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Full text of "Bulletin trimestriel de géographie et d'archéologie"

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in  2010  with  funding  from 

University  of  Ottawa 


http://www.archive.org/details/bulletintrimestr3536soci 


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D'ARCHÉOLOGIE 


LA     F»F50VI]NrCE     D'ORAN 


FONDEE      EN      1S78 


TOME    XXXV.     —     1915 


72 


ORAN 

Imphimehie    Tvpor.iiAriiKji'E    et    Litiioohaphique    L.    FOl'Ol  E 
//  et  6,  Hue  ThuilUer  (Place  Kléber) 


1  9i  5 


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621887 

^1  Ao .  S'S 


Société  de  Géographie  et  d'Archéologie 

DE    LA    PllOVIXCE    D'ORAN 
7,  Rue  Schneider,  ORAN 


MM. 


COMITÉ    ADMINISTRATIF    DE    LA    SOCIÉTÉ 

1914-1915 


Aramboi'rg  Camille. 

Bascuiîng  (Général). 

RÉREiNGEu(ComTuand'). 

Dangles. 

Dkciiaud. 

doumergue. 

DupiTv  Charles 

Fabre  (Abbé). 

Flahault. 

HuoT. 

Kriéoer. 

Lamur  Louis. 


MM.    I.i;moisso\. 
Levain, 
de  Paciitere. 
Pellet. 
Ferez. 

POCK. 

Pontet. 

pousseur. 

IAe.né-Leci.erc. 

RotlX-FuEI^SINENG. 

Sandras  (Docteur). 

TOURNIER. 


BUREAU    DE    LA    SOCIÉTÉ 


Président  :  MM. 

i®''  Vice-Président  : 

2*   Vice-Président  : 

Secrétaire  général  : 

Trésorier  : 

Bibliothécaire-archiviste  : 

Secrétaire  pour  la  Section  géographique  : 

Secrétaire-adjoint  id. 

Secrétaire  pour  la  Section  archéologique  : 

Secrétaire-adjoint  id. 


DOUMERGDE. 

Général  Rasciil  ng 
Flahault. 
Coni'  Hére\(;er. 
PocK. 

TOURMER. 
DÉCHAUD. 

Lemoisson. 
Abbé  Fabre. 
Arambourg. 


COMMISSION 

MM.    DoUMERGUE. 

Bascrung  (Général) . 
Flahault. 


DU    BULLETIN 


M1\L 


Bérenger. 

DÉCHAUD. 

Abbé  Fabre. 


COMMISSION 

MM.  Dangles, 
Pontet. 
D""  Sandras. 


DES    FINANCES 


Liste  Générale  des  Membres 

de  la  "  Sûciélé  de  Géooraptiie  el  d'Arctiéoloyie  de  la  province  d'Oran  " 

au.   l»^!   Mar^s   1915 


PRÉSIDENTS    D'HONNEUR 

Al  M.   Le  Gouverneur  général  de  l'Algérie. 

G.   Hanotaux,   membre  de  l'Académie  Française,   ancien 

niinisfredes  Affaires  Etrangères,  i5,  rued'Auniale,  Paris. 

Le  général  Lyautey,  Résident  général  de  France  au  Maroc. 


VICE-PRESIDENTS    D'HONNEUR 

MM.   Le  Préfet  du  département  d'Oran. 

Le  Général  commandant  la  Division  d'Ohan. 
Maurice  Varnier,  Haut  Commissaire  du  Gouvernement  de 
la  République,  Oudjda  (Maroc  Oriental). 


MEMBRES    D'HONNEUR 

MM.   Le  Sénateur  du  département  d'Oran. 

Les  Députés  du  département  d'Oran. 

Le  Président  du  Conseil  général  d'Oran. 

Le  Maire  d'Oran. 

A.  HÉRON  DE  Villefosse,  membre  de  l'Institut,  if),  rue 
Washington,  Paris. 

René  Cagnat,  membre  de  l'Institut,  96,  boulevard  Mont- 
parnasse, Paris. 

Le  Colonel  Marchand,  explorateur,  20,  rue  du  Comman- 
dant Marchand,  Paris. 


PRÉSIDENT    HONORAIRE 

M.  MoNRRUN  Théogène,  avocat,  3,  rue  El  Moungar,  Oran. 


MEMBRES    HONORAIRES 


MM.  Ringer,  explorateur. 
Caron,  id. 

Monteil.       id. 


MM.   Nansen,  explorateur. 
Trivier,         id. 
Verminck,      id. 


LISTE    DES    MEMFiHES    IJE    l,A    SOCIÉTÉ 


MEMBRES    CORRESPONDANTS ' 

MM.   Uciié   Bassi:t,   doyen   de   la    Faciillé   des    Leltics,    77,    rue 

Michclet,  Alger. 
Augustin  Hku.naiu),  professeur  à  l'Universilé  de  Paris,   10, 

rue  Decarnps,  Paris  (XVF). 
D""  Carton,  membre  correspondant  de  l'Institut,  Klu'red- 

dine,  La  Goulellc  (Tunisie). 
Le    P.    Delattrk,    membre   correspondant   de    l'Institut, 

Carthage  (Tunisie). 
DouTTÉ  Ed.,  professeur  à  la  Faculté  des  Lettres,  Alger. 
Flamand  .T.-R.-M.,   professeur  à  la  Faculté  des  Sciences, 

87,  rue  Michclet,  Alger. 
Gentil    L..     fjrofcsscur-adjoint    à    l'Université    de    Paris, 

Sorbonne,  38  I>is,   rue  Denfert-Rochereau,  Paris  (V*). 
Mesplé  A.,  professeur  à  la  Faculté  des  Lettres,  président 

de  la  Société  de  Géographie,  Alger. 


MEMBRES    A    VIE< 

lyniil  racheté  leurs  otisalions  annuelles  par  un  versement  uni'inr  de  100  francs 

MM.    AzAN  P.,  (>ii|jilaine  détaché  à  la  Section  d'Afrique  de  l'ittat- 
Major  de  l'Armée,  ar,  avenue  de  Suffren,  Paris  (VIP). 
Bertiion  Paul,  chef  de  bataillon,  169,  r.  S'-Jacques,  Paris. 
BoNXARD.  avocat,  i^i,  rue  de  Vaugii'ard,  Paris. 
CiiEYLARD,    chef  de   bataillon   en    retraite,    Bois-la-Reine, 

Mustapha-Alger. 
Delinon,  directeur  de  la  Compagnie  du  Gaz,  Barcelone. 
Getten,  directeur  général  de  la  C  française  des  Chemins 

de  fer  de  l'Indo-Chine,  i4,  rue  Pelouze,  Paris. 
GoYT,   topographe  principal  en  retraite,    ig,   cours  Saint - 

André,  Grenoble. 
Massenet,   ingénieur  civil,  fi,   rue  Aubert.   Paris. 
Patxary,  instituteur  à  l'école  d'Eckmiihl,  Oran. 
Pastorino.  notaire.  12,  boulevard  du  Lycée,  Oran. 
TnoRiN,  propriétaire,  26,  boulevard  Bon  Accueil,  Alger. 


I   MM.  les  Sociétaires  sont  priés  de  faire  connaître  au  Secrétaire  général  le» 
rectifications  qu'il  y  aurait  lieu  d'apporter  aux  indications  qui  les  concernent. 


LISTE    DES   MEMBRES    DE    LA    SOCIETE 


MEMBRES    TITULAIRES 

MM.  Amillac  Albin  lils,  chirurgien-denlisle,  nw  du  Cercle 
Militaire,  Oran. 

Amokos  Ihomas,  nci^ociant,  GamhiîUii,  Oran. 

Anduze,  agent  de  la  C*®  Transatlantique,  Oran. 

Anfré,  capitaine  au  li^  Régiment  de  Tirailleurs,   Meknès. 

Anglard  Jean,  chef  de  section  aux  (ïhemins  de  fer  algériens 
de  l'État,  rue  Molière,  quartier  Saint-Pierre,   Oran. 

Aracil  (abbé),  vicaire  à  la  Cathédrale  du  Sacré-Cu'ur, 
i8.  boulevard  Magenta,  Oran. 

Arambouro  Camille,  ingénieur  1.  N.  A.,  doniaine  Saint- 
Joseph,    Oran. 

Ardaillon,  recteur  de  l'Académie  d'Alger,  Alger. 

Ardoin,  inspecteur,  chef  du  Service  Topographique,  Oran. 

Arc.oud  Paul,  vétérinaire  de  l'Abattoir,  Oran. 

Arnould  Alfred,  commis  des  Postes,  Bureau  Central,  Oran. 

AuzAS,  professeur  au  Lycée,  6,  rue  Vieille-Mosquée,  Oran. 

Balande    François,    entrepreneur    de    serruirerie,    87,    rue 

d'Arzew,  Oran. 
Bai.longue,  commis  des  Postes  et  Télégraphes.   i4,  me  de 

la  Remonte,  Oran. 
Barber,  consul  d'Angleterre,  pi.  de  la  République,  Oran. 
Barbie,    receveur    des    Contributions    Diverses,    27,    rue 

d'Arzew,  Oran. 
Barbin,  direclein-  d'école,   Lalla-Maghnia. 
Barisain,  négociant  en  matériaux  de  consfruclion,  boule- 
vard et  place  Sébastopol,  Oran. 
Barthélémy,  pharmacien,  54,  rue  Phili|)pe,  Oran. 
Bartitolomé,  directeur  des  Tramways  électriques,   Oran. 
Bartibas,     pharmacien,    conseiller    général,     adjoint     an 

Maire,  boulevard  Oudinof,  Oran. 
Bartoli  fils,  propriétaire,  7,  r.  de  la  Vieille-Mosrpiée,  Oran. 
Baschung,  général,  cadre  de  réserve,   Gambetla,   Oran. 
Bastos  Manuel,   manufacturier  en  tabacs,   2^.   ine  Miraii 

chaux,  Oran. 
Baudry,    ingénieur,    85,    Avenue   de   l'Arniée,    Etterberg, 

Bruxelles. 
Bauger,  capitaine  an  i^"  Ri'irimenf  d'infanleric,  Tonlf>use. 
Beaudouin,  propriétaire,    i5,  boulev.  Charlemagne,  Oran. 
Reaupuy,  président  de  la  Chambre  de  Commerce,  Hs.  rue 

de  Mostaganem,  Oran. 


Voir  renvoi   i,  page  5. 


LISTE    DES   MEMBRES    DE    LA    SOCIETE  / 

MM.   Beiir  Fr.,   négociant  en  vins,  boulevard   FronK-iil-Cosle. 

Saint-Eugène,  Oraii. 
lÎKN  Dwou  César,  clavelisalcur,  Mécli«'Tia. 
M'"''  Ben  Daoud  (V^"),  villa  Ben  Daoud,  [K)rles  de  Mascara,  ()ran. 
\1M.  IÎE^  Daoud,  capitaine  en  retraite,  i,  avenue  Louhet,  Oran. 
Bendjo  Prosper,  négociant,  32,  boulevard  National,  Oran. 
Ben  Savd,  étudiant  en  pharmacie,  5^,  rue  Philippe,  Oran. 
Bentavotj  Xavier,  propriétaire,  membre  de  la  Chambre  de 

Commerce,  boulevard  Lescure,  Onin. 
Bérenger,   chef  de   bataillon   de   réserve,    1/4,    rue   Beau 

prêtre,  Oran. 
Bernard,    capitaine,    détaché    à    la    Scctitjn    d'Xfricpic    de 

l'Fitat-Major  de  l'Armée,    i/i4,   boni.   S'-Geruiain,  Paris 
Bernaiek  Louis,  iiégoc*  en  bois,  r.  de  Mostaganem,  Oran. 
Beroue  Augustin,   administrateur-adjoint,  Frenda. 
Bertrand,  propriétaire,  conseiller  général,   Belle-Côte. 
Bethenod,  propriétaire,  faubourg  de  Miramar,  Oran. 
Beugnot,  capitaine,  commandant  le  •:'.''  escadron  de  Spahis 

Sénégalais  à  Saint-Louis,  p""  Dakar  (Afrique  Occidenl''). 
Bibliothèque  communale  de  ua  Vilue  de  Tlemcen. 
Bibliothèque  populaire  de  la  Mosquée,  École  Karguentah, 

38,  rue  d'Arzew.  Oran. 
Bibliothèque  du  Bureau  arabe,  Lalla-Maghnia. 
Bibliothèque  de  la  New-York  public  library,  New-York. 
Bibliothèque  de  l'Université  de  Harvard  (Cambridge), 

Etats-Unis. 
B1DAINE  Paul,  administrateur  des  Colonies,   commandant 

le  cercle  de  Siguiré  (Guinée  Française). 
BiENABE    Justin,    comptable    au    Service   Topographique, 

Avenue  Loubet,  Oran. 
BisTER  P.,  interprète  judiciaire,  Relizane. 
BizET  Albert,  ingénieur-architecte,  Djenan  Kssel  et  Hand, 

rue  Marey  prolongée,   Alger. 
Blanciiet,  négociant,  rue  de  l'Hôtel  de  Ville,  Oran. 
BoLELLi,  inspecteur  primaire,  .^r,  boul.  Sébastopol,  Oran. 
BoNiFAY  Paul,  propriétaire,  i,  rue  de  la  Paix,  Oran. 
BoMPAR  (abbé),  professeur  au  Séminaire,  Eckmiihl,  Oran. 
Bons   Gabriel,    capitaine  d'artillerie,    en    retraite,    délégué 

financier,  iTie  Lepelletier,  Oran. 
BoRiEs   Auguste,   délégué   financier,    Mostaganem. 
Borne,    officier    d'administration    du    Génie,    en    retraite, 

à  Settat  CVIaroc). 
Bosc  P.,  négociant,  rues  d'Tgli  et  de  r.olinar.  Oran. 
BoiTTY  Joseph,  pharmacien,  Tlemcen. 
BoYER    DE    Choisy    (de),    commis    aux    Hypothèques,    ruo 

Duvivier,    Oran. 


Voir  renvoi   i.  page  5. 


O  LISTE    DES    MEMBRES    DE    LA    SOCIETE 

MM.   Brégeat,    docteur  en    médecine,    directeur  de    la    Santé, 

kl,  boulevard  National,  Oran. 
Brousses    Clément,    directeur   de    l'Institution  de    Sonis, 

Sidi-hel-Âbhès. 
Bruneau,  professeur  de  dessin,  12,  houl.  Malakoff,  Oran. 
Brunel  Camille,  ^■•éomètre  principal  en  retraite,  Maison 

Blanche,  près  Maison  Carrée. 
Brunie  Pierre,  ingén""  E.  C.  P.,  loi,  r.  de  Mostaganein,  Oran. 
Brustlein  Henri,    ing'"-construct'",    70  r.   d'Arzew ,   Oran. 
Buzenet  Jean,  propriétaire,  boulevard  du  Lycée,  Oraii. 
Buzenet  René,  agent  commercial,  Tanger. 

Camallonga,  propriétaire,  domaine  d'Arbal  (Saint-Maur). 
Camara  oficial  de  Commebcio,   Industria  y  Navegacioin 

DE   MeLILLA. 

.    Canal  J.,  ingénieur  civil,  5,  rue  Amilcar,  Tunis. 

Capifali,  receveur  des  Postes  et  Télégraphes  en  retraite, 

Calvi  (Corse). 
Carcopino  Jérôme,    professeur   à  la   Faculté   des   Lettres, 

directeur  du  Musée  des  Antiquités,   Ixo,   rue  Salvandy, 

Alger. 
Cardona,  chancelier  du  Consulat  d'Espagne,  i,  boulevard 

Charlemagne,  Oran. 
Cardonne,  secrétaire  du  Syndicat  agricole,  Tlemcen. 
Carles  Victor,  négociant,   i,  rue  de  la  Paix,  Oran. 
Carli,  agent  général  d'assurances,  i5,  boulevard  Charle- 
magne,   Oran. 
Carrafang,  propriétaire,  délégué  financier,  Saïda. 
Carteaux    Octave,    officier    d'administration   en    retraite, 

2/î,  rue  d'Alsace-Lorraine,  Oran. 
Casalta    Dominique,     commis    dessinateur    au    Service 

Topographique,  2,  rue  de  Paris,  Oran. 
Castanié     Joseph,     armateur,     rue     Canroberl,     Miramar 

supérieur,  Oran. 
Caulet  Jules,  sous-ingénieur  des  Ponts  et  Chaussées,  quar- 
tier Saint-Pierre,  Oran. 
Cavaliéro  Barnett,   courtier  en  grains,   !x.   rue  Boëldieu, 

Alger. 
Chabaud     Paul,     receveur     des     Postes     et     Télégraphes, 

Relizane. 
Chandelier     Georges,     propriétaire,     6,     boulevard     du 

2®  Zouaves,  Oran. 
Chanson  (abbé),   curé  de  L'Hillil. 
CuAPELiN,   propriétaire,   rue  Marie-Thérèse,    Oran. 
CiiAREix  Jacques,  officier  interprète  au  Bureau  des  Affaires 

Indigènes,   Lalla-Maghnia. 


Voir  renvoi   i,  page  5. 


,ISTE    UDS    iMlîMUHliS    DE    LA    SOCIETE 


9 


\nî.    (  ji\i  i;i,\iN    Louis- \irii;iiHl,     |)r()|)ri('-liiiic,    villafrc    niimir, 

Oraii. 
CiiATROUSSK   Alx'l,    ii(liiiiiiisliiili'iir-  des  MïiiiiL's   Indigènes, 

La  Cal  le. 
(liiiusTAT  1)    .losicpli.    (lircclcur    (rassiiraiit-cs,     i    nie    de    la 

Bastille,  Oraii. 
CoiiKN-SoLAi,    A.,    (lofleiir    en    inédeeine,     lo,    boulevard 

Seguin,  Oraii. 
CoiiEN-SoLAi,  E.,  [jiur  au  Lycée,  3o,  howl.   Seguin,  Oraii. 
CoKJNARD    Paul,    ingénieur    E.    C.    P.,    4o,    nie    Alsace- 
Lorraine,  Oraii. 
Coi.oMBAM    Jules,     docteur    en     inédeeine,     place    de     la 

Bastille,   Oraii. 
CoMMON,  avoué,  Ixo,  boulevard  Seguin,  Oraii. 
Conseil  municipal  de  Pfrrégaux. 
Conseil  municipal  de  Relizane. 
Conseil  municipal  de  Saint-Denis-du-Su;. 
Conseil  municipal  de  Sidi-bel-Abbès. 
CosTANTi.M,    inspecteur    divisionnaire    des    Douanes,     i, 

boulevard  de   l'Industrie,   Oran. 
Cour   A.,    professeur  à   la  chaire  d'arabe,    place   Négrier, 

Constantine. 
Courcelle  Abel,  docf  en  médecine,  5,  I).  Seguin,  Oran. 
CouRRECii,  direct""  de  l'École  du  faub.  d'Eckimilil,  Oran. 
Cruck  Eugène,   rédacteur  à   VEfho  d'Oinn,    i,    boulevard 

Chaiiemagne,  Oran. 

Dalbéra  Albert,  propriétaire,  5,  place  d'Armes,  Oran. 
Dandine   Achille,   membre  de  la  Chambre  de  Commerce, 

77,  rue  d'Arzew,  Oran. 
Dangles  Victor,  géomètre  du  Service  Topographique,  Ix, 

rue  Saint-Louis,   Oran. 
Dakmon  Moïse  de  Guenoun,  mercier,  3,  pi.  d'Armes,  Oran. 
Déciiaud  Edouard,  secrétaire-archiviste  de  la  Chambre  de 

Commerce,  place  de  la  République,  Oran. 
Decrion  Constant,   propriétaire,   Sidi-bel-Abbès. 
Dklabv  Xuma,  chef  de  bureau  au  Service  Topographique, 

Oran. 
Délace,   ingénieur  en  chef  des  Ponts  et  Chaussées  de  la 

circonscription  Ouest,  rue  La  Tour  d'Auvergne,  Oran. 
Deliiomme,    capitaine    au    Service    des    Renseignements, 

Casbah   Tadia   (iNIaroc  Occidental). 
Demas   L)ominique,    architecte-voyer,    Tiaret. 
Dehos  Julien,  négociant,  pi.  Garbé,  maison  Ribeton,  Oran. 
Deurikn  Louis,  ingénieur-chimiste,  i,  rue  Anber,  Oran. 


Voir  renvoi   i,  page  5. 


dO 


LISTE    DES   MEMBBES    DE    LA    SOCIETE 


MM.  Descuamps,  ad  jii(laiit-(het',  au  convoi  auxiliaire,  n"  i, 
Fez  (Maroc). 

Descours,  pr()|)ii('lairc,  délégué  linancier,  uiaiic,  Saiiil- 
DeTlis-du-Si^^ 

Desseaux  Louis,  négocianl  en  bois,  boni.  Fullon,  Oran. 

Directeur,   Hôtel   Coulineiilal,    Oran. 

Djian  Georges,  officier  interprèle  au  Tchad. 

Dobrenn,  chirurgien-dentiste,  7,  boulevard  Seguin,  Oran. 

Doumergue,  professeur  au  Lycée,  2,  rue  Manégat,  Oran. 

Dreveton  Julien,  propriétaire,  Nemours. 

DuPUY  Charles,  [)ropriétaire,  membre  de  la  Chambre  de 
Commerce,  3,  rue  de  Lyon,  Oran. 

DuRET  Ferdinand,  avocat,  délégué  financier,  18,  boule- 
vard Seguin,   Oran. 

Dutartre,  commandant  en  rciraite,  directeur  de  la  Villa 
de  Convalesctnice,  Eckmiihl,  Oran. 

DuzAN,  docteur  en  médecine,  maire,  Saint-Leu. 

Elghozi  Moïse,  négociant,  ko,  boulevard  National,  Oran. 
Ei.LiKER,  ingénieur  de  la  voie  à  la  C'^  des  Chemins  de  fer 

de  l'O.  A.,  Sidi-bel-Abbès. 
Emerat,  négociant,  conseiller  général,  9,  place  d'Orléans, 

Oran. 
Engel,  ingénieur  civil  E.  C.  P.,  Sa,  boul.  National,  Oran. 
EsTAUNiÉ,     secrétaire-adjoint     de     la     commune     mixte, 

Montagnac. 
Etienne     Eugène,     vice-président     de     la     Chambre     des 

Députés,    II  l'is^   Ywe  Saint-Dominique,  Paris. 
EvÊQUE  (L')  du  diocèse,  Oran. 

Fabre  (abbé),  curé  de  la  paroisse  de  Saint-Louis,  3i,  rue 

de  l'Eglise,  Oran. 
Fabre    Sylvain,    receveur   des   Contributions    Diverses   en 

retrciite,  11.  me  deis  Jardins,  Oran. 
Fabre  la  Maurelle,  commis  princi|)al  à  la  Direclion  des 

Chemins  de  fer  de  l'Etat,  77,  rue  de  Mostaganem,  Oran. 
Fargues  Henri,  lieutLMuinf.  adioint  au  colonel  commandaul 

le  régiment  de  marche  du  2^  Etranger,  Fez. 
Farjon  Ernest,  propriétaire,  rue  du  Chemin  de  Fer,  Oran. 
FÉRAUD,  ingénieur  civil,  !\,  rue  Michelet,   Alger. 
Flaiiault,  ingénieur  E.  C.  P.,  87,  r.  de  Mostaganem.  Oran. 
Fleureau   Georges,    avocat    agréé    au    Tribunal    de   Com- 
merce, 43,  rue  de  Richelieu,  Paris. 
Flotte  de  Roque vaire  (R.  ïîe),  chef  du  Service  des  Cartes 

au   Gouvernement  général  de  l'Algérie,    6,   boulevard 

Laferrière,  Alger. 


Voir  renvoi  i,  page  5 


LISTE  DKS  miîmijues  de  la  société  11 

MM.    Foi  Li)  Mlicd-Israi'!,  |)i'o|)ii(';laiie,  9,  boul.  Nulioiial,  Oran. 
FouLQUiEH,  (loclciir  CM  ni»''(l<'rine,  9,  nie  de  Moptaj^'aiieiii, 

Oran. 
FouQUE  Léon,   iiii[)riiiiciir,   rue   lliuillier,   l\,  Oran. 
FouRNiAL,  mcdeciii-iiiajor,  Fez  (Maroc). 
FouRMER    P.,    capitaine    anx    Alïaircs    Indigènes,    liiskra 

(Constanline). 
Français  Léopold,  piopriélairc,  2G,  rue  d'Orléans,  Oran. 
Fronty,  directeur  du  Crédit  Lyonnais,  Oran. 

(Jabkiel  Charles,  courtier  en  vins,  Ecivuiulil,  Oran. 

Galan  (abbé),  curé  de  Saint-Eugène,  Oran. 

Game  Louis,  juge  de  paix,  Arzew. 

Gaquière,  capitaine  au  4i^  régiment  dliilanterie,  bennes. 

Garoby  Edouard,  secrétaire  général  de  la  Préfecture,  Oran. 

Garoby    Jean,    professeur    à    la    Médersa,    26,    boulevard 

Bon-Accueil,  Alger. 
Garrouste  Charles,  contrôleur  des  Contributi'  iis  Diverses. 

place  Sébastopol,  maison  Barisain,  Oran. 
Gasquet  Camille,  notaire,  boulevard  Seguin,  Oran. 
Gaubert,  directeur  des  Contributions  Hiverses,   place  de 

la  République,    Oran. 
Gaudefroy-Demombynes,    professeur   à    l'Ecole   Coloniale, 

9,  rue  Bara,  Paris  (VP). 
Gaudibert,  docteur  en  médecine,  rue  Lahitte,  Oran. 
Gauthier,    capitaine   du    Service   des    Affaires   Indigènes, 

Aïn-Sefra. 
GÉRARD  E.,  propriétaire,  Palikao. 

GiBou  Emile,  entrepreneur  de  travaux  j)nblics,  Saïda. 
Girard,  propriétaire,   11.  iiie  Pélissier,  Oran. 
GiRAUD  Amédée,   villa  Fanny,   faubourg  Delmonte,   Oran. 
GiRAUD  Ednioutl,  avoué,  2,  rixe  Dumont  d'Ui'\ille,  Ali>or. 
GiRAUD  Louis,  avocat,  6,  boulevard  du  2*  Zouaves.  Oran. 
Glatard,  docteur  en  médecine,  chef  de  service  à  rH«')pifal 

civil,  3o,  boulevard  Seguni.  Oran. 
M"®     Glotz,    professeur    agrégée    au    Lycée    de    .Jeunes    Filles, 

79,  rue  d'Arzevv,  Oran. 
MM.    GoDCHOT,  général,  du  (  adre  de  résene,   Auxerre. 

Gognalons,     oflicier--interprète,     avenue     Cassaigne      La- 

ghouat. 
GouT  Louis,  receveur  de  rEnrcgistrement,  Sidi-bel- Al)bès. 
Grandjean,  directeur  d(>  l'Ecole  .Jean  Macé.  Oran. 
Grai'INET,    lieutenant     adjoint    au    ('omniandant    militaire 

du  Territoire,  A.ïn-Sefra. 
GRÉ(.orRE  Félix,   notaire,   Alger. 


Voir  renvoi   i,  page  5. 


12 


LISTE    DES   MEMBRES    DE    LA    SOCIETE 


MM.    Grkuzard  Charles,  lo,  rue  de  la  Pépinière,  Paris,  (8®). 

(jiU(;uER  Jules,   contrôleur  des  Domaines  à   la   Résidence 

Générale,    Rabat. 
Griguer  Léon,  interprèle  judiciaire,  Le  Télagli. 
Gross  Eugène,    pubiiciste,    secrétaire  de  la   Rédaction   de 

l'Echo  d'Oran,  Oran. 
GsELL,    professeur   au   Collège  de   France,    92,   rue  de   la 

Tour,  Paris. 
GuÉRiDO,  docteur  en  médecine,  /ig,  rue  d'Arzew,  Oran. 
Guillaume,  préparateur  au  Lycée,  3,  rue  Vieille-Mosquée, 

Oran. 
Guillet,  général  de  brigade  du  cadre  de  réserve  de  l'État- 

Major  de  l'Armée,  iro,  rue  d'ArzcAv,  Oran. 
GuiLLOT  Maurice,  professeur-adjoint  au  Lycée,  Oran. 
GuiRAND,  avoué,  18,  rue  Relleville,  Oran. 
GuYON,  lieutenant  de  réserve,  8*^  Tirailleurs  Algériens,  Fez. 

Hablvgue  Pierre,  professeur  au  Lycée,  Oran. 

Hadj  Hacène  Allal,  instituteur  en  retraite,  chevalier  de 

la  Légion  d'honneiu",  officier  de  l'Instruction  publique, 

10,  rue  Léoben,  Oran. 
Harburger  Jules,  avocat,   10,  boni.  Charlemagne,  Oran. 
Hassan  Léon,  négociant,  69,  rue  Philippe,  Oran. 
Haimidakis,  professeur,  membre  de  l'Académie,  au  Pirée, 

Grèce. 
Heiblig,    sous-directeur   de   la   Société   Générale,    79,    rue 

d'Arzew,  Oran. 
Heiivtz  Désiré  et  fils,  imprimeurs,  20,  boni.  Malakoff,  Oran. 
Henrion,  Diégo-Suarez  (Madagascar). 
Henrys,     général,     cominandant    le     cercle    de     Meknès 

(Maroc  Occidental). 
HÉRELLE  Amédée,  proj)riétaire,  rue  de  Moslaganem,  villa 

Sauzède,  Oran. 
Herson,  général  de  division  du  cadre  de  réserve.  Sceaux 

(Seine-et-Oise). 
HiRN  Denis,  commis  principal  des  Postes,  OraiL 
HouDOti  Albert,  propriétaire,   a,  rue  Arago,  Oran. 
IIuertas  Raphaël  (chanoine),  aumônier  des  SS.  Trinitaires, 

fi,  rue  de  Rerlin,  Oran. 
HuMMEL  Edouard,  propriétaire,  79,  rue  d'Arzew,  Oran. 
HuoT  Charles,  directeur-adjoint  de  VEcho  d'Oran,  5,  rue 

Général  Joubert,  Oran. 
HuoT  Louis,  ingénieur  à  la  Compagnie  des  Eaux,  10,  rue 

Ampère,  Oran. 

Ibrahlm  bey  Br.NSALEM  BEN  Hamida,  Conseiller  municipal. 
Oran. 


Voir  renvoi   i ,  page  5. 


LISTE    DES    MEMliKES    DE    LA    SOCIETE  I^'» 

MM.    IsAAc  Pierre,  raissicr-adjoint  du  Mont-de-Piété,  Oran. 
IvARA    Albert,    adrniriistraleur-adjoinl,    Freiida. 
Jaïs,  directeur  du  ('-redit  Foncier  et  Agricole,   boulevard 

du  Lycée,  Oraii. 
Jarsaillon  Fdonaid,  piopi  ii'Iaire,  35,  boul.  Sefrnin,  Oniii. 
Jarsaillon    Louis,    docteur   eu    rucdeeiiie,    i6,    rue   de    la 

Paix,  Oran. 
Jassero.n  Ferdinand,  docteur  en  uicdecine,  9,  rue  d' Arz(!\v, 

Oran. 
Jauffret,  avoué,  10,  rue  Ampère,  Oran. 
Jeanmaire,  professeur  au  Lycée,  Besançon. 
jEANMiY,    chef   d'escadron,    conmiandant    (rArlilb'iic,    3-, 

boulevard  Srl)as(()pol,  Oran. 
Jrannkl,  docteur  en  médecine,    if),  inv  Jussieu,  Paris. 
JoBERT,  manufacturier,  maire  de  la  ville  de  Moslaganem. 
JoLiET  (abbé),  aumônier  du  pensionnai  \.-D-des-Champs, 

io4,  rue  de  Moslaganem,  Oran. 
.ÎON'CHAY    (Sarton    du),    Heutenant-colonel    directeur    des 

Etablissements  hippiques,  Alger. 
Jouinot-Gambetta,  colonel,  commandant  le  régiment  de 

marche  de  Spahis,  Casablanca  (Maroc  Occidental). 
Julien  André,  étudiant,  27,  boulevard  Marceau,  Oran. 
Julien  Louis,  propriétaire.   18.  quai  Debosc,  Cette. 

Kalfcn-PiiMienta,  négociant,  rue  Saint-Félix,  Oran. 
Karsenty  Albert,  agent  général  d'assurances,  7,  boulevard 

Seguin,  Oran. 
Keime  Emile,  secrétaire  rédacteur  à  la  Mairie,  Oran. 
Kiener,  ancien  juge,  Eckmùhl,  Oran. 
Klein,  directeur  de  l'usine  à  huile  de  Delmonte,  Oran. 
KcEBEL,  directeur  de  la  brasserie  VAlgérietine,  Oran. 
Krieger  Edouard,  contrôleur  principal  des  Contributions 

directes,  boulevard  de  Tivoli,  Oran. 

Lacave-Laplagne   Jean,    administrateur  de   la   commune 

mixte  d'Ammi-Moussa. 
Laffargue,   administrateur-adjoint,   Saint-Cloud. 
Lafforêt,  ingénieur,  entrepreneur,  Oudjda  (Maroc). 
Lamothe    (de),   colonel,  hors    cadre,  chef    du  Service  des 

Renseignements,  Marrakech  (Maroc). 
Lamur   Louis,    propriétaire,   délégué   financier,    conseiller 

général,  71,  nie  de  Mostaganem,  Oran. 
Laurent,  conseiller  général,  Perrégaux. 
Lauret  François,   pharmacien,   carrefour  de  Karguentah. 

Oran. 


Voir  renvoi  i,  page  5. 


