaient
détrôné 4ettr pèw,ib foJent voiriu exterminer l'un
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§
<
BSBBBBS
$92 Etat d£ l'Euhope après la koRT
■ ■ ' I " , K i II
Tautre; G'éUit à. qui dépouillerait foh ftère/ Lotbairt
empereur ^ roulait tout. Charles le chauve ^ roi At
France , & Louis , roi de Bavière , s'uniitent contre
lui. Un fils de Pépin , ce roi d'Aqditâine iits du Débon-
naire^ & devenu roi apfès la mort de foft pcre, fé
joink à Lotbâtire. Ils défolent Tcmpire ; ils l'épuifent
de foldats. Enfin , deux rois éontre* deux rois ^ dont
trois font frères , Se dont l'autre cft leur neveu , fe
livrent une bataille à Fontenai dans TAuxerrois ,' dont
l'horreur eft di^ne des guerres civile». Plufîeurs au-
teurs aflurent qu'il y périt cent mille hommes. Il eft
vrai que ces auteurs ne font pas contemporains « &
que du moins il eft permis de douter que tant de
fang ait été répandu^ L'empereur Lotbaire fut vaincu.
Cette bataille , comme tant d'autres , ne décida de
rieui II faut obferver feulement que les évéques qui
avaient combattu dans- l'armée de CbarUs & de Louis ^
firent jeûner leurs troupes & prier D I E U pour les
morts t& qu'il eût été plus chrétien de ne les point
tuer que de prier pour eux. Lotbaire donna alors au '
monde l'exemple d'une politique toute- contraire à
celle de Cbarlemagne*
I
'Le vainqueur AtS Saxons * les avait âffojettîs au
chriftianifme comme à un frein néceflaire. Quelques
révoltes . & de fréquens retours i leur culte , avaipnt
hiarqué leur horreur pour une religion qu'ils regar-
.dàient comme leur châtiment. Lotbaire , pour fe les
jBttacher , leur donne une liberté entière de confcience.
La ihoitié du pays redevint idolâtre > mais fidelle à
fon roi. Cette conduite & celle de Cbarlemagne (on
grand-père , firent voir aux hommes combien diver-
sement les princes plient la religion à leurs intérêts.
Ces intérêts font toujours la deftinée de la terre.
tJn Franc , un Salîen avait fondé le royaume de Fran-
ce ; un fi Is du maire , ou majordAme Pépin ^ avait fondé
rctnpire Franc. Trois frères le divifent à jamais. Ces
trois enfans dénaturés , Lotbai^ , Loms de Bavière
& Charles le chauve \ après av(m verfé taot de fang
^flaSTii wiaafciiii
e lang ||
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iÇSKitfiBpfieMHMpai
DB L.QUIS LE; DÉBONNAIRE. 39}
à Fontehai ^ défflcmbfent enfiil Feitapire de Char le*
magne par la fameufe paix de Verdun» Cbaries 11^
.futnàmmé le chauve^ eut la France ; Lotbaire Tltalie,
la Provence , le Oauphiné ,.Ie Languedoc » la SuilTe,
la Lorraine , TAlface , la Flandre ; Louis de Bavière ,
ou ie Germanique , eut TAUemagne.
C'eft àcetteëpoque que les favans dans PhUlolre,
commencent à donner le nom de Français aux Francs;
c'eft alors que TAllemagne a fes loix particulières ;
c'eft l'origine de fon droit puMic , & en même tems
l'origine de la haine entre les Français & les Alle*-
mands. Chacun des trois frères fut troublé dans (pn
partage » par des querelles ecclèfiaftiques , autant que
par les divîfions qui arrivent toujours entre des en«
nemis qui ont fait la paix malgré eux.
C*eft au milieu de ces difcordes que Cbariet ie
vbauve , premier roi de la feule France , & ipuis h
Germanique premier roi de la feule Allemagne^ af-
femblèrent un concile à Aix-la-Chapelle contre £o-
tbaire\ & ce Lotbahre^< premier empereur Franc
privé de l'Allemagne & de la France.
Les prélats d'un comi^un accord , déclarèrent Zo-
tbaire ài^AiM de fon droit à la couronne , &.fes fu«
jets déliés du ferment de, fidélité : Promettez-vous de
mieux gouverner que /m ? difent^ils aux deux frères
Charles & Louis : Nous le promettons , répondirent
les deux rois : Et nous , dit l'évéque qui préfîdait »
nous vous permettons par F autorité divine , ç^f nous
vous commandons de régner à fa place. Ceconunan*
dément ridicule n'eut alors aucune fuite.
En voyant les évéques .donner atnfi les couronnes»
on fe tromperait fi on croyait qu'ils fuflent alors tels
que des électeurs de l'empire. Ils étalent puifTans à
la vérité , mais aucun n'était fouveratn. L'autorité
de leur caraékère &.le refpe<^ des peuples étaient
S^Ofm^
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I9t4 Etat de l'Europe avrés la mort
•1
des inftnnncni dont les rois fe fermaient à leur gré.
II y ivaic dans ces eecléfiafUqoes bien plus de fai-
bieite que de grandeur , k décider ainti du droit deS'
fois foivant les ordres du plus fort.
On ne doit pas être furpris, que quelques années
après un archevêque de Sens , avec vingt autres évé-
ques , ait ofé dans des tonjonâures pareilles , dé*
pofer Charles h chauve ,^ toi de France» Cet attentat
fut commit pour olalre à ÎA>uis de Bavière. Ces ino*
narques , aulli médians rois que frères dénaturés , ne
pouvant fe faire périr Tun 1 autre, fe Biifaient ana«
thematifer tour-à-tour. Mais ce qui furprend , c>ft
l'aveu que fait Charles le chauve dans un écrit qu'il
daigna publier contre Parchevéque de Sens : Au mins
cet archevêque, ne devait pas me dépofer avant (pu
feuffe comparu devant les iviques qui m^ avaient facrt
rois il/alait qu* auparavant feuffe jubi leur jugemtmi^
ayant toujours été prêt à me foumettre à leurs corrH»
fions paternelles & à leur châtiment. La race de
Charlemagne , réduite à parler ainfi , marchait Yilibl^
ment à fa ruine.
Je reviens à Lotbaire , qui avait toujours un grand
parti en Germanie , & qui était maître paifible en
Italie. Il paife les Alpes , fait couronner fou fils
Louis 9 qui vient juger dans Rome le pape Serons
IL Le pontife comparait > répond juridiquement aux
accufations d*un évéque de Metz , fe juftifie , & prête
enfuîce ferment de fidélité à ce même Lotbaire dépofe
par fes évéques. Lotbaire même fit cette célèbre & inu-
tile ordonnance, que pour éviter les féditions tropftc-
cjuentes , le pape ne fera plus élu par le peuple y & que
Ton avertira Tempereur de la vacance du St. Siège.
On s'étonne de voir l'empereur tantôt fi humble»
& tantêt fi fier ; mais il avait une armée auprès de
Ifome quand le pape lui jura obéiflance 9 ^ "*^ J
^çim^
'ffihyil'illl>iî4gg
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|IS»«î-
DS LOVIS X.B D^BONSTÂtRe. 39IÇ
"•"— ^ — '-^ ' ' ' .1. ■. . . ...... ... . .
avait ppintl Aix>»la«ChsipeU« quand les évéques I9
détrônèrent
Leur fentence ne fat qu'un fcandale de p1u8 ajouté
aux défolations de l'Europe. Les provinces depuis
les Alpes au Rbln ne Taraient plus à qui elles de-
vaient obéïr. Les villes changeaient chaque jour de
tyrans ^ les campagnes étaient ravagées tour^-touf paAr
différons partis. Qn n'entendait parler que de com-
bats ; & dans ces combats il y avait toàjours des
moines , des abbés , des évéques qui périflTaient les
armes à la main. Hugues un des fils de Cbarltnta^
gne y forcé jadis à être moine , devenu depuis abbé
( de St. Quentin , fut tué devant Touloufe avec f'abbé
de Ferrière : deux évéques y fureçt faits prifonniers.
Cet incendie s'arrêta un moment ^ pouf recommen»
cer avec fureur. Les trois frères , Lotbaircy Cbéign^ '.
les & Louis y firent de nouveaux partages , qui ne S
furent que de nouveaux fujets de divifions & de guerre « ^
L'empereur Lotbaire , après avoir bouleverfé 1*E»-
rope fans fuccès & fans gloire , fe fentanc alE^ibli ,
vint fe faire moine dans l'abbaye de Prum. Il ne
vécut dans le froc que fix jours ^ & mourut imbéciile
après avoir régné en tyran*
À la mort de ce troifiéme empereur d'Occident , |l
s^éleva de nouveaux royaumes en Europe , comme
des monceaux de terre après les fiscouiles d'un grand
tremblements
tïn autre Lotbaire , fils de cet cmperçût , donna
le nom de Lotbarmge à une affez grandç étendue
de pays , nommé depuis par contradion Lorraine ,
entre le Rhin , l'Efcaut , la Mcufe & la mer. Le Bra-
bant fut appelle la bajft Lorraine ,• le relie fut connu
Jfous le nom de îa,beuite% Aujourd'hui dç cette haute
iforraine il ne tefte qtfune petite province de ce
^^AW wU)U*'Ha I ' 'ij,fj»i&'i>i
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«15*^
f
il
396 Etat db l'Europe APaàs la mqat
nom » enfgloutie depuiâ peu dans le royaome de
France.
Un fécond fils de l'empereur Latbaire , nommé
Charles , eut la Savoie , le Dauphiné , une partie du
Lyonnois , de la Provence & du Languedoc. Cet état
compofa le royaume d'Arles , du nom dei^a capitale^
ville autrefois opulente & embellie par les Romains ,
mais alors petite , pauvre , ainfi que toutes les villes
en-de<;à des Alpes.
Un barbare , qu'on nomme Saîomon , fe fit bientôt
après roi de la Bretagne , dont une partie était encor
payenne ; mais tous ces royaumes tombèrent prefque
aufli promptement qu'ils furent élevés. . .
Le fantôme d'empire Romain fubfiftait Lotds , fé-
cond fils de Lotbaire , qui avait eu en partage une
partie de l'Italie , fut proclamé empereur par Févc-
que de Rome Sergms 11^ en 8SS* ^ ne réfidait point
à Rome ; il ne poffédait pas la neuvième partie de
l'empire dé Cbarlemagne , & n'avait en ItaÛe qu'une
autorité conteftée par les papes & par les ducs de
Bénévent » qui pofledaient dors un état con&dérable.
Après fa mort , arrivée en 875 , fi la loi fallque avait
été en vigueur dans la maifon de Cbarlemagne , c'é-
tait* à l'ainé de la maifon qu'appartenait l'empire.
Louis de Germanie aine de la maifon de Cbarlema-
gne ^ devait fuccéder à fun neveu mort faas enBms;
mais des troupes & de l'argent 4rent les droits de
Cbarles le cbauve. Il ferma les paiTages des Alpes à
fon frère, & fe hàu d'aller -à Rome avec quelques
troupes. Reginus , les annales de Metz & de Fulde ,
aflTurent qu'il acheta l'empire du pape Jea» VIIL Le
pape non-feulement fe fit payer, mais profitant de
la conjonâure , il donna l'empire en fou verain , &
Cbarles le reçut en vaflal , proteftant qu'il le tenait
du pape , ainfi qu'il avait protellé auparavant en
âfiîtf^
wt ipp liBi m\ ^^^^s^ wr^\\
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ritt
Hta
DE Louis le débonkâire. 397 1 !
France en 8S9) qu'il deviit fubir le jugement des
évéques , laiiTant toujours avilir fa dignité pour en
jouir.
Sous lui l'empire Romain était donc eomporé de la
France & de iltalie. On dit qu'il mourut empoifonné
par ion médecin , un Juif nommé Si.décias ; mais per-
fpnne n'a jamais dit par quelle raifon ce médecin
commit ce crime. Que pouvait-il gagner en empoifon-'
nant fon maître ? Auprès de qui eût-il trouvé une plus
belle fortune^ Aucun auteur ne parle du Tupplice de
ce médecin. Il faut donc douter de Tempoifonnement,
& faire réflexipn feulement que l'Europe chrétienne
était fi ignorante , que les rois étaient obligés de
chercher pour leurs médecins des Juifs & des Arabes.
On voulait toujours faifir cette ombre d'empire Ro-
main ; & Louis le bègue , roi de France , iils de Char-
les le chauve , le difputait aux autres defcendans de
Chcarlemagne i c'était toujours au pape qu'on le de-
mandait. Un duc de Spolette , un marquis de Tof-
cane , inveftis de ces états par Charles le chauve , fe
iàifîrent du pape Jean VIII ^ & pillèrent une partie de
Rome , pour le forcer , difaient-ils , à donner l'empire
au roi de Bavière , Carloman , l'ainé de la race de Char-
lemagne. Non -feulement le pape J^po// F/// était ainfi
perfécuté dans Rome par des Italiens 5 mais il venait
en 877 de payer vingt -cinq mille livres pefant d'ar-
gent aux mahométans , pofTeiTeurs de la Sicile & da
Garillan ; c'était l'argent dont Charles le chauve avait
acheté Pemprre. Il paifa bientôt ,des mains du pape
en celles des Sarrazins ; & le pape même s'obligea
par un traité autentique , à leur en payer autant tous
les ans.
Cependant ce pontife , tributaire des mufulmans &
prifonnier dans Rome , s'échappe , s'embarque , pafle
en France. Il vient facrer empereur Louis le bègue
dans la ville deTroycs , à l'exemple de Léon III , d'v^r
wf^f
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iMM«apBÉÉi
s
39g ]STATDBL'ETJB.OPB,&a
I àrim Se d'EiieH?9e III j^erfécutés chez eux > & don<>
nant ailleurs des.CQuronnes.
Sous Cbarlês le gros , empereur & roî de France , la
d^oladon de rSurûpê redoubla. Plus le fang de C64r.
Umagm s'éloignait de fa fource , & plus il dégénérait'
Charles le gros fut déclaré incapable de régner , par
une afTemblée de feigneurs Français â: Allemands ^
qui le dépofcrent auprès de Mayent:e dans une diète
convoquée par lui-même. Ce ne font point loi dçs évè-
ques , qui en fervant It paffion d'un prince , femblent
difpofer d'une couronne ; ce furent les principaux fei-
gneurs , qui crurent avoir le droit de nommer celai qui
devait les gouverner , & combattre à leur tête. On
dit que le cerveau de Charles le gros était afiFÎEiibli* 11 le
fut toujours fans douce , puifqu'il fe mit au point d'ê-
tre détrôné fans réfiftançe , de perdre à la fois l'Alle-
magne i la France & Tltalie , & de Vavoir enfin pour
fubfiftance que la charité de Tarchevéque de Mayence,
qui daigna le nourrir. Il parait bien qu'alors l'ordre de
la fuccefficm était compté pour rien , puifqu'^^nvoid^ ,
bâtard de Carloma» , £ls de Louis le bègue , fut déclaré
empereur , & qu'Eudes ou Odon , comte de Paris , fut
roi de France. Il n'y avait alors ni droit de nailTance ^
ni droit d'éleétion reconnu. L'Europe était un chaos
dans lequel le plus fort s'élevait fur les ruines du plus
fkible « pour être enfuite précipité par d'autres. Toute
cette hiiloire n*eft que celle de quelques capitaine»
J^rbares qui difputaient avec des évêques la domina-
tion fur des ferf^ imbéciiles. U manquait atix homme»
deux choffss nécelTaires pour fe fouftraire à tant d'hor-
reurs , la raifoa & le courage.
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II
'" Itflji'l'l
B^^tf^l^
D B s N O R M A N fi fi, &6. 3^ S
CHAPITRE VINGT-CINQ.UIÉME.
Des Normands vers U nemviimijiicle,
TOut ëunt divifô , tout était malheureux & fiible.
Cette confî/fion ouvrit un ptlTage t^ix peuples de
k Scandinavie & aux habicanf des bords de la mer BaU
tique. Ces fauvages , trop nombreux , n'ayant à culti^
ver que des terres ingratet , manquans de manufaétu*
res , & privés des arts , ne cherchaient qu'à fe répan^
dre loin de leur pati^ie» Le brigandage & la piraterie
leur étaient li^eflaires) comme U carnage aux bétet
féroces. En Allemagne on les appellait Normandie
tommes du Vor.d , lans diilinétion , comme nous difons
encore 9Ti général les corfaires de Barbarie, Dès le
Suatriénne fiecle ilsfe mêlèrent aux âûts des autres bar^
ares , gui portèrent la défolation jufqu'à Rome à en
Afrique. On a vu que rcfferrés fous Cbarlemagne , ils
Craignirent Tefclavage. Dès le tems de Louis le dibofu
heure ils commencèrent leurs courfes. Les forêts dont
Ces pays étaient hérilTés , leur fourniraient aflez de
bois pour conilruire leurs barques à deux voiles & à
rames. Environ cent hommes tenaient dans ces bâd-
mens , avec leurs provifious de bière y de bifcuit de
mer , de fromage , & de viande ftimée. Ils côtoyaient
Its terres , defcendaient où ils ne trouvaient point de
réfiftance , <& retournaient chez eux avec leur butin ^
qu'ils partageaient enfuite félon les loix du brigan.
dage , ainfi qu'il fe pratique en Barbarie. Dc^ l'an S41
ils entrèrent en France par rtmbouchure de la rivière
de Seine , & mirent la ville de Rouen au pilhge. Une
autre flotte entra par la Loire , & dévafta tout jufqu'en
iTouraine. Ils emmenaient en efclavage les hommes ;
ils partageaient entr'eux les femmes 6^ les filles , pre-
nant jufqu'aux enfàns pour les élever dans leur métier
de pirates. Les befliaux , les meubles , tout était em-
porté. Hâ vendaleût ^quelquefois fur ufie côte ce qu'ils
I'
m^
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s 400 Des Nobmak
— =i^
D S
il
avaient pillé fur une autres Leurs premiers gains exci-
tèrent la cupidité de leurs compatriotes indigens. Les
habitans des côtes germaniques & gauloifes fe joigni-
rent à eux , ainfi que tant de renégats de Provence &
de Sicile ont fervi fur les vaHTeaux d'Alger. .
En 844 ils couvrirent la mer de vaiiTeaux. On let
vit defcendre prefqu'à laibis en Angleterre , en France
& en Ëfpagne. H faut que le gouvernement des^Fran-»
(^ais & des Anglais fût moins bon que celui des mat
homécans , qui régnaient, en Efpagne ', car il n'y eut
nulle mefure prife par les Français ni par les Anglais,
pour empêcher ces irruptions i mais en Efpagne les
Arabes gardèrent leurs qkes, & repoufîçr^ât enfia
les pirates, . ,
, En 84c les Normands pillèrent Hambourg , & péné»
trèrent avant dans TAllemagne. Ce n'était plus alors
un ramas de corfaires fana ordre : c'était une flotte
de fix cent bateaux , qui portait une armée formi-
dable. Un roi de Dannemarck , nommé £r/V, était ï
leur tête. Il gagna deux batailles avant de fe rem-
barquer. Ce roi des pirates ,' après être retourné chez
lui avec les dépouilles allemandes , envoyé çn France
un des chefs des corfaires , à qui les hiftoires donnent
le nom de Régnier. Jl remonte la Seine avec cent
vingt voiles, n n'y a point d'apparçnce que ces cent
vingt voiles portaffent dix mille hommes. Cependant,
avec un nombre probablement inférieur, ilpîlle Rouen
une féconde fois , & vient jufqu'à Paris, Dans de
pareilles invafions , quai\i la faiblefle du gouverne-
ment n'a pourvu à rien , la terreur du peuple aug-
mente le péril , & le plus grand nombrç fuît devant
le plus petit. Les Parificns , qui fe défendirent dans
d'autres tems avec tant de courage , abandonnèrent
alors leur ville ; & les Normands n'y trouvèrent que des
ipaifons de bois , qu'ils brûlèrent; ]Lç. malheureux roi,
Charles le chauve , retranché à St. Denis avec peu de
troupes,, au-lieu de ^'oppofer à ces barbares , acheta
W^i 1 ,11 iM. vm ^^L .hiTJI*
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^^S'»*^
SÈÈ
jHÈti^l
YBRS LE VBUTléME SIÉOLE. 4OI
de quatprze mille marcs d'argent la retraite qu'ils
daignèrent faire. Il e^ croyable que ces marcs étaient
ce qu'on a appelle longtems des marqyes , marcas , qui
valaient environ un de nos demi-écus. On eft indi-
gné quand on lit dans nos auteurs que plufieurs de
ces {barbares furent punis de mort Gubite pour avoir
pillé réglife de St. Germain - des - Prés. Ni les peu?
pies , n^i leurs faints ne fe défendirent ; mais les vaincus
fe donnent toujours la honceufe confolation de fuppo-
fer des miracjies opérés contre lieurs vainquçurs,
Charles le chauve , en achetant ainfî la paiK , ne
faifait que donner à ces pirates de nouveaux moyens
de faire la guerre , & s'ôter celui de la foutenir. Le?
NoriTiands fe fervirent de cet argent pour aller affiégep
Bordeaux , qu'ils pillèrent Four comble d'hutiifliation
& d'horreur, un defcendant de Charlentagne ^ Pépin ^
roi d'Aquitaine , n'ayant pu leur réfifter , s'unit avec
eux ; & alors la France vers Tan BsS fut entièrement
ravagée. Les Normands ^ fortifiés de tout ce qui fe
joignait à eux , défolèrent longtems l'Allemagne , h
Flandre, TAngleterre. Nous avons vu depuis peu des
armées de cent mille hommes pouvoir k peine prendre
deux villes après des victoires fignalées ; tant l'art
de fortifier les places & de préparer de^ reiTources a
jçté perfectionné ; mais alors diss barbares , combattant
d'autres barbares d^unis , ne trouvaient , après le
premier fuccès, prelque rien qui arrêtât leurs cour-
fes. Vaincus quelquefpis , ils reparai ffaient avec de
nojjveljes forces,
»;;
Godefroy , prince de Dantiemarcic , à qui Charlsf k
gros céda enfin une partie de la Hollande en 88^ '1
pénètre de h Hollande en Flandre ; fes Normand?
paffeht de la Somme ^ TOife fans réfiftance , pren-
nent & brûlent Fontoife , & arrivent par eaii & par
terre devant Paris,
^ Efaîfur les mœurs ^ ^c. Tom. I,
ç<?
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WJ?^
^^^m
402
Des Noumands
Les Parifiens , qui s'attendaient alors à l'irruption
des barbares , n'abandonnèrent point la ville , com-
me autrefois. Le comte de Paris, Odon ou Eudes y
que fa valeur éleva depuis fur le trône de France,
mit dans la ville un ordre qui anima les courages,
& qui leur tint lieu de tours & de remparts.
Sigefroy , chef des Normands , prefla le fiége avec
une fureur opiniâtre', mais non deftituée d'art. Les
Normands fe fervirent du bélier pour battre les murs.
Cette invention eft prefque auffi ancienne que celle
des murailles ; car les hommes font aufli induftneux
pour détruire que pour, édifier. Je ne m'écarterai ici
qu'un moment de mon fujet pour obferver que le che-
val de Troye n'était précifémcnt que la même ma-
chine > laquelle on armait d'une tête de cheval de
métal, comme on y mit depuis une tête de bélier,
& c'eft ce que Paufanias nous apprend dans fa def-
crîption de la Grèce. Ils firent brèche , & donnè-
îrent trois affaûts. Les Parifiens les foutinrent avec
un courage Inébranlable. Us avaient à leur tête non-
feulement le comte Eudes , mais encor leur évéque
Goslin , qui chaque jour , après avoir donné la béné-
didîon à fon peuple , fc mettait fur la brèche , le
cafque en tête , un carquois fur le dos , & une hache
à fa ceinture ; & ayant planté la croix fur le rem-
part , combattait à fa vue. Il parait que cet évéque
avait dans la ville autant d'autorité pour le moins
*^que le comte Eudes , puifque ce fut à lui que Sige-
fi^oy s'était d'abord adrefle , pour entrer par fa per-
mifTion dans Paris. Ce prélat mourut de fes fatigues
au milieu du fiége , laiflant une mémoire refpedtable
iS: chère ; car s'il arma des mains qjuie la religion ré-
servait feulement au miniitère de l'autel , il les arma
fbur cet autel même & pour fes citoyens , dans la
«aufç la plus juilq , & pour la défeufe la plus nécef-
faire^ première loi natureUe, qui eft toujours au-deffus
des loix de convention. Ses confrères ne s'étaient
armés que dans des guerres civiles & contre des chré-
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av
fai
I ^^
I "
VERS LE NEUVIÈME SiéCLE. 403 il
tiens. Peut-étse fi Tapothéofe eft doe à quelques hom*
mes , eût -il mieux valu mettre dans le ciel ce prélat
qui combattit & mourut pour fon pays , que tant
d'hommes obfcurs , dont la vertu , s'ils en on( eu ,
à été pour le moins inutile au monde.
Les Normands tinrent la ville alliégée une année
& demie : les parifiens éprouvèrent toutes les horreurs
qu'entraînent dans un long ficge la famine & la copta-
gion qui en font les fuites , & ne furent point ébran*
lés. Au bout de ce tems , l'empereur Charles le gros,
roi de France « parut enfin à leur fecours fur le mont
de Mars , qu'on appelle aujourd'hui Montmartre 1
mais il n'ofa pas attaquer les Normands: il ne vint
que pour acheter ençor une trêve honteufe. Ces bar-
bares quittèrent Paris pour aller afliéger Sens & piller
la Bourgogne , tandis que Charles alla dans Mayence
aflembler ce parlement qui lui ôta un trône dont il
était fi indigne.
Les Normands continuèrent leurs dévaftations ; mais
quoiqu'ennemis du nom chrétien , il ne leur vint ja-
mais en penfée de forcer perfonne à renoncer au chrit
tianifme. Us étaient à -peu -près tels que les Francs,
les Goths , les ATains , les Huns , les Hérules , qui »
en cherchant au cinquième fiécle de nouvelles ter»
res , loin d'impofer une religion aux Romains , s'ac*
commodèrent aifément de la leur ; ainfi les Turcs en
pillant l'empire des califes , fe font fournis à la rcU.
gion mahométanç. ^
Enfin Rohn ou Raoul ^ le plus îlluftre de çeç. tri-
gands du Nord , après, avoir été ch^fle du Dannc-^
marck , ayant ràffcmblé en Scandinavie tous ceqx qui
voulurent s'attacher à fa fortune , tenta de. nouvelles
avanture8,& fonda l'efpérance de fa grandeur fu^la
faibleffe de l'Europe. Il aborda rAnglçte.rre ♦^ ^^^^?
compatriotes étaient déjà établis ; mais après deux
victoires inutiles , il tourAà du côté dé la France, que
Ce ij
, *
I
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404 DesNormands f
d'autres Normands favaient ruiner , ipais qu'ils ne
favaient pas affervir.
Roion fut le feul de ces barbares qui ceffa d'en
mériter le nom , en cherchant un établiffement fixe.
Maître de Rouen fan« peine , au -lieu de la détruire,
il en fit relever les murailles & les tours. Rouen d^
vînt fa place d'armes; de -là il volait tantôt en An-
gleterre , tantàt en Frafnce , faîfant la guerre avec
poMtique , comme avec fureur. La France était expi-
rante ,fous le règne de Charles lejîmpîe , roi de nom ,
& dont la monarchie était encor plus démembrée par
les ducs , par les comtes & par les barons fes fujets,
que par les Normands. Charles le gros n'avait donne
'<)ue de l'or aux barbares : Charles le Jîmfle offrit à
kohn fa fille & des provinces.
î
Raoul demanda d'abord la Normandie ; & on fiit
trop heureux de la lui céder. Il demanda enfuite la 6r&
tagne ; on difputa ; mais il falut la céder encor avec
des claufes que le plus fort explic^ue toujours à fon
avantage. Ainfi la Bretagne , qui était tout-à-rhetire
un royaume , devint un fief de la Neuftrie ; & la
Neuftric , qu'on s^accoutuma bientôt à nommer Nor-
mandie du nom de fes ufurpateûrs , fut un état féparé,
dont les ducs rendaient un vain hommage à la coq-
tonne de France»
L'archevêque de Rouen lut perfuader à Roîon de
*fe faire chrétien. Ce prince embrafla volontiers une
religion qui afFermilTaift (k puiflance.
