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THE LIBRARY
OF
THE UNIVERSITY
OF CALIFORNIA
LOS ANGELES
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HISTOIRE
SE
HAINAUT.
IMPRIMERIE DE H. FOURNIER,
RUE DE SEIHB,It° l4.
HISTOIRE
DE
HAINAUT,
PAR JACQUES DE GUYSE,
TRADUITE EN FRANÇAIS AVEC LE TEXTE LATIN EN REGARD,
BT àCCOUPlGNÉB SE NOTES.
( Le texte est publié pour la première fois sur deux manuscrits de la Bibliothèque
du Roi.)
TOME SECOND.
A PARIS,
CHEZ A. SAUTELET ET 0% LIBRAIRES,
PLACE DE LA BOURSE.
A BRUXELLES,
CHÏZ ARNOLD LACROSSE , IMPRIMEUR-LIBRAIRE.
M nccc XXVI.
PRÉFACE.
JLes annales de Hainaut, qui sont l'objet principal
de cet ouvrage, n'ont pas occupé l'auteur exclusi-
vement. Il donne l'histoire de la Belgique entière;
il y joint même l'histoire sainte, l'histoire romaine,
celle des Perses et des Grecs. Il s'efforce de n'o-
mettre aucun fait important , et il y réussit assez
bien. Il commet quelques erreurs sans doute; mais
qui peut s'en croire exerat? Nous avons tâché de
les corriger, et nous n'avons épargné ni soins ni
recherches pour y réussir.
Le second livre commence à l'an 7^5 avant notre
ère, et la partie du troisième livre que nous donnons
ici finit à la destruction de Carthage, l'an 146 avant
notre ère. C'est un intervalle de six cent vingt-neuf
ans pendant lesquels nous trouvons ici une histoire
complète de la Belgique. La prise de Rome par
les Gaulois est l'événement qui paraît le plus
important et le plus glorieux pour nous dans cet
intervalle , ainsi que l'établissement des Gaulois
dans la Galatie et la Gallo-Grèce. Aussi Jacques de
Guyse ne l'a point oublié : il nous donne de longs
détails sur Brennus , qui fut le chef de cette expé-
dition , et ces détails sont puisés dans des annalistes
1 250925
l'RKFACE.
plus anciens que lui. Il ne les copie pas sans quel-
que critique, puisqu'il rejette la plus grande partie
(les récits d'un ancien historien d'Ecosse, auquel
il donne le nom de Crésus. Il est plus confiant
lorsqu'il rapporte l'histoire de Bavo qui, des bords
de la Phrigie, vint faire nn établissement dans le
Ilainaut. Pourquoi Lucius de Tongres et Nicolas
llucléri, desquels il paraît avoir tiré ces anciennes
traditions, n'auraient^ils pas cru qu'un neveu de-
Laomédon serait venu s'établir chez eux, après
avoir vu lui comte de Hainaut devenir empereur
de Constantinople? Ce dernier fait n'était-il pas en
quelque sorte plus incroyable que le premier ?
N'avons-nous pas vu presque de notre tems un des
chefs de la secte des Quakers donner son nom à la
Pensilvanie, après avoir été assez long -tems en
prison à Neugate ? Qu'on nous rapporte ce fait
à la manière des anciens annalistes, sans les dé-
tails qui ne nous permettent pas d'en douter, et
nous aurons bien de la peine à l'admettre. Un
gentilhomme corse devenu notre empereur, allant
mourir prisonnier des Anglais dans une île d'A-
frique, ne nous a-t-il pas offert pendant tout son
règne, une véritable fantasmagorie? Reportons-
nous à l'époque dont il est ici question, et sup-
pléons à notre auteur, en rapportant im fait non
moins (xtraordinaire qui s'est passé à l'époque
dont il parle ici, et dont il ne nous dit rien, sans
doute [)arce qu'il l'a cru étranger à son royaume
de lîelgis, mais qui prouve encore la réalité de
PRÉFACE. iij
ces anciennes émigrations, plus faciles autrefois
qu'aujourd'hui.
Sigovèse et Bellovèse sont les chefs de cette
expédition. Tous deux étaient neveux d'Ambigat,
roi des Bituriges , qui avait alors la principale au-
torité sur les Celtes , et régnait à peu près sur le
tiers de la Gaule. Cet Ambigat, dit Tite-Live,
« avait tout l'ascendant que peuvent donner à ini
« souverain ses qualités personelles et la pros-
« périté de son pays ». La population de cette con-
trée s'accrut tellement sous son empire, qu'elle
ne pouvait plus y subsister, et qu'il était difficile
de comprendre comment une pareille multitude
pouvait être gouvernée. Ce prince, déjà avancé en
âge, voulant en délivrer son royaume, chargea
Bellovèse et Sigovèse, fils de sa sœur, jeunes et
pleins d'activité , de conduire une partie de ses
sujets dans des contrées où , selon les augures , les
dieux eux-mêmes avaient fixé leur séjour. Il les
avertit qu'ils auraient besoin d'être assez nom-
breux pour triompher des anciens habitans , et
leur permit d'emmener autant d'hommes qu'ils
voudraient. Le sort donna à Sioovèse la forêt Her-
cinie, tandis que Bellovèse eut une route bien plus
agréable vers l'Italie. Cet événement mémorable
est ainsi rapporté par Tite-Live, qui en fixe l'épo-
que au tems de Tarquin l'Ancien , deux cens ans
avant le siège de Clusium; et ces deux dates s'ac-
cordent très-bien ensemble : le siège de Clusium
est placé sous l'an 388 avant notre ère, suivant le
IV PREFACE.
tableau chronologique qui termine la dernière
édition du Tacite de Bureau de Lamalle (i). Ainsi
l'expédition de Sigovèsedoit être portée à l'an 588
avant notre ère, époque à laquelle régnait en effet
Tarquin l'Ancien.
Les Celtes, de l'aveu des Romains eux-mêmes ,
étaient donc, à cette époque, bien plus puissans
que les Romains, et portaient leurs armes d'un
côté dans le nord de l'Allemagne, et de l'autre
dans l'Italie. Tite-Live n'est pas le premier histo-
rien qui l'atteste. Jules-César avait dit avant lui,
en parlant évidemment de cette expédition : « Il
« fut un tems où les Gaulois, plus belliqueux et
(c plus vaillans que les Germains, leur fesaient
« d'autant plus volontiers la guerre, qu'elle leur
« donnait lieu de se débarrasser d'une multitude
« d'hommes que le pays ne pouvait faire subsister,
« et dont ils formaient des colonies qu'ils en-
« voyaient au-delà du Rhin. Les Volces-Tectosages
« occupèrent donc, au voisinage de la forêt Her-
« cinie, les lieus les plus fertiles de la Germanie,
« et s'y établirent : ils s'y maintiennent encore de
« nos jours, avec une très-grande réputation de
« justice et de valeur (2). »
Ce passage nous apprend ce que Tite-Live laisse
ignorer, le nom des peuples qui suivirent Sigovèse :
c'étaient les Volces-Tectosages , alors soumis aux
Bituriges, et peut-être impatiens, par cette raison,
(i) Chez Michaud, Paris j 1817. vi , 353.
(2) Caesar, de Bello ^allico, vi , 24.
PRÉFACE. V
de quitter leur pays. « La partie voisine des Cé-
« vennes », dit Strabon (i), « y compris le côté
« méridional de ces montagnes jusqu'à son extré-
« mité, depuis les environs de Lodève jusque vers
« Toulouse, est occupée par les Volces, surnommés
« Tectosages , c'est-à-dire couverts de casaques ou
« de capotes de laine. Quant à la partie septen-
« trionale des Cévennes, ce territoire abonde en
« mines d'or. La population paraît même en avoir
« été jadis si puissante et si nombreuse, qu'à l'oc-
« casion des troubles qui s'y élevèrent, ils chas-
te sèrent de leur pays un grand nombre de leurs
« compatriotes. Une partie de ces fugitifs, associés
« avec des habitans d'autres pays, envahit la Phri-
« gie, voisine de la Cappadoce et de la Paphlas^onie.
« Nous avons la preuve de cette émigration , « con-
tinue Strabon , » dans le nom même de Tecto-
« sages que porte encore aujourd'hui , » c'est-à-dire
vers l'an i8 de l'ère chrétienne (2), « l'une des
« trois nations qui occupent la Phrigie : c'est celle
« qui habite le territoire d'Ancire,» Angora dans
l'Anadolie (3). «Quant aux deux autres, connues
« sous le nom de Trocmes et de Tolistoboges , ces
« deux noms exprimaient deux divisions de l'ar-
ec mée gauloise , ainsi appelées du nom de leurs
« généraux respectifs (4)- »
(1) IV, 187. Voyez la traduction française , ii, 3i.
(1) Voyez l'art. Strabon dans la Biographie unii>erseUe , xliv, i.
(3) Traduction française de Strabon, ii. 3a.
(4) Strabon, xii , 566, Voyez la traduction française, iv, .S9.
Vj PREFACE.
Tacite (i) paraît faire allusion au passage de
Jules -César en nommant d'autres nations, lors-
qu'il dit que deux peuples sortis de la Gaule , les
Helvétiens et les Boiens, s'étaient établis entre la
forêt d'Hercinie, le Rhin et le Mein. Cette forêt
d'Hercinie s'étendait jusqu'à la forêt Noire; elle
allait encore plus loin du côté du levant; elle se
prolongeait dans la Pologne et dans la Hongrie.
Elle était nommée Orcinie par Ératosthènes , Ar-
cinie par Aristote ; une partie s'appelle encore
aujourd'hui leHartz, nom corrompu iX Hercjrda[i)
ou Arcynia; ou peut-être c'était le nom primitif de
ces forêts, dont les Grecs et les Romains avaient
adouci la prononciation, en les désignant sous les
noms ^Arcynia ou <y Hercjnia.
On voit par tous ces détails puisés dans quatre
auteurs dont le témoignage est irrécusable , et
auxquels on pourrait en ajouter plusieurs autres,
tels que Pline et Justin , de quelle importance était
l'expédition conduite par Sigovèse. On ne doit donc
pas être surpris que ce nom célèbre se trouve in-
scrit sur trente-six médailles, découvertes en 1806
dans le département de Vaucluse, au lieu où les
Auvergnats furent battus par les Romains, et qui
portent en caractères étrusques ce nom lelikovesij
bien ressemblant à celui de Sigovèse. On peut voir
sur ces médailles l'ouvrage que j'ai publié en 1808
sur les antiquités du département de Vaucluse (3).
(1) De Morihus Germanoriirn , c. 28.
{1) La Germanie, par C. L. F. Panckouckc. Paris, i8a4, p. i'|3.
{>) Pag. 385.
PRÉFACE. vij
Elles offrent tous les caractères d'une époque très-
ancienne, et sont conservées à Paiis dans mon ca-
binet, à l'exception d'une qui m'a été soustraite
par un graveur, et de trois cédées à M. Tôchon ,
qui les avait fait graver pour un ouvrage sur les
médailles gauloises , qu'une mort prématurée Ta
empêché de finir.
Quant à Bellovèse, Tite-Live, né dans le pays
qu'il envahit, nous parle plus en détail de son ex-
pédition , connaissant très-bien ce point d'his-
toire. « Bellovèse , dit-il , rassemble autour de lui
« ce qu'il y avait de jeunesse surnuméraire chez
«les Bituriges , les Arvernes, les Sénonais, les
« Eduens , les Ambarres, les Carnutes , les Au-
« lerques; et, à la tète d'une armée formidable,
« tant en cavalerie qu'en infanterie, il arrive dans
« le pays des Tricastins. Là il trouva devant lui la
« barrière des Alpes, qu'il jugea insurmontable ;
« et je ne m'en étonne pas, puisqu'elle n'avait
« point encore été franchie, du moins de mémoire
« d'homme, à moins qu'on ne veuille croire aux
« récits débités sur Hercules. Tandis quelesGau-
« lois emprisonnés aux pies de ces hautes mon-
« tagnes , recherchaient par quels moyens ils
« pourraient s'ouvrir une route dans un autre
« monde à travers ces escarpemens inaccessibles
« qui se perdaient dans les cieux , des considéra-
« tions religieuses vinrent encore arrêter leur
« marche. Ils apprirent que des étrangers, qui,
« comme eux , cherchaient un établissement ,
viij PRÉFACE.
« étaient attaqués par la nation des Saliens. Ces
« étrangers étaient arrivés des bords de la Pho-
« cide : on les appelle aujourd'hui Marseillais. Les
« Gaulois, envisageant dans le succès de ces nou-
« veaux venus le présage de leur propre dt^stinée,
« les protégèrent; et grâce à leurs secours, le ter-
M rain que les Phocéens avaient occupé à leur dé-
« barquemont sur un rivage qui d'ailleurs n'était
« qu'une vaste foret, devint une ville puissante.
« Pour eux, ils franchirent les Alpes, jusqu'alors
« impraticables, par la gorge de Turin, défirent
« les Toscans en bataille rangée , non loin du Tésin ;
« et comme ils apprirent que le terrain sur lequel
« ils avaient campé, s'appelait le champ des In-
« subriens, la conformité de ce nom avec celui
« d'Insubrès, canton des Éduens, leur paraissant
(f d'un augure favorable, ils y bâtirent une ville
« qu'ils nommèrent MedioIaiiwn,y> Milan (i).
On voit que ces peuples n'étaient pas aussi bar-
bares que Polibe veut nous le faire croire , lorsqu'il
nous dit (2) que lors de l'invasion des Phocéens,
les Gaulois étaient répandus par villages qu'ils ne
fermaient point de murailles. Le mot urbs qu'em-
ploie Tite-Live pour désigner Mediolanum y n'a
jamais été employé pour signifier un village, et
cette ville ne fut pas la seule qu'ils bâtirent dans
le nord de l'Italie. En effet, ceux qui l'avaient
construite furent suivis bien tôt après d'une troupe
(i)Titc-Livc, V, 34.
(a) Liv, 3 , c, 4-
PRÉFACE. ix
de Cénomans, conduits par Elitovius, qui , s'atta-
chant à leurs traces , traversèrent les Alpes par le
même défilé, à l'aide de Bellovèse, et vinrent se
fixer dans le pays possédé alors par les Libuens ,
où sont maintenant les villes de Brescia et de
Vérone (i). On trouvera dans la suite de ce pas-
sage les autres invasions faites par les Gaulois à
différentes reprises. J'ai discuté fort au long tous
ces faits dans un autre ouvrage (2).
Les Phocéens n'étaient pas les premiers Grecs
qui fussent venus dans la Gaule, Si l'on en croit
Timagènes , copié par Ammien Marcellin (3) , et
son autorité , fondée sur de nombreuses recher-
ches, n'est pas à dédaigner, avant l'arrivée des
Phocéens , les Gaulois avaient déjà eu de fréquens
rapports avec les Grecs. D'abord les Doriens
avaient, dit-il, fondé des colonies sur les côtes
de l'Océan. Dorienses Oceani locos inhabitasse con-
fines. Ensuite, après la prise de Troie, quelques
corps de l'armée grecque , errans et dispersés en
tous lieus, auraient occupé dans la Gaule les por-
tions de terrain inhabitées. Ces émigrations , dit
Timagènes, sont attestées par le témoignage con-
stant de tous les habitans de ce pays, et de plus
JE l'ai lu gravé sur leurs monumens. Regionum
(1) Ïite-Live , v, 35.
(2) Tableau historique et géographique du monde. Paris, 1810,
IV, I et suiv.
(3) XV, 9. Timagènes , et diligentiâ grcecus et lingud , hœc quœ
diii sunt ignorata , collegit ex niultiplicibiis libris : ctijus fidcm
sequuti eadeni distincte doceùiiniis et apertè.
X PRÉFACE.
autem incolce ici magïs omnibus adseveranl , quocl
ctiàm nos legimus in monumentis incisum (i).
On peut joindre à ces faits curieux un autel et
des inscriptions grecques fort anciennes trouvées
en Calédonie et citées par Solin (2) , l'autel con-
sacré près d'Ausbourg à Ulisse, avec son nom et
celui de Laërte son père, plusieurs tombeaux et
monumens avec des inscriptions en caractères
grecs , qui existaient encore du tems de Tacite (3)
sur les confins de la Germanie et de la Rhétie (4)-
Tous ces rapprochemens entre les Grecs , les
Romains et les Gaulois, sans oublier les Cartha-
fijinois , puisque l'ancienne écriture grecque n'est
autre chose que l'écriture phénicienne , paraissent
incontestables. Mais devons -nous admettre, sur
la foi de Lucius de Tongres , extrait par Jacques
de Guyse, les faits qu'il nous raconte sur les expé-
ditions de Servius TuUius et des autres rois de
Rome dans la Belgique ? c'est ce qui paraît plus
difficile. Il semble cependant que l'histoire des
anciens rois de Rome a été défigurée par les ré-
publicainsquiles ont chassés. Denis d'Halicarnasse,
qui a voulu la reconstruire lorsque l'établissement
(i) Ammianus Marcellinus, xv, 9.
(2) Cap. xxii.
(3) Be Moribus Germanoriun , cap. iii. Voyez Pellcrin , Recueil
(ie Médailles, t. i, p. 14.
(4) Je dois ces rapprochemens à M. Bureau de Lamallc , qui a
bien voulu me communiquer un mémoire manuscrit de lui sur les
Auïerci, qui a été lu à rAcadc'mie des inscription» m 1822, et
<|ui me'riterait d'être public.
PRÉFACE. XJ
dereinpire romain rendait raiicieiine autorilédes
rois moins odieuse, a puisé tous ses matériaux dans
les historiens grecs , et n'a parlé des Gaulois que
comme de barbares sans civilisation. Les Belges
ont-ils eu des historiens assez anciens pour que
les noms et les dates aient pu se transmettre fidè-
lement d'une génération à l'autre jusqu'à Lucius
de Tongres? C'est ce que nous avons peu de moyens
d'éclaircir. Fabius Pictor, le premier des histo-
riens romains , vivait deux cent vingt-trois ans
avant notre ère, et conséquemment plus de cinq
siècles après Romulus. Il consulta les monumens
publics de la république ; mais ceux des rois avaient
été détruits.
Si l'ancienne histoire des Romains qui nous ont
conquis est incertaine , la nôtre l'est sans doute
encore plus : mais nous croyons rendre service à
ceux qui aiment nos antiquités, de leur faire con-
naître un ancien annaliste qui nous donne une
histoire suivie de la Belgique depuis la guerre de
Troie jusqu'au tems auquel il a vécu; histoire
écrite d'après d'autres plus anciennes , sans aucun
ornement de stile, et sans aucune de ces additions
romanesques destinées à embellir un récit.
Une lettre que je viens de recevoir de Cambrai,
sous la date du 27 juillet dernier , m'annonce un
voyage fait quelques jours auparavant à Douai ,
où Ton conserve plusieurs antiquités découvertes
récemment à Famars, telles qu'un trépié qui
servait aux sacrifices de Bacchus , des armes
xij PRÉFACE.
fort anciennes et beaucoup de vases étrusques.
C'est sans doute une manie condamnable que de
se créer une antiquité factice, entièrement puisée
dans notre imagination; mais c'en serait une peut-
être coupable de rejeter sans examen des monu-
mens authentiques qui nous donnent une histoire
non interrompue antérieure à celle des Romains.
Nous mettons nos lecteurs à portée de juger cette
grande question , et nous espérons que cette pu-
blication en amènera d'autres qui serviront à mieux
résoudre encore cet intéressant problème.
Paris, 3 août 1826.
Le Marquis de Fortia.
II.
xij PRÉFACE.
fort anciennes et beaucoup de vases étrusques.
C'est sans doute une manie condamnable que de
se créer une antiquité factice, entièrement puisée
dans notre imagination; mais c'en serait une peut-
être coupable de rejeter sans examen des monu-
mens authentiques qui nous donnent une histoire
non interrompue antérieure à celle des Romains.
Nous mettons nos lecteurs à portée de juger cette
grande question , et nous espérons que cette pu-
l3lication en amènera d'autres qui serviront à mieux
résoudre encore cet intéressant problème.
Paris, 3 août 1826.
Le Marquis de Fortia.
II.
ANNALES
HISTORIJ:
ILLUSÏRIUM PRINCIPUM
HANNONI^.
LIBER SECUNDUS.
CAPITULUM I.
In nninine Sanctir Trinitatis. Incipit liber seciindiis Annaliiiin liis-
turiarum llliistriiim principiim Hannoniae^ et primo de L rso ,
rege Belgensium.
P osT trojanae civitatis destructionem , fermé anno
quadringeritesimo quinto (i) ; ab exordio civitatis
belgensis quadringentesimo, videlicet Osiœ, régis Juda
(i) Le manuscrit de S. Germ. ajoute : vel, secundUm aliani opi-
ninnem, cccci. C'est-à-dire , vers l'an ^yS ou 779 avant notre ère.
Eustbe rapporta la 5o' année d'Osias à l'an 1241 d'Abraham , nu
Tan 776 avant notre ère ; en ajoutant 4o5 à celte année, on aura
1 180 pour l'année i depuis la prise de Troie, qui est celle que donne
Eusèbe pour cet événement. Ainsi Jacques de Guyse est toujours
d'accord avec ce cbronologisle.
/ ,7/ ,lrO i.;«,tiiu
<^^ '//r^^^^/
. ANNALES
HISTORIQUES
DES NOBLES PRINCES
DE HAÏNAUT.
LIVRE SECOND.
CHAPITRE I.
Ail nom de la Sainte-Trinité. Ici commence le .second livre des
Annales dos illustres princes de Hainaiit. D'Lrsiis , roi dos
Belges.
HiNviRON Tan 405, ou, selon d'autres, l'an 401 de la
ruine de Troie , ou l'an 400 de la fondation de Belgis ,
c'est-à-dire , l'an 60 du règne d'Osias , roi de Juda
et de Jérusalem, lorsqu'Amulius régnait chez les Latins,
l'assemblée du peuple belge se donna pour premier
roi , dans la ville de Belgis , le célèbre chasseur ÏIrsus ;
il eut, dit-on , de ses femmes légitimes trente-huit fds ;
et ceux-ci lui donnèrent soixante-quatorze petits-fils ,
4 Annales
v[ J(;rusalom circiter ({niiK|uagcsimo ; apiul Latinos
Amulio (i) conrcgnantc , clectiis est à coniinunitate
populi primus rex , in civltate belgensi , Ursus, insi-
gnis venator, qui ex uxoribus legitimls octo ettriginta
filios , et quatuor et scptuagiiUa ex eisdem nepotes,
omnes in armis doctissinios legitur liahuisse. Erat
siquidem Ursus admirandae naturœ , robustus et
pilosus ut ursus, à similitudlne nomen habens ; ele-
gantis staturœ, quia cubitibus quasi duabus al-
tiorcs civitatis exccdebat ; faciei torrentis sed ve-
nustœ ; audacis atque impertcrribilis animi ; levis et
agilis corporis, clarus intellcctu, crudelis affectu,
horribilis aspcctu , astutus affatu et tardus in incessu.
Hic legitur ursos quinque propriis manibus discerp-
sisse ; apros et consimiles feras solus aggrediebatur,
et viribus propriùs domabat.
GAPITULUivl II.
De cUvisione imperii Bcigensium.
ViDENs igitur Ursus , anno primo sui regni , (juod
pauci valdè ad templa deorum convenirent , et quod
natio ({uœHbct dcos et idola sibi composuorat , leges-
que condiderat novas , tristis legatos misit ad omncm
[t) Dans Euscbc la 21* année d'Aniiilius répond à la 5o' d'Osi;»*.
DE UAliXALT. LIVRE II. ^J
qui lous se montrèrent fort habiles dans les armes. Cet
Ursus était d'une conformation extraordinaire. Robuste
et couvert de poil comme un. ours , sa ressemblance
avec cet animal féroce lui en avait fait donner le nom.
Sa taille était belle et élevée , car il surpassait de près
de deux coudées les plus grands citoyens de Belgis. Sa
figure inspirait la terreur ; mais elle n'était pas sans
beauté. Il avait un courage et une audace que rien ne
pouvait ébranler. Il était léger et agile de corps , d'un
esprit vaste et intelligent ; cruel dans ses affections ,
horrible à voir, rusé dans ses discours et lent dans sa
démarche. On rapporte qu'il mit de ses propres mains
cinq ours en pièces , qu'il attaquait seul les sangliers
et les autres bêtes sauvages^ et qu'il lui suffisait de ses
propres forces pour les domter.
CHAPITRE II.
Divi'^ion lie l'empire îles Hclr^es.
Ursls s'apercevant , dès la première année de son
règne , que les temples des dieux n'étaient fréquentés
que par un petit nombre de personnes , que chaque
nation avait adopté des dieux et des idoles particulières,
et qu'elles s'étaient choisi de nouvelles lois, ressentit une
6 ANNALES
uatioiiein et niunituin clvitatem , ut tributa débita cleis
antiquitùs consueta transmitterent , et civitatl bel-
geiisi , Icgibiis et sibi régi, taïufuàm saccrdotiim prin-
cipi, obedireiit, aiit dcfeiiderent se. Qui omnes uno
aiiinio reniiseruiit nuiicios vacuos et sine bonore ;
undè et tune in quatuor partibus imperium fuit see-
tum. Nam Saxonia, Hassia , Suevia (i), Dacia (2),
et tota Gciinania Irans lUicnum , unum regem eb-
gentes , novuni regnum condiderunt. Belgis Comata ,
quae etTreberis , Agrippina, Tungris, Mosellana (3),
eivitas Argentata et eaeterifi civitates inter Rbenum et
Mosani , ad invicem bgam facientcs, novuni donii-
nium ineœpeiunt. Senonenses (4), Celtes (5), Sequa-
nistae (G), Allobroges (7I, Aquitani (8), cœterœque
nationes à montibus Rbodanieis usquè ad mare bis-
panicuni (9), ad invieeni conjurati , tanquàm regnum
unicum , persistere eontià iJelgos se ferociter dispo-
suerunt. Jîelgis auteni Galliea , qua.' et Belvacus, Rbo-
donus , Lutetia, Ncustria, Ganda , Lusa (10), Mo-
riana (i j), Rbuteni (12), Britones(i3) et Albani,qui
(1) La Smiahc , iiitisi (HIC IVntriul certainement l'auteur.
(2) La Valaoliic , la Moldavie , la Servie,
(3) Agrii)()ine est atijourcriiiii Colopjne , et Mosellane iMetz.
(4) Peuples du Se'nonais, de l'Aiixerrois et du INivernais.
(5) Peuples entre in Loire et la (iaronne.
(6) Les Francs-(>omfois.
(7) Peuples entre le ilhone rt risère.
(8) Peuples de la Guienne.
(9) Le golfe de Gascogne.
(10) Leuse, dans K; Ilaiiiaut.
(11) TeVoueiinr.
(l'j^ Les Flamamls.
^li Cfux de la Pi-fite Bretagne.
DE HAINAUT. LIVRE II. 7
vive douleur de ce changement, et envoya des députés
à tous les peuples et à toutes les places fortes , afin de
les engager à payer, selon l'antique usage , les tributs
qui étaient dus aux dieux , et à obéir à la cité de Belgis,
à ses lois et à lui-même , de même qu'au prince des
prêtres ; ou , en cas de refus , à se tenir prêts à com-
battre. Partout ses députés furent renvoyés sans pré-
sens et sans honneurs ; et c'est depuis ce tems que l'em-
pire belge a été divisé en quatre parties. La Saxe , la
Hesse , la Suévie , la Dacie et toute la Germanie trans-
rhénane se donnèrent un roi, et fondèrent un nouveau
rovaume. Belgis-la-Chevelue ou Trêves , Agrippine ,
Tongres , Mosellane , Strasbourg et toutes les autres
villes qui se trouvent entre le Rhin et la Meuse , se
liguèrent entre elles et commencèrent un nouvel em-
pire. Les Sénonais , les Celtes, les Séquaniens , les
Allobroges , les Aquitains , et , en général , tous les
peuples qui habitent entre les montagnes du Rhône et
la mer d'Espagne , s'étant conjurés entre eux , comme
s'ils n'eussent formé qu'un seul royaume , se préparè-
rent à opposer aux Belges la plus vigoureuse résistance.
D'un autre côté , Belgis la gauloise ou Beauvais ,
Rouen , Lutèce , la Neustrie , Gand, Leuse , Moriane ,
les Ruthènes , les Bretons , les Albaniens ou les Scots ,
s'étant de même ligués entre eux , occupèrent contre
les Belges la quatrième partie de l'empire. Belgis ne
retint dans son parti que les villes quil'avoisinent, telles
que Solèmes , Famars , la cité de Mercure , et quelques
forteresses ou châteaux , mais en petit nombre , et se
vit ainsi dépouillée de tous ces grands honneurs qu'elle
avait possédés.
8 ANNALES
et Scoti , etiàm ad invicem combinat! , contra Belgos
quartam partem imperii tenuerunt. Remansit autem
Belgis sola cum suis circumvicinis clvitatibus , videli-
cet, Solis, Martis, Merciirii, paucis supcradditis oppi-
dis et castellis , tantis honoribus viduata.
GAPITULUM 111.
Qualiter rcx Ursus regnum Belgensium res arcire disposuit.
TuNC rcx Ursus , iratus valdè , omnem virum for-
tem et armatum in suis civitatibus colligens , dispo-
sait dictas invadcre nationes. Collegit autem in sua
civitate belgensi ducenta millia , in civitate fani Solis
octoginta millia , in civitate fani Martis sexaginta mil-
lia , in civitate fani Mercurii quinquaginta millia , et
in patriâ circumadjacenti usquè ad mare, et irsquè ad
Mosam, et usquè ad Ausonam, centum millia homi-
num expeditorum ad prœlium ; et suas civitates et
patriam munitissimas dcrclinquens, primo invase-
runt Morianam civitatem atque Rutlienos , velut ca-
tuli leonum sanguinem prœdœ sitibundi, Videntes
autem nationes atque civitates ligœ illiûs quœ dcbilior
erat , inter alias primum aggressum sustinere debere,
dccreverunt quœlibet per se potiîis uxoribus et liberis
DE HAINAUT. LIVRE ir.
CHAPITRE III.
Comment le roi LVsus se disposa à rétablir le royaume des Belges.
Alors Ursus , violemment irrité de cette révolte gé-
nérale, rassembla tous les hommes robustes et armés
qu'il trouva dans les villes qui lui étaient soumises , et se
disposa à envahir les terres des rebelles. Il leva deux
cent mille hommes à Belgis , quatre-vingt mille à So-
lèmes , soixante mille à Famars , cinquante mille dans
la ville de Mercure , et cent mille dans tout le pays
voisin compris entre la mer, la Meuse et l'xVisne. Aban-
donnant alors sa patrie et les villes qui étaient sous sa
domination , après les avoir auparavant fortifiées et
approvisionnées , il commença les hostilités en fesant
attaquer la ville de Moriane et les Ruthènes par ses
soldats , qui se montraient aussi altérés de sang que de
jeunes lions qui attendent leur proie. Mais les peuples
et les habitans des cités qui formaient la ligue la plus
faible , voyant qu'ils allaient essuyer le premier choc ,
résolurent de rester avec les femmes et les cnfans dans
10 ANNALES
propi'iis in suo solo fortunam cxpectare deorum ,
(jiiàm, extra corum limites , incertum campale bcUum
coDtrà Bclgos inirc primariô. Cùm igitiir IMorianam
IJrsus ciicumciiigisset, non fuit qui extra progrcde-
retur ; illico vero antiquas renovavit armorum leges,
inter quas fuerunt eœ.
CAPITULUM IV.
Di" Lej;ibiis Ursi, régis Rcl^^oriirn.
Prima ut , sub excoriationis pœnà , nuUus impu-
ber, ^aut praegnaiis niulier^ aut sexagenarius intei-
ficeretur, signa misericordiee faciens aut j)etens.
Item ut nulla combureretur liabitatio, nisi rcx ipse
primo incendiuni ministraret. Item ut nulla virgo
corrumpcretur. Item ut rcqualis esset portio des-
cendentibus ad prœlium, et remanentibus ad sarci-
nas. Item ut nulli viro aut mulieri seipsum defen-
denti aut invadenli inter vigesinunn et quinquage-
simum annum parcerent , etc. Obsidione tandem
vallatà et eonfirmatâ , reliqui patriam ciroumadjaccn-
teni pcrlustrantes usquc ad mare et usquè ad Neus-
triam, et eircumferentialiter usquc ad triginta mil-
liaria. Sed quis ces cxcreeret minime repercrunt, nisi
solùm Albanos profugos qui in locis maritimis et
DE IIAINALT. LIVRE II. Il
leurs propres pays et d'attendre le secours des dieux ,
plutôt que d'aller hors de leurs frontières combattre
les Belges en rase campagne. Ursus , après avoir investi
Moriane à tel point qu'aucun habitant ne pouvait en
sortir, renouvela les anciennes lois des armes , entre
lesquelles je rapporterai les suivantes.
CHAPITRE IV.
Lois d'Ursiis, roi des Relges.
La première loi que rendit Ursus fut de défendre ,
sous peine d'être écorché vif, de tuer aucun enfant ,
aucune femme enceinte ni aucun sexagénaire, qui im-
plorerait merci , soit par signes, soit par paroles. Il
défendit aussi de mettre le feu à aucune habitation sans
l'ordre du roi , et il ordonna qu'il ne serait point fait
de violence aux jeunes fdles. Il régla de plus que les
soldats qui resteraient auprès des bagages auraient une
part égale à celle des soldats qui iraient au combat , et
qu'on ne ferait point de grâce à tout homme ou à toute
femme de l'âge de vingt à cinquante ans , qui attaque-
rait ou qui opposerait de la résistance, etc. Enfin le gros
de son armée ayant achevé et assuré le blocus de la
place , le reste de ses troupes battit la campagne, et se
répandit jusque sur les frontières de la iNeustrie et jus-
qu'à la mer, cl à lionlc^ milles aniour de la place. Mais
12 ANNALES
tutissimis sub Ruthenorum potestatc lalitabant. Qui
ad Ursum regem legatos transmiscrimt , misericor-
diam cxpostulantcs. Cîim animadvcrtcret rcx obsce-
nissimos Albanos illùc latitarc , qui nobilem interfe-
cerant prolcm saccrdotum Belgis , proùt patet libro
primo supcriiis in fine, decrevit ipsos invaderc, sed
iinus diicum affatus est rcgcm : « Rex, inquit, in
sempiterniim vive. Cùm ista gens pessima pessiniè in
principes nostros hactcniis egerit, qiiod factum est am-
pliîis resumi non valet. Sipermortemistorumvitanos-
trorum reciiperari valerot , mille mortibus consulerem
istos pci'ire. Puniti fuerunt ipsi ciun parcntelis eorum,
nec cgemus adversariormn ampliori pullulationo, cir-
cumcingimur undiquè adversariis, utamuradversariis
contra adversarios , ut sic seipsos confunclant. Vide-
tur quod ad miseiicoidiam suscipiendi sunt istis tcm-
poribus , conditionibus tamen adliibitis. » Placuit
autem sermo régi et principibus ; sed , cùm de condi-
tionibus adbibendis perquiierct , respondit.
DE TIAINAUT. LTVr.E II. l3
elles ne rencontrèrent d'autre ennemi (jue les Alba-
niens qui s'étaient réfugiés sur les bords de la mer, et
qui s'y tenaient cachés dans des retraites assurées que
protégeaient les Rutliènes. Ce malheureux peuple en-
voya des députés au roi Ursus pour implorer sa misé-
ricorde. Mais le roi ayant remarqué que ces endroits
écartés servaient de retraite à ces infâmes Albaniens
qui avaient massacré la noble famille des prêtres de
Belgis , ainsi qu'on l'a vu plus haut à la fin du premier
livre , il formait la résolution de les attaquer, lorsqu'un
des ducs qui l'accompagnaient lui tint ce discours :
«Prince, dit-il , vivez éternellement. Cette nation
abominable s'est , il est vrai, souillée jusqu'ici des plus
grands crimes envers nos princes ; mais il n'est pas
possible de réparer le mal qui a été commis. Certes , si
nous pouvions rappeler les nôtres à la vie en fesant
périr ces misérables, je serais d'avis de leur faire souf-
frir mille fois la mort. Cependant ils ont été punis de
leurs crimes ainsi que leurs parens ; et, comme nous ne
manquons pas d'adversaires à combattre, puisque nous
en sommes entourés de tous côtés, servons-nous de nos
ennemis contre nos ennemis , afin de les détruire tous
les uns par les autres. Il me semble donc que , dans les
circonstances où nous nous trouvons, nous devons faire
grâce aux Albaniens , en exigeant d'eux certaines con-
ditions. » Cet avis plut au roi et aux princes ; ils invi-
tèrent le duc qui venait de le donner, à exposer ses
conditions ; ce qu'il fit de la manière suivante.
lli ANNALES
CAPITULUM V.
QiialitPr Albnni riiornnt subjecti Relgensihus.
Prima sit ut perpétue servi civitati Belgis et rogi
remaneant. Secunda, ut si de csetero récidivent , aiit
rebellent, vlvi excorientur. Tertia , ut de laboribus
suis, possessionibus , aut spoliis, j)orpetiio quiiUam
partem civitati Belgis aut régi porrigere tenebnntur.
Quarta, ut cuni spoliis liberorum Belgorum non ])ai-
ticipabunt, scd ab cisdem in quintà parfe scnipei',
proùt dictum est, participabuntur. Quinta, quocl in
collocationilîus tentoriorum , in campis antè civitates
aut alibi, ad mille passus tentoria Belgorum non ap-
proximabnnt. vSoxta, ut in omnibns insultationibus bel-
lorum, aut civitatum , turrium, muroram, aqnnruni
fossatorum , aut consimilium, primum locum obtine-
bunt. Septima et fînalis, quod ipsi in personA pio poi--
petuo Belgis civitatem non intrabunt. Plaruerinit
régi et consilio adliibitte conditiones. Hœc responsio
dictis Albanorum legatis fuit exbibita, qui très men-
ses pro babendo consilio pctierunt. Erant fert^ nona-
giiita quiuque millia expeditorum ad praplinm.
DE HAINAIT. I.IVHE H. li)
CHAPITRE V.
Comment les Albaniens so souiniront aux Belges.
La première condition fut que les Albaniens reste-
raient à jamais esclaves des citoyens de Belgis ; la se-
conde , que s'il leur arrivait de retomber dans leurs
fautes ou de se révolter, ils seraient écorcliés vifs ; la
troisième,qu'ils seraient tenus d'abandonner sans retour
à la cité de Belgis ou au roi la cinquième partie du pro-
duit de leur travail , le cinquième de leurs possessions
ou du butin qu'ils auraient fait ; la quatrième , qu'ils
n'auraient aucune part dans le butin appartenant aux
Belges de condition libre, tandis que ceux-ci seraient
toujours admis pour un cinquième dans le partage des
dépouilles enlevées par les Albaniens, ainsi qu'on vient
de le dire ; la cinquième, que dans la campagne, devant
les villes ou ailleurs , ils éloigneraient toujours leurs
tentes de mille pas de celles des Belges: la sixième, qu'ils
seraient toujours placés au premier rang dans toutes les
affaires, soit qu'il s'agît de l'attaque d'une ville, d'une
tour, d'un mur, du passage d'une rivière, d*un fossé, ou
d'une autre expédition semblable ; la septième enfin ,
qu'ils n'entreraient jamais dans la cité de Belgis. Ces
conditions furent approuvées par le roi et par son con-
seil, et transmises ensuite aux députés des Albaniens,
l6 ANNALES
CAPITULUM VI.
De dcstructione civitatis Morianae (i) per Belgos.
Igitur , reintegratis aciebus , post quartum obsi-
dionismensem, Eelgi civitatem Morianam, postmultos
et graves insultus, alacriter in quinque partibus inva-
serunt, et gentes ter, quater, qulnquies , continuo
rénovantes. Tandem in quinto aggressu muros civita-
tis contingentes, civitatem obtinuerunt. Die autem
prima captionis, nibil aUud fecerunt nisi Morinos in-
terficere ; die sccimdâ , nihil aliud nisi domos spo-
bare; die autem tertiâ , domos, famibas, vicos, por-
tas perlustrantes , infantibus et antiquis, virginibus
et prsegnantibus, tutores et victuaba designàrunt. Die
verôquartâ, qui civitatem tuerentur, disposuerunt;
et instituit Ursus fibum primogenitum ducem illius
civitatis, sibi duces subditos assignando, mûris sive
turribus et portis priiis ad terram prostratis , et, ma-
gna parte spoborum Belgis transmissâ , versus Belgim
gallicam (2) tandem processerunt.
(i) rcrouenne.
(a) Bcaiivais.
DE HAINAUT. LIVRE II. 1 "
qui demajulèrent trois mois pour se consulter. Le
nombre de leurs troupes s'élevait à environ quatre-
vingt-dix mille hommes exercés au métier des armes.
CHAPITRE yi.
Destruction de la ville de Moriane par les Belges.
Les armées d'Ursus s'étant réunies , les Belges , après
avoir assiégé pendant quatre mois la ville de Moriane
(Térouenne), et après lui avoir livré plusieurs assauts
graves et meurtriers , attaquèrent la place par cinq
cotés à la fois, en envoyant des troupes fraîches à
toutes les attaques. Enfin à la cinquième ils firent une
brèche aux remparts et s'emparèrent de la ville. Durant
tout le premier jour ils ne furent occupés qu'à tuer les
Morins; le second jour qu'à piller les maisons; le troi-
sième jour ils parcoururent les maisons , les palais , les
rues , les portiques , et pourvurent à la sûreté et à la
subsistance des enfans et des vieillards , des jeunes filles
et des femmes enceintes. Le quatrième jour ils établi-
rent des postes pour veiller à la défense de la place.
Ursus nomma son fils aîné duc de la ville , plaça plu-
sieurs ducs sous ses ordres , et fit abattre les murailles,
les tours , les portes et toutes les fortifications de Mo-
riane. Enfin, après qu'il eut envoyé à Belgis une grande
partie du butin , il s'avança avec ses troupe.': vers Belgis
la gauloise.
II. 2.
l8 ANNAf.ES
CAPITULUM VIL
De oLsiclioiie Ikljjis gallica' i>fr Tk-lgos nafuraks.
Albani videntes (jiiid Iccerant Bclgi , timcntcs
valdè , licèt invite , conditiones adhibitas in pactione
eorum jiiramento confirniarunt ; et sic cum Belgis
in obsidione Belgis gallicœ subsecuti sunt. Ciim autem
Belgi ripariam quanidam pcrtransire debercnt, et
ecce Gallici belvacini in oceiirsuni dispositi, viriliter
ripariam defendcntes , cum fundis et jaculis trans
ripariam projicientes , midtos Bclgorum transire vo-
lentium abos occidcrunt abosqiic submcrserunt. Pcr-
pendens autem Ui'sus suorum occisionem verecundam,
disposuit ut in unâ parte ripariœ fieret apparentia
transeundi pubHca , et illiic adstarent centum milHa
virorum transire simulantium, et ad decem milba
passuum superiùs , fièrent cum paucis apparenter
pontes, qui, usquè in bodiernum diem , dicuntur
Pontes Beris (i), id est, Ursi. Undè et tota patria illa
dicta est Pontigniaca (9.), à niultitudine pontium
super illam ripariam faclorum contra Gallos belva-
(i) Un ours se dit Imcr rn allrninnil , et heur en anglais.
(■i) Le PontViicii.
DE IIAINAIT. LIVRE U. I9
CHAPITRE Vil.
Siège de Belgis la gauloise par Ips Belges.
Les Albaniens ayant vu ce que les Belges avaient fait,
furent saisis de crainte, et acceptèrent les conditions
du traité qui leur avait été proposé , en jurant, quoiqu'à
contre-cœur, de les observer fidèlement ; de sorte qu'ils
suivirent les Belges au siège de Belgisla gauloise. Lors-
c[ue l'armée se préparait à effectuer le passage d'une
rivière, les Gallo-Belges, qui avaient pris position pour
le disputer, défendirent courageusement le bord où ils
se trouvaient , et , fesant pleuvoir une grêle de pierres
et de javelots sur l'autre côté de la rivière, tuèrent ou
noyèrent un grand nombre de Belges qui tentaient de
passer. Aussitôt qu'Lrsus s'aperçut du carnage que l'on
fesait de ses soldats , qui tous succombaient sans gloire,
il ordonna que l'on fît dans un endroit de la rivière
des dispositions ostensibles pour effectuer le passage, et
que l'on v plaçât cent mille hommes qui feindraient
de le vouloir opérer ; tandis qu'à dix mille pas plus
haut, il fit jeter sans bruit plusieurs ponts, qui , jusqu'à
ce jour même , ont été appelés les ponts de Bères ,
c'est-à-dire , d'Ursus. C'est du grand nombre des ponts
établis sur cette rivièrepour débusquer les Gallo-Belges,
que la contrée nommée aujourd'hui le Ponthieu a tiré
son nom. Enfin les Gallo-Belges, voyant avec douleur
20 ANXAI.r.S
rinos. Tandem Gallici vitlenles Belgos et Albanos
ti'ans ripariam , dolentes , plateani grandem reperien-
tes , oinncm honiinein venire volentem illùc expecta-
verunt. Erant forte centuni quinquaginta niillia pu-
gnatorum. Ciim autem Ursus cum totâ gente sua
transmeâsset, et vidisset Gallicos belvacinos deeenter
dispositos ad pugnani , mislt exploratores ut investi-
gai'ent apparatiun, numeruni et eoruni dispositionem.
Qui iTiagnalia de ipsis referentes , timuit Ursus , quia
montem ceperant , et siivam habebant pro refugio ;
Ursus vero eum sua gente convalles et ripariam ob-
tinebat. Sed qualiter aggrederetur Gallos illos peni-
tùs igaorabat. Consuluit autem ducum unus, ut mons
ille cireumvalletur, et ut oetogintamillia expeditorum
superiùs per sllvam mitterentur ; qui infrà dies très
in aurorii Gallicos invaderent , et horà eadem à valli-
bus ad montem fieret Gallorum aggressus ; quo'd et
factum est. Nam Galli belvacenses in primo aggressu
ità potenter et magnifiée dimicaverunt , ut ultra vi-
ginti millia Beigorum illà die interimerentur. Ursus
quasi furibundus existens , suorum internecionem
prospiciens , crcdcbat (juos adhuc emiserat super
montem fore occisos. Sed ecce in retracta, ciim Galli
belvacenses credcrcnt esse victores et suprà montem
coUocatos assecurati, arma deponere fessi incœpissent,
subito Belgi in Gallos belvacenses irruerunl à ntro
per nemora , et fessos et inermes eos reperientes , cx-
deni niagnam excrcuerunt; rcsidui vivos se reddide-
runt. Ursus, audiens clamorem , misit exploratores
quid boc praetendcret , et repererunt Gallos dcbacca-
DE HAINALT. LIVRE II. ' 2>
que les Belges et les Albaiiiens avaient passé , se reti-
rèrent sui' un plateau, et y attendirent de pié ferme
l'arrivée de l'ennemi. Ils étaient au nombre de cent
cinquante mille combattans environ. Ursus ayant donc
effectué le passage de la rivière avec toute son armée ,
et voyant les Gallo-Belges préparés au combat, envoya
des éclaireurs pour connaître l'appareil , le nombre et
la position de leurs troupes. Les rapports effravans
qu'il reçut sur tous ces objets commencèrent à ébranler
son courage. H vovait avec crainte que les ennemis
occupaient la montagne et avaient derrière eux un bois
qui leur servirait de refuge ; tandis que l'armée belge
n'était maîtresse que de la plaine et delà rivière; et
il ignorait absolument comment il devait commencer
l'attaque. Mais un duc proposa d'entourer la montagne,
et d'envoyer quatre-vingt mille hommes s'emparer des
hauteurs en traversant la forêt ; ces troupes au bout de
trois jours attaqueraient les Gaulois au lever de l'au-
rore, tandis qu'à la même heure on dirigerait une
pareille attaque du côté de la plaine contre la mon-
tagne : ce qui fut exécuté. ^lais les Gallo-Belges com-
battirent si vaillamment et avec tant d'opiniâtreté à la
première attaque, (pi'ils tuèrent, le premier jour, plus
de vingt mille Belges. Ursus , que la déroute de ses
troupes j^ait dans de violens accès de fureur, croyait
que les soldats qu'il avait envoyés sur la montagne
avaient été pareillement massacrés ; mais au milieu de
la retraite de son armée , et dans le moment même que
les Gallo-Belges , se croyant vainqueurs et maîtres de
la montagne, commençaient à se livrer à la sécurité et
à déposer leurs armes pour se remettre de leurs fati-
gues , les Belges fondirent soudain sur leurs adver-
saires , en débouchant par le bois et eu les prenant
22 ANNALES
tos. Tune ascendentes Belgi residuum vivos captiva-
verunt. Abhinc Ursus acles commovens , usquè ad
fines niontium , eirca Belgini belvacinam , pervc-
niens, illùc tentoria figerc prœecpit. Post oeto dies
ab eorum adventu, misit Ursus deeem viros captivos
de Belvaco ad eamdem civitatcm , ut rcddcrent se et
sua régi et civitati bcigcnsi , aliter dcfenderent se.
Consilio civitatis super hoc congregato, videntes suos
jàm prostratos esse , et eis simile stipendium immi-
nere , responderunt se , sicut antiquitùs sacerdotuni
principi et diis civitatis Belgensis non aliter obedire ,
et sacrificiorum tributa, proùt consuetum erat, ab
antiquo ministrarc velle , novo autem régi aut con-
suetudinibus novis civitatis nunquàm se obtempera-
turos. Ursus autem liœc audiens , ultra moduni indi-
gnatus, juravit ab obsidione non dcsistere usquè dum
prostratam cerneret civitateni.
DE HAINAUÏ. LIVRE II. 23
par derrière ; les ayant trouvés fatigués et sans ar-
mes , ils en firent un horrible carnage , et forcèrent
tout ce qui échappa au glaive à se rendre prisonnier.
Ursus entendant des cris , envoya à la découverte des
éclaireurs, qui connurent bientôt la défaite des Gau-
lois. Alors les Belges, montant sur le plateau, firent pri^
sonniers tous ceux qui restaient. De là, Ursus conduisit
son armée jusqu'à l'endroit où finissent les montagnes:
et étant arrivé sur le territoire de Beauvais, il fit dresser
ses tentes autour de la place. Huit jours après son ar-
rivée , il députa dix prisonniers , citoyens de Beauvais,
vers les habitans de celte ville, pour les engager à se
rendre au roi et à la cité de Belgis , ou , à leur refus ,
pour les avertir qu'ils seraient attaqués. La cité ayant
tenu conseil sur ce message , et voyant que ses défen-
seurs avaient péri et qu'elle était menacée d'éprouver
le même sort , fit réponse qu'elle était prête à vivre ,
comme anciennement , sous l'obéissance du prince des
prêtres et des dieux de la cité de Belgis , et à payer ,
selon l'antique usage, les tributs ordonnés pour les
sacrifices ; mais qu'elle ne reconnaîtrait jamais le nou-
veau roi ni les nouvelles lois des Belges. Ursus fut
saisi de fureur en entendant cette réponse, et jura
de n'abandonner le siège de la place qu'après l'avoir
détruite.
24 ANNALKS
CAPITULUM VIII.
Qiialitei- lîelgi natiirales ccperiint Belgiin gullicam.
Interea dùm hœc agerentur, Belgls comata (i),
Agrlppina (a) , cœteraequo illlus ligœ civitatcs cum
eorum gravi potentiâ , audientes civitatem Belgls po
pulorum destltutam fore, ad ipsam obsidendam pcr-
venerunt, ut eam , si possent, penitùs destrucrent;
quia erat ipsis onerosa riimis. Et Mosellam atque Mo-
sam pacificè transeuntes , Bclgim approxiraavorunt.
Hoc videntes Bclgi, Urso rcgi eorum quae apud eos
agebantur demandantes , auxilium deprecabantur.
Hoc audiens Ursus quid agere deberet penitùs igno-
ravit. Duces consuluerunt ut per triduum rumores
illos omnino celaret, et die prima civitatem aggrede-
retur fortiter et asperè; secundâ die ferociùs et poten-
tiùs , et si de compositione pertractare vellet, ipse
quasi invitus oblationes notaret , et si qua ultra quod
priùs prajsentaverant superadderent,cum misericordia
ipsos susciperet. Quod et factum est. Undè et subito
Ursus proclamare jussit ut die sequenti, in solis ortu,
civitatls muros invadere vellet , et ad hoc faciendum
(i) Trêves.
(a) Cologne.
HE H.UNAUT. LIVRE II. 25
CHAPITRE VIII.
Les Belges s'emparent de Belgis la gauloise.
Pendant ces événemens, Belgis la chevelue , Agrip-
pine et les autres cités qui avaient formé entre elles
une ligue redoutable, ayant appris que la ville de
Belgis était dépourvue de ses habitans , prirent la réso-
lution d'en faire le siège , afin de la détruire , s'il était
possible , parce qu'elle les incommodait beaucoup.
Leurs troupes ayant donc traversé paisiblement la Mo-
selle et la Meuse, arrivèrent sous les murs de Belgis.
Mais les Belges , dans cette circonstance , firent savoir
à Ursus ce qui se passait chez eux , et implorèrent de
lui les plus promts secours. Ursus, à cette nouvelle,
ne savait comment il devait se conduire. Enfin les ducs
furent d'avis qu'il fallait tenir tous ces bruits secrets
pendant trois jours, et donner, dès le premier jour, à la
Tille de Beauvais un assaut vigoureux et opiniâtre ; que
le second jour, on recommencerait l'attaque en redou-
blant d'efforts , et que , si la place voulait entrer en
composition , le roi n'écouterait ses propositions que
comme malgré lui ; mais aussi qu'il userait de miséri-
corde à son égard, si elle ajoutait d'autres offres à celles
qu'elle avait faites d'abord. Ce plan fut exécuté. Ursus
fit aussitôt publier que le jour suivant , au lever du
2 6 ANNALES
quillbet se disponcret. Undè et prœcepit Albanls ut
ad hoc prim» existèrent. In crastinum venit hora, et
ccce venit Albanorum alqiie Bclgorum copiosa multi-
t,udo , qui ab unâ parte clvitatis liguis , palcis , feno ,
vineis atque terra , alveolum ripariolœ replevcrunt ,
et per locum ilium ad civitatis muros devenerunt. Sed
repulsam gravcm sustincntes, multi tune ex utrâque
parte corruerunt. Duravlt autem congressus usquè ad
noctis initium; retrocesserunt tandem Belgi. Die au-
tem sequenti , in solis ortu , in eodem loco et ejus op-
posite ab alia civitatis parte, à novis et rccenlibus
Belffis iterùm civitas insultatur. Civitas autem se viri-
liter defendens , circà horam nonam , fecerunt illi de
civitate signa ut audientiam apud regem obtinere va-
lerent. Rex autem retrahere jussit suos usquè ad tem-
pus. Qui miserunt legatos offerentes quœcumque ab
antique consueta fucrant diis et sacerdotum principi
ac civitati , et ultra centum boves annuatim , et mille
cados vini et quingentos olei, etc., si ab obsidione
recédèrent, et in eorum antiqua consuetudine per-
mitterentur. Et rex ministerio consilii sui pra3ha])ito,
respondit. « Non recedemus ab hac obsidione , nisi
reddatur nobis régi, tanquàm sacerdotum principi
ipsi, totalis civitas , et quadriplentur quœ obtulistis. »
Tune legati quod pctcbat rex libenter concedentes ,
illico pacem concluserunt , et pacifiée rex cum decem
millibus electorum civitatem subintrans, juramenta
civitatis suscipiens et confinnans, donaria quoquc
multa rccipiens atque donans , câ<lt>m nocle ad ten-
toria propria ropodavit.
DE IIAINAUT. LIVRE II. 2"]
soleil, il livrerait assaut à la ville, et que chacun devait
s'y disposer. Il ordonna aux Albaniens de se tenir
prêts à commencer l'attaque. Aussitôt que l'heure fixée
fut venue , une multitude prodigieuse d' Albaniens et
de Belges accourent en armes , comblent le lit de la
rivière d'un côté de la ville avec des bois , de la paille ,
du foin , des fagots et de la terre , et marchent par cet
endroit à l'attaque des murs de la place ; mais ils furent
repoussés avec vigueur, et il y eut de part et d'autre
un grand nombre de morts. Le combat dura jusqu'au
commencement de la nuit, et les Belges se retirèrent.
Le jour suivant, au lever du soleil, des troupes fraîches
recommencèrent l'attaque au même endroit que la
veille , et en dirigèrent une seconde sur le côté opposé
de la ville. Les assiégés se défendaient vaillamment,
lorsque , vers la neuvième heure , ils firent un signal
pour obtenir une audience du roi. Celui-ci fit aussitôt
retirer ses troupes et suspendre l'attaque. Alors les
Gallo-Belges lui envoyèrent des députés qui lui offrirent
toutes les redevances qu'ils avaient autrefois coutume
de payer aux dieux , au prince des prêtres et à la cité
deBelgis, et y ajoutèrent un revenu annuel de cent
bœufs , de mille tonneaux de vin , de cinq cens ton- .
neaux d'huile , s'il consentait à lever le siège et à les
laisser vivre selon leurs anciennes lois. Mais le roi, ayant
pris l'avis de son conseil , répondit qu'il ne lèverait le
siège qu'après que toute la ville se serait rendue à lui ,
qui était roi, de la même manière que s'il eût été prince
des prêtres, et qu'après qu'elle se serait obligée à lui
payer quatre fois plus qu'elle n'offrait. Les députés ac-
cordèrent volontiers ce qu'exigeait Lrsus , et la paix
fut conclue aussitôt. Alors le roi , étant entré dans
la place à la tête d'un corps de dix mille hommes d'é-
28 ANNALES
CAPITULUM IX.
Quôd Ursiis, rex Belgensis, i;idicom et originem siimnioriim saccr-
(lotiim exlirpavit; et primo civitatem Belgensem deslruxit.
In crastiiio vcro, quos civitate Bclgcnsi receperat
rumores manifcstaiis , ad propria remeare omncs
concitus properarunt. Ciim vcro die quiiitâ , Belgim
ad mllliarla docom approximàssent , rclatuin est cis
ut , die câdem , erat conflictus Belgorum ac civitatum
ejus contra Germanos , qui magnam patriœ partem
succciidcrant. Et alaciitcr et ferociter properantcs,
iiivcnerunt jàm belli confiictum contra Belgos termi-
natum, et Germanos jàm trans ripariam , quae nunc
Sambra dicitur, transmeâsse victores. Jacuerimt si-
quidem in campo certaminis occisi uluà qulnquo et
viginti millia Belgorum , Germanorum vcro ultra
quindecim millia. Inter vivos quos Germani obsides
ceperant, fuit Hères, juvenis princeps sacerdotum ,
undc tota civitas cruentissimè lamentabatur. Accur-
rens igitur Ursus post Germanos , qui rcperit eos
inermes circà lociim , qui nunc dicitur Belgorum
DE HAINAUT. LIVRE II. 29
litc , prit et confirma le serment des citoyens , reçut et
donna un grand nombre de présens , et retourna , la
nuit du même jour, dans son camp.
CHAPITRE IX.
L rsiis , roi des Belges , extirpe jusqu'à Ja racine la race des f^rands
prêtres, et commence par détruire la ville de Belgis.
Ursus ayant fait connaître à son armée, dès le matin
du jour suivant , les nouvelles qu'il avait reçues de
Belgis, tous les soldats se mirent en marche et se hâtè-
rent d'arriver dans leur patrie. Le cinquième jour de
marche, ils n'étaient plus qu'à dix milles de Belgis,
lorsqu'on leur rapporta que ce jour même les Belges
et les habitans des villes qui leur étaient soumises ,
étaient aux prises avec les Germains , qui avaient mis
le feu à une grande partie du pays. Ils redoublèrent
alors de vitesse , et trouvèrent à leur arrivée le combat
terminé en faveur des Germains , qui avaient passé en
vainqueurs la rivière qui porte aujourd'hui le nom de
Sambrc. Il périt dans le combat plus de vingt-cinq mille
Belges et plus de quinze mille Germains. Au nombre
des otages que ces derniers prirent fut Kérès , jeune
prince des prêtres, dont le sort malheureux jeta toute
la ville dans la consternation. Ursus s'élant mis à la
poursuite des Germains, les trouva désarmés près du
lieu qui porte maintenant le nom de Berlaimont ; il
JO ANNALES
mons , et illùc cuin ipsis congrecîicns , die illâ, occidit
de Germanis ferè xxx millia. Erant autem Germaiio-
rnm superstitûm omncs ad bcllandum dispositi dii-
ccnta sexaginta millia, qui in ciastiniim conflictum
spcrantes habere Ursum cum suâ gentc , expo(;tantes.
Ursus vero disponcbatur ad invadendum , et ecce
archiflamincs quatuor accedentes ad Ursum , qui
dixerunt ei : « Rcx, in sempiternum vive. Quid tibi et
Germanis istis ? Fratres etenim nostri sunt. Ad ipsos
accedemus. Si rebellare contra civitatem et te , et le-
gibus antiquis contraire , priîis expedit scire , si etiàm
principcm sacerdotum non reddere proponunt. Si
sic , facias qua3 proposuisti. Sin autem , cum pace et
fraternali dilectione , antiquorum more , permanea-
mus. » Respondit Rex : « Vestra igitur experiatur ex-
hortatio. » Accesserunt autem arcliiflamines, propo-
suerunt Germanis amicitias, qui libentes respon-
derunt : « Sub principis sacerdotum regimine , sicut
patres nostri , deorum sacrificia débité offcrentes ,
legibus consuctis non aliter persistere proponimus.
Reges in bac sectâ usquè liodiè non vidimus, nec ci
obediemus tanquàm régi, sed tanquàm vicegerenti
illiûs , quem apud nos liabemus , usquè ad pubertatis
tempora illius, et non ultra obediemus. »
DE HAINAUJ. J.lVr.E II. 01
leur livra bataille , et en tua ce jour près de trente mille.
Il restait encore aux Germains deux cent soixante mille
hommes propres aux combats. Ils avaient eu l'espoir
de faire prisonnier Lrsus avec ses troupes dans l'at-
taque du matin , et n'avaient fait aucun mouvement.
Le roi rangeait son armée en bataille , lorsque quatre
archiflamines s'avancèrent vers lui , et après l'avoir
salué en disant « vive à jamais le roi ! » ils lui parlèrent
ainsi : « Quel sujet de guerre existe-t-il entre toi et les
Germains ; ne sont-ils pas nos frères? Nous allons nous
rendre auprès d'eux ; car avant de les attaquer, il est
juste de savoir s'ils ont l'intention de se révolter contre
la ville et contre toi, et de contrevenir aux lois qu'ils
observaient anciennement , comme aussi de garder en
leur pouvoir le prince des prêtres. Si telle est leur
résolution , exécute alors ce que tu as entrepris ; mais
s'il en est autrement , continuons de vivre avec eux en
paix et en amitié , comme feraient des frères , ainsi
que nos pères l'ont fait avant nous. » Le roi répondit :
« Allez , faites ce que vous avez dit. » Les archiflamines
allèrent donc auprès des Germains, et leur proposèrent
paix et amitié. Ceux-ci répondirent : « Nous voulons
vivre sous le régime du prince des prêtres , ainsi que
nos pères ont fait, et comme eux offrir aux dieux les
sacrifices qui leur sont dus, et obéir aux anciennes lois.
Mais jusqu'à ce jour nous n'avons point vu de rois dans
la famille sacerdotale , et nous ne voulons pas recon-
naître Ursus pour notre roi ; seulement nous lui obéi-
rons comme étant le lieutenant du prince que nous
avons avec nous, et jusqu'à ce que ce dernier ait atteint
sa majorité, car, passé ce terme, nous ne voulons plus
lui obéir. »
Ô2 ANNALES
CAPITULUM X.
De régis Ursi pcstil'erit proditionc
DuM adhùc de concordia tractarent archiflainincs ,
et ecce , ex insperato Albanorum consilio , Ursus rex ,
oiini omnibus Albanis et Belgls multis , Germanos
illos invadentes, maxlmam caedem exercuerunt. Mor-
ttms est autcm illùc juvenis sacerdotiirn princeps
captivatus cum archiflaminibus concordiam tractan-
tibus. Mortui simt etiàm Germanorum circiter octo-
ginta millia, Belgorum et Albanorum ferè viginti
millia. Et sic terminata est nobibs atque generosa sa-
cerdotum principum progcnies , Urso rcge procu-
rante. Pars vero potior Belgorum ad civitatem Belgis
concurrentes , quid rex Ursus peregerat referentes ,
furibundi contra eum concurrerunt. Ursus haec au-
diens suos, proiit valuit, recoUigens , in locum queni-
dam Belges expectavit , qui , suie ordine debito
venientes , quotquot progrediebantur Ursus peri-
mcbat. Occidit die illâ rex Ursus de Belgis ultra
scptuaginta millia, quos omnes in crastinum recolligi
faciens , montem quemdam ex ipsis cadaveribus con-
stituit, juxtà ripariam Sanibr.T , quom, usquc ;id
DE HAI.NAUT. LIVRE II. Où
CHAPITRE X.
Perfidie détestable du roi Ursns.
Pendant que les archiflamines étaient occupés à mé-
nager la paix , le roi Ursus , par le conseil des Alba-
niens , fondit tout à coup sur les Germains avec toutes
ses troupes , tant albanieunes que belges , et en fit un
horrible carnage. Dans cette attaque le jeune prince
des prêtres , qui avait été fait prisonnier , fut tué avec
les archiflamines qui traitaient de la paix. Près de
quatre-vingt mille Germains restèrent sur le champ de
bataille , tandis que les Belges et leurs alliés ne perdi-
rent que vingt mille de leurs combattans. C'est ainsi
que finit l'illustre et généreuse race des princes des
prêtres , par la méchanceté du roi Ursus. Cependant ,
après ce massacre , la plupart des Belges coururent
à Belgis annoncer l'action que venait de commettre
Ursus, et marchèrent ensuite contre lui animés de la
plus vive fureur. Le roi , ayant appris leurs desseins ,
rassembla ses troupes comme il put , et attendit les
Belges à un certain endroit. Ceux-ci , marchant en
désordre , tombèrent sous les coups d'Ursus à mesure
qu'ils se présentèrent. Plus de soixante et dix mille
des leurs y périrent. Le jour suivant, le roi, ayant fait
rassembler leurs cadavres, en construisit, sur les bords
de la Sambre , une montagne qui porte encore aujonr-
II. 3
5-4 ANNALES
tempora nostra , montem Belgorum appellaïuUim
tlccrcverunt , qui nunc gallicè à modernis Berlaimonl
nuiicupatiir. Tune Bclgi primo suœ civitatis Icguntur
suas conclusisse portas. Ursus hoc pcrpendeus , cum
Germanis rcsiduis fœdus iniit , qui, simul adjuncti ,
civitatcm obscderunt. Quarto autcm obsidionis mense,
misit privatos in civitate legatos ad complices, quos
sibi sentiebat benevolos , ut omnibus quibus possent
modis , populi suscitarent seditionem , et ignem in
certà die in diversis civitatis locis, in silentionocturnu
intromittcrent; et, cùm ad incendium perpenderenl ,
dubio propulso civitatcm aggrcderentur. Monuit ctiàm
ut sui complices quotquot in civitate morabantur,
hora illa, in loco certo simul congregati, cùm audi-
rent regem aggredi civitatcm , adversarios sibi rebel-
landos invaderent; et ipse cum suis superveniens ,
opus consumaret. Quod et factum est. Nam rex ,
statutâ die, cum Germanis et civitatum vicinarum
omnipotentia, civitatcm est aggressus; et ccce in
omni differentia civitatis, incendia succrescunt ; pa-
latia ducum comburuntur ; régis fautores ab intrà
civitatcm depopulantur; quot([uot erant de sacerdo-
tum sanguine, cum bcnevolis corum , in ore gladii
I raditi sunt ; Icgum alque dcorum et civitatis zelatoros,
ubi se rocoUigere valercnt non invenientes , velut
arietes intcrimebantur. Subjccit tandem Ursus sibi
clvitalem ; et, cunctis prostratis advcrsariis, loges,
])roiit placuit, ampliavit. Luxit autem civitas annis
pluribus h consuetii nobilitate prostratâ. Actor. Quia
vero,bis temporibus , nnilla cxordium assumpserunt
T>E IIAIXAUT. LIVRE II. 55
d'hui le nom de montagne des Belges , et qui s'appelle
en français Berlaimont. C'est alors qu'on dit que les
Belges fermèrent pour la première fois les portes de
leur ville. Ursus ayant vu ce qui se passait , fit alliance
avec les Germains qui restaient encore , et forma avec
eux le siège de Belgis. Il y avait près de quatre mois
qu'il tenait la ville assiégée , lorsqu'il envoya secrète-
ment des a gens dans la place auprès de ses partisans
qu'il savait lui être les plus dévoués , afin de les enga-
ger à user de tous les moyens pour soulever le peuple ,
et pour mettre , à une époque désignée et pendant le
silence de la nuit, le feu aux différens quartiers de
Belgis , en les avertissant que , tandis que les citoyens
seraient occupés à éteindre l'incendie , les assiégeans
livreraient sans faute un assaut à la ville. Il fit dire de
plus à ses partisans de se rassembler tous à une heure
fixe dans un endroit qu'il leur indiquait , et aussitôt
qu'ils apprendraient que le roi donnerait l'assaut à la
place , d'attaquer vivement les citoyens qui lui oppo-
seraient de la résistance ; pendant ce tems le roi sur-
viendrait avec ses troupes et terminerait l'affaire. Ce
plan fut exécuté. Ursus , après avoir indiqué le jour de
l'attaque , donne l'assaut à la ville avec les troupes des
Germains et toutes celles des villes voisines. Au même
moment , et tandis que le trouble règne dans la place ,
le feu éclate de tous les côtés , les palais des ducs sont
réduits en cendres , la ville est pillée par les partisans
du roi enfermés dans ses murs; toute la race des prêtres
et tous leurs amis sont passés au fil de l'épée ; les
défenseurs des lois , des dieux et de la cité , ne trouvant
plus aucun asile, sont impitoyablement égorgés comme
de vils troupeaux. Ursus s'empara de la ville, et après
s'être défait de tous ses adversaires il changea les lois
56 A^rCALES
régna , multa etiàm termiiiuni finalem dicuntur con-
cliisisso, idcirco de notabiliorlbus quse in historiis
solemnibus reperi, huic operi pauca restringam.
CAPITULUM XI.
De fxurdiu re^ni Maceiloiiiim.
Ex chnmicis.
Regndm autem macedonicum incœpit tredecimo
anno regni Osiœ , rcgls Judae, qui fuit annus septimus
Arbacis, primi régis Med or um (i), in quo primus
regnavit Caranus annis xxviii. Secundus Cinnus xir.
Tertius Dumminas xxxviii. Quartus Pcrdica lt.
Quintus Argeus xxxviii. Sextus Philippus xxxviii.
Septimus Acorpas xxvi. Octavus Altéras xxix. Nonus
Ainyiitas l. Dccimus Alexander xliii. Undecimus
Perdica xxviii. Duodecimus Arcbelaus xxiv. Tertins
(leeimus Orestes m. Quartus declmus Archelaus iv.
Qnintus derinius Amyntas i. Sextus dccimus Pansa-
(i) L'an iSii av. nolierrr.
DE IIAIXALT. LIVRE II. 5^
à son gré ; et Belgis pleura pendant plusieurs années
sur sa grandeur déchue. L' Auteur. Mais, comme on rap-
porte à cette époque la fondation de plusieurs royaumes
et la destruction de plusieurs autres, j'ai cru de mon
devoir de mentionner ici en peu de mots ce que j'ai
trouvé de plus remarquable sur ce sujet dans les his-
toires les mieux accréditées.
CHAPITRE XI.
Commencement du rnvaiime de Mvice'doinc
Extrait des Chroniques.
Le royaume de Macédoine fut fondé la treizième an-
née d'Osias , roi de Juda , ou la septième d' Arbaces ,
premier roi des IMèdes. Le premier roi macédonien fut
Caranus , qui régna vingt-huit ans. Le second, qui fut
Ginnus ( Coenus), régna douze ans. Le troisième, Dum-
minas ( Tirimas ), régna trente-huit ans. Le quatrième,
Perdicas , cinquante et un ans. Argœus , qui fut le cin-
quième roi , régna trente-huit ans. Philippe, le sixième,
trente-huit ans. Acorpas ( iEropas ), le septième , vingt-
six ans. Altéras (Alcétas), le huitième, vingt-neuf
ans. Le neuvième roi, qui fut Amintas, régna cinquante
ans. Le dixième , Alexandre , quarante-trois ans. Le
onzième , Perdicas , vingt-huit ans. Le douzième , Ar-
chélaiis , vingt-quatre ans. Le treizième , Orestes , trois
58 ANNALES
nias 1. Septimus decimus Amyntas vi. Octavus cleci-
inus Algcus II. Nonus decimus Amvntas xviii. Vice-
simus Alexander i. Vicesimus primus Ptoloniœus qui
et Alorices iv. Vicesimus secundus Perdica vi. Vice-
simus tertius Philippus xxvi, Vicesimus quartus
Alexander, Philippi filius, xii et menses vi. Quibus
finitis, mortuus est apud Babylonem, xxxii œtatis suae
anno ; et tune, translate in multos impeiio, regnum
divisum est. Huic indè ortum est regnum Alexandri-
norum , ([uod est iEgypti ; et non multô post regnum
Asiaî et mox Syriae. In Macedoniâ regnavit, post
Alexandrum , Philippus , qui et Aridœus , frater
Alexandri , annis septem. Deindè Cassander annis
XIX. Antigonus et Alexander, fîlii Cassandri , iv. De-
metrius vi. Pirrhus vu mensibus. Lisimachus annis vi.
Ceraunus , qui et Ptoîemœus , mensibus ix. Melear-
gus mensibus ii. Antipater xlv diebus. Sostenes annis
II. Antigonus Gonatas annis xxxvi. Demetrius x. An-
tigonus XV. Philippus xLii. Perses x, in quo regnum
Macedonum déficit.
DE H AIN ATT. LIVRE II. 5()
ans. Le quatorzième , Archélaus , quatre ans. Le quin-
zième , Amintas , un an. Le seizième, Pausanias, un
an. Le dix-septième , Amintas, six ans. Le dix-hui-
tième , Algaeus (Argœus), deux ans. Le dix-neuvième ,
Amintas , dix-huit ans. Le vingtième , Alexandre , un
an. Le vingt et unième , Ptolémée ou Aiorites , quatre
ans. Le vingt-deuxième , Perdicas , six ans. Le vingt-
troisième , Phihppe , vingt-six ans. Le vingt-quatrième,
qui fut Alexandre , fils de Philippe , régna douze ans et
six mois. Au bout de ce tems , il mourut à Babilone ,
dans la trente-deuxième année de son âge ; et le souve-
rain commandement ayant été réparti entre plusieurs ,
l'empire resta divisé. De là prit naissance la dinastie
des Alexandrins , c'est-à-dire , des rois d'Egipte macé-
doniens ; et , peu de tems après , furent aussi fondés les
royaumes d'Asie et de Sirie. Alexandre étant mort , le
trône de Macédoine fut occupé pendant sept ans par
Philippe , nommé aussi Aridée , et frère d'Alexandre.
Ensuite Cassandre régna dix-neuf ans. Antigone et
Alexandre, fils de Cassandre, régnèrent quatre ans.
Démétrius régna six ans. Pirrhus sept mois. Lisima-
chus six ans. Céraunus , nommé aussi Ptolémée , neuf
mois. Méléagre deux mois. Antipater quarante -cinq
jours. Sosthènes deux ans. Antigone-Gonatas trente-six
ans. Démétrius dix ans. Antigone quinze ans. Philippe
quarante-deux ans. Persée , qui fut le dernier roi de
Macédoine , régna dix ans.
40 AANALES
CAPITULUM XII
De Zacharia , regc Israël.
ACTOR.
Régnante autem Osia in Jiidaeâ , post Jéroboam
regnavit super Israël filiiis ejus Zacharias (i) vi men-
sibus tantùm. Ipso enim peccata patrum imitante,
percussit eum palàm Sellum , fîlius Jabes ; et regnavit
pro eo : sicque translatum est regnum de domo Jehu
in generatione quartà, jiixtà verbum Domini. Scd
regnavit Sellum uno mense tantùm, quia percussit
eum Manahen è Thersâ, et regnavit pro eo x an-
nis in Samariâ. Ex chronicis. Eo quoque tempore,
Corintliiorum (2) et Lacedajmoniorum (3) reges defe-
cerunt; et Lydorum regnum exortum est, anno
(1) Zacharie , suivant Eiisèbe , commença à régner en l'an 3o
d'Osias, ou 7()3 avant notre ère.
(2) Les rois de Corinthe finirent, suivant Eusèbe, en l'année 778
avant notre ère, et furent remplaces par des pritanes annuels.
5) L'auteur, trompe par Eusèbe, (pii s'arrête à Alcamènes, place
après la mort de ce prince , en l'an 77(>, la On des rois de Lacèdè-
mone; mais la royauté subsista loug-tems après dans les deu\
branches delà niaisun îles Hcraclidcs.
DE HAINALT. LIVRE II. ^l
CHAPITRE XII.
De Zacharie , roi d'Israël.
L AUTEUR.
Du tems qu'Osias régnait sur Juda , Zacharie , fils de
Jéroboam , roi d'Israël , succéda à son père, et occupa
le trône pendant six mois seulement. Jl imita les fautes
de ses pères , et fut tué aux ieux de tout le peuple par
Sellum , fds de Jabès, qui régna à sa place. C'est ainsi
que fut accomplie la promesse que Dieu avait faite à
.Téhu , de faire asseoir ses descendans sur le trône
d'Israël, jusqu'à la quatrième génération. Sellum ne
régna qu'un mois , ayant été tué par Manahem , venu
de Thersa. Ce dernier occupa le trône de Samarie pen-
dant dix ans (1). Extrait des chroniques. Yers ce tems-là
furent éteints les rois de Corinthe et de Lacédémone.
Le rovaume de Lidie (2) fut fondé l'an quarante-huit
d'Osias , roi de Juda ; il fut détruit par Cirus , roi des
Perses , après avoir subsisté pendant deux cent trente
ans.
(i) Il commença son règne en l'an -i)4 av. J.-(].
(2) Eusèbe place le commencement iln royaume «3e Lidie ea
l'anne'e 777 av. notre ère, mais il siiljsislait l)ien avant cette e'jiix|tie,
et remontait, selon Frère t (Mrni. de i'Acad. des lu^crip. l. v,
p. 273) à l'an 15-9 av. J.-C.
L\2 ANNALES
videlicet Oziae , régis Judée, xlvih ; (juotl tandem à
Cyro, rege Persarum , destructum est ( i ) , quod stetit
per annos ducentos et triginta.
CAPITULUM XIII.
De exoidio olympiadiim.
Anno regni Oziae, régis Juda, quinquagesimo ^^2),
Remus et Romulus ex Marte et'Yliâ generantur; et
eodem anno olympias (3) prima constituitur, qui fuit
^schyli , régis Atheniensium , secundus ; à captivitate
vero Trojae quadringentesimus et quintus (4)- -^ctor.
De hâc autem olympiade loquitur Eusebius in chro-
(i) En l'an 547 av. J.-C. , selon Eusèbe , et en l'an 545, selon
Fréret.
(2) La 5o' année d'Osias rëpond , dans Eusèbe , à l'an 775 avant
J.-C. Du reste, les difiérentes e'ditions de la Chronique de cet
auteur varient sur l'époque de la naissance de Romulus et de
Re'mus.
(3) Dans les éditions d'Euscbe , la 1" année de la 1" olimpiade
répond à la 49' et non à la 5o' anne'e d'Osias j ce qui fait remonter
au solstice d'e'te' de l'an 776 av. J. C. le commencement des olim-
piades. Mais Eusèbe confondant ensemble l'année civile des Grecs
et l'année olimpirpie , fait commencer au 1" septembre celle-ci,
qui commençait vers le i" juillet.
'4) Le texte dit 'j5<i , ce qui est cvidcmmcnl une faute.
Dr. UAINAUT. LIVRE II. l\Ci
CHAPITRE XIII.
Commencement des olimpiades.
En l'an cinquante d'Osias , roi de Juda , naissent
Rémus et Romulus , fils de Mars et d'Ilia. La première
année de la première olimpiade commence aussi à la
même année , qui fut la deuxième d'Eschile , roi d'A-
thènes , et la quatre cent cinquième de la prise de
Troie. L'auteur. Eusèbe , dans ses chroniques , parle de
la fondation des olimpiades. «Lapremière olimpiade,
dit-il, commença l'an second d'Eschile, juge des Athé-
niens , et Corébus d'Élide y fut vainqueur. Jules Afri-
cain rapporte au tems de Joathan, roi de Juda, l'époque
de la première olimpiade , qui , d'après notre calcul ,
se trouve également correspondre au même règne.
Voici ce que dit sur ce sujet le même Jules Africain ,
dont j'emprunte ici les paroles : Eschile , fds d'Aga-
mestor, gouverna les Athéniens pendant vingt-trois
ans , dans le tems que Joathan régnait à Jérusalem. »
Vers la même époque, Téglalh-Phalassar, roi des Assi-
riens , transporta en Assirie une grande partie du
peuple juif, qui avait alors Phacée pour roi; et c'est
44 ANNALES
nicis. « Hîc, inqult, constitiiitur olymplas prima, se-
cundo anno iEschyli, Athenienslum judicis, in qiui
Corebus Eliensis extitit victor. Hanc Africanus tem-
poribus Joatban , régis Hebraeorum , fuisse scribit ;
nostra quoque supputatio temporibus iisdem eam ex-
hibuit (i). Scribit autem Africanus, ut verba ejus
ponam , ad bunc modum : /Eschylus , Agamestoris
filius , apud Athenienses obtinuit principatum annis
XXIII, quâaetate Joatban regnabat in Jérusalem.»
Hoc tempore , Teglatb-Phalassar, rex Assyriorum, ma-
gnam partem Judœorum popuU in Assyrios transtu-
lit, rege Pbacee : quo tempore , Arctinus Milesius
versificator propè omni métro et opère clarus habe-
tur. Elii agunt quinquennale certamen , quatuor an-
nis in medio cxpletis ; in quibus principes annui
constituuntur : quam olympiadem Ipbitus, filius
Praxonidis, filii Haemonis, primus constituit. Ab lioc
tempore graeca de temporibus liistoria vera creditur;
nam antè liœc, ut cuique visum est, diversas senten-
tias protulerunt. Porro et nos in primiî olympiade
Joatban posuimus. A captivitate Trojae usquè ad olym-
piadem primam anni ccccvi. Lacedaemoniorum reges
defecerunt. Ilinc, decedentibus et succcdentibus re-
gnis , novus ordo consurgit. Ilinc olympias prima.
Rem us et Romulus generantur à Marte et Yliâ. Hoc
anno, in regno Israëlis, Pbacee rex sextus decimus (2)
(i) La 1" année de la i" olimpiaclc se rapportant à la 4g"" année
d'Osias , qui régna en tout .S2 ans, la 4"" annc'o de la même olim-
piade repond en effet à la i" année de .Tnathan.
(t.) Le texte nonfime Phaci-e le dix-peptième roi d'Israël , et le
fait régner ao ans; r'<'st une double erreur.
DE H AIN ALT. LIVRE II. 45
aussi vers ce tems que florissait le poète Arctinusde
Milet , également célèbre par ses vers et par ses ou-
vrages. Au bout de quatre ans , pendant lesquels on
e'tablit des magistrats annuels , les Éléens célébrèrent
leurs jeux quinquennaux , qui avaient été institués
pour la première fois par Iphitus , fils de Praxonides ,
fds d'Hémon. C'est à partir de cette époque que l'his-
toire grecque nous présente plus de certitude ; car
dans les tems antérieurs , les rapports des faits étaient,
comme on a pu le voir , souvent contradictoires. Ainsi
nous avons placé l'institution des Olimpiades sous le
règne de Joathan ; et, depuis la prise de Troie jusqu'à
la première olimpiade , nous comptons quatre cent six
ans. Vers le tems de la première olimpiade , la royauté
fut abolie à Lacédémone , un nouvel ordre s'établit
dans les royaumes qui se formèrent , et Piémus et Ro-
mulus furent engendrés par Mars et Ilia. En l'an pre-
mier de cette nouvelle ère vivait Phacée , seizième roi
d'Israël , qui régna dix années , et Osias , roi de Juda ,
accomplissait la cinquantième année de son règne. »
46 ANNALES
regnavit annis x ; et in Jiidâ regnabat Ozias sui regni
anno l (i). »
CAPIÏULUM XIV
De ovUi Rémi et Romuli.
HELINANDUS.
Latinorum quintus dccimus regnavit Aniuliiis,
Procœ fillus, annis xliv. Hiijus frater niajoi* natii
Numitor, ab eo regno pulsus , in agro suo vix'it. Filia
ejus Ylla , atlimendi partûs gratiâ, virgo vestalis est
electa. Quae cùm uno partu geininos edidisset infan-
tes, juxtà ripam Tiberis expositos Faustulus, rcgii
pastor armenti , ad Acciam Laurentiam suam uxorem
detulit. Quœ, propter pulcliritudinem et capacitatem
corporis quœstuosi, Lupa à vicinisappellabatur. Undè
ad nostram usquè mcmoriam meretricum ccUuloc lu-
panaria dicuntur. Pueri vero cùm adolevissent , col-
lecta pastorum et latronum manu , interfecto apiul
(i) Nous avons vu Jans une note précédente que les eJUions
tl'Eusèbc fesaient correspondre la i"' année de la i" olimpiade à
Tan 49 d'Osias; TEusèbc de Scalij;er recide cependant le commen-
rement des olimpiades à la 5o' année d'Osias et à Tan 7^5 av.
J.-C. Du reste, c'est la seule eilition qui reiiriduisc exactement le
passaj^e rappoi'le dan-< ce rhapifre.
DE HAINALT. LEVRE II. 4/
CHAPITRE XIV,
^Naissance de Remiis et de Romulii^
HELINAND.
Amulils , fils de Procas , fut le quinzième roi des La-
tins , et régna quarante-quatre ans. Il avait chassé du
trône Numitor, son frère aîné , qui s'était retiré dans
ses terres ; et Ilia , fille de ce dernier, avait été consa-
crée au culte de Vesta , pour qu'elle restât condamnée
à une virginité perpétuelle. Mais , ayant mis au monde
deux enfans dans une seule couche, ces jumeaux furent
exposés sur les bords du Tibre , et portés ensuite par
Faustulus , gardien du troupeau royal , à Accia Lauren-
tia son épouse. La beauté de cette femme et le prix
qu'elle mettait à ses faveurs lui avaient fait donner le
nom de Louve ( Lupa ) par le voisinage. C'est d'elle que
les lieus de débauche tirent leur nom et sont appelés
encore aujourd'hui lupanaria. Lorsque Romulus et Ré-
mus furent devenus grands , ils rassemblèrent une
troupe de pasteurs et de brigands , tuèrent Amulius
dans Albe , et rétablirent Numitor, leur aïeul , sur
son trône. Justin, livir xlih , chap. 2. Amulius chassa
ilu Irùnc ?ûimitor, son frère ahié , et «'ondainua llliéa ,
48 ANNALES
Albam Amulio , avum Numitorem in regnum resti-
tueriint. JusTiNUS in libro xliii (i). « Amulius aetate
majorem Numitorem fratrem à regno expulit , filiam-
que ejus Rheam in pcrpctuam virginitatem demersit ,
ne quis ultor patris ex eâ nasceretur. Quœ quasi sa-
cerdos clausa est in luco Martis , ubi geminos enixa
est, incertum stupro an ex Marte conceptos, quos
Amulius exponi jussit, ex quorum injuria illa deces-
sit. Expositos lupa aluit, quos Faustulus pastor ani-
madvertens substractos cos agresti vita nutrivit. Qui
adulti cùm latrones à rapina pecorum submoverent ,
Remus , à latronibus captus , Numitori tanquàm latro
offertur. Quem cùm inspiceret, repente Faustulus
cum Romulo supervenit ; factaque conspiratione ,
Amulium occidunt, regno Numitorem rcstituunt (2). »
Albericus in Poetario. Rernus etRomulus Martis fin-
guntur filii , quia fuerunt viri bellicosi. Mars Gradi-
\us dicitur, quia gradatnn pergitur in praelium , vel
à gradin , id est, à vibratione hastae.
(1) Cap. 2.
(2) Ce passage est plutôt imité que copie de Justin.
DE H AIN AL T. LIVRE II. /J9
fille de ce dernier, à une virginité perpétuelle , pour
empêcher qu'elle ne donnât naissance à un prince qui
pourrait devenir le vengeur de Numitor. Elle fut enfer-
mée , comme prêtresse, dans un bois consacré à Mars ,
où elle mit au monde deux jumeaux, soit qu'ils dussent
le jour au dieu , soit qu'ils fussent les fruits de la dé-
bauche. Amulius les ayant fait exposer aussitôt, Rhéa
conçut un si grand chagrin de cette injure , qu'elle en
mourut. Une louve prit soin de les allaiter, jusqu'à ce
que le berger Faustulus , les ayant découverts , les em-
porta dans «a cabane , et les éleva dans la vie agreste.
Lorsqu'ils furent devenus grands , ils firent la guerre
aux voleurs de troupeaux ; mais Rémus fut pris par ces
brigands, et conduit comme un voleur lui-même devant
Numitor. Pendant que celui-ci le considère attentive-
ment , Faustulus et Romulus arrivent tout-à-coup ; et ,
conspirant aussitôt contre le roi Araulius , ils le tuent,
et rétablissent Numitor dans son royaume. » Albéric ,
dans son poème, dit : « On feint que Rémus et Romulus
sont fils de 3îars , parce qu'ils furent des hommes belli-
queux. On donne à Mars le surnom de Gradivus, soit
parce qu'il s'avance pas à pas au combat , soit que ce
surnom vienne de yç'xji.in , qui signifie brandir une
Jance. »
ir.
5o ANNALES
CAPITULUM XV.
De Joatlian , rege Juda.
OsiA, rege Juda, mortuo , filius ejus Joathan regna-
vit pro eo, anno quartae ai'tatis ccciti, mundi vero
iiiMCXCi (i), et icgnavit annis xyi. Bonum et ipsc
coràm Domino fecit , sed excelsa non abstulit. Portam
templi siiblimissimam , quse et speciosa dicitur, œdifi-
cavit , et haec sola , in destructionc pcr Chaldœos
factâ, remansit. Conies/or. li'ic devicit Ammonitas,
et imposait eis annuum tributum talenta argenti ccn-
tum , et decem millia choros tritici , et totidem hordei.
In diebus ejus, Rasin, rcx Syriœ, et Phaccc, rex
Israël, cœpcriint infestare regnum Juda. Sub isto
Joathan exorsus est prophetare INaun, de tribu Si-
meon , contra Ninivem. Item sub Joathan vidit Isaias
Dominum sedentem super sohum excelsum , et séra-
phin mundavit labia ejus. Item sub eodcm exorsus est
prophetare Michceas ; et tune prophetabant Osée et
Joël. In diebus Phacee, régis Israël , regnavit Teglath-
Phalassar, rex Assur, et asccndit in Israël, et vastavit
omncm rcgionem trans Jordanum , et captivas duxit
duas tribus et dimidiam ; vastans quoque Galilaeam
(i) L'.'in 772 avani Vire clin'tir'nnc.
DE IIAINAUT. LIVRE II. 01
CHx\PITRE XV.
De Joatlian , roi Je Juda.
Après la mort d'Osias , roi de Juda , Joathan , son
fds , lui succéda , l'an 303 du quatrième âge , ou l'an
du monde 3191 , et régna seize années. Il fît ce qui était
agréable au Seigneur, mais il ne détruisit pas les
hauts-lieus. Il bâtit la porte la plus élevée du temple ,
qui était aussi la plus magnifique , et qui resta seule
debout , après la destruction de la maison du Seigneur
par les Caldéens. Pierre Comestorl Joathan vainquit
les Ammonites , et exigea d'eux, un tribut annuel de
cent talens d'argent , de dix mille mesures de blé et de
dix mille mesures d'orge. Sous son règne , Rasin , roi
de Sirie , et Phacée , roi d'Israël , commencèrent à
ravager le royaume de Juda. Du tems du même roi,
Naun , de la tribu de Siméon , commença ses prophé-
ties contre Ninive ; Isaïe vit le Seigneur assis sur un
trône élevé , et un séraphin purifia ses lèvres ; Michée
commença aussi à prophétiser ; et sous le même règne
florissaient les prophètes Osée et Joël. Lorsque Phacée
régnait sur Israël , Téglath-Phalassar occupa le trône
d'Assirie ; et , étant venu en Israël , il ravagea tout le
pays de l'autre côté du Jourdain. Il emmena captives
deux tribus entières et la moitié d'une troisième tribu ;
puis il ravagea encore la Galilée, et emmena avec lui
52 ANNALES
de tribu Zabulon et Nephtalin mullos transtulit se cum
in Assyrios , qui posscut dimicliœ tribui comparari ;
undè sœpô Icgitur quod très tribus Israël captiva-
verit ; et hoc fuit initium caplivitatis dccem tribuum.
CAPITULUM XVI.
(^iiùcî Ursiis rex transferre voliiit numarchiam et dorninationen»
civil atis Bel£:('nsi> in civitafcnn Troberinam.
ACTOR.
Lucius Tungrensis, cujus liistoriam prosequor
istis temporibus , incœpit annos suos per olympiades
coniputare, dicendo Ursum regem in belgensi civi-
tate atquc rcgno dominasse, circà olympiadis prima-
rioe constitutionem ; et anno quarto olympiadis pri-
mœ (i), Belgim sibi rebellantem ferociter edomâsse
et cum Germanis iniisse pactioncs, Sequitar. Ursus
videns suœ civitatis destructionem , praecaveus in fu-
(i) La 4* année de la i" olimpiado commence au solstice d'c'lc
7^3 et finit au même solstice li^. A chaque anni'o oHmj)i(nic cor-
respondent toujours deux années juliennes ; mais Eusèbc n'i-n a
fait c<^rrespon(1re qu'une , et il choisit toujours Tannée julienne
dans îaq'.nlle finit Tanner olimpi(|ue : de sorte qu'à la 4* anne'e de
la i" olinipiade mentionnr'f ci-dessus, il fait concorder l'an i'~/i
seulement.
DE IIAIAALT. LIVRE II. Où
en Assirie un grand nombre d'Hébreux de la tribu de
Zabulon et de celle de Nephtali , qui pouvaient former
en tout la moitié d'une tribu ; c'est pourquoi on lit qu'il
fit prisonnières trois tribus d'Israël. Ce fut là le com-
mencement de la captivité des dix tribus.
CHAPITRE XVI.
Ursus veut transférer dans la ville Je Trêves le gouvernement de
la ville de Bclgis et de tout le royaume.
L AUTEUR.
Lucius deTongres, dont je suis l'histoire pour com-
poser celle de ces tems , commence ses années par
compter celles des olinipiades, en disant que le roi
Ursus commença à régner sur la ville de Belgis et sur
tout le royaume vers le commencement de la première
olimpiade ; et que la quatrième année de cette même
olimpiade , il soumit avec barbarie la ville de Belgis
qui s'était révoltée contre lui , et fit alliance avec les
Germains. Puis il continue ainsi : » Ursus , voyant la
cité belge ruinée , et voulant prendre ses précautions
pour l'avenir, résolut , dans la crainte qu'il avait des
fils des habitans dont il avait causé la mort , et dont ie
nombre s'élevait à plus de deux cent mille, de quitter sa
propre ville , et de transférer à Trêves le siège de son
gouvernement. Il exécuta cette résolution la troisième
54 ANNALES
turum, et timens defunctorum filios, quorum ducenta
millia numerus oxcedebat, disposuit civitatcm pro-
priam relinquoro , et Trcvcrim thronum sui rcgni
transferre. Quod et fecit anno tertio quartae olym-
piadis (i). Totum regimen civitatis Belgis atque ci-
vitatum subjectarum filiis suis, tanquàm ducibus
earumdom, derelinquens , Treverim honorificè sus-
ceptus est.
CAPITULUM XVII
De Achas , rcge Juda.
ACTOR.