14  LISTE    DES    MEMBRES    DE    LA    SOCIÉTÉ 

iMM.    LeboiN  Paul,  médecin  principal  à  l'Hôpital  militaire,  cj,  rue 

Alsace-Lorraine,  Oran. 
Le  Camus  Pierre,  architecte,  27,  r.  Alsace-Lorraine,  Oran. 
Leclèke,  capitaine  au  SB**  Régiment  de  Ligne,  Belfort. 
Lecocq,  professeur  d'histoire,  rue  Bel-Ahhès,  Tlemcen. 
Ledeint,  propriétaire  au  Télagh. 

Legeas,  capit.  en  congé,  5o,  rue  Nationale,  Constantine. 
Legendre,   payeur  principal  en   retraite,    villa   Legendre, 

à  Trouville,  Aïn-el-Turck. 
Lemoisson,  professeur  au  Lycée,  7,  rue  Dutertre,  Oran. 
Levain,  ingénieur,  à  Lardy  (Seine-et-Oise). 
Levé,  général,   commandant  le  territoire  militaire  d'Aïn- 

Sefra. 
Levet,  commis  principal  des  Postes  et  Télégraphes,  Oran. 
LÉvy,  J.  S.,  négociant,  5i,  boulevard  National,  Ora». 
LTk  ILLIER  Maurice,  architecte,  rue  El-Moungar,  Oran. 
Lisbonne,  délégué  financier,  maire  de  Sidi-bel-Abbès. 
Llabador  Oct.,  licencié  en  droit,  agent  maritime,  Nemours. 
Loge   Maçonnique    «  l'Union   Africaine  »,    26,    boulevard 

Sébastopol,   Oran. 
LouBiÈs,  officier  d'administration,  Debdoii  (Maroc). 
Lyautey  h.,  général,  Résident  Général  de  France  au  Maroc, 

Rabat. 

Mager  Henri,   ingénieur   en    hydrologie  souterraine,    21, 

rue  Henri  Monnier,  Paris. 
Manouené,  prof  de  la  chaire  d'agriculture  à  Mostaganem. 
Maraval,  docteur  en  médecine,  47,  boul.  National,  Oran. 
Marchand  Xavier,  propriétaire,  io5,  rue  d'Arzew,  Oran. 
AIarégiano,  notaire  honoraire,  7,  r.  Edgard  Weber,  Oran. 
Margot,  officier  interprète  du  Service  des  Renseig*'^,  Fez. 
AL\RTiN  Ferdinand,  avocat,  8,  boul.  du  2''  Zouaves,  Oran. 
Martinez    Antoine,   greffier   en    chef   du    Tribunal    civil, 

boulevard  de  Tivoli,  Oran. 
Massiou,  rédacteur  en  chef  de  La  Vciité,  Oran. 
Masson,    contrôleur   des    I^roduits    Communaux,    65,    rue 

d'Arzew,    Oran. 
Mayaudon,  notaire  honoraire,  rue  Paixhans,  Oran. 
Mellet  Pierre,   agent-voyer  d'arrondissement,   Frenda. 
Merlin,  directeur  de  la  Banque  d'État,  Rabat  (Maroc). 
Mesrine  Charles,  avoué,  rue  El-Moungar,  Oran. 
Metz  (de),  maire  de  Lamoricière. 
Meziat,  négociant  en  vins,  7,  rue  de  la  Paix,  Oran. 
MiCAL,  négociant  en  vins,  aven,  de  la  Petite  Vitesse,  Oran. 
Micheler,  colonel  au  29®  Régiment  d'Infanterie,  Autun. 


Voir  renvoi  i,  page  5. 


MAI 


MSTE    DES    MEMBRES    DE    LA    SOCIÉTÉ  15 

Miu.k-Poi:t,n,;o>,  ,.n .pri.-la i rc,  nK.i.v  .l,- Hio-S.la.ln    8    m. 

Anipric,  Oniii. 
MiLsoM,  i„gn,ieur  civil  des  Mines,  rue  Chénier    Oraii 

Onin""'  ''"■''^'"'  "^^  '^  '^'^^''''''^  ^^''"'^'-^^^^  (Agence  d'Oran), 

Molle,  docteur  en  médecine,  rue  Edward  Wel>er    Oran 
MoNBRUN,  avocat,  3,  rue  El-Moun-ar,  Oran. 
MoNzoN,  inspecleur  des  Contril.ulions  diverses,  H   C    chef 
du  Service  des  perceptions  et  régies  chérifiennes.  Ou.'l  jda 
MoTKLEY  Albert,  propriétaire,  El-Ançor  ' 

^^%JTl'T^\  ^'^''■''*"""   '^'   ^'^'''^'   '^'•''"«''•^'   supérieure, 
bidi-bel-Abbès. 

Navarre  H.,  négociant,  rue  de  Tlemcen,  Oran. 

^EHLiL,  oITicier-interprète  à  la  Résidence  générale,  Rabal 

^FSSLER,  consul  de  la  République  du  Pérou,  boulevard  d.- 

1  Industrie,  Oran. 
N.coLAÏ,  capilaine  de  port  en  reiraile,  lo,  r.  d 'Orléans,  Oran 
McoLAs  Jacques,  docteur  en  médecine,  Lamoricière. 
Méché^ia^''^   ""''  '^''  ^'  ^''■'-^"^^  "^'^  ^«'^^'^««  incl.gènes, 

Olivier  Pierre,  propriétaire,  Bou-Tlélis 
Otten    Jean     directeur   de   l'usine   cotonnière    de    Saint- 
Eugène,  Oran. 

OuDRi,  général  de  division,  du  cadre  de  réserve,  à  Durtal 
(Maine-et-Loire). 

Pachtere  (de)  boursier  d'études,  45,  rue  d'Ulm,  Paris 

dTl'0"r^,?^'"'  ^V,  ^-   K'   '''''''^''  ^«  '«  Direcli'on 
de  to.  A.,  27,  rue  Alsace-Lorraine,  Oran. 

Pages  Jean,  armateur,  53,  rue  d'Arzew,  Oran. 
Paire,  docteur  en  médecine,  6,  rue  Ampère,  Oran. 
PARTKr'''  ^'f '"'  T"'^-  '"•  '•  ^"^  ^'^"gir^'-d,  Paris  (VP) 
BTni:Ou'n';f     "'  ^'"'  ''  '"'"^^^  '''  ^^^^'^  J-^^'^-es. 

PArcATxl''rf ''.'"'  ^",".':d-"-'  6,  boul.  Seguin,  Oran. 
PASCALI^  Charles     président   du  Tribunal   de  Commerce 
3o,  boulevard  Seguin,  Oran.  ">'erce, 

Passeron,  sous-ingénieur  des  Ponts  et  Chaussées,  faubourg 
saint-Eugene,  Oran.  ^ 

Pedoussaud,  avenue  Raynal,  Mostaganem 

P^r'"";.'?^/*''*"'  ^^'  ^"»l^^-«rd  Sébastopol,  Oran. 
Phrez  Adolphe,  sous-chef  de  bureau  au  Service  Topogra- 

phique.  3.  rue  de  Lvon,  Oran 
Pkrez  Henri,  banquier,'  pi.  Garbé,  maison  Ribeton.  Oran. 
____P™o^i^Lou^  en  médecine,  rue  de  l'Aima;  Oran. 

Voir  renvoi  i,  page  5. 


16  LISTE    DES    MEMBRES    DE    LA    SOCIETE 

MM.    Petit    Claude,    sous-ingénieur  des    Ponls    et    Chaussées, 

conseiller  général.  Mascara. 
Petit  M.,  capitaine,   i*"  Régiment  Etranger,  Taza  (iVlaroc 

Oriental) , 
Peyras,  bureau  central  de  la  Compagnie  des  Chemins  de 

fer  de  l'Ouest- Al g^'ien,  Sidi-bel-Abbès. 
PiÉRART  Alexandre,  administrateur-adjoint,  Télagh. 
PiNEL  Henri,   propriétaire,   Bou-Tlélis. 
PiTOLLET,  notaire,  conseiller  général,  i,  r.  delà  Paix,Oraii. 
PocK,    caissier  de    la    succursale   de   la    Caisse    Nationale 

d'Épargne,  Oran. 
PoMMiÈs  Jules  (abbé),  vicaiie,  Mostaganem. 
Pontet,   directeur  des   Contributions   directes,    rue  de   la 

Bastille  prolongée,  Oraii. 
PoRTHÉ  Raymond,  propriétaire,  Frendah. 
PoTTiER  W.,  juge  d'instruction,  Oran. 
PoussEUR,  directeur  de  la  C'^  du  Gaz,  36,  b.  National,  Oran. 
Prades  Benjamin,  réparîiteur  des  Contributions  diverses, 

Nemours. 
Prat  Clément,  négociant,  boulevard  Seguin,  Oran. 
Princeteau  Henry,   rédacteur  à  la  Direction  de  la  Dette 

Marocaine,  Tanger. 

QuiÉVREux  Clément,  huissier.  Le  Télagh. 

Rahal  Mohammed  ben  M'Hamed,  caïd  de  Nédronia. 

Ramier,  conseiller  général,  rue  El-Moungar,   Oran. 

Recoing  Maurice,  topographe,  li,  boul.  Lescure,  Oran. 

Renaud  A.,   propriéf'',  conseiller  général,   Sidi-bel-Abbès. 

René-Leclerc,  chef  du  Service  des  Etudes  économiques. 
Résidence  générale.  Jardin  du  Télégraphe,  Ral)at  (Maroc) 

RÉUNION  des  Officiers,   Ain-Sefra. 

RÉUNION  des  Officiers,  Oran. 

Rey,  capitaine  au  24''  d'Infanterie  à  Aubervilliers  (Seine). 

Robert  Edouard,  proviseur  du  Lycée,  Oran. 

Rognon,  secrétaire  général  de  la  Préfecture,  Oran. 

Rolland  Wilhem,  chef  de  bataillon,  quai  Duperré,  La 
Rochelle. 

Roman  Noël,  directeur  des  Postes  et  Télégraphes,  Oran. 

RouLLAND,  propriétaire,  conseiller  général,  Sidi-bel-Abbès. 

RoussET,  sous-inspecteur  de  l'Enregistrement,  i,  rue 
Thierry,  Oran. 

RoussET  Louis,  propriétaire-viticulteur,  i3,  rue  de  Mosta- 
ganem, Oran. 


Voir  renvoi  i,  page  5. 


LISTE    DES    MEMBRES    DE    LA    SOCIÉTÉ  17 

MM.    Koi  \-Fiu;i.s.siM',NG,   av<K-al,   a,   boni,  du   i».''  Zouaves,  Oraii. 
RouziÈs  Casimir,  inslituleur,  Tizi. 
Russi,    docteur   en    médecine,    vice-consiil    d'Ilalie,    quai 

Sainte-Marie,  Oraii. 
Sabatier,  avocat-défenseur,  conseiller  général,  Tlemcen. 
Sabouret,    agent    général    d'as.^uranccs,     3^,     boulevard 

National,  Oraii. 
Saint-Geumain,   sénateur  d'Uran,    i,   rue   Blanche,    Paris. 
SAiiNrpiEURE  Charles,  négociant,  l'aub.  Saint-Charles,  Oran. 
Sajous,  topographe  de  circonscription  du  Service  Topo- 
graphique,  Tiarel. 
Sanduas,  docteur  en  médecine,  5,  boulevard  Seguin,  Oraa. 
Saurel  Jules,  lils,  avoué,  Sidi-bel-Abbès. 
Say  Louis,  lieutenant  de  vaisseau  de  réserve,  Port-Say. 
Schlotterbeck    Frédéric,    ingénieur,    maison    Brustlein, 

Oran. 
ScnfT.NBERG,  ingénieur  ordinaire  des  Ponts  et  Chaussées, 

Mascara, 
ScHOCRON,  commis  des  Domaines  et  Moslafadal,  Tanger. 
ScoTTi,  armateur,  3,  rue  de  Rome,  Oran. 
Séchet,  répétiteur  au  Lycée,  Oran. 
Sécrétant,  professeur  au  Lycée,  Oran. 
Section  des  Affaires  Indigènes  dk  l'P.tat-Major  de  la 

Division,  fi5,  boulevard  National,  Oran. 
Segui  François,  contrôleur  des  Contributions  Diverses,  i4, 

rue  Bruat,  Oran. 
Sénac  Antonin,  négociant  en  bois  et  matériaux  de  cons- 
truction, faubourg  Médioni,  Oran. 
Sépulohre,  maréchal-des-logis,   2"  Spahis,  .Aleridja. 
Serre  Telmon  (du),  lieutenant  au  2*^  Groupe  d'Artillerie, 

Bou-Denib. 
Serret  Gaston,  vérificateur-adj.  des  Douanes,  Casablanca. 
Simonin,  inspecleur  des  Chemins  de  fer  algériens  de  l'Étal, 

5,  rue  Sirtienne  (Bab  el  Oued),  Alger. 
SissoN  Jean,  chef  d'exploitation  des  mines  de  Sidi  Kham- 

ber,  par  Sidi  Mesrich  (Constantine). 
Smadja  Gaston,  négociant,  21,  rue  Saint-Félix,  Oran. 
SoLiGNAc,  professeur  au  Lycée,  Constantine. 
S01PTEUR,  propriétaire,  Tlemcen. 
SouLEYRE,  docteur  en  médecine,  Arcachon. 
Soulier,    docteur    en    pharmacie,    inspecteur    des    phar- 
macies du  département,   ^^,   boulevard  Seguin,   OraiL 
Stf.phanopoli, vice-président  du  Conseil  de  Préfecture,  Oran. 
Storto,  négociant,  33,  boulevard  Seguin,  Oran. 
SuQUET,  ingénieur,   16,  rue  Paixhans,  Oran. 
Sureau  Emile,  agent-voyer  d'arrondissement,  Bel-Abbès. 


Voir  renvoi  i,  page  5. 


18  LISTE    DES    MEMBRES    DE    LA    SOCIETE 

MM.    Tafanelli,   prolesseur  au  Collège,   Tlenicen. 
Tardy,  architecte,  Tanger. 
TiiiÉBAULT,  conservateur  des  Hypothèques,  i6,  boulevard 

Sébastopol,  Oran. 
Thomas,  fondé  de  pouvoirs  de  la  maison  Mazella,  Rahat, 

ou   io5,   rue  Michelet,   Alger. 
ToLÉDANO  Isaac,  négociant,  5i,  boulevard  National,  Oran. 
ToRDJMAN  Maklouf,  notaire,  Frenda. 
TouRNAYRE,    pharmacien,    Hammam-bou-Hadjar. 
Tourné,  receveur  principal  des  Douanes,   rue  du  Crève 

Cœur,  Oran. 
TouRNiER,  agent  de  la  Société  des  Auteurs,  Compositeurs 

et  Editeurs  de  Musique,  place  de  la  République,  Oran. 
Trotin  Albert,  conseiller  du  Commerce  extérieur,  domaine 

d'Hamiza,  Arzew.  A  Paris,  9,  111e  du  Comm*^  Marchand. 
Trouin  César,  député  d'Oran,  8,  rue  Miromesnil,  Paris. 

Vaffier  Ernest,  lieutenant  de  vaisseau  de  réserve,  16,  rue 

du  Rocher,  Paris. 
Valérian  Louis,  architecte,   i/i,  rue  Charles-Quint,  Oran. 
Valette,  syndic  de  faillites,  2,  rue  Schneider,  Oran. 
Vallois,  capitaine  en  retraite,  Daours  (Somme). 
Valois    (de),    oilicier  d'administration    en    retraite,    villa 

Louise,  Saint-Eugètie,  Oran. 
Var.mer  Abel,  administrateur-adjoint  de  commune  mixte, 

Montagnac. 
Varnier  Maurice,  Haut  Commissaire  du  Gouvernement  de 

la   République,   Oudjda. 
Venisse     René,     administrateur     de     commune     mixte, 

contrôleur  général  adjoint  des  services  de  la  Sûreté,  au 

Gouvernement  général  de  rAlgérie,-29,  rue  Hoche,  Alger. 
Viala  Eugène,   interprète  près  le  Tribunal   civil,    Mosta- 

ganem. 
ViiNsoT  René,  officier  vétérinaire,  Oudjda  (Maroc). 
VoiNOT,  capitaine  d'artillerie  hors  cadre,  chef  du  Bureau 

du  Service  des  Renseignements,   Oudjda. 

Weil,  grand  rabbin,  5,  boulevard  Sébastopol,  Oran. 


Voir  renvoi   i,  page  b. 


s  0 CI  É T  K s     C 0  H  R  E  S P 0 N  ï)  A N T E S 


[0  SOCIÉTÉS  DE  GÉOGRAPHIE 


Paris.  —  Société  de 
Géographie. 

Société  de  Géo- 
graphie commer- 
ciale. 

Alger. 

Bordeaux. 

Bourges. 


France  et  Alyérie 

Douai. 

Dunkerque. 

Le  Havre. 

Lille. 

Lorient. 

Lyon. 

Marseille. 


Montpellier. 

Nancy. 

Nantes. 

Rochefort. 

Rouen. 

Toulouse. 


Étrançjer  : 


Anvers. 

Berne. 

Bruxelles. 

Bncarest. 

Buenos-Ayres. 

Copenhague. 


Edimbourg. 

Genève. 

Helsingfors. 

Le  Caire. 

Lisbonne. 

Londres. 

Madrid. 


Manchester. 

Neufchâtel. 

New-York. 

Rio  de  Janeiro. 

S'-Pétersbourg 

Washington. 


2°     SOCIÉTÉS     DIVERSES 


France  et  Colonies;: 

Paris.  —  Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Lettres.  —  Publi- 
cations du  Comité  des  Travaux  historiques  et  scientifiques 
(Bulletin  de  Géographie  historique  et  descriptive.  —  Bulletin 
archéologique.  —  Bulletin  des  Sciences  économiques  et 
sociales.  —  Bulletin  historique  et  philologique.  —  Congrès 
des  Sociétés  savantes).  —  Société  nationale  des  Antiquaires. 

—  Musée  Guimet.  —  Mission  scientifique  du  Maroc  (Archives 
Marocaines).  —  Comité  de  l'Afrique  Française  et  du  Maroc. 

—  Ofïlce  colonial.  —  Office  du  Gouvernement  général  de 
l'Algérie.  —  Questions  diplomatiques  et  coloniales.  — 
Réunion  d'Études  algériennes.  —  Ministère  des  Colonies 
(Revue  coloniale) .  —  Revue  des  questions  maritimes  et  colo- 
niales. —  Société  des  Études  maritimes  et  coloniales.  — 
Le  Mois  colonial  et  Maritime. 


20  SOCIÉTÉS  CORRESPONDANTES 

Alger.  —  Faculté  des  Lettres.  —  Société  Historique  algérienne. 
— Bulletin  agricole  de  l'Algérie  et  de  la  Tunisie. 

Autun.  —  Société  Éduenne, 

Bône.  —  Académie  d'Hippone. 

Constantine.    —  Société  Archéologique. 

Angouléme.  —  Société  Archéologique  et  Historique  de  la  Charente. 

Dax.  — Société  de  Borda. 

Gap.   —  Société  d'Études  des  Hautes-Alpes. 

Grenoble.  —  Faculté  des  Sciences  :  Laboratoire  de  Géologie. 

Lyon.  —  Faculté  des  Sciences.  —  Société  d'Anthropologie. 

Saint-Dié.  —  Société  philomatique  Vosgienne. 

Saint-Hippolyte  de  Caton  [Gard).  —  Revue  épigraphique  d'Espe- 
randieu, 

Saigon.  —  Société  des  Études  Indo-Chinoises. 

Sousse.  —  Société  Archéologique. 

Toulouse.   —  Société  Archéologique  du  Midi  de  la  France. 

Tunis.  —  Institut  de  Carthage.  —  Direction  des  Antiquités  et 
Arts.  —  Direction  Générale  des  Travaux  publics  du  Gouver- 
nement Tunisien. 

Étranger  : 

Almeria.  —  Sociedad  de  Estudios  almerienses. 

Baltimore.    —  Publications  Johns  Hopkins. 

Bruxelles.  —  Société  belge  d'Études  coloniales. 

Helsingfors.  —  Fennia. 

Cordoba.  (République    Argentine).    —    Academia    nacional    de 

Ciencias. 
Madrid.  —  Real  Academia  de  la  Historia. 
Mexico.  —  Sociedad  cientifica  «  Antonio  Alzate  ».  —  Instituto 

Geolôgico. 
Naples.  —  Società  Africana  d'Italia. 
Rome.  —  École  française.  —  Accademia  dei  Leincei.  —  Istituto 

Archeologica  Germanico-Romana. 
Saint-Pétersbourg. —  Société  impériale  d'Archéologie. 
Stockholm.    —  Académie  royale  des  Belles-Lettres,  d'Histoire  et 

des  Antiquités.  —  Journal  d'Archéologie. 
Toronto.    -  -  The  Canadian  Inslitute. 
Upsala.  —  Institut  Géologique  de  l'Université. 

Abonnements  : 

L'Anthropologie. 

Les  Annales  de  Géographie. 

Revue  de  Géographie  de  Ch.  Velàin. 

L'Afrique  française. 

Le  Tour  du  Monde. 


MONOGRAPHIE 


DE  LA 


Commune  d'Aïn-el-Turck 


AVANT-PROPOS 


J'ai  toujours  eu  de  l'attrait  pour  ce  qui  concerne  l'Agri- 
culture, l'Histoire  et  l'Histoire  Naturelle  d'une  région  ; 
aussi,  dès  mon  arrivée  à  Aïn-el-Turck,  en  1906,  mon 
premier  soin  fut-il  de  me  mettre  en  relations  avec  les  vi(!iix 
habitants  européens  et  indigènes.  Je  fus  immédiatement 
fiappé  de  leur  ignorance  complète  en  ce  qui  concernait 
l'histoire  du  village  et  les  choses  qu'ils  voyaient  tous  les 
jours. 

Les  fonctions  (pie  j'avais  occupées  dans  un  poste  des 
Hauts-Plateaux,  comme  correspondant  agricole  de  l'Ecole 
Supérieure  des  Sciences  d'Alger,  m'avaient  permis 
d'acquérir  un  peu  de  pratique  agricole,  qui  me  servit 
lorsque  je  fus  appelé  par  des  colons  sur  divers  points  de  la 
commune.  J'en  profitai  pour  étudier,  dans  le  détail,  la 
constitution  du  territoire,  ses  cultures,  ses  produits 
naturels,  son  histoire. 

Des  amis  s'intéressant  à  mes  collections  me  prièrent 
d'écrire  une  notice  sur  les  diverses  recherches  que  j'avais 
entreprises,  d'en  faire  une  sorte  de  monographie.  Mais  une 
monographie  doit,  avant  tout,  être  historique;  or,  la  mairie 
d' Aïn-el-Turck  n'ayant  en  sa  possession  que  des  renseigne- 
ments insignifiants,  force  me  fut  de  puiser  à  d'autres 
sources,  en  regrettant  toutefois  qu'une  mairie  n'eût  point 
dans  ses  archives  tous  les  renseignements  concernant  le 
centre  depuis  sa  création. 


^2  MONOGRAPHIE  DE  LA  COMMUNE  d'aÏN-EL-TURCK 

Une  autre  difficulté  m'attendait  :  En  Algérie,  les  ques- 
tions d'Histoire  Naturelle  sont  des  plus  épineuses.  Nous 
avons  bien  la  Flore  Algérienne  de  MM.  Battandier  et 
Trabut  ;  la  Carte  géologique,  feuille  d'Oran,  au  i/5o.ooo 
avec  Notice  explicative,  de  MM.  Doumergue  et  Ficheur, 
mais  en  ce  qui  concerne  la  zoologie,  il  n'existe  rien  de 
précis  et  il  était  présomptueux  de  vouloir  faire  un  travail 
convenable  sans  le  faiie  contrôler  par  des  spécialistes  en 
certaines  questions  scientifiques. 

Je  me  suis  donc  adressé  à  eux  et  je  remercie  sincère- 
ment :  M.  Maire,  professeur  à  la  Faculté  des  Sciences 
d'Alger,  qui  a  revu  mes  planches  des  champignons  de  la 
région  et  divers  exemplaires  de  cryptogames  qui  me 
laissaient  dans  le  doute  ;  M.  Doumergue,  professeur  au 
Lycée  d'Oran,  qui  a  vérifié  la  partie  géologique  et  botanique 
et  mon  collègue  Pallary,  qui  a  revu  mes  collections  mala- 
cologiques. 

Je  n'oublierai  pas  M.  Saint-Cyr,  un  ancien  universitaire 
et  ancien  maire  d*Aïn-el-Turck,  qui  a  pris  à  sa  charge 
les  frais  des  fouilles  que  j'ai  dirigées  en  ipiS  dans  l'enceinte 
berbère  de  la  Douane. 

Je  remercie  également  le  Comité,  les  membres  de  la 
Société  de  Géographie  et  d' A  rchéologie  d'Oj'an  et  leur  actif 
Président,  M.  Doumergue,  pour  les  félicitations  qu'ils  ont 
bien  voulu  me  faire  parvenir  après  l'Assemblée  générale 
du  3  mai  191/1. 

Si  ce  petit  travail  peut  intéresser  le  lecteur  et  lui  donner 
l'envie  de  le  compléter  et  de  le  tenir  à  jour,  ma  tâche  ne 
sera  pas  perdue  ;  les  générations  qui  nous  succéderont 
auront  ainsi  des  renseignements  sur  l'époque  passée, 
renseignements  d'autant  plus  précieux  qu'il  leur  serait, 
sans  doute,  à  ce  moment,  matériellement  impossible  de  se 
les  procurer  ailleurs. 

Sidi-Bel-Ahbès,  le  i^''  juillet  i9iU. 

F.  BLANCHE. 


MOHOCfiaPHlE  DE  LU  COMMUNE  D'ilN-EL-TORCR 


PREMIÈRE  PARTIE 

NOTICE   GÉOGRAPHIQUE 


CHAPITRE  l 
D'ORAN    A    AIN-EL-TURCK 


Le  village  d'Aïn-el-Turck  (Aïoun  et  Toiiick)  est  situé 
par  35°  46'  20"  de  latitude  Nord  et  3°  26'  20"  de  longitude 
Ouest.  Il  fait  partie  de  l'arrondissement  et  du  canton 
d'Oraii  et  n'est  séparé  du  clief-lieu  que  par  une  distance 
de  i5  kilomètres. 

Bien  que  le  service  se  fasse  en  voiture,  ces  i5  kilomètres 
ne  sont  pas  une  fatigue  pour  le  voyageur,  car  le  trajet  ne 
manque  pas  de  pittoresque. 

Portons-nous  à  6  heures  du  matin,  place  Kléber,  centre 
du  vieil  Oran.  Nous  sommes  en  été.  Le  train  de  plaisir, 
traîné  par  quatre  chevaux  des  Messageries,  descend  la  rue 
(Jiarles-Quint,  frôle  le  pied  des  falaises  du  port  sous 
Saint-Grégoire,  laisse  à  droite  le  port  d'Oran,  011  les 
navires  de  fort  tonnage  et  les  torpilleurs  de  la  Défense 
Mobile  forment  un  fourmillement  multicolore,  cependant 
que,  plus  modestes,  les  caravelles  espagnoles  débarquent 
activement  leurs  fruits  et  salaisons  au  milieu  des  quais 
encombrés  de  marchandises.   Nous  franchissons  à  toute 


24  MONOGRAPHIE  DE  LA  COMMUNE  d'aÏN-EL-TURCK 

allure  les  portes  de  Mers-el-Kébir,  dominant  la  batterie 
du  fort  Lamoune  et  nous  prenons  la  route  de  «  la  Corniche  » 
taillée  dans  le  roc  :  à  droite,  la  mer,  d'un  bleu  d'azur, 
à  gauche,  la  montagrie.  Les  Bains  de  la  Reine  sont  franchis 
en  un  clin  d'œil  et  nous  laissons  à  gauche,  au  flanc  de  la 
montagne,  deux  petits  nids  de  verdure  :  Sainte-Clotilde 
et  Roseville.  Une  trouée  se  fait  jour  et  Saint-André  de 
Mers-el-Kébir  apparaît  ;  village  de  pêcheurs,  de  briquetiers, 
de  douaniers,  d'ouviiers  travaillant  dans  les  carrières 
exploitées  pour  l'agrandissement  du  port  d'Oran,.ou  à 
l'usine  électrique,  en  construction.  Un  peu  plus  loin, 
Mers-el-Kébir,  avec  ses  vieilles  maisons,  son  parc  à  charbon 
et  le  fort,  vieilli  par  le  temps,  mais  toujours  solide  sur  sa 
large  base  rocheuse. 

Passons  la  brèche  de  Mers-el-Kébir;  un  panorama  magni- 
fique s'offre  à  nos  yeux  :  les  rochers  du  Santon  surplombent 
la  route,  de  leurs  crevasses  des  palmiers-nains  étiques 
secouent  leur  panache,  tandis  que  leurs  racines,  tordues  et 
rabougries,  surplombent  désespéiément  l'abîme.  A  droite, 
la  mer,  calme,  sur  la(|uelle  des  voiles  rapides  laissent  un 
sillage  d'argent,  coupé  seulement  par  le  passage  de  légères 
mouettes  cherchant  une  proie  ou  se  grisant  d'une  atmos- 
phère limpide,  réchauffée  par  le  soleil  levant.  En  face. 
((  l'immense  faucille  d'or  »,  formant  la  longue  plage 
d'Aïn-el-Turck  et,  jusqu'à  l'horizon,  vers  le  Sud,  la  plaine 
des  Andalouses  ',  avec  ses  fermes  isolées,  ses  champs 
moissonnés,  dont  la  couleur  fauve  fait  mieux  ressortir  le 
vert  des  pampres  et  des  figuiers. 

La  route  serpente,  surplombant  constamment  la  mer  ; 
la  deuxième  tranchée,  très  resserrée  entre  le  rocher  de  la 
Vieille  femme  et  la  montagne  du  Santon,  est  franchie. 
Bientôt  la  route  s'écarte  de  la  mer,  rentre  dans  la  plaine, 
laisse  à  droite  Saint-Roch,  Trouville,  Bouisseville  Tcentres 
balnéaires  en  création),  à  gauche,  des  vignes,  des  champs 
de  primeurs  et  nous  arrivons  sur  la  place  centrale  d'Ain 
el-Turck  après  un  voyage  d'une  heure  et  demie. 


I  La  plaine  des  Andalouses  comprend   les  leriitoires  Nord   d'Aïn-el-Turck, 
de  Bou-Sfer  et  d'El-Ançor. 


MONOGRAPHIE  DE  LA  COMMUNE  d'aÏN-EL-TURCK  25 


26  MONOGRAPHIE  DE  LA  COMMUNE  d'aÏN-EL-TURCK 

CHAPITRE  II 
LE    SOL,    LE    RELIEF 


Constitution  liéolog'iqiie  du  territoire  d'Aïn-el-Turck  i 

Au  Sud  cl  à  l'Est,  la  plaine  d'Aïn-el-Turck,  comme  celle 
des  Andalouses,  est  enserrée  par  la  chaîne  du  Murdjadjo 
et  le  Djebel  Santon,  qui  sont  constitués  principalement 
par  des  schistes  jurassiques  et  crétacés  supportant  par 
places,  et  plongeant  vers  la  mer,  de  puissants  bancs 
de  dolomies  basiques,  tandis  (|ue  les  crêtes  sont  couronnées 
par  un  plateau  de  calcaires  sahéliens.  Sur  la  pente  Nord 
sont  accrochés,  à  diverses  hauteurs,  des  bancs  de  grès 
qui  marquent  les  abaissements  successifs  de  la  mer 
pliocène. 

La  plaine,  très  uniforme,  est  constituée  par  des  grès, 
très  coquilliers  en  profondeur,  représentant  les  dépôts  du 
pliocène  supérieur.  Au  Nord,  elle  se  termine  en  terrasse 
dominant  de  3o  mètres  la  ligne  de  rivage  dont  elle  est 
séparée  par  une  étroite  mais  longue  plage. 

Enfin,  en  bordure  de  la  mer,  se  trouvent,  çà  et  là,  des 
lambeaux  de  la  plage  quaternaire,  qui  se  développe  surtout 
près  du  Cap  Falcon  et  au-dessus  de  laquelle  se  sont  consli- 
tuées  les  vastes  dunes  qui  s'étendent  d'Aïn-el-Turck  aux 
Andalouses  et  qui,  à  Falcon.  couvrent  200  hectares. 

Dans  cet  ensemble  d'une  conslitulion  géologique  assez 
régulière,  les  prescju'îles  de  Falcon  et,  des  Coralès,  repré- 
sentant les  restes  d'une  chaîne  plus  ancienne  que  le 
Murdjadjo,  jettent  une  note  discordante  ;  elles  sont  cons- 
tituées par  des  schistes  et  des  poudingues  primaires 
(permien),  qui  supportent  des  lambeaux  de  calcaires 
basiques  minéralisés  par  places. 

Nature  des  terrains 

Les  terrains  composant  le  territoire  d'Aïn-el-Turck  sont 
d'origine  sédimentaire.  Dans  la  partie  montagneuse,  sur  le 
flanc  gauche  de  la  vallée  de  l'Oued  el  Bachir,  nous  trouvons 


I  Voir  carte  géoloufiriuc.  Feiiillo  d'Oran  an  i/5o.ooo  et.  Notice  explicative 
pai-  MM.  Donmergue  et  Ficheur.  Jourdan,  éditeur,  Alger. 

DouMERGUE.  —  Historique  et  observations.  Bull.  Soc.  Géogr.  Oran,  1908, 
p.   233,  248. 


MONOORAPIîTE  DE  LA  COMMUNE  D  AIN-EL-TURCK 


27 


dos  schistes  rubigineux  ''oxfordicn)  en  contact  avec  une 
étroite  bande  de  schistes  et  quartzites  du  Néocomien 

Erilie  l'oued  el  Biichir  et  IWïn  Khedidja,  une  formation 
de  schistes  à  Posidoimniics  ^(lalloNien)  supporte  des  bancs 
(le  calcaires  inarn(Mi\  et  de  doloniies  du  li.as,  auxquels  font 
suite,  jus(|u'à  ranciiMine  roule  dOran  aux  Andalouses.  les 
giès  pliocènes  du  Plateau  d'Oran. 