Les véritables cpnquérans font ceux qui favent faire
des loix. Leur puiflance eft ftable ; les autres font
des torrens qui paflent. Rolon paifible , fut le fcul
légiflateur de fon tems dans le continent chrétien.
On fait avec quelle inflexibilité il rendit la juftice.
Il abolit le vol chez les Danois , qui n'avaient juf-
ques-là vécu que dé rapine. Longtems après lui , fon
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fe VERS LE NEUVIEME SIÉ CL E. 40Ç
nom prononcé , était un ordre aux officiers de juftice
d'accourir pour réprimer la violence ; & de - là eft
venu cet ufage de la clameur de Haro , fi connue
en Normandie. Le fang des Danois & des Francs
mêlés enfemble , produifit enfuite dans œ pays ces
héros qu'on verra conquérir TAngleterre , Naples
& Sicile.
CHAPITRE VINGT-SIXIÉME.
De f Angleterre vers le neuvième Jtécie, A L F RC D
ie grand,
LEs Anglais , ce peuple devenu puiffant , célèbre
par le commerce & par la guerre , gouverné par
l'amour de fes propres loix , & d« la vraie liberté qui
confifte à n'obéir qu'aux loix , n'étaient rien alors de
ce qu'ils font aujourd'hui.
,ïls n^étaicnt échappés du joug des Romains que
pour tomber fous celui de ces Saxons , qui , ayant
conquis l'Angleterre vers le fixiéme fiécle , furent
conquis au huitième ptit Cbarlemagne dans leur pro-
pre pays natal. Ces ufurpatcurs partagèrent TAngle-
terrc en fept petits cantons malheureux , qu'on ap-
pella royaumes. Ces fept provinces s'étaient enfin
réunies fous le roi Egbert de la race Saxonne , lorf-
•que les Normands vinrent ravager l'Angleterre , auffi-
bien que la France. On prétend qu'en 8Sî^ î^s 'emoni.
tètent la Tamife avec trois cent voiles. Les Anglais
ne fe défendirent guères mieux qu« les Francs. Ils
payèrent, comme' eux , leurfe vainqueurs. Un roi , nom-
mé Etbeibert ^{umt le malheureux exemple de Cbar-
les le chauve. Il donna de l'argent ; la même faute eut
la même punition. Les pirates fe fervirént de cet ar-
gentpour mieux fubjugner le pays. Ils conquircatia
Ce iij ^
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4o6 De l'Am&leterKb $
'■■ '■'■'■■I I III ■ I I I ■— il— ^— ifcr
moitié de l'Angleterre. U falait que les Anglais, nés
courageux , & défendus par leur fituatiort , cuffent
dans leur gouvernement des vices bien eflentiels ,
puifqu'ils furent toujours a(tujettis par des peuples
qui ne dejraient pas aborder impunément chez eux.
Ce qu'on raconte des horribles dévaflations qui défo-
lèrênt cette ifle , furpaffe encore ce qu'on vient de
voir en France. Il y a des tems où la terre entière
n'eft qu'un théâtre de carnage , & ces tems font trop
fréquenSi
Le ledteuf refpire enfin un^ peu , lorfque dans ces
horreurs il voit s'élever quelque grand -homme qui
tire fa patrie de la fervitude, & qui la gouverne en
bon roi» ,
Je ne fais s'il y a jaihais eu fur la terre un homme
plus *digne des refpeds de la poftérité qu'Alfred le
grand , qui rendit ces fervices à fa patrie , fappofé
que toilt ce qu'on raconte de lui foit véritable*
Il fuccédait à fon {rhre Etbélred I qui ne luîlaifla
qu'un droit contefté fur l'Angleterre , partagée plus
que jamais en fouverainetés , dont plufieurs étaient
pofledéés par les Danois. De nouveaux pirates ve-
naient encor , prefque chaque année ^ difputer aux pre-
miers ufurpateurs le peu de dépouilles qui pouvaient
reften
Alfred y n*ayant poUr loi qu'une province de roHefti
fut vaincu d'abord en bataille rangée par ces barba-
res , & abandonné de tout le monde. Il ne fe r&
tira point à Rome dans le collège anglais , comme
Btitred fon oncle , devenu roi d'une p^stite province,
& chafle par les Danois ; mais feul & fans fecours,
il voulut périr oU venger fa patrie. Il fe cacha fix
mois chcî un berger dans une chaumière environnée
de marais. Le feul comte de Div(m , qui défendait
™ eiicor.un feiblc château, favait fon fecrct. Enfin, ce ^
& «
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VERS LE NEUVIÈME SlÉCLE. 407 |f
coftite ayant raflemblé des troupes , & gagné quelque
avantage , -^//rf4 , couvert des haillons d*un berger,
ofa fe rendre dans le camp des Danois , en jouant
de la harpe: voyant ainfi par fes yeux la fituation
du camp & fes défauts , inftruit d'une fête que les
barbares devaient célébrer , il court au comte de
Dévon qui avait des milices prêtes ; il revient aux
Danois^ avec une petite troupe , mais déterminée : il
les furprend , & remporte une vicftoire complette. La
difcorde divifait alors les Danois. Alfred fut négo-*
cier comme combattre ; & , ce qui eft étrange > les
Anglais & les Danois le reconnurent unanimement
pour roi. Il n'y avait plus à réduire que Londres;
il la prit , la fortifia , Tembellit , équipa des flottes ,
contint les Danois d'Angleterre, s'oppofa aux defcentes
des autres , & s'appliqua enfuite , pendant douze an.
nées d'une poffeffion paifible , à policer fa patrie. Ses
loix furent douces , mais févérement exécutées, C'eft
lui qui fonda les jurés , qui partagea l'Angleterre en
shires ou comtés , & qui le premier encouragea fes
fujets à commercer. Il prêta des vaifleaux & de l'ar-
gent à des hommes entreprenans & fages , qui allèrent
jufqu'à Alexandrie ; & de là , paflant l'ifthme de Suez ,
trafiquèrent dans la mer de Perfe. Il inftitua des
milices ; il établit divers confeils , mit partout la rè*
gle & la paix qui en eft la fuite.
Qui croirait même que cet Alfred ^ dans des terne
d'une ignorance générale , ofa envoyer un vaiffeau
pour tenter de trouver un pafTage aux Indes parle
nord de l'Europe & de l'Afie ? On a la relation de
ce voyage écrite en anglo-faxon & traduite en latin
à Coppenhague , à la prière du comte de Plelo^ am*.
bafladeur de Louis XV, Alfred eft le premier au-
teur de ces tentatives hardies que les Anglais , les
Hollandais & les Ruffes ont faites dans nos derniers
tems. On voit par-là combien ce prince était aw*
delfus de fon fiécie.
& *^^ '"^ _
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lliS^ii*"' -T 'r I liai' >
*«i^
408 Dé l'A II 6l e t b rr E,&é.
■' I ■■ I ■ ■ I II 1
Il n'eft point de véritablement grand-homtac , qui
n'ait on bon cfprit. Alfred jetta les fondement de
Tacadémle d'Oxford. 11 fit venir des livres de Rome.
L'Angleterre toute barbare' , n'en avait prefque point.
Il fë plaignait qu'il n'y eût pas àlor* un prêtre An-
glais qui fût le latin. Pour lui , il le favait. Il était
rtiéme aflei bon géomètre pour ce tcms4à. U poffé-
dait Thiftoire. On dit même qu'il faifatt des vers en
àngloi^faxoii; Lés niomens qu'il ne donnait pas aax
foins dé l'état \ il les donnait à l'étude; \iiit fagé
ÔBConomîé le mit en état d'être libéral. On voit qu'il
rebâtit plufîeurs églifes , mais aùciin monaftére. 11
penfait fans doute qub dans un état défolé qu'il fà-
hit repcuf)ler , il t^t mal fervi fa i^atrie , en favori-
fant trop ces familles immenfes fans père & fans en^
fans , qui fe perpétuent aux dépens de la natioft :
au(n iie fut*il pas au nombre des faints ; itlais l'hif-
toire , qui d'ailleurs ne liti re])roche ni défaut ni fai-
bleflfe.le met au premier rang des héros titiles au
l^enre-numain , qui fans ces hommes extraordinaires,
eût toujours été femblable aux bétes farouches;
CHAPITRE VINGT-SEPTIÉME.
Ve FEJ^agne ^ det ffiuftitmans Mauret , oM btdtiimé
6? neuvième Jtitlesi
Vous avez Vu des états bien malheureux & bien
mal gouvernés ; mais l'Efpagne , dont il faut tra-
cbr le tableau , fut plongée Ipngtems dans un état
plus déplorable» ' Les barbares dont l'Europe fut inon-
dée nrï commencement do cinquième fiécle ^ raVagè^
rent l'Efpagne comité les autres pays ; poui^qdoi l'Ef»
pagne qui s'était fi bien défendue contre les Romains,
«éda-t-elle tout-d'un-cpup aux barbares i C'eft qu'elle
était corapolée de patriotes iorfque les Romains l'at-
taquèrent (mais fous le joug des Romains ^ elle né
f
Mét^
^mta
*«W
-9r^3l
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•
De l'Espa6Nb et des musulmans * &a 409 If
fut plus compoféé quç d'efclaves , maltraités par des
maîtres amollis ; elle fut dono tout*d'un-coup la proie
^es Suéves , des Alains , des Vandales ) aux Vandales
fuccédèrent les Vifigoths , qui commencèrent à s'é-
tablir dans l'Aquitaine , & dans la Catalogne ; tandis
que les Oftrogoths décruifaient le (iége de l'empire
Romain en Italie. Ces Oftrogotbs & cfes Viiigoths
étaient , comme on fait , chrétiens ; non pas de la
communion romaine , non pas de la communion des
empereurs d'Orient qui régnaient alors , mais de celle
q[ui avait été longtems reque de Péglife grcfcque « &
qui croyait au Christ fans le croire égal. à Dieu.
Les Efpagnols , au contraire , étaient attachés au rite ro<«
main ; ainfi les vainqueurs étaient d'une religion , & les
vaincus d'une autre , ce qui appefantiflait encor l'efclii-
vage. Les diocèfes étaient partagés en évéques ariens ,
6i:en évéques athanafiens, cqmme en Italie; partage,
qui augmentait encor les malheurs publics. /Les rois
Vifigoths voulurent faire en Efpagne , ce que fit,
Comme nous l'avons vu , le roi Lombard Lotbaris en
Italie , & ce qu'avait fait ConftoHtin à fon avènement
à l'empire ; c'était de réunir par la liberté de conf-
cience les peuples divifés par les dogmes.
(
Le foi Vifîçoth Lêuvigilde prétendît réunir cent
qui croyaient à la confubftantiabilité , & ceux qui n'y
croyaient pas. Son fils Herminigilde fe révolta con-
tre lui ; il y avait encor alors un roitelet Suève , qui
pofTédait la Galice , & quelques places aux environs*
Le fils rebelle fe ligua avec ce Suève , & fit long-
tems la guerre à fon père ; enfin , n'ayant jamais voulu
fe foumettre , il fut vaincu , pris dans Cordoue , &
tué par un ofiicier du roi. L'églife romaine en a
fait un faint , ne confidérant en lui que la religion
fômaîne , qui fut le prétexte de (a révolte.
Cette mémorable avantufe arriva en ^84 » & jene
la rapporte que comme un des exemples de l'état
funcfte où l'Efpagne était réduite*
t'gtfj iii'i 1^1 <6> \u Jt&^
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410 Dk (.'Espagne kt des musulmans
« !
Ce royaume des Vifigoths n'était point hérédi*
taire ; tes évéques qui eurent d'abord en Efpagne U
même autorite qu'ils acquirent en France du tems des
Carlovingiens , faifaient & défaifaient les rois , avec
les principaux feig'neurs. Ce fut une nouvelle fource
de troubles continuels ; par exemple , ih élurent le
bâtard Liuva^zu mépris de fes frères légitimes ;&
ce Liuva ayant été aiTafliné par un capitaine Goth
nommé Vitteric , ils élurent ce Vitteric fans difficulté.
Un de leurs meilleurs rois nommé Vamba , dont
fM>us avons déjà parlé , étant tombé malade , fut revéta
d^un fac de pénitent , &. fe fournit à la pénitence
publique , qui devait , dit- on , le guérir ; il guérit en
effet ; mais en qualité de pénitent , on lui déclara
qu'il n'était pas capable des fondions delà royauté,
èi il fut mis fept jours dans un monaftère. Cet exem*
pie fut cité en France , à la dépofition de Lom It
ftdbie.
Ce n^ctait pas ainfi que fe laiffaient traiter tes pre-
miers conquérans Goths , qui fubjuguèrent les Ef[»-
gnes ; ils fondèrent un empire qui s'étendit de la
Provence & du Languedoc à Ceuta & à Tanger en
Afrique ; mais cet empire fi mal gouverné , périt bien-
tôt. Il y eut tant de rebellions en Efpagne , qu'en-
fin le roi Vitiza, défarma une partie des fujets , & fit
abattre tes murailles de plufieurs villes. Par cette con-
duite , il forçait à l'obéiiTanée , mais il fe privait lui-
même de fecaurs & de retraites. Pour mettre le cler-
gé dans fon parti , il rendit dans une affemblée de
h nation un edit , par lequel il était permis aux évé-
çucs & aux prêtres de fe marier.
Rodrigue^ dont il avait aiTaffinc le père , l'aflaflina à
fon tour, & fut encor plus méchant que lui. Il ne faut
pas chercher ailleurs la caufe de la fupériorité des
mqfulmans en Efpagne. Je ne fais s'il eft bien vrai que
Rodrigue eût violé Florinde ,^ nommée la Cava ou la &
ygtfi • Il mjb !■■ ■" il ii'i ' nH»^*
1
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m.
:^lM"
AUX HUITIÈME ET T^EUVIÉME SiéCLES. 4II Û
Méchante^ fille malheureufemenc célèbre du comtf
Julien : & û ce fut pour venger fon honneur que ce
comte appella les Maures. Peut-être Tavanture de la
Cava eft copiée en partie fur celle de Lucrèce ^ & ni
Tune ni l'autre ne parait appuyée fur des monumens
bien autentiques. Il paraît que pour appeller les Afri-
cains , on n'avait pas befoin du prétexte d'un viol ,
qui eft d'ordinaire aufTi difficile à prouver qu'à faire.
Déjà fous le roi Vamba , le comte Hervig^ depuis roi ,
avait fait venir une armée de Maures. Opas , arche-
vêque de Seville , qui fut le principal inftrument de la
grande révolution , avait des intérêts plus chers à
fou tenir que la pudeur d'une fille. Cet évéque , fils de
l'ufurpateur Vitzza détrôné & afiafliné par l'ufurpateur
Rodrigue , fut celui dont l'ambition fit venir les Mau-
res pour la féconde fois. Le comte Julien , gendre de
Vitiza , trouvait dans cette feule alliance allez de rai-
fons pour fe foulever contre le tyran» Un autre évêque
nommé Torizo , entre dans la confpiration à^Opas &
du comte. Y a-t-il apparence que deux évéques fe
fuifent ligués ainfi avec les ennemis du nom chrétien ,
s'il ne s'était agi que d'une fille ?
Les mahométans étaient maîtres , comme ils le font
encore , de toute cette partie de l'Afrique qui avait
appartenu aux Romains. Us venaient d'y jetter les
premiers fondemens de la ville de Maroc , près .dif
mont Atlas. Le calife Valid Aintanzor , maître dç
cette belle partie de la terre , réfidaît à Damas en Syrie.
Son vice^roi Muzza^ qui gouvernait l'Afrique , fit
par un die fes lieutenans la conquête de toute l'Ef-:
pagne. Il y envoya d'abord fon général Tarifa qui
gagna en 714 cette célèbre bataille xians les plaines
de Xérès , où Rodrigue perdit la vie. On prétend que
les Sarrazins ne tinrent pas leurs promeffes à Julien ,
dont ils fe défiaient fans doute. L'archevêque Ô^^ix fut
plus fatisfait d'eux. Il prêta ferment de fidélité aux
mahométans , & conferva fous eux beaucoup d'auto-
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m^^N'^ I "> imi "^ ï ifir'JJI
m 4ï* De l'Espagne Et des musulmans
rite for les églifes chrétiennes , que les vaînqneun
toléraient.
Pour le roi Rodrigue , it fut fi ped regretté , que fa
veuve Egiione époufa publiquement le jeune Abdalh^
fih du conquérant Muzza , dont les armes avaient
fait périr fon mari , & réduit en fervitude fon pays & (a
religion.
Lès vaînoucUrs n'abufèrent point du fuôcès de leurs
armes ; ils laiiTérent aux vaincus leurs biens , leurs
loi^, leur culte, fatisfaits d'un tribut & de Thonneur de
Commander. Non-feulement la veuve du roi Rodripu
époufa le jeune Abdalis , mais à fon exemple le fanj
des Maures & des Efpagnols fe mêla fou vent. Les Ei-
pagnols fi fcrupuleufement attachés depuis à leur reli^
gion , la quittèrent en affcz grand nombre , pour qtfon
kut donnât alors le nom de Mo/arabes , qui fignifiait,
dit -^ on , moitié Arabes , au -lieu de Celui de Vifigoès
que portait auparavant leur royaume. Ce nom de Hio-
farabes n'était point outrageant » puifque les Arabes
étaient les plus démens de tous les conquéransdela
terre , & qu'ils apportèrent en Efpagne de nouvelles
fciences & de nouveaux arts.
L'Êfpagrtè avait été foumîfe en quatorze mois à
|*empire des califes , à la réferve des cavernes & des
rochers de TAdurie. Le GotK, Pilage Teudomer, parent
du dernier toi Rodrigue , caché dans ces retraites , y
Çonfèrva fa liberté. Je ne fais comment on a pu donner
ie nom de roi à ce prince , qui en était peut-être digne,
inalà dont toute la royauté fe borna à n*étre point
captif. Les hiftoriens Efpagnols , & ceux qui les ont
fuîvîs , lui font remporter de grandes vidoires , ima-
ginent des miracles en fa faveur, lui établirent une
Cour,lui donnent fon 6\sFaDiIia& fon gendre jl/pbdnfi
pour fuccefTeurs tranquilles dans ce prétendu royaonic.
Mais comnrent dans ce tems-là même les mahométans ,
qui fous Abdirame , vers Tan 7)4 fubjiiguèrent la moi-
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AUX HUITIÈME ET NEUYliMB SIECLES. 413
tié de la France , auraient-fls laHTé fubfifter derrière
les Pyrénées ce royaume des Afturîes ? C'était beau-
coup pour les chrétiens de pouvoir fe réfugier dans ces
montagnes & d'y vivre de leurs courfes , en payant
tribut aux mahométans. Ce ne fut que vers Tan 759 ,
que les chrétiens commencèrent à tenir tête à leurs
vainqueurs , affaiblis par les viétoires de Charles Mat*
^f/& par leurs divifions ; mais eux-mêmes , plus divifés
entr'eux que les mahométans , retombèrent bientôt
fous le joug. Mauregat , à qui il a plû aux hiftoriens de
donner le titre de roi y eut la permiffion de gouverner
les Afturies & quelques terres voifines , en rendant hom-
mage & en payant tribut. I) fe fournit furcout à fournir
cent belles filles tous les ans pour le ferrail d'Abdirame.
Ce fut longtems la coutume des Arabes , d'exiger de
pareils tributs , & aujourd'hui les caravanes , dans les
préfens qu'ils JFont aux Arabes du défert, offrent tou-
jours des filles nubiles.
On donne pour fucceffcur à ce Mauregat un diacre
nommé Vérimon^ chef de ces montagnards réfugiés,
fàifant le même hommage & payant le même nombre
de filles qu'il était obligé de fournir fouvcnt. Eft -»ce là
un royaume , & font-ce là des rois ?
Après la mort de cet Abdèrame , les émirs des pro..
vinces d'Efpagne voulurent être indépendans. On à
vu dans l'drticle de Cbarlemagne ^ qu'un d'eux , nommé
Ibna V eut l'imprudence d*appeller ce conquérant à fon
fbcours. S'il y avait eu alors un véritable royaume chrê<«
tien en Efpagne , Charles n'eût -il pas protégé ce
royaume par fes armes , plutôt que de fe joindre à
des mahométans ? Il prit cet émir fous fa proteâioa ,
& fe fit rendre hommage des terres qui font entre TE*
bre & les Pyrénées, que les mufulmans gardèrent. On
voit en 794 le Maure Abutar rendre hommage à Louis
le débonnaire , qui gouvernait l'Aquitaine fous fon père %
avec le titre de roi. S
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€m Ml
9^ 414 De l'Espagne et des musulmans
6
Quelques tems après , les divîfions augmentèrent
chez les Maures d'Efpagne. Leconfeilde Louis le de-
bonnaire en profita ; fes troupes afliégèrent deux ans
Barcelone , & Louis y entra en triomphe en 796. Voilà
le commencement de la décadence des Maures. Ces
vainqueurs n'étaient plus foutenus par les Africains &
par les califes dont ils avait fecoué le joug. Les fuccef-
feurs à'Abdérame , ayant établi le fiége de leur royaume
à Cordoue , éuient mal obéis des gouverneurs des au-
tres provinces.
Aipbùnfe , de la race de Pilage , commença , dans ces
Gonjondtures heureufes r à rendre confidérables les
chrétiens Efpagnols retirés dans les Afturies. Il refufa
le tribut ordinaire à des maîtres contre lefquels il poU^
vait combattre ; de après quelques vidoires , il fe vit
maitre paifible des Afturies & de Léon au commeO'
cément du neuvième fiécie. ' ^ .
C'cft par lui qu'il faut commencer de retrouver en
Êfpagne des rois chrétiens. Cet Alpbonfe était artifi-
cieux & cruel. On l'appelle h cbajie , parce qu'il fut le
premier qui refufa les cent filles aux Maures. On ne
longe pas qu'il ne foutînt point la guerre pour avoir
refufé ce tribut , tnais que voulant fe fouftraire à
la domination des Maures , & ne plus être tribu-
taire , il Mait bieii qu'il reful^t led èent filles ainfi que
le refte.
Les fuccès A*Aïpbonfe , malgré beaucoup de tra-
verfes , enhardirent les chrétiens de Navarre à fe don-
lier un roi. Les Arragonois levèrent Tétendart fous un
comte : ainfi fur la fin de Loms le débonnaire , ni les
Maures , ni les Frant;aîs n'eurent plus rien dans ces
contrées ftériles ; mais le reftc de l'Efpagne obéïffait
ï
gleterre.
m^iêfm^
m/m
^'fffim
II
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AUX HUITléke ET NEUVIEME SIÈCLES. 4If
On ne doit point être furpris que les Efpagnols des
Afturies , de Léon , d'Arragon , ayent été alors des
barbares. La guerre qui avait fuccédé à la fervi-
tude, ne les avait pas polis. Us étaient dans une fi
profonde ignorance , qu'un Alpht^nfe , roi de Léon &
Ats Afturies , farnommé le grand , fut obligé de livrer
l'éducation de fon fils à des précepteurs mahométans.
Je ne ccfle d'être étonné , qaand je vois quels titres
•les hiftoriens prodiguent aux rois. Cet Ahbonje qu'ils
appellent Jt grand , fit crever les yeux a fcs quatre
frères ; fa vie n'eft qu'un tiffu de cruautés & de per-
fidies. Ce roi finit par faire révolter contre lui fes fujets ,
& fut obligé de céder fon petit royaume à fon fils Don
Garde VdXi ^10.
Ce titre de Bon était un ïibrégé de Dominus , titre
qui parut trop ambitieux à rempereury^«^«//f , parce
qu'il fi^nifiait Maître , & que depuis on donna aux
bénédidtins , & aux feigneurs Efpagnols , & enfin aux
rois de ce pays. Les feigneurs de fief commencèrent
alors à prendre le titre de ricb - borner , ricor bom-
bref i riche fignifiait poflefTeur de terres ; cir dans
ces tems-là il n'y avait point parmi les chrétiens
d'Efpagne d'autres richeflcs. La grandeffe n'était point
encor connue. Le titre de grand ne fut en ufage que
trois ftéclcs après , fous Aîpbonfe lefage , dixième du
nom , roi de Caftille dans le tems que l'Efpagnc com-
mençait à devenir floriffante.
^
CHAPITRE VINGT-HUITIÈME.
Puijfance des mufulmans en Afie êf en Europe aun
buitiime ^ neuvième Jîicles, V Italie attaquitfar
eux. Conduite magnanime du pape LÉON IV.
LEs mahométans qui perdaient cette partie de TEf-
pagne qui confine à la France , s'étendaient par-
tout ailleurs. Si j'envifage leur religion , je la vois
it^ga^'i'i ' .hKUfciiM» ^¥^i)^^
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' ^ 4itf L E P A p B L i o N IV f
«mbraflee dans Tlnde Se fur les côtes orientales de
l'Afrique , où ils trafiquaient. Si je regarde leurs coo-
quêtes , d'abord le calife Aaron al Racbild , ou k
fage y impofe un tribut de foixante & dix mille écus
d'or par an à Timpcratrice Irine, L'empereur Nici-
fbore ayant enfuite refufé de payer le tribut, Acarm
prend l'ifle de Chypic , & vient ravager la Grèce,
Almamon fon petit -fils , prince d'ailleurs fi recom-
mandable par fon amour pour les fciences & par fon
favoir , s'empare par fes iieutenans de l'ifle de Crète
en %t6. Les mufulmans bâtirent Candie » qu'ils oot
reprife de nos jours,
£n 828 les mêmes Africain» qui avaient fubjugué
l'Efpagne & fait des incorfions en Sicile , reviennent
encore défoltr cette ifle fertile , encouragés par un
Sicilien nommé Euphemius , qui ayant , à l'exemple
de fon empereur Michel^ époufé une reUgieufe, poor-
fuîvi par les loix que l'empereur s'était rendues favo-
rables , fit à -peu -près en Sicile ce que le çom^e Juâm
avait &it en ECpagne.
Ni les empereurs Grecs , ni ceux d'Occident , ne
fmrent alors chaffer de Sicile les mufulmans : tant
'Orient & l'Occident étaient mal gouvernés. Ces con-
quérans allaient fe rendre maîtres de l'Italie , s'ils
avaient été unis ; mais leurs fautes fauvèrent Rome,
comme celles des Carthaginois la fauvèrent autrefois.
Us partent de Sicile en 846 avec une flotte nombreu-
£e. Us entrent par l'embouchure du Tibre : &'ne trou-
vant qu'un pays prefque défert , ils vont affiéger Ro-
me, Us prirent les dehors , & ayant pillé la riche
ëglife de St. Pierre hors des murs , ils levèrent I?
ficge pour aller combattre une armée de Français qui
venait fecourir Rome fous un général de l'empereur
Lotbaire. L'armée franqaife fut battue , mais la ville
rafraîchie fut manquée ; & cette expédition , qui d^
Jl vait être une conquête , ne devint , par leur méfia-
3 , telligênce , qu'une incurûon de barbares. Jls revinrent
1^ bientôt ^
iJfglIW II é^^m3Êk%^i ilfftP
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Éifti
SAUVE K.OMS.
417 »
ly
bientôt après avec une armée formidable, qui -fem^'
blaic devoir détruire Tltalie & faire une bourgade ma^
hométane de la capitale du chriftianifme. Le pape
LéoH^F prenant dèns ce danger une autorité que les
généraux de l'empereur Lotbaire femblaient abandom
ner , fe montra digne , en défendant Rome , d'y com,
mander en fouverain. Il avait employé les richefleç
de réglife à réparer les murailles , à élever des tours ,
à t^ndr^ des chaînes fbr le Tibre. Il arma les mili*
ces à fes dépens , engagea les habitans de Naples &
de Gayette à venir défendre les côtes & le port d'Of-»
rie , fans manquer à la fage précaution dé prendre
d'eux des otages , fâchant bien que ceux qui fbnfc
aflez puiiTans pour nous fecourir , le font affez pour ^
nous nuire. Il viOta lui-même tous les poftes , &
requt les Sarrazins à leur defcente , non pas en équi*.
page de guerrier , ainfi qu'en avait ufé Gostiu évêque
de Paris dans une occafion encore plus prenante ,
mais comme un pontife qui exhortait un peuple chr&
tien , & comme un roi qui veillait à la fureté de fes
fujets. Il était né Romain, te courage des prçmia^
âges de la république revivait en lui dans un tems
de lâcheté & de corruption , tel qu'un des beaux mor
numens de l'ancienne Rome au'on trouve quelqueffois
dans les ruinies de la nouvelle. Son courage & fes
foins furent fécondés. On recjut les Sarrâzins coura*
geufement à leur defcente ; & la tempéfe ayant difllpé
la moitié de leurs vaifleaux , une partie de ces con«
quérans , échappés au naufrage ^ fut mife à la chaîne.