Defuncto Joathan, rege Juda, Achas, filius ejus ,
regnavlt pro co , anno quartœ œtatis cccxviii, mundi
vero tiiMCCvii (2); et regnavit annis xvi. Ilic ambu-
lavit in via rcgum Israël. Nam et unum de filiis suis
consecravit idolo , trajiciens euni per ignem Toplietli
in valle Ben Ennoni , juxtà Aclieldemach. Tune as-
cenderunt Rasin, rcx Syriœ, et Phacee, rex Israël,
in Jérusalem, et obsederunt cam. Primo, ut ait Jo-
sephus , et aggressus cum eis Achas , victus est , et
(1) y.n l'an 5G1 av. J.-(^
(2) En l'an yjG av. J.-C.
DE HAINALT. LlVlîE II. 55
année de la quatrième [olimpiade/^ Après avoir aban-
donné l'administration de Belgis et des cités sujettes à
ses fils , en qualité de ducs de ces mêmes villes , il
se rendit à Trêves , et y fut reçu avec de grands hon-
neurs.
CHAPITRE XVI
D'Achas , rui de Juda.
L ALT EUR.
Après la mortde Joathan, roi de Juda, son fils Achas
lui succéda, l'an 318 du quatrième âge, et l'an du
monde 3207. Il régna seize ans, et marcha sur les
traces des rois d'Israël. En effet , il consacra un de ses
fils à une fausse divinité , en le fesant passer par le feu
de Topheth , dans la vallée des fils d'Ennom , près d'A-
cheldémach. Alors Rasin , roi de Sirie , et Phacée , roi
d'Israël, marchèrent sur Jérusalem, et en firent le
siège. Dans cette première expédition, dit Josephe,
Achas leur livra bataille , et fut vaincu ; son fils Zacha-
rie fut tué dans le combat , et plusieurs milliers de sol-
dats périrent avec lui. Le roi de Sirie et celui d'Israël
5(> ANNALES.
occisus fîliiis ejus Zacharias, et mulla mlllia cuni
eo. Porro secundo ol)seclcruiit Jérusalem rex Syria?
et rex Israël ; cùmque timeret Aclias nimis, confor-
tavit eum Isaïas diccns : « Ne timeas ah his duabus
caudis titionum fumigantium. » Sed non credidit ei
Aclias, nec voluit queerere signum à Deo, et misit
nuncios ad regem Assyriorum Teglalh-Plialassar, di-
cens : « Servus tuus ego sum. Ascende, et salvum me
fac de manu l'egis Syrise et régis Israël. » Et intravit
rex Assyriorum Syriam et vastavit eam , et ideo rediit
Rasin in Damasco. Rex autem Assyriorum cepit Da-
mascum, et inteifecit Rasin , et Damascenos transtu-
lit in Cyrenem (i), quœ est versus Ethiopiam. Et oc-
currit eis Achas , rex Juda, cum muneribus in
Damascum. Cùmque vidisset altare Damasri, misit
ad Uriam sacerdotem in Jérusalem exemplar ejus ut
extrueret ei consimile. Quo facto , cùm rediisset
Achas, altare aeneum transtulit à facie templi ad
aquilonem , et super altare novum obtulit holocausta
et pacifica. De altare vero ;eneo, ut tradunt quidam
Hehrœi, fecit illud horologium famosum, quod dice-
batur horologium Achas, de quo habctur in libro
Isaiae prophétie. Et prœcepit sacerdotibus ut deinceps
super altare novum offerrent ; et disposuit luteres et
mare aeneum super pavimentum, ut eis nuUus ute-
retur. Musach quoque sabbati et ingressum régis re-
dusit in templum Domini, ut cum templo ea profa-
(i) Dorn Calmel dit qu'il faut entendre une ville de Cirène, biltie
sur la rivière du Cirus en Albanie, au sud-ouest de la mer Cas-
pienne.
DE iiAiNAiT. Livnr: II. 57
assiégèrent une seconde fois Jérusalem. Comme Achas
fesait paraître beaucoup de crainte , Isaïe chercha à le
rassurer, en lui disant : « IXe crains rien de ces deuv
morceaux de tisons fumans. » Mais Achas n'eut pas de
confiance en lui , et refusa de demander un signe de sa
délivrance au Seigneur. Il aima mieux envoyer au roi
d'Assirie Téglath-Phalassar, des députés qui lui dirent
de sa part : « Je suis ton serviteur. Monte et sauve-moi
des mains des rois de Sirie et d'Israël. » Téglath-Pha-
lassar entra alors dans la Sirie et la ravagea ; ce qui
força Rasin de revenir à Damas. Mais le roi d'Assirie
prit Damas , tua Rasin , et transporta les Damascènes à
Cirène près de l'Ethiopie. Achas se rendit au-devant
de lui à Damas avec des présens ; et , après avoir vu
l'autel de Damas , il en envoya un modèle à Jérusalem
en mandant au grand-prètre Lrie d'en faire construire
un semblable. Cet ordre fut exécuté. A son retour, il
fit enlever l'autel d'airain qui était devant la façade du
temple , le fit placer au septentrion , et offrit sur le
nouvel autel des holocaustes et des sacrifices. Quelques
Juifs rapportent qu'il fit fabriquer avec l'autel d'airain
cette horloge fameuse , que l'on appelait l'horloge d'A-
chas , dont il est question dans le livre du prophète
Isaïe. Achas ordonna de plus aux prêtres de faire doré-
navant leurs sacrifices sur le nouvel autel ; et en même
tems il fit mettre sur le pavé du temple les cuves
et la mer d'airain , afin que personne ne s'en servit
dans la suite. Il ferma aussi la chaire du sabbat et
la porte d'entrée du roi dans le temple du Seigneur,
afin d'exercer sur ces choses sacrées la même profana-
tion qu'il avait exercée sur le temple , et dans l'espoir
de plaire par ce moyen au roi d'Assirie. Sous le règne
d'Achas , Isaïe vit les malheurs futurs de Babilone ,
58 ANNALES
naret, ut sic placeret régi Assyriorum. Sub isto Achas
vitlit Isaïas omis Babylonis ; alia vero decem vidit sub
EzcchiA.
CAPITULUM XVIII.
De Oseâ , rege Israël , et transinigratione septem tribuiirn Israèl.
Anno XII (i) Achas, régis Juda , regnavit Osée
su}3er Israël novcm annis, fecitque malum coràm
Domino , scd non sicut patres sui , quia licentiavit
Israëlitas subditos suos, ut ascenderent in Jérusalem
ter in anno. Contra hune ascendit Salmanasar, rex
Assyriorum , et factus est ei tributarius. Cimique de-
prehendisset rex Assyriorum quod Osée rebellare ni-
teretur, per Sesac, regem TEgypti, cui munera mise-
rat , obsedit eum , et vinctum misit in c^rcerem in
Ninive. Et obsedit Saniariam tribus annis, et cepit
eam anno nono Osée et sexto Ezechiae (2); et trans-
(i) Toutes les éditions d'Etisèhp placent le commencement du
règne d'Ose'e, en la 3' année de celui d'Achas, c'est-à-dire en l'an
754, suivant Ensèbe.
(2j Ici le texte est conforme à l'Art de vérifier les dates qui
rapporte la prise de Samarie à l'an 6 d'Ëzcchias. Eusèbe place la
fin du règne d'Osée en la 1 1* année d'Achas , c'est-à-dire , en l'an
746. Suivant le même auteur, la 6° année d'Ézéchias répond à
l'an 735 ; mais, suivant l'Art de vériilcr les dates, cette année
n-pond à l'an 718 av. J.-(^.
r>1L IIAINALT. LIVRE II. JQ
et SOUS celui d'Ézéchias , il vit ceux de dix autres na-
tions.
CHAPITRE XYIII.
D'Osée , roi d'Israël , et de la transmigration des sept trfhus
En la douzième année d'Achas , roi de Juda , Osée
commença à régner sur Israël. Il régna neuf ans , et lit
le mal devant le Seigneur, mais non de la même ma-
nière que ses pères , parce qu'il permit aux Israélites
qui lui étaient soumis de monter trois fois dans l'année
à Jérusalem. Salmanazar , roi d'Assirie , marcha
contre Osée , et le contraignit de lui payer tribut. En-
suite , avant appris que le roi cherchait a. se révolter
en se fesant soutenir par Sésac , roi d'Egipte , auquel
il avait envoyé des présens , il l'assiégea ; et , l'ayant
pris , il l'envova chargé de chames dans une prison de
Ninive. Le siège qu'il mit devant Samarie dura trois
ans , au bout desquels il s'empara de la ville , la neu-
vième année d'Osée et la sixième d'Ézéchias. Il emmena
en Assirie le peuple d'Israël , c'est-à-dire , les sept tri-
bus qui restaient encore , et les établit sur le fleuve de
Gozan, au-delà des montagnes des iMèdes et des Perses.
Ensuite Salmanazar fît venir de divers pays de nou-
veaux habitans à Samarie , en petit nombre d'abord ;
Go ANNALES
tulit Israël in Assyt-ios , videlicet septeni tribus quae
remanserant , et posuit eas jiixtà fluvium Gozan, ultra
montes Mcdorum et Persarum. Porrô rex Assyriorum
(le cHversis regionibus atlduxit colonos in Samariam
paucos primo, scd posteà Assaradoch populavit ter-
ram totam. Hi priiis vocati sunt Chutaei, à regione
pcrsidâ quœ dicta est Chuta ; Grœci vero dixcrunt
eos Samaritas , Hebrasi vero Jacobitas , quia supplan-
taverant Israëlitas à finibus suis. Immisitque Domi-
nus in eos leones , et interfîciebant eos ; et nunciatum
est régi quod périrent coloni ejus, quia ignorabant
légitima Dci illius. Et misit eis unum de sacerdotibus
Israël et legem Moysi scriptam , et susceperunt cir-
cumcisionem et légitima Dei Israël. Nihilominiis deos
sucs in excelsa colebant.
CAPITULUM XIX.
De cxordio civitatis Romanae.
Ëx chronicis.
Temporibus Aclias, à gemellis Rcmo et Romulo
Koma in monte Palatino conditur (i), et, anno ab
(i) Eiisèhe place la fondalion ilo Rome en Tan 782 av. J.-C.j
Vairon la rapporte à l'an 763 , et l'édition annc'nienne d'Eiisèbe
dit <pie quelques auteurs adoptent cette date.
DE IIAINAUT. LIVRE II. 6 1
mais plus tard Assar-Addon peupla tout le pays. Ces
nouveaux liab'itans furent d'abord appelés Chutéens,
d'une contrée de la Perse , nommée Chuta ; mais les
Grecs leur donnèrent le nom de Samaritains , et les
Hébreux celui de Jacobites , parce qu'ils s'étaient em-
parés du pays occupé par les Israélites. Le Seigneur
avant envoyé contre ce peuple nouveau des lions qui
se mirent à le dévorer, il fut annoncé au roi que toute
sa colonie périrait , parce qu'elle ig^norait les lois du
Seigneur. Alors le prince envoya aux Samaritains un
des prêtres Israélites avec la loi écrite de Moïse ; ils
se firent circoncire, et reçurent la loi du dieu d'Israël :
ils adorèrent néanmoins leurs dieux sur les lieus élevés.
CHAPITRE XIX.
Commencement de la ville de Rome.
Exlrail des Chroniques.
Daîns le tems du roi Achas , Rome fut bâtie sur le
mont Palatin par Piomulus et Piémus , frères jumeaux.
L'an 3 de la fondation de la ville , Rémus fut tué avec
un pic (le berger, par Fabius , général de Romulus.
6 2 ANNALES
urbe conditâ tertio, Remus à Fabio, Romuli duce,
riitro pastoral! occiditiir. Actor. Nàm, sicut dicit
Titus Livius, cimi Remiis et Romulus essoMt fratres
gemclli et ejusdcm œtatis, quis eorum conditam ur-
bcm tanquàm senior regerct condixerunt per augu-
rium dctcrmliiarc. Cîimque proptcr hoc in montem
Aventinuni uterque cum suis asccndissct, priori Renio
dicuntur apparuisse septem vultures , Romulo vero
cùm duplex numcrus vulturum se ostendisset, uterque
sefcliciùs augurinm haberc asserebat, Remus propter
hoc quia pi'iiis viderat , llonuilus , quia numéro avium
superabat, dicebat se prœvaluisse : et sic in seditio-
nem versi, Remus in turbû occiditur. Vulgarior tamen
opinio est Rcmum, quia novos muros, contra statu-
tum, transilicrat, interfectum. Actor. Ilis tcmporibus
legitur claruisse sibylla Erythrœa , de qua superiùs,
libro primo, pauca perstrinximus.
CAPITULUM XX.
De pervcrsitate rcgis Ursi Bclgoriim.
LUC! US.
Anno primo olympiadis quintœ (i ), obsedit Ursus
Tungrim sibi, propter énormes excessus suos, rebel-
(i) L'an 759 av. J.-C.
DE IIAl.NALT. LirRr II. 65
L'aïUeur. Suivant Tite-Live, comme Romulus et Rëmus
étaient frères jumeaux et par conséquent du même
âge , ils convinrent de consulter les augures pour con-
naître celui d'entre eux qui devait gouverner en qua-
lité de chef la ville qu'ils avaient fondée. Etant donc
montés à cet effet sur le mont Aventin , accompagnés
chacun de leurs officiers , on dit que Piémus aperçut le
premier sept vautours , et que Piomulus en vit ensuite
un nomhre double. Tous deux prétendirent alors avoir
obtenu le meilleur augure, Rëmus, parce qu'il avait vu
des vautours le premier, et Romulus , parce qu'il en
avait découvert un plus grand nombre. De là naquit
une querelle dans laquelle Rémus fut tué. Cependant
l'opinion commune veut que Rémus ait été tué pour
avoir franchi , contre la défense qui en avait été faite ,
les murs de la nouvelle ville. L'auteur. Vers ce tems-là,
florissait , dit-on , la sibille Erithrée , dont nous avons
dit un mot plus haut , au livre premier.
CHAPITRE XX.
De la perversi c d'Lrsus, roi des Belges.
Lrcius.
En l'an premier de la cinquième olimpiade , Lrsus
assiégea et prit la ville de Tongres , qui s'était révoltée
contre lui, à cause des excès et des crimes dont il s'était
64 ANNALÏÏS
lantem, nt subjccit cam ; et consequenter, propter
consimilcin causam et propter ejus tyrannidein, Agi'ip-
pini sibi rcbollantos cum Strasiburgcnsibus patrlam
Treberi circuniadjacontem succondentes, opprobi-ia
rogi atque ejus civitati intulere fcruntur. Similitei' et
Treverini contra eum , propter ejus tyrannidein, in-
surrcxcnint et hoc pluries ; sed falsis promissionibus
populuni semper illudcbat. Scquiiur Luciits. Olym-
piadis septimae anno secundo (i), Ursus, belgensis
rex , licèt à Treverinis fuisset susceptus , in eo tamen
minime confidobant. Volens tandem eorum captare
bencvolentiam, cunctis audientibus proposait. « Viri
sanguine ac prosapià omnium Galliœ civitatum nobi-
Hores, origine praestantiores et antiquiores, constat
univcrsis juniores semper antiquis subjici debere ;
imonatura abborret seniores sanguinis ilhistrioris ju-
venibus immeritis submitti. Et ubi auditum est fibam
sine reverentiâ matris dominari? aut quis audivit ser-
vos suprà dominos velle magistrari et impunèPHinc
estquod nostra nobilissima civitas Treberis antiquior,
pra?stantior, nobilior, et nunc potentior omnium Gal-
lirc civitatum indubitanter consistit; quarc si mibi
eonsenseritis , et mibi adh.'crere fidebter det^-everitis,
cunctis mandabimus subditis nostris et Belgi, ut
cuncta tributa tàm deorum quàm aliorum nobis a(.'
civitati Treberinne infailHbibter, de caetero et in perpe-
luum transmittantur. Aliter civitales rebelles solo
•ro.Tquabimus , et (piotquot inobedientes viros ac îe-
(i) L'an 750 av. J.-(^ , ri 7;"): mA m l'c'dilrMi ,;rni<'r)i(Miiir.
DE IIAINAUT. LIVRE IT, 65
rendu coupal)le. On dit aussi que les Agrippiniens ,
unis à ceux de Strasbourg , excités par les mêmes mo-
tifs et par la tirannie sous laquelle ils gémissaient,
se soulevèrent contre IJrsus, envahirent le territoire
voisin de ïrèvcs , et causèrent du dommage au roi et
à sa cité. Les Trévirois eux-mêmes , irrités contre leur
tiran, levèrent plusieurs fois l'étendard de la révolte ;
mais celui-ci sut, par des promesses trompeuses, flatter
le peuple et calmer son irritation. Liicius continue : En
la deuxième année de la septième olimpiade , le roi
LJrsus , voyant qu'il n'avait pas la confiance des Trévi-
rois , quoiqu'il eût été accueilli par eux , chercha à
capter leur bienveillance , et leur parla ainsi , après les
avoir assemblés: «Citoyens, qui, de toutes les cités
de la Gaule , vous montrez les plus illustres par le sang
et par l'origine , et qui vous vantez jus'.ement d'être les
plus nobles et les plus anciens , vous savez tous que les
plus jeunes doivent obéir aux plus âgés, et que ce serait
une chose contre nature de voir des vieillards d'un
sang illustre céder l'autorilé à des jeunes gens sans mé-
rite. Et oîi a-t-on entendu dire que la fille dût com-
mander à sa mère , sans respect pour elle , ou que les
esclaves dussent impunément gouverner leurs maîtres ?
Comme donc notre très-noble cité de Trêves est indu-
bitablement plus ancienne , plus recommandable, plus
illustre et plus puissante qu'aucune autre cité de la
Gaule , si vous voulez suivre mon sentiment et vous
montrer résolus de me rester inviolablement attachés,
j'ordonnerai à la ville de Belgis et à tous les peuples qui
nous sont soumis , d'apporter dorénavant , et sans y
manquer jamais , à nous et à la cité de Trêves, les tri-
buts qu'ils' doivent aux dieux et toutes les autres rede-
vances de quelque nature qu'elles soient ; et , s'ils s'y
II. 5
GG ANNALES
minas rcpericimis ci'iulcliter vivi excoi-ial)niiliir. i>
Cunctis coMiplaruit oditio.
CAPITULUM XXI.
Ile oonslanfiA inulicnim civitatis lUl^cnsis; (jiuililcr ocrideiunl
Ursum rtcei'i.
ExiiT igitur edictum à regc, ut civitas Belgis cae-
teraequc regni civitates et oppida de cœtero tributariae
et subjcctœ civitati trcbcrina? pcrpctiio pcrmancront,
sub cxcoriationis pœna. A.d quod edictum pluresrej^ni
civitates consulte responderunt , quod si Belgis civi-
tas edictum susciperet et obedirct, licèt dejecta pro
tcmpore, ipsam tamen confitcbantur metropolim et
(lomiuam eorum , et quidcjuid faceret ipsam valide
.sequerentur. Ciam autem edictum illud in Bclis tliea-
tro, antè statuam magnam, publiée promulgaretur,
tantus et tàm terribilis populi cxtitit ululatus et cla-
mer, et prœcipiiè mulierimi , ut viderentur omnes
irremediabiliter insanire. Lndè mulieres impetu fu-
rioso in proclamatorcm edicti prosilientes, ipsum cum
i[iiatuor ducibus sibi assistentibus filiorr.m Ursi , un-
LMsilniset denlibus in loi frustris (|iiot crant diiipue-
DE HAINAUT. UVWE lî. G7
refusenl , nous raserons les villes des rebelles; et tous
hommes ou femmes qui nous désobéiront seront sans
pitié écorchés tout vivans. » Cette proposition fut ap-
prouvée par l'assemblée entière.
CHAPITRE XXL
Ci^nstance et fermeté des femmes de Relf^is; comment elles fuirent
le roi TJrsns.
Le roi publia donc un décret par lequel il ordonnait
que la ville de Belgis et toutes les cités et les places
fortes de son royaume deviendraient et resteraient à
jamais sujettes et tributaires de la cité dé Trêves , et que
toute personne qui se montrerait rebelle serait condam-
néeà être écorchée toute vive. Plusieurs cités du rovaume
répondirent sagement à ce décret , que , si la ville de
Belgis , qu'elles considéraient toujours comme leur
métropole et leur souveraine , quoiqu'elle fût déchue
pour un tems de sa grandeur, consentait à le recevoir
et à lui obéir, elles imiteraient son exemple , et lui res-
teraient inviolablement attachées. Mais , lorsque le dé-
cret fut publié au théâtre de Bel , devant la grande
statue, le peuple et surtout les femmes poussèrent des
cris et des hurlemens si terribles, qu'on eût dit qu'elles
étaient devenues entièrement folles. Elles se jettent
avec furie sur celui qui publiait l'édit et sur les quatre
ducs , fds d'Ursus , qui l'assistaient , et les déchirent
6S ANNALES
runt. Et codeni impetu totam civitatem pcrcuiTciitos,
quotqiiot viros aut muliercs Urso favorabiles, cujus-
cumque œtatls , existèrent, sine, tniscrieordiâ jiigulâ-
runt. In crastiiium viri civilatis in am])hillieati'o
Bacclii conglobati, quid super factis agcrcnt ; jiivcnes
et timidi et armis inexperti et sine consilio , qiiis regi-
men civitatis assumeret minime repererunt. Dictac
mulieres, liORe audientes, qiuie congrcgatœ simul in
thealro Belis permanebant, posterioribus denudatis
et ipsis demonstralis quasi démentes , secretis tamen
partibus coopertis , viros illos ab ampbitbealro , prœ
verecundiâ ac timoré, effngàruut, et cunctis viduis
civilatis illùc congregatis cum multis maritatis, con-
sibo inter se habito, elegerunt Ursam virginem ,
quondàm fîHam Herisbrandi principis sacerdotum , in
reginam civitatis. Remanscrunt igitur in civitate so-
lùm deorum atquc Icgum anticjuarum zelatores pauci
tamen cum juvenibus liborum intercmptorum. Re-
censait autem regina muUeres à viginti annis usquè
ad quadraginta quinquc , et reperit ad prœbandum
aptas duccnla miUia et eo ampbùs, demptis dcbibbus,
praegnantibus et infirmis, ({uœ unanimiter per nu-
mina juraverunt cum regina earum contra Ursum et
suos Treberinos civitatem in suis Hbertatibus susli-
iiere, aut \ham earimi exponere totalilor.
DE HAINAUT. LIVRTî IT. Gç)
tous les cinq , à coups de dents et d'ongles , en autant
de morceaux qu'elles étaient de personnes. Puis , cou-
rant avec impétuosité par toute la ville , elles égorgent
sans pitié tous les hommes et toutes les femmes , de
quelque âge qu'ils soient , qui s'étaient montrés favo-
rables àUrsus. Dès le matin du jour suivant, les hommes
de la ville s'assemblèrent dans l'amphithéâtre de Bac-
chus ; mais , comme ils étaient pour la plupart jeunes ,
timides , sans aucune expérience des armes et sans
résolution , ils ne purent prendre aucun parti convena-
ble aux circonstances , ni trouver un chef qui se char-
geât de gouverner la cité. Les femmes , qui s'étaient
aussi rassemblées dans le temple de Bel , ayant connu
cette faiblesse des hommes., retroussent leurs vètemens
comme des folles, et leur montrent leur derrière , en
cachant néanmoins les parties que la pudeur leur or-
donnait de couvrir. A cette vue , les hommes , frappés
de honte et de crainte, s'enfuient de l'amphithéâtre de
Bacchus , et cèdent leurs places aux veuves de Belgis ,
qui toutes s'y rassemblent aussitôt avec un grand nom-
bre de femmes mariées, délibèrent ensemble, et élisent
pour leur reine la jeune Ursa , qui était fille de Héris-
brandiis , autrefois prince des prêtres. Il ne resta plus
alors dans la ville que le petit nombre de ceux qui
étaient demeurés fidèles au culte des dieux et aux an-
ciennes lois de Belgis, et les enfans de ceux qui avaient
été tués. La reine fit le recensement de toutes les
femmes depuis l'âge de vingt ans jusqu'à celui de qua-
rante-cinq , et en trouva plus de deux cent mille capa-
bles de porter les armes , sans comprendre dans ce
nombre celles qui étaient enceintes , malades ou in-
firmes. Elles jurèrent toutes par les dieux, qu'elles dé-
fendraient avec leur reine les libertés de Belgis conlr<;
ANNALES
CAPITULUM XXII.
T)c regno et doniinio Ursae rej^ina' Belj^onini:
Tmprimis autem regiiia sacrificavit iuvictissiiiia
deo Marti atqiie clcœ Vcneri potcntissiinœ , quatcnùs
Martcm placard, solemnissinia sacrificia ciiin centum
virginibus de nobilioribus iirbis devotè sacrificatis.
IJndè meruit in responsis audire, ut iiicœpta viriliter
peragcrct , et Ursum ab Ursâ supcrandiim , principa-
tuni ad propria reforiTiflndum. Aliis autem diis et nu-
minibus , juxtà eorum naturam , oblationes mittens ,
residuum facti sui ipsis commendavit. Responsis
deorum auditis roborala , misit ad vicinas civitatcs
et spccialiter ad muliercs , facti sui seriem suppli-
cando, quateniis consilio destituta sibi assistere di-
gnarentur. Dicta3 vero civitatcs , mœrorc et gaudio
permixtlm circumfusœ, factum approbantes, obtule-
ruTit se ultro mori pariter quàm vivere cum ipsa ,
omnibus fautoribus Ursi à regno priùs elïugatis. Mi-
serunt deniquè ad Belgim Gallicam et ad eorum
oppida, ediclum régis, et quid super eo mulieres
l)elg;eiises pcrrgcrant. Oui sine pi'ovidà deliberationc
DE ITAINALT. LIVRE II. 7I
Ursus et contre SCS Trcvirois , ou qu'elles perdraient
la vie.
CHAPITRE XXII.
Du rogne et tle la doniitiation d'Ursa, reine des Piclgos,
Alop.s la reine offrit d'abord des sacrifices à l'invin-
cible dieu Mars , pour l'apaiser, et à la puissante déesse
Vénus. Cent jeunes fdles des premières maisons de la
ville furent immolées saintement dans ces sacrifices so-
lennels. C'est pourquoi les oracles parlèrent en faveur
d'Ursa, et l'avertirent d'achever courageusement ce
qu'elle avait entrepris , qu'elle triompherait d'Ursus ,
et qu'elle rétablirait le gouvernement. Elle fit aussi des
offrandes aux autres divinités, chacune selon sa nature,
et les pria de l'aider à finir heureusement ce qui lui
restait encore à faire. Rassurée par les réponses des
dieux, elle envoie des députés aux cités voisines, et
principalement aux femmes , pour les instruire de ce
qu'elle avait entrepris, et pour les engager à l'assister
de leurs conseils , dont elle avait besoin. Les cités se
livrant en même tems à la joie et à la douleur, approu-
vèrent sa conduite , et offrirent d'elles-mêmes de mou-
rir ou de vivre avec elle , puisque les fauteurs d'Lirsus
avaient été chassés du royaume. Enfin on envoya à
Heauvais et aux villes qui dépendaient de celle-ci , le
■']'l ANNALES
respoiiclerc non audentes , dicm consilii expeticriuit.
Intercà miserunt ad Rivallonem , regem Britanniœ ,
pro auxilio ; qui factinn considcrans , niisit statim
Gui'gunsium, filium cjus, cum potcnlià gravi, ad
Belgim succunendam. Gallici tandem cum Britoni-
biis colligati , Bcigim subintrantes , civitatcm ad vi-
riliter rcsisteudum Lrso coaptârunt. Disposait autem
rcgina ut solae mulicrcs quas viduavorat Ursus , cum
ipsâ, piimum aggressum obtincrent. Britanni, viden-
tes mulierum ferocitatcm , civitatcm extra in subur-
biis exeuntes , illiic dicm belli expcctarunt. Undc
usquè in hodiernum dicm à Gurgunsio , fîbo régis
Brilanniœ, locus iste Gurgunsignacus dicitur, in vul-
gari Gussignies (i) uuuc ab iucolis appcllatur. Porro
Ursus civitates sibi suljjcctas circà Rbenum et Moscl-
lam mandans , ut secum contra Belgos progrcdercn-
tur, omnes rebellantes, Mosellanâ duntiixat excepta ,
cum duccntismillibus armatorum profectus est. Cùm
vero Ursus ad tria millia passuum Belgim appropin-
quasset, illùc tentoria figcrc disposuit. Et ccce, nocte
primaria, ex abrupto, dùm dispcrsi , fessi et exinaniti
de suis disponerent sarcinis ad securiùs obsidendum,
Ursa cum suis mulieribus semi furibundis civilatem
exeuntes, Ursum cum suis Trcbercnsibus invadentes,
casualiter regem in papilione febribus laborantem in
lecto cum nudtis suffocarunt , non advcrtentcs qui
essai. Supposuerunt ignem curribus , disrupuerunt
tentoria, cœdem gravom exercuerunt, non sine
maximâ earum intercnqilione et vidnerationc gi"avi
(ij Gusscnics, villngc à -i liciics cl au nord- ouest de Bavni.
DE IIAINAIT. LIVRE II. 'JO
clécreL du roi et la relation de la conduite des femmes
de Belgis dans cette circonstance ; mais ces peuples ,
n'osant prendre de résolution sans avoir délibéré entre
eux , remirent de faire réponse jusqu'à ce qu'ils eussent
consulté l'assemblée de la nation. Pendant ce tems-là ,
des députés partirent vers Rivallon , roi de Bretagne ,
pour lui demander du secours. Ce prince , ayant pris
connaissance de ce qui s'était passé , envoya aussitôt
Gurgunsius son fds avec une puissante armée pour se-
courir la ville de Belgis. Enfin les Gaulois , s'élant
joints aux Bretons , entrèrent dans Belgis , et se
préparèrent à opposer à Lrsus la plus vive résis-
tance. Mais la reine ordonna que les seules femmes
qu'Ursiis avait rendues veuves, en fesant périr leurs
maris, marcheraient les premières avec elle au combat.
Les Bretons, témoms du courage farouche des femmes,
sortirent de la ville dans les faubourgs , où ils attendi-
rent le jour du combat. De là vient qu'aujourd'hui en-
core l'endroit occupé par les Bretons porte le nom de
Gurgvnsigniacus , ou Gussignies, ainsi que l'appellent
maintenant les habitans , nom qui lui fut donné en
l'honneur de Gurgunsius, fils du roi de Bretagne. Ur-
sus , de son côté, fit publier dans toutes les villes situées
près du Rhin et de la Moselle , qu'on se rendit auprès
de lui pour marcher contre les Belges ; mais de toutes
parts on se révolta contre son autorité , à l'exception
de la ville de Mosellane qui lui resta fidèle. Il partit
néanmoins à la tète de deux cent mille combattans ; et,
lorsqu'il fut arrivé à trois mille pas de Belgis, il lit
dresser ses tentes. Mais soudain , au milieu de la pre-
mière nuit , tandis que ses troupes , dispersées et acca-
blées de fatigue et d'inanition, disposent leurs bagages
de manière à faire le siège avec pli'.s de sûreté , Ursa,
74 ANNALES
rcginne. ïaiidem , reintegratis mulieribus ciiin rc-
gina, circà diei crepusculum , ad civitatem quae sii-
perstes remaiiscrat , sunt reversa?. Ilemanscrunt mor-
tuœ in illo confllctu fcrc triginta millla ; mortcm vero
régis penitùs ignorabant. In crastinum Belgi , l)clluni
expcctantcs , extra civitatem cum Bi'itonibus se fcro-
citer coaptâriint viri ad bcUandum promptissimi dii-
centa millia ; et usqiiè ad lioram nonam advcrsarios
expectantcs, miscruiit cxploratorcs qui advcrsarioruin
contemplarentur dispositionem , qui referentes Ur-
sum regem à mulieribus fuisse occisum , et ïreberos
dispositos ad reccssum. liœc audieiis regina exclamans
intulit :« Dii dcœque pugiiant pro iiobis , occurramus
ois , nostri sunt. » Tune ipsa cum mulieribus suis
progredientcs veisiis adversarios fcrociter propera-
])ant. Haec perpcndens Gurgnnsius Brito, cxclamavit
voce magna : « Heu ! viri belgi , ut quid famam ves-
tram sic turpiter ncgligitis ? Ut quid honorem victo-
rire mulieribus applicari permittitis , cum sufficientes
simus advcrsarios dcbellare? Saltcm occurramus cis ,
et mulieribus assistamus , ut iguominiosam relatio-
nem posterorum evitare valeamus. » Tune très acies
statim ordinandas sic decrevcrunt, ut Fanimartcnses,
Fanisolemncnses, Fanimei'curiales, cum oppidis simul
juncti , per vias brevioi'cs advcrsarios anticipa-
rent, et ipsos à parte anteriori invaderent cum octo-
ginta millibus armatorum. Gurgnnsius cum suis Bri-
lonibus et Bclgcnsibus civitatis, cum triginta millibus
à dextrls dictos Trcberos invaderent ; Belgi vero Gal-
lici ciuii residuis à sinistris accédèrent. MandaviM'unl-
DE IIAINAUT. LIVRE II. ^5
sorlant de la ville avec son année de fcnnncs , aElaque
avec furie Ursus et ses Trévirois. Le roi , qui était re-
tenu au lit par la fièvre , est étouffé avec un grand
nombre des siens , sans avoir été reconnu. Les femmes
belges mettent le feu aux chars , brisent les tentes , et
exercent un horrible carnage , non sans perdre beau-
coup des leurs , et sans que la reine ait reçu une grave
blessure. Enfin elles se rallient , et rentrent au lever de
l'aurore , dans la ville que leurs exploits avaient frap-
pée d'admiration. Elles perdirent dans cette affaire
près de trente mille des leurs , et restèrent ignorantes
de la mort du roi. Dès le matin , les Belges et les Bre-
tons se préparent au combat , et se rangent fièrement
en bataille hors de la ville , au nombre de deux cent
mille hommes, tous très-exercés au maniement des ar-
mes. Ils attendent l'ennemi jusqu'à la neuvième heure,
et envoient des éclaireurs pour connaître sa position.
Ceux-ci rapportèrent que le roi Ui'sus avait été tué
par les femmes belges , et que les Trévirois se prépa-
raient à la retraite. En apprenant cette nouvelle , la
reine s'écria : « Les dieux et les déesses combattent
pour nous , marchons à l'ennemi, et il est vaincu. »
Alors elle sortit avec ses femmes , et s'avança en fré-
missant de rage à la rencontre des Trévirois. A cette
vue, le Breton Gurgunsius s'écria : « Eh quoi ! citoyens
de Belgis, ne rougissez -vous pas d'abandonner ainsi
Je soin de votre réputation? Souffrirez-vous que des
femmes aient l'honneur de la victoire , lorsque nous
sommes assez forts pour renverser nos ennemis? Au
moins, marchons contre eux , et assistons ces femmes,
pour éviter les reproches honteux que nos descendans
seraient en droit de faire à notre mémoire. » Aussitôt
on forme trois armées , la première , des habitans de
76 ANNALES
que iii Bclgis ul ([Liot(juot essent masculiiii sexûs ,
civitatem exirent, et cum mulieribus jungerentur, et
à parte posteriori aciversarios insultarent, Quod et
factum est. In crastinuni autem Trcberinos rccedoiites
invascrunt , qui ferociter dimicautes et alacritei'
defeiulcntes , cum gravi prostratione Belgorum tan-
dem dcvicti , fcrè omnes Trt-berini occubuernnt ,
paucis verè per latibula effugientibus. Occubuerunt
tune de Belgis et Brilonibus ferè quadraginta niillia
de mulieribus in duobus bellis, et octoginta millia de
omnibus Treberinis atque Mosellanis et Albanis cum
rege, paucus valdè evasit numerus.
OBSERVATION.
On verra dans les Mémoires pour servir à l'iiistoire ancitnue ilu
Globe (i), que Rivallo ou Rivallon régna sur les Bretons quarante-
six ans, depuis ran"764 avant notre ère jusqu'en 718; et que 5on
fds Guri;ustius ou Gurgunsius Tt'^nn trente-sept ans, depuis 718
jtis(ju'en ()8o. Ainsi colle histoire des ijelf^es est lit'c avec celle des
Rretous.
(i) 1, i83.
DE HAINAUT. LIVRE H. 77
Famars , la seconde, de ceux de Solcme , la troisième ,
de ceux de Mercuriale ; on fait entrer dans ces armées
les habitans des places fortes , et elles sont chargées
d'aller, par les chemins les plus courts, couper la re-
traite aux ennemis , et de les attaquer de front
avec quatre-vingt mille soldats. Gurgunsius avec ses
Bretons, unis aux habitans de Belgis, doit , à la tète de
trente mille combatlans, tomber sur la gauche des
Trévirois , pendant que les Gallo-Belges , avec le reste
des troupes, les prendront par la droite. En même
tems , on donne l'ordre de faire sortir de Belgis les
hommes qui s'y trouvaient , et de les envoyer renforcer
la troupe des femmes qui attaquerait l'ennemi par der-
rière : ce qui fut exécuté. Dès le matin du jour suivant,
les Trévirois furent assaillis dans leur retraite ; mais ils
combattirent avec courage , se défendirent opiniâtre-
ment , et firent essuyer de grandes pertes aux Belges.
Cependant ils furent à la fin défaits presqu'entièrement,
et le petit nombre qui échappa ne dut son salut qu'à la
fuite et à la profondeur des retraites où il se réfugia.
Du côté des Belges et des Bretons, la perte fut d'envi-
ron quarante mille femmes , qui succombèrent dans les
deux affaires ; et du côté des Trévirois , des Mosellans
et des Albaniens , qui avaient combattu avec le roi ,
elle s'éleva à quatre-vingt mille hommes; un petit
nombre échappa au massacre.
78 AXNAf.ES
CAPITULUM XXIIl.
Di: 1 rini:i oiij^ine silva' dicta- Mormal.
Locusautem ubi illa fuit exécuta tempostas, dictus
est Mors jMaloriim , et nunc vulgarités ab incolis pa-
triae Mormal (i) appcUatur; in quo postniocUini ar-
bores duarum specierum , spccialiter quercuum , ra-
tionc virorum defunctorum , et fagorum , rationo
mulicruni ibidem occisarum , ad perpetuam menio-
riani , fucrunt complantata? , quaj silva à diversis re-
gibus et principibus postmodùm extitit dilatata. Post
autem sarcinarum œqualem et justam divisionem ,
inuliercs n^gem Ursuni inler cadavera sollicitùs per-
quircntes , et ipsum reperientcs suffocatum sine pla-
gis , caput ejus abscissum cum ipsis detulerunt atquc
pellem. Tune cum gaudio et victoria ad civitatem
unanimitcr revcrtentes , diis deabusque , et specialiter
Veneri, sacrificia , in gratiarum actionibus rcddcnrcs ,
obtulerunt , victoriam tamen diis et mulieribus appli-
cando. Barones autem Britanniœ , audientes mulieres
civitalis belgensis làm ardua perpétrasse , exarserunt
in amorem carum , desiderantes prolem et successio-
(1) Cette fiir6t est à une deiui-licuc cl au midi de naval.
DE IIAINAUT. LIVRE II. 79
CHAPITRE XXIII,
Origine Je la foret de Mormal.
L'endroit où fut livrée celte sanglante bataille fut
appelé ( Moi's Malorum ) Mort des Méchans , et est
nommé aujourd'hui Mormal par les habitans de la con-
trée. On y planta , pour perpétuer le souvenir de cet
événement remarquable , des arbres de deux espèces ,
des chênes, en mémoire des hommes qui y avaient péri,
et des hêtres , en mémoire des femmes qui y avaient
été tuées. Cette forêt fut dans la suite agrandie par di-
vers rois et par divers princes. Après le partage égal
du butin , les femmes s'étant mises à chercher avec
soin le roi Lrsus parmi les cadavres , le trouvèrent tel
qu'il avait été étouffé , sans aucune blessure sur le
corps ; elles lui coupèrent la tête qu'elles emportèrent
avec elles ainsi que sa peau. Revenant alors à Belgis
avec la joie et la victoire , on rendit des actions de
grâces , et on offrit des sacrifices aux dieux et aux
déesses, et principalement à Vénus, en attribuant néan-
moins aux femmes , autant qu'aux dieux , l'honneur de
la victoire. Dès que les barons bretons apprirent que
les femmes de Belgis avalent obtenu un si grand succès
dans une entreprise aussi difficile, ils ressentirent pour
elles un brûlant amour, et désirèrent ardemment d'a-
voir de ces héroïnes des enfans et des héritiers. C'est
80 ANNALES
ncm ab eisticm suscipere. Undc ultra ikio millia vir-
ginum, qiiîc clictae interfuerant ormcstae, de beiic
placilo civitatisac rcginae ad Britaiiniam dostinandas,
et nobilitcr maritandas postmodùin mandaverunt ;
abhinc in niajori reverentià et honore quàm priùs, in
toto regno , mulieres habitœ sunt. Sacrificiis tandem
expletis , (juilibet ad propria romcandum disponens ,
rcginam in l'ogni reginiinc priiis approbatam à civi-
tatc rcccsserunt. Rcgina vero civitatis ruinas , leges
et antiquas consuetudines , proùt valuit , ixîparare in-
ciplcns, confirmabatur in regno. Anno siquidem se-
quenti, Rivallo, Britannorum rex, pro Gurgunsio
fdio suo Ursam reginam expostulavit in uxorem , qua^
sine regni sui speciaU consilio et assensu respondere
recusavit. Tandem , conscnsibus omnium concurren-
tibus , in belgensi civitatc Gurgunsius non sine pompa
Ursam reginam virginem in j)rincipalem uxorem ae-
cepit. Et factus est Gurgunsius, fiHus principaHs Ri-
vallonis , régis Britanniœ , Belgorum rex secundus ;
qui de uxore sua légitima septem liberos suscipicns ,
lex lîritanniœ postmodùm effectus est. Qui in ïrino-
nanto (i) mortuus , Sisillus , fîlius ejus, adlmc Ursâ
matre superstite, factus est Belgorum rex tertius.
(i) Londres. Suivant l'histoire des Bretons, Sisillus ou Si;illiiis
snrcf'da à son jx'ic l'an 680 avant notre îrc , et régna quarante-
neuf ans.
DE IIATNAUT. IIVr.EII. 8l
pourquoi plus de deux mille jeunes fdles , qui avaient
pris part a ces glorieux événemens , furent par eux
demandées en mariage , et accordées ensuite par la
ville et par la reine de Belgis. Elles partirent pour la
Bretagne , et furent reçues avec de grands honneurs.
De là vint que dans tout le royaume les femmes se
virent entourées de plus de respects et d'honneurs
qu'auparavant. Enfin , les sacrifices étant terminés ,
chacun se disposa à rentrer dans ses foyers ; et , avant
de partir , confirma la reine dans l'administration du
royaume , qui lui avait déjà été confiée par la cité. Ursa
s'appliqua de tout son pouvoir à réparer les ruines de
Belgis , à rétablir ses lois et ses coutumes anciennes ,
et à se faire aimer de tout le royaume. Un an après ,
Rivallon, roi des Bretons , la fit demander en mariage
pour Gurgunsius son fils ; mais elle ne voulut lui faire
réponse qu'après avoir pris l'avis et obtenu le consen-
tement de son royaume. Lorsque tous les citoyens
eurent approuvé cette alliance , Gurgunsius , fils aîné
de Rivallon , roi des Bretons , vint à Belgis , prit en
grande pompe la reine Ursa pour sa première femme ,
et devint alors le second roi des Belges. Après avoir eu
sept enfans de son épouse légitime , il parvint au trône
de Bretagne. Il mourut à Trinobante, et Sisillius son fils
devint , du vivant même d'Ursa sa mère , le troisième
roi des Belges.
II.
ii2 ANNALES
CAPITULUM XXIV.
De Ezcchi;1 , rcgc Jnda.
ACTOR.
His toinporibus in Jiulaeâ rcgnabat Ezechias, Aclias
rcge Juda defuncto. Regnavlt Ezechias filius ejus anno
quartoc œtatis cccxxxv, mundi vero iiimccxxiii (i),
et regnavit annis xxix. Comestor. ITic, convocalis sa-
ccrdotibus et levitis , aperuit tcmplum , primo anno ,
primo mense regni sui , et vasa Dei reparavit et res-
titiiit sacrifîcia intermissa , clissipavit excelsa , et con-
trivit statuas , et lucos succldit. Scripsit quoquc filiis ,
Israël ut redirent ad cultum Dei. Isaias, xxxviii" ca-
pitulo. Hujus meritis Dominus, in castris Assyriorum,
unâ nocte , centum octoginta quinque millia pugna-
torum per angelum interfecit, ejus quoque vitae
despcratœ , quia flevit peccata versiis ad parietem ,
Dominus xv annos addidit, et, in hujus rei signum,
solcm X gradibus retrocedere fecit. Hujus Ezcchinc
tcmpore , sub Osée rege , destructum est regnum
Saniarinc, in qua captivitate croditur Tobias captivi-
tatu^ fuisse. Prophctabanl autein tune Osée et Aza-
(i) 7'jo ans av. J.-C
DE IIAIXALT. LIVRE II. 83
CHAPITRE XXIV
D'Eze'chias , loi de Juda.
L AUTEUR.
En ce tems-là , Ezéchias régnait en Judée , après la
mort d'Achas , roi de Jnda. Ezéchias son fils commença
son règne , qui fut de vingt-neuf ans , l'an 335 du qua-
trième âge, et du monde 3223. Comestor. Ezéchias,
après avoir convoqué les prêtres et les lévites, ouvrit
le temple du Seigneur, le premier mois de la première
année de son règne. Il répara les vases sacrés , rétablit
les sacrifices qui avaient été interrompus , détruisit les
hauts lieus , brisa les statues , et fit couper les bois sa-
crés. Il écrivit aussi aux enfans d'Israël pour les enga-
ger à revenir au culte de Dieu. Isaïe , chapitre xxxvin.
Le Seigneur, touché de la vertu d'Ezéchias , envoya
dans le camp des Assiriens un ange qui , dans une seule
nuit, tua cent quatre-vingt-cinq mille de leurs combat-
tans ; et , lorsqu'on désespérait des jours de ce roi , le
Seigneur , parce que ce prince pleura amèrement ses
fautes , en se tournant dux^ôté de la muraille, lui promit
encore quinze années de vie , et lui confirma sa promesse
en fesant rétrograder le soleil de dix degrés. Du tems
d'Ezéchias, et sous le roi Osée, le royaume de Samarie
fut détruit ; les habitans furent emmenés en captivité ,
S.'i ANNALES
rias, et Joël, et Micheas. Ex Chwnicis. Roiniilus
liùc tcmpore milites ex populo sumpsit, et nobilissi-
1110S ceiitum seiies ob actatcm senatorcs, ob similitu-
(lincm ciii'œ patris, appcllavit. Actor. Mortuo Ezccliiâ,
Manasses , filius ejus , regnavit in Judω , anno
quarts .Ttatis ccclxiv, mundi vero iiimcclii (i), et
regnavit annis li. Hic pessimus idolâtra fuit in prin-
cipio, et plateas Jérusalem sanguine proplictarum
rubricavit. Helinandus. Tcmporibus Manasse , Ro-
manorum secundus regnavit Numa Pompilius , qui
nulhun confinitibus gessit bellum. Duos mcnscs anno
addidit , videlicet januarium et februarium , cùm
ante lioc deccm apud Romanos computarentur. Capi-
tolium à fundamentis œdificavit. De isto Numâ Au-
gustinus, lihm vu, de Cwitate Dci{o?)^ etVarro (3),
in libro de Cjdtu deoriim , nudta proloquitur, scd
brevitatis causa pertranseo.
(i) L'an 71 1 av. J.-C.
(2) Chap. 34 et 55.
(5) J. De Gii3'sc cite Varron vraiscinblablcincnf sans l'avoir
conrm, et d'apri^s la seule autorité de saint Augustin , qui parle du
livre du cullc des dieux, dans sa Cite' de Dieu, 1. vu, cliap. ().
DE ITAINAUT. LIVRE II. 85
et Tobie , comme on le croit o;énéralemcm , fut au
nombre de ces captifs. Alors florissaient les prophètes
Osée , Azarias , Joël et Michée. Extrait des chroniques.
Dans le même tems , Romulus prit des soldats parmi le
peuple , et choisit les plus illustres des vieillards , au
nombre de cent , pour former son sénat , ainsi nommé
à cause du rapport de ses fonctions aux devoirs d'un
père. L'auteur. Après la mort d'Ezéchias, Manassès son
fils lui succéda l'an 364 du quatrième âge, et du monde
3252 ; son règne fut de cinquante et un ans. Ce prince
fut , dans les commenceraens , un détestable idolâtre ,
et inonda les places de Jérusalem du sang des prophè-
tes. Helinand. Du tems de Manassès , vivait Numa Pom-
pilius , second roi des Romains, il ne fît aucune guerre
ù ses voisins; il ajouta à l'année deux mois, ceux de
janvier .et de février, car auparavant les Romains n'en
comptaient que dix , et jeta les fondemcns du Capitolc
qu'il fit bâtir. Saint Augustin , au livre vu de la Cité de
Dieu, et Varron , dans son livre du Culte des Dieux ,
parlent beaucoup de Numa; mais, pour être plus
court , je passerai tous ces détails.
86 ANAALES
CAPITULUM XXV.
De morte Isaiie prophcfnc.
COMESTOR.
iNTEii scolcra quœ Manasse , rex Jiula, gcssit ,
Isaiam sanctum prophotam avum siuim inalornuin ,
vcl , secunclùin Hebraeos , affîncm propinquum , ejec-
tiim extra HIerusalem contra piscinain Siloë , serra
lignea per iiicdiuin sccari fccit. Qui , diini in priiuipio
sectionis angiistiaretur, pctiit sibi dari a([uain inodi-
cam biberet; et, ciim nollent ei dare, Dominiis do
sublimi niisit aqiiani in os ejus, et expiravit; nec ta-
inen carnlfices dostiteriint à scctione. Ob banc aquœ
missioncni , confirmatum est nonien Siloë , quod in-
terpretatur /«mi^v.Nec scpelleriint eum in sepulcro
propbetarum, sed sub quercu Rogel jiixtà transituin
aqiiariun (jucni fccerat Ezecbias in niemoriam niira-
culi quod fccerat Doniinus in illis, ad prcces IsaicP.
Imniisit igitur Dominus contra Manassem rcgcm Ba-
l)ylonis , ({ui depopulatus est Judœam , et Manassem
dolo captuin traxit in Babylonem , et pluribus aiïlixit
tornicntis ; et inteUigens banc esse nianum Domini ,
egit pœnitcntiani. Et attenté oravit adDominuni; et
DE HALNALT. tlVRl-. IT. S;
CHAPITPxE 'XXV
]Mort (lu propliùte Isaïe.
PIERRE COMESrOR.
Parmi les crimes dont se rendit coupable Manassès ,
roi de Juda , le plus horrible est d'avoir fait scier par
le milieu du corps , avec une scie de bois , le saint pro-
phète Isaïe , son aïeul maternel , ou , suivant les Hé-
breux , son beau-père , après l'avoir fait jeter hors de
Jérusalem , vers la piscine de Siloë. Ce saint prophète
demanda , au commencement de son supplice , un peu
d'eau à boire ; et , comme on la lui refusait , le Sei^ieur
lui envoya d'en haut de l'eau dans la bouche , et il ex-
pira , sans que ses bourreaux cessassent de scier son
corps. C'est à cause de cette eau , qui avait été envoyée
par le Seigneur, que le nom de Si/oc, qui signifie e?i-
voyé , fut confirmé à la fontaine qui l'a conservé depuis.
Isaïe ne fut point enseveli dans le sépulcre des prophè-
tes ; mais il fut déposé sous le chêne de Piogel , près du
canal qu'Ezéchias avait fait ouvrir en mémoire du mi-
racle opéré en ces lieus par le Seigneur , à la prière
d'Isaïe. Pour punir ces crimes , le Seigneur envoya
contre Manassès le roi des Babiloniens , qui ravagea la
Judée , et emmena captif à Rabilone ce même Alanassès
dont il s'était emparé par ruse , et qu'il accabla de
88 ANNALES
miscrtus Domiiiiis rotliixit cum iii rcgiuun siiuiii.
Oui , cîim venisset ïlierosolymis , destriixit iilola ,
liicos et aras, qiiœ fcccrat , ità ut iii mcmoriam prio-
ruiii iiiliil supci'cssct, et rostituit cultuni Doinini.
CAPITULUM XXVI.
De fiimlationc civitatis Remoi'iim.
ACTOR.
SiCiiT superiîis tractuiii est, in quacstiono libri
primi , Hugo Tullensis qui , clesd'ibciulo JjOlharïngo-
ruin originein , Iklgorum tmctans chronographa, à
Romulo, rcge primo Romanorum, sui processus iii-
cepit liistoriam , et non antè ; vcrùm, quia de niultis
civitatibus, regnis, villis et oppidis tractât et décla-
rât, ab ejus tanicn dictis soUun eb'ccre illa proposui,
quœ materiœ mei conccptûs congruunt et applaudunt ,
proîit consequenter apparebit in allegationibus. Post
occisioncm Kemi, fratris Romuli , niulti ab urbc ro-
niana , ut majora evitarcnl pcricula , et spccialitcr de
^ I)E IIAINAUT. 1,1 VUE It. 89
mauvais trailcmens. Ce malheureux prince , reconnais-
sant la main de Dieu dans ce qui lui était arrivé , fit
pénitence , et adressa au Seigneur des prières ardentes.
Dieu , touche de son repentir, le rétablit dans son
royaume ; et Manassès , de retour à Jérusalem , détrui-
sit les idoles , les bois sacrés et les autels qu'il avait éta-
bhs , de manière qu'il n'en subsista aucun vestige , et
fit revivre le culte du Seigneur.
CHAPITRE XXVI
Foml tii>n ilc la ville <lc Reims.
L AUTEUn.
On a vu ci-dessus, dans la question du premier livre,
que Hugues de Toul , en racontant l'origine des Lor-
rains , traite de la chronologie des Belges , et com-
mence son histoire à Uomulas , premier roi des
Romains , sans remonler plus haut ; mais , comme il
parle de plusieurs cités, royaunîcs, villes et forteresses,
et qu'il les nomme, j'ai résolu de ne m'attacher aux
détails qu'il nous donne , qu'autant qu'ils auraient rap-
port à mon sujet, et qu'ils le favoriseraient , ainsi qu'on
pourra le voir dans mes citations. Apres la mort de
Rémus , frère de Romulus , un grand nombre de ( i-
toyens se retirèrent de la ville de Rome, pour échapper
aux dangers dont ils étaient menacés , principalement
go ANNALES
parte suà , quàin clliùs iccesscruiit , et catervatiiii per
Italiam traiisomitcs , Alpes Cinericios potierunt, ab-
liinc Galliaiu sublntrantes, regiuini Belgorum , in
iocuin ubi mine Remoruni eivitas funtlata est, qiiie-
vcriint ; ibique civitatcm œdificantes , nomcn régis
corum, videlicet Rémi, imponentes, mûris et portis
eam firmaverunt. Cùm autem , ex assensu régis Bcl-
goriun, dicti Romani dictam Remorum inciperent
fundare eivitateni, supcrvenerunt Senonenses Galli ,
qui dietam civitatem sibi ipsis applicare conati sunt.
Quibiis eîim viriliter résistèrent, rumores hujusce-
modi ad Ursam, Relgorum reginam , devoluti sunt.
Quœ, in régis absentia , qui in Trinobanto rex Bri-
tanniœ coronabatur, populuni à toto regno congrega-
vit , quœ, proeedens usque ad Ausonae ripariam , et
transire citiîis non valens , seeùs littus oppitlinn à no-
mine vulgari reginœ denominatum , unà cum ligneo
ponte, invitis Senonensibus, extruxit; et, proùt dicit
dielus Hugo, U rsa , in vulgari illius temporis diccba-
lur Beere , undè dietum oppidum adhuc à nominc;
reginœ dicitur Berj (i). Ipsa denique cum Belgcn-
sibus ripariam pertransiens , ante novam civitatem
Remorum , contra Senonenses dimicans, canq)um ob-
tinuit, in quo postmodinn oppidum extractum est ,
quod Bcerni (2) à nomine dietœ reginœ adliue appel-
latur. Effugatis tandem Senonensibus à civitale
Remorum, tan([uàm regina Ursa nobiliter suscepta
(1) ncry-au-Bac , entre Craonc cl NeuichUt'l , ilaii-^ lettcpait--
nicnt <li: rAisue.
(2) Villafjo à i lieues nnril-est ilc Reims, de'paricmcnl tic la
Marne.
DE IIAINALT. LIVRE II. Ql
tic la part ilc Romulus. Ils traversèrent en troupe l'iia-
lie , gagnèrent les Alpes Cinériciennes , de là passèrent
dans la Gaule , et s'arrêtèrent dans le royaume des
Belges . à l'endroit où est aujourd'hui bâtie la ville de
Reims. Ils y fondèrent une ville , a laquelle ils donnè-
rent le nom de leur roi Rémus , et qu'ils garnirent de
murailles et de portes. Pendant que ces Romains com-
mençaient , du consentement du roi des Belges , à bâtir
leur ville , les Gaulois Sénonais arrivèrent , et s'effor-
cèrent de s'en rendre maîtres , tandis que les Romains
la défendaient avec courage : le bruit de cette invasion
parvint aux oreilles d'Ursa , reine des Belges, Elle fit
aussitôt rassembler tous les soldats de son royaume ,
pendant l'absence du roi , qui était alors occupé à se
faire couronner roi de Bretagne à Trinobante ; elle
s'avança ensuite jusqu'à la rivière de l'Aisne , et
n'ayant pu passer outre , elle bâtit sur la rive , malgré
l'opposition des Sénonais , un château fort qui prit le
nom vulgaire de la reine , et en même tems elle con-
struisit un pont de bois (Hugues de Toul rapporte
qu'Ursa était appelée Beere dans le langage vulgaire
du tems ; et c'est pourquoi ce château , ou cette forte-
resse , porte encore le nom de Bery, tiré de celui de la
reine. ) Ursa passa alors la rivière avec ses Belges ; et ,
après avoir combattu les Sénonais devant la nouvelle
ville des Rémois , elle resta maîtresse de la campagne ,
au milieu de laquelle fut bâtie dans la suite une forte-
resse que l'on appela Berru, et qui doit encore son nom
à celui de la reine. Enfin les Sénonais ayant été chassés
de la ville de Reims , Ursa y fut reçue en reine et avec
de grands honneurs ; les habitans renouvelèrent les an-
ciens traités , et jurèrent de rester à jamais fidèles au
culte et aux lois des Belges. Le roi des Belges, qui se
92 ANNALES
est , et pactiones rénovantes , ritum Bclgoriun et loges
se porpetuo obscrvaturos jiuamentis finnavcrunt.
Hex auteni Belgorinn , iu Britanniâ atlliuc cxistens,
et quœ regina exercucrat aiidicns , cum Belgorum ,
Albanorum el Britannoriim gravi multituilinc trans-
frctans, ad rcglnam matrem cjiis in Remoriim confi-
nibus accessit. Qui simul civitatem subintrantes , et
in câdem per bienniuin coniniorantcs , templis , pala-
tiis et aedificiis ipsam décorantes; ripariam secîis pa-
ludes regijia effodi jussit , quàm Ursam primitiis
vocitantes, dcindè , quia regina tune vetula et anti-
quacrat, postmodùm incolœ Yctulam nuncupârunt.
Inter caîtera construi feccrunt fana duo , Martis vide-
licet atque Bacchi. Intereà iniserunt Friscembaldum
reginœ secundo gcnitum , qui et régis fratcr erat , ad
terras rebellantes , videlicet Senoniorum , Allobrogo-
rum, Secanist^.rum atque Celticorum, cum supradictis
acicbus, ut dictas nationes ad pristinam obedicntiam
et Belgoruni subjectioncni rcducerent. Qui , infrà
annorum duoruin spatio, dictas edomuerunt nationes,
et ad pristinuni cultum et ritum antiquum et ad re-
verentiam deorum Belgis unanimiter reduxerunt.
Frisccmbaldus, in honorem et perpetuam faniani
victoriœ, civitatem grandem illùc fundavit, quam
nomine matris suœ Urscie, id est Beerc (i), Beerri ,
censuit appellandum. Cùm autem dictus Frisccmbal-
dus cum suis victor rcvertcretur, ejus mater à Ke-
(i) Je ne sais de cjuellc ville il est ici (|uc5lion. L'auteur vnu-
clrail-il parler de la ville et du peuple des iîiliuiges, autrefois le
plus puissant des Gaules, que nous appelons aujourd'hui Bourges et
k Reni?
DE IIAI?nAUT. LIVTIE II. 93
trouvait encore en Bretagne, ayant appris ce que la reine
avait exécuté , passa le détroit avec une armée nom-
breuse composée de Belges , d'iUbaniens et de Bretons,
et se rendit auprès de sa mère sur les terres des Rémois.
11 entra ensuite dans la ville , et y séjourna avec ses
troupes deux ans , pendant lesquels il l'embellit de tem-
ples , de palais et d'autres édifices somptueux. La reine
fit creuser près des marais une rivière qui porta le nom
d'Ursa , mais que les habitans appelèrent dans la suite
la Vesle , parce que la reine était alors devenue vieille.
Parmi les temples qui furent bâtis dans le même tems ,
on remarque ceux de Mars et de Bacchus. Friscembal-
dus , le second fils de la reine et le frère du roi actuel ,
fut alors envoyé dans les pays des rebelles, c'est-à-dire,
des Allobroges , des Séquaniens et des Celtes , avec
l'armée que le roi des Belges avait amenée de la
Bretagne , afin de ramener ces peuples révoltés à
l'ancienne obéissance et à la soumission des Belges. Ces
peuples , dans l'espace de deux années , furent soumis
et réduits entièrement au premier culte et aux rits an-
tiques , et furent contraints d'adorer les dieux de Bel-
gis. Friscembaldus , en l'honneur de sa victoire et pour
en perpétuer le souvenir, fonda une grande ville qu'il
appela Beerri , du nom de Becre que portait Ursa , sa
mère. Comme il revenait triomphant avec ses trou-
pes , sa mère sortit de Reims pour aller à sa rencon-
tre ; mais, ayant voulu passer la rivière à dix mille pas
de la ville, elle se noya, et cette rivière prit dans la
suite le nom de la mère du roi , et s'appela la Marne ,
nom qu'elle porte encore aujourd'hui. Nous lisons au
contraire , dans Lucius , que la reine fut tuée par les
Sénonais, et que Sisillius mourut sans postérité ; c'est
pourquoi Friscembaldus , frère de ce dernier et duc
94 ANNAtEè
morum civitate, eis obviàm progrcdiens, et Irans
ripariam ad deccm millia passuum ultra Remorum
civitatem transmoaro volons , in câdcm submcrsa est.
Qiia3 ri paria à régis matrc postmodiini iisquè ad mo-
derna tempora, dicta est Materna (i). Lucius dicit
liane à Senoncnsibus interfectam fuisse , et Sisilliuiu
sine libcris obiisse. Undè et ejus fratcr, dux Remo-
rum , Friscem])aldus , factus est Relgorum rex quar-
tus. Temporibus liujus , Britanni contra Belgos rebel-
laverunt, olympiade xviii (2) tune currente. Huic
Friscembaldo successit filius ejus , Frisceml)aldus
sccundus , temporibus Numœ Pompilii , régis Roma-
norum , circà olympiadem xxvi. Hic gcssit plura bella
contra Jagonem et deindè contra Rimarcum , regem
Britanniœ. Ilic œdificavit oppidum et portam Belgo-
rum super vicum JMercurii , contra Albanos et Brito-
nes , qui civitatem Fani Mercurii et mcrcatorcs ad
ipsam déclinantes deprœdabantur. Quod quidem op-
pidum, saltèni territorium, usquè ad ista tempora,
Porta, scu Portus-Belgorum , vulgariter Poiicherge ,
ab incolis appellatur. Actov. Non imaginor illùc
nunc fore oppidum , sed silvam magnam et pericu-
losam.
(1) Pour Matrona.
(2) La prcmitrc anncc de la 18' olimpiade repond à Tan 707 ,
suivant Eusi'he.
DE IIAIXAUT. r.TVr.E 11. Ç)D
des Rémois, devint le quatrième roi des Belges (l). Eu
ce tems-là , c'est-à-dire dans le cours de la xvin* olim-
piadc , les Bretons se révoltèrent contre les Belges ; et
vers l'olimpiadc xxvi , du tems de Numa Pompilius ,
roi des Piomains , Friscembaldus II succéda à Friscem-
baldus , son père. Ce prince fit plusieurs guerres à
lago , et ensuite à Kimarcus, roi de Bretagne. Il bâtit
une forteresse , et une porte sur la chaussée de Mer-
cure , pour protéger les Belges contre les Albaniens et
les Bretons , qui pillaient la ville de IMercuriale, ainsi
que les marchands qui y descendaient : et cette forte-
resse , ou du moins le territoire sur lequel elle était
bàlie , fut appelé la porte ou le port des Belges , et
dans la langue du pays , PorUhcrgc , nom qu'elle con-
serve encore aujourd'hui. L'auteur. Je pense que cette
dénomination se rapporte maintenant , non à une for-
teresse , mais à une forêt vaste et dangereuse.
l'i) Suivant l'histoire des Bretons ( Mémoires pour servir à l'his-
toire ancienne du globe. I , i83), Sisillius mourut l'an 63i avant
notre ère, après avoir régne' quarante-neuf ans. Après lui Jacques
ou lago régna vingt-huit ans. Friscembaldus II aj ant fait la ijuerre
à lago, roi des Bretons, ainsi que le dit Jacques de Gujsc ; il
paraît qu'après la mort de Sisillius , le royaume des Belges fut
séparé de celui des Bretons. Kimarcus ou Kinmarc succéda à
lago l'an 6o3.
96 amsales
CAPITULUM XXVII.
De fiindatione civitatnni Tiilli atijur Tornaci.
HUGO TULLENSIS.
His temporibus , Bclgorum rex , à Rcmicis iiicita-
lus , mortem Rcmi , quoiKl?im rcgis eorum , vlnd Icare
satagentibus , dccrcvit Romanos invaclcre , aiixilio
fiiltiis ïrcberoruni atquc Scnonioriiiîi ; Nmna Poni-
pilio , secundo rege Romanorum , jàm mortuo , et
Tullo Ilostilionc in regem assunipto. Qui , cùm liujus
modi rumorcs pcrpcndcret, consilio scnalorum utcns,
itcr salvum et inducias triennii régi Bclgorum per
legatos cxpostulavit , et quodinceperat rex minime ad
complementum deduccret , usquè post causa? diges-
tionem ampliorem. Cujus expostulationis rationabi-
1cm dilucidationcm Bclgorum rex, consilio proccrum,
annuit quod petebant. Ad hœc Tullus Hostilio , cum
Romanorum provida gentc , ad Galliam declinans ,
primo cum Trebcrinis discidii causas disculiendas
disposuit. Inhibucrunt tamcn ut civitatcm non ap-
proximaret multitudo , scd eligerot , ad certam di-
slantiam , locum in (|uo suam coUocaret acicni , post-
DE HAINAUT. LIVP.E II. 97
CHAPITRE XXVII.
Fondation Jes villes de Toiil et de Tournai.
Hugues de Toul.
Vers la même époque , le roi des Belges , excité par
les Rémois, qui voulaient absolument venger la mort de
Rémus leur ancien roi , résolut d'attaquer les Romains
avec le secours des Trévirois et des Sénonais. Numa
Pompilius , second roi des Romains , était mort , et
Tullus Hostilius avait été élu à sa place. Celui-ci, ayant
été instruit du dessein formé contre les Romains, prit
conseil de son sénat , et fît demander , par des dépu-
tés, au roi des Belges un sauf- conduit et une trêve
de trois ans. Il le priait en même tems d'attendre de
plus amples explications pour mettre à exécution ses
projets. Cette demande parut juste au roi des Belges,
qui l'accorda après avoir pris l'avis des grands de
son royaume. Alors Tullus Hostilius se rendit dans la
Gaule avec un grand nombre d'hommes sages de sa
nation , et voulut d'abord discuter avec les Trévirois
les motifs allégués pour lui faire la guerre. Ceux-ci lui
défendirent d'approcher de leur ville avec sa troupe ,
mais ils l'engagèrent à choisir , à une certaine distance,
un endroit pour y placer son armée, après quoi il pour-
Ji. n
9 s ANNALES
mocliiin cum paucis ahhinc progrederelur ad agibilia
pertractaiida. Qui elegerunt sibi convallem cujusdani
niontis socùs fluviinn Mosellae, qui Loucus dicebatur,
in quo civitatem fundavorunt, quam à proprio no-
inine régis corum TuUum vocari dccrevcrunt. Tan-
dem , cum Treberinis nihil concludere valentes , nisi
priùs régis ac civitatis Bclgorum praesuppositis decre-
tis , abhinc descendcntcs et Belgim approximantes ,
cum bcentià lîelgorum, locum ubi acies suas quieta-
rent impetrârunt ; secùs ripariam Scaldi inamœnissimo
loco quicscentes , civitatem illùc fundaverunt , quam
à coi^nomine dicti régis eorum Hostilionem appellari
deliboraverunt , quflc postmodùm Nervia , dcindè Tor-
nacus appellata est. Ab hac siquidem civitate cum
Belgis causas discidii diutiùs pertractans , Romanos
ad ambas civitates competenter inbabitandas dorc-
linquens , cum pace tandem ad propria remeavit.
Actor. Lucius aliam causam adventiis Tulli Hostilio-
nis ad Galbas praetendit. « Tullus, inquit , HostiHo,
Romanorum rex , cum senaloril)us , audientes Belgos
vcUe contra eos inirebcUa, proposuerunt cos indu-
cere priùs ad ignominiosœ mortis prœdecessorum
suorum vindictam expectandam , quàm ad pauperum
vicinorum suorum scintillas extinguendas ; undc
Tullus [Tostilio ad Gallias dcscendcns , Belgos indu-
ccre voluil ut ipsi cum Romanis Grajcos invadcrent,
qui parentes corum in Trojae destructione pereme-
rant. » « Nobilius , inquit , est priùs adversarios
debellare, quàm, ipsorum prosperitatc conservalà ,
aliénas non inimicanf^s invadere terras. » Ilic Tullus,
DE HATXAUT. Ï.IVIÎE TT. Ç)^
rait s'avancer avec peu de personnes pour traiter des
objets en question. Les Romains s'établirent au pie
d'une montagne , sur les bords de la Moselle , dans un
vallon qui s'appelait Leucus , où ils fondèrent une ville
à laquelle ils donnèrent le nom de Tonl , que portait
leur roi. Mais , ne pouvant rien conclure avec les
Trévirois, sans connaître auparavant la décision du
roi et de la cité des Belges , ils se mirent en marche;
et , s'étant avancés près de Belgis , ils obtinrent encore
des Belges un endroit pour reposer leur armée. Ils s'ar-
rêtèrent sur les bords de l'Escaut , dans un lieu déli-
cieux, et y bâtirent une ville qu'ils appelèrent Hostilio,
du surnom de leur roi , mais qui fut nommée Nervia ,
et enfin Tournai. De cette ville , Tullus négocia long-
tems av€c les Belges , il en obtint la paix , et repartit
pour son royaume, après avoir laissé un nombre suf-
fisant de Romains pour peupler les deux villes qu'ils
avaient bâties. Vj" auteur. Lucius allègue une autre cause
de l'arrivée de Tullus Hostilius dans les Gaules. « Tullus
Hostilius , dit-il , roi des Romains , ayant appris avec
son sénat que les Belges voulaient lui faire la guerre
crut pouvoir les engager à tirer vengeance de la mort
ignominieuse de leurs ancêtres , avant de s'occuper des
griefs dont se plaignaient leurs misérables voisins. Il
passa donc dans les Gaules , et pressa les Belges de se
joindre avec les Romains pour faire la guerre aux Grecs
qui avaient fait périr leurs ancêtres sous les ruines de
Troie. Il est plus noble , dit-il , de combattre ses en-
nemis , que de les laisser dans la prospérité, pour en-
vahir des nations paisibles. » Le même Tullus, avec le
consentement des Gaulois , jeta en divers endroits de
leur pays les fondemens de plusieurs villes , dont les
principales furent Hostilio et Toul.
tOO ANNALES
Galloruin asscnsu , in teniiinis eorum diversis inccpit
fuiidarc urbes , iiiter quas Hostilis et Tullus cxtitc-
runt.
CAPITULUM XXVIII.
Opiniones fundationis civitatis Tornacensis.
ACTOR.
Hicpatct magna discordia internugoncin,LuciLim
et hlstoriam Tornaccnscm ; nam hisloria Tornacen-
sis, quœ communiter habetur, videtur dicere quod
Tarquinius Priscus , rcx Romanoriim , Tornacuni
fundaverit , ad fincm ut cœterarum civitatum Romanis
subditarum tiibuta susciperet , et multa consimilia ,
proiit inferiiis declarabitur. Cum rcverentiâ historio-
grapbi , dictum suiim non consonat huic nec veris
histoi'iis Romanorum (i ) ; ciini nullum penitùs domi-
nium haberent Romani, tcmporc icgum eorum, ultra
quindecim milliaria extra urbem , proîit expresse
ponit Titus Livius et alii plurcs historiaruni Roma-
norum conscriptores ; et uL eorum propriis utar vcr-
(i) Il est fàclieiix <iiie Jacques de Gtiysi; u\iit pas perséve'ie ilans
le cliciuiu du la ciiliquo qu'il a embiassi; un racmjut.
DE IIAINAIT. LIVRE II. lOl
CHAPITRE XX VIII .
Opinions diverses sur la fondation de Tournai.
L AUTEUR.
Ici Hugues , Lucius et l'histoire de Tournai , ne sont
nullement d'accord : en effet, l'histoire de Tournai, que
l'on suit communément , semble dire que Tarquin l'an-
cien , roi de Rome , bâtit la ville de Tournai , pour y
recueillir les tributs et en général toute espèce de rede-
vances de toutes les cités soumises aux Romains ; c'est ce
que nous rapporterons plus tard. Mais, sans manquer au
respect dû à l'historien , je remarquerai que ce récit ne
s'accorde ni avec notre histoire , ni avec les histoires
des Romains les plus estimées , puisqu'il est constant
que ceux-ci , du tems de leurs rois, n'étendaient pas
leur domination au-delà de quinze milles de la ville ,
ainsi qu'on le voit positivement établi par Tite Live
et plusieurs autres historiens de Rome. Je vais me ser-
vir de leurs propres paroles. « Après la mort de Tar-
quin-le-Superbe , disent-ils, la royauté, après avoir
duré deux cent quarante ans, fut abolie dans la ville.
Alors la république fut établie et gouvernée par deux
102 ANNALES
bis. « Post , inqiiiuiit , Tai'cjuinium Siiperbuin , ccssa-
veiimt reges regiiarc iii iirl)e , qui per annos clucentos
et ([iiadragiiita rcgnavcrunt. Doindè ordinavorunt
rcmpublicam rcgcndam per consulcs J^ucium videlicet
et Brutum ; et tanc Roma vix adhuc usquè ad quin-
tam dccimam lapidem impcrium tcnebat. » Sequitur.
ft Milliaria enim tune lapidibus distinguebantur sicut
et modo aHcubi agrorum termini per lapides distin-
guuntur. » Hœc ibi. Et praetereà, secundùiii verita-
tem , tributa et exaction es fuerunt primitùs à rege
Servio stal)iHtîie et adinvontœ ; qui successit Tarqui-
nio Prisco , proùt inferiùs declarabitur. Et praetereà
si Tarquinius Priscus eani fundaverit, proùt dicitTor-
nacensis historia, et Seryius rex , qui sine medio Tar-
quinio successit in regno , qui eam destruxit , quo-
modo potuit in tàm brevi spatio hujus modi civitas
sic nudtiplicari , sicut habetur in dicta liislorià ? Vi-
detur igitur quod opinioni Ilugonis potiiis sit assen-
liendum ; et, ut clariùs liabeatur opinio bistoriaruni
Tornaccnsium , quae dictce opinioni vidctur subalter-
nari, quae reperi , liîc ascribere cuiavi.
DE HALNAUT. LIVRE If. !(>.>
consuls , Lucius et lîrutus; et vers ce leins Uonie n'ë-
teiulait pas sa domination plus loin que la quinzième
pierre. » Et plus bas : « On marquait alors les milles
avec des pierres, de même que l'on distingue aujour-
d'hui en plusieurs pays, par des pierres, les limites
des champs. » Voilà ce que nous lisons dans les histo-
riens de Home (1). On lit déplus que les tributs et les
autres exactions furent véritablement créés et établis
pour la première fois par le roi Servius, qui succéda
à Tarquin l'ancien, comme nous le dirons plus bas.
Ajoutons que si Tarquin l'ancien bàtil Tournai , comme
le rapporte l'histoire de cette ville , et si le roi Servius ,
qui succéda immédiatement à Tarquin, la détruisit,
comment serait-il possible que dans un si court espace
de tems la cité fut parvenue à ce point de grandeur
décrit par la même histoire ? Il me semble donc
que nous devons suivre de préférence l'opinion de
Hugues; et afin de mettre le lecteur à même de juger
avec plus de certitude de l'histoire de Tournai , qui
paraît contraire au récit de cet écrivain , j'ai eu soin
de rapporter ici tout ce que , dans l'histoire de Tour-
nai, j'ai trouvé de relatif à cette matière.
(i) Sans doute dans ÎNIartin de Fologue. jN'otre auteur auiait
p'i mieux choisir ses autorites. Il paraît au contraire certain par
le témoignage de Tite-Live, Jules-Cesar et Strabon ( Voyez l'ar-
ticle Sigovèse dans la Biographie universelle. ) qu'Amhigal régnait
alors sur les Bituriges , et que Tan 5tiS avant notre ère, sous le
règne de Tarquin l'ancien, il envoya Bellovèse et Sigovèse, fils
lie sa sœur , faire des conquêtes , le premier dans l'Italie septen-
trionale, et l'autre dans la forêt Hercinie , conse'quemment dans
la Belgique. Cet eve'nement se rapj)ortc au règne de Kinmarc sur
les Bretons, et h celui de Friscembaldus II, sur les Belges. Peut-
être les Bituriges s'e'taient rendue iiuli'poudins après la m<>i t d'Ursa,
qui se'para les Belges des Bretons.
104 A.\i\ALES
CAPITULUM XXIX.
De fundafione civitatis Tornaccnsis.
Ex Historid Toinacensi.
Qu^ incipit: Tornacum itaquc Galliœ Belgicœcivi-
tatem antiquissimam esse , etc. Anno igitur cxliii (i)
à constitutione urbis Romœ , et per successioncs
principatuum eu administratâ , quatuor regibus ,
Remo unà cum Romulo, fuudatoribus suis, Numâ
Pompilio, ïullo Hostilioue , Aiico Marcio , ac dcindè
régnante Tarquinio Prisco, dccimo quoque anno (2)
regni ejus, Tornacus civitas regia à Romanis aedifi-
cata est , altéra vero minor Roina vocata est , quâ
teinpestate , Nabuchodonosor, rex Chaldœorum , Hie-
rusalem sanctam dextruxit. Hujus minoris Romae ur-
bis mûri validi , portœ fortiores , palatia civitatis
pr.Tcelsa , turresquc suprà portas constitutœ firmiores
fuerunt; dignitate et omnium civium, amœnitatc
locorum , alias prœccllebat civitatcs. Tarquinio igitur
(i) L'an 610 av. J.-C, d'après Eusèbc.
(3) En l'an 608 , suivant Eusèbe. Cette date ne s'accorde pas avec
la prcce'dcnU; , parce qu'elle aura ctc puisée dans un historien <|ui
place la fondation de llonic sous Tua 75i.
Di: HAINAUT. LIVRE II. 103
CHAPITPlE XXIX.
Fondation de la ville de Tournai.
Extrait de T Histoire de Tournai.
Cette histoire dit en commençant que Tournai est
la plus ancienne ville de la Gaule Belgique, etc.
L'an 143 de la fondation de Rome et sous Tarquin
l'Ancien , cinquième roi des Romains ( ses prédéces-
seurs avaient été Rémus et Romulus, qui régnèrent en-
semble , et qui sont les fondateurs de la ville , puis
Numa Pompilius , TuUus Hostilius et Ancus Marcius ) ,
la dixième année de son règne , la ville royale de Tour-
nai fut fondée par les Romains , et fut appelée la pe-
tite Rome , dans les tems que Nabucliodonosor , roi
des Caldéens , détruisait Jérusalem la sainte. Des
murailles épaisses , des portes solides , des palais élevés
et des tours érigées sur les portes , embellirent et for-
tifièrent cette R.ome nouvelle , qui l'emportait sur les
autres villes par la noblesse de tous ses citoyens , et
parla beauté de sa position. Après la mort de Tarquin
l'Ancien , fondateur de la petite Rome , le roi Servius
gouverna la république. Ce fut sous son règne que les
villes et les forteresses voisines, que les Romains avaient
réduites sous leur domination , payèrent à Rome des
loG ANNALES
Prisco, huJLis luiiioi-ls KonicB fundatoro , inlorcniplo,
Servius rex suscepit impcriuni ; quo régnante, tri-
hiita vicinorum oppidoruni aut civitalum, quos Ro-
mani sua? subilltlerant poLestati , lloniœ li-ansmissa
siint. Qui , ciini videret niinoreni Romani vicinis
civitatibus praecelsiorem , super cxxv civitates vel
oppida sublimavil; decerncns ut tributa earum colli-
geret et majori Komœ sua cuni illis transmittoret,
quod diebus nudtis factum est. Sed senatores hujus
minoris Romae invalescentes , postmodùm tributa
Iransferiidistulerunt; qua de causa Servius impeiator
et Romani indignati , ad ejus superbiam comprimen-
dam , exercitum dirigunt copiosum , contra qucm ci-
ves minoris Romœ vi ri H ter decertaverunt; sed hostes
tandem prœvalentes muros destruxerunt, cosque ma-
gna cœdc dilaceraverunt , totamque civitatem penc
inbabitabilem reddiderunt. Tandemque pace resli-
tuta inter utrosque cives , decreverunt Romani ne
ulteriiis minor Roma vocaretur, sed Hostibs, propter
nimiam resistendi fortitudinem ; et ex illâ die tributa
iibus civitatis Romœ transmissa sunt sicut priiis. Non
longo post tempore , Servius rex interfectus occubuit.
Actor. Patet multiplex opinio fundationis civitatis
Tornacensis, sed cui sit assentiendum lectoribus de-
relinquo. Lucias. Tullus Ilostilio cum Romanis pro-
posuerunt Graecos invadere , eo quod Trojam paren-
tum corum civitatem destruxerant; et quia imbccilles
vidcbantur hœc exequi , Gallias ad traclandum cum
ipsis, eo quod pari modo à Trojanis desceiiderant ,
excitari ad consimilia laboravcrunt. Ex historiis Ro-
DE IIAIINALT. LIVRE II. IO7
tributs. Tarquin, voyant que la petite Rome l'empor-
tait de beaucoup sur toutes les cités d'alentour , l'éta-
blit à la tcte décent vingt-cinq villes ou forteresses , en
ordonnant qu'elle recueillerait leurs tributs , pour les
faire passer à Rome avec ceux qu'elle payait elle-même,
ce qui fut observé exactement pendant long-tems.
Mais les sénateurs de la petite Rome , étant devenus
puissans, négligèrent dans la suite d'envoyer leurs
tributs: et le roi Servius , ainsi que les Romains, en
étant indignés , envoyèrent , pour réprimer leur or-
gueil , une armée nombreuse , contre laquelle les ci-
toyens de la petite Rome se défendirent avec courage ;
mais enfin ils furent vaincus , et les ennemis renversè-
rent les murailles de la place , passèrent les habitans au
fil de l'épée , et rendirent presque toute la ville entiè-
rement inhabitable. Cependant , la paix s'étant réta-
blie entre les deux nations , les Romains ôtèrent son
nom à la ville , et voulurent qu'au lieu de la petite
Rome , elle s'appelât Hostilie , fesant ainsi allusion à la
résistance opiniâtre qu'elle avait opposée. Depuis ce jour
elle envoya comme auparavant ses tributs à Rome. Peu
de tems après cet événement , le roi Servius fut tué.
h'auteiir. Il existe plusieurs opinions sur la fondation
de Tournai, mais à laquelle donner la préférence?
C'est au lecteur à en décider. Luciiis. Tullus Hostilius
et les Romains résolurent de faire la guerre aux Grecs,
pour les punir d'avoir renversé Troie , la ville de
leurs pères; mais, comme ils ne se croyaient pas assez
forts pour réussir , ils travaillèrent à entraîner dans
leur entreprise les Gaulois, qui descendaient comme
eux des Troyens. Extrait des histoires des Romaitis.
Le troisième roi de Rome fut Tullus Hostilius , qui
le premier d'entre les rois des Romains se servit de
io8 A^^ALEs
manuriun. Tertius Romanorum rex regnavit Tullus
Hostilio. Hic prinius intcrregos Romanorum purpura
et fascibus usus est. Qai post longam paccm hella rc-
paravit; Albanos , Veicntes , Fidenatcs vlclt. Adjecto
monte Cœlio ampliavit urbem ; tandem cum domo
sua fulmine afflagravit. Actor. His quoque tempori-
bus , in Ilierusalem rcgnabat rex Amon , Manasse
filius, de quo habetur in chronicis. Manasse mortuo,
Amon filius ejus regnavit in Judaeâ , anno aetatis
quartae cdxviii, mundi vero iiimcccvii (i); et regna-
vit, secundùm opinionem lxx interpretum, annis xii ;
sed , secundùm Hebr2eos, tantummodo regnavit annis
duobus. Materiam hujus conlroversiœ non declaro,
brevitatis causa. Comestor. Amon, rex Juda, fecit
malum coràm Domino, sicut paler suus in juventute
sua fecerat ; et tetenderunt insidias servi sui , et intcr-
fecerunt eum in domo sua. Hclinandus. Hujus tem-
poribus , vidclicet olympiadis xxxiii (2) , claruit
Zenon pliilosopbus , de quo idem Hclinandus et Ya-
lerius, libro tertio, multa proloquitur. Actor. His
temporibus rcgnabat in JudœA rex Josias , de quo ha-
betur in chronicis.
(1) L'an 63G av. J.-C.
(2) La i" annce île la 33'^ oliinpiailc rt'poml à Tan 0*7 av. i .-(].,
sel n Eusèbc.
DE ÏIAIXATIT. LIVr.E II. 1 O9
ja pourpre et des faisceaux. 11 recommença la guerre
après de longues années de paix , et vainquit les Al-
bains , les Véiens , et les Fidénates. Il agrandit la
ville en y ajoutant le mont Célius, et finit par être con-
sumé dans sa maison par la foudre, h'aufeur. Dans ce
tems-là , régnait à Jérusalem Amon , fils de Manassès ,
dont il est fait mention dans les Chroniques (1).
Après la mort de Manassès , Amon , son fils , régna
donc sur la Judée , l'an 418 du quatrième âge , et du
monde 3307. La durée de son règne fut de douze ans ,
selon les septante; mais selon les Juifs elle ne fut que
de deux ans. Je ne discuterai pas ce point de chrono-
logie , pour cause de brièveté. Comeslor. Amon , roi de
Juda , fit le mal en présence du Seigneur , ainsi que
son père l'avait fait dans sa jeunesse. Ses serviteurs
lui dressèrent des embûches et le tuèrent dans son pa-
lais. Hélinand. Vers cette époque j c'est-à-dire dans la
trente-troisième olimpiade, florissait le philosophe Ze-
non , dont il est beaucoup parlé dans ce mcme Héli-
nand, et dans le livre ni de Yalère Maxime. \J auteur.
Ters le même tems encore , régnait en Judée le roi
Josias dont il est fait mention dans les Chroniques.
(i) On donne le nom de chroniques aux deux livres que nous ap-
pelons Paralipomènes, et les Hébreux Dibrei-IIaïamim , ou paroles
des jours. Les Juifs avaient plusieurs autres chroniques sur les-
quelles on peut voir l'article Chronique , dans le Dictionnaire de
la Bible par (Jora Calmet.
1 1 0 AISNAI.ES
CAPITULUM XXX
De regibus Juda, Amon et Josi;!
JosiAS Justus , filius Amon , cîim cssot annoi'um
octo, cœpit regiiaïc, jiixtà Eusebium , anno qiiartœ
œtatis ccccxxxi , mundi vero iiimcccxviii (i), et re-
gnavit annis xxxi, Eusebius tamen ponit xxxii. Cu-
mestor. Ilic, in quarto anno rcgni sui , qui crat cjus
aetatis duodecimus, ut dicit Josephus , pietatem et
justitiam mirabilem in se jàm demonstrabat. Nàni
populum jàm revocabat ad idolatria, et opéra prava
velut senior emendabat. Porrô, anno septimo rcgni
sui, omnem civitatem et provinciam à cultu idolorum
purgavit , ut nullum vestigium idolatriac supcressct.
Scrutabatur etiàm domos ne quis latenter remaneret
suspectum ; et in unâquacumque causa justitiam co-
luit, tanquàm animœ suae medicinam. Anno tredo-
cimo rcgni sui , exorsus est propbetare Jeremias in
terra Benjamin , tertio ab urbc milliario , et proplie-
tavit usquè ad cversioncm urbis xli annis. In dicbus
Josiae, ascendit Pharao (2), rcx ^Egypti , contra ro-
(1; L'an ^14 3V- J--t^-7 selon Fnsèbc.
(2) Ce Pliarann était. IMecliao; dont le règne commença en d j ,
.1 (Inil en GiHj, suivant Kiisrbe.
DE nATWri. r.ivp.E it. im
CHAPITRE XXX,
Des rois Je JiiJa , Amon et Josias.
Josus-le-Juste , fils d'A-mon, commença à régner à
l'âge de huit ans , selon Eusèbe , et en l'an 43 1 du qua-
trième âge, 3318 du monde. Son règne fut de trente-
un ans, ou de trente-deux , selon Eusèbe. Comestor. Dès
la quatrième année de son règne , qui était la douzième
de son âge, selon Joseph, il fit paraître une piété
et une justice admirables. En effet , il retirait déjà le
peuple de l'idolâtrie, et réprimait le mal, comme l'eût
fait un vieillard. En la septième année de son règne , il
purgea la ville et toute la province du culte des idoles,
à tel point qu'il ne resta plus une seule trace d'idolâ-
trie. Il fit aussi visiter les maisons dans la crainte qu'il
ne s'y cachât quelque personne suspecte. Enfin , dans
toutes les occasions il pratiqua la justice, qu'il regar-
dait comme la médecine de son arae. En la treizième
année de son règne , Jérémie commença à prophétiser
dans la terre de Benjamin , à trois milles de la ville, et
continua ses prophéties pendant quarante-un ans , jus-
qu'à la destruction de la ville. Du tems de Josias , Pha-
raon , roi d'Egipte , marcha contre le roi des Assiriens,
Il le croyait hors d'état de se défendre , parce que les
Mèdes et les Babiloniens s'étaient séparés de son cm-
l 1 2 ANNALES
gem Assyriorum. Audierant eiim debilitatum , quia
Medlct Babylonll à monarchiâ ojus rcccsscrant. Primo
autem aggrcssus crat regem Adremon , qui tune re-
gnabat in Carcanis (i); descendit igitur Josias in
occursum ejus , probibens ne transitum faceret per
Judaeam. Et misit Pbarao ad Josiam , dicens : « Quid
milii et tibi , rex Jiida? Non advcrsùm te venio. Misit
me Dominus ad Mcdos. » Et non acquievit Josias, scd
cum rege Adremon componebat acies , ut dimicarent
adversîis Pbaraonem, Et forte dùm transirct à curru
in currum qui sequcbatur eum , moi'e regio , occisus
est à sagittariis in campis Macedon. Et plan\it cum
inconsolabiHter Adremon rex cum exercitu suo. Tra-
ditur autem quod juxtà fontem et arborem occisus
est, qui statim arucrunt. Et planxit eum uni versus
Juda et Jérusalem , et maxime Jeremias, qui super
eum exequias scripsit tbrenos lamentabiles , quibus
utebantur cantores et cantatrices. Martinus. Quar-
tus Romanorum rex fuit Ancus Marc i us , tempore
Josiœ in Judœâ. Ilic suprà mare , sexto et decimo mil-
liario ab urbe Româ Hostiam civitatem condidit, et
regnavit annis xxiii. Hic pontem trans Tiberim inter
montem Aventinuni et Janicukun fecit. Ex C/ironicis.
Eo tempore claruit 'Tbalcs Milcsius, Examii fdius,
primus pbysicus pliilosopbus, qucm usquè ad Lvir
olympiadem vixisse ferunt {'i). Actor. Josias moriens
(i) "Ville situde sur rEuphratc.
(2) ïhalès , né l'an 669 av. notre crc , mourut l'an 548, dans la
cinquantc-liuiticnjc olimpiade, suivant Dingincs Lacrce. Il nVtait
pas né à Milet , mais en Phciiicie. Il vint à Milet à rilge de 52 ans,
et y reçut le droit de bonrj^eoiMe. Voyez son arliclc dans la Bio-
ijfnj'hic universelle . .
DE IIAINAUT. LIVRE II. 1 1 ?>
pire. Mais il attaqua d'abord le roi Adrémon, qui ro-
gnait alors à Carclicmis : c'est pourquoi Josias s'avança
à sa rencontre, pour l'empêcher de passer par la Ju-
dée. Pharaon envoya alors demander à Josias quel
sujet de guerre était entre eux , et lui fît dire qu'il
n'était pas venu contre lui , mais que le Seigneur l'a-
vait envoyé contre les Modes. Josias , sans tenir compte
de ces paroles , unit son armée à celle du roi Adré-
mon pour combattre Pharaon. Mais tandis que le roi
de Juda passait d'un char dans un autre qui suivait ,
ainsi que c'est d'usage pour le roi , il fut tué par des
archers dans les champs de Maggédo. Adrémon et toute
son armée pleurèrent sa perte. On raconte qu'une fon-
taine et un arbre , auprès desquels il fut tué , furent
aussitôt desséchés. Tout Juda , Jérusalem et principa-
lement Jérémie, se montrèrent inconsolables de sa
mort. Celui-ci composa sur ses obsèques des lamenta-
dons qui furent chantées par les hommes et les femmes.
Martin de Pologne. Le quatrième roi de Rome fut
Ancus Marcius , qui régnait du tems de Josias , roi do
Juda. Il fonda sur le bord de la mer , à seize mil! es
de Rome , la ville d'Ostie , et régna vingt-trois ans. Il
fit aussi constf uire un pont sur le Tibre , entre le mont
Aventin et le mont Janicule. Extrait des Chroniques.
En ce tems-là , florissait Thaïes de Milet , fils d'Examius,
et le premier phisicien philosophe. On dit qu'il vécut
jusqu'à la cinquante-septième olimpiade. L'auteur. Jo-
sias , en mourant , laissa trois fils , Eliakim ou Jécho-
nias , qui était l'ahié , Joachas ou Sellum, qui venait
ensuite , et Mathanias , qui était le plus jeune. Joachas
fut le premier des trois élu roi par le peuple , mais au
bout de trois mois il fut chassé du trône par le roi
d'Egipte; ce prince mit à sa place Eliakim, qu'il rendit
II. 8
Il4 ANNALES
très filios nllquit, Heliachim qui et Jechonias primo
genituin , et médium Joachas qui et Selluin , Matha-
niam vero tcrtium. Ilorum primas Joachas in regnum
h populo constituitur, sed per très mcnses à regc
zEgypti amovetur; et Pfeliachim , pro eo substitutus,
ejusdem tributariusefficitur, mutatoque nomine, Joa-
chim vocatur. Mvrtinus. AncoMarcio,regcRoniaiio-
rum , mortuo, Tarquinius Priscus, Romanorum rex,
quintus rcgnavit ; qui Capitolium instruxit et Jovi
dedicavit , temporibus Joachim , régis Judae , et re-
cnavit XXXVII annis. Hic circum ad ludos Romœ œdi-
ficavit, muros et cloacas quœ aquam et kitum urbis
deferi'cnt in Tiberim construxit. Capitobum fabricarc
incepit, et dictuni est Capitobum , ([uia , cùm funda-
menta foderentur, inventum fuit caput hominis sine
corpore.