Tout  le  Santon  et  son  prolongement  à  l'Ouest,  du  col 
d'Aïii  Khedidja  à  la  côte  2o:^  sont  recouverts  de  calcaires 
doloniili(jues  du  lias. 

1-a  partie  Est  de  la  plaine  comprend  les  grès  et  sables 
d'Aïn-el-Turck.  11  en  est  de  même  des  terrains  situés  à 
l'Ouest  et  près  du  village. 

La  côte  89  (Est  de  la  route  d'Aïn-el-Turck  à  Bou-Sfer)  est 
environnée  de  dunes  consolidées  qui  se  développent  aussi 
à  l'Est  de  la  Daya  et  dans  la  partie  comprise  entj-e  la  côte  61 
et  le  chemin  de  la  Daya. 

A  signaler  des  travertins  dans  les  lits  des  sources  actuelles 
ou  de  celles  disparues,  dans  la  vallée  de  l'Oued  el  Bachir 
notamment. 

Stratii?raphie  :  Etude  de  la  zone  coquillière  du  pliocène 

De  T906  à  1911,  j'ai  suivi  les  travaux  de  creusement 
d'une  trentaine  de  puits  disséminés  dans  la  plaine  et  dans 
la  montagne.  Ces  puits  atteignent  souvent  une  profondeur 
de  36  mètres.  Dans  tous  j'ai  rencontré  un  dépôt  de  sédi- 
ments très  riches  en  fossiles  et  disposés  régulièrement. 

Cette  zone  est  constante  et  régulière,  sauf  .près  de  Falcon. 

Elle  a  une  épaisseur  de  un  mètre  environ,  et  repose  sur 
de  l'argile,  d'auties  fois  sur  du  limon,  ne  montrant  pas  de 
traces  de  fossiles,  enfin  sur  des  marnes  (Puits  Albalat).  Elle 
se  relève  vers  la  montagne  selon  le  profil  suivant  : 


Fig.   I.  —  Coupe  montrant  le  relèvement  de  l'assise  coquiUfre 


28  MOÎVOGRAPIITE  DE  LA  COMMUNE  d'aÏN-EL-TURCK 


Description  de  la  côte 

De  la  Pointe  Saint-Roch  au  Cap  Falcon.  —  Le  territoire 
d'Aïn-el-Turck  est  baigné  au  Nord  par  la  mer  Méditerranée. 
La  côte  commence  à  la  Pointe  Saint-Roch  pour  se  terminer 
au  bas  du  phare  de  Falcon,  mais,  par  suite  de  son  rappro- 
chement d'Âïn-el-Turck  et  de  l'intérêt  qu'elle  offre  au  point 
de  vue  géologique,  nous  prolongerons  l'étude  de  cette  côte 
jusqu'à  3  kilom.  5oo  au  Sud-Ouest  de  la  plage  des  Coralès 
(territoire  de  Bou-Sfer).  (Voir  cartes  p.  25  et  29.) 

A  la  Pointe  Saint-Roch,  nous  sommes  en  présence 
d'éboulis  et  de  dépôts  de  pentes.  Jusqu'à  l'Aïn-Ouzel,  la 
plage,  longue  d'environ  8  kilomètres  et  large  de  20  mètres, 
est  coupée,  en  certains  endroits,  par  des  rochers  peu  élevés. 

Elle  n'a  point  partout  la  même  consistance  :  le  ravin 
Henry  Bailly  (Bouisseville)  lui  apporte  des  marnes  sableuses 
et  des  grès  tendres  fossilifères.  Entre  la  ferme  Navarre  et  le 
Rocher  de  la  Bretonne  i,  des  lambeaux  de  la  plage  émergée 
dominent  la  plage  actuelle,  ainsi  que  dans  l'anse  N.-E.  de 
la  baie  des  Aiguades  ;  là,  un  important  éboidement  de 
terrain,  ayant  la  forme  d'un  demi-cône  et  composé  de 
marnes  d'un  bleu-verdâtre  (miocène),  change  l'aspect  de  la 
falaise,  ainsi  que  le  font,  à  100  mètres  à  l'Ouest  du  phare, 
les  grès  et  schistes  violacés.  Viennent  ensuite  des 
poudingues. 

Cap  Falcon  2.  —  T.e  cap  Falcon,  situé  à  6  milles  à 
l'E.-N.-E.  du  cap  Lindless,  est  formé  par  un  large  promon- 
toire qui  s'étend  sur  un  espace  de  /  mille  3/à  de  l'Est  à 
l'Ouest  et  est  terminé,  à  chacune  de  ses  extrémités,  par  deux 
mamelons  que  sépare  une  alternance  de  rochers  escarpés 
et  de  plages.  Celui  de  l'Ouest  est  le  plus  bas.  Il  ne  dépasse 
pas  70  mètres  et  forme  la  pointe  Coralès.  Celui  de  l'Est, 
sur  lequel  se  trouvent  le  phare  et  le  sémaphore,  a  une 
dizaine  de  mètres  d'élévation  en  plus  :  c'est  le  cap  Falcon 
proprement  dit.  De  loin,  par  suite  de  la  configuration  du 
terrain,   le  cap  Falcon  prend  l'apparence  d'un  îlot    Les 


I  Diiil  s(]n  iimii  h  nu  des  [)rf'miers  habitants  d'Aïn-el-Turck  :  Francisco 
Bretones,  orio^inaire  de  la  province  d'Alicante,  colon  à  Falcon  et  décédé  à 
Oran,  le  7  mars  18.53.  Comme  le  rocher  en  question  se  trouvait  à  proximité  de 
ses  terrains,  on  l'appela  rocher  Bretones,  puis  «  de  la  Bretonne  ». 

■2    Extrait  des  Insiruclivns  nautiques  pour  V Algérie. 


MONOGUAIMIIE  DE  LA  COMMUNE  d'aÏ.\-EE-TLRCK  20 


30  MONOGRAPHIE  DE  LA  COMMUNE  d'aÏN-EL-TURCK 

navires  qui  doublent  le  cap   Fenat  peuvent  avoir  cette 
illusion. 

Devant  la  pointe  Coralès,  une  chaussée  de  rochers  longue 
et  étroite  s'étend  à  35o  mcires  au  Nord  et  à  3oo  mètres  à 
l'Ouest.  A  i/2  tnille  au  Sud,  devant  la  plage  des  Corailleurs, 
il  y  a  un  bon  abri  contre  les  vents  d'Est.  Le  cap  Falcon 
peut  être  doublé  à  petite  dis  lance  ;  les  fonds  de  i5  mètres 
sont  peu  éloignés  de  la  terre.  Au  Nord-Est  du  phare,  à 
5oo  mètres  environ,  se  trouve  un  gros  îlot  peu  distant 
de  la  terre,  dont  il  est  séparé  par  quelques  têtes  de 
rochers.  Une  roche  noyée  gît  à  5o  mètres  de  cet  îlot,  au 
Nord.  Deux  autres  petits  îlots  se  trouvent  également  à  la 
pointe  E.-N.-E. 

Mouillage.  —  La  pointe  Est  du  cap  Falcon  est  très 
saillante  vers  l'E.-N.-E.  Elle  forme  la  petite  baie  des 
Aiguades  qu'elle  abrite  parfaitement  contre  les  vents  du 
Sud  au  Nord  par  l'Ouest  ;  à  5oo  ou  600  mètres,  les  navires 
mouillent  par  des  fonds  de  8  à  12  mètres. 

Ce  mouillage  est  très  fréquenté  par  les  caboteurs,  ainsi 
que  par  les  grands  navires  qui  se  trouvent  arrêtés  par  des 
vents  contraires,  quand  ils  font  roule  vers  l'Ouest.  On 
débarque  facilement  au  milieu  des  rochers  devant  le  com- 
mencement de  la  plage  d'où  part  un  sentier  conduisant 
au  phare  i. 

Une  citerne  en  maçonnerie  se  trouve  à  proximité  de  la 
plage  ;  elle  peut  conlenir  288  mètres  cubes  d'eau,  mais  elle 
est  généralement  à  sec  en  été. 

Du  Gap  Faucon  au  89°  69'.  —  Après  avoir  franchi  la 
((  Cueva  de  la  Arena  »,  la  piltoresque  baie  du  Pain  de  Sucre 
nous  apparaît  avec  ses  plages  émergées  et  ses  éboulis  de 
blocs  gréseux,  les  surplombant.  Avant  d'arriver  aux  plages 
émergées  du  Chiendent,  ((  Playa  del  Agram  »,  une  couche 
de  conglomérat  coquillier  très  friable,  reposant  sur  des 
roches  dolomitiques,  domine  la  mer  d'une  hauteur  de  4  à 
6  mètres. 

Dépassons  la  pointe  des  Coralès,   caractérisée  par  ses 


I  Haut-fond  d'Aïn-el-Tuhck.  —  XI  mille  2/3  de  la  plage  et  au  N.-E.  du 
village  d'Aïn-el-Turck,  il  existe  une  tête  de  rocher  sur  laquelle  il  ne  reste 
que  17  mètres  d'eau  au  milieu  de  fonds  de  Co  à  70  mètres  ;  il  est  accore  et 
n'offre  aucun  danger  pour  la  navigation. 

Ce  haut-fond  est  très  connu  des  pêcheurs  à  la  turlute  et  aux  palaugres. 


MONOGRAPHIE  DE  LA  COMMUNE  d'aÏN-EL-TURCK  '^1 

rochers  avançant  dans  la  mer  à  la  lilo  indienne,  pour 
arriver  à  des  roches  dolonnti(|uos  supportant  des  grès 
tendres  fossilifèies  à  hélices. 

Jusqu'à  la  Grotte  du  .Négro,  les  doloinies  réapparaissent  ; 
au  bas  de  la  grotte,  des  blocs  dolomitiques  à  hématite 
foiinent  un  él)oulis  assez  consécpicnt,  auquel  fait  siiili"  la 
courte  mais  belle  plage  des  Coralès,  admirablement  abiitéo 
des  vents  d'Est.  Cette  plage  part  du  bas  de  la  Grotte  du 
Négro  poiu  aboutir  au  rocher  de  la  Batterie  ;  elle  est  coupée 
par  des  rochers  plats  s'avançant  dans  la  mer  ^. 

Après  le  rocher  de  la  Batterie,  jusqu'au  ^9"  6g',  la  côt(; 
est  formée  de  falaises  de  grès  à  hélices  dont  les  strates 
horizontales  sont  tiès  marciuées  dans  lanst;  du  fer  à  cheval. 
Sur  ces  falaises,  des  dunes  de  100  mètres  de  haut  s'y 
terminent  en  pente  douce. 

Mines 

En  1873,  une  société  anglaise,  fit  des  recherches  de 
minerai  de  fer  au  cap  Falcon,  au-dessus  de  la  grotte  des 
Pêcheurs.  Plusieurs  balancelles,  chargées  de  minerai, 
prirent  le  chemin  de  l'Europe.  En  1874,  une  autre  société 
continua  les  fouilles  qui,  comme  les  premières,  furent 
abandonnées. 

En  19 12,  la  Société  Armani-Cou ve  et  C*  voulut  exploiter 
les  gisements  de  fer  signalés  depuis  longtemps  au  cap 
Falcon.  Au  i"  janvier  1918,  près  de  5. 000  tonnes  étaient 
extraites.  <(  Ces  travaux  ont  montré  qu'on  se  trouvait  en 
((  présence  d'un  vaste  gisement  de  fer  oligiste  et  d'hématite 
«  rouge,  donnant  comme  résultat  une  teneur  de  fer  variant 
«  de  48  à  57  %.  »  (Rapport  de  l'ingénieur  Cayla). 

Carrières 

Les  grès  à  hélices  qui  composent  les  terrains  de  la  pro- 
priété Navarre  fournissent  une  excellente  pierre  à  bâtir. 
La  carrière  est  exploitée  depuis  quatre  ans.  Les  blocs  sont 
équarris  sur  place  et  les  moellons  sont  vendus  à  Ain  el- 
Turck  ou  transportés  à  Oran. 


I  Hors  de   la   commune,   mais   inséparable   au   point  île   vue   géographique, 
Falcon   u'étaut   guère  accessible  que  d'Aïn-el-Turck. 


32  MONOGRAPHIE  DE  LA  COMMUNE  DAÏN-EL-TIIRCK 


Le  sol.  —  Les  terres 

D'après  l'aperçu  géologique  du  territoire  d'Aïn-el-Turck, 
nous  voyons  que  la  composition  du  sol  est  très  variable. 
Une  remarque  qui  s'impose  c'est  la  pauvreté  du  sol  en 
calcaire.  L'analyse  faite  par  le  service  phylloxérique  n'a 
reconnu  qu'une  proportion  de  i  à  3  %  aux  alentours  de  la 
montagne  Pochet. 

Vers  i85o,  certains  chaufourniers,  se  fiant  à  la  blancheur 
des  pierres  des  coteaux  situés  au  S.-O.  d'Aïn-el-Turck, 
voulurent  les  exploiter.  Cette  industrie  fut  vite  aban- 
donnée, la  quantité  de  chaux  extraite  étant  trop  faible  pour 
payer  la  main-d'œuvre. 

Le  milieu  de  la  plaine,  formé  dalluvions  récentes  ou 
actuelles,  est  favorable  à  la  culture  de  la  vigne..  Dans  la 
partie  montagneuse  et  dans  les  reliefs  de  la  plaine,  la 
couche  arable  est  peu  profonde,  les  céréales  donnent  un 
faible  rendement  ;  la  brousse  même  y  est  maigre. 

Depuis  quatre  ans,  le  colon  empiète  sur  les  dunes  pour 
y  cultiver  des  primeurs.  Ces  terrains,  deshérités  autrefois, 
ont  acquis  une  grande  valeur,  mais  lee  terres  manquent  de 
consistance.  Le  sable,  remis  en  mouvement,  va  redevenir 
un  danger  pour  les  terrains  alluvionnaires. 

Les  meilleures  terres  se  trouvent  au  Poteau,  à  la  Daya 
et  à  proximité  du  village.  Au  Poteau,  les  terres  sont  fran- 
ches et  donnent  de  bonnes  récoltes,  même  pendant  les 
années  de  sécheresse.  A  la  Daya,  les  terres  sont  fertiles  et 
fortes  ;  mais,  si  les  pluies  sont  insuffisantes,  la  récolte  y 
est  très  faible.  L'hiver  est-il  pluvieux,  les  rendements  sont 
énormes,  à  tel  point  que  les  vignes  de  cette  région  pro- 
duisent plus  de  loo  hectolitres  à  l'hectare. 

Dans  les  terrains  accidentés,  la  meilleure  exposition  est 
le  Sud.  Ces  terrains  servent  surtout  à  la  culture  des 
primeurs. 

Curiosités  naturelles 

Dans  le  territoire  d'Aïn-el-Turck,  les  eaux  d'infiltration 
et  de  dissolution  ont  creusé  de  nombreuses  grottes  dont 
deux  surtout  méritent  d'être  visitées  ;  ce  sont  :  la  Grotte 
des  Enfants,  connue  encore  sous  le  nom  de  Grotte  du  Poilu 
(Cueva  de  los  Niiîos  ou  Cueva  del  Peludo),  et  la  Grotte 
du  Curé.  (Voir  carte  des  grottes,  p.  62.) 


moiNO<;kapiiie  de  i.a  commune  d'aïn-el-tukck  .'{.'! 

CiKVA  DE  ros  NI^os  : 

Silualion.  —  A  i.'ioo  iiiùtres  environ  au  Siul-Ouesl  (h: 
la  l)alterio  du  Santon,  picsquo  à  la  limite  du  tejiitoiie  de 
Mcis-cl-Kébir. 

Description.  —  On  se  laisse  glisser  de  haut  en  bas  par 
une  ouverture  deo"'6o,  placée  enire  dcuv  l'ochers  dislocpiés 


B  ExK,vn.55«m^uvt  iii  au  frjv.til  de  1  komme 

B  3oyan-  Jn.icceiiih]e . 

E  Jocher  £  dri.ntnei  '!ti.]a.<^md>cnui  ■ 

T  f<i55d.oe   Sud. Est. 

Q  VâfStiivei  . 

M  Cojoane  centrale. 


riiin  (If   la   Cueva   de  los  Nif 


perdus  dans  le  diss,  et  on  se  laisse  choir  sur  un  plancher 
sédimentaire  situé  à  2  mètres  de  profondeur.  On  suit  une 
galerie  de  20  mètres  de  longueur  sur  i  mètre  de  largeur 
et  i^oo  do  hautem-  qui  va  en  se  rétrécissant.  Accroupi,  on 
débouche  dans  une  salle  de  iT)  mètres  de  longueur  sur 
•20  mèlies  de  largeur  environ.  Au  milieu  de  la  pièce,  on 


34  MONOGRAPHIE  DE  LA  COMMUNE  d'aÏN-EL-TURGK 

voit  quelques  colonnes  réunies  en  tuyaux  d'orgue  et  ayant 
l'aspect  d'énormes  pattes  de  poulpe.  Le  plancher  stalag- 
mitique  et  la  voùle  remplie  de  stalactites  seraient  d'un 
fort  bel  effet  s'ils  n'avaient  été  abîmés  par  les  visiteurs.  Les 
draperies  stalagmitiques,  d'une  blancheur  éclatante,  sont 
1res  belles,  surtout  à  l'Ouest  de  la  grotte,  oii  Tune  d'elles 
affecte  la  forme  d'un  éléphant.  Derrière  la  colonne 
centrale,  des  vasques,  pareilles  à  des  bénitiers  superposés, 
arrivent  au  niveau  du  plancher  formé  par  l'accumulation 
des  concrétions  calcaires.  Ces  vasques  sont  très  souvent 
remplies  d'eau,  les  rebords  ont  été  brisés.  L'intérieur  de 
cette  grotte  est  très  frais  ;  les  murs  donnent  asile  à  une 
multitude  d'araignées  du  groupe  des  faucheurs  qui,  prises 
de  peur  à  l'approche  de  la  lumière  acétylène,  se  laissent 
tomber  pour  se  réfugier  dans  les  trous  du  sol. 

Légende.  —  Très  enfantine  est  la  légende  de  la  ((  Cueva 
de  los  iNiiîos  ».  Elle  date  d'une  soixantaine  d'années  à  peine 
et  m'a  été  racontée  par  un  vieil  espagnol,  qui  prétendait 
avoir  vu,  lui  aussi,  les  troglodytes. 

Des  gamins  cherchaient  des  nids  dans  la  montagne.  La 
chaleur  était  accablante.  Ils  auraient  bien  voulu  se  reposer 
à  l'ombre,  mais  les  maigres  touffes  du  djebel  ne  pouvaient 
la  leur  fournir.  Chemin  faisant,  ils  découvrirent  un  trou 
entre  deux  rochers,  ils  descendirent  l'un  après  l'autre  et  ils 
entendirent  le  bruit  d'une  source  qui  tombait  en  cascades 
dans  l'intérieur  de  la  grotte.  Quelle  aubaine  !  Allumer  un 
paquet  d'alfa  fut  l'affaire  d'un  instant  et  la  bande  joyeuse 
s'aventura  dans  ce  palais  de  fées  oii  tant  n'était  que  cristal. 
Ils  buvaient  à  la  source  depuis  un  moment  lorsque  du  fond 
de  la  grotte,  un  cri  rauque,  formidable,  accompagné  d'im- 
précations, se  lit  entendre,  déterminant  la  fuite  des 
oiseleurs. 

Les  parents,  mis  au  courant,  résolurent  de  vérifier  le  fait 
et,  après  de  mvdtiples  précautions,  ils  arrivèrent  à  la  grotte. 
Prudemment  ils  s'aventuraient,  lors(|u'une  voix  caverneuse 
et  terrible  les  appela  chacun  par  leur  nom...  Un  obus 
tombé  au  milieu  d'eux  n'aurait  pas  déterminé  une  fuite 
aussi  précipitée  que  celle  de  ces  chercheurs  d'aventures. 
La  grotte  fut  qualifiée  de  hantée.  Quelques  jours  après, 
voulant  connaître  l'hôte  énigrnatique  de  cette  «  cueva  », 
plusieurs  adultes  s'embusquèrent  derrière  les  broussailles 
et  virent  apparaître,  très  calme,  un  géant  à  longue  barbe 
blanche,  les  cheveux  en  broussaille,  tenant  sur  ses  bras 


MONO<;HAPIIIi:   DE  LA  COMMUNE  D'AÏ>-Ef.-TIRCK  35 

deux  t<»iil  jeunes  el  énormes  eiifiinls.  II  n'iiNiiil,  [j;n;iîlnl. 
conini  diuilre  lo^is  ijue  iclui-là  :  on  l'appela  1  honiine  de 
la  eaverne.  Peu  après,  on  ne  sentrelenait  plus  que  de  la 
caverne  de  «  rilonune  [)()ilu  »  ou  «  des  Enfants  ». 

I,<>rs(|ne,  plusieurs  années  plus  tard,  on  i-elrou\a  la 
CTioiic,  le  <•  poilu  11  et  les  enfants  n'y  étaient  plus.  La  source 
d'eau  glacée  coulait  encore,  abonda Jile,  les  chasseurs  et  I(s 
Itergers  pouvaient  en  loule  sécurité  y  étancher  leur  soif  ; 
ils  devisaient  toujours  sur  l'hole  étrange  de  la  caveine  et 
buNaienI,  en  riant,  à  la  santé  «  del  Peludo  »,  qui  avait 
causé  tant  de  frayeurs  à  leurs  pèies. 

Grotte  du  Curé  : 

Sitiialion.  —  Djebel  Santon,  versant  Nord.  Territoiie  de 
.Meis-eI-Kébii\  à  uoo  mètres  de  celui  d'Aïn-el-Turok. 

I-'oummIuic  de  la  Giotte  du  Curé  est  au  niveau  du  sol, 
profonde  de  ({uehjues  mètres,  elle  ne  présente  pas  de 
stalactites. 

I.égeiide.  —  In  pauvre  espagnol  et  sa  chienne,  douce  et 
lidèle,  avaient  élu  domicile  dans  une  excavation  de  la  mon- 
tagne du  Santon,  à  l'époque  oij  les  drapeaux  de  Castille  et 
de  Léon  IloltaitMit  sur  Mers-el-Kébir  et  Oran.  Avec  le 
|)almier-nain  (pii  croissait  dans  la  montagne,  ce  brave 
homme  fabri(|uait  des  balais,  qu'il  allait  vendre  aux  irou 
pes  d'occuj)ation.  La  vente,  peu  fructueuse,  sulïisait  juste 
à  le  faire  vivre. 

Donc,  tous  les  matins,  il  quittait  son  humble  demeure, 
fermée  par  une  dalle,  emportait  son  dîner  froid  et,  jusqu'à 
la  tombée  de  la  nuit,  il  aurait  pu  donner  à  ses  concitoyens 
l'exemple  du  plus  grand  labeur  s'il  n'avait  vécu  en 
anachorète. 

Un  beau  jour,  son  dîner  disparut.  Un  chacal  ou  toute 
autre  hèle  malfaisante  s'en  serait-il  emparé  ?  La  chienne 
pouitanl,  si  bonne  gardienne,  aurait  aboyé  !  Bah  !  se  dit-il, 
après  réllexion,  elle  aura  suivi  la  trace  dun  lièvre,  pendant 
ce  temps  le  voleur  aura  fait  son  coup. 

Le  lendemain,  le  dîner  disparaissait  encore  ;  le  surlen- 
deiruiin  également.  C'en  était  trop.  «  Je  pincerai  bien  le 
voleur,  dit-il  »  et,  sans  plus  larder,  il  coupa  dans  le  djebel 
une  solide  trique  de  zebboudj  ',  puis  au  petit  jour,  caché 
derrière  un  lentisque,  il  al  lendit... 


I  Olivier  sauvage 


3(3  MONOGRAPHIE  DE  LA  COMMUNE  d'aÏN-EL-TURCK 

Un  bruit  de  branches  secouées,  d'un  corps  qui  se  faufile 
entre  les  toulTes  d'épines  éveillèrent  son  attention.  Lente- 
ment, il  sortit  la  tête  du  fourré  et  il  vit  sa  chienne,  sa 
propre  chienne,  emportant  le  coufiin  dont  il  avait  lui- 
même  tressé  les  nattes... 

<(  Sangre  de  Dios  !  pera,  ven  aqui  !  »  Mais,  pareille  au 
chien  de  Jean  de  Nivelle,  la  chienne  continua  son  chemin  ; 
l'homme  se  mit  à  sa  poursuite.  Sur  le  point  d'être  atteinte, 
elle  se  retourna,  le  regard  terrible,  prête  à  bondir.  Stupéfait 
le  maître  fit  un  pas  en  arrière,  la  chienne  en  profita  et, 
tenant  toujours  le  couffîn  à  la  gueule,  elle  redoubla  de 
vitesse,  franchissant  les  buissons,  toujours  suivie  par  le 
maître  furieux.  Enfin,  elle  s'arrêta  et,  au  moment  où  la 
matraque  se  levait  sur  elle,  d'une  grotte,  que  l'espagnol  ne 
connaissait  pas  encore,  sortit  un  curé,  taillé  en  athlète  et 
dont  l'œil  fixe  semblait  le  méduser. 

Pris  d'une  terreur  indescriptible,  il  lâcha  son  bâton  et,  se 
retournant  brusquement,  livide,  tremblant  de  tous  ses 
membres,  la  poitrine  oppressée,  descendit  à  grandes 
enjambées  la  pente  raide  du  ravin. 

L'apparition,  toujours  immobile  devant  la  grotte,  le  bras 
droit  tendu  vers  l'Occident,  suivait  des  yeux  cette  silhouette 
dont  la  frayeur  décuplait  la  vitesse  et  qui  ne  formait  déjà 
plus  qu'une  tache  se  léduisant  à  vue  d'œil,  là-bas,  au  loin, 
dans  la  plaine  d'Aïn-el-Turck. 

On  n'entendit  jamais  plus  parler  du  marchand  de  balais 
et  de  sa  chienne,  ni  du  curé,  fantôme  mystérieux  de  cette 
grotte  séculaire.  La  <(  cueva  )>  existe  toujours,  «  la  Cueva 
del  Cura  »,  et  le  soir,  à  la  veillée,  les  aïeuls  racontent  en 
tremblant  l'histoire  de  la  grotte  avec  un  tel  accent  de  sin- 
cérité que  si  jamais  vous  voulez  prendre  pour  guide  un 
espagnol  ou  un  arabe,  ne  soyez  pas  étonné  qu'il  voui 
réponde  :  «  Je  n'y  rentre  pas  !  »  Demandez-leur  pourquoi, 
ils  vous  diront  d'un  air  ingénu  :  ((  C'est  pas  bon  d'entrer  là, 
il  y  a  des  choses...  ^  » 


I  Pour  descendre  dnns  les  silos  berbères,  j'ai  eu  toutes  les  peines  du  monde 
à  me  faire  accompagner  d'un  arabe  ou  d'un  espagnol. 


MONOGRAPHIE  DE  I-A  COMMUNE  d'aÏN-EL-ÏURCK  'H 

CHAPITRE  III 
LE  CLIMAT 


Aïn-el-Turck  a  un  climat  très  doux  en  hiver.  Les  chaleurs 
de  l'automne  y  sont  prolongées  et  le  brouillard  y  est  peu 
fréquent. 

La  température  ne  présente  pas  de  très  grands  écarts 
entre  le  jour  el  la  miit,  l'hiver  et  l'été.  La  moyenne  de  l'été 
est  de  25°,  celle  de  l'hiver  de  i6°.  A  défaut  de  températures 
prises  journellement,  l'existence  de  certains  végétaux  serait 
un  sûr  garant  de  la  constance  de  la  température.  Certaines 
plantes  :  les  giroflées  et  les  ricins,  par  exeinple,  y  sont 
vivaces  ;  c'est  en  février,  mars,  avril,  que  la  flore 
des  cham[)s  est  la  plus  riche  ;  les  petits-pois,  nécessitant 
pour  la  maturation  une  température  d'environ  i4°,  sont 
une  des  richesses  du  pays  de  décembre  à  mars  ;  la  fève, 
l'artichaut,  les  tomates,  fructifient  en  même  temps  et  la 
vigne  primeur  et  le  dattier  entrent  en  floraison  à  la  fin 
de  l'hiver. 

La  température  baisse  brusquement  en  novembre,  occa- 
sionnant la  chute  des  feuilles.  En  janvier,  les  bourgeons 
des  amandiers  épanouissent  leurs  fleurs.  La  vigne  débourre 
vers  la  fin  du  mois  de  février. 

L'orge  est  moissonnée  en  mai  et  le  blé,  en  juin.  Les  ven- 
danges commencent  en  août  par  l'AIicante-Bouschet  et  se 
terminent  dans  la  première  quinzaine  de  septembre. 

Relevés  météorologiqi  es  '.  —  Les  relevés  météorolo- 
gi(]ues  suivants,  portant  sur  42  mois,  de  janvier  1910  à 
juillet  19 13,  donneront  un  aperçu  du  climat. 

Température.  —  Le  tableau  ci-après  donne  les  moyen- 
nes relatives  aux  quatre  armées. 


I  Mes  remerciements  à  MM.  Salmon  et  Vergnes,  maîtres  Hc  phare  à  Falcon, 
et  à  M.  Le  Goff,  chef  du  poste  radiotélégraphique  d'Aïn-el-Turck,  qui  ont  bien 
voulu  me  communiquer  leurs  observations  météorologiques  journaliôrep 
indispensables   pour   établir   les   statistiques. 


38  MONOGRAPHIE  DE  LA  COMMUNE  d'aÏN-EL-TURCK 

Températures  moyennes  mensuelles  prises  au  phare  de  Falcon  du 
1er  Janvier  1910  au  31  Juillet  1913.  (Thermomètre-centigrade  extérieur) 


MOIS 

ANNÉES 

1&10 

^9-1-1 

-lS-12 

■19^3 

Janvier 

13»  3 

11°5 

14° 

13"  4 

Février 

14-4 

13°  4 

15°  7 

14°  2 

Mars 

13°  5 

13°  9 

15°  8 

13°  6 

Avril    

15°  9    " 

IS'-S 
21°  6 

16'^ 
18°  5 
21°  4 

16°  8 
20^2 
22°  1 

14°  7 

15°  8 
19° 

Mai 

Juin. 

Juillet 

24°  9 

24°  8 
24°  8 

24°  3 
24°  6 
25° 

24°  7 
25-2 
22-3 

24°  6 

Août 

Septembre 

Octobre 

23°  4 
21° 

20°  6 
16°7 

19°  1 
15°  3 

Novembre 

DécemVjie 

17° 

15' 6 

15°  2 

Moyenne  de  l'année iq^S       i8°5       i8°8 

—  des  3  mois  d'hiver.  .        iô°b        i'S°  i5°i 

—  des  3  mois  d'été 2li°8       24°6       24° 

En  comparant  les  températures  du  poste  radiotélégra- 
phique  avec  celles  du  phare  de  Falcon,  nous  voyons  que  les 
moyennes  diffèrent  ;  celles  du  poste  radiotélégraphique 
sont  toujours  plus  élevées  pour  les  raisons  suivantes  : 

1°  Le  thermomètre  du  poste  T.  S.  F.  est  placé  à  l'inté- 
rieur du  poste  ; 


MONOr.n  M'IIIK   DR  I.\  COMMINR  O  AIN-EL-TURCK 


39 


0°  î.a  lriii|)('raliii('  n'y  est  prisf^  ([n'iuic  fois  p.ii'  jour,  le 
malin  à  8  luMires  ; 

'y  Le  poste  T.  S.  V .  est  plaeé  dans  un  bas-fonrl,  abiité, 
à  une  altitude  inférieure  de  près  de  Ho  mètres  à  celle  du 
l^liare. 

l,a  eoinpai  aison  de  ces  Icmiiéralmcs,  ainsi  que  le  montre 
le  tableau  suixani,  nous  eonlirme  qu'août  et  juillet  sont 
les  mois  les  plus  chauds  de  l'année. 

Tableau  comparatif  des  températures  prises  au  phare  de  Falcon  et  au 
poste  radiotélégraphie  de  juillet  1911  à  juillet  1913 

NOTA.  —   Les  températures  au  poste  de  T.  S.  F.  ne  sont  prises  que 
depuis  le  P^  juillet  i\)il . 


MOIS 

1911 

1912 

1913 

1 

PHARE 

T.    S     F. 

PHARE 

T.   S.   F. 

PHARE 

T.   S.   F 

Janvier 

Février 

24"  3 

24°  6 
25° 
20°  6 
16°  7 
15°6 

26°  3 
27^5 
23°  2 
22M 
17°9 
16-8 

14° 
15°  7 

15°  8 
16  8 
20' 2 
22' 1 
24°  7 
25°  2 
22-3 
19°  1 
15°  3 
15°  2 

14'^  7 
15°  9 
17-2 
17" 
21-5 
22  °9 
26° 
27° 
24°  5 
20' 4 
17° 
14°  3 

13' 4 

14°  2 
13°6 
14°  7 
15°  8 
19° 
24-6 

14°  5    , 
14°6 
15°  9 
17-9 
21°  5 
24°  1 
26-6 

! 

Mars 

Avril . 

Mai .. 

Juin 

Juillet 

Août 

Septembre 

Octobre 

Novembr-e 

Décembre 

40 


MONOr.RAPLlIE  DE  LA  COMMUNE  D  AIN-EL-TURCK 


Vents.  —  Les  vents  dominants  sont  ceux  de  l'Ouest  et 
du  Nord-Est.  Ces  derniers  inclinent  les  arbres,  suivant  la 
direction  N.-E.  S.-O.  et  parfois  les  brisent.  C'est  à  eux  que 
l'on  doit  la  destruction  totale  des  cyanophyllas  plantés 
en  1896.  Ces  vents  ont  encore  l'inconvénient  de  dessécher 
les  jeunes  pousses  de  la  vigne,  ce  qui  oblige  les  colons 
à  planter  du  seigle  tous  les  six  ou  huit  rangs  de  vigne. 
Lorsque  la  vigne  débourre,  le  seigle  est  assez  élevé  pour 
former  un  abri  vivant. 