Le pape rendit fa viétoire utile, en faifant travailler
aux fortifîçatipns de Rome & à (es çpibellifTemens 1^
mêmes mains qui devaient les détruira. Les mahov
métans reftèrent cependant maîtres du Garillan entre
Capoue & Gayette , mais plutôt comme une colonie
de corfairçs indépsndans> que comme des conquér^n^
difciplinést
Je vois- donc au neuvième fiécle les mufvlman$
redoutables à la fois â Romç & à Conf^a^ntinpj^le 9
EJfaifur tes mœurs, &ù.Tom.t Dd ^
ÏÏ^m
9
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4it Le papb LioN IV sauvb Rome.
mûtxtê de la Pcrfc , de h Syrie , de TArabie , de
toutes les côtes d'Afrique jufqu'au mont Atlas , des
trois quarts de PEfpagne. Mais ces conquérans ne for.
ment pas uoe nation , comme les Romains , qui éten-
dus prefiiu'aiitant qu'eux , n'avaient fait qu'un feul
peuple.
Sous le fameux calife Almamon , vers Tan giç ,
un peu après la mort de Cbarlemagne, l'Egypte était
indépendante, & le Grand -Caire fut la réfidençc d'un
autre calife. Le prince de la Mauritanie Tangîtanc,
fous le titre de Mirantolm , était maître abfolu de
l'empire de Maroc. La Nubie & la Lybie obéiffaient t
un autre calife. Les Abdirames , qui avaient fonde
le royaume de Cordoue, ne purent empéchct d au-
tres mahométans de fonder celui de Tolède. Toutes
ces nouvelles dynafties révéraient dans le calife le
fucceflfcur de leur prophète. Ainfi que les chrétiens
allaient en foule en pèlerinage à Rome , les «nahome-
tans de toutes les parties du monde allaient à la Me^
que , gouvernée par un shérif que nommait le calife ; &
c'était principalement par ce pélérlriage que le ca-
lifc, maître de la Mecque , était vénérable à tous les
princes de fa croyance. Mais ces princes , diftingant
la religion de leurs intérêts , dépouillaient le califB en
lui rendant hommage*
Nom
itantii
rcux
'racfn
Wttêffm
CHAPITRE VINGT-NEUVIÉME.
De r empire de Conjlantineple ^ aux huitième S? tff^
viime jiicles.
TAndis que Teropire de Cbarîemagne fe démem-
brait , que les inondations des Sarrazîns & d«
Normands défolaient l'Occident , l'empire de Conl-
tantinople fubfiftait comme un, grand arbre , vjgoo-
rcux encore , mais déjà vieux , dépouillé de quelques
'racines , & affailB de tous côtés par la tempête. Ut _
BOBai
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l(S<>tfij
«MOli
-*«»«r
»
De i;'BZ«ri«.s 6R^C)&e^ 419
çmpire n'avait, plus mn^n A^riqve; ta Syriç & ihi^)
partie de PAfie mineure liit étsiient enlevée». It défi^iH
daic contre les mufuImantTes Pondères veri i'orienf
dé la mer Noire ] & tantôt vaincu , tantôt vain<)ueyr ,
it aurait pu ap iiKsint. fe fortifier centraux par cet
ufage continuel de la guerre. TUm du côté du Danqbedl^
ve,rs le bord oc<?identat de la mer Noire , d'autres cnn&r
mis la ravageaient. Une nation de Sicfthes , nommée
les Ab^res ou Avares „ les 9ii%arçs , aqtr^ Scy?
thés , dont la Btilgarie tîenf fbn nom « dcTolaient tou9i
ces beaux climats de la Romani^ , oè Adrien & Trth
jetn avalent conftruit de F beHes villes , & ces grands;
ciiemins dçTqueJs U nç ft4>fifte'f Igs ^||e ^uçlquç»
chauffées,
Les Abaras furtout , r^pitndtrs dans la Hongrie ^
dans l'Autriche , fe jett^afent tantôt fur l'empiré d'Of
rient , tantôt fur celui de Cbarlemagnfif AinQ des fron«
tiéres de la P^feà celles d^h France, la terre éta}^
en proie k dçs inçyrfionf greft^uç continuelles^
Si \t% frontières de Petfj^ire GrcQ étaient toôjouft
refferrées & toàJQyrs défolées,, la capitale était le
théâtre des révolutions & dc« crime^. Un mélange
dç Taitifice des Grecs & de I4 férocité des Thraces ,
formait le cara^rç qut régnait à la copr* En effet »
3uel fpeAacle nous préfentç Çonllantînoplef Maurice
t fçs cinq enfant maflaçrés : Pbocar aflaffiné pour
prix. de fes meurtres & de fes înccftes : Confiantin
empolfonné par r impératrice JUwrtine , à qui on arra,
che la langue , tmàis qu'on coupe le nez à Minif
ciéonaf fhn fits: Confions qui fait égorger fon frère;
Cqnfians affommé dans un bain par fes domeftiques :
Conjiantin Pogonate qui ftit crever les yeux à fe§ deux
frères : Juftinien II fpn fils prêt à fairp è Çonftanti»
nople ce que Tbiodpfe fit à T^^^^loniquc , furpris ,
mutilé & enchaîné par Léonce ^^\^ moment q^ill allait
fejre égorger les prin^cipaux citoyens : Lionçe bîeritôt
traité bi^m^me comme il avait traite Jujimm Hi
Od ij 1
11
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^ 4?aO D B l' E M P I R E G R E C *
oe Juflinien rétabli , faifant couler fous fes yeux dans
la place publique le fang de fes ennemis , éc périSant
onfin fous la main d'un bourreau : Philippe Bardanès
détrôné & condamné à perdre les yeux : Léon Plfm-
rien & ConJiaiUiif Coproninte morts à la vérité dans
leur lit , mais après un règne fanguinâire^aulfi mal-
heureux pour le prince que pour les fujets : l'im-
pératrice Irène ^\h première femme qui moQta furie
trône des Céfars , & la* première qui fit périr fon fils
pour régner : Nicépbore fon fuccefleur , détefté de fes
fujets , pris par les Bulgares , décollé , fervant de4)â-
ture aux bétes , tandis que^ibn crâne fert de coupe
4 fon vainqueur : enfin Michel Curopalate , contem-
porain de Cbarlemàgne , confiné dans un cloître , &
mourant ainfi moins cruellement , mais plus honteu-
fement que fes pcédéçeifeurs. C'eft ainfi que Teropire
eft gouverné pendant trois cei^t ans. Quelle bidoire
de brigands obfcurs punis en place publique pour leurs,,
crimes, eft plus horrible & plus dégoûtante?
Cependant il faut pourfuivre : il faut voir au neu-
yiéme fiecle Léon f Arménien^ brave guerrier , mais
ennemi des images , aflaffiné à la meffe dans le cems
qu*il chantait une antienne : fes aflauins s'applaudif-
fant d'avoir tué un hérétique , vont tirer de prifon
un officier , nommé Michel le bi^ue ^ condamné à la
mort par le fénat, & qui au -lieu d'être exécuté, reçut
la pourpre impériale. Ce fut lui qui^ étant amoureux
d'une religieufe » fe fit prier par le fénat de Tépoufer ,
iàns qu'aucun évéque ofât être d'un fentiment con-
traire. Ce fàît«eft d'étant plus digne d'attention , que
prefqu'en mé.i^e t^ms on voit Eupbemins en Sicile,
pourfuivi crimînelkmçnt pour un femblable mariage;
& quelque tçiRS après, on condamne à Ûonftantinople
le mariage très légitime de l'empereur Léott le philo-
fppbe. Où eft. donc le pays où l'on trouve alors des
loix & des moçurs? Ce n'eft pas dans notre Occident
. Cette ancienne querelle des images troublait toû*
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imfu Ml I ^•=^mittemi!i
AUX HUITIÈME ET NEUYléMEf.Slici^ES. 4::^
jours Tempire. La cour était tantôt fitférabie, tantôt
contraire i leur culte , fdon qu'elle jvoyait •pencher
refprit du plus grand nombre. Michel le bègue com-
mença par les confacrer, & finit par les abattre.
Son fucceflfeur Théophile ^ qui régna environ douze
ans , depuis 629 jufqu'à '842 « feldé^lufa contre ce
culte : on a écrit qu'il ne croyait piôlnt la réfurrec-
tion , qu'il niait l'exiftence des démons , &x)u'il n'ad-
mettait pas Jésus - Christ jpour Dieu. Il fe peut
&ire qu'un empereur penflt ainfi ;mais faut-il croire,
je ne dis pas fur les princes feulement , mais fur les
particuliers , des ennemis qui fans prouver aucun
fait , décrient la jeligion & les mœurs des hommes
qui n'ont pas penfé cjjmme eux ? ,
Ce Théophile , fils de Michel le hègue , fut prefque
le feul empereur qui eût fuccédé paifiblement à fon A
père depuis deux fiécles. Sous lui les adorateurs des \
images furent plus perfécutés que jamais. On connaît
aifément par ces longues perfécutions , que tous les
'citoyens* étaient diviles.
Il eft remarquable , que. deux femmes ayent rétabli
.les images. L'une eft l'impératrice Irène , veuve de
Lion IFi 8c l'autne l'impératrice Tbéodora ^ veuve
de Théophile.
Tbéodora , ' maîtreffe de rêmpîre d'Orient fous le
jeune Michel fon fils , perfécuta à fbn tour les enne-
mis des images. Elle porta fon «zèle, ou fa poKti»
que , plus Jpin. Il.y avait encor dans l'Afie mineure
un grand nombre de manichéens. qui vivaient paifi-
blés , parce que la fureur d'entoufiafme , qui n'eft
guère^ que dans les feâes naiffantei, était paiTée. Ils
étaient riches par le, commerce. Soit ..qu'on çn vou»-
lût à leurs opiniona ou à leurs l)iens, on fit contr'eux
des édits févères , qui furent exécutés avec cruauté.
ar La perfécution leur rendit leur premier fanatifme. On
W Dd iij _
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mmm
^ Dl t's k 1 1 t c -Q t. z 0
itn et petit 4m imUlitt IsAs ^es fii|1pBo69. Lb fcfte
^dUpélé fe véfolta* B ta pafla clés de garante
ikâlle cher les nHofolmtns ; ft dtt maakhéetis , aup»-
hivant fi Utoquilles ^ devinrent des ennemis ittécom
eiliables ^ qui joints mx Sarrazins ravagèrent PAfie
«Bîn^ttre înTqii^an partes de U ville ti^>ériale , dé-
|>eDplée par ha^ .p^e honnie «a 84t , * deveaoi
ta objet et pitié. : .'
La i^efte pt^tementéké , eft une mésiétt pité^
Ênliére aux peuples^ dé MUHque » cosme la petitt
vérole. C*eft de ces ptys qu'elle vient toâjoors ptt
des TaiffeauK marchands. Elle monderait l'Europe Âm
les fiiges précautions qu'on prend daoÉ im» ports^ à
probablement l'inattention du goutemementki&to^
trer la conugion dans la ville impériale.
Cette même inattention éxpoCi TttApirt I tin atitre
fiéau. Les Rufles s'embarquèrent vers le port qu'on
nomme aujourd'hui Azoph fur la mer Noire, ft vin-
rent nnrager tous les rivages du Font • Ëtixîn. Leà
Arabes d'un autre côté pouffèrent encor leurs con-
quêtes par-delà l'Arménie, & dans PAfie mmemt.
xnfin MicM h jeune , après un règne cruel ft in-
ïbttuné , fut alfafliné par Ètifile. qu*tt avait thré de
la plus bafi^ conditim pont Taffocfer à IVmpire.
L^admfaiIftMtoii et É^ nt tfot p^tèret plu« keo-
tenfe. Ceft fout An règne qu'eft ^époque du graoè
fchifme qvi divila l'églife grecque de la latine. Cdt
cet aflafTm qu'ion regarda oomme juftei quand U&
dépofér le |>atliaich« notUù%
Les malheim de iW^e me ittMt tt% li>eattcoii(
réparés fous Um , qu'on appella h fbiiùfopbii non
qu'il ftt un AntMhts^sn Marc^Amrih , un JuHeus
m Aaron ûl Racbitd , Un Alfred^ mais parce qu'il
était favantv U paile pour avdir le premier ouvert un
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!««•*
wÊh
^'^mm
AUX ittJiTiéME ïT :Kcuyiétfs ïiécLes. 421 S
chemin aox Turcs , qui fi longtems q^ès ont prit
Conliantinople.
Les Turcs qui Combattirent depuis les Sarracint , &
qui mêlés à eux , furent leur foutien & 1«8 deilruo
teurs de l'empire Grec , avaient- ils Myà enroyé def
colonies dans ces contrées voifines du Danul>e ? Ott
n'a guères d'hiftoires véritables de ces ém^cations des
bariïares.
n n'y a que trop d'apparence que les hommes ont
«infi vécu longtems. A peine un pays était un peu
cultivé 9 qu'il était envahi par une nation affamée ,
cfaa£Eée à fon tour par une autre. Les Gaulois n^étaient-
•fls pas defcendus en Italie ? n'avaient - ils pj» couru
ijurques dans TAfie mineure ? Vingt peuples de Ig
^aade Tartarie n'ont -ils pas dierché de nouvelle^
terres ? Les SuHfes n'avaient -ils pas mis le feu à kmn
bourgades , pour aller fe tranfplanter en Languedoc ,
i|ttand Véfttr les contraignit de retourner labourer leurs
terres f^ qu'étaient Pbaratnond & Clovif finon 4^
barbares tranfplantés ^ qui ne trouvèrent point de
Céjkr ?
Malgré tant de déraftres , Conftantinople fut en-
cor longtems la ville chrédenne la plus opulente,
la plus peuplée , la plus recommandable par les
arts. Sa fituation fede , par laquelle elle domine.^ur
deux mers , la rendait nécelTairement commerçante.
La pefte de 842 « toute deftcuâive qu'elle avuit été ,
ne fut qu'un fléau paflager. Les villes de commerce,
& où la cour, réfide , fe repeuplent toi^jours par Taf-
iluence des voifins. Les arts méchaniques^ les beauX-
arts mêmes ne périment point dans une vafte capitale
qui eft le féjour des ridies.
Toutes ces révolutions fubites éa palais , les otî-
mes de tant d'empereurs égorgés le3 uns par les au-
\ très , font des orages qui ne tombent guères fer des
0r Dd iiij
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r
i
424 Db l'empiiL£ G,r.bc,&c;
hommes cachas , qui cultiTent ,ea paix des profélfiodi
qu'4;)n n'envie point.
tes richélTes n'étaient point içuiCétt : on dit qil*en
9^7 Tbéoiora mère de Michel^ en fe démettant mal-
gré elle de la régence , & traitée i-peu^près par fonfils
comme Marie de Midicis le fut de nos jours par
Louis XlJIf fit voir à l'empereur qu'il y avait dans
le tréfor cent neuf mille livres pefant d'or , & tioii
cent mille livres d'argent
tin gouvernement fage (Pouvait donc encot Main-
tenir l'empire dans fa puiflance. Il était reflerré , vm
non tout - à ^iait démembré ; changeant d'empereurs ,
mais toujours uni fous celui qui fe revêtait de la pour-
pre ; enfiin plus riche , plus plein de relTources , plus
puiHant que celui d'Allemagne. Cependant il n'eft
•plus , Se l'empire d'Allemagne fubfifte encore.
r
• Les horribles révolutions qu'on vient de voir
effrayent & dégoûtent; cependant il faut ionrenir
-que depuis Co^^aji//» furnommé /r gro»^ , l'empire
de Cot)ftantinople n'avait guère été autrement gou-
verné ; & fi vous en exceptez Juiien , & deux ou trois
autres , quel empereur ne fouilla pas le trône d'abo-
minations & de crimes ?
CrtÀPltRË tRÉNtlÉMÊ.
,ï)e fîtalie , des papes ^ du divorte de LoTHAlRE m
^ de Lorraine , 6f des autres affaires de t*églife aux
huitième ^ neiwieme JiicîeH
.:1p Our ne pas perdre le fil qui Jie tant d^évcneraens,
, A fouvenons - nous avec quelle prudence les papes
. ÎTc conduifirent fous Fefin & fous Cbarlema^ne j copi-
m^m * I mmjikjii
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i
^ De l'Ijalib, des papes, &c- 42f
me ils aflbupirent habilement les querelles de reli-
gion ,& comme chacun d'eux établit fourdement les
fondemens de la grandeur pontificale.
Leur pouvoir était déjà très grand » puifque Gri*
goire IK rebâtit le pbrt d'Oftie , & que Léon IV for-
tifia Rome à fes dépens. Mais tous les papes ne pou-
vaient être de grands - hommes , & toutes les con-
jonâures ne pouvaient leur être favorables. Chaque
vacance de fiege caufait les mêmes troubles que ré«
le<fUon d'un roi en produit en Pologne. Le pape élu
avait à ménager à la fois le fénat Komain , le peuple
& l'empereur. La nobleffe Romaine avait grande part
au gouvernement ; elle éUfait ak)rs deux confuts tous
les ans^ Elle créait un préfet , qui était une efpèce
de tribun du peuple. Il y avait un tribunal de douze
fénateurs ; & c'était ces fénateurs qui nommaient les
principaux officiers du duché de Rome. Ce gouverne-
ment municipal avait tantôt plus, tantôt moins d'auto-
rité. Les papes avaient à Rome plutôt un grand crédit
qu'une puiffance légiflative.
S'ils n'étaient pas fouveraîns de Rome , ils ne per-
daient aucune occafion d'agir en fouverains de l'églife
d'Occident. Les évéques fe conRituaient juges des
rois , & les papes juges des évêques. Tant de con^
flic'ts d'autorité , ce mélange de religion , de fuperfti-
tion ,de faibleffe, de méchanceté dans toutes les cours,
rinfuffifance des Ibix , tout cela ne peut être mieux
connu que par l'avanture du mariage & du divorce
de Loibaire roi de Lorraine , neveu de CbwrUs le
i:baHve*
Cbarjentc^ne zv^it répudié une de fes femmes, &
en avait époufp une autre , non-feulement avec l'ap-
pj-obation du pape Ethrmè ^ mais fur fes preffantes
follicitations. Les rqis Francs , Gontrun , Caribert ,
Sigebert , Cbilperic , Dagobert , avaient eu plufieurs
femmes à la fois fans qu'on eût murmuré ; .& fi c'était
M^
•J^W*
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r
itÊSâ
4i6 DBL'iTàLIB) DBS >APE8,
À l
un fcaadaie , il était ftns trouble, le tems change
tout. LêPbMtre marié a?ec Teutberge , fille d'on duc
de la Bourgogne Transjurane , prétend la répudier
pour un incefte avec fon ftère , dont elle eft accufée ,
& époufer (a maitreire Vahrade. Toute la fuite de
œtte avantsre eft d'une fingularité nouvelle. D'a-
bord la reine Teutberge fe juftifie par Tépreuve de
Teao bouillante. Son avocat plonge la main dans un
vafe 9 au fond duquel il ramaffe impunément un an*
neau béni. Le roi fe plaint qu'on a employé la four-
berie dans cette épreuve. Il eft bien fur que fi elle
fot faite 9 Tavocat de la reine était inftruit du fecret
de préparer la peau à foutenir Taftion de l^eau bonil-
lante , fecret qui conGfte , dit- on , à le frotter long-
tems d'efprit de vitriol & d'alun avec du jus d'oi-
gnon. Aucune académie des fciences n'a de nos jours
tenté de connaître fur ces épreuves ce que Aventles
charlatans»
Le fuccès de cette épreuve paflTait pcrar uft mira*
cle , pour le jugement de Dieu même ; & cependant
Teutberge , que le ciel juftifie , avoue à pluGeurs évé-
ques , en préfence de fon confeflfeur , qu'elle eft cou-
pable. Il n'y a guéres d'apparence qu'un roi qui
voulait fe féparer de fa femme fur une imputation
d'adultère , eut imaginé de l'accufer d'un incefte avec
fon frère , fi le fait n'avait pas été public. On ne va
pas fuppofer un crime fi recherché , fi rare , fi diffi-
cile à prouver : il fout d'ailleurs que dans ces tems-
là ce qu'on appelle aujourd'hui honneur , ne fiftt point
du tout connu. Le roi ft la reine fe couvrent tous
deux de honte , l'un par fon accufadon , l'autre par
fon aveu. Deux conciles nationaux font aifemblés ,
qui permettent le divorce.
Le pape Nicolas 1 cafle les deux conciles. Il dé-
f»ofe Gontier archevêque de Cologne , qui avait^ éti
e plus ardent dans l'affaire du divorce. GmOifr écrit
auffi-tôt à toutes les églifes : ^ Quoique le foigneor
6..
''^rtf^M
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DVDiYORCB. 427
î
S) Kcolàt , qû^on nomme pape ^ & ^ (è Compte pape
13 & empereur ^ nous aie excommuniés, noas avons r&>
s9 Cfté à fa foKe. ^^ Enfuitedans fon écrie ^s'adreflantao
pape même 1 1» Nous ne tecevons point , dtt-U ^ v^cro
«5 maudite fentence : nous It méptifons ; nous rovn
j^ rejettons vous-même de notre oommonkm, nous
» contentant de celle des êvtques aci fipires que
a> VOUS taiftik^ , &o»
tJn ifrèré de IVrchevéque de Cologne |Mta Ini-mé^
me cette proteftation à Rome , & la mit i'épée à la
miain fur te tombeau oà les Komains prétendent que
repdfent les cendres de St. Pierre. Mais bientôt après
l'état poliiiqde des dlBaires ayant changé , oe même
arckevéque changea auffi. Il vint au mont Caffin fe
jetter aex gencfox du pape Attrim II fucceifeur de
Nico/as. ), Je déclare , dit-il , devant DiEU & devant
yy fes falnts , à vous « monfeigoeur Adrien , fouverain
» pontife , aux évéques qui vous font fournis , & à
^ toute raflfemblée , que je fupporte humblement la
)) fentence de dépofition donnée canoniquement con^
yy tre moi par le pape Nicoldr , &c. ^^ On'fent com-
bien un exemple de cette efpèce afFermilTait la ûipé-
riorité de féglife romaine , & les conjoaétures rcA*
daient ces exemptes fréquens»
Ce même ¥iûoka t extcimmtime la feçcmde &m-
me de Lothaire , & ordorme i ce ^jJiriace de repren-
dre la première. Toute l'Eurofiie prend part à ces
événemens. L'empereur Louis il frère de Cbwries k
cbativi , & onde de Loibmre^t^ flédare d'abord vio-
lemment pour fon neveu contre le pi^e. Cet em-
4)èreur qui réfidait alors en Italie , laenaoe Ni^as Is
il y a du fang répandu , & l'ItaUe eft en aHarmcs.
On négocie , on cabale de tous côtés. Teutherge va
plaider à Rome ; Valrade fa rivale entreprend le voya-
ge , & n'ofe Tachever. Lotbaire excommunié s*y tranf-
porte , & va demander pardon à Adrien fucccfleur de
Nicolas > dan« la crainte où il -eft que fott oncle ie
U^w H II ■ail II nffa
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I
«!■
V^
428
djâ
De L o t»H a I r b.
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chauve armé contre lui au nom de Téglife , ne s'em-
pare de fon royaume de Lorraine. Adrien II en lui
donnant la communion dans Rome , lui fait jarç
qu'il n'a point ufé des droits du mariage avec Val-
rade , depuis l'ordre que le pape Nicolas lui ayaic
donné de s'en abftenir. Lotbaire fait ferment , corn.
munie, & meurt quelque tems. après. Tous ieshifto»
riens ne manquent pas de dire qu'il eft mort en pu-
nition de fon parjure , & que les domeftfques qui
ont ]uié aveclui , font morts dans l'année.
Le droit qu'exercèrent en cette occafion Wicoîasl
& Adrien It y était fondé fur les fauflfes décréules
déjà regardées comme un codé univerfei. Le con-
trat civil qui unit deu;c époux , étant devenu un (k-
crement , était fournis au jugement de l'églife.
Cette avanture eft le premier fcandale touchant
le mariage cfes têtes couronnées en Occident On a
vu depuis les rois de France Kohert , Pbilipte /»
Philippe- Augujie excommuniés par les papes pour des
caufes à-peu-près femblables , ou même pour des ma-
riages contradtés entre parens très éloignés. Les c?ç-
ques nationaux prétendirent longtems devoir être les
juges de ces caufes. Les pontifes de Rome les évo-
quèrent toujours à eux.'
On n'examine point -ici fi cette nouvelle jurifpni-
dence eft utile ou dangereufe ; on n'écrit ni comme
jurifconfulte , ni comme controverfifte : mais toutes
les provinces chrétiennes ont été troublées par ces
fcandales. Les anciens Romains , & les peuple»orien-
tatfx furent plus heureux en ce point. Les droits des
pères de famille , le fecrct de leur lit n'y furent ja-
mais en proie à la curiofité publique. On ne con-
nait point chez eux de pareils procès au fujet d'un
mariage ou d'un divorce.
Ce defcendant de Charîemc^ne fut le premier qui
alla plai4er à trois cent lieues de chez iuî devant on
âfrj^
T*^
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DV DIVOKCB DE LOTHAIRE. 429
juge étranger , pour favoir quelle femme il devait
aimer. Les peuples furent fur le point d'être les
viiftimes de ce différend. Louis le débonnaire avait
été le premier exemple du pouvofîr des évêques fur
les empereurs. Lotbaire de Lorraine fut l'époque du
pouvoir des papes fur les évéques. Il réfultc de
toute rhiftoire de ces tems-là , que la focîété avait
peu de règles certaine» chez les nations occîdenta-
les > que les états avaient peu de loix , & que l'é-
glife voulait leur en donner, -
CHAPITRE TRENTE-UNIÈME. '
... •
i Le Pbotdus , 6f dufcbifme entre t Orient 6f P Occident.
LA pkis grande affaire que l'^glife eut alors ,* & S
qui en eft encore une très importante aujour* '
d'hui , fut l'origine de la féparation totale des Grecs
& des Latins. La chaire patriarchale de Conftanti-
nople étant , airifi que lê trône , l'objet de l'ambi*
tîon , était fujette aux mêmes révolutions. L'empe-
reur -AfzVi'f/ /// mécontent du patriarche Ignace^
l'obligea «à figner lui*méme fa dépofition , & mit à, fa
place Pbotius , eunuque du palais , homme d'une
grande qualité » d'un vafte génie , & d'une fcience
univerfelle. U était erand*écuyer,& miniftre d'état.
Les évêques , pour 1 ordonner patriarche , le firent
paflTer en iix jours par tou« ie^ degrés» Le premier
jour on U fit moine , parce qpe les moines épient
alors regardés comme faifant partie de la hiérarchie,
Le fécond jour il fut le<fteur, le troifiéme fous -dia-
cre ^ puis diaci^ « prêtre , & enfia patri^^hç , le jour
de Noël erigçg.