CAPITULUM XXXI.
De rriscembaldo , rege Belgoriim.
ACTOR.
A tempore secundi Friscenibaldi , Belgorum régis ,
olympiade xxvi (i) currente, temporibus videlicet
(i) La i" année de la i" olimpiacle correspond, dans Eus«'î)e ,
avec l'an 776 av. J. C; et la 1" année de la 2G* olimpiadc avec
Tan G-'C). C'était la 38' de Kiutia selon Euscbc.
DE HAIXAUT. LIVRE II. 1 1 5
son tributaire , et dont il changea le nom en celui de
.loachim. Martin de Pologne. Après la mort d'Ancus
Marcius , roi des Romains , Tarquin-l' Ancien fut le cin-
quième roi de Rome. Il fît bâtir le Capitole , et le dédia
à Jupiter , dans le tems que Joachim était roi de .Juda ,
et régna trente-sept ans. Il construisit à Rome un
cirque pour les j<ux , et des aqueducs pour conduire
dans le Tibre les eaux et les immondices de la ville. Il
jeta les fondemens du Capitole , que l'on appela ainsi
parce qu'en creusant les fondations on trouva une
tète d'homme sans corps.
CHAPITRE XXXL
De Friscembaldus , roi des Belges.
L AUTEUR.
Depuis le tems du second Friscembaldus, qui était roi
des Belges, en l'olimpiade xxvi, c'est-à-dire sous les
règnes de Numa Pompilius , roi des Romains , et de
Manassès, roi de Juda, jusqu'au tems de Léopardinus
11 6 ANNALES
Numae Pompilionis, ivgis Romanorum, et Manasse,
rogis Judae, usqiiè ad tempora Leopardini , qui in
Relgis rcgnabat rcx, olympiade xLvni (i), temporibus
Servi! , régis Uomanoruin , et Sedeciœ, régis Judîc,
non repcri factum aliquod notabile, relatione digniim,
in historiis Belgorum , licèt in spatio dicto quinque
reges illùc extiteriint successive , videlicet Warige-
nis , filius Friscenibaldi , Leonius , Warigeri filius ,
I^eopardus , frater Leonii , Leopardus , filius Leo-
pardi,et Leopardinus, filius Leopardi, qui regnabant
in Belgi , temporibus Servii, régis Romanorum, proùt
apparebit inferiiis suo ioco. Horum temporibus, re-
gnum belgensc totum in se et in suis partibus tan ta
pace et prosperitate fruebatur, ut non esset qui au-
deret ipsum suscitare. Actor. Joachim (a) in Judœa
cœpit regnare anno quartœ œtatis cccclxii , mundi
vero iiiMCCCL (3), et regnavit annis xi. Ab hoc Urias
proplieta , ciim eum redarguisset turpiter, interfectus
est. Jeremias quoque , destructionem urbis et templi
prophetans , incarceratus est , ne publicc pr.Tdicaret.
Anno Joachim iv, Nabuchodonosor in Babylone re-
gnare cœpit. Qui, victo rege iEgypti, cuncta quaî
illius fuerant à rivo vEgypti usquè ad Euphratem tu-
lit; Euphratcm vero transiens, omnem Syriam usquè
ad Pelusium , pnTtcr Judœam , cepit. Dcniquè , anno
(i) La fin de ToliiTipiadc 48 commence Tan 584 avant notre ère ,
et Serviiis ne monta sur le trône que l'an 58o selon Eusèbo.
(2) Nommd anssi Eliakim.
(3) L'an (ji3 av. J. C. , suivant les tables d'Euscbe , et suivant
Tautenr qui compte 3962 ans de la création du monde à la 1" année
<lc notre ère.
DE nAIXAlT. LIVRE II. 11-
qui régnait à Belgis vers l'olimpiade xlviii , el à l'épo-
que où Servius régnait sur les Piomains, el Sédécias
sur Juda , je n'ai trouvé aucun fait remarquable et
digne d'être rapporté dans l'histoire des Belges; quoi-
que dans cet intervalle de tems on compte cinq rois
qui se succédèrent sans interruption dans ce royaume;
savoir, Wariger fds de Friscembaldus , Léonius fils de
Wariger, Léopard frère de Léonius, Léopard II fils
de Léopard ^f , et Léopardinus fils de Léopard II.
Tous ces princes régnèrent à Belgis du tems de Servius,
roi des Romains , comme nous le dirons plus bas et en
son lieu. Sous les règnes de ces princes , tout le royaume
des Belges jouit d'une paix si profonde et d'ime si grande
prospérité , qu'aucun ennemi n'osa venir l'attaquer.
Y.' Auteur, Joachim commença à régner en Judée l'an
462 du quatrième âge, et du monde 3350, et son règne
dura onze années. Ce fut par lui que le prophète
Urie, qui l'avait fortement réprimandé, fut mis à
mort; et Jérémie , qui prophétisait la ruine de la ville
et du temple, fut jeté dans une prison pour l'empêcher
de prêcher en public. En la quatrième année du règne
de Joachim , Nabuchodonosor commença à régner à
Babilone. Il vainquit le roi d'Egipte, et lui enleva
tout ce qu'il possédait depuis le Nil jusqu'à l'Euphrate;
puis il passa ce dernier fleuve, et s'empara de toute la
Sirie jusqu'à la ville de Péluse , à l'exception de Jéru-
salem qui fut épargnée. Enfin , en la huitième année
de Joachim , Nabuchodonosor monta à Jérusalem , prit
Joachim, et le fit enchaîner pour le conduire à Babi-
lone avec les personnages les plus remarquables de
la Judée ; mais il lui imposa un tribut en chemin
et le renvoya à Jérusalem. Il retint les otages qui
étaient du sang ro\al, et au nombre desquels ^c troii-
n8 ANNALES
vm Joacliim, asccndit Nabuchodonosor Jcrusalom,
captumquo Joachim et ligatum trahebat secum, et
ciim eo nobiles viros de Jiidω in Babylonem ; In iti-
iicrc vcro imposuit ei tributuni , et remisit in Jérusa-
lem. Sed obsides de semine regio Danielem scilicet
et très pueros (i) secum traxit ; et Joachim tribus
annis sibi servivit. Sed posteà cùm negavit tributum
quod e promiserat, Nabuchodonosor veniens , eum
occidit et in sepulcrum objecit , ac Joachim , Jecho-
niam {îHum ejus equivocum scihcet patris regem
tf j)nstituit. Et post très menscs , timens ne ille patcrnœ
.njuriœ memor, vEgyptiis adhœreret, et contra eum
pugnaret, rcdiens Jérusalem obsedit, ipsumque eum
matre suâ et familiâ, de consilio Jeremiae, se tradente,
suscepit, et eos in Babylonem transtulit, principes
quoque eum aliis plurimis , inter quos erat Mardo-
cheus et Ezechiel adhiic juvenis. Constituit autem
regem patruum Joachim , Mathaniam , accepte jura-
mento quôd serviret ei sub tributo ; mutatoque no-
mine, vocavit eum Sedechiam.
(i) Ces trois cnfans du sang royal étaient Ananias , Azarias et
Misacl.
DE IIAINALT. LIVRE II. 1 19
vaicnt Daniel , et trois autres enfans. Joachiiu paya
pendant trois années le tribut qui lui avait été im-
posé ; mais ensuite l'ayant refusé , Nabuchodonosor
vint, le tua, et le plaça dans un tombeau. Puis il
mit sur le trône Jéchonias , qui était fils de Joachim ,
et qui porta le même nom que son père. Mais trois
mois après , craignant que celui-ci , se souvenant de
l'injure faite à son père, ne prît le parti des Egip-
liens , et ne combattît contre lui , il revint mettre le
siège devant Jérusalem. Alors Jéchonias , d'après le
conseil de Jérémie , se rend avec sa mère et toute sa
famille à Nabuchodonosor , qui les emmène à Babi-
lone , ainsi que les princes et plusieurs autres person-
nages , au nombre desquels étaient Mardochée et Ezé-
chiel encore jeune. Nabuchodonosor établit Mathanias,
oncle paternel de Joachim , roi de Judée , après avoir
reçu de lui le serment qu'il le servirait et qu'il lui paie-
rait tribut; il changea ensuite son nom de Mathanias
en celui de Sédécias.
120 ANNALES
CAPITULUM XXXII.
De Servio, icgc Romanorum.
MARTINUS.
MoRTUO Tarquiiiio Prisco, (i) rcgc Romanorum ,
successit in regno Servius Tullius Sextus , rex Roma-
norum , tempore Sedechiœ , régis Judœ. Tlic fossas
circà muros romanos duxit. Item ordinavit primus
ut census , tributa et vectigalia tollerentur, de quibus
ante hoc ignorabatur. Tandem occisus est à Tarquinio
Superbo (2). Hoc tempore , excidium Judœorum fac-
tum est , per Nabuchodonosor, regem Chald;eorum ,
tempore Sedechiœ , régis Judae. Hugo Tullensis.
Occiso Tarquinio Prisco, Romanorum rege , Servius,
sextus rex Romanorum , concorditer à Romanis eli-
gitur. Hic primus ordinavit ut census et tributa ,
exactiones et vcctigaHa tollerentur. Ratione cujus ,
populus ferociter insurrexit conlrà cujn, circà olym-
piadem l (3). Videns autem Servius rex populi rc-
(i) Tarqiiin rAiifion mourut, suivant Eusèbe, l'an 58i avaul
notre ère , et Pan SyS, suivant l'Art de veritier les dates.
(2) En l'an 647 , suivant Eusèbe, et en l'an 534, suivant l'Art
de ve'rifier les dates.
(5) La i'" année de la 5o' oliinpiadc repond , dans Eusèbe , à l'an
58o av. J. C. C'est aussi, dans Eusèbe, la i"" année de ijcrvius.
DE HAINAUT. LIVRE H. 121
CHAPITRE XXXII.
De Servius, roi des Romains,
MARTIN DE POLOGNE.
Après la mort de Tarquin l'Ancien, roi des Romains^
Servius Tullius , sixième roi de Rome , lui succéda au
tems de Sédécias, roi de Juda. Il fit creuser des fossés
autour des murs de la ville. Il fut le premier qui leva
des cens, des tributs et des impôts, dont on n'avait
jamais entendu parler auparavant , et fut tué par Tar-
quin le Superbe. En ce tems-là arriva la ruine des
Juifs , par Nabuchodonosor , roi des Caldéens , lors-
que Sédécias était roi de Juda. Hugues de Toul. Tar-
quin l'Ancien , roi des Romains, ayant été tué , Servius
Tullius fut élu unanimement par le peuple pour sixième
roi de Rome. Il créa le premier les cens, les tributs,
les exactions et les impots , ce qui fit révolter le peuple
contre lui, vers la cinquantième olimpiade. Le roi
Servius voyant cette révolte , et sentant bien qu'il ne
pouvait seul triompher des rebelles , se prépara à faire
alliance avec les étrangers , afin de forcer les Romains
à rentrer dans le devoir.
122 ANNALES
belliolieiii, et quôd oos supcrare non possct, clisposuit
ciim exteris inire fœdcra , ad finem ut Romanos sll)i
rebellantes edomare valcrct.
CAPITULUM XXXIII.
Qiiùil Scrvius, rex Romanorum , ciim extraneis fœtlcra iuit, .td
fînem ut Romanos faciliùs edomet.
LUCIUS ET HUGO.
Igitur Servius , rex Romanorum , sibi rebellantes
Romanos edomare eupiens, olympiadis lii[ (i) anno
secundo , Pannoniam cum pluribus sibi favorabilibus
Romanis subintrans , gentem copiosam ibidem colli-
gens usquè ad Mœotidas paludes solum penetravit ,
illùccjue gentem efferam reperiens , Hunnos videlicet ,
qui, per multa tempora, antequàm Pannoniam inva-
derent , morabantur. Servius , rex borum , magnam
partem ad sua vota perlraxit, et cum Cambro, eorum
duce , secum deducens Histrios , Antenoridcs , Sicam-
bros , Caprimontenses (2) , Durbianos , deindè Ger-
manos pcrhistrans , innumerabilcm populum con-
gregans , Sucviam , Saxoniam , Daciam , multasque
(i) L'an 567 av. J. C, suivant Eiisrbe.
(2) Les habitans do (^hcvrcmont vl ceux de Duihut. Les Anlc-
norides sont ceux d'Ath , on poul elir les Tranes , que l'on fait
ilr^rpudre d'Anl('noi-.
DE UAINAUT. LIVRE II. \ 2Ô
CHAPITRE XXXIII,
Servius, roi des Romains, fait alliance avec les étrangers poui
dompter plus facilement les Romains révoltes.
LUCIUS ET HUGUES.
Servius , roi des Romains , voulant dompter ses su-
jets rebelles, entra, la seconde année de la cinquante-
troisième olimpiade , dans la Pannonie , avec plusieurs
Romains qui tenaient son parti, y rassembla une grande
armée, pénétra jusqu'aux Palus Méotides , et trouva
dans cette dernière contrée la nation féroce des Huns ,
qui l'habitaient long-tems avant que Servius ne fiil
entré dans la Pannonie. Servius attira la plus grande
partie d'entre eux sous ses étendards , et emmenant
avec lui Camber , leur duc, et les peuples de l'Istrie ,
les Anténorides , les Sicambres , les Chèvremontains ,
les Durbians ; parcourant ensuite la Germanie , et ras-
semblant une armée innombrable , il envahit et ra-
vage la Suève, la Saxe , la Dacie, et une foule d'autres
états, et arrive enfin sur le fleuve du Rhin. Son armée ^
comme une horrible tempête , renversait les villes et
les forteresses sur son passage.
./;
12£^ ANNALKS
nationcs alias ciim cisrlcin invadeiis et clevastans, flii-
vium Rheul fmalitcr petioruiit. Civitatos et opplda
undiquè velut liorrenda tempestas solo coaequabant.
CAPITULUM XXXIV,
De Leopardino , regc Bclgonim.
Leopardinus autcm , Belgorum rex , audiens regni
sui debacehationem , duces civitatum ac natu majores
sul regni congr;>gans, proposuit quid esset acturus
in tàm arduo facto, aut proprias tucri civitates, aut
in transita fluvii Rheni adversarios obviare. Tandem
decrevcrunt medietatem omnium civitatum regni ad
fluvium Rhcui accessuram contra adversarios , aliam
vero medietatem pro tuitione regni in propriis rema-
nere territoriis. Quibus congrcgatis, Leopardinus tan-
tam videns multitudinem , expavcscens , divisit sic
gentem suam. Timens ne tanta multitude confusio-
nem causarct, ut sexcenta millia ad fluvium Rheni
secum progrederentur; residui vero ad fluvium ^losœ
conservandum remanerent. Quod et factum est. Tune
Leopardinus rex cum suis versîis Agrippinam progrc-
diens, reperit jàm Tlunnos et Pannouios duos pontes
in diversis partibus Rheni construxisse , et populum
innumcrabilem transmeasse. Hoc pcrpcndens dispo-
DE IIAINAUT. LIVRE II. 1 2'J
CHAPITRE XXXIV.
De Léopardiuus, roi des Belges,
LÉopARDiNus, roi des Belges , ayant appris les ravages
qui étaient exercés dans son royaume, rassembla les
ducs des cités et les plus anciens de ses états , et leur
demanda ce qu'il y avait à faire dans des conjonctures
aussi délicates ; si l'on devait s'en tenir à la dé-
fense des villes , ou passer le l\hin pour marcher à la
rencontre de l'ennemi. Il fut résolu que la moitié
de tous les citoyens s'avancerait vers le Rhin contre
les ennemis , et que l'autre moitié resterait dans ses
propres territoires pour la défense du royaume. Léo-
pardinus , après avoir assemblé tous ses soldats , fut
dans l'étonnement de les voir si nombreux ; il les
divisa de cette manière , de peur qu'une si grande
multitude ne causât de la confusion. Il ordonna que
six cent mille hommes s'avanceraient avec lui vers
les bords du Pihin , tandis que le surplus resterait pour
défendre la Meuse ; ce qui fut exécuté. Alors le roi
Léopardinus s'étant avancé avec les siens vers Agrip-
pine, rencontra les Huns et lesPannoniens, qui avaient
1 26 ANNALES
suit ipsos Invaclcre. Jàm ducenta mlUia Rhcnum
transierant. Ex utrâque parte acicbus dispositis, se
mutuo aggressi sunt ; sed post multas ac diversas stra-
ges hinc indè exécutas , Leopardino , rcge Lclgorum
interempto , Belgi succubuerunt , paucis evadcntibus,
quorum aliqui vcrsîis Agrippinam, aliqui versus Tun-
grim , rellqui qui potuerunt Treverim mœsti confuge-
runt. Ormestâ gravi sic terminatâ , caeteri Belgi cum
fillo régis ad littus Mosellœ atque Mosœ se fortiùs ap-
plicantes, decreverunt littora atque civitates et oppida
tutiiis ac cautiîis defcndenda disponere. Undè et re-
gnum totum timere cœpit. Intereà Servius rex cum
Cambro , duce Hunnorum , Agrippinam invadentes et
obtinentes, Treverim etiàm diruerunt, et incolis captis,
omnes à viginti annis et suprà usque ad xl annum secum
deduxerunt. Nec remansit civitas aut oppidum inter
Rhenum , Mosam aut Mosellam , quin suis subjicerunt
dominiis. Tandem ad fluvium Mosae pervenientes ,
remotè à locis ubi transmeare dccreverant , signa
transeundi facientes , Belgi suas acies diviserunt. Ser-
vius rex cum Cambro , Clondrone atque Vermendiono
ducibus, cum multis in loco qui nunc dicitur Trajec-
tum , ab illo transitu nomen suscipiens , trans Mosam
transiverunt ; reliqui dictum fluvium per nemora in
vadis plurimis turmatim sine periculis transvadentcs.
Erant siquidem Belgi aut ipsorum pars major con-
gregata in loco qui nunc dicitur Antevisetum, inter
Lcgiam etTrajectum; expectantes Hunnorum transi-
tum ; qui delusi obstupucrunt. Qui tamen versus
Tungrim se recolligentes nubeni illam pestiferam ad
DE ilAINAUT. LIVRE II. 12"
déjà jeté deux ponts sur le Rhin , et fait passer des
troupes innombrables. Dans cette circonstance , il ré-
solut de les attaquer. Deux cent mille hommes avaient
déjà franchi le fleuve. Les deux armées s'étant rangées
en bataille, s'attaquèrent mutuellement; mais après
différentes pertes essuyées par les deux partis , Léopar-
dinus, roi des Belges , ayant été tué , ses troupes furent
vaincues ; un petit nombre de ses soldats échappèrent
par la fuite, et se retirèrent les uns vers Agrippine,
d'autres vers Tongres , et le reste se réfugia tristement
à Trêves. Après cette sanglante bataille , les autres
Belges , conduits par le fils du roi , se fortifiant sur les
bords de la Moselle et de la Meuse , prennent la résolu-
tion de mettre en état de défense les rivières , les villes
et les places fortes : ce qui commença à inspirer des
craintes à tout le royaume. Cependant le roi Servius
accompagné de Camber , duc des Huns , met le siège
devant Agrippine , et s'en empare ; puis ils détruisent
ensemble la ville de Trêves, en font prisonniers les ha-
bitans, et emmènent tous ceux qui avaient plus de vingt
ans et moins de quarante. Toutes les villes et les places
fortes situées entre le Rhin , la Meuse et la Moselle ,
furent soumises à leur domination. Enfin , lorsqu'ils
furent arrivés sur les bords de la Meuse , loin de l'en-
droit où ils avaient résolu de la passer , ils firent sem-
blant de vouloir exécuter ce passage ; et les Belges
divisèrent leur armée en deux corps. Le roi Servius,
ainsi que les ducs Camber , Condron , Vermendion ,
et une foule de guerriers , passèrent la Meuse dans un
endroit qui se nomme aujourd'hui Trajcclum ( Maes-
tricht ) , nom qui lui a été donné à cause de ce passage
qui y fut effectué; les autres troupes passèrent cette
rivière à gué dans les bois et sans aucun danger. Les
128 ANNALES
pugnandum per sex clies continuos se disponentes ,
fiualiter corruerunt , paucis evadentibus quorum ali-
quiTungrim, reliqui ad proprias civitatcs confugcrunt.
In crastinum Tungrim insidione vallaverunt, quam
finaliter obtlnentes et spoliantes, aptos ad bellum
quorum non tetigerat gladius secum perducentes ,
residuum patriœ illius faciliter subjecerunt ; abliinc
Rhetiam sub intrantes totam totaliter usque ad Ocea-
num subdiderunt.
CAPITULUM XXXV.
De primariâ fundationc multariim civitatiim ad rcgnum Belgoriira
pertinentiuin.
ACTOR.
Hi , proîit refert Lucius , plures condiderunt ci vi-
tales et oppida, ut Numciam (i), Ncomagum, Jupi-
(i) Le manuscrit de S.Germ. dit JYlnneiani. C^csl sans doute la
ville (le Ninovc sur la Dcnrc, pallie de Jean Dcspautère.
DE IIAINAUT. LIVRE II. 1 29
Belges , ou du moins la plus grande partie de leur
armée, étaient rassemblés dans un lieu situé entre
Liège et Maestricht , et nommé TAntiviset , ils atten-
daient le passage des Huns qui étaient déjà de l'autre
côté delà rivière. Lorsqu'ils reconnurent qu'ils avaient
été trompés par leurs manœuvres , ils restèrent stu-
péfaits. Cependant ils se réunirent sous les murs de
Tongres; et, s'étant apprêtés pendant six jours à com-
battre les barbares, ils livrèrent bataille, et furent
vaincus. Un petit nombre s'échappa; les uns se réfu-
gièrent à Tongres , et les autres dans leurs propres
cités. Le lendemain matin l'ennemi commença le siège
de Tongres , s'empara de cette ville , en fit le pillage ,
et emmena tous ceux qui étaient propres à la guerre ,
et que le fer avait épargnés. Il soumit sans obstacle le
reste du pays , et entra ensuite dans la Rhétie (1), dont
il fit la conquête jusqu'à l'Océan.
CHAPITRE XXXV.
De la fondation de plusieurs cités appartenant au royaume des
Belles.
L AUTEUR.
Les barbares , au rapport de Lucius , fondèrent plu-
sieurs villes et places fortes , telles que celles de Ninove ,
(1) En Rrabant.
II. 9
1 5o ANNALES
liain (i), Capiimontcm , Durbcium et caefcras alias
plurcs mihi pcnitùs ignotas , quarum nomina, causa
brcvitatis, prœtermitto. Circà vcro Mosam condide-
ruiitTrajectLimsuperiiis etinferiiis. Item illiic rcxSer-
vius condidit oppidum à uomino proprio Scrvium (2)
nominatuni. Condro vero , dux Ilistriorum , juxtà
ripariam Mosai civitatem fortissimam condidit, quam
à Hunnis Hoyum , usquè ad hodiernum dicm , appel-
latum dignoscimus. Item oppida multa riparias et
castra dictus Condro constituit , quae à Hunnis illis
omnes dcnoniinationcs susceperunt. Qualiter vcro
Rhetiam dictus Condro et cjus sequaces edomaverint ,
et suas usquè ad occasum et Rhuteniam dilatavcrint
alas Lucius edocet ; verùm quia longa valdè claret
historia, et patria mihi pcnitùs ignota est, conscri-
bere pigritavi. Cùm igitur alii Ilunni cum Servio rege
atque Cambro Hunnorum et Vermendione Pannonio-
rum ducibus, Mosam pertransisscnt, pcrpendcntes
Bclgos stupefactos atcjue pavcfactos fore, terramque
considérantes fructifiîram aquis , herbis , nemoribus ,
oppidis, vcnationibus, frugibus et fontibus irriguam,
in duabus partibus principaliter se diviserunt ; nam
Cambro cum Vermendione ducibus , regionem super
quemdam fiuvium , qui à dicto Cambro nunc dicitur
Sambra , c mutatâ in s , cum Hunnis et Pannoniis ad
civitatem Belgensem oljsidendam perrexerunt ; et se-
cùs Httus dictarum ripariarum fanum Noptuni suprà
montem repcrientes, locum atque populum faciliter
(1) Peut-être Julicrs.
(2) (Jhiùvre.
DE HAINAUT. f.TVRE II. l5i
Nimègue , (1 ) Jupilia, Chevremont, Durbut, et une foule
d'autres dont les noms me sont entièrement inconnus ,
et que je passe pour être plus court. Ils Ibndèrent le
haut et le bas Maestricht sur la Meuse , et le roi Servius
bâtit aussi sur la même rivière une forteresse qu'il ap-
pela de son nom Servie. Coudro , duc des Istriens ,
fonda sur le même rivière une ville très-forte qui est
connue encore aujourd'hui sous le nom de Huy , qui
lui fut donné par les Huns. Le même Condro bâtit en-
core sur différentes rivières plusieurs forteresses et
châteaux , qui reçurent des Huns leurs dénominations.
Lucius nous apprend aussi comment Condro et ses sol-
dats soumirent la Pihétie , et s'étendirent ensuite jus-
qu'à l'Océan et à la Ruthénie ; mais, comme son his-
toire est entre les mains de tout le monde , et que les
pays dont il parle me sont entièrement inconnus , je
me suis dispensé de le transcrire. Les Huns, qui avaient
passé la JMeuse sous la conduite du roi Servius et sous
celle de Camber , leur duc , et de Vermendion , duc des
Pannoniens , voyant les Belges défaits et frappés de
terreur , et trouvant que leur territoire était fertile ,
qu'il renfermait des prés , des bois , des fontaines , des
villes et des chasses, et qu'il produisait beaucoup de
fruits, ils divisèrent leurs armées en deux corps , com-
mandés , l'un par le duc Camber , et l'autre par le duc
Vermendion ; et s'enfonçant dans le pays , en suivajit
la rivière de Sambre , ainsi appelée du nom de Cam-
ber , en changeant c en ^ , ils marchèrent sur la ville
de Belgis pour eu faire le siège. Ayant rencontré le
long de la Sambre le temple de Neptune , situé sur une
(i)Ou plutôt Nmiiagen , ancien bourg sur la Moselle, et à cinq^
lieues au-dessous de Trêves.
1 52 ANNALES
subjeceriHit. Praedis dicti ("ani susceptis, in via bcl-
gensi , civitates et oppida , inansiones et castra plura
construentes , tandem ad obsidionem dictae Bclgis ci-
vitatis devenerimt. Inter civitates et oppida quœ con-
struxerunt dicti llunni in via dictœ civitatis , fucrunt
Mons Tuitionis , Ilugnia, Hugnella et Huigina (i),
et caeteras plures , quas brcvitatis causa pertranseo.
CAPITULUM XXXVI.
Quùd Servius , rex Romanonim , fiindavit civitatem Serviae (q) et
de primariâ inhabitatione montis in quo nunc villa Montcnsis
coUocatur.
Servius autem rex cum Romanis et Sicambris et
Antenoribus et cœteris sibi copulatis , ncmora subin-
trans, ad obsidendas fani Mercurii, Portus-Bolgo-
rum et Ilostilis civitates se disposucrunt. Undè Ser-
vius rex, in profundis silvarum reperiens territoriuni
fontibus et arboribus et frugibus irriguum, jussit
ligna et arbores per quatuor miUia passuum circum-
(i) Il y a beaucoup de villages situe's sur les bords de la Sambre
qui portent, des noms approchant de ceux-ci; mais il n'est guère
possible de distinguer ceux dont parle Jacques de Guysc; cette re-
recherche d'ailleurs ne serait d'aucun intérêt.
(2) Qiièvre , au midi de la ville d'Ath.
DE H AIN ALT. LIVRE II. l33
montagne, ils soumirent sans clifQculté ce pays et ses
habitans. Ils pillèrent le temple, et continuant d'avan-
cer vers Belgis , en construisant sur leur route des
cités , des forteresses , des maisons et des châteaux en
assez grand nombre , ils arrivèrent enfin sous les murs
de la ville. Parmi les cités et les places fortes que les
Huns bâtirent sur leur route, on compte 3Ions Tuitionis,
Hugnie , Hugnelle , Huigine , et une foule d'autres dont
ie détail serait trop long.
CHAPITRE XXXVI.
Servius , roi des Romains , foade la ville de Servie ; et la montagne
sur laquelle est bâtie la ville de Mons est habitée pour la pre-
mière fois.
Le roi Servius, étant entré dans les bois avec les Ro-
mains , les Sicambres , les Anténorides et les autres
peuples qui s'étaient joints à lui , se disposa à faire le
siège des villes de Fanum Mercurii , de Porte-Belge et
d'Hostile. Puis , ayant trouvé au fond des bois un ter-
ritoire couvert d'arbres , de moissons et de fontaines ,
il fit abattre et arracher tous les arbres sur un espace
de quatre mille pas carrés , et fijt bâtir sur cet endroit
une grande ville , à laquelle il donna son nom , et qui
se nomme encore aujourd'hui Servie , ou le Sart de
Servin. Il éleva des tours et des portes, construisit des
ponts et des remparts, entoura la place de fossés et
l34 ANNALES
quaqiic velociùs prœcidi atque radicitùs cxertari ,
illùcque iugcntcm coiulciis civitatcm , quam nomine
proprio insigniri deliberatus est, quae usquc in ho-
dicrnum diem Scrvia seu Sartum Scrvini (i) decrevit
appellandum. Illùc turres et portas , pontes et mœnia
construens , fossatis et mûris fortissimis eam circum-
cinxit , et ut sibi et suis sequacibus esset in arccm et
refugium fortissimum , dictam civitatem prœmunivit.
Ab bac autem civitatc, in qua recursum spccialem
babebant dicti Romani suprà dictas civitates, très ob-
sidentes et invadentes, tandem easdem subjecerunt,et
speciabter Hostilem bostiHter dejecerunt, quae priùs
sub dominio belgensis civitatis babebatur. Intereà,
dùm Servius rex fundabat suam civitatem , Camber
et Vermendio Belgim approximantes , perpenderunt
cives belgenses, Hunnos fore divisos et in diversis ap-
pbcatos territoriis, qui nocte quâdam exeuntes ma-
gnam Pannoniorum atque Hunnorum cladem exercue-
runt, in locoqui, rationc bclli et ratione situationis
Hunnorum, Hugniacum , gallicè Hugnies , usquè in
hodiernum diem appellatur, propè Belgis. Quod ad-
vertentes Camber et Vermendio, suos rccoUigentes et
retrocedentes , decreverunt rcgem Servium appro-
pinquarc , ut saltem se mutuo , si nécessitas afforet ,
tlefenderc valerent. Tune Camber secùs civitatem ré-
gis Servii in nemoribus castrum (2) extruxit, scciis
fluviolum Albœ, quod, usque in bodieinum diem,
(1) Nous avous vu dans le chapitre précèdent que Servius avait
déjà bâti une forteresse de son nom sur la Meuse,
(2) Le village de Cambron est situe sur une petite rivière que
l'auteur nomme l'Aube , et qui se jette dans la Dcurc à Ath.
DE IIAINAUT. r.IVRE II. 1 vlS
de murailles très-fortes , et en fit pour lui et pour les
siens , une place de sûreté. C'est de cette ville que les
Romains dirigèrent leurs attaques contre les trois cités
dont nous avons parlé , et dont ils se rendirent maîtres.
Ils emportèrent de force celle d'Hostile , qui était au-
paravant soumise à la domination de Belgis. Pendant
que le roi Servius était occupé de la fondation de sa nou-
velle ville , Camber et Vermendion s'étaient approchés
de Belgis ; et aussitôt que les habitans de cette dernière
place avaient reconnu que l'armée des Huns était divi-
sée, et qu'elle occupait différens pays , ils étaient sortis
la nuit, et avaient fait un grand carnage des Pannoniens
et des Huns , dan§ un endroit situé près de Belgis , et
qui , à cause de cette guerre et de la position des Huns ,
fut appelé Hugniacum , et en français Hugnies, nom
qu'il porte encore aujourd'hui. Camber et Vermen-
dion ayant appris ce revers, rassemblèrent leurs forces,
et résolurent de retourner sur leurs pas et de s'unir à
Servius , afin d'être en mesure de se prêter un secours
mutuel , si les circonstances le demandaient. Alors
Camber bâtit un fort près de la ville du roi Servius ,
sur le ruisseau d'Aube , dans un endroit qui s'est ap-
pelé jusqu'à ce jour le château de Camber , ou Cam-
bron-le-Châtel. Il réunit en même tems le reste de ses
troupes sur plusieurs montagnes et dans l'épaisseur du
bois , au milieu des marais , le long d'un ruisseau qui
fut d'abord appelé Hiignia par les Huns , mais qui prit
le nom de Hmjnia ou Hayne. Il choisit aussi une mon-
tagne près des bois , et au milieu des marais dont nous
venons de parler, pour y bâtir un temple , où il plaça
l'idole de Pan , pour laquelle sa nation avait beaucoup
de vénération, afin de ne pas s'attirer, par sa négli-
gence envers le culte de cette divinité , les malheurs
l56 ANNALES
dicitur Castrum Cambri scu Cambronis. Reliquas
vero acics suoruni in iiiontibus tliversis atque locis
tutissimis nemorum , inter paludes secîis fluviolum ,
quod Hugnia à dictis Ilunnis tune primitùs appellatum
est , recollegit ; à modcrnis vero dieta rlparlola Hay-
nia (i) voeltatur. Inter autem dictos montes in quibus
suas constituerant aeies , unum elegerunt in oris ne-
morum inter dietas paludes , cœterls aptiorem , et
illùc primitùs fanum œdificantes , idolum Pan , quod
colebant, in eodem colloeaverunt ; tlmentcs ne prop-
ter incuriam servitii dei Pan indignationem incurris-
sent in damnum quod à Belgis noviter ineurrerant.
Ab illo siquidem fano (2) Belgis, fani Martis , fani
Mcrcurii, Hostilis, Portus-Belgorum atque Servii régis
civitates , necnon Mincrvœ fanum , faciliter cerneban-
lur. Undè et territorium illud Pannoniam sive Pro-
panciam per multa annorum curricula voeitatum
dignoscitur. Ad illud siquidem idolum ex generali
praecepto tàm Hunnorum , Pannoniorum , Romano-
rum , Rhetiorum atque omnium aliorum , pro suis
necessitatibus recurrebant omnes incolae dictarum
nationum , et perseveraverunt usquè ad tempora Ju-
lii Cœsaris , qui dictum idolum destruens , castrum
'primitîis ex fano construxit.
(i) La Hayne se jette dans l'Escaut à Condc.
(2) Lo temple de Pan était bâti sur remplacement qui fut dcpurs
occu^ié par la ville de Mon s.
DE IIAINAUT. LIVRE II. 107
que venaient d'essuyer les Belges. Ou découvrait faci-
lement de ce temple de Pan les villes de Belgis, de
Famars , de Fanum Mercurii , d'Hostile , de Porte-
Belge , de Chièvre , et le temple de Minerve. Le pays
fut long-tems appelé , à cause de cette idole de Pan ,
la Pannonie ou la Propancie (le Brabant); et , d'après
le commandement des Huns, des Pannoniens, des
Romains , des Rhétiens , et de tous les autres peuples
alliés, toutes ces nations se rendirent au temple de
cette divinité pour l'intercéder en leur faveur, jus-
qu'au tems de Jules-César , qui détruisit l'idole et
transforma le temple en forteresse.
1 .)b ANNALES
CAPITULUM XXXVII.
De idolo Pan, et ejus form;1 et festivitate.
ACTOR,
Imago clicti idoli , jiixtà opinionem antiquorum et
maxime Fulgcntii , erat homo cornutus cum facic
rubicundâ , et in pectorc ejus tiepingebantur stellae plu-
res; fcmora autem ejus cum herbis et arboribus cir-
cumcingebantur. In ore autem ejus erat fistula cala-
morum vu ; pedcs vero caprines habebat , et erat
cum Amorc luctans , sed ab eodem vincebatur. Ex-
ponunt autem Fulgcntius et Rabanus causam forma?
idoli dicti in suis libris , dicentes Pan figurasse deum
naturae, cujus facie rubicundâ cum cornibus fîgurabat
superiorem mundi partem , scilicet ignem et œtbera
cum radiis et eorum influentiis ; pectus autem stclla-
tum stcllas significal)at et planetas , femora vero arbo-
rosa significabant inferiores plantas , lierbas , arbores
et arbusta. Pedes vero caprini significabant animalia
et bestias nemorum ac camporum ; et luctabatur cum
Amore et superabatur, quia ad litteram amor natu-
ram exsuperat atque domat. Hujus idoli solemnitas
erat xv kalendas martii , die eàdcm <{ua celebrabatur
DE HAINALT. LIVRE II. ] 09
CHAPITRE XXXVII.
De lidole de Pan, de sa figure , et de sa fête.
L AUTEUR.
La Statue du dieu Pan représentait, d'après l'opinion
des anciens , et particulièrement d'après celle de Ful-
gence , un homme cornu avec une face rubiconde , sur
la poitrine duquel étaient peintes plusieurs étoiles; ses
cuisses étaient ceintes d'herbes et de feuillages , il ap-
prochait de ses lèvres une flûte à sept tuvaux ; il avait
des pies de chèvre ; il luttait avec l'Amour , mais il
était vaincu. Fulgence et Piaban donnent , dans leurs
ouvrages , l'explication de la figure de cette idole ; ils
disent que Pan signifiait le dieu de la nature ; que sa
face rubiconde et ses cornes figuraient la partie supé-
rieure du monde , c'est-à-dire le feu et l'éther avec
leurs rayons et leurs influences; sa poitrine étoilée
fesait allusion aux étoiles , et ses cuisses garnies de
feuillages aux plantes basses, aux herbes , aux arbustes
et aux arbres. Ses pies de chèvre figuraient les ani-
maux et les bètes sauvages des champs et des bois , et
s'il luttait avec l'Amour, qui demeurait vainqueur, c'est
qu'en effet l'amour surpasse et domte la nature. La
fête de Pan se célébrait le xv des calendes de mars , le
même jour que celle des Faunes , ainsi que nous l'avons
1 40 ANNALES
solemnitas Faunorum , proùt patet superiùs , llbro
primo; et hoc ostendit Ovidius de Fastis , libro ii ,
ubi sic inquit : Tcrtiâ post idus , id est , tertiâ die post
idus februarii....
VERSUS.
Tertia post idus nudos aurora lupercos
Aspicit : et Fauni sacra bicornis eunt.
Dicite , Piérides , sacrorum quae sit origo :
Attigerint latias undè petita domos.
Pana deum pecoris veteres coluisse feruntur
Arcades. Arcadiis plurimus ille jugis....
Pan erat armenti custos , Pan numen aquarum :
Munus ob incolumes ille ferebat oves....
Inde deum colimus , devectaque sacra Pelasgis.
Flamen ad hœc prisco more dialis erat :
Cur igitur currant , et cur sic currere mos est ,
Nuda ferant positâ corpora veste , rogas ?
Ipse deus velox discurrere gaudet in altis
Montibus , et subitas concitat ille feras.
Ipse deus nudus nudos jubet ire ministres ,
Nec satis ad cursum commoda vestis erat.
DE HAINACT. LIVRE II. l4l
dit dans le livre premier, et suivant le témoignage
d'Ovide dans son livre ii des Fastes , où nous lisons :
« Le troisième jour après les ides , c'est-à-dire le troi-
sième jour après les ides de février.... »
VERS (1).
Au troisième jour après les ides, l'aurore éclaire
les courses des luperques nus , et la fête de Faune , au
front orné d'une double corne. Muses , apprenez-moi
l'origine de ces solennités ; dites de quelle contrée elles
ont passé dans le Latium. On raconte que les antiques
Arcadiens honoraient d'un culte particulier, Pan, le
dieu des troupeaux ; sur la plupart des montagnes s'é-
levaient des temples en son honneur Pan était la
divinité tutélaire des troupeaux ; Pan était le dieu des
eaux ; il recevait l'hommage des bergers , pour la con-
servation des brebis;... c'est pourquoi nous suivons le
culte de Pan , et les cérémonies transmises par les
Pélasges. Dans l'ancien rit , ces sacrifices avaient leur
flamine diale. Mais pourquoi voit-on courir de toutes
parts les luperques , et d'où vient l'usage qu'ils ob-
servent de courir nus et dégagés de tout vêtement?
C'est que le dieu se plait à courir lui-même d'un pas
rapide sur le sommet des montagnes , et à semer une
terreur subite parmi les animaux. Toujours nu , il veut
que ses ministres soient nus ; d'ailleurs les vêtemens
sont peu propres à la course.
(i) Nous empruntons la traduction de Bayeux.
ll^2 ANNALES
CAPITULUM XXXVIII.
Quod ServiuR, rex Romanornra , ilestruxit primo civitatem Hosfi-
licnscm , f{ua' niinc diciltir Tornaoïis.
Igitur cùm unâ dicrum acics régis Servii intenta
foret fabricationi suae civitatis , et fessi de noctc quasi
seciiri quicscerent, ecce subito à civitate fani Mer-
curii ab unâ parte , à civitate Hostili ab aba parte , à
Portu-Bcigorum à parte tertia , ferociter insultantur;
qui magnam cœdem in Romanos et in gentem Servii
exercuerunt. Gonsimiliter eâdem noctc , Belgi ctiàm
acies Cambri exterruôrc vebementer. Quod advcr-
tentes , decreverunt suos coadunare populos et deindè
primario simul invadere Hostilem civitatem , ut ,
illa captivata , facibiis cîcteras obtinerent. Tune
monte Pan priùs prœnumito , omnes ad régis Servii
Sartum confluxerunt. Sic autem suas ordinaverunt
acies , ut Camber cum abquibus Hunnis et Pannoniis
in suo Castro , cjuod perpriîis construxerat , à parte
orientis respectu dictœ civitatis, super Albam, collo-
caretur ; ut , si nécessitas afforet , ad fanum Pan con-
tuendum quàm citiîis pararentur. A parte vero occi-
dentis dictœ civitatis, respiciendo Hostilem civitatem,
nullum instituit, quia liabebatur ripariola ïluncinclla
DE IIAINAIT. LIVRE II. l43
CHAPITRE XXXVIII.
Que Serviiis, roi des Romains, de'tniisit pour la première fois la
■ville d'Hostile, qui porte aujourd'hui le nom de Tournai.
Une nuit que l'armée du roi Servius , occupée à bâtir
la nouvelle ville de Servie , se reposait avec sécurité
après ses travaux, elle fut attaquée vigoureusement,
de trois côtés différens , par les garnisons de Faniim
Mercurii, d'Hostile et de Porte-Belge, qui firent un
grand carnage des Romains et de la nation de Servius ;
tandis que , dans le même tems , les Belges jetaient la
terreur parmi les troupes de Camber. Les chefs enne-
mis prirent alors la résolution de réunir leurs forces
et d'attaquer d'abord la cité d'Hostile , dont la prise
leur faciliterait la conquête de toutes les autres villes.
Ils fortifièrent alors la montagne de Pan , et se rendi-
rent ensuite avec leurs armées au Sart du roi Servius ( 1 ).
Voici comment ils ordonnèrent leurs troupes : Camber
fut placé avec un corps de Huns et de Pannoniens dans
le fort qu'il avait bâti long-tems auparavant sur l'Aube ,
à l'orient de la ville d'Hostile , pour être à portée , s'il
en était besoin , de voler à la défense du temple de
Pan. Aucunes troupes ne furent placées à l'occident de
la même ville, parce qu'il se trouvait de ce côté une pe-
(i) Chiévre.
1 44 ANNALES
à Ilunnis sic denominata, cum canali magno et lato,
quocl quidem canalc , usquè ad moderna tempora ,
dicitur gallicè Canal de la Cité^ id est, civitatis , quia
usquè ad locum illum protendebatur. Civitas ab illâ
parte satis fortis vidcbatur. A parte verô septentrio-
nal! dictae civitatis , in concursu ripariarum Albae
et Tenoris , contra illos de portu Belgorum posuerunt
Antenorides. Undc ab illâ gente locus ille usquè in
hodicrnum dicm dicitur Anth , et riparia Ténor à
dictis Antlienoribus, A parte vero meridiei respectu
dictae civitatis , contra civitatem Mercurii atque Bel-
gorum aut Hostilis , quia locus ille erat debilior et
adversariis magis expositus , posuerunt primo popu-
lum quem à Tungris adduxerunt; dcindè superiùs,
in alio loco, competenter posuerunt Hunnos, à quibus
ripariola, quse illùc prseterfluit, dicta est Huncinella.
Deindè constituerunt Agrippinos in loco qui nunc di-
citur Grisagion ; posteà collocavcrunt Caprimontenscs
consequenter, et deindc Vandalos in loco ab cisdem
Wandegnies , usquè nunc appellato ; et finaliter po-
suerunt advenas gentes à rétro , in loco extra acies ,
qui ab eisdem Herimansum, usquè in hodiernum
diem , appellatur. Hi omnes circà civitatem régis
Servii sua oppida construentes , et in eisdem suas
sarcinas collocantes , ad Hostilcm civitatem propin-
quiùs obsidendam properantcs , immaniter eam inva-
serunt. Sed ferociter se dcfendens , tandem eani cum
turribus , mûris et portis solo coaequavcrunt, liostilio-
nibus siquidcm interfectis , et per ncmora ut pluri-
mùm diffugatis. Servius rex cum Hunnis ad portum
DE II AI?, AL T. LIVRE II. l45
tite rivière , nommée HuiK'iiielle par les Huns , et un
canal larg;e et profond , qui , jusqu'à ce jour , a porté,
en français, le nom de canal de la Cité, parce que Hos-
tile s'étendait jusqu'à ce canal. Ce côté paraissait trop
fortifié à l'ennemi pour qu'il osât l'attaquer. Mais les
Anténorides prirent position au nord de la ville d'Hos-
tile, au confluent des rivières d'Aube et deDenre,pour
attaquer Porte -Belge. C'est de ce peuple que l'en-
droit a pris le nom d'Ath , qu'il porte encore aujour-
d'hui , et que la rivière a été appelée le Ténor ( la
Denre ). On plaça au midi d'Hostile , vis-à-vis des villes
de Mercure, de Belgis et d'Hostile, et dans un lieu
qui paraissait faible et exposé à l'attaque , les troupes
venues de Tongres, et un peu plus haut , dans un autre
endroit, les Huns, qui donnèrent leur nom à la rivière
qui y passe , et qui s'appelle l'Huncinelle. Ensuite les
Agrippiniens se formèrent en bataille dans un lieu
nommé depuis Grisagion ; les Chevremontains furent
rangés derrière eux; et enfin, les Vandales prirent
position dans un endroit auquel ils donnèrent le nom
de Vandegnies (Bandcgnics ) , (pi'il conserve encore
aujourd'hui. Enfin , les troupes auxiliaires prirent po-
sition à quelque distance des autres troupes , dans un
lieu qui fut nommé par elles Hérimansum , ainsi qu'on
l'appelle encore à présent. Toutes ces armées bâtirent
des forts autour de la ville du roi Servius , et , y ayant
laissé leurs bagages , elles firent les approches de la
ville d'Hostile, qu'elles assiégèrent et attaquèrent avec
vigueur. La résistance fut opiniâtre; cependant, à !a
fin , elles rasèrent les tours, les murailles et les portes
de la place ; les habitans furent passés au fil de l'épée ,
ou obligés de s'enfuir dans les bois. Le roi Servius ,
avant marché avec les Huns contre Porte-Belge, rea-
II. 10
]^6 ANNALES
Belgorum accédons , Albanorum , Britonuni , Bel-
gorum et extraneorum magnam rcperientes multltu-
dinem, conflixerunt ad invicem, neutrà parte, die pri-
ma , succumbeiite ; tandem Hunni Albanos illos atque
Britones cum Fani-Mercurialibus , et usquè ad Occa-
num omnes subjecerunt , gladio , famé atque peste.
CAPITULUM XXXIX.
De fundalione Chievrani , et Advcnnis , et obsidione civitatis
Tîclgeiisis.
SuBJECTis igitur nationibus , à paludibus huynifi-
cis et a flumine Scaldi usque ad Oceanum , munitis-
que fani Pan saccrdolibus et ministris, juxtà idoli
ritum, nec non et in civitate régis Servii duce, vcna-
toribus ac centurionibus, decurionibus mibtibusque
super populum institutis , qui toti patriœ à dictis pa-
ludibus , Scaldo et Oceano , ab una parte , et ab aliâ
usque ad silvarum profunditatem , participando cum
Rhetiis et Condrone, prœessent, decrcvcrunt civita-
tem belgensem obsidere. Scd de forma obsidionis
ignorantes, quia ipsam reformidabant, tùm propter
Fani-Martis atque Fani-Solis , tùm propter civitatis
magnificam resistontiam , tùm otiàm quia advcntum
DE IIAINAUT. LIVRE II. l/^J
contra une foule innombrable d'xUbaniens , de Bre-
tons, de Belges et d'étrangers : il leur livra bataille :
mais la victoire resta indécise le premier jour; enfin,
les Huns soumirent parle fer, par la faim et par la mala-
die , les Albaniens et les Bretons , ainsi que ceux de
Fanum Mcrcurii , jusqu'à l'Océan.
CHAPITRE XXXIX.
De la fondation de Quiëvrain et d'Avesnes; et du siège de la ville
de Belgis.
Les Huns ayant soumis tout le pays , depuis la Haine
et l'Escaut jusqu'à l'Océan , instituèrent des prêtres et
des ministces dans le temple de Pan , pour le culte
de cette idole ; et nommèrent dans la ville du roi
Servius , un duc , des chasseurs , des centurions , des
décurions et des chevaliers, pour commander au peuple,
et gouverner toute la province, depuis la Haine, l'Es-
caut et l'Océan , jusqu'au fond des bois , y compris les
Rhétiens et Condron; puis ils résolurent de faire le
siège de Belgis, Mais ils ne savaient comment s'y pren-
dre , tant parce que les habitans de Famars et de So-
lème leur donnaient de l'inquiétude , que parce qu'ils
redoutaient une vigoureuse résistance de la part
de la ville , et qu'ils craignaient l'arrivée des Gau-
lois. Après avoir longtems délibéré sur ce sujel , ils
1 48 Annales
Gallorum timebant. Idcirco diutiîis concilia célébran-
tes , finaliter dccrcvcriint à rcmotis castra, pro refu-
giis et conservationibus sai cinarum, fortia construere,
et ab eisdcm dictain civitateni sœpiîis invadere , ut sic
excitata et attaediata viribus dcbibtctur. Quod et fac-
tum est. Undè et très elegerunt plateas in qiiibus
omnes insimul , successive tamen, fundaverunt ci vi-
tales aut oppida, juxtà vicos Brunehuldis régis. Prima
fuit à rege Servio eîecta, prope suam praedictam civi-
tateni, ultra tamen dictas paludes , suprà fluviolum
qui, usque moderna tempora à dictis Hunnis , dictus
est Hunellus ( i ) ; et oppidum à rege Servio dictum est
oppidum Servii , scd vulgarlter dicitur Seivrain (2).
Ab illo siquidem oppido duas simul obsidebat ci vi-
tales, Fanum Martis videlicet et civilatcm Belgenscm.
Secunda platea elccta ad dictam civitalem obsid(>n-
dam , nunc appellatur Advennis , ab advenis genlibus
ibidem coUocatis, sub Hepprone, duce genlis advcnae,
à quo rlpariola illius lerrilorii , usque ad moderna
tempora, Heppra (3) nuncupatur, proiit narrai bis^
toria.
(1) C'est une petite rivière qui se jette dans le Honeau , ou c'est
peut-être le Honeau nicrnc qui se décharp.e dans la Haine, près
de Conde.
(2) Quie'vrain.
(3) L'Hèpre passe à Avèncs et se jette dans la Sambre.
• DE IIAINAUT. LIVRK II. 1.j9
prirent le parti de construire des forts écartés , pour
garder les bagages , et servir de refuge en cas de né-
cessité , et de diriger de ces forteresses des attaques
vives et fréquentes contre Belgis , afin de fatiguer et
affaiblir la garnison qui la défendait. Ce plan fut mis
aussitôt à exécution ; on choisit trois endroits le long
des routes du roi Brunéhulde , pour y bâtir des villes
et des places fortes. Le premier endroit fut choisi par
le roi Servius , près de sa ville , mais de l'autre côté
des marais de la Haine , sur une petite rivière qui porte
encore aujourd'hui le nom de Hunel , qui lui fut donné
par les Huns ; la nouvelle ville fut nommée par le roi
la ville de Servius , mais on l'appelle vulgairement
Servrain. De cette dernière on fesait en même tems
le siège des deux places de Famars et de Belgis. La
seconde position choisie pour faire le siège de Belgis ,
porte aujourd'hui le nom d'Avesnes , qu'elle doit aux
étrangers qui y furent placés sous la conduite de Hep-
pron leur chef, qui donna , ainsi que le dit l'histoire,
son nom à la rivière d'Hèpre , qu'elle porte encore à.
présent.
1 50 ANNALES
CAPITULUM XL.
De fimdationt' civilatis Cameracensis.
Tertïa vero platea à Cambro et residuo populi
clecta , nunc appellatur civitas Cambri , à clicto diico
Ilunnorum. Utrùm autcm fuorit civitas Cambcraceu-
sis, aut fiierit oppidum Camberacesii historia non
déterminât. Verùm quia in eâdem habetur historia
quod, stante obsidione civilatis Belgensis, rex Servius
oppidum construxit , sccùs civitatem Cambri , pro
solatio, quod noniine suo Servium appcllavit; autu-
mant plures quod locus ubi nunc castrum quod dicitur
de Seeles (i), juxtà Camberacum fucrit locus oppidi
dicti i*egis, transmutatis aliqualiter propter autiqui-
tatem nominibus, ex quo concludunt quod civitas
quam dictus Camber fundavit, fuit iila civitas quae
nunc Camberacensis appellatur. In oppositum argui-
tur ex eâdem historia , ubi habetur quod riparia
prœterduens secùs civitatem Cambri, usquè ad mo-
derna tempora dicta est Cambra aut Sambra , propter
variationem et sonationem litterarum , c mutata in s.
Sed manifestum est quod lluvius fluens secùs civita-
(i) Ce chûtcaii n'existe plus , ou a change de nom.
DE IIAINAUT. LIVRE II. 131
CHAPITRE XL.
De la fondation de la yille de Cambrai.
La troisième position, occupée par Camber et le
restant des troupes , porte maintenant le nom de cite
de Camber , qu'elle a emprunté à ce chef des Huns.
Mais l'histoire ne détermine pas si cette ville est celle
de Cambrai , ou si c'est la forteresse de Cateau-Cam-
brésis. Cependant, comme la même histoire rapporte
que, pendant la durée du siège de Belgis, le roi Ser-
vius fit bâtir, pour se consoler de sa longueur, une
ville près de celle de Camber , et qu'il l'appela , de sou
nom , Servie ; plusieurs personnes pensent que l'em-
placement de cette ville est le même que celui du châ-
teau qu'on appelle aujourd'hui château de Seeles , et
qui se trouve près de Cambrai , (les noms ayant été un
peu altérés par la suite des siècles ); d'où elles concluent
que la ville qui fut fondée par Camber est la même que
celle qui porte aujourd'hui le nom de Cambrai. On
oppose à cette opinion ce passage de la même histoire ,
où l'on voit que la rivière qui passe près la ville de
Camber, a toujours été, jusqu'à présent, appelée la
Cambre ou la Sambre , en changeant le c en ^. Or , il
est manifeste que le fleuve qui coule pi'ès de Cambrai
n'est pas la Sambre, mais l'Escaut; tandis que la ri-
l52 ANNALl-S
tehi Cunioraceiisoni non tlicitiir Sanibia, itno Scadus
aiit Scalda. Aqua vcro currens secùs oppitlum Canic-
raccsii videtiir vcrisimiliîis nuncupari Sambra, qaia
versus partes illas , vel benè propè riparia Cambrae
videtur sumere originem. Posset bîc dici quod ambas
fundavit civitates , licet , in bistoriis Eritonum Icgc-
rim, Cambrum , regem Brltanniœ, in Galliiscivilatem
fundàsse , et ab ejus nomine proprio Cambram de-
nominatam fuisse. Sed quidqviid fuerit veritatis à
parte rei dctenninationcm lectoribus der(;lin(juo. Ab
illo siquidem loco très simul obsidebant civitates Fa-
num-Solis , Fanuni-Martis \idelicet et Belgim. Multis
interpositis , quœ longa forent enarrare , post multa
bella , post insultus graves, et borrendis occisionibus
ex utrâquc parte perpetratis , tandem Hunni dictas
civitates post xv mensem obsidionis earum hostiHter
subjecerunt, et novum regem, in civitate Belgensi ,
(îambrum videlieetquondàm ducem Hunnorum insti-
tuentes , qui postmodùm uxores de sanguine regio
ritum et vitam Belgorum suscipiens , Belgos potenter
edomavit. Rex autem Servius videns popukun velle
cumClambro remanere, dolens nimiùm cumliepprone,
duceadvenarum gentium, et cum Vermendione,ducc
Pannoniorum , qui nondùni terras adopta verant , fœ-
dus inire proponens, ad finem ut Cambrum invuderet,
eo quod populum (juem eollegerat usibus suis appli-
cabat. Hoc perpendens Camber, eonsidei'ans sibi pe-
riculum imminere, obtuHt régi Servio clx miUia
Belgorum , qui Romam secum accédèrent ad eani
edomandam , et plaeatus est rex. Tune ( '.amber edic-
DE HAINAUT. LIVllE II. l55
■vièrc qui passe près de Cateau-(]anibrésis , s'entend
vraisemblablement de la Sambre , parce que cette der-
nière semble prendre sa source dans le pays de Cateau-
Cambrésis, ou du moins très-près de cet endroit. On
pourrait dire ici que Camber fonda les deux villes dont
il est question , quoique nous lisions dans l'histoire
des Bretons , que Camber , roi de la Bretagne , bâtit
dans les Gaules une ville à laquelle il donna son nom ,
c'est-à-dire celui de Cambre. Quoi qu'il en soit, je laisse
celte question à résoudre à mes lecteurs. Qu'il nous
suffise de dire que , de la ville nouvellement fondée ,
l'ennemi fesait à-la-fois le siège des trois villes , de
Solème , de Famars et de Belgis. Je passe beaucoup de
choses qui nous entraîneraient dans de trop longs dé-
tails, et je rapporte simplement, qu'après de fréquens
combats, de violens assauts et de grandes pertes essuyées
par les deux partis , les Huns s'emparèrent enfin , après
quinze mois de siège , des trois places ci-dessus dési-
gnées , et qu'ils choisirent pour roi , dans la ville
de Belgis, Camber, autrefois duc des Huns, qui
prit pour épouses des femmes du sang royal , et qui ,
après avoir adopté le culte et la vie des Belges , les
soumit entièrement à son autorité. Le roi Servius,
voyant que l'armée voulait rester avec Camber , en
ressentit beaucoup de chagrin , et résolut de faire
alliance avec Heppron , duc des étrangers , et Vermen-
dion , duc des Pannoniens , qui n'avaient pas encore
fait choix d'un pays pour y habiter, afin d'attaquer
Camber , qui voulait employer à son service l'armée
qu'il avait levée. Celui-ci en ayant eu connaissance , et
ayant considéré le danger qui le menaçait, offrit au
roi Servius cent soixante mille Belges, pour marcher
sur Rome et la réduire. Le roi accepta cette proposi-
1 54 ANNALES
tum condidit générale , ut omnes viri , non solîim
civltatis Belgcnsis, sed etiàm clvitatum Fani-Solis ,
Fani-Mercurli atque Portûs-Bclgorum, à viginti quin-
qiie annis usquè ad quadraginta , sub pœnâ capitis ,
rcgnura Belgorum abhinc usquè ad decem annos
exirent , et alienam sibi conquirerent patriam. Et hoc
eglt ut in regno quictiùs ac tutlùs reinaneret. Pacifi-
cato Servio , et populo innumerablll aggrcgato, unà
cum Hepprone, duce advenarum , versîis Romam
viam arripientes , regnum Belgorum debilitatum at-
que desolatum valdè rclinquerunt. C.ainber cum Ver-
mendione fœdera iniens , quia cum illis indomitis
Belgensibus progredi renuens , sibi territorium assi-
gnans trans ripariam Sommae , in quo civitatem
grandem œdificans, nomine proprio Vermendiam (i)
appellandam decrevit. A ripariâ igltur Sommne et
Vermendionis civitate , usquè ad Mosam et Oceanum
et Rhenum , terra gcneraliter ab iilis Hunnis et Panno-
niis et Romanis paucis fuit occupata , et ab cisdem
Huinia generaliter, et particulariter à deo Pan Panno-
nia , et Propantia extitit per magna tempora vocitata.
Sed postmodiim à diversis diversimodè partialitor
inhabitata, alias denominationes suscipiens , solus an-
gulus Ilannoniœ antiquam conservavit denominatio-
nem , et pro causis inferiùs, Deo duce, assignandis,
&ic rcmansit vocitata.
(i) Saint-Quentin
DE HAINAUT. I IVRE II. 1 55
tion , et fut apaisé. Alors Camber publia un édit général
pour ordonner à tous les hommes , non-seulemeut de
Belgis , mais encore des villes de Solème , deFamars et
de Porte-Belge , qui seraient âgés de vingt-cinq à qua-
rante ans, de sortir, sous peine de mort, du rovaume
des Belges pendant dix années , et de se conquérir une
autre patrie. Il se conduisit ainsi afin de rester plus
tranquille et plus assuré dans ses États. Servius , satis-
fait de Camber, assembla une armée innombrable, et
marcha sur Rome avec Heppron , duc des troupes
étrangères, en laissant le royaume des Belges dans l'é-
puisement et la désolation. Camber fit alliance avec
Yermendion , qui avait refusé d'accompagner les re-
doutables Belges à leur départ , et lui assigna un
territoire au-delà de la Somme , où celui-ci bâtit une
grande ville qu'il appela de son propre nom Ver-
mende. De cette rivière , et de la ville de Vermendion
jusqu'à la Meuse , à l'Océan et au Rhin , le pays fut en
grande partie occupé par les Huns , les Pannoniens et
quelques Romains. Il reçut de ces premiers le nom
général de Huinie ; il prit du dieu Pan le nom parti-
culier de Pannonie , et fut aussi pendant long-tems ap-
pelé Propancie. Mais, plus tard , il prit des divers peu-
ples qui l'habitèrent différentes dénominations ; le seul
canton de Hainaut conserva son ancien nom , et resta
ainsi appelé par des raisons que j'exposerai dans la
suite , avec l'aide de Dieu.
i56
ANNALES
CAPITULUM XLI.
De morte Servii , régis Romanorum.
DcM igitur dicta agerentur, Tarquinius Burbentius
sive Superbus, quod idem est, rempublicam Roma-
norum manu ducens , contra Servium regem populum
fortii^is informabat , et cùm tandem civitatem roma-
nam cum populo innumerabili intrare deerevisset,
post longam obsidionem proditoriè cum paucis est
susceptus, qui stat\m à dicto Tarquinio interimitur;
ncc cum lamentis ejus exscquice celebratae sunt, rc-
galium more, eo quod primitùs tributa super populum
instituerat. Inde Tarquinius in regem eligitur, qui
fœdera cum exteris iniens , à civitate sunt susccpti.
Post hœc, Cambcr timens populi in civitate Belgensi
seditionem , in civitate quam extruxerat secedens , in
eâdem quœ ad regni sui gubernaculum cxigebantur,
cxcrcuit. Tandem mortuus , regnavit in civitate Bel-
gensi Melbrandiis, filius ejus, pro eo. Ex Hislonâ
Tornacansi. Olympiadis lviii aiuio primo (ij,mortuo
Servio rege , qui primitùs civitatem Tornacensem de-
struxit, aller Tarquinius susccpit imperium. Cujus
(i) An 547 av. J.-C, -iiivaut EiisèJx' , ou l'an 1 <lc Tolimpiade 58.
DE IIAINALT. LIVRE II. 1 57
CHAPITRE XLI.
De la mort de Servius , roi des Romains.
Pendant ce tems-là , TarquIn-l'Orgueilleux ou le
Superbe (car ces deux mois signifient la même chose),
tenant en main les renés du gouvernement , excitait le
peuple contre le roi Servius. Celui-ci ayant formé le
dessein d'entrer dans Rome avec une armée nombreuse,
fut introduit par trahison dans la ville avec un petit
nombre des siens , et fut aussitôt mis à mort par Tar-
quin. Ses funérailles ne furent pas célébrées au milieu
des lamentations qui accompagnaient ordinairement
les obsèques des rois, parce qu'il fut le premier qui
établit des impôts sur le peuple. Tarquin fut nommé
roi à sa place, et fit alliance avec les étrangers, que
l'on reçut alors dans la ville. Après ces ëvénemens,
Camber, craignant la révolte des habitans de Belgis ,
se retira dans la ville qu'il avait bâtie , et en fit le siège
de son gouvernement. Après sa mort, Melbrand son
fils régna sur Belgis. Extrait de l'histoire de Tournai.
En l'an premier de l'olimpiade lvhi , le roi Servius , qui
avait détruit le premier la ville de Tournai , étant venu
à mourir , un second Tarquin gouverna l'empire à sa
place. Sous son règne la ville de Tournai fut recon-
struite et réparée, les citoyens y furent rappelés et ré-
1 58 ANNALES
tcmporibus rcaedificata et rcparata est civitas , et
rccollocti cives et in pristinum (lominiuni rcstituti,
cunctaque prospéra , et quasi ex sententiâ , huic
civitati bona succrescebant.
GAPITULUM XLII.
De Scdecluil , regc Juda , et de destnictione civitali? Jcnisalcm.
ACTOR.
Ad tempora nostra contiiiuenda , stylum converta-
mus ; iiàm , proùt superiiis est actum , dictas Servius
rex regnavit in Romà, tempore Sedechiœ, régis Judœ,
cujus historiam ad tempora continuanda conscribere
proponimus. Circà olympiadcm (i), Sedecbias in
Judaeâ regnabat. Cœpit autcm anno quartœ aetatis
CDLxxiv, nmndi vero iiimccclxii (2), et regnavit
annis xi. Sub quo propbetaverunt Jercmias et Barucli.
Justinus , lihro xlii (3). Temporibus Tarquiuii , ex
(1) Les deux manuscrits offrent ici une lacune , et ne donnent
ni l'un ni l'autre le nombre de l'olimpiade, ni l'année, de cette
olimpiade. Ces deux nombres se trouvent dans la vieille traduction
française , et je les rapporte tels qu'elle les donne. Cependant, selon
Eusèbe, Se'décias monta sur le trône l'an fioi avant notre ère, l'an
4 de la W olimpiade , et Unit de régner l'an x de la 4;'' olimpiade ,
591 avant notre ère.
(2) L'an 600 av. J.-(L , suivant Fusèbc.
(3) C'est au livre xliij , chap 3.
DE IIAINAUT. LIVRE II. 1 $9
tablis dans leur ancienne domination. Alors tous les
genres de prospérité affluèrent à la fois à Tournai , et
elle devint aussi florissante qu'il était possible.
CHAPITRE XLII.
De Sedecias , roi de Juda , et de la desfruction de la ville de
Jérusalem .
L AUTEUR.
Mais continuons notre chronique. Le roi Servius
régna à Rome du tems de Sédécias roi de Juda , dont
nous allons rapporter l'histoire en suivant l'ordre des
tems. Sédécias régnait sur Juda en l'an premier de la
cinquante-huitième olimpiade. 11 commença son règne
en l'an 474 du quatrième âge , et du monde 3362 , et
occupa le trône pendant onze années. Sous son règne
parurent les prophètes Jérémie et Baruch. Justin ,
livre XLII. Aux tems de Tarquin , une troupe déjeunes
Phocéens partis d'Asie abordèrent à l'embouchure du
Tibre, et firent alliance avec les Romains. De là , conti-
nuant leur route sur leurs Vaisseaux , ils s'avancèrent
jusqu'à l'extrémité de la mer des Gaules, où ils bâti-
rent la ville de Marseille entre les Liguriens et des
nations barbares... Marseille fut donc fondée près des
bouches du Rhône, au fond d'un golfe, et comme dans
un recoin de mer. . . Ce fut de ces Phocéens que les Gau-
iGo ANNALES
Asia PhooœenfiiMii juvonUis, ostio Tibcris inveola ,
amicitiam cum riomanis junxit : intlè in ullimos Gal-
liae sinus navibus profccta, Massiliam intcr Liguros
et feras gentes Gallorum conclidit.... Condita estigltur
Massilia propè ostia llliodani, in remoto slnu , velut
in angiilo maris.... Ab liis Galli usum vitnc cultioris ,
etagrorum cultiis , et urbes mœnibus cingore didisce-
runt, mansucfactd (i) quoque barbariâ Icgibiis, non
armis vivere, et vitcm poncrc et olivam inscrere.
Anno quinto Sedochiîc (2), exorsus est Ezecbiel pro-
phetare in Bal)ylonc ad captivos, postquàm aceepc-
rant epistolam Jeremi.T. Hie in Babylonem ductus est
cum Joaclîim et matre ejus , cum Daniele et tribus
pueris , et habitabat juxtà fluvium Cliobar (3j. In
piincipio aulem anni noni (4j Scdecliia3 , INabucbo-
donosor Jérusalem obsedit, quia superbus et infidus
tributumei promissumnegavit. TuncrcxiEgypti cum
cxercitu, quasi soliturus obsidionem venit; et Nabu-
cliodonosor à Jérusalem in occursum ejus recedens,
eum fugavit ac de Syria exire compulit. Tune falsi
prophetae nunciabant Sedccliiœ prospéra, scilicct falsa,
Jeremias autem his contraria et vera. Qui egredieiis
ad vicum suum Anathot, tanquàm fugeret ad liostes
captus estetincarceratus. Anno nono Sedecbiœ, mense
decimo , rediit Nabuchodonosor et Nabusardan cum
(i) Dans l'cdition de Doux-Pnnts, J784, celte phrase niansucfticfa
qiioqiie barbarie est placée après ces mots, usum vilœ cultioris.
(2) L'an 5(/) av. J.-C
(3) Le fleuve (^hol)ar est prcsmné avoir ete tmr hranrlic »le TFn-
phrate. Dom Calmet croit ((uc c'est le lleuvc Cliaboras.
(4) L'an 592.
DE HAI.NAUT. LIVRE II. l6l
lois apprirent un genre de vie plus doux , et qu'ils surent
cultiver leurs champs , entourer leurs villes de mu-
railles; se dépouiller de leur barbarie pour vivre par les
lois et non par les armes; ils se rendirent aussi habiles
à tailler la vigne et à planter l'olivier. » En l'an 5 de
Sédécias , Ezéchiel commence à prophétiser au milieu
des captifs de Babilone lorsque ceux-ci eurent reçu
une lettre de Jérémie. Il avait été emmené à Babilone
avec Joachim et la mère de celui-ci , avec Daniel et les
trois autres enfans du sang royal , et habitait sur les
bords du fleuve Chobar. Au commencement de la neu-
vième année de Sédécias , Nabuchodonosor assiégea Jé-
rusalem , parce que Sédécias , orgueilleux et parjure ,
lui avait refusé le tribut qu'il lui avait promis. Alors
le roi d'Egipte s'avança avec une armée , pour faire le-
ver le siège de la ville ; mais Nabuchodonosor quittant
les murs de Jérusalem, et marchant à sa rencontre, le
met en fuite et le force à sortir de la Si rie. En ce tems-
là les faux prophètes annonçaient à Sédécias des choses
heureuses mais fausses , tandis que Jérémie- en annon-
çait de toutes contraires et qui étaient vraies. Ce pro-
phète en se retirant à ^^lathot , sa patrie , fut arrêté et
mis aux fers comme s'il eût voulu passer aux ennemis.
En la neuvième année de Sédécias, au dixième mois ,
Nabuchodonosor et Nabuzardan revinrent avec leur
armée et mirent de nouveau le siège devant Jérusalem ,
qui resta bloquée pendant dix-huit mois. Sédécias ,
frappé de terreur , fît sortir Jérémie de prison , en-
lendit secrètement ses prophéties , et lui fît chaque
jour apporter des vivres. Mais ensuite Jérémie ayant
recommencé à prêcher en public , il le livra aux princes
et aux vieillards , qui le lui demandaient pour le faire
mourir. Ceux-ci le jetèrent dans la basse-fosse de Mel-
II. 1 1
\62 ANNALES
exercitu,etobseclit Jérusalem, et clausa est xviii mcn-
sibus. Territus quoque Sedechias Jcremiam de carcere
tulit, et prophetiœ secreto veritatem requirens, au-
divit, eique victualia quotidiè ministrare jussit. Sed
posteà dùm publiée praedicaret, principibus ac se-
nioribus eum ad mortem pctentibus, exposiiit; qui
eum in lacu Melcliiœ deposuerunt- et crat in luto
usquè ad guttur, quod ci erat omni morte amarius.
Sed extraxit eum Abdemelech iEthiops, vir eunuchus.
Tandem deficientibus in urbe victualibus , adeo ut
mulieres parvulos suos comcderent , in mensura pal-
mae capta est civitas, xi anno (i) Sedecliiœ, fugiens-
que comprehensus est, et in conspectu Nabuchodo-
nosor in Reblatâ judicatus , dicentis eum ab ipso
impcrii suscepti ingratum extitisse , et contra muni-
ficum bostilitcr agendo etiàm in Deum deerrasse. Et
addidit : « Magnus Deus habens odio tuam nequitiam
te mihi tradidit. » Itaque fdios ejus coràm eo occidit
et oculos ejus cffodit, vinctumque catenis in Babylo-
nem adduxit et Josedecb eum eo , et Saraiâ pontifi.ce,
pâtre ejus, occiso. Nabusardan verô princeps Coco-
rum, templum et civitatem incendit,acmurum totum
in circuitu ejus destruxit , captivos et vasa Domini
transtulit, Godoliam pauperibus et agricolis in terrd
relictis prœfecit ; Jeremiœ vero libertatem et munera
praebuit, Recbabitas abire permisit.
(i) An 591 suivant Euscbe , et .586 suivant l'Art de vérifier les
dates.
DE HAINAUT. LIVRE II. l63
chias ; et le prophète fut plongé clans la boue jusqu'au
cou , ce qui était pour lui un supplice plus insuppor-
table que la mort. Mais l'eunuque Abdémélech , qui
était d'Ethiopie, le tira de son bourbier. Enfin, les vivres
étant venus à manquer dans Jérusalem au point que
les femmes furent réduites à manger leurs enfans , la
ville fut emportée en un tour de main , la onzième an-
née de Sédécias. Ce prince fut pris , lorsqu'il cherchait
à fuir , et amené en jugement à Reblata , devant Nabu-
chodonosor , qui lui reprocha de s'être montré ingrat
envers lui , dont il tenait sa couronne , et d'avoir pé-
ché envers Dieu en agissant hostilement contre son
bienfaiteur. Puis Nabuchodonosor ajouta: «Le Sei-
gneur , qui déteste ta méchanceté à mon égard , t'a
livré entre mes mains. » Ensuite il fit mettre à mort ses
fds en présence de leur père , et , ayant fait crever les
ieux à celui-ci , il le fit conduire à Babilone chargé de
fers avec Josedec , dont le père , Saraias , souverain
pontife, fut mis à mort. Nabuzardan , général des Cal-
déens , mit le feu au temple et à la ville de Jérusalem ;
renversa toutes les murailles qui l'entouraient , et em-
mena les captifs et les vases du Seigneur, après avoir
établi Godolias pour gouverner les pauvres et les la-
boureurs qui furent laissés en Judée. Il mit Jérémie
en liberté , lui fit des présens , et lui permit de se re-
tirer chez les Réchabites.
1 64 ANNALES
CAPITULUM XLllL
De fine quartœ selatis et prophetiâ EzechicHs , et consolatione
transmigratorutn .
ACTOR.
Hic fuit exitus regai Judaeorum , in qiio regnatum
est annis quingentis et xiv et mensibus vi, secundùm
Josephum. In hâc ultimâ captivitatc Judœorum aetas
saeculi quarta terminatur habens annos cdlxxxv. Fue-
runt autem ab anno quarto Salomonis , in quo funda-
tum est templum , usquè ad ejus inccndium, anni
CDXLi ; ab ingressu terrœ promissionis dccclxxxii ;
à datione legis cmxxii; à nativitate Abrahae mcdxxvi;
ab initio vero seculi iiimccclxxiii. Comestor. Venit
autem ad Ezechielem quidam qui fugerat de Jérusa-
lem , dicens vastata est civitas in prœcedenti. Tamen
vespere prophetaverat Ezechiel de nuntio future. Et
audiens omnis transmigratio excidium urbis et incen-
dium templi , levaverunt vocem suam et dixerunt :
« Periit spes nostra , abscisi simius et non rosurgemus. »
Et exclamavit Ezecbiel : « Haec dicit Dominus : Cùm
sanctificatus fuero in vobis , tollam vos de gentibus , et
udducam in terram vostram , et effundam super vos
r>E HAINVUT. Llvr.E II. 1 6,"
CHAPITRE XLIII.
Fin da cjtiatritme âge^ prophétie d'Ezéchiel et consolation des
émisrés.
L AUTEUR.
Telle fut la fin du royaume des Juifs, qui avait duré
514 ans et 6 mois, d'après le calcul de Josèphe. C'est
à cette dernière captivité des Hébreux que finit le qua-
trième âge, qui renferme 485 années. On compte 441 ans
depuis la quatrième année de Salomcu, époque delà fon-
dation du temple , jusqu'à son incendie; 882 ans depuis
l'entrée des Juifs dans la terre promise; 922 ans depuis
que la loi leur fut donnée ; 1426 ans depuis la naissance
d'Abraham, et 3373 ans depuis le commencement du
monde. Comestor. Quelqu'un qui s'était enfui de Jéru-
salem accourut vers Ezéchiel pour lui annoncer que la
ville avait été détruite le jour précédent. Mais Ezéchiel
avait , dès le soir même de cette catastrophe , prophé-
tisé cette nouvelle. Toute l'émigration, en apprenant
la ruine de la ville et l'incendie du temple , éleva la
voix et s'écria : « Notre espoir a péri ; nous sommes
brisés, et nous ne nous relèverons pas. n ^Ezéchiel de
son côté s'écria : «Voici ce que dit le Seigneur : lorsque
j'aurai été sanctifié en vous^ je vous tirerai du milieu
l66 ANNALES
aquaiii nuiiidain , etc. » Et ("acta est super Joël pro-
phetaiu maims Domiiii , et etluxit eum , in spiritu, in
campum qui plenus erat ossibus siccis , vehementer et
ait : « Ossa arida , auflite verbum Domini. Hœc dicit
Dominas : Ecce dabo super vos nervos , et succrescere
faciam carnes et superextendam cutem, daboque vobis
spiritum et vivetis. » Ossa haec universa domus Israël
est. Praetereà , in consolationeni gentis suœ , prœdixit
propheta calamitatem circumstantium nationum, qu<€
juverant bostes contra Jérusalem , vel insultaverant
captivis; id est, fdiorum Amon et Moab et Edom ,
Pliilistini , Tyri et Sidonis , M^ypù et ^tbiopiae.
CAPITULUM XLIV.
De descensu rcliqiiiarum filioriim Israël in y^Ej^yptuni , et morte
Jeremiae.
Interea, contra consilium Jeremiae, descenderunt
roli([uiœ Juda, ducentes secum ipsum Jercmiam et
Barucb in iEgyptum; ethabitavcrunt ibi, et factus est
sermo Domini ad Jercmiam in Tbannis. « Sume lapi-
des grandes et abscondc cos in crypta quae est sub
muro latericio , in porta domûs Pbaraonis; et dices
DE HAINALT. L1V11£ II. 1 67
(les nations , et vous reconduirai dans votre patrie , et
je répandrai sur vous une eau pure, etc... » La main du
Seigneur saisit le prophète Joël et le conduisit , en es-
prit, dans un champ qui était couvert d'ossemens arides;
et Joël dit : « Ossemens arides , entendez la parole du
Seigneur. Yoici ce que dit le Seigneur : Je vous don-
nerai des nerfs et je vous couvrirai de chair , et j'éten-
drai une peau sur vous , et je vous donnerai l'existence
et vous vivrez. » Ces ossemens signifient toute la mai-
son d'Israël. Outre cela le prophète , pour consoler sa
nation, prédit le malheur des peuples voisins, qui
avaient aidé les ennemis contre Jérusalem , ou qui
avaient insulté aux captifs. Ces peuples étaient les fils
d'Amon , de Moab et d'Edon , les Philistins , les habi-
tans de Tir et de Sidon , les Égiptiens et les Éthiopiens.
CHAPITRE XLIV.
De la descente en Ègipte des restes des Gis d'Israël, et do la mort
de Jëre'mie.
Pendant ce tems-là , les restes de Juda partirent ,
contre l'avis de Jérémie , emmenant en Egipte avec
eux Jérémie et Baruch. Ils habitèrent ce pays ; et le
Seigneur parla ainsi à Jérémie dans Tanis : « Prends
tle grosses pierres et cache-les dans la cripte qui est
sous le mur de brique , à la porte de la maison de Pha-
l68 ANNALES
ad JikIcTos : Hœc (li(;it Doniinus : Ecce assumam ser-
vum meum Nabuchodonosor, et ponam thronum ejus
super lapides istos , et percutiet terram iEgypti , et
peribitls vos ciim /Egyptlis. » Et insurrexit populus
contra Jeremiam , et lapidaverimt eiira cum lapidibus
quos absconderat sub muro latericio. ^Egyptil vero
honoraveruut prophetam, sepelienles cum juxtà tu-
iTiulum regum, memores beneficiorum qua3 praestite-
l'at /Egyptiis; quia oratione sua fugaverat aspides et
bcstias aquaruin quas Grseci crocodillos vocaiit, qui-
bus priùs /Ëgyptus infestabatui-. Tradunt ctiàm quod
adhiic de pulvere ejusdem loci ubi jacuit sepultus ,
aspidum pcrcussura sauatur et fugantur crocodilli.
De eodem multa proloquitur Epiphanius , et inter
cœtera dicit : « Hic est Jcrcmias, qui rogibus iEgypti
signum dédit quod eorum idola everti opoi'teret, cùm
virgo parcret. Undè et sacerdotes eorum in secreto
tcmpli loco imaginem virginis et pueri statuentes
adorabant (i). Dùm vero Ptolemaeus rex interrogaret
eos quâ hœc ratione agerent , dixerunt paternœ tra-
ditionis esse mysterium quod à sancto prophetâ acce-
perant, majores et credebant in rébus ità esse ven-
turum. Scquitur : Hic est Jeremias , qui templum
evertendum prœnoscens , arcam testamenti cum his
quaî in eâ crant tulit , et precibus suis absorberi in
pclrà ; petram vero digito designans Dei nomen im-
(i) Ceci a rapport à ces peintures dc'couvertcs sur les murs inte'-
rietirs des temples egiptiens, où l'on voit une femme donnant nais-
sance à un enfant niïlle, Orus sans doute. L'explication imaginée
par saint Épiphane sur l'origine de ces ptintiircs , est plus conforme
à l'esprit de son siècle qu'à la vciitc.
DE HAINALT. LIVRE II. 1 69
raon ; et tu diras aux Juifs ; voici ce que dit le Seigneur :
Je prendrai mon serviteur Nabuchodonosor et je pla-
cerai son trône sur ces pierres , et il frappera la terre
d'Égipte et vous périrez avec les Egiptiens. » A ces
mots le peuple se souleva contre Jérémie, et le la-
pida avec les pierres que le prophète avait cachées sous
le mur de brique. Mais les Egiptiens lui rendirent de
grands honneurs , et l'enterrèrent près du tombeau des
rois , pour prix des bienfaits qu'ils en avaient reçus. En
effet , il avait chassé par ses prières les aspics et les ani-
maux aquatiques nommés par les Grecs crocodiles , qui
infestaient l'Égipte auparavant. On raconte de plus
que la poussière du lieu où il fut enterré , guérit encore
aujourd'hui les blessures des aspics et met en fuite les
crocodiles. Épiphane parle au long de ce saint prophète
et dit entre plusieurs choses : « Tel est Jérémie qui an-
nonça aux rois d'Égipte qu'ils devraient renverser leurs
idoles , lorsqu'une vierge mettrait au monde un en-
fant. C'est pour cela que leurs prêtres plaçaient et
adoraient dans l'endroit le plus secret de leur temple
l'image d'une vierge et d'un enfant. Ptolémée, roi
d'Egipte , leur ayant demandé pourquoi ils en agis-
saient ainsi , ils répondirent que c'était un mistère que
leurs ancêtres, qui l'avaient reçu du saint prophète ,
leur avaient transmis , et qu'ils croyaient que ce qui
leur avait été annoncé s'accomplirait. » Plus loin, saint
Epiphane ajoute : « Tel est Jérémie qui, connaissant
d'avance la ruine du temple , emporta l'arche d'al-
liance avec ce qu'elle renfermait , et obtint par ses
prières qu'elle fût enfouie dans une pierre; en ayant
soin d'imprimer avec son doigt le nom de Dieu sur
cette pierre , pour servir à la reconnaître.» Depuis elle
a été si bien cachée par une nuée , que jusqu'à présent
lyO ANNALES
pressit, qui iiubis impedimcnto ità celatiim est, ut ex
tune nec locuin quis cognoscere queat, née ipsum
nomen légère; et pristinae figurœ instar illic saepè
nubes fit ^ ut ignis, nocturno tempore; eo quod gloria
Dei ab ejus lege non desinat. Est autem petra illa in
eremi loco, inter duos montes, in quibus jacentMoyses
et Aaron. Dixitque Jeremias prœsentibus : « Domi-
nus ex Sion recessit ad cœlos, indè rursùs venturus
propriâ virtute; et erit signum préesentiae ejus quando
universœ gentes adoraverunt lignum. Dixitque quod
hanc arcam nisi Aaron nemo poterit producere , et
tabulas , quœ in eâ sunt , nullus aperiet sacerdotum ,
nullus proplietarum , nisi electus Dei Moyses ; et in
prima resurrectione rosurget. Hœe arca et exiblt de
petrâ et ponetur in montcm Sina, et omnes sancti
congregabuntur ad eam , regressum Dei sustinentcs. »
Hœc Epiplianius.
CAPITULUM XLV.
De exovdio quint* ictatis , et regibus Habyloninc.
Ab initio igitur captivitatis Judœorum , œtas quin-
ta(i) cxordium habult; quœ , scilicct captivitas, juxtà
(i) Le cinquicme .'îgc comiucacc, suivant le calcul irEusèhc ,
à l'an fi<)«i avant notre cie.
DE HAINALT. LIVRE II. I7I
personne n'a pu la retrouver , ni lire le nom qui y est
empreint. Souvent il se formq à l'endroit où l'arche se
trouve un nuage de même figure qu'elle, qui ressemble
à un feu au milieu de la nuit , afin que la gloire de
Dieu ne se retire pas de sa loi. Cette pierre se trouve
dans un endroit du désert entre deux montagnes , où
sont les sépultures de Moïse et d'Aaron. Jérémie dit à
ceux qui l'entouraient ; « Le Seigneur s'est retiré de
Sion pour monter aux cieux , d'où il reviendra par
sa propre vertu ; et sa veime sera proche lorsque vous
verrez toutes les nations adorer le bois. » Il dit aussi
que nul autre qu'Âaron ne pourrait déterrer l'arche ,
et que Moïse, l'élu de Dieu, pourrait seul , à l'exclusion
des prêtres et des prophètes , ouvrir les tables qu'elle
renferme. Cette arche reparaîtra à la première résur-
rection ; elle sortira de la pierre , elle sera placée sur le
mont Sinaï , et tous les saints seront rassemblés autour
d'elle , pour assister au retour de Dieu. » C'est ce que
rapporte Epiphane.
CHAPITRE XLV.
Du commencement du cinquième .loe, et des rois de Babilone;
Le cinquième âge date du commencement de la
captivité des Juifs , qui , suivant la prophétie de Jéré-
mie, dura soixante-dix ans, jusqu'à la seconde année
I ^9. ANiVALES
prophetlam Jeremiae , perseveravit lxx annis , usqiic
ad annum secundum Darii filii Hystaspis. Horum xxx
priml computantur, juxtà Eusebium, usquè ad regnum
Cyri. Comestor. Anno quinto eversionis Jérusalem,
descendit Nabiichodonosor in Syriani inferiorem et
obtiniiit eam; Moabitas quoque et Ammonitas subju-
gavit sibi , tandem intravit in iEgyptum , eamque
subvertit, et regem qui tune erat in eâ occidit; aliam-
que in eâ constituens, denuo Judœos in eâ captivos
duxit. Eusehiiis. Anno captivitatis nono (i) , mortuo
Nabuchodonosor, regc Babyloniae, suscepit imperiuni
Evilmerodach , oui successit frater ejus Baltazar. Co-
m.eslor. Mortuo magno Nabuchodonosor, qui de ma-
nibus hostium templum Bebs magnifiée decoravit,
civitatem reparans , ità ut nequaquàm valerent obsi-
dentes fluvium convertere , eo mortuo , régna vit pro
eo Evibnerodach, qui, xxxvii (2) anno transmigra-
tionis , suhlevavit caput Joacbim , régis Juda , de
carcere, quia pater ejus servaverat cum eo fœdus.
Tradunt quidam quod Evihnerodacli , frater minoris
Nabuchodonosor, in diebus ejectionis paternœ , multa
gessit impie in terra ; et pâtre restituto , accusatus
apud eum, missus est in carcercm , ubi erat Joachim,
iisquè ad mortem fratris sui. Ciimque regnare cœpis-
(i) L'Eiisèbe de Scaliger place la mort de Kabucliodonosor en
l'an xviii de la ruine du Temple ; dans les tables de l'e'dition des
Pienedictins , cet e'vënement est rapporte à l'an xi.v , et à Tan xx
dans la version arménienne. Il y a donc une faute de copiste dans
notre texte, et au lieu de l'an ix il faut lire Tau xix , rpii re'poud .
suivant Eusèbc, à Tan 571 av. J.-C.
'•/) L'an 553 av. J.-C.
DE HAINAUT. LIVRE II. 1^5
du règne de Darius , fils d'Histaspe. Les trente pre-
mières de ces soixante-dix années , vont , d'après le
calcul d'Eusèbe , jusqu'au règne de Cirus. Comestor.
En l'an 5 de la ruine de Jérusalem , Nabuchodonosor
descendit dans la Sirie inférieure et s'en empara ; il
subjugua aussi les JMoabites et les Ammonites , et entra
enfin en Egipte , dont il se rendit maître. Il fit mettre
à mort le roi qui régnait dans ce pays, et après y en
avoir établi un autre à la place de ce dernier, il y
emmena les Juifs captifs. Eusche. En l'an 9 de la cap-
tivité, Nabuchonosor , roi de Babilone , étant mort,
Evilmérodach obtint l'empire , qui échut ensuite à
Baltazar , son frère. Comestor. Après la mort de Na-
buchodonosor-le-Grand , qui décora magnifiquement
le temple de Bel avec les dépouilles des ennemis, et
qui répara si bien la ville , que l'armée qui en ferait le
siège ne gagnerait rien à détourner le fleuve ; après sa
mort, dis-je, Evilmérodach régna à sa place, et fit
sortir de prison, en la trente-septième année de la
captivité , Joachim , roi de Juda , parce que son père
avait été fidèle à l'alliance contractée avec lui. On
raconte qu'Évilmérodach , fils de >abuchodonosor-
le-Jeune , pendant les malheurs de son père , commit
beaucoup d'impiétés sur la terre ; ce qui fut cause , qu'a-
près le rétablissement de ce dernier , il fut accusé de-
vant lui, et conduit dans 'la prison où était enfermé
Joachim , et où il resta jusqu'à la mort de son frère.
Lorsqu'il fut appelé au trône , il donna la liberté à
Joachim , qu'il avait eu pour compagnon de sa capti-
vité; et craignant que son père qui, de l'état de bête
où il avait été réduit , avait repris la forme humaine ,
ne fût rappelé à la vie, il eut recours à Joachim. Par
le conseil de celui-ci il fit déterrer le corps de son
1 74 ANNALES
set, elevavit Joacliini , quem sociuiu liabucrat in car-
cerc ; timensquc ne resurgeret pater suus , qui de
bestiâ redimerat in hominem , consuluit Joacliim. Ad
CMJus consilium cadaver patris effossum divisit in tre-
centas partes, et dédit cas trecentis vulturibus ; et
ait ad eum Joachim : « Non rcsurget pater tuus , nisi
redeant vultures in unum. »
CAPITULUM XLVI.
De primari;! invcnlionc ludi scacorum.
ACTOR.
His temporibus , fuit ludus scacorum repertus à
Xerxe philosopbo. Undè dictus rex Evilmerodacb ,
qui corpus patris trecentis vulturibus condivisit , ne
ampbùs resurgeret, inter aba mala signa unum babe-
bat pessimum , quod correctores suos occidcbat ;
quemadmodiim legimus de Nerone , qui Senecam
magistrum suum occidit. Huic assimilatur pater suus
Nabucbodonosor, qui dùm somniâsset, et evigilans
non recordaretur somnii , voluit occiderc omnes sa-
pientes Babyloniœ, eo quod somnium régi non pote-
rant indicare, ut babetur Daniebs iv capitulo. Opi-
iiantur tanicn mulli bunc bidum inventum fuisse
DE IIAINALT. LIVRE II. 1^5
père , qu'il parlagea en trois cens morceaux , qu'il
donna à un pareil nombre de vautours. Alors Joa-
chim lui dit : « Votre père ne ressuscitera que
quand tous ces vautours ne formeront qu'un seul
oiseau. »
CHAPITRE XLVI.
De l'invention du jeu des e'chccs.
L AUTEUR,
Vers ce tems-là, le jeu des échecs fut inventé par
le philosophe Xerxès. Le roi Evilmérodach , dont nous
avons déjà parlé, et qui avait partagé entre trois cens
vautours le corps de son père pour l'empêcher de
ressusciter , avait entre autres habitudes détestables ,
celle de faire mourir ceux qui s'avisaient de le re-
prendre ; ainsi qu'on l'a écrit plus tard de Néron , qui
fit mettre à mort Sénèque , qui avait été son maître.
Evilmérodach ressemblait, sous ce rapport, à Nabu-
chodonosor , son père , qui , ayant eu un songe , et
l'ayant oublié à son réveil , voulait faire mourir tous
les sages de Babilone, parce qu'ils ne pouvaient pas
le lui expliquer. C'est ce qu'on lit dans le quatrième
\']6 ANNALES
tcmpore belli trojani; secl hoc non habet voritatem: nàm
à Chaklseis ad Graecos transivit, ut dicit grœcus Dio-
medes ( i ) , qui inter philosophes primo famam et inter
Gi'cTCOS accepit, et postmodiim Alexandri-Magni régis
temporibus , tàm yEgyptum quàm partes australes
orbis famâ occupavit. IIujus ludi (2) inventer extitit
philosophus quidam orientahs, nomine Xerxes, apud
Chaldaeos, vel Pliilometor, apud Graecos, quod idem
est apudLatinos , quod mensurae sive justitiœ amator.
Hujushominis fama apud Grœcos et apudAthenienses,
in tantum claruit, ut postmodiim multi probi philo-
sophi et scientiœ amatores hoc à progenitoribus suis
nomen acciperent. Tantae enim justitire extitit, ut
mori potiîis ehgeret , quàm simultatem sequens , in
dehciis regahbus , spretâ justitiâ , vitam detestabilem
finiret vel mortem fugaret. Nàra ciim philosophus ille
videret detestabilem vitam régis , et nemo eum cul-
pare auderet , propter ejus crudelitatem quam in
hominum sapientium necem ostendcrat , rogalu po-
(i) On ne connaît point de Diomèdes grec contemporain d'Alexan-
dre, et il y a ici une erreur de nomj vraisemblablement Jacques
de Guyse veut parler du pliilosophe De'mocrite, disciple de cjuel-
(lues mages ou philosophes caldeens. On a sous son nom plusieurs
ouvrages regardes aujourd'hui comme suppose's.
(2) L'invention du jeu des échecs ne remonte guère au-delà du
cinquième siècle de notre ère. Voy. la dissertation de Frèrct, Hist.