Pour  les  42  mois,  la  station  du  phare  de  Falcon  nous 
indique  que  les  vents  du  N.-E.  ont  soufflé  pendant  21  mois, 
ceux  d'Ouest  pendant  1 1  mois,  ceux  du  S.-O.  pendant 
7  mois  et  le  tableau  suivant  nous  donne  le  détail  par  mois  : 

Tableau  des  vents  dominants  de  Janvier  4910  à  Juillet  1913 


ANNÉES 

f— 

ca 

03 

Pu 

-33 

s 

'3 

os 

(X3 

S 

as 
00 

as 

m 

i 

1910 

N.-E. 

S.-O. 

N.-E. 

S.-O. 

0. 

N.-E. 

N.-E 

N.-E. 

N.-E. 

N-E. 

S.-O. 

S.  0. 

1911 

N.-E, 

N.-E. 

S.-O. 

S.-O. 

S.-O. 

N.-E 

N.-E. 

N.-E. 

N-E. 

0 

0. 

0, 

1912 

0. 

0. 

0. 

N.-E. 

N.-E. 

N.-E. 

0. 

0. 

N.-E. 

0. 

0 

N.-E. 

1913 

0 

N.-E 

N-E. 

0 

0. 

N-E. 

Les  vents  dominants  sont  donc  ceux  du  N.-E. 

SiROGO.  —  Le  siroco,  peu  intense  d'ailleurs,  souffle  en 
moyenne  de  12  a  i5  fois  par  an  et  ne  dure  que  f|uel(jues 
heures  ;  rarement  il  souffle  plus  de  9  heures  consécutives. 

Pllte.  —  11  pleut  en  nK)yenne  5i  jours  par  an.  Voici  la 
répartition  mensuelle  de  ces  pluies  : 


03 

03 

03 

_ 

,    . 

J=3 

jra 

xa 

t» 

■g 

t» 

'3 

•!=1 

03 

a 

S 

TOTAL 

<TS 

'£ 

S 

•ai 

C3. 
03 
C<2 

C3 

3 

•03 
(=1 

1 

4 

5 

4 

10 

0 

0 

1 

4 

3 

10 

51 

MONOcn  M'iiii;  ME  r,A  commim;  i»  mx-et.-ti'rck  >I 

l'i.i  \  loMi-;  I  ui;.  -  La  (iiiantilL'  dcuu  est  \;iiial»lf,  aiii>i 
que  l'induiiie  le  tableau  suivant,  comprciiaiil  la  liaiilciir 
il('<  pluies  |()iiil)(''('s  (le  janvier'  kjk»  à   jiiillrl    i(ji3. 


MOIS 

A  N  N  É  E  S 

-19-10 

^9^  a 

•19^2 

■19^3     1 

Janvier    

0"'0;mô 

0-  030 

0-0388 

0-0114 

Février 

0-(J.SO 

0-027 

0-0038 

0-0284 

Mars 

0-0912 

o^oeoi 

0-0112 

0-0269 

Avril 

o-o:U5 

0-OKSiS 

0-0248 

0-0106 

Mai 

0-0245 

0-0223 

0-007 

0-0111 

Juin 

0"'001 

» 

0-009 

0-0014 

Juillet 

» 

0-008 

» 

» 

!   Août 

1 

" 

» 

0-004 

»          1 

Septembre 

0-0233 

0-0021 

0-  0229 

Octobre 

0-0067 

0-0191 

0-1169 

» 

Novembre 

0-0071 

0-024 

0-0205 

0 

Décembre 

0-0284 

0-0014 

0-0091 

» 

Sur  loo  jours  de  pluie  nous  conslatons  (pi'c'llc  est  amenée 
par  les  vents  suÏNants  : 


VENTS  DE  : 

S.-O 

O. 

X.-E 

N.    ■  N.-O. 

S 

1 

1 
Iv         TOTAL 

Nonmre  de  jours  de  pluie . . . 

31 

26 

20 

15           ti 

1           luu 

42 


MONOORAPHÏE  DE  LA  COMMUNE  D  AlN-EL-TURCK 


T.es  vents  du  S.-O.  sont  donc  ceux  qui  amènent  le  plus 
fréquemment  la  pluie.  On  peut  s'en  convaincre  par  l'orien- 
tation que  les  colons  donnent  à  leurs  meules  de  paille. 

Pression  barométrique.  —  D'après  certaines  moyennes 
que  j'ai  prises  au  phare,  le  baromètre  baisse  avant  et 
pendant  la  pluie  pour  remonter  ensuite,  ainsi  que  l'indique 
le  tableau  suivant  : 


ÉTAT  DU  BAROMÈTRE 

Pl'RIODES 

AvaDt  la  pluie 

Pendant 

Après 

Du  14  au  31  Janvier  1912 

760  »,  - 

747  -,  » 

750  ■","'  8 

Du  3  au  13  Février  1912 

745  "■  "" 

744  ■"/"■ 

760  ■",  " 

Du  12  au  30  Avril  1912 

755  "'/"  1 

743  »  »  9 

756 -> 

Sur  i5  observations  relatives  au  siroco,  il  résulte  qu'une 
seule  fois  (7  octobre  191 1)  ce  vent  a  amené  un  peu  de  pluie 
(o'"ooa/i),  deux  ou  trois  fois,  quelques  gouttes  seulement 
sont  tombées  et  en  si  faible  quantité,  que  le  pluviomètre  n'a 
pu  les  enregistrer. 

En  prenant  la  moyenne  des  pluies  tombées  pendant  ces 
/i2  mois,  on  remarque  que  les  mois  les'plus  pluvieux  sont 
par  ordre  d'importance  :  mars,  février,  octobre  et  janvier. 

Ora(.es. —  Les  orages,  peu  fréquents,  éclatent  surtout  en 
décembre.  Le  12  décembre  1909,  la  foudre  tomba  sur  l'école 
de  filles,  brisant  Txw  tuiles,  crevant  deux  plafonds,  pulvé- 
risant un  lanterneau,  en  lançant  au  loin  les  morceaux  dont 
un,  du  poids  de  26  kilogrammes,  fut  projeté  à  5o  mètres. 

Neige  et  Grele.  —  H  y  a  ^9  ans  (depuis  t884)  qu'il  n'a 
pas  neigé  à  Aïn-el-Turck.  Les  gelées  y  sont  inconnues  et  la 
grêle,  extrêmement  rare,  n'a  jamais  atteint  les  proportions 
de  ces  orages  calamiteux  (|ui,  en  (juelques  minutes,  broient 
et  ensevelissent  des  hectares  de  culture,  sous  des  grêlons 
de  dimensions  énormes. 


MONOr.RAPIlIE  UE  T.A  COMMUNE  D*AÏN-ET.-TURCK  43 

Dkhoisement,  ses  (^ONSÉQi'ENCEs.  —  Il  csl  riavmnl  fie 
conslalcr,  h  \ïn-('l-Tiiirk,  la  (juanlilé  tlCau  boueuse  qui, 
à  la  uioiiiilic  averse,  défei  le  vers  la  mer.  Sur  son  passade, 
C(>tle  uiasse  d'eau  produit  des  affoiiillenienls  au  [)ied  de  la 
montagne  et  détruit  les  berges  dans  les  détours  du  eaual 
de  dérivation.  Ce  canal  se  comble,  déborde,  envahit  le 
village  :  la  rue  prin("ipale  devient  un  toiMcnl  (pii  désem- 
pierre  la  chaussée  et  dépose  son  cône  de  déjection  au  \ord 
du  village. 

Pendant  ?.8  ans,  de  i85o  à  1878,  les  habitants  de  la  région 
procédèrent  au  déboisement  en  règle  de  la  plaine  et  des 
flancs  Nord  du  Alurdjadjo,  ce  qui  fut  la  cause  de  plusieurs 
inondations.  La  Municipalité  s'alarma  et  le  9.1  mai  1878, 
elle  chargea  M.  Valette,  agent-voyer  de  circonscription,  de 
dresser  un  plan  de  canal  de  dérivation,  qui  fut  construit 
peu  après.  Malgré  ce  canal,  les  inondations  ne  se  comptent 
plus  à  Aïn-el-Turck.  Ainsi  que  le  fait  remarquer  M.  Mous- 
saud,  agent-voyer,  dans  une  note  du  6  août  19 13,  Aïn-el- 
Turck  sera  toujours  menacé  d'être  inondé  parce  (pie  le 
profil  en  long  de  son  canal  présente  une  ligne  brisée, 
contrariant  sérieusement  l'écoulement  des  eaux. 

Le  mal  ira  en  empirant  :  le  défrichement  des  dunes  qui 
se  poursuit  sans  relâche  depuis  trois  ans  prépare  la  plaine 
à  l'inondation  et  à  l'envahissement  des  sables.  Un  des 
anciens  maires,  M.  Julien,  avait  pourtant  prévu  le  danger  : 
le  ■).?>  janvier  1879,  il  prenait  un  arrêté,  dont  voici  l'ait,  i  : 

«  Art.  I.  —  Il  est  défendu  d'extraire  les  souches  de  toute 
«  essence  sur  tous  les  teri'ains  communaux  et  de  couper 
«  les  branches  de  thuya  dans  la  partie  Ouest  du  comnninal 
((  à  partir  de  la  publication  du  présent  arrêté.   » 

Comnne  la  plupart  des  arrêtés  municipaux,  celui-ci  resta 
lettre  morte.  Ces!  ainsi  (ju'on  ne  trouve  plus  un  seul  pied 
de  thuva  sur  le  territoire  de  la  commune. 


MONOCRAPHTE  DE  LA  COMMUNE  D  AlN-EL-TURCK 

CHAPITRE  IV 
L'EAU 


Aïn-el-Turck  est  alimenté  en  eau  à  l'aide  de  puits  et  de 
sources.  (Voir  la  carte,  page  ^b.) 

Le  premiei-  puits  creusé  à  Aïn-el-Turck  le  fut  par  le  Génie 
eu  i85o.  H  se  trouvait  à  la  place  Sud  et  a  été  comblé,  il  y  a 
vingt  ans. 

Depuis  le  développement  pris  par  la  culture  des  pri- 
meurs, de  nouveaux  puits  sont  creusés  tous  les  jours  dans 
la  plaine  ;  leur  profondeur  varie  de  lo  à  35  mètres  et  les 
couches  de  roches  qu'on  rencontre  ne  sont  pas  partout 
les  mêmes. 

Pour  l'étude  de  ces  puits,  il  faut  partager  le  territoire 
d'Aïn-el-Turck  en  deux  régions  distinctes,  séparées  par  une 
ligne  passant  très  approximativement  par  l'axe  de  la  route 
d'Aïn-el-Turck  à  Bou-Sfer.  L'eau  des  puits  situés  à  l'Est 
de  cette  ligne  repose  sur  l'argile  ;  elle  est  peu  abondante 
et  légèrement  saumatre.  Celle  des  puits  situés  à  l'Ouest 
repose  sur  un  tuf  marneux  ;  elle  est  très  abondante,  fraîche 
et  potable.  L'eau  de  tous  ces  puits  cuit  bien  les  légumes. 

Le  plus  important  de  ces  puits  est  celui  de  M.  Liverato 
(jardin  à  proximité  de  la  place  Sud)  ;  il  est  intarrissable, 
même  pendant  les  années  de  plus  forte  sécheresse.  L'eau, 
très  fraîche,  y  est  excellente. 

Les  sources  d'Aïn-el-Turck  sont  nombreuses.  Le  sous-so] 
compris  entre  Aïn-el-Turck  et  les  Coralès,  en  bordure  de 
la  mer,  ne  forme  pour  ainsi  dire  qu'une  nappe  qui  va  se 
])erdre  dans  le  sable  de  la  plage.  Pour  s'en  convaincre,  on 
n'a  ([u'à  creuser,  avec  la  main,  dans  le  sable,  pour  la 
rencontrer.  Sa  direction  vient  du  Sud.  T>'eau  en  est  un  peu 
fade  parce  qu'elle  est  en  contact  permanent  avec  les  grès 
d'origine  marine.  En  dehors  de  ces  sources,  d'autres 
viennent  sourdre  de  points  plus  élevés.  Les  principales 
sont,  en  allant  de  l'Est  à  l'Ouest  : 

La  source  Henry  Bailly  (ravin  Henri  Bailly),  à  Bouisse- 
ville  ; 

L'Aïn-Atrous  (ferme  Navarre)  ; 


MOiNO(.lt  AI'IIIK   DE   LA  CO.M.Mt   \E  I)' \ÏN-i:i.- r  I   HCK  45 


ab  MONOC.KAPIIIE  DE  LA  COMMUNE  D  AIN-EL-TURCK 

L'Aïn-el-Turck,  qui  a  donné  son  nom  au  village,  c'est  iu 
plus  importante  et  la  meilleure  de  toutes  ; 

La  source  Sainl-Cyr,  dans  une  grotte  du  jardin  de 
M.  Saint-Cyr,  eau  fraîche  el  excellente,  mais  peu  abon- 
dante ; 

La  source  Saint-Maurice,  qui  alimente  les  villas  boid  de 
mer  de  l'ancienne  propriété  Debaix  ; 

L'Aïn-Aounsar  (ferme  Emerat),  captée  en  partie  pour  les 
besoins  du  village,  et  envoyée  à  Aïn-el-Turck  à  l'aide  d'une 
machine  élévatoire  qui  refoule  l'eau  sur  le  mamelon  5a  ; 

L'Aïn-Ouzel,  dont  les  deux  sources  alimentent  le  village 
Ghazeau  (Cap  Falcon)  ; 

La  source  des  Coralès,  se  perdant  dans  la  plage  du  même 
nom  ; 

L'Aïn  Khedidja,  placée  à  la  limite  S.-E.  du  territoire. 

Les  eaux  de  ces  sources,  ainsi  que  celles  des  puits, 
viennent,  pour  la  plupart,  du  pied  du  Murdjadjo.  C'est  au 
piintemps  qu'elles  ont  le  plus  de  débit. 

Aucune  rivière  n'existe  à  Aïn-el-Turck.  A  3  kilomètres 
au  S.-O.  du  village  existe  une  daya  qui  occupe  une  cinquan- 
taine d'hectares  qui  se  remplit  d'eau  en  hiver  et  inonde 
les  terres  du  pourtour. 

Le  dessèchement  de  ce  bas-tojid,  inondé  aux  moindres 
pluies,  a  commencé  en  1901.  Le  trop  plein  des  eaux  est 
entraîné  à  la  mer  par  un  canal  passant  à  100  mètres  de  la 
ferme  Emerat. 

Source  thermale  de  Saiiit-Rocli 

La  source  thermale  de  iSaint-Roch  est  située  à  la  limite 
Est  du  territoire,  en  bordure  de  la  mer,  à  la  Grotte  aux 
Pigeons  (Grotte  de  Saint-Roch).  Il  est  question  d'y  bâtir 
un  établissement  thermal.  Cette  source  a  une  température 
de  45  à  5o°.  Elle  doit  être  rejetée  comme  eau  de  consom- 
mation ou  d'alimentation,  car  elle  contient  5  grammes  de 
sel  fixe  par  litre  (sels  de  chaux,  magnésie,  soude,  à  l'état  de 
chlorures  et  de  sulfates). 

Cette  eau,  par  sa  composition  et  son  degré  thermomé- 
trique, se  rapprocherait  de  l'eau  de  Bourbon-Lancy  (Saône- 
et-Loire),  employée  dans  le  traitement  du  rhumatisme 
sous  toutes  ses  formes,  des  névralgies,  paralysies,  trauma- 
tismes,  accidents  consécutifs  aux  fractures,  plaies  par 
armes  à  feu,  syphilis,  diabète,  anémie,  trajets  fistuleux 


MONO(;H.\l'IlIE  DE  LA  CO.M.Ml  NE  I)  Al.N-KL- 1  I   UCK 

(.IIAPITHF  V 
LES   RESSOURCES 


Produits  naturels  du  sul 

VÉcjÉTATiON.  —  l.ii  loiO'l  n'oxislL'  [);is  à  Aïii-d-Tmck,  ù 
l'exceplion  loiiU'foi^  dt'  deux  hoscjiiols  coniplaiilés  t'ii  pins. 
d'Alcp  :  l'un,  coniniuiial,  (':?l  silué  8ur  la  roule  du  (Jap 
Falcon,  après  le  ilouar  :  l'autre  décore  les  sommets  de  la 
montagne  l'oeliet  et  provient  de  semis  laits  par  M.  \  assas, 
en  1888. 

A  part  ces  plantations  bien  minimes,  nous  ne  trouvons 
ici  (jue  la  brousse,  composée  de  lentiscpies,  palmiers-nains, 
(jui  disparaît  avec  le  défrichement  des  dunes,  genêts 
épineux,  chène-kermès,  asperges,  diss,  alla.  Dans  les 
dunes,  le  lentisque  atteint  de  grandes  dimensions.  Deux 
genévriers  :  Jiu}iperus  macrocarpa  et  J.  Piiœnicea,  résis- 
tent aux  vents  les  plus  violents  et  iixent  aussi  les  dunes. 
On  pomrait  donc  les  utiliser  poui'  reboiser  les  sables. 

Plaintes  comestibles.  —  Parmi  les  plantes  sauvages 
communément  consommées  ou  utilisées  comme  condi- 
ments, on  peut  citer  :  le  fenouil,  employé  pour  aromatiser 
les  olives,  le  cresson,  la  doucette  (Fedia  cornucopia') ,  la 
chicorée  sauvage,  la  barbe  de  chèvre  (Scorzouera  undu- 
lata) ,  mangées  en  salade. 

La  châtaigne  de  terre  (Biinium  iiicrassatuui) ,  dont  le 
tubercule  est  consommé  pai"  les  indigènes. 

Le  jeune  réceptacle,  teurfa,  du  Rhaponficiuii  acaiilc. 

Les  inflorescences  en  boulons  de  la  grande  férule. 

Les  feuilles  de  la  bette  maritime   (Beta  maritima) . 

Les  turions  de  plusieurs  espèces  d'asperges. 

Champkino.ns.  —  Lorsque  les  premières  pluies  d'octobre 
sont  abondantes,  les  champignons  pullulent  en  certains  en- 
dioits,  (]u'un  peu  de  pratique  nous  a  fait  connaître.  Si  ces 
cryptogames  n'ont  jamais  occasionné  d'accidents,  c'est  (jue 
l'habitant  d'Aïn-el-Turck  s'est  borné  à  consommer  trois 
espèces  seulement  :  le  [tleurote  de  la  férule,  le  psalliote  des 


48  MOiNOGRAPllIE  DE  LA  COMMUEE  D  AÏN-EL-TU  RCK 

champs  et  lo  pliuliole  des  dunc\s.  Tout  autre  ciyplogaïue 
étant  suspect,  ils  ojit  laissé  se  iiiultiplier  la  coulemelle,  la 
coucoumelle,  le  bolet  granulé,  le  pleurote  de  l'agave,  les 
tricliolomes,  collybies  et  coprins.  Depuis  ces  dernières 
années,  tout  de  même,  ils  augmentent  leur  champ  dft 
dégustation  et,  dans  les  champignonnières  naturelles,  les 
produits  dimiiment  graduellement. 

Dans  la  liste  ci-dessous,  nous  ne  tenons  compte  que  des 
espèces  comestibles  et  toxiques.  Nous  avons  donc  laissé  de 
côté  celles  qui,  par  leur  petite  taille,  n'intéressent 
guère  que  le  mycologue. 

Copriiius  atrarneiitarius.  —  Terres  fortes  et  fumées.  Tout 
l'automne.  Comestible  quand  il  est  jeune. 

Coprinus  ovatus.  —  Coprin  ovale.  Comestible  quand  il 
est  en  œuf.  Très  abondant  dans  les  champs  de  petits-pois 
fortement  fumés. 

Pleurotus  opuntiae.  —  Pleurote  de  l'opuntia.  Ne  se 
trouve  que  sur  l'agave  à  Aïn-el-Turck,  aussi  l'ai- je  désigné 
sous  le  nom  de  «  Pleurote  de  l'agave  ».  Comestible,  se 
cultive  bien.  Les  essais  que  j'ai  tentés  en  191 2  sont 
concluants. 

Pleurote  en  coquille.  —  Automne,  bois  de  pins.  Comes- 
tible. 

Pleurotus  eryngii  (2  variétés).  —  Pleurote  de  la  férule, 
champignon  de  fenouil,  de  canne  bédouine.  En  novembre 
abande  sur  les  vieilles  souches  de  la  férule  commune,  aux 
abords  de  la  montagne  Pochet.  Comestible.  —  Pleurote 
du  Panicaut  :  champignon  du  chardon.  Rare.  Se  trouve 
sur  le  chardon  eryngii.  Ces  deux  pleurotes  ont  les  mêmes 
caractères,  le  dernier  a  le  pied  moins  fort  que  celui  du 
pleurote  de  la  férule. 

Agaric  cintré.  —  Couleur  orangé.  Autour  du  poste  de 
radiolélégraphie,  sur  les  racines  du  lentisque.  Comestible. 

Agaric  albellus.  —  Mousseron  blanc.  Très  abondant  dans 
les  bas-fonds  humifères  de  la  zone  radiotélégraphique. 
Octobre.  Comestible. 

Russula  emetica.  —  Russule  émétique.  Vénéneux.  Pins 
de  la  montagne  Pochet.  Novembre  et  décembre.  Rare. 

Agaric  travesti.  —  Tricholoma  personatum.  Autour  de 
la  ferme  Duret,  au  Nord  de  la  Daya.  Connu  ici  sous  le  nom 
de  champignon  bleu.  Comestible. 

Psalliota  campestris.  —  Psalliote  des  champs.  Champi- 
gnon rose.  Coteaux  au  Sud  du  poste  radiotélégraphique, 


.'MONOnRAl'IllE  DE  LA  COMML.NE  d' AÏ.N-EL- 1  L  HCK  4U 

SOUS  les  biiiyèros  et  dans  Itjus  les  chani[)>  de  lumiilcs  cl  de 
|)etils  pois.  I'V'\  lier,  (loiiicslihlc. 

Psdlliola  syliuitica.  —  J'salliolc  (\v<.  l'orèls.  J'Ius  rare  (jue 
le  prrcrdciit.  Mémo  habitat. 

AnKUiitu  iuujiiiaia.  —  Aiiianiic  h  v[\i\.  Coucounu'lle. 
(lonicstiblo.  Très  aboiidiml  (l;iii>  les  cliamps  de  petits  pois 
et  autour  des  meules.  Automne. 

Lépiote  éleuce.  var.  Hhacodes.  —  Automne  et  hiver. 
Haies  de  roseaux  de  la  propriété  Chamuel  ;  meules  Henry 
lîailly  ;  Sud-Ouest  de  la  petite  Daya.  Comestible. 

Plioliolc  (lu  thym.  —  Sur  les  pieds  de  Thvnms  Munbya- 
nus.  i, Appelé,  ici,  tomillo).  Sud  du  {)hare.  Décembre.' 
Comestible. 

Pholiotc  des  dunes.  - —  Très  abondant  dans  le  sable  des 
dunes  dont  il  crève  la  surface.  Vit  sur  les  racines  pourries 
des  lentisques,  phyllerea,  olivier  sauvage.  Ce  champignon 
n'est  qu'une  forme  de  Pholiota  aeyerita.  Après  les  pluies 
de  septembre-octobre.  Dans  toutes  les  dunes.  Comestible. 

Boletus  granulaius.  —  Bolet  gianulé.  Très  abondant 
en  octobre-novembre  sous  les  pins  de  la  montagne  Pochet. 
Comestible. 

Boletus  luridus.  —  Bolet  blême.  Vénéneux.  Peu  abon- 
dant. Se  trouve  en  hiver  sous  les  bruyères  et  autres  brous- 
sailles. 

Boletus  satanas.  —  Bolet  Satan.  Vénéneux.  En  automne. 
Mamelons  de  la  Daya,  sur  la  mousse,  au  pied  des  bruyères. 

Plantes  fourragères.  —  La  prairie  naturelle  n'existe 
pas  à  Aïn-el-Turck,  ce  qu'on  appelle  vulgairement  four- 
rage, est  l'herbe  des  jachères,  très  luxuriante  quand  l'hiver 
a  été  pluvieux.  Ce  fourrage,  séché,  est  assez  recherché  des 
chevaux  et  mulets. 

Plantes  industrielles.  —  Deux  plantes  sont  impor- 
tantes :  le  palmier-nain  et  l'alfa.  Le  premier,  assez  abon- 
dant dans  la  région  caillouteuse  de  Falcon,  est  exploité  et 
vendu  à  une  usine  de  crin  végétal  de  Bou-Sfer.  Le  second 
est  assez  répandu  dans  la  zone  calcaro-sableuse. 

On  pourrait  citer  aussi  l'agave  d'Amérique  (vulgo  aloèsl, 
dont  les  fibres  des  feuilles  servent  à  fabriquer  des  mèches 
de  fouet,  et  le  roseau,  très  recherché  par  les  primeuristes 
pour  tuteurs  et  abris. 


50 


MONOGRAPHIE  DE  LA  COMMU^E  D  AIN-EL-TURCK 


Cultures.  —  Economie  rurale 

Hkpartition. —  Au  point  de  v  ue  des  cultures,  le  territoire 
d'Aïn-el-Turck  peut  être  divisé,  très  approximalivement, 
en  trois  parties. 

A  l'Est  :  terres  à  céréales. 

Au  centre  :  terres  plantées  en  vignes. 

A  l'Ouest  :  terres  cultivées  en  primeurs. 

Céréales.   —  On  cultive  l'orge,    le   blé,    l'avoine     Le 


seigle  est  semé  comme  brise-vent  dans  les  champs  de 
primeuis  et  les  vignes.  On  le  sème  en  octobre. 

Pour  la  confection  des  abris  artificiels,  on  utilise  aussi 
la  paille,  concurremment  avec  le  diss. 

L'orge  et  l'avoine  sont  aussi  cultivées  comme  fourrage 
vert.  Le  rendement  moyen  est  de  i5  quintaux  à  l'hectare. 


.M0N0(;M AI'IIIK   l)K   I.A   CO.MMl   ^E   I)  AIN-Kt.    ri'IUJK  H 

Deux  variélés  de  blé  sont  culUvéos  :  le  blé  dur  et  le  blé 
tendre.  La  i)rodu('li()ii  atleiiit  souvent  /o  quintaux  à 
l'hectare.  C'est  là  un  Ixin  rendement  si  on  le  corni)ar'e  à 
celui  de  la  Helgi(iue,  (|ui  arrive  au  premier  rang,  avec 
•i'i  quinlaux,  et  à  celui  de  la  Krance,  qui  arrive  au  deuxième 
rang  avec  i/i  (|uinlaux. 

Mi'rrnoDE.s  dk  ci  i.j  i kks.  —  Les  méthodes  françaises  de 
culture  sont  les  seules  (jui  soient  adoptées  ici,  même  pai- 
les  indigènes. 

.   Incinéuation  des  ciiAi  mes.  —  L  incinération  des  chau- 
mes se  fait  rarement. 

Transports.  —  Les  transports  se  font  par  charrettes 
(grains  et  vins),  ou  à  l'aide  de  camions.  Ces  derniers 
transportent  surtout  les  primeurs. 

Luzerne.  —  La  luzerne  est  cultivée  dans  les  jardins  ; 
elle  est  vendue  sur  place  ou  sur  le  marché  d'Oran  en  petits 
paquets  de  o  fr.  o5.  Ses  ennemis  sont  :  la  cuscute,  les  larves 
du  soufré  (  Colins  hyalc) ,  de  l'argus  bleu,  de  l'argus  myope, 
du  bombyx  de  la  luzerne,  du  Palomcna  viridissuna. 

Dans  les  grandes  et  moyennes  exploitations,  on  cultive  la 
vigne  et  les  céréales  (jui  nécessitent  mcjins  de  main- 
d'œuvre  que  les  primeurs.  Dans  les  petites  exploitations, 
dirigées  par  des  personnes  ayant  une  nombreuse  famille, 
on  cultive  surtout  les  primeurs,  car  dans  cette  culture  la 
main-d'œuvre  ne  nécessite  pas  de  grands  efforts  '. 

Vigne.  —  La  culture  de  la  vigne  occupe  une  superficie 
de  4oo  hectares  et  produit  en  moyenne  60  hectolitres  à 
l'hectare. 

Les  vignerons,  venus  pour  la  plupart  du  midi  de  la 
France,  importèrent  ici  les  cépages  du  Bas-Languedoc  et 
du  Roussillon  ;  ces  variétés  ont  fait  leurs  preuves. 

Les  terrains  argilo-siliceux  d"Aïn-el-Turck  donnent  des 
vins  de  bonne  tenue  et  de  coloration  franche. 

Dans  les  vieilles  vignes,  les  cépages  les  plus  répandus 
sont  :  le  cariqnan,  qui  a  trouvé  ici  son  terrain  de  j)rédi- 


I  Les  parents  abusent  du  travail  de  leurs  enfants  :  i5  %  des  enfants  d'âge 
scolaire  n'ont  jamais  fréquenté  l'école.  Quelques-uns  d'entr'eux  sont  cependant 
des  fils  d'électeurs.  Tant  que  la  loi  sur  l.'instniclion  obligatoire  ne  sera  pas 
appliquée,  Aïn-el-Turck  fournira  un  nombre  respectable  de  conscrits  illettrés. 


52  MONOGRAPHIE  DE  LA  COMMUNE  d'aÏN-EL-TURCK 

lectiou.  Très  productif,  il  donne  un  vin  coloré,  mais  il 
craint  l'oïdium,  le  mildevv  et  surtout  l'altise. 

Le  grenache,  à  souche  vigoureuse,  se  complaît  dans  les 
coteaux,  il  est  sujet  à  la  coulure  et  son  moût  accusant 
parfois  22°  au  glucomètre  est  sujet  à  refermenter. 

Le  mourverdre,  au  grain  ferme,  lutte  avantageusement 
contre  l'oïdium  et  la  pourriture  ainsi  que  le  niorastel,  qui 
donne  de  bons  rendements  dans  les  sols  profonds. 

L' Alicaiite-Bouschet  donne  un  vin  très  riche  en  couleur. 

La  mondeiise,  connue  ici  sous  le  nom  de  plantamono, 
donne  des  produits  abondants  et  un  vin  limpide  ayant  du 
corps. 

Raisins  de  table. —  Le  chasselas  et  la  madeleine  mûris- 
sent fin  juin  ou  au  commencement  de  juillet  et  arrivent  les 
premiers  sur  les  marchés  d'Oran  et  d'Europe,  jusqu'au 
moment  où  ils  sont  concurrencés  par  ceux  d'Espagne, 
d'Italie  et  du  midi  de  la  France.  Un  hectare  de  ces  cépages 
donne,  en  moyenne,  i.ooo  francs  de  bénéfice  net. 

Parmi  les  variétés  moins  précoces,  citons  :  le  Valenci, 
le  Mascara,  le  muscat  d'Espagne,  au  grain  ovale  très  par- 
fumé. VEl  Bordj,  au  gros  grain  rose  et  blanc,  appelé 
Cognac,  est  un  cépage  tardif. 

Maladies  de  la  vt(;ne  relevées  pendant  les  sept  der- 
nières ANNÉES  : 

La  coulure,  dont  les  causes  mal  expliquées  sont  d'origine 
atmosphérique. 

La  jaunisse,  rare. 

L'oïdium,  très  fréquent  à  la  suite  des  vents  d'Est. 

L'anthiacnose,  rare. 

Le  mildew,  assez  fréquent  par  temps  humide. 

La  pyrale,  rare. 

L'altise,  assez  commune. 

Le  phylloxéra,  qui  a  fait  son  apparition  en  19 10.  La 
libre  culture  a  été  accordée  la  même  année.  La  reconsti- 
tution en  américain  a  commencé  en  191 2  avec  les  porte- 
greffes  :  Rupestris  du  Loi,  sur  lesquels  étaient  greffés 
Carignan  et  Cinsaut  (vigne  Vassas  :  montagne  Pochet  et 
Poteau).  Ces  plantations  ont  réussi  à  merveille. 

Arbres  fruitiers.  —  Aïn-el-Turck  est  loin  d'être  un 
pays  à  fruits.  Néanmoins,  en  pleine  terre  et  loin  de  la  mer, 
on    cultive    quelques    piuniers,    abricotiers    et    pêchers. 


MONOGRAPHIE  DE  T,A  COMMI'NE  n'AÏN-ET.-TIJRCK  -^-^ 

I/ainandior  donne  do  bonnes  lécoltes  sur  le  penehant  des 
coteaux  :  les  ariiiindes  Princesse  sont  e\[)ortées  en  primenis 
aux  mois  de  mai-juin.  Toutes  ces  espèces  sont  sujettes  à  des 
maladies  et  ont  des  ennemis  acharnes  :  les  pucerons,  les 
forficult's  ;  la  larve  du  papillon  flambé  (Papilio  podaliruis) 
paraît  alïectionner  les  piuniers.  Le  poirier  et  le  pommier 
sont  sujets  au  chancre. 

Figuiers.  —  -  Les  figues  précoces  sont  transportées  au 
marché  d'Oran  et  valent  de  o  fr.  /jo  à  o  fr.  5o  le  kilogr.  Les 
variétés  cultivées  sont  la  figue-fleur,  qui  produit  deux  fois 
par  an,  et  la  verdale,  qui  produit  de  septembre  jusqu'en 
décembi'e.  In  hectare  de  figuiers  peut  donner  600  francs 
de  bénéfice. 