Le pape 'Nicolas prit le parti. à'Jgnace , & excmn-
ixah Pbçtiut. Il lui reprochait furtout d'avoir patf^ ^
munia
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«i^
I ! 430 Di Photut» it ev schisme
de Htzt de laïc à celui d'évéque avec tant de n*
pidité ; mais Pbotius répondait avec raifon que St.
jimbraife , gouverneur de Mtbn , & i peine chrétien ,
avait joint la dignité d*évéque à celle de gouverne^
Elus rapidement ençor. Photiut excommunia donc
t pape à fon tour , & le déclara dépofé. Il prît le
titre de patriarche œcuménique , & accufa hautement
d'héréfîe les évéq^es d'Occident de la communion
du pape. Le plus gr^d reproche qu'il leur fàiûit,
roulait fur la proceflfion du Père & du Fik. JDfi
bommts , dit-il dans une de fes lettres ^fortis des ti*
nitris de tOccidenà , mettomt corromfu far leur igno-
rance. Le comble de leur impiiti ^ Rajouter de non*
velles, paroles au façri Jymbole autoxifi par totu les
conciles , en dijani que le St. Bfprit ne procède pas
du Pire feulement , trttiis encor 4k Fils yCf qtd ^ re-^
umçer au çbrffliamfmep
On voît par ce paflage & par beaucoup d^utres ,
quelle fupériorité les Grecs affedbdent en tout fur
les Latins, Ils prétendaient que Téglife romaine de-
vait tout à la grecque , jufqu'aux noms des ufàges,
des cérémonies , des myftéres , des dignités. Batime^
éucbarijhe , liturgie , diocèfe , paroi ffe , ivêque , ftitre ,
diacre , moine , ïglife , tout eft grec. Ils regardaient
les Latins comme des difciples ignorans , révoltés
contre leurs mitres , dont ils ne (avaient pas mémo
la langue. Ils nous accufaient d'ignorer le catéchif-
me , enfin de n'itre pas chrétiens,
Les autres fujets d*anathême étaient , que les La-.
tins fe fervaîent alors communément de pain non*
levé pour Teuchariftie , mangeaient des œuft & du
fromage en carême , & que leurs prêtres ne fe fei^
faient point rafer la barbe. Etranges raifons pour
brouiller l'Occident avec TOrient !
Maïs quiconque eft jufte avouera que Pbotius était
non -feulement le plus favant homm^ de Péglife»
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1"**
• 431 f
EKTRE l'Orient et l'Occidbkt
Biais un grand évéque. Il fe conduifit comme St.
Ambroife , quand BapU aflaffin de l'empereur Michel
fe préienta dans Téglife de Sophie : Vous ifes indim
gne cCafpvcber desjaints myflères , lui dit-il à haute
voïx^ vous qui avez les mains enpor fùtfillies dujhtg
Ae votre bienfaHleur. Pbotius ne trouva pas un Tbéo^
dofe dans B^ifile. Ce tyran fie une chofe jufte par
vengeance. Il rétablit Ignace dans le fiége patriar-
chal , & chafla Pbotius, Rome profita de cette con-
jondure pour faire aflemblcr à Conftantinople le hui*
tiéme concile œcuménique , compofé de trois cent
évéques. Les légats du pape préfidèrent , mais ils ne
favaient pas le grec , & parmi les autres évéques très
peu favaiept le latin. Pbotius y fut univeitcllcmcnt
condamné comme intrus , & fournis & la pénitence
publique. On figna pour les cinq patriarches avant
de figner pour le uape ; ce qui eft fort extraordinaire ;
car puifque les légats eurent la première place , ils
devaient figner les premiers. Mais çn tout cela les
queftions qui partageaient TOr ient & l'Occident ,
ne furent point agitées ; on ne voulait que dépofer
Pbotius.
Quelque tems après^ , le vrai patriarche , Ignace ,
étant mort , Pbotius eut Tadreflc de fe faire rétablir
Îar l'empereur Bajîle. Le pape Jean VIII \e retjut
fa communion , le reconnut , lui écrivit ; & malgré
ce huitième condle œcuménique , qui avait *anathé<»
ttiatîfé ce patriarche , le pape envoya fes légats à un
autre concile à Conftantinople , dans lequel Pbotius
fîit reconnu innocent par quatre cent évéques , dpnt
trois cent l'avaient auparavant condamné. Les légats
de ce même fiége de Rome , qui l'avaient anathéma*
tifé , fervirent eux-mêmes à cafler le huitième con-
cile œcuménique.
Combien tout change chez les hommes ! combien
ce qui était feux , devient vrai félon les tems ! Les
légats de Jean VIB s'ét^rient en plein concile ; Si
.1
hifm
N«"
^Wftâil
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§r 432 De PhOTIVS ET DU SCHISMB
-*w
1
il
queîqu^un ne reconnaît pas Pbotius , que fon pwrtagî
joit avec Judas, Le concile s'écrie , Longues amùtt
au patriarche Pbotius , 8f au putriarcbe de Bonn
Jean.
Enfin à la fuîte des aâes dp concile on' voit une
lettre du pape à ce favant patriarche , dans laquelle
il lui dit ; Nous penfons comme vous ; nous tenons pur
tranfgre£eurs de la parole de DiBU, nous rangeons
avec Judas , ceux qui ont ajouté au fymbole , que le
St, Efprit procède du Père gf du Fils j mais nous
croyons quHl faut ufer de douceur avec eux , 6? ^^
exhorter à renoncer à ce blafphême.
Il eft donc cUir que réglife romaine & la grecque
penfaient alors cliSeremment de ce qu'on penle au-
jourd'hui. L'églife romaine adopta depuis la procef-
fion du Père & du Fils ; & il arriva même qu'en
s 274 l'empereur des Grecs, Michel Paléologue ^'m-
plorant contre les Turcs une nouvelle croifade , en.
voya au fécond concile de Lyon , Ton patriarche &
fon chancelier , qui chantèrent avec le concile en
latin , qui ex pâtre filioque procedit. Mais l'églife
grecque retourna encore à iba opinion <,.& femblala
quitter encor dans la réunion paflagère qui fe fit
avec Eugène IF. Qpe les hommes apprennent delà
à fe tolérer les uns' les autres. Voilà des variations
& des difputes fur un point fondamental , qui n'ont
ni excité de troubles , ni rempli les prifons , ni allu*
mé les bûchers.
On a blâmé les déférences du pape Jean Vlllfont
le patriarche Pbotius ^ on n'a pas aflez fongé que
ce pontife avait alors befoin de l'empereur Bajile.
Un roî de Bulgarie , nommé Bogoris , gagné par l'ha-
bileté de fa femt^e qui était chrétienne , s'était con*
verti , àPej^emplede C/ow & du roi Egbert. tti'a-
giflait* de favoiç de. quel patnarchat cette nouvelle
province chrétienne dépendrait, Coaftantfnople &
Rome
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!
^mm
ENTWt l'OrieiTt et l'Occidewt. 433
Rome fe la dlfputaient. La' décifion dépendait de
Tempereur Bqfî/e. Voilà eti partie le fujet des com-
plaifances qu'eut Tévéquc de Rome pour celui de
Conftantinople.
Il ne faut pas oublier que dan v ce concile , ainfi
que dans le précédent , il y eut des Cardinaux. Oa
nommait ainfi des prêtres & des diacres qui ferraient
de confeils aux métropolitains. Il y en avait à Rome
comme dans d'autres églifes. Us étaient déjà diflin-
. gués : mais ils fignaient après les évéques & les abbcs.
Le pape donna par fes lettres & par fes légats le
titre de vœre fainteté au patriarche Pbotius. Les
autres patriarches font aufli appelles papes dans ce
concile. C'eft un nom grec , commun à tous les prê-
tres, & qui peu -à- peu eft devenu le titre diftinâif
du métropolitain dç Rome»
Il paraît que Jean VIII fe conduifaît avec pru-
dence ; car fes fuccefleurs s'étanjt brouillés avec l'em-
pire Grec , & ayant adopté le huitième concile œcu-
ménique de 8^9 & rejette l'autre qui abfolvait Pbo*
tins , la paix établie par Jean VIll fut alors rom^
pue. Pbotius éclata contre l'églife romaine , la traita
d'hérétfique au fujet de cet article du filioque proce^
dit , des oeufs en carême , de l'euchariftie ^ite avec
du pain fans levain , & de plufieurs autres ufages.
Mais le grand point de la divifion était la primatie.
Pbotius & fes fucceffeurs voulaient être les premiers
évéques du chriftianifme , & ne pouvaient foufFrir
que Vévêque de Romç , d'une ville qu'ils regardaient
alors convtie barbare , féparée de l'empire par (à rê-
bellion , & en proie à qui voudrait s'en emparer,
jouit de la préféance fur l'évéque de la- ville impé-
riale. Le patriarche de Conftantinople avait alors dans
fon diftriét toutes les églifes de la Sicile & de la
Fouille ; & le St. Siège en paflant fous une domina-
tion étranjgète , avait perdu à la fois dan^ ce? pro-
Ejfaifur les mœurs , èf c* Tom. I. E e
î
mm^
'^mT'
i^m
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ST 4H Dk PHOtlUSlT DU SCHIf AE f
1
Tinoès (on patrintoiné & Tes droits de métropohuàa.
L'églife grecque méprifait réglîfe romaine. Les fcien"»
ces flmfTjîenc à Conftahtinofyle , mais à Rome tout
tombait jufqu'à la langue latine ; & qiioK)u'on y fât
plus inftruit que dans tout le refte de TOccident , ce
peu de fcience (é reflbitait dé ces tems maHiéiiretix.
Les Grecs fc tengcaîent bien de la fiipérioritc qe<
les Romains avaient t\xé for eux depuis le tems dtf
Lucrèce & de Cicerm jofqu'à Corneille Tacite, Ils fit
parlaient des Romains qu'arec ironie. L'évéquc Luiu
frixnd y enfoyé depuis enambaflade à Conftantinople
par les Otbons y rapporte que les Grecs n'appellaient
3t. Grég(dri k grand , ^ue Grigairf diaiogue , parce
a^^cn effet fes éialogues font d^un homme trop 6m*
^e. Le etms a taut changé. Les papes font deve^
-fins ût grands fouTeraîns , Rome le centre de la po^
lltefTé & d^i arts , Péglife latine favante ; & le pa*
triarche de Conflantinople n'eft plus qu'on cfclave^
évéque d'un peuple efclave.
Photint , qtti eut dans fa vie plus de revers que de
gloire , fut dépofë par des intrigues de cour ^ & moa^
mt malhigureux ; mais fes fucceffeors , attKfaés à fès
prétentions , les fontinrent avec vigueur.
Le pape Jean Vtll mourut encor plus malhevren-
femènt. Les annales de Fttidê difeiit qu'M fîit a(fa&
fihé à coups de marteau. Les tems faivans noi» fe^
rortt voir le fiége p(»AtificaI fouirent en£uiglsmtc , &
Rome toujours un grand objet pour les nation», mais
toujours à plaindre.
Le dogme ne troubla pokit encor Pcglife d'Occi-
dent ; à peine a<t-on confervé la mémoire d'une pe»
tite dif^ute excitée en 8r4 P«r un bénédiâm nommé
Jean Godefca/d fur la prédeftînadon & fur hi grace:
l'événement fit voir combien il eft dangereux de traî*
ter ces matières , & furtout de difputer contre un wi-
veriàire puiflant Ce moine prenant à ta lettre pin*
tÇtMki^ I" ' yi^naa^meg— Il II ' mmSSt
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BMTRB li'OKIBNT BT fc'OceiBENr. 435
fleurs Éxpceffioas dé Sf. Paul Se de £r, Augnftin^
enfeignait la prédeftination abfoiiie & éternelle du
petit nombre des élus & du grand nombre des fé*
pl-ourés. L'drehëvé^ue de Hiieims ^ Httiçmur ^ homme
Tiolenk dans les aflalfesf eadéfiaiUques comane dan%
les dViles , lui dtfe, qt^il était fridejHni à être cQdû
damm & à être f^ttu £n effet il le fit anathéma*
ttfer dans UH petit eoAcile en 850. On Texpofa tout
Bud en préfence de Temperf ur Charles le chauve , &
il fut fouetté depuia lea épaules jufqu'aux jambes par
ies flMines.
Cette difjpute impertinente dans laquelle les deux
partis ont également tort , ne s'eft que trop renou*
f ellée. Tous Terrez chez les Hollandais un fynodv de
Dordrecht , compofé des partîfans de l'opinion de Go.
defcaid , faire^pis que fouetter les fe(ftateurs d'Jfinfmar.
Vous verrez au contraire eh France lès jéfuites du parti
i*Hincmar pourfuivre autant qu'ils le pourront les
janfénifies attachés aux dogmes de Godefcafd >• & ces
querelles qui font la hohté âcs nations policées , ne
finiront que quand il y aurii plus de philofophes quç
de dodteurs.
Je çe^ ferai, aucune mention d^une {bliè épidémie
eue , qui faifit le pciiple de Dijon en 844 i Tocca-
uon d'pn $L Sinise , qui donnait y difaic-on , des
convuUiôns à ceux qui priaient fur fon tombeau i
je ne parlei'ais pas , dis-je , de cette fuperftîtion pppu.
laire, fi elle île s^étaic renouvellée de nos jours aveq
fureur dans ies circonliances toutes pareilles. Les
méihès folies femblent deiUnées à reparaître ^e.^ms;
en-tems fur la fcéne du monde ; mais, aqiC le; bon^
fetls eft 1< même dans tous les tenis : & oii n'a.rien
dît de fi' fage fur les miracles modernes opérés a^
tombeau de je ne fais quel diacre de Paris, que ce
que dit en ^44 un évê^ue ià Lyoh fur ceuS. deDi-
jOnt)» Voilà m étsange faint , qui eftfopie oeux qut
» ont iecdUra à lui : M me femblet que les mirackl
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£fi6^ Disputes ïl^ Oc ciBBK T.
,j devraictit étr€ faks potir guérir les maladies , &
,5 non pour en donner. ^^
Ces minuties ne troublaient point la paix en Occi-
dent , & les querelles théologiques y étaient alors
comptées pour rien , parce qu'on ne pcnfait qu*à s'a-
grandir* Elles avaient plus de poids en Orient , parce
que les prélats n'y ayant jamais eu de puiflance tem-
porelle , oh^chaient à fe faire valoir par les guerres
de plume. 11 y a encor une autre caufc de la paix
théologique en Occident , c'eft l'ignorance qui au
moins produifit ce bien parmi les maux infinis dont
^le était caufc. =
CHAPITRE TRENTE-DEUXIÈME.
Erat de T empire d* Occident , â la fin du neuvième
Jîicle. -
L ^Empire d'Occident né fubfiftà plus que de nom.
' Arnould , Arnolfe ou Arnold , bâtard de turhman.,
fe rendit maitre de TAIIemagne ; mais. Tltalie étsdt
pirtagée entre deux feîgneurs , tous deux du fang
de ^Itrariemagfie par les femmes ; Tun était an duc
de Spolette , nomme Gui ,• l'autre Bérenger , duc de
trîoul : tous deux inveftîs de ces duchés par Charles
te chauve , tous deux prétendans à Tempire aufli-bîen
qu^âu ï'byàume de France. Arnould , eu qualité d'an,
pereur , regardait aufli la Ffî^hce comme iuî appar-
tenant de droit : tandis que la France , détachée de
î^empïre , était part gée entie Charles le fintple t|uî
la perdait, & fe roi Eudes ^ grand-oncle de Hugues
Ûapet , qui Pufurpaît.
Un Bozon^ roi d'Arles, drfputait encor Tempire*
Le pape JonMo/*^, évéque peu accrédité de I» mal-
heureufe Rome , ne pouvait que donner l'onAioii fa^ ;
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1
1
^ Etat de l'empire d'Occidekt , Ad 437 *
crée aa plos fort. Il i^onronna ce Gui de Spoiette^
L'année d'après il couronna Birenger vaîiiqueiir ; &
il fut forcé de facrer enfin cet Arnould qui vint aflié*
ger Rome & la prit d'aflaut. Le ferment équivoque «
que requt Arnould , des Romains , prouve que déjà
les papes prétendaient à la fouver<iineté - de Rome.
Tel était ce ferment : ^ Je jure par les (aints my&è«
yy res , que fauf mon honneur , ma loi &, ma fidélité
,9 à monfeigneur Formqfe pape , je ferai fidèle à l'^m-
„ pereur Arnould. "
Les papes étaient alors en quelque (brte femUablea
aux califes de Bagdat, qui révérés dans tous les états
Inufulmans comme lèS'Chef;i de \% religion , n'avaient
plus guères d'autre droit que celui de donofer Its* kh
veftitures des royaumes à ceux qui les demand^ierrt
les armes k la main ; mais il y avait entre ces Qallfts &
ces papes cette difFérence > que les califes étaient
tombés du premier trône de la terre» & que les papes
s'élevaient infonfiWement* ' v . :
Il nV 3^ait réellement. plus d'empire, ni de droil
ni de fait. Les Romains , qui s'étaient donnéâ à Char*
lemagne par acclamation , ne voulaient plus recon*
naître des bifiards , des étrangers , à peine maitces
d'une partie de la Germanie*
' Le peuple Romain dahs'fon abaiiTement, dans foU
mélange avec tant d'étrangers, confervait encér ,'Coni«
me anjourd'hoi , cette fierté feàrette que donne- la
grandei(r i^aflee» Il trouvait infupportable quel des
Bruges v^ef Cattçs , des Marcomans , fc diflent let
fucceifeurs des Céfars , & que les rives do l(ein & la
forêt Hercinie fiiflent le centre de l'empire de Tipus
& de TraJMtM
On fréfbiffait à Rome d^ndîgnation , à on rtait'en
même tems de pitié, lorfqu'on apprenait qu'après la
mort d' Arnould , fpti fils Hiiudovic , que nous appel*
Ee iij
^ . I
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r
498 ETA.Ï BB t^liflEE O'ÛCCIDBHT^ &C.
^^t^i^m ' ^ I f r II
pelions £o«7> , aiAit été cUâfité empereur des Ro«
mains à t'ige de trois ou quatre ans , dans un villags
bafbare , nomm^ Fourkem , paf quelques leuds as
évAques Germains. Cet enfiint ae tm jamais compté
p^tmi les emj^trtors ; mais on le regat dait dans PAile*
magntf eomme celui qui défiait fueoéder à Cbopfîtm^
ffie ft aux Céjkrs. C'était en irflet un étrange empire
:6main qtie 6e gouTtHiement qui n^amis alors ni lei
pays^ trmé feUfcin t^ la Afei^ , nî la France , ni 1«
Bourgogne, ni rSfpagne, ni rien enia dans l'Iulict
& pas même une maifoù dans Kome qu'on pût (Ure
ippkiiléiiïf à Péoq^eawr.
t)tt Utr» de ee jto»i!^ ^ demie? prinoe Allemand
c^ ftng de Okariiftuigfte fêf bàtardife, mort en 912,
l^Altemagne fet ce qu^étaît la Ftance , une concréi
tënftéf pnr tes ([oèrres civiles de étrangères , fooi
ton pritiee élu en tumulte êc mal obéï.
Tout eil révolution dans tes goifvememens : s'en
eft une frappante que de voir une partie de ces Saxons
fittVagSM ^ traités par Ohàrimm^ comme les Ilotes
par les liieédémoniens , dfnt^r eu prendre au bout
dt cent douiKe «nr eettv même dignité , qui n'était
pH»^ dans la jmaifoA 4a leur ^nqaeur^ 0$bm^ doo
de Saxe, après la mort de iaids^ met, dît*qn, par
fon crédit la couronne d'Allemagne fur la tête de
iSônmà duo ^ Francboief &'«|fa'és la mârt de (km^y
k fils. -du duo Otktm de Siie , Hmri: e^^ehWi eft
élu. Toos eeqx qui trient .^eta pri^iees hérécKlairta
esi Garpiasiie, jaiiHs auja'évéqves ^faHJUen^ ci« é(s^
thûiB ^Al y. àppeilaieut alofe les pritûiifMJj^ ekoyoifl
dès:''boiuiaéëf.
\\\\ 4 5:; 'JT!
.u
r--/'ipM»ii 'ff4 y , ff^'uMjtyiiiiii^ amn u ^ ^i^pumij^^i ,t^
Ksunk-
m Il" ' ^aMÊÈttm
m^
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DtS FIITS BTDB L'iMPIKf. 499
CHAPITRE TRENTE.TROÏSIÉMB.
Des fiefs 6f iie f empire. .
T A force qui a tout fdît dans cc*!nondc , avajt
JLi donné l'Italie , & les Gaules aux Romaine. Les
barbares pfurpèrent leurs conquêtes. Le père de Cfy(ir^
iemagne u£mp^ les Gaules furies rois Francs. Les
gouverneurs fous la race (le Çbarlemagne ufprpèt^nt
tout ce qu'ils purent. Les rojs Lombards avaient ééjt
'Établi des fieft en Italie.' Ce fut le modèle fqr lequel ft
réglèrent les ducs & les comtes dès le teàis dje Cbturles
ie cbawtff. Peu -à -peu leurs gojnremèmçns devinrent
des patrimoines. |.es évéqufes de phifieurs grands lîé^
ges , déjà puîflans paj'.lcur dignité, n'avSicht plut
qu'un pas à faire pour être princes : ^ ce paç fut i
bientôt f^it De -là vient la puiffancc ftcdière des B
èvêqucs de Mayence , dç Cologne, de Ttàycs , de. ^
Vunzbourg, & de tant d'autres en AHçmagnc & eh
Trance.^ Les archevêques^ dç^Rhcims ^ de Lyon ,- de
Beàuvaiç, de L^ngres , de Laon , s'attribuèrent les
droits régaliens. Cette puiffandé des feçcléfiaftiqués
ne dura pas en France : m^îs en: Allemagne elle eft
affermi^ pour longtems. Enfin les moines eux-mêmes
devinrent princes , les abbéà de Fulde , de St. Gai ,
de Kenjpten , de Corbic , &o. étaient de petits rofe
dan^ les pays-oFù quatre^ingt ans auparavant ils défri»
fshtîent de kurs mains quelques terres que des pro«
IH^étaires charitables leur avaient données. Tous cmz
fergneurs , ducs , eemites , marquis , évites , abbés >
rendaient hommage au fouverain. On a longtems cher-
ché i^orfgiTiè do ttf ffouvf mtjnent fédd^b U eft à
croire :^u*H ft'ta a point d'aijttne ^jue t^andennt cou-
"tom« de tcmtes W nations , d'iïtipofer on hommage
"& un trlhi/t au plus feible. On fait (pi'enfuîte les em-
pereurs Rômafn^ dévinèiPent des terres à perpétuiié à
H de certaines condiiloAt. On en treuvedes^exempiks -
& Ec iîij 1
WSWl* ' " liUKBIii il I" ^^^W^Si^
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m^s^it^
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440 DïS FI Ers ET DE l'empire.
dans les vrts à'Alcxvndre Sévère & de Probus. Les
Lombards forent les premiers qui érigèrent des du-
chcsircleians en fief dé leur royaume. SpoJette &
Bénévent furent iTous les rois Lombards des duchés
héréditaires.
Avant CbarUmagne i Tajjllon polTédalt le duché de
Bavière à. condition d*un hommage ; & ce duché eâc
appartenu à fcs defcendans^ fi Charkmagne , ayant
vaipcu ce prince', n'eut dépouillé le père & les enÉios.
Bientôt point de villes libres en Allemagne , ainfi
point de commerce , poiDt de grandes richelTes. Les
villes ^u-^ielà du Rbm n'avaient pas même de mu-
railles^ Cet état ^. qui pouvait être fi puifTant, était
jdevepu fi^ faible par le r^ombre & la diviûon de&s
piaicres , ^ue l'empereur Cornai fut obligé de pro-
{peUre un tribut annuel apx Hongrois , Huns ou Pan-
noni^s , f^hiea contenus par CbarJemagnt , & fournis
depuis p^ les empereurs de la maifon à'Au^icht,
Hais alors ils femblaient être ce qu'ils avaient été
îpus Aitiia. Ils ravageaient l'Allemagne , les Pondères
de la France. lU defcendaient en Italie par le Tyrol ,
après avoir pillé la Bavière , & revenaient enfnite avec
>|çs dépouilles de, tant dc^nations.
^ : G'eft au rçgiiç de Henri PoifeUur que fe débrouilla
;UU; peu Ije chaos ;dje, l'Aiienmgne, Ses limites étaient
-alors le fleuve ,^c l'Odef , la-Bobéme, la Moravie,
.te.Hongi-ie, Içs. rivages du Rhin, de rEfciut , de la
.MofellQ^ de la JVlcuft , foyers Iç feptentrion la Pomé-
r^oie ^ le Hplfieio étaiei?t &s barrières.
; Il Ê4Ut que Henri N{feîatr fût un des rois ^es plus
dignes de réj^ner^ Sou« lui les; feigneurs de rAllc-
ma^ne fi divifôs , font réunis. Le premier fruit de
cette réunion. eft l'afiïan.Qhîffement du tribut qu'on
/payait aux Hopgrois, & une gfaode viAoire remportée
iur .cette n&tii^n «erriUe^ Il jgt ^nfourçrrde murailles
-;^5g^jpsnç5— «
«iMMMiï^
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■alrtiM
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Des FIEFS ET DE t'EMPIKE. 441 ijf
la plupart des villes d'Allèniagne. Il inftitua des mili-
,ces. On lui attribua même Tinvention de quelques
jeux militaires qui donnaient quelques idées des tour-
nois. Enfin l'Allemagne relpirait, mais il ne parait p^«
qu'elle prétendit être Tempire Romain. L'archevêque
de Mayence avait facré Henri roifeieur. Aucun légat
du pape , aucun envoyé des Romains n'y avait afSfté.
L'Allemagne fembla pendant tout ce règne oubliet
l'Italie. . .
* Il n'en fut pas ainfi fous Otbon 7e grofrd^qne les
princes Allemands , les évéques & les abbés élurent
unanimement après la mort de Henri fon père. L'hé-
ritier reconnu d'un prince puifTant , qui a fondé ou
rétabli un état , eft toujours plus puiflant que fon
père , s'il ne manque pas de courage ; car il entre
Jdans une carrière déjà ouverte : il commence o fon
prédécefTeur .a fini. Ainfi Alexandre avait été plut
loin que Philippe fon père , Cbariemagne plus loin
que Pépin , & Ofbon le grand pafla de beaucoup
Henri Poifeleur.
CHAPITRE TRENTE-aUATRlÉME.
D' O T H 0 M k grand , au dixième Jiicle.
OTbon qui rétablit une partie de l'empire de Cbar^
lemagne^ étendit comme lui la religion chrétienne
en Germanie par des -vicftoires. Il força les Danois
les armes. à la main à payer tribut , & à recevoir le
batéme qui leur avait été prêché un fiécle aufara*
vant , & qui était prefqu'entîérement aboli.
Ces Danois ou Normands qui avaient conquis la
Neuftrie & l'Angleterre , ravagé la Fran.ce & l'Aile^
magne V requirent dés loixd' O/i&oi/» U établit des évé-
17
«ft»r«^
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qoet tB Djuincmarck\, i^i fimnt alors fournit à Piff^
çhf rêqiie ic Haaibovrg nictropolitain des églifci bar*
bftTM f fendes depuk peu dans le HoHtein , dam k
Siîrde^ (bioi le Dannemarek. Tout ce ohriftiamfine
eoofifiii^ à ^ins k figi»e de la craiK. Il (bomit la
BÎ^nM après une guerre opiniâtre. C^eft depuis lui
Qiic |g Bohime, & même le Daqnemarelc, furent répo-
n9 pro vifiçttB de ranpîre ; jwda les Daiioit iècooèrant
bientôt le joug.