(le fAcad. des inscript., t. v, p. a5o. Xerxès, surnomme Philo-
me'tor, n'est pas plus connu que le Diomèdes dont il est question
dans la note précédente. Peut-être Jacques de Guyse a-t-il consulté
un ouvrage de Democrite qui parlait de ce Xerxt's d'après les Cal-
de'ens; ou plutôt ces récits sont firc's de ces nombreux romans du
moyen âge, que l'ignorance et le de'fautde critique fosaient prendre
pour de l'histoire.
DE IIAIXAUT. LIVRE II. l'J'J
chapitre de Daniel. Beaucoup d<? personnes pensent que
le jeu des échecs a été inventé dans le tems de la guerre
de Troie ; mais cette opinion est fausse ; car ce jeu passa
des Caldéens aux Grecs , ainsi que le rapporte le Grec
Démocrite,quijouissaitdelapremière réputation parmi
les philosophes et parmi les Grecs , et qui , plus tard ,
dans les tems d'Alexandre-le-Grand, remplit de son nom
TÉgipte et toutes les contrées méridionales de la terre.
L'inventeur du jeu des échecs fut un philosophe de
l'Orient , nommé Xerxès chez les Caldéens , et Philo-
métor chez les Grecs et chez les Latins , ce qui signifie
amateur de la mesure ou de la justice. Cet homme ob-
tint une si grande réputation chez les Grecs, et prin-
cipalement chez les Athéniens , que dans la suite un
grand nombre d'illustres philosophes et d'amis des
sciences reçurent de leurs parens le nom de Philo-
métor. Celui-ci, en effet, se distinguait tellement par
sa justice , qu'il aurait mieux aimé mourir que de se
livrer à ses passions , et de renoncer à la vertu pour
mener , dans les délices , une vie coupal^le. Ce philo-
sophe , voyant que le roi menait une vie détestable ,
et que personne n'osait lui faire sentir ses torts, à
cause de sa cruauté , qu'il avait mise dans tout son
jour en fesant périr plusieurs hommes de science
et de vertu , fit , aux prières du peuple , le sacrifice de
sa vie, et s'exposa à la mort, aimant mieux mourir
pour la justice , que de traîner, pour quelque tems en-
core, une vie souillée par des mœurs infâmes. C'est
ce que fit, au rapport de Valcre Maxime, Théodore de
Cirène , qui fut attaché à une croix pour avoir osé re-
procher au roi Lisimaque ses crimes et ses infamies.
Comme il était pendu à la potence du roi, il dit à ce
prince : <« Puissent tes conseillers , couverts de pour-
II- 12
l'-'S A\NAI,|-.S
j
puli , ncglectâ vit.i iiiorti se cxposuit , niaicns pro
justitia vitam fîniro quàm ad modicum tcmpus cani
ducere brutis moribus infamatam. Quod idem fecil,
ut dicit Valerius Maxiimis, Theodorus Cyrenœus (i),
qui fuit affixus cruci, pio eo quod regem Lysimaclium
pro suis obscenis et injustis actibus increparc ausus
est. Qui, cùm in eculco régis peiideret, dixit régi :
« Tuis consiliariis purpuratis sit haec pœna quam li-
ment! Meâ siquidem nibil interest utrùm humili vei
vili loco putrcscam. » Voluit dicerc quod parlim cu-
rabat de ipsâ morte et mortis modo, dùm tamen inno-
cens et pro justitia moreretur. Legimus enim Demo-
critum (2) philosophum sibi ipsi oculos eruisse, ne
videret benè esse malis civibus et injustis. Socratem
(juoqae legimus, ad mortem properantem et uxori suae
post eum flendo dicenti innocentem eum damnatum ,
respondisse : « Tace , inquit , 6 uxor, mehîis est me
mori innocentem , quàm propter culpam diem extre-
mum claudere. » Sic et bujus inventor ludi pro tuendà
justitia morti se cxposuit, et vitam prœsentem con-
tempsit.
(i) Le texie dit Thendostus Chitenns ; mais Vak're Maxime,
liv. TÏ, chap. 2, dit Theodorus Cyrenœus.
{'>) Diogôncs Lacrce ne dit rien do ce fait dans la vie de Demo-
crite. C'est Cicéron , que Jacques de Guyse connaissait mieux , et
(fui le rapporte dans s<!S Tusculancs, V, ÔQ; et dans son Orateur,
ii,4fi.
DE HAINAUT. LIVRE II. ' l'JQ
pre , subir le même supplice ! Pour moi , peu m'im-
porte que je pourrisse clans un lieu obscur et vil. » Il
voulait dire qu'il ne s'inquiétait guère de la mort,
ni du genre de mort qui lui était préparé , pourvu
qu'il mourût innocent et pour la vertu. Nous lisons
aussi que le philosophe Démocrite s'arracha lui-même
les ieux , pour ne pas voir prospérer les citoyens mau-
vais et corrompus ; et l'on nous raconte de Socrate ,
qu'en allant à la mort , il répondit à sa femme , qui le
suivait en pleurant et qui lui disait qu'il était innocent
du crime pour lequel il avait été condamné : « Taisez-
vous; il vaut mieux mourir innocent que criminel. »
De même que. ces hommes célèbres, l'inventeur du
jeu des échecs s'exposa à la mort pour garder la jus-
tice , et méprisa les douceurs de la vie présente.
l8o ANNALES
CAPITULUM XL VII.
De triplici causa inventionis ludi scaconim.
Causa autem Inventionis ludi scacorum fuit triplex.
Prima fuit correctio ; secunda fuit otii evitatio ; tertia
fuit rationum subtilium multiplex inventio. Circà pri-
mam, sciendum est quod prœdictus rex Evilmerodach,
cùm vidisset hune ludum , ac multos milites et baro-
nes et duces cum dicto pliilosopho bellicosè ludere,
miratus est ludi pulcbritudincm ac inconsueti solatii
novitatc intéresse voluit, ludum discere desidcravit,
ac cum dicto philosoplio ludendo debellare decrevit.
Quod cùm pliilosophus rcspondisset hoc non posse
regem facere , nisi priùs formam discipuli assumeret,
respondit rex hoc esse congruum; et, discere cupiens,
formam discipuli in se omnimodè suscepit. Tune plii-
losophus formam tabularii ac scacorum, ac mores
régis ac nobilium et popularium, et officia eorum
describens , eum ad correctionem et morum liones-
tatem ac virtutum honestatem attraxit. Ea propter
audicns rex correctionem suam , propter quam jàm
multos sapientes occiderat, comminatorio prcTcepto,
philosophum interrogavit j diccns quarè huno ludum
DE HAINAUT. LIVRl- II. l8l
CHAPITRE XLVII.
De la trii'le cause de l'iuvention du jeu des échecs.
On inventa le jeu des échecs pour trois raisons : la
première , pour corriger le roi ; la seconde , pour fuir
l'oisiveté ; et la troisième , pour exercer l'esprit aux
découvertes ingénieuses. Quant au premier motif, il
faut savoir que le roi Evilmérodach , ayant vu ce jeu ,
et plusieurs chevaliers , barons et ducs , donner , en
jouant avec le philosophe dont nous avons parlé , une
représentation de la guerre , admira la beauté de cette
invention , et voulut goûter un plaisir nouveau pour lui.
Il désira d'apprendre ce jeu , et de se battre, en jouant,
avec le philosophe. Celui-ci ayant dit que le roi ne
pourrait se livrer à cet exercice qu'après s'être mis au
rang de ses disciples , le prince répondit que ce qu'on
exigeait de lui était juste; et, comme il désirait de s'in-
struire , il prit entièrement les manières d'un disciple.
Alors le philosophe, en lui expliquant les figures du
damier et des échecs , en lui peignant les mœurs d'un
roi , des grands et du peuple , et en lui traçant les
devoirs de tous , le porta à se corriger , à se former
aux bonnes mœurs et à la pratique des vertus. Le roi ,
en s'entendant condamner pour avoir fait mourir
un grand nombre de sages , demanda au philosophe ,
l82 ANNALES
composuissct. Qui rospoiulit : « O domine inî rex ,
tuam vitam gloriosam desidero , quam viderc non
possum nisi justitiâ et bonis moribus insignitus , ut
à populo diligaris. Opto ergo te alio fore regimine,
ut tibi priùs domineris , qui non jure aliis scilicet vio-
lentiâ dominaris. Injustum quippè est ut aliis impe-
rare tu velis, cîim tibi ipsi imperare non possis; et
mémento violenta imperia diù durare non posse. Hœc
ergo tuae correctlonis causa una et principaliter ex-
titit; patienter enim reges sapientium suorum correc-
tiones ferre debent, et ipsos correctores libenter au-
dire. » Secunda causa fuit otia evitare , de quo dicit
Seneca ad Lucilium : Otium sine litteris mors est, et
vivi hominis sepultura. Et Varro in Sententiis suis
dicit : Quod viatores non vivunt ut eant , sed ut ne-
gotientur; sic et vita non suî causa fit, sed ut in eà
ad prœclarum operetur. Et ideo hic praesentis ludi
iuventor non soliim eum invenit ut rcgem corrigeret,
sed ut otium et tristitiam ex otio causatam vitare do-
ceret. Tertia causa fuit subtilia intellcctualiter inda-
gare. Nàm unusquisque naturaliter appétit scire et
audire novitates; undè legitur de Atheniensibus, quod
ad hoc studebant ut scirent vel audirent aliquid novi.
Quia visus corporalis quandoque multa impedit cogi-
tare subtilia , ideo Democritum philosophum legimus
sibi oculos eruisse, ut vegctatiores et acutiores cogi-
tationes haberet. Ob hoc ei'go hujus solatii inventor
mortis anxietate pressus , ac extra corpus effectus ,
sensibilium et rerum palpabilium factus obliviosus , ad
mentem se contulit, ludtuii variarum et innumera-
DE llAIiXAlT. LIVIU: II. l83
tTun air menaçant, à quelle fin il avait inventé son
jeu. Celui-ci répondit : « O mon seigneur et mon
roi, je désire que votre vie soit glorieuse, mais elle
ne peut devenir telle qu'en vous fesant aimer de votre
peuple par la pratique de la vertu et par de bonnes
mœurs. Je souhaite donc que vous changiez de con-
duite et que vous commandiez d'abord à vous-même
qui régnez sur les autres, non par la justice, mais par
la violence. Il serait en effet injuste à vous de préten-
dre commander aux autres, lorsque vous ne pourriez
commander à vous-même. Rappelez- vous que les em-
pires fondés sur la violence ne peuvent avoir une
longue durée. J'ai donc eu principalement en vue
votre correction , lorsque j'ai inventé le jeu des échecs.
Les rois doivent en effet supporter patiemment les re-
montrances de leurs sages , et écouler volontiers leurs
correcteurs. « Le second objet que le philosophe a eu
en vue , a été d'apprendre à éviter l'oisiveté, dont Sé-
nèque parle en ces termes à Lucilius : « L'oisiveté sans
les lettres est la mort , et la sépulture d'un homme
vivatit. » Varron, dans ses Sentences , dit aussi que les
voyageurs ne vivent pas pour marcher , mais pour
négocier, et qu'ainsi l'on doit vivre non pas seulement
pour vivre, mais pour se former au bien. C'est pour-
quoi l'inventeur des échecs n'a pas seulement voulu,
en imaginant ce jeu , corriger le roi; mais il a voulu de
plus enseigner aux hommes d'éviter l'oisiveté et la tris-
tesse qu'elle produit. La troisième cause de l'invention
des échecs a été déporter l'esprit àdes découvertes ingé-
nieuses. En effet , chacun désire naturellement desavoir
et d'apprendre des choses nouvelles ; et nous lisons que
les Athéniens étaient empresses de connaître les nouvel-
les. Comme la vue des corps empêche souvent l'esprit de
l84 ANNALES
biliuin rationum plénum adinvenit, ac proptcr niul-
tilufliuein rationum ot variarum similitudinum ac
iiigonla bellorum in eo contentorum tracions dcc:crtan-
libus in exemplum , et ob hoc autor hujus ludi mul-
tùm famosus fuit.
CAPITULUM XLVIIÏ
De morte Ezechielis prophcta-.
COMESTOR.
Anno XIV poslquàm percussa est civitas Jérusalem ,
facta est manus Domini super Ezcchielem , et adduxit
eum in spiritu in montem excelsum in terra Israël et
ostendit ei descriptionem civitatis Jérusalem et templi,
super quam ad litteram nostri siluerunt autores. Porro
Ezechiel in Chaldω inter captivos judicavit transgres-
sores legis et praecipuè quosdam de tribu Dan et Gad,
qui in Dominum committeront impia , legis perse-
DE HAINALT. LIVRE II. 1 0'J
se livrer à des pensées profondes , le philosophe Démo-
crite , ainsi que l'histoire nous l'apprend , s'arracha
les ieux , pour que ses pensées fussent plus vives et
plus fécondes. C'est ainsi que l'inventeur des échecs ,
bravant les aiguillons de la mort , s'était dégagé de tout
lien corporel , et méprisant tout ce qui pouvait affec-
ter ses sens , pour se renfermer en lui-même , avait
imaginé un jeu plein d'adresse et d'innombrables com-
binaisons. La multitude des chances et des coups dif-
férens que ce jeu présente , l'image de la guerre qu'il
offre aux joueurs, attirèrent à son auteur la plus
grande réputation.
CHAPITRE XLVIII
De la mort du prophète Ezechicl.
COMESTOR.
Quatorze ans après la ruine de Jérusalem , la main
du Seigneur saisit Ézéchiel , et le conduisit en esprit
sur une haute montagne de la terre d'Israël. Ensuite
le Seigneur lui fit la description de la ville de Jérusa-
lem et du temple , description dont nos auteurs ne nous
ont rien laissé. Ezéchiel jugea en Caldéc les captifs
qui transgressaient la loi , et particulièrement quelques
hommes delà tribu de Dan et de Cad, qui commet-
1 SC) ANNALES
quciido custodes; et f'ecit,ut dicit Epiplianiiis , ootilrà
eos prodigium magnum, quia (ilii eorum et universa
pecora à serpentibus perierunt ; et prœdixit quod
tribus illre non reverterentur ad propiia, sed Mediae
in regionibus remanerent. Ob hoc exacerljati in eum,
distraxerunt eum equis per crepidines saxorum , et
excerebraverunteum, et sepelierunteum in sepulchro
Sem et Arphaxat , in speluncà duplici.
CAPITULUM XLIX
De Panii'lc propfictl.
EX IIISTORIA SCIIOLVSTJCA.
Tempouibus bis prophetavit Daniel in Clialdaeà ,
(jui , secundùm Josephum et Epiphanium, fuit de
semine reglo Judœ, secundùm septuaginta vero , luit
sacei'dos de li'ibu Levi. Fuit(jue adeo castus , ut à
contribulibus suis spado putaretur. Hic, apud Nabu-
chodonosor honoratus, super omnes provincias Ba-
bylonis fuit , et super omnes sapientes principatum
meruit, tribusque sociis suis super provincias prin-
cipatum obtinuit, quibus videlicet pueris de camino
diviuitùs liberatis, Kex Dei potontiani prœdicavil,
et ne blasphemaretur à quorumcpie ediehim public a-
DE nAINAUT. LIVRE II. 187
laieul des impiétés envers le Seigneur , en persécutant
les gardiens de la loi , et il fit contre eux , au rapport
d'Epiphane , un grand miracle , ayant lait périr par
les serpens leurs fils et tous leurs troupeaux. Il prédit
aussi que ces tribus ne rentreraient jamais dans leur
pays, mais qu'elles resteraient dans la Médie; c'est
pourquoi le peuple irrité contre lui , le fit traîner par
des chevaux sur des pierres aiguës, et lui fendit la
lête ; puis il l'ensevelit dans le sépulcre de Sem et
d'Arphaxat, qui se trouvait dans la double caverne.
CHAPITRE XLIX
Du prophète Daniel.
Extrait de l'histoire scolastique.
En ce tems-là prophétisait, dans la Caldée, Da-
niel, qui, au rapport de Josèphe et d'Epiphane, était
du sang des rois de Juda , mais qui , d'après les sep-
tante , était prêtre de la tribu de Lévi. Il fut d'une si
grande chasteté que ceux de sa tribu pensèrent qu'il
était eunuque. Comblé d'honneurs par Nabuchodono-
sor , il gouverna toutes les provinces du royaume de
Dabilone , il mérita de commander à tous les sages , et
obtint pour trois de ses compagnons des gouverne-
l88 ANNALES
vit. Ciun autem rox Dauicloin flliorum suorum cohœ-
redem facere voluisset , respondit : « Absit ut hœrc-
ditatem patrum relinquam et iiicircumcisorum donis
adhaercam. « Haec dicit Josephus quod ipse Daniel li-
bres hebraicos in latinum transtullt eloquium ( i ) ;
liistoriam Susannœ patet esse factam adliùc récente
captivitate, quia Daniel crat adliiic juvcnis ; qui per-
severavit usquè ad annum primum (2) Gyri régis
Persarum.
CAPITULUM L.
De Melbramlo rege Belgensiiim.
HUGO.
Tempore Tarquinii ultimi régis Ronianorum , rcx
Gallorum Senoncnsium regni ac civitatis Belgorum ac
(1) Ce passage ne fait pas honneur à la critique de Jacques de
Guyse. Où Daniel aurait-il appris le latin, cl pour qui aurait il
cerit en cette langue ?
(2) L'an S^'Q av. J.-C.
DE HAINAUT. LIVRE II. 1 89
mens de province ; ceux-ci étaient les mêmes qui
avaient été délivrés de la fournaise ardente par la grâce
de la Divinité. Nabuchodonosor publia la puissance
de Dieu , et porta un édit qui défendait à tous le blas-
phème. Ce prince ayant voulu admettre Daniel au
même rang que ses fils pour partager sa succession ,
ce dernier répondit : « Me préserve le ciel de renoncer
à l'héritage de mes pères pour jouir des bienfaits des
incirconcis ! » Josèphe dit aussi que le même Daniel tra-
duisit en latin les livres hébreux. L'histoire de Suzanne
paraît avoir été écrite au commencement de la capti-
vité, parce que Daniel était encore jeune alors. Il
vécut jusqu'à la première année du roi Cirus.
CHAPITRE L.
De Melbrand , roi des Belges.
HUGUES.
Du tems de Tarquin , dernier roi des Romains , le
roi des Gallo-Sénonais , voyant la ruine du royaume
et de la ville des Belges , et de la ville d'Hostile , en-
voya à leurs habitans des députés , pour leur enjoin-
dre de lui envoyer sans retard l'idole de Minerve ,
et de réparer les dommages qu'ils lui avaient jadis
IQO ANNALES
Hostilionis f i) civitatum prostrationem considcrans,
misit ad eos legatos , ul sibi idolum Minervœ quhm ci-
tiiis remitterent, et damna sibi aliàs à dictis civitatibus
illata restituèrent, aliàs per violentiam ab eisdem ex-
torqueret. Dictse civitates vacuos remiscrunt et sine
honore legatos. Tune rex Senonensium cum regibus
Allobrogorum et Britanniœ fœdera iniit, ad finem ut
regnum atque dominium Belgorum sibi aequirerent.
Qui postmodùm regnum subintrantes , Britones à
parte Belgis gallicœ (2) , Senones vero atque Allo-
brogi à parte Remorum , et ambas civitates simul ob-
sederunt, patriam undiquè dévastantes. Melbrandus,
rex belgensis , haec considerans , perplexus , et quid
agere deberet ignorabat; quia nec confidebat in Bel-
gensibus , nec ipsi in ipsum confidebant. Tandem
rogitavjt ut cum Condronensibus huygnificis iniret
fœdera, et succursum ab eisdem expeteret. Qui res-
ponderunt animo libenti suscipere fœdus, et ipsum
contra adversarios tueri pro posse atque defendere ,
et quod primo ad Remorum partes accédèrent, ad
obsidionem , et deindè ulteriùs progrederentur, si af-
foret congruitas. Melbrandus , audita responsione
grata , suis proposuit Belgensibus quid esset acturus.
Qui responderunt contra adversarios necesse progre-
di ; sed ipsi cum Hunnis aut extraneis quovis modo ad
bellandum minime progrederentur. Rex postulavit ut
ipsi digèrent aut soli exire et extraneos civitatcm ob-
servare, aut remanere et extraneos secum progredi.
(i) Tournai.
(2) Beau vais. ♦
DE HAINAUT. LIVRE II. IQl
causés, sinon (lu'il irait lui-même leur arraclier de
force ce qu'il réclamait. Les cités de Belgis et d'Hos-
tile , congédièrent ses députés sans leur rendre aucun
honneur et sans leur faire de présent. Alors le roi
des Sénonais fit alliance avec celui des Allobroges et
celui de Bretagne , pour s'emparer du royaume et du
gouvernement belge. Ces princes entrèrent ensuite
dans le pays qu'ils voulaient conquérir, les Bretons du
côté de Belgis -la- Gauloise , et les Sénonais, avec
les Allobroges , du côté de Reims. Les deux armées
assiégèrent en même tems et séparément ces deux
villes , en ravageant tout le pays d'alentour. Melbrand ,
roi des Belges , à la vue de cette invasion , restait
plongé dans l'irrésolution et ne savait quel parti pren-
dre, parce qu'il ne se fiait pas aux Belges et que ceux-
ci ne se fiaient pas davantage à lui. Enfin , il conçut le
dessein de faire alliance avec ceux du Condros , et de
leur demander du secours. Ces derniers répondirent
qu'ils s'allieraient volontiers avec lui, et qu'ils le défen-
draient de tout leur pouvoir contre ses ennemis ; qu'ils
marcheraient d'abord sur Reims pour en faire lever
le siège , et qu'ensuite ils s'avanceraient encore da-
vantage , s'il en était besoin. Melbrand , avant reçu
cette réponse favorable , délibéra avec les Belges sur le
parti qu'il fallait prendre. Ceux-ci répondirent qu'il
était nécessaire de marcher à la rencontre de l'en-
nemi , mais qu^ils ne voulaient point marcher au com-
bat avec les Huns ni les étrangers. Le roi leur dit alors
de choisir l'un de ces deux partis : ou de sortir seuls
et de laisser la garde de la ville aux étrangers; ou de
rester et de faire marcher les étrangers à sa suite. Les
Belges choisirent d'accompagner le roi. Ce prince
ayant découvert leur ruse, se fit suivre de près pai-
19^2 ANNALES
Qui eligcntes cum rege progrodi, (jiium comperissct
rcx eorum fraudcni, pcrcopit vigintl inillibus Huiino-
riiin ut ipsum de propc sequerentur. Proponeljant
interficere rcgem aut in manihus advcrsarionim ipsum
prodire. Melbrandus, igitur cum suis versus Belgim
gallicam à Britannis olisessam progrediens, tandem
Britannos aggrcssus est ; qui in primo bello devictus ,
nisi HunniatqueMauri (i) etquod horâ eadem civitas
Belvaccnsis contra Britannos ipsam obsidenlcs cxivis-
sct, prostratus illùc omninorcmansisset. Melbrandus,
hœc pcrpendens, continuo transmisitBclgis,Fani-So-
lis, Fani-Martis , Fani-Mercurii cœterisque civitatibus
sibi subditis,ut sine mora,Pannonii , Ilunni, Sicambri,
Vandab, Anthcnorides (2), caeterlquc advcnnp ad ip-
sum succurrendum quàm citiùs properarent. Qui cùm
advenissent , novo génère pugnandi in adversarios
irruentes , post magnam stragcm , reliquos in fugam
converterunt , et usquè ad Occanum perscqucntes ,
majorem partem reHquiarum non valentes super naves
ascendere submerserunt. Melbrandus in civitatc Bel-
gis gallicœ, id est, Belvaccnsis, honorificè susccptus,
in rcgem eornm approljaverunt. Scnoncnscs, qui in
Rcmorum obsidione jacebant , audientes Condronen-
ses , Hunnos ac ferè totam Huiniam (3)advenire, au-
dîsscntque Britones inhumaniter prostratos, obsidio-
nemrelinquentes, ad propria quàm citiùspropciArunl.
(1) Au lieu de Mauri il faut sans doute lire Morini.
(2) Ceux de la ville d'Atli.
(3) La Huinic était 1c pa^s compris cnire 1.1 Soninie . la Meuse,
le Rhin et rOcean. Tjcs Condronicns , ou phitùt les Condrnsieus,
sont les hahitans du Condios, dont Iliiy etail la capilale.
DE HAINAUT. LIVRE II. 1C)5
vingt mille Huns. Les Belges se proposaient en effet
de tuer leur roi ou de le livrer vivant aux ennemis.
Melbrand, s'étant avancé avec son armée vers la ville
de Beauvais , que les Bretons tenaient assiégée , atta-
qua ces derniers ; mais , vaincu dans ce premier com-
bat , il aurait été entièrement détruit , si les Huns ,
les Morins et la ville de Beauvais elle-même ne lui
eussent en mêmetems porté secours. Melbrand, recon-
naissant alors que ses troupes étaient inférieures à celles
des ennemis , envoya aussitôt à Bel gis , a Solème , à Fa-
mars , à Faniim. Mercurii , et à toutes les autres cités
qui lui étaient soumises , l'ordre de faire partir sur-le-
champ , à son secours , les Pannoniens , les Huns , les
Sicambres , les Vandales , les Anthénorides , et toutes
les autres troupes étrangères. Ces différens corps s'é-
tant réunis à son armée, un nouveau combat s'eno^a-
gea aussitôt , et les ennemis , après un carnage effroya-
ble des leurs , furent obligés de prendre la fuite , et
furent poursuivis jusqu'aux bords de l'Océan , où la
plupart d'entre eux, ne pouvant gagner leurs vaisseaux,
furent engloutis dans la mer. IMelbrand, ayant été reçu
avec de grands honneurs dans la ville de Belgis-la-
Gauloise , ou Beauvais , fut choisi pour roi par tous
les habitans. Dès que les Scnonais , qui fesaient le
siège de Reims , eurent appris que les Condroniens ,
les Huns et presque tous les peuples de la Huinie s'a-
vançaient contre eux , après avoir écrasé les Bretons ,
ils abandonnèrent le siège de la place, et se mirent
hâtivement en route pour leur pays. Mais les Con-
droniens , les ayant poursuivis , les atteignirent sur les
bords de la Marne, qu'ils n'avaient pas encore passée ,
et les attaquèrent dans l'endroit où est aujourd'hui
Condé-sur-Marne. Alors il s'ensuivit un combat san-
ir. i5
194 ANNALES
Coiitlroni ipsos proscquentes , suprà liltora riparia;
Maternae citiùs transmoare non valcntcs , in loco qui
nunc dicitur Condatum suprà Matcrnam (i) ipsos
sunt aggressi. Illiic fcrociter pugnantes magnam par-
tem Senoniorum occiderunt. Non contenu Condro-
nii trans ripariam postmodiini transmeantcs, partes
coruni iisquè ad Rhodanum vastaverunt, regc eoriim
priùsintercmpto. Melbrandus, Belvaci remanens, plu-
rimùm civitatem dilatavit ; ad propriam civitatem
reverti nolens, rcgiam civitatem Bclvacum inslituit;
idolum Belis atque templum cinn saccrdotibiis instaii-
rans, tributa consueta diis belgensibus trausportare li-
bcraliter quictavi t. Filios pku'es habens, i iiniorem Blan-
dinumnomine solum loco siiî Belgis dcreliquit. Ab illo
tune civitasBelgensis dcrelicta ab omnibus civitatibus,
rege caruit, dignitate regali non sacerdotali translata
ad Belvacenses. Et tune civitates rcgni, juxtà carun)
voluntates, sibi duces atque venatores constituerunt
nuUo contradicente. Ab illo tune Belgenses et Huy-
nienses (2) ex odio vehementi se invicem videre non
poterant , nec quisquam cum eisdem pacifiée loqui ;
undè ex intestinis bellis crudellbus civitas penè suffo-
cata videbatur, nec erat qui civitatis regimcn auderet
assumere, loco Blandini juvenculi,
(1) C'est ainsi que ce nom est écrit dans les manuscrits. Le villagf
«le Conilc dont il est ici question, est situe sur la Marne outre
Châlons et Épcrnai.
[2) Ceux du pays de Huy.
r>E HAINAUT. LIVRE II. 1^5
glarit , dans lequel la plus grande partie des Sénonais
périrent. Non contcns de cette victoire , les Condro-
niens passèrent la rivière , et ravagèrent jusqu'au
Rhône le territoire de leurs ennemis , dont le roi fut
tué. Melbrand , ayant fixé son séjour à Beauvais ,
agrandit considérablement la ville ; et , ne voulant
pas retourner dans sa propre cité , il nomma Beau-
vais cité royale; il y fit élever la statue et le temple
de Bel , y établit des prêtres de ce dieu ; et dispensa
ses peuples de porter les tributs accoutumés aux
dieux de Belgis. Il avait plusieurs fils, et laissa le
plus jeune d'entre eux , nommé Blandinus , pour gou-
verneur de Belgis à sa place. Depuis cette époque , la
cité belge fut abandonnée de toutes les autres cités , et
ne posséda plus son roi dans ses murs , la dignité
royale , mais non la dignité sacerdotale , ayant été
transférée à Beauvais. Alors aussi les cités du royaume
se choisirent, selon leur fantaisie et sans aucun obsta-
cle , des ducs et des chasseurs pour les gouverner. C'est
de cette époque que date la haine violente que les
Belges et les Huiniens conçurent les uns contre les
autres , et qui fut portée au point qu'ils ne pouvaient se
voir ni se parler. La ville de Belgis, déchirée ainsi
par des guerres intestines , paraissait presque entière-
ment ruinée , personne n'osant s'emparer du gouver-
nement de la cité, au détriment du jeune Blandinus.
!()(> ANNALES
CAPITULUM LI.
Qtialitcr Tarniiiiiii filiiis t[iion;làm rcgis Romanoruni , in civifafc»
Bclgensi voluit coinmorari.
HUGO.
ÏARQiTiNius Supcrbiis sive Buibantius, cfiiofl idem
est , rex Romanorum septimiis , regnavit in tliebus
Cyri, régis Persarum , xxxv annis (i). Hic, propter
Tarquinium, filium suum , qui Lucretiam, nobilem fc-
miiiam génère et virtute, vi corruperat, à regno est
expulsus. Quœ Lucretia , poft qucrimoniani de vitu-
pcrio marito et patri et consanguineis factam , se
i[)sam occidit , propter vituperii dolorem. Tarquinius
vero de Româ expulsus , ad Torsennam regeni , Clu-
siuni confugit. Qui rex , eum exercitu Tuscorum et
aborum conlrà Romain veniens , usquè ad bttus Ti-
b<>ris circà Janicuhnn , magnum timorem Romanis
incussit. Sed, pacc factà cum Romanis, obsessit Are-
tium. Filius ejus Tarquinius , autor sceleris, ab Itaba
expulsus est. Qui cum multis Gallis et aliis quos col-
(i) Il commença à régner en l'an 54(> av. J.-C. , et fut cliassi- en
Tan 5i?. , selon Eusèbc, qui est toujours suivi par notre auteur;
mais l'Art de vérifier les dates rapporte jilus sûrement ees deu\
epocjuesaiix anndes 534 et iiio , en ne donnant, comme il eonvii'ut ,
que 25 anni'es de règne au dernier roi de Rome.
DE HAINÀUT. LIVRE II. 1 g^
CHAPITRE LI.
Comment le lils de Tarquin , jadis roi des Romains, voulut s'airètci
dans la ville de Belgis
HUGUES.
Tarquin l'Orgueilleux ou le Superbe , ce qui est la
même chose, septième roi des Romains , régna pendant
trente-cinq ans du tems de Cirus , roi des Perses. Il fut
chassé du trône à cause de Tarquin , son fils , qui avait
fait violence à Lucrèce, femme aussi remarquable par la
noblesse de son origine que par sa vertu. Lucrèce ,
après avoir entendu les reproches de son mari , de
son père et de ses parens , ne put supporter sa honte ,
et se donna la mort dans son désespoir. Tarquin,
chassé de Rome , se réfugia à Clusium , auprès du roi
Porsenna , qui marcha contre Rome avec une armée de
Toscans et d'alliés , et s'avança jusque sur les bords
du Tibre , au pié du mont Janicule , ce qui jeta les
Romains dans une grande frayeur. Mais, la paix ayant
été faite , il alla mettre le siège devant Arétium (1). Le
fils de Tarquin , l'auteur du crime commis sur Lu-
crèce , ayant été banni de l'Italie , rassembla une
troupe de Gaulois et d'autres soldats , avec lesquels il
'i) Arezzo.
i 98 ANNALES
legorat, trans Alpes, tandem ad regnum Belgoruni
deveiiit. Qui misit ad Belgensem civitatem , diccns :
« Civitas Belgis in sempiternum vivat ! Tarquinius
cmn sibi subditis Bclgensibus mandat saintes. Ciim
ipsc verè sit filins régis Romanorum Tarquinii , qui
Servium regem , quondàni vestrum adversarium ac
vestrœ civitatis ac regni desertorem interfecit , et vos
de forefactis vestris potenter vindicavit; et paratus est
contra Romanos ad vindictam ulteriorem expetendam,
pro vobis se ipsum exponere ; supplicat ut ipse cum
suis alligatis concives istius civitatis excipi valeant cum
amore. » Dux Bclgorum, liaec audiens, post consilium,
respondit : « Ciim filii naturaliter sint parentum imi-
tatores , et pater niagistri tui dominum naturalem
interfecerit , proîit videris dicore; non est spes repo-
nenda in eo. Prœtereà ciim ipsc spondeat Romanos
velle persequi , ciim ipse Romanus existât, alieni me-
rito ipsum cffugcre dcbent. Insuper sciant omnes ut
regiœ majestatis laesores aut reipublicœ desertorcs, in
civitatc nostrâ locum non liabere. » Qui confusus re-
cedens in de sub finibus Morinorum , in loco qui à
dicto Tarquinio gallicè nunc dicitur Torqiiin (i),
applicans cum suis effiigatis , oppidum et castrum
construxit. Non multinn post vcro temporis, ipse cum
Hostiliensibus fœdera iuiens, dux civitatis eorum el-
lectus est. Hic ruinas civitatis Hostilis quas Scrvius ,
rex Romanorum, exercuerat rcparans, ad invadendum
omnem locum, et ad resistendum onmibus se pr?epa-
rans, quidquid dictus Servius rex exercuerat maximr
(i) Turcoin , de ranomlisscmcnl de Lille.
DE HAINAUT. LIVRE II. igc,
passa les Alpes , et arriva enfin dans le royaume des
Belges. Il envoya à la cite de Belgis des députés qui
parlèrent ainsi aux habitans : « Ville de Belgis , durez
éternellement. Tarquin et ses soldats envoient leurs
saints aux Belges. Comme ce prince est le fils de Tar-
quin , roi des Romains , qui tua le roi Servius , votre
ennemi , l'ennemi de votre cité , et le déserteur de
son royaume , et qui vous vengea d'une manière écla-
tante des torts commis envers vous , et comme il est
prêt à vous venger et à s'exposer pour vous au ressen-
timent des Romains , il supplie les citoyens de cette
ville de le recevoir , ainsi que ses alliés , avec amitié
dans leurs murs. » Le duc des Belges , après avoir
entendu ce discours , prit conseil des siens , et fit cette
réponse : « Comme les fils suivent naturellement
l'exemple de leurs pères , et que le père de votre maî-
tre a tué son seigneur naturel , ainsi que vous venez
de le dire, on ne doit avoir aucune confiance en lui.
Et de plus , comme il manifeste l'intention de pour-
suivre les Romains , sans aucun égard pour sa qualité
de Romain, les étrangers doivent justement le fuir.
Mais du reste , sachez tous que les ennemis de la ma-
jesté royale , et les fauteurs des républiques, n'ont au-
cune place dans notre cité. » Tarquin , confus de cette
réponse, se retira avec sa troupe de bannis, sur le
territoire des Morins , dans un lieu qui fut appelé en
français , de son nom , Torquoin ; et il y bâtit une ville
et un château-fort. Peu de tems après il fit alliance
avec les habitans d'Hostile , et fut nommé duc de
leur cité. ïl répara cette ville, que Servius, roi des
Romains , avait ruinée , et se disposa a envahir tous les
pays onviionnans , et a tenir tête à tous ses ennemis.
11 forma le dessein de détruire tout ce qu'avait fait
IJOO ANNALES
tlcstruere cupiens , ad vota consimilia suos atque Hos-
tilienses (i) animavit.
CAPITULUM LIL
De primariâ obsidione civitatis Servia; (a'i
HUGO.
Posï annos paucos à civitatis Hostilis omnimodà
repara tionc, Tarquiniiis Burbantius , quod idem souai
quod Superbus , amicitias cum duce Ruthcnorum at-
que confaedcrationes eomponere proponens , enchenia
donaque sibi transmittens, ad finem ut duci Belgorum
iinà secum diffidentias sibi transmitteret, ut cùin ci-
"vitas infirmarctur faciliiis eam cverterct. Qui renucns
ipsum totalitcr et sua despexit munera. Quod adver-
tens Tarquinius, ad alia se divertit. Audicntes civi-
tates vicin;e ({uid Hostilienses cum duce eorum Tar-
quinio proponebaiit , ad invicem contra Tarquinium
ligam composuerunt. ïarquinius, hacc videns , omncs
profugos Belgos , omncs Albanos atque Britones ma-
lefactores ac abos , quos congregare valuit, coadunans
onmcs in sua Hoslibensi civivate i-e<'epit. Tune dé-
fi) Les habitans de Tournai.
(2) Cbii'vie.
DE HAINALÏ. LIVRE II. 20 1
Servius , et fit approuver tous ses projets par les siens
et par les habitans d'Hostile.
CHAPITRE LU.
Du premier siège de la ville de Servie.
HUGLES.
Peu d'années après l'entière reconstruction de la
ville d'Hostile , Tarquin le Superbe ou l'Orgueilleux se
proposant de faire alliance et amitié avec le duc des
Rutliènes , lui envoya des offres et des présens , pour
l'engager à faire avec lui la guerre aux ducs des Belges,
afin que la cité, affaiblie par cette diversion, fut plus
facile à renverser. Mais le duc des Ruthènes rejeta ses
propositions et méprisa ses présens ; et lorsque Tarquin
en fut informé, il se livra à d'autres soins. Cependant
les cités voisines ayant appris les desseins des Hostiliens
et de Tarquin leur chef, formèrent toutes à l'envi une
ligue contre ce dernier. A cette nouvelle, Tarquin, atti-
rant tous les transfuges belges , tous les malfaiteurs
albaniens, bretons et autres qu'il put réunir à son
parti, les reçut dans sa ville d'Hostile. Alors ils réso-
lurent tous ensemble d'attaquer et d'assiéger d'abord
la ville bàlicpar le roi Seivius, qui avait renversé la
leur, afin de venger, par la ruine de cette cité, la
202 ANNALES
creto omncs, civitatem quam Servius rexconstruxerat,
qui corum clebcllaverat (.Ivitatein , primo invaderc et
obsidcre proposuerunt, ut mortem parciitum et damna
corum in dicta? civitatis eversione vindicarent ; omnes
Bclgos atquc Hunnos et corum civitates et oppida as-
securantes , solùm vcro Romanos et civitates aut op-
pida corum à Scrvio rcgcî fundata dlffidcntes; ex quibus
dictam ligam intcrimcrunt civitatum. In brevi vero
civitatem Serviœ obsederunt. Huynicnscs et Pannonii
circumquâque dispcrsi audicntes decretum HostiHcn-
sium , cunctis provisionibus ad victum et bcllum ne-
cessariis unà cum idolo Pan secum comportantes, cum
suis sacerdotibus sexûs utriusque, civitatis Serviœ ad
ipsam contuendam intraveruntcum Romanis illùc re-
sidcntibus. Qui unanimiter supplicàrunttàm Iluynien-
sibus Condronicis qui tune principales erant patria-
rum, quàm ITuynicnsibus Rbetianis (i), sic dictis à
patriâ quœ priùs Rhetia (2) dicebatur, ut , si nécessitas
afforet, contra ïarquinium Burbantium et Ilostilien-
ses, si expcterent auxiHum,, cis succurrere dignaren-
tur; quod et promiserunt. Obsidione tandem firmatâ ,
civitatem Serviœ fortiter invadentcs , multis cam affe-
cerunt dispendiis, niullis cam contuderunt suppliciis;
sed velut leonum catuli adversariis resistebant, tro-
dccim mcnsibus in dicta gravi obsidione persévéran-
tes. Intereà Tarquinius castrum (3) quod Camber
ronstruxcrat , juxtà oljsidioneiu , invadens , ipsuin
'1) Les liabitans du jinvs roiiijiris ciilrc Hny cl Atli
(2) Le Brahant
(!J) Le village lie (ianiliinn , .1 tleiix lieues d'Alli
DE HAINAUT, LIVRE II. 20.>
mort de leurs pères et leurs propres injures. Puis ils
assurèrent aux Belges et aux Huns la possession de
leurs villes et de leurs forteresses, menaçant seule-
ment les Romains et les villes et places fortes possédées
par eux et fondées par le roi Servius. C'est en prenait
ces mesures qu'ils parvinrent à rompre la ligue des
cités. Ils assiégèrent donc sans retard la ville de Servie.
Les Huiniens et les Pannoniens d'alentour, apprenant
la résolution des Hostiliens , emmenèrent avec eux
toutes les provisions et munitions dont ils pouvaient
avoir besoin pour la guerre , ainsi que l'idole de Pan
et les prêtres des deux sexes attachés à son culte, et
entrèrent dans la ville de Servie pour la défendre con-
jointement avec les Romains qui y derneuraient. Ceux-
ci supplièrent unanimement , tant les Huiniens du
Condros , qui étaient alors les principaux du pays , que
les Huiniens-Rhétiens , ainsi appelés de la contrée qui
portait jadis le nom de Rhétie , de venir à leur secours,
si jamais ils en avaient besoin et que l'occasion se pré-
sentât à eux de leur en demander. Ceux-ci leur en
firent la promesse. Cependant le siège de Servie ayant
été formé , la place fut attaquée avec vigueur et reçut
plusieurs dommages , en perdant un grand nombre de
ses défenseurs; mais les habitans, qui résistaient comme
des lions à leurs adversaires , soutinrent les efforts
multipliés des ennemis durant treize mois. Pendant ce
tems-là, Tarquin , attaquant Ip fort que Camber avait
construit près de la place , l'enleva , le répara ; et di-
rigeant de là toutes ses entreprises contre la campa-
gne environnante , il finit par s'en rendre maître. Tar-
quin céda aux Hostiliens tout le pavs qu'il venait de
soumettre, qui s'étendaii depuis la montagne de Pan
jusqu'à ccl'c (le Minerve , el toute la conlréo que le
204 ANNALES
obtinuit , et ipsiini municns ab eodeni patriam cir-
cumadjacentem iiifcstans ipsam sibi subjugavit. A
monte igitur Pan (i ) iisquè ad montem Mincrvac, et
omne solum quod rex Servius duci Serviae subjecerat,
Tarquinlus Hostillensibus subjcctum condonavit et
non aliud. Subjecerat si quidem dictus Tarquinius
siiprà Morinos et Ruthenos patriam totam à ci vitale
Hostiliensi usquè ad ripariam Lisae, et hanc patriam
denominari jusserat à nomine suo proprio , et illùc
fundaverat civitateni quam Tarquiniam appellavit.
Istam autem patriam sibi noviter et Hostiliensibus
acquisitam denominari prœcepit, à suo cognominc,
Burbantiam ; indè et ab illo tune tota illa terra , ci-
vitate Serviensi duntaxat excepta ,• dicta est Biirban-
tiu (2) à cognomine Tarquinii Burbantii , ut ejus
nomen et cognomen perpetuo Hostiliensibus in me-
moriam , reverentiam et honorem haberetur. Duravit
autem obsidio civitatis Serviœ, ipsâ intacta rémanente,
usquc ad obsidioncm Hostiliensis civitatis à Belgensi-
bus factam, quâ Hostilienses compulsi sunt obsidioncm
derelinquere.
(i) La montagne de Pan est celle où fut b;1lle plus tard la ville
tic Mons. La montagne de Minerve c'tait près de Belgis.
(2) Le pays compris entre Tournai et la Lis , appartenant à la
Flandre.
DE HAINAUT. LIVRE II. ao5
roi Servius avait réduite sous l'obéissance de la cité
lie Servie. Mais il ne leur céda pas d'autre territoire.
Cependant il s'était encore emparé , sur les Morins et
les PiUthènes, de tout le pays qui s'étendait depuis la
ville d'Hostile jusqu'à la rivière de la Lis, auquel il
donna son propre nom ; et où il fonda une ville qu'il
appela Tarquinie. Il voulut que ce dernier pays et que
celui qu'il avait cédé aux Hostiliens se nommassent
Burbantie , de son surnom BurbanUus ( l'Orgueilleux
ou le Superbe ) ; et c'est pour cela que depuis ce tems
toute la province, à l'exception de la seule ville de
Servie , fut appelée Burbantie , afin que son nom restât
à jamais chez les Hostiliens en mémoire, en vénération
et en honneur. Le siège de Servie dura , sans qu'elle
put être enlevée , jusqu'au siège de la ville d'Hostile
par les Belges, qui forcèrent les Hostiliens à lever celui
de Servie.
206 ANNALES
CAPITULUM LUI
De sec(iiul:i dcslriictidiic Ilostilicnsis civitatis.
HUGO ET LUCIUS.
CuM per annos plurimos Blandinus, dux belgcnsis,
tanquàm sopitus in sua gente minime confideret , ot
tanquàm advena reputatus in civitate timidus adhîic
romancrct , tandem Xarquinii Burbantii considcrans
siiperbiam robcllioncmqiic IlostiUs civitatis, gcmcMido
plui'ibus dixit : « Heu , heu ! cur Servius et Camber
parentesque nostri Belgim aggredi reformidabant,
ut qui eorum ignorabant mores ! Cùm eminîis jaceat
apcr solus qui dente unico cardines portarum nostra-
rum rimatur? Catub pigritant ad ostium et foris la-
trant furibundi. Huic accidit regno quod fabulosè
profcrtur; Monoculus foras emisit lamias ad arva,
intiis apri olera corrodentes. » Et subjunxit : « Non est
virtutis corporis extrema protegere , pectore palàm
rémanente denudato. » Ilœc et consimiba pronun-
cians, perpenderunt audientes in civitate non babere
fi(Uiciam, et de eadem ironicè taba proferri. Popubis
audiens demandavit duci : « Ciim alienus esses à nobis,
mores luoscomprobare nobis utile dccrevinius, ulriini
DE HAINAUT. LIVRE II. 2O7
CHAPITRE LUI,
De la seconde destruclion Je la ville «rHostilc.
HUGUES ET LUCIUS.
Depuis plusieurs années Blandinus , duc des Belges ,
restait plongé dans l'inaction, n'ayant aucune confiance
en son peuple, et ne montrant que de la timidité, parce
que la ville le regardait comme un étranger. Cepen-
dant , lorsqu'il vint à considérer l'orgueil de Tarquin
le Superbe et la révolte de la cité d'Hostile , il dit à
plusieurs des siens en gémissant : « Hélas ! pourquoi
Servius et Camber , ainsi que nos pères , craignaient-
ils d'attaquer Belgis , puisqu'ils ignoraient les mœurs
des habitans ? Pourquoi est-il loin de nous le seul san-
glier qui , de sa dent , ébranle les joints de nos portes ?
Les chiens se tiennent inactifs derrière l'entrée , et
aboient avec fureur. Il arrive à ce royaume ce que nous
voyons clans la fable : le borgne envoie ses lamies
aux champs; les sangliers entrent chez lui et mangent
ses légumes. » Puis il ajouta : « Ce n'est pas un acte
de sagesse que de garantir les extrémités du corps , ei
de laisser le cœur à découvert. » Ceux qui entendi-
rent Blandinus s'exprimer ainsi , n'eurent pas de peine
à s'apercevoir qu'il n'avait aucune confiance en la cité,
et qu'il parlait d'elle avec ironie. Le peuple , entendant
2o8 Annales
potiores ossent noslris; quae vero prolulisti in te mc-
rito rctorqucri possent. Quid cnim possuiitcatuli fina-
lltcr absente venatore ? Apes turmatim absque rege
non volant. Verùm quia tibi fidelitatcm juravimus ,
imperterritè jubeas ut dominus, corripias ut judex,
regas ut rcx , defendas ut princcps, pi\Tcipias ut dux,
ot mores magnificos in subditis cxpcrieris ; et ut jura-
tam fidelitatem comprobarc valeas , te cum gente tua
tecum, cum uxoribus et fdiis nostris olis in civitatc
commorantibus , quibus nostra committcmus , cxhi-
bcas duces qui ad Hostilem nos soles Belgos deducaut
civitatem; et quid indè dii deœque subordinaverint
exitus comprobabit. « Non multo post tcmporis , or-
dlnatis ducibus , Hostilem obsederunt civitatem , ad-
junctis sibi Fanimartensibus , Fanimercurialibus et
Portu-Belgensibus; priùsTarquinio cum Tlostilibus ob-
sidionemcivitatis Serviae, quam intactam dimiscrunt,
derellnqucntibus, et ad propria repatriatis. Multis
tandem intcrvenientibus bellis, post quatuor mensium
obsidioncm , Belgorum atque Hostiliensium quàm plu-
rimorum prostratorum ; priiis Tarquinio fugientc mi-
serabiliter interempto, Hostilem finaliter subjeccrunt,
interfectis omnibus quos reperire valuerunt, reliquis
ad nemora diffugatis. Deindè civitatem penè funditùs
extirpantes, sic muros ac portas tandem debacclia-
vunt, ut vlxlapidem super lapidcm posteri rcperirent.
Abliinc civitatem Tarquinii, quaî à dicta civltate fermé
sex millia passuum distarc dignoscitur, petierunt;
quam obsidentes et obtinentes cum toto territorio solo
coîequârunt. Ex Historid Torunccusi. Kxpidso Tar-
DE HAINAri. LIVRE il. 20g
ce discours , adressa au due ces questions : « Puisque
tu es un étranger pour nous , nous avons pensé qu'il
était utile d'éprouver ton caractère , pour savoir s'il
valait mieux que le nôtre; car nous pourrions, avec
raison, te rétorquer ce que tu as dit à notre sujet.
Que peuvent en effet les chiens en l'absence du
chasseur? Les abeilles ne volent pas en troupe sans
leur roi. Mais puisque nous t'avons juré fidélité,
commande avec l'inflexibilité d'un maître , règne en
roi , défends en prince , ordonne en duc , et tu con-
naîtras la loyauté de tes sujets ; et, afin que tu puisses
éprouver la foi que nous t'avons jurée, reste dans
notre ville avec ta famille , avec nos femmes et nos
enfans , auxquels nous confions tout ce qui nous ap-
partient , et donne-nous des chefs pour nous conduire
nous seuls , qui sommes Belges , contre la ville d'Hos-
tile. L'événement fera connaître l'arrêt des dieux et
des déesses. » Peu de tems après, les Belges allèrent
sous la conduite de leurs ducs, assiéger la ville d'Hos-
tile, après s'être adjoint les habitans de Famars , de
la ville de Mercure et de Porte-Belges. Tarquin et les
Hostiliens avaient déjà levé le siège de la ville de Ser-
vie , sans lui avoir fait aucun mal , et étaient retournés
dans leur ville pour la défendre. Enfin , après plu-
sieurs combats et quatre mois de siège, les Belges et
les Hostiliens ayant , chacun de leur côté , essuvé de
grandes pertes , Tarquin fut tué lorsqu'il prenait la
fuite , et la ville d'Hostile fut prise. Tout ce qu'on ren-
contra fut passé au fil de l'épée ; et le reste s'enfuit
dans les bois. Ensuite les Belges ruinèrent tellement la
ville et renversèrent les murs et les portes si complè-
tement , qu'il aurait été difficile , dans la suite , de
trouver deux pierres l'une sur l'autre. Ils gagnèrent
II. i4
2 1 0 ANNALES
c{uinio Superbo ab urbe romanâ et ipso mortuo , con-
sules , tribuni et dictatores Romœ facti sunt ; quorum
temporibus , Hostilis civitas turpiter destructa est
mûris, œdificiis et civibus, ut vix vestlgium solum
appareret civitatis ; sed à quo vel à quibus tàm bor-
renda et crudeHs vastatio fuerit exécuta, in volumini-
bus minime reperimus. Hœc ibi. Actor. Miror quod
liistoriographus civitatis Tornacensis reperit praece-
dentia et subsequentia langentia dictam civitatem, et
non reperit quis actor fuerit tàm enormis excidii.
Quœrat igitur dibgens inquisitor bistorias Hugonis
Tullensis et Lucii Tungrensis, et reperiet qui dictas
ruinœ fuerunt executores.
CAPITULUM LIV
Do Rlandino «liice Belgensiuiii.
HUGO , Ut suprà.
Belgensibus igitur à dicta victoriâ repatriatis ,
Blandinus dux volens deos de fortunâ placare, ha-
bens quinque fdios et novem fibas , uiium eorum cum
DE HAINALÏ. LIVRE II. 211
ensuite Tarquinie , qui est à environ six mille pas de la
première ; ils en firent le siège , s'en emparèrent et la
rasèrent. Extrait de l'histoire de Tournai. Tarquin le
Superbe ayant été chassé de Rome et étant mort , on
créa dans la ville des consuls, des tribuns et des dic-
tateurs. De leur tems , la ville d'Hostile fut ruinée , ses
édifices et ses habitans furent détruits , et il resta à
peine quelque trace de cette cité; mais quel est ou
quels sont les auteurs d'une ruine si horrible et si dé-
plorable? Aucun ouvrage n'en fait mention. Yoilà ce
qu^on lit dans l'histoire de Tournai. V auteur. Je suis
étonné que l'historien de cette ville , ayant trouvé les
choses précédentes et subséquentes concernant la ville
de Tournai, n'ait pas découvert l'auteur d'une des-
truction si effroyable. Il suffira, à celui qui voudra le
connaître , de consulter les histoires de Hugues de
Toul et de Lucius de Tongres ; il y trouvera les auteurs
de cette destruction.
CHAPITRE LIV.
De Blandinus , duc des Belges.
Hugues, ( comme ci-dessus).
Les Belges étant rentrés chez eux après ces vic-
toires , le duc Blandinus voulut sacrifier aux dieux
pour les remercier de sa fortune. Il avait cinq fils et
2 1 2 ANNALES
filiâ misitad iinmolandos idolo Beli; coiisiniillter misit
aliiiin cum filia ad dcam Mincrva^ placandam ; tcr-
tium vero cum filià misit idolo Pan ad immolandum.
Quibus factis, placavit populum et eorum corda at-
traxit. Tandem in populo non confidcns , princeps
sacerdotum Minervîic effectus Blandinius est, relictis
duobus filiis in manibus Bclgensium. Qui non longé
à monte Minervae oppidum fundans, Hostilicnses pro-
fugos, Hunnos atque Belgos indifférente!' suscipiens,
nomine proprio Blandino insignivit, quod etiàm mûris,
turribus et portis solemniter adornavit; et ut securiiis
et remotiùs à civitate belgensi distaret, et eorum vi-
taret pericula , quia ab una civitatis parte diligebatnr
et ab alia minime , in monte quodam suprà portum
finale maris, juxtà portum qui nunc dicitur Ganda ,
etiàm oppidum dicitur fundâsse et diem extremum
clausisse, Dicit tamen Lucius quod finaliter inter pa-
ludes ripariae quai Huyna dicitur, ipse Blandinus
castrum fortissimum construxit contra Belgos juxtà
locum qui nunc dicitur Crispinus (i), et illùc à Bel-
gensibus finaliter interemptus est. Lucius. Dicti Blan-
dini temporibus, Gorbogudo, rex Britanniœ, Ruthe-
nos invadens , oppida quàmplurima })rostravit, et
tandem secùs Oceanum progredientes , oppidum Blan-
dini in portu qui nunc dicitur Ganda , circumvalla-
verunt. Quod audiens Blandinus , Hunnos, Romanos
et BelgQs civitatcm Serviœ , Fanimartis , Fanisolis et
aliarum à belgensi civitate congregans cum feroci
apparatu ad Gorbogudoncm accessit. Qui siiiud liis
(i) Crepin, village :'i une lieue et demi'- ilc ('oudi*.
DE UAIXALT. LIVRE II. 2l3
«leuf llUes ; il envoya un de ses fils avec une de ses
filles pour être immolés à l'idole de Bel; il envoya
pareillement un autre de ses fils avec une autre de
ses filles pour être offerts en sacrifice à la déesse
Minerve ; enfin , il envoya un troisième fils avec une
de ses filles pour être sacrifiés à l'idole de Pan. Ces
sacrifices apaisèrent ses sujets , et lui rendirent leur
amour. Cependant, comme il ne se fiait pas à son peuple,
il se fit prêtre de Minerve , après avoir laissé ses deux
fils entre les mains des Belges. Il fonda , non loin de
la montagne de ^linerve , une forteresse dans la-
quelle il accueillit indifféremment les transfuges hos-
liliens , les Huns et les Belges , et à laquelle il donna
son propre nom de Blandinus. Il la munit de remparts,
de tours et de portes magnifiques ; et , pour être plus
en sûreté , et à plus grande distance de Belgis , et aussi
pour se mettre plus aisément à l'abri des dangers qu'il
redoutait de ce côté , parce qu'il n'était aimé que
d'une partie de la ville , il fonda , dit-on , sur une
montagne , au-dessus d'un port de mer , et près du
port que l'on appelle aujourd'hui le Sas de Gand , une
autre forteresse dans laquelle il mourut. Cependant ,
Lucius dit que , finalement , Blandinus construisit au
milieu des marais de la rivière de Haine , un château-
fort contre Belgis , près de l'endroit qui porte main-
tenant le nom de Crépin , et que c'est là qu'il fut tué
par les Belges. Lucius. Du tems de Blandinus, Gorbo-
gudon , roi de Bretagne , attaqua les Ruthènes , dé-
truisit un grand nombre de leurs places fortes , et ,
s'avançant ensuite le long des côtes de l'Océan , mit le
siège devant la forteresse de Blandinus , qui se nomme
aujourd'hui le Sas de Gand. Blandinus en ayant été
informé , rassembla les Huns , les Romains et les Bel-
9l4 ANNAIES
tertio congressl , Blandinus coegit Britoncs carbasa
conscendere. Qui potitiis victoriâ dictum oppidum
dilatavit , quo fortificato , ad propria remeans , in
Huyniae paludibus, ad laudis ejus tumulum, castrum
fundavit , cui nomen proprium imponens , in adver-
sarios postmodùim incommoda plurima retorsit. Victus
autem Gorbogudo , rex Britannine , ad alterum portum
applicans, civitatem Morianam ( i ) invasit , et patriam
devastans et Ruthenos officiens , Rutheni succursum
à Blandino postulârunt ; qui à totali Huiniâ et à prac-
libatis civitatibus magnum aggregans exercitum ,
versus Morianam quàmcitiùs perrexit. Cùm autem
Moriani atque Rutheni qui in dicta civitate reclusi
succursum perceperunt , uno impetu egredientes ,
Gorbogudonem simul invaserunt. In quo conflictu
priùs Answardo , rege Morinorum , mortuo , usquè
tamen ad maris littora Britones retorserunt. Morini
Rutheni victoriam considérantes, pro gratiarum ac-
tionibus referendis, filium Blandini, Suardum nomine,
in regem eorum elegerunt. Hic Suardus filiam dicti
Gorbogudonis , régis Britanniae , postmodùm in uxo-
rem susccpit. Blandinus tandem ab adversariis Bel-
gensibus in Castro proprio interemptus est.
(i) Terouennc.
DE HAINAUT. LIVRE II. 2 1 5
ges , ainsi que les habitans de Servie , de Famars , de
Solème et des autres cités , et marcha avec un grand
appareil de guerre contre Gorbogudon. Après trois
combats successifs , Blandinus força les Bretons à se
rembarquer. Ensuite il agrandit et fortifia la ville
qu'il avait bâtie , et à son retour dans ses foyers , il
fonda, pour monument de sa gloire, dans les marais
de la Haine , un château auquel il donna son nom ;
et d'où il incommoda fortement ses ennemis dans la
suite. Gorbogudon , roi de Bretagne , se rembarqua
après sa défaite , et ayant débarqué dans un autre
port , il attaqua la ville de Moriane , ravagea son ter-
ritoire, et causa de grands dommages aux Ruthé-
niens. Ceux-ci demandèrent du secours à Blandinus ,
qui leva une armée nombreuse dans toute la Huinie et
dans les villes ci -dessus mentionées, et marcha en
toute hâte au secours de Moriane. Lorsque les Morins
et les Ruthènes qui se trouvaient renfermés dans
cette dernière ville , eurent reçu les secours qu'ils
avaient demandés , ils firent une sortie et attaquèrent
avec impétuosité Gorbogudon. Answard , roi des Mo-
rins, fut tué au commencement de ce combat, mais
les Bretons furent repoussés jusque sur le rivage de la
mer. Les Morins et les Ruthènes , après cette victoire ,
élevèrent , par reconnaissance , sur le trône de leur
nation , Suardus , fils de Blandinus. Ce Suardus épousa
dans la suite la fille de Gorbogudon (1) , roi de Breta-
gne. Quant à Blandinus , il finit par être tué dans sa
propre forteresse par les ennemis qu'il avait parmi les
Belges.
f î) La chronologie des rois brelons ( Mémoires pour servir à This-
toirc ancienne du Globe, i, i85) nous apprend qu'en effet Gor-
bodug régna soixante-frois ans sur les Bretons, depuis l'an 549
jusqu'à l'an 'iSy avant notre ère.
3l6 ANNALES
CAPITULUM LV.
De cessationc regiim Romanorum et institutionc consuluni.
MA.RTINUS (l
PosT Tarquinium Supcrbiim , in Roma cessaveriint
regcs in urbe rcgnarc , qui regnaverunt per annos tlu-
ccntos et quadraginta olympiadis lxviii (2); et ordi-
navcrunt romanam rempublicam regendam per con-
sules ; statuerunt quoque ut duo consules per unura
annum rcgerent , ne ex protractu temporis ex dominio
in superbiam erigercntur. Tune Roma vix adbuc us-
què ad quintam decimam lapidem impcrium tencbat,
( milliaria enim tune lapidibus distinguebantur, sicut
et modo abcubi termini agrorum per lapides distin-
guuntur). Fecerunt ergo tune consules Lucium et
!i) Cette citation est irès-importante ^ elle peut avoir e'te puisce
«lans un très-ancien manuscrit rjuc je possède , et qui est conforme
à l'édition publiée par Jean-Basile Hcrold et Sufl'rid Pétri; elle ne
se trouve point dans celui qu'a fait imprimer Jean Fabricius qui
n'est donc ni plus exact ni plus correct, comme Fabricius l'a cru ,
et comme le repète la Biographie universelle à l'article Martin le
Polonais, xxvii , 3oo.
(a) La royauté' fut abolie à Rome la quatrième anne'c de la 66'
olimpiade ( an Siî av. J.-C. ) selon Eusèbe. Mais nous avons vu
qiTjl fallait rapporter cet événement à l'an 5io avant notre ère.
m: iiAi\.\rT. T.ivnr ii.
CHAPITRE LV.
De rabclitiop. lies rois des Romains, et de rétablissement des consuls
MARTIN DE POLOGNE.
Après Tarc£uin le Superbe , la royauté fut abolie h
Rome. Les rois avaient gouverné la ville pendant deux
cent quarante ans , et jusqu'à la soixante-huitième
olimpiade. 11 fut établi que la république romaine se-
rait gouvernée par deux consuls , qui ne resteraient
en fonctions que pendant un an , de peur qu'une ad-
ministration d'une plus longue durée n'excitât leur
orgueil. Alors la domination de Piome s'étendait à
peine jusqu'à la quinzième pierre hors de son enceinte :
( les milles étaient en ce tems-là marqués par des pier-
res, de la même manière qu'en plusieurs pays les limites
des champs sont fixées aujourd'hui ). Lucius et Brutus
furent créés consuls. Vers cette époque , Pithagore et
Anaxasoras moururent à Rome.
2l8 ANNALES
Briitum. His temporibus, Pythagoras Romae obiit et
Aiiaxagoras (i).
CAPITULUM LVI.
De Suardo, regc Moriiiorum.
LUCIUS.
MoRTUO Blandino , duce Belgorum , successlt sibi
Suardus , rex Morinorum , filius ejus. Hic Suardi.s
fratrem uxoris suœ regcm Britanniaî in regnum po-
tcnter restituît. Suardus tamen credens intestina odia
civitatis belgcnsis pacificare , saccrdotes et nobilcs sibi
in omnibus parentes, à mcdiocribus et exiguis invasus,
templum Bacchi subintrans , non obstantibus dcfen-
sionibus tàm suorum quàm nobilium et omnipotentiâ
sacerdotum, interfectus est. Proindè Morini, Rutheni
atque Britones per longa tcmpora Belglm infcstam
liabuerunt. Morini vero Cherilphoncm, filium Suardi,
in regem eorum clcgcrunt. Ab illo tune Bclgi de-
creverunt novum ducem eligere naturalem asper-
(i) D'après lamblique , cite par M. Larcli(!r ilans sa clironolosjie
d'Héroclotc , p. 553 de la seconde édition , Pilhagore mournt Tan
5io avant notre ère , âgé de quatre-vingt-dix-huit ans. Or , Eusèbc
place les premiers consuls sons Tan 5ii. Ainsi ces deux opinions
ne sont nullement contraires.
DE HAINAUT. LIVRE II. 219
CHAPITRE LVI.
De Suardiis, roi des Morins.
LUCIUS.
Blaisdinus, duc des Belges, étant mort, Suardus ,
son fds , roi des Morins , lui succéda. Ce prince réta-
blit sur le trône le roi de Bretagne , frère de son
épouse , et lorsqu'il croyait avoir éteint les haines in-
testines de la cité de Belgis et qu'il se voyait obéi en
tout des prêtres et des nobles , il fut attaqué par le
peuple et la populace , et obligé de se réfugier dans le
temple de Bacchus , où il fut tué malgré la résistance
des siens et des nobles , et la toute-puissance des prê-
tres. Depuis cet événement, les Morins , les Ruthènes,
et les Bretons nourrirent une haine violente contre
Belgis. Les Morins choisirent pour roi Chérilphon ,
fils de Suardus. Ce fut alors que les Belges résolurent
de se nommer un nouveau duc , sans avoir égard au
successeur légitime de Suardus ; et en effet , ils élu-
rent un nommé Léo , qui était verdier (1) d'un chas-
seur. Après la mort de Léo ils nommèrent à sa place
(i^' Garde-f'MCsticr.
2 '20 AiNlNALES
nentes , et tune vernaculum cujiisdam vciialoris,
Leonem nomiiie, in clueem eoruni clegcrunt. Quo
mortiio, WalacriuLim, eominunem plebanum fortissi-
mum viribus corporis, ducem eorum statuerunt. £x
Hislorid Britonum. Mortuo Rinmarco, Gorbogudo,
filius cjus, olectus est in rcgem Britanniœ. Huic nati
flierunt duo filii , quorum unus Ferrex et alius Porrex
nominati sunt. Ciim autem pater in senium vergisset,
orta est contcntio inter eos quis in regno eorum suc-
eederet. Et Porrex, niajori cupiditate subductus,
paratis insidiis fratrem interficere parât. Quod ciim
illi compcrtum fuisset , vitato fratre , transfretavit in
Galliam ; sed usus auxilio Suardi , régis Francorum ,
( Actor. id est Gallorum Morinorum , quia nondùm
erat Francia) reversus est, et cum fratre dimicavit.
Pugnantibus tamen illis , interfectus est Ferrex et
magna multitudo quœ ipsum comitabatur. Porro ma-
ter eorum cui nomen erat Indoîi (i) cùm de nece filii
certitudinem habuisset, ultra inodum commota , in
odium alteriûs versa est. Undè lanta ira ob mortem
ignescebat ipsius , ut ipsum in fratrem vindicare affec-
taret. Nacta ergo tempus quo ille sopitus fuerat , ag-
greditur eum cum ancillis suis, et in plurimas seca-
tiones dilaceravit, et mortuus est,
(i) LVdilion di; l'iiistoiro des Hretons do iSiy, raj)j)ello tViik-n.
DE IIAINAUT. LIVRE II. 22 1
Walacrinus , homme du peuple et sans illustration ,
mais doué d'une force prodigieuse. Extrait de l'histoire
des Bretons . Après la mort de Kinmarcus , Gorbogudon,
son fds, fut élu roi de Bretagne. Ce prince eut deux
fds, nommés, l'un, Ferrex, et l'autre, Porrex(l). Lors-
que leur père fut devenu vieux , il s'éleva entre eux
une querelle , parce qu'ils prétendaient l'un et l'autre à
la couronne. Porrex, poussé par l'ambition , dressa
des embûches à son frère et chercha à le tuer. Mais
celui-ci s'en étant aperçu , échappa à Porrex et passa
dans la Gaule ; puis muni du secours de Suardus , roi
des Francs [W^utcur. c'est-à-dire des Gallo-Morins ,
parce que la France n'existait pas encore ) , il revint
dans sa patrie , combattit son frère , et fut tué avec un
grand nombre de ceux qui l'accompagnaient. La mère
de ces princes , nonnnée Indon , ayant été informée
de la mort de son fils , en ressentit la douleur la plus
vive , et conçut une haine violente contre son meur-
trier. La perte qu'elle venait de faire l'enflamma d'une
si grande colère qu'elle songea , pour venger son fils ,
à faire périr son autre fiîs Porrex. Saisissant le mo-
ment où celui-ci était enseveli dans les bras du som-
meil , elle l'attaque avec ses servantes, et le fait mou-
rir en le coupant en plusieurs morceaux.
(i) Suivant la chronologie dfs rois bretons (^Mcinoircs pour servir
à l'histoire ancienne du Globe , I , i83 ) , Gorbodug succéda à Kin-
marc l'an 549, ^^ niourut l'an 4^7- Après lui, ses fils Feiiex et
Porrex régnèrent quatre ans, de 48^ à 4^3.
222 ANNALES
CAPITULUM LVII '
De Cyro, rege Pcrsarum.
ACTOR.
Ut autem annos nostros juste rectificare possimus ,
ad historiam sacrœ Scripturae , quam aliquantuliim
prœteiinisimus , recurrendum est. Eusehius. Anno
captivitatis judaicœ xxx (2), Cyrus, rcx Mcdorum ,
iraperium destruxit , subversoque rege corum Astria-
ge, regnum ad Persas transtulit. Cœpit igitur anno
setatis quartae xxxi, mundi vero iiimcdiv (3), et rc-
gnavit annis xxx. Comestor. Iste Cyrus fuit ncpos
Darii ex sorore , nepos autem Astriagis ex filiâ ; nàm
Astriages unicam habuit filiam, et vidit in somniis
quod de genitalibus filiœ oriebatur vitis quae totam
occupabat Asiam; et accepit à conjectoribus se habi-
turum nepotem ex filiâ qui dominus esset Asiœ, et
ipsum dejiceret à regno. Quod timens dédit filiam
suam militi plebeio , ne filius ex eo nasceretur nobilis
(i) Le fond de cette histoire de Cirus est puise dans He'rodotc,
mais plusieurs circonstances et les plus extraordinaires , ne se trou-
vent pas dans le récit de cet historien.
(2) L'an 56o av. J.-C. , suivant Eusèhc.
(3) L'an 559 av. J.-C.
DE HAINAUT. LIVRE II. 2 20
CHAPITRE LVII.
De Ciriis , roi des Perses.
L AUTEUR.
Pour rectifier nos calculs dans le compte des an-
nées , il est nécessaire de recourir à l'histoire de l'Écri-
ture-Sainte que nous avons un peu négligée, Eusèbe.
En l'an 30 de la captivité des Juifs , le roi Cirus
détruisit l'empire des Mèdes ; et , après avoir renversé
leur roi , fit passer le royaume sous la domination dés
Perses. Il commença donc à régner en l'an 31 du qua-
trième âge , et du monde 3404, et occupa le trône pen-
dant trente années. Comestor. Ce Cirus était neveu de
Darius par la sœur de ce prince, et petit-fils d'Astiages
par la fille de ce dernier. Astiages n'avait qu'une seule
fille ; il vit en songe que du sein de celle-ci sortait une
vigne qui couvrait toute l'Asie. Des interprètes lui prédi-
rent qu'il naîtrait de sa fille un enfant qui serait le maître
de l'Asie, et qui le renverserait lui-même du trône.
Dans la crainte de cet événement, Astiages donna sa fille
en mariage à un homme de basse condition , afin que
l'enfant qui naîtrait de ce mariage ne fût ni puissant
ni noble. Outre cela , il fit venir sa fille , lorsqu'elle fut
sur le point d'accoucher, et remit le fils auquel elle
donna le jour à l'un de ses confidens , pour le faire
2 24 ANNALES
et potens. Praetereà fillam prœguantem ascivit, et
iiatum ex eâ filium cuidani participi arcanoruni tra-
didit occidenduin. Qui credens regnum transiturum
ad filiam , filium ipsiûs veritus est occidere , et uni de
pastoribus régis tradidit parvulum cxponendum in
nemorc. Qui cùm exposuisset eum , et id indicâsset
uxori quse in dicbus illis pepererat , supplicavit ei mu-
lier ut ei parvulum deferret alenduïn , et proprium
pro eo exponeret. Cùm rediisset pastor ad puerum ,
invcnitcanem prtebentem ei ubera et à feris et ab avibus
defendentem. Ciimque tulisset eum ad uxorem , allusit
ei tanquàm diù notée, vocavitque eum Spartacum, id
est, Catulum ; spartos enim pcrsicè canem sonat la-
tine. Qui cùm esset grandiculus , à pueris ludentibus
factus est rex eorum , et contumaces et inobedientes
sibi graviter afïligebat. Quod graviter ferentes patres
eorum, verbum detulerunt ad regem de filio pastoris.
Quem cùm advocâssct rex, et argueret eum quod puc-
ros plagâsset , ille intrepidus se ut regem fecisse res-
pondit. Et admiratus est rex , et quaedam signa geueris ■
sui dcprehendens , ascito pastore secretiùs, veritatem
rei agnovit. Verùm tamen timor ejus de ncpotc miti-
gatus est , œstimans quod verbum conjectorum de
regno impletum esset puerorum; et eidem cui priùs
commiserat occidendum commisit alendum , non indi-
cans tamen esse nisi pastoris filium. Filium quidcm
illiûs secretarii sui clamculo dcdit patri ad comedoii-
dum , quia non obedierat ori ejus , et post indicavit
ei. Factum est autcm ut Astriages traderet exercitum
illi secretario ad hostes expugnandos ; ipse vero resc-
DE UAINALT. LIVRE II. 22'3
mourir. Celui-ci, croyant que le royaume passerait à
la fille d'Astiages, craignit de tuer le fils de cette prin-
cesse , et le livra à un berger du roi pour l'exposer dans
un bois. Le berger, ayant fait ce qui lui avait été pres-
crit , raconta le tout à sa femme qui venait d'accoucher.
Alors celle-ci le supplia de lui apporter l'enfant pour
le nourrir, et d'exposer le sien à sa place. Le berger
retourna donc auprès de l'enfant , et trouva une
chienne qui lui présentait ses mamelles, et qui le dé-
fendait contre les bêtes féroces; et les oiseaux ; il le prit ,
et, l'ayant porté à sa femme, l'enfant sourit à cette
dernière , comme s'il l'eût connue depuis long-tems ,
et reçut d'elle le nom de Spartacus , c'est-à-dire, petit
chien ; car spartos, en persan^ veut dire chien. Lorsque
cet enfant fut devenu un peu grand , il fut choisi par les
autres enfans qui partageaient ses jeux, pour être leur
roi , et il punit avec rigueur tous ceux qui lui résistaient
ou qui lui désobéissaient. Les parens de ceux-ci ne
souffrant qu'avec peine cette tirannie , en firent leur
rapport au roi , et se plaignirent à lui du fils de son
berger. Le roi l'ayant fait venir, et le grondant au sujet
des mauvais traitemens qu'il fesait subir à ses cama-
rades , celui-ci , d'un air assuré , lui répondit qu'il avait
agi en roi. Cette réponse frappa le prince d'admiration ;
et ayant reconnu son origine à quelques signes parti-
culiers, il tira le berger à l'écart et apprit de lui la vérité
du fait. Alors les craintes qu'il avait eues de son petit-fils
vinrent à se calmer, jugeant que la prédiction des de-
vins avait reçu son effet dans cette autorité royale que
son petit-fils avait eue sur des enfans. Il confia donc
l'éducation de ce dernier à la même personne à laquelle
il avait remis jadis le soin de le faire mourir, sans lui
dire néanmoins autre chose sinon que l'enfant était fils
IL i5
226 ANNALES
(lit in provincid Media. Porro ille non immemor ma-
leficii régis , persuasit exercitui ut Spartacum regem
Persldis eligerent , et cognominavit eum Cyrum ,
quod interprctatur haeres , quasi diceret : licèt rcluc-
tetur Astriages, tamen hic est haeres. Quo facto, timens
AstriagesDarium consobrinum adoptavitsibi infihum,
et collecte exercitu congressus est adversùs Cyrum, et
fugerunt Persœ. Uxores autem eorum et matres egres-
sœ sunt adeos, et detectis suis posterioribus,aiebant :
«Vultis-ne introire in uteros matrum et renasci?»IIoc
pudore excitati Persœ acriter redierunt in hostes , et
victus est Astriages. Cyrus autem magis se exhibuit
illi nepotem quàm victorem; nàm regnum Hyrcano-
rum concessit ei , Dario vero , tanquàm fratri suée
matris , tradidit regnum Medorum , tamen sub tecttî
spe revertendi ad ipsum.
DE HAINAUT. LIVRE li. 2 2"
d'un berger. Mais, pour punir son confident de sa dés-
obéissance , il lui donna à manger son propre fils ; puis
il lui découvrit la chose. Mais il arriva qu' Astiages ayant
confié à ce même confident le conïmandement d'une
armée pour combattre les ennemis , celui-ci se retira en
Médie; et, gardant le souvenir de l'outrage que lui avait
fait le roi , il persuada à l'armée d'élire rôi de Perse Spar-
tacus , auquel il donna le nom de Cirus , qui signifie
héritier, voulant dire que Cirus hériterait du trône
malgré Astiages. Après cet événement , Astiages tour-
menté par la crainte, adopta pour fils Darius (1) son
cousin, et , après avoir levé une armée , attaqua Cirus.
Les Perses prirent la fuite; mais leurs épouses et leurs
mères sortirent à leur rencontre , et soulevant leurs
vétemens s'écrièrent : Voulez-vous rentrer dans le sein
de vos mères et renaître? Les Perses couverts de honte
à cette vue revinrent avec ardeur au combat , et As-
tiages fut vaincu. Cirus alors se conduisit plutôt en
petit-fils qu'en vainqueur ; car il lui céda le royaume
des Hircaniens , et donna à Darius en sa qualité de
frère de sa mère , le royaume des 3Ièdes , mais avec
l'espoir tacite que ce royaume lui reviendrait un jour.
(j) Ce Darius dont Hérodote ne parle point , et que Xenophon
appelle Ciasarès, est connu sons le nom de Darius le Mède. Le
prophète Daniel dit qu'il était fils d'Astiages. Voyez l'article Da-
lius dans le Dictionnaire de la Bible par dom Calmet.
228 ANNALES
CAPITULUM LVIJÏ
Dt; Esopo philosoplin.
EUSEBIUS.
Anno regni Cyri , régis Pcrsarum , primo ( i), Eso-
pus à Dclphis intcrimitur. Actor. Fertur quod iste
Esopus compilavit libellum de fabulis moralibus , qui
quidem incipit :
Ut juvet et prosit conatur pagina prœsens ;
Dulciiis arridcnt séria picta jocis.
A sexto decimo autem anno Josiœ usquè ad annuni
primiim Cyri computantur anni lxx. Sciendum quo-
que est ab anno quarto Joathan usquè ad annum
primum Cyri computari annos ducentos et deceni ,
tantum autem temporis dicit Josephus Isaiam de
Cyro anno antcquàm regnaret prophetâsse. Undè
videtur anno quarto Joathan Isaiam dixissc : « Hœc
dicit Dominus Christo mco Cyro cujus manum ap-
prehendi , etc. »
(i) An 55g av. J.-C.
DE HAINAUT. LIVRE II. 2 29
CHAPITRE LVIII
Du sage Esope.
EUSEBE.
En l'an premier de Cirus, roi des Perses, Ésope est
tué par les habitans de Delphes. L'auteur. On rapporte
qu'Esope compila un livre de fables morales qui com-
mence ainsi : Le présent écrit s efforce de plaire et d'in-
struire ; les choses sérieuses ont plus de charme lorsqu'elles
sont unies au hadinage. Depuis la seizième année de
Josias jusqu'à la première de Cirus on compte soixante-
dix ans. Il faut savoir encore qu'on compte deux cent
dix années depuis la quatrième année de Joathan jus-
qu'à la première de Cirus ; et les prophéties d'Isaïe au
sujet de Cirus , eurent aussi lieu , dit .Tosèphe , deux
cent dix ans avant le règne de ce prince ; d'où il parait
que ce fut en la quatrième année de .loathan qu'Isaïe
dit : « Voici ce que dit le Seigneur à Cirus , mon oint ,
dont j'ai pris la main , etc. »
230 ANNALES
CAPITULUM LIX
De regibus Persarum.
Persarum itaque primus rex Cyrus regiiavit annis
XXX. Secundus Cambyses aimis viii; hune secundum
aiuiit Nabuchodoiiosor vocari, subquohistoria Judith
describitur. Post hune duo fratres regnavcrunt men-
sibus vu; post quos Darius, fîhus Hystaspis, xxxvi
annis. Quintus Xcrxes xx annis. Sextus Artabasus
mensibus vu. Septimus Artaxerxes Longimanus an-
nis XL. Octavus Xerxes Seeundus mensibus ii. Nonus
Sogdianus mensibus viii. Decimus Darius Nothus
annis xix. Undeeimus Artaxerxes, qui et Assuerus
dieitur, sub quo historia Ilester expleta videtur, an-
nis XL. Duodecimus Artaxerxes qui et Ochus xxvi (i).
ïredecimus Darius, Arsami fîHus, vi annis; quo Alexan-
der, rex Macedonum, interfecto, obtinuit Babyloneni,
et sic regnum Persarum destructum est. Actor. Haec
de ChronicisEusebii breviterexcerpsi. Babylonem de-
niquè, anno primo Cyri régis, fuisse captam videtur
velle Daniehs historia ; cùm dicit : Fuit autem Da-
m'cl us(juè ad annmn piimiun Cjri régis , etc.
(i)Le règne d'Arscs , (ils iFOchus , est omisj il fui de trois ou
quatre ans, selon les diirerenle* éditions d'Eusèbc.
DE HAINAUT. LIVRE II. 2Jl
CHAPITRE LIX.
Des rois des Perses.
Le premier roi des Perses fut donc Cirus qui régna
trente années. Le second fut Cambise qui en régna
huit , et qui , dit-on , fut ce Nabuchodonosor sous le
règne duquel fut écrite l'histoire de Judith. Après
Cambise , deux frères occupèrent le trône pendant
sept mois , et eurent pour successeur Darius fils d'His-
taspe , dont le règne fut de trente-six ans ; le cinquième
roi fut Xerxès qui en régna vingt ; le sixième Ai'tabase
qui régna sept mois ; le septième Artaxerxès-Longue-
main qui régna quarante ans ; le huitième Xerxès II qui
régna deux mois ; le neuvième Sogdien qui régna huit
mois ; le dixième Darius-Nothus qui régna dix-neuf ans ;
le onzième Artaxerxès qui est aussi appelé Assuérus ,
au règne duquel paraît devoir être rapportée l'histoire
d'Esther, et qui régna quarante ans; le douzième Arta-
xerxès nommé aussi Ochus, qui régna vingt-six ans, le
treizième Darius fils d' Arsame,qui régna six ans. Lorsque
ce prince fut tué, Alexandre , roi de Macédoine, s'em-
pai a de Babilone , et mit fm de cette manière au royaume
des Perses. L'auteur. Voilà ce que j'ai extrait briève-
ment des chroniques d'Eusèbe. L'histoire de Daniel
semble marquer que Babilone fut prise en la première
année du règne de Cirus ; car elle dit : Daniel vécut jus-
qu'à la première année du roi Cirus , etc
202 ANXALES
CAPITULUM LX
De Babvlonicâ civitate.
iiiERONYMUS , super haiam y libro v".
BabylojveM fuisse potcntissiinam et in campestribus
per quadrum sitam , ab angiilo usquè ad angulum
mûri XVI millia tcnuisse passuum , id est simul per cir-
cuitum LXiv (i). Arx autcni, id est capitoUum illius
urbis , est turris , (jusp icdificata post diluvium , in
altitudine tria millia dicitur tenere passuum , paula-
t'im de lato in angustias coarctata, ut pondus immi-
nens faclliùs à latioribus sustentetur. Describunt ibi
Icmpla marmorea , aureas statuas , plateas lapidibus
auroque fulgcntcs, et multa alia quac penc videantur
incredibilia. Hoc totum narravimus , ut ostenderemus
quod ad iram Dei omnis potentia pulvis sit , et favilla^
et cincri comparetur. Coineslor. Igitur Cyrus divise-
rat Euphratum , longé à civitate babylonica, per plu-
res rivos , ut alvcum qui fluebat in civitate vadabilem
faceret; et per ipsum ingressi sunt hostes in civitate
(i) Ces mots, rejerl Hivodntits , rt niuUinhi i/iti grœcas hislorint
t oiiscripseriint , sont omis «Tans notre aiik'in, mais se Iroiivcnl (lans
les e'ililions de S. Ji'iôme.
DE HAINAUT. LIVRE II. 2.>v>
CHAPITRE LX.
De la ville do Babiiont
Saint Jérôme , au livre v ck son commentaire sur Isàie.
HÉRODOTE et plusieurs autres historiens grecs , disent
que Babilonc fut une ville très puissante , bâtie en carré
dans une plaine , et ayant seize mille pas d'un angle à
l'autre , c'est-à-dire , soixante-quatre mille pas de circuit.
La citadelle , c'est-à-dire , le capitole de cette ville , est
une tour bâtie après le déluge , haute , dit-on de trois
mille pas , et se rétrécissant de la base au sommet ,
afin que son poids soit plus aisément supporté par des
assises qui sont de plus en plus larges. On dépeint la
ville comme décorée de temples de marbre , de statues
d'or, de places éclatantes d'or et de pierreries , et de
beaucoup d'autres richesses qui paraissent presque in-
croyables. Du reste nous n'avons fait cette description
que pour montrer que contre la colère de Dieu toute
puissance est poussière , et ne peut être comparée qu'à
la fumée et à la cendre. Comestor, Cirus avait donc
divisé l'Euphrate , loin de la ville de Babilonc , en
plusieurs canaux , afin de rendre guéable le lit du
fleuve qui coulait dans la ville. Les ennemis entrèrent
clans la cité par ce lit, en passant sous les remparts,
et Ballhazar fut tué. Darius, auquel Cirus marquait
234 ANNALES
sub muro, et interfectus est Baltliazar; et successit ei
Darius (i) in regnum annos xlii : iiam et Cyriis ei
tanquàm majori in omnibus deferebat.
CAPITULUM LXI
Quùd angeli provinciales Persarum ut Griccoriim imjn'cliebant
reditum captivitatis Judaeorum.
Anno igitur tertio (2) regni Cyri, prima die meu-
sis primi, lugebat Daniel trium hebdomadarum die-
bus (3). Die autem xxiv, dùm csset juxtà lluvium
Tigris , vidit : Et ecce vir vestitus lineis , accinctus
zona aurea, cujus faciès quasi fulgur, oculi ut lani-
pades, et senno ejus quasi vox multitudinis. Porro
viri qui erant cuni eo territi fugerunt ; et solus vidit
visionem ; et corruit in faciem suam , sed vir ille ac-
cessit, et erigens cum et confortans , ait : « Noli me-
tuere , Daniel, quia ex die primo niensis quo posuisti
cor tuum, ut te afïligercs coràni Deo, cxaudita sunt
verba tua, et egressa est scntentia à Deo de redilii
populi Israël , et eadem die volui ad te vcnire , ut
nunciarem ; sed princeps regni Persarum rcstitit niihi
(i) Darius le Mètlc dii Ciaxarr ii.
(2) L'an 557.
(5) Dan. chap. x.
DE HAINAUT. LIVRE II. 2 05
beaucoup de déférence dans toutes les occasions , comme
étant beaucoup plus âgé que lui , succéda à Balthazar,
et régna quarante-deux ans.
CHAPITRE LXI.
Les anges , protecteurs des Perses et des Grecs , empêchent le retour
des Juifs de leur captivité'.
En la troisième année du règne de Cirus , depuis le
premier jour du premier mois , Daniel fut dans les
pleurs pendant trois semaines. Le vingt-quatrième jour,
comme il était près du fleuve du Tigre , il vit tout à
coup un homme vêtu de lin , ceint d'une ceinture d'or,
dont le visage brillait comme les éclairs et les ieux
comme des lampes ardentes, et dont la voix était
comme celle d'une multitude. Or les hommes qui
étaient avec lui furent épouvantés et s'enfuirent; et il
eut seul cette vision ; et il tomba la face contre terre ;
mais l'homme s'approcha de lui, le fit relever, et le
rassurant , lui dit : « Ne crains rien , Daniel; car dès le
premier jour du mois que tu as déposé ton cœur pour
gémir en présence de Dieu , tes paroles ont été exaucées ,
et le Seigneur a prononcé sa sentence touchant le retour
du peuple d'Israël. Et j'ai voulu ce même jour venir
vers toi pour t'en instruire ; mais le prince du royaume
des Perses m'a résiste vingt et un jours , et lorsqu'au
bout de ce tems je suis sorti, le prince des Grecs a
236 ANNALliS
viginti et uno diebus ; cùmque tune egrcderer, appa-
l'uit princeps Grœcorum , veuiens , ut adversaretur
principi Persarum et milii; et aliquantam feci moram,
et nunc venio ut ccrtificcin te de reditu populi Israël,
etinhisnemo est mihi adjutor, nisi Michael, princeps
noster. » Hos duos principes Graecoruni et Persarum
dicit Hicronynius angelos malos fuisse, qui oppositi
sunt regnis illis ad cxercitium. Laborabat itaquc an-
gélus Persarum ne Hebraei liberarentur à dominio
Persarum , ti^im quia delectabatur afïiictionibus eorum,
tiim ut Persœ diutiùs affligentes eos graviiis peccarent.
Laborabat etiàm angélus Graecorum ut Persœ et cap-
tivitas Hebrœorum cum eis transirent in dominio Grae-
corum. Gregorius autem vult eos fuisse angelos bonos,
qui satagebant ne tàm cito liberarentur Hebrœi , ut si
quid in eis erat purgandum purgarctur et dccoquere-
tur ad unguem. Porro à primo anno Darii, orabat
Daniel pro eo, ut staret et roboraretur regnum ejus,
et sollicitus erat de successoribus regni Persarum ,
volens eos scire, de quorum manifestationc décima
visio ci ostensa est.
DE IIAINAUT. LIVRE II. 2J7
paru pour s'opposer au prince des Perses ainsi qu'à
moi , et je me suis arrêté , et maintenant je viens pour
l'instruire du retour du peuple d'Israël, et nul ne
m'assiste dans ces choses , si ce n'est Michel notre
prince. » Saint Jérôme dit que ces deux princes des
Grecs et des Perses étaient de mauvais anges , qui
s'exerçaient à nuire à ces royaumes. Ainsi l'ange des
Perses s'opposait à ce que les Hébreux fussent délivrés
de la domination des Perses , tant à cause du plaisir
(ju'ii prenait à leurs afflictions , que parce que les Perses
péchaient d'autant plus qu'ils les affligeaient plus long-
tems. De son côté, l'ange des Grecs s'efforçait de faire
passer les Perses et les Juifs captifs sous la domination
des Grecs. Mais saint Grégoire veut au contraire que
ces êtres soient de bons anges , qui s'opposaient à la
promte délivrance des Hébreux , pour leur donner le
tems de se purger de leurs souillures s'ils en avaient
encore besoin , et de se rendre sans tache. Or dès la
première année de Darius , Daniel priait pour la sta-
bilité et la force de son royaume , et il était inquiet au
sujet des héritiers du royaume des Perses. Il désira de
les connaître , et ils lui furent manifestés dans la dixième
vision qu'il eut.
238 ANNALES
CAPITULUM LXII.
De primo retlitu captivitatis Jiidœorum sub duce eorum Zorobabcl.
PoRRO clarissimi Juclseorum viri habitabant In Ba-
byloniâ, id est, in terra Babylonis eversae. Inter eos
Zacharlas , natus in Chaldœâ , jàm prophetabat. Hic
benedixit Salathiel in fîlio , vocans eum Zorobabel ,
quod interpretatur magister Babylonis , quasi diccret
hic crit magister captivitatis babylonicœ. Ad hiijus
prophétie exhortationem primi surrexerunt viri Juda
ut ascenderent in Jérusalem ; posteà vero viri Benja-
min et Levitae. Igitur in tertio anno Cyri, egressi sunt
sub Zorobabel duce et Jesu magno sacerdote , adlior-
tantibus eos Zacharid prophetâ et Aggaeo juvene sed
nondùm prophetâ. Erant autem circiter quinquaginta
millia; fuerunt enim de Judœis xlii millia cccxl ,
reliqui vero erant servi et ancillœ , et homines generis
promiscui. Et remisit cum eis Cyrus parlem vasorum
Domini vmxxx. ïlic est annus lxx relaxandae captivi-
tatis (i) quem prœdixit Jcremias. Porro in anno re-
gressionis in Judœam , congregatus est populus quasi
'i ) L'an 520 a\ . J . i'.. , selon Eust-be , et, suivant TArt dv. vcriUer
les Jates , l'an 537
DE HAINALT. LIVRE II. ajQ
CHAPITRE LXII.
I)ii premier retour îles Juifs de leur captivité , 5ous leur chef
Zorobabel.
Or les premiers d'entre les Juifs demeuraient dans
la Babilonie , c'est-à-dire , sur le territoire de Babilone
qui avait été renversée , et parmi eux se trouvait Za-
charie , qui était né dans la Caldée , et qui déjà prophé-
tisait. Ce prophète bénit Salathiel dans la personne de
son fils, en appelant celui-ci Zorobabel, qui signifie
maître de Babilone , voulant dire qu'il serait le chef des
captifs de Babilone. A l'exhortation de Zacharie les
premiers hommes de Juda se levèrent et montèrent à
Jérusalem ; ceux de la tribu de Benjamin et les lévites
les suivirent. Ainsi, en la troisième année de Cirus ,
ils sortent sous la conduite de Zorobabel et de Jésus ,
grand-prètre , animés par les discours du prophète
Zacharie, et d'Aggée, qui était jeune alors, et qui ne
prophétisait pas encore. Ils étaient près de cinquante
mille, dont 42,340 Juifs et le reste esclaves et ser-
vantes , ou hommes de race mêlée. Cirus renvoya avec
eux , 5030 des vases du Seigneur. Cette année est la
soixante-dixième prédite par Jérémie pour être celle
de la fin de la captivité. Or, dans l'année du retour
en Judée, le peuple, comme s'il n'eût formé qu'un seul
homme, se rassembla à Jérusalem, releva l'autel , en
^40 ANNALES
vir unus in Jérusalem; et œdifieaiites altare, colloca-
verunt illud super bases suas, et obtulerunt super
illud holocausta Domino mauè et vespcrè, fecerunt-
que solemnitatem tabernaculorum. Undè vero liabuc-
runt ignem nescimus, nisi forte ex calculis veteris
altaris excusserunt illum. Anno autem secundo (i),
secundo mensc, jecerunt fundamenta templi; ciunque
apparuissent fundamenta super terram, éleva vit po-
pulus vocem in jubilatione. Porro quidam senioresqui
viderant templum priiis , ejulabant voce magnâ; nec
poterat quisquam agnoscere clamorem lœtantium
et planctum ejulantium. Porro Samaritœ indignati
impediebant manus eorum ; cimique Persœ impedire
non possent, dederunt munera principibus régis, qui
pecuniis eorrupti vendiderunt negligentiam œdifica-
tionis, Cyro tamen ignorante; et adeo impedierunt
eos quod, in xxx annis quibus Gyrus regnavit, non
erexcrunt muros templi , nisi usquè ad appodiatio-
nem.