Ennemis  :  le  kermès  fCoccus  ficus  caricœ) ,  surtout  dans 
les  jardins  clôturés,  les  fourmis  et  les  oiseaux.  Le  figuier 
craint  beaucouy)  le  vent  marin. 

Olivier.  —  Atteint  rapidement  de  grandes  dimensions. 
L'arbre  est  très  résistant,  mais  la  récolte  des  fruits  est 
devenue  impossible  à  cause  des  ravages  occasionnés  par 
la  mouche  de  l'olivier  (Decus  olœ). 

Aurantiacées.  —  L'oranger  et  le  citronnier  sont  cultivés 
dans  les  jardins  abrités,  mais  en  petit  nombre. 

Grenadiers.  —  Deux  variétés  sont  cultivées  :  la  grenade 
douce  et  l'aigre-douce. 

Figuier  de  Barbarie.  —  Se  trouve  en  petite  quantité 
autour  du  douar. 

Primei  Rs.  —  Le  climat  privilégié  dont  jouit  Aïn-el- 
Turck  devait  amener  les  personnes  ayant  l'esprit  d'initia- 
tive à  cultiver  autre  chose  que  des  céréales  et  de  la  vigne. 
M.  Auguste  Pessoles  fut  le  premier  qui,  il  y  a  20  ans,  tenta 
la  culture  des  primeurs.  Elle  occupe  aujourd'hui  une 
superficie  de  200  hectares. 

Tomates.  —  Produisent  toute  l'année  ;  les  plus  précoces 
valent  i5o  francs  les  100  kilogs. 

Par  sélections  successives,  les  colons  sont  parvenus  à 
créer  ici  deux  variétés  de  tomates  parfaitement  acclimatées 
et  qu'ils  désignent  sous  les  noms  de  Calvania  et  Candiana. 
La  première  a  été  sélectionnée  par  M.  Galvan,  l'autre  doit 
son  nom  à  sa  ville  d'origine  :  Handia,  dans  la  province 


54  MONOGRAPHIE  DE  LA  COMMUNE  d'aÏN-EL-TURCK 

d'Alicante  (Espagne),  d'où  elle  a  été  importée  et  sélec- 
tionnée ensuite. 

Un  hectare  de  tomates  nécessite  une  main-d'œuvre  de 
i.5oo  francs  à  2.000  francs.  I.e  bénéfice  peut  atteindre 
2.000  francs. 

Maladies  :  Oïdium  (la  blanc  a) .  Remède  :  soufrages. 
Le  phytophtora  infeslans  (la  négra),  caractérisé  par 
l'aspect  grillé  des  feuilles  et  des  taches  noires  sur  les  fruits. 
Remède  :  sulfate  de  cuivre  au  2  %.  La  rouille. 

Les  larves  de  cétoines  (Cetonia  mono,  C.  opaca,  C  flo- 
ralis,  var.  harhara)  dévorent  le  pied,  ainsi  que  le  ver  gris 
qui  n'est  autre  chose  que  la  larve  de  la  noctuelle  des 
moissons.  Elles  causent  de  très  grands  dégâts. 

Petits  pois.  —  Se  cultivent  en  pleine  terre  dans  les 
terrains  accidentés.  Deux  variétés  :  le  pois  blanc,  le  plus 
précoce,  et  la  serpette. 

Maladies  :  le  Mildiou,  caractérisé  par  des  marbrures 
blanches  sur  les  cosses  ;  l'anthracnose,  cosses  trouées. 

Artichaut.  —  Se  reproduit  par  œilletons.  Production  : 
de  décembre  jusqu'en  mai.  En  décembre,  les  artichauts 
sont  vendus  à  raison  de  i  fr.  80  la  douzaine,  o  fr.  5o  en 
février-mars.  En  avril-mai,  ils  n'ont  plus  de  valeur,  car  ' 
cette  époque,  l'intérieur  alimente  les  marchés.  Aussi  le 
primeuriste  force  la  fructification,  afin  d'amener  le  maxi- 
mum de  production  en  décembre-janvier-février. 

Variétés  cultivées  :  le  précoce  artichaut  vert  ;  le  violet 
d'Alger  ;  le  bâtard,  à  tête  énorme  ;  le  violet  épineux  qui 
est  le  plus  tardif. 

Frais  culturaux  :  i.5oo  francs  par  hectare. 

Bénéfice  par  hectare  :  i.ooo  francs. 

Maladies  :  Puceron  noir,  puceron  blanc,  la  casside  verte, 
le  mildiou. 

Haricots  verts.  —  Récolte  et  exportation  en  janvier 
Variétés  cultivées  :  haricots  nains  qui   résistent  mieux 
à  la  sécheresse  et  sont  aussi  productifs  que  ceux  à  rames  ; 
le  haricot  beurre,  le  Soissons. 

Maladies  :  la  graisse  (taches  vertes  sur  les  gousses  qui 
poiurissent),  l'anthiacnose  (taches  rondes,  brunes,  crevas- 
ses sur  les  cosses).  Le  haricot  ciaint  beaucoup  le  froid 

Courgettes  primeurs.  —  Depuis  cette  année,  on  cultive 
au  Cap  Falcon  les  courgettes  primeurs.  Essais  très  satis- 


MONOGBAPflIE  DE  LA  COMMUNE  D  AIN-EL-TURCK  O.) 

faisants.  \']n  clrccnibic  i()i:^  "'I  jinixicr  Mjr.H,  elles  se 
veiulaieril  à  liiisoii  de  i  fr.  -h)  le  kilo;.'  siii  le  iiiaielii''  de 
Marseille. 

MeAons  et  pastèques.  —  Cultures  de  pleine  terre.  On 
cultive  1rs  melons  Cantaloup  et  le  Brodé  ^nielon  éerit).  (ri 
hectare  de  melon  rapporte  600  francs  de  bénclice  et  un 
hectare  de  pastètpies,  ()oo  francs. 

Asperges.  —  Cette  culture,  tentée  durant  ces  dernières 
années,  a  donné  des  résultats  merveilleux,  tant  au  point 
de  vue  de  la  qualité  ffue  de  la  (juantité  des  turions  produits. 

I/asperj^c  craint,  moins  que  la  vi^ne,  les  maladies,  les 
insectes  et  les  intemi)ciies.  liénéfices  :  1.200  francs  par 
hectare.  Une  seule  variété  est  cultivée,  c'est  l'asperge 
d'Argenteuii  '. 

PorA(;Ei?.  —  Certaines  plantes  potagères  cultivées  en 
grand  donnent  de  bons  revenus  pendant  la  saison  estivale. 
Telles  sont  : 

Les  aubergines,  vendues  à  o  fr.  5o  la  douzaine  en 
moyenne. 

Le  concombre,  jaune  hâtif  de  Hollande  et  le  corne  de 
cerf,  désigné  sous  le  nom  d'afilcos. 

Le  potiron  jaune  de  Paris  et  la  citrouille  arabe. 

Les  piments  doux  ou  poivrons,  l'ordinaire  et  le  doux 
d'Espagne. 

Les  piments  forts  :  le  long,  le  chinois  et  la  cerise,  ces 
deux  derniers  à  saveur  extrêmement  forte. 

L'échalotte,  qui  vaut  de  20  à  3o  francs  les  100  kilos  sur 
le  marché  d'Oran. 

Plantes  d'agrément.  —  Pour  cultiver  ces  végétaux,  il 
est  nécessaire  qu'ils  soient  abrités  des  vents  marins.  On  a 
beaucoup  tâtonné  pour  trouver  une  essence  forestière 
capable  de  leur  résister  efficacement.  Tl  est  reconnu  aujour- 
d'hui que  le  tacahout  et  le  tamarin  réunissent  les  conditions 
voulues. 


I  Nota.  —  Je  sijrnalf  ici  l'intérêt  qu'il  y  aurait  à  cultiver  dans  les  terres 
léjrères,  et  elles  ne  manquent  pas,  la  pomme  de  terre  hollandaise  à  l'intérieur 
jaunâtre,  d'un  gnûf  exquis  et  qui  se  vend  très  bien.  On  la  cultive  beaucouii 
dans  la  région  de  Mustaganem,  où  elle  fait  merveille  depuis  quelques  années. 
Ce  serait  là  une  culture  à  tenter  d'autant  plus  que  les  autres  variétés  donnent 
de  piètres  résultats  à  cause  de  l'incurie  des  colons  qui  s'obstinent  à  semer 
de  mauvaises  pommes  de  terr«  achetées  à   vil  prix  au  marché  d'Oran. 


56      MONOGR APHTE  DE  LA  COMMUNE  d'aÏN-EL-TURCK 

Dans  les  jardins  ainsi  abrités,  on  cultive  de  nombreuses 
espèces  résistant  |)lus  ou  moins  an  climat. 

Arbres  de  promenades  et  d'agrément  : 

Cyanophyllas.  —  Développement  rapide,  mais  ils  sont 
brisés  par  les  forts  vents. 

Palmiers.  —  Deux  variétés  :  le  phénix  et  le  dattier.  Un 
seul  dattier  amène  son  régime  à  maturité.  C'est  celui  placé 
dans  la  cour  de  Madame  veuve  Gustave  Combet. 

Eucalyptus.  —  Viennent  très  mal,  ils  sont  brisés  par 
le  vent. 

Faux-ficus.  —  Réussissent  dans  les  endroits  abrités.  Ceux 
plantés  dans  la  cour  de  l'école  de  garçons,  en  1896,  s-ont 
magnifiques  et  progressent  sans  aucun  soin. 

Tacahout  et  tamarin.  —  Résistent  aux  vents  marins. 
En  T912,  le  service  des  Ponts  et  Chaussées  a  utilisé  ces 
essences  pour  orner  l'entrée  du  village.  En  igi^,  il  a 
prolongé  la  plantation  depuis  la  ferme  Navarre  jusqu'à 
Bouisseville. 

Triacanthos.  —  Ces  acacias  entourent  la  propriété 
Navarre  où  ils  forment  des  haies  impénétrables. 

Vente  des  récoltes.  —  Les  récoltes  se  vendent  de 
diverses  façons  :  Des  courtiers  visitent  les  propriétés  et 
achètent  la  récolte  sur  pied  :  raisins,  tomates,  artichauts. 
D'autres  fois,  le  propriétaire  apporte  ses  produits  au 
marché  d'Oran.  Enfin,  il  expédie  directement  à  diverses 
maisons  de  Marseille,  Genève,  Paris. 

Achat  de  c.ratnes  et  d'enorats.  —  Les  cultivateurs 
conservent  des  semences  de  tomates,  melons,  pastèques, 
poivrons,  petits  pois.  Quant  aux  autres  plantes,  les  semen- 
ces sont  achetées,  soit  directement  en  Erance,  soit  chez  les 
marchands  grainiers  d'Oran.  11  en  est  de  même  des 
engrais,  mais  Oran  devient  un  centre  fournisseur  des  plus 
sérieux  depuis  que  plusieurs  usines  d'engrais  y  ont  été 
créées. 

Machines.  —  Les  machines  agricoles  n'existent  pas,  les 
colons  d'ici  ne  sont  pas  syndiqués  et  n'ont  pas  de  machines 
en  commun,  ils  sont  donc  à  la  merci  des  sociétés  qui  leur 
louent  les  moissonneuses  ou  qui  dépiquent  leurs  gerbes 
à  raison  de  i  franc  par  quintal  de  grain. 


MONOr.K  \PIIIF   DR  î,\   COMMINF   P   MN-FI.  TT'HCK  •>/ 

T,rs  niiicliiiK's  ('l(''\  Jilniirs  "^(Uil  iiii  iMHiibic  (]*•  oti/.f.  Co 
soiil  (les  iiidlciirs  n  ^m/.  pjiiiNrc  on  l'i  [x'-lrctlc  i|iii  ('■l('\ciil 
l'oaii  (les  puits  iirccssairr  i\  la  culfiirc  mai  aîclirrc  cl  à  relie 
de  l'arlirliaiil.  Citons  encore  deii\  norias  à  elievaux  et 
trois  élévateurs  éoliens. 

Ef.en.\(;e.  —  On  n'élèxc  ici  (|uc  des  chèvres,  fi^o  en 
moyenne.  Elles  voni  pacager  dans  les  comnnmaux.  aux 
bords  des  chemins,  sur  les  coteaux,  dans  les  propriétés, 
après  l'enlèveïnent  des  récoltes.  Chaque  chèvre  paye  à  la 
commune  un  droit  de  o  fr.  i5  par  mois.  A  certains 
momtMits,  le  troupeau  de  chèvres  s'augmente  de  quelques 
moutons  venant  du  Sud.  T-c  colon  les  achète  potir  la  viande- 
et  pour  avoii-  du  fumier.  Afais,  à  part  le  fumier  et  la  laine 
qu'il  en  retire,  le  bénéfice  est  bien  réduit. 

T>a  laine  non  lavée  se  vend  de  t  fr.  à  r  fr.  '>.")  le  kilog. 

T,e  lait  est  vendu  sur  place  à  raison  de  o  fr.  -h)  à  o  fr.  .'^o 
le  litre  et  à  des  laitiers  qui  l'emportent  deux  fois  par  jour 
à  Oran. 

Rt'ciier.  —  l,e  rucher  compt(>  '|0  ruches.  T.es  apicul- 
teurs sont  tous  des  indigènes  :  ils  emploient  des  ruches 
sommaires  fabriquées  avec  des  caisses  ou  avec  des  tiges  de 
férule  relié'cs  entre  elles  et  recouvertes  de  diss.  Le  prix  du 
miel  varie  de  t  fr.  5o  à  ?.  fr.  .5o  le  kilog. 

TwvsTONs  DE  svTTEBELLEs.  —  La  première  invasion  enre- 
gistrée date  de  1867.  Viennent  ensuite  les  invasions  de  i8()i, 
iSpr»,  T8p3,  1907.  T>a  dernière  est  du  ^'i  mai  1909. 

Propriétés  et  exploitations.  —  Le  domaine  de  l'Etat 
comprend  le  terrain  de  la  réserve  domaniale  du  phare  de 
Ealcon,  d'une  étendue  de  t'i  hectares  90  ares  44  centiares 
cultivables. 

Les  communaux  occupent  une  superficie  de  900  hectares 
(Miviron.  Les  biens  indigènes  n'existent  pas. 

L'étendue  totale  des  propriétés  des  colons  est  de  t. 000 
hectares.  La  surface  moyenne  d'une  propriété  de  colon  est 
de  t5  hectares  environ.  Les  propriétaires  exploitant  eux- 
mêmes  leurs  concessions,  les  fermieis  sont  peu  nombreux. 

Le  prix  des  terres  varie  de  5oo  francs  a  3. 000  fraucs 
l'hectare.  Elles  se  louent  de  ."^o  francs  à  9.00  francs  l'hectare. 

Le  salaire  journalier  agricole  est  de  ?>  francs  par  jour, 
mais  un  liavail  de  spécialiste,  comme  celui  de  tailleui-  de 
vigne,  par  exemple,  se  paie  'j  francs  par  jour. 


58  MONOGRAPHIE  DE  LA  COMMUNE  d'aÏN-EL-TURCK 

Le  nombre  des  ouvriers  agricoles  esl  très  variable,  mais 
il  n'est  jamais  inférieur  à  ^oo.  Au  moment  de  certains  tra- 
vaux :  moissons,  vendanges,  piochage  des  vignes,  ense- 
mencements, cueillette  des  piimeurs,  les  Marocains  du  Riff 
(i  les  Espagnols  arrivent  par  bandes  et  doublent  au-delà  le 
nombre  ordinaii'e  des  ouvriers  agricoles. 

Une  ferme  avec  son  terrain,  ses  constructions,  ses  outils 
agricoles,  son  matériel  vinaiie,  représente  une  valeur 
moyenne  de  3o.ooo  francs. 

Le  colon  est  aisé  ;  il  doit  cette  aisance  à  la  qualité  des 
terres,  au  climat  privilégié  d'Aïn-el-Turck,  à  la  proximité 
d'Oran,  enfin  à  l'établissement  des  seivices  réguliers  mari- 
times, qui  lui  ont  permis  de  cultiver  les  primeurs  pour 
l'exportation. 

Pour  les  mêmes  raisons,  l'indigène  est  aisé  ;  il  travaille 
ses  terres  pour  son  propre  compte,  il  a  adopté  les  procédés 
culturaux  et  les  instruments  agricoles  des  Européens  et 
s'en  trouve  très  bien.  Parfois,  il  loue  son  terrain  pour  la 
culture  des  primeurs. 


CHAPrrUE  VI 
ACTIVITÉ    HUMAINE 


Dans  un  pays  où  les  habitants  tirent  à  peu  près  toutes 
leurs  ressources  du  sol,  le  conunerce  et  l'industrie  ne 
peuvent  prendre  une  giande  extension  et  seule  l'industiie 
peut  présenter  quelque  intérêt  particulier  à  la  région. 

Commerce 

Le  commerce  local  d'importation  se  borne  à  fournir  aux 
habitants  les  produits  d  usage  courant  :  denrées  alimen- 
taires, tissus,  vêtements  confectionnés,  poteries,  matériaux 
de  construction,  substances  éclaiiantes,  engins  de  pêche, 
etc.,  achetés,  en  général,  sur  la  place  d'Oian. 

L'outillage  et  le  matériel  agricoles  proviennent  des 
maisons  d'Oran. 

A  l'exportation,  les  transactions  sont  plus  importantes, 


MONOr.RAI'IIIK   t)F,  I,\  COMMUNE  D  AIN-EI.-TIIRCK  0!> 

rar  elles  poilenL  sur  les  léréjiles,  le  \iii  et  lo  primeuis. 

Les  céréales  el  le  vin  sont  vendus  iuix  nég(K-,ianls 
(l'Orau  ;  les  piirueuis  smil  expédit'es  siu'  le  poit  de 
Miuseiile,  iiue  uuuiine  |»arlir  ><iu  l'i  ni  \  endics,  nù  ii  lieu 
la  \('ule  [lai  l'i  rilertnédiaiic  des  eourtici^,  (pii  -^'atl  i  d)ueii| 
ii't)|)  s()u\eul  des  eouuiiissions  exlioibilardes. 

Il  y  a  lieu  de  si«jualer  (|ue  l'alfa,  (|ui  n'est  pas  liés  lare 
dans  la  bioussaille,  fournit  un  lé^rer  alirnenl  au  eoniriiorre 
d'exporlalioii.  !>(>  uièine  le  palmier-nain,  (pii  est  vendu  à 
une  usine  de  Uou-Sfer. 

Industrie 

En  dehors  des  petites  industiies  de  niéliers,  il  n'existe 
I)as  de  grande  industrie  à  Aïn-el-Turek.  Toutefois, 
il  y  a  lieu  de  citer  deux  petites  industries  particulières  au 
littoral  maritime  :  la  pêche  du  poisson,  la  |K'che  du  corail. 

Pêche.  —  Ouel(|ues  pécheurs  sont  inslallés  à  Aïn-el- 
Turck  et  au  cap  Falcon,  mais  le  plus  p^rand  nombre 
viennent  de  Meis-el-Kébii'  et  d'Oran. 

Les  fonds  de  pèche  sont  très  différents  :  il  y  a  la  plage, 
les  rochers,  le  banc  de  la  seiche,  si  connu,  les  fonds  argi- 
leux, les  plus  profonds,  explorés  par  les  pareilles,  les  fonds 
vaseux,  visités  pai-  les  tartanons,  les  lanijiar'os,  les  boliches. 

La  diversité  des  poissons  rencontrés  est  très  grande.  Les 
espèces  péchées  et  consommées  comamment   sont  : 

L'anguille  de  mer,  la  nunène,  l'anguille  commune,  le 
congre,  la  sardine,  l'anchois,  le  turbot,  la  sole,  la  limande, 
le  poisson  anguille,  le  gobie  noir  ^cabotte,  el  cura),  le 
maquereau  Tpoisson  bleu,  cavalla\  le  thon,  la  bonite,  le 
baccorète,  la  dorée  fie  Saint-Pierre),  la  dorade,  la  grande 
araignée  (grande  vive),  la  petite  araignée  (petite  vive)  ', 
le  chabot,  le  mérot  (cernier),  la  rascasse,  le  bar  fie  loup), 
le  serran,  le  rouget,  le  nuilet  (la  lisse),  la  sargue,  le  tam- 
bour, le  pageot  (pagel),  le  bezugue,  la  bogue,  la  salpe  la 
pastenague,  la  raie  blanche,  la  raie  bouclée,  l'ange  de  mer 
fel  angel),  le  chat  de  mer  (el  gato). 


-i  Le?  vivi's  portent,  derrière  \,i  tèle,  des  ;u;.'iiill<iiis  ('>>iiii)iiiiiii|N;iiit  avec  des 
j.'liiiKles  à  venin.  La  piciùre  est  ilnno'ereiise,  surtout  relie  tle  In  petite  vive. 
Tniites  den\  sont  communes  d.-ms  les  foiuls  de  siihle.  nu  voisinage  de  la  côte. 
Pour  combattre  ces  piqûres,  l'application  de  divers  méilicaments,  souvent 
empiriques,  a  causé  des  désordres  dans  l'orjjfauisme.  In  procédé  railical  que 
J'ai  vu  employer  eiricacement ,  à  maintes  reprises,  est  l'instillation  de  quelques 
fïonttes  de  permanganate  de  potasse  :!    i/ion  dans  la  piqûre  même. 


60 


MONOGRAPHIE  DE  LA  COMMUNE  D  AlN-EL-TURCK 


l'iiniii  les  crustacés,  on  prend  (juelques  homards  sur  les 
rochers  de  Falcon.  Le  grand  crabi'  épineux  n'est  pas  très 
rare  et  les  crevettes  sont  assez  abondantes. 

Gisements  nioiilicrs.  —  Parmi  les  niollus^iues,  en  dehors 
de  (juelques  espèces  partout  communes,  il  faut  citer  les 
moules  dont  il  existe  plusieurs  gisements  sur  les  parties 
rocheuses  de  la  côte. 

Les  gisements  mouliers  ont  tous  une  tendance  marquée 
à  faire  face  au  N.-N.-E.  Les  parties  des  îlots  et  de  la  côte, 
ayant  une  autre  orientation,  en  sont  totalement  dépourvus. 
Malgré  la  pèche  incessante  qu'on  leiu'  fait  i)ar  basse-mer, 
surtout  aux  j)ériodes  d'équinoxe,  certains  gisements  sont 
encore  très  imi)ortants.  On  peut  les  classer  ainsi  par  ordre 
d'importance  :  ceux  de  l'île  Plane  et  de  (j-uelques-uns  de  ses 
îlots  ;  le  rocher  des  moules,  à  r.ooo  mètres  à  l'Ouest  du 
})hare  de  Falcon  ;  ceux  du  bas  du  phare  ;  ceux  de  la  pointe 
Saint-Roch. 

La  moule  d'Afrique  ou  moule  verte  (Mytilus  africanus) 
atteint  un  développement  considérable.  La  moule  noire 
(Mylllus  (jalloproviiicialis)  et  Modiola  adriutica,  à  taille 
|)lus  faible  et  à  valves  plus  minces,  y  sont  plus  rares  La 
dernière  est  ornée  de  rayons  rougeatres  d'un  fort  bel  effet. 
La  moule  verte  (var.  Maaritanica)  se  rencontre  autour  de 
l'île  Plane. 

Le  coi-ail.  —  Le  corail  rouge  (CoralUiuii  rubruin  L) ,  la 
seule  variété  de  coiail  existant  à  Aïn-el-Turck,  fut  autrefois 
une  des  ressources  du  pays.  La  pèche  en  est  interdite  depuis 
plusieurs  années,  ce  qui  permettra  aux  bancs  de  coraux  de 
se  reconstituer.  La  fig.  3  montre  l'emplacement  des  bancs. 


+  ♦ 

/p5ï  î  .TÎiTtô 


I.ift  rat! 


Fig.   3.  —   l'i)^iti(iii   ;i|>[ir(iximative   des   b:incs   de  coraux   en    igo'6. 


MONOGHAI'IIIE  DE  LA  COM.MUiNE  u'aÏN-EL-TUKCJC  ('1 

DEUXIÈME  PARTIE 

NOTICE    HISTORIQUE 


CHAPITRE  Vil 
LE  VILLAGE 


Préhistoire,  histoire 

I, "homme  PRKiiisTOHUjiE.  —  Lcs  diverses  stations  de  làge 
de  la  pierre  qui  ont  clé  découvertes  sur  le  territoire  d'Aïn- 
el-Turck,  prouvent  (|uc  la  plaine  des  Andalouses  a  été 
habitée  dès  la  plus  haute  antiquité.  (Voir  carte,  page  62.) 

Dans  son  Caialo{jue  des  stations  préhistoriques  de  ta 
province  d'Oraii,  M.  Pallary  signalait,  en  1886  et  1888,  la 
présence  de  silex  taillés  aux  environs  du  village  et  dans 
la  grotte  de  l'abri  de  la  Plage  (.Grotte  aux  Pigeons  du 
Cadastre). 

En  février  1896,  M.  Doumergue  relevait,  près  de  la  ferme 
Navarre,  au  bord  de  la  falaise,  premier  ravin  à  l'Ouest,  une 
excavation  éboulée  avec  couche  archéologique,  renfermant 
des  silex  taillés,  des  coquilles  marines  et  des  fragments 
d'œufs  d'autruche. 

En  19 10,  derrière  la  ferme  Emerat,  à  la  côte  89,  en 
bordure  de  la  mer,  auprès  de  la  source  de  l'Aïn-Aounsar, 
un  beau  dépôt  préhistoiique,  nettement  néolithi(jue,  dont 
la  couche  supérieure  constitue,  au  moins  en  partie,  les 
terres  du  jardin.  La  tranche,  apparente  sur  10  à  i5  mètres 
de  longueur,  montre  une  épaisseur  de  couche  de  2  mètres 
à  2'°5o.  Dans  ce  dépôt  en  plein  air,  qu'on  peut  considérer 
comme  station  littorale,  M.  Doumergue  n'a  exploré  que  la 
lèvre  et  y  a  recueilli  la  partie  inférieure  d'un  métacarpien 
(V Antitopc  t)u1>nJis  Pallas  et  quelques  silex  de  petite 
dimeiision. 


62 


monoc;haphie  de  la  commune  d'aïn-el-tu 


RCK 


^—   ^-«ULjjl 


iMONOdUAI'IlIli  DE  LA  COMMUNE  d'aÏN-EL-TUUGK  <>-Î 

A  l'Ouest  de  la  falaise  des  (.loialès,  à  5oo  mètres  au  Nord 
de  la  côte  i^O,  il  rcciicillail  de,  nuiiibieux  silex  et  (juartziles. 
Je  signalciai  deux  ikhincHcs  stations  : 

1°  A  la  base  du  Ras  bel  llanech,  ù  l'Est  du  ravin  Khedidja. 
—  Intrigue  par  les  (luantilés  de  ecxjuillcs  niarines  que  la 
eharrue  lanienail  en  certains  endroits,  iM.  Cirandjean  m'en 
apporta  un  ceilain  nombic  à  déterminer  :  avec  quelques 
hclix  se  trouvaient,  en  assez  grande  abondance,  des  pecton- 
cles,  Purpnrea  hcniastotna,  Cassis  sulcosa  et  un  Cassis 
saburon  ;  ils  étaient  em[)àtés  de  terre  rougeâtre,  provenant 
de  la  désagrégaticjn  des  roches  de  la  colline.  A  la  surface, 
j'ai  recueilli  quelques  morceaux  de  S.  T.,  mais  brisés.  Je 
ne  me  suis  livré  à  aucune  fouille,  pas  plus,  d'ailleurs,  que 
dans  la  station  suivante  ; 

2°  Station  du  Cimetière  des  Escargots  '. —  Entre  la  plage 
des  Coralès  et  la  côte  loo,  sur  une  étendue  d'un  demi- 
hectare  de  dunes,  se  trouvent  des  coquilles  d'hélix  que  l'on 
aperçoit  en  quantité  considérable,  surtout  après  une  forte 
pluie.  Ces  coquilles  ont  été  transportées  en  cet  endroit,  car 
les  80  %  d'entre  elles  appartiennent  à  Vllelix  aspersa.  Or, 
cette  espèce  ne  se  trouve  actuellement  vivante  que  dans  la 
proportion  de  2  %.  Nous  avons  là  un  foyer  en  plein  air, 
qu'il  serait  intéressant  d'explorer.  Les  coquilles  marines  s'y 
rencontrent  en  moins  grande  quantité  que  les  hélices. 

Des  coquilles  d'escargots  et  des  restes  de  repas,  que  nous 
avons  trouvés  en  fouillant  les  abords  des  grottes  et  cavités 
portées  sur  la  carte  de  la  page  62,  nous  prouvent  que  sept 
ont  été  sûrement  habitées. 

Ce  sont  :  la  Cueva  de  los  Ninos,  la  grotte  du  Curé,  les 
3  grottes  de  Khedidja  (surtout  la  grotte  du  Diable,  très 
escarpée  et  la  grotte  longue  qui  lui  fait  face),  la  grotte  des 
Ciseaux,  celle  de  la  Tour  du  Cap. 

Les  outils  préhistoriques  les  plus  remarquables  que  j'ai 
rencontrés  ici,  entre  la  grotte  du  Négro  et  l'anse  des 
Coralès,  sont  deux  haches  en  pierre  verte  cylindro-coniques 
dont  voici  les  dimensions  :  longueur,  o"  097  ;  corde  du 
tranchant,  o'"o42  ;  plus  grand  diamètre,  o'"o4ô. 

Les  berbères  autochtones.  —  Parmi  les  peuples  qui  ont 
occupé  le  territoire  d'Aïn-el-Turck,  ceux  qui  laissèrent  des 
traces  visibles  de  leur  occupation  furent  les  Beibères.  que 

I  Nom  que  je  lui  donnai  en   1909. 


04 


MONOOKAPIIIE  DE  LA  COMMUiNE  D  Al\-EL-TtIRCK 


l'on  peut  considérer  comme  les  aiitochlones.  Les  ruines 
berbères  (jue  j'ai  signalées  et  décrites  en  kji^  \  formaient 
neuf  villages  occupant  des  liauleuis  dominant  la  plaine  et 
à  proximité  de  points  deau.  Ces  ruines  peuvent,  d'après 
leur  importance,  être  classées  dans  l'ordre  suivant  : 

i"  Ruines  de  la  Daya  (3  villages)  ; 

2°  Ruines  de  la  ferme  Anselmo  ; 

3"  Ruines  de  Bouisseville  ; 

4°  Ruines  de  la  Douane  ; 

5°  Ruines  de  Saint-Roch  ; 

6"  Ruines  de  l'Eglise  ; 

7°  Ruines  du  cap  Falcon. 

Leur  situation  est  indiquée  sur  le  croquis  suivant  : 


Environs  d'Aïn-el-Turck 


zr--  Huiiu's   liei  hères   --■■ 
Cch. //(..•  il-. 1—, L 


Les  croquis  de  la  page  65,  relatifs  aux  ruines  berbères 
de  Bouisseville,  de  la  Douane  et  de  Saint-Roch,  complètent 
mon  premier  travail. 


I   Ferdinand    Blanche.    —    Ruines    berbères    des    environs    d'Aïn-el-Turck 
In-Bull.  Soc.  de  Géog.  et  d'Arch.  d'Oran,  Février  igiS. 


\i<>\(M,n  \nii|.:  i,i:  i  \  co.m.mi  .\l;  I)'aï\-i:i.- it  iujk  65 


nuLn^s  oerop'res   de^ 
'^^  TCoch   dUi  r2  Avrf7  f^/3 
&cKeile  •  -1 


^uôi  es  ierâe.  -es  de  BoaissevïJJe 
en  -/^o]f .        Eckeiie:  __L__  . 


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7luxn^5    DeJVer<35    --zzzz 

Tum.L'lus (^ 

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Miiubout  3-duel,.     ^ 
SouM'ce    _  ^ . . . ^ 


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S  o  u  l û  Vci  r  d. 


Tînmes  Serleres   ,Je  Jd  c/ouci/ie  en  /^/J 
Xoo  o 


6e^ 


MONOr.KAPHlE  DE  LA  COMML  >E  u' AÏN-EL-TURCK 


Les  Iknbèies  paiiussoiit  avoir  orciipé  le  pays  vers  la  Un 
de  l'âge  de  la  pierre.  Dans  les  ruines  berbèies,  il  n'est  pas 
rare  de  rencontrer  des  balles  de  jet  en  silex,  des  niielei, 
des  silex  taillés  et  de  nombreux  fragnu-nls  de  poteries 


L'industrie  de  la  polerie,  jugée  par  les  débris  reneonirés 
sur  l'emplacement  des  anciennes  agglomérations,  nous 
prouve    (pi'elle    fut    ccmslanunenl    en    progrès  :    noirâtre, 


AÎ(1\0(.U  VIMIIK   \)K   r.A   COMMI    Ni;   I»' VÏ\    l'.l.    Il   HCK  '»" 

^Tossirif,   l'oilciiiciil    iiiiciMM'c,   iii.il  ciiilc  de-  Ir  di'ltiil,   r||i 
.illciiil  |tliis  l.iid  un  (Iciiir  <!<•  |tci  Icclidii  1 1 rs  marque,  donl 
i>li     pcill    se    liiiif    une    idcr    piii     le»    (lcii\     \  iiscs    ci-roillic 
trouvrs   dans   les   riiiii(.'>   bcrljèics   de   la    hdiiaiic.    (^)ijc   de 
temps  n"a-l-il  pas  fallu  pdur  ai  river  à  un  pareil  jcsullal  ! 

l  II  aiilit'  aiiiiiiiH'iil  en  laxrur  de  la  Idii^iuc  oc('U]>al  ion 
berbèri'  (>sl  ('cliii-ci  :  dans  les  vases  mal  linis,  ceux  (pii 
appailiennent  par  eonséipienl  à  la  période  la  plus  reeiih-e, 
on  ne  lit)u\e  jamais  de  Iraee  de  mélaiix.  haiis  ceux  appai- 
lenanl  à  une  période  [)lus  récente,  on  tintuvc  des  anneaux 
en  cuivre,  t'ormés  dune  torsade  de  gros  lil  de  laiton,  dos 
morceaux  de  fer  mal  l'oiLié  cl  des  débris  d'œiils  daiiIruelK': 

Les  Berbères  curent  peut-être  des  relalii>ns  aycc  les 
Curtliagiiiois.  —  Les  villages  berbères  étaient  trop  bien 
situés  pour  ne  pas  être  visités  par  les  Phéniciens.  Ces  com- 
mervanls,  ayant  des  comploirs  de  Tripoli  à  Tangei',  de 
Cadix  à  C-arlhagène,  auraieid-ils  ignoié  ces  agglomérations 
placées  à  côté  de  baies  sûres  comme  celles  des  Aiguades  et 
des  Coralès  ?  Certains  vases  berbères,  peints  avec  des  cou- 
leurs indélébiles,  renfeiniant  |)arl'ois  des  parures  où  l'étain 
donnne,  des  (l'ul's  daulnielie  taillés  à  (îenls,  indicpieraieiit 
une  imj)oiialion  ou,  au  moins,  une  imitation  phénicienne. 