Oflwn s'était ainfi rendu niomme le pins confidé-
laMc de TOccidcnr; & t'arbitre des princes. Son an*
tortté àttit fi grande , 6c l'état de la France fi déplo-
tablfi ftbrs » que iCooiif 4'^9Mirem^ fils de C&or/fi /«
,^/>jr t de(ce»dant*4e dutritmagne , ^cait venu «a
f48à un CDudliP d^éréques que tenait (Mofi prèsdt
Jttiyifaoe;ee roc de France dit ces propircs nets ré-
iBgf s ^n0 les aâes. ^ J*«i été reconnu roi , & faai,
I» «ar les foArages de tpus lef firi^ncvrs y & de toott
ip unMctb deFrpnce. Huguei toutefois m'a chaffé,
)5 m'a pris frauduleufement , & m'a retenu prifonnicr
„ un an entier , & je n'ai pu obtenir ma liberté qu'en
,5 lui iaiflant la Tille dç LaoA qui reftalt leule i la
„ reine Gerberge , pour y tenir fa cour avec mes fer*
)) yiiews# Slon prétend que y^yt cpnwni^ qudqjM
„ crfme qui méritit un tel traitement , je foi^prét
55 à m'en purger au jugement d'un concile , & fni-
55 vani l'ordre du coi O^bm , ou par le combat fin-
55 gulier. ^^
Co difeoure {«portant prouve à b fois bien des
dbpfei ; ks prétentions des empereurs dp ju^er les roit,
h r^tiTaoce i!QHïon^ la finblefle de la F4M0s,u
MVAttflue des (mmbats fip^liers , & enfin ruHage qni
s'établiflait do doooeflea^ooavroniies^nosiçarie droit
du fang , mais par les fufFrages des feigneurs , ufage
UW^ «f>r^ d^i 0u FcafDCO.
- , X4 iuix 1« paumr A'OtbêH Ig stmii , qaaivl ^
H(0^
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'<^ iWgj
AU DIX li JUt SiéCLE. 44)
qwi tQûjQurs fi^ftieu^ç §: fiiiblf ^ , ne pQuviû«9t ni ©Wïf
à Jfçurs comp»trio^9 , ni être libres , ni fe dé&ndf«
4 Ja fais çpn^re les Sarrazina & les ^Hongroi* t im%
lej9 inçurfions infeit^ient ençor leur payf •
L'Iulîe , qui ànm fes ruines était toujours la p\nn
riche & la plua floriffante contrée de rOocident, était
déchirée (ans cefTe par des tyrans. Mais Rome dam
ces divifions donnait encer le mouvement auK autiei
villes d'Italie. Qu'on fonge à ce qu'était Paris dans
le tems de la Fronde « & plus f nc^i fous CJf^/et fin-
Smféy& è Qe qu'était torfdr^s foii« riijfortiiné Ckar^
h9 /^ ou dans les guerres ciyiles des Xv^çk & dei
Lanpuftre , on aura quelque idée de l'état de Rome an
dixième fiéçlet Le ehaire ppntificjil^ é^t opprima ,
deshonorée 6ç fanglenta. L'éleôiçin ^e^ p^pe^ fe fei-
fait d'une manière dont on n'a guères d'exemples , ni
HVaiit, ni (après.
wmmimmm
5
CHAPITRE TRiENT,B.CINQ.UlâME.
De la fofaaai cm dixième Jtiek^ avant ffi'OTNOll h
grand fe rendît maitre de Rame.
L'Es fçandale^ & les troubles inteftinç qvi affligé*
rent Rçme &, fon ég^fe au dii^iémc fiédç , * qui
continuèrent longtcms îiprè^ , n'étaient arrivé* ni fovi
les empereurs Grecs & Latins , ni fous les rois Gotha,
ni fou^ Les roii Lombarde ^ n^ feus Ck^ietmipt^'-lls
font vifiUement la fuite de l'ans^rchie { âc çotte gneiv
cHie eut fa fourçe dans ce que les ptupies avaient ^t
pour la prévenir , dans la politique jqu ils a? aîwt eue
d'appeller les Francs en Italie. S'ik avaient en effet
poffédé tentes les tcires qu^on prétend qu« CA^/f-
ntagne leur dc^na^ ib) auieieet éfé plus grands four
verains qu'ils ne le font aujourd'hui I/ordtft ^ U
HSdfirW
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ÉÊSS
444 De la ? k v k v t i
1
i
tègle euCTent été dans les élections , & dans le gou^
verhement , comme on les y voit. Mais on leur dit
puta tout ce qu'ils voulurent avoir: i'Iulle fut toô-
jours l'objet de l'ambition des étrangers : le fort de
Rome fut toujours incertain. 11 ne l^aut jamais per-
dre de vue que )e grand but des Romains était de
rétablir l'ancienne republique , que des tyrans s'éle-
vaient dans ritdli^ & d.ns Rvime , que les éleétioas
des^évéques ne fure t prefque jamais libres, & que
tout était abandonné aux fuétions.
Le pape Formofe , fils du prêtre Leott , étant évé-
que de Porto, avait été à la tête d'une faâion con-.
tre Jean VllI^ & deux fois excommunié par ce pape;
mais ces excommunications, qui furent bientôt après
fi terribles aux têtes couronnées, le furent fi peu pour
Formofe , qu'il fe fit élire pape en 890.
Etienne VI ou F/Zauffi fils de prêtre , fucceflcur
de Formofe^ homme qui joignit l'efprit du fanatifoie
à celui de la f tdion , ayant toujours été l'ennemi de
/br»îq/>, fit exhumer fon corps qui était embaumé,
& l-ayant revêtu des habits pontificaux , lé fit corn-
paraître dans un concile affemblé pour juger fa mé-
moire. On donna au m irt un avocat ; on lui fit fon
procès en forme ; le cadavre fut déclaré coupable d'a-
voir changé d'évêché , & d'avoir quitté celui de Porto
pour celui de Rome ; Â pour réparation de ce crime ,
on lui trancha la tête par la m in du bourreau; on lui
coupa trois doigts ; & on le jetta dans le Tibre.
Le pape Etienne VI fe rendît fi odieux par cette
farce auffi horrible que folle , que les amis de For-
'mofe ayant foulevé les citoyens , le chargèrent de
Fers , & rétranglêrcnt en prîfon.
- La fadion ennemie de cet Etienne fit repécher le
corps de Formofe , & le fit enterrer pontificalemeat
une féconde fois. ' * «
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^
AVâiffT Othon le grand. 445
. Cette querelle échaufiait lersefprits. Sergius ///qui
rempIifTait Rome de fes brigues pour fe faire pape^
fut exilé par fon rival Jean IX , ami de Formofe ;
mais reconnu pape après la mort de Jean IX\ il
condamna Fonwq/> encore. Dans ces troubles, Tbiit^
dora mère de Maarozie , qu'elle maria depuis au mar-
quis de Tofcanelie, & d'une autre 27>A)^)ora , toutes
trois célèbres par leurs galanteries, avait à Rome la
principale autorité. '&r^/«/ n'avait été élu que par
les intrigues de Tbiodora la mère. 11 eut, étant pape,
un fils de -^aro;j/V , qu'il éleva publiquement- dans
fon palais. Il ne parait pas qu'il fUc haï des Romains ,
qui naturellement voluptueux , fuivaient fes exemples
plus qu'ils ne les blâmaient.
Après fa mort, les deux fœurs Marozie & Tbio^
ifora. procurèrent la chaire de Rome à un de leurs
fayoris , nommé Landon; mais ce Landon étant mort,
la jeune Tbéodora fit élire pape fon amant Jean X, '
évêque de Bologne , puis de Ravenne , & enfin de
Rome. On ne lui reprocha point , commt à Fonnbfe ,
d'avoir changé d'évêché. Ces papes , condamnés par
la poflérité comme évéques peu religieux, n'étaient
|>oint d'indignes princes* il s'en faut beaucoup. Ce
Jean X^ que l'amour fît pape , était un homme
de génie & de courage ; il fit ce que tous les
papes fes prédécefleurs n'avaient pu faire ; il chàiTa
les Sarrazins de cette partie de Tltalie , nommée le
Gariîlan.
Pour rcuflîr dans cette expédition , il eut TadrefTe
d'obtenir d es. troupes , de l'empereur de Conftantino^
pie , quoique cet empereur eût à fe plaindre autart
des Romains rebelles que des S.^rr^zins. Il fit armer
le comte de Capoue. H obtint des milices . de Tof*
cane, & marcha lui-même à la tété de cette armée,
menant avec lui unj'eune fils de J/araaiV & du mar-
l qtiis AdeîbeYt, Ayant ckafle les mahométaos du voi^
^
r3
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f
44( D B L A P A ]? à u: T i
finagé d« R6610 ) il vot3laU &u(Q délivrer lltadie des
AUemands âe dot «uttes éttatigets.
L'Ifialic «tait envahie preff^u'à la fois par les Bénn^
ri , par Un roi de Bourgogne 1 par un roi d'Arles,
les empéoha tous de dominer dans Rome. Mais
AU bout de quelques années Guido 1 frère utérin de
Jlt^p roi d'Arles , tyran de Tltalie « ayant épouCé
Jlar^iie « toute -pUi flan te à tloHie^ Cette même Ma-
TQMît oonfpira oohtre le pape fi longieids amant de £t
fœttr. Il fut (brpris « mil ^Uh fers , & étouffé enue
deux matelas.
Marozie , maitreffe de Rome 9 fit élire pape un
nommé Léon , qu'elle fit mourir en prifon au bout
de quelques mois. Enfuite , ayant; donné le iiége de
Rome à un homme obfcuf , qid ne vécut que deux
ans , elle mit enfin for la ôhaire pontificale Jean XI
Ton propre fits , qu'elle avait eu de fbn àduhère avec
Sttgjtm m.
Jé4m XI n'avait que vingt -quatre ans quand (a
mère te fit pape ; elle ne loi conféra cette dignité
qu'à condition qu'il s'en tien(batt uniquement aux
fonctions d'étéqud , & qii'il ne ferait que le chapelain
de (a mère.
On prétend que Jïafoiié erapoîfonna alors fon mari
Cuido , marquis de, Tofcàmlk, Ce qui eft vrai , c'eft
qu'elle époufa le frère de fon mari , Hugo , roi de
Lombardie, &lemiren poflcflion de Rome, fc flat-
tant d'être avec lui impératrice ; mais un fils du pre-
mier lit de Marozie fe ihit afors a la tête dés Ro-
mairts conti*e fa mère , chaflfa Hugo de Rotnè , ren-
ferma Marozie 8c le pape fon fils dans le môle ^A^
drien , qu'on app^illc aujourd'hui le château St. Ange.
On prétend que Jean XI y mourut empoifonné.
Urt £^em& Vin , Allemand dé naiffance ^ élu
tn 9}$#^ftlf par> cette haifiMcd ieple fi odieux aux
S^igjiiii m«K>ii «iPtiLSl
il
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^ÊÈÊ
mÊM
\
kVkHiT Otbou le okavd. 447 :
Romains ,. 4ue dans une dâuion U peuple M balafra
le vifage au point qu'il ne put jamais depuis paraître
en pubËC.
. Qtf^lqve lem^ après un pttit-filft de Mâfotiê , nom-
mé OSavien.Sporco , fut élu pape àl'àge de dix-huit ans
paf le crédit de & Bimitle. Il prk It nom ikJecinXIith
mémoire de Jean XI ion oncle* Ceft le premier papt
qui ait changé fon nom à &n avénemem atr pontiflcatf.
U n'était point dans les ordres qoand fir fumHIe Itf it
ponti^. Cet QSmPttn Spareo était patrrce de Rome ^
|t ayant la mémd digitké ()u'ava)t eu Cbûtriemagnt i
il réwiiffait par le fiége pontifical les droits des rfeUt?
puilTinces , & le pouvoir le phw légitln>e. Mafîs H
était jeune , livré à la débauche , & n'était pas d'âil-
Uvrs un puifTant prince.
On s'étonne que {bos taflt de papets (S (bandaient
& fi peu puîffans *, l'eglife romaine ne perdit ni ttt
prérogatives , ni fes ptétertions : mais alors prefqui!
toutes les autres églifes étaient ainfi gouvernées. L<
dei'ge dltalie pouv<:it méprifer de tels papet^ mais
il refpeéUit ta pupauté , d'autant plus qu'il y arfpfrait :
enfin « dans l'opinion des hMames la plate étaïc fa-
crée y quand la;perfonne éti^ oékufo.
Peadafnt que Rome & l^églitb étaient aMi déchi-
rées , Bérenger qu'on appelle k jemte , dHputait Vi*
talie à Htigues d'Arles. Les ItaMens , comme le dît
LuHprand contemporain , voûtaient toAjotkrs avofr
deux maîtres pour n'en avoir réellement aucun : Suffis
& malheureufe politique ^ qui tes faifeit changer dé
tyrans & de malheurs. Tel étale Pétat déplorable de
ce beau pays , \tt(^*Otbon U gi^and y ftit appelTé par
les plaintes de prefque toutes les villes , & même pai^
ce jeune pape Jean XII ^ réduit à feire venir les Alle-
mands qu'il ne pouvait fouffrir.
mUfs^
nw"
=m«âl
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tèéÊ^
ÉÊÊa
44S. Suite de l'empire d'Oxhok
^
CHAPITRE TRENTE-SIXIÈME.
Suite dt fnnfiri ^'OthON ^ ^ de r état de Htalie.
OTbon entra en Italie , & il s*y conduifit comme
Cbarlemagne* Il vainquit Bérettger , qui en affec-
tait la (buveraineté. Il fe fit facrcr & couronner em-
pereur des Romains par les mains du pape , prit le
nom de Céfar & d*jiugujie , & obligea le pape à lui
(aire ferment de fidélité fur le tombeau , dans lequel
on dît que repoft le corps de St. Pierre. On drefTa
un inftrument autentique de cet ade. Le clergé 6c
la noblefle Romaine fe foumettent à ne jamais élire
de pape qu'en préfence des commiffaires de l'empe-
reur. Dans cet adte , Otbon confirme les donations
de Pépin ^ de Cbarlemagne ^ de Louis le débonnaire ^
fans fpécifier quelles font ces donations fi conteftées ;
99 fauf en tout notre puiiTance , dit - il , & celle de
9^ notre fils & de nos defcendans. ^^ Cetiriftrument,
écrit en lettres d'or , foufcrit par fept évéques d'Aile^
maj^ne , cinq comtes, deux abbés & plufîeurs prélats
Italiens , eft gardé encor au château St Ange , à ce
que dit Baronius. La date eft du i} Février 962^
£
Mais comment l'empereur Otbon 'pouvait«-il donner
►ar cet adfce , confirmatif de celui de Cbarlemagne ^
a ville même de Rome , que jamais Cbarlemagne ne
lonna ? Comment Douvatt^il faire nréfent du duché
donna ? Comment pQuvait^il faire préfent du duché
de Bénévent qu'il ne pofledait pas , & qui apparte-
nait encor à fes ducs ? Comment aurait- il donné la
porfe & la Sicile que les Sarrazins occupaient? Ou
Otbon fut trompé , ou cet acte eft faux , il en faut
convenir,
* On dit , & Mènerai le dit après d'autres , que
iLotbaire roi de France , & Hugues Capet depuis roi ,
«(liftèrent à ce couronnement. Les rois de France
étaient
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ET DE L'jÉTAT DE L'ItALIB. 44? W
étaient ea effet alors fi faibles, qo'ih* pouvaient fiervir
d'ornement au facre d'un empereur ; mais le nom de
Lotbaire & de Hugues Captt ne fe> trouve pas dans les
iigoatures vraies ou faulTes de cet aéte, ;
Quoi qu'il en foit , l'imprudence de Jean XII d'à.
voir appelle les Allemands à'Rome> fut la (burce de
toutes les calamités dont Rome ^ritalie furent affiif
gées pendant tant de fiécles.
Le pape s'étant ainfi donné un maître , quand il
ne voulait qu'un protedeur , lui fut bientôt infidèle.
11 fe ligua contre l'empereur avec Bérenger même,
réfugié chez des mahométans qui venaient de fe can^
tonner fur les côtes de Provence. Il fit venir le fils
de Bérenger à Rome , tandis qu'O^bon était à PaviOb
Il envoya chez les Hongrois , pour les foUiçiter à
rentrer en Allemagne ; mais il n'était pas afTez puîjÇi
faut pour foutenir cette a^op hardie , ^ l'empereur
l'était afftz pour le punir.
Olhon revînt donc de Pavîe à Rome , & s'étant
affuré de la ville , il tînt un concile, dans lequel il
fit juridiquement le procès au pape. On affembla léz
feîgneurs Allemands & Romains , quarante évêquM ,
'dix-fept cardinaux dans l'égliffc de St Pierre; &
là en préfence de tout le peuple , on accufa le Se.
Père d'avoir jouï de plufieurs femmes , à furtout d'une
nommée Etîennette^ concubine de Ton pcrc, tjui étaît
morte en couche. Les autres chefs d*accufadon étaient »
d'avoir faif^ évèque de Todî un enfant de dix ans ,
d'avoir vendu les ordinations & les bénéBces , d'avoir
fait crever les yeux à fon parrain i d*avoir châtré un
cardinal, & enfuite de l'avoir fait mourir; enfin de
^ ne pas croire fen Jesvs-Christ , & d'avoir invoqué
*ïe diable : deil^ chofes' qui femblent fe contrctïîre,
''On mêlait donc , comme il arrive prefque toujours*,
de faufles accufations à de véritables ; mais on n^
. Effai furies mœurs, &c.-T^m,t / Jf -
':
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it 4Ç0 O T H D K F H B M I B 11
1
parla point du tout de là feule raifon pour hqudie
lè concHe était aflembic. L'empereur craignait Ëms
doute de réveiller cette révolte & cette confpiradon
dans laquelle les. mccufatèurs mêmes du pape avaient
trempé. Ce jeune pontife , qui avait alors vingt-fept
«ns ,' jpafrut cfépofé -pouf fes indeftes & fés fcandales,
& le fut en effet ^, pour avoir voulu , ainfi que toi»
là Rjomaîns , détruire la puiiTance allemande dans
Rome.
. Otbpu ne put fe rendre lâaitre de fa perfoniie; '
ou s'H le put> il fit une faute en le laifTant libre. A
peine avait -il fait élire le pape Léon Vïll qui , fi
non -en croit le difcours à* Arnaud évéque d'Orléans^,
n^étifit ni eccléfiafttque , ni même chrétien : à peine
en avait-il reçu l'hjOmmâge , & avait^il quitta Rome,
^ont probablement il ne devait pa& s'écarter , que
Jion X'It eut le coinrage de faire foule ver les Ro-
tnains : & oppofant alors concile à concile , on dépoia
Lion FI IL On ordonna que jamais f inférieur ne
f aurai f ôter le rang à fon fupérieur.
te pape , par cette déçifion, n'entendait pas feule-
ment que jamais |es évêques & les cardinaux ne pou-
raient dépofer le pape; mais on dçfignait auffi Tem-
;|^reur , que les çvcques de Rome regardaient tou-
jours comme un féculier ^ qui devait à réglife l'hom-
mage & les ferméns qu'il exigeait d'elle. Le cardinal
nommç Jean , qui avait écrit & lu les accufations
contre le pape^ eut la main droite coupée. On ana.
cba la langue, im coupa le nez & deux doigts à
celui qui avait ferVî de greffier au concile de dépo- •
fition. /
Au refte , dans tous ces conciles , où préfidaient la
faétion & la vengeance, on citait toujours Pévaogile
& les pères , on implorait les lumières du St. Efprit ,
f on parlait en fon nom, on fàifait même des réglemens I
t& utiles i& qui lirait ces aâe9 fans coxm4tre l'hiftoire» i
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ctoirak litc les É^s des (kiots; SijESUS^CHRisir
(était aioÉs re^^sno au monde , qu'ai|rait-11 dit en voyani;
tant d1)ypoçnfie » & (ant d's|boaixna(ion9 dans fpà
f?^life? - ■ ^ . . . ' ^
' Tout cela fe felfiilt prefque fotis l« yen» de l'eah»
pereur ; & qui fait jufqu'oii'le' courage & le refleh-
timçnt du jeune pontifç , le tpul^ycrpe^t.^çs Romainç
en fa faveur, la. haine de3 antres ^ille$ d- Italie contre
les Allemands , euflent4)u .porter cette révolution?
Mais le pape Jetm JÇÙfut âffaflîHé iroî^ tûpU âpréf ,
entre les bra$ d'uni^ femme mariée , par les mains du
mari qui vengeait fa hmife. l\ moUrut de ies bléifdîe?
au bout de huit jours. On a écrit que ne croya^
pas à la religion dont îi était porrtifé ,'il ne vouli|Ç
pas recçvpir i?n ipourai^t 1^ viat^wp.' ^ ^ - :.1
Ce pape , ou plutôt ce pàti^ce , avait feeiremcnt îmî-
nié les Romains , qu'ils oférent , même après fa mort"!
foutenirun fiége, &nefe rpndîreht qu'à'rextrémitél
Otbon^ deux fois vainqueur dé Rome , fût le maîfftf
de l'Italie çpmmç de 1-iiilemâgne. '■'■■ 'i;
Le pape Zeo», créé par lui , le fénat , les prîrtcU
paux du peuple, le çler^jçé dtf Rome, folemnellemertt
affemjjlés dans St. Jean de Latran , conErmèrent à
Fempereur le droit de fe choifir un fucccfTeur au royaui*
me d'Italie , d- établir le pape , & de donner riaveltiT
ture aux éyêqlres. Après tant de traités 8c de fermens
formés par la crainte , W fuîait des empereurs ^u%
àemeurafïÇTit à' Rome pour les Mit obferyefv ', --
A peine Penipereur Otbon était retourfié en A'l«f
piagne, tjue les Romains voulurent j:tfe libres. 41^
mirent en prîfbn leur nouveau çape^^cVéature de rerà'-
J)ereur. Le préfet de Rbn;^ ; les:.tri6i|n^ » le fénat
Voulurent faire reviv^re les 'anciennes loïx-; mais çô
qiM dans un tems eft une envepçife. de Jiéros , de;.
Vient dans d^autres uhe iéyolt?e'4cfé^ftïtûx. ÇfAo»
Ff ij
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f
442 Des empbeeuks Othoh H et ni >
revole en Italie « £dt pendre une ^rtie do (enat:*
d^le préfet de Rome , qui avait voulu être un Bmius y
rat fouetté dans les carrefours, promené nud fur un
âne, & jette dans un cachot , où il mourut de &lm. ^
CHAPITRE TRENTE-SEPTIÉME.
Def mfereurs OtKOK II ^ III , 6f de Rom
TEl fut à -peu -pris Peut de Rome fous Ofbon k
grande OtbonJI & Otbon lit Les AllcmaTids
tenaient les Romains fubjugués , & les Romains bri-
{aient leurs fers dés qu'ils Tç pouvaient
' Un pape élu par l'ordre de l'empereur , ou notnmc
Esc lui , devenait Tobjet de l'exécration des Romains,
'idée de rétablir h république , vivait toujours dans
leurs cœurs ; mais cette noble ambition ne produifait
que des mifères humiliantes & aSreufes.
. Ophon II marche à Rome comme fon père. Qud
gouvernement ! quel, empire ! & quel pontificat ! Un
conful nommé Crefcentius ^ iîls du pape Jean X^ &
de la fameufe Marozie ^ prenant avec ce titre de
oonful h haine de la royauté , foulev^ Rome contre
Otbon IL II fit mourir en prifon Benoif VI ^ créature
de l'empereur; & l'autorîté d' 0/i&o«, quoîqu'éloiçnc,
ayant dans ces troubles donné avant fon arrivée la
chaire romaine au chancelier de /l'empire en Italie,
qui fut pape fous Ip nom de Jean XXV r ce malheu-
feux cape fut une nouvelle vîdtîme que le parti Ro^
inain immola. Le pape Boniface Vit créature du con-
ful Crefcentîut ^ déjà fouille du fang de flen'oip F/,
fit encore périr Jean XIV. Les tcms de Caiîguîa ,
de 'Néron ^ de Vitetlius , ne produîfirent nî des in-
fortunes plus déplorables, ni de plus grandes barbsr
mmmi I il wmw 1 , iiiiiSi
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Ve!$MÊÊaÊÊÊÊÊmÊmÊÊBamÊàÈÈimâfaiei
B T D B K O JÉL B.
ries ; mais les attentats & les malheurs de ces papes
font ofifcurs comme eux. Ces ttagédiesy&ngtantes fe
jouaient fur le théâtre de Rome , mais f^tit & ruiné ;
& celtes 4es Cèfarî avaient pour théâtre le monde
connu.
Cependant , Oiboft tî arrive à Rome en 981. Les
papes aucrefbis avaient fait venir les Francs^xn Italie,
& s'étaient fouftraits à Tautorilé des empereurs d'O-
rient Que font-ils maintenant ? Ils eflayent de re-
tourner en apparence à leurs anciens maîtres ; &
ayant imprudemment appelle les empereurs Saxons «
ils veulent les chaflTer. Ce même Bvniface VII était
allé à Cooftantînople preffer les empereurs Bafilt Se
' Conftafitin de venir rétablir le trône des Céfarr. llo-
me ne favaît ni ce qu'elle était , ni à qui elle était.
Le conful Crefcenttus & le fénat voulaient rétablir
"la république. Le pape ne voulait en effet ni répu-
blique , ni maître. Otbon II voulait régner. 11 entre
'donc dans Rome; il y invite à dîner lés principaux
'fénateurs , & les partifans du conful : & fi Ton en
• croit Geofroy de Viterbe , il les fait tous égorger au
^milieu d'un repas. Voilà le pape délivré par fon en^
nemi des fénateurs républicains. Mais il faut fe dé-
livrer de ce tyran. Ce n'eft pas aflez des troupes de
l'empereur d*Orient, qui viennent dans la Fouille,
le pape y joint les Sarrazins. Si le maifacre des
fénateurs dans ce repas fanglant rapporté par 6eo-
froy eft véritable , il valtiit mieux fans doute avoir
les mahométans pour proteAeurs , que ce Saxon fan-
-guinairô pour maître. U eil vaincu par les Grecs;
il l'eft par les mufulmans ; il tombe captif entre leui^
mains , mais il leur échappe; & profitant de la divi-
(ion de fes ennemis , il rentre encox dans Rome, où
Û meurt ea ^8j*
Après fa m<wt le conful Crefitntîus maintînt quel-
ifùt eems I ombre de la république Romaine. U ch^fla ^
»tiu fiége pontifical Grigoirt V neveu de l'empcreui: ^ »
Ff iij i3j
ti^'^m^ Il Ml Hit 'PiifASift
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«SS*ÎI||
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S 4f4 ÛËë SMEÈRÈUK5 OxdOK Il^ET lit » |
Ùfbon III. Mais eoM Rome fiit encore affiégée &
prifti Crefcejitiui v attiré hors du château St Ange
fur refpérance d'un accommodement & fur la foi é^
fermens de Tempereiir , eut la. tête tranchée. Son
corps fut pendu par les pieds : & le nouveau pape^
élu par les Romains fous le nom de Jean XV ^ eut
les yeux crevés & le net coupé. On le jetta en cet
état du haut du château St. Ange dans la place.
Lés Romains renouvellèrént alors à Otbm lîllts
ferment faits à 0$bo» I& i CbarUmagiu $ & il afls-
f|na aux papes les terres de la marche d'Ancone poui
butenir leur dignité.
Après les trois Othom , Ce combat de la domina-
iion allemande & de la liberté italique refta long-
tems dans les mêmes termes. Sous les empereurs Jfeuri
II di Bavière , &, Conrad II le faliquf t dès qu'un em^
pereut était occupé en Allemagne , il s'élevait un
parti en Italie. Henri II y vint , comme les Otbons^
difliper des fa Aions , confirmer aux papes les dona-
tions des empereurs , & recevoir les mêmes homma-
ges. Cependant la papauté était à l'encan j ainC ^ue
prefque tous les auttes évéchés.
Benoit Vllt, Jean XIX, l^ackctérènt publique-
ment Tun après l'autre : ils étaient frères de la mai-
foit des marquis de Tofcanelle , toujours puiflante à
Rome depuis le tems des Marozie & des Tbiodoroé
Après leur mort s pout perpétuer le pontificat dans
leur maifon , on acheta encore les fuffrages pour un
enfant de douze ans. C'ét»t Benoit IX qui, eut l'é-
ttréché de Rome de la même hianière qu'on voit en-
tore aujourd'hui tant de familles acheter > mais en
iecret , des béhéficés pour dés enfans.
Ce défordire n'eut point de bornés, on vît fous
le. pontificat de œ Benoit IX deux autres papes élus
m
"9i^ft9%
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ggtH' Miaulai L. i ^wM^a
fe ; E T D E R O M B. 45$ \
k prix d'argent ) & trois p^^s i^na> Rome g'excomf
munier réciproquement ; mais par , une conciliation
hcureqfc , qui, (étouffa une guerre civile , ces trois
papes s'accordèreftt à partager les revenus dol^eglife,
i& à vivre en paix chacun avec fa maitrefle.