(I ) L\in 5i8 av. J.-C. , suivant Eiisèbe.
DE IIAINAUT. LIVRE II. 24 1
le plaçant sur son ancienne base , et matin et soir offrit
dessus des holocaustes au Seigneur. Il célébra aussi la
fête des Tabernacles. Mais nous ignorons où il se pro-
cura du feu , à moins qu'il n'en ait peut-être tiré des
cailloux de l'ancien autel. Au second mois de la se-
conde année furent jetés les fondemens du temple ; et
lorsqu'ils parurent hors de terre , le peuple fit retentir
les airs de ses cris de joie. Quelques-uns des plus âgés
qui avaient vu le premier temple , se lamentaient à
haute voix , et l'on ne pouvait distinguer les cris d'al-
légresse des cris de douleur. Mais les Samaritains in-
dignés s'opposaient de tous leurs efforts à l'avance-
ment des travaux ; et comme les Perses ne pouvaient
les arrêter , ils firent des présens aux officiers du roi ,
qui se laissèrent corrompre à prix d'argent , et vendi-
rent la suspension des travaux, sans néanmoins que
Cirus en eût connaissance ; de sorte qu'ils empêchèrent
les Juifs d'élever , pendant les trente années que régna
Cirus , le temple au-dessus de la hauteur d'appui.
II.
16
'2l'i2 ANNALES
CAPITULUM LXIJÏ
De morte Cyri , régis Persaruni.
Anno Cyri xfii (i), Crosus à Cyi'o captus est,
et Lydorum regnum destructum est, quod stctit an-
nis ccxxxi. Hic est ille Cresus ditissimus rex de quo
narratur, quod, cùm ei omiiia prospère evenisse glo-
riaretur et divitiarum copia niniiiim se jactaret, dic-
tum est ei à Solomiiio quodam sapientissimo , non
debere quemquam in divitiis et prosperitate gloriari.
Eâdcm noctc vidit in somniis quod Jovis eum aqua
perfunderet et sol extcrgeret. Quod cùm filiae su<t
Famiae indicasset, illa ut res se habebat prudenter
absolvit ; dicens quod cruci esset affigendus et aqu;i
perfundendus et à sole siccandus. Quod ità demiun
contigit, nam posteà à Cyro captus crucifixus est.
Eodem anno, videlicet, Cyri xiii, Romanorum unus
rex Tarquinius Superbus, occiso Servio socero, ro-
manum regnum arripuit et regnavit annis xxxv (2).
(1) L'an 547 av. J.-C. , suivant Eiisèbe j mais nous avons tu ((u<-
Fréret rapporte à l'an 545 la fin du royaume de Lîdie.
{■i) Nous avons vu ([ue T.irciuia commença eu l'an 55 i son rèpne
qui ne fut que de 25 ans
DE HAINAUT. LIVRE II. 243
CHAPITRE LXIIl.
De la mort de Cirus , roi des Perses.
En la treizième année de Cirus , Crésus fut fait pri-
sonnier par ce prince, et le royaume de Lidie, qui
avait duré 231 ans , fut détruit. C'est à ce même Cré-
sus , ce roi si riche , que le sage Solon , après l'avoir
entendu se glorifier de ce qu'il n'avait éprouvé que
du bonheur , et se vanter de l'immensité de ses ri-
chesses , répondit que personne ne devait s'enorgueil-
lir de son opulence ni de son bonheur. La même nuit,
Crésus eut un songe dans lequel il lui sembla être
arrosé de l'eau du ciel , et séché ensuite par le soleil.
Lorsqu'il eut raconté ce songe à sa fille , nommée
Famie , celle-ci lui expliqua avec sagesse ce qu'il signi-
fiait , et lui dit qu'il serait attaché à une croix et ar-
rosé d'eau , puis séché par le soleil. Ce qui arriva
comme elle l'avait dit ; car dans la suite , ayant été
pris par Cirus , il fut crucifié. En la même année ,
c'est-à-dire en l'an 1 3 de Cirus , Tarquin le Superbe ,
roi des Romains , après avoir tué Servius , son beau-
père, s'empara du gouvernement de Rome, et régna
35 ans. Eusèbe. Du tems de Cirus, vivait le médecin
Anaximénès ; Simonides et Chilon , qui fut un des
sept sages , florissaient : Thaïes mourut dans le même
244 ANNALES
Eusehius. Temporibus Cyri Anaximenes physicus
agnoscitur, Sinionidcs clams habetur et Chilon qui
de scptem sapientibus fuit, Thaïes vero moritur(i).
Comestor. Porro Cyrus ciim pcrtransiisset cursum
fluminis almi , gentem Lydorum bellicosissimam as-
tutè redegit in concordiam; tradidit enim eis solem-
iiitates et ludos, prœcipiens eis ut lucibus et comessa-
tionibus et amplexibus vacarcnt, quasi bencvolentiaiu
eis ostendens. In hune nioduni eos immuta vit, et quos
bello non poterat per libidinem expugnavit. Posteà
vero transgressus Araxem , à reginâ Massagctarum
Tamari victus et occisus est ; quœ caput illius praîci-
sum in utrcm plénum sanguine humano projiciens,
insultando dixit : « Satia te sanguine quem sitivisli. »
Et sic mortuus est Cyras.
(i) Thaïes est le chef de l'ëcolc ionienne et le premier dus sept
sages. Il naquit en Phe'nicie Tan fiSg avant noire ère, et mourut à
Mile^ Pan 54i^- Chilon, de Lact-demone, fut Fun des sept sages ,^
et Sparte le clioisit pour l'un de ses e'phorcs, Fan 556. Anaximandre
de Milct fut le clief de re'colo ionienne après 'J'halès , et Anaxi-
menes après Anaximandre. Mais Diogrnes Laorce et les auteurs
qui nous parlent d'Anaximenès ne disent point qu'il ait e'te mé-
decin. Il c'tait bien postérieur à Cirus. On compte quatre poètes
appelés Simonides : le pins célèbre est Simonidcs de Céos, né l'an
558 , et mort l'an 4(>8 , presque nonagénaire.
DE IIAINAUT. LIVRi: II. ^45
tems. Comestor. Cirus , ayant passé un grand fleuve ,
soumit par la ruse la nation belliqueuse des Lidiens;
il leur donna en effet des fêtes et des jeux , en leur re-
commandant de se livrer à l'amour, aux festins et à
la débauche , comme pour leur donner des marques
de la bienveillance qu'il leur portait. C'est ainsi qu'il
parvint à changer leurs mœurs, et qu'il vainquit par
les plaisirs ceux qu'il ne pouvait vaincre par les armes.
Ensuite, ayant passé l'Araxe , il fut vaincu et tué par
Tomiris , reine des IMassagètes, qui lui fit couper la
tête , et qui , l'ayant jetée dans une outre pleine de
sang humain , dit en lui insultant : « Rassasie-toi du
sang dont tu fus altéré. » C'est ainsi que mourut Cirus.
•à[\Q A^^ALEs
CAPIÏULUM LXIV.
De Walaciino, duce Belgensi.
ACTOR.
Annis ad historiam nostram prosequendam , proiit
valeo, adaequatis, revertor ad incœpta. Hugo. Suardo,
duce Belgorum mortuo , populus, proùt dictum est,
ducem elegerunt Leonem; quo mortuo, Walacrinum
loco ejus statuerunt. Qui in sui adventûs principio
totam regiam stirpem prœter sacerdotes in exilium
relegavit. Hic ferociiis solito non regnare sed tyran-
nisare incœpit. Nobiles ac potcntcs, virtuosi ac men-
tis sanae perlucidi Walacrini ac populi tyrannidem
insuetam ferre non valentes , secretiiis civitatem suc-
cessive reliquerunt , et turmat\m recollecti in oppidis
Blandini suscepti sunt. Qui , loca fortificantes , ad
viriliter resistendum se coaptaverunt. Ab his postmo-
dùm oppidum Blandini, quod nunc dicitur Ganda,
et aliud oppidum Blandini , quod postmodùm dictum
est Nervia, et nunc Tornacus dicitur, fundata , popu-
lata et ampliata feruntur.
DE HAINATJT. LIVRE II. 2[{'l
CHAPITRE LXIV
De V'alaciintis, iliic des Belges.
L AUTEUR.
Après avoir réglé , aussi bien qu'il m'a été possible ,
les années que comprend la marche de noire histoire, je
reviens à mon sujet. Hugues. Suardus, duc des Belges,
étant mort, le peuple , ainsi qu'on l'a vu , élut Léo à sa
place , et , après la mort de Léo , il nomma Valacri-
nus. Celui-ci , dès le commencement de son adminis-
tration , envoya en exil tout ce qui était du sang royal,
à l'exception néanmoins des prêtres ; puis il se mit ,
non à gouverner , mais à exercer une tirannie qu'on
n'avait jamais connue. Les nobles et les grands , les
hommes de bien et les gens sages , ne pouvant sup-
porter davantage la tirannie sans exemple de Yalacri-
nus et du peuple , abandonnèrent secrètement et suc-
cessivement la ville , et, s'étant réunis en corps , trou-
vèrent un asile dans les places de Blandinus. Ils les
fortifièrent et s'apprêtèrent à opposer une résistance
vigoureuse à ceux qui voudraient les attacjuer. On dit
qu'alors ils fondèrent, peuplèrent et agrandirent la
ville de Blandinus , appelée maintenant G and , et une
autre ville du même Blandinus qui fut nommée Nervie
dans la suite , et qui aujourd'hui porte le nom de
Tournai.
^48 ANNALES
CAPITULUM LXV.
Opiniones rcscdificationis civitatis Nervi.T.
LUCIUS.
Regales Belgli tyrunnidem populi belgensis civi-
tatis fugientes , secùs templuni Minervœ civitatcin
fîrniissiinam , quam , ab idolo Minervœ , Nervani ap-
pellantcs, secùs fliiviuin Scadi, reœdificaverunt. Ex
Historid tornacensi. Post reversionem captivitatis de
Babyloniâ , Hostilis civitas est reaedificata à quibus-
dam in déserta fugientibiis, et in destructâ urbe re-
nmnentibus exulibus et victis , et Nervia vocata est, à
Servio rege , sub quo primiim est devastata , s mu-
tatâ in n dicta est INervia. Ex historid Henrici{i)^
iiuionici toinactncis. Tempore quo Eleazarus princi-
patum sacerdotii in Jiidaîa tenebat , Ptolomœus , fîlius
Lagi, rcgnum iEgypti gubernans post captivitateni
babylonicam , exules et fugitivi , et qui in silvis latue-
raiit, Ilostilem civitatcm rcœdificare cœperunt. Qui
niuros firmos, turres et portas stabiles propugnacula-
([ue fabricantes , in eâdem palatia et œdificia mira;
pulchritudinis fundaverunt. Quatuor portas intcr
(i) Il vivait vers le miliou du xii'' sicclo.
ne iiAiNAUT. Livr.r: it. 2^9
CHAPITRE LXV.
Diverses opinions sur la leconstructinn de jNervic.
Les Belges du sang royal, fuyant la tirannie du
peuple de Belgis , rebâtirent près du temple de Mi-
nerve une ville très-forte, qu'ils appelèrent INervie, du
nom de l'idole de Minerve. E.rlmit de l'histoire de Tour-
nai. Après le retour de la captivité de Babilone , la
ville d'Hostile fut rebâtie par des hommes qui avaient
cherché la solitude , et qui restaient exilés et vaincus
au milieu des ruines de l'ancienne cité. Ils appelèrent
leur nouvelle ville Nervie, du nom du roi Servius, qui
le premier avait ravagé l'autre , en changeant ainsi Ys
en n. Extrait de l'histoire de Henri, chanoine de Townai.
Du tems qu'Éléazar occupait le sacerdoce en Judée ,
et quePtolémée , fds de Lagus , gouvernait le royaume
d'Égipte , après la captivité de Babilone , les exilés ,
les fugitifs , et ceux qui s'étaient cachés dans les bois ,
commencèrent a rebâtir la ville d'Hostile. Après avoir
élevé de fortes murailles , des tours , des portes solides
et des forts , ils construisirent des palais et des édifices
d'une grande beauté. Us érigèrent quatre portes entre
les bâtimens de leur nouvelle ville. L'une du côté du
levant , qu'ils appelèrent Servie , parce que c était par
250 A NIVALES
œdifîcia statucriuit ; unam à parte orientis , quain
Scrviœ portam vocaveriint, eo quod ab illâ regione
aut loco rex Servius , civitates alias oljsidens , cam-
dem subjecerat j vel quia per eam ad civitatem dicti
régis Servii (i) directus habebatur aggressus. Sccun-
dam à parte occidentis quam Vectuariam nuncupave-
runt , eo quod vccturœ et mcrcimoniai sub cadcm
pertransibant. Tertiani à parte septentrionis quam
Damnativam dicebant, eo quod per eam damnati du-
cebantur : quartam versus austrum , et illam Sacrifi-
ciorum appellaverunt , eo quod ad sacrificandum per
eamdem populi pertransibant. Tandem eam sic œdifi-
cantes , Hostili nomine sublato , Nerviam eam voca-
verunt , ex eo quod fortis et tenax velut nervos aliàs
contra Romanos extiterat; qua? postmodùm usque ad
tempora Julii Cœsaris intacta permansit. Ilœc ibi.
Actor. Cui aut quibus de fundatione dictae civitatis sil
assentiendum lectoribus derelinquo. Reperi siquidem
nuper qucmdam novellum fictum bistoriograpbum
ritlnnatisatum in vulgari , qui de secunda Roma , IIos-
tilione, Nerviâ seuTornaco, mirabilia refert, cujus
nomen Bucalio sivc Buscalus (2) incsse videtur ; sed
([uia inopinabilia et falsa multa conscribit, et si qua
vera pauca tamen etiàm suis ten)poril)us non applicat ;
idcirco dicta sua miniis reputans , eadcm ratione in-
digna non allego.
(1) La ville do Chicvre.
(2) Ce Rucalio ou IWiscaliis csl peu connu. CepcnJaiil Rcrgicr fait
mention <le lui tlans son ouvrage intitule : Le dessein île ^Histoire
tic Reims, Reims, iGjS; où il dit, pag. m , «pie Buscalus a écrit
riiistoire de Helges en rime normande , prenant ainsi Tournai pour
DE HAINAUT. LIVRE II. 2:)1
cet endroit que le roi Servius s'était emparé de la
place , pendant les sièges qu'il fesait de plusieurs
autres cités , ou parce qu'elle offrait le chemin le plus
direct pour se rendre à la cité du roi Servius ; la se-
conde , du côté du couchant , à laquelle ils donnèrent
le nom de Passagère , parce que c'était par elle que
passaient les voitures et les marchandises ; la troisième,
située au nord , fut appelée Criminelle , parce que c'é-
tait par elle que passaient les criminels condamnés au
supplice ; la quatrième , située au midi , fut nommée
la porte des Sacrifices , parce que le peuple passait par
cette porte pour aller aux sacrifices. Enfin après avoir
ainsi bâti la ville , ils lui ôtèrent son nom d'Hostile et
l'appelèrent Nervie, parce qu'elle avait jadis été forte
et tenace comme des nerfs contre les Romains. Elle
resta entière jusqu'au lems de Jules César. Voilà ce
qu'on lit à l'endroit précité. U' Auteur. Quelle opinion
faut-il adopter sur la fondation de cette ville? J'en
laisse le choix au lecteur. Il m'est dernièrement tombé
entre les mains une histoire en vers vulgaires , mais
fabuleuse , qui raconte des choses merveilleuses de la
seconde Rome, Hostile, Nervie ou Tournai , et dont
l'auteur paraît se nommer Bucalio ou Buscalus ; mais
comme il rapporte beaucoup de faits incroyables et
faux , et que s'il en rapporte quelques-uns de vrais , ils
sont en très-petit nombre et nullement placés à leurs
temsi j'ai fait peu de cas de ses récits , et les ai regar-
dés comme indignes d'être relatés.
Belges. Jean le INlaire, dans le premier volume des Illustrations
delà Gaule Bcli;ique , Paris, i53i, i" juillet, est plus exact en
disant que Bnscalus a écrit l'histoire de Oslille.
2 52 ANNAU:.S
CAPITULUM LXVl
De cfTiigatione Walarrini ducis à regno Pitlgoruin , tl piimaii;!
inhabitatione insulse qiiae mine Walacria dicitiir.
HUGO.
WaL/VCIunus, dux belgensis , iiovos rilus ac coiisiic-
tudincs instituens , quidquid reges priùs ordinavcrani
irritare cupiens , idola spoliavit , quibus uxores pro-
prias adornans , ettributa, qiuT diis dcbobantiir, sibi
applicans, et buinano sanguine sitions atquc vosccns ;
tandem antè lîclis statuam , in populi prœsentia, sa-
cerdotio functus est. Quod advertens sacerdos sum-
mus , ciim sibi in tàni enormibus excidiis in facicni ,
zelo deoruni , resistcret, sacerdos morte eonfusibiH
adjudicatus est. Cùm autem ad moriendum ducere-
tiir, major populi pars insurrcxit in ducem et in suis
adliœrentibus ; et , multis interfectis , eodem impetu ,
ipsum cum satelbtibus suis ab urbe elfugànint, phi-
ribus suœ Hgœ prii^is interfectis. Qui , extra civitatem
post triduum recollecti , civitatem obsidcre decreve-
runt. Quod comperientes incolœ ipsos invadentes us-
que ad maris bttora prosecuti sunt. Qui tandem
navigio quamdam uisulam repenenUs, ipsam post-
modîim aggcribus eontrà maris insultus fortificantcs ,
DE H AIN AIT. LIVRE II. 2 55
CHAPITRE LXYl.
De la fuite tîu duc Valacrinus du royaume des Belges , et de la
première habitation de l'île qui porte maintenant le nom de
\' a lac rie.
HUGUES.
Valacrinus, duc des Belges, institua de nouveaux
rites et de nouveaux usages pour satisfaire son désir
d'abolir tout ce qui avait été établi auparavant par les
rois. 11 dépouilla les idoles pour orner ses propres
femmes ; il s'appropria les tributs réservés aux dieux
seuls, et se reput du sang humain dont il était altéré ;
enfin il usurpa les fonctions du sacerdoce devant la
statue de Bel, et en présence du peuple. Le grand
prêtre , qui en eut connaissance , voulut par zèle reli-
gieux s'opposer vivement à ses excès abominables ;
mais il fut condamné à une mort honteuse. Lorsqu'on
le conduisait au supplice , la plus grande partie du
peuple se révolta contre le duc et ses adhérens ; elle
tua un grand nombre de ceux-ci, et continuant son
attaque , chassa le duc lui-même, ainsi que ses gardes,
de la ville , et fit tomber sous ses coups plusieurs
hommes de son parti. Les bannis s'étant rassemblés
au bout de trois jours hors de Belgis, résolurent de
faire le sivge de cette place; mais les habitans ayant
découvert leur intention , les attaquèrent et les pour-
254 ANNALES
eam inhabitaverunt , et iiomine proprio diicis cain
vocaverunt Walacrinam (i). Ab illo tune decreverunt
lîelgi annuatim ducem novum eligere , ad finem ut
ojus dominatio sub timoré clauderetur, quorum pri-
mus Waringerus extitit nominatus.
(i) L'île de Walchtre , à l'embouchure de l'Escaut occidental.
L'atlaS de M. Biue e'crit son nom Walcheren j c'est la principale
et la plus peuplée des îles qui composent la Ze'laude. On y trouve
Middclbourg , en latin Meclioburgum , qui est la capitale de toute
la Zelande. Celte ville occupe le centre , non de la province ,
ainsi que le dit M. Malte Brun, mais de l'île, où l'on trouve aussi
le port de Flessingue , à l'cmhouchurc de l'Escaut oriental.
ET SIC FINITUR LIBER SECUNDUS.
DE HAIXALT. LIVRE II. 255
suivirent jusque sur les bords de la mer. Ceux-ci ce-
pendant s'étant embarqués trouvèrent une île , qu'ils
fortifièrent , et après l'avoir mise à l'abri de toute atta-
que du côté de la mer, ils y fixèrent leur demeure , et
l'appelèrent Valchère du nom de leur duc. Les Belges
alors décrétèrent qu'ils éliraient tous les ans un nou-
veau duc, afin que l'expiration prochaine de son auto-
rité pût le tenir en crainte. Varingérus fut leur pre-
mier duc annuel. • •
ICI FINIT LE SECOND LIVRE,
OBSERVATIONS.
On voit que ce secoml livre commence Tan 770 avant notre
ère, à rave'nement du roi Ursus, et finit avec le règne de Vala-
crinus, duc des Belges, qui fut chassé par ses sujets, lors de la
mort de Cinis , roi de Perse, l'an 529 avant notre ère. Lucius de
Tongres et un assez grand nombre d'anciens écrivains sont cito^
par Jacques de Guyse, qui extrait fidèlement les passages de leurs
écrits, et qui n'ajoute qu'un petit nombre d'observations de lui.
Pour lui refuser sa confiance, il faut la refuser à des auteurs qui
n'existent plus, et qu'il nous serait difficile de juger. C'est ce que
nous essaierons de faire dans la suite.
256 ANNALES
LIBER TERTIUS.
• . tAPlTULUM 1.
Quoil civilas Pelgis anmios duces eligendos super se instiluit.
ACTOR.
Septingentesimo fermé à fundatione helgensis ci-
vitatis anno ; sccundùm aliam supputationem,sexceii-
tesimo nonagcsimo quarto; post obitum iinmcdiatc
Cyri . régis Persarum ; annoquintœ aetatis lxi, miiiidi
vcrô iiiMCDXxxiv, anno ii olympiadis lxxii (i); tem-
porc quo Cambyses apud Persas rcgnabat , belgcnsis
civitas super se primo ducem annuum , id est , an-
nuatim renovandum elegit, cœteris rcgni civitatibus
regcs super se statucntibus. Horum ducum tempori-
(i) Les deux manuscrits rapportent à la seconde année de la
lxxii" olimpiadc la mort de Cirus; mais c'est ime faute de copiste.
<.]e prince mourut la 2" année de Tolimpiade Ixii ( en l'an 530 ou 52<)
avant notre ère) , ainsi que le dit Ensèhc , presque toujours suivi
par notre auteur. Le cinquième ù^c commence à la destruction du
temple de Salomon , qui eut lieu en l'an 690 avant J.-C. , selon
Eusèbc , et en l'an 586 , suivant l'Art de vérifier les dates. La créa-
tion du monde est r.iitport('c par l'auteui-.à Tan 5c)Cri avant notre
ère.
DE H AIN AUX. LIVRE III. 267
LIVRE TROISIÈME.
CHAPITRE I.
Là cité de Belgis établit des ducs annuels pour la gouverner.
L AUTEUR.
E.wiRON sept cens ans, ou , suivant d'autres, trois cent
qualre-vingt-qualor/.c ans ajjrcs la fondation de Belgis,
imméclialenienl après la mort de Cirus , roi de Perse,
l'an 61 ilu cincjuiènie âge, 343 4 du monde, et second
de la soixante-douzième olimpiade, dans le teins que
Cambises régnait sur les Perses, celle cilé établit pour
se gouverner un duc que l'on devait renouveler chaque
année, tandis que les autres villes du pays conser-
vaient le gouvernement royal. Sous ces ducs, et pen-
dant plus de vingt-six olimplades, la république de
Belgis s'agrandit considéiablenîent , et fit rentrer dans
son alliance les Huiniens du Condros et les Rhéliens.
La nation belge, comme nous l'avons exposé plus
haut, se divisait en li'ois nations différentes, dont
chacune avait ses cités, ses habitans et ses places
folles, et parmi lesquelles Belgis obtint toujours le
premier rang. Lucius et plusieurs autres historieiu
IL 17
258 ANNALES
bus, quod duravit ultra xxvt olympiadas, respublica
civitatis vclicmentcraucta est, et fœderatio civitatinn
l'cparala; ctiàm IIuinitMiscs-Condronlci , Tluiuicnscs-
Rlietiani atquc Mcnapli , et JIuinicnses-Belgici (i)
ad invicem amicitiis colliguntur. Erat eiiim , proùt
superiùs est cxplanatuin, lîelgis in ti'ii)lici differen-
lia , quarum quœlibet suas habebat civitates, popu-
los et oppida , quarum omnium Belgis-Armata (o.)
semper obtinuit principatum. Veriim quia Lucius et
alii plui'cs liistoriogi'aj)bi dispLM's\m nominaiit regio-
ncs eisdem subdilas, decrevl illas rccoHigoro et liuic
capitule intexere. Bcigis sicpiidcm aiinala bas babebat
civitates, tei-ritoria at(juc nalioues, sino medio, ab
aliis pi'incipalibus ivgui jKu-libus st-questi-atas : et
primo Silvam Carbonariam à Servie, irge llomano-
rum , et Cuinbro, duce Ilunnoi-um , sic primitiis vo-
citatam, vel à re nomen babens; et luce propriè
nunc dicilur Haunonia; et bas notabiles aiili(juitLis
civitates legitur babuisse : et primo et prineipaliler ,
Cai'ina quœ et civitas Mercui'ii , quœ nunc Ablatonas
(i) TVoiis avons vu (|iic railleur cf>ini)H'nJ sotir. le nom île Hiignia
tfuit le pav^ «l'ii s\'tcn<I entre lus st>iii<es de la S' nirm-, la !Meiisc ,
le Rliiii et rOei'an. Les Unuik-ii.s( s-Coiiiliout< i soiil les lial)il;iiis liu
(lonilrns , (|iii avaient la vi le île Huy j) Mir ra|iilale. Les Hiiinifu.ei,-
Jihelirini a 'ut les IJrahançms, (ni pliilùt les liahilaiis du tciiiloirc
de Reiix, Ville on rhiîteaii situé à deii\ lieues à l'orient de ^1 ins ,
et nommé en lalin Hmliiim ou IHiclui. I^ts DJcnnjiii <|iiM ne la'it
jias confondre avec les peuples de mèini" nom nienli )nni'> <laii'; ( !■ sar,
et fpii oeeiipaienf la pallie sej)lenlri<inale du l!i.djaiil \w<i\'\ à la
mer) liaMliient le tei riloiiv de l'omiiai. Les Iliuiieiud- Bd^ui
sont ceux du territoire du Cu\ ai. '
(2) Bcl^is ou Bavai.
DE IIAIXAUT. LIVRE III. 269
ayant parlé en divers endroits des pays qui étaient sou-
mis a cette (.iié, je me suis proposé de recueillir ces
documeiis et de les insérer dans ce chapitre. Elle
avait suus sa domination immédiate, des villes, des
territoires et des peuples entièrement séparés des
autres parties principales du pays; et d'abord la forêt
Charbonnicre, tirant ce nom de son usage, et ainsi ap-
pelée dans l'origine par Servius roi des Romains, et
Camberduc des Huns. Elle est mainlenant nommée le
Hainaut. Ce pays avait anciennement des villes remar-
quables, parmi lesquelles nous citerons principalement
(farinée, nommée aussi cité de Mercure, efc maintenant
Ablaione. Apics celle ville vient celle de Servie, ainsi
nommée du nom de Servius, dont nous venons de par-
ler, et auquel on lit qu'elle doit son origine et sa domi-
nation; vient ensuile le pays prcs d'Audenaide qui
reçut dans la suite le nom tie PorL-Belge. Enfin les
S.ixons fondèrent dans le même pays , sur les boids de
la Denre , une ville qui fut nonnnée Saxonia et qui
porle mainlenani le nom de Lessines, On rapporte
aussi que les Albaniens s'élant fixéi dans la forêt Cbai'-
bonnicre , y fondèrent des bourgs, tles villes et des
châteaux. Leur lerriloire s'étcnc'ail le long de l'Escaut
et de la Denre depuis l'Aube, (|ui coule près de la ville
de Servie au >ïord , jusqu'à la Denre vers le pays où les
Auténoiides s'élablirent comme nous l'avons dit plus
haut. Après avoir habile cette forêt , on lit qu'ils occu-
jièrcnl une partie de celle des Ardennes , où ils fon-
dèrent un château nomuié de leur nom Héricine. Dans
la suite ils devinrent une grande nation, comme nous
le dirons bientôt, et leur puissance s'étendit jusqu'au
Rhin à travers les bois. Je me rappelle avoir lu que
toutes ces viliei anciennes étaient uu-deiù des marais
260 ANNALES
clicitLir. Post illam clvitas Sorvicnsis (i), à dicto rcgc
lloinanoi'Lim Sorvio logiliir cloniiniuin et lociun obti-
luiisso. Dcinclè Porluni-Ijclgormu , qiiae niuic Silva-
Portus Belgoi'Lnn juxlà Alclenanliim clicitur, denoini-
nationcin obtinult. Taiicloni à Saxonibus fuit civitas
fuiulata in tcrritoi'io illo, qiiae Saxoiiia dicta fuit, scd
nunc Lessi/ies (-i) suprà ripariam Tcnoris appoUatur.
IttMU in dicta Silva Carboiiaria loguntur Albani coni-
inaiisissc, qui oppida , villas et castra fundavcrunt ;
et fuit territorium coruin juxtà fines fluviorum Scaldi
ac Tcnoris, incipientcs à fluvio Albœ flucntc sccùs ci-
vitatcm Servii rogis à septcnti'ione , et tcnninatui* in
Tenoris fluvio juxtà locum in quo Antenoridcs (3)
commanscrunt , proiit dictum est suprà. Item legun-
tur in dicta silva postmodùm Hericynos silvam (4)
pro parte iniiabitasse, et castruin , nomine eoruni ,
lierycinium (5) appellatuni fuisse. Qui postmodùm
in gentem magnam oxcrcverunt, proùt inferiùs decla-
rabitur, et extensa fuit corum potentia usquc ad flu-
vium Rheni per silvas et nemora. lias civitates anti-
(i) Civilas Scri'iensis , que les geof^raplies a]i]irllcnt Ceri'in en
latin , est la ville de (>l>iè\re. Quant à la ville oti au village de
Carina , ou di'ilos Ji/erciirii , ou yfblainnns , ou Ji'oton , \i' n'ai
pu encore le trouver sur les railcs ni dans aucun ouvrage; de g'" >-
grap-liie. J'ignore aussi <|uel est le pays que notre auteur a||>illc
Poitiis-Iiclgorimi; \ii n'en trouve aucun de ce nom dans les envi-
rons d'Audenarde.
{i) A deux lieues au nord d'Ath. V
(3) Ceux d'Ath.
(i) La forêt des ArdcMiiics.
yS) Peut-être le village de Harcis, :. trois lieues à l'oucst nord-
ouest de JMczières.
DE IIAINAUT. LIVRE III. 26 1
de la forêt Charbonnière ; mais en deçà, je n'ai point
vu que, depuis l'invasion des Huns jusqu'au lenis de
Jules Cés-.ir, il exislÙL de ville reni-irquable, si ce
n'est un petit nombre de bouri;s peu iuiportans que
les Belges fondèrent, et dont nous parlerons en leur
lieu. Au milieu et sur l'une des éminences de la forêt
Charbonnière, était le temple de Pan, fondé par les
Pannoniens , qui donnèrent à ce pays le nonî de Pan-
nonie ou de Rrabant. Ce temple exista et fut en hon-
neur )squ'à Jules César, qui le premiei' en fit un châ-
teau , comme nous le dirons dans la suite. On donne
maintenant à ce pays le nom de Mous. 11 y avait encore
d autres villes, bourgs et châteaux fondés à diverses
époques dans cette contrée; mais les plus anciens et les
plus distingués étaient ceuv que nous venons de nom-
mer. La cité de Belgis avait encore sous sa domination
la Cambrianeou le Cambresis. Ce dernier nom, tiré de
celui de la ville de (>amber, est resté au pavs. Il possé-
dait la ville célèbre de Fanum-Solis , (|ui se nomme en
français Sulemes , ainsi (pie les bourgs et châteaux
qui en dépendent , et FanumMaiiis ( ville très-puis-
sante, nommée ainsi d'un temple de Mars , et qui porte
aujourd'hui le nom de Famzrs), ainsi que les bourgs et
châteaux circonvoisins. On y trouvait encore iVervie,
ainsi nommée du nom de Minerve, ou du mot 7ierf, et
qui s'appelle maintenant Tournai , avec les bourgs et
châteaux qui en dépendent; Moriane, ville très puis-
sante , ainsi nommée du nom de son premier fondateur
3Iorianus , et maintenant appelée Térouenne , avec
ses bourgs, ses terres et ses châteaux; la Ruthénie,
c'est-à-dire le territoire des Ruthènes, ainsi nommé
du nom de leur duc Ruthénus, et qui porte maintenant
le nom de Flandre , avec les bourgs d'Harlebeck et de
262 AKNALES
qiias in Silvœ Carbonarijin iillrà paliidrs torritorio
l'ccordoi' porlrgissc ; s^hI ciirà paliidcs (Ifctae silv;r, à
toinpoi'ihus Himnoi'um iis(jiie ad Julii C^esaris tciii-
pora , lion Icgi civitates noIaI)dcs liabuissi* iiisi paucas
et o.vilc'S , quas Hiiinionsrs-Bclgici condidcrunt , de
({uil)us fict inriîlio suis locis. In nicdio aiitoin dictae
Silvœ Carboiiai-iœ crat faniiin Pan (i) siipiT uniiin
inonliiun à quo tcrriloriiiin illiid dictum fuit Paniio-
nia vrl Propanlia (2) à Pannoniis qui illùc raiiuin fuii-
davorant; et cNtitit fanuui illud iii magiiificciitiu
iisquo ad Julii Orsaris tcmpoi-a, qui primitùs ex fano
casti'uni iiislituit, proùt inforiiis osfciulctui". Et islud
tcrritoriuin n.unc Mi)iittMise in Ilannonia ah omnibus
appeliatur. Fuornnt autcni abœ civitatos , oppida et
castra ab antiquo et consoqucntei' in (bcto toi-ritorio
fundatœ, scd illœ fucrunt cxccllontioros et anticpiio-
irs quas prœnominavimus. IJabebat secundo Belgis
Cauibi'ianain sibi subditani , quœ et Camcracisium, à
ci vitale Canibri sic (bclain : Camcracisium nunc ap-
peliatur, cum suis oppidis vl caslris. Habebat et Fa-
uum-Solis, civitalem solemnem val(l>, qu.T nunc gal-
licc Solcmes appellatui', cuir» suis oppidis et castris
sibi sul)ditis. Habebat et faiium Martis, potentem ci-
vitatem vald> , à fano Marlis sic dictam , cum suis op-
pidis et caslris sibi circiimvieinis, qtia^ nunc Famais
lumcupatup. Habebat et Nei-viam, à Minerva deà vel
à Nervis sic diclam , quïc et Tornacus dicitur, cum
(j) Ce temple r'fait biUi , suivant notre auteur, sur remplacement
que la ville de Mons occupe aujourd'hui.
(1) Le Brabant.
DE UAIXAUT. LIvr.E HT. 263
Rlandimiset les antres liens qu'elle comprend cl qui lui
sont soumis; Verniaiide , ainsi nommée du duc Vermaii-
dion , avec ses bourgs et châteaux. Celle ville jadis
magnifique esl siluée sur la Somme, cl porte en français
le nom de Vermand. La ville de Belgis avait encore
sous sa domination le Rémois, ainsi nommé de Uénius
frère de Ronudus , premier fondateur de Rome. Ce
pavs s'étendait entre l'Aisne au INord et la Marne au
Midi , qui séjiarait les Belges des Sénonais; on le nom-
mait pavs des Rémois : maintenant on l'appelle simpîe-
uienl le Rémois. Relais possédait aussi le territoire de
Diii-bnt , ainsi nommé du nom du peuple qui l'habitait.
Il élait d'une grande étendue, et forme maintenant plu-
sieurs ccmtés, comme celui de Namur et d'aulici qui
s'étendent' au miili jusqu'au Mosellan , cl au nord jus-
qu'à la Rhéiie. C'était sans intermédiaire que Belgis
possédait ces terres; mais elle dominait sur d'autres
par la médiation de quelques gouverneurs. Belgis la
Gauloise comprenait divers pays et divers peuples : il
faut mcitre au premier rang la ?^euslrie supérieure ,
qui renfermait plusieurs peuples, plusieurs villes et
bourgs, et qui s'étendait depuis Ikauvais jusqu'à la
Loire, jusqu'à l'Arniorique, qui s'appelle maintenant
la Bretagne, et jusqu'à l'Océan. On trouvait dans cette
contrée des ciiés importantes, comme celles de Rouen,
de Nantes , de Chartres. On donne maintenant le nom
de Normandie supérieure au pays qui renferme Vlcn-
çon , Elampes, Harcourt, la lîrie, le pays Chartra!n
et les autres lieus que j'omets pour être court. En
seconde ligne se trouvait la Neustric inférieure, qui
s'étend entre la .Seine , la .Somnie et l'Océan , et qui esl
maintenant nommée , par plusieurs , Normandie ,
Vexin et pays de Caux. Venait ensuite le pays soumis
264 ANNALES
suis oppidis et castris sibi siibditis. ÏIal)ol)at Moria-
nam, civitatom prcepotcntcni, à Moriano prolofiiiuia-
(laforo cjus sic niinciipa'am , qiioe ot Tcrravana nmic
appclIaUir, ciim suis ()|)pi(lis, Icrriloriis et castris sihi
suhditis, Ilabcbat et llulbcniain , id est, terciloi-imn
Ruthcnorum , à Rulbdio duce sic appellatum, cpuT
nniic Flandi'ia dicilui-, cum oppidis Ilerlebaccensi (1)
et Blandini et e.Tlei'is territoriis sibi subditis et iii ca-
deni inciusis. Item et liabebat Verinaïuiiani , à A^(>r-
inandione duce sic dictam , cum suis oppidis et castris.
Qu.T civitas exlilit liiagnifica , et ba-c juxtà ripai'iain
Somma3 extilit situata, qu.iR nuuc /'c/n/a/is (2) gal-
licè nominalur. Item babebat Ik'Igis sub se Remen-
tiam , à Rem), fratre Hoinub, protofundatoribus
civitatis romanœ, sic ap|)il!atam. Et erat i-egio illa
intcr fluvium Ausonœ à paite S'.'ptenlrionis et Ma-
tornnc à parte meridiei ; (pwrcpjidem iMaterna Relgos
à Senonensibus dividebat, et dicebatui* territorium
Remorum, et iiunc leineiisc dciiomiiialiir. Item ba-
bebat Belgis Armata s d) se le.i itorium durbiensc, h
gcnte dui'beiea sic a^jpellatum ; et ei'at teiritorium
grande atque dispersum , iiunc plurcs comitatus
continentem , utpotè Namurcum et c.Tteros comita-
tus usquc ad fines MoseHanorum à | arte au>ti"ab , et
u>que ad Rlietios à parte; septentrionab. lias enim
tcri'as sine medio possidebat Relgis-Armata , ca;teris
(i) Harlcbrrk sur la Us, A iin(; licMie aii-lcs o s de Conrtrai.
Il existait ;"i Garni imc c<'li'brc al)l)aye dite de Blandi^^ni, que le
pape Paul IV (TÎ^ra en (alhi'iliMle.
(2^ Saint-Qucnlia, chcf-licu d'arrondissement dans le departe-
nirnt de TAisne.
DE HAINAUT. LIVRE III. 26^
par ]e^ Piconicns et nommé maintenant Picardie. Il
compreiiaii alors la ville irAmiens , le Poiithieu , Pé-
quigiii , Lutcce qui est mainicnant appelée Paris, et
Isie. La cité de Belgis possédait encore plusieurs pays ,
mais comme ils sont éloiijnés de nous, je n'ai pas pris
le soir» de les éinimérc. Reliais la Clieveliie possétlait
dabord la Piliclie, maintenant le Rrabant , dont la ca-
pitale éiait la ville de Tonj^Mcs, (|iii, dans un lems , a
surpassé en puissance et en grandeur la ville même de
Belgis la Chevelue; le Condros, dont la ville d'Htiy
était la capitale; la lihéiie-Huinienne, située de l'autre
côté de la Meuse; la lorèt Hercinienne, située au-delà
de la Meuse , et maintenant nommée forêt des Ar-
dennes; Ca^ri-Mons , nonnné par les modernes Liège;
la Mosellane , maintenant lu Lorraine, qui tirait ce
premier nom de la ville de Mosellane, maintenant
nommée Metz; l'Alsace, dont la ville principale était
Vogis , située entre les Alpes et les lorèls ; enfin , Agi'ip-
pine (1), maintenant nommée Cologne. Ainsi cette do-
mination s'étendait entre le Rhin , à l'orient , la Meuse
au couchant, les Alpes au midi , et l'Océan au nord. On
rapporte qu'alors la ville de Troves étendait sa domi-
nation sur les peuples suivans , savoir : les Russes , les
B'athuaniens , les peuples de IN imcgue, du Luxembourg,
les Merlenscs , les habilans d'Audenarde , de Coblentz ,
(?) Afjiii j)ine, femme «le rempToiir Claude, ayant envoyé' une
colonie de vi'te'rans dans la ville des Ubiens, où elle ctail née,
cette ville reçut le nom de Co'onin ^'igri/t/fina. (Tacite, Ann. sii,
27. ) Le nom de Thistorien (|iii vient (relie rite est sans doute fort
imposant , mais non pas siii" li s l'Iimol'igies; je me contenterai
d'observei" qu'il prétend que le mont Ida, dans la Crète, a donné
son nom aux Idœi, d'où Ton a fait les Jnclœi ou Juifs, qui, tou-
jours selon lui , viennent conscqucmment do l'île de Crète. ( Tacite»
Hist. V. 2.
206 ANNALES
v(M'o mofliantilnis aliis giibornatoribus ilominal)atnr.
Bcigis autcm galiica lias rcgionns et populos Irgitur
habuissc; : ot primo supcM'ioriMn Noustriain qii.T |)lii-
rcs populos, civitates et oppida continohat; ot dura-
bat à Bi'Ivaco iisquo ad Ligrrim et nstjue ad Anno-
ricos, qui Britaniiia-Superioi- dicunlui', et oeeanum.
Il)idem ei'ant civitates solemnes, ut Rodomis, Nan-
iietum atque Carnotuui ; et nunc dieuntui' Nonnannia
Su|)ei'ior, Alenconia , Slauipis, Hai-icuria, Rrissia ,
Carnotesium , et sic de aliis qu;ic, causa brevitatis,
pei'transeo. Item INeustriaui luferiorein , qu.T situatui*
inter Sequanam et Souiinaui et oeeanum , ([uvc nunc
Normannia, Yexiuia et Cauehia à iiudtis a|)pellatui\
Item Picoriia , videlicet terriloria ([uœ Piconii post-
inodùm subjeeerunt, qu.nc lumc Pieai'dia dieitur, in
quibus tune erant civitates Ambianis , Pontinicum ,
Piconictim, Lutetia, quœ Parisii.s nunc dicitur, et
Ysia (i); plura territoria auliùc possidel^at, sed quia
lemovcntur h nobis, non curavi illa distincliùs nu-
inei'aro. Relgis autem comata (2) bas dicitur habuisse
regiones : et primo Rbetiam (3) ({unc nunc Bi-abantia
dicitur, cujus civitas prineipalis extitit Tungi-is, (juœ
pro tenq;)ore Relgim comaliun in potenlia et fortitu-
diiic muitipliciler excessit; item Iluiniam-Condioni-
cam , cujus civitas nietropolis fuit îfoyum ; item Tlui-
iiiam-Rbetianam , et b.xc ex altéra parte fluvii Mosœ
(i) Meliin.
{1) Tîcl}^is-la-Chovoliic est la ville de Trrvcs.
(3) On voit (jiril ne faut pas confondre les lîhclii dont parle
Jac<iues de Giiyse, avec les JiheCi,\cs, Rliètcs, qui occupaient le
pays <1es Grisons,
DE IIAINAUT. LIVRE III. 267
deVesel, lesVostphaliens, les Limbourgeois , lesÉbii-
foris et ceuv d'Aiihall; mais comme ces pays me sont
enlièrement incomuis , clans la crainte de nie tromper,
j'ai laissé au li'cleur le soin de les déterminer (1).
(t ; Nous ne prrfcndons ]iis fi^'T lo (l('i;i-c dp confiance <\uv mrrife
îri et îiillciirs n'ifrc I.isf rien. INons avons ili'^ nt'anmnins cljcrclicr
à iT'i-'inn.iîlrc; sons li-tns tlillercntcs (It'nominations les pays (|iril
mentionne , sans nous arrêter à ccUe c )nsi.Ieralion , (|u'ils n'ont «'tu
connus et «lesigne's ilans l'iii^tnire, ({iTapris le iems anijnel il les
ra| porte j car si la c mnaissancc de ces pays n' iflrc aiicnne utilité'
sons le rapp'iit de la gi'ogr.ipliie ancienne, elle peut i-ervir à la
gi'ogiajiiiie lin moyen :1j;e,<pii est encore trè5-)ien avaiici'e. Nous
Ttods rési rvons de donner pliis tard une ta! Je ge >graplii(pie de »ous
le? noms de lieu rajiporti's par Jaccpies de (iuyse. Il «'st. lâcheux
<pie Sun manuscrit original, qui est, nous dil-im , à Valenciennes ,
s il en si mauvais état (pie nous -loyons r('duits à nous srr\ir tic
deux copii's, à la veiite fort anciennes, mais nà les nfims propres
sont souvent <le'IIgires : on sent (pic ce reproche ne doit pas être
adresse à Tauleur.
26S ANNALES
sltiiabatur; item Tlericyniain (i) ultra Mosani qurc
nuiic Ardonna appollatui-; itoiii Capri-Montcm , (jiiœ
luinc Loodluin à inodcM-nis dicitur; item Moscllaiiam
qiKC mine Lolharmgia à Moscllana civitato, qiiœ
jMcdioinati'iciim et Motliis dicitur, mmc sic a|)|)('ila-
tam Icgimiis; item xAlsaciain , ciijus Voj^is (2^ civitas
extitit pi'iiicipalis intei* Al|)('S et silvas situata; ilcm
Agrippiiiam , (jiuc mmc Coloiiia dicitur, iiitor ouim
fluviuin Khciii ab oriente, et IMosam ahoccidenie, et
Alpes à meridie , et oceanum à septentrione. Iloscpii
sequuntur populos legi his temporibus permansisse
sul) dominatione Trebei'orum , videlicet Russios, lîa-
llmanos (3j, Neomagos, Lucendjurgenses , Merlen-
ses (l[), Audernaceiises (5), Confluenlinos , Wassel-
lienses (6), Welliflarienses (t), Lipurgenses (8),
Eburiones (c)) et Analdos ' 10). Vei'iim (juia j)atria illa
milii peniliis est igiiola, timeiis repreliendi applica-
tiones earum , Icctoribus dereliqui.
(1) Pour Ilercyniiini-Sil^nm.
(2) Sans (I )iilc Epinal.
(3) Poiii-t'Ire Ii's Biilti ou Eafavcs , qui habitaient enirc rOocan,
le vifux Rliiii ef le Valial.
(41 -Te- nv sais (|ii(l pays vc it designer l'auteur sons ce nom , qui
est ainsi écrit dans tous les manuscrits.
(5) Le manuscrit de Saint-Germain écrit Aiulenarsenses.
(6j Sans d lute ceux de Vescl.
(^) Pour JF'a.tjihalicn es.
(8j P'.ur Lhnbin-^cnscs.
(9) Pour Ehiivnnes , les Khnrons , dans le pays de Liège.
(10) Ceux de la principauté d'Anhalt.
DE HAINALT. LIVRE III. 269
370 ANNALES
CAPITULUM II.
De Cambysc, rcge Pcrsaruni.
ACTOR.
Ut autrm annos juste ciim dictis et diccndis va-
Icain cnuineruro, ad sacrani scriptnrani recmramus,
proùt IiiCcTpi. Ex Chronicis. Cyro inortuo, siicc-cssit
filins ejus Cambysos , aiiiio qiiintœœtatis lxi , imiiuli
voro iiiMCDXXxiv (1), et rcgnavit aiinis viir. Heli-
nandus. Tlic (>st Canihyscs (jui in iinpcrio j)atris
iEgypUim adjecit; scd orrL'iisussnptM'.stitioiiihiis ^gvp-
tiormn , Apis cœtiM'ormnqiio dooriiin .Tdos dirui jus-
sil. Ad Ainnionis ((uo(|uo nobiliss'inmn ti'iiiplinn ox-
pugnandiim exercituin misit : qui tcmpestalibus et
aiviiai'uui moiibus opprossus intoriit (2). Hic Cainby-
ses adco sevorus fuit, ut (jueiiulani injustuui judiccin
cxcoi'iari fecit, et super scllain eutc ejus adaptalain
filium judicis iii judicio fecerit sedere, ut tiuieret in-
juste judicare, ne siniile judiciuni paterctur. Hic
Cainbyses ab ipsâ nativitate sua li'gitu»' furiosus [Z)
(1) L'an ,'^29 av. T.-(] suivant Fiisc'ho.
(2) (>c passage d'Hi-liiianJ est jnis m )t p')nr m )t de Jiislin ,
1 I , c 9.
(3) Hérodote dit que Cambisej fut sujet à Tcpilepsie des sa naU-
saace.
DE HAINALT. LIVRE 111. 2'J l
CHAPITRE II,
De Canibiscs, rci des Perses.
L AUTEUR.
Poun faire accorder les années avec les événeniens
racontés et avec ceux qui doivent l'èlre, j'aurai re-
cours à riicrilure sainlc , comme je l'ai déjà f.iit. Extrait
(les Chroniques. Cirus éLaiiL mort , son fds Cambises lui
succéda, dans la 61'' année du cinquième àj^e , l'an du
monde 3434 , et réijna huit ans. Helinund. Ce l'ut ce roi
qui ajouta l'Éi^ipte à l'empire de san pcre ; mais ollensé
delasiiperstiiiondes Éy;ipliens,il fit détruire les temples
d'Apis et des autres dieux. H envoya aussi , afin de ren-
verser le célèbre temple d'Ammon , une armée qui lut
détruite par le climat et par les sa!)les du ilésert. On
ciie de Cambises cet exemple de sévérité : api'ès avoir
l'ait écorclier un .iu:;e piévaricateur , il voulut qu'on
couvrît de sa peau le siège du tribunal de son fds, et
ordonna à ce jeune homme de s'y asseoir, afin c{ue
l'exemple d'un pareil cluitiment rempèchùt de rendre
des jiigemens iniciues. On raconte que ce roi était
furieux des sa naissance , qu'il s'avança tellement dans
les déserts pour cbercliei" la source du Nil , (pie les
vivies lui manquèrent , et que la faim le contraignit de
manger plusieurs de ses compagnons.
272 ANNALES
fuisse, et ortum Nili (1) per tantum terrarum quaesl-
visse, quod, epulis ei cleficlcntibus , coactus est car-
nes sociorum suorum famc comedere.
CAPITULUM 111.
De historiâ Judith.
COMESTOR.
Hic Cambyses , Cyri filius, et in regno succcssor,
apiul Esdi'ani Artaxcrxos vel Assiierus (2) dicitur; in
liisloria vcro Jiulilli vocatur Nabiichodonosor. Sub
hoc Cainbyse factiiin csl quod iii historia Judith scrl-
bitur. Mortuo itaquc Cyro,([uidam Ai'phaxat , Mo-
dus, in Lcbalanis surroxit, et roparavit eain , ot uui-
nivit inexpugnabilitor , quasdam partes JNIodi.T sibi
conciiians, at tandem toti IMcdiaj inq^eraret. ISabu-
chodonosor vei'o, rex Assyiioi-uin , qui rognabat in
INinivc, aniio duodecinio rcgiii sui obtinuit eiun. Tlic
est Cambyses cui pater adiiùc vivens Niniveni et re-
gnum Assyi-iorum concessit, et euni Nabucliodonosor
(1) CcMe cxpi'Jilion de ('aml'iscs avait pour ()l)ji-t la nonf|iirt«' de
l'Etliio|iie, et non pas seidemcnt la ilecouverte des sources du Nil.
(2 11 ne faut pas coiifnnilrc rot Assiicriis d'Ksdras àvcc ccltii du
livre d'Esllur, sur lc.|:irl oo peut voir rartîclc Aubuérua dans le
Dictionnaire de la Bible par dom Calract.
DE HAINAUT. LIVRE III. 2"J
CHAPITRE III.
De l'Histoire de Judith.
COMESTOR.
Ce même Cambiscs , fils et successeur de Cirus , est
nommé par Esdras Arla\ei'cés ou Assuérus , et dans
l'histoire tle Judilh, ÎNabuchodonosor. Ce fut sous le
même prince qu'arriva ce qui est écrit dans celte
histoire. A la mort de Cirus , le mède Arphaxat se ré-
volta dans Ecbatane , répara celte ville et la forlifia de
manière à la rendre inexpu^naMe Se conciliant ensuite
quelques pi'oviuces de la Métiie, il se serait emparé de
tout le pavs ; mais iNabuchodonosor , roi des Assiriens ,
qui réi;;nait à Ninive, le vainquit, la douzième année
de son règne. Ce prince est ce Cambises auquel son
père céda de son vivant Ninive et le royaume d'Âs-
sirie , et (|u'il surnonnna Nabuchodonosor. A la mort
de son père, il réi^nait déjà depuis douze ans sur ce
pays; il ne régna jjas plus de luiit ans sur toute la m i-
iiarchie. Lorsqu'il en lut devenu le maître , l'orgueil
lui enfla le cœur , et il envoya en Ciiicic , ù Damas , au
II. 18
i274 ANNALES
cognominavit. Tlic, mortiio patro, tlnodociinuin illiiis
iTgni ap.iiiim ag( bat ; nani in rcgno inuiiarclnœ non
nisi octo aiinis irguavit. Qui (i), postquàin lactiis
est moiiarcliiis, oxaltatmn est cor ejiis; et misit ad
omiicsqui Iiabitabant in Cilicia, et Damasco, et Li-
bano , et Cai'niclo, Galilea, Sainaria , et us(jiie ad Jé-
rusalem, exi«.';ens ab eis tribufa longé gi'aviora (juàm
patres sui; qui onines uno auimo conlra{iixei".uit. Igi-
tur anno viii regnl sui (u) pioncepit Ilolopliei'ni , pi'in-
cipi mililiœ sua}, ut egivdieiis nulli pai'cei-et , ouini's-
quc deos tcrrœ cxtei minaret, ut ipse solus deus
diceretur. Audientes filii Isiael tiinuerunt valdè ne
siniilia faceret in Jérusalem et in sanctuario Dei.
Erat autem in civitate Judilli, vidua tribus annis,
mulier pulehra nimis, sed easta. Holopbernem in
specie sua cepit, et eum vinolcntum et soporatum
decollavit, caputque ejus ablatuin in Jérusalem lidit,
et omnes audientes et videntes in admirutionem et
laudem Dei concitavit, undè et cantieum victorifiR
Domino cecinit. Eusebius. Anno Cambvsis viii, Py-
thagoras physicus philosophus babetur clarus. De
quo Solinus et Augustinus,r/e Civitatt Dci^ libro viii",
et Justinus xx" libro, et Valerius libro v°, et Tullius
(le OJJiciis , et Hieronymus et alii doctores muila ad
laudem virtulum ac pliilosopbiaî moralis multa pro-
lo([uuntur. Coniestur. Post Cambysem , unus île sep-
tem niagis qui Persarum regnum judicabaut, impc-
(i) L'auteur attribue à Cambiscs, roi de Perse, ce qui appartient
au roi de Ninive.
(2) L'an 622 av. J.-C , selon Ensibe.
DE HAlXAtT. LIVP.E III. 2^5
Liban, au Carmel , en Galilée, à Sainarie et jusqu'à
Jérusalem, deiuaniler et exiger tles tribiiis beaucoup
plus r;)rLs (jMC n'en avaient e.i^é sei préJécesseurs.
Tous refusèrent de les Ini accorder; c'est pour cela que
la huitième année de son règne , il fit partir Holopherne
à la tète d'une armée, avec ordre de n'épargner per-
soime , et d'exlerminer tous les dieux, de la terre , afin
(|iie lui seul (ùt honoré comme un dieu. Les enfans
d'Israël, en apprenant cette- nouvelle, tremblèrent
pour Jérusalem et pour le temple du Seij^jneur. Il y
avait, depuis trois ans, dans la ville, une veuve nom-
mée Judith , femme d'une rare beauté et encore plus
chasie (]ue belle. Ayant séduit Holopherne par sa
figure, elle l'enivra , et pendant son sounneil lui coupa
la tète et la porta à Jérusalem. Tous ceux qui enten-
dirent ou qui virent cette femme extraordinaire,
furent transportés d'admiration , et rendirent grâces à
Dieu. Judith adressa au Seiyneur le cantique de la vic-
toire. Eusffjc. La huiiième année du règne de Cam-
bises, le phisicien Pithigore était célèbre parmi les
philosophes. Solin , saint Augustin, au livre vni de la
Cité (le Dieu ; Justin , livre \x ; Yalere , livre v ; f jcéron
dans son Traité des devoirs; saint Jérôme et d'autres
dorieurs parlent beaucoup et av.'^c éloge de ses vertus
et de sa [ihi.osophie. Comeslor. Après Cambises, l'un
des sept mages, qui renilaient la jusliee, monta sur le
trône des Perses. Justin, livre n, dit que Cambises
\it . dans son sommeil , que son frore Mergis régnerait
un jour. Lffra\é de ce songe, il n'hésita point de le
faire mourir... H choisit pour cette commission un
mage dévoué , nommé Comètes. Sur ces entrelaites ,
Cambises se blessa gravement à la cuisse avec son épée
qui était sortie du fourreau, et mourut... Acettenou-
276 ANNALES
rium obtinuit. Jusf/nus , libro n ( i ) : Cambyscs quidcm
per quiotcm vidit fratrcm suum Mei'gum(2)regnatu-
riim. Quo somiio exterritus, non dubitavit euni occi-
dere... Ad boc niagum quemdam ex amicis delegit,
Coinetem(3)noinine. Intérim ipse, gladio suo sponte
evaginato, in femore graviter vulneratus occubuit...
Quo nuntio acccpto, magus antè famam amissi ré-
gis occupât facinus, prostratoque Mergide, cui reg-
nuni debebatur, fi'atrem suum subjecit Oropastom.
Erat enim decorus(4)etcorporis Hneamentis Mergidi
persimiUs. yéctor. Quià vero Juslinus et Comestorde
duobus istis Cambysi succcdenlibus inter se discor-
dant, brevitatis causa, dissonantia pertranseo.
CAPITULUM IV
De Dario rege.
PosT igitur duos magos, quartus à Cjro Daiius,
filius Hystaspis,quictfuit unusde scptem uiagis, cœpit
{\) Cap. 9.
(2) Ce prince, que notre auteur aiipello Mergis, est nomme Ta-
noxarès par Xénophon.
(3) Hérodote tlit Prexa-spe.
(4) llans l'edili m de Justin de Dcux-Ponls, on lit et oris au Jieu
de décoras, qui se trouve dans notre leit»;.
DE HAINAUT. LIVRE III. 277
velle le mage, avant que le bruit de la mort du prince
ne se soit répandu, se liùte d'accomplir son crime et
d'assassiner iMergis , auquel le trône appartenait. H y
substitua son frère Oropaste, qui ressemblait parfaite-
ment à ÎMergis (1). V Auteur. Comme Justin et Comes-
tor ne s'accordent pas sur ces deux successeurs de
Cambises, pour abréger, je passe sous silence leurs
contradictions.
(:) En citant ici Justin et Comestor, Jacques de Gnyse fait voir
qn'il ne connaissait pa- Hérodote, qui appelle Smerdis et non
Mergis le frère de Cambises j Justin , dans nos éditions, lui donne
le même nom , et ne fait qu'extraire Hérodote. Cte'sias, au lieu de
Smerdis , dit Tanyoxarcès.
CHAPITRE IV.
Du roi Darius.
Après ces deux mages , le quatrième roi depuis
Cirus , fut Darius , fils d'Histaspe , et l'un des sept
mages. Son règne commença l'an G9 du ■5'" âge, 344:? du
monde, 2' de la 04*^ olimpiade , et dura trente-six ans.
Comestor. Parmi les courtisans de Darius se trouvait
Zorobabel, fds de Solalhiel. Cambises ayant défendu la
reconstruction du temple , Zorobabel , par l'interven-
tion de Darius, essaya de faire changer cette résolu-
278 ANNALES
anno quîiitncœratis lxix, nuiiuli vrro iirMCDXLii (i),
olvmpiadis lmv aiwio 11", et rognavit aiiiiis xxwi.
Conicsfor. Unie J)ai"io fainiliaris orat Zoroliabcl filius
Salaticl. Cùm cnim intordixisset Cambuses i'i;r(Iifica-
tioiiom tcinpli, asceiulit ad emii Zorohabil , ol pcr
rjus Dai'ii intervontiiin tenta vit ([iiidcin aniimmi régis
mularc, scd non j)otuit. ïnnc jx-rsnasit Dai'io sccro-
ti s ut vovei'ct votnin Doo Israël , (juod , si enni re-
gein faceret, restaurai'et ejus teniplnm, et universa
vasaDoniini , (Uî.TadliLic erant pen s reges Persarinn,
remitteret in J(!rusaleni. Cinn audivisset igitur Zoro-
babel bunc regnare, fidiicialiter aggressns (>st in r •-
œdifieai'e tempiinn, Aggaeo et Zacbaria exbortantibus
populum , ({iii praedicabant Detnn eis offensnm, eo
ijiiod babitaivnt in doniibns laqueatis , et doinus Do-
mini essct desolata. Hoc auteni signinn ir.T De: dico-
bant quod seininal)ant nudliiii) et inferel)ant |)arùin.
Principes vei'ô régis Pei-sarum ([iii era it tr<Mis flii-
vimn, interdicebant reœdificationeni ; cùinqiie res-
pondissent seniores Juda (juod Deus suiis boc eis
pi'œceperat cui nefiis estcontradicere, placuil utriscpio
ut resadDai'iuni referretur; etascendit Zorobabelcuin
nuntiis principmn ad regeni , et (lonoratus est al) eo
super qnod speravei'at : nain et in cnbirnio régis dor-
miebat cnin aliis duobus cubicidariis. Porro Darius
exbibuit cœnain satrapis Persaruni et prcereclisliidiœ
et .'Etbiopiœ et niagistratibus ccxxvii piovinciarum.
Ea nocte cxpergefactus , noctcni duxit insoinnein , et
{i) Ensèbe dit la 4' année tic la Gf" oliinpiadcj ce qui rciiond à
l'an 520 av. J.-C,
DE IIAIXAUT. LIVP.E III. 279
lion du roi, mais il ne pul y réussir. Alors il engagea
secreleinent Darius à faire au Dieu d'Israël le vœu que,
s'il lui donnait le trône, il rétablirait son temple, et
renverrait à Jérusalem tous les vases consacrés au
Seigneur et qui étaient encore au pouvoir c!ei rois de
Perse. Lorsque Zorobabel eut appiis que Darius ré-
gnait, il commença avec confiance la reconstruction du
temple, tandis qu Aggée et Zacliarie exhortaient le
peuple, et lui fesaient craindre la colère de Dieu de
voir sa maison désolée, lorsque celles des homuics
étaient richement ornées. Ils donnaient pour signe de
cette colère le peu d'abondance des récoltes malgré
l'abondance des semences confiées h la terre. Les lieu-
Icnaiis du roi de Perse , qui étaient au-delà du fleuve,
empêchaient la reconstruction, et lorsque les anciens
de Juda eurent représenté que Dieu , à qui personne
ne peut désobéir , la leur avait ordonnée , on convint,
de part et d'autre, de porter l'alFaire devant Darius.
Zorobabel partit avec les envoyés des princes pour
aller tiouver le roi : il en fut honoré au-delà de son
espérance; car il coucha dans la chambre même du
monarque avec deux autres chambellans. Dans le même
teins Darius donna un grand repas aux satrapes de la
l^ei'se , aux gouveineurs de l'Inde, à ceux de l'Ethiopie,
et aux magistrats des deux cent vingt-sept provinces;
la nuit suivante, ne pouvant sommeiller, il proposa à
ses gardes du corps la question de savoir lequel des
trois était le plus puissant d'un roi, du vin, ou d'une
femme , promettant une récompense et des honneurs à
celui qui répondrait le mieux à cette question. Le len-
demain ils parurent tous trois en présence des sairaj^es
et des magistrats, et le prcniier déclara qu'un roi était
ce qu'il y avait de plus fort; car de même que les
aSo ANNALES
proposait quoRstioncm custodibus corporis sui, qiiid
de tribus fortius vidorotiir, rcgc , scilicet, vino et
mulicre, promittens mimera et honorem ei qui sa-
pientiùs rcspontleret. In craslinum coràin satrapis et
niagistratibus accesserunt illi très, et ail primus re-
gem esse fortiorem caeteris : cùin ciiim homo pr.Tsit
Cîcteris animalibus, rex prœest homiiii, et ad nulum
cjus omnia fiunt. Seeuiulus autem prsotulit viui forli-
tudinem, quià cÙmî homo prœsit cœleris animi forti-
tudiiie, viiium superat Ipsum animi fortitudinem.
Zorobabel vcro mulierem fortiorem utroque asseruil:
nam regibus et eis qui vites plantant mulieres vitam
conferunt et alimoniam , et ad robur usque perdu-
eunl, et pro mnliciibus animas ponere non timent
liomines. Et concliisit super liis ante onmia veritatem
esse fortiorem qurc inunutabilis est et sempiterna.
Cùmque omnes judicai'ent fortiorem omnibus esse ve-
ritatem, di\it rex ad Zorobabel ut peteret ab eo quid-
quid vellet; et postulavit Zorobabel templi aedifieatio-
iiem, et vasaDomini remitti in Jerusaleu). Et gavisus
est rex, nam ad ipsum nuMuinit se vovisse , et scrip-
sit per epistolam princij)il)us suis trans iluvium, ut
nuUatenùs impedirent Judjcos, sed do sumplibus ré-
gis juvarent eos ; remisitque etiàni vasa Domini per
manum Zorobabel ; qui reditum faciensper (Jialdœam
cum Iribulibus suis, régis mandata patefeeit,et ascen-
derunt multi cum eo llierosolymis. Igitm* ainio se--
cundo Darii (i) mense octavo, inslabant operi , et
compleverunt illud anno octavo (2) Darii , qui erat
(1) L'an 5'9, suivant Kusèbc.
(2) L'an 5i3, suivant le ni<^rae.
DE HAINAUT. LIVRE III. 28 1
hommes sont au-dessus des autres animaux , de même
un roi est supéiieur aux autres liommes , et tout se fait
à son commandement. Le second plaça le vin au pre-
mier rang; car si Ihomnte l'emporte par la puissance
de l'esprit, le vin dompte la puissance de l'esprit
même. IMais Zorol>abel soutint que l'un et l'autre le
cédaient à la femme , puisqu'elle donne la vie et la
nourriture aux rois comme à ceux qui plantent la
vigrje, et les conduit jusqu'à la force de l'âge; et que
les hommes ne craignent pas de mourir pour les
femmes. Il ajouta que la vérité l'emportait encore en
puissance sur toutes ces choses, puisqu'elle est im-
muable et éternelle. Tous jugèrent en faveur de la
vérité, et le roi dit à Zorobabel de lui demander ce
qu'il voudrait. Celui-ci demanda la reconstruction du
temple de Jérusalem et le renvoi des vases consacrés
au Seigneur. Le roi éprouva une grande joie en se
rappelant qu'il avait lui-même fait ce vœu ; il ordonna
par lettres , à ses gouverneurs au-delà du fleuve , non-
seulement de n'empêcher en aucune nianière les Juifs
de reconstruire leur temple , mais de les aider de ses
trésors. Il rendit aussi les vases du Seigneur à Zoro-
babel, qui, revenant par la Caldée avec ceux de sa
tribu , montra les ordres du roi , et un grand nombre
de .luils vinrent avec lui à Jérusalem. Ainsi le huitième
mois de la seconde année du règne de Darius , ils se
remettent à l'ouvrage avec ardeur, et l'achèvent la hui-
lièuie année du même règne, qui était la quarante-
sixième de la domination des Perses. Ce fut donc vers
celte quarante-sixième année que le temple lut re-
construit , c'est à-dire que ces années s'écoulèrt'nt
depuis le premier édit de Cinis poiu' le retour et la
reconstruction , Jusqu'à Ja septième année de Darius»
282 ANNALES
xLVi rcgnl Pers.irum. Ju\tà illiul xlvi anniini, frdi-
ficatiim est tcmplimi hoc, ici est, à prima lirentia
quain (ledit Cyriis rcdeuiuli et rcœd ificaiuli tcinplmn,
usque ad scptiinmn amniin Darii (jiio consimiinatimi
est, tôt antii dcflu.vorunt. Coiivoneriirit aiitem filii Is-
raël ad dedicationein teinpii , et dedicavermit ilkid
lîieiise duodecimo, qui apiul Latiiios martiiis dicitiir,
tertia et vigesinia die meiisis Et hœc est seeimda teui-
pli dedicatio. De archà vero Doiniiii (|uoinodo recepe-
nint eain iiicertuin est ; sed si cei'tiini est cpiod Ej)i-
plianiiis dieit, eani usque ad ulliimun dieni non egres-
suram de latibulo petrœ; scilicet certuin est ((uod
Jlebraei iiistai' pi'ioruui iedifieaverunt alterani. Ei/sc-
biiis. AiHio secundo Darii, Denioctitus pliilosopluis
et Heraclitus et Anaxagoras plivsicus elari liabeban-
tur, ({c quibus Aristoteles, iti primo jîiiysicorum et
inetaj)liysi(£K libro decimo , opiniones de primis prin-
cipiis récitât plenariè. Easc.hius. Aniio Darii xix(i),
o!yu)|)iade lxix , bellum in Maralbonc gi'slum est;
et ea quœ de inilitià describuiilur et Ai'istide, qui
cognominatus est Justiis , gesta sunt. Eiisfliiis. Auno
Darii xx", olynipiadis lxix aiuio primo, Valerins('i),
Bruli Collega , adeo pauper mortuus e.^l , ut sumptu
jndjiico sepelii'etur. Aiiiio ])arii xx\i, olvm|)iade
Lxxii. Arislides(^3jcuin ignominiâ v]\c\ln\\ y^clur. Ilic
(1) I-'an ."^02 av. J -(]. ; mais 1rs <'<lilinns «FFiisrlx- rapp'irfrnt
Cfltr «latp î'i la i"'ann(M' »li.' la "i,' (ilim|>iat!<* . <\s!-;i-ilir(' ;'i l'.m 4()i
avant notre ère L'art «le v<'iiii<'r les tlatcs, «onCoiene aux nuiilni-s
(1c Paros, plare la I afaillc dt; Mai al lion in l'an \i\o.
(a) VaJt'riiis mourut en Pan 5o5, suivant l'Art tic vcri.'jcr les
dates.
fS"! Arisljflc fut b.Tnni In 1"' annc'c df* la t^'' r>limpia<1p ( '{8? an<
DE HAINAL'T. LIVRE ITI. 283
que celte reconstruclion fut achevée. Les enfans d'Israël
rassembles fireiiL la iléilicace du temple le vingl-troi-
siemc jour du douzième mois de raimée juive , qui
correspond au mois de mars chez les Latins. Ce l'ut la
seconde dédicace du temple. On ne sait pas comment
on retrouva l'arche du Seigneur; mais, si ce que dit
Epipliane est certain , que l'an he ne doit sortir qu'au
dernier jour, de l'asile qui la recelé: ileit pareillement
vrai que les luifs en construisirent une autre semblable
à la prciniere. Eusche. La seconde année du règne de
Darius, les philosophes Démocrite et Heraclite, et le
phisicien Anaxagore, étaient célèbres. Aristote rap-
porte leurs opinions sur Ici jjrincipes des choses, dans
son prenner livre de la Piii-,i(|ue, et dww', son dixième
livre de la Méiaphisique. Eiis.be. La bataille de Mara-
thon , les éveneuiens de celle guerre et ce que l'on
j-aconte d'Aristide , surnonnné le .lu-te, arrivèrent la
di.v-neuvieme année du legne de Darius , dans la
69' olimpiade. Easiùe. La vingtième aimée du règne
de Darius, ou la première de la 69* oThupiade, Valé-
rius-Publicola , collègue île Brutus, mourut si pauvre
qu'il fut enterré aux irais du trésor public. Aristide fut
banni avec ignominie, la trente-unième année du
même règne, dans la 72"^ olimpiade. X.' Auteur. On ra-
conte qu'il fut banni de sa patrie, parce qu'il était
juste outre mesure. Le roi Darius njourut la même
année, laissant un grand nombre de fds qu'il avait eus
avant et pendant son règne.
av. J -{] ) suivant IV'.Jili d de saint Jcrùme , et cdk- de IT.ustbc
de hcali^cr. ,
284 ANNALES
de propria patria logitur expiilsiis eo qiiod prœter
modum jiistusesset. Hoc aiino Darius rex decrssit(i),
relictis multis filiis et in regno et antè regnuin siis-
ceptis.
CAPITULUM V.
De Xerxe, rege Pcrsarum.
EUSEBIUS.
Igitur Xerxes filius Darii, Persarum quintus, caepit
anno quintae œtatis cv, mundi vero iiimcdlxxxiii (2),
olyrapiadis lxx anno primo, et regnavit annis xx.
Valerius libro ix" (3). Hic adeo luxuriosus erat, ut
edicto primum ei proponeret qui novum voluptatis
genus invenisset. Justinus (4). Hic Xerxes bellum à
pâtre susceptum adversiis Graeciam quinquennium
instruxit. De hoc Xerxe loquitur Valerius lihro primo
(i) Darius mutiriit rn l'an -'i8.} av. J.-C , suivant Knscbe.
('j) II faiif liie l'an du morule i»70, «|ni n'i)on(l à l'an 4 \ avanl
noire «re cl à la 4' année de 1' limpiaile 78, et non à la i'' année
de la 70' olimpiade, comme le marque à t rt notre auteur.
(3) Cap. t.
(ij LA- Il , cap. 10.
DE HAINAIT. LIVRE III. 285
CHAPITRE V.
De Xercis, roi des Perses.
EUSEBE.
Xercès , fils de Darius et cinquième roi des Perses ,
monta sur le trône l'an 105 du S" âge, 3483 du monde,
1" de la 70*^ olimpiade, et régna vingt ans. Valère-
Maxime, livre ix. 11 était si adoimé aux plaisirs qu'il
promit , par un édit , de récompenser celui qui lui indi-
querait un nouveau genre de volupté. Jlstin. Xercès
se prépara, pendant cinq années, à faire contre la
Grèce , la guerre commencée par son père. C'est de ce
roi que parlent Valère-Maxime , livre i et livre ix , Sé-
iièque , livre vi , des Bienfaits ; Justin , livre n ; et
Orose , livre n. Klsèbe. Pindare, Sophocle et Euripide
florissa ent au tems de Xercès, la troisième année de
la 75^ olimpiade. Justin, livre ni. Ce roi , jadis la
terreur des nations , ayant été malheureux dans la
guerre qu'il fit à la Grèce , tomba dans le mépris de
ses propres sujets. L'avilissement de la majesté royale
augmentant chaque jour, Arlaban , sou lieutenant
586 ANNALES
et lihro iiono; itom Sonoca lib vi(iV/<? Bcnr/iciis ;
item Jiislimis, lil)ro ii" (•>.); item Oi'osiiis, lihro ii".
EosEBiiis. Tcinporibus Xcrxis, olympi.ulis lxw an-
no m" (3j, Piiularui, Soplioclcs v\ Euri|)i(l('S clariie-
Y(\\\\. JusTiMis, libro m" ([\]. Xorxos aiitcin, ton-or aii-
t(\i gcnliinn , IjcIIo in Giœoia iiifclicitci' goslo, otiàni
suis contomptiii es o cœpit; et dcficicnto (jtiotidiè ré-
gis majeslate, Artahaniis, praifcctus ejiis, in spein
regni addiiclns , einn rol)iistissimissepteni filiis aulani
régis ingressus vesperi , (jiiia illi jure aniiciti.T seniper
patebat; ivge trueidato, filios ej'.is dolo agf^reditur,
dixitcpie Artaxerxi pnerulo regeni à Daiio fratre siio
interfectum, et sic impulit eiini in neceni fratris in-
nocentis, qui dorniiens invenlus , (juasi sonmuin fin-
geret , inleifeetus est. Ciim ergo Artabanus soluni
illinn de regiis fdiis superesse viderct, m,'tueret({uc
diï regno certamina |)rineipiin ; ass'.imjisit in socleta-
tem eonsilii P>,ieeal)asuni ; (pii, prdesenti statu eon-
tentus, rem produxit Artaxerxi, (juoniodo pater et
frateroccisi sunt. Q libus eognitis, Artaxerxes verens
numerum filiorun\ A.rtaljani, in crastinum diein para-
luni esse exereituni juhet, (juasi recogniturus et nu-
merum militum (>t in armis industriam singuloi'um.
Cùmque inter cœ'.eros ipse Artabanus armatus as-
sistèrent, rex simulât se breviorem loricain babei'e,
et jubet Artabanuni sccuni comnuitare; et exuentem
(i) Clip. 3i el seq.
(2 C<ti>. 9.
(3) L'an 477 av. J.-C, suivant EusLbc.
(4) Cap. I.
DE IIAINAI'T. LIVRE III. 287
dans l'espérance de monter sur le trône , entra , un
soir, avec ses sejît fils , dans le palais qui lui était tou-
jours ouvert comme à un favori du prince. Ayant tué
Xercès , il agit de ruse auprès des fils de ce roi , et dit
à Arlaxerccs (I), le plus jeune, que son père a clé
assassiné par Darius, son frère; il l'engage ainsi à
luei" sou frère innocent et endormit. Artaban voyant
qu'il ne restait plus que l'un des fils du roi, et crai-
gnant la rivalité des grands pour monter sur le trônj,
mit dans sa confidence Baccahase , {|ui, partisan du
présent état de choses, fit connaître ces projets à Ar-
laxerccs et comment son père et son frère avaient é:é
mis à mort. A celle nouvelle Artaxcrcès, pour se pré-
( autionner contre les fils d'Arlaban , indicpie au len-
demain une revue de l'armée. Arlaban se trouvait
sous les armes avec les autres, lorsque le roi lui de-
manda à changer de cuirasse, sous prétexte que la
sienne propre était trop comte. Aussitôt que le traître
eut découvert sa poitrine, Arlaxeiccs le perça de son
épée et fit saisir ses fils. Ainsi ce jeune prince vengea
la mort de son père, et se délivra des pièges qu'on lui
tendait.
(1) <;%-st Arlaxorr('s-T,ongiirm.i.in (jiii, après av-ir eVIiappu au
miMirlrii r lie son |)iio, m ;ufa sur le liune l'an ^6\ avuiit notre
l're.
288 ANNALES
seacnudatumgladlotrajlcit; etfiliosejuscorripi jubct.
Et sic atlolescens egregius et cacdem patris vindica-
vit et se ab insidiis liberavit.
CAPITULUM VI.
De Artaxerxe rege.
EX CHRONICIS.
Igittjr regnavit Pcrsarnm rex sextiis Artabanns
mensibus octo, olympiadis lxxviii arino ii (r). Post
huiic, soptiinus Artaxcrxcs, qui Loiigiinaïuis cogiio-
nilnabatur, cœpit aniio qiiiiitae œtatis cxxv, umiuli
vcro iiiMCDxcviii(2), et irgnavit annis xl. Comes-
tor. Eodem tcinpoi'c, Esc! ras aaronita Dei legein
quani CliaIcKTi siicceiideratit et coinhusscrant , rcpa-
ravit; novosquoque littorarum apices cxcogitavit, qui
facilioros ad scribcMiduin fioivnt ot ad pronunlian-
dum, et pi'opteroà vclox sci'iba dictus esl. A<ldidit
etiàiii quipdam de suo , sicut litulos p alinonnn, et
(i) L'an 46} av J.-C , suivant Fiisi'hc; mais alors il faut lin- la
4' année ilf la -jh' oliin| iad»', scion l'i'ililinn valiai'-ii'nnc «rKnsrhc
et relie de Srali^ir. l.a vcr.si .n arménienne «In même a itenr rap-
porte eelte anni'c à la ■}.' ilela ;<)' o'.inipiade , c'est-à-tlire à l'an tG6
on 465 av. J.-(>'.
[i) L'an -iG.'. av, J.-C
DE HAINAUT. LIVRE III. 289
CHAPITRE VL
Du roi Artaxercts.
. Extrait des Chroniques.
Artaban , sixième roi des Perses , remonta sur le
Irôiie la seconde année de la 78^ olimpiade , et l'oc-
cupa huit mois. Apres lui , le septième roi lut Ar-
taxerccs, surnommé Lon{,ue-Main, qui commença son
l'ègne l'an 125 du 5* àj^i^e , 3498 du monde, et régna
quarante ans. Comeafor. Dansée même tems, Esdras,
de la famille d'Aaron , refit la loi de Dieu, que les
Caldéens avaient brûlée. 11 inventa aussi pour les
lettres de nouveaux accens qui rendaient l'éci iture et
la prononciation plus faciles, ce qui lui fit donner le
surnom de scribe. On lit dans le Pentateuque plusieurs
passages qui sont de lui, de même que les titres des
psaumes. Il est vraisemblable aussi qu'il en retrancha
ce qui lui paraissait superflu. Esdras ayant gagné les
bonnes grâces d'Artaxercès, lui demanda la permission
de retourner à .Jérusalem, pour instruire son peuple
dans la loi qu'il avait rétablie. Le roi le lui permit et
lui donna une lettre pour ses lieutenans des provinces
au-delà du fleuve et pour les gardiens du trésor pu-
n. 19
îSrgO ANNALES
plura quae leguntur in Pentatcucho. Sic quoque vcri-
simile est quœdam quae superflua inlellexit ipsum sub-
traxisse. Porro Esili-as invcnit gratiam in oculis Ar-
taxerxis, et petiit licentiam ab eo ascenclendi in Jéru-
salem, ut in lege quani reparaverat populuni suuin
erudiret. Dédit ergo ei rex licentiam redeundi , et
tradidit ei epistolam ad principes suos trans fluvium,
et ad custodes arcae publicne, ut traderet Esdrae ne-
cessaria. Ministres vero templi ab omni vectigali , tri-
buto et annonis absolvit; dédit etiàm Esdrae potesla-
tem amovendi et constituendi judices et praesides
trans fluvium , secundùm sapicntiam suani , et pu-
niendi contumaces. Et fuerunt cum eo mille septiii-
genti, et venerunt Jérusalem , mense quinte, et si-
luerunt tribus diebus. Quartâ dio obtulerunt in domo
Domini quœ secum lulerant. Tune adjuravit Esdras
sacerdotes , principes et levitas, ut projicei'ent uni-
vcrsasuxores alienigenas et eos qui de eis nati erant.
Eusehius. Eo tempore Empcdocles et Parmenides
pliilosophi agnoscuntur, de quibus Aristoteles in
•primo Plijsicuriun et de Fegelalibiis et ^;lunlis ,
multa refert. Actor. HicEmpidccles Dcum legitur sic
descripsisse : m Deus, inquit, est splinera cujus cen-
tiiun est ubique et circumfcrentia nusqui.m. »
Euseliiis. Eo tempore, scilic^'t j:nnj xiii xlrlaxcrx s
régis (i;, cccii ab urbe condila, decemviri cr.'ati
post annum erecti sunt(2), propter Appium Cîaii-
(i) L'an 45i av. J.-C, scion Eiisèbc.
(a Lrs premiers docemvirs «■ntn'rrnt en charge U' 3 JMi;i \^\\
les seconds , entres en càar;,e le '^4 n^^'i 42<^> ruticuucut rautunlé
DE HAINALT. LIVRE III. 201
blic . afin qu'ils lui fournissent ce dont il aurait besoin.
Il affranchit les prêtres du temple de tout tribut et de
toute fourniture de vivres; et donna à Esdras le pou-
voir d'établir et de nommer des juges et des magistrats
au-delà du fleuve, comnie il le voudrait, et celui de
punir les rebelles. Div-sept cens juifs partirent avec
lui; et, cinq mois après leur arrivée à Jérusalem, ils
gardèrent le silence pendant trois jours. Le quatrième
jour ils tirent, au tejiiple du Seigneur, l'offrande de ce
qu'ils avaient apporté avec eux. Alors Esdras conjura
les prêtres , les grands et les lévites de renvoyer toutes
les femmes étrangères et les enfans qu'ils en avaient
eus. Eascbe. Dans ce tems vivaient les philosophes
Empédocle et Parméniile , dont Aristote parle souvent
dans son premier livre île la Phisique et dans son His-
toire des plantes. L' Auteur. On lit qu'Empédocle dé-
finissait ainsi la Divinité : « Dieu, disait-il, est une
sphère dont le centre est partout, et la circonférence
nulle part. n[\) Eascbe. A cette époque, c'est-à-dire, en
la treizième année du règne d'Ariaxercès, trois cent
deux ans après la fondation de Home, les décemvirs
furent établis, et renversés une année après, à l'occasion
d'Appius (Jaudius, qui voulut laire violence à la fille
de Virginius, qui combattait alors contre les Latins
sur le mont Algide. L'Auteur. On trouve dans Isidore,
livre V, ch. 10, les noms des décem\irà. Valèrc'
Maxime. Virginius tua sa fille au milieu du Forum,
aimant mieux être meurtrier que père d'une femme
jusqu'à l'an 4f9 >Je J.-(]. , f|ii'ils furent forces d'abiliciuer. ( Art de
vérifier les liâtes, j Mais il a '-te proiivif dans la clirondogie jointe au
Tacite de M. Dureau de I amalle que ces evcnemens sont posté-
rieurs de deux ans.
(i) Pascal a , dans sei Pensées, apj)liqut' cette de'.lnition à l'u-
nivers.
292 ANNALES
diiim qui Virginii cnjiisdani niiam contra Latinos in
Algitlo niilitantisfi), voliiil addiiccrc. Avtoi. ISoniina
auloin dccrniviioiMini ponit Isidoiiis in lihi-o v, ca-
pitulo X (2). Vak-iius \^S). A^ii'giniiisfdiam suam in mo-
dio foro oi'cidit , malens esse occisor Virginiiis quàni
corruptœ patci'. Eusebius. Olympiadis lxxxi anno se-
cundo (^4)î Romani autoin pcr logatos ab Athenionsi-
busjura peticrunt, ex quibus duodecim tabulie con-
scriplae sunt. TIoc quoque teinpore Zeno et Ileraclitus
tenrbrosus agnosciintur, Anaxagoras moritur, Aiis-
tarcbus tragjipdiograpluis agnosrilur ; Ciatinus et
iMato, coniœdiarum scriptores, Crates qnoquc coini-
cus , et Bacchylides lyricus, clari habeutur.
CAPITULUM VIL
De primariâ fundatione villae Dionanti.
LUCIUS ET HUGO.
His temporibus, Condronii atque Rlictii gentcin
efferam , sine loge quasi viventcm, teiritoi'ii civitalis
Dianœ, quae et Lunae dicitur, peremerunt cum lotu
(]) Montagne à douze milles de Rome.
(3) Cap, I.
(3) Lib. vi, cap. i.
^4) L*an 454 av, J.-^,
DE HAINAUT. LIVRE III. 293
déshonorée. Euscbe. La seconde année de la 81* olhu-
piade , les Romains envoyèrent des députés aux Athé-
niens pour leur demander leurs lois, et on en composa
les douze tables. Dans ce tems vivaient encore Zenon
le Ténébreux et Heraclite; Anaxagore mourut tandis
qu'Aristarqiie le Tragicpie se fesait connaître , que
Cratinus et Platon écrivaient des comédies, et que flo-
rissaient encore Cratès le Comique et Bacchilydes le
Lirique (1).
(i) Araxagnre naquit l'an 5oo avant noire rre, et mourut à
?rixaiile-il )uze ans , l'an 4'-i8 Aristar(|ne de Tr^c'e , poif;; tragique,
vrrtit J1I11S rie cent ans, scion Suidas, depuis l'an Sii jusqu'à
l'an 41" Il y a eu ileiix (j'iète? rnmiqiies du n'>m de Cratinus : l'an-
cien \ivait vers l'an 4-^^ • <?t a poussé sa carrière jus(|u'à l'âge de
quatre-vingt-dix ans; le second est nn poète de la moyenne eome'-
die 11 y a en de même deux jioètes comicpies du nom" de Platon,
dont le plus jeime appartient ;'i la moy. nne comédie, et dont lan-
cien flori<sait à I èp xpie de lu mort de Socralc. Cratès, poêle co-
mique, vivait au cr)mmencemcnt du 5" siècle avant notre ère.
F.nfin Baccliili<les, poète lirique, neveu du fameux Simonides ,
floiissait l'an 430 avant noire ère.
CHAPITRE VIL
Fondation de la ville de Dinant.
LUCIIJS et HUGUES.
A cette époque les Condrosiens et les Rhétiens dé-
truisirent une nation sauvage qui vivait sans lois sur
le territoire de la ville de Diane, nommée aussi la
Lune, et détruisirent cette ville qui était placée dans
la foret de la Fagiie , et restée intacte depuis sa fonda-
tion , parce que ses habitans n'avaient excité aucune
^94 AXÎÇALES
civitatc,qunB iii sylvis Faunoruni (i)collocafa dignos-
cebatiir. ïlœc à suî fundalione rcmanserat intacta,
quia nequc gens illa neqiic civitas (|uibns{M;nqiie no-
civa vidcbatiir. Piofcrt taincn Liiciiis qtiod iclicjiiire
geiitis illiûs posliTiodùin Dioiiantum, à DiaiiA sic dic-
tiiiii,suprà ripariam Mosaefuiidantos,nomcn antiqure
civilaf.is ooruin iinpoiiciitos , Famioiiiin faincn inorc»
aliquos diii retimu'i-imt. Nota , sicundiiin Liiciiiin,
loges Faunoriim , quorum fi'uctus arborum et berba-
rum simplex et rriidus erat victus ; fonorum et eor-
licum et raro l;csliannn pelles erat, pro aiili;piis ; pro
mediocribus et juvcnibus iiulla penitLis erat veslis.
CAPITULUM VIII.
De Nohcmiâ, et rcaedîficalionc civilalis Jcrtisalcm.
COMESTOR.
iNannoxxxriregisArtaxerxis(a), olympiadisLxxxvi
aniio primo, eral pineerua régis Nebeiuias de filiis
caplivitatis ; qui diini esset in Susis Castro, audivit
(i Le bois de la Fagnc , ;'i rnri("nt crAvrnfs.
(a) L'an ^\i nv J.-(y , s(■l^n Ensèbc. Mii': la i" année de la
fie i>limpia>le re'p md n lan 4 >5 , "'< l'iiifôf ù Tannée t(ui commen-
cerait le 6 juillet 456 et finirait le ^5 juillet 4^'»
DE HAIN.AUT. LIVRE ITI. sgS
crainte. Liicius rapporte , à ce sujet, que les débris de
C'.'lle population fondèrent, sur la Meuse, la ville de
Dînant (I). Ils l'appelèrent ainsi, du nom de Diane,
pour conserver la dénomination de leur ancienne cité ;
mois ils gardèrent long-tems les mœurs des faunes. S'il
en faut croire le même auteur, ce peuple se nourrissait
d'herbes et de fruits crus; les vieillards avaient des
feuilles , des écorces d'arbres et rarement des peaux de
bêle pour vêtement; les personnes moins âgées et les
jeunes gens allaient nus.
^i) Cette ville est située entre Cliarlemont et IN'amur, sur la rive
droite tic la Meuse; elle e>t gi'niTalcment regarde'e comme an-
cienne , et dépendait autrefois de Téglise de l'ongres.
CHAPITRE YIII.
De Kéhe'raic, et de la rccoustructi )n du temple de Jerusa'em.
COMESTOR.
La trente-deuxième année du règne d'Ârtaxercrs, la
première de la SB*" olimpiade, Néhémie, né pendant
la captivité, était échanson du roi. Tandis qu'il vivait
dans le château de Suse , il entendit des voyageurs
parler hébreu , et s'informa de l'état de la Judée
et de Jérusalem. Il apprit que la ville était sans mu-
railles, et que le peuple de Dieu , qui l'habitait, était
2C)6 ANNALES
percgrinos hebraîcè loquontrs;ct accecicns sciscitatus
est ab eis de statu Judaert' ot Jérusalem ; et aece|)it ab
cis nrbeni esse sine mûris, et habitarc in ea populum
Dei in afïlictione; namperdiem sushnel)ant inipetum
hoslium, et noctibus intrabant latrunculi , et plateas
implebant cadaveribus occisorum. Et flevil Nebemias ,
et ribum desidt rabilem non comedit, noete et die
clamans ad Dominuni. Sciseitahl Iristitirc causa , rex ,
reverlendi sibi constilulo , dédit ei epislolam ad prin-
cipes trans fluvium, in qua mar.davit de bonore ex-
bibendo Nebemiae , tanquàm (bici et h'gato misso de
latereejus, et de impendiis uibis re.TdificandtT ; et
misit cum eo principes militum et équités. Et trans-
itum faeiens per Babyloniam multis de filiis captivi-
talis reduxit secum , et venit in Jérusalem xxv an-
no (i) Artaxerxis. Poii"o in Jérusalem suinmus erat
saccrdos Eliapbat (2), filius Eliacbim ; et siluit Mebe-
mias tribus diebus; et nocte consurgens cum paucis
circuibat ruinas nuu'orum , considerans qualiter re-
œdifîcari possent. Qiiarta die locutus est ad midtitu-
dinem : « Venite, et œdificemns ; et non simus ultra
« opprobrium in gi'ntibus. » Et cons.ujnnatunu'st op ;s
in annos duos et (piatuor menses, licet in niult.i an-
guslia el j)luribus impedinienlis. Cùnique inunineret
inensis septimus, qui ferè apnd eos tôt us solenuiis est ,
convenerunt in Jérusalem cpiasi vir unus, et acccpit
Nebemias quod non babebant ignem sacrum de subli-
mi. Traditum est ei à scnioribus quod Jeremias , iii
(1) 439 av. .T,-C. , suivant Eusèbe,
(a« Eliasib.
DE HAINALT. LIVRE III. 297
dans l'affliction, obligé, pondant le jour, de soutenir
l'attaque des ennemis et, pendant la nuit, en pioie
aux brigands qui joncbaient les places de cadavres, ^'é-
héniie versa des larmes et se priva de nouriiture ,
invoquant le Seigneur le jour et la nuit. Le roi, s'étant
inf<u'më de la cause de sa tristesse , consentit à son re-
tour et lui donna une lettre pour ses lieutenans d'au-
delà du fleuve , dans laquelle il leur prescrivait de
rendre bonneur à îSébémie comme à un duc et à son
légat a lalcre (1), et de pourvoir aux frais de la recon-
struction de Jéiusalcm. Il envoya aussi avec lui des gé-
néraux et des cavaliers. En passant par Babilone, Në-
bémie emmena un grand nombre des captifs , et arriva
à la ville sainte, la vingt-cinquième année du règne
d'Arlaxercès. Eliaphat, filsd'Eliachim,étaitalors grand-
prêtre. Nèbémie garda le silence pendant trois jours; il
se levait la nuit pour parcourir avec quelques autres
les ruines des murailles et voir comment on pourrait
les reconstruire. Le quatrième jour il dit au peuple :
«Venez, et bâtissons, et ne soyons plus l'opprobre
des nations. » L'ouvrage fut achevé en deux ans et
quatre mois, malgré les difficultés et les nombreux eni-
])è( hemens. A l'approche du septième mois , que les
Juifs passaient en fête presque en entier, ils se ras-
semblèrent à Jérusalem, comme un seul homme, et
apprirent à INéhéuiie qu'ils n'avaient pas le feu sacré
venu du ciel. Les anciens lui rapportèrent (jue Jéré-
mie, aux jours de la captivité, avait caché les tisons
et le brasier de l'autel sous la terre dans la vallée de
.losaphat. S'étant lendus dans ce lieu, ils découvrirent
le puits, et trouvèrent les restes du feu sacré et de l'eau
fi) Tels «ont les termes mêmes du texte.