Les  Berl)ères  eurent  eertainement  des  relations  avec  les 
Roniains  de  Castra-Pueroruni.  —  Au  uf  siècle  de  notre  ère,, 
les  Romains  construisirent,  dans  la  région,  le  centre  de 
Castra-Pueroruni  (les  Andalouses).  Il  y  a  lieu  de  supposer 
(pi'ils  entretinrent  des  relations  avec  les  Berbères  d'Aïn-el- 
Turck,  car  des  débris  ornés  de  poteries  romaines  sont 
mélangés  à  d'autres  franchement  berbères  ;  certains  por- 
lenl  même  des  dessins  romains  grossièrement  imités. 

Quelques  mots  sur  les  Berl)ères.  —  Les  Berbères  d'Aïn- 
el-Turck  étaient  agriculteurs,  leur  silos  fourmillent  à  tel 
point  que  dans  une  seule  agglomération  j'en  ai  relevé  plus 
de  soixante.  Ils  avaient  le  culte  des  morts  qu'ils  enteriaient 
dans  des  tumuli.  Ces  lumuli  sont  en  petit  nombre,  si  Ion 
tieid  compte  des  nombreux  Beibèies  <pii  occupèrent  le 
pays.  On  ne  peut  eri  faire  une  description  exacte,  car  ils 
ont  tous  été  fouillés,  les  ossements  et  le  mobilier  dispersés. 
Au  dire  des  vieux  Arabes,  de  nombreux  tumuli  existaient 
entre  le  marabout  de  Sidi  bel  Kheir  el  le  posie  radiotélé- 
grapliique  actuel.  C'est  le  seul  point  du  territoire  que  je 
n'ai  point  e\jtloré,  car  les  dunes  l'ont  einahi  en  progies- 
sanl  constamment  de  l'Ouest  à  l'iist. 


68  xMO.\OORAP]llE  DE  LA  COMiMUNE  d'aÏiN-EL-TURCK 

Vandales  et  Arabes.  —  Au  v*"  siècle,  après  avoir  conquis 
l'Espagne,  les  Vandales  ajiivèrent  en  Al'ii(iue  el  déliui- 
siient  l'œuvre  berbère.  Depuis  cette  époque,  jusqu'au 
xvf  siècle,  nous  ne  connaissons  rien  de  l'histoire  du  pays 
que  les  Arabes  occu})èrent  pourtant  vers  le  vni''  siècle.  La 
seule  trace  de  leur  occupation  était  un  cimetière,  disparu 
aujourd'hui,  et  qui  occupait  approximativement  le. teriain 
sur  lequel  est  construit  le  faubourg  Saint-Maurice. 

Occupations  établies  si  r  des  DocLMENrs  historiques  i. 
—  A  partir  du  xv*  siècle,  la  plaine  d'Aïn-el-Turck  est,  à 
diverses  reprises,  sillonnée  par  des  troupes  débarquées,  soit 
aux  Corailleurs,  soit  dans  la  baie  des  Aiguades,  dans  le  but 
de  s'emparer  ou  de  reprendre  iMers-el-Kébir  et  Oran. 

Portugais.  —  Sous  Jean  I,  le  i4  août  i/ii5,  les  Portugais, 
après  avoir  débarqué  aux  Andalouses,  s'emparent  de 
Mers-el-kébir  et  d'Oran,  qu'ils  abandonnent  ensuite. 

En  1471,  Alphonse  V  s'empare  de  nouveau  d'Oran,  mais 
Jean  II  rendit  la  place  aux  Maures. 

En  i5oo,  les  Maures,  chassés  d'Espagne,  débarquent  à 
Aïn-el-Turck  et  s'établissent  à  Oran. 

En  1607,  les  Portugais  débarquent  aux  Andalouses, 
s'emparent  de  Mers-el-Kébir,  puis  repartent. 

Espagnols.  —  En  1609,  le  i/i  mai,  le  cardinal  Ximénez 
débarque  à  Aïn-el-Turck  et  occupe  Mers-el-Kébir  et  Oran. 

Si  les  Espagnols  n'établirent  rien  de  durable,  on  ne  peut 
nier  cependant  que  leur  action  s  étendit  plus  à  l'Ouest  de 
Mers-el-Kébir  :  de  nombreuses  pièces  de  billon  de  cette 
épocjue  (xvi''  et  xvii^  siècles)  ont  été  trouvées  dans  les  com- 
munaux de  Bou-Sfer,  par  M.  Vuillaume  et  par  d'autres  per- 
sonnes, à  Aïn-el-Turck.  Voici  la  description  d'une  de  ces 
pièces  trouvée  dans  un  défrichement,  à  un  kilomètre  au 
Sud-Ouest  du  phare  de  Falcon  2.  C'est  une  pièce  obsidionale 
frappée  à  Oran,  en  1691,  sous  le  règne  de  Charles  H.  Elle 
est  taillée  à  six  pans  : 

Charles  II 

Revers  :  Armes  écart elées  de  Caslille  el  de  Léon,  couronne 
royale.  Dans  le  champ  et  transversalement,  Î\I  D  et  un  8. 

Avers  :  I.  H.  S.  (Jésus,  Honiinum,  Salvator),   il  y  a  un  petit 


1  Ouvrages  consultés.   —  Fey  :   Oïdii,   (tvniil,   pcinlaiit.   djivi's   In   ânniiin'litiii 
espnçindle.  Conimanflant   Derrieii  :  Hisloirc  d'Ornii. 

2  Cette  pièce  me  fut   remise  jiar  iiii   (Irrricliciir  pcndiiiit    une  ilc  mes  excur- 
sions. 11  venait  rie  la  trouver. 


MONOr.TtAPMIE  DR  LA  COMMl'NE  d'aÏN-EL-TURCK  ^^^^ 

ncurftti  f(irl  ('•It'^Miit    puis  iriinK'diîilciiiciil  iiii-(l(.'ss<nis,  cl  suivant 
la  (•(luiliiiiv  (lu  jrrriu'lis,  le  mol  :  OMAN. 

(!) 'aprî's  [>.  Fcy,  cpii  a  citô  la  inomc  monnaie.) 

Maures.  —  F.es  Espai^nols  ciircnl  1res  souvent  à  su!)ir  les 
alhuiiics  dos  Maiiros.  En  \l^)C)?>,  \c  pacha  Hassan,  d'Mfror, 
d('hai(]n;i  sur  la  [)laii('  d' Aïn-el-Turck  cl  so  dirigra  sur 
Mers-cl-Kébir,  (|u'il  ne  |)iil  prendre.  En  1708,  Oran,  ne 
recevant  [)as  (le  seeoiiis,  ea[)ilula  et  Bon  Chelagliram  en 
pril  possession  an  nom  du  pacha  d'Alger. 

Espaçinols.  —  Vingt-quatre  ans  après,  Phihppe  V,  roi 
d'Espagne,  vouhit  re|)rendre  Oran,  tombe  aux  mains  des 
liarharcs.  Une  armée  de  .Ho. 000  hommes,  commandée  par 
le  comte  de  Aforteniart,  partit  d'Alicante  le  i5  juin  r-Sr? 
et  débarqua,  le  80  juin,  sur  la  plage  d'Aïn-el-Turck,  dans 
la  baie  des  Aiguades.  4o.ooo  infidèles  voulurent  s'opposer 
au  débarquement,  mais  ils  furent  vaincus.  Les  Espagnols 
passèrent  le  col  de  Khedidja  et  entièrent  dans  Oran,  le 
T*'"  juillet  T-?!-?..  Quelques  jours  après,  Alexandre  de  la 
Motte,  lieutenant-général  ,  investit  Mers-el-Kébir,  défendu 
par  l'agha  turc  Ben  Dahiza.  Ees  Tiucs  capitulèrent  par 
suite  du  luanque  d'eau  '. 

Ees  Espagnols  conseivèrent  la  plaine  d'Aïn-el-Turck 
jusqu'en  176:^..  A  cette  date,  l'Espagne  qui  était  entrée  dans 
la  coalition  contre  la  France  républicaine,  dut  négliger  ses. 
colonies.  En  1790,  un  tremblement  de  terre  poita  un  rude 
coup  à  la  ville  d'Oran.  Ea  position  devint  intenable. 
T, 'Espagne  entra  en  pourparlers  avec  le  dey  d'Alger  et  ce 
fut  le  ca|iitaine  Guinbaida,  en  personne,  qui  apporta  les 
propositions  concernant  la  remise  d'Oran  et  de  Mers-el- 
Kébir  au  gouvernement  du  dey. 

Turcs.  —  De  1792  à  t8.So.  le  territoire  d'Aïn-el-Turck 
passe  sous  la  domination  turque.  Pendant  ces  38  ans,  les 
Tui'cs  ne  laissèrent  aucun  vestige  de  leur  occupation.  (Une 
pièce  en  or  turque  fut  trouvée  dans  le  terrain  de  M.  Saint- 
Cyr,  à  l'endroit  où  les  Turcs  établirent  leur  campement). 
Pendant  cette  occupation,  le  territoire  des  Andalouses  était 


I  .S|ir  l:i  portf  ilii  fort  de  Mpis-pI-Kciiir.  un  m.irlire  rappelle  à  la  poslérité  le 
succès  de  cette  campagne. 

.\ii  cap  Falcon,  près  du  mur  berbère,  se  trouve  une  tnur  en  ruines  qui  n'est 
ni  d'oripine  arabe,  ni  turque.  Elle  pourrait  bien  avoir  été  construite  par  les 
Fspajrnols  pour  servir  de  vijrie  dans  la  crainte  d'un  débarquement  des  Turcs. 
Ce  point  surveille  la  baie  des  Andalouses,  la  côte  des  Coralès  et  celle  d'.Vïn- 
el-Turck. 


70  MONOr.B APHTE  DE  L\  COMMUNE  d'aÏN-EL-TURCK 

parcouru  par  des  tribus  nomades,  composées  de  quelques 
tentes  seulement  ;  celles  d'Aïn-el-Turck  faisaient  pacager 
leurs  troupeaux  dans  la  plaine  et  sur  les  coteaux,  (jui 
étaient  très  broussailleux.  A  la  Daya,  ils  ensemençaient  un 
peu  d'orge  dans  les  clairières  existant  entre  les  touffes  de 
palmier-nain.  Ils  éle^  aient  aussi  des  abeilles  autour  de 
l'emplacement  actuel  de  la  ferme  Duret. 

Les  agents  du  fisc  turc,  envoyés  d'Oran  avec  une  forte 
escorte,  passaient  le  col  de  Khedidja.  venaient  prélever  le 
zekkat  et  d'autres  impôts  que  les  Arabes  payaient  en  mau- 
gréant, impôts  iniques  contre  lesquels  ils  se  seraient  bien 
révoltés,  s'ils  avaient  été  plus  nombreux  et  s'ils  n'avaient 
point  craint  d'être  conduits  auprès  du  bey  d'Oian  qui,  en 
fait  de  sanction,  les  aurait  fait  pendre  à  la  tour.  T>es  soldats 
turcs,  surtout,  étaient  réputés  pour  leur  brutalité.  Ils 
campaient  sous  les  figuiers,  auprès  de  la  source  «  Aïn-el- 
Turck  ».  Après  leur  départ,  les  Arabes  trouvèrent  leurs 
silos  vides  et  leurs  ruches  sans  miel. 

François.  —  Oppressés  par  les  Turcs  d'un  côté,  ne  pou- 
vant transporter,  à  La  Marsa  (Mers-el-Kébir),  un  sac  d'orge, 
sans  donner  une  rançon  aux  coupeurs  de  route,  les  \rabes 
menaient  ici  une  vie  des  plus  précaires.  Aussi,  lorsque  les 
Français  débarquèrent  à  Mers-el-Kébir,  sous  les  ordres  du 
général  Damrémont  et  occupèrent  Oran,  le  i/j  août  t83o, 
ils  furent  accueillis  comme  des  sauveurs.  Un  vieil  arabe 
du  douar  des  Ali  Larbi  pouvait  dire  à  son  fils  :  «  Lorsque 
nous  vîmes,  sur  les  collines,  se  dresser  des  fortins  pour 
tenir  au  large  les  djicbeurs  du  grand  lac  fLac  de  Misser- 
gbin'),  qui  contournaient  la  monlagne  y)our  diriger  leurs 
attaques  sur  Mers-el-Kébir,  ei  qu'au  moindre  coup  de 
canon,  ils  se  sauvaient  comme  des  moineaux  dans  un 
champ  d'orge,  nous  disions  :  «  Dieu  soit  loué  !  »  Nous 
rapprochâmes  nos  tentes  à  l'abri  du  canon  français.  »  Ce 
vieil  arabe  et  tous  ses  proches  servirent  contre  les  Gharabas, 
les  Douairs,  les  réguliers  d'Abd-el-Kader,  car  ils  ne  voulu- 
l'ent  à  aucun  prix  retourner  sous  la  domination  turque 

L'attachement  de  la  petite  tribu  des  Ali-Larbi  à  la  cause 
française  fut  sincère.  Nous  trouvâmes  chez  elle  de  précieux 
auxiliaires,  ceitains  furent  goumiers,  comme  Ben  Touil, 
don!  les  petits-fils,  presque  tous  primeuiistes,  vivent  actuel- 
lemenl  au  milieu  des  Luropéens,  sans  que  c<Mix-ci  aient  eu 
jamais  à  se  plaindre  d'un  nllentat  quelconque  sur  leur 
pei'sonne  ou  sur  leurs  l)iens.  Les  pionniers  de  la  Milidja 
auiaient  bien  envié  leur  sort  ! 


MONOr.H  AI'IIIi;   DE  T.  \  COMMl  \K   f)' VÏN-EF.- TIIRCK  Tl 

Histoire  du  viilau:<' 

Avant  l'ail  îm'-c  (les  l-'rjiiiriiis,  en  nS.So,  le  Ici  riloiic  d"  Aïri- 
cI-Tiirclv  rlail  parcoiiiii  [tar  la  [»rlilr  Irihii  iKHiiadr  des 
FI  l'afia.  Les  \ral)('s.  (|\ii  la  conijJOsairMil,  cullix  aient  un 
peu  d'tir;^('  cl  faisaicnl  pacaitcr  leurs  lr()uj)eaiix  dans  la 
plaine  d' Aïn-el-Tuick,  (lu'ils  désii^naient  sous  le  nom  de 
«  IMaine  de  l'i^urfa  ». 

\  renconirc  daulres  Iribiis,  eaiu})ées  au  Sud  du  Miird- 
jadjo,  les  l'.l  j-afia  élaicnl  des  ^ens  paisibles  qui,  ayani  au 
CfiMU'  la  haine  des  Tuirs,  devinieni  nr)s  auxiliaires. 

Apiès  le  débarcpienient  des  Français  à  Oian,  le  i 'i  a<>ùl 
iN.'^o,  la  («laine  de  l'Furfa  appartint  au  Maf?hzen  et  fit  pailie 
du  leriiloii'e  uiilitaiie  d'Oran.  Fes  (îouverneurs  Généraux, 
étant  préoccupés  pai"  les  révoltes,  sans  cesse  renaissantes, 
qui  ensanglanlaient  le  pays,  du  Kiss  à  l'Aurès,  remiicnl  à 
plus  tard  la  création  des  centres. 

l-a  Commission  des  centies,  réunie  pour  la  première  fois 
le  t'"' janvier  i846,  ne  parla  point  de  la  création  d'un  villaj^e 
à  Aïn-el-Turck.  car  ce  n'était  pas  un  pte  d'étapes. 

Fe  i"""  août  t8'|S.  le  territoire  d'Aïn-el-Turck  fit  partie 
iiitéo-rante  de  celui  d'Oran,  qui  venait  d'être  érigé  en  com- 
nuine  de  plein  exercice. 

Création  or  centre  d'Aïx-el-Ti  rck.  —  F^n  décret  en 
date  du  it  août  i85o,  et  promulgué  le  i8  septembre  i85o,. 
])resciivit  la  création  d'un  centre  dans  la  plaine  de  l'Eurfa. 

Voici  la  copie  du  texte  de  cet  arrêté  : 

Au  nom  du  Peviple  Français, 

Fe  Président  de  la  République, 

Vu  les  ordonnances  du  21  juillet  i845,  o  juin  et  i"'  soptem- 
t)re  18/17. 

Sur  le  rapport  du  Ministre  de  la  Guerre, 

DÉCRÈTE   : 

Article  i*"".  —  Tl  e.*!  créé  dans  la  plaine  de  l'Eurfa  (arron- 
dissement d'Oran),  au  lieu  dit  Aïn-el-Turek,  un  rentre  de  popu- 
lation européenne  de  60  feux,  qui  prendra  le  nom  d'Aïn-el-Turck. 

Art.  :>.  —  Un  territoire  de  :>.6oo  hectares  35  ares  f^^  centiares 
est  affecté  à  ce  centre  de  y)0])idation.  ronfomiément  au  plan 
ci-annexé. 

Art.  3.  —  Fe  Ministre  de  la  Guerre  e."!  chargé  de  l'exécutinn 
du  présent  décret. 

Fait  à  l'Elysée  National,  le  1 1  août  t85o. 

Siffué  :  Fouis-Napoléon  BONAPARTE. 


12.  MONOGRAPHIE  DE  LA  COMMUNE  D  AÏN-EL-TURCK 

Le  lo  septembre  i85o,  le  Ministre  de  la  Guerre  adressa 
une  dépêche  demandant  le  plan  de  délimitation  et  d'ali- 
gnement du  village,  dressé  conformément  aux  règlements 
et  instructions  en  malière  de  voirie  urbaine. 

A  partir  de  ce  moment,  le  centie  d'Aïn-el-Turck  devient 
une  annexe  d'Oran  et  un  adjoint  du  chef-lieu  y  est  délé- 
gué, comme  faisant  fonctions  de  Maire. 

Je  laisse  à  deviner  le  temps,  l'esprit  d'initiative,  l'activité 
qu'il  a  fallu  pour  permettre  à  Aïn-el-Turck  de  devenir 
commune  de  plein  exercice.  Son  histoire,  pendant  i/i  ans, 
sera  liée  à  celle  d'Oran,  de  Bou-Sfer  et  des  Andalouses. 

•     Passons  en  revue  chacun  de  ces  points  : 

Création  du  centre  de  Bou-Sfer.  —  Un  décret  impérial 
du  II  septembre  i8r>/i  créa  le  centre  de  Bou-Sfer  ;  il  fut 
d'abord  rattaché  à  la  commune  de  plein  exercice  d'Oran, 
plus  tard,  à  celle  d' Aïn-el-Turck. 

Constitution  de  la  Commission  de  i86i  relative  a 
l'étude  du  projet  de  distraction,  des  annexes  d'Ain- el- 

TURCK    ET    DE    BoT'-SfER,     DE    LA    COMMUNE    d'OrAN.    Le 

i5  octobre  1861,  une  commission  syndicale,  nommée  par 
le  Préfet,  était  chargée  de  donner  son  avis  motivé  : 

1°  Sur  l'utilité  de  la  distraction  des  centres  d'Aïn-el- 
Turck  et  de  Bou-Sfer,  de  la  commune  d'Oran  et  de  leur 
constitution  en  communes  séparées  ; 

2°  Sur  les  limites  du  teiritoire  à  assigner  à  la  nouvelle 
commune  d' Aïn-el-Turck. 

3°  Sur  la  situation  financière  dans  laquelle  se  trouvera 
placée  la  nouvelle  commune,  en  prenant  pour  base  les 
diverses  ressources  qu'elle  pourra  réaliser  et  les  dépenses 
auxquelles  elle  aura  à  faire  face. 

La  Commission,  indépendamment  de  l'adjoint  spécial, 
président,  comptait  dix  membres  : 

MM.  Froment  Ernest,  Olivérès  Antoine,  Bailly  Nicolas, 
Julien  Sébastien,  Leloup  Joseph,  propiiétaires  à  Aïn-el- 
Turck  ;  MM.  Semperez  Gas|)ard,  Crozet  François,  Grégoire 
Hyacinthe,  Blanchot  Ange-Marie,  Paya  Joaquim,  proprié- 
taires à  Bou-Sfer. 

Le  37  octobre  i86t,  elle  émit  un  avis  favorable. 

Les   propriét  VIRES    des    A\d\loi;ses    réclament   lei  r 

RATTACHEMENT    A    LA    I-UTTTΠ   COMMUNE    DE    PLEIN    EXEliCICE 

d'Aïn-el-Turgk.  —  Lorsque  les  propriétaires  des  Anda- 


MONOC.nAPIlIE  DE  f,A  f;OMMI  NE  D  AÏN-EF  - TÎTRCK  /•> 

loiiscs  iippi  iitiil  <|iic  Aïii  cl  I  iiick  iilliiil  (ItM'iiii  iirir 
(■(  illlllilllic  lie  [)l»'ili  rxciricc,  ils  (lriii;i  iidricill ,  plil'  voie  (Ir 
pi-lilioii,  il  M.  If  Pirlt'l  (l'Oiiiti,  le  r»  iidùl  i(Sli;>,  à  flrc 
iiilliiclK's  j  l:i  ii(iii\ clic  coiiimuiic. 

(-('Ile  pt'-lilicii  [Kiiliiil  les  signatures  tl<'  MM.  \iii. 
niaiulio,  II.  liliiiiclid,  i'riiiljci  iil  .T.  .];i('(|ii(s,  I  li'hi  iiid, 
Ariliiissc.  l'CiiilIci  ;il.  .I(is('|)li  Hiir<,  .1.  l'iuis,  riiliiidoii, 
Joseph  (liiiitiin,  MorL-ciii,  .1.  lîolici',  Asiiiir,  Péicz,  DrnnI, 
TTfMiii  Olixici',  l'oiilciKM,  Merccran,  iMlcIin  F.oiiis,  Edrliii 
l'ifiic,  Hiihi'v,  .Icaii  Masia,  (jallaiulier,  plus  deux  siguu- 
taiics  illisibles. 

U\  DÉCREI    IMI'KIUM     KR1(;K   AÏN-EL-TlHCK  EN  COMMINE   DE 

iM.EiN  EXEHcicE.  —  Fullu,  les  colous  (l'Aïn-el  Tiuek  ])iirciil 
vivre  de  leur  piopre  vie.  Le  23  mars  i86/|,  -m  seul  décret 
impérial,  conlrcsi/^jnc  du  Maréchal  Randon,  érigea  en 
communes  de  plein  exercice,  les  centres  de  Alers-el-Kébir, 
Aïn-el-Tuick  et  Bou-Tlélis. 

Voici  la  {»artie  du  décret  ipii  concerne  Aïn-el-Turck  : 

Art.  /|.  —  Commune  d'A'in-el-TurcI:.  —  La  coinmiine  d'Mn- 
el-Turck  comprend  le  terrilnirr  indiqué  aii  plan  ri-anncxc.  et  a 
pour  limites  : 

Au  Nord  :  la  mer  ; 

A  l'Est  :  le  territoire  de  la  coninuuie  de  Mers-el-Kébir  ; 

\  l'Ouest  :  l'oued  Atchan  et  l'oued  Madrao  ; 

Au  Sud  :  la  crête  Nord  du  Djebel-'Merdjajnu,  le  chemin  d'\ïn- 
Rerzoïiff  à  Oran  et  l'oued  Berzoug. 

Elle  a  pour  sections  : 

1°  Le  centre  de  Bou-Sfer  ; 

2°  La  plaine  des  Andalouses. 

Art.  5.  —  Le  corps  municipal  de  la  commune  d'Aïn-cl-Turck 
se  compose  ainsi  qu'il  suit  : 

1°   Du  maire  : 

:>"  De  trois  adjoinls,  ddtil  un  pour  chacune  des  sections  de 
Bou-Sfer  et  des   Andalouses  ; 

3°  De  six  conscillei-s  municipaux,  dont  quatre  Français  ou 
naturalisés  Français,  plus  un  étraniJ^er  ayant  au  moins  deux 
années  de  résidence  en  Alirérie.  dont  une  dans  la  circonscriplidu 
conununale.  ini  indiirène  musulman. 

Le  2^  octobi(>  iSr)/),  urK^  bdtre  préfectorale  demande 
l'état,  des  douars  et  fractions  de  douars  situés  sur  le 
teriitoiie  d'Aïn-el-Turck  et  t<iutes  observations  sur  le 
passage  des  indigènes  sous  l'Administration  civile. 


74  MONOr.RAPlIIE  DE  LA  COMMUNE  d'aÏN-EL-TURCK 

Le  relevé  de  ces  douars  n'a  pas  élé  annexé  au  dossier 
existant  dans  les  aichives  de  la  Préfeclure  d'Oran. 

Les  annexes  Jioi-SFEU  Er  les  Andalolses  se  sépakem 
d'Aïn-el-Tirck.  —  Les  deux  annexes  d'Aïn-el-Turck,  Bou- 
Sfer  et  l(>s  Andalouses,  mieux  desservies  pai'  la  route  d'Oran 
aux  Andalouses,  s'agrandirent  au  détriment  d'Aïn-el- 
Turck  et  acquirent  bientôt  assez  de  développement  pour 
justifier  leur  accession  à  la  vie  communale. 

Après  la  constiliilioM  d'une  commission  syndicale  de  ces 
deux  sections  et  le  rap})oit  favorajjle  cpi'elle  émit,  le  Préfet 
d'Oian,  par  arrêté  en  date  du  r>3  octobie  1869,  décréta  la 
distraction  d'Aïn-el-Turck,  des  annexes  de  Bou-Sfer  et  des 
Andalouses. 

Bou-Sfer  devint  conHUune  de  plein  exercice  et  eut  les 
Andalouses  comme  section. 

La  seciton  des  Andalouses  se  sépare  de  Bou-Sfer  ei' 
devient  a  son  tour  commune  de  plein  exercice.  —  A  son 
tour,  la  section  des  Andalouses  ne  tarda  pas  à  demander 
son  indépendance.  Par  décret  du  Président  de  la  Bépu- 
bli(|ue  du  i"^""  mai  189:?,  elle  était  érigée  en  commune  de 
plein  exercice  et  prenait  le  nom  d'El-Ançor. 

A  partir  de  ce  moment,  la  grande  plaine  des  Andalouses, 
depuis  Saint-Boch  jusfju'au  cap  Lindless,  est  partagée  entre 
trois  communes  de  plein  exercice  :  Aïn-el-Turck,  Bou-Sfer 
et  El-Ançor.  ('.es  deux  dernières  primeront  Aïn-el-Turck, 
qui  s'elToicera  de  ne  point  '^e  laisser  devancer  par  ses 
rivales  u 

l)h;\  ELOPi'EMENT  d' AïN-EL-TuRCK..  —  Dc  1869  à  i885, 
Aïn-el-Turck,  isolé,  reste  à  peu  près  stationnaire.  Ce  n'est 
qu'à  partir  de  i885  qu'il  commence  à  piogresser  lentement. 

De  i885  à  1900,  pendant  ([uinze  ans,  le  village  est  em- 
belli par  des  plantations  d'arbres,  des  trottoirs  sont  cons- 
truits, les  rues  sont  éclairées.  C'est  déjà  un  progi'ès. 

En  1900,  un  colon,  M.  Debaix  Maurice,  a  l'ingénieuse 
idée  de  lotir  son  terrain  en  bordure  de  la  plage,  pour  la 
construction  de  villas  qui  devaient  constituer  le  noyau 
d'une  station  balnéaire  ;  l'opération  réussit.  Le  faubourg 
Saint-Maurice  était  créé. 

La  municipalité  ne  peut  pas  se  laisseï-  devancer  par  l'ini- 
tiative privée  :  le   16  févriei-   189*^,   elle  vend  les  terrains 


\'i>ir  l'Hiliclc  (le  \,i  Culuni-salion. 


MONOr.HAPIlIE  DE  I, A  COMMTINE  D  AlN-ET,-TTJRCK  75 

('('(Irs  piir  le  (l(  iiiiiiiiic  iiiiiril  itiic,  s  r|rii(l:iiil  du  \  ill;i<^M>  Siiiiil- 
Miimicr  ;iii  c;!!);!!  de  d(.''\  crsciiiciil  de  In  i);i\ii.  i  i  »  lois  soiil 
Nciidii^  M  iiiison  de  o  IV.  -.")  le  iiiMic  ciuié.  l-a  sprciilidion 
^"('11  niric,  cl,  en  i<)i.'^,  siiixiinl  hi  siUiJilioii,  le  prix  du  riirln' 
iillcinl  de  T)  à  :>o  fiaiics. 

(  ju-;\i  i<)\  i)i;  J'vicoN.  —  I.cs  iiiiiiilciii  s  de  poclu'  siii\  iiciil 
le  nioincinfnl  cl  séinhiirciil  à  l'aulrc  cxlrruiilc  {]o  la  [)la<T(', 
au  cap  l^^dcon,  (pii  avait  déjà  alliré  l'allciiliou  des  Oiaiiais, 
puis(pi'cu  i8;)<i  r  Xdmiiiisti'ation  loiiail,  jxtiu  lo  ans,  une 
supcilicio  de  i6  hcclaics  de  Icnaiii,  dépoudaiicc  (]\i  pliaic 
(/'('•lait  l'cmplaccnicnl  du  villaf^c  do  Falcon. 

Des  baraques  coniuicncèrcnl  à  s'élever  bien  péniblement 
jus(|u'au  niomenl  où  Aïn-el-Tuick  lolil  son  tenain.  Dès 
lors,  de  belles  constructions  s'élevèreiil.  INI.  Olio  avait 
constiLiit  la  première  baratjue  ;  en  1906,  ou  en  comptait  12 
et  actu(^llement  se  dressent  nno  trenlaiue  de  luaisons  ou 
ca.bauous,  saus  eouiptei'  les  maisons  des  primeuiistes  que 
l'on  bàlil  petit  à  pcMit  sur  les  l(M'rains  compris  entre  le  cap 
Falcou  et  le  Pain  de  Sucre. 

Crkation  d'adres  \\\exes.  —  Aïn-el-Turck  comprend 
encoie  l'annexe  Trouville,  datant  de  T900  ;  le  faubourg 
Saint-Germain,  créé  en  tqoFi  par  une  société  composée  de 
MM.  Pitollel,  Vassas,  Pessoles,  Boux  :  le  fauboni'o-  Bouissc- 
ville,  créé  en  19F0  par  M.  Bouisse,  suivant  un  plan  métho- 
dique :  le  fnubouro-  Saint-Roch-sur-Mei-,  loti  en  1912 
fancienne  propriété  Soulié),  il  ne  comprend  encore,  en 
T9Î.S,  que  la  cantine  Soulié  et  la  villa  Manliès. 

Tous  ces  faubourgs  sont  construits  ou  se  construisent 
sur  des  terrains  qui  piennent  .jouruellem(>nt  de  la  valeur, 
de})uis  (pie  les  municipalités  ont  essayé  de  faire  d'Aïn-el- 
Turck  une  station  balnéaire*  et  (pie  le  tramway  est  en  voie 
de  constiiiction. 

Les  .ndmiin'strateiirs 

En  i85o,  M.  Gouvion,  adjoint  au  Aîaire  d'Oran,  est 
délégué  eonmie  adjoint  spécial  faisant  fonctions  de  Maire 
à  \ïn-e]-Tui('k.  T.e  village  n'a  pa^  (\v  niaiiie,  la  population 
est  infime  et  les  futurs  époux  vont  pédesticment  faire 
établir  leur  contrat  de  mariage  à  la  ferme  Gou^  ion,  occupée 
aeluellerncni  p;ii'  la  maehine  élévatoire  de  Bouisseville. 

En  iSfii,  Aïn-el-Tuick  devient  e<mimune  de  plein  exei'- 
cice.  M.  Gouvion  qui,  comme  adjoint  sj)écial.  a\ait  adnn'- 


76  MONOCBAPITIE  DE  LA  COMMUNE  d'aÏN-EL-TURCK 

iiislré  la  coiiiirtuiic  de   i8r)0  à   i86i,  est  nommé  maire  et 
conserve  ses  fondions  jusqu'en  1867. 

Son  adminislralion  est  mar(|uée  par  quelques  faits 
importants  : 

l,a  remise  à  la  comumne,  le  7  avril  1857,  du  puits  com- 
nninal,  du  lavoii'  et  de  la  fontaine  de  la  place  Sud. 

Le  7  août  1857,  l'église  Saint-Antoine  de  Padoue  est 
remise  à  la  commune  par  les  Domaines. 

En  1858,  le  général  de  Géraudon,  inspecteur  général, 
séjourne  quelques  jours  à  Aïn-el-Turck. 

Le  9,9  janvier  1860,  ouvertine  de  la  première  école  mixte. 