Ce triumvirat pacifique & finguliet ne dura qu^at»-
tant qu'ib eurent de l'argent ; &, enfin , quand ils
n'en eurent plus , chacun vendit fa part de la papauté
au diacre Gratien , homme de qualité , fort riche.
Mais comme le jeune Benoit IX avait été ilu long-
tems avant les deux autres, on lui laifla par: un ao-
cord fplemnel la joulffance du tribut que l'Angleterre
payait alors à Rome , qu'on appellait le dénier de
St. Pierre , à quoi un roi Danois d'Angleterre , nom-
mé Eteholft ^ Edeholf ^ ou Etbeîulfe ^ s'était fournis
en 8Ç2.
Ce Gratien qui prit le nom de Grégoire TI, jouit- »
fait pailiblemeitt du pontificat , lorfqoe l'enipereur 1
Henri III fils de Conrad II le faiique , vint à Rome.
Jamais empereur n'y exerça plus d'autorité. Il
txila Qrégoire VI ^ & iromma pape Suidger toïi chan-
celier , évéque de Bamt)erg , fans qu'on ofat murmurer.
Après kl mort de cet Allemand > qui parmi les pg-
pes eft appelle Clément //, l'empereur, qui était en
Allemagne , y créa pape un Bavarois nommé Popon :
c'eft Damafe II qui avec le brevet de Tempereiir
alla fe faire reconnaître i Rome. Il fut intronifé
malgré ce Benoit IX qui voulait encor rentrer dai^s
la chaire pontificale après l'avoir vendue.
^ Ce Bavarois étant mort vlngt^trois jours après fon
intronifation , l'empereur donna la papauté à fon cou-
fin Brunon de la maifon' de Lorraine , ^u'il tj»ns-
fcra de Tévêché de Toul à celui de Rome par une
autorité abfeluc« Si <^te autorité des empeieurs m,
|y Ff iiij JSt
aflSiTjii immamm uftS»
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mft^
i
4Çtf Des empereurs Othon II et m,
avait duré , les papes n'eulTent été que leurs chape,
lains ) & ritalie eût été efclave.
Ce l)Qntife prit le nom de Lion IX ; on J'a mis
au rang des faints. Nous le verrons à la tête d'une
armée combattre les princes Normands fondateurs du
royaume dis Naples , & tomber captif entre leurs mains.
Si les empereurs euITent pu demeurer à Rome , on
voit par la faiblefTe des Romains > par les divifiops
de l'Italie , & par la puiflance de l'iÛlemagne , qu'ils
euiTent été toujours les fouverains des papes , &
qu'en effi^t il y aurait eu un empire Romain. Mais
ces rois éleâifs d'Allemagne ne pouvaient fe fixer
à Rome loin des princes Allemands trop redoutables à
Jenrs maîtres^ Les voiiins étaient toujours prêts d'en-
vahir les frontières. 11 falait combattre tantôt le^
Danois , tantôt les Polonais & les Hongrois. C'eft
ce contrepoids qui (au va quelque tems l'Italie d'un
joug contre lequel elle fe ferait en vain débattue.
Jamais Rome & l'églîfe latine ne furent plus mé-
prifées à Conftantinople que dans ces tems malheu-
reux. Luitprand l'ambafTadeur di'Otbon I auprès de
l'empereur Nicipbore Pbocàs , nous apprend que les
habîtans de Rome n'étaient point appelles Romains,
Inaîs Lombards , dans la ville impériale. Les évé^
ques de Rome n'y étaient regardés que comme des
brigands fchifmatiquèS. Le féjour de St. Pierre à
Rome était confidéré comme une fable abfurde fon-
dée uniquement fur ce que St* Pierre avait dit dans
une de fes épitres y qu'il était à Babilone , & qu'on
s'était avifé de prétendre que Babibne iignifiait Ro-
me : on ne faifait guères plus de cas à Conftantinople
«des empereurs Saxons i qu'on traitait de barbares.
Cependant la cour de Conftantinople ne valait pas
mieux que celle des empereurs Germaniques. Mais
•il y avait dans ^empire Gr^c plus de commerce
Mais I
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w^n^
B T DE Rom e.
41^7
d'iAdlidrie , de richelTes /que dans l'empire Latin !
tout était déchu dans l'Europe occidentale , deptiis
lès terts brillans de Cbarîemagnel La férocité & la
débauche , l'anarchie & la pauvreté étaient dans tous
les états. Jamais l'ignorance ne fut plus uhiyerfelle.
Il ne (e éifait pourtant pas plus de miracles que
dans d'autres tems ; il y en a eu dans chaque fiécle,
& ce n'eft guères que depuis Tétabliffement des aca^
démies des foiences dans l Europe , qu'on ne voit plus
ait miracles chez les nations éclairées ; & que fi Ton
en voit , la faine phyfique les réduit bientôt à leur
valeur.
%
L^
CHAPITRE TRENTE-HUITIÉME.
De la France , vers le tems de HUGUES Capkt.
PEndant t|ue l'Allemagne commençait à prendre ainfi
une. nouvdle forme d'adminiftration , & que Rome
& l'Italie n'en avaient aucune » la France devenait ,
comme l'AUemagne , un gouvernement entièrement
féodal.
Ce royaume s^étendait des environs de TEfcaut &
de la Meufe jufqu^à la mer Britannique , & des Py-
rénées au Rhône, C^était alors fes bornes ; car quoi-
que tant d^hiftoriens prétendent que ce grand fief
de la France allait par-delà lesPyrénéès jufqu'à TEbre,
il ne parait point du tout que les ECpagnols de ces pro-
vinces entre TEbre & les Pyrénées fuÏTent fournis au
faible gouvernement de France en combattant contre
les mahomctans.
La France , dans laquelle ni la Provence ni le Dau*
phiné n'étaient compris , était un aîTez grand royau-
me ; mais il s'en falait beaucoup que lé roi de France
fût un grand fouverain. Louis , ie dernier des deC
ccndans de Cbarlemagne ^n^avàit ptos pour tout do-
1
M^
lim'
'iUPi^^
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n
'
4^8 De h k Franc E»
"1
maine que les villes de Laoïi & de Soiflbns , & qoel-
<^ies terres qu'on lui conteftait. L^hotnniage renda
par la Normandie ne fervait qu'à donner au roi im
valTal qui aurait pu foudoyer fon maître. Chaque pro-
Tjuice avait ou &s comtes ou fes ducs héréditaires ;
celui qui n'avait pu fe (aifir que de deux ou trois
bourgades ^ rendait hommage aux ufurpateurs d'une
province ; & qui n'avait qu'un château , relevait de
celui qui avait ufurpé une ville. De tout cela s'était
fait cet aflbmblage monftrueux de membres qui ne
formaient point un corps.
Le tems & la nécéffité établirent que les feignears
des grands fiefs marcheraient avec des troupes as
fecours du roi. Tel feigneur devait quarante jours
de fervice , tel autre vingt -cinq. Les iM^rière-vaT-
{aux marchaient aux ordres dé leurs feigneurs im-
médiats. Mais fi tous ces feigneurs particuliers fer*
valent l'état quelques jours , ils fe faifaient la guerre
entr'eux prefque toute Tannée. En vain les conciles,
qui dans ces tems de crimes ordonnnèrent fûuveot
des chofes juftes , avaient réglé qu'on ne fe battrait
point depuis le jeudi jufqu'au point du jour du lua*
di , & dans les tems de Pâques & dans d'autres (blein-
nités ; ces réglemens n'étant point appuyés d'une juf-
tîce coërcitive , étaient fans vigueur. Chaque château
étarit la capitale d'un petit état de brigands ; chaque
monaftère était en armes : leurs avocats , qu'on ap-
pellait avoyers , inititués dans les premiers tems pour
préfenter leurs requêtes au prince & ménager leurs
affaires , étaient les généraux de leurs troupes : les
moifTons étaient ou brûlées , ou coupées avant le
tems, ou défendues l'épée à la main; les villes pref-
que réduites en folitude , & les oampagnes dépeo*
plées par de longues famines.
Il femble que ce royaume, fans chef, fans police,
{ans ordre , dût être la proie de l'étranger ; mais une
anarchie prefque femblable dians tous les royaumes,
it^Hm^^
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Htjs»».irt.., ■ I , I ■■ lai n ■ 'nfjB^
1
VERS LB TEMS DE HuGUES CaPET* 4^9
fit fa fùvtti ; & quand fous les Oibôns l'Allemagne
fut plus à craindre i les guerres inteftines l'occu*
pèrent
C'eft de ces tems barbares que nous tenons Pufage
de rendre hommage pour ui>e maîfon & pour un boyrg
au (eigneur d'un autre village. Un praticien , un mar-
xhanaqui fe trouve pofleiTeur d'un ancien fief, reqoit
foi & hommage d'un autre bourgeois ou d'un pair
du royaume qui aura acheté un arrière -fief dans
fa mouvance. Les loix de fiefs ne fub&ftent plus ; mais
ces vieilles coutumes de mouvances , d'hommages ,
de redevances fubfiftent encore : dans la plupart des
tribunaux on admet cette maxime. Nulle terre fans
Seigneur : comme fi ce n'était pas affez d'appartenir à
la patrie.
Quand la France ^ lltalie & l'Allemagne furent
aînfi partagées fous un nombre innombrable de petits
tyrans , les armées , dont la principale force avait
été Tinfanterie fous Cbarlemagne , ainfi que fous les
Romains i, ne furent plus que de la cavalerie. On ne
connut plus que les gendarmées \ les gens de pied
n'avaient pas ce nom , parce qu'en comparaifon des
hommes de cheval ils n'étaient point armés.
Les moindres pofTcffeurs de châtellenîes ne fc met*
taient en campagne qu'avec le plus de chevaux qu'ils
pouvaient; & le fafte confiftait alors à^mener avec
foi des écuyers , qu'on appella vaslets , du mot vaf-
falet , petit vaffal. L'honneur étant donc mis à ne
combattre qu'à cheval , on prît l'habitude de porter
une armure complette de fer , qui eût accablé un
homme à pied de fon poids. Les brafTars , les cuiflars
furent une partie de l'habillement. On prétend que
Cbarlemagne en avait eu ; mais ce fut vers l'an looô
.que l'ufage en fut commun.
Quiconque était tiche , devint prefqu'invulnérable
^'^•a^^^ ^w^JRtoMit iits3^
i!
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I'
<9(VtaÉfMMiiMHHHiâllk
! 4^ De tjt r R A » C £»
=«îî^»8i
à la guerre ; 8c c'était aloft qu'on fe fervît plus que
.jamais de maflues , pour affommcf ces chevaliers que
les pointes ne pouvaient percer. Le plus grand coca,
merce alors fut en cuiiaflcs , en boucUcrs, en cafqoei
ornes déplumes.
Les payfans qu^on traînait à la guerre , (culs cxpofc!
& mepnfcs, fervaient de pionniers plutôt que de com-
battons. Les chevaux , plus eftimés qu'eux , furent
bardes defer , leur tête fut armée de chtmfrcins.
[ On ne connut guère alors de loîx que celles que
Jesj>lus puiflans firent pour le fervice des ficft. Tous
les autres objets de la juftîcc diftributive furent aban-
donnes au caprice des maitres^'hôtel , prévôt! , bailliSi
nommes par les poffefleurs des terres.
tes fénats de ces villes , qui fous Cbarkma^ *
fous les Romains avaient jouï du gouvernement mn-
mcipal , furent abolis prcfque partout Le mt)t de
^euhr^ Seigneur , aflFedé longtems à ce« principaux
?V^^^^ villes , ne fut plus donné qu'aux pof-
Tcfleurs des ficft.
Le terme de pair commençait alors à s*întroduîrc
datîs la langue gêtUo-tudcfque, qu'on parlait en France.
On fait qu il venait du mot latin par^ qui fignific ig^
on coTïfrên On ne s'en était fervi que dans ce fcns
fous la première & la féconde race des rois de France.
Les enfens de Louis le débonnaire s^zppellèrent Para
dans une de leurs entrevues , Tan 8^i » & longtems
auparavant Dagobert donne le nom de Pairs a àes
mornes. Godegrand, évéque de Metz, du tems de
Càc&hmapne, appelle Pairs des évêques & des abbcs,
ainfi que le marque le favant Du Congé. Les vaffaox
d un même fcîgneur s'accoutumèrent donc à s'appd-
1er Pairs. ^^
=mi&
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p-
VERS LE TEM8 DE HUGUES CAtET. 45l.
Alfred le grand avait établi en Angleterre les jurés :
c'était des pairs dans chaque profeffion. Un homme
dans une ca^fe criminelle choifiiTaic douze hommes
de fa profeflbn pour être juges. Quelques TafTaux en
Jrance en ufèrent ainfi ; mais le nombre des pairs
n'était pas pour cela déterminé à douze. Il y en avait
dans chaque fief autant que de barons , qui relevaient
du même feigneur , & qui étaient pairs entr'cux, mais
non pairs de leur feigneur féodal.
Les princes qui rendaient un hommage immédiat
à la couronne , tels que les ducs de Guiennc , do
Normandie, de Bourgogne , les comtes de Flandres,
de Touloufe , étaient donc en effet des pairs de
France.
Hugues Cafet n'était p^s le moins puiflant H poffé-
dait depuis longtems le duché de France , qui s'éten-
dait jufqu'en Touraine. II était comte de Paris. Dé
vaftes domaines en Picardie & en Champagne lui don«
naient encor une grande autorité dans ces provinces.
Son frère avait ce qui compofe aujourd'hui le duché
de Bourgogne. Son grand-père Robert & fon grand-
oncle Eudes ou Odon^ avaient tous deux porté la
couronne du tems de Charles lejîmple. Hugues fun
Îère , furnommé Tabbé , à caufe des abbayes de St.
lenis , de St. Martin de Tours , de St. Germain^
des-trés , & de tant d'autres qu'il poffédait , avait
ébranlé & gouverné la France. Ainfi l'on peut dire
Î|ue depuis l'année 910 où le roi Eudes commenqa
on règne , fa maifon a gouverné prefque fans inter-
ruption ; ^ que fi on excepte Hugues l'abbé , qui ne
voulut t)as prendre la couronne royale , elle Totme
une fuite de fopverains de plus de huit cei^t cinquante
ans : filiation unique parmi 4cs rbis.
On fait comment Hugues (ktpet 9 duc de Fi«nc^-,
comte de Paris , enleva la couronne au duc Charités
onçic au dernier roi Lwis F. Si les fuffrages eu^eçif
^^1^01^
«^
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'wt^m
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1
^ 462 Delà Frakce,&c.
i ' ' — '
été libres , le fang de Cbarlemagne reTpcdé , & le
droit de fucceffion aufli facré qu'aujourd'hui , Charles
aurait été roi de France. Ce ne fut point un parle-
ment de la nation qui le priva du droit de fes an-
cêtres , comme Pont dit tant d'hiftoriens , ce ïut ce
3'ui ^it & défait les rois» Ja force aidée de la pru-
ence.
Tandis que Louis ce dernier roi du fkng Carlovm^
g'fff , était prêt à finir, à l'âge de vingt -trois ans^
vie obfcure par une maladie de langueur , Hugues
Cafet aflemblait déjà Tes forces; & loin de recourir
à l'autorité d'un parlement , il fut difllper avec fei
troupes un parlement qui fe tenait à Conipiégne pour
afTurer la fucceffion à Charles, La lettre de Gerbert
depuis archevêque de Rheims & pape fous le nom de
JSyheJlre II ^ déterrée par Duchèfne\ en eft un témoi-
gnage autentîque.
Charles duc de Brabant & de Hainaut , états qui
comportent la baffe Lorraine , fuccomba fous un
rival plus puiffant & plus heureux que lui ; trahi
par Tevêque de Laon , furpris & livré à Mugues Capes ,
Il mourut captif dans la tour d'Orléans ; & deux en-
fans mâles qui ne fmrent le venger V mais dont Tun
eut <:ette bsrfle Lorraine, furent les derniers princes
de la poftérité mafcultne de Charlemag^e^ Hugues
Capes i devenu roi de fes pairs , n'en eut pas u]>j)1ms
grand domaine.
CHAPITRE TRENTE-NBUVIÉ ME,
Efo/ de la France au»,4ixiime ^onzième Jiècles. Ex^
çommunicaSion du roi RoBERT.
JLi^bfcurs ilepiiis Charles le gros jufqu'i Pbiiifpe I
Jl arrière-petit-fils de HugUes Capet , près de deux cent
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||gt."!l , 'T '1! €W KW^
E T A t D B L il. F R A M C E, &C. 4^3 C
cinquante années. Nous verrons fi les croi&dés, qui
flgnaièrent le règne de PMipp^ / à la fin du oriziéme
fiécle , rendirent la France plus floriflanea Jttais dsos
l'eQ>ace de tems dont je parle ^ tout ne fpt que con* ,
fufion , tyrannie , barbarie & pauvreté. Chaque fei*
gneur un peu confidérable , faibit battre monnoie>
'mais c'était à qui l'altérerait. Les belles manufaâures
étaient en Grèce & en Italie. Les FranCfais ne pon<»
vaient les imiter dans les villes fans privilèges , &
da^s un pays fans union.
De tous les événemens de ce rems , le pins digne
de l'attention d'un citoyen , eft Texcommunioation
du roi Robert. Il avait époufé Bertbe fa coufine au
quatrième degré ; mariage en foi légitime , & de plus
néceflaire au bien de Pétat. Nous avons vu de nbs
jours des particuliers époufer leurs nièces , & acbe-^
ter du prix ordinaire les difpenfes à Rome , comme
fi BAme avait des droits fur des mariais qui fe fontià
Paris. Le roi de France n'éprouva pas jutant d'in-
dulgence. L'égHfe romaine , dans l'aviliftement & les
fcandales ou elle était plongée , ofa impofer au rèi
une pénitence de fept ans, lui ordonna de quitter
fa femme , l'excommunia en cas de refus. Le pape
interdit tous les évéques qui avaient afliité à ce ma-
riage , & leur ordonna de venir à Kome lui deman-
der pardon. Tant d'infolence parait incroyable ; mais
l'ignorante fuperftition de ces tems peut l'avoir fouf-
ferte,& la politique peut l'avoir c^ufée. Grégoire V
qui fulmina cette excommunication /était Allemand»
& gouverné par Herbert , ci '-* devant ^archevêque de \
, Rheims , devenu^ ennemi de la maifgn de France.
L'empereur Otbon IJI peu ami de Robert , aflifla
lui-même au c6tK:ite où l'excommunication fîit pro-
noncée. Tout cela fait croire que la raifon d^tat eût
autant de part à cet attentat que le fanàdfmîe.
• * r • j
Les hiftorîens diîent que attte eîccômmunîcatîdn r
fit en France tant d'efitt , que tous les xotfrdfaHs
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r
a^dfe.
4
il
i
4^4 ETATDBLAFllAlfCB
do roi & fes propres domeftiques l'abandonnèrent,
& qu'il ne lai refta que deux ferviteurs , qui jettaicnt
an feu le refte de fes repas , ayant horreor de ce
qu'avait touché un excommunié. Quelque dégradée
que fût abrs la raifon humaine , il n'y a pas d'appa-
rence que rabfurdité pût aHer fi loin. Le premier
auteur qui rapporte cet excès de l'abrutiAfement de
la cour de France , éft te cardinal Pierre Damien ,
qui n'écririt que foixante-cinq ans aptes. Il rapporte
qu'en punition de cet incefte prétendu , la reine ac-
coucha d'un monftre ; mais il n'y eut rien de monf-
trueux dans toute cette affaire , que l'audace du pape ,
&'la faibleffe. du roi qui fe fépara de fa femme.
Les excommunications , les interdits font des fou-
dres qui n'embrafent un état que quand ils trouvent
des matières combuftibles. Il n'y en avait point alors;
mais peut - être Robert craignait « il qu'il ne s'en
formât.
La condefcendance du roi Robert enhardît tefle-
ment les papes , que fon petit-filç Philippe I fut tu
communié ^omme lui. D'abord le fameux Grégoire Vil
le menaqa de le déporer en xo7s s'il né fe juftifîaitde
l'accufation de fimonie devant fes nonces. Un autre
- pape l'excommunia eiî effet Philippe s'était dégoûté
de fa femme , & était amoureux de Éertrade , époufe
du comte à* Anjou. Il fe fervit du miniftère it$ ioix
pour caffer fon mariage , fous prétexte de parenté:
& Eertrade fa maitrefle fit caffer le fien avec le comte
HAf^ou , fous le même prétexte.
Le roi & fa maitreffe furent enfuite mariés folen-
nellement par les mains d'un évéque de Bayeux. Ik
liaient condami^ables ; mais ils avaient au moins
rendu ce refpeifil: aux Ioix , de fe feryîr d'elles pour
couvrir leurs fautes. 'Quoi qu'il en foit , un pape avait
.excommunié Robert , pour avoir époufé & pareote ,
i & un autre pape excpmmunia Philippe pour av(^r
quitte
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AUX DIXléJKE'ET ONZléMETSléCLES.
4«f t
Quitté fa parente. Ce qu'il y a de^{>lo« fingulièr ^ c^eft
q};^' Urbain II qui pronomja cette fentencc , la pro*
nonqa dai^ Içs. propres états du roi^ à £lerinont en
Auvergne , où il venait chercher Un afyle , & dan«
ce même concile oô noujî vçrrons qu'il prççh^ \%
çroifade,
Cependant , il ne parait point t^Mt Philippe evcooir
munie ait été en.horreur à &s fujets ; Veft une rallbn
de plus pour douter de* œt abandon généiral où V911
dit que 1^ |0i fybprp avaiç 4^ rédqitv
' Ce qu'il y eut d'afTez remarquable , c'eft le mârlagf^
du roi Hemri^hxe de Fbilifp9 \ avec atie princeflede
Ruflie I fille d'on duc nommé JarusHai. On ne fait Q
cette Ruffie était la Ruflie noire, la. blanche , au 1^
rouge. Cette princ^fle était relie née idplitre ; oi|
chrétienne, ou grecque? Cfaangea>4C4«lle de rdigion
pour épeufer un roi de France ? Comment dans ipi|
tems ou la communication entre let états de l'Ëuropf
était fi rare , un roi de F'rdbce::catwii cbnnaiflancQ
d'une piinceffe du pays des mdens Scythes $ Qui
piropofacet étrange marjagetjL'biikjre de ces (ço^f;
cbfcurs ne fàdsfait à aucune dç cçs ^ueftions,
H eft à erdre que le roii^des Ftanqa^ Henri Jfra^
chercha cecte idliance , afin de ne pas s^expoftr. i
des querellps ecdiéfiafiiques. Dè> toutes les fupérâi^
tions de ces tems-là, ce n'était pas la moins nuifi/
ble au bientdes états , qaexetle de ne poiuioix lépoii^
fer fa parente au feptiéme degré. Frefque tpus lef
fouveratùsde l'Europe étaient psrrent d^ Menri, Qjloi
qu'il en fok^ j^i^Mf fille d'un JAteislau^ duc inconn»
d'une Ruffiebra ignorée, fût jreinâ de FraQcf.ij& i)t
cft à remarquer jqu'après la Mtt.de iprl mari, eU4
nfeut p0iQtiIlaj:Qgence,ft; n'^précepdit point., («ei
loix ouihgeiil rielon les te«ii.:<6t rut le^comtedhf
Flandiieviin'déa vi^ffauK du roysbime!» q)ii en fatré:^
gent. La Jteiee.ye^Te fe reiwir» .^.jjn çpmfç dQl
P ÊJftiifuT ifî nfmrs , 6Pc. Tom, I, Pc
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^ 4<d Et AT BZ Lk Vkak^m !
En général , fi on ooopare ces .fiécles ao nAtr^t
fis yaraillcnt renfançe ^o jjcnre biunaih , 'd^ns tout
ce qui regarde le souVemement , h religion ,Ic com^
mcrce , les arts » les droits des citoyens.
Ceft fiirtout ira (peAade étrange qne i'ai^USb-
aient 9 le fcandale de Rome , & ùl puiflance d'opi*
nion fubfiftant dans lésants au milieu de (an ,9i^ù
fement, cette foule de papes créés par les empereurs «
Kefidavage de otf ^^nt^ , lear polUrAir immeofe ç^
w'ils £>nit malties ,& l'exçeflif abus 4e pe fK»i>yoîr.
Sjyh^^II^ /Gerbnî , qe iàVaot du àbifim^ ^çcle ,
qui .pa(Iii jpour on ^nagiden , putcc qu'jua hx^ lui
avait enfeigné ^arithmétique , & quelques élé^eiis d^
féofnétrie • ce précqpiteur à^fHbm Ift diafle de foa
archeréche de Rheinis du tems du roi Bfibert « nomn^
pape par rempereur Mkn Ulcùnkir» jeacor la ré-
putation d'un nomaeioleti^9 A d'un p^pe fkgp- €e-
peiîdillit, vpid ce que rapjporCe h dirôdiquc d'4^
'« C&i^Moâ,Mi[a>fitqpipoxaia&ffmato^
Un fdgneur de France Gt^y^ vicomte de Limoges,
dispute qùêlqii^ droits '4è i^abbaye ile finSnti^ç à
an Ûrimoàd évoque (Fângouléme ; l*éf ^flue Texcm-
mnnie,;1e vicomte iiâthiettterifièqiieen|)rifi»i. Cas
violences nci^roiniQs hsdcfiA <tcès comautnes daiU
tonkf l'£usQpr, oA la ^ideaoe toaait liai ds loi.
I^ refpeapour Ron^bitait alors fi grarid dana ceu
te anarchie uaivérfcUé, que Févéque ibiâ defapri*
m , (ft k Vicomte de Limogef aBèrent tons deaz
de li'nince à Rome plaider leur caufe de?aitt le pape
fyà>ejhf ti eh plein epînfiftoire. Le cnuaU^on t <^
fctaidur fut oMlamaé à être tiré è quatre «dievaoz;
ftlaftntenoedkt été exécutée, ^il ne Sfe tàt^ndé.
Vtt(é$ manh'pm ce i^(«ae|r , ta fidftne empî^
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Îiord3 9 Al foqmilGon poyr Rome , U f^ntpncp au(Q
àrbarç ^M'^fuiriiiç du çonfiftoifc , |cîgoçp| yarfaitpr
Au r^ , le roi ie$ fixais ^^pi | ^Iç 4c Aï/iiprf ^
IM P4ri/ip;»«|||l9 ^ç #^^> >^c îtfi;^t coQQus par aucuo
éy4liemF>^^ m(^9pr^|f } m^ ip leur tqos , leur$ yfff,
Noffs fitlipi» ypir ^A9iip^$ f^4w^ a?anturierf df
Il provifipf d^ Jjforip^t^di^ 9 fa^ bi^ , fans terres p
$ pnefqu^ âni I^ÛâM , fon^ér^t la monarchie dp^
dieju^ Si!?iîp? 1 «u> ^fp»M f¥J «n fi grand fu^et ip
^ifcprdc ^ntrç l^ fi^purfuji df Ifi dynaftie de Suabf
-* leij papj^ , fçitrj? l^s i^^ifcn^ 4'AnjoM * d'Af ragpp.,
«WUre. ç.e}te 4-A»triçb|5 $ 4^ ?r»l»çe,
QUand (^fimiptu pfîf 1$ îipm d^empereur ^ ce
pom pp^i donna gue pg que fes armes pou,
vaîent lui auurer. Il fe prétf^f^^l^ dumm^ceur fu?
prjime dy duché de Qénéyent , qui c^tnpor^^ic alors
UX^ graodjpp^tie ^ i^t%t^ WPIIM aujourd'hui Tous
\ç nowi f^q rû^4uai« dp STapJgs. l^s ducp de BérçT
jy^nj a pli^ç Jieureuy flWf lç.8 fpiiJ Lwiihîirds , lui refif-
t^ren^ âiofi qp'i fc? ruejppj(ïiç^;[$, f.9 pouillc , la Ça-
'JabriB , )[è Siçflf pifçnt cri pfôîe aias incurfion* dçç
.^rabcç. Lp^ f mpereurç prcçg ^ t^t' 'S ^e dîfputaîpm
en vaîp la fq^yçraippjiç jjç fé^ Pays/ fluficurs feU
gpcprç paVriç^^^^ ^a|^aî|^^ept;,l|fa^e|3|puilles ay«$
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46^ Conquête des £)Eux.SiciLEr
jpartenaient , ni s'ils étaient de la communion romain
ne« ou de la grecque , ou mahométans. L'empereur
Otbon I exerqa foii autorité dans ces pays en qua-
lité du plus fort. U érigea Capoue en principautés
j^i&o»J/. moins heureux, fut battu par le^ Grqcs,
ft'par les Arabes réunis contre lui. Les empereurs
dfOrient reftèrent alors en pofTeflion de la Pou9le&
de la Calabre qu'ils gouvernaient par un Catapan.