398 ANNALES
flicbus caplivitafis, abscoiulorat stip'tos altaris et
primas in inforiorihiis tonii' , in vallo Josapliat. Cimi-
qiic vrniss(Mit ad locmn , oriiclavoriint piilomn , et iii-
veni'i'iint stipitos et primas et atjiiain crassam ; et
tolleiites ea super striiein ligtiorinn , et liostias cpiae
erant super altare projecerimt , et erupit ignis , et
oiahaiU sacerdotes , Jonalha irulioante et eœteris res-
p )iKl(Mitihiis. Nelieinias quoipie tune ediiiit specialem
orationem. Porrô prima die scenopegiarum , dixerimt
Esdrœ ut afferret librum legis et legeret coràin po-
pulo ; stetit((ue Esdras siipi'à g: adum ligneum juxtà
portam aquarum, et legit à manè usque ad mediam
diem; levitae vero duodecim silentiiim faciebant in
populo. Flevit autem omnis popu'us, et dixit ad eos
Esdras : « Nolite contrislari , quia sanctus dies Do-
« mini est. » Cùmque rediissent in diem sccundum ,
mandante Esdra, egressi sunt, et tulerunt frondes ar-
borum , et feccrunt sibi tabernacula in atriis et do-
matibussuis et in atriisdomûsDei, quod non fererant
à diebus Josue fiiii Nun, et observatum est deinccps
in Israël. Die vero octava , fecerunt eollectam , juxtà
ritum , ad oleum et panes propositionis et ligna et
sacrificia. Post hicc, juxtà legem, separaverunt alic-
nigenas ab eeclesia , et in emundationem suî, sta-
tuerunt in crastinum jejnnium générale, ut afd'ge-
renl animas suas, liomines et jumenta u^què ad
pueros septennes; et coiivenerunt orties ad audien-
dum legem, quater in die et quater in nocte; lectionc
terminata prosternebatur populus ad orandum, et
fiebant preces super cum, et tandem benedictio sa-
DE HAINAUT. LIVRE III. 299
bourbeuse. Ils les placèrent sur un bûcher , y jelèrent
les hosties qui étaient sur l'autel, et le bûcher s'en-
flainma, tandis que .lonathas(l) et les autres prêtres ré-
citaient (.les prières alternatives. Ce fut alors aussi que
Néliémie publia son oraison. Le premier jour de la
fcte des Tabernacles , le peuple pria Esdras d'apporter
le livre de la loi et de le lire en sa présence. Ksdi-as,
niontésur ime hibuneen bois, près de la porte des Eaux,
fil celle lecture depuis le matin jusqu'à midi. Douze Lé-
viles maintenaient le silence parmi les auiliteurs, qui
tous fondaient en laimcs. «Ne vous attristez point,
leur dit Esdras , parce que ce jour est consacré an Sei-
gneur. » Lorsqu'ils revenaient le deuxième jour, ils
sortirent par l'ordre d'Esdra« , cueillirent des branches
d'arbre et se construisirent des tabernacles dans les
cours, dans les maisons et devant le temple du Sei-
gneur. Cette cérémonie, qui n'avait point eu lieu de-
puis Josué , fils de Nun , fut observée dans la suite en
Israël. Le huitième jour , le peuple s'assembla, suivant
la coutume, pour pourvoir à l'huile, aux pains de
proposition, au bois et aux sacrifices. Ensuite ils ren-
voyèrent les étrangers, et pour se purifier et pour
mortifier leur ame, ils ordonnèrent, pour le lende-
main , un jeune général auquel seraient soumis les
hommes , les enfans au-dessus de sept ans et les bêtes
de somme. Ils se rassemblèrent huit fois pour entendre
la loi, quatre fois le jour et quatre fois la nuit. A. la
fin de ces lectures, le peuple se prosternait pour ado-
rer ; on fesait des prières sur lui, et il recevait la béné-
diction sacerdotale. La religion chrétienne, comfne le
dit Bède, a imi é cet exemple, car nous nous rendons
(1) (.'est Johanan.
30O ANNALES
ccrdolalis soquebatur. Ex liis , prout dicit Beda , cc-
clesia cliristianoriim traxit in oxompluin ; iiam octios
conv(Miiimis ad ccclcsiani, et si non pcnitùs eo modo
qiio illi, semi'l onini siii'giinus ad nocturnos, seciin-
dinn illiid niedid nucte suigcUau ad confilendum
tibi. In die vero scptics psallimiis, secundum illiid
septies in die laudeni dixi (ihi. Singulis aiitom
horis, Icgitiir Icctio quain capilulum dicinni>; post
qiiam prosternimus ad procès, in diebus profectis,
et subditur oratio pro benrdictione. Porro videns
Ncbemias uibcm ferè vacuam habitantibus, roga-
vit optimales ut babitarcnt in Jérusalem, et benc-
dixit cis qui se sj)onte obtulerunt; reliqua vero
multitudomisit sortem , etdecimum caput super quod
cecidit , fecit habitare in Jérusalem. Post aliquod tem-
pus congregati sunt in Jérusalem ad dedicationem
mûri; et ascenderunt saceidotes et levitœ cantoresque
cum musicis , et psallentes et incedebant per muros;
Esdras vero prœcedebat , Neliemias autem , et opti-
males cum eo, super alteram partem mûri incedebant
psallentes; reliqua vero multitudo sequebatur cos
super terram, et ducebant cboros. His impletis, re-
diit Nebemias ad regem, anno xxxii regni sui (i) ;
et mortuus est Esdras scriba in seuectute venerandâ ,
et multà liberalitatc sepultiis est in Jérusalem. Actor.
Prœtei' duos autem libres Esdrœ , primum et sccun-
dum qui vulgali sunl apud nos, sunt cliàni Iresalii,
tcrtius, quartus el quintus, nomine cujusdam inlitu-
lati ; sed intcr apocryplia reputati sunt.
0") L'an ^\i av. J.-C. suivant Eusèbe.
DE HAINAUT. LIVRE ITÏ. 3oi
huit fois à l'église et , si ce n'est pas tout à fait de la
même manière que les Israélites, cependant nous nous
levons une fois pour les nocturnes, suivant ces paroles
du prophète : Je me levais au milieu de la nuit pour me
confessera loi; et dans le jour, nous chantons sept fois
la gloire de Dieu, suivant ces autres paroles : J'ai
chanté ta louante sept fois par jour, A chaque heure on
fait la lecture qu'on appelle le chapitre; ensuite, on
se prosterne pour prier , et l'on ajoute l'oraison pour
la bénédiction. Néhémie , voyant la ville dépeuplée,
pria les grands de venir habiter Jérusalem , et bénit
ceux qui s'offrirent d'eux-mêmes. Le reste de la
multitude tira au sort , et le dixième désigné fut
obligé d'habiter cette ville. Quelque tems après, les
Juifs se rassemblèrent à Jérusalem pour la dédicace
des murs. Les prêtres et les lévites , accompagnés
de chantres et de musiciens , psalmodiaient en mar-
chant sur les murs : Esdras les précédait , tandis que
Néhémie , et les grands avec lui , s'avançaient , en
chantant, sur une autre partie des murs. Le reste de la
multitude les suivait à terre et répondait en chœur à
leurs chants. Cette mission remplie , Néhémie retourna
près du roi , la trente-deuxième année de son règne ,
et Esdras le Scribe mourut dans une vénérable vieil-
lesse , et fut enterré à Jérusalem avec une grande
pompe. L' Auteur. Outre les deux premiers livres d'Es-
dras, qui sont communs chez nous, il y en a encore
trois autres, c'est-à-dire, le troisième, le quatrième et
le cinquième , qui portent chacun un titre particulier,
mais on les regarde comme apocriphes.
302 ANNALES
CAPITULUM IX.
De Socratc, Hippocratc et pluiibus aliis phi!o^O];Li».
EUSEBIUS.
Anno Artaxorxis xxxv (i), olympiade lxxxvii,So-
phocloset Deniocrltus, Einpedocles vt Hippocras mo-
(licus et Gorgias et Zcno et Pafinenides, pliilosoplii
indignes habebaritui'. Item, eodem teinpore claruit
P}'tlia<;oras sophista , eujiis libres Atlieniense.;, de-
creto pnhlieo, eombiisseriint. Fusebius. Amio Arta-
xerxis xi. (2), olympiadis Lxxxviir anno primo, So-
erates j)hiiiino sennoiie cclehratur. Aiigtufinus iii
Whvo (le Cii'ilatc Dci \\\\ (iV). Soei'ates Arelielai disei-
pnlus fuisse perliibetiir. Qui piimiis miiversam phi-
losopliiam , ad coriigenrlos eomponendo^que mores,
floi'uisse memoratur , ciim , aiifè illiim, omiies magis
pliysieis,id est nalnralil)iis rel)iis, perscrutatulis ope-
ram ma\i>uam iinpend(>reiit. ThiGo, iy/V/rt.ay///6■"/^ li-
bro 111 clliicœ j i. Morabs j)bilosopliiae invciitoi- So-
f 1) L'an .'fvg av. J.-C, <iiii n'ponil à la 4' année tic la 87' olim-
j iadc
(■2 L'an 4»-4 "'^ ^ -^'- , «l'ii r»'|ion<l en jjufie :"i la 1'' année et en
partie à la a* Je la 89* ulimpiade, et non de la 88'.
Ci] Cap. 3.
DE HAINAUT. LIVRE III. 3o5
CHAPITRE IX.
De Socrate, d'Hippocrate et de plusieurs autres philosophes.
EUSEBE.
La trente-cinquième année du rè^ne d'Artaxercès ,
dans la 87'' olinipiade, Sophocle et Déinocrite , Empé-
docle et le médecin Hippocrate, Gori:;ias, Zenon et
Parménides, étaient célèbres. A cette même époque
vivait encore Pilhagore le Sophiste , dont les Athéniens
brûlèrent les livres par un décret public. Enscbe.
Beaucoup d'ouvrages , qui parlent de Socrate, le font
vivre en l'an quaianle du rcgne d'Arlaxeicès, pre-
mier de la 88 olinipiade. Saint Augustin, Vi\rc \ m de la
cité de Dieu. On croit que Socrate a été le disciple d'Ar-
chélaiis. Il fut le premier qui fit fleurir la philosophie
universelle en l'appliquant à la rcforme'et à l'améliora-
tion des mœurs. Avant lui lous les philosophes s'étaient
surtout adonnés aux objets phisiques, c'est-à dire, à
l'étude des êtres matériels de la nature. Hugles, Didas-
calicon , livre m, éthiques l. On dit que Socrate fut
l'inventeur de la philosophie morale , sur laquelle il
écrivit vingt- ^uatre livres, d'après les vraies règles de
la justice. Saint Jékome , Contre Jovinien, livre i*^"^. So-
crate avait deux épouses , Xantippe et iMiron , petite-
fille d'Axislide. Comme eliei se querellaient fréquem-
3o4 ANNALES
crates fuisse dicltur, qui de ed xxiv libros, secundiim
positivam justitiarh, conscrlpsit. Hieronvmus, contra
Jouinianum (i) , llbro primo. Socrates Xantippen et
Myron , neptem Aristidis , duas liabebat uxores. Quae
cîim crebrô inter se jurgarentur, et ille eas irridere
solitus esset, quod propter se fœdissiinum hominem,
siinis naribus , reclava fronte, pilosis liumeiis , et ré-
pandis cruribus, disceptarent; novissimè verteruntin
eum impetum, et nialè multatum fugienteinque diù
pcrsecutaBsunt. Quodam autem teinpore, eum infinita
convicia è supet'iore loco ingerenti Xantippœ restitis-
set,aqua perfusus immunda , nihil ampliùs respondit,
quàm, capitc dctciso : « Sciebam , inquit, futtirum
ut ista tonitrua talis iinbcr socjucretur. » Acior. So-
crates interiogatus ab Alcibiado, cur Xantippen iiui-
lierem tam acerbam uou abigoret , « Quin, in((uit,
cînn illain donii taloin perpetior, insueseo, etexerceor
ut caeteroruin quoque fui"is pestilentiam et iujuriain
facibùs feram. » Aclov. De illo Socrate AgeUius, Ter-
tulianus, Ilieronymuset Seneca, ad ejus vener.uulaiii
recommendationeni mulla conscripseiuiit, et de ejus
morte suo tempore inferiùs dicenda reservavimus.
(i) Lïh. 1 , cap. 48.
DE HAINAL'T. I.IVRF. III. 5o5
ment , Socrate avait coutume de les railler de ce
qu'elles se disputaient un homme aussi difforme que
lui , qui avait un nez de singe , un front chauve , des
épaules velues et des jambes de travers. Elles se dé-
chaînaient contre lui, l'accablaient de mauvais traite-
mens et le poursuivaient long-tems lorsqu'il les fuyait.
Un jour , après l'avoir accablé d'outrages, Xantippe lui
jeta , d'un lieu supérieur , de l'eau sale ; il se contenta
de répondre en se lavant la tête : « Je savais bien
qu'une telle tempête amènerait une semblable pluie. »
L'Auteur. Socrate interrogé par Alcibiade pourquoi il
n'abandonnait pas une femme aussi méchante que Xan-
tippe : « C'est, dit-il , parce qu'en supportant, chez moi,
de tels excès , je m'exerce et je m'accoutume à souffrir
plus facilement ailleurs, les injures et les mauvais
traitemens. » L'Auteur. Aulu-Gelle , Tertullien , Saint-
Jérôme et Sénèque (1), ont beaucoup écrit en l'hon-
neur de Socrate. Nous nous réservons de parler plus
tard de sa mort.
(i) C'est surtout Xcnopbon et Platon qu'il faut consulter pour
connaître Socrate. Les œuvres de Xe'nophon ont e'te traduites en
entier par M. Gail. M Cousin a publié les trois premiers volumes
de Platon, et le qualri('me est sous presse; ra lis sa traduction du
dialogue île THipparquc ne dispense pas de lire celle qu'a publiée
avant lui M. de Fortia d'Lrban , et qu'il a copiée presque cntiire-
ment. On trouvera cette dcrnitrc traduction dans le Magasin en-
cyclopédique fesant suite à celui de M. Millin.
II. 220
3o6 ANNALES
CAPITXTLUM X.
De Dario Notho, rcge Persarum.
EUSEBIUS.
PosT Artaxerxem regnavitXerxcs seciinrliis duobus
mcnsibus , Persarum octavus rex, olynipiadis lxxxvih
anno secundo (i). Post quem iionus Sogdianus mensi-
bus vir, cui successit Darius, cognomento Notlius,
qui caepit aiino œtatis quint.ne clxvi , niundi vero
niMDXxxix, et regnavit aiinis xix. Actor. Hic jàm est
tertius Darius à Dario Cyri avunculo.
("i) Ucdition vénitienne fl'lùisèbc plare le lègne de Xcrxès en
]a i"^ annt'c de la %çf oliniiiiadc , ce qui n'pond à l'an 4^4 avant
J.-C. , et ce qui s'accorde avec les deux dates suivantes, qui mar-
quent le commencement du règne de Darius.
DE ÏTAINAIT. LlMiE III. JOT
CHAPITRE X.
De Darius Nothus , roi des Perses.
EUSKBE,
Aprics Artaxercès , Xercès second , huitième roi des
Perses, régna deux mois , en la 2'" année de la 88" olim-
piade Sogdien , le neuvième roi, régna ensuite sept
mois. Il eut pour successeur Darius, surnommé No-
thus (1), qui monta sur le trône l'an 166 du 5" âge, 3539
du monde, et régna dix-neuf ans. V Auteur. C'est le
troisième de ce nom depuis Darius, oncle de Cirus.
(i) Darius INotbus, ou le bâtard, s'appelait vc'ritablement Ochusj
il était l'un des fils naturels d'Artaxercès-Longuemain, qui lui
avait donne le gouvernement d'Hircanie, et lui avait fait épouser
Parisafis , sa fille • qu'il avait eue d'une autre mère. Sogdien, égale-
ment fils naturel d' Artaxercès, s'c'tant em])aré du trône après avoir
tue Xercès second , jjhisieurs satrapes, révoltes par la cruauté' de
cet assassin , se re'unirent à Ocbus et le nommèrent roi l'an t\-i\
avant notre ère : ce fut alors qu'il prit le nom de Darius. Il parvint
à attirer Sogdien auprès de lui, et le fit étouffer dans la cendre.
v5o8 ANNALES
CAPITULUM XI.
De Plntono philo!«opho.
EUSEBTIJS.
Anno IV Darii Nothi ( i j, olympiadis lxxxix anno ii,
Plato nascitur, scilicet,anno ab ortu Socratis xliii. Hie-
RONYMUS, contra Jouinianum (2), libro i. Speusippus
sororis Platonis fillus , et Clearchus in laudc Platonis,
et Anaxilides in 11 libro Philosophiae , Perictioncni ma-
trem Platonis , phantasmate Apollinis oppressam fe-
runt, et sapientiœ principem non aliter, nisi de partu
virginis edituin arbitrantur.\ aleriiis, libro i (3).Dor-
mienti Platoni incunis apesmcl labcllisparvuli insere-
bant, signifîcantes singularis eloquii suavitatem. Apu-
LEius , (Je Vitâ et moribus Platonis (4). Plato priùs
Aristotelcsnominatuscst. Pater ejus \riston dégénère
Neptimi fuit; mater ejus Perictione à Solone, sapientis-
simo legum atticarum fundatore, traxit originem.
Cùm autem Ariston , pater Platonis , deferret eum ad
Socratem , ut ab eo instrueretur; nocte précédente,
(') L'an i\ lie Darius répond tlans Kiisèhe ù l'an 4'?-o av. J -C. ,
tunilis que la 9.'" année de la 81)'^ olimpiaJe repond à l'an ^xZ et 422.
(2 Lib. I , cap. f[9..
(3^ Cap. 6.
(4) Lib, 1. On peut remarquer que Jacques de Guyse ne copie
pas littéralement ses auteurs, et que même le plus souvent il se
contente d'eu faire un extrait fort succinct.
DE HAIXAUT. LIVRE III. ^OQ
CHAPITRE XI.
Du philosophe Platon.
EUSEBE.
La quatrième année du règne de Darius Nothus,
seconde de la 89* olimpiade, Platon vint au monde
quarante-trois ans après Socrate. Saint Jérôme contre
Jovlnien, livre i""' . Speusippe , fils de la sœur de Platon ,
Cléarque, dans l'éloge de Platon , et Anaxilide , dans
son deuxième livre de la Philosophie , rapportent que
Périctione , mère de Platon , fut fécondée par le simu-
lacre d'Apollon , et pensent que le père de la philoso-
phie dut le jour à une vierge. Valère-Maxime, livre i".
Platon étant encore enfant , des abeilles vinrent , pen-
dant qu'il dormait , déposer du miel sur ses lèvres ,
comme pour faire présager le charme de sa future élo-
quence. ApllÉe , Vie et Mceurs de Platon. Platon fut
d'abord nommé Aristote. Son père Ariston descendait
de Neptune et sa mère Périctione de Solon , législa-
teur des Athéniens. Ariston , père de Platon , le con-
duisit à Socrate pour l'instruire. Ce philosophe avait,
la nuit précédente , vu en songe un jeune cigne d'une
blancheur éclatante et d'une voix mélodieuse , voler
de l'autel de Cupidon dans l'Académie et venir sur son
sein , et de là s'élever en chantant vers le ciel. Lorsque
3 1 0 ANNALES
somnium videra!: Socrates, quocl in sinum ojus advo-
labat pullus oloris, candoris cxiinii et vocis canorae,
de ara Cupidinls in Academia , et de sinu siio can-
tando volabat in cœluni. Cîim crgo vidisset pueram
Platonem à patrc ad se deferri , mox interpretationem
somnii sui dixit completam esse. Eusebius. AnnoDarii
Nothi v(i), olynipiadis lxxxix annoiii , Alcibiades
profugus abiit ad Tissaphernem. Actor. De quo Justi-
nus, libro v, et Hicronymus, contra Jovinianum ^
et Valeriu? , libro vi, multa conscribunt. Eusebius.
Anno Darii ÎSotlii ix(2), olympiadis xc annoiv, Eudo-
xusOvidius (3)clarus habetur. Helinandus, libro xvi.
In Heracleâ fuit iliud theatrum mirabile, quod in-
ter scptem miracula mundi quintum ponitur : nam
de uno monte mannoreo ità sculptum est, ut omnes
cellulœ et mansiones et mûri et antra bestiarum ex
uno solido , quod est, lapide facta sunt. Est autoni
totum thoatruni super septcm cancros de ipso lapide
sculptos appcndcns ; et nemo in gyi'um ipsum làni
secrète aut solus aut cum alio loqui poterat , quin
omues qui in circuitu erant ipsum audirent. Heliiv\n-
Dus. Anno Darii Notlii xviii(4), olympiade xcm , Ma-
ccdonum duodccimus irgnavit Orestcs annis tribus,
cujus anno ii mortuus est Darius.
(i) L'un !yîi av. J.-C.
(9.) L'an }î5 ^olon Eriscbe , et l'an 417 on f\\Cy , m comptant sui-
vant K's nlinipiaflcs.
(3) Ainsi écrivent les doux maniisciils^ mais il est clair cjn'il
fant lire Eiidoxtis cnirlius.
(4) Los éditions d'Kuscbs rapportant le commencement du règne
d'Orrstes à la i^' année de Daritis , r'e-,t-à-dirc ;! Pan 407 avant
notre ère , et par cinséquent recnlcn! la mort de Darius jiisf|ii'à la
.'-)* armée (VOi-("<lcs. Vîais I1,iriii< mniu'il l'an jii."i.
DE HAINALT. LIVRE III. 3ll
Platon lui fut amené par son père , il dit. que le songe
se vérifiait. Eusèbc. La cinquième année de Darius No-
thus, ou la troisième de la 89" olimpiade, Alcibiade,
proscrit, se rendit vers Tissaphcrne. L' Auteur. Justin ,
livre v; saint Jérôme , contre Jovinien ; et Valère-
Maxime , livre vi , entrent dans de grands détails sur
cet Athénien. Eusche. La neuvième année de Darius
Nothus , quatrième de la 90" olimpiade , Eudoxe de
Gnide florissait. Hélinand, livre xvi. Dans la ville
d'Héraclée se trouvait ce théâtre admirable, la cin-
quième des sept merveilles du monde : taillé, en effet,
dans une montagne de marbre , toutes les cellules ,
les loges, les murs , les emplacemens destinés aux
bêtes féroces , étaient d'une seule pièce. Ce théâtre
était soutenu par sept colonnes d'un seul bloc. Per-
sonne ne pouvait, dans son intérieur, parler seul ou
avec un autre, si bas qu'il ne fût entendu par tous ceux
qui en occupaient l'enceinte. Hélinand. La dix-huitième
année de Darius Nothus, dans la 93' olimpiade, Orestes,
douzième roi de Macédoine , monta sur le trône, et
régna trois ans. Darius mourut la deuxième année du
règne de ce prince (1).
(i) Darius Notliiis jnonrnt Tan 4o5 avant notre ère , aprts avoir
régné dix-neuf ans, comme Ir dit Fi.'sèhc et nnn trrnt'^ «s'^-pt ,
comme on le fait dire à Ctesias.
3l2 ANNALES
CAPITULUM XII.
De Artaxerxe secundo, rege Persarum.
EUSEBIUS.
MoRTUO Dario, successit ei Artaxerxcs secundus,
qui cognoniinatus est Memnon, Darii filius; cœpit an-
no quintse aetatis clxxxv, mundi vero iii^idlviii fi),
olympiadis xciii anno ii, et regnavit annis lx. Co-
MESTOR. Hic ab Hebrœis dicitur Assueriis, sub qiio
historia Hestcr conscripta est. Regnavit autem hic
Artaxerxcs, dictus Assueriis , ab Indid usque ad tE-
thiopiam, super cxxvii provincias. Erat in Susis ci-
vitate solium regni ejus. Actor. Justinus(2) et Pom-
peius(3)Trogusdicunt Artaxerxem istuni ex pellicibus
cxv filios habuissc, quod satis concordat libro Hester,
in quolegitur qu6d,post abjectionem rcginae Vasthi ,
per univcrsas provincias quaesitœ sunt scmel et se-
cundo puellnp speciosae et virgines, et adductœ sunt
il) li'an /|o5 av . J.-C
(2) Lih. X , cap. 1.
(3) n n'est guère vraisemblable que notre auteur ait eu sons les
yeux un cxoniplatrc de Trogue Pompée; car on ne conn ît auruu
auteur depuis Priscien , c'est-à dire depuis le commencement du
<ixi(''nir sirflr- . (jni ait rite cet hisloririi.
DE HAINAUT. LIVRE III. 3i3
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* * "V^ «^^^ ^^.^ ^
CHAPITRE XII.
D'Artaxercès second, roi des Perses.
EUSEBE.
A la mort de Darius , Artaxercès II , son fils , sur-
nomme Memnon, lui suecëda, l'an 185 du 5* âge,
3558 du monde, 2<' de la 93= olimpiade, et régna
soixante ans. Comeslor. Ce fut sous ce prince , nommé
par les Hébreux Assuérus , qu'arriva l'histoire d'Es-
ther. Assuérus régnait , depuis l'Inde jusqu'à l'É-
Ihiopie , sur cent vingt-sept provinces. Le siège de son
empire était à Suse. L'Aaleur. Justin et Trogue-Pora-
pée disent qu'Artaxercès eut de ses concubines cent
quinze fils, ce qui s'accorde assez avec le livre d'Es-
ther, où l'on voit qu'après la chute de la reine Vasthi ,
on fit chercher dans toutes les provinces et à deux re-
prises , les jeunes vierges les plus belles, et qu'elles
furent amenées à Suse et livrées à l'eunuque Egée , qui
avait la garde des palais des femmes. Eusèbc. La
10"= année du règne d'Artaxercès et la 4' la 95= olim-
piade, les Athéniens commencèrent à se servir de
vingt-quatre lettres , au lieu de seize seulement qu'ils
employaient auparavant.
5l4 ANNALES
arl civitatem suam, et traditaî sub rnanu Egei eunu-
clii , qui erat prœpositus et custos regiarum mulierum.
EusEBius. Anno Artaxerxis x (i), olympiadis xcv
anno iv, Atlienienses viginti quatuor litteris uti cœ-
perunt, cîim anteà sexdecim tantîim haberent.
CAPITULUM XTII.
De morte Socratis philosophi.
EUSEBIUS.
SocRATES pbilosoplms sumpsit veneniim anno xi
Artaxerxis (9.), olympiade xcvi. Orosius, libro 11. So-
crates, ille actor clarissimus philosophorum , adactus
malo, veneno sibi apud Athenienses vitam extorsit.
VrNCENTius. Ex dictis, inquit , Orosii , potest intelligi
Socratem non exjjectasse ut ei à cariiificc venenum
propinaretur ; sed dcceptus consilio faniiliaris sui
dnemonis , quem Apulcius dcum Socratis appellat ,
morleni sibi iiilulcril, aut aniore popularis i;lori£r,
(1) L'an rif}5 av. J.-C , suivant F-iisL'bc; mais cette aiinee ne
rorrospond jms avec la '|= annc'c de la f)5' olimpiade, qui se rap-
porte à l'an 3ç)'j— liç)G.
(a) L'an ."îgj av. J.-C, Du reste, l'Art de vérifier les dates rap-
])orte la mori de Socrate à Tan joo, et Fn'rct {^^rrd. Jt/enr. tant.
XXVI, p. an) à l'an \o^ j cependant Dioj^cnes Laërce et Diodore
fixent cette date à la i" année de la pS" olimpiade.
DE HAINAUT. LIVRE III. 5l5
CHAPITRE XIII.
Mort du philosophe Socrate.
EUSEBE.
Socrate but la ciguë la onzième année cVArtaxerccs,
dans la 96*" olimpiade. Orose , livre n. Socrate, le plus
célèbre des philosophes , succombant à la méchanceté,
mourut par le poison chez les Athéniens. Vincent de
Beaavais. On peut induire du récit d'Orose que Socrate
n'attendit point que le poison lui eût été donné par
le bourreau, mais que, trompé par le démon qu'Apulée-
nomme le dieu de Socrate , il se donna la mort ou par
amour de la gloire populaire, ou pour éviter un plus
grand supplice. Tep.tlllien , dans V Apologétique. So-
crate , pour faire injure aux dieux , leur sacrifiait un
chêne, un bouc ou un chien; mais ensuite il fut con-
damné pour ses paroles , parce qu'il cherchait à ren-
verser la religion. Les Athéniens persécutèrent et firent
périr ses accusateurs après sa mort, et lui élevèrent,
dans un temple, une statue d'or. L'Auteur. On trouve
3l6 ANNALES
aut timoré majoris pœnn^. I'ert» llianifs,/// ApologC'
tico. Socrates in contuincliam deorum quercum et
liircum et canem dejecebat, sed dictis proptereà
damnatus est, quià deos destruebat. Athenienses in-
criminatores Socratis , post ejus mortem , afïlixerunt
atque destruxerunt ; et imaginem ejus auream in
templo collocaverunt. Actor. De isto venerabili So-
crate pleniùs babetur in libro de Vitâ et moribus
illuslrium vivo ru m .
CAPITULUM XIV.
Quôd Bclgenses ciim Gallis Sononensibus fœdiis pepip;erunt, ut de
adversariis velociùs vindictam expetere valft-pnt.
LUCIUS ET HUGO.
His temporibus , Bclgenses iinàciim civitatibus cir-
cumvicinis , iitpolè civitate Solis, civitate Fani-Martis,
civitate Fani-Morcurii , curn eœterisque siiee ligœ,
proposucrunt ut tle Saxonlbus, Hunnis, Pannoniis
atque Romanis , de bactenùs forofactis vindictam ex-
petcrent, et terras coruin, proîit ipsi fecerant, si
possent, destruercnt. Gui deliberationi non consen-
serunt Huinienses-Condronici ncque IIuinienses-Rbe-
tiani ; imo hiic occasione Bclgenses et corum civitates
invaserunt, adjunctis Saxonibus et Germanis cum
J)E IIAINAUI. LIVRE 111. ÔlJ
de plus amples détails sur ce vénérable Socrate dans
le livre intitulé : de la Vie et des mœurs des hommes
illasires (1).
(i) Nous avons une vie de Socrates parDiogènes Laèrce dans ses
Vies des Philosophes , où il donne aussi celles de Xénophon et de
Platon.
CHAPITRE XIV.
Les Belges font alliance avec les Gallo Sc'nonais, pour tirer une
vengeance plus pronite de leurs ennemis.
LUCIUS ET HUGUES.
Vers ce tems-là les Belges, soutenus des cités voisines,
telles que Solèmes , Famars , la ville de Faniim-Mer'
curii, et les autres villes qui s'étaient liguées avec eux,
proposèrent de tirer vengeance des torts qu'ils avaient
essuyés de la part des Saxons , des Huns , des Panno-
niens et des Romains, et de ravager, s'il leur était
possible , les terres de leurs ennemis , à l'exemple de
ceux-ci qui avaient dévasté celles des Belges. Les Con-
drosiens et les Rhétiens, loin d'approuver cette réso-
lution, se joignirent aux Saxons et aux Germains,
pour attaquée les Belges et les villes de leur domina-
r>l8 ANiNALES
eis. Qui Hainlam-Relç;icain suijintrantes, quitlquirl
extra civitatcs icperorLint iu favillani rcdegerLint , acl-
juti Vermandiis, Cambrinis, Nerviis, Serviis et plu-
ribus aliis civitatibus, qui cum Belgis non consentie-
baut. Post graves insultus , et bellis quàmpluribus
perpctratis, tandem qui superfuerunt ad propi'ia re-
mearunt, omnibus tamen civitatibus pcnitùs rema-
nentibus intactis. Belgi dolentes et se vindicare vo-
lentcs cum Senonensibus , Gallis et Allobrogis et aliis
intermediis civitatibus, fœdus inierunt, ut de Hu-
niensibus , Germanis , Saxonibus , Hunnis , Pannoniis
et Romanis, qui , temporibus Servii régis, ipsos vas-
taverant, è contrario ipsos vastare valeirnl. Quibus
sic rébus undecùmcjue vergeiitibus, Breiinius (i), régis
Britonum filiiis, à fratre proprio extra regnum pro-
prium expilsus, virlute dicloe ligœ, in Britanniam
^repositus est. Verùmtameu^Vermandia, Çambria,
Nervia et Servia in indignationcm Belgorum reman-
serunt; quœ se quotidic fortificantes, muros, portas
et turres resarcientes et novas componentes, insultum
Belgorum continue expectaverunt.
(i) Geofi'roi de M )nmoiith, copie ici par Jacques de Guyse, et
tous les auteurs anglais écrivent Brennus.
DE UAINAUT. LIVUE III. Jly
tion. Ils entrèrent dans la Belgique, et, s'étant joints
aux Vermandois, aux Cambraisiens , aux Nerviens ,
aux Serviens et à plusieurs autres cités qui n'étaient
pas dans le parti des Belges , ils réduisirent en cendres
tout ce qu'ils trouvèrent hors des villes. Après de longs
désastres et des guerres meurtrières , tout ce qui resta
de leur armée retourna dans ses foyers , en laissant
néanmoins intactes toutes les villes. Les Belges , dans
leur douleur et dans le désir de se venger , firent al-
liance avec les Sénonais , les Gaulois , les Allobroges
et toutes les cités qui se trouvaient comprises entre ces
peuples , afin de ravager à leur tour les territoires des
Huiniens , des Germains, des Saxons, des Huns, des
Pannoniens et des Romains, dont ils avaient supporté
les dévastations du tems du roi Servius. Au milieu de
ces débats , Brennus, fils du roi de Bretagne , qui avait
été chassé de son royaume par son frère, fut rétabli
dans ses états par les armes des confédérés. Cependant
Vermande (1), Cambrie (2), Nervie (3) et Servie (4)
n'en restèrent pas moins ennemies des Belges ; et, crai-
gnant continuellement de s'en voir attaqués , elles
travaillèrent journellement à se fortifier , à réparer
leurs remparts , leurs portes et leurs tours , et à con-
struire de nouveaux retranchemens.
(i) Saint-Quentin.
(■-'- (Cambrai.
3) 'J'onmai.
(4) CWovrc.
020 ANNALES
GAPITULUM XV.
De Misseno, duce Belgorum.
CuM autem dux Belgorum Missenus , cum centum
et sexaginta inillibus pugnatorum, in Biitanniâ cum
Brennio et Senonensibus iiinumerabiiibus, pace iiiter
fratres Bremum et Brerinium reformata, remaneret,
civitas Belgensis litteras ad ducem eorum transmislt,
continentes ut sine morâ ad propiia cum gente sua
reverteretur , et officio ducatûs , ut mos erat , cum
solemnitatibus resignaret, nam tempus resiguationis
instabat , et sciebat pacem inter fratres reformatam ;
aliter cum sua gente à dicta proscriberetur civitate.
Cùm vero eas perlegisset, dux dolens et tristis ad
Brennium accedens, recedere ab eodem volens, ex-
orsit Brennius : « Ciim , post spem deorum, sub alis
Allobrogorum , Senonensium et vestris , hùc accesse-
rimus, et dubii quo fine claudentur pacis signa, quae
inter fratrem nostrum Bremum et nostros designan-
tur; non nobis aequum videtur in tanto dubio nos de-
bere relinquere. Et idcircô restât ut, quià tempus
non prolongabitur, nostra» securitatis determinatio
quam civitati belgensi infide qu;i nobiscum fœderalur,
conscribemus, quod , quià sine gravi discrimine re-
Dl HAINAUT. LIVRE III. 02 1
CHAPITRE XV.
De Missénus, duc des Belges.
Comme Missénus , duc des Belges , restait en Bretagne ,
après y avoir rétabli la paix entre les deux frères Bré-
mus et Brennus , avec une armée composée de cent
Soixante mille çombatlans et des troupes innombrables
de Sénonais, la ville de Belgis lui écrivit pour lui or-
donner de revenir sans retard dans ses foyers avec
tous ses soldats , résigner solennellement , suivant
l'usage, sa charge de duc, dont le terme approchait;
et sachant que la paix avait été rétablie entre les deux
princes bretons, elle le menaçait de le bannir de sa
pairie, s'il n'obéissait pas aussitôt. Le duc , affligé par
la lecture de cette lettre, s'approcha tristement de
Brennus; et, ayant voulu prendre congé de lui , Bren-
nus lui parla en ces termes : « Lorsque, après avoir placé
notre espoir dans les dieux , nous sommes venus ici
p;ir votre assistance et par celle des Allobroges et des
Sénonais, serait-il juste, dans le doute où nous sommes
encore des conditions qui seront consenties entre mon
frère et moi pour la paix , de nous abandonner et de
nous laisser sans défense? Non , mais il faut, puisque
le tems presse, que nous écrivions à la ville de Belgis,
avec laquelle nous avons fait alliance , pour la prier de
différer quelque tems la nomination d'un nouveau
II. 21
02 2 ANNALES
vcrti non potestis , elig i-c diicem aliiim pcr tcmpus
niodicuin différant, vol saltini tacteros de morii ex-
cusarc dignentur; si ad nostras supplicationes aures
porrexerint, pietatis gaiidio perfundemur; sin autem,
vobis porrigonius nianus adjutrices. » Litlcris igitur
snpradictis à Jjronnio Bcigis transmissis, indignantor
a Belgis siisccptœ sont; et, tenipore ducatûs cxpi-
rato, novum clegeiunt duccm, et alliim, cum suis
centuni et soxai^inta miHibus pugnalonnn , l\ civltate,
tanquàm civitati rebelles, prosciipserunt.
CAPITULUM XVI.
De iraciindi;! nrennii contra Belges,
Brennius autem , eùm audiisset Misseni ducis bel-
gensis at({ue suoruni proscriptioneni , iracundiâ velie-
menter pennotus, uuàeum fratrc suo Brenio, oninino
jàm concordes decrevcrunt, aut rectoi'cs civitatis bel-
gensis,aut civitatem funditîis extirpare, et ducem
cum suis alicubi regem stabilire, aut in dicta civitate
ipsum ducem et sequaces suos in statum pristinum
per violentiam, prius interfectis rcctoribus , restau-
rare. Quod audiens Missenus dux, dolore cordis tac-
tus, cum suis nobilibus, ad dictes principes acceden-
UE 11 AIN AU T. LIVRE III. "S'IÙ
tluc ; car vous ne pourriez partir sans nous exposer
à un grand danger, ou au moins de vous pardonner
voire retard ; en ajoutant qu'elle nous comblera de joie,
et s'assurera à jamais notre reconnaissance , si elle
écoute notre prière , mais que, si elle la rejette, nous
vous offrirons le secours de nos bras. » Cette lettre de
Brennus , parvenue à Belgis, excita l'indignation des
citoyens. A l'expiration du tems des fonctions ducales,
ils élurent un nouveau duc, et bannirent de la cité,
comme rebelles , l'ancien et ses cent soixante mille
soldats.
CHAPITRE XVI.
Colùe de Brennus contre les Belges.
Brennus, ayant appris la proscription de Missénus ,
duc des Belges , et de ses troupes , entra dans une
grande colère, et, de concert avec son frère Brémus,
résolut d'exterminer les gouverneurs de la cité belge,
ou de renverser la ville même de fond en comble, et
de former un royaume au duc proscrit, ou de rétablir
de force celui-ci et ses adhérens dans leur ancien rang,
après avoir tué les chefs de Belgis. Le duc Missénus , à
cette nouvelle, ressent la plus vive douleur; il ras-
semble les nobles de son armée , et tous allant en-
semble trouver les princes bretons , ils leur disent : « O
324 ANNALES
tes inquiunt : « O principum praestantiores, intellcxi.
mus qiiod occasione Belgorum vobis assistentium ,
qulà eorum mater aliquantulLim ipsos perturbavit, et
extra ejus territorium, tanquàm filios inobedientes
sibi, exulavit, proposuistis ipsam evertere, ad inju-
rias nobis vcrisimiliter impensas vindicandas ! En re-
quirimus quod , si mater nostra naturalis cecidit nos
virgis, in exequendis quod proposuistis non cedamur
scorpionibus aut flagellis : nam in civitatc belgensi,
qua? est mater nostra natiiralis, quœ nos aluit et
sublimavit, degunt uxores nostrœ atque liberi , bona-
que nostrœ fortunœ. Et ex quo perpendimus , quod ,
pro nostra promolione , vos exponere decrevistis, in-
gentia recordemini pacta cum dieta civilate jamdu-
dùm quœ pepigistis, et nos terras alias nobis subditas
requiremus, si tantummodo, pro stipendiis nostris,
naves, dùm ad littora neustrica applicueritis, dare
dignemini. » Brennius et Bremus audicntcs requaestas
rationaljiles , annuerunt petitioni eorum. Interjeeto
tempore post pacliones faetas , de regnis Belgorum ,
Romanorum et aliorum conquirendis , valefacientes
insulœ, mare conscenderunt; et ad porlus neustricos
appbcantes, Brennius et Bremus, naves in mandjus
dietoruni Belgoi'um relincpientcs , tcrram Neustriic
primo percurrentes, eam sibi totabter subjecerunt.
Deindè prosequentes , omne solum usquè Senonas ab
utraque parle edoniantes, diclani civilatem senonen-
scm ampHantes , Bremus longiiis à civilate aciem per-
ducens, et illùc civitatem novam construcns, nominc
suo proprio Bremam appellavit, quœ, usquè in ho-
DE HAINAUT. LIVRE HT. 325
les meilleurs des princes, nous avons appris qu'à l'oc-
casion dés Belges qui vous assistenf, , et parce que leur
mère les a , en quelque sorte , proscrits et bannis de son
territoire, comme des fds désobéissans, vous avez ré-
solu de la renverser elle-même , pour venger , sans
doute, nos propres injures. Mais nous vous en conju-
rons; si notre mère légitiuie nous a frappés de verges,
ne nous exposez pas, en exécutant vos projets, aux
coups de fouet et de discipline ! Cardans la ville de Bel-
gis , qui est notre véritable mère , qui nous a nourris et
élevés aux honneurs, se trouvent nos femmes et nos
enfans , nos biens et toutes nos richesses. Songez plutôt ,
quand vous voulez vous sacrifier pour notre querelle,
aux anciens traités qui vous lient depuis long-iems à
notre patrie. Pour nous , nous chercherons d'autres
terres , et nous vous prions seulement de nous donner,
pour prix de nos services, des vaisseaux qui nous con-
duisent aux rivages de la Neustrie. » Brennus et Bré-
mus se rendirent à la justice de leurs demandes. Quel-
que tems après le traité qui fut fait entre eux à cette
occasion, ils dirent adieu à l'île et s'embarquèrent
pour la conquête du royaume des Belges , de celui des
Romains et d'autres royaumes encore. Lorsqu'on fut
entré dans les ports de la Neustrie , les Bretons lais-
sèrent leurs navires aux Belges , et se mirent à par-
courir le pays des Neustriens, qu'ils réduisirent en-
tièrement sous leur domination. De là, poursuivant
leurs conquêtes , ils subjuguèrent tout ce qui se trouva
sur leur route jusqu'à Sens, qu'ils agrandirent. En-
suite Brémus , conduisant plus loin son armée , fonde
une nouvelle ville , à laquelle il donne son nom , et qui
s'appelle encore aujourd'hui Brémen. Brennus resta à
Sens. Cependant les Belges, auxquels ce prince avait
326 ANNAr.ES
clierniim diem , Brenna (i) vocitatur ; Brennio in civl-
tate senonensi rémanente. Deniqiiè Belgensibus qui-
bus Bremiis navigia dederat, videlicet, duci Misseno,
œquora sulcantibus, terras janipiideni Belgis subjectas
sed rebellantes et eisdeni inobcdientes, ipsos infestos
habentes, petierunt. Post perieula non paiica, tandem
ad regnum saxonicum applicantes, super mare civi-
tatem ingontem, pro recursii fundantes, et nomen
Locus Belgurum , quod modo Lubeea dieitur , im-
ponentes, partes maritimassubjecerunt. Ablilnc Saxo-
lîiam infestatione diutina debacchantes , civitates
et castella et penè totum regnum spoliantes, Anscno-
riorege Saxoniœ prius captivato, tandem ad obedien-
tiam civitatis belgensis, uti fuerant ab antiquo , omnes
reduxerunt. Actor. Verùm quia bona pro malis civi-
tati reddiderant belgensi , à cunctis nationibus exti-
terunt tanquàm nobilcs commendati. Ab bis autem
Belgensibus-saxonicis, post temporum longas revolu-
tiones , fuit insula Bruti funditiis ab incolis extirpata,
et à Saxonibus-belgicis restau rata, proiit clariîis patet
in liisloriis Saxonuni atcjuo Britoiium. Dux vero
Missenus, ad ejus perpetuam laudem, eivitatem in-
gentem fundavit, et noniine proprio insignlvit.
(i) Il est sans doute ici question de la ville de Bremen.
DE HAiNAtT. LIVRE lïT. 52 7
fourni des vaisseaux, ayant sillonné les mers sous la
conduite de Missénus , arrivèrent dans un pays qui
avait jadis appartenu à Belgis , mais qui s'était révolté
depuis et était en guerre avec elle. Après de fréquens
dangers , ils abordèrent enfin au royaume des Saxons ,
et , v fondant une grande ville sur les bords de la mer,
pour leur servir de refuge , ils lui donnèrent le nom de
Lieu des Belges , aujourd'hui Liibec (I), et soumirent
toutes les contrées maritimes. De là ils ravagèrent la
Saxe par des incursions continuelles, pillèrent les cités,
les châteaux et presque tout le royaume, et, après
avoir fait prisonnier le roi Ansénorius , réduisirent tout,
comme autrefois , sous l'obéissance de Belgis. JJ Au-
teur. Mais parce qu'ils avaient rendu le bien pour le
mal à leur pairie, ils furent considérés par toutes les
nations comme des hommes nobles et loyaux. Dans la
suite du tems , l'iîe de Bruf.us fut entièrement ravagée
et dépeuplée par les Belges-Saxons , puis repeuplée par
eux , ainsi qu'on le verra plus tard dans les histoires
des Saxons et des Bretons. Quant au duc Missénus, il
fonda une grande ville, et lui donna son nom, pour
perpétuer ses exploits et sa gloire.
(ly Lubec est une ville cV Allemagne dans le cercle de la Basse-
Saxe, au confluent do la Trave, du Wackenitz et du Steckenitz ,
qui mêlent leurs eaux dans ses fosses, à quatre lieues de Trave-
miindo et du golfe de Lubec, dans la Vagrie. On trouvera dans
le dictionnaire de La Martinière trois fondalions ou re'tablissemens
de cette ville, bien poste'rieurement au tems dont il est ici ques-
tion.
328 ANXALES
CAPITULUM XVIL
De Diogene.
DiOGEwrs cynicus et Eudoxus astrologus agnos-
cuntur anno Arlaxerxis xiii (i), olympiadis xcvi
anno i. De Ii6c Diogene et ejiis mii'abilibiis opinionl-
bus Augustinus xiv de Ciritatv Dci{i)^ Tullius(3)
atqnc Macrobius (Zj), Ilclinanclus xvri libro, Valerius
libro IV (5), Tertullianus/« Jpologetico ^ Hieronyinus
contra Jovinianwn ^ libro ii (6j, atque Fulgentius {'f)
in libro Mjthologinrum , multa mirabllia refe-
runt (8).
(i) L'an Sg-î av. J.-C, suivant F.ustbe; mais la 2* année de la
96* olimpiadc n'pond aux années SgS et 3ç)\,
(2) C(ij}. 20.
(3) Titsc. I , V. De nat. deor.
(4) Satitrnal. i.
(5) Cop. 19.
(6) Cap. 14.
(7) Fabius Fiiriiis Fiilgenlins Planciacics , qni florissait vers
l'an 020, et qui composa trois livres de mit lioloj^ic.
(8) Diogènes Laërce aurait dû être cite parmi ces auteurs.
DE HAINAUT. LIVRE III. 329
k V*^^^/*-^ * *. •% ^* » ^-«-^ ^-^ ■* **^ ^'^-^ ^
CHAPITRE XVII.
De Diogènes.
DiooÈNEs (1 ) LE CiMQUE et l'astronome Eudoxe (?) flo-
rissaicnl en l'an treize d'Artaxercès, ou l'an deuxième
de la 96" olinipiade. Sainl- Augustin, dans la Cité de
Dieu, livre xiv , Cicéron et 3Iacrobe, Hélinand ,
livre XVII ; Valcre-Maxime , livre iv; TertuUien, dans
son Jpolos:éliquc , Saint Jérôme, dans son Trailé contre
Jovinien, livre h, et Fulgcnce , dans sa Milhologie ,
racontent une foule de choses merveilleuses relative-
ment à Diogènes et à ses opinions extraordinaires.
(i) On trouvera une a=sez longue histoire de Diogcncs-le-Ciniqiie
dons les vies des philosophes, par Diogènes I,aè"rce. Le Ciniqne ,
ne à Sinope, ville de l'Asie mineure, mourut l'an 824 avant notre
ère, la même anne'e qu'Alexandre-le-Grand.
(2) Eudoxe de Cnide, ami de Platon , se forma avec lui à l'e'cole
des Égipticns , et apprit d'eux l'astronomie qu'il ensergna aux
Grecs. Il vivait 3-0 ans avant notre ère.
330 ANXAtES
CAPITULUM XVIII.
De famoso bcllo Carthnginrnsium.
EUiJEBIUS.
Anno A.rtaxcrxis \iv (i), olympiadis xcvi an-
no m (2), Speusippus insignis liabitus est, et hic fuit
ncpos Platonis, ex. sorore ; et anno sequenti Cartlia-
gincnsium bellum (3) fatnosissiinuin fuit : famosiini
aiitcni (lictmn est non propter virtutem Cartliagincn-
siuni , secl propter iniiabile pestis infortuniiim , quod
repente universum consumpsit exercitum. Hierony-
Miîs (4), in C/uoni'cis. Hoc tempore Dionysius in
tyrannidem persévérât. Justinus , xx libro (5). Hic
Dionysius , fugatis à Siciliâ Carthaginensibus , totius
(1) L'an 391 av. J.-C, suivant Eusèbe.
(2") La 3' année de la 96' olitnpiade rc'pond aux anners 3c)^ et 3g3
avant J.-C, et ne concorde pas avec la 14' année d' Art amorcés ,
dti moins en suivant Eusèl>e , Je guide ordinaire de notre auteur.
(3) Cette guerre contre les (^artliaginois sous la conduile d'Imil-
con et Denis, tiran de Siraciise, fut terminée par la rnine en-
tière de la flotte et de l'armec carthaginoise, f^oy. Diodore , /. xiv.
(4) L'auteur cite ici la Chronique d'Eusèbe traduite ))ar saint
.îerômc.
(5) Cap. I . jSous avons déjà observé que Jacques de Gujse
abre'srfait ses auteurs en les citant.
DE HAINAUT. LIVRE III. 001
CHAPITRE XVIII.
De la fameuse guerre des Carthaginois
EUSEBE.
E\ l'an quatorze d'Artaxercès, troisième année de
la 96" olimpiade , Speusippe , fils de la sœur de Platon ,
jouissait d'une grande réputation. La fameuse guerre
des Carthaginois eut lieu l'anjiée suivante. Elle est cé-
lèbre non par le courage qu'ils y déployèrent, mais à
cause d'une peste horrible qui consuma tout-à-coup
leur armée. Sunt .Iérôme, dans ses Chroniques. En ce
même lems , Denis l'Ancien persévérait dans sa tiran.
nie. JusiiN, livre xx. Ce Denis, après avoir chassé les
Carthaginois de la Sicile, soumit tout le pavs , et fit
passer ses troupes en Italie, où il eut d'abord à com-
battre les Grecs , qui occupaient les côtes de la mer les
plus proches. Les ayant vaincus , il attaqua les peuples
voisins et principalement tous les Grecs qid s'étaient
établis dans la péniïisule. Mais il fut forcé de repasser
en Sicile par l'arrivée des Carthaginois, qui revenaient
sous la conduite d'Hannon , et avec des forces plus con-
sidérables, pour recommencer la guerre que la peste
seule les avait contraints d'abandonner. L'auteur. Va-
lère Maxime, livres i" etiv, parle beaucoup de Denis
l'Ancien et de sa tirannie.
532 ANNALES
Siciliiïî occupavit imperiinn, et copias suas in Italiam
trajecit ; et adversùs Graecos, qui proximi italici ma-
ris littora tenebant, prima bella habuit. Quibus de-
victis, finitimos ([uosquo aggressus est et praecipuè
omnes grœci noiiiiiiis Italiam possidentes. Sed (i)
eum ab Italià revocavit adventus Cartbaginensium,
qui bellum quod lue deseruerant , auctis viribus , re-
petebant, duce Hannonc. Actor. De bôc Dioiiysio
Valerius Maximus , libro i et iv, multadeejus t)ran-
nide proloquitur.
CAPITULLM XIX,
De Plalone philosnpho.
EUSEBIUS.
Anno Artaxerxis xvii (2), olympiadis xcvii anno i,
Plato philosophus claruit. Hieronymus , conlvci Jo\^i-
nianum (3). Plato cùm dives esset, et toros ejus
Diogcncs lutosis pcdibus conculcaret, ut possct va-
care pbilosophiœ, elegit Acadcmiam villam ab urbe
procul, non solùm desertam sed etiàm pestilenlem;
(i) Cap. 5.
''iX An 3S8 av. J.-C. , «îuivant Euscbe; mais la i" année de la
97' olinipiatlc repond aux années Sga et Sgi avant notre ère.
(3) Lih. I . '■np . ;).
DE HAINAUT. LIVRE III. 335
CHAPITRE XIX.
Du philosophe Platon.
EUSEBE.
En l'an dix-sept d'Arlaxercès , première année de la
97' oliinpiade , florissait le philosophe Platon. Saint .Té-
nÔMK, contre Jovinicn. Comme Platon était riche et que
Diogènes foulait ses lits de ses pies sales, il choisit,
loin de la ville , la retraite de l'Académie , qui était dé-
serte et malsaine, afin de se livrer avec plus de liberté
à l'étude de la philosophie, et de domter l'impétuosité
de ses passions , en se soumettant aux soins et à l'assi-
duité qu'exigent les maladies. Plusieurs de ses disciples
se crevèrent les ieux par le même motif. Valère Maxime,
534 ANNALES
Ut cura et assiduitato morborum libidinls impotus
fi'aiigoi'cntnr. Undè et pliires ejusdlscipiili oculossibi
effoderuut. Valeuius, lil)ro viii (i). Plato patriam
Atbenas, praeceptorem Sonatem sortitnsest, etiocuin
et bomiricm foitiinœ (orlilissiiniim. CLiin(jiic sapien-
tissimus habcreUir, et à studiosis juvenibus certat\in
Atbenœ Platonem doctorern quaerentlbus peterentiir,
ipse Nib fluiniiiis irie.vpbcabdes ripas et vastissinios
campos e{Tasai)K|ue barbarlein , iEgyptiorum senum
discipidus, peragi'avit , el à sacerdotlbus iHius gentis
geometriae multipliées numéros, cœlestium rationum
observatione , peic\Tpit. In Italiam quoque transgres-
sus est , ut ab ArchitâTarentino et Arione Pylbagorœ
prœcepta suseiperet : tanta enim copia litterarum un-
diquè coUigeuda erat, ut iuvicem per totum terrarum
orbem dispergi possetacdllatari. Actor. De isto veiic-
randopbilosopbo, totet taiiti deejusmoralibusdictis et
factis libros etepistolasconscripserunt , utnostr.ne non
est potenlioe in paucis verbis explanare. Et potissimè
Seneca, libio vi (2) de Bcncjiciis y et in Epistolis ad
Lucilium , et Tertullianus, //^ Apologctico , et Augus-
tinus, de Civitate Dei {y) ^ et HelinaïuUis, et Ma-
crobiiis, de Sonuio Scipionis , libro primo , nudta ad
ejus laudem coiiscripseriml. ïstis temporibus , Arcbi-
tas Tareiitinus dicitur lloriiissc , cnjiis Plato legitur
auditor fuisse , de (jiio Tuliius, in libro de ScnecUite
et de amicitid, et Valeriiis, libro iv (4), et Agcl-
(l) Cap. 7.
{-x) Cap. . i . - Kpht. 4', , 47, 58, 19S.
(3) Lib. II, viii , IX, X.
(4) Cap, I.
DE HxMNAUÏ. LIVRE lll. 0.)0
livre vni. Platon eut Athènes pour patrie et Socrale
pour maître. Quelle source de bonheur pour lui qu'un
tel maître et nu tel pays! Tandis que la jeunesse stu-
dieuse courait en foule à Athènes pour suivre les leçons
du plus sage des hommes, lui-même, devenu disciple
des vieillards égipliens , parcourait les rives incompré-
hensibles du INil, de vastes campagnes et des contrées
barbares, et puisait chez les prêtres de cette nation la
science des nombres , de la géométrie et des mouve-
mens célestes. Il passa aussi en Italie , pour y apprendre
d'Architas de Tarente et d'Arion , les préceptes de Pi-
thagore : tant il mettait de soin à recueillir de tous
côtés ce grand fonds de connaissances qu'il devait , par
la suite , accroître encore et répandre dans tout l'uni-
vers. L'auteur. Il existe un si grand nombre d'illustres
historiens qui ont écrit des lettres et des ouvrages en-
tiers sur ce vénérable philosophe , sur sa morale , ses
maximes et sa vie , qu'il n'est pas en notre pouvoir de
les désigner ici, même en peu de mots. Nous citerons,
néanmoins, parmi les principaux, Sénèque, livre vi de
son traité des Bienfaits^ et plusieurs lettres à Lucilius;
Tertullien dans son Apologétique , Saint-Augustin dans
la Cité de Dieu , Hélinand , Macrobe , livre i" du Songe
de Scipion. Vers le même tems, florissait, dit on, Ar-
chitas de Tarente, dont Platon suivit les leçons, et
dont il est beaucoup question dans Cicéron , livre de
la Vieillesse, dans Valère-Maxime , livre iv; et dans les
Nuits atliques d'Aulu-Gelle.
536 ANNALES
lins, in libro Noctium alticanim plura conscripsc-
runt.
CAPITULUM XX.
De Belino et Brenno,
Ex historid Biitonum.
MoRTUO Dunvallone, rege Britanniae, duo filii ejiis
Belinus et Brennus in regnuni siicccdere volontés
maximû contriti siuit discoi-tlia. Contendebant eniin
quis eorum regni diadeniate insigniietur. iXxxw itaque
pltires decertationes inter se comniisissent, interfece-
runt amici iitrorLinKjiie qui ipsos in coiicordiam
reduxerunt , consueiunt quoque rrgnum inter eos ea
conditione dividenduui esse : ut Belinus diadenia in-
su I.TCum Leogriâ ( i )atque Cainbria(2) necnon et Cor-
nubià possideret; ei'at enini primogenitus , petebat
quoque trojana consuetudo ut dignilas h;ei'edilatis ei
proveniret; Brennus vero, quià junior l'uerat, fratri
subdereturetlSorlbumbriani abllundjrousquèad Ca-
thanesiam possideret. Confinnato igitur super bis
paclionibus fœdere, tractaverunt jxitriam per quin-
quennium cuni pace et juslitià, Sed quia (bscoidia
[\\ Peut-t*lre la picivincc tic Lciceslcr.
(2) Le pays de Galles.
DE HAINAUT. LIVRE III. 337
CHAPITRE XX.
De Bëlinus et de Brennus.
Extrait de l'histoire des Bretons.
Après la niorl de Dunvallon , roi de Bretagne , ses
deux fils Bélinus et Brennus se disputèrent sa succes-
sion; l'un et l'autre voulaient ceindre le diadème.
Lorsqu'ils se furent livré plusieurs combats , leurs amis
intervinrent et rétablirent la paix entre eux, en pro-
posant de partager le royauuie de cette manière , sa-
voir , que Bélinus aurait la couronne de Bretagne avec
la Léogrie , la Cambrie et le Cornouaille ; parce qu'é-
tant l'aîné , il devait , suivant la coutume de Troie ,
hériter du trône ; et que Brennus , qui était le plus
jeune , obéirait à son frère , et posséderait le Norlhum-
berland depuis lefleuvede l'Humber jusqu'au Catliness.
Les deux princes, ayant fait un traité sur ces bases,
gouvernèrent leurs états en paix et équitablement pen-
dant cinq années. Mais la discorde s'efforce toujours
de se mêler à la prospérité; et des artisans de men-
songes allèrent trouver Brennus et lui dirent : « Quelle
lâcheté pour toi de vivre dans la dépendance de Bé-
linus ! Wavez-vous pas tous deux le même père , la
II. 22
558 ANNALES
scse rebus prosperls semper immiscere conatur, af-
fiierunt quidam fabricatores mendacii , qui ad Bren-
nuin accesserunt, dicentcs : « Ut quid ignavia te tan-
tùm occupavit , ut Bclino subjectionem tcneas ; cîim id
patertuus et mater cademquenobilitas te ei parificiet?
Adde quod in pluribus debellationibus expertns es ,
qui loties Cbenulfo, duci Morinorum, in provinciam
tuamappHcanti, rosistcre potuisti, ipsumque ex regno
tuo fugare. Rumpc fœdus quod tibl dedecori est , et
duc fiHani Elfungi , régis INorguegensium , ut ipsius
auxiUo amissam dignitatcm recipias. » Postquàm igi-
tur bis et abis pbu'ibus aiiimuni juvenis corruperunt,
acquievit ipse, adivitque Norwcgiam, duxitquefibam
régis , proiit à dictis adulatoribus edoctus f Lierai. In-
tereà ciim id fratri nunciatum esset, indignalus quia
sic sine bcentià suâ et contra ipsum egisset, pelivit
Norlbumbriam , cepitque cum provinciâ civitales , et
cas cuslodibus suis munivil. Porro Brennus , audito
rumore qui actum fratris notificaverat , adduxit se-
cum magnam copiam Norguegensium, paratoque na-
vigio , rediit in Britanniam. Emensis deindè abquot
diebus , ecce Brennus cum navibus in Albaniam ap-
pbcuit. Quùm quod Bebnus scivisset , coUectoque
omni mibte insulae, venit ad Albaniam contra eum
pugnaturus. At Brennus, ut scivit germanum contra
se venire, ivit obviàm illi, ut cum illocongrederetur.
Ut igitur nacti sunt campum , diviserunt inter se so-
cios in turmas, cominùsquc accedentcs, praeliari cœ-
perunt, multùmque cruoris bine et indè fuderunt,
quia tela ipsorum viribus \ibrata letbifera vulnera
DE HAIXAUT. tlTRli HI. OÔg
même mère et la même noblesse ? Sans compter que tu
as fait tes preuves clans plusieurs combats, en résistant
maintes fois à Chenulfe, ce duc des Morins, lorsqu'il
abordait dans tes états, et en le forçant de s'enfuir de
ton royaume. Hàte-toi donc de rompre un traité qui te
déshonore, et épouse la fdle d'Elfungius , roi de Nor-
vège , afin de recouvrer par son secours , la dignité
que tu as perdue. » Le jeune prince, corrompu par ces
discours et autres semblables , se laissa entraîner; il se
rendit en Norvège, et y épousa la fille du roi, suivant les
conseils de ses flatteurs. Mais son frère, à cette nou-
velle, indigné de ce mariage contracté sans sa permis-
sion, et de la conduite menaçante de Brennus, passa dans
le Northumberland , s'empara de toutes les villes de
cette province , et y mit des garnisons. Brenims , aus-
sitôt qu'il apprit ce que venait de faire son frère, em-
mena avec lui une armée nombreuse de Norvégiens ,
équipa une flotte , et s'embarqua pour la Bretagne.
Quelques jours après , il aborda en Ecosse , et vit bientôt
venir à sa rencontre son frère Bélinus qui avait rassem-
blé toutes les troupes de l'ile. Il marcha au-devant de
lui pour le combattre ; et lorsqu'ils eurent choisi leur
champ de bataille, ils partagèrent leurs armées eu
plusieurs corps, et s'étant approchés, commencèrent
le combat. 11 y eut beaucoup de sang répandu des deux
côtés, parce que les traits lancés avec force portaient
des blessures mortelles. Enfin les Bretons l'emportè-
rent; les Norvégiens , se voyant enfoncés, s'enfuirent
du côté de leurs vaisseaux, et Bélinus les poursuivit
en les massacrant sans faire de quartier à personne.
Quinze mille hommes périrent dans cette bataille, et
il n'y en eut que mille qui parvinrent à se sauver sans
blessures. Brennus , ayant trouvé un bâtiment , que la
54 O ANNALES
ingerebant. Deniquè prœvalentibus Britonlbus, dlffu-
gerunt Norguegenses , laceratis agminibus, ad naves;
et cùm fugam facerent, insequitur illos Bcliiius, cse-
dem sine pietate faciens. Ceciderunt in illo praelioquin-
decim millia hominum , nec ex résidais mille fuerunt
qui illaesi abscederent. At Brennus vix unam navem
nactus, ut fortuna conduxerat, gallicana littora peti-
vit ; cœteri vcro qui cum illo advenerant , quo casus
ducebat , latebras expetebant.
CAPITULUM XXI.
Quôd Erennus invasit Belinum fratrem suiim in regnum Britanniae.
Belino autem regnum cum pace et tranquillitate
régente, frater suus Brennus in gallicano littore, ut
praedictum est, appulsus, interiùs cruciatibus anxia-
batur. Ferebat enim graviter sese expulsum à patrià ,
nec copiam revertendi babere , ut amissâ dignitate
frueretur. Nescius igitur quid faceret, principes Gal-
liae adiit duodeciin solummodo militibus comitatus.
Cùmqueinfortuniumsuum singulisostenderet, neque
auxilium ab uUo impetrare quivisset, vcnit tandem
ad Seginum ducem Allobrogum, et ab eo lionorificè
susceptus est. Morans autem apud ipsum , accessit ad
tantam familiaritatem ducis, ut non csset alius in cu-
riâ qui sibi prœferretur : in omnibus namque negotiis,
DE IIAINAUT. LIVRE III. 54 1
fortune lui offrit, gagna les côtes de la Gaule; mais
les compagnons qu'il avait amenés avec lui restèrent
en Ecosse, en se cachant dans les retraites qu'ils pu-
rent se procurer.
OBSERVATION.
Il paraît que Jacques de Giiyse , d'après l'histoire des Bretons ,
appelle ici Be'linus et Brennus les deux frères qu'il a nommés
Brémus et Brennius dans les chapitres xv et xvi , d'après Lucius
de Tongres et Hugues de Toul. L'auteur lui-même l'observe à la
fin du chapitre xxii.
CHAPITRE XXI.
Brennus attaque son frère Betinus dans son royaume de Bretagne.
Tandis que Bélinus gouvernait ses états en paix,
son frère, débarqué sur le rivage de la Gaule, ainsi
qu'on l'a vu , était rongé par de cruelles angoisses. Il
supportait avec peine d'être banni de sa patrie , et de
n'avoir pas la liberté d'y rentrer pour y jouir de sa di-
gnité passée. N'ayant aucun dessein fixe, il va trouver
les princes de la Gaule avec une suite de douze cheva-
liers seulement. Lor.squ'il leur eut exposé à tous ses
infortunes , sans avoir pu obtenir du secours d'aucun
d'eux, il se rendit auprès de Séginus, duc des Allo-
broges, qui le reçut honorablement. Dans le séjour
qu'il fit chez ce duc, il sut tellement s'insinuer dans
sa familiarité, qu'aucun autre personnage de la cour
34^ ANNALES
tum in pace, tum in bcllo , probitatem suam mons-
trabat, ità ut dux illum amore patris diligeret. Erat
aiitem pulcher aspectu , procera et gracilia niembra
liabens. Statuit dux ut unicam filiam suam sibi mari'
tali lege copularet ; et si masculino sexu deinceps care-
ret , concedebat ei regnum Allobrogum post obitum
suum cum filia possidcndum : si autem filius ei snper-
veniret, promittcbatauxilium , ut in regnum Britan-
niœ promoverctur.Nec niora : maritatur puella Brenno,
principesque subduntur, soliumque regni ei donatur.
Attractis ergo qaibusque in dilectionem suam , deli- .
beravit apud se quallter se in Belinum fratrem suum
vindicaret. Quod cùm populo sibi subdito indicasset,
assensum fecerunt cuncti , ut cum illo irent ad quod-
cumque regnum ipsos conducere affectâsset. Nec
morâ , coUecto grandi exercitu , fœdus cum Gallis
iniit , ut per provincias eorum Britanniam cum tran-
quillitate adiré sineretur. Exindè peracto in littore
Neustriensium navigio , mare ingressus est , secun-
disque velis in insulam applicuit. Divulgato igitur
adventu ipsius , Belinus frater , ascitâ totius regni ju-
vèntute, obviàm perrexit, prselium cum illo commis-
surus. Sed ciim hinc et indè cohortes statutae ferè
commisceri incœpisscnt, accclcravit mater amborum,
quae adhùc vivebat, per dispositas turmas incedens.
Erat nomen ejus Connuvcnna, œstuabatque fîlium
videre, quem multo tempore non aspexerat. Ut igi-
tur, trcmulis gradibus , locum , quo ipse stabat , naçta
fuit, brachia collo ejus injecit , desiderata basia
ingeminans.
DE HAINAUT. LIVRE III. 343
ne lui était préféré : en effet , soit dans la paix , soit
à la guerre, il fit preuve dans toutes les affaires d'une
si grande loyauté , que le duc finit par l'aimer comme
son fils. Brennus avait du reste une figure pleine de
beauté, une taille élevée et des dehors gracieux. Sé-
ginus le choisit pour mari légitime de sa fille , et
voulut qu'après sa mort, s'il ne laissait point d'enfant
mâle, sa couronne passât à son gendre; si, au con-
traire, il lui survenait un fils, il s'engageait à l'aider
à s'emparer du trône de Bretagne. Brennus épousa
donc la princesse , les grands reconnurent son auto-
rité, après la mort de Séginus, et la couronne lui
fut dévolue. Lorsqu'il eut gagné le cœur de son peu-
ple, il réfléchit aux moyens de se venger de Bélinus
son frère , et ayant fait part de ses desseins à ses sujets,
ceux-ci consentirent unanimement à le suivre partout
où il voudrait aller. Aussitôt il lève une grande armée,
fait alliance avec les Gaulois , qui lui permettent de
traverser leur pays pour se rendre en Bretagne , et ,
après avoir équipé une flotte sur les côtes de la Neus-
Irie , il se met en mer , et aborde heureusement à
l'île de son frère. Dès que Bélinus apprit son débar-
quement, il rassembla toute la jeunesse du rovaume
et marcha à sa rencontre pour lui livrer bataille. Mais
comme les deux armées commençaient à s'attaquer
avec vigueur , la mère des deux princes , nommée
Connuvenna , accourut dans les rangs en cherchant
son fils qu'elle n'avait pas vu depuis long-tems. Enfin ,
étant parvenue avec beaucoup de peine à l'endroit où
il se trouvait, elle se jeta à son cou et l'accabla de ses
baisers.
344 ANNALES
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CAPITULUM XXII.
Quod mater propria pacificavit filios suos, volentes se mutuo
interimero , videlicet, Belinum et BrÊnnum.
NuDATis quoque uberibus, illum in hune modum
affataest,sernioriemimpedicntcsingultu : «Mémento,
filî, mémento uberum tuonim, scilicet, istorum quœ
suxisti matrisque uteri tuae qno te opifex rerum ex
homine in homincm creavit ; undè te in mundum pro-
diixit, angustiis mea viseera cniciantibus. Anxieta-
tnm igitur quas pi'o te passa sum reminiscens, peti-
tioni meœ acquiesce; fratrique tuo veniam concède,
atque conceptam iiam compesce. Nullam enim adver-
sùs cum habes justam querimoniam, qui tîbi nullam
intuHt contumebam. Non enim fugavit te ut deteriùs
tibi contingeret, sed coegit détériora postponere, ut
ad potiora sublimaret : subditus namque illi partem
regni possidebas , quam ut amisisti , par sibi factus es,
Allobrogum regnum adeptus. Quid igitur fecit, nisi
quod ex paupere regulo te in sublimem regcm promo-
vit? » Super his igitur quîie ipsa expresserat motus,
sedato animo, obedivit, et, ullro deposità galea,
cum iliii ad fratrcm perrexit. Bclinus ergo, ut illum
cum vultu pacis ad se venire conspexit, abjectis ar-
DE HAINAtT. LIVRE III. 345
CHAPITRE XXIL
La mère des deux princes Belinus et Brennus les reVoncilie lorsqu'ils
e'taient sur le point de s'arracher la vie.
La. princesse découvrant son sein, adressa à son
fils Brennus ces paroles qu'interrompaient à chaque
instant ses sanglots : « Souviens-toi, mon fils, dit-elle,
souviens-toi du sein qui t'a porté , et dans lequel le
souverain maître de l'univers t'a donné l'être, du sein
que tu as pressé de tes lèvres et que tu as déchiré en
naissant. Songe aux douleurs que j'ai souffertes pour
toi , et daigne écouter ma prière. Pardonne à ton frère,
je t'en conjure , et calme la colère qui t'anime. Tu n'as
aucun sujet de te plaindre de lui; il ne t'a fait aucun
tort ; il ne t'a point chassé pour rendre ton sort pire
qu'il n'était auparavant ; au contraire , il t'a forcé de
quitter un rang inférieur pour t'élever à un poste plus
élevé. Tu étais son sujet en possédant cette partie du
royaume que tu as perdue plus tard ; aujourd'hui lu es
devenu son égal, et tu as obtenu le trône des Allobroges.
Que peux-tu donc lui reprocher? Tu n'étais qu'un petit
seigneur, et il t'a fait un grand prince. » Brennus,
désarmé par les larmes et les prières de sa mère , oublie
ses ressentimens, et, déposant son casque, se dirige
avec elle vers son frère. Dès que Bélinus le vit ap-
procher d'un air bienveillant , il jeta ses armes et cou-
346 ANNALES
mis , in amplexus cjusdem cum osculo occurrit. Nec
mora : facti sunt amici adinvicem , et cohortibus ex-
armatis, urbem Trinonantum vencnint. Ibi consilio
accepto quid faccrcnt, paravcrimt cxercitum com-
munem in Galliarum partes ducere, cunctasque pro-
vincias suœ potestati submittere.Emenso deindè anno,
transfretaverunt in Gallias, patriamque vastare incœ-
periint. Qiiod ciim per nationes divulgatiim fuis-
set, convcnenmt otnnes reguli Gallonim, obviàinque
venientes contra eos diuiicaverunt. At Belino et Bren-
no, Victoria proveniente, Galli, vulneratis catervis,
difrugcrunt. Mox Britones et Allobroges, ut triumpho
potiti sunt , fugientos Gallos insequi non cessaverunt,
donec captis regibus, ipsos deditipni suœ coogerunt.
Munilis etiàm urbibus eversis, lolum regnum infrà
unum annum subniiscrunt. Postrenio cùm universas
provincias deditioni compulissont , pctierunt Romani
cum tota multitudine sua, urbosque et colonos per
ItaUam depopulantur. Actov. Quos liistoria dicta vo-
cat Brennum et Belinum, Hugo atque Lucius appel-
lant Brennium et Bremiim.
DE HAINAUT. LIVRE III. 347
rut dans ses bras. Ils redevinrent amis sur-le-champ ,
et se rendirent ensemble dans la ville de Trino-
bantes , où , après avoir délibéré sur ce qu'ils devaient
faire, ils s'apprêtèrent h conduire de concert une armée
dans les Gaules , pour en faire la conquête. En effet,
au bout d'un an , ils débarquèrent en ce pavs et se
mirent à le ravager ; et lorsque cette nouvelle se fut
répandue chez les peuples qui l'habitaient, tous les
petits rois qui se partageaient les Gaules , se rassem-
blèrent, et marchant à leur rencontre, les combat-
tirent. Mais Bélinus et Brennus furent vainqueurs , et
les Gaulois, enfoncés de tous côtés, prirent la fuite.
Alors les Bretons et les Allobroges , profitant de la vic-
toire , les poursuivirent sans relâche jusqu'à ce qu'ils
eussent fait les rois prisonniers, ou qu'ils les eussent
réduits à se rendre. Les places fortes furent rasées,
et, au bout d'un an, tout le royaume fut conquis.
Enfin, lorsqu'ils virent que toutes les provinces leur
étaient soumises , ils se dirigèrent sur Rome avec tou-
tes leurs forces , et ravagèrent en ItaUe les villes et les
colonies qui se trouvèrent sur leur passage. L' Auteur.
L'histoire des Bretons appelle Brennus et Bélinus ceux
qui sont nommés Brennius et Brémus par Hugues et
par Lucius.
348 ANNALES
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CAPITULUM XXIII.
Qualilcr Senonenses Belgos ïnvaserunt.
HUGO mixtim et lucius.
Trecentesimo an no ab urbe romanâ conditâ ,
tempore consulum, leges(i) athenienses Romam de-
latœ sunt in decem tabulis, quibus duœ additœ sunt
à Romanis. Anno autem trecentesimo primo, cessa-
verunt regnarc consiiles(2)in urbe romanâ; et anno
trecentesimo ctqiiinto decimo, Veicntes(I^) victi sunt
à Romanis , tempore Assueri régis. Circà quod tem-
pus, Senoncs, Galli , Allobrogcs etBiitanni, ducibus
corum Brcmo et Brcnnio, Galliam et regnum Belgo-
rum invascrunt. Oui , post beliis pluribus , et regibus
Gallorum devictis , primo Neustriam et Belvacinium ,
cum civitatibus omnibus, concremantes, Lutetiani,
(i) En Tan Je Rome 3o3 , 4^' 'iv. J -C. , sous le consulat de
P. Sestius (>aiiitoliniis et T. Me'ncnius Lanatus , les liis furent
apportées d'Athènes à Rome.
(a) En Tan 4S<> le 3 da mois de juin, les consuls, qui étaient
alors Appius Claudius Crassinus et T. Géniicius Augiirinus, abdi-
quèrent et furent élevés au dccemvirat charge de rédiger les lois.
(3^ L'an 436 av. J.-C
DE HAINAUT. IIVRE III. 349
CHAPITRE XXIII.
Les Senonais attaquent les Belges.
HUGUES et Lucius ensemble.
En l'an 300 , depuis la fondation de Rome , après
l'établissement du consulat , les lois d'Athènes furent
apportées à Rome sur dix tables (1), auxquelles les
Romains en ajoutèrent deux. En l'an 301 , les consuls
abdiquent l'autorité ; et en l'an 3 1 5 , les Véïens sont vain-
cus par les Romains , dans le tems du roi Assuérus.
Vers la même époque, les Senonais, les Gaulois (2), les
Allobroges et les Rrelons , sous la conduite de Rrémus
et de Brennus , envahissent la Gaule et le royaume
des Belges. Apres plusieurs batailles et la défaite des
rois du pays , ils incendient la Neustrie , le Beauvoisis
et toutes les villes renfermées dans ces provinces ;
ils rasent Lutèce ou Paris, Vsiiim ou Melun, et sont
enfin reçus à Sens au milieu de la joie des habitans.
Après avoir agrandi considérablement cette ville, ils
résolurent de fonder un nouveau royaume , et bâtirent
plus au loin une nouvelle ville sacerdotale qu'ils nom-
mèrent Auxerre, c'est-à dire, le séjour le plus élevé
(:) Les dix premières tables furent rédigées par les premiers de'-
cemvirs, et les deux autres par les derniers.
(a) L'auteur désigne sous ce nom les Celtes,
550 ANNALES
id est Parisius, Ysium, ici est, Melunum, solo co-
aequantes , tandem Senonisciiin ingenti gaudiosuntà
Seiioiiensibussuscepti. Qui dictam in immensum dila-
tantes civilatem, regnum novumslabiliredecreverunt;
et civitatcm sacerdotalem novam remotiùs fundantes,
Altissiodorum, id est, Altissima sedes deorum , niin-
cupâriint. Ettuncexaltata sunt rcgum Brenii et Bren-
nii corda, et miserunt ad omnes qui habitabant in
Galliis, ubicumque repei'icbantur ci vitales et oppida,
et ad ducem et civitatem Belgorum , et ad omnes sibi
favorabiles et colligatos, ad Ruthenos, Riielios,
Huynos, Nervios et Servios, Germanos, Tungrinos,
Agrippinenses, Rbenos, Treverinos, Menapios, Mo-
sellanos , Moguntinos , Strasburgenses , et ad omnem
regionem aquilonarem circà Oceanum, et à fluvio
magno Rheni usquc ad Alpes; et pertranseundo per
Placentiam et Mediolanum , usquè ad civitatem ro-
manam , et pertranseundo Romaniolam et Calabriam ,
terram Laboris et Apuliam usquè Grseciam, ubi ha-
bitabant filii quorum parentes Trojara destruxerant ,
magnam gentem à quâ descenderant , mcdlante Bru-
to , cujus destruclionis énorme excidium ipsi vindi-
care volebant : ad hos omnes miserunt nuntios dicti
Brenms et Brennius ut defenderent se. Qui ferè con-
tradixerunt omnes, et remiserunt nuntios vacuos et
sine honore et abjecerunt eos. Tune indignati Bremus
et Brennius juraverunt per numina quod cunctos
edomarent, qui suis refutarunt parère mandatis. Vo-
caverunt igitur duces et comités et magistros militiae
eorum , dinumeraverunt viros , in expeditione eorum »
DE HAINAUT. LIVRE III. 35 1
des dieux. Ce fut alors que les rois Brémus et Bren-
nus corumenccrent à s'enorgueillir. Ils envoyèrent des
députés aux habilans des Gaules, à toutes les villes,
à tous les bourgs qu'ils rencontrèrent, au duc et à
la cité des Belges , aux partisans et alliés de ceux-ci,
aux Ruthènes , aux Rhétiens , aux Hugniens , aux Ner-
viens, à ceux de Cliièvre, aux Germains, auxTongriens,
aux Agrippiniens , aux habitans des rives du Rhin, aux
Trévirois, aux IMénapiens, aux Mosellans, à ceux de
Maïcnce, de Strasbourg , et à tous les peuples du nord
près de l'océan , et depuis le grand fleuve du Rhin
jusqu'aux Alpes; ensuite par Plaisance , et Milan jus-
qu'à la ville de Rome , et par la Romagne , la Terre
de Labour, la Fouille et la Calabre, jusque dans la
Grèce habitée par la postérité de ceux qui avaient dé-
truit la cité de Troie, cette grande nation d'où ils
descendaient par Bru tus et dont ils voulaient venger
la ruine. Brémus et Brennus envoyèrent à tous ces
peuples pour les engager à se soumettre. Mais ils re-
fusèrent tous avec fierté , et renvoyèrent sans préseus
et sans honneurs les députés, qu'ils chassèrent même
de chez eux. Alors Brémus et Brennus jurèrent, dans
leur colore , de détruire tous les peuples qui avaient
méprisé leurs ordres. Us firent venir les ducs, les comtes
et les maîtres de leur milice ; ils désignèrent, pour les
suivre dans leur expédition , un nombre infini de guer-
riers , qu'ils partagèrent en corps d'infanteiie, de ca-
valerie et d'archers , et se firent précéder de tout ce
qui pouvait maintenir l'abondance dans leur armée.
352 ANNALES
pedltes, équités et sagittarios multos valdè; omnem-
que expeditionem suam fecerunt prœire cum his quae
exercitibus sufficerent copiosè.
CAPITULUM XXIV.
De fundatione civitatis Suessionensis.
Anno igitur primo regni eorum, contra Belgos
primitùs l)elluin arripientes, decreverunt Belgi dictis
rogibus oninino contradicere ; et acics eorum prépa-
rantes ad fluvium Ausonîe castra metantur. Qui viri-
liter dictis regibus resistentes per longum terminum ,
ripariam dictam ne transirent, ferociterconservarunt.
In qua obsidione Bremus cum Senonensibus, ab aiiâ
parte fluminis, oppidum fundaverunt, quod Sessio
Senonensium appellatum est, nunc vero Suessio di-
citur. Brennius vero ex eâdem parte fluminis , super
quoddam fluviolum , quod Vcdula dicitur, aliud op-
pidum construxit, quod usquè in hodiernum diem
Brema dicitur; et eadem pro succursu reservantes,
ad fluvium pertranseundum se disposuerunt, Remo-
rum civitate priiis subjugatâ.Stationibusque ex utra-
que parte fluminis duraatibus, finxit Bi'ennius cum
suis Senonensibus velic fluvium per violentiam, una
dierum , pertransire ; et clangentibus tubis , et ponti-
DE HAl.SAUl. UVRi, m. ÙOJ
CHAPITRE XXIV.
De la fondation de la ville de Soissons.
En la première année de leur règne, Brémus et
Brenniis se disposant à attaquer d'abord les Belges,
éprouvèrent une forte résistance de la part de ceux-ci,
qui levèrent une armée et allèrent camper surles bords
de l'Aisne, où ils résistèrent Icmg-tems à leurs enne-
mis en les empêchant de passer la rivière. Dans ces
circonstances , Brémus , qui se voyait pour ainsi dire
assiégé, fonda avec les Sénonais, sur le bord occupé par
ses troupes, une ville qui fut appelée la Session des
Sénonais , et qui porte aujourd'hui le nom de Soissons.
Brémus fonda aussi, du même côté de l'Aisne, et sur
le bord d'une petite rivière nommée la Vêle , une autre
ville qui s'appelle encore aujourd'hui Braine. Les deux
princes, après s'être ménagé ces retraites, se dispo-
sèrent à passer l'Aisne, et commencèrent par s'empa-
rer de la ville de Reims. Comme les deux armées étaient
toujours en présence sur les deux rives opposées,
Brennus feignit de vouloir passer de force la rivière,
ce jour même , avec les Sénonais. Les trompettes
II. iZ
.354 ANNALES
bus cordarum dispositis ab eisdem, et ecce in occur-
suni subito omnes Belgi se opponentes passum te-
nuerunt. Intereà durante tempestate, Breinus, cum
suis Britonibus, ad quatuor milliaria superiîis, flu-
viuni pacifiée pertransiil; et reverlcns eontià Belgos
à relro, reperit eos in littore contra Brennium pug-
nantes, qui sagittis, telisetjaculis, pcnèotnnes interfe-
cit; erant enim ab utràque parte inimiciscircumclusi.
Paucis igiturBeigis evadentibus et per dévia fugienti-
bus, transmeaverunt Senonenses cum Brennio rege,
pervagantes et patriarn totain subjiigantes, Yei'inan-
diam cremaverunt , et ripanam Suuiniœ approximan-
tes, Belgos recoUectos sentientes, ad pugnanduin se
coaptaverunt, duoscivitatuni Belgorum mittentes qui
adversarios explorarent. Qui revertentcs retulerunt
duas vidisse acies, quarum quixlibet ultrà ducenta
millia expeditorum ad pugnandum continebat, aUis
quàmpluribus undiquè circunifusis, non enumeratis.
Quod audientes, concordi decreverunt assensu potiùs
in suis civitatibus, cum uxoribus et liberis, se fortu-
niisexponere, quàm illuc improvisé pugnare. Reversi
sunt igitur quilibet ad propria Cambrini, Solares,
Belgenses, Nervii, Mercuriales, Fanimartenses, Ser-
vienses, Portubelgenses, Attrebatini, Morinenses,
Rutheni atque Huynienses.
;
DE HAINAUT. LIVhE III. 355
sonnent , on jette des ponts de cordes , et tous les
Belges accourent aussilùt pour s'opposer au passage.
Pendant cette fausse attaque , Brémus avec ses Bre-
tons , franchit tran(|uillement la rivière , quatre milles
plus haut; et, tonibant sur les Belges par derrière,
il les accable de flèches , de traits et de javelots , lors-
qu'ils étaient occupés à combattre Brennus, et les tue
pres(jue tous, après les avoir cernés de tous côtés. Le
peu qui s'échappa s'enfuit par des chemins détournés ;
Brennus passa la rivière avec les Sénonais , et , ra-
vageant tout le pays , brûla la ville de Vermande.
Lorsque les deux armées furent arrivées sur les bords
de la Somme , elles s'aperçurent que les Belges avaient
rassemblé de nouvelles troupes, et s'apprêtèrent alors
à combattre. Ceux-ci envoyèrent d'abord deux ducs
pour reconnaître l'ennemi; et, lorsqu'ils eurent appris,
à leur retour , qu'ils allaient cire attaqués par deux
armées , dont chacune était composée de plus de deux
cent mille combaltans, sans compter une foule innom-
brable qui les accompagnait, ils résolurent unanime-
ment, plutôt que de livrer, sur le lieu même, une
bataille à l'improviste, de s'exposer aux hazards de la
guerre dans leurs villes, avec leurs épouses et leurs
enfans. Ils revinrent donc sur leurs pas, et Cambré-
siens , Solemniens , Belges , Nerviens , Mercuriaux ,
Famarsiens , Serviens , Portebelgiens , A.rtésiens, Mo-
rins, Ruthènes et Huiniens , tous enfin rentrèrent dans
leurs foyers.
356 ANNALES
CAPITULUM XXV.
De fundatione oppidi Valentenensis.
Proindè Senonenses audientes secessiim Belgo-
rum, aniinati, decreverunt omnes dictas civitates
siinul obsidere. Et pertranseuntcs jnxtà civitates
Cambri , Solis, Fanique Martis, suprà ripariam Scal-
di , in paludibus, insulas pluies, in paludum mc-
dio , reperientes , decreverunt abbinc dictas civi-
tates obsidere. Undè illùc, pro opportuno recursu,
fortalilium et aggeres, turres, portain et oppidum
munitum et forte construxcrunt, vallein([ue Sono-
nensium sibi nomen imponentes, pro nunc à nioder-
nis Valentianis appcllatur. Bremo et Brennio in sta-
tionibus Brevitici , quod nunc dicitur Buvraigcs( i),
à dicto Bremo, et Brenaî pausantibus, sic à Brenuio
diclœ, quae usquè ad lempora Caroli-Magni dicto
nomine vocabatur; sed ob reverentiam gloriosi mar-
tyris Salvii , mutato nomine, Sanclus-Salvius (•:)!) à
cunctis nunc appcllatur. Paludes vero internicdii à
Brutis, id est, à Britonibus, in eisdoni coinmoranli-
bus, dictœ sunt Bruel (3) : qui quideni Britones cum
Bremo et Brennio à Britanniâ discesseraut.
(i) Beuvragcs, ;"i une lieue au nord de Valenriennes.
(a) Saint-Sauge, ;'i une lieue au noid-est de Valenciennes.
(3) Ou plutôt Bruay.
DE HAINAIÎT. LIVRE III. 357
CHAPITRE XXV.
De la fondation de la ville de Valenciennes.
Lorsque les Sénonais eurent appris la retraite des
Belges, ils résolurent, dans leur ardeur , de former le
siège de toutes leurs villes. Passant donc près de Cam-
brai , de Solème et de Famars , ils arrivent sur le bord
de l'Escaut, et trouvent, au milieu des marais, plu-
sieurs îles qui leur paraissent propres à devenir le
centre de leurs opérations. Dans cette intention, et
pour se ménager une retraite, ils construisent une for-
teresse, des remparts, des tours, une porte et une
ville de guerre , à laquelle ils donnent le nom de
Vallée des Sénonais, mais qu'on appelle aujourd'hui
Valenciennes. Brémus et Brennus , campèrent, l'un
à Brevilicum, nommé ainsi par Brémus, et appelé
maintenant Beuvrages; l'autie, au lieu de Brena, qui
tient de Brennus ce nom qu'il conserva jusqu'au tems
de Charlcmagne, mais qu'il a quitté depuis pour pren-
dre celui du glorieux mirtir saint Sauge. Les marais
d'alentour furent nommés les marais de Bruel, en
l'honneur des Brutes , c'est-à-dire des Bretons, qui y
séjournèrent, et qui étaient sortis de Bretagne avec
Brémus et Brennus.
358 ANNALES
CAPITULUM XXVI.
De fundatlone Senoncnsisburgi.
Deniqui!; Ut ncics Belgim approximarcnt , ipsi
quemclam burgmn fiinclavei-unt juxtà queinclam alveo-
lum ,quem vocaverunt Senoncnsium biirgiim , gallicè
Sebourg{\^ ; et illùc vcndebantur omnia quœ aclebus
necessaria videbantur. Ab bis igitur stationibus to-
tam Galbain-Bolgicam invaserunt. Cùm autom Fa-
num-Martis bis, ter, quater invasisscnt, et resisten-
tiam validissimam experti fuissent cum delrimento
suorum, decrevernnt illùc liiemari. Decrevit tandem
Brennius Belgim obsidere, Bremo antè Fanum-Martis
commorante. Intereà ciirsores senonenses ad moiitem
Minervae cucurrerant, et idolum ad prœsentiam Bre-
mi asportaverunt , qui cum jucunditate suscipiens et
Senonis transmittens, intubt : « Si Belgi nobiscum
fœderari vellent , proîit aliàs incœperanl , et nobiscum
contra Romanos et Grœcos progredi, ob Minervae
reverentiam ac doorum cœli, intactas rebnqueremus
civitates eorum : cxperiemur enim ipsos ergà deos
sempcr habuisse reverentiam, deos ergà eos benevo-
(i) Entre Valencicnncs et Bavai.
DE HAINAUT. LIVRE III. SSp
CHAPITRE XXVI.
De la fondation de Sebourg.
Enfin , lorsque les troupes ennemies approchèrent
de Belgis , elles fondèrent, sur un petit canal, un
bourg, auquel elles donnèrent le nom de Bourg des
Smonais , et qui s'appelle en français Sebourg. On y
vendait tout ce qui était nécessaire aux armées. C'est
de ces différentes stations que les ennemis se répan-
dirent pour faire l'invasion de toute la Gaule-Belgique.
Aprèj avoir donné quatre assauts à la ville de Famars,
et éprouvé chaque fois une résistance vigoureuse avec
une perte considérable des leurs, ils résolurent de
prenilre à l'endroit même où ils se trouvaient leurs
quartiers d'hiver. A la fin Brennus se détermina à as-
siéger Belgis, tandis que Bréinus resterait d 'vant Fa-
mars Pendant ce tems-là, des éclaireurs sénonais vont
à la montagne de Minerve , et en rapportent à Brémus
l'idole de cette déesse, qu'il reçoit avec joie, et qu'il
des'ine à la ville de Sens, en disant : « Si les Belges
voulaient faire alliance avec nous, comme ils ont fait
jadis, et nous suivre dans notre expédition contre les
Romains et les Grecs , nous laisserions , par respect
pour Minerve et pour les autres divinités , leurs villes
intactes: car nous sa\ons qu'ils curent toujours un
grand respect pour les dieu.K , et que les dieux leur ont
360 ANNALES
lentiam. Spero, inquit, in nostra prosperari peregrl-
nalionc, si nobiscum auiicitiis jungerentur. » Cùni
auilîsset Brennius quae frater cjus protulerat, non ap-
probans dixit : « Et si ouinos nobiscum fœdciarontur
civitatcs, in Belgi cxpetani vindictani de mihi aliàs
forcfactis ; npc ab obsidioiK; recodain quous(jiiè onines
à civilate perpetiioproscripti ruerint, qui aliàs duccin
et suos st!|)i'ndiarios proscripscrunt. » Non dcfucrunt
qui Bi'lgcnsiuni civilatibus dcnunciavcrunt qune Brc-
mus et Brennius protulerant. Petierunt civitates in-
ducias dieruni octo, quae tandem pepigerunt fœdus
cum Senonensibus , sub conditionibus quae sequuntur.
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CAPITULUM XXVII.
De pactionibus Belgorum cum Senonensibus.
« Prima conditio, quod omnium civitatum Galliae
belgicae ac totius rcgni ejus pars tertia viroruni expc-
ditorumad bellumcuni ipsis pj-ogredietiuad pugnam
contra omnes ipsis adversanles, et specialiter contra
Romanos et Graccos. Sccunda conditio, quod deinceps
de olympiade ad olympiadem totum regnum belgense
tenebitur mitterc, ad ipsos conforlandum , pi'opriis
sumplibus, scxties ccutuin millia virorum expedito-
DE HAINAUT. LIVRE III. 36 1
souvent donné des preuves de leur bienveillance. J'es-
père , « ajouta-t-il , » que tout nous réussira dans notre
expédition, si nous fesons alliance avec eux. » Mais
Brennus n'approuva pas le discours de son frère.