C'est  pendant  l'édilité  de  M.  Gouvion  (pi'eut  lieu,  le 
if)  déceinbie  i865,  M.  Vassas  étant  adjoint  au  maire,  le 
naufrage  du  «  Borysthène  »,  sur  l'île  Plane  '. 

Ce  paquebot,  des  Messageries  Impériales,  élait  parti  de 
Marseille  le  mercredi  i3  décembre  t865,  à  5  heures  du  soir, 
pour  Oran,  avec  257  passagers,  dont  10^  hommes  du  55"  de 
ligne,  55  militaires  voyageant  isolément  et  46  passagers 
de  y  et  fi^  classes. 

A  9  heures  et  demie  du  soir,  le  t5  décembre,  la  mer, 
houleuse  depuis  quelques  heures,  devint  très  mauvaise  ; 
tous  les  passagers  étaient  couchés,  loi'sque,  vers  les 
1 1  heures,  un  craquement  terrible  se  fit  entendre.  Le  navire 
venait  de  toucher  l'île  Plane.  Heureusement  que  l'avant 
s'était  engagé  entre  deux  récifs,  ce  qui  permit  le  va-et- 
vient  des  passagers  du  bateau  juscpi'à  l'île. 

Le  sous-lieutenant  Roy  commandait  le  détachement  du 
55"  de  ligne.  Il  Ht  l'appel  de  ses  hommes  sur  l'île  Plane, 
dix-sepi  soldats  man((uaienl,  lem^s  corps  furent  retrouvés, 
plus  tard,  du  cap  Lindless  jusqu'à  Bougie,  et  reconnus  par 
l'écusson  el  le  matricule.  En  tout,  54  personnes  avaient 
disparu. 

Il  n'y  avait,  à  cette  épo(|ue,  ni  phare  ni  sémaphore  si- 
gnalant l'île  Plane.  Le  sinistre  s'étant  produit  pendant  la 
nuil,  les  pauvres  naufragés  pouvaient  rester  longtemj)s 
sans  secours  ;  massés  au  point  culminant  de  l'îlot,  ils  ne 
foiniaient  plus  qu'une  grappe  humaine,  sur  laquelle  la 
pluie  faisait  rage,  tandis  que  les  vagues  furieuses  se 
brisaient  avec  fracas  contre  ce  petit  îlot,  distant  de  8  milles 
de  la  côte. 


I  1,11  reliilion  (lôlriillre  du  iiimrrnrfp  se  tnmve  dans  VErlia  r/'O/o/i  dr  l'p|)cif|iie 
cl  flans  les  «  Naufrages  célèbres  ».  L'/Z/^/x/rc'  Algérien  du  i"  mars  iS()fi  en  donne 
le  récit  de  M.  Verette,  aide-major,  échappé  au  désastre. 


MO.NOC.ItAI'IIllJ  l»l';   I.A   (XJMMI   Ni;   I)    \l\-lil.- I  l   IICK  '/ 

Aïii-cl-Tiiick  n'iipi)!!!  le  dôsa^ln'  (jik'  le  Iciidciiiuin  à  l;i 
pi'emièic  hciue.  La  nouvelle  lui  apportée  par  un  (jUicier 
conimandanl  nu  «h'-laclK  iiieiil.  Il  scnail  trouver  M.  \assas, 
adjoint  au  uiaire,  [joui  ré(piisitionin'i  les  liubilunl.s,  alin  d«; 
porter  secours  aux  luallieureu.x  lia u liages.  Toute  la  popu- 
lation, coupant  droit  à  travers  les  dunes,  se  précipil<i  à  la 
hàle  dans  la  direclioii  du  sinistre,  mais  arrivée  aux  Coralès, 
la  mer  était  démontée  et  accumulait  dans  la  crique  :  cada- 
vres, caisses  de  pétrole,  marcliaiidises  diverses.  l*ar  inter- 
mittences, un  soleil  blafard  éclairait  iile  IMane  et  la 
silhouette  des  naufragés,  (pi'il  était  impossible  de  secourir 
par  terre. 

l'endant  (]ue  l  olliciei  prenait,  avec  l  adjoint  au  Maire, 
les  mesures  nécessaires  pour  assurer  le  service  d  ordre, 
cinq  balancelles  ariiv aient  d'Oran,  toutes  voiles  ouvertes. 
Les  survivants  étaient  sauvés. 

A  I  heure  de  l'après-inidi,  ils  débaicpièient  à  Oran  dans 
un  état  de  fatigue  et  de  dénuement  extrême,  après  être 
restés  au  milieu  des  transes,  depuis  le  vendredi  i5  décem- 
bie  à  1 1  heures  du  soir,  jusqu'au  dimanche  à  lo  heures  du 
matin,  c'est  à  dire  pendant  ^^5  heures. 

((  L'Echo  d'Oran  »  ouvrit  une  souscription  pour  les 
sinistrés  ;  elle  rapporta  12.000  francs  i. 

M.  GoLvioi\  eut  pour  successeurs  à  la  mairie  : 

De  1867  à  1868  :  iM.  liviLLY  Nicolas. 

De  1868  à  1871  :  M.  Vassas  Antoine. 

Le  8  avril  1869,  Bou-Sfer  est  détaché  d'Aïn-el-Turck 

Le  23  mai  1870,  est  décidée  la  construction,  sur  la  place 
du  Centre,  du  bureau  de  poste,  de  la  geôle,  de  l'école,  du 
logement  de  l'instituteur,  des  dépendances  de  l'école  et  de 
la  poste. 

De  1871  à  1874  :  M.  Perrin  Louis. 

L'école  mixte  est  transférée  à  la  place  du  Centre,  en 
janvier  1872. 

De  1874  à  1876  :  M.  Vassas  Antoine. 

De  1876  à  1878  :  M.  Perrin  Louis. 

De  1878  à  1881  :  M.  Julien. 

Par  décret  du  i^""  mai  1879,  l'école  est  dotée  des  terrains 
compris  dans  les  lots  n°'*  ii5,  116,  117,  118  du  plan 
cadastral. 


I  M.  Perrin  ramassa  sur  la  plniri'  (]iu'l(iues  épaves  du  linryallihie  avec 
lesquelles  il  orna  avec  goût,  près  de  la  mer,  un  petit  coin  de  la  ferme  Perrin, 
aetuellement  ferme  Navarre.  —  La  elochc  du  [iorystliène  se  trouve  à  l'école 
de  gar<;ons  de  Bou-Sfer. 


7S  MONOORAI'IIIE  DE  LA  COMMUNE  d'ai^-EL-TT  RCK 

Le  i"'  mai  11^79,  le  lavoii'  cl  l'abreuvoii',  silués  près  de 
la  Douane,  soiil  mis  en  eonsliiietion,  ainsi  (|ue  le  j)resbytèie 
el  le  cimetière. 

De  t88i  à  i8():'.  :  iM.  Bam.i.v  llemi. 

Le  16  mai  1887,  l'école  mixte  est  dédoublée. 

De  1872  à  1900  :  M.  Pessoles  Frédéric. 

Plantations  de  cyanophyllas,  189 y. 

Création  d'une  ■.>."  classe  de  filles  et  aehat  , l'une  horloge 
communale,  1893. 

Construction  du  préau  de  l'école  de  lilles  (cour  des 
ficus),  7  décembre  1893. 

Adduction  des  eaux. 

Trottoirs  et  caniveaux. 

Plantation  de  ficus  à  l'école  d(^  filles,  1896. 

Installation  de  la  machine  élévatoir(>  de  l'Aïn-el-Tiu'ck, 
1895. 

Premier  éclairage  du  centr(^  à  l'aide  de  réverbères  à 
pétrole. 

De  1900  à  1912  :  M.  Sai\t-C\r  Adolphe. 

C'est  pendant  l'édilité  de  M.  Saint-Cyi'  (pie  la  construc- 
tion des  villas  prit  une  grand.'  extension. 

En  1902,  le  Domaine  maritime  céda  à  la  commune  des 
terrains  qui  furent  revendu^  par  elle  à  de  très  nombieux 
acquéreurs. 

Quelques  faits  importants  iniirquent  le  passage  de  la 
municipalité  Saint-Cyr  : 

Création  d'une  2"  classe  de  garçons  et  d'une  3*"  classe  de 
filles,  octobre  1906. 

Création  d'une  3*  classe  de  garçons,  avril  191 2. 

Transformation,  en  1908,  de  Ta  jecette  auxiliaire  des 
postes  en  recette. 

Création  de  l'usine  élévatoire  de  rAïn-Aounsai\ 

De  19 12  à  1913  :  M.  Batlly  Alfred. 

Du  20  juillet  1913  à  .  .  .  :  iM.  Vassas  Joseph,  fils  de 
l'ancien  maire  de  1868. 

Colonisation 

En  18:^7,  un  colon  lijjre,  du  nom  de  Perrin,  et  vjui 
n'avait  lien  de  commun  avec  les  familles  de  ce  nom  habi- 
tant actuellement  le  village,  s'établissait  dans  un  gourbi, 
à  2  kilomètres  à  l'Est   du  futur  emplacement  du  village. 

Comme  nous  l'avons  vu  au  chapitre  ((  Histoire  du 
village  »,  le  nombre  de  concessions  accordées  par  le  décret 
du  II  aoijt  1850  fut  de  60.  Chaque  concession  avait  une 


M()\()(.n  M'iiii-:  hi:  I  \  (  <)\iMi  \i:  it"\ï\  i:i,   ii  hck  7!) 


LÉGENDE  ;  1.  Douane.  —  2.  Maison  Louis  Longhi  ;  3.  Maison  Olivérès  :  4.  Maison  Pierre  Longhi  : 
5.  Maison  Chanel  et  Charles  Perrin  ;  6,  Maison  Gibergues  ;  7.  Maison  Piochaud  :  8.  Maison  Pochet  fils  : 
9.  Maison  Pareil;  10,  Maison  Boiella  Michel:  II.  Maison  Vassas  :  12.  Maison  Couderc.  —  13.  Pu^ts, 
Bassin,  Abreuvoir, 


80  MONOGRAPIUE  DE  LA  COMaltiSE  d'aÏN-EL-TURCK 

contenance  moyenne  de  25  hectares.  Le  plan  de  distribu- 
tion, d'alignenienl  et  de  nivellement  fut  établi  par  le 
Service  des  Bâtiments  Civils. 

La  brousse,  composée  surtout  de  lentisques  et  de  pal- 
miers-nains, occupait  tout  le  territoire  et  l'emplacement 
même  du  village.  Le  Gouvernement  de  la  -i"  République, 
voulant  favoriser  les  défrichements,  accorda  aux  colons 
125  francs  par  hectare  défriché. 

Les  premiers  colons  établis  furent  :  Couderc,  Vassas 
Antoine,  Botella  Michel,  Pareil,  Piochaud,  qui  habitaient 
place  du  Sud  ;  Olivérès,  Pierre  Longhi,  Louis  Longhi, 
Narbo  Jean,  Chanel,  place  du  Nord  ;  Pochet,  sur  la  route 
entre  la  place  du  Nord  et  celle  du  Centre  ;  Gibergues,  à  la 
place  du  Centre.  Quelque  temps  après,  Couderc  vendit  sa 
concession  à  Anton  Carlos.  Ils  habitaient  les  maisons  indi- 
quées sur  le  plan  de  1802.  (Voir  page  79.) 

Bien  assis  dans  une  plaine  fertile,  très  sûre  et  très  saine, 
le  village  aurait  prospéré  rapidement  si  des  voies  de  com- 
munication l'avaient  uiis  directement  en  relations  avec 
Mers-el-Kébir  et  Oran.  Lu  même  temps  que  la  création  du 
Centre,  la  r(jute  d'Oran  aux  Andalouses  avait  été  construite, 
mais  elle  ne  desservait  pas  directement  Aïn-el-Turck  K 
Un  embranchement  partait  de  la  source  de  Khedidja. 
Cette  route,  très  accidentée,  était  impraticable  en  hiver. 
Aussi,  pendant  plus  de  '60  ans,  Aïn-el-Turck  vécut  à  l'écart 
de  la  civilisation  et  resta  un  des  centres  les  plus  arriérés 
de  l'Oranie.  Les  Aïn-el-Turckois  furent  aussi  isolés  que  les 
Kabyles  dans  leurs  montagnes.  Mal  desservis  par  les  voies 
de  communication,  les  colons  furent  dans  l'impossibilité 
de  pouvoir  écouler  leurs  marchandises  à  des  prix  rémuné- 
rateurs ;  certains,  ayant  perdu  patience,  regagnèrent  leurs 
lieux  d'origine.  Ceux  qui  restèrent  vécurent  pendant  quel- 
ques années  encore  dans  les  gourbis  et  se  bornèrent  à 
cultiver  des  céréales  et  un  peu  de  vigne. 

En  i885,  la  route  du  littoral,  plus  communément  appelée 
route  de  la  Corniche,  est  créée.  Aïn-el-Turck  est  mis, 
désormais,  directement  en  relations  avec  Oran. 

A  la  même  époque,  le  vignoble  français  traversait  une 
crise  très  grave,  par  suite  de  l'apparition  du  phylloxéra. 
Les  colons  en  profitent  et  plantent  de  la  vigne  avec  une 


I  On  s'explique  diiricilenieiil  qu'un  centre  nouvellement  créé  fût  aussi  mal 
desservi.  La  route  passait,  en  effet,  à  3  kilomètres  du  village,  aux  flancs  du 
Murdjadjo,  alors  qu'il  aurait  été  plus  pratique  de  relier  Aïn-el-Turck  à 
Mers-el-Kébir  par  le  bord  de  mer.  C'est  d'ailleui-s  le  plan  qui  fut  suivi  en  i885. 


MONOC.Il  M'IIII-:   hK   LA   (X)MMl   M^   I)' \ï\- Kl  -  I  I    HCk  f^l 

acUvité    (liiiiliiiil    plus    ^liiiidr    (pic    les    \'\\\^    ■>(•    m'ikIciiL 
jiisfpi'à  bo  francs  riicclolilic. 

\)v  1885  à  1895,  les  deux  giaiitics  cullmcs  d  Aïii-cl-Tiirck 
soiil  les  céréales  et  la  vigne. 

!.('  Méeliisscnienl  des  cours  des  vins  amène  bicnlùl  la 
iiic\  cille.  Veis  i8i),"),  les  colons  essayent  de  cultivei-  les 
prinieuis  et  ils  ne  sont  pas  déçus,  car  les  produits  sont  d'un 
e\celleiil  raj)|)orl.  Depuis  celle  épo(pie,  Aïii-el-Tiirck  est 
en  pleine  prospérité. 

La  création  des  services  mai  iliiiies  poslaux  réguliers 
amène  les  colons  à  augmen.lci'  la  ciilluie  (ïv^  j)i  imeins  dans 
l(>s  (erres  légères,  (-es  primeurs,  consislanl  en  tomates, 
pelils  pois,  arlicliaiils,  sont  lians|)ortées  direclemejil  au 
pafpiebot. 

I. "arrosage  n'est  guère  organisé  (|ue  p<jur  la  cul I me  df- 
l'aitichaut  et  les  légvniies  d'usage  courant. 

Les  routes,  exception  faite  pour  les  chemins  de  grande 
comnuuiication,  sont  en  mauvais  élat. 

La  population  est  disséminée  au  \illage  et  dans  les 
annexes. 

I!  n'y  a  plus  de  liibu,  mais  un  douar  composé  de  deux 
familles  :  lien  Ali  (chef  de  douar)  et  Ben  Touil.  Ces  deux 
familles  sont  des  descendants  des  Arabes  installés  à  Aïn- 
el-Turck,  avant  la  conquête. 

A  Bouisseville  se  trouve  un  gourbi  isolé,  celui  de 
Belazreg. 

A  part  quelques  colons  riches  qui  ont  une  belle  maison, 
les  autres,  bien  cpi'aisés,  ont  un  simple  rez-de-chaussée. 
Tu  grand  portail  donne  accès  dans  une  cour  au  milieu  de 
laiptellc  se  trouve  un  puits  ;  au  fond,  l'écurie,  la  cave,  le 
débarras,  le  four,  la  buandeiie.  Le  troupeau  vit  sous  un 
hangar. 

L'indigène  vit  plus  modestement  ;  une  pièce  seule,  cou- 
verte de  tuiles,  lui  sidnt  ;  à  côté,  il  a  un  hangar  pour  lemi- 
ser  cheval  et  charrelti^;  le  tout,  entouré  dun  nnu'  en  pierres 
sèches  ou  d'une  haie  d'épines.  Le  figuier  de  Barbarie  en  e^t 
l'ornement  essentiel. 

Les  matériaux  de  construction  viennent  de  France  et  de 
l'étranger,  les  tuiles,  de  Marseille,  mais,  depuis  le  dévelop- 
pement de  l'industrie  céramique  à  Mers-el-Kébir  ('1912), 
les  usines  de  cette  localité  accaparent  la  pres(|ue  totalité  des 
commandes. 

La  meilleiu'e  orientation  pom-  les  habitations,  e1  la  plus 
recherchée,  est  celle  du  Sud-Ouest. 

6 


82  MONOGRAPIUE  DE  LA  COMMUNE  d'aÏ>-EL-TLRCK 

Etat  actiK'l  (l'Aïii-el-Turek 

Description  di  \  iuace.  —  Aïn-ol-Tiirck  a  la  forme  «l'un 
liiaiigle  isocèle,  dont  la  base  esl  parallèle  à  la  plage.  La 
hauteur  ou  rue  prinrij)ale  a  une  direction  X.-IL  S.-O.  Le 
milieu  de  la  base  est  occupé  par  un  \  aste  demi-cercle  :  c'est 
la  place  Nord,  dont  la  terrasse,  la  <>  miranda  »  domine  la 
plage  par  20  mètres  dallitudc 

Des  places  Nord  et  Sud  i)arleni  des  rues  div<'rgentes  qui 
ne  sont  pas  enlreteiuies.  La  loute  du  phare  <'t  celle  des  vil- 
las, toutes  deux  aboutissant  à  la  place  Nord,  font  exception. 
Toute  l'activité  d'.\ïn-el-Tuick  reste  localisée  dans  l'artère 
principale  et  autour  des  places.  C'est  là  que  se  trouve  la 
majeure  partie  des  constructions.  (Voir  plan,  page  83.) 

Les  établissements  communaux  : 

Mairie.  —  En  1860,  la  mairie  est  construite  en  façade  sur 
la  place  Nord,  maison  Olivérès,  à  côté  de  l'école  mixte. 

En  1878,  elle  est  transférée  sur  la  place  du  Centre,  dans 
le  local  actuellement  affecté  au  garde-champêtre,  (^est 
d'ailleurs  sa  place  définitive  entre  la  geôle  et  la  lampisterie. 
Par  suite  dune  entente,  l'Académie  autorisa  la  municipa- 
lité à  occuper  une  dépendance  scolaire,  entre  la  place  du 
Centre  et  la  place  Sud  icôté  Est),  mais  cela  à  titre  absolu- 
ment provisoire. 

Ecoles.  —  L'école  mixte  d'Aïn-el-Turck  fut  ouverte  le 
i^"^  janvier  1860,  à  la  place  Nord,  maison  Olivérès. 

En  janvier  187'.^,  elle  est  transférée  à  la  place  du  Centre. 

Le  16  mai  1887,  elle  est  dédoublée  :  l'école  de  garçons 
occupe  l'emplacement  de  la  poste  actuelle,  celle  de  filles, 
l'emplacement  actuel  de  l'école  de  garçons. 

En  1893,  une  deuxième  classe  est  créée  à  l'école  de  filles. 

En  octobre  1906  a  lieu  l'ouverture  d'une  école  de  filles 
à  3  classes  dans  le  nouveau  bâtiment  (style  mauresque). 
L'école  de  garçons,  cpii  couiprend  '.'.  classes,  prend  la  place 
de  l'école  de  filles. 

En  avril  1912.  une  tioisième  classe  est  créée  à  l'école  de 
garçons. 

De  l'école  dépeudetit  la  ((  Bibliothèque  »  et  la  «  Société 
de  Tir  ».  —  Le  ao  février  187'!,  M.  Nouvion,  préfet 
d'Oran,  envoya  une  ciiciilairc  à  toutes  tes  municipalités, 
les  invitant  à  acheter  une  armoiie-bibliothè(|iie  de  100  fr. 
et  5o  fr.  de  livres  poiu'  ciéalion  dune  bibliothèque  scolaire. 


MONO(;nArim;  dk  i,\  commi  m:  n"  \ïn-el-tijhck  ''^•» 


Pian  d'âlH  E-IUBCR 

en  Septem-Tors  -IS-IS 


Échelle 


10   (MiO 


LÉGENDE  :  I.  Vers  le  poste  radiotèlègraphique  ;  2.  Château  d'eau  :  3.  Chapelle  S'  Maurice:  4.  Marabout  de 
Sidi  Mohamed  Moula  el  Bahar  ;  5.  Douane  :  6.  Poste  :  7.  Ecole  de  garçons  :  8.  Ecole  de  filles  ;  9.  Mairie  ; 
10.  Eglise  S'  Antoine  de  Padouc  ;    II.  Cimetière;    12.  Abreuvoir  et  lavoir. 


84 


MONOGRAPHIE  DE  LA  COMMUNE  d'aÏN-EL-TURCK 


MONOf.HAPKIK  DE  LA  COMMINE  d'aÏN-EL-TURCK  85 

Ainsi  fui  crrrc  la  Ijihiiollirqiic  scnlairc  d"  \ïii-(l-'|'iir(k,  (|iii 
cul,  à  SCS  (lcl)uls,  •>-  \(»liinics. 

I!ii  i<)oy,  la  hihlic  il  lic(|iir  ^c  (li\i>c  en  liihljol  lir(|iir  -(«i 
lairc  cl  l)i[)rK>llic(|uc  popiilaiic  A  laide  i.\t'  icssoui ces  «|iic 
lui  criM'  lindiisli  ic  c()(|uilli('i(',  l'inslilulcui-  poric  le  iKunhic 
tics  \t)iiinics  à  [»i'cs  de  fioo.  l  ne  cii(  idairc  de  M.  (llt'nieri- 
ocau,  niini>lrc  de  llnléiicur,  asanl  su()|)iiun''  les  Inlciies 
(|ui  claicnl  auloiisccs  prcccdcinnicnl ,  riuslilulcui-  fui 
oblijtjé  de  supjuiiucr  les  cours  de  lia\au\  niafiuels  du  jeudi 
dont  les  produits  étaient  mis  en  loterie.  Kaulc  de  rossciuiccs, 
la  l)il)liolliè(pie  no  put  continuer  à  être  alimentée. 

•  La  Scolaire  d'Aïn-el-Turck  »  déposa  ses  stalul>  à  Ja 
l*i(''fcclurc  dOran,  le  t*""'  novembre  1909. 

lùjlisc.  —  l.c  -  août  i8r)y,  réalise  Saint-Antoine  de 
l'adoue  csl  l'eniise  par  les  Domaines.  Consiruile  sur  un 
mamelon,  à  f) '1  mclics  d'allilude,  elle  est  dépoiu\  ue  (l<' 
style.  Elle  se  compose  tlunc  [)icce  rectaufiulairc,  dont 
lavant  supporte  un  cloclielon  dominé  par  une  coupole 
portant  imecn^ix  en  bois. 

(iomnu'  curiosités,  nous  y  Ir'ouvons  un  tableau  de  Saint 
Antoine  de  Padoue,  exécuté  par  le  cardinal  Antonelly,  cl  un 
bref  d'autel  Iraduit  en  cinr|  langues.  Ces  deux  œuvres 
fuient  données  par  le  pape  Pie  IX,  en  i86r?,  sur  la  demande 
du  i^énéral  de  Géraudon. 

De  1850  à  i86o,  un  prêtre  ambulant  venait  oiriciei'  Ti 
Aïn-el-Turck.  Pa  première  nomination  d'un  prêtre  date 
de  1860. 

Chapelle  Saint-Maurice.  —  Cette  chapelle  a  été  bâtie 
en  1911  sur  un  terrain  donné  par  M.  Eugène  Debaix  i*» 
M.  l'abbé  Delmas.  Un  comité  s'est  chargé  de  la  construction 
faite  0)1  souvenir  de  M.  Debaix,  pour  permettre  aux  habi- 
tants du  village  et  des  villas  du  faubourg  Saint-Maurice 
d'avoir  une  chapelle  à  proximité. 

I.  ancienne  église  est  trop  éloignée,  en  outiT,  (>lle  tombe 
en  lui  nos  et,  de  ce  fait,  n'est  plus  convenable  pour  les 
services  religieux. 

f.e  pJiare  de  Falcon.  —  Construit  par  MM.  Robin  et 
Donamiol,  ingénieius  des  Ponts  et  Chaussées,  le  phare  est 
bàli  sur  le  luanK^lon  le  plus  éle\é  du  cap  Falcon.  Sa  tour 
octogonale  de  :>8"'  yo,  en  pi(M're  grise,  domine  l'horizon 
au  Sud,  à  l'Est  et  à  rOuesl.  Sa  hauteur,  au-dessus  de  la 
haute  mer,  est  de  io/|  mètres.  Ee  phare  commença  à 
fonctionner   le    if)   août    18O8.    L'allumage   fut   changé  le 


86  mono(;raim]ie  de  la  commune  d'aïn-el-turck 

28  mars  1907.  La  poiléo  liiminouso  est  de  21  à  3/|  milles  et 
sa  puissance  de  20.000  becs  Carcel.  I/incandescence  est 
produite  j)ai'  le  [x'Iiole.  Ses  feux  à  éclat  sont  groupés  par  !x. 
La  duiée  de  i"é(>lal  est  de  o^ay.  Chaque  éclipse  dure  2^  76. 
La  durée  de  la  (pialrième  éclipse  est  de  i5^  27. 

C'est  un  phare  de  premier  ordic,  le  plus  imporlant  de  la 
région,  il  converge  ses  feux  avec  ceux  des  phares  de 
l'île  Plane,  des  Ilabibas  et  de  r\iguille  '. 

Du  haut  de  la  tour,  on  jouit  d'un  panorama  splendide  : 
à  l'Ouest,  on  aperçoit  le  cap  Lindless,  les  îles  dénudées  des 
Habibas,  l'île  Plane,  la  partie  Ouest  de  la  plaine  des  Anda- 
louses,  la  plage  Antras,  celle  des  Coralès,  la  pointe  des 
Coralès  avec  ses  rochers  hérissés,  couleur  de  lave  ;  à  l'Est, 
le  cap  Ferrât,  le  village  indigène  de  Krichtel,  le  faubourg 
Cambetta,  le  mont  Sanlon  et  la  j)1age  d'Aïn-el-Turck. 

Sémapho?'e.  —  Le  sémaphore  est  placé  à  côté  du  phare, 
il  a  été  construit  en  1899.  C'est  un  des  derniers  vestiges  de 
la  télégraphie  aérienne. 

Poste  radiotéléfirapliique.  —  Le  poste  de  télégraphie 
sans  fil  dépend  du  Ministère  de  la  Marine.  Tl  est  constiuit 
dans  une  dépression  à  gauche  de  la  route  qui  mène  à 
Falcon.  Ce  poste  a  été  créé  au  mois  de  juillet  1908.  Les 
essais  commencèrent  en  août  1909  et,  en  septembre,  la 
station  était  officiellement  ouverte  au  service  militaire. 
L'action  de  ce  poste  pourrait,  à  la  rigueur,  s'étendre  jusqu'à 
7.000  kilomètres. 

Démographie, 

En  iSao,  Aïn-el-Turck  compte  io4  habitants,  vivant 
dans  des  gourbis.  A  part  les  routes  tracées  ])our  l'empla- 
cement du  village  et  des  concessions,  rien  d'autre  n'avait 
été  prévu.  Les  moins  tenaces  partirent  de  suite  et  un  an 
après,  en  i85i,  il  n'y  avait  plus  (jue  97  habitants.  On  en 
compte  108  en  185/1  et  620  en  1881. 

Trente  ans  après,  en  1911,  Aïn-el-Tnrck  a  doublé;  il 
compte   i.?'>~\  habilanls,   ainsi  répartis  : 

Français  d'origine   ?>r>\ 

Israélites  naturalisés 2 


I  I,n  pliaie  de  l'île  Plane  fut  créé  le  25  septembre  1007-  Ses  taraetéristiques 
sont  :  loiirelle  cylindrique,  fen  fixe  permanent,  i  bec  Carcel  6,  portée  de  2,r 
fi  /i  milles. 


M(jN<>(.i'.  M'iiiE  i)i;  \.\  co.m.mim;  i>'\ï\  Il    M  iu:k  S7 

Eliaii^''crs  iiiiliiralisés ii3 

Fliiiii^ci  s    718 

Indigènes    loS 

Marocains    lorj 

La  |»(i|)iilali(>ii  s'accidil  Ions  1rs  jciiirs.  I.cs  excédents  (1<'S 
naissances  se  ((iiislalciil  inissi  bien  chez  l'européen  (jue  chez 
rin(iifrène  ;  les  fannllcs,  (|iii  c()iii[ii(Mment  de  6  à  m  enfants 
vivants,  ne  soni  f)as  rares. 

Depuis  (]?>  ans,  on  n  a  subi  (|iie  deux  épidémies  :  la 
pelUe  vérole,  en  i(S88  el  la  lièvre  typhoïde,  en  I9r3,  rpii 
fut  d'ailleurs  \ite  enrayée. 

I,e  preiiiiri  (l(''cès  enr(>gislré  à  Aïn-el-Turck  esl  celui  (h* 
M  Hoiron,  à<>é  tie  '|i  ans,  préposé  des  Douanes,  décédé 
en  i8r)r. 

Voici  le  tableau  des  naissances  et  des  décès  de  i()oi  à 
1910  : 

1901  :  .H5  naissances  et  r>3  décès 

j()0->.  :  33  —  18     — 

1903  :  36  —  9     — 

igo4  :  22  ^ —  27     — 

1905  :  3i  —  22     — 

1906  :  32  —  12     — 

1907  :  38  —  12     — 

1908  :  4i  —  II     — 

1909  :  3i  —  17     — 

1910  :  46  —  i5     — 

T.es  indigènes  n^émigrent  pas  et  sont  peu  employés  chez 
les  colons,  car  presque  tous  cultivent  les  primeurs  pour 
leur  propre  com[)te.  F.es  marocains,  seuls,  aident  les  colons 
pour  les  travaux  de  jaidinage  et  pour  l'enlèvement  de 
certaines  récoltes  ('moissons,  vendanges'). 

T.es  étrangers  sont  bien  plus  nombreux  cfue  les  Français, 
ils  sont  presque  tous  cultivateurs  ou  épiciers.  Ceux  qui  ont 
25  ans  et  au-dessous  savent  presque  tous  lire  et  écrire  : 
au-dessus  de  cet  Age,  la  grande  majorité  de  ces  étrangers 
(^st  illettrée. 

Fa  fortune  des  étrangers  ne  s'est  pas  acciue,  elle  a  plutôt 
diminué  ;  cela  provient  de  leur  apathie  et  de  leur  impré- 
voyance. Ils  avaient  pourtant  de  belles  concessions  qu'ils 
ont  vendues  de  leur  plein  gré. 

Fes    fils   de   ces   étrangers   font    volontiers    leur   service 


88  MONor.R AimîE  de  t,\  f:o^r^^T"^E  d'aïn-et^-turck 

mililairc  dans  l'armée  française,  tout  en  conservant  leur 
mentalité  et  leur  langue  ;  ils  éprouvent  trop  souvent  encore 
les  mêmes  sentiments  que  leurs  parents,  et  nombreux  sont 
ceux  qui  considèrent  l'Espagne  comme  leur  propre  patrie. 

Toutes  les  catégories  de  la  population  se  nourrissent  à 
peu  près  de  la  même  façon  et  se  nourrissent  bien. 

Les  relations  entre  colons  et  indigènes  sont  cordiales. 

Au  contact  des  européens,  les  indigènes  modifient  leur 
genre  de  vie,  mais  ils  prennent  plutôt  les  mauvaises  habi- 
tudes des  étrangers,  ils  parlent  même  leur  langue,  alors 
qu'ils  ne  savent  presque  pas  s'exprimer  en  arabe  et  qu'ils 
entendent  très  mal  le  français  '.  C'est  la  faute  de  la  plupart 
des  français  d'origine  qui,  eux  aussi,  dans  leurs  relations, 
même  de  famille,  parlent  constamment  le  patois  espagnol. 

Les  arabes,  au  nombre  de  loS,  sont  devenus  de  bons 
primeuristes  et  sont  d'honnêtes  gens.  Leur  esprit  est  bon. 
Au  moment  de  la  conscription  iç)i3,  les  jeunes  conscrits 
indigènes  ont,  de  grand  cœur,  répondu  à  l'appel  sous  les 
drapeaux. 

En  1913,  le  18  mai,  les  3^  électeurs  indigènes  se  réuni- 
rent pour  la  première  fois  à  l'effet  d'élire  2  conseillers  mu- 
nicipaux indigènes.  Trois  candidats  étaient  en  présence  : 
un  taleb  de  la  secte  des  Derkaoua  et  deux  cultivateurs  d'Aïn- 
el-Turck.  Il  n'y  eut  pas  une  seule  abstention.  Le  taleb  fut 
évincé.  Comme,  après  le  dépouillement  du  scrutin,  je 
manifestais  mon  étonnement,  un  des  électeurs  me  dit,  en 
désignant  le  taleb:  <(  Nous  ne  sommes  pas  des  «  rahhalin  ^  » 
pour  nous  faire  représenter  par  ces  farceurs.   » 

Situation  financière 

Voici,  pour  la  lin  de  Tannée  1910,  la  situation  financière 
de  la  commune  ;  elle  est  sensiblement  la  même  que  celles 
de  1911  et  191a. 