Des feigneurs avaient ufurpé Salerne. Ceux qui pof-
fédaient Bénévent $ Capoue , envahiilkienç ce qu'ils
pouvaient des terres du Catapan; & le Catapan les
dépouillait à fon tour. Naples & Gayette étaient de
' petites républiques comme Sienne & Luqueâ : Perprit
de l'ancienne Grèce femblait s'être réfugié dans ces
deux petits territoires. U y avait de la grandeur k
vouloir être libres , tandis que tous le^ peuples' d'a-
lentour étaient des efclaves^qui changeaient de^inai-
I . très. Les mahoinétans cantonnés dans pIuGeurschà-
a teaux , pillaient également les Grecs & les Latins : les
■ églifes des provinces du Catapan étaient foumifesau
métrc^olitain |^e Cpnftantinople » les apbes à celui de
Rome. Les mœurs (ereflentaient iu mélange de tant de
peuples , de tant de gouveriijemens $ dp^reljgions. L'ef-
prit naturel 'dés hà&itans ne jettâit aucune étincelle.
On ne reconnaifTait plus le pays qui avait produit
Horace & Cic^ron , & qui devait fairp n^trç le Taffe*
"Voilà dans quelle' filuation était cet t'^ftrtile contrée
^zuH dixième & pnziétne fiéçles > de Gajrçtte & du
Garillan jufqu'à Ôt'raàte, •"
Le goût des pèlerinages ^ des avantures de ch^
"Ivalçrie régnait alors. Les tems d'anarchie frnt ceux
*quî produîfent l'excès de l*héroïfme ; fon effor cft
^plus retenu' dans les gouvememens réglés.. Cinquante
on fqixante Français étant partis ^n 98 j des côtes
\dë Normandie pout aller à Jerufalem , paflcrent à lent
'retour fur la mer de. Naples, & arrivèrent dans Sa-
lerne , dans le tems que cette ville affiégé* pat les
' mabométans^ vpnàit de fk rodieter i prix d*argcnt
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BAR QB» OBNTILSHOMMSS NqrMANQS. 4H
Ils trourent les Salertins occupés à raiTembler le prix
de leur rançon ,.& les yamqueprs livrés dans leuf
ca^p à. la fecurité d'une joie brutale & de la dé*
bauche. Cette ]^orgnée d'étrangers reproche aux af-
fiégés la lâclîeté de leur foumHIlon , & dans Tinf-
tant marchant avec audace au milieu de la nuit ,
fuivis de quelques Çalertins qui ofent les imiter » ils
fondent dans le camp des Sarrazins , les étonnent ,
les mettent ,en fuite , les forcent de remonter en dé-
fordre fur leurs vaifleaux , & non-feuiement fauvent
les tréfors de Salerne , mais ils y ajoutent les dé-
pouilles des ennemis.
Le prince de Salerne étonné , veut les combler de
pr .éfens , .& eft encor plus étonné qu*ils les refufent;
ils font traité^ longt^s à Salerne comme des héros
libérateurs le méritaient On leur fait promettre de
revenir. L'honneur attaché à un événement fi fur-
prenafat , ënf âge bientôt d^autres Normands à pafler
à Salerne & à Bénévent. Les Normands reprennent
l'habitude de leurs pères , de traverfer les mers pour
combattre. Us fervent tafttftt l'empereur Grec , tantôt
les princes du pays , tantôt les papes. Il ne leur im-
porte pour qui ils fe fignalent , pourvu qu'ils recueil-
lent le fruit de leurs travaux. Il s'était élevé un duc
à Naples , qui avait aiïeryi la république naiflante.
Ce duc de Naples eft trop heureux de faire al-
liance avec ce petit nombre dt Normands , qui le
fecourent contre un duc de Bénévent. Us fondent
la ville d'Averfa entre ces deux territoires vers
l'an lo^o. C'eft la première fouveraineté acquife. par
leur valeur.
Bientôt après arrivent trois fils de Tancride de Han-
Uville^ du territoire de Coutance , Guillaume furnom-
mé fier-à^ras , Drogon & Humfroi. ?Rien ne^ reflem-
ble plus aux tems fabuleux. Ces trois frères avec les
Normands d'Avêrfe , acciompagnent le Catapan dans
J: la Sicile ; Qidllaumi fier -> à -bras tue le général
& Gg iij • J
^
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m
:
47e COKQSft'^E BtS D£tJi-SlËI»S
-iXIft.
rrra
Arabe ^ ddnné aok Grecs U viiSbtfe ; ft fa Sîclte tf irit
retourner arux Greàs , â'ib h'airaient J)at été ingrate.
Mais le Gatapan Craignit ces Français tfli 1er défena
daiént ; Il léoir fit des iiljtiftiêes ^ & H s^atttra lait
Vengeance, tls tourrtisnt leurs armes ct>ntré loL Troiâ
à quatre cent Normands f*em{Kirent de prt^fdoe toute
la Pôuille. Le fait ^aradt incroyable ; malt les «vanw
toners do pays fe joignaient i eox , A d^irenaiènt
de bons foldacs foiis de tels ttlalt^es ; let Calabrois
()ui cherchaient la fortune pat Ib courace devenaient
gâtant de Normands. GuillaMun^ fier^a-ètoî fe fait
lui-même comté de la Pouille ^ fans confoteerni eiAL
^ereur, ni pape^ hi feîgneurs yoifins. U ne confult^
que fes foldats , Comme ont £rft tous les premiers
to'ii de tous les pays. Ghaqbe capitaine Normand evt
une ville oU un village i^ottt foti pait^ti
Fiet'à'hras étant mort , (on frère DroÊon eft élu
Souverain delà PouilIé. AldrU Robert tkiijcard Se fes
deux jeunes frères quittent éncor Couuuicé pour avoir
part à tant de fortune. Le vieux TaMcridec& étonné
de fe voir père d'une race de conquérans* Lé nom
des Normands Eiifait trembler tous les voiflns de ta
Fouille « & mêmes les papes. Robert Gnifcard & tek
frères , fuivis a'une foule de leurs compatriotes , vont
pur petites troupes ea pèlerinage à Rome. Ib marchent
inconnus le bourdon à la main v& arrivent enfin dans
la Fouille.
.t^empéreùr Étftri til adEel fort aibrs^ pdût régnèl
dans Rome , ne le fut pas aflez pour s'oppofer d'a^
bord à ces conquérans. U leur donna folemnellement
l'inveftitore de ce qu'ils avaitent envahi. Ils poftédaient
alors la Fouille entière ^ le comté d'Averfe 5 la moitié
du BèoéVôiitin;
^ Voiïà donc cette maifon deVenàé bientôt après mal-
ton royale ^ fendatrioe des royaumes d« Naplet & de
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PAR DES GENTII'SHOMltfES NORMANDS. 47 1
Sicile , feudataîre 'de Pcmpîre, Comnlcnt ç'eft-îl pu
faire que cette portion de l'empire en ait été fi -tôt
détachée, & foit devenue un fief de réyêché de Ro-
me, dans le tems que les papçs ne pofiedaient pref-
que poii]it de terrain , qu'ils n'étaient point msdtres
à Roqie , qu'on ne les reçonnaiflait p^s même dans
la marche d'Ancone qu'0/Ào»/egra»^ leur avait, dit?
on , donnée ? Ce^ événement eft prefque aiiffi éton-r
nant que les conquêtes des gçnjdlshommes Normands.
Voici Texplication de cette énigme. Le pape Liwt
IX voulut avoir Iii ville de Bénévent qui appartenait
aux princes de la race des rois Lombards depoiTédéç
par Cbariemagne. L'empereur Henri III lui donna en
effet cette ville, qui n'était point à lui, en échange du
fief de Bamberg en Allemagne. Les fouverains pon-
tifes font maîtres aujourd'fiui de Bénévent en vertu
I de cette donation, (a) Les nouveaux princes Normandç
I étaient des voifins dangereux. Il n'y a point de con-
g I quêtes fans de très grandes injuilices : ils en commets
f talent , & l'empereur aurait voulu avoir des vafTauif
moins redoutables. Léon IX après les avoir excom?
munies , (e mit en tête de les ^ller combattre aveo
une arniée d'Allemands que Henri ///lui fournit
L'hiftoire ne dit point comment les dépouilles de-
vaient être partagées. Elle dit fculemeht que l'arn^ëe
était nombreufe , que le pape y joignit des troupes
italiennes qui s'enrôlèrent comme pour une guerre
fainte , & que parmi les capitaines il y eut beaucoup
tfévêques. Les Normands qui avaient toujours vaincu
en petit nombre , étaient quatre fois moins forts que
le pape : mais ils étaient accoutumés à combattre.
Robert Guifcard , fon frère Humfroi , le comte d'A-
verfc Richard^ chacune la tête d'une troupe aguer-
rie , taillèrent en pièces Tarmée allemande , & firent
diQ)araitre l'italienne. Le pape s'enfuît à. Civitade
dans la Capitanate près du champ de bataille ;
les Normands le fuivent , le prennent , l'emmènent
(a) Le roi de Naplcs y eft rentré entras.
^ G^ iiij
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R««
Xddâ^
■"^Htaff^
ÉÊ^
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472 CONQPÊTE DES DeUX - S1CILE&
prifonnier dans cette même ville de Bénévent qtd
était le premier fujet de cette entreprife.
On a fait un faint de ce pape Léon IX. Apparem-
ment qu'il fit pénitence d'avoir fait inutilement ré-
pandre tant de fang , & d'avoir mené tant d'ecdé-
fiaftiques à la guerre. Il eft fur qu'il s'en repentit «
furtout quand il vit avec auel refped le traitèrent
{es vainqueurs , & avec quelle inflexibilité ils le gar-
dèrent prifonnier une année entière. Ils rendirent
Bénévent aux princes Lombards , & ce ne fut qu'a-
près TextinAion de cette maifon que les papos eurent
enfin la ville.
On conçoit aifément que les princes Normands
étaient plus piqués contre l'empereur qui avait fourni
une armée redoutable , que contre le pape qui Tavait
commandée. Il falait s'affranchir pour jamais des pré-
tentions ou des droits de deux empires entre lefquels
ils fe trouvaient. Us continuent leurs conquêtes ; ils
s'emparent de la Calabre & de Capoue pendant la
minorité de Henri IV , & tandis que le gouverne-
ment des Grecs eft plus faible qu'une minorité.
C'étaient les cnfans de Tancrède de HautevWe qui
conquéraient la Calabre ; c'étaient les defcendans des
premiers libérateurs qui conquéraient Capoue. Ces
deux dynaflies viâorieufes n'eurent point de ces que^
relies qui divifent fi fouvent les vainqueurs & qui les
affaibliflent. L'utilité de Tbiftoire demande ici que je
m'arrête un moment , pour obfervcr que RJcbard di^A^
verfe qui fubjugua Capoue , fe fit couronner avec les
mêmes cérémonies du facre ■& de l'huile fainte qu'on
avait employées pour Tufurpateur Pépin pète de Cèar^
lémagne. Les ducs de Bénévent s'étaient toujours fait
fdçrer ainfi. Les fucceffeurs de Richard en ufèrent de
même. Rien ne fait mieux voir que chacun établit
les ufages à fon choix.
^^^^^
â
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^ \ PAR DES OENTIL8H0MMB& Normands. 473 ^
iîp^fr^ Gmfiard duc de la Poufflc * de la Cala"
bre , Richard comte d'Avcrfe & de Capoue , tous
deux par le droit de Tépce , tous deux voulant être
indépendans des empereurs , mirent en ufage pour
leurs (ouverainetés une précaution que beaucoup de
particuliers prenaient dans ces tems de troubles &
de rapines j)our leurs biens de patrimoine : on les
donnait à Téglife fous le nom d'offrande , d'obIa$a ,
& on en jouiflait moyennant une légère redevance.
C'était la reiTourcç des faibles dans les gouverhemens
orageux de l'Italie. Les Normands quoiqi/è puiiTans,
l'employèrent comme une fauve-garde contre des em-
pereurs qui pouvaient devenir plus puiflans. Robert
Guifçard & Richard de Capoue excommuniés par le
pape Lion IX ^ Pavaient tenu en captivité. Ces mê-
mes vainqueurs excommuniés par Nicolas 11 , lui ren*
dirent hommage.
Robert Guifçard & le comte de Capoue mirent donc
fous la proteddon de l'églife entre ks mains de Nicolas
11^ non -feulement tout ce qu'ils avaient pris , mais
tout ce qu'ils pouraient prendre. Le duc Robert fit
hommage de la Sicile même qu'il n'avait point en-»
core. Il fe déclara feudtataire du St. Siège pour tous
fes états , promit une redevance- de douze deniers
par chaque charrue , ce qui était beaucoup. Cet hom-
mage était un ade de piété politique qui pouvait être
regardé comme le denier de St. Pierre que payait
l'Angleterre au St. Siège , comme les deux livres d'or
que lui donnèrent les premiers rois de Portugal , enfin
comme la foumifllon volontaire de tant de royaumes
àréglife.
Mais félon toutes les loix dp droit féodal établies
en Europe , ces princes va0kux de l'empire ne pou-
vaient choifir un autre fuzerain. Ils dey-enaient cou-
pables de félo^e envers l'empereur ^ ils le mettaient
en droit de confifquçr leurs états. Les querelles qui
furvinrcnt entt^ le facerdoce & l'empire , & encor
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474 CoMQjjètB ois Dbux-Sicilbs.
t
i
tins les propres forces^ des princes Normands , n^dffmt
les empereurs hors d'état d'exercer lei^s droits. Ces
conquerans en fe faifant yafTaux des papes devinrent
les proteâenrs & fouvent Içs maîtres de leurs no^yeau^ç
fiizerains. Le duc Bobert ayant reçu un étendart du
pape , & devenu capitaine de Té^fe de fon ennemi
quil était , pafle en Sicile avec fon frère Moger : ils font
la conquête de cette ifle fur les Grecs & fur les Arabes
qui la partageaient sdors. Les mahométans & les Grecs
& Ibumirent à condition qu^ confefversdent le^rs reU.
gions & leurs ufiiges.
n falait achever la conquête de tout ce qui compofb
aujourd'hui le royaume de Naples. U reftait encor des
princes de Salerne, defcendans de ceux qui avaient les
premiers attiré les Normands dans ces pays. Les Nor-
mandç enfin les chafférent ; le duc Robert lem prit Sa-
lerne : ils fe réfugièrent dans la campagne de Rome
fous la protedion de Grégoire VII, de ce même pape ;
qui faifait trembler les empereurs. Robert , ce vaiTal &
ce défenfeur de Téglifc , les y pourfuit Grégoire VU
ne manque pas de Texcommunier , & le fruit de Te^-
communication eft la conquête de tout le Bénéventin
que fait Robert après la mort du dernier duc de Béné-
vent de la race lombarde.
Grégoire Fil, que nous verrons fi fier &fi terrible
avec les empereurs &les rois, n'a plus que des complai-
fances pour Texcommumé Robert. Il lui donne Tablb-
ludon , Se en reçoit la ville de Bénévent , qui depuis ce
tems-là eft toujours demeurée ai^ St Siège.
Bientôt après éclatent les grandes querelles dont
nous parlerons entre l'empereur Hem-i IF Se ce mê-
me Grégoire FIL Henri s'était rendu maître de Rome
Se affiégeait le pape dans ce château qé'on a depuis
appelle le c âteau St. Ange. Robert accourt alors de
la Dalmatie où il fàifait des conquêtes nouvelles ,
délivre le pape malgré les Allemand^ & les Romain^ «^
sçê»R^
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ièxMs centre ki y À rend midtilp de & |â«rfbftné ft
remmène i Saleràe , oi ce pàper i^fii Mpeuii taM d0
rois mourut le captif ft le protège d*un gentUkGtBuae
Vùtïtt&tiûh
repréfentent des chevaliers errans devenus de grandi
Souverains par leure exiptoits ft entrans daor Itf miltî
des empereurs. G'eft. prédféfflent oe qui arriva à Xùbifi
tlmfcard , & ce que nous verrons plus d'une fbif
a» tems ctes cirdiades^ Rotert maria la fille' à €%n|C
tixrtHn fils de remf^eur de CoiâUntti^ople JSicitl
Ducas. Ce maiiage ne fut pas heureux. Il eutlMe»(l6€
lia fille ft feii «endre à veiiger , ^rtfolut dHUlef dé.
iFÀner ('empereur «^Orient apre^ avoir bomilié^ celui
d'Oecidenli.
ta emir dé Cetitoiiitutôt^te Hètik ^n eAntMid
bfage. Michel Ducat fut chafle du trAhe par 'SképÈotè
jTuirnbmmé Botoniate, ConftanttM gendre de RobtrP fat
iètft ewnôèuei dkr eidht Ai^t CmMêke y ipH ettt de-
fmi» tattt à ft phAidrè dei oi^Mk, winta ftif le ttintf;
lC(^ir^ pi^datté ctfs révotutibni $'à^^ïtef^ défà pir la
ÎMûiiOt.px to Hiacédeliir, <( pimaft k tehrëur juT^
3tfk ConOafSiAioore. B^éimoM fou IU>d^ prenter
i« , ii fiîmettx dans: lee ci(e!fi!des ^ raccMipsqmA à
aeti» eotfqu4«t Htm empire, titoifo^ vc^yeM par44 dôilf^
Mefi uifej»^ CMM^ em laifb» de drdftdre^ tes er^
fife ) ptdfiiûe B¥Ummtê itùiam^u par voiMr Ifdé^
ertoei»
ta mort de SohrB dans l'ifle de Corfoû Mt ISn à
tiis'entepfifeb. £a pHnœfle ^âtiof €ùmMi»è fill^ de
i^emperaiir JMwfii vlaqfueHe écriât i^ie partie4e^i6tt6
idftoire , ne tt^de Mùèert que comme on brigand,
& s^indigne quil alv ey Pa^dace de marier fk fitle
«1 fib d'un empereim £lle devait fonger que I1ii&
. i^oitt mêine éêf l^M^ kn feuraiffiat des exemptes
WÇtiÊi <il WiHi
;
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47^ Suite de la conquêtb db Sicile.
de fortunes plus confidérables » & que tout cède dan
k monde à la force & à la putflance.
CHAPiTH* (IttARÀNTE.UNIÉMÏ.
De la Sitih en partftuHer , 6f du droii dî ïi^atm
• '^ dont cette aie.
T 'Idée de conquérir Pempîl-e de Conftantinople
JLi s'évanouît avec la vie de Robert $ maïs les cti-
blïlPemenit de fa famille s'affermirent en Italie. Le
comte Roger Ton- frère refh' maître de la Sicile. Le
duc Roger fon fil« demeura pofTefTeur de prefque tout
les pays qui ont le nom de royaume de Naples. Bofté«
niond fon autre fils alla depuis conquérir Andodie ,
après avoir inutilement tenté de partager les étaU ila
duc Roger fon &cre.
. , Pourquoi qî l^ comte Aoger (ouverain de Sicile^
ni ion neveu Jïoftfr duc de la Fouille , ne prirent-iit
point dès- lors le tikre de rois ^ U faut du tons^
tout. Roger <jttifcmrd te premier conquérant avait été
jn.vefti comme duc par le pape . Nicolas tl. Kofff
fon firèrc avait itàïti^tîà p^t Robert Gmfcatitn
qualité de comte de Sicile. Toutes ces cérémonies ne
donnaient que des noms & n*aioutaient rien an ^o-
VQîr. Mai9 ge^comte de Sioile eut m. droit qai.s'eA
confervé toujours , & qu'ajucun roi de l'Europe n*a
eu : il devint un fécond pape dans fon ifle»
' . Les papes s^étaient mis en po(tc(&ùn d^en^over dam
toute la chrétienté des légats qu'on nootmait alatere%
qui exerçaient une jurifdiâiQn. fut. toutes les^égUfeS)
en exigeaient de» décimes , donnaient les l}énéfi<^»
exerçaient & étendaient le potuvoir, ppnUfical aotaot
j ^ <que les C(HÛoi|âurcs &. le« intérêts. 4<l^ fois le pe^
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m LÉGATrOlJ DAlïS^C^TTE tSLÉ. 477
•mcttaîent. Le temporel prcfque toujours mêlé âufpî-
rituel leur était fournis ; ils attiraient à leur tribûnd
les caufcs civiles. Four peu ^ue le ftcré s'y joignit
au pro&ne , mariages y tefiamens , promeiTes par fer^
ment , tout était de leur teiTgrt. C'étaient ûes pr<^
confuls que Tempereur eccléfiaâiqve éks chrétiens
déléguait dan9 tout TOccident. C'eft par-là que Ro-
me toujours faible , toujours dans Tanarchie , efclavè
quelquefois des Allemands , & en proie à tous les
fléaux , continua d'être la maitrefle des nations. C'eft
-par-là que l*hïffoîre de chaque" peuple eft toujours
rhiftoire de Rome.
Urbain ÏI envoya un légat cii Sicile dès que le
comte Roget eut enlevé cette ifle aux mahométans
êc aux Grecs, & que réglife latine y fut établie. C'é-
tait de touis les pays celui qui femblait en eiFet avoir
le plus de befoin:d'un légat i pour y régler la hié-
rarchie , chez un peuple dont la moitié était muful^
mane , & dont l'autre était de la communion grec-
que;- Cependant ce fut le feul pays où la légation
fut profcrite pour toujours. Le comte Roger bien-
faicfteur de l'églife latine , à ïaqueile il rendait^ la* Su
cile , ne put fouiFrir qu'on envoyât un roi fous le nom
de légat dans le pays de (k conquête*
I
Le pape Urbain uniquement occupé des croifa^
des , & voulant ménager une famille 4e héros fi a^
ceflaire à cette grande entreprife , accorda la dernière
année de Ca vie en 1098. une bulle au comte Roger ^
nar laquelle il révoqua fon légat , & créa Roger &
■Ç8 fqcceffcurs légats nés du St. Siège en Sicile , leur
^attribuant tous les droits & toute l'autorité de çettb
dignité qui était à la fois fpîrituelle & temporelle.
C'eft-là ce fameux droit qu'on appelle la monarcbit
de 5jf«7f , c'eft-à-dire,le droit attaché à cette mo-
narchie , droit que depuis les papes ont voulu anéaiir
ût & que les rpîs. de Sicile ont maintenu. Si cette
prétogative eft încompatible avec là hiérarchie chrê-
«I - prero
î
^m^
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Godgle
47l SviTft PS Là. CONq.ViT|
liffinf , il eft éddient qu^UrMM no pot p^ la don»
pgi ; Q ç'eft un objet de difdpline quf U religûm
H)» répi9uve pas , U çft aufli évid^i que chaqvç
îpjravme çft en drpit de fe T^ttribuçr. Ce prifflig^
j|)i fonds n'eft qae le droi( dç Çoi^timin ft de to«i
Ifs empereors djp BréQder à toute U police de lemi
jB(at& ; cependant il tt?j 9 eu danf tonte TEurope a-
tholi^ttç qii'pn gentîlhoipiiie Norn^and qui ait ft ft
donaf:r cf tce prérogative %m portes d^ Home-
Le fils de ee comte fêgir recueillit tout lliéritig»
de là mairon Normande ; il fe fit couronner &(ka«
foi de Sicile & de la Fouille. Naples qui ëtai( alon
gne petite ville , n'^it poiqt encor km & ne pou*
vait donner |e npm au royaume, ^e s'était to^
Jours, mainrenue en république fous |i9 duc qoi ri^
bvait des empereurs d« Conftantinople ; & ç<; 4«€
avait jofqu'alprs échappé par dçs f%mn$ k l'a9#|oo
4e la famille çonqua^ter
Ce premier roi Roger fit hommage an St. ^
n y avait alors deux papes : l'un le fils d'vo jinf
nommé Lion , qui s'appellait Anaclet , ft que it.
Bernard appelle Judaicam foboiem , race hébraïqae;
l'autre s'appellait Iitnocent IL Le roi Roger reconnot
Anaclet^ parce que Tempereur Zo/i&afre // reconoaifi
fait Innocent s $ ce fiJI à cet Anwlet qu'il r^ndjf b^
yain honupiage.
Les empereurs ne pouvaient r^ardjsr les oonqo^
xaos Normands que comme des uiurpateurs, Aoffi Si.
Bernard qui entrait dans toutes les af&îrjcs des papes
& des rois , écrivait contre Roger aufli-bien que con-
tre ce fils d'un Juif oui s'était fait élirç papç à prit
d'argent JJttH , dît-il , a ufurpi Iq, chaire de St. PïVT'
te , PoMtre ^ tffurfi la Sicile , c'eji q Pifar i les fumr.
Il était donc évident alors que la Qi^çraine^é du pap^
fur ces imx provinces ^ n'était qu'une u^ipation^
g?»S#
â
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Le roi J{of rr fbuUaait Jbmlff » qui ftic toAjourt
reconnu dans Rome, lot bain prend cette occaGon
pour çnlerer aux Norn^uidf leurs cooquéces. Il mar*
che ?er^ la Foi^e nvpQ le pape Jtmoçtm IL II pa*
rait bien que ces Normands avaient eu raifon de ne
pas vouloir dépendre des empereur! y & de mettre
entre Tempire & Naples une barrière. Roger ï peine
roi fut fur le poii^t dç tout perdre. 11 aQiegefût
Naples quand l'empereur s^avance contre lui. Il perd
des batailles ; il perd prefque Routes (es province;
dans le continent htnoanP H l'excommunie & le
Sourfuit. S$. Bernard était avec l'empereur & le pape.
I voulut en vain ménager un accommodement. Ro*
ger vaincu fe retire en Sicile. L'empereur meurt.
Tout change alors. Le roi Roger & Ton fils repren.
nent leurs provinces. Le pape Innocent II reconnii
enfin dans Rome , ligué avec les princes à qui £o*
tbaire avait donné ces provinces , ennemi implacable
du roi , mardie comme Léon IX à la tête d'une ar-
mée. 11 eft vaincu & pris comme lui. Que peut-il
faire alors? U fait comme fes prédéceifeurs : il donne
des abfolulions & des inveftitures , & il fe fait des
proteâeur; contre Tempire , de cette même maifon
Normande contre laquelle il avait appelle J'empire
à fon fecours.
Bientôt sq^rés le roi fubjugue Naples , ft le peu
qui reftut encor pour arrondir fon royaun^e de Gavet*
te jufqu'à Brindes : la mpnarchie fe forme telle qu^elle
eft aujourd'hui. Naples devient la capitale tranquille
dû royaume , & les arts commencent i^ renaitfe un
peu êan» cei belles provinces.
Après avoir vi^ comçient des gentilshommes de
Coutance fondèrent le royaume de Naplès ^ 'd,e Si-
cUe f *A faut voir comment un duc dç Norrnandfe
pair de France conquit PAnglcterre; CTeftunc çnôfe
bien firappantie que toutes ces invafions , toutes ces
émijsrations , qdl continuèrent depuis la fin du qûa«
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HlS^tMfeegBgsMagaaa— rfilMflU ^' 'i i gaeapgggaAIyg
t
1
I
48d Coi^QJ^TB DE L'ANOLEnUM
triéme fiédé jurqv'au commencement du quatorzié*
me , & qui finirent par les croifades. ' Toutes les na-
tions de l'Europe ont été mêlées , & il n'y en a eo
prefque aucune qui n'ait eu fes ufurpateurs.
CHAPITRE aUARANTE-DEUXIÉME.