«Quand bien même, «s'écria-t-il,» toutes les villes belges
se ligueraient avec nous , je ne tirerais pas moins ven-
geance des torts que Belgis a eus jadis envers moi; et
je ne lèverai le siège de cette dernière , qu'après que
tous ceux qui ont anciennement proscrit le duc Missé-
nus et ses soldats , auront été bannis à perpétuité de
leur ville. » Les cités belges, informées des discours de
Brcmus et de Brennus, demandèrent une trêve de huit
jours, et finirent par conclure avec les Sénonais un
traité de paix , sous les conditions suivantes :
CHAPITRE XXVII.
D'un traite des Belges avec les Se'nonais.
« Article i. Le tiers de tous hommes propres à la
guerre , que renferment les villes de la Gaidc-Belgique
et tout l'empire belge , suivra les Sénonais dans leurs
expéditions militaires contre tous leurs ennemis, et
spécialement contre les Romains et les Grecs. Arùcle ii.
Dorénavant, le royaume belge sera tenu d'envoyer, à
chaque olimpiade, à ses frais, au secours de leurs al-
liés, et dans quelque contrée qu'ils occuperont, six
cent mille de bons guerriers , joints à un pareil nombre
de Sénonais. Article m. La Gaule-Belgique vivra en
5,62 ANXALES
rum ad prseliuni, ciim totidem Senonenslbus sibi ad-
junctis , ubicumquè tcrrarum persliterint. Tertia
conditio, quod Gallia-Bclgicacum senonica perpetuis
ainicitiis fœderabitur, et quaelibet deinccps suorum
deorum sacrifîciis propriis contentabitur. Qiiarta
conditio, quod Léo filius quondàm ducis Misseni ,
ducis belgciisis proscripti, coronetur rex non solùm
civitatis, sed totius rcgni belgcnsis, et ejus posteritas
perpetuis temporibus in regno succédât, nunquàm
de cœtero ducibus annuis fruituri. Quinta conditio,
quod centum principaliuuî civitatis Bcigis , qui duccm
Missenum quondàm proscripscrant, et ligani quam
cum Senononsibus habiierant interruperunt , capita
eorum, absentibus corporibus, cunctis Senonensibus
congregatis prœsenfentur. Scxta conditio, quod an-
nona oniniiun civitatum Senononsibus cunctis infrà
biduum prœscntetur conuuutantla. » Et, licet civitas
belgensis assentire nollct conditionibus , tandem ta-
men cunctis civitatil)us regni id concordantibns, ipsa
consensit. Undèconchisivè, ad bas omnescontlitiones
inviolabibterobservandasobligaverunt seoinnes rcgni
civilates à liparia Yonœ et Sequana? per Maternam
descendcndo , usquè ad Oceanum à pai'te aquilonis ,
demptis Rutlienis , Rbetiis, Menapiis, Batbuanis,
Huyniensibus concb'onicis et Tungrensibiis , ([ui, dic-
tis condition bus auditis, in eisdein , circumvolvj no-
luerunt.Eratauteniannusprimusolympiadisxcviii(i)
initium Leonis prinii régis post duces. Civitatesautem
circumviciniTc pahidibus Iliiyniirquœ ad parlamentum
(i) L'an 388 av. J.-C.
DE HAlNAtT. LIVRE III. 365
perpétuelle amitié avec la sénonaise, et chacune se
contentera des sacrifices particuliers qu'elle l'ait à ses
dieux. Article iv. Léo, fils du feu duc Missénus, qui
avait été proscrit , sera couronné roi de la cité et de
tout le royaurae des Belges, et sa couronne passera à
jamais à ses descendans, le gouvernement des ducs an-
nuels demeurant pour toujours aboli. Article v. Les cent
premiers des citoyens de Belgis, qui ont jadis proscrit
le duc Missénus, et qui ont rompu l'alliance qu'ils
avaient formée avec les Sénonais, seront décapités, et
leurs tètes seront présentées à tous les Sénonais assem-
blés. Article vi. Pendant deux ans, tout le blé des
Belges sera apporté aux marchés des Sénonais. » La
ville de Belgis refusa d'abord d'adhérer à ces condi-
tions, mais lorsqu'elle vit qu'elles étaient consenties
par toutes les autres cités, elle finit par les approuver.
Ainsi donc toutes les villes du royaume belge, depuis
l'Yonne et la Seine, et en descendant par la Marne,
jusqu'à l'Océan, au nord, à l'exception des Ruthènes,
des Rhétiens , des Ménapiens , des B.itaves , des Hui-
niens du Condros et des Tongriens, qui, avant en-
tendu ces contlilions, ne voulurent pas v consentir,
toutes ces villes, dis-je, s'obligèrent à observer invio-
lablement tous les articles du traiié. Léo coniuiença à
régner la première année de la QS*" olimpiade. Quant
aux cités voisines des marais de la Haine , qui n'a-
vaient point été appelées au traité, telles que Nervie,
Famars, Servie, Porlebelge, les Belges qui habitent les
bords de la Sambre et quelques Pannoniens des rives de
la Haine, frappés des dangers qui les menaçaient, con-
sentirent aux aiticles ci-dessus rapportés, et furent
compris dans le traité de paix fait avec les Belges,
avant que les Sénonais eussent franchi leurs marais.
364 ANNALES
convocatae non fuerant, ut Nervia, Fannm-Martis ,
Servia, Portus Belgoruni , Huynienses belgici circà
fluvium Sambrae atque paiici Pannonii suprà Huy-
niam, videntcs iinmincre pericula, antequàm seno-
nenses paliides pertransissent , impctrarunt ut, con-
ditionibus adhibitis, pace Belgorum fruerentur.
CAPITULUM XXVIII.
De primarill fundatione Sonej^ii, Reux , Brcnœ , Lembccque , et
consimilium oppitloriim.
Paucis tandem emergentibus dicbus, Senononses,
licct cuni diffîcultate, paludos Hiiyiiiae pertransire
disposucrunt, et contra Rhctios , Rluitenos, Mena-
plos et Huynienses et cœteras nationes congrcgatas in
j)iincipio Rlietiae , ad bellandiini se disposueruiit , in
loco qui nunc Senogias(i), à slatione Senonensium,
dicilur, cuin Bremo; Brennius vero ruin suis, non
multùin reniolc ab eodem loco, in territoiio, (jui ab
eodern regc nunc Brena(>è)dicitur, suas acies stabili-
vit ; Belgos vero quos rccentcr applicuerant, Belgione
(i) Snignîes , à trois lieues nord de Mons.
loi) Brenne-le-Comte , à trois lieues nord de Reux.
DE HAINAUT. LIVRE III. 365
CHAPITRE XXVIII.
Fondation de Soignies, de Reux, de Rraine , de Lembeck , et
autres villes semblables.
Peu de jours après, les Sénonais se disposèrent,
quoique avec peine , à franchir les marais de la Haine ,
et à attaquer les Rhétiens , les Huthènes , les Ména-
piens, les Huiniens et toutes les nations rassemblées à
l'entrée de la Rhélie. Brémus fit ses préparatifs de
guerre dans la ville de Soignies , ainsi nommée à cause
du séjour qu'y firent les Sénonais. Brénuis rangea son
armée en bataille un peu plus loin dans un endroit qui
de son nom fut appelé Braine. Les Belges , qui venaient
d'arj-iver, sous la conduite deBelgion, leur duc, furent
postés dans un lieu nommé aujourd'hui Lembeck ,
c'est-à-dire lieu des Belges. Toutes les forces réunies
des Rhétiens et des Ruthenes s'avancèrent contre les
Sénonais , et s'arrêtèrent à un endroit qui se nomme
Rhetia en latin , et Reux. en français; les iMénapiens et
leurs alliés s'établirent à Megnapia ou Migueau en
366 ANNALES
eorum duce praeeunte, profundliis, in Rhetiâ, in
locoquinunc Lembecca(i)à loco Relgoriiin dicitur,
statULM'unt. Rlietii ciiin Rliiitenis simul congregati ,
cum omnipotrntià coruiii, cohtrà Senononscs proces-
seriint, et acies pcrvias facientes, usquè ad locum,
qui nniic latine Rlietia, gallicè vero Reux(a)dicitur ;
Meiiapii vero, cum suis adjunctis, in loco qui latine
Megnapia, gallicè vero Migncau(3)dicitur, et Hiiy-
nienses reniotiùs in loco qui nunc gallicc dicitur
Haynwipres(4j acies suasstatuerunt, in quibus et tan-
dem perierunt. xlbhinc nationes eis rebellantes inva-
serunt, undè et magna multitudo Senonensium apud
Senegias intcrempta legitur, sed Senonenses finaliter
victoriosi de cunctis adversantibus triumpliaverunt.
Aclor. O quantas clades Rlietii Rliutenique cum
Megnapiensibus et Huyniensibus, Gallis tune intule-
runt! Ferunt Senogiensem sanguine Senonensium
pluries inebi'iatam; eampos cadaveribus, fossata cor-
poribus mortuorum repleta reliquerunt, et tandem à
pereuntibus perierunt. Senonenses igitur illi territorio
Senogias et ripariœ ibidem prseterfluentis Sequanam
denominandas decreverunt. De territorio clarum est,
sed de ripariâ patet : nàm rude vulgus illius territorii
gallicè appellat eam Canaste, primam syllabam se
videlicet obmittendo; Teutonici, eodem modo etiàm
quo Parisienses Sequanam gallicè appellant, videlicet
(i) Lembeck , à une demi-licuc de Halle , au midi.
(3) A deux lieues est de Mons.
(3) Migtiaut. près de Reux.
\4) Hennuières, à u«e lièue nord de Brenne-le-Comte.
DE H AIN AUX. LIVRE III. 3^7
franoais ; et lesHuiniens allèrent se ranger un peu plus
loin dans un lieu nommé en français Hennuières , et
célèbre par leur défaite. Après ces préparatifs, lé com-
bat s'engagea, et nous lisons qu'une foule de Sénonais
y perdirent la vie près de Soignies; cependant ils
finirent par triompher dé tous leurs adversaires. L'Àu-
TELR. O quels désastres les Gaulois essuyèrent alors de
la part des Rhétiens , des Ruthènes, des Ménapiens et
des Ruinions! On rapporte que le territoire de Soi-
gnies fut plusiem's fois abreuvé du sang des Sénonais ,
que les champs furent couverts de corps morts, et les
fossés remplis de cadavres, enfin que les vainqueurs
périrent avec les vaincus. Les Sénonais donnèrent au
pays le nom de Soignics, et à la rivière celui de Senne ( I ).
Quant à ce qui regarde le pays, il n'y a rien de plus
clair; et quant à la rivière , le peuple grossier de cette
contrée l'appelle Canaste , en retranchant ainsi la pre-
mière sillabe. Les Allemands la nomment Senne , qui
eu la même chose que Sequcma en latin ; c'est aussi le
nom que les Parisiens donnent à la rivière qui passe
dans leur ville. La Senne prend sa source près de Soi-
gnics, et coule à Bruxelles.
(i) La Seune, en latin iyert«rt, est une rivière de la Belgique.
Elle prend sa source dans h- Huinaut, entre le RoeuU et Soignies,
prèsdu village n'imme' l'Hermitage : de lu elle coule à Soignies d.;à
Home, d ; à Stt'inker([ue,g. ; à Konast, g.; à Tubise, g. j à Halle, g. ;
à l'abbaye de Verst, d.j à Bruxelles, qu'elle traverse j à Hareii, d.j
à Vilvordej à Vert, g. Elle passe à demi-lieue de M.dines,
qu'elle laisse à droite , puis à Hessein j enfin elle va se perdre dans
la Uyle au-dessous du château de Battelbroeck ^ à une grande lieue
au-dessous de Malines.
30)8 ANNALES
Seine, quod idem est quod Sequana, tàm apud Gal-
licos quàm apud Teutonicos. Quae exordium habet
Senogias et fluit Bruxellae.
CAPITULUM XXIX,
De primariâ impositione notninum Brabanlise atque Bruxellœ.
Debellatis cunctis adversantibus , locum mutave-
runt, et infrà Rlu'tiœ limites oppidum solemne con-
strMKoruiit pro refugio , si nécessitas perui'geret. Qui
quidcm burgum Senonensium, sed nunc Bruxella , ri-
|)ariam etiàm in eodem (liientcm Senoniam, idiîst Scqua-
nani, vocaverunt. Abhinccivitatem Lovariii et Antvver-
piœ et reliquas civitates et oppida totiiis territorii
obsederunt, t ri umpliatores fi nali ter omnium exister» tes.
lIlLicamio illo liiemaveruntcLim paceet lran({uillitate,
novos duces et principes civitatibus et oppidis immu-
tantes, et toti patriœ novam denominationem impo-
nentes; nàm quianteà Rbetia,ab illo tune Brebantia,à
primissyliabisduorum regum Bremi et Brennii, statue-
runt deinceps appellari. Reliquerinit tandem pati'iam
sub manibus Britontun dirigendam ; abbinc suprà
Huvium Rbeni versus montes et Liguriam et Italiam
cousequenter acies direxeruut , terras cunctas et nu-
iJi: llAl.NAi T. l.[VRt 111. 369
CHAPITRE XXIX.
Origine des noms de Brabant et de Bruxelles.
Après leur victoire , les Sénonais changèrent de
place . et bâtirent sur les frontières tle la Rhétie une
granile ville pour leur servir de refuge , en cas de né-
cessité. Ils la nommèrent le bourg des Sénonais ; mais
elle porte aujourd'hui le nom de Bruxelles: et ils ap-
pelèrent la rivière qui la traverse, la Senne. De là ils
assiégèrent Louvain , Anvers , et toutes les autres villes
ou places de la province , et finirent par être victorieux
sur tous les points. Ils passèrent l'hiver dans le pays
sans éprouver le moindre trouble , établirent de nou-
veaux ducs et de nouveaux princes dans les villes et les
bourgs , et donnèrent un autre nom à la Rhétie, qu'ils
appelèrent Brabant, en l'honneur des deux roisBrémus
et Brennus. Enfin ils laissèrent le gouvernement de
cette province aux Bretons, et conduisirent leurs ar-
mées , en remontant le Rhin , vers les Alpes , la Ligurie
et l'Italie, soumettant les peuples et les villes (ju'ils
trouvaient sur leur passage , et s'avançant jusqu'à Rome
dont ils s'emparèrent, et qu'ils quittèrent pour passer
■2\
570 ANNALES
tiones edomando, quousquè ad civltatem romanam
pervenerimt, qu:i subjugatâ transièrunt ad Graecos,
qiiibus protritis, tandem in territorio, quod Galathas
à dictis Gallis dicitur, divino Dci jiidicio, periêrunt,
Bremoperpi'iùscunisuIsBritonibusrepatriato.AcTOR.
De hac materiâ pliires liistoriograplil proloquuntur ;
undèEusEiîius : Anno Artaxerxls xvii (i), Senonenses
Galli Romain invasei'unt et totam ccpcrunt, excepto
Capitolio. Item Isidokus, xii libro Etjmologiarum:
«GallorumascensusinCapitolioanserisclangoredepre-
liensLisest; nulliim enim animal ità odoi'cm hominis
sentit, ut anser(2). » Sequitur: « Merito igilur debes
regratiari anseribus, 6 Roma, quod régnas ; dii tui
dormiebant, et anseres vigilabant; illis potiùs debes
sacrificare quàm Jovi. Cédant enim dii vestri anseribus
à qnibus se sentiunt esse defensos, ne et ipsi ab hoste
caperentur. » De lulemateria proloquitur diffus • Oro-
sius, de ormestis muncb , libro 11 (3}. Item Valerius
Maximus (4) dicit quod illa in Capilolii obsidione ,
cùm llomani famé gravissimâ artarentur, panes è com-
pluribus locis jacere cœperunt. Quod videntes Galli
senones, putantes eos abundare victualibus, obsidio-
nem dimiserunl. Item Vegf.tius, de Re miiilaii ^ li-
bro IV (5) : In obsidione Capitolii à Gallis facta , cùm
(1) I/an 388 avant J.-(]. , selon Fnsi'he. Suivant PArf de véri-
fier les dates, Rome fut prise par li-s (iail lis le 7 juillet 3()o; mais
il faut 387. Voyez l'observation placée à la fin de ce chapitre.
(2) Isidor. Oi'ig. l. xii, c 7.
(3) Cap. 19.
(4) Lih. vii, cap. 4-
(5^ Cap. 9.
DE HAINALT. LIVRE III. D; 1
dans la Grèce où ils exercèrent d'affreux ravages. Puis
étant entrés dans le pays qui de leur nom fut appelé
Galatie , ils y périrent tous par l'ordre de Dieu, à l'ex-
ception de Bréinus qui était retourné depuis long-tcins
dans son royaume avec ses Bretons. L'Altklr. Plusieurs
historiens ont parlé de ces faits. Ainsi Eusèbc dit : « L'an
dix-sept d'Arlaxercès , les Gaulois sénonais attaquèrent
Rome et la prirent tout entière, à l'exception du Ca-
pitole. » De même Isidore , livre xn des Elymologies ,
a Les oies par leurs cris avertirent les Romains lorsque
les Gaulois montaient au Capitole ; en effet, il n'y a
point d'animal qui reconnaisse mieux l'homuie à l'o-
dorat que l'oie. » Puis il ajoute : « Rome , si tu lègues,
tu doii en rendre grâces aux oies : tes dieux dor-
maient, tandis qu'elles veillaient pour toi, et c'est à
elles que tu dois sacrifier plutôt qu'à Jupiter. Que tes
dieux rendent donc hommage aux oies , en reconnais-
sant qu'ils leur doivent de n'avoir pas été pris eux-
mêmes par l'eimemi. » Orose traite longuement de
ce sujet, livre ii des Révolutions dn monde, et Valcre
Maxime rapporte que, pendant le siège du Capitole,
les Ronjains souffrant une famine extrême jetèrent du
pain de plusieurs endroits , et firent croire aux Gallo-
Sénonais qu'ils avaient des vivres en abondance; ce
qui les engagea à lever le siège. Voici ce que rapporte
Végèce, de V Art militaire , livre iv : « Lorsque le Capitole
était assiégé par les Gaulois, les cordes des machines
de guerre étant pourries, toutes les dames romaines
coupèrent leurs chevelures pour réparer ces machines
et sauver leurs maris. » Vincent de Beauvais entre
aussi dans beaucoup de détails sur cet é\énement, au
livre IV, chapitre (Si de ses liistoircs ,• mais , pour être plus
court , je les omettrai entièrement. Fakiiis l'historien.
571i ■ ANNALES
machinarum bellicaruni fîmes putrefacti cssent, ma-
h'onœ omms ci'lnos siios abscidoriiiit ad machinas
iTj)aran(las et vir'os liberantlos (i) Item Vincetitiiis ,
in suis historiis, libro iv, capitulo 8i , de ista male-
ria multa proloquitur; sed omnia, brevitatis causa,
pertranseo. Fabius (i) historiograpbns. Anno Ar-
taxerxis xxii , (^lalH vestigia Breniii inse([uentes ,
transalpantes , Mediolanum , Aretiuni et Rrixiam et
pluies alias civitates cum totali territorio earumdein
ceperunt,et pacifiée possederunt, usquè ad tempora
Lucii ^mibi et Anchi Wastonis(3)corisules quos in-
terfecerunt cum onmibus Rouianis eisdcMi adjunclis;
sed anno sequenli, videlicet ab urbe coudita dxxxiii,
Claudius Marcellus cos multùm debilitavit, sed nec-
dùm dominium civitatum tune perdiderunt.
(i) Nous avons tli'j.i fait observer f(iie JacqiiPS de Giiyse se con^
tentait d'analiser ses auteurs an lieu tie les cnpicr textciellcmtnt.
2 Ce n'est pas Qiiintns Fabius Picfur, sur lef|iiel on /»ciit voir la
Biographie umueraelle , xiv, 12. Polibe l'accusait d'tître peu ju-
dicieux.
(3) En l'an 224 avant J.-C, les Gaulois eurent l'avantage dans
une première aflaire avec les Romains j mais le consul L. AEini-
lius Papus les battit ensuite complètement (son collèa;ue était
C Atilius Règulus ) ; et en Tan 221 (533 de Rome) ils turent entiè-
rement soumis par Claudius Marcellus. (J'est du moins ce qu'as-
surent les historiens romains, dont le récit n'est pas à l'ai'ri de
toute contestation. Au lieu de Anclu fi^a^tonis , le manuscrit de
Saint- Germain porte AcilU f^astonis.
DE HAINALT. LIVIŒ III, O^O
L'an 22 d'Ârtaxercès , les Gaulois , suivant les pas de
Brennus, passèrent les Alpes, s emparèrent de Milan,
d'Arezzo, de Brescia, ainsi que de plusieurs autres villes
avec tous leurs territoires, et possédèrent paisiblement
leurs conquêtes , jusqu'au tems des consuls Lucius
jîlmilius Papus , et Caius Atilius Régulus , qu'ils mas-
sacrèrent avec toute l'armée romaine; mais l'année
suivante, c'est-à-dire l'an .533 de Rome, Claudius
Marcellus leiu- fit éprouver de grandes pertes, quoiqu'il
ne put détruire leur domination sur les villes d'Italie.
OBSERVATION.
II ne paraît pas que Jacques de Guyse ait connu Polibe. Car il
aurait sCtrement cite' sur la prise de K' me cet l)i>toricn pris(|iie
contemporain qui dit , en commençant son oiivrafje : « (]'.' fut donc
» la dis-neuvi('me anne'e après le combat naval donné près de la
» ville d'Egos-Potamos , que les Gaulois s'emparèrent de
i> Rome, à l'esception du Capitule. Les Romains, ayant fait une
« trêve avec les Gaulois, aux conditions qu'il plut à ceux-ci
» desiger , regagnèrent leur patrie cont'-e toute espe'rance » Ce
re'cit entièrement conforme à celui de Jacques de Guyse , place la
prise de Rome sius l'an 3'i'] avant mitre ère. Voyez le tableau
chr.jnologique place à la fin du Tacite de M. Dureau de Lamalle.
Paris , 1817 , vi, 348.
074 ANNALES
CAPITULIM XXX
De Aristotele.
EUSEBius, in Chronicis.
Hu.TUS teiïiporibus, videlicet anno Artàxerxis
xxxiirfi), olympiadis cr anno ii, Aristotoles xviii
agensannumPIatonisaudilorfuit. De'quo Augustiniis,
(le C'mtale Dii ^ libro vni i^i)'. Aristoteles, inquit,
discipulus Platoiiis , vir exccllciitis ingenii, et clo-
quio quidem Platoni inipar,sed niultos facil^ snpcrans,
sectam piiripateticam condidit, qiiae doambulando
dispiitarc coiisucvorat ; plurunosque discipulos piTC-
clai'à fama cxcoHens , vivo adhùc priTCcptore, in siiam
lincresim congrrgavit. Aclov. Hdjus tcniporibus , olym-
piadis CI anno ii , niortiuis est A itaxerxes (3j, rex Per-
sarum , lococnjus successitOebiis. Tcniporibus cujus
Ochi floiTicrunt Atlienis Demostbenes et Escbincs (4)
(i) I 'an '^■]■l avanf J -CL , suivant Ensrhe; mais la a*" année de
Ja loi' olimp ade rc-pond aux anncts 3^5 et 3^4 avant J.-C
(-2) Cap. 12.
(3) Iri nitre auteur s'erarte de Popinion d'Eusèhe , qui fait régner
Artaxurcès sept ans de plus.
(41 De'mosthcnes esl ne' vers l'an 38 j, et Eschines en Tan 3^7
avant J.-(J.
DE HAINAUT. LIVRE III. 3^5
CHAPITRE XXX.
D'Aristote,
Chroniques d'Eusèbe.
En l'an 33 d'Artaxercès , seconde année de la 101"
olimpiade , Arislote , âgé de dix-huit ans , fréquentait
l'école de Flaton. Saint Augustin dit au livre vni de la
Cité de Dieu : « Arislote , disciple de Platon et homme
d'un grand génie, fut , sous le rapport de l'éloquence,
inférieur à son maître , mais supérieur à beaucoup
d'autres philosophes. H fonda la secte des péiipatéti-
ciens , qui avaient coutume de discuter en se promenant,
et compta dans son école , du vivant même de Platon ,
un grand nombre de disciples que sa haute réputation
attirait de tous les pays. » L'Auteur. De son lems, c'est-
à-dire, en la deuxième année de la 101" olimpiade,
Artaxercc's , roi des Perses, mourut, et eut pour suc-
cesseur Darius Ochiis , du vivant duquel florissaient , à
Athènes, lescélèbresorateursDémosthènes etEschines,
dont il est fait mention dans Valère-Maxlme, livre vni.
Du tems de ceux-ci, le sage Nectanébo abandonna le
trône d'Egipte , et se rendit en Macédoine. L'histoire
d'Alexandre rapporte comment ce prince cgiplien
trompa Olimpias et Philippe son mari ; comment il
576 ANXALES
siinimi oratoros . de qiiibus ValtM-ius, libro viii. Quo-
rum tempofibus IScctanebus sapicntissimus rcgnum
^Egypti rolinqiiens , Macedoniani accessit. Qualiter
vei'o reginam Olympiadem et Pbdippum deceperit ,
et Alexandrum Magnum gcnuerit; et qualitci' dictus
Alexandcr inoriginatus cxtitcrit, aut mundl monar-
chiam sibi acquisiêrit, patet in historiâ Alexandri(i),
quam , brevitatis causa , relinquo.
CAPITULUM XXXI.
De morte Platytii*.
Anno Ochi dicti , régis Persarum , xxi , olympia-
dis cviii anno 11, Plato philosophas moritur. De
que Mercurius Termegistus, libro 1 de Constellatione,
Platonem cum illis animi virtulibus, cum illa sapien-
tiœ doctrina, fiitum vendidit (a), illamque divini
animi doctrinamtyrannicisoi'udeiitatibus et ludibriosis
Dyonisii potestatibus tradidit. Et Senoca , m F.pis-
tolcl xvni (3), Plato in natali suo decessit, et annum
unum at({ue octoginta implevit sine ulla deductione.
Idco magi qui tune Aîhenis erant, immolaverunt de-
(0 II s\ip;it sans doute ici de rhistoirc fabuleuse d'Alexandre,
d'où sont tires les contes rapportes ici.
(a) Le texte n'est pas frès-ciair en cet endroit. 11 dit littérale-
ment que Platon remlU son ilestin à Oenis.
(y^ Ce<!t l.T lettre cinqnanle-Vniit ù [.ucilitis
DE HAIX.AUJ. LIVRE III. 077
engendra Alexandre; commentée prince fut élevé, et
comment il obtint la monarchie universelle; mais,
pour être plus court , je n'entrerai pas dans ces détails.
CHAPITRE XXXI,
De la mort de Platon.
En l'an 21 d'Ochus, roi des Perses, seconde année
de la lOS'^ olimpiade, mouiut le philosophe Platon.
Mercure Trismégiste dit au livre 1 de la Constellalion ,
que Platon passa toute sa vie à enseigner la sagesse et
à la pratiquer; il parvint même à faire goûter l'excel-
lence de sa doctrine, et son génie divin au tiran Denis
qui était enclin à la cruauté et à la débauche. Nous
lisons dans Sénèque , lettre cinquante-huit, qu'il vécut
juste quatre-vingt-un ans , et mourut le jour même qu'il
était né ; et que les mages qui se trouvaient alors à
Athènes, persuadés qu'il avait joui d'un sort au-dessus
de la nature humaine , lui offrirent des sacrifices , parce
qu'il avait accompli le nombre de neuf fois neuf, qu'ils
378 ANNALES
functo , amplioris fuisse sortis quhm humanae rati ,
quià consummâsset perfectissimum numerum , quem
novem novies multiplicata componuiit. Item Augus-
TiNvsde Civitate Dei y libro 11 (1). Labeus Platonem
inter semicleos ponit et Herculem et Romulum; se-
mideosautemheroibiis praefert, utrosquc tanien inter
numina collocat... Nos autem Platonem nec cuiquam
homini christiano comparamus. Hugo floriacensis ,
in Historiâ scholasticâ, libro i. Platoni successit
Apuleius, et Apuleio Hermès (2) œgyptius quem Tri-
megistum vocant. Item Vincentius, libro v. Disci-
puli Platonis , ut legitur , in templorum lucis et
porticibus versabantur, ut admoniti augustioris babita-
culi sanctitate, niliil aliud quàin de virtulibus cogita-
ront ; quorum etiàin quidem oculos sibi effodisse
leguiitur, ne per eoiiun usuin à contemj)latione sa-
pientine avocarentur. Tune autoni floruorinit pbiloso-
plii Apuleius, Plotinus, Mercurius lVrniogistus(3),
Xenocratcs et Isocrates (4), de quibus loquitur Vale-
rius, libro viii. Helin\ndus. Anno quarto olympiadis
cix(5), qui fuit annus Ocbi xxv , et œtatis Alexan-
(i) Cap. .4.
(2^ On i>e(il voir sur Hcrmrs lo Tioiivcan sistc'me de Rihliogiapl)ie
aIplial)t'fi<jiio, tioi^irmc partie. Usage de cf sistrme pour les enci-
clopedifs, pa-^cs ao3 et suivantes. Il a vi'cii lf>ng-lems avant Platon,
qui parle de lui, et avant A|iile'e, qui Fa traduit.
(3) (Je Mercure Trisme'j»istc est rauteiir :"; qui smt aftrihiie's plu-
sieurs ouvragi's, d-.nt l'un a ete traduit par Ajudee. San véritable
nom est llioth on Hermès Voyez la note précédente.
{4j (l'est dans le chap 7 de sm livre viii (pic Valère Maxime,
traitant du travail et de l'application à l'etudc, fait mention d'Iso-
crates «-t d'autres.
.'>'' Oftr année dUmpique est l'an 'Vj 1 avant notre ère . qu'Eusèfie
DE HAINAIT. LIVRE III. 379
regardent comme le plus parfait. Saim Augustin, livre 11
de la Cité de Dieu. Labéon met Platon au rang des
demi-dieux , comme on y met Hercule et Romulus, et
préfère les demi-dieux aux héros, quoiqu'il mette les
uns et les autres au nombre des divinités Pour
nous , nous ne le comparerons pas même à un chrétien.
Hugues de Fleury, Histoire scolaslique , livre 1. Apulée
succéda à Platon , et Hermès l'Egiptien , surnommé
Trismégiste , succéda à Apulée. Vincent de Beauvais ,
livre V. Les disciples de Platon, ainsi qu'on le rapporte,
fréquentaient les bois sacrés et les portiques des tem-
ples, afin qu'avertis par la sainteté d'une habitation
plus auguste, ils fissent des vertus seules l'unique objet
de leur pensée. On lit môme que plusieurs d'entre eux
se crevèrent les ieux , de peur d'être détournés par la
vue des objets extérieurs de la contemplation de la sa-
gesse. Alors fleurirent les philosophes Apulée, Plotin,
Mercure Trismégiste, Xénocrales et Isocrales , dont il
est fait mention dans le vin" livre de Valerc-^Ja\ime.
HÉLiNAND. L'an 4 delà 109" olimpiaile, qui est la vingt-
cinquième année du règne d'Ochus et la seizième de l'âge
d'Alexandre, Speusippe mourut, et fut remplacé par
Xénocrates, que Cicéron regarde comme le plus grave
des philosophes. Yalèr e-Maxime. La vertu de Xénocrates
lui avp.it attiré tant d'estime , qu'ayant été appelé en
témoignage, et s'étant appioché de l'autel pour jurer
qu'il avait dit la vérité , il fut dispensé par le sénat de
prêter ce serment. Alexandre lui envoya un jour des
députés chargés de lui remettre quelques talens; le
philosophe reçut ces persorniages avec modestie et
simplicité , selon sa coutume ; et le lendemain , comme
ils lui demandaient à qui ils devaient remettre l'argent
dont ils étaient porteurs, « Quoi, » leur répondit-il ,
580 ANiNALES
dri xvi,Spcusippusnioritur, cui successit Xenocrates,
quemTullius dicit philosophorum fuisse gravissimum.
Valerius(i). Hulc Xenocrati tantam auctoritatcm
sua sapientla attulerat, ut cîim testimonium dlcens, co-
actus ad aram accessissct, ut omnia se verèprotulisse
juraret, prohibitusàsenatu jurare. Alexander ad Xe-
nocratem legatos cum aliquot talentis misit , quos ille ,
ut erat solitus , modico apparatu excepit. Postera die
interrogantibus cuinam pecuniam annumerari vellet :
« Non intellexistis , inquit , hesternà cœnâ , ea me non
indigere. » Ità rex pecunia amicitiam pliilosopbi emere
voluit. Helinandus. Anno regni Pbilippi xxiii , Per-
sarum XIII regnavit Arses, Oclii fibus. Cœpit igitur
anno quintae œtatis ccli, mundi vero iiimdcxxiv(2),
et regnavit annis iv. Hune inter reges Persarum non
numerat Justinus, sed stat\m post Oebum ponit Da-
rium. Tertulbanus autem bunc Arseni vocat Argum,
quem dicit régnasse anno uno. Isidorus appellat eum
Xerxem , quem dicit régnasse annis iv. Hieronymus,
super Danielem , vocat eum Arxem ; alii vocant eum
Arsanium(3).
fait en effet correspondre à Tan 25 d'Ochus. Or , dans le calcul
adopté par M. de Sainte-Croix {Examen critique des historiens
(fy4/eran(lre , page 648), c'est l'an 356 qui est l'an 1 de l'iige
d'Alexandre ; aussi l'an 34i est son an j6, comme le dit ici Jacques
de Gnysc.
(i) Lib. ii . <-iip. 10, et lil>. iv, rop. 3.
(a) L'an SSg av. J.-C.
(3) Slrabon le nomme INarsès. Plutarque Oarsès , et d'autres
Arsioclius.
DE HAINALT. LIVRE 111. 58 1
« n'avez-YOus pas compris par le souper d'hier , que je
n'avais nul besoin de ces choses-là? » C'est ainsi qu'A-
lexandre voulut acheter au poids de l'or l'amitié de ce
^rand philosophe (I). Héunand. L'an 23 du règne de
Philippe , \rsès , fils d'Ochus et treizième roi des Per-
ses , monta sur le trône. Son règne commença l'an 251
du cinquième âge , 362 i du monde , et dura quatre an-
nées. Justin , qui ne compte pas ce prince au nombre
des rois de Perse , place Darius immédiatement après
Ochus. TertuUien le nomme Argus et le fait régner un
an ; Isidore l'appelle Xerxès , et le fait régner quatre
ans. Il est appelé Arsès par saint Jérôme, dans ses
commentaires sur Daniel , et Arsame par d'autres au-
teurs.
fi) Diogèties Laërce , dans la vie de Xe'nocrates, dit seulement
qu'Alexandre ayant envoyé' à ce ]iluloso[)he une grande somme
d'argent, Xenocrates garda trois mille drachmes, et renvoya le
reste , en observant que celui qui avait beaucoup de monde à
nourrir était celui qui avait besoin de beaucoup d'à gent Xéno-
cratcs na(|uit Tan 896 avant notre ire, fut oljef de l'académie
a| rès la mort de Speusippe, l'ao SSg, et mourut l'an 3i4> à quatre-
vingt-deux ans.
502 ANNALES
CAPITULUM XXXII.
De initio regni Alexandri Maceilonis.
Hujus temporibus , olympiadis cixanno quarto '^j),
Alexander Ingrcssus ad Fliilippum palrom ejus , ut
vlctoi'iam Molonœ ('^) civltatis nunciaret; vlditque iii
doino rcgia viios barbaro liabitu, percunctansque cog-
noscit régis Darii legationcm, qui vénérant pro tributo
atque censu , terr» scilicct et aquse ; iniratur Alexan-
der petendi moreni et tituknn, dixitque uni qui pri-
mus illoruin esse videbatur : « Haec ne elenienta vin-
dicant Pers.TmortaHbusqufie Deus cunctis mortaUbus
largitus est in communi ? » Igitur ferri jubet ad Da-
rium mandata ut bujiis consuetudinein petendi tein-
perarct, sin aliter sciret se cum Alexandre prœlio
(i) L'an 3'[i avant J -C .
(a) Plnli|)j)e prit et rasa la ville de Me-lli^ne { b.îtie sur la côte
occidentale du <^Mc 'l'iiet maï(|ne } , Tan 353 avant J.-C (Je fut ù
la |)risc de cette ville ([n'il jk rtlit un nil d'nn ciup de flèche de-
coc-lict; par .\ster. On vnil (pic la ruine de Mc-tlmni' est anteiieiirc
d 12 ans à l'i-pocpie <pie notre auteur, ou plutùt riiistorien (ahu-
leiix d'Alexandre, (ixe ;'i cet événement. D'ailleurs il scmMealfii-
bu<'r à Alexandre, (pii n\-ta:t alors .Ige ipie de trois ans. une
conquête <|ui appaitienl à l'Iiilippe I,a suile du récit ne niciilc
aucune confiance; l'histoire y est entièrement falsifiée.
DE 1IAI.\AL1. LIVRE 111. 385
CHAPITRE XXXII.
Du commencement du règne d'Alexandre le Mace'donien.
Dl tems d'Arsès , en l'an 4 de la 109» olimpiade,
Alexandre étant entré dans l'appartement de son père ,
pour lui annoncer la victoire de Mélhone , vit dans le
palais des hommes en habits étrangers, et apprit que
c'étaient les ambassadeurs du roi Darius, qui étaient
venus pour demander en tribut la terre et l'eau. Surpris
de cette manière de s'exprimer et de cette prétention ,
il dit à celui qui lui paraissait le chef de la dépulation :
« Les Perses voudraient-ils revendiquer des mortels
les biens que la Divinité leur a accordés à tous en com-
mun? » Aussitôt il les charge d'avertir Darius de s'abs-
tenir dorénavant de cette sorte de demande, sinon qu'il
aura des guerres terribles à soutenir avec Alexandre;
puis il leur ordonne de partir. Comme une ville voisine
chancelait dans l'obéisance qu'elle devait au roi de
Macédoine, Alexandre fut chargé d'aller la maintenir
dans le devoir. Mais pendant cette expédition, un nom-
mé Pausanias, homme opulent et voluptueux, étant
devenu amoureux d'Olimpias, et ayant , à force d'in-
stances , obtenu d'elle la promesse qu'elle l'épouserait
après la mort de Philippe , crut trouver une occasion
favorable dans l'éloigneraent du jemie prince , qui s'ë-
384 ANiNALEt.
acriùs coiicertaturum. His dictis , exlgit liomines
proficisci, Rursiis dùm civitas vicina vacillaret de ob-
sequio, Alexandre datur cxpeditio, et illùc ire jussus
est. Intereà Paiisanias quidam, nomine , opibus et
doliciis afïluens, iii Olympiadis amorem prolapsus
est; qui cùin per nuiitios attcmptaret , et mulier con-
seiitiret , scilicct, ut, defuncto Pliilippo, ad illum
transnuberet, Pausanias opportunum tempus existi-
mans , quià Alexander tuiic forte aberat , cujus jàm
nonieii formidosum erat nimiùm, repente irruit super
Philippuni , eumque vulnere prîcvenit. Qui ciim le-
tlialiter ictus esset , mox Pausanias festinat ad raptum
Olympiadis. Cùm igitur populus adhiic in tbcatro
turbaretur, forte, rébus ex scntentia perpetratis ,
Alexander suporvenit, ostenditque turba Pliilippi
vulnera, irruensque in reginam deprebenilit Pausa-
nias violentiam ; tùmquecum jaculo dcslinaret, tene-
returque formidine matris vulnerandœ, Olympias sic
eum adhorlatur : « Jacula, » inquit, « filî , jaculare non
didjitcs! » Alexander autem cùm adbùc Pbilippum
conspirai e comperisset, jussit Pausaniam illorsùm
adduci , gladiuinque in dexteram patris misit quo
manu ejus oppeteret, occiditque eum. Ergo jàm mo-
riens Pbillppus ait : « Nibil est quod me finis vitîc aut
mors contristet : ultus enim auctorcm injuriœ, libcns
operam adjecit. Reminiscor, ô Alexander, deum ma-
tri tuae prsegnanti prœdixisse quod vindicem filium
esset paritura. « Et bis dictis spiritum exbalavit. Htec
in bistorià Alexandri(i).
(0 l'CS romarricrs aii«si-l)ien qno les historiens se sont dispuh-
Di: IIAINAIT. LIVRE III, 585
tait déjà rendu extrêmement redoutable, tout à coup
il se précipita sur le roi et le frappa, sans qu'il s'y at-
tendit. Philippe est blessé mortellement , et son meur-
trier s'empresse d'enlever Olimpias. Mais, tandis que
le peuple en tumulte s'agite dans le théâtre , Alexandre
survient lorsque tout paraissait avoir réussi à souhait.
On se presse autour de lui, on lui montre les blessures
de son père; aussitôt il vole sur les pas de Pausanias
qui entraînait la reine , et cherche à l'alteindre de son
javelot; mais la crainte de blesser sa mère le retenait,
lorsque celle-ci lui cria : « Frappe , mon fils, frappe , et
ne crains rien! » Cependant s'étant aperçu que Phi-
lippe respirait encore , il fait approcher le meurtrier
de son auguste victime, il met son épée à la main de
son père pour qu'il se venge lui-même , et aussitôt Pau-
sanias tombe et expire. Le roi dit alors en mourant :
a La mort n'a rien qui m'afflige, car je me suis vengé
de mes propres mains. Je me souviens , ô mon fils ,
qu'un dieu avait prédit à ta mère, dans sa grossesse ,
qu'elle mettrait au monde un fils vengeur. » Après ces
mots il expira. (Ceci est tiré de l'histoire d'Alexandre.)
long-tcms le sujet de la vie d'Alexandre; il en est résulté une
foide d'ouvrages qui ont joui d'une grande vogue dans Icmoyen
âge. Il ne faut jias s'ëtnnncr que notre auteur, à l'exemple de tant
d'autres, ait pris la fable pour la vérité, dans des siècles peu
éclairc's et pendant lesquels la critique n'avait pas les ressources
qui abondent aujourd'hui.
II. 2;:)
536 ANNALES
CAPITULUM XXXIII.
De pernicionibus matronarum romaoorum.
EUSEBIUS, Ubro IV.
Parvo deindc tempore interjecto, Claudio scilicet
Marcello et Valerio riacco(i)consulibiis, incredibili
rabie et amore scelerum romana; matronae cxarserunt.
Erat utique fœdus ille oc pestilcns annus , infllctœquc
jàm catervatim strages egerebantiir; et adliùc taiiien
penè omncs corriipto acre simj)lcx criidolitas erat,
cùm, excuntc qiuidam aiiciliu indice et convinccnte,
prœvium imdtae inatronre ut biberent venena quae
coxerant compulsas, deindc siinul ut liausêre consum-
malne sunt; tantaque fuit multitiido niatronariun in
hoc facinorc consciaruin , ut treccntic et octoginta
dainnatœ simul ex illis fuisse refcruntur (2).
(1) Ces consuls elaicnf rnlres en rliarj^e l'an 3'i8 av J -C. Vojcz
la clironologic placée à la fin du Tacite de IM. Diireau de Lamalle.
(2) Voyez Tite-Livc , viii, i8. Le texte de ce chapitre est visi-
blement altère en plusieurs endroits.
1>E HAINAIT. LIVKK III, 38;
CHAPITRE XXXIII,
Du crime des dames romaines.
EUSÈBE , livre iv.
Peu de tems après , sous le consulat de Claudius
Marcellus et de Valérius Flaccus , les dames romaines
furent transportées d'une rage incroyable et de l'amour
du crime. Cette année était désolée par des épidémies
et des maux de toute espèce , et l'on était occupé cha-
que jour à enlever des monceaux de cadavres. Tout le
monde alliibuait ces ravages à la corruption de l'air,
lorsque, de l'avis d'une esclave , on fit boire à plusieurs
clames des poisons qu'elles avaientpréparés, et qui leur
causèrent la mortaussltôt après qu'elles en eurent pris.
Le nombre de leuis complices était si grand, qu on
rapporte qu'il v en eut trois cent quatre-vingts qui
fui'enL condamnées en une seule fois.
388 AiNiNALES
CAPITULUM XXXIV.
De Dario Arsam filio.
EUSEBIUS.
Anno primo olympiadis cxi (i), qui fuit œtatis
quinttTCCXLv, inuncli voi'oiiimdcxxvii, Persarum xiv,
rogiiavit Daiius, Arsami filiiis, annis scx. Eodcm anno
Alexandcr Pliilippo patri succossit in rogninn , et
rcgnavit annis xii. Procurata patris scpulturâ , niox
asccndcns illiiis statuani , convocataquc universa mul-
titndinc plobis , ait : « En tcnipiis est ut quicuinque
cuporit Alcxandi'o militaro , fœdus cum illo inire
festinct; naniquc milii dignum vidctur bella in eos
priniùni niovcrc, qui nos piid(Mn contiistaverunt;
nunc autem cupiunt spoliarc etiàm et Hbertate. »
His dictis acquicscit omnis miles, ac Fi divinitùs vo-
catusfuisset. De liacmaterià videaturlustoria Alexan-
dii atque Justini. Vincentius, liljio v. Ilôc tempore
Anaximcnes , Epicurus et Callistlienes , philosophi
clai'i habentur.
(i) L'an 335 avant J.-C.
DE HAINAUT, LIVRE III. ôSg
CHAPITRE XXXIV.
De Darius, fils d'Arsame.
EUSEBE.
En l'an 1 de la HT olinipiade , 3i5 du cinquième
âge et 3627 du monde, Darius, fils d'Arsame, fut le
quatorzième roi de Perse, et régna six ans. En la
même année Alexandre succéda à Philippe son père ,
roi de Macédoine, et en régna douze. Après avoir dorme
la sépulture à son père et lui avoir érigé une statue , il
assembla le peuple et lui dit : « Voici le tems où tous
ceux qui veulent suivre Alexandre à la guerre doivent
se hàler de s'unir à lui; car il me paraît juste de
commencer la guerre en attaquant ceux qui nous mo-
lestent depuis long-teius, et qui désirent aujourd'hui
de nous dépouiller mcuie de notre liberté. » A ces
mots chaque soldat applaudit, comme s'il eût été in-
spiiépar le ciel. Voyez sur ce sujet V Histoire d' Alexan-
dre , et le livre de Justin. Vincent de Heauvais , livre v.
En ce teins florissaient les philosophes Anaximcnes ,
Épicureet Callisthènes.
jgO ANNALES
CAPITULUM XXXV.
De inclijsione Judseorum factâ per Alexandriim.
Ex Historiâ scholasticâ.
CuM venisset vVlcxander ad montes Caspios, miso-
runt filios captivitatis decem trihmim postulantes
ab eo ogredicndi liccntiani : ex odicto etiim tene-
bantur rgredi non licoro. Cùmquo qnaesivissot causani
captivitatis, acceplt ces apertè recessissc à Doo Israël ,
vitidis aiireis immolando, et pri* proplietas esse prae-
dictum eos à captivitatc non redituros. Tune x\lexan-
derrcsponditqiîod dignierantarctiùsinchidi.CLnnque
angusta viarum obsti'iieret njolibus bituniinatis, et
videret laboreni hnmanum ad lioc non sufficere,
oravit Deuni Israël ut opus iilud compleret. Et ac-
ccsserunt ad se invicem pra-rupta nionlium, ex quo
liquidé apparet non esse voluntatem Dei ut exeant.
Egredientur tamen circà finem mundi , magnam stra-
geui hominum facluri. H\c addit Joseplius : Deus quid
fucturus est pro fulelibus suis, quando tanta fecit pro
infideli?
DE HAINAUT. LIVRE III. 5^1
CHAPITRE XXXV.
Alexandre enferme les Juifs.
Histoire scolastiqne.
Ar.EXANDRE étant arrivé aux monts Caspies, les Juifs
captifs lui députèrent cli\ hommes des tribus pour lui
demander la permission de rentrer dans leur pays ,
car il existait un édit qui leur défendait ce retour. Le
prince les questionna sur la cause de leur captivité ,
et ayant appris d'eux qu'ils s'étaient ouvertement éloi-
gnés du Dieu d'Israël , en immolant à des veaux d'or,
et qu'il avait été prédit par les prophètes qu'ils ne
sortiraient pas de leur captivité , il répondit qu'ils mé-
ritaient d'être enfermés plus étroilement, et fit boucher
les issues avec des monceaux de bitume; mais, s'étant
aperçu que la main des hommes ne suffisait pas à ce
travail, il pria le Dieu d'Israël d'achever l'ouvrage.
Alors des montagnes de roche s'approchèrent d'elles-
mêmes , et il devint manifeste que le Seigneur s'oppo-
sait au retour des Juifs. Cependant ils doivent sortir
vers la fin du monde pour détruire la plus grande partie
du genre humain. Josèphe a joute cette réflexion : « Que
ne fera pas le Seigneur pour ceux qui suivent sa loi ,
lorsqu'il a tant fait pour un infidèle? »
392 ANNALES
CAPITULUM XXXVI.
Qubd Alexandcr magnus iTedit Liriope silTam Carbonariam.
ACTOR.
His temporibiis acciderunt illa qune Cresiis histo-
riographus ( i) poiiit in historia Scotorum, qui et
Albani in dicta liistoria vocanliir. Dico si historia
veritatcm in se contineat usqueqiiàm, quam illustris
princcps ac nobilis cornes Hannoniae Guillelmiis (2)
hujus noniinis sccundus , ciini esset in Angliii juxtà
illiistrissiinam materteram suam reginam Pliilippam,
iixorem niagni Edwardi, régis Angliœ, ab anglico in
vulgai'i nostro gallico transfori'i atque Iranscribi fecit
in quatuor magnis voluminibus, in quibus aliqua
(1) Nous donnerons dans le dernier volume de cet oiivr.'gc des
notices historiques sur les auteurs ([iii ont ete' cites par J. deGuyse,
(.4) Guillaume II , comte de Hainaut et de Hollande , était iVère
de Philippine de Hainaut (pii avait épouse en 1327 Edouard lli ,
roi d'Anglelerre. (^etfe Philippine cfait donc la sœur et non la tante
maternelle malertern de Guillaume 11. Cette filiati m est donnc'e
j> r l'Art de vérifier les dates à Tarliile des comtes de Hainaut et
des comtes de Hollaude. l>a mire de Guillaume II était Jeanne de
Valcis, qui avait deux sœurs j Isabelle <lc Valiis, duchesse de Bre
tagne , et Marguerite de Valois , comtesse de Blois.
DE HAINAUT. LIVRE III. SgS
CHAPITRE XXXVI.
Alexandre-le-Grand donne à Liriope la Forêt-Cbarbonnière.
L AUTEUR.
C'est vers ce tems qu'eurent lieu les ëvénemens
rapportés par l'historien Crésus clans son histoire des
Ecossais qu'il appelle aussi Albaniens, si toutefois cette
histoire renferme quelque vérité. L'illustre prince et
noble comte de Hainaut , Guillaume II du nom , étant
en Angleterre près de la reine Philippine, sa sœur (1),
et femme d'Édouard-le-Grand , roi d'Angleterre , la fit
traduire et transcrire de l'anglais en notre français
\nlgaire. Elle est en quatre grands volumes, qui ne
contiennent que peu de faits relatifs à mon sujet. Néan-
moins je les ai extraits pour les insérer dans mon livre,
en laissant aux amateurs de fables les contes qui les
accompagnent. Alexandre, roi de Macédoine, ayant
soumis presque toute la terre à sa domination , partagé
les deux Bretagnes à ses soldats, fait de magnifiques
largesses à ses maîtresses, et assigné à chacun , selon
ses mérites , des royaumes, des duchés , des comtés ,
des villes et des châteaux , s'apprêtait à opérer son
(i) Et non sa tante comme le dit le texte latin , sur lequel on peut
voir la note précédente.
594 ANNALES
pauca tamen continentur ad nieam pertinentia mate-
riam ; et illa excerpsi , et hiiic opusculo appllcui , fa-
bulas ibidem intermixtas fabulatoribus relinquendo.
IgitLir cùm Alcxander, rcx Macedonum , quasi totuni
orbem suo subjugàsset impcrio, et Britariniam utram-
que suis distribuisset militibus, dominabusque multa
clargitus fuissct donaria, régna, ducatus, comitatus,
civitates et castella unicuique , proùt valebat , assig-
nâsset, et jàm ad recessum paratus extitisset; affuit
virgo pulcberrima ac nobilis, Liriope nomine, de
sanguine regio, quae nihil inter donaria Alexandri
perceperat. Undè rex dolcns petiit si cunctas assigna-
verat terras. Unusrespondit : « Est ultra mare, inquit,
» illustrissime rex , in principio Gallia" quœdam nobilis
» terra ferlilis et amœna, quîie ferocissimos gignit mi-
wlites, habciis civitalos et castra, (\uvc Carbonaria
n Silva nuncupatur, ad quam non accessislis, 6 prin-
» cipum nobilissinie, quae si posset adipisci aut sub-
» jici , Liriope eadem, si vcstrre placeret dominationi,
» solemnitcr dotaretur. » Tune Alcxander dictae Li-
riope dictam patriam in omnium nobilium Britanniœ
atque Scoliœ prœsentia contulit et donavit; dictis
principibus priTcipiens quatenùs pro dicta virgine ad
dictam terram conquirendam laborarent viriliter et
potcnter; et antuuMunt. Cùm verô post recessum
Alexandri à ilnibus Biitanniœ ac Scotiœ, nobiles dic-
torum regnorum insimul forent congregati in solem-
nitatequâdam pro rébus publicls, intcr caetera, trac-
taverunt matoriam qualiter adiniplercntur pi'omissa
Liriope, nobilis juvenculœ, et terra sibi data etiàm
DE HAINAIT. LIVRE III. 5gS
retour , lorsqu'il fut arrêté par une jeune fille char-
mante et du sang royal , qui se nommait Liriope , et
qui n'avait reçu aucun présent du prince. Alexandre ,
affligé de cet oubli , demanda s'il ne lui restait aucune
terre adonner, et quelqu'un lui répondit : « Grand roi ,
il existe au-delà de la mer , sur les confins des Gaules ,
une province fertile, délicieuse et célèbre, qui engendre
des guerriers invincibles , qui renferme des villes et des
châteaux, qui se nomme la Forêt-Charbonnière, dans
laquelle vous n'êtes point allé , ô le plus illustre des
princes , et que vous pourriez conquérir et soumettre,
pour en doter la belle Liriope , si telle était voire vo-
lonté souveraine. » Alors le roi donna ce pavs à la jeune
princesse , en présence de tous les noble s de la Bielague
et de l'Ecosse, auxquels il recommanda de faire tous
leurs efforts pour qu'elle pût en avoir promptement la
jouissance. Ceux-ci y consentirent, et après le départ
d'Alexandre de la Bretai;ne et de l'Ecosse , s'étant ras-
semblés, un jour de fêle, pour s'occuper des affaires
publiques, ils avisèrent entre autres choses, aux moyens
de remplir leur engagement envers Liriope, et de con-
quérir le pays qui lui avait élé cédé. Au milieu de la
délibération , l'illustre comte de Périgord (I), nommé
Taurus, se leva , et par amour pour la jeune fille , autant
que par respect pour la volonté d'Alexandre , fit vœu
de s'emparer avec ses propres armes de la province en
question , et d'en procurer bientôt la jouissance pai-
sible à Liriope , si les dieux le conservaient à la vie. Il
(i) C'est ainsi que !e rmt pedragensis est hadtiit ilans les ver-
sions française- , sans qu'on puisse s'expliquer cnmm: ni ce comte
de Périgord se trouvait dans l'assemble'e des nobles de l'Ani^leterre
et de l'Ecosse , à moins dose transporter aux tems postcrieurs au
mariage d'Kléonore de Guyenne avec Henri II , roi d'Angleterre.
5g6 ANNALES
qualiter subjiceretiir. Cîini vero perscrutaretur mo-
dus, assurrexit illustris pcdragensis cornes, nomine
Taiirus , qui , ob amorem Liriope et ob reverentiam
donationis régis Alexandri, illùc vovit sua potentiâ
et fortitudine terrain dictam subjiciendam , et eam à
Liriope pacificè, vitâ comité, in brevi possideri. Qui,
gravi congregato exercitu , Atbonitum nobilem scuti-
ferum suse militiae magistrum constituit. Hi, navigio
prceparato, ad neustrica littora potenter applicuerunt;
et pluribus civitatibus , villis , oppidis et castelliscon-
tritis , tandem Silvam - Carbonariam ingressi sunt.
Qui , per diversa quœque dispersi , castrum Bavaci
invaserunt. ( Actor. Utrum vero copcrint vel ne his-
toria non facit montioncni.) Finaliter Fanum Martis
obsederunt. Quii obsidione scx annos durante, gentc
eorum pluries rcnovata , post strages multorum , rcge
Fani Martis priùs inleronipto, mixt\ni violenter et
per tractatus civitatcm obtinuorunt. Filiam dicti ré-
gis Clarenuiiidiam Karadoci , (|ui cognatus eratTauro
pedragcnsi , maritantes, cui totius Silvœ-Carbonarire
doniinium recommendantcs usqnè ad Liriope adven-
tum. Ad recessum versus Scotiam victoriosi , et ad
Liriope intimanduni quid artum erat , et ad ipsam
adducendam se pracparavcrunt irpalriaturi. Hic Ka-
rados fertur ad caslium, (piod nuiic Kirignain(i)
dicitur, primo construxissc; in sua obsidione, juxlà
Fanum Martis. Tandem ïaurus pediagcnsis cum
Liriope uxore sua cum gravi Albanorum multitudinc
ad Silvam-Carbonariam venientes , donationem régis
I Onorptiaiii . ;i iit»<' pplifc hfUf hh miili «le Famars.
Dh HAINALT. livre IIJ. Ô^'^
rassemble donc une grande armée , nomme Athonitus
son écuyer, le maître de la milice ; et , équipant une
flotte , il débarque avec des forces nombreuses sur les
côtes de la ^Neustrie, renverse les cités, les villes, les
bourgs et les châteaux qui s'opposent à son passage ,
envahit la Forêt-Charbonnière , fait occuper tout le
pavs par ses troupes qu'il divise , et vient attaquer le
château de Bavai. (L'altelr. L'histoire ne dit pas s'il
fut pris ou non. ) Enfin , il vient mettre le siège devant
Famars , et au bout de six ans qu'il dura , après avoir
renouvelé son armée plusieurs fois , après une grande
perte d'hommes et la mort du roi de Famars , il s'em-
pare de la ville moitié par force et moitié par capitu-
lation. Claremundine , fille du roi défunt, fut donnée
en mariage à Karados , cousin de Taurus de Périgord ,
et on lui confia le gouvernement de toute la Forêt-
Charbonnière, jusqu'à l'arrivée de Liriope. Les vain-
queurs s'apprêtèrent alors à retourner en Ecosse , pour
annoncer à la jeune princesse ce qu'ils avaient fait , et
pour l'amener dans la province qui lui avait été assi-
gnée. On rapporte que ce fut ce Karados, dont nous
venons de parler , qui construisit le château de Que-
renain , près de Famars, pendant le siège de cette der-
nière ville. Enfin Taurus de Périgord se rendit avec
Liriope , sa femme , et un grand nombre d'Albaniens ,
dans la Forêt-Charbonnière , et jouit paisiblement de
la donation d'Alexandre. Voilà ce qu'on lit dans Crésus.
Llci us. Vers le même tems régnait à Belgis Léo, deuxième
du nom, après les ducs. L'auteur. C'est tout ce que j'ai
trouvé sur ce prince.
ôqS Annales
Alcxandri pacifîcè possederunt. Hœc Cresus. Lucius.
His temporibus, regnabat in Belgi Léo secundus
hujus nominis post duces. Actor. Nihil aliud de
ipso reperi.
CAPITULUM XXXVII.
De morte Alexandri régis.
COMESTOR.
CuM enim rediissot Alcxander in Babylonem , sump-
to vcnono à soiore sua, iisum liiiguœ ainisit, et
oxtromaiii voluntatcm suam scripto express! t ; et no-
liiit munai'cbiam siuun in aliqiiem transférée, no ali-
quis par ci in potenlia apiul postei'os legeretur. Sed
diiodcx'im qiios al) adolesccnlia suà socios babucrat ,
roani successores inslitnil. User autem instilutio non
stctit, nam quatuor ex eis tantùm , abis abjectis,
regnavei'unt, sicut in historiâ Danielis est expres-
sum (i).
(i) Il est sans doute question ici du prophcte Daniel qui vivait
trois siècles avant Alexandre , et n'a pu écrire l'hisloire de ce
prince. Au lieu d'historid il faut lire prophétie!.
DE HAlNAliX. LIVRE 111. O99
CHAPITRE XXXVII.
De la mort du roi Alexandre.
COMESTOR.
Alexandre étant de retour à Babilone , perdit l'usage
de la parole , après avoir été empoisonné par sa sœur,
et fît écrire ses dernières volontés. l\îais il ne voulut
pas désigner son successeur au trône, afin que la pos-
térité ne put dire qu'il eût existé quelqu'un aussi
puissant que lui ; il se contenta de nommer pour ses
héritiers douze généraux qui n'avaient cessé de l'ac-
compagner depuis sa première jeunesse. Cet arrange-
ment ne tint pas long-tems ; car de ces douze il n'y en
eut que quatre qui régnèrent, après l'expulsion des
autres, ainsi qu'il est marqué dans la prophétie de
Daniel.
400 ANNALES
CAPITULUM XXXVIII.
De initio rcgui AEgiptionira.
EUSEBIUS.
Olympiadis cxtii anno iv, igitur A.lexandro mor-
tuo apucl Babylonem ( i ) , translato post euin in multos
imporio, divcM'si regnaverunt. Hinc Alexanclrinorum
nascitur regnuin qiiod est ^gypti ; et per diversas
gontes quas Alexander tenuerat diversi regnaverunt.
Primus in iEgyplo Ptolemaeus, Lagi filins, cœpit an-
no quinlœ .Ttatis cCLXvn , miindi vero iii.mdcxl (i) ,
et regnavit annis xl (3\ MacedoniiE rcgnavit Philip-
pns, qui et Arideus, frater Alexandri, annis vu.
Lydiam et Thraciam et Hellespontum Lysimachus
tenuit.
(i) Jacques de Cnyse est ici craccoriî avec M. Saint Martin qui
fait mourir Alexantlre à Ja fin de rolimpiade cxiij', le 2a juin de
l'an 324 avant notre ère. L'olimpiade cxiv' a commence' le 3 juillet
suivant.
(2) An 323 av. J.-C.
(3) Ptolcmee Soter I*% fils de Lagus , prit le gouvernement de
l'Égiple le 8 novembre 323 selon M. Saint-Martin, et mourut le 17
octobre a83.
DE HAIXAUT. LIVRE III. i^Ol
CHAPITRE XXXVIII.
Du commencement du royaume d'Egipte.
ECSEBE.
En l'an 4 delà llS*" olimpiade , après la mort d'A-
lexandre à Babilone , l'empire fut partagé entre plu-
sieurs rois. C'est alors que le royaume d'Alexandrie ou
d'Egipte prit son origine. Ptolémée , fds de Lagus, en
fut le premier souverain , et conunença son règne , qui
fut de quarante années, l'an 267 du cinquième âge,
et 3640 de la création du monde. Philippe Aridée (I) ,
frère d'Alexandre , occupa le trône de Mdcédoiue pen-
dant sept ans; et Lisimaque posséda la Lidie et la
Thrace.
[i) Aiide'e ou plutôt Arrliidce fut couroTiné roi dès l'an 324, et
Perdiccas fut drclare tuteur des rois Perdiccas ayant p.-rdu la vie
en Egipte l'an 32o, Anli])ater lui succéda et mour:it celle même
année. Polisperchon eut alors la tutelle des rois.
ff.
402 ANNALES
CAPITULUM XXXIX.
De Theophrasto philosopho.
EoDEM tempore , Theophrastus (i) philosophas
claruit, qui successor fuit Aristotelis, de quo Hiero-
nymus contra Jovinianam loquitur hbro i. « Fertur, »
inquit, « Aureolus Theophrastl Uber de nuptiis, in quo
quaerit, an vir sapiens ducat uxorem. Et ciim defi-
nîssct, si pulchra esset, si benè moriginata (2), si
honestis parentibus nata, si ipse sanus ac dives, sic
sapientem inire aUquando niatrimonium , statim in-
tuHt : Hœc autem raro in nuptlis univcrsa concor-
dant. Non est , inquit, ducenda uxor sapienli. Primîun
enim impediri studia philosophiaR, nec posse quem-
quam libris et uxori pariter inservirc... »
(i ) Théophraste, philoiîophe, naturaliste et me'ilecin , naquit à
Erèse dans l'île «le Lesbos Tau 390 avant notre ère , et mourut Pan
286, à Atlicnes, .Igc'tle in4ans, regrettant «.le quitter la vie lorsqu'il
commençait seulement à être sage
(2) Le tex'e <le saint Jérôme porte morala au lieu de moriginata,
mot de- la basse latinité'.
DE HAINAUT. LIVRE III. l\o'b
CHAPITRE XXXIX.
Du philosophe Théophraste.
Vers la même époque florissait le philosophe Théo-
phraste , qui fut le successeur d'Aristote , et dont saint
Jérôme parle en ces termes dans son Traité contre Jo-
vinien, livre i" : « \J Aureolus est un livre que Théo-
phraste composa sur le mariage, et dans lequel il re-
cherche si un homme sage doit se marier. Après avoir
avancé que le mariage peut lui convenir , si la femme
qu'il prend est belle , vertueuse , née de parens hon-
nêtes , et si lui-même est riche et bien portant; il ajoute
aussitck que tous ces avantages se rencontrent rarement
dans le mariage , et conclut en affirmant que le sage ne
doit pas se marier, parce que les chaînes conjugales
nuisent, à l'étude de la philosophie, et que personne ne
peut servir en même tems les lettres et une femme. »
^04 ANNALES
CAPITULUM XL.
De initio regni Asiae.
EUSEBirS.
Olympiadis cxv anno i, temporibus Ptolemsei
anno vi , rcgnum Asiae cœpit. In quo rcgnavit prinius
Antigonus annis xviii; secundus Demetrius xvii,
tandem tradidit semetipsum Scleuco régi Syriie, qui,
destructo regno Asiae, caploque Demetrio, Syriae et
Asiœ pariter imperavit. Hujiis temporibus. Romani
Samnites diutissimè contra se prœbantes , ad extremum
in servitutem redigunt(i).
(i) La guerre des Samnilcs, commence'e en l'an 343 avant J -C,
finit 1 an JQ'j mais elle rcc')n)inenea lucntùt après, et ne fut en-
tièrement terminée qu'en l'année 2^3, pur l'entière soumission Jii
Samnium à la république romaine.
DE HAINALT. LIVRE III. 4^5
CHAPITRE XL.
Du commencement du royaume d'Asie,
EL'SEBE.
Commencement du royaume d'Asie , en la 1" année
de la 115'' olimpiade, et la 6*^ de Ptoléiiiée. Le pre-
mier roi fut Antigène , qui régna dix-huit ans ; le second
fut Démétrius , qui en régna dix-sept, et se livra lui-
même à Séleucus , roi de Sirie. Ce dernier prince dé-
truisit le royaume d'Asie , fit prisonnier Démétrius, et
domina également sur la Sirie et sur l'Asie. De son
tems, les Romains firent une longue guerre aux Sam-
nites, qu'ils finirent par réduire en servitude.
/(06 ANNALES
CAPITULUM XLL
De Papirio.
ACTOR.
Htijus teinporlbus fuit Papirius(i)bellicosus con-
sul romanus, de quo Orosius (2) : « Vicit Papirius
Samnites eo quod vanas augurum et auruspicum con-
jecturas contempserit. Hic Papirius adeo apud Ro-
manos bellicosissimus liabebatur, ut cùm Alexander
Magnus disponerc diceretur ab oriente dcscendens
obtincre viribus Africam , atque indè ad Italiam
transvelii , Romani inter cœteros duces tune in repu-
blicâ vel in expeditione sua optimos, hune praecipuum
fore, qui Alcxandri inipctum siistinere posset nicdi-
tarentur. » De isto loquitur multa Macrobius in Sa-
turnalibus. Orosius (3). Anno post victoriam de
(i) L. Papirius Ciirsor fut cinf[ fois consul et deux fois dictateur;
il obtint plusieurs triomplies sur les Samnites, et effara la liontc
des fourches Caudines. Son premier consulat est de l'au 33o, et son
dernier de Tan 3i3 avant J.-C
(2) Lib. iii , cap. i5.
(3) Lib. iii , cnp. 22. Notre auteur cite textuellement Paul Orose,
et fournit une leçon i\\\i est en quelques endroits préférable à celle
d'Havercamp. Mais lorsqu'il renvoie à Macrobc au sujet de Papi-
rius Cursor, il confond ce dernier avec Papiiius Prrefextatus , le
seul dont, il soit fait menfinn d;ins les Saturnnfps.
DE HAINAUT. LIVRE III. /4O7
CHAPITRE XLI.
De Papiriiis (Cursor^.
L AUTEUR.
Du tems de Sëleucus vécut le consul Papirius , l'un
des plus grands hommes de guerre que Rome ait pro-
duits , et dont parle Orose en ces termes : « Papirius
vainquit les Samnites parce qu'il avait méprisé les
vaines conjectures des augures et des aruspices. Ce Pa-
pirius passait pour un capitaine si consommé, que quand
le bruit courut qu'Alexandre -le -Grand, à son retour
d'Orient , s'apprêtait ù soumettre l'Afrique , pour des-
cendre ensuite en Italie, les Romains le regardaient
comme le plus digne parmi leurs citovens et leurs
généraux , d'être opposé aux entreprises du roi de
Macédoine. » Macrobe dit aussi beaucoup de choses du
même Papirius, dans ses Saturnales. Paul Okose. Lu
an après la victoire des Romains sur les Samnites , lo
consul Curius (1) fit aux Sabins une guerre sanglante,
dans laquelle on tua et on fit prisonniers tant d'en
(1) La guerre des Samnites finit l'an 290 avant notre ère , sous le
premier consulat de Marciis Curius Dentatiis, et les Sabins s'ctunt
révoltes , furent vaincus par ce consul qui triompha ainsi des
Samnites et des Sabins la même année. L'Art de vérifier les dates
nvnnt Vcrc rhrç'tienn''. iv 'yft.
4o8 ANNALES
Samnitibus, gestum est hcllurn cum Sabinis à Curio
consule, ubi qiiot millia lioniiniiin interfecta, quot
capta sint, ipse consul ostendit : qui cùm in senatu
magnitudinem agri sabini acquisiti, et multitudinem
populi capti referre vellet, numerum explicare non
potuit.
CAPITULUM XLII.
De initio regum Syriae et Babylooiae.
VINCENTIUS.
Anno Ptolemœi xiii, Antigoni vu, regnum Syriœ
et Babylonis et superiorum locorum nascitur(i); et
regnavit primusSeleucus Nicanor annis xxxii;secun-
dus Antiochus, qui et Scier, xx; deindô Antioclius,
qui vocabatur Theos, xv; Selcucus Callinicus xx;
Seleucus Ceraunus m; Antiochus Magnus xxxvi;
Scleucus Piiilopator xii; Antiochus Epiphanes xi ;
Antiochus Eupator ii ; Demetrius Sotcr xii; Alexan-
der (Bala) ix , mensibus x (s) ; Demetrius annis m ,
(i) Cette phrase est extraite d'Eiisehe, qui place iri IVre des
Scleiicides sous l'an 1705 d'Abraham, 3ii avant notre ère. On l<i
met ordinairement sous l'an 3i2. , et les manuscrits «le Jacques de
Giiyse permettent cette opinion, en écrivant Anno PloUniœi xii.
(2) Le manuscrit de Saint-Germain ne donne à Alexandre Bala
que neuf mois de règne.
DE HAINATJT. LIVRE III. 4^9
nemis , que le consul ne put trouver de nombre pour
exprimer devant le sénat la quantité de territoire pris
sur les Sabins, et la multitude de leurs captifs.
CHAPITRE XLIL
Du commencement des rois de Sirie et de Babilone.
VINCENT de Beauvais.
Commencement du royaume de Sirie, de Babilone et
des provinces supérieures , l'an 1 2 de Ptolémée, 7 d'An-
tigone. Le premier roi fut Séieucus Nicanor , dont le
règne fut de trente-deux années ; le second, Antiochus-
Soter, qui régna vingt ans ; ensuite Antiochus-le-Dieu ,
qui en régna quinze ; Séleucus-Callinicus qui en régna
vingt; Séleucus-GérauDus qui légna trois ans; Antio-
chus-le-Grand, trente-six ; Séieucus Philopalor, douze;
Antiochus-Epiphanes, onze ; Antiocbus-Eupator, deux;
Démétrius-Soter , douze ; Alexandre Bala , neuf ans et
dix mois ; Démétrius , trois ans ; Antioclius-Sidétès ,
neuf. Ce dernier ayant été tué par le Parthe Arsace ,
Démétrius , son frère , remonta sur le trône , et régna
encore quatre années; après lui Antiochus-Griphus en
régna douze; et, après l'expulsion de Griphus , An-
4 10 ANNALES
Antioclius Sidetes ix; quo inteifecto ab Arsace Par-
tho, iterùm Demctrlus, frator ejiis, regnavit iv;
Antiochus Gryphus xii; Antiochus Cyzicenus, Gry-
plio ejecto , Syriam tenuit ; sed Gryphus , superato
Cyziceno, eamdem recepit: et ità ex successione reg-
naverunt invicem advcrsùs se dimicantes aiinis xviii ;
posteà Philippus annis ii , quo capto à Gabinio ,
regnum Syrife finitum est (i).
CAPITULUM XLIII.
De Seleuco et Ptolemœo Philadelpbo , et Iranslatione sacri canonis.
Ex Chronicis Eiisehii.
PosxPtolemaîum, T.agi fillum, regnavit in jEgypto
Selcucus ( 2 ) in regno Alcxandrinorum , olynipia-
dis cxvi anno iv, et regnavit annis xl ; cui successit
Ptolemaeus Philadolphus, et cœpit anno quintit aeta-
tis cccvii , mundi vero iiimdclxxx (3); olympia-
(i) (Jette date est conforme ati texte trF.iist'bc , selon lequel le
royaume de Siiie cessa d'exister l"au •?. du roi Philippe, 19 ■} d'A-
braham , 9.Î avant notre ère.
(9.) Kofre îuitetir môle ici les rois de Sirie avec cetix d'E;;iple.
Ptolemee Philadelplu; fut successeur immédiat de Ptoleinee , fils
de Lagiis.
'^' An <»S'^ nvant J.-C Ptolemee. (ils de Laj;iis , elait mort
DE HAINAlT. LIVRE III. 4»!
tiochus le Ciziccnien posséda la Sirie ; mais avant été
vaincu par Griphus, celui-ci recouvra l'empire. Ces
deux princes , qui se firent des guerres continuelles,
régnèrent ensemble dix-huit ans. Philippus , qui leur
succéda , n'occupa le trône que deux années , et fut
fait prisonnier par Gabinius. Ainsi finit le royaume
de Sirie.
CHAPITRE XLIII.
De Seleiicus, de Ptolcmf'e Pluladelphe, et de la rersion des livres
saints.
Extrait des chroniques (TEiisèbe.
Â.PRÈS Ptolémée, fils de Lagus , Séleucus monta sur
le trône d'Alexandrie , en la 4'' année de la 116^ olim-
piade , et l'occupa quarante ans. Son successeur fut
Ptolémée Philadelphe, qui commença à régner l'an 307
du cinquième âge, du monde 3680, olimpiade 1:24,
et régna trente huit ans. Il rendit la liberté aux Juifs
d'Egipte , envoya des vases votifs à Eléazar , pontife de
Jérusalem , et fit traduire par soixante-dix interprètes,
de l'hébreu en grec , les divines écritures , qu'il possé-
l'an 284 selon Eusèbc, suivi par Jacques de Giiyse , en sorte que
l'an I de Ptolenie'e Philadelphe est 283. Cependant 31. Saint-Martin
fait mrxirir Ptolf'tnpV , fils <\r T.açii*. le i' «-irtnlii-c ■>?>?,.
4 1 2 ANNALES
de cxxiv, et regnavit annis xxxviii. Hic Judœos qui
in iEgypto erant liberos esse permisit, et vasa Elea-
zaro pontifici Hierosolimarum votiva transmittens ,
divinas scripturas in graecani vocem ex hebraeâ lin-
guâ per Lxx interprètes transferre curavit, quas in
alcxandrinâ bibliotlieca habiiit, quam sibi ex omni
génère litteraturae comparaverat. Hic multos astro-
nomiae libros et canones , tabulas et instrumenta
composuit (i). Anno Ptolemœi Philadelphi iv, regna-
vit decimus Macedonum Sosthenes (a) annis duobus.
JusTmus (3). Intereà Brennus, quo duce portio Gal-
lorum in Graeciam se effuderat, auditâ victoriâ suo-
rum , qui, Belgio duce, Macedones viccrant,.,.
adunatis cl millibus peditum et xv millibus equitum,
in Macedoniam irrupit, agros et villas populans. Cui
cùm occurrisset Sosthenes cum instructo exercitu,
pauci à pluribus , trepidi à valentibus facile victi
sunt. Brennus autem, quas\ jam terrena spolia sor-
derent, aniiniun ad deoram tenipla convertit, scur-
riliterjocatus inquit Locupletcs deos largiriJiominibus
oportere; stat\mque Delphos adit, aurum religioni
praedam offensas deoruni prœferens, quos nullis opi-
bus egcrc , utpotô qui cas liomini])us lai'giri soleant ,
affirmabat. Templum autem Apollinis Delphis posi-
tum est in monte Parnasso , liuic montes undiquè
(i) Ici Jacques de Giiyse conlond le roi d'Egipte avec l'astro-
nome Ploleme'c , qui florissait vers Je milieu du second siècle de
notre ère , sous les Antonins.
(2) Soslhènes est 1(^ douzième roi de Macédoine depuis Alexandre-
le-Grand.
■3) T.ih. \tiv. i-iij', (i et -.
DE HAINAUT. LIVRE Ili. 4*^
dait dans la bibliothèque d'Alexandrie , composée de
toute sorte d'ouvrages de littérature que lui-même avait
rassemblés. Le même prince composa des livres , des ca-
nonsj des tables et des instrumens d'astronomie. En la
4*' année de son règne, Sosthènes, dixième roi de Macé-
doine, monta sur le trône, et régna deux ans. Justin.
Cependant Brennus, chef de cette partie de l'armée des
Gaulois qui s'était répandue dans la Grèce , informé
de la victoire que ses soldats , sous la conduite de Bel-
gius , avaient remportée sur les Macédoniens , fondit
dans la Macédoine à la tête de cent cinquante mille
hommes d'infanterie et quinze mille de cavalerie, ra-
vageant la campagne et lés fermes. Sosthènes marcha
à sa rencontre avec une armée rangée en bataille; mais
le petit nombre céda à la multitude, et la timidité au
courage. Brennus, comme si les dépouilles des hommes
eussent été indignes de lui , convoita les richesses des
temples , disant par raillerie, que les dieux qui étaient
si riches devaient partager avec les hommes. Il prend
aussitôt la route de Delphes , sacrifiant la religion à la
cupidité, le respect des immortels à la soif de l'or, et
affirmant qu'ils n'avaient pas besoin de richesses , eux
qui avaient coutume de les dispenser aux humains. Le
temple dWpollon est bâti sur le mont Parnasse, au
sommet d'un rocher qui domine de toutes parts des
montagnes escarpées. C'est pourquoi le temple et la
ville , dépourvus de remparts , sont défendus par des
précipices, et doivent leurs fortifications à la nature et
non au travail des hommes. Le milieu du rocher s'en-
fonce en forme de théâtre. . . . l'armée des Gaulois
commandée par Brennus , était de soixante-cinq mille
hommes de pié , tandis que celle des Delphiens et de
leurs alliés ne s'élevait qu'à quatre raille combattans.
4^4 AMSALES
concurrentes ineosaxoconsedere; atque ità templuin
et ctvitatem non mûri sed praecipitia , nec manu facta ,
sed naturalia praesidia defendunt. Media saxi rupes
in forma theatri cessit... Igitur Gallorum vulgus in
exercitu Brenui peditum sexaginla quinque millia,
Delphorum sociorumque non nisi quatuor millia
militum erant (i).
CAPITULUM XLIV.
De morte Brenni.
EDSEBIUS (2).
Erant autem in templo multae stature cumquadrigis
solido auro fusœ; ol) qiiam rem cupidi praedae Galli ,
sincrespectu periculorum , in belluni ruebant. Delphi
autem scandentcs Gallos è summo niontis vertice,
partim saxis , part\m armis , obruebant. In hoc autem
partium certamine , repente universorum templorum
antistlles simul et ipsi vatcs , sparsls crinibus, cum
insignibus atque infulis, pavidi vecordesque in pri-
(i; Jacques Je Guyse ne ilonne que des extraits tle Justin, et
encore d'une manière assez inexacte. Celte observation doit aussi
être appliquée au cliapitre suivant.
{1) Ce chapitre est extrait non d'Eusèbe , mais de Justin ,
//. . v\iv, ./,. S.
DE HAINAUT. LIVRE 111. /^lO
OBSERVATON.
Puisque Jacques de Guyse cite ici Justin , il est clair qu'il n'a-
vait pas l'ouvrage de Trogue Pompée qui devait renfermer plus
de détails , et qu'il aurait cité de préférence On sait que Justin n'a
fait qu'abréger Trogue Pompée.
CHAPITRE XLIV
De la mort de Brennus,
EUSEBE.
Le temple renfermait beaucoup de statues avec des
quadriges en or massif, qui enflammaient la cupidité
des Gaulois , et les fesaient courir à la guerre sans
songer aux dangers. Ceux de Delphes, du haut de
leur rocher, accablaient à coup de pierres et de traits
les Gaulois qui s'eflbrcaient de monter à l'escalade.
Mais , tandis que le combat s'opiniatre de part et
d'antre , voici que tout d'un coup les prêtres de chaque
temple et les Pithies elles-mêmes , les cheveux épars ,
leurs mitres en tête et toutes les marques de leur di-
gnité sur leurs personnes , courent en tumulte et
comme saisis d'une fureur divine aux premiers rangs
des corabattans , s'écrient que leur dieu est arrivé ,
4lG ANNALES
mam pugnantium aciem procurruiit; advenisse Deum
clamantes, cumqiie se vidlsse desilientem in templum
per culminls aperta fastigia, et juvenem supra huma-
num moduin insignls pulcliritudinis , coinitesquc ci
duas annatas virgines, ex piopinquis duabus Dianae
Minervœqiie aedibus occurrisse ; et audîsse stridorem
arcûs ac strepitum annorum : proindè ne cunctaren-
tur, diis antcsignanis , liostem cœdere, cœteros mo-
nebant. Quibus vocibus inceusi, omnes certat'im in
praelium prosiliunt. Moxque terrae motu portio mon-
tis abrupta , Gallorum stravit exercitum ; insecuta
deindè tempestas est, quœ grandine et frigore sau-
cios ex vulnei'ibus absumpsit. Dux ipse Brennus,
cùm dolorem vulnerum ferre non posset, pugione
vitam fini vit. Alter ex duobus ducibus qui cum eo
erant , cum deccm miUibus sauciorum Graecia exccs-
sit. Quibus pavidè fugieiitibus nulla sub tectis acta
nox est; nullus sine labore et periculo dies; imbres
assidui et gelu , nix concreta , et famés et lassitudo,
et super hoc maximum pervigiliîe malum , infebcis
bclli reliquias obtrlvit. Nemoque ex tanto exercitu
vel ad memoriam tantœ cladis superfuit. Item Jlsti-
Ni]s(i). Eo tempore, reges orientis sine mercenario
Gallorum exercitu ulla bella gerebant , neque pulsi
regno ad alios quàm ad Gallos confugiebant. Tantus
terror gallici nominis, et armorum invicta félicitas
erat , ut aliter neque majestatem suam tutari , neque
amissam recuperare se posse sine gallica virtutc arbi-
trarcntur. Itaque residui Gallorum qui bellum effu-
([■* L,ib. \\i\ , ciifi. i.
DL HAIXAUT. LITRE III. 41 7
qu'ils l'ont vu descendre dans le temple par l'ouver-
ture du faîte, qu'un jeune homme d'une beauté surna-
turelle leur a apparu accompagné de deux vierges
armées , qui des deux temples voisins de Diane et de
Minerve étaient venues à sa rencontre; qu'ils ont en-
tendu le bruit d'un arc et un fracas d'armes, ils excitent
en même tems tous leurs guerriers à exterminer l'en-
nemi sous les ieux des divinités qui conduisent leurs
drapeaux. Enflammés par ces cris , ils se précipitent
dans la mêlée à l'envi les uns des aiitres. Bientôt une
partie de la montagne , détachée par un tremblement
de terre, écrase l'armée gauloise; ensuite il s'élève
une tempête furieuse qui fait périr les blessés par la
violence de la grêle et du froid. Brennus lui-même, ne
pouvant supporter la douleur de ses blessures , s'ar-
rache la vie d'un coup de poignard. L'un de ses deux
lieutenans se hâte d'abandonner la Grèce, en emme-
nant avec lui dix mille blessés; mais aucun toit ne les
couvre la nuit dans leur fuite et dans leur frayeur, et
le jour ne leur offre que fatigue et dangers de toute
espèce. Les pluies continuelles, la gelée, une neige
épaisse, la faim , la lassitude, et, par-dessus tout, les
veilles , le plus insupporiable des maux , consument
les tristes restes de cette malheureuse armée. De tant
de milliers d hommes , il n'en resta pas un seul pour
rendre témoignage d'une si grande défaite. Jusiiiv. A
cette époque , les rois d'Orient ne fesaient aucune
guerre sans avoir une armée mercenaire de Gaulois à
leurs ordres, et ne se réfi giaient que chez ce peuple,
lorsqu'on les chassait de leurs états. La terreur du nom
gaulois et le bonheur invincible des armes de cette
nation , avaient tellement frappé les rois , qu'ils ne
crevaient pouvoir défendre leur majesté ou la rétablir,
H. 27
4l^ ANNALES
gérant (i), poditiim quindeciin millia, equitum tria
millia, inauxilium Eumenis, Bithviii.T régis, invocati,
regnum cum co , parta victoria, tliviserinit, caiiique
regionem Gallo-Grœciam cognominaverunt.
CAPITULUM XLV,
De orisine Picardonim.
Ex Histondqiiœ Amhianensiiim iiitituldtiir.
PosT Alexandri , régis Maccdoiium , lugubre dis-
pendium, ejusdemque regiio in pluribus regnis con-
diviso, innumerabilibusstipendiariis in aimis exper-
lissiinis tanquàm inanes derelictis, vidantes regem
Alexandrum mortuum, nec haberc palriam in qua
diverti valerent, proposuerunt duceni eligere, et
navium reglaruin depraedari , et sic per maria evagari
piraticè; et ubi fortuna ipsos duccret illùc applicari;
et terram novam conquirere, si valerent. Consilio ha-
N
(i) Il s'agit ici tlfs Gaulois en pcucrai. Ces mots : qui belliim
ejjiigeranl ne se trouvent pas tlans Justin , qui a «lit jxvîceciciunicnt
qne de toute l'armée de Rrenmis qui ait;. qua Delplies , il no resta
pas même un seul homme pour transmettre la menioiie de cet
événement , exagération lies liistoriens grecs.
DE HALNAl T. LIVRE IfJ. 4l9
après sa perte, que par la valeur gauloise. C'est pour-
quoi les Gaulois qui avaient échappé des hazards de la
guerre , au nombre de quinze mille fantassins et trois
mille cavaliers , appelés au secours d'Eumène , roi de
Bithinie, partagèrent son royaume avec lui, comme
ils avaient partagé sa victoire, et nommèrent Gallo-
Grèce le pays qui leur fut cédé.
CHAPITRE XLV.
De l'origioe des Picards.
Histoire d' Amiens.
Après la mort déplorable d'Alexandre, roi de Ma-
cédoine , et le partage de sa monarchie en plusieurs
royaumes , d'innombrables soldats d'une grande ha-
bileté dans la guerre , furent abandonnés comme deve-
nus inutiles. Ceux-ci se voyant privés de leur roi,
n'ayant pas de patrie pour les recevoir, résolurent de
se donner un chef, de s'emparer de la flotte royale et
de faire le métier de pirates , jusqu'à ce que la fortune
leur eût offert une plage pour débarquer, et une nou-
velle terre à conquérir. Après une mûre délibération ,
ils se choisirent pour chef Picon , grand homme de
guerre ; et, sillonnant les mers sur les vaisseaux du roi ,
comme ils en étaient convenus, ils abordèrent enfin aux
côtes de Neustrie , dans les Gaules. Ils s'avancèrent alors
420 ANNALES
bito, elogcnint Piconom , ducem streniiissimnm ; et ,
proLit consiihicraiit, maria suprà rogias navcs sulcaii-
tcs, tandem ad portus iieustrios Galliaium appli-
cuerunt. Qui more regio , proùt vjderant in gestis
Aloxandri, se coaplantcs, et gesta regum acmilitum
dediicentcs, Piconem,eorum ducem, tanquàm si essct
ipse Alexander, vcnerabanturobsequiis. Hi , armorum
virtute solum conquirentes , portus subjugaverunt.
INeusti'ia belvacina edomhtâ , illùc oppidum fortissi-
mum construentcs, Piconium , à ducis eonim no-
minesic denominatum, statuantes, ab codem Galliam
Infei'iorem per multa tempora invaserunt. Multipli-
catis tandem Piconibus , sic ab eoi'um duce denomi-
natis , latiorem plateam fortem tamcn dccreverunt
pro eorum tuitione eligere;qui intergurgites cujus-
dam dispersae ripariœ planltiem latam reperientes ,
proposuerunt iliùc, contra omnes observantes , oppi-
dum cum mansionibus divcrsis ac fortabtiis stabibre.
Qui gurgitcs et alveolos et bttora diversa insimul
ambiantes, unum mansum, seu oppidum capacitatis
latum insimul congregatum fbrtificantes, Ambianis
iiuncuparunt. Qui Piconii, postmodùm multiplican-
tes , contra Gallos primo, et postmodùm contra Ro-
manos , majorem partem Galbœ Inferioris suis di-
tionibus subjugarunt. Qu.ne pars Gallinc à Piconiis
postmodùm Picardia noscitur denominari.
DE IlAl.XALT. LIVRE lll. f['2l
dans un appareil royal, en imitant ce qu'ils avaient vu
sous Alexandre ; et , figurant un corps de soldats com-
mandés par leur roi, ils entourèrent leur chef Picon
d'autant de respects que s'il eût été lui-même le guerrier
macédonien. La force de leurs armes les eut bientôt
rendus maîtres de la province et de ses ports. Après
avoir soumis la partie de la Neustrie qui forme le Beau-
voisis , ils y fondèrent une petite ville très-forte , qu'ils
appelèrent Piconiiim {\) , du nom de leur général, et
d'où ils firent pendant long-lems, des incursions dans
la Gaule inférieure. Lorsque les habitans de Plconiiim
se furent multipliés , ils résolurent de choisir pour leur
défense une place forte beaucoup plus étendue, et
trouvèrent, entre les sinuosités d'une rivière divisée en
plusieurs branches, une vaste plaine, dans laquelle ils
formèrent le dessein de bâtir une forteresse avec des
maisons et des châteaux , pour se mettre à l'abri des
attaques de leurs ennemis. Enfermant donc dans une
même enceinte différens détours de la rivière, avec
les ruisseaux et les rives qu'elle comprenait, ils con-
struisirent une grande ville à laquelle ils donnèrent le
nom d'Amiens. Le nombre des habitans s'étaut beau-
coup accru dans la suite , ils enlevèrent aux Gaulois
d'abord , et ensuite aux Romains , la plus grande partie
de la Gaule inférieure, qu'ils réduisirent sous leur do-
mination , et à laquelle on donna plus tard, à cause
d'eux , le nom de Picardie.
(i) Pe(jui|^ni.
423 AN>ALES
CAPITULUM XLVI.
De Arcpsilii Thebano.
EUSEBIUS.
Anno ab ui'be condita CDLxxxvir,olynipiadis cxxv
anno m (i), qui fuit annus vu Philadelphi, Polemo
philosophas moritur. Post quem Arcesilas et Crates
Athenis clari habentur (2 j ; de quibus Augustinus ,
XI libro de Civitatc Dei[6\ et Seneca in 11 Xxhvo de
Bcnejicus (4), et libro i Epislolarum , cpistola ix (5),
proloqultur. Actor. In Chrunicis enim ponitur Ar-
cesilas Thebanus fuisse natione , de quo legitur quôtî
magiuiin pondus auri in mare projecerat, dicens :
« Abite , pessimœ divitiae ; ego vos mergam , ne ego
(i) Ail 277 avant J.-(]. Il y a erreur clans le compte des années
de la fondation de Roniej il lant lire {77 an lieu «le J87 : le ma-
nuscrit de Saint-Germain porte 48o.
(2) On trouvera dans les Vies des Philosophes par Diogènes
Laërcc, celles de Polc'nion , successeur de Xe'nocrates, de (!ralcs >
successeur de Polemon , et d'Arccsilas , fondateur de la moyenne
acadc'mie.
(3) Ce n'est point au livie xi cpie saint Auj^nstin jiarle d'Arce-
silas et de C atès, cl nous ne le trouvons point i:illeurs.
(4) Cap. ^l^.
'5 riVist T.itirç 10.
DE HAINAUT. LIVRE III. 4^5
CHAPITRE XLYI.
Du Thebain Arcësilas.
ELSEBE.
Ex l'an 487 de la fondation de Rome , troisième
année de la 125^ olimpiade, et septième de Plolëmée
Philadelphe , le philosophe Poléinon termine ses jours.
Après lui, fleurirent ù Athènes Arcésilas et Cratès,
dont il est question dans saint Augustin , livre xi de la
Cité de Dieu , et dans Sénèque, au second livredes bien-
faits, et au premier livre de ses lettres, tpître neu-
vième. L'auteur. On lit dans les chroniques qu'Arcé-
silas était Thébaiii de nation. Ce fut ce philosophe qui
jeta à la mer un énorme poids d'argent, en disant:
« Loin de moi, pernicieuses richesses, je vous englou-
tirai, plutôt que de me laisser engloutir par vous. » 11
est essenliel de rapporter ici ce qu'Orose place en cette
même année. «En l'an 487 de Rome, dit-il, on vit
sur la terre quantité de prodiges. Du sang parut couler
de la terre, et du lait du ciel : car, en plusieurs endroits,
on vit du sang jaillir dc-s fontaines, et du lait tomber
des nuées par gouttes , en forme de pluie , et arroser le
globe. »
\'l\ ANNALES
inergar à vobis. « Sciendum quod Orosius de isto
anno dicit : « Anno ab urbe conditâ cdlxxxvii (i), in
terra visa sunt multa prodigia; sanguis enim c terra
lac visum est maiiare de cœlo ; nam et pliirimis locis
scaturiens è fontibus cruor fluxit, et de nubibus gut-
tatiiri in speciem pluviœ, lacté demisso viris (2), ut
ipsis visum est , terram imbres irrigaverunt. »
CAPTTULUM XVLII
De sect!» stoicornm,
EOSEBIUS.
Anno Pbiladelphi xiv, olympiadis cxxvii anno i (3),
Zeno stoicus moritur ; post queni Cleantlies floruit.
AcTOR. De qiiibus Augustlnus ait Zenonem et Cris-
piim fuisse principes stoicorum ; et Hieronymus in
suo dialogo contra pelagianos, récitât opinlones eo-
rum. Dicit fortem posse omnein perturbationeni era-
dicari et cxstirpari de mentibus hominuni. Hoc idem
seuserunt vetcres academici. Peripatetici casdem pcr-
turbalioncs dicunt frangi , régi et moderari , et quasi
(i) L'i'dition d'Havcrcamp écrit ^80, l. iv, c. 5.
(2) LVdilioTi précitée porte lacte dtniisso, diri , ut etc.
V An 9'i av.nnt .T.-(],
DE UAINAUT. LIVRE III. 4^5
OBSERVATION.
Les pluies de sang ont ete' explique'es d'abord par Peiresc en
160H, ensiiile par Jean Reckniann dans sa dissertation de protliifiis
Sfrni{ Ce phénomène est produit par une grande quantité' de pa-
pillons ((iii répandent des gouttes d'un suc roiigc sur les endroits
où ils ont passe'.
CHAPITRE XL VII.