1  La  plupart  des  indigènes  d'Aïn-el-'l"urcii.  et  des  environs  sont  dans  le  même 
cas  :  En  igia,  un  indigène  est  appelé  tomme  témoin  en  Correctionnelle.  L'inter- 
prète arabe  l'interroge.  Le  témoin  répond  en  bredouillant  un  arabe  inintelligible. 
L'auditoire  rit  :  «  Pardon,  dit-il,  n'y  aurait-il  pas  ici  ini  interprète  espagnol  ?  » 
Ses  vœux  furent  exaucés  et,  dès  lors,  avec  une  volubilité  extraordinaire,  il 
répondit  en  espagnol  aux  questions  que  lui  posait  l'interprète. 

2  Rahhalin  pluriel  de  rahhal  :  nomade.  Par  extension  de  mot  :  rust»-!!,  sans 
instruction. 


MONOGRAPHIE  DK   l.\  COMMINK   I)' \Ï\-KI,- I  I   HOK  ^Î' 

Recetiks  i)i:  r, 'exercice  n)To  : 

Alliilnilioiis  sur  les  palciilcs    Bo' 

Tii.vcs   lofalivcs    '^ .  f\'A,\ 

l'roduils  (les  ('(Miliincs    S:<  i 

Ta\(>s  spéciales r .  /joo 

Chiens    5v!:j! 

Picslalioiis  vicinales  et  rurales •>.'.\~\ 

Droits  divers néant 

Octroi  (le  mer () .  ()/4(S 

Loyers  et  fermao-e,  concessions  d'eau ï).\\o~ 

Peiinis  de  chasse  cl  actes  dv  l'I^lat-Cavil aoo 

Recettes  accidentelles   ;So() 

Subventions  : 

De  l'Etat .Sai 

Du  Département i  .  ooo 

Rembouisemcnts  d'avances    88 

Total 25.54i' 

DÉPENSES   DE    l/EXEMCICE    IQIO   : 

Personnel    i .  ()()y 

Matériel    fx)  i 

Frais  de  ticsticjn  financière i .  i.S3 

Reinbonrsement  de  dettes  et  annuilé-s  d"enij)riiiit.  -^-^qo 

Police 1  .  080 

Incendie   2q6 

Eclairage    8/19 

Eaux   ^7.333 

Cimetière    68 

Hygiène   4 

Hospitalisation    q.S^q 

Secours  et  subv(>ntions  à  des  (iMivres  de  bienfai- 
sance     r .  oo'j 

Instruction  publique   i .  yo8 

Justice 32 

Biens  communaux   i .  "",38 

Voirie  et  travaux  publics '1 .3  iTi 

Subventions  diverses    4") 

Alïiches  publiques 1  ^o 

Dépenses  diverses •)  u) 

Total i>7 .  555' 


90  MONOOH APIIIR  DE  LA  COMMT  \E  d'aÏN-EL-TURCK 

SiTi  \Tio\  (;k.m':k\i  E  de  l'exercice  : 

Excédont  à  la  lin  de  l'cxeicicc 8.892' 

Recettes  de  l'exercice   ^5  .54i' 


Total 3:^.933' 


Le  chiffre  du  budj?et  ira  sans  cesse  en  augmentant  ; 
lors(]ue  le  tramway  éieclrifjuc,  actuellement  en  construc- 
tion, desservira  le  village,  les  besoins  locaux  se  multiplie- 
ronl  ;  la  conmuuie  devia  être  autorisée  à  contracter  un 
em|)runt.  Cet  em|)runt  lui  [)iM'mettra  d'embellir  le  village, 
d  amener  les  eaux  du  sous-s!)!  dans  des  bassins  plus  gj'ands 
que  ceux  actuellement  existants. 

Les  habitants  d'Âïn-el-Turck  et  de  ses  annexes  auront 
ainsi  de  l'eau  en  (juantité  suiTisante.  Et  si  la  commune  a  la 
sagesse  de  conserver  la  régie  des  eaux,  elle  en  retirera  des 
bénéfices  sérieux  (|ui  lui  perjuetiront  de  faire  face  à  des 
dépenses  utiles. 


CONCLUSION 


Giaee  au  labeur  de  ses  habitants,  à  l'intelligence  de  ses 
adminislratinns,  à  sa  situation  jjrivilégiée,  Aïn-el-Turck 
est  devenu  un  des  centi'es  les  plus  enviés  de  l'Oranie.  Se$ 
habitants  se  trouvent  aujom'd'hui  dans  l'aisance.  Ce  résul- 
tat, ils  le  doivent  h  ceux  qui  les  ont  précédés  et  (jui,  par 
leur  énergie,  surmontant  les  multij)les  dillicultés  du  début, 
ont  fait,  d'un  pays  très  broussailleux,  une  riche  région 
agricole.  Les  fils  de  ces  pi-emiers  colons,  plus  audacieux, 
plus  aptes  à  saisir  les  réalités  prati((ues  de  la  vie  sociale, 
|)lanlèi"ent  de  la  vigne,  cultivèrent  les  pi'imeurs,  créèrent 
la  station  balnéaire,  donnèrent  de  la  valeur  aux  terres, 
enrichirent  le  village. 

(y est  aux  jeunes  généiations  qu'il  appartient  de  conser- 
ver ce  patrimoine,  de  l'einbellir,  de  rester  toujours  attachés 


MONOi.n  M'iiii    1)1.  i.\  coMMi  m:  Il  \i\  Kl.  Il  iu:k 


!M 


fi   l;i  Iciic  (|iii   1rs  iKuiiiil,  (!*'  l'iiir  l;i   \illi'  (|iii   Iciii    mviiiiil 
!<•   hifli  rlif.    lii   s;iiil(''.    I  i  iitli|iiii(lii  iicc. 

Miillicill  l'il^ciiiciil  ,    Ir  Ciilurcl    iilliic  ll(i|i   1rs  jcillics  ;i'<'lis, 

It'iir  l'iiil    [iiidic   If  ^^dùl    (le   l;i   Iccluic.    A   peine  sortis  de 
I  r('(t|('.  il.s  (•(•ssciil  (If  s  iii^l  I  iiirc . .. 

I^><[n''ri »ii-  (|iif  licdlf.  iiiifii\  oi-;j;iiii->ff  [HMir  If  but  à 
alleiiKJrf,  |i;ii  \  if  iidi  ii  à  t'iuinfr  des  iidiillfs  sobics,  éiicifj;!- 
qiios,  écdiKiiiifs,  à  rf<|)iil  liif^'"f,  aux  idé«'s  «iféiiéreuses,  el 
(|iii  se  monlreioiit ,  poiir  le  plu.s  «riiind  bien  d'  \ïri-f  I- Turf  k, 
les  dii:Mf>  dfscf  iiilaidr,  de  leuis  aïeuls. 


['kudinam)  BLA.NCIir:, 

Directeur   d'école    à    Aîn-el-Tiirck. 


DE  LA  FRONTIERE  ORANAISE  A  TAZfl 


(MAROC) 


Quand,  quilliint  l'Algéiic,  à  Zoiidj-cl-Bcghal,  on  va  à 
Mçouti,  soit  i)ar  étapes,  soit  pai'  la  voie  ferrée,  soit  en  auto- 
mobile, riinj)ressioM  ressentie  est  la  uiénie,  elle  est  seule- 
ment d'autant  plus  forte  que  la  vitesse  est  plus  rapide  ! 
Nous  irons  sans  arrêt  jus(|u'à  Mçoun,  pour  ilàner  depuis 
ce  poste  jus(pi'à  la  limite  de  notre  voyage. 

D'un  bout  à  lautre  du  parcours,  on  a  l'obsession  de 
circuler  dans  un  pays  abandonné  dej)uis  des  siècles  et,  sauf 
les  postes  (don!  (pieKpies-uns  avec  village)  et  les  bordjs 
construits  par  tios  troupes,  on  n'y  voit  (pie  de  très  rares 
douais,  dont  les  troupeaux  trouvent  difficilement,  plusieurs 
jours  de  suite,  la  nourriture^  et  l'eau  qui  leur  sont  néces- 
saires. Cette  pénurie  d'babilants  augmente  la  tristesse  de 
ce  pays  désolé  que  nous  allons  parcourir  de  l'Est  à  l'Ouest, 
et  (pie  nous  aj)pelons,  depuis  les  débuts  de  la  conquête  : 
le  Maroc  ()  tien  fol. 

De  la  t'nuitière  à  Oudjda.  —  Une  route  excellente  et  une 
voie  ferrée  inililair(>  de  i  mètre  de  largeur  conduisent  au 
chef-lieu  de  l'ancien  Amalat. 

D'Oiidjda  à  Mcoiin.  —  Au-delà,  une  piste,  défoncée  en 
maints  endn^its  par  les  innombrables  convois  de  charrettes 
espagnoles  attelées  à  cinq  bêtes,  et  dont  les  ornières  restent 
parallèles  à  la  voie  ferrée  Decauville  de  o""  60,  qui  est  venue 
lui  a |) porter  son  aide  fraternelle. 

La  piste  suit,  le  plus  souvent,  le  «  triq  Sol  tan  »,  qui 
réunissait  Oudjda  à  Fez.  (Voir  carie,  page  9.H.) 

Se  déroulant  entre  les  montagnes  des  Beni-Snassen,  au 
Nord,  et  le  Moyen-Atlas,  au  Sud,  elle  a  une  direction  E.-N.-E. 
W.-S.-W.  A  la  sortie  d'Oudjda,  elle  coupe  l'oued  Isly,  puis, 
de  J\aïma  k  Dar-el-Caïd,  une  infinité  d'aflhi(>nts  de  droite 
de  la  Moulouya,  dont  les  plus  importants  sont  :  l'oued  Za, 
à  Taoïirii'l,  l'oued  Cu(>ttara,  à  Coiifitir  ',  et  l'oued  Télagh. 


I  .le  ne  résislc  pirs  .ni  pliusii-  di-  si^Mliili'C  le  ^ii|iiilic  ti:iv;iil  ;icci)iii|)li  |inr 
in;i  ('(impripiiio,  la  :>]'  du  Iîi';^iiiii'ii1  de  m^iiclio  ilii  i"  l'IliMiii^cr,  pour  pcnin-llrc 
aux  \(''lii('Ml('s  les  plli>  Idiuds  de  r!:in(  iiir,  en  Icjiis  Iriiips,  l'diied  (Micltin'ii  cl  iiii 
do   ses   aniiiciiU   do   didile. 


i»i:  I  \   I  it(»\  I1I.H1-:  oitwvi'^i:    \    i\/\ 


[y.i 


d'i  niî    I.A    FROMIÈKE   ORANAISE   A   TAZA 

au  poste  du  même  nom,  puis,  la  Moulouya  elle-miême.  La 
piste  emprunte  ensuite  la  vallée  de  l'oued  Mçoun,  un  des 
aiîluents  de  gaiielie,  ee  qui  lui  permettra,  quelques  kilo- 
mètres au-deJà  de  la  casbah  de  Mçoun,  de  passer  sur  le 
versant  atlanficjuc  au  Hcdjcin  Zhaza,  limite  géographique 
des  deux  bassins. 

Ce  seuil  communique,  à  l'Ouest,  avec  le  bassin  de  l'oued 
Sebou  (tleuve  qui  se  jette  dans  l'Océan),  par  un  de  ses 
aflluents,  l'oued  Innaouen,  formé  de  plusieurs  oueds,  dont 
les  plus  importants  sont  l'oued  Aghbal,  l'oued  bon  Ladjeraf 
et  l'oued  Taza. 

Nous  citerons,  poui  mémoire,  les  postes  ou  bordjs  les 
plus  importants  que  nous  avons  rencontrés  sur  notre  route 
depuis  Oudjda  :  ^aïma,  El  Aïoun-Sidi-Mellouk,  Mestig- 
meur,  Taourirt,  Goutiiir,  El  Agreb,  Oued  Ce  fia  (ancienne 
bifurcation  sur  iMérada),  Dar-el-Caïd,  Giiercif,  El-Mizen, 
Safsafat,  El-Guettaf,  Mçoun. 

Au-delà  de  Mçoun.  —  Si  nous  continuons  à  suivre  notre 
«  Iriq  Soltan  »  amélioré,  nous  éprouverons  encore,  dans  ces 
parages,  la  même  impression  de  tristesse  que  pendant  les 
précédentes  étapes  ;  nous  nous  demanderons  à  quoi  pourra 
bien  nous  servir  notre  conquête  marocaine  !  Cette  question 
ne  recevra  sa  réponse  vraie  qu'à  hauteur  de  Taza  ! 

Déjà,  après  avoir  traversé  le  ravin  profond  de  l'oued 
Aghbal,  où  ne  coule  pas  le  plus  mince  filet  d'eau  entre  ses 
berges  d'argile,  l'aspect  du  pays  change.  La  partie  occiden- 
tale de  la  plaine  de  Fahama  nous  offre  un  commencement 
de  végétation.  Nous  entrons  bientôt  dans  les  chardons,  les 
artichauts  sauvages  qui  montent  jusqu'à  mi-cuisse,  avec, 
çà  et  là,  de  hautes  tiges  de  fenouil:'  Cette  verdure,  assez 
piquante  (nous  sommes  au  mois  de  mai),  abrite  des 
myriades  d'énormes  cloportes  de  plus  de  trois  centimètres 
de  longueur,  que  nous  écrasons  pai'  dizaines  sous  nos  pas. 
A  cette  manifestation  de  la  nature,  à  laquelle  nous  ne 
sommes  plus  habitués,  les  cigales  participent  par  leur 
chant  étourdissant. 

Les  mouvements  de  terrain  se  succèdent. 

Nous  apercevons,  à  la  picmière  crête,  située  à  800  mètres 
au-delà  de  l'oued  Aghbal,  de  vieilles  habitations  troglodv- 
tiques  abandonnées  ;  puis,  après  avoir  franchi  l'oued  bou 
Ladjeraf,  qui  a  bien  /|0  centimètres  d'une  eau  limpide,  à 
son  confluent  avec  l'oued  Ouerghin,  nous  débouchons  sur 
un  plateau  couvert  de  palmiers-nains. 


i»K   i.\   I  nn\  I  iriii';  ouwsisi:    \    i  \/,  \  95 

Tous  les  (»ii('(l<,  jii>(|ii  î\   I  ;i/.;i ,  soi  il  |)i  (>roii(l(''iiitii|  niciiis 
ses  dans  d«'s  b('r»i«'s  argileuses. 

Connue  sou>  l'elTel  de  la  hatiiieltc  niajji(|ue  d'un  sorcier, 
le  pays  s'esl  suhilenienl  luiiisloi  mr  !  Il  un  ;i  plus  de  steppe, 
les  liahilalions  lidi.;lo(|\  li(|ii<s  el  aulres,  occupées  |»ai  des 
sédentaires,  se  inull i|)lieril  ;  chacune  [)ossède  son  |>elil 
jardin  piaulé  de  l'èNcs,  de  coni'^-es  ;  les  cli;inij)s  en\ir<»n- 
naiils  soid  semés  d'oige,  qui  connuence  à  niùrii  ;  les 
olivieis  gainisseni  de  lâches  sond)res  les  vallées,  doni  les 
thalwegs,  sinueux,  soni  cou\erls  de  laïuieis  roses. 

Nous  éprouvons  très  \iveinenl  I  impression  de  pénétrer 
dans  une  oasis,  après  avoir  séjourné  dans  le  déserl.  Les 
gris,  les  mauves,  les  jaunes  et  les  verls  de  toutes  les  tona-- 
lités,  sous  le  ciel  d'un  bleu  iidense,  charment  nos  yeux  (jui 
s'étaient  habitués  à  la  teinte  uniformément  poussiéreuse  du 
bled. 

Notre  regard,  n'uionlanl  la  \allée  de  l'oued  Ouerghin, 
saiièle  à  moins  de  trois  kilomètres  sur  la  v'wv  gauche,  sur 
(pielques  groupes  de  maisons  à  terrasse.  C'est  Djehla, 
formé  de  trois  petits  hameaux  qui  se  touchent  prescjue, 
dont  les  habitants  ont  tenté  un  semblant  de  résistance  le 
lo  mai  1914  jour  où  nous  sommes  entrés  à  Taza),  et  qui, 
vaincus,  oïd  préféré  laisser  détruire  et  incendier  leurs 
habitations,  leurs  récolles,  plutôt  que  de  se  rallier  à  notre 
cause. 

Leurs  demeures,  constiuiles  en  pierres  plates,  sont  cou- 
veites  de  chaume  soutenu  par  des  branches  d'arbres 
d'essences  diverses,  [)rovenant  des  montagnes  proches,  au 
S.-W.,  et  supportant  une  épaisse  couche  de  mortier.  Quel- 
ques-unes sont  creusées  dans  la  roche.  Toutes  ont  deux, 
quelquefois  trois  pièces,  l'une  réservée  aux  bestiaux  et 
autres  animaux,  les  autrc^s  à  la  famille,  mais  une  seule 
ouverture  livre  passage  aux  uns  et  aux  autres.  A  proximité 
sont  creusés  des  silos,  dont  quelcpies-uns  seulement  étaient 
utilisés  à  notre  arrivée  ;  les  auties  étaient  aux  trois  ipuirts 
comblés  de  décombres  et  d'éboulis. 

Reprenant  notre  marche  sur  Taza,  nous  passons  près  du 
marabout  de  Sidi-bcl-Haceii,  élevé  au  milieu  d'un  cimetière 
dont  une  partie  des  occupants  ne  reposent  guère  en  paix. 
En  effet,  le^  vivants  ont  creusé  une  quinzaine  d'habitations 
sur  la  rive  droite  de  l'oued  Djeouna,  au  Nord  el  à  l'Ouest 
du  plateau,  sans  se  soucier  le  moins  du  monde  de  ceux  qui, 
cependant,  doivent  être  leurs  aïeux  ;  des  tombes  mêmes 
sont  enlr'ouvertes  el  laissent  échapper  leurs  ossements 


96 


ni:  I  \  im)\iii;i4K  ohvnmsk   \    i\/\ 


Ce.<  lial)ilali(iiis  lioylcKlN  li(|ii('s  soiil  |)ii's(jU('  louirs  rla- 
blies  sur  le  mèiwe  i)liiii  : 

I/ouvortui'c,  (|ui  s(M  I  (r»iilié(',  a  i"'.Ho  (Mi\iit)ii  do  hau- 
t(Mir  sur  i"':>o  de  largeur  à  la  parlic  su[)éiicuro.  Lorsqu'elle 


lùitrée  il'iinr  liiiljitnlion  troglûdytique 


est  exposée  au  vent  douiiriant  qui  vient  de  l'W.-S.-W.,  elle 
est  parfois  précédée,  à  petite  distance,  par  un  mur  de 
protection  en  pierres  sèches.  (Fig.  i.) 

Juste  en  face  d'elle  se  trouve  la  paroi  de  séparation  des 
deux  pièces  principales  :  à  gauche,-  l'écurie  ;  à  droite,  la 
pièce  d'habitation  avec  les  pierres  de  foyer  en  F  (voir  fig.  2) 
et  une  petite  excavation  surélevée  d'environ  o'^So,  qui  doit 
servir  à  loger  les  enfants.  Les  dimensions  de  la  pièce  d'ha- 
bitation sont  de  2  mètres  sur  a^So  ;  celles  de  la  petite  pièce 
contiguë  et  de  l'écurie,  respectivement  de  2  mètres  et  4^25 
sur  2™5o. 

L'écurie,  dont  le  sol  est  en  contre-bas  du  seuil,  est  garnie 
en  son  centre  de  galets  jetés  au  hasard,  pour  éviter  aux 
animaux  de  patauger  le  moins  possible  dans  le  purin  qui 
séjourne  dans  les  dépressions  creusées  par  leurs  sabots. 
Les  animaux  sont  attachés  par  le  cou  à  des  cordes  fixées  aux 
parois. 

Des  niches  sont  creusées  dans  celles-ci  à  hauteur  du  sol 


i)K  r,\  iMO\rii:MK  onwMsr:   \    i\/\ 


97 


on  plus  haut  :  i-llcs  scrvciil  ;iii\  poules  [xint  s'y  (-(jucher, 
pondre  et  coinei'.  i:iles  s.  .ni  nlilisécs  coiiiinr  placards  (|;ii,s 
les  pièces  dliahilalioii. 

La  iiaiileui   du  j)lar(tiid  est  de  i'";"»  à   i"'<S(i. 

Si  riiabilaliou  u'e>l  pu^^  léceide,  les  paidi.s  el  je  plafond 
conser\en|  une  cduche  (jpaisse  de  suie  (pii  donne  un  a[)eiçu 
de  la  dinicullt'-  cpiune  personne  non  lialtituf^^e  y  (.''pion- 
verait  à  n'<pirei,  pai  liculi('i-einenl  riii\er,  pai'  riuiinidité, 
au  milieu  des  t'iiianalions  (h'-^'at^t^'es  pai-  les  h(Me.s  e(  les 
g'cns  I 

Le  nouibie  dvs  pièces  augmente  en  raison  du  iiondjie 
de  membres  de  la  ramille.  mais  je  n'eu  ai  pas  vu  plus 
de  trois. 


Fig.    -A.   —    I'Ijiii    cIp    riiiil.itiitidii. 


Pas  une  seule  fenêtre  !  L'entrée  uni(|ue  sert  ainsi  aux 
humains,  aux  animaux,  à  lair  pur  ou  contaminé  et  à  la 
lumière. 

Les  Marocains  ayant  fui,  lois  de  noire  arrivée  dans  leur 
pays,  les  seuls  êtres  vivaids  (pie  nous  trouvons  dans  ces 
demeures  sont  de  rares  chiens  à  la  voix  éraillée  et  des  puces 
en  nombre  incalculable.  Ce  sont  là  l(\s  derniers  défenseurs 
de  la  propriété. 


DE   LA    FRONTIERE   OUANAISE   A    TAZA 


TAZA 


Ses  abords.  —  A  1500  mètres  à  l'ouest  du  marabout, 
nous  débouchons  sur  lo  boid  Ouest  du  plçitoau,  dont  les 
pentes  dévalent  biusqucment  sui'  une  plaine  bien  cultivée. 
Nous  apercevons  Taza  très  distinctement,  car  c'est  le  matin, 
le  soleil  est  deiTière  nous.  Nous  la  devinerions  à  peine,  se 
confondant  avec  la  montagne,  si  nous  l'abordions  l'après- 
midi,  à  contre-jour. 

La  ville  apparaît  à  moins  de  six  kilomètres,  allongée 
dans  toute  sa  longueur  sur  le  dernier  contrefort  Nord  de 
la  montagne,  que  les  cartes  dressées,  par  lenseignements, 
avant  notre  occupation,  nommaient  à  tort  le  «  Kern 
Nesrani  ».  A  cette  distance,  la  ville,  avec  ses  hautes  mu- 
railles, les  minarets  de  ses  mosquées,  paraissant  tout 
entière  au-dessus  d'un  bois  d'oliviers  qui  l'encercle  pres- 
que, a  fort  bel  aspect  et  produit  un  effet  grandiose. 

Pour  l'approcher,  nous  traversons  des  terres  labourées, 
des  champs  d'orge  jaunissante,  de  blé  encore  en  herbe  et, 
si  nous  suivons  la  piste  nouvellement  créée  pour  nos 
convois,  nous  ne  la  perdons  plus  de  vue,  sauf  en  traversant 
deux  petits  oueds  roulant  une  eau  limpide  ;  au  contraire, 
si  nous  avions  continué  par  le  <(  triq  Soltan  »  qui,  après  le 
marabout  de  Sidi-bel-llacen,  se  dirige  plus  à  gauche,  de 
nombreuses  crêtes,  peipendiculair-cs  à  la  direction  de 
notre  marche,  nous  l'auraient  cachée  jusqu'au  delà  de 
l'oued  Rahi. 

Des  cigognes  circulent  majestueusement  au  milieu  des 
champs,  largement  irrigués  sous  de  superbes  oliviers,  ce 
qui  donne  l'impression  de  ne  plus  être  dans  notre  Maroc. 
Nous  commençons  maintenant  à  calculer  ce  que  pourra 
nous  donner  cette  contrée  si  fertile,  quand  elle  sera  livrée 
à  la  culture  européenne  !  Il  ne  nous  a  fallu  que  quelques 
heures  pour  passer  dans  une  région  toute  différente  de  celle 
que  nous  avions  parcourue  jusqu'alors  ;  cette  transition 
brusque  nous  fait  nous  exclamer  joyeusement  et  trouver 
tout  magnifique. 

Cependant,  en  nous  approchant  de  plus  en  plus  de  la 
ville,  perchée  à  70  ou  80  mètres  au-dessus  de  ses  jardins, 


DK  i.\  I  itôMiiiiu-:  onwMsr   \   r\/ \ 


99 


iioli'c  .idiniiiilioii  de  loiil  ;'i  riKMirc  l'ail  place  à  un  rloiilciii- 
icu\  rloiiiu'Uiciil .  \.r>  iiiiiiaillcs  allirics,  les  maisons  à  h-i- 
rassc  lie  SOI  il  <|ii('  i  ni  ric^  a(  cnnnilrrs,  l)i('(li('<,  d  ('•(•(  »nil)i  es  r| 
désolalion.  Nous  a[n'ic('vons  dislinclcint'nl  les  créneaux 
dcnianlclés.  Les  nnns,  I1an(|ncs  de  loins  carrées  nous 
rappelant  Mansonrali,  son!  ('■Ncnliés  ])ai  cndioils  comme 
s'ils  venaienl  de  snbir  un  lon^^  bomhaidemenl  el,  cepen- 
dant, pas  un  piojeclil(>  français  n'a  élé  lire  sur  la  ville. 
Ces  ruines  se  sont  su|)(M[josées  par  suite  d'aband(ui,  de 
négligence  et  aussi,  sans  mil  doule,  par  ordre  dvi^  Hiata,  qui 
se  sont  ainsi  olT(Mt  le  phiisir  d'avoir  une  cilé  toujours 
ouverle  à  lenrs  rapines  el  à  leurs  déprédalioiis. 

Si  nous  plongeons  le  regard  au-delà  des  murs  d'enceinte, 
nous  constatons  encoie  qu'une  grande  partie  des  habita- 
tions ne  |)ossèdent  plus  que  des  pans  de  murs  à  demi  elTon- 
drés  et  que  toutes  ces  misères  sont  déjà  anciennes. 

l/entrée  en  ville.  —  La  piste  traverse  l'oued  \nemli,  puis 
gravit  en  lacets  un  terrain  rocailleux,  l-^lle  longe  bientôt 
le  mur  extérieur  de  la  forteiesse,  encore  imposante, 
ajipelée  le  «  Baslioun  »,  la  dépasse  et.  laissant  à  gauche 
un  plateau,  sur  lecpiel  (jiiekpies  koubbas  à  demi  démolies 
nous  indiquent  un  cimetière,  elle  tourne  brusquement  à 
droite  pour  pénétrer  dans  renceinle  extérieure  par  la  porte 
((  el  Khebor».  Au  débouché  de  cette  porte  assez  étroite, 
nous  voyons  à  gauche  une  esplanade  agrémentée  d  un 
sfpiare.  Devant  nous,  la  route  longe  à  gauche  le  mur  d'en- 
ceinte intérieur  de  la  ville,  tandis  qu'à  droite  dominent,  bien 
conservées,  les  nuuailles  du  réduit  conligu  au  <(  Bastioun  ». 
Tout  le  long  du  miu"  d'enceinte  se  sont  installés  des  mer- 
canlis  el  kaouadjis  Tazi,  dès  le  lendemain  de  notre  arrivée 
dans  la  ville,  alors  (pie  les  troupes  occupaient  le  terrain 
vague,  couvert  de  pans  de  murs  effrités,  qui  s'étend  à 
droite  entre  les  enceintes  intérieure  et  extérieure  du  côté 
Est. 

Le  «  Bnstioiin  ».  —  Avant  de  pénétrer  en  ville,  nous 
allons  visiter  le  "  Bastioun  »,  forteresse  bien  conservée  et 
d'un  ensemble  encore  très  imposant.  Construit  sur  et 
contre  le  mur  Sud,  dominant  ainsi  la  vallée  Est,  le  chemin 
d'accès  à  «  bab  Khebor  »  et  le  plateau  du  cimetière,  le 
«  Bastioun  »  a  bravé  les  intempéries  el  les  outrages  des 
hommes.  Précédé  par  une  cour  spacieuse  qui  devait  loger 
les  tentes  des  défenseurs,  leur  montures  et  leurs  approvi- 


100  DE   LA    FRONTIÈRE   ORANAISE   A    TAZA 

sionnemenls,  il  Jie  possède  (]u'uiie  poli  le  poile  doimaiil 
accès  dans  un  assez  long  couloii'  (|ui  reste  à  gauche  du 
bâtiment.  Avec  ses  murs  construits  à  laide  de  caissons 
d'un  ciment  très  dur  et  ayant  de  i  à  j  mètres  d'épaisseur, 
ses  angles  faits  en  briciues  cuites  au  feu,  ses  créneaux,  ses 
embrasures,  ses  chambres  nudtiples,  au  sol  de  hauteur 
inégale,  (\u\  se  succèdent  en  labyrinthe,  ses  différents  éta- 
ges, il  a  dû  abriter  non  seulement  des  défenseurs  indigènes 
mais  aussi  des  européens.  Ces  derniers  ont  en  effet  laissé 
des  traces  de  leur  passage.  Les  enduits  du  coiUoir  et  ceux 
d'une  terrasse  qui  y  fait  suite  portent  des  dessins  au  trait 
représentant  des  navires  dont  l^es  silhouettes  rappellent 
beaucoup  celles  des  galères  Dauphine  ou  Héale,  ou  encore 
celles  de  la  Fuste  ou  de  la  ((  Galéane  Vénitienne  »,  du  dic- 
tionnaire Larousse  en  sept  volumes  (pages  826,  789  et 
9-44  >•  Plusieurs  sont  inachevés,  mais  il  est  facile  de  dis- 
tinguer, sur  pres([ue  tous,  plusieurs  mats  avec  antennes 
et  voiles. 

De  là,  à  conclure  que  le  «  Bastioun  »  a  abrité  des  pri- 
sonniers de  profession  niaritiine  il  n'y  a  qu'un  pas,  d'autant 
plus  vit(>  franchi  que  certains  dessins,  représentant  des 
f|uilles  inache\ées,  ne  peuvent  être  que  l'œuvre  de  gens 
(lu  métier. 

Les  tious  des  murs  du  «  Bastioun  >')  servent  de  nids  à  une 
imillilude  de  geais  bleus,  de  pigeons,  de  merles,  de  moi- 
neaux bruyants,  que  nous  faisons  fuir  si  nous  nous  pen- 
chons au-dessus  de  la  muraille,  pour  admirer  le  panorama 
environnant. 

La  ville.  —  Les  illustrés,  journaux  et  magazines  ont 
publié,  de  Taza,  des  photographiées  la  représentant  comme 
une  ville  entom^ée  et  dominée  par  de  hauts  palmiers- 
dattieis,  ou  bien  dont  le  pied  des  remparts  est  baignée  par 
une  nappe  liquide  de  proportions  rappelant  celles  d'un  lac 
ou  l'immensité  d'un  littoral.  Aucune  de  ces  photographies 
entièiement  fantaisistes,  mais  publiées  avec  la  vanité  de 
faire  croire  à  une  information  rapide  de  la  part  de  publi- 
cations cependant  sérieuses,  aucune  d'elles  n'est  la  repro- 
duction de  Taza. 

La  description  exacte  en  a  été  faite  dans  les  intéressants 
récits  de  Foucauld  et  de  Segonzao. 

Je  me  bornerai  donc  à  une  description  succincte. 

Pénétrant  par  la  première  poite  à  notre  gauche,  en 
sortant  du  «  Bastioun  )>,  nous  traversons  une  bande  assez 


DE   T.  \    FRONTIRHE   OnANATSR    \     TAZA  1^'! 

('•Iroilc  (le  tcirJiiii  ijiii  dcxiiil  rire  [ihiiili'  rd  jiudiiis,  jiclurl- 
Icinciil  en  riiclics,  doiil  la  lonaliU'-  vcrl  ('■iiici  ini(l<'  tics  seuls 
li^niicis  iKKis  i(''j()iiil  les  \('u\.  l)cs  Ins  (riiimioiidiccs  accii- 
nînU'cs  depuis  la  consliucliun  de  la  \ill('  et  constituant  le 
sol  de  ces  jardins  nous  pcirucllcnt  de  Noir  à  l'intéiicur  de 
Taza.  C'est  une  aj^'^ioniéiation  de  maisons  à  terrasse,  de 
couleur  (XMc,  dotninces  |)ar  sept  minarets  de  mosquées, 
dont  deux  sont  pres(|ue  cachés  dans  les  oliviers  ;  quelques 
toits  à  |)i^non  pointu,  couverts  de  tuiles  vernissées  vertes 
et  adossés  à  certains  minaiets,  tranclietd  sur  la  leiute 
uniforme  et  sur  !"enseml)l(^  des  teirasses. 

Nous  passons  une  nouvelle  porte  pour  suivi»-  une  rue 
étroite,  dont  le  ciel  disparaît  bientôt,  caché  par  le  premiei 
éta<?e  des  maisons  forniant  voûte.  Après  quelques  détoms, 
nous  nous  li'ouvons  devant  une  mosquée  qui  s'encastre 
dans  "  Dai-  cl  Mao^hzen  »,  et  occupe  tout  un  (juartier  de  la 
cité.  A  droite  et  à  o-auche  de  cette  artère  principale,  partent 
d'autres  rues  ou  luelles  dont  les  portes  sont  closes  ou  seu- 
lement entr'ouvertcs  pour  permettre  aux  enfants  de 
s'amuser  entre  eux,  de  maison  à  maison,  ou  à  une  femme 
voilée  de  se  glisser  silencieusement  d'une  maison  dans  une 
autre  ^ 

Nous  reniar(|uons  l'extrême  propreté  de  toutes  ces  rues 
à  caniveau  central  se  déversant