Conquise de t Angleterre far GUILLAUME dm k
Tfornumàie.
TAndis ^ue les enfans de Tancride de Hataevilli
fondaient fi loin des royaumes ^ les ducs de leoi
oadon en acquéraient un qui eft devenu plus coo^
fidérable que les deux Siciles. La nation Britahm-
que était, malgré. fa fierté , deftinée à fe voir tou-
jours gouvernée par des étrangers ; après la mort
d* Alfred y arrivée en 900 , l'An^eterre retomba dans
la confuGon & la barbarie. Les anciens Angto-Saxons
fes premiers vainqueurs « & les Danois fes ufurpateors
nouveaux , s'en difputaient toujours la poflefGon;
& de nouveaux pirates. Danois venaient encor fou-
vent partager les dépouilles. Ces pirates continuaient
d'être fi terribles , & les Anglais fi faibles , que vers
L'année 1000 on ne put fe racheter d^ux qu'en payant
quarante-huit mille livres fterling. On impofa , pour
lever cette fomme , une taxe q^ii dura depuis alTez
longtems en Angleterre , ainfi que la plupart des au*
très taxes, qp'on coritinue toujours xle lever après
le befoin. Ce tribut humi^ai^ fvt fippçllç argçat.
danois , Dawtgeit,
Canut roi de Dannemarck , qu'on' a nommé It
grande & qui n'a fait que de grandes cruautés, r^
mit fous fa domina^on en 1017 le Dannemarck &
l'Angleterre. Les naturels Anglais furent traités alors
comme dl!s elblaves. Les auteurs de çe^tem;6,9y9ueot
* ' " ' . ' " qyg
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PAR GviLLAViMiB DUC &E Normandie. 48 !> |f
I
que quand ài^Rnglais rencontrait un Danois, il &•
lait qu'il' s'arrêtât jufqu'à ce que le Danois eût pàlTé.
La 'race de Caimû ayant manqué en 1041 , les ëtatsf
du royaume , reprenant leur liberté , déférèrent la
couronne à Edouard ^ un âèfcèndant des anciens An'^
glor Saxons , q^*on appelte A? fcdnf & ie cotifeDeur.
Une çles grandes fautes , ou un des grands malheurs
de ce. rbi , fut de n'avoir point d'enfans de fa fem-
me Editbe'; fille du plus puiflant feigneor du royaume.
Il hàïflàit fe femme , ainiî que fa propre mère , pour
des râîforts'^d'étatf'& les fitéfoighél: l'urte & l'autre.
L^ ftéfîlité 'de fori mariage fer vit 11^ fa canonifation.
On prétendit qu'il aviait feft vœu^'^chaftetc : vœu
téméraire dans irn mari , & ^al$fur4èHdans un roi qui
avait jbefbin d'hérîtîersl "Gé vœuv^'il fut réel i pré-
para iie «ouVeaiiît'-fers à TAngktfcrre»
' Au refté lesThoînésbnt écrit que tet Edouard fut
le prerkier roi dé l'Europe^ qûî/citt-îe don de" guérir
ïeS écroùy Fc5. H . avait ^eja^'Tert^u' la vue à (bpt bu
hdit aveugles pî qûanfd uile paUVre' femme attaquée
d'une htftjicur froide fc préfenta devant lui ; ît là
giiéritrîflcdminçnt en fàîfant le'fijjne de la croix r
&4â rcîntîtt fécoftide de îlérile qu'elle était aupara-
vant., tfi» rois d'Angleterre ^fe fo^nt attribués depuis
4è prîyilè^é, non pas de rendate les ftériles fécondes r
non pa^dë ^eérir les aveugles î, Mais de toucher les
éri'ouçll^; qiriltf né gucriffaièhr i)a8:
l
'S. £ô/i/j*en France , coniine fuzerain des rois d'An-
gleterre , toucha les écrguéîes , & fcs fûcceflbXjrs
jbyiVent' d'e dette prérog;ative. étdilaume III h, né-
gligea en Ang!e,tçrre ; & art terris viendra que la raî-
foii qui coiiirrence'à f4Jre quelques progrès en Fran-
ce t ahûîiri cette coutume. - * i' >
VoU» vri^eii'upi(youTS^ <esjufiigefe & lea:i»x?u;s de
lees tëfiife4à alsffiihiineiii dsffic&ôai des ii<6trj^. Guil^
EJ/aifur les mœurs , &c. Tom. I. H h ^
^ti ~ni«m tfi éOà u ■ fpiii&U
\
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«s«
e
i
9
Àurme duc dt NtfiNmAHri m ^mvff^ VAa^kmt^
loin d'avoir tuctui drcHt Oir ^^ royaume , ne» a?4ti
pas même fur la Normandie , fi la naiffancc donnait
ks dwits. Son f èr# li^ 4uQ Mob^ ,^qul »C «^é^^it
ÎKDftis marié, l'avait ^u ^ U, Slle d'vn p^ticir d«
Iilaift > que l'hiftoiie i^pp«;lk -ff^wricuC ^ Wme qMi&
gnifiait & fignifi^ «ncqs. anjowd'lwi «i apgliM Wi
M^ém ou /ewviy» tuhHqm^ l!^%% i^ coocnbiMi
pmnift dans ^v^ XQnmt * daps 1^ ^ d<» luift,
m Wiait pa» *Wi b *WITÇJ1^ loi B éiiW autp^ïft p«
k covt4M»e. Oftip^iifeft fc peu ^.éue nji jj'oncpi.
saîb utiio» ^ quft foi^^nfi Gn^li^wpe. ^ wiwt,
fifMk ^ l^iil^Kd QuHiflfiÇ^^. \\ ^ îcfté, une lettrf df
horau aomtt JiÉ^n d^ Jk^taga? , ims laqvdM a S^
gM aio&. iea'bitai:49 héfit^H^nt ^¥ept; C4( (iaa<
to«4 lea paya où le;$ hovmw ti'étaîenii pas gouvenici
par des loix fixc^ , j^irfslM|U|B^ifc«oc(mi>u^,^y çftdM;
fque la volonté d'un prince puifTant était le (eulcode.
GnîUtmw fui déclaré ^ piar foiv pcrc.*^ pat ka cWs.
beikierdq duc;|ié^'^ it. iîç maintint dOuite pa^foa
liaibileté & par fa^.valew'ç, contre tçps eaux cjui to
éiTputèrent fon dom^ini^. U régnait pà|£oIiemeot eQ
IHoimandie ., & (a ^l'^^igne lut renoaJTt Bofinaett.
%^{^v^'Sdo^wri k roM^effemr étant wort ,0 jwétww
a». r<^QUi9e d'Angleçerrf ,, Je d^oii^ d^ Ju^ceflioi^ n^
pftraHfei» 9!^ ékMi da^ç ai»cun q^at 4<5 VEuropfi»
^ coi)iona« d'Alkvi^snf it9^t éle(^ve ;j?£^gn(i
f Mit paitag^fl, eiUW J«l fiMtiqi^ fls, ],f^ wp&ta^
La Lombardie ch9i>f 0^1 chaque jp|i% dç /n^tre. m
race Carhvingieune , détrônée eh France ; faifait voir
09 quç p#wt É fwc* contre le droU; dMi:fîiM^ . -^^f^f^
^ amfejfmr o'avait point jw'idu trÔMrA^^'tre m
t^^fi, tiatdd û^flcur i;Ùmçri n^etak poînlOB
fa «acr i mais il a,y^it^I« pl^j; i^ico^i^ûabledçiiotts W
d«Pitf ï.ie^ fuffr^gff. <iie tpiûr b i^on^ | ÇMhm.
le bâtard n'avait pour fui 4>l.le dj^oit^'éle^ioQf ^
celui d'héritage , ni même aucun parti en Angleterre*
tf pr^endii que étw.vir voj9g& qu'Srit^avtirefois
dans cone iAc , la tfAEdxmaràwùà fik taft ftvcaf
^ii»m^
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tkK GtfiLtAtmit Dtft; ot NokJVXMiiiE. 4Sa
— , ■ , ^ , ■ ■ ■ ^
un tefbmcfit ^e perfotint ne vk jamais. U difatt
encor qu'autrefois il avait délivré de prifon Harold ^
& qn'HaroIi lui avak cédé {es dréits fur l' Angleterre.
Il appuya fes fiiibtes railbns d'une forte armée.
Les barons de Normandie , aflemblés en forme
d'états , refuférent de Targenc i leur duc paur cette
expédition : pa^ce qae, i% ne réuiliffaic pas , la.jyfoN
mandieen refterait appauvi4e, A qu'un heureux fuc^
ces la rendrait province d'AngleteiPre ; mais plufieucs
Normands bazardèrent leur fortune avec leur duc*
Un feul feigneur nommé Fiz - Otbbem , équipa qua-
rante vaîfleaut à fes dépens. Le cemte de Flandre,
1>eau-père du duc Otdlltapm , le fiecourut de quelque
argent Le pape AUxtmdrt Iltmtz dans fet intérêts. Il
excommunia tdus oeuK qoi s'oppofocaient aui^efleinfl
dç CMQmme. C'était fe jouer de ia religion; maia
les peuples étaient aceomuttiés i ces profanations^ &
les princes en |»refitaient^ Guiiimmie partit de, St.
Valeri ayçc )ime flotte nombreufie ; on ne fait txnxi^
1)ien il avait de vaifleaw , ni de foldats. II aborda
foi* les cA^es de Suflex : &< bientôt apcès fe donna
dans cette province la fomeofé bataiiie de Haffii^g^»
9ui décida finile du jbrtde f An^teterre. Les ancien-
nes chroniques noi^s appremienc qii^au premier raïag
de Parmée Normande ^ un Àqayet uomnié Tsdlkfex^^
monté fur un cheval armé , chanta la chanfon de
Éùfétugâj qui fiit & longtems^dait j^ jftfducbe des Bran.
Îiis , 'fana qv^i^en foie r^ lemMsdre fir^gment. Ce
\Ullèfii^ après «v«iremonné>la iâi^nfon que les fol*
data tépéuknt^ & jctta ir^reiaiief pafmi le^ Aillais,,
éc filé tué. Le rcri Ibtrgld Ai le duc ile Notrrn^Adie
^tièreiir latin ohe^^awc^ & icembajrtirent ipi«;4; ia
%atallte dura fix Iheuret. La gèoéaijwe;:^ à cbeval >
qui ceeimen^ à fkire aSkues totute la force de& ar*
mées i ne parait pas avoir été eraployi^e' da4^ cette
journée; Les troupes de phct et d'autre éiajeat coi^-
pofées 4e ftntaffins. HanM & deuir d^ fes frères
7 ftfrene tfués; Le vaiiiqbeur a^'a|it>i^c^ de tP9«
S Hh ij
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4S4 CoNiQuèrJE i>iji/AWij;/gn»9S
dres^ portant tievimt loi one. b^nni^re bénke que le
piipe lui avait envoyée. Cette bannièri^ fut Tétendart
auquel tous les évéques/e ralli^;^t en fa faveur. Ils
vi' rcnt aux poctos êrtclcm^gi&f^P liOn^res lui offrir
la couronne , qu'on ne pouvait refufer au vainqueur.
. Quelques autres, appellent, cç^ couronnement uae
-éledion libre v ttn aâje. d'^ptorité du parlement d'An-
gleterre. C'eft.précifémfa^/rautorité ^es efclaves faîu
à la guerre , qui accoid^ieiit à leurs maîtres le droit
de ks.fuitigcr.
' Gfàllaume nyant j;equ u^ bannière du papej)our
ctxtt expédition , Jkil envoya en récompenfe Tetcn-
'dart du roi Haràid tué dans la bataiUç ^ & une petite
«partie^ ipetit.tséfor.qUe pouvait avo^: alors un ro}
Anglais. C'était uapré&nt opniîdérable pour ce pape
Alexandre II qruidifputait encor fq^^fiége a Honarius
JJ,)& qui. fur la fin d^ine longtieguçrre civile dans
Rome , était .réduit à Tindigence^ !^qft un barbare
'fils d'une proftituée^ meurtrier d'un roi légitime , par-
.'tage les dépouilles de cft^rpi avec- ufi, autre barbare;
. car 6tez les noms de duo de Nof mendie ^ de roi d'An-
gleterre & de pape, tout fe réduit à ration d'an vû-
. leur Normand , & d'un receleur Lam)3|ard : & c'èft au
r fonds à quai toute ttfur|>atioo (e réduit^
<^m4îaKmi fut gouTerner! commis îL fut conquérir.
"Pluficflfs révolte» étouffées ♦-des irruptîôos des Danois
k^eridttts inutiles , des loix rigoureufcs durement exé-
cutées , fignalèrerit fon ifèghe. Andeos Bretons, Dar
'noîs , Anglo ^Saxons, toua.&rent confondus dans k
^rnême efckvage. Le» Normands qui 'avaient eu paît
' à fa vîtfloîre , partagèrent par fcs bienfaits les terres
des vaincus^ De -là toutes ces iàmiKes Normandes,
dont les defcendans , ou du moins. les noms , fubfif-
tent cncor en Angleterre. U fit faire un .dénombrement
'ex«<5t de tous les biens àei fdiets de, quelque natur^e
qti'ils fuffent. On prétendfqu'il en proⅈpour fe &ire
«W*"
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ST pA^ Guillaume Dtjfc DE ^Normandie. 48Ç
qi Angleterre un revenu de quatre cent mille livres
fterling , environ oent vingt millions de France. D eft
évident qu'en cela les hiiloriens fe font trompés. L'état
<d' Angleterre d'aujourd'hui , qui comprend TËcofle &
^Irlande , n'a pas un plus gros revenu , fi vous en dé-
duifez ce qu'on paye pour les anciennes dettes du gou»
vernement. Ce qui eft fur , c'eft que Guillaume abolit
toutes les loix diï pays , pour y introduire celles de
NormancUe. Il ordonna qu'on plaidât en normand ; &
depuis lui , tous les ades furent expédiés en cette lan-
gue jufqu'à Edouard IIL U voulut que k langue des
vainqueurs fèt la feule du pays. Des écoles de la lan-
gue normande furent établies dans toutes les viUe8& les
bourgades. Cette langue était le français mêlé d'un peu
de danois : idiome barbare , qui n'avait aucun avan.
tage fur celui qu'on parlait en Angleterre. On prétend
qu'il traitait non - feulement la nation vaincue avec du^
reté,mais qu'il afïedait encor des caprices tyrannt-
ques. On en donne pour exemple la ioi du couvre-feu ^
par laquelle il falait , au fon de la cloche , éteindre le
feu dans chaque maifon à huit heures du foir. Mai?
cette loi, bien loin d'être tyrannique , n'eft qu'une an-
cienne police établie prefque dans toutes les villes du
nord ; elle s'en longtems confervée dans les cloitrea.
Les maifons étaient bâties de bois ^ & la crainte cfai feu
était un objet des plus importaits delà police générale.
1
6
On lui reproche encor d'avoir détruit tous les villa-
ges qui fe trouvaient dans un circuit de quinze lieues ,
i)our en faire une forêt , dans laquelle il pût goûter
e plalfir de la chafle. Une telle aAion eft trop infen-
{ée pour être yraifemblable. Les hiftoriens ne font pas
attention qu'il faut au moins vingt années pour qu'un
nouveau plant d'arbres devienne une forêt propre à
la chaiTe. On lui fait femer cette forêt en logo. Il avait
alors foixante-trois ans. Quelle apparence y a-t-il qu'un
homme raifonnable aie à cet âge détruit des villages,,
pour femer quinze Ueues en bois , dans l'efpérance d'y
chaifer un jour ?
Hh iij
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m^
tistaiittitalia
éàSi
4iS COKtlVitB DE L'AKGLBtCR&S
■ — ^- \
Le cônqaénni de rAngleterrè fut h terreur du rjn
BeFirance Pbilipftl^ qui Toulut abaifler trop tard un
Vaflal fi puifiant , & qui & jettà fur le Maine , dq>en-
dant alors de la Normandie* Guillaume repafla la mèr,
Reprit le Maine 4 & contraignit le roi de France i de-
mander la paix«
teâ pt^tentioni de la cour de Rom^ n'édaterenf
jamais plus finguliérement qu'avec ce prince. Le pape
Qrigoire VU prit le tems qu'il fidfait la guerre à la
France 5 poyr demander qu'il lui rendit hommage du
Royaume d'Angleterre. Cet hommage était fondé fur
tet ancien denier de St. Pierre , que TAngleterré payait
à réglifé de Rome : il revenait à environ vingt tous de
hotre monnoie par chaque maifon ; offrande regardée
bn Ai^Letèrre comme une forte aumône , & à Rome
•bomme un tribut GnUlaumele conquéroftt 6t dkc au
Î" apé , qu'il pourait bien continuer TaumÔne ; mais aç-
eu de faire hommage, il fitdéfenfe en Angleterre de
teconnaitre d'autre pape que celui qu^ approuverait
Lapropofition de Grégoire Vil devint par-là ridicule i
force d'être audackufe. Ceft ce même pape qti boule-
terfait l'Europe pour élever le facerdoce au^effiis de
rempire ; mais avant de parler de cette querelle mémo^
tablé , jft des crôi&des qui prirent nai£Ginoe dans ces
téxns , il faut voir en peu de mots en quel état étaient
les autres pays deTEuropei
Fin du iomè p^emie^.
mk
Éfri-in^ri'-t rn
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^r (487 y ^ l!
T A B LE
DES CHAPITRES
contenus dans ce volume.
Si
il *
La philosophijs db l'histoire.
IntroduclioTu . •., • . Pag. i.
D^s diffUr^Mtes racu sCbûmmefw « 4*
l)e r antiquité des nattons. , . 7*
De la connaijfance de Pâme. . . 9.
De la religion des premiers hommes, . 11.
Des ufngjBs ^ des féktiment communs à pr^J^ta ro«-
tes les nations anciennes» . . 17.
Des Sauvages^ ....... 21.
De P Amérique, . • . ^ * «9.
De la théocratie, • . * jt.
. DfX Caldéens,^ , . , . 34,
Des Babiloniens dep^na Pfrf^s, . • '40.
DèlaS^ie^ » • « » 4^.
. Dex Phéniciens ,• g^ iie Sanchonîaton. . 47.
Des Scythes êf dex Gomérites. . • 52.
Z)f fArMt, % . . . Ç4.
De Bram , Abram , Abraham. • » , S 8*
DeVInde* • • • .61.
JPf /a Qhinf, . • • .69.
Hh iîîj
UpiMiaiWJ II I I ilrrfl^^
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488 ' T A. B L )b
9
ï>e PEgypte. * * . Pag. 7c.
De la langue des Bgyf tiens , ^ de leurs JynUfof es. 79.
De leurs monuHiens, . • • 82.
Df /f«fX rites , ?«? ^fe 7a circoncipon, , 84«
2)e /^«r J njyflhres% - - . ' . • • . S7«
Des Grecs , //? /^/irx anciens déluges , 4f /^«rx alpha-
bets , Êf rf^ leur génie, . . . 88-
Des législateurs Grecs , de Minos , /f Orphée , de
f immortalité de Pâme. . ^ . . 9).
Desfeéfes des Grecs, . . . 96.
D^ ZaleoCus Ê? ie quelques autres législateurs, 9g.
D^Bacchus. . . . . 100.
Des métamorpbofes cbeH les Grecs , récueillies par
Jl Ovide. é . • • it>4. 1
V De r idolâtrie* . . . . loç. •
i!)^x oracles. • . • % 109.
Desjibyl/es cbez les Grecs , ^ rfe /mî' influence fur
les autres nations, v • . ii;.
Des miracles. . ■ . • . , 119.
Des temples.- • • • . . 124.
De la magie, • . ^ • . 129.
Des viSimes humaines. . ■ , • 132.
J>ex myftèr^s de Cérés Eleufine. . i)^*
' Des Juifs , 01» tesns ôà ils commencèrent à être
connus. » «. •* • 14.1.
JD^x Jtdfs en Egypte^ . • . 14J.
De Moïfc confidéri Jîmplemeni comme chef éCune
nation. . « . • 14.4.
Des Juifs après Moïfc , jufqu'à Saùl. . '*^* n
^ Des Juifs depuis Sàtii, • . • . '^î* S
ttiSiflrj^i il I I I II ,p,tKani I II ^1 ifcft^Bi
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DES Qhafitrbs. 48a
.- i),es pophites Juifs., . • .. . .' Pag. «59;
_ Dfs.priireî d€t Juifs* , • ^ .. i>5.
. jCfïr Jôfçph , bijloriendes Juifs. ^ . . 168.
. l)*iiH minpmge de at biftorien , conc^tcnant: hlemn*
- . drc @^ ks Juifs. .. ^ . ^ . 172.
. Ses préjugés populaires auxquels lef écrivains Jeuris
"', ofiS daigné fe conformer par condejijgndqnce, 17 f«
Ifes anges y des génies , des diables , chez let anciennes
\ nations 6f cbéz les Juifs. . , 1 78.
Si les Jmfs'Ont enfeigné les autres nations , ou fils
-, ont été enfeigni par elles. . ; . 186.
Des Romains. Commencemens de leiir efhpire ^ d^
leur religion: leur tolérance. » . 189.
Quejiionsfur leurs conquîtes , &kur décadence. 192.
. Des premiers peuples qui écrivirent tbijioire , êf des
fables des premiers bijioriens. .\ . 196.
Des législateurs qui ont parlé au nom des Dieux. 202.
Avant-propos, Qui contient le plan de cet au*
vrage^ avec le précis de ce qu'étaient originaire'^
ment les nations occidentales.^ €s? les raifonspour
lef quelles on commence cet EJfai par l^ Orient. 2oç.
C H A P. I. D^ la Chine y de fon antiquité , defes forces ,
de fes loix , de fes ufages & defesfcien»
ces. . . ... W4.
C H. IL De la religion de la Chine. Que le gouverne*
ment n'eji point athée ,• que le cbrijiianifme
n'y apoif^ été prêché aufeptiémejtécle. De
. quelqfiesfeSes établies dans le pays. 228. Ji
&:^ *
1
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^
" m II iwai
4^ T & a L È
en â ^. I II. Des Indes. . Pig. Ms*
en. I Vv De/ bracnumsi du Viiam ^féitStm.
vidant* * % • 1^6.
0 fBifi^&^e PasuimniteUgtoMàtlo^
•^►rfftf* . . . 15c.
et* VL De ^^r4«i^, ^ iTeMaliMMt , 26^.
CH. TIL X)ir PAl^tm & dit ia ki mnjMlmàM.
Eotammji lAfftigtmiftmfuimtmkià
mtmUé j y J! 4lli ^ i$i ferficu-
faute. . • ' • 2ih
Ch. TIIL Dé PbàHê^ diNgl^ .mfomCBùXi'
MAGKS. Cùmmmt h thrifHof^ ii-
nHitablKSMmM''i^^f9té^^''^^
defttficMtiùm qu'mie^^t. . B90.
Cft» IX. QuelesfimjjhH^ndesdiesftemiirscbfi'
Htm n'ont foint nui à tittàHJfmtnt
de la religion chrétienne. . 301.
CtêL. X. Suite de tkabFiJpement du chrifiitxmfint
Cofnment Co^^Thi^rDSi tnfit hrê-
gion dominante. Décadence dt tm^
cterme Rome. . . jog.
Ch. XI. Caufes de la chiite de r empire Romairu)^*
GS. XÎL Suiie de la décadence de Paucietmt i»-
me. \ . . . P^
en. XIII. Origine de la puiffance dei papes. Digref-
Jtonjkr le Jaùtè des ràis. Lettré de St
fkxtt à PïPlW , maire de France , *•
♦entt roi. Priteuduet donations au St.
Siège. . . . P2
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> y ^Sir^i^jr» ■ m
DES Chapitres. 491
CànV.XlY.Batdé tiglife en Orient avant Gmarle-
MAGNÈ. Querelle pour les images, Ré^
volution de Rome commencée, Pag. ))o.
Cé. X V. De CHARIEMAGiîE. Son anAition^fafo-
iitique. Il dépouille fes neveux de leurs
états, Oppreffton & converjton des Sa-
*ô»/ , Êf r. . ; . 5 î <i
Ch. JtVI. Cn k KL E M AbVE empereur d'Occident,
Î45^-
Cit. XVII; Mœurs , gouvernement & ufages vers le
tems de CharLEMAG^E. . ^49-
Cn. XVIIL Suite des ufages du tems de C H A R I E-
M AO N È , 6f ttoant lui. S'il était dejpo^
^ tique ^^ k royaume héréditaire, 554.
Gd. XIX. Su^te des stages du tems de Charie-
MAGNE. Commerce , finances , fcien»
cet. . . . . -35^.
CH. XX. De lareligiondti tems de CRAEtEMAG'SE.
. . 3^?.
Câ. XXI. Suite des rites religieux du tems de Char«
• LEMAGNE. . . . i^2.
GA. XXII. Suite 4es ufages du tems de CharIE-
MAGNE. De la juftice , des loix. Coutu*
mes Jîngttliires. Epreuves. . ^79.
Ch. XXIII. LôUM lé fàibte , ou le débonnaire, ^^q/if
par fes enfans-^ par des prélats. Î84.
Cfl. XXIV. Mt<a de FEurope après la mort de LoDIS
le débonnaire ou le faible. VAlletnagne
pour toujours fiparée de l* empire Franc
ou Français. . . J91.
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49*
T A B L B4
-'^î*^
Chap. XXV. Des Normands vers te ueuvihnejticie'
Pag. 599-
Çh. XXVI. De r Angleterre vers le neuvième jUcle.
Alfred le grand. . , 40c.
Ch. XXyih De fEfpagne&desmufuimans Maures^
aux huitième & neuvième Jîicles. 408.
Ch. XXVni. Pmjfançe des mufulmans en 4fif &eH
Europe , aux bidtième 8f muniènufii»
des. V Italie attaquée par eux. Cofidtà'
te magnanime du pape LéoN IV. 41 s*
Ch» XXIX. De t empire de Conjiantinopîe \ aux bm^
tième & neuvième Jtèçles, . 4i8«
Ch. XXX. De ntalie s des papes ^ du divorce àe\jQ^
: THAI&E roi de Lorraine , ^ des au*
très affaires de fèglife , aux bsntiime
f^ neuvième Jtècles. . . . 424.
Ch. XXXI. peVhot\us,& du fcbifme entrer Orient
^r Occident. . ... 429*
Ch. XXXII. Etat de Pempire i Occident , à lafin du
neuvième Jlécle. • . 4j6.
Ch. XXXIII. Dts fiefs 6f de f empire. . . 4?9.
Çh. XîpClV. D'Othon le grai^di, au dixième Jîècle.
; . . ; . 441.
Ch. XXXV. Delapapasité au dixième Jtècle ^ avant
;ii'Othon le grand yï rendit maître
de Rome. . . . 44).
Ch. XXXVI. Suite de Pempire ^Othon , & de fi.
tôt de rUfidie. . . 448.
Ch. XXXVII. Des empereurs Othon H Êf III , 6f ^
Rome. . • . 452.
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»^i^l
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DES Chapitres. 493 s
Chap. XXXVni. De la France , vers le tems de Hu-
GUES Capet. . Pag. 457.
Ch. XXXIX. Etat de la France aux dixième ^
onzième Jticles. Excommunication
du roi Robert. . 462.
XL. Conquête de Naples & Sicile par des
gentilshommes Normands. 467.
XLI. Le la Sicile en particulier , 6? du
droit de légation dans cette isle,
... . • 47^*
Ch. XL il Conquête de î Angleterre par GUIL-
LAUME duc de Normandie. 4Sa
Ch.
Ch.
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il
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JUMt.
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E R RATA
POUR LE PREMIER VOLUME
D X
L^ESSAI SUR LES M(KURS.
Page 281. ligne 20. était la notmile. lifet : était nou«
velle.
pag. 282. Ug. ?. *yMJ cent avec fept cent concubines,
lifez : fept cent avec trois cent concubines.
pag. 927. lig. 26. meilleurs rublicijies. lifez: meilleurs
publiciftes.
pag. 41 d. lig. ^-fage. lifez : juftc. •
pag. 484. lig. 6. Quelques autres, lifez : Quelques au-
teurs.
^ÇtOi^
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i 596Û3477
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