De la secte des stoïciens.
EUSEBE.
En l'an quatorze de Philadelphe , première année de
la 127^ olimpiacle, Zenon le stoïcien finit ses jours.
Après lui, fleurit Cléanthe. L' Auteur. Saint Augustin
dit que Zenon et Crispus ont été les chefs des stoïciens;
et saint Jérôme , dans son dialogue contre les péla-
giens , rapporte leurs diverses opinions. Selon ces phi-
losophes, l'homme peut déraciner et extirper de son
cœur toute agitation violente. C'est aussi l'opinion des
anciens académiciens. Les péripaléticiens prétendent
que toute perturbation de l'esprit , peut être rompue,
gouvernée , modérée et contenue comme des chevaux
sans frein avec des mors inflexibles. Nous trouvons plu-
sieurs de leurs sentences exposées dans les Tusculanes
de Cicéron et les Stromales d'Origène ; le livre des
426 ANNALES
infrenes cquos quibusdam lupatis cocrceri. Quorum
sententias ponit Tullius in Tiisculanis Quœstionibus,
et Origenes in Stromatibus. Liber autem Ciceronis de
Paradoxis de scntentiis stoicorum totus contextus
est. Item stoicorum sunt illa quœ ponit Scncca in li-
bre de Benejiciis ; de sectâ eorum et opinionibus et
sententiis etiàm loquitur Augustinus libro xiii de Ci-
vitnte Dei, Hieronymus contra Pelagianos , Augusti-
nus ad Hieronymum.
CAPITULUM XLVIII.
De primo bcllo c.onlrù Carihagincnses.
Anno vero sequcnti , fuit pi'imum bclluni Carllia-
ginense, do quo Orosius : « Cornolio Asina , Caio
Duilio consulibus (i), cùm Hanniiial senior oram Ita-
liae maritimam, instructâ septuaginta navium classe,
vastai'et , Romani cl ipsi classom fabricari atqiic iii-
slrui praecopcrunt ; quod Duilius consul cclciiiis
implevit; nam intrà \.\ dics, qnum arbores cœsae
erant , cxxx navium classis deducta in ancboris ste-
tit. Cornélius Asina, consul altcr, cuni xvi navibiis
Lipariam insulam petit, ibique ab Ilannibale, quasi
r \n '^fii :i\ .'Mit ,1. c
DE HAlNAtï. LIVRi: III. 4^7
Paradoxes de ce premier auteur est un tissu des
maximes des stoïciens ; Sénèque les a adoptées dans
son livre des Bienfaits ; et nous trouvons plusieurs dé-
tails sur cette secte philosophique, sur ses opinions et
sa morale , dans le livre xiii de la Cité de Dieu de saint
Augustin, dans le livre de saint Jérôme contre les pé-
lagiens , et dans les lettres de saint Augustin à saint Jé-
rôme.
«•%'«/«<«.'«/%^^f^.%,^-«
CHAPITRE XLVIII.
De la première guerre punique.
Dans le cours de l'année suivante éclata la première
guerre punique. «Sous le consulat de Cornélius Asina
et Caïus Duilius, dit Orose, lorsqu'Annibal l'ancien
ravageait les côtes de l'Italie avec une flotte de soixante-
dix vaisseaux, les Romains en fiient construire et
équiper une, avec laquelle le consul Duilius eut
promtement appareillé; car soixante jours seulement
après que les arbres eurent été coupés , il eut cent
trente vaisseaux à l'ancre. Cornélius Asina , l'autre
consul, gagna l'ile de Lipari; mais Annibal l'ayant
appelé à une entrevue, comme pour traiter de la paix ,
le retint prisonnier, et le fit mourir dans les fers , avec
une perfidie digne d'un Carthaginois. A cette nouvelle,
le consul Duilius s'avance avec trente vaisseaux contre
Annibal , hii livre im combat sur mer, détruit la çalèrc
428 ANNALES
ad colloquiuin pacis evocatus , pudicà fraude captus,
alque in vinculis necatus est. Quod ut Dudius , aller
consul , audivit, cum xxx navibus adversùs Hanniba-
lem profcctus est. Commisso navali prcnello , Haundial,
amissa navi quiî veliebaLur, scaphà subductus aufu-
git ; XXXI naves ejus captae, xiri mersae, tria millia
hominum occisa, septeni millia capta refei'untur. »
CAPITULUM XLIX.
De flnali rebcllione Saxoniim contra Belgos et Tungrinos.
Ex Gestis Saxonum.
Saxones diutinâ pace potiti post aliquorum Brito-
nuin transmigrationem, Belgensibuspluribus inter eos
connnorantibus interemptis , régi belgensi Leoni ter-
tii atque ïungrinoi'um rebellantes, caput régis Saxo-
num de génère Belgoruin civilati Tungroruin at([ue
Belgis , transiniserunt, nuiiquàni cum eisdem dein-
ceps pacificaturi. Belgcnsibus atque Tungrensibus ad
Saxones invadendum disj)ositis, timonî tamen Pico-
nioruni atque Ilomanoium , quibus undique circum-
cingcbantur, pro temporc (juieverunt in [)ropriis
civitatibus, sed invité. Tandem , post recessum Ko-
ni;inf>nnii , IVlgensos cum IViconils freui;as dr(^<Mn an-
DE IIAINAIÏ. LIVRE 111, 4^9
qu'il montait, et le force à s'enfuir sur une chaloupe.
Les Romains s'emparèrent de trente et un navires , en
coulèrent treize à fond , tuèrent trois mille hommes ,
et firent sept mille prisonniers.
CHAPITRE XLIX.
De la ilernicre rébellion des Saxons contre les Belges et les Trëvirois.
Gestes des Saxons.
Les Saxons, qui étaient restés lon^-tems paisibles,
tuèrent plusieurs Bele^es qui séjournaient parmi eux
depuis la transmigration de quelques Bretons , se révol-
tèrent contre Léon 111 , roi desBelges , et contre les Ton-
griens, et envoyèrent à Belgis et à Tongres la tête de
leur roi , qui était Belge de nation , afin de se mettre
dans l'impossibilité de faire la paix. Les Belges et les
Tongriens, quoique prêts à attaquer les Saxons, restè-
rent cependant quelque tems en repos, quoique malgré
eux , dans leurs villes, par crainte des Piconiens et des
Romains, dont ils étaient entourés de tous côtés.
Enfin, après le départ de ces derniers , les Belges font
avec les Piconiens une trêve de dix ans ; et, prenant ,
noruzn confirmantes , ciim apparatu foroci versus
Saxoniaiii itor arripientes, Rlienum fliivium trans-
ieriiat. Saxones adventum eorum praesentientes, in
mcdio Sucvife Bolgos obviantes, durissiniè pugnave-
runt; quinquectenim dicbus bciluni perduravit. Saxo-
nes tand. m postsuorum perditioneni gravissimani, se
retrahentes, obtinueriint Belgi atque Tungrini cam-
pnm ; sed iindè prosequerentur adversarios non ha-
bentcs , morte suorinn cognitâ , succuisum Tungrim
et Treberim mandaverunt. His diebus , Romani strage
Belgensium atque Tungrinorum audita, revertentes ,
ad Tungrinos iterùm invadendos se coaptaverunt ;
animadvertentes Tungrini atque Belgi trans Rhenum
existentes, proiit potucrunt, rcpatriantes, Romanos
anticipaverunt , et Tungri imminentes Romanis fero-
citer resisterunt, ipsos à territorio effugantes.
CAPITULUM L.
De Antiocho et Philadelpho.
EUSEBIUS.
Olympiade cxxxi, anno Pbiladelphi xxix (i), Ju-
daeoium pontifex, Onias, lilius Simonis, clarus babe-
f l^ An tjS avant J.-(J.
r "•
DE HAINALT. LIVRE III. 4 j 1
avec un appareil terrible le chemin de la Saxe , passent
bientôt le Rhin. Leurs ennemis, préparés à les recevoir,
marchent à leur rencontre jusqu'au milieu de la Souabe ,
et leur livrent une bataille qui dura cinq jours. Enfin
les Saxons, ayant essuyé des pertes énormes, sont
obligés de se retirer en laissant le champ de bataille
aux Belges et aux Tongriens. Mais ceux-ci , affaiblis
par le combat, où ils avaient perdu beaucoup de
monde , ne se trouvèrent pas la force de poursuivre
un ennemi à moitié vaincu , et demandèrent du se-
cours aux Ailles de Tongres et de Trêves. Cependant
les Romains avant appris les pertes des Belges et des
Tongriens , revinrent sur leurs pas , et se disposèrent à
attaquer de nouveau ceux de la cité de Tongres. Les
Belges et les Tongriens qui avaient passé le Rhin se
hâtèrent, à cette nouvelle, de regagner leur pays, et
y devancèrent les Romains. D'un autre côté la ville de
Tongres opposa à l'ennemi une telle résistance , qu'il
fut obligé d'abandonner sou territoire.
CHAPITRE L.
D'Antiochus et de Philadelphe.
ELSÈBE.
En la première année de la ISl*" olimpiade , vingt-
quatrième année de Ptoléuiée-Philadelphe, florissait le
pontife Onias , fils de Simon. 11 irrita le roi Ptolémée
452 ANNALES
tur. Qui consueta régi Ptolemaeo tributa non red-
dens,acl iram eum impulit. Eodcm. tempore regnabat
in Syriâ Antiochus, qui vocatur Theos, et regnavit
annis xv. Hieronymus, stiper Danielem (i). «Hic
adversiis Philadclphuin bella gessit quàm plurima ,
totisque Babylonis et orientis viribus contra eum di-
micavit. Volens autem Ptolemœus Philadelphus , post
multos annos , molestuin finire certamen , fiUam
suam , noinine Berenicen, Antiocho uxorem dcdit,
qui de priore uxore, noniine Laodice, habuit duos
filios, Seleucum, qui cognominatus est Callinicus, et
alterum Antiocbum; duxitque eam usquè ad Pelu-
sium , et infinita auri et argenti millia , dotis noinine ,
dédit. » Item Hieronymus, super Danielem (2). Phi-
ladelphus (3) apud Graecos habitus est orator et
philosophus; tantaeque potentiae fuisse narratur , ut
Ptolemaeum patrein vinceret. Narrant historiae ha-
buisse eum peditum daconta millia, equitum viginti
millia, curruum duo millia, et clephantes, quos pri-
nius eduxit ex Ethiopiâ , quadringentos. Naves longas
mille quingentas, alias, ad cibaria militum dopor-
tanda , mille ; auri quoque et argenti grande pondus :
ità ut de iEgypto, per singulos annos, quatuordecim
millia et octingenta talenta acceperit argenti et fru-
(i) Cap. 1 1.
(a) Ihid.
(3) Au lieu de Philadelphus il faut lire Demetrius Pha'ereiis ;
mais le dernier membre de la |)luase se rappcirte à Philadeiphe.
Le peu d attention que ni)tre auteur a mis à extraire ce passage de
saint Jc'rômc, se prouve [:ar nos deux manuscrits, qui présentent
ici la même confusion.
DE HAINAUT. LIVRE III. 433
en lui refusant les tributs accoutumés. Dans le même
tems régnait, en Sirie, Antiochus-le-Dieu, qui occupa
le trône quinze ans. Saint Jérôme, sur Daniel. «Ce
prince fit des guerres fréquentes à Philadelphe , et le
combattit avec toutes les forces de lîabilone et de l'O-
rient. Apres de longues années , Ptoléméc-Philadelphe ,
voulant mettre un terme a cette lutte sanglante, donna
en inttriage Bérénice, sa fille, à Anliochus, qui avait
eu de Laodice , sa première femme, Séleucus, sur-
nommé Callinicus, et un autre fds nommé Antiochus.
11 conduisit sa fille jusqu'à Féluse , et lui donna en dot
des milliers pesant d'or et d'argent. » Le même saint Jé-
rôme , sur Daniel. «Démélrius de Plialère se distingua
chez les Grecs parnù les orateurs et les philosophes.
Philadelphe fut si puissant qu'il surpassa Ptolémée-
Soler, son père. Des histoires rapportent qu'il avait
une armée de deux cent mille fantassins, de vingt
mille che\aux, de deux mille chars et de quatre cens
éléphans, qu'il tira le premier de l'Ethiopie. 11 pos-
sédait en outre quinze cens vaisseaux longs , mille
bàtimens destinés à transporter les vivres des soldats,
un poids énorme d'or et d'argent ; en effet , l'Égipte
lui rapportait, chaque année, quatorze mille huit cens
talens d'argent , et quinze cent mille arlabes de blé,
(cette mesure contenant trois boisseaux et un tiers.)
Ei;sÈBE, dans ses Chroniques. En la dernière année du
règne de Philadelphe, deuxième année de la 133^ olim-
piade , un incendie consuma , à Rome , le temple de
"N'esta.
II. 28
434 ANNALES
menti artabas (quae mensura très modios et tertiam
partem modii continet ) qulnquies et decies cen-
tena millia.wEusEBius in Clironicis. AnnoPhiladelplii
ultimo, olympiadis cxxxiii, anno ii (i), Romae tem-
plum Vestae incensum est.
CAPITULUM LI.
De Ptolemœo Evergete.
EUSEBIUS.
MoRTUO Ptolemaeo Pliiladelplio , regnavit Ptole-
maeusEvergetes, qui cœpit anno qui litre œtatiscccxLv,
miindi vero iiimdccxviii, olynipiadis cxxxiii, an-
no m (2), et regnavit annis xxvi. Comestor. Hic
frater Ptoleniœi Philadelphi (3) ab vEgyptiis Evergetes
dictus est, quod revectionem sonat; quia post vasta-
tam Syriam et Ciliciain et partem Asiai, intcr innu-
mera spolia qurc cœpit , etiàm Dcos eorum quos Cam-
byses inPersas transvexerat, revexit. Eusebius. Anno
(i) An i\Q avant J.-C. JJyirt de vérifier les dates place cet eve'-
nement en l'année 24' — 24*^ > sous les consuls A. IManlius Torqualus
Atticus, et Q. Liitatius Ccrco.
{■i) Toutes ces dates su rapportent à Tan 24'' avant J.-C.
(3) Ptolt'me'e-Évergète est fils, et non frère, de Ploleméc-Pliila-
delphe.
DE HAINAUT. LIVRE III. ^î^
CHAPITRE LI,
De Ptolemee-Evergète.
EUSEBE.
Après la mort de Philadelphe , Ptolëmée-É verge te
lui succéda II commença à régner en l'an 345 du
cinquième âge, 3718 du monde, troisième année de
la 133* olimpiade, et régna vingt-six. ans. Comestor.
Ce prince, fds de Ptolcmée-Philadelphe, fut appelé
par les Egiptiens Evergète (nom qui signifie Yaction
de rapporter)[\) , parce qu'après avoir ravagé la Sirie, la
Cilicieetune partie de l'A-sie (2), il rapporta en Egipte,
parmi les dépouilles immenses qu'il fit, les simulacres
des dieux, que Cambises avait transportés en Perse.
EusÈBE. En l'an premier de ce Ptolémée, florissait
Simon , fils d'Onias et pontife des Juifs , sous lequel
Jésus, fils de Sirach, composa le livre de la sagesse ^
(i) Evergtte signifie bienfaiteur.
(a) Au-delà de l'Euphratc.
436 ANNALES
hujus Ptoleniœi primo, Judœorum pontifex, Simon,
Oniœfilius, clarus habctur; sub quo Jésus, filius
Sirach, sapientiae libriun componens (i), etiàm Si-
monis in eo facit mentioncm ; qui quiclem liber inter
libros canonis sacri coniputatur.
GAPITULUM LU.
De Antigono , Macedonum rege.
EUSEBIUS.
Anno Ptolcmaei xiv , olympiadis cxxxvi anno iv (2),
rrgnavit apud Maccdones Antigonus annis xv. Se-
NECA, in libro 11, cap. xvii de Beneficiis. Ab Anti-
gono, inquit, cynicus petiit talentum. Respondit
Antigonus plus esse quàm cynicus pctere deberet.
Rcpulsus petiit denarium; respondit minus esse quàm
deccret dure. Turpissima cortè luijus modi cavillatio:
invenit quomodo noutruni darot. Elsebils. Anno
Ptolemaei xix, olympiadis cxxxvii anno 11 (3), qua-
(i) C'est l'Z.'tc/eiifls/i<7Me, livre que les Grecs nomment XlAvl^tTOf.
(2) An 282 av. J.-C.
(5) Il faut lire olympiatlis cxxxviii, anno \, si Ton vont que
celte date s'accorde avec celle de la dix-neuvième année du règne
de k'tole'mée Évergète , qui i-c'pond, suivant Eusèbe , à l'an 237
DE HAINAL'T. LIVRE III. 4^7
(l'Ecclésiastique), qui est placé au nombre des livres
canoniques, et dans lequel il est fait mention de ce
même Simon.
CHAPITRE LU.
D'Antigone , roi de Macédoine.
EUSEBE.
En l'an quatorze de Ptolémée-É vergeté , quatrième
année de la l^G*" olimpiade , Anligone monta sur le
trône de Macédoine qu'il occupa pendant quinze ans.
Sénèqle, livre n des bienfaits. Un philosophe cinique
demanda un jour un talent à Antigone , le prince ré-
pondit que c'était plus qu'un cinique ne devait de*
mander; le philosophe, se voyant refusé, demanda un
denier; mais Antigone lui dit que c'était trop peu pour
un roi; et , par cet artifice honteux , trouva moyen de
n'accorder rien de ce qu'on lui demandait. Elsèbe. En
l'an dix-neuf de Plolémée-Evergète , seconde année de
avant J.-C. Mais suivant l'Art de veriGer les dates, cette défaite
des Gaulois à la bataille de Télainon , par les consuls AEmilius
Papus et C. Atilius Régulus , eut lieu dans l'année 225 — aa4
avant J.-C
4:5$ ANNALES
dragiuta ferme niillia Gallorinn à Romanis cœsa sunt.
Actor. Quando autem aut ubi vel à quihus Romanis
ista strages Gallorum exécuta fuerit adhùc non rc-
peri (i).
CAPITULUM LUI.
De secundo hello punico.
viNCENTius, lihro VI.
Anno Ptolemcei xxiii, videlicet ab iirbe con-
ditâ Dxxx, olympiadis cxxxix anno i (2), bclluni pti-
nicuni secundum surrexit. Hoc bellum multa piodi-
gia prgecesserunt, de quibus plura ponit Orosiiis atque
Valerius; de quibus Augustinus, libio m, de Civi^
tate Dei{?t). Omitto, inquit, boves loculos, infantes
(1) A défaut de Polibe, de Pline, d'Eufrope, des Fastes capi-
tolins, qui semldent lui avoir ctc inconnus, Jac<|ues de Gnyse
aurait pu consulter Orosc, l'un de ses auteurs favi.ris; il y aurait
trouve (l.iv, c. i3 les rensei}»ncmens qu'il desirait , et qu'il a
cherches en vain dans les chr(ini(|ueurs ilu moyen .Ige.
(a Si nous adoptons la <]ale catonienne tic la fonilaf ion de Home,
les h' is ilal«-s ici (lonni'e> par noire auteur se rapportent à l'an iii
avant .1 -<; Mais l'<'p que «lu romm<'iic<m'nt «le la sccomlc guerre
piini'pii- «l'ii' ê'n- r cide.' à l'an ïi8 '217 avant. J.-(J. Vf<y. V /Irt
de i< ■//<" / 'f-s (Iiitcu.
{i) Cap. 3i.
DE HAIXAUT. LIVRE III. 4%
la 137* olimpiade, environ quarante raille Gaulois
furent tués par les Romains. L'Auteur. En quel tems
et en quel lieu , et par quelle armée romaine ce mas-
sacre des Gaulois a-t-il été exécuté? c'est ce que je n'ai
encore trouvé nulle part.
CHAPITRE LUI.
De la seconde guerre punique.
"Vincent de Beauvais , livre vi.
En l'an vingt-trois d'Évergète , 530 de Rome, pre-
mier de la 1 39* olimpiade, commença la seconde guerre
punique. Elle avait été précédée d'un grand nombre
de prodiges , dont plusieurs sont rapportés par Orose
et Maxime. Saint Augustin en fait mention dans son
troisième livre de la Cité de Dieu. « J'omets , dit-il , que
des bœufs ont parlé, que des enfans ont prononcé
quelques mots dans le ventre cTg leurs mères, que des
serpens ont volé, que des femmes sont devenues
hommes, et des poules coqs »
440 ANNAIES
noriflùni natos de utcris niatrum quaeclam vorba cla-
masse, volasse serpentes , feminasct gallinas in mas-
culinum sexiim fuisse conversas, etc.
CAPITULUM LIV.
De magoo colo!>so Rhodiensi.
EUSEBIUS.
Anno Ptolemnei xxv, olympiadis cxxxix anno m (i)
Caria et Rliodus ità terrœ motii concussre sunt, iit
<:olossiis magnus riierit. Vincentius, lihro vi. Colos-
sus illc rhodius inter septem inundi mirabilia ter-
tiinn ponitur. Fuit autem imago aîrea centum vigiiiti
et sex peduin fusilis. Miruni cnim valdè est quomodo
tàni ininiensa moles fuiidi potuit, vel erigi aut stare;
quindecim pcdibus allior fuit quàm colossis Romœ.
Eodem anno, fuit annus ub urbecondità dxxxiii (2),
de quo Orosius (3).Eodein anno, Hannibal, Pœnorum
imperator, Saguntum, florentissimam civitatem His-
(i) An 231 av. J.-C.
(2) Fn suivant le calcul de Varron.
(3) LVdition d'Havcrcamp conii»te cette même année la 534' Je
Rome. Oiose, /. iv, c. i4.
DE HATXAUT. LIVRE III. 44»
CHAPITRE LIV.
Du grand colosse de Rhodes.
EUSEBE.
En l'an vingt-cinq d'Évergète , troisième de la
1 39* olimpiade , la Carie et l'île de Rhodes ressentirent
lin tremblement de terre si violent, que le grand co-
losse en fut renversé. Vi>CE>ra'tf Bcaiiiais , livre vi. Le
colosse de Rhodes occupait le troisième rang parmi les
sept merveilles du monde. Celait une statue d'airain
coulé, haute de cent vingt-six pies. C'est véritable-
ment une chose merveilleuse qu'une masse aussi énorme
ait pu être fondue, érigée et fixée debout : elle surpas-
sait en effet de quinze pies le colosse de Rome(l). Le
renversement de cette statue arriva l'an de Rome 033.
« En cette année , dit Orose , Annibal , général des
Carthaginois, assiégea Sagonte, l'une des villes les
(i) Rome comptait dans son enceinte sept colosses principaux ,
savoir : deux d'Apollon, deux de Jupiter, un de INc'ron , un de
Domiticn, et un du Solfil. Je ne sais du(|uel Vincent de Rcau-
vais a voulu parler. Le colosse de Rliodos avait 70 coudées da haut j
c-\'i\ d'Apr.Ilnn à Rom'" Ji''>n avait fpie 3o.
442 ANNALES
panine, obsedit, et famé oxciuciatam, octavo mcnse,
delevit. De quâ tractât Augiistinus , libro m de Cm-
taie Dei (i).
CAPITULUM LV.
De Ptolemîeo Philopatre, rcge AEgypti.
EUSEBIUS.
MoRTUO Ptolemaeo Evergete , regnavit in yEgypto
Ptolemaeus Philopator. Cœpit anno quintae .Tta-
tis ccci.xx, iniuir.li vero ii[,mdcc\i.iii , olympia-
dis cxxxix anno iv (2), et regnavit aiinis xvii. Ea (jua;
in secundo libro Macliabaeoriiin scripta sunt snb lioc
principe gesta refcruntnr, Actor. Isto tcmpore, Ro-
mani ab ilannibale, Pœnorum imperatore, ter victi
leguntur. Orosuis. Hoc itaquc temporc, Publio Cor-
nelio Scipione et Til)crio Sempronio Longo consub-
bus , Hannibal Pyrenîcos montes transgi"essus in-
ter feroclssimas GaHiarum gentes ferro viam ape-
ruit , et nono demùm die à Pyrenœo ad Alpes perve-
nit (3), montanosque Gallos repellantes cum ascensu
(1 j Cap. -yo.
(i) Toutes ces dates se rapportent :i Tan 520 avant J.-(^.
['S\ Voyrz la rlisrrtation di' M. )<■ ;nar((iii< de Forlia sur le pas-
sage 'lu Khùn»- *"l «II"; Mp»^». par AmMl>al.
DE HAIXAUT. LIVRE III. 44^
plus florissantes d'Espagne, la prit par famine, au bout
de huit mois, et la délruisit. » Saint Augustin parle
de celle ville, au livre m de la Cité de Dieu.
CHAPITRE LV.
De Ptolemëe-Philopator , roi d'Égipte.
EUSEBE.
Ptolémee-Évergète étant mort , Ptolémée-Philopator
monta sur le trône d'Égiplc. la 370' année du cin-
quiemeàge, 3743 du momie, quairièmedela 1 39* oiiui-
piade, et régna dix-sept ans. Ce fut sous le règne de
ce prince qu'eurent lieu les événeuiens qui sont rap-
portés dans le second livre des Macliabées. L'Ai tki-r.
Vers ce teuis-là, les Romains furent vaincus trois fois
par Annibal, général des Carthaginois. Okose. Sous le
consulat de Publius Cornélius Scipion et de Tibérius
Sempronius Longus , Annibal franchit les monts Pi-
rénées, s'ouvrant avec les armes un passage à travers
les nations les plus redoutables des Gaules , parvint au
bout de neuf jours démarche au pie des Alpes; puis
repoussant les Gaulois de ces montagnes qui voulaient
l'arréler, il se fraya avec le fer et le feu un chemin
au milieu de rochers jusque-là impraticables. S'étant
reposé quatre jours , il arriva le cinquième , après d«
444 ANNALES
superans (i), invias rnpcs igné ferroquc rescindit.
Quatiicluiim ibi commoratus, quitito domiini rlio,
cum maximo labore ad plana Italiœ pervenit. Fuisse
tune exercituni ejus in centum et viginti millibus
equitum difïiniunt (2). Hannibali autem Italiam in-
gresso Scipio primus occurrit, comniissoque praelio
apud Ticinum, ipse graviter vulneratus, per Scipio-
nem filium admodùm praetextatum , qui post Africa-
nus cognominatus est, ab ipsâ morte liberatus evasit.
Caesus est ibi omnis penè exercitus romanus. Pugna-
tum est deindè cum eodem consule ad fluvium
Trebiam, iterùmque Romani pari clade superati
sunt. Sempronius consul , cognito coUegae casu , à
Siciliâ cum exercitu rediit. Qui similiter apud eum-
dem fluvium congressus , amisso exercitu , penè so-
lus evasit. Ibi tamen Hannibal sauciatus est.
(i^l Ail li^Mi de ces mots: monlnnosque Gal/o.i , etc., l'editinn
d'Haverramp écrit après le mot fien'enil : iil/i, tt'um montanos
Gdll.os, repelleve ab tidsce/mit où/iittntes , htllo iuperat, a'qiit:
ini'ias , etc.
(2 I.a mf'me ddition offic en cet endroit une meilleure leçon,
que voici : fouine Itinc ej-i-rritinn t-jm centum mifliiim pedilum et
viginti mitlium equitum iltjin uni.
DE ITAINAUT. LIVRE III. 44 ^
grandes fatigues , clans les plaines de l'Italie. Son
armée était , au rapport des historiens , composée de
cent mille hommes d'infanterie et vingt mille cavaliers.
Lorsqu'il fut entré en Italie , Scipion marcha le premier
à sa rencontre , et fut grièvement blessé au combat du
Tésin ; il ne dut son salut qu'à son fils Scipion qui n'a-
vait pas encore quitté la prétexte , et qui dans la suite
fut surnomméTAfricain. L'armée romaine périt presque
tout entière dans ce combat, et, quelque tems après,
les Romains essuyèrent une pareille défaite sous le
même consul, près de la rivière de laTrébie. Le con-
sul Sempronius, ayant appris le malheur de son col-
lègue , revint de Sicile avec ses troupes, et livra ba-
taille à x\nnibal sur la même rivière ; mais il y perdit
son armée , et échappa presque seul du combat , dans
lequel néanmoins le général carthaginois fut blessé (1).
(i Orose semble parler de deux actions sur la Tre'bie, entre les
Carthaginois et les Romains, tandis ({u'il n'y eut -véritablement
qu'ime seule bataille livrée sur les bonis de cette rivière, après
que Sempronius eut j'ûnt ses troupes à celles de Scipion , son
collègiu; On p'iuira consulter sur le passage du Rbùne et des
Alpes par Annibal , Tan 'Ji8 avant n<freèrc, une diss(!i tation pii-
i)iii'esiir ce sujet au mois de novendîre 18-21 , in-8", ;i l<i(|uelle il
faudra jointire un supple'ment an 'lile-Live tlans la C)llectiiin des
auteurs classiques de M Le Maiie , publie de x ans après en ii
pages du même format. On trouvera de nouveaux détails dans la
vie du !)rave Crillon , in-S". Paris , '8.25 , II , 3 el suivantes, (j'est
là qu'est décrite la bataille de la Trébie, dont l'emplacement est
dëtermi.é a^ec le plus grand soin.
44^ ANNALES
CAPITULUM LVI.
De bello cannensi.
ACTOR.
QuiDQUiD egerit Hannibal contra Marcum Marcel-
lum (i) et Flaminiuin et alios consules , brevitatls
causa , transeamus ad bellum cannense, de quo dicit
Orosius (2): « Anno ab iirbe condità dxl (3) , Lucius
yEmilius Paulus et Publius Terentius Varro (4), con-
sules, contra T]annil)alein inissi , inipatienlià Varro-
nis consLilis infelicissimc apud Cannas, Apnliae vi-
cinn, omnes penè lomanrc spel vires pei'diderunt.Nam
in eà piigiia xliv inillia Ronianoriun interfecta snnt,
et d(! exercitu Hannibalis uiagna pars cœsa est
Periit in eo bello consul iEmilius Paulus, consulares
(i) Marciis (Maudiiis Marrrllus avait t'tr envnyj on Sicile an
commcnreiiient de la seronile };iicrri' |)iini(|ii(!^ il ne fut npjjoso à
Annibal «•n Italir i|ii'.i|)rt''s la j'uiiiu'i- «Ii- annes. Le consul (J. 11a-
miniiis fut tiii- ;'i la bataille de Trasinirne.
2; Lib. iv, ctij). i6.
3; (Jette date cafouicnne répond à Tan -i-S avant J.-C. ; mais
l'Art de vérifier les ilates rai)j)C)rle Ja bataille de Cannes ati 5 sep-
tembre 2l6.
(4) 11 faut lire Caius Terentius f^arro, au lieu de Publius.
DE HAINÀUT. LIVRE III. 44?
CHAPITRE LVI,
Bataille de Cannes.
L AUTEUR.
Pour être plus court , je passerai sous silence tout ce
que fit Annibal contre Marius Marcellus, contre Fla-
minius et les autres consuls, et j'en viendrai de suite
à la bataille de Cannes , dont Paul Orose parle en ces
termes. «L'an oiO de la fondation de Rome, dit cet
auteur, les consuls Lucius .Emilius Paulus et Caius
Térentius "S'a rron, furent envoyés contre .\nnibal ; mais,
p;ir l'impaiieiice de Varron , les troupes qui fesaieiit le
seul espoir de la république périrent presque en entier,
dans la funeste batailU-qui fut livrée près du village de
Cannes en Apulie, et dans laquelle les Romains pei'di-
rent (]uaranle-quaire mille hommes, et Annibal la meil-
leure partie de son armée ( I ). Le consul yEmilius Paulus
y fut lue, ainsi que vingt consulaires ou anciens pré-
teurs, trente sénateurs , trois cens patriciens, quarante
mille fantassins et trois mille cinq cens chevaliers. Le
(i) Annibal perdit quatre mille Gaulois, quinze cens Fsp;ignols
ou Africains, et ileux cens chevaux j s-n armée était composée
avant la bataille de quarante mille fantassins et dis mille cavaliers.
Poljrb. iii, 117J Tit. Liv. xxii, 46.
448 ANNALES
et prcEtorii viri xx , sciiatoiTS (0 occisi xxx , nobi-
les CGC, pédestres milites xl inillia , équités iiimd.
VaiTO eonsul cum xl equitibus Venusiain fugit
Hannibal, in testimoniiiin vicloriae, très modios
anmiloi'iim aureoruin (lartbagiiiein , qiios ex maiiibiis
interfectorum equituin romanoruin senatormnque
(letraxerat, misit. Orosics (2). Anno x, postquàni
Hanniijal in Italiain venerat, Cneo Fulvio et Sulpieio
consulibus , Hannibal de Canipaiiia n)0\ it exercltnm,
et CLim ingenli clade Rouianorum via Latinâ profec-
tus est ad Anienem fluviuni , tribus niilliaribus ab
lJrl)e consedit, incredibiU totius civitatis nietu , eum
senatu populoque trepido, matronis per pi'opugna-
cula currentibus, primisque pro mûris pugnare ges-
tientibus. Ipseque cum expeditis equitibus usquè ad
portam Collatinam processit , deindè omnes copias in
aciem direxit; sed et consulcs non detrectavêre pu-
gnam. At ubi expositœ acies utrimque constiterunt
in conspectu Romae, praîinium vicloriaî futurae, tan-
tus se subito imber gi'andine mixtus eff'udit, ut tur-
bata agmina, vix armis retentis, in sua se castra col-
ligerent. Deindè cùm serenitate reddita in campuni
iterùm processissent, rursùm violentior fusa tempes-
tas majore metu mortalium audaciam coercuit; et
conversas in religionem liininibal dixisse fertur po-
tiundœ sibi Rouice modo vokmtatem non dari, modo
potestatem Intérim in Hispauiâ ambo Scipiones à
fratre Hasdrubale interfecti sunt.
i) Apres xenatores , rédition précitée écrit vel capti vel occisi
sunt tviginta.
(:4j Lib. iv , cnp. i^.
DE HAINAUT. LIVRE III. 449
consul Varron s'enfuit à Venouse avec quarante
hommes de cavalerie. Annibal envoya à Carthage , en
témoignage de sa victoire, trois boisseaux d'anneaux
d'or que ses soldats tirèrent des mains des sénateurs et
des chevaliers restés sur le champ de bataille ; » Le
même auteur dit plus bas : « La dixième année de
l'entrée des Carthaginois en Italie , sous le consulat de
Cnéus Fulvius et Sulpicius , Annibal sortit son armée
de la Campanie , et , après avoir défait les Romains ,
arriva par la voie Latine sur les bords de l'Anio , dans
un endroit situé à trois milles de Rome , et où il établit
son camp. A son approche toute la ville fut conster-
née ; le sénat et le peuple saisis de frayeur; les femmes
courant sur les remparts demandaient à combattre les
premières pour leur ville. Le général carthaginois s'a-
vança lui-même avec un corps de cavalerie légère jus-
qu'à la porte Colline , et fît ensuite ranger toutes ses
troupes en bataille. De leur côté les consuls s'apprê-
tèrent au combat. Mais dès que les deux armées furent
en présence et sur le point d'en venir aux mains, à
la vue de Rome, qui devait être le prix delà victoire,
il tomba tout à coup une si grande quantité de pluie
mêlée de grêle , que les troupes , pouvant à peine garder
leurs armes , se réfugièrent dans leurs camps respectifs.
Lorsque le ciel fut redevenu serein , elles s'avancèrent
de nouveau au combat ; mais il s'éleva encore une si
furieuse tempête , que les cœurs les plus intrépides en
furent épouvantés. C'est alors qu'Annibal reconnais-
sant la main d'une puissance surnaturelle, s'écria, dit-
on , que les dieux lui avaient refusé tantôt la volonté
et tantôt le pouvoir de prendre Rome. Cependant les
deux Scipion avaient été tués en Espagne par Asdru-
bal , son frère.
II. ag
450 ANNALES
CAPITULUM LVII(^)
De initio Scipionis Africani, et captione Carthaginis.
Interfectis Scipionibus , Sclpio , qui post Africa-
canus dictus est, admodùm adolescens, annos na-
tus XXIV, imperlum in Hispaniâ proconsulare sortitiis
est. Qui mox ultionem patris et patrui animo inten-
dens , Pyrenœum transgressus , primo impetu Cartha-
giiiem novam capit, ubi stipendia magna, prœsidia
valida, copiae auri argentique magnae Pœnorum ba-
bebantur. Ibi etiàm Magonem , fratrem Hannibalis ,
captum cum cœteris Romam misit. Solinus. Necatis
matribus, nati auspicatiores sunt. Quaiis fuit Scipio
Africanus prior, qui ob hoc primus Romanorum Cae-
sar dictus est; quia excisus utero matris in diem véné-
rât. TuLLius (2). Quid dicam de moribus Scipionis
facillimis, de pietate in matrem, liberalitate in
sorores, bonitate in suos, justitid in omnes? Hujus
Africani uxor fuit tertia iEmilia, mater Corneliae
Gracchorum. Vincentius. Dicebat Scipio nihil esse
(1) Le commencement de ce chapitre est tire' d'Orose , liv. ir,
chap. 18.
(a) Il est au moins douteux que ce passage se trouve dans les
OEuvres de Cicéron , telles que nous les avons , l'y ayant cherché
long-tems inutilement.
DE HAINACT. LIVRE III. 4^*
CHAPITRE LYIl.
Coramencemens de Scipion l'Africain , et prise de Carthage.
Après la mort des deux Scipion , leur fils et neveu,
Scipion , surnommé plus tard l'Africain , et alors âgé
de vingt-quatre ans, fut désigné par le sort pour com-
mander en Espagneavec le litre de proconsul ( 1 ). Brûlant
de venger la mort de son père et de son oncle , il fran-
chit les Pirénées , et s'empare, dès le premier assaut,
de Carthagène, où les Carthaginois avaient de grandes
sommes destinées à la paie des troupes , une forte gar-
nison et quantité d'or et d'argent. Il envoya à Rome,
Magon frère d' Annibal et beaucoup d'autres prisonniers
qu'il fit avec ce chef. Soi.ix. Les enfans qui naissent en
causant la mort à leur mère , sont destinés à un
avenir plus heureux. Tel fut l'ancien Scipion l'Africain ,
qui le premier des Romains fut appelé César, parce
qu'il ne vint au monde qu'après qu'on eut ouvert le
ventre de sa mère. Cicéron. Que dirai-je de la facilité
d'humeur de Scipion , de sa piété envers sa mère , de
sa libéralité à l'égard de ses sœurs , de sa bonté pour
les siens, de sa justice envers tous? Sa troisième
femme fut Emilie , mère de cette Cornélie qui donna le
(i) Tite-Live (sxvi, i8) rapporte que Scipion fut porté au com-
mandement d'Espagne par l'assemblée du peuple.
452 ANNALES
difficiliùs quàm amicitiam usque ad extrcmum diem
vitae permanere : iuterdùm cnim dimittitur contcn-
tione luxurlae vel alteriûs ejusmodi , quod idem adi-
pisci uterque non potest. Valerius (i). Denique
Sclpio, HispaniA à Pyrenaeo usque ad oceanum in
provinciam redactâ, Romam venit. Consul autcm cum
Licinio Crasso creatus (a), in Africam transit , Hanno-
nem , Amilcaris filium , ducem Pœnorum , interfccit ;
exercitum ejus, part'im caede, part\m captivitate
disperdidit: nam quadragintamillia Pœnorum interfc-
cit, Hasdrubale, eorum imperatore, effiigato. Oro-
sius (3). Hannibal redire in Africam jussus, fessis
Carthaginensibus ut subveniret, flens reliquit Ita-
liam, omnibus italici generis milltibus qui eum sequi
nollent interfectis ; oui ad Afi'icanum littus appro-
pinquanti, jussus quidam è nautis ascendere in ar-
borera navis , atque indè speculari quam regionem
teneret; sepulchrum dirutum se prospiccre rcspon-
dit. Abominatus dictum Hannibal, deflexo cursu, ad
Leptim oppidum copias exposuit. Qui, continue re-
fecta multitudine, Cartliaginem venit, deindè collo-
quium Scipionis petiit. Ubi ciim se diîi attoniti admi-
ratione mutuâ duo clarissimi duces suspexissent,
infecto pacis negotio , prœlium consertum est. Quod
diù magnis ducum artibus dispositum , magnis copia-
rum molibus gestum, magnis militum viribus con-
(i) Ce passage est extrait , non de Valère-Maxime , mais d'Orose,
iv, 18.
(2) Le consulat de P. Corne'lius Scipion et P. Licinius Crassiis
commença le i3 février 2o5 av. J.-C ^rt </<• i-érifier les dates.
(3} Iv , 19.
DE HAINAUT. LIVRE III. ^S3
jour aux Gracques. Vincent de Beauvais. Scipion disait
que rien n'était plus difficile que d'être fidèle à l'a-
mitié jusqu'à la mort : en effet, elle est détruite par une
rivalité pour le faste, ou pour toute autre chose que
deux amisnepeuvent obtenir également. Orose. Scipion
revint à Rome , après avoir réduit en province toute
l'Espagne depuis les Pirénées jusqu'à l'Océan. Créé
consul avec Licinius Crassus , il passa en Afrique , tua
Hannon, fils d'Amilcar et général des Carthaginois , et
détruisit son armée, dont une partie périt dans les com-
bats et l'autre fut faite prisonnière de guerre : en effet,
il tua quarante mille Carthaginois , après avoir mis en
fuite Asdrubal leur général. Oro.se. Annibal ayant
reçu l'ordre de revenir en Afrique au secours de sa
patrie affaiblie et fatiguée, quitta l'Italie en pleurant,
après avoir mis à mort tous les soldats italiens qui re-
fusèrent de le suivre. En approchant des bords afri-
cains, ayant ordonné à un matelot de monter au mât
du navire, et d'examiner en quelle région il se trou-
vait , celui-ci répondit qu'il apercevait un tombeau dé-
moli. Annibal détesta cette réponse , et prenant un
détour débarqua ses troupes à Leptis , où il les fit ra-
fraîchir aussitôt; il partit ensuite pour Carthage, et
demanda une entrevue à Scipion. Ces deux illustres
généraux se considérèrent long-tems avec une mu-
tuelle admiration, mais n'ayant pu s'accorder pour la
paix , ils en vinrent ensemble aux prises. La bataille
long-tems réglée d'avance avec toute l'habileté des
deux généraux , à laquelle des masses énormes de
troupes prirent part, et où les combattans firent les
plus grands efforts , se termina à l'avantage des Ro-
mains. Quatre-vingts éléphans y furent pris ou tués,
et vingt mille cinq cens Carthaginois y périrent. An-
454 ANNAIES
summatum , Romanis victoriam contulit. Octoginta
ibj elcphantum vel capti vol occisi sunt , Carthagi-
nensium interfecta sunt viginti millia militum qiiin-
genti. Hannibal , omnla antè prœlium et in prœlio
expertus, cum panels, hoc est, vix cum quatuor
iiiiiitibus, inter tumultum elapsus, Adrumctum con-
fugit. Posteà Carlliagineni post sex et triginta annos,
quam indè purvus cum matre exierat, venit, consul-
tantique seoatul, nullam esse lesiduam spem nisi in
petenda pace, persuasit. Igitur (Ineo Cornello Len-
tulo , Publico iElio Pœto consulibus , Cartbaginen-
sibus pax per Scipionem voluntate senatûs populique
concessa est. Naves tamen plusquàm quingeiitae in
altum productae, in conspectu civitatis incensre sunt.
Scipio,jam tune cognomento Afrieanus , triumphans
Urbem ingressus est, quem Terentius (i) comicus, ex
nobilibus Carthaginensium captivis, pileatus (quod
insigne indultœ sibi libertatis fuit), triuniphantem
post curruin secutus est.
(;) Ce n'est point l'aiitenr comique Te'rcnce qne Scipion ommena
Je Cartilage , c'est Terentius CtiUt'o, sénateur romain , cpie les (>ar-
tliaginois avaient fait prisonnier, et qne Scipion rendil à la liberté.
Terence était ne à Carfhage l'an 194 avant notre ère. On croit
qu'il fut pris dans son enf.mce et vendu à des marcliands romains.
Le sénateur Terentius Lucanus l'acheta. A l'.'îge de 27 ans, l'an
167, il composa l'Andrirnne , et fut mis en liberttÇ. Il voulut
aller perfectionner son talent dans la Grèce , et mourut à Stim-
phale, ville d'Arcadie, l'an 160, à 34 ans. 11 n'était donc pas ne
lors de la prise de Carlhage , l'an aoa.
DE HAINAUT. LIVRE III. 4^5
nibal , qui avait employé toutes les ressources de sou
génie avant et pendant le combat, s'échappa de la dé-
route avec quatre soldats au plus, et s'enfuit à Adru-
mète. Ensuite il revint à Carlhage , trente-six ans après
en être sorti avec sa mère , lorsqu'il n'était encore que
dans l'enfance ; et persuada au sénat qui le consultait,
qu'il n'y avait plus d'espoir de salut pour eux, qu'en
demandant la paix. Ainsi, sous le consulat de Cnéus
Cornélius Lentulus et Publius yElius Paetus, Scipion ,
du consentement du sénat et du peuple , accorda la
paix aux Carthaginois. Plus de cinq cens de leurs
vaisseaux furent conduits en mer et brûlés en présence
de toute la ville. Scipion , qui reçut alors le surnom
d'Africain, entra en triomphe à Rome ; l'auteur co-
mique Térencc , la tcte couverte d'un chapeau en
signe de la liberté qui lui élait rendue, suivait son
char, au milieu des prisonniers de la noblesse cartha-
ginoise.
456 ANNALES
CAPTTULUM LVIll.
De Ftoleinœo Epiphunc, rege Al^gypti.
EUSEBius m Clironicis.
MoRTUo Pliilopatrc , in /Egyptiorum regno rex
quintus Ptolemaeus Epiphanes , aiinis xxiv. Cœpit
autem anno quintae œtatis ccclxxxvui, miindi vero
iiiMDCCLXi, olympiadis cxliv anno primo (i). Hie-
RONYMUs suprà Danlelem. Pugnantibus contra se
Ptolemaeo Epiphane (2) et ducibus Plolemœi, in me-
dio Judaea posita in contraria studia scindebatiir,
aliis Ptolemaeo, aliis Antioclio faventibiis. Denique
Onias saccrdos , assumptis Judaeoram plurimis, fiigit
in iEgyptum , et à Ptolemœo susccptus lionorificè
accepit regionem Heliopoleos ; et, conccdente rcge,
templum construxit in iEgypto similo templo Judaeo-
rum, quod pennansit usque ad imperinm Yespasiani,
annis dncentis (3j. Eusebii s. Anno Ptolcnia^i Epi-
(i) Les deux ])remiôres ilatos coirospondcnt a Tan 202 avant
J.-C. , Rf la (IcrnitTP .1 l'an ao.j — ^^.o'^.
(a) Au lieu de Ptoléme'c-Epijihaiie , il faut lire : Aiitiochiis Mag-
niis, ainsi <[iie le portent lés c»!itions dv. S. Jérôme.
(3 II faut a^nwXe.v quinqtiaginta, comme on le trouve dans les
éditions de S. Jérôme , et comme le demande la chronolosjie.
DE HAINAUT. LIVRE III. 4^7
CHAPITRE LYIII.
De Ptolémëe-Epiphane , roi d'Egipte.
CHRONIQUE D EUSEBE.
Après la mort de Philopator, Ptolémée-Épiphane,
sixième roi d'Egipte, monta sur le trône , en l'an 388
du cinquième âge, 3761 du monde, premier de la
144* olimpiade, et régna vingt-quatre ans. Svi>r Jé-
rôme , Commcnlaires sur Daniel. Pendant qu'Antiochus-
le-Grand et les généraux d'Epiphane se fesaient la
guerre, la Judée, qui se trouvait au milieu des deux
armées , était partagée en différens partis , les uns
favorisant celui de Ptolémée , les autres celui d'An-
liochus. Enfin le prêtre Onias, ayant rassemblé plu-
sieurs Juifs, s'enfuit avec eux en Égipte, et fut reçu
honorablement par Ptolémée qui lui céda le territoire
d'Héliopolis, et lui permit de bâtir dans son royaume
un temple pareil à celui de Jérusalem, qui subsista
pendant deux cent cinquante ans , et jusqu'au tenis de
l'empereur Vespasien. EtsÈuE. En la septième année
de Ptolémée Épiphane, quatrième de la 1 45* olimpiade ,
les Romains déclarèrent les Grecs libres, et toute l'I-
bérie fut subjuguée. Yalère-Maxime. Après la défaite
de Philippe, roi de 3Iacédoine , les Romains ayant
rendu la liberté à toutes les villes de la Grèce qui se
458 ANNALES
phanis vu, olympiadis cxlv anno quarto, Romani
Graecos liberos esse jusserunt, et universa Iberia im-
perata fecit. Valerius (i). Philippo , rege Macedo-
num , superato,... cùm Romani omnes Graecise urbes,
quse sub ejus ditione erant, libertate donâssent, tan-
tùm cœli clamoris alacritate compleverunt, ut certè
constet aves qua; supervolabant, attonitas paventes-
que decidisse. Eo tempore , matronse Rrutorum (2)
domum ausae sunt obsidere , quia legem Oppiam tolli
cupiebant, quae his nec veste varii coloris uti , nec
auri plus semiunciâ habere , nec juncto vehiculo
propiùs urbem mille passus, nisi sacrificii grati«i,
vehi permittebat. Et quidem obtinuerunt ut jus per
XX annos servatum aboleretur (3). Orosius. Publio
Scipione Africano et Tiro consulibus (4) apud Medio-
lanum decem millia Gallorum cœsa sunt : sequenti
autem praelio, undecim millia Gallorum, Romanorum
vero quinque millia, occisa sunt. Lucius. Galli seno-
nenses, adjuncto sibi Leone, rege belgensi, Italiam
pluries contriverunt, et Romam tanquàm eis debitam
repetentes , consules romanos occiderunt , Ticinum
atque Mediolanum à tempore Brenni possidendo,
dictus Léo ibidem à Romanis in bello mediolanensi
interfectus est (5).
(1) Le passage suivant est un extrait abre'gé et incorrect du
livre iv , chapitre 8 de Valère-Maxime-
(2) C'étaient les tribuns du peuple Marcus et P. Junius Brutus.
(3) Val.Alax. ix, 1.
(4) Il faut lire P. Scipione Africano iteriim , T. Sempronio
Lon/E^o consulibus. ouos. iv, 20. Ces consuls entrèrent en ch.Trj2;e le
fi rlixi^mbie if)5 av. J.-C- Art fie vérifier fei dates.
5} Lnriiiwli- TonsTf"-. f(tie notre aiileur ropie ici. ne mérite
DE HAIÎÏAUT. LIVRE III. 4^9
trouvaient sous sa domination , les Grecs poussèrent de
si grands cris de joie , qu'il est certain que des oiseaux
qui volaient sur leurs têtes , tombèrent épouvantés
et palpilans au milieu d'eux. Vers le même tems , les
dames romaines eurent la hardiesse d'assiéger la de-
meure des Brulus , parce qu'elles voulaient qu'on abro-
geât la loi Oppia, qui leur défendait de porter des ha-
bits de diverses couleurs , d'avoir sur elles plus d'une
demi- once d'or, et de s'approcher dans un chariot
attelé de deux chevaux à plus de mille pas de la ville,
si ce n'était pour sacrifier. Elles eurent le crédit de
faire abolir cette institution qui avait été pendant vingt
ans en vigueur. Orose. Sous le second consulat de
Publius Scipion l'Africain et premier de Titus Sem-
pronius Longus, dix mille Gaulois furent tués près de
Milan; et dans un second combat, il en périt encore
onze mille , tandis que les Romains n'y perdirent que
cinq mille hommes. Lucils de Tongres. Les Gaulois
Sénonais , auxquels s'était réuni Léo , roi de Belgis ,
saccagèrent plusieurs fois l'Italie; et lorsqu'ils mar-
chaient sur Rome qu'ils regardaient comme une proie
réservée pour eux; ils tuèrent les consuls romains,
étant restés maîtres de Pavie et de Milan depuis l'expé-
dition de Brennus. Le roi Léo fut tué par les Romains
dans la guerre de Milan.
guère de confiance. C'est à tort qu'il rapporte que des consuls ro-
mains pe'rirent dans la guerre contre les Gaulois. Cette guerre ne
peut être que celle des Insubriens et des Boïens , qui furent vaincus
par le proconsul L. Valerius Flaccus. Peut-être aussi les Romains
ont-ils exagère leurs avantages.
460 ANNALES
CAPITULUM LIX.
De Seleuco Philopatre , rege Syriae.
Anno Ptolemœi Epiphanis xvii, olympiadis cxlviii
anno primo (i), regnavit Syriœ et Asiae Seleucus ,
qui et Philopator, xii annis. Comestor. Post Antio-
chum Magnum regnavit in Syria filius ejus Seleucus,
pessimus sed iners. Pontifex Judϙrum erat Onias ;
nani, Oniâ transeunte in ^Egyptum, filius ejus Simon
sedit pro eo; oui successit filius ejus Onias. Sub hoc
misit Seleucus nuntium Heliodorum in Jérusalem ad
spoliandum commune aerarium templi , non vasa sed
donaria in usus templi. Quo ingresso in templum ,
surrexerunt duo juvenes de latibulis, et occiderunt
eum. Videtur tamen Josephus velle angelos fuisse in
similitudinem hominum. In libro Machabaeorum (2)
legitur quia apparuit terribilis scssor equi et concul-
cabateum et confractus est, et comminutus sed non
mortuus. Timensque Onias indignationcm Scleuci
oravit ad Dominum pro dcfuncto, et surrexit. Qui
rediens ad regem ait : « Si habuerit Dominus meus
aliquos quorum sitiet sanguinem , mittat eos in Jeru-
(1) An i87av..T.-C.
•A^ 11, 3.
DE HAINAUT. LIVRE III. 4^1
CHAPITRE LIX.
De Séleucus Philopator , roi de Sine.
En la dix-septième année de Ptolëmée-Épiphane,
première de la 148* olimpiade , Séleucus, surnommé
Philopator, monta sur le trône d'Asie et de Sirie , et
régna douze ans. Comestor. Après Antiochus-le-Grand,
Séleucus son fils régna en Sirie , et fut un prince mé-
chant et fainéant. Onias était souverain pontife des
Juifs; car, après le passage d'Onias (1) l'ancien en
Egipte, Simon son fils lui succéda, et Onias, fils de
celui-ci, le remplaça. Pendant le sacerdoce du der-
nier Onias , Séleucus envoya son ministre Héliodore
à Jérusalem , pour piller le trésor public conservé
dans le temple , non les vases mais les sommes qui y
avaient été portées pour le service du culte. Lorsqu'il
fut entré dans le lieu saint, deux jeunes gens sortirent
d'un endroit secret , et le tuèrent. Josèphe semble
croire que c'étaient des anges qui avaient pris une figure
humaine ; mais on lit dans les Machabées qu'il parut
un homme à cheval ; que d'un air terrible il renversa
et écrasa le messager du roi , qui en fut tout meurtri
mais qui n'en mourut pas; et qu'Onias craignant la
(i) Il y avait encore eu avant celui-ci un Onias, souverain pontife,
qui était fils de Jaddus et père de Simon-le- Juste , et qui était
mort l'an 292 av. J.-C. , suivant VArt de -vérifier les data.
4^2 ANNALES
salem , ut spolient templum. » Augitsti]vus(i). Eodem
tenipore, Scipio Africanus cedens inimicorum accusa-
tionibus, carensque patriii quam sua virtute salvam
et liberam reddiderat, exul in oppido Linternensi ,
post insignem suum triumphum, nullo illius urbis
captus desiderio, vitam fînivit. In ejus sepulchro ,
jussu ejusdem scriptum est : Ingrata patria , ne ossa
quidem mea hahes. hieronymus super Danielem (2).
Mortuus est autem Ptolemeeus, anno regni sui xxiii,
veneno à ducibus suis dato. (3) Hoc tempore , Titus
Livius, (/j) tragœdiarum scriptor, clarus habetur, qui
ob ingenii meritum à Livio Salinatore, cujus libères
erudiebat, libertate donatus est.
(i) Les mots terribilem hahens sessorem en parlant du cavalier
qui frappa Hëliotîore , se trouvent en eflet dans le second livre
des M achabées, ii, 26; mais le fait indique' ici relativement à Onias,
ne s'y trouve point.
(2) L'auteur ne cite pas exactement S. Je'rôme, qui ne s'exprime
pas ici d'une manière aussi affirmative , et qui d'ailleurs ne déter-
mine pas la dure'e du règne d'Epiphanc. Cette durée est de 24 ^"3
dans Eusèbe.
(3) Ce qui suit est emprunté de la Chronique d'Eusèbe.
(4) 11 faut lire Lucius Li\^ius.
DE HAINAUT. LIVRE III. 4^5
colère de Séleucus , pria le seigneur pour Héliodore ,
qui fut rappelé à la vie. A son retour, le ministre dit au
roi : « Si mon maître a quelqu'un dont il veuille se dé-
faire , qu'il l'envoie à Jérusalem dépouiller le temple. »
Saint Augustin. Vers la même époque, Scipion l'Afri-
cain cédant aux accusations de ses ennemis , et chassé
d'une patrie qui devait à lui seul son salut et sa li-
berté , mourut en exil après son triomphe , dans sa
métairie de Linterne , sans conserver pour Rome le
moindre regret. On grava , par son ordre , ces mots
sur sa tombe : Ingrate pairie , tu ne possèdes pas même
mes os. Saint Jérôme, Commentaires sur Daniel. Pto-
lémée-Épiphane mourut en la vingt-quatrième année
de son règne, du poison que lui donnèrent ses offi-
ciers. Dans le même tems florissait l'auteur tragique
Lucius Livius, qui, à cause de la beauté de son génie ,
fut affranchi par Livius Salinator, dont il élevait les
enfans.
464 ANNALES
CAPITULUM LX.
De Ptolemaeo Philometore.
LUSEBius, in Chromcis.
MoRTUo Ptolemaeo Epiphane, regnavit in ^gypto
PtolemrEus Philometor, filius Cleopatrœ, filiae Antio-
chiMagni, sororis Antiochi Epiphanis, olympiadis cl
anno primo. Hic fuit iEgyptiorum sextus ; cœpit autem
annoquintœaetatiscDxii , mundi verô niMDCCLXXxv( i ),
etregnavitannisxxxv. Eusebius. AnnoPliilometoris v,
olympiadis cli anno secundo (2), Antiochus, qui et
Epiphanes, Syriee regnavit annis xi. Eo tempore,
Aristobulus, natione Judœus, peripateticus philoso-
phus agnoscitur, qui ad Philometorem Ptolemaeum
explanationum in Moyse scripsit commentarios.
(i) La première de ces trois dates re'pond à l'an 180 — 179 avant
J.-C.i les deux antres rrpondt-nt à l'an 178. Du reste ce premier
paragraphe n'est pas emprunte' d'Eusèbe.
(2) An 174 av. J.-C.
DE HAINAtT. LIVRE III. 4^5
CHAPITRE LX.
De Ptoltjniée Philomëtor.
CHRONIQUE D EUSEBE.
A la mort de Ptolémée-Épiphane , Ptolémée-Pliilo-
métor, fils de Cléopâtre , fille d'Aniiochus-le-Grand et
sœur d'Aniiochus-Épiphane, fut le sixième roi d'E-
gipte. Il monta sur le trône la première année de la
150^ olimpiade, 412^ du cinquième âge, 3785 du
monde, et régna trente-cinq ans. Eusèbe. En la cin-
quième année de Philométor, deuxième de la 151®
olimpiade, Antiochus Épiphane monta sur le trône de
Sirie , qu'il occupa onze ans. Vers la même époque,
florissait Aristobule , Juif de nation et philosophe péri-
patéticien , qui adressa à Ptolémée-Philomélor des com-
mentaires sur les livres de Moïse.
IL ^û
466 ANNALES
k>«^%.%^«i'%'«r%
CAPITULUM LXI.
De Antiocho , wgf- Syriae.
COMESTOR.
AwTiocHus autem , regno suscepto , iniquitatem
sibi insitam aperuit, quam pro regno obtinendo pal-
liaverat. Tune surrexerunt in Jérusalem fîlii Belial
introducentes ritus gentium, et petierunt ab Antiocho
ut faceret in Jérusalem eusebiam , id est , lupanar
epheborum , et quod Hierosolymitae scriberentur An-
tiocheni,et gymnasia in quibus dogmatisabant de ritu
gentilitatisi, et fecerunt prepucia sibi, id est non cir-
cumcidebant parvulos suos , vel quia ritu prepuciato-
rum vivebant : quidam tamen volunt quod quœdam
velam.ina fecerintcircumcisioni suse, ne Judœi nalione
Grœcisapparerent disslmiies. Causa veroliujus flagilii
erat Onias; sine libcris duos babebat fi'atres Jcsum et
Oniam vel Joannem qui contendebant de pontificatu;
et, ut placèrent Antiocho, dcclinavcrunt ad ritus
gentium , adeo ut etiàm nomina gentilium sibi impo-
nerent , Jésus dictus est Jason , Joannes vero vel
Onias, Menelaus. Cùmque plures essent cum Jasone,
supplicavil cum Antiocho de faciendo gymnasium in
Jérusalem. Actor. Verùm quia historia planiùs ha-
DE HAINAUÏ. LIVRE III. f^Qn
CHAPITRE LXI.
D'Antiochus, roi de Sirie.
COMESIOK.
Antiochus devenu roi de Sirie découvrit toute la
méchanceté de son naturel , qu'il avait pris soin de
cacher pour obtenir la couronne. Alors parurent à
Jérusalem les fils de Bélial , qui introduisaient dans le
culte les rits gentils, et qui demandèrent à Anlio-
chus la permission d'établir dans la ville sainte une
eusébie (1), c'est-à-dire un lieu de prostitution pour les
jeunes gens, de rendre les habitans de Jérusalem ci-
toyens d'Antioche , et de bâtir des gimnases pour y en-
seigner la religion des païens. Alors ils se firent des
prépuces, c'est-à-dire qu'ils ne soumirent plus leurs
enfans à la circoncision , ou qu'ils vécurent à la ma-
nière des peuples incirconcis , ou encore, suivant quel-
ques auteurs, qu'ils voilèrent la marque de leur
circoncision , afin qu'un Juif ne parût pas différent
d'un Grec. Onias , parce qu'il était privé d'enfans pour
lui succéder, avait donné lieu à tous ces forfaits. Jésus
et Onias , nommé aussi Jean , ses frères (2), se dispu-
(i) Ce mot se lit dans nos deux manuscrits, mais je crois que c'est
une faute , et qu'on doit lire Ephcbia.
(2) Jésus ou Jason était seul frère d'Onias ; Jean ou Ménélas était
fils de Tobie , frère de Simon , préfet du temple.
4^8 ANNALES
betur in libris Machabœorum (i), de ampliori dila-
tione supersedeo.
CAPITULUM LXIl.
De bello Macedonico.
JUSTINUS (2).
Eo tempore , commissum est bellum macedonicum
intei" Perseum et Romanos , ubi fiierunt in auxilio
Persei Scordisci, Galli, Istri et Daci, qui Daci sobo-
les Getarum sunt. In eo praelio viginti millia peditum
de parte Persei interfecta sunt. Rex cum cquitatu
subterfugit, sed continuo captus, atque in triumplio
cum filiis antè currum actus est, et post apud Albam
in custodiâ defecit. Eusebius. Anno Pbilometoris xii ,
(i) l,etll, 4.
(a) Ce paragraphe est un abrégé inexact et grossier du livre xxxii,
chap. 3 et 4j f^^ du livre xxxiii^ chap. i et 2 de Justin.
DE IIAINAUT. LIVRE III. 4^9
talent le sacerdoce , et pour faire leur cour à An-
tiochus , ils adoptèrent les usages et même les noms
des gentils; Jésus s'étant fait appeler Jason , et Jean
ou Onias ayant pris le nom de Ménélaûs. Comme Ja-
son avait un grand nombre de partisans , il pria An-
tiochus d'établir un gimnase à Jérusalem (1). L'Au-
TELR. Mais ces événemens se trouvant pleinement
rapportés dans les livres des Machabées , je n'entrerai
pas dans de plus longs détails sur ce sujet.
CHAPITRE LXII.
De la guerre de Mace'doine.
JUSTIN.
En ce teras-là la guerre de Macédoine eut lieu entre
les Romains et Persée , soutenu parles Scordisques (2),
les Gaulois, les Istriens et les Daces qui descendent
des Gètes. Persée y perdit vingt mille hommes d'in-
fanterie , et s'étant enfui avec une troupe de cavaliers ,
il fut pris presque aussitôt, puis conduit en triomphe
avec ses enfans devant le char du vainqueur, et mou-
rut en prison dans la ville d'Albe. Eusèbe. En la dou-
(t) Le texte rie Comestor est , comme ou voit , rapporte fort in-
correctement dans nos manuscrits.
(a) Peuples de la Pannonie et de la Mœsie, sur la rive droite du
T)anufir.
470 AKNALES
olympiadis cliii anno primo, Antiochi verô Epiplia-
nis VIII (i), Macedonum regniim defecit. Eodem anno
Ennius (poeta) annis major arliculari morbo periit;
sepultLis est in Scipionis monuniento, via Appiâ, intrà
primum ab Urbe inilliarium. Actor. De impietate
autem Antiochi in Judœos et de zelo Matathiœ et filio-
rum ejus , et de septem Machabœis martyribus et de
praeliis Judae Machabcei, et de lurpi morte Antiochi ,
satis habetur in secundi Macliabaeorum sexto et
infrà.
CAPITULUM LXIII
De restauratîone regni Judseorum,
EUSEBius, in Chronicis.
Anno igitur Philometoris xvi , olympiadis cliv
anno primo (-a), Syriœ et Asiae rcgnavit (Antiochus)
Eupator annis duobus. Eo tempore, PubHus Teren-
tius Carthaginensis , comœdiarum scriptor, ob in-
genium et formam Hbertate donatus , in Arcadiâ mo-
ritur. EusEBius , in Clironicis. Olympiadis cliv anno
primo igitur à tempore Machabœorum renascitur
(i) Ces dates repondent à l'an 167 av. J.-C
(2) An i63 avant J.-C .
DE IIAINALT. LIVRE III. ^J l
zième année de Philométor, première de la ISS** olim-
piade, huilième d'Épiphane, finit le royaume de
Macédoine. En la même année le poète Ennius meurt
de la goutte dans un âge avancé : il fut enseveli dans
le tombeau de Scipion , sur la voie Appienne, à moins
d'un mille de Rome. L'Auteur. Quant à la conduite
impie d'Antiochus envers les Juifs, au zèle de Mata-
thias et de ses fils, au martire des sept Machabées,
aux combats de Judas Machabée, et à la mort honteuse
d'Antiochus, il en est assez parlé au chapitre vi du
livre II des Machabées , et dans la suite du même livre.
CHAPITRE LXIII.
De la restauration du royaume des Juifs.
CHRONIQUES d'euSÈBE.
En la seizième année de Philométor, première de la
154^ olimpiade , Antiochus Eupator monta sur le trône
d'Asie et deSirie, qu'il occupa pendant deux ans. Vers
la même époque, l'auteur comique Publius Térence de
Carlhage, qui avait été affranchi à cause de son génie
et de la grâce de sa personne, mourut en Aroadie.
EusÈBE, Chro7iiqiies. En la première année de la 154'
olimpiade , et sous les Machabées , le royaume de Judée
renaît de ses ruines , en même tems que Judas Ma-
chabée, fils de Matathias, est, du consentemeiU de
472 ANNALliS
regnum Jiidseorum , cùm Judas Machabaeus, fillus
Mathatiœ, omnium JiuUrorum favore, pontifex de-
cernitur. Suscepit aulem ducatum populi anno se-
cundo Demetrii Soter, qui fuit xix Ptolemaei Philo-
metoris (i) , et tennit annis tribus. Deindè frater ejus
Jonathas xix; posteà frater ejus Simon viii, deindè
fîlius Simonis Joannes Hyrcanus xxvi. Ex tune Aris-
tobulus, filius Jonathœ, rex pariter et pontifex pri-
mus apud Judaeos , diadematis sumpsit insigne post
CDLxxx annos (2) Babylonicae captivitatis, et regna-
vit anno uno, Deindè Jannaeus, qui et Alexandcr,
xxvu; posteà Alexandra , uxor Alexandri, ix ; post-
modùm Hyrcanus, filius Alexandri , xxxrii ÇS). Tan-
dem Antigono dimicante contra Judceos , cessavit
principatus pontificum , et à Romanis constitutus est
princeps alienigena Herodes, filius Antipatri ascalo-
nitae, sub quo natus est Dominus Jésus; et regnavit
annis XXXVII. Quo miserabiliter mortuo, anno Do-
mini VI, loco ejus fdius Archelaus constituitur ab
Augusto, et quatuor fratres ejus tetrarchse fiunt,
scilicet, Herodes, Antipater, Lysias et Philippus ;
regnavit autem annis xiv (4). Post eum, Herodes
tetrarcha xxiv; post eum Agrippa, filius Agrip-
pée XXVI (5), scilicet, usque ad annum secundum
(i) L'an 160 av. J.-C. , suivant Euscbc.
(2) L'édition de Venise porte 484-
(3) xxxiv , ilii'l,
(4) ix. ibid.
(5) Eust'be s'est trompé en donnant 26 ans de rtgne au second
Agrippa, fils du grand Agrippa. Voyez Basnage , Histoire des
Juifs. Rotcrdam , 1707. I, 102, Agrippa II n'a jamais re'gné à Jé-
rusalem.
DE HAINAUT. LIVRE III. 4?^
tous les Juifs , nommé souverain pontife. Il prit la
conduite du peuple juif la deuxième année de Dé-
métrius Soter, dix-neuvième de Ptolémée-Philométor,
et gouverna pendant trois ans. Après lui , Jonathas ,
son frère, gouverna les Juifs dix-neuf ans; Simon
frère de Jonathas , les gouverna huit ans ; Jean Hircan ,
fils de Simon , vingt-six ans ; vint ensuite Aristobule ,
fils de Jonathas , qui le premier fut à la fois roi et sou-
verain pontife des Juifs , qui prit le diadème 480 ans
après la captivité de Babilone, et qui régna un an.
Après lui Jannée, nommé aussi Alexandre, régna vingt-
sept ans ; puis Alexandra , femme d'Alexandre , neuf
ans ; Hircan, fils d'Alexandre , trente-trois ans. Enfin ,
pendant la guerre d'Antigone contre les Juifs , cessa la
principauté pontificale ; les Romains établirent sur la
Judée un prince étranger nommé Hérode , fils d'Anti-
pater d'Ascalon , sous lequel Jésus vint au monde, et
dont le règne fut de trente-sept ans. Après sa mort
misérable , arrivée en la sixième année du Seigneur,
ArchélaUs son fils fut choisi par Auguste pour le rem-
placer, et ses quatre frères Hérode , Antipater, Lisias
et Philippe , furent nommés télrarques (1); ArchélaUs
régna neuf ans. Après lui, le tétrarque Hérode régna
vingt-quatre ans; ensuite Agrippa, fils d'Agrippa,
régna vingt-six ans , c'est-à-dire jusqu'à la seconde
année de Vespasien , pendant laquelle la Judée fut
(i) Ou peut consulter l'histoire des Juifs par Basnage , sur la ge-
ne'alogie d'He'rode. 11 y combat le père Hardpuin j dom Calmet ,
dans son dictionnaire de la Bible , donne un autre tableau de la
ge'nealogie des descendans d'Herode. Cette matière ne paraît point
encore suffisamment e'claircie. Mais il faut surtout consulter sur
ce sujet le Traite' de vitd et gestis Herodum , place' avec un ta-
bleau ge'ne'alogique à la fin de la belle édition des OEuvres de
Flavius- .Tospph , par Havercnmp.
474 ANNALES
Vespasiaiîi , in quo Jiid.nea capta est, ot Jérusalem
subversa, et Judaei captivati venundati et occisi , et
tune regnum Judaeorum penitùs dcfecit, scilieet,
anuo Domini lxxii. Elsebius. Anno Philometoris
xxiii et Demetrii v, olympiadis CLv anno tertio (i) ,
Jonathas, frater Judœ, factus est dux Judaeorum,
qui Bacchidem, ducem Demetrii , à Judœâ expulit ,
et pontificatum tenuit annis xix. Eo tempore, Aris-
tarchus grammaticus agnoscitur , Pacuvius (Brundu-
sinus)promptissimus(2)tragœdiarum scriptor, clarus
habetur.
CAPITULUM LXIV.
De Ptolemeeo Evergete secundo , rege AEgypti.
EUSEBIUS.
AwNO Jonathae xiv, Alexandri vu-, quintae aeta-
tis CDXLVii , mundi vero iiimdcccxx, olympiadis
CLix (3), Ptolemaeus Evergetes secundus, iEgyptio-
[i] Dans l'édition de Venise , l'an 23 de Philomp'tor et Tan 5 de
De'me'trius repondent à la 4" année delà iSj' olimpiade , qui est
l'an i6i — i6o avant J.-C.
(a) Cet adjectif promptissimiis , est sans doute rais par Terreur
d'un copiste au lieu de Brundusinus , que nous avons ajouté au
texte.
(?>) Toutes ces dates répondent à l'an i43 av. .T.-C.
DE H AIN AL T. LIVRE III. 4"^
prise, et Jérusalem renversée; et les Juifs furent em-
menés en captivité, vendus ou mis ù mort. Alors,
c'est-à-dire en l'an 72* de notre Seigneur, finit pour
toujours le royaume des Juifs. Elsèbe. En la vingt-
Iroisième année de Philométor, cinquième de Démé-
trius, troisième de la lôô* olimpiade, Jonathas, frère
de Judas, est élu chef des Juifs. Il chassa de la Judée
Bacchide , général de Démélrius , et occupa le sacer-
doce pendant dix-neuf ans. Vers la même époque flo-
rissait le grammairien Aristarque ; et Pacuvius de
Brunduse , célèbre auteur tragique, jouissait d'une
grande célébrité.
CHAPITRE LXIV.
De Ptolëmée Évergète II , roi d'Égipte.
EUSEBE.
En l'an quatorze de Jonathas , sept d'Alexandre , roi
deSirie, 447 du cinquième âge, 3820 du monde, pre-
mier de la lo9^ olimpiade, Ptolémée-Evergète II , sep-
tième roi d'Egipte, monta sur le trône qu'il occupa
•vingt-neuf années. C'est à cette époque que commença
la troisième guerre punique , dont saint Augustin parle
ainsi au livre i de la Cité de Dieu. «Lorsque le sénat
délibérait sur la question de détruire Carthage , Sci-
pion Nasica voulait qu'on laissât subsister une ville
476 ANNALES
rum septimus, regnavlt annis xix (1). Horum tenipo-
ribus fuit tcrtiuin bellum punicum contra Carthagi-
iiem , de qiio Augustiiius, libro primo de Ch'itate
Dei , (2). « Cùin senatus, » inquit, « delendam Car-
thaginem ceuseret , Scipio Nasica nolebat urbem ,
semulam romani imperii , dirai , et décernent! ut
dirueretiir contradicebat Catoni, timens infirmis ani-
mis hostilem securitateni; et tanquàm pupullis civi-
bus idoneum tutorem, necessarium videns esse terro-
rem. Res secundas quibus avarus luxuriosusque
populus effectus est, providentissimè cavendas esse
censebat. Quare civitatem hostium maximam , fortis-
simam opulentissimamque nolebat auferri , ut timoré
libido premeretur, libido pressa non luxuriaretur,
luxuriâque cohibitâ nec avaritia grassaretur. Quibus
vitiis obsecratis, civitatis utiliter virtus floreret et
cresceret. Prœvaluit enim Catonis sententia. » Oro-
sius (3). Profectique sunt in Africam consules Lucius
Censorinus et Marcus Manilius , et Scipio tune tribu-
nus militum propè Uticam majoris Africani castra te-
nuerunt (4)- Ibi Carthaginensibus evocatis jussisque
ut arma et naves traderent , nec moratis, tanta vis
armorum repente tradita est , ut facile tota ex his
Africa potuisset armari. Sed Cartilagineuses , post-
(i) Il faut lire xjix.
(a) C. 3oe« 3i.
(3) iv, 22.
(4) Je prends la liberté' de corriger ici , comme je l'ai fait déjà
un peu plus haut, le texte de nos deux manuscrits, qui au lieu de
propè Uticam. .. . porte quippè Uticam majoris u4Jricam caUra
tt'nnrriitit . Tn C'trtha^inensihiif . . . .
DE HAUNATIT. IITRE ïll. 477
rémule de l'empire romain , et s'opposait à Caton qui
demandait sa ruine : car il redoutait une trop grande
sécurité , comme pernicieuse à des cœurs amollis , et
pensait que la crainte était aussi nécessaire à ses con-
citoyens, qu'un tuteur à ses pupilles. On devait , suivant
lui, se défier surtout de cette prospérité qui avait
rendu le peuple avare et dissolu, et c'est pour cela
qu'il était d'avis de ne pas renverser la plus grande , la
plus forte et la plus opulente ville des ennemis , afin
que la crainte arrêtât la licence , et que la licence étant
arrêtée , l'avarice et la dissolution le fussent aussi , et
que par conséquent la vertu fleurît et se fortifiât dans
la république, et pour son bonheur. Néanmoins l'avis de
Caton l'emporta. » Orose. Les consuls Lucius Censori-
nus et Marcus Manilius , ainsi que Scipion , tribun des
soldats , partirent pour l'Afrique , et occupèrent, près
d'Ulique , le camp de Scipion l'Africain. Là ils man-
dèrent les Carthaginois, et leur commandèrent de
livrer leurs armes et leurs vaisseaux. Ceux-ci obéirent
sans retard, et livrèrent une si grande quantitéd'armes,
qu'il y en aurait eu assez pour armer toute l'Afrique.
Mais après cela , ayant reçu l'ordre d'abandonner
Carlhage , et de se retirer à dix mille pas de la mer, ils
furent saisis de douleur et de désespoir, et résolurent
de défendre leur cité , ou de s'ensevelir pour elle sous
ses ruines. Ils se choisissent aussitôt pour chefs les deux
Asdrubal, se mettent à fabriquer des armes, et, à dé-
faut de fer et d'airain , emploient à cet usage l'or et
l'argent. Alors les consuls prennent la résolution
d'assiéger Carthage , dont je donnerai ici la descrip-
tion telle qu'on l'a rapportée.
47 s ANNALES
quàm arma tradiderimt , et relictâ iirbe recedere pro-
culàmari decemmillibuspassuumjussisunt, dolorem
ac desperationem contiilerunt, aut defensuri civitatem,
aut cum ipsâ et super ipsam sepeliendi; ducesque sibi
duos Hasdrubales creaverunt. Arma primtim facere
aggressl , aeris ferrique inopiam , auri argeiitique me-
tallis suppleverunt. Consules oppugnare Carthaginem
statuerunt, cujus situs fuisse hujusmodi dicitur.
CAPITULUM LXV.
De forma civitatis Carthaginis (i).
Trigfnta millibus passuum muro amplexa (2) ,
tota penè mari cingebatur, absque faucibus, quœ tri-
bus millibus passuum aperiebantur. Is locus murum
triginta pedes latum habuit, saxo quadrato , in alti-
tudinem cubitorimi quadraginta. Arx, cui Byrsœ no-
men erat, paulo aiiipliîis quàm duo millia passuum
tenebat. Ex una parte murus commuais est urbis et
Byrsœ imminens mari, quodmareetstagnum vocant,
quoniàm objectu protentae linguœ strangulalur (3).
Consules igitur quàm vis aliquantam mûri partem quas-
(1) Ce chapitre est extrait d'Orose , livre iv, chapitres 22 et 23.
(a) L'e'dition d'Havercamp écrit viginti mil/ta passuum. . . .
;3 ■ Au lieu de strangulaturla même e'dition écrit tranquillatur...
DE UAINALT. LIVRE III. 479
CHAPITRE LXV.
Description de la yille de Carthage.
L'enceinte de ses murailles était de trente mille pas ;
la mer l'entourait presque de tous côtés , un isthme
de trois mille pas de large seulement la joignait à la
terre ferme. Cet endroit ayait un mur de trente pies
d'épaisseur, de quarante coudées de haut , et construit
en pierres carrées. La citadelle, nommée Birsa, occu-
pait un peu plus de deux mille pas. D'un côté , un seul
mur entourait la ville et la citadelle , et dominait sur
la mer, qui prend le nom de lac , parrequ'elle est
presque enfermée par une lagune qui s'avance au loin
dans les eaux. Les consuls , quoiqu'ils fussent parvenus
à renverser, à l'aide de leurs machines de guerre , une
partie de la muraille , furent néanmoins battus et re-
poussés par les Carthaginois; mais Scipion les seeou-
4^0 ANNALES
satam machinls diruissent, tamen à Carthaginensibus
victi et repulsi sunt; quos fugientes Scipio, repulso
intrà muros hoste , défendit. Censorinus in urbem
rediit. Manilius , omissa Carthagine , ad Hasdrubalem
arma convertit. Scipio, Massinissâ mortuo, intertres
fîlios Massinissae Numidise regnum divisit: quo contra
Carthagincm reverso, Manilius Tezagam urbem ex-
pugnavit atque diripuit; quadraginta (i) slbi millia
Afrorum cœsa, sex millia capta sunt. Hasdrubal,
Pœnorum imperator, Massinissae nepos, subsellio-
rum fragmentis in curiâ à suis, propter suspicionem
proditionis, occisus est... IgiturannoabUrbeconditâ
Dcvi (2), id est, anno quinquagesimo post bellum
punicum secundum, Cneo Cornelio Lentulo, Lucio
Mummio consulibus, Publius Scipio, superioris anni
consul, delere Cartliaginem supremâ sorte molitus,
Cothonem (3) ingreditur : ubi dùm continuis sex die-
bus noctibusque pugnatur, ultima Cartilagineuses
desperatio tiaxit, petentes ut quos belli clades reli-
quos fecit, saltem servi re liceat. Primum agmen mu-
lierum satis miserabile, post virorum magis déforme
descendit; nam fuisse mulierum viginti quinque millia,
virorum trigenta millia , memoriae traditum est. Rex
Hasdrubal se ultro dédit. Transfugae, qui ^Esculapii
templum occupaverant, voluntario praecipitio dati,
igné consumpti sunt. Uxor Hasdrubalis se duosque
filios suos secum, virili dolore et furore femineo , in
( I ) Duodticim millia . Ihid.
(2) An T46av. J.-C.
(3) Port de Carihage.
DE HAINAUT. LIVRE III. 4^1
rut dans leur défaite, et força l'ennemi à se renfermer
dans ses remparts. Censorius revint à Rome , et Ma-
nilius, abandonnant le siège de Carthage, tourna ses
armes contre Asdrubal. A la mort de Massinissa , le
royaume deNumidie fut partagé entre ses trois fils par
Scipion. Ce général étant revenu faire le siège de Car-
thage , Manilius prit et pilla la ville de Tazaga , quarante
mille Africains y furent tués , et six mille faits prison-
niers. Asdrubal, général des Carthaginois, et petit-
fds de Massinissa , fut tué par les siens à coups de bancs ,
parcequ'il était suspecté de trahison.... En l'année 606
de la fondation de Rome , c'est-à-dire cinquante après
la seconde guerre punique , sous le consulat de Cnéus
Cornélius Lentulus et Lucius Mummius, Publius Sci-
pion , consul de l'année précédente , résolu enfin de
détruire Carthage , entre dans le port de Cothon ; et ,
tandis qu'on s'y bat sans relâche pendant six. jours et
six nuits , l'excès du désespoir porte les Carthaginois
à se rendre sous la condition que ceux que le fer a
épargnés , auront le choix entre la mort et l'esclavage.
Le Corps des femmes sortit d'abord dans un état digne
de compassion , vint ensuite celui des hommes qui fe-
sait horreur à voir. On dit qu'il y avait vingt-cinq mille
femmes et trente mille hommes. Le roi Asdrubal se
rendit de plein gré. Les transfuges , qui s'étaient re-
tranchés dans le temple d'Esculape , se firent périr eux-
mêmes en y mettant le feu et en se jetant au milieu des
flammes. La femme d' Asdrubal désolée , mais non
abattue , s'abandonne à un parti extrême , et se préci-
pite , avec ses deux enfans , dans l'incendie. Ainsi la
dernière reine de Carthage périt du même genre de
mort que la première. La ville brûla continuellement
pendant dix-sept jours, et offrit aux vainqueurs un
II. 3l
402 ANNALES
médium jecit incendium : eumdem nunc mortis exi-
tum faciens novissima regina carthaginensis, quem
quondàm prima fecisset. Ipsa autem civitas decem et
septem continuis diebus arsit , miserumque spectacu-
lum de varietate conditionis humanae victoribus prae-
buit. Diruta est autem Carthago , omni murali lapide
in pulverem comminutato, septingentesimo postquàm
anno fuerat condita. Multitude omnis captivorum ,
exceptis principibus^ vendita est.
DE IIAINAUT. LIVRE III. 4^^
exemple déplorable de l'instabilité des choses humaines.
Elle fut entièrement détruite, et tout ce qui était bâti
en pierre fut réduit en poudre , sept cens ans après sa
fondation. Tous les prisonniers furent vendus à l'encan,
à l'exception des principaux (1).
(i) L'Asdrubal dont il est question dans ce chapitre, est le sep-
tième ge'ne'ral carthaginois de ce nom. 11 se remit lui-même au pou-
Yoir des Romains. Sa femme, loin d'imiter son exemple, e'gorgea
elle-même ses enfans, et se brûla dans le temple. Neuf cens trans-
fuges se pre'cipitèrent dans les flammes qui détruisirent ce temple
consacre' à Esculape, et toute la citadelle. Le se'nat romain, à qui
cette vengeance ne suffisait pas, envoya l'ordre de détruire la ville.
En conséqjjence l'infortune'e Carthage fut rase'e jusqu'aux fondemeus
l'an i46 avant notre ère. Voyez l'histoire de cette république dans
V Art de vérifier les dates avant l'ère chrétienne, m, 4'4 ^t sui-
vantes de l'édition in-S".
TABLE
DES CHAPITRES DU SECOND VOLUME
Chapitres. Pages.
Annales historiques des nobles princes de Hainaut.
Livre second. Chapitre I. Au nom de la Sainte-
Trinité. Ici commence le second livre. D'Ursus,
roi des Belges 3
IL Division de l'empire des Belges 5
III. Comment le roi Ursus se disposa à rétablir le
royaume des Belges 9
IV. Lois d'Ursus , roi des Belges 11
V. Comment les Albaniens se soumirent aux Belges. . i5
VI. Destruction de la ville de Moriane par les Belges. 17
VIL Siège de Belgis la Gauloise par les Belges 19
VIII. Les Belges s'emparent de Belgis la Gauloise. . . aS
IX. Ursus, roi des Belges, extirpe jusqu'à la racine
la race des grands-prêtres , et commence par dé-
truire la ville de Belgis 29
X. Perfidie détestable du roi Ursus 33
XI. Commencement du royaume de Macédoine 37
XII. De Zacharie, roi d'Israël 4»
XIII. Commencement des olimpiades 4^
XIV. Naissance de Rémus et de Romulus 47
XV. De Joathan, roi de Juda 5i
XVI. Ursus veut transférer dans la ville de Trêves le
gouvernement de la ville de Belgis et de tout le
royaume 53
486 TABLE
(Chapitres. Pap;es.
XVII. D' Achas , roi de Juda 55
XVIII. D'Osée, roi d'Israël, et de la transmigration
des sept tribus Sg
XIX. Commencement de la ville de Rome 61
XX. De la perversité d'Ursus, roi des Belges 63
XXI. Constance et fermeté des femmes de Belgis ;
comment elles tuèrent le roi Ursus 67
XXIï. Du règne et de la domination d'Ursa, reine
des Belges.. .. 71
XXIII. Origine de la forêt de Mormal jg
XXIV. D'Ezéchias, roi de Juda 85
XXV. Mort du prophète Isaïe 87
XXVI. Fondation de la ville de Reims 89
XXVII. Fondation des villes de Toul et de Tournai . . 97
XXVIII. Opinions diverses sur la fondation de Tour-
nai ICI
XXÏX. Fondation de la ville de Tournai io5
XXX. Des rois de Juda , Amon et Josias m
XXXI. De Friscembaud , roi des Belges 1 15
XXXII. De Servius , roi des Romains 121
XXXTII. Servius, roi des Romains, fait alliance avec
les étrangers pour domter plus facilement les Ro-
mains révoltés 1 25
XXXIV. De Léopardin, roi des Belges ia5
XXXV. De la fondation de plusieurs cités appartenant
au royaume des Belges 129
XXXVI. Servius, roi des Romains, fonde la ville de
Servie ; et la montagne sur laquelle est bâtie la ville
de Mons est habitée pour la première fois i35
XXXVII. De l'idole de Pan, de sa figure et de sa fête. iSg
XXXVIII. Que Servius, roi des Romains, détruisit
pour la première fois la ville d'Hostile, qui porte
aujourd'hui le nom de Tournai il\5
XXXIX. De la fondation de Kiévrain et d'Avesnes,
et du siège de la ville de Belgis )47
TABLE 4^7
Chapitres. P^g^^
XL. De la fondation de la ville de Cambrai iDi
XLI. De la mort de Servius, roi des Romains iS^
XLII. De Sédécias, roi de Juda, et de la destruction
de la ville de Jérusalem i Sg
XLIII. Fin du quatrième âge; prophétie d'Ézéchiel,
et consolation des émigrés i65
XLÏV. De la descente en Égipte des restes des fils
d'Israël , et de la mort de Jérémie 167
XLV .Du commencement du cinquième âge et des rois
de Babilone ^ 7 ^
XLVI. De l'inrention du jeu des échecs 17^
XLVII. De la triple cause de l'invention du jeu des
échecs ' " '
XLVIII. De la mort du prophète Ézéchiel i85
LXIX. Du prophète Daniel 187
L. De Melbrand, roi des Belges '89
LI. Comment le fils de Tarquin, jadis roi des Ro-
mains, voulut s'arrêter dans la ville de Belgis. ... 197
LU. Du premier siège de la ville de Servie 201
LUI. De la seconde destruction de la ville d'Hostile. . 207
LIV. De Blandinus, duc des Belges 211
LV. De l'abolition des rois des Romains, et de l'éta-
blissement des consuls 217
LVI. De Suardus, roi des Morins 219
LVII. De Cirus, roi des Perses 225
LVIII. Du sage Ésope 229
LIX . Des rois des Perses 23 1
LX. De la ville de Babilone 235
LXI. Les anges, protecteurs des Perses et des Grecs,
empêchent le retour des Juifs de leur captivité 235
LXIÏ. Du premier retour des Juifs de leur captivité,
sous leur chef Zorobabel 259
LXIII. De la mort de Cirus, roi des Perses 243
LXIY. De Valacrinus, duc des Belges 247
/|88 TABLE
Cliapiires. Pages.
LXV. Diverses opinions sur la reconstruction de
Nervie a/iç)
LXVl. De la fuite du duc Valacrinus du royaume des
Belges, et de la première habitation de l'île qui
porte maintenant le nom de Valacrie 253
LIVRE TROISIEME.
I. La cité de Belgis établit des ducs annuels pour la
gouverner 267
II. De Cambises, roi des Perses 271
m. De l'histoire de Judith 275
iV. Du roi Darius 277
V. De Xercès, roi des Perses 285
VI. Du roi Artaxercès 289
VII. Fondation de la ville de Dinant 29^
VIII. De Néhémie, et de la reconstruction du temple
de Jérusalem 295
IX. De Socrate, d'Hippocrate et de plusieurs autres
philosophes 5o5
X. De Darius Nothus, roi des Perses 307
XI. Du philosophe Platon 009
XII. D' Artaxercès second , roi des Perses 3i3
XIIT. Mort du philosophe Socrate 3i5
XIV. Les Belges font alliance avec les Gallo-Sénonais,
pour tirer une vengeance plus promte de leurs en- '
nemis 317
XV . De Missénus , duc des Belges 52 1
XVI. Colère d« Brennus contre les Belges 523
XVII. De Diogène ... 529
XVIII. De la fameuse guerre des Carthaginois 33 1
XIX. Du philosophe Platon 333
XX. De Bélinus et de Brennus 337
TABLE 4^9
Chapitres. Pages.
XXI. Brennus attaque son frère Bélinus , dans .son
royaume de Bretagne ^4»
XXII. La mère de Bélinus et de Brennus les réconcilie
lorsqu'ils étaient sur le point de s'arracher la vie. . . 345
XXÏII. Les Sénonais attaquent les Belges 54f)
XXIV De la fondation de la ville de Soissons oSï
XXV. De la fondation de la ville de Valenciennes. . . . 067
XXVI. De la fondation de Sebourg o5f)
XXVII. D'un traité des Belges avec les Sénonais. ... 56 1
XXVIII. Fondation de Soignies, de Reuï, deBraine,
de Lambecque , et autres villes semblables ô65
XXIX. Origine des noms de Brabant et de Bruxelles. 369
XXX. D'Aristote ^76
XXXI. De la mort de Platon 077
XXXII. Du commencement du règne d'Alexandre le
Macédonien - • 383^
XXXIII. Du crime des dames romaines 387
XXXIV. De Darius , fils d'Arsame 389
XXXV. Alexandre enferme les Juifs 391
XXXVI. Alexandre-le-Grand donne à Liriope la forêt
Charbonnière Sg?
XXVII. De la mort du roi Alexandre 399
XXXVIII. Du commencement du royaume d'Egipte. 40 '
XXXIX. Du philosophe Théophraste 4"^
XL. Du commencement du royaume d'Asie ^o5
XLI. De Papirlus Cursor 4'>7
XLII. Du commencement des royaumes de Sirie et
de Babilone 4^0
XLIII. De Séleucus, de Ptolémée Philadelphe, et de
la version des livres saints j 1 1
XLIV. De la mort de Brennus 4 • 5
XLV. De l'origine des Picards . . 4^9
XLVI. Du Thébain Arcésilas 4^3
XLVII. De la secte des Stoïciens 4^5
XLVIII. De la première guerre punique . 427
490 TABLE
Chapitres. Pages
XLIX. De la dernière rébellion des Saxons contre les
Belges et les Trévirois 4'-iî)
L. D'Antiochus et de Philadelphe 4^»
LI. De Ptolémée Évergète 4^5
LIT. D'Antigone, roi de Macédoine 4^7
LUI. De la seconde guerre punique 4^9
LIV. Du grand colosse de Rhodes . . 44 '
LV. De Ptolémée Philopator, roi d'Égipte 44^
LVI. Bataille de Cannes 447
LVII. Commenceinens de Scipion l'Africain, et prise
de Carthage 4^ '
LVIII. De Ptolémée Épiphane, roi d'Égipte 4^7
LIX. De Séleucus Philopator, roi de Sirie 4^»
, LX. De Ptolémée Philométor 4^5
LXI. D'Antiochus, roi de Sirie 4^7
LXII. De la guerre de Macédoine 4^9
LXIII. De la restauration du royaume des Juifs .... 47*
LXIV. De Ptolémée Evergète II, roi d'Egipte 47^
LXV. Description de la ville de Carthage 479
Nota. En tête du second livre est la copie d'une miniature qui se trouve
dans le manuscrit de la Bibliothèque du Roi , représentant les Beljjes qui
chassent leurs prêtres, et nomment roi Ursus. En tête du troisième livre,
une seconde miniature peint Be'linus et Breunus, princes anglais, qui sont
réconcilie's par leur mère , au moment où ils allaient se livrer un comhat à
mort. Ces dessins nous donnent les costumes du quinzième siècle , époqife à
laquelle ils ont c'té faits.
FIN DE LA TABLE.
Le troisième volume de la Vie de Grillon a paru. On y
trouve la fin de l'histoire des duels, et des élémens de
cosmologie. On sera peut-être surpris que les notes d'un
ouvrage dont le texte n'a que 80 pages soient aussi éten-
dues. L'auteur convient de la justesse des reproches que
l'on peut lui faire à cet égard : mais si ce qu'il écrit est
utile , il aura rempli son but principal, qui est d'offrir aux
lecteurs le fruit des réflexions et des études d'une longue
vie, en plaçant le résultat de son travail sous un nom qui
lui est cher.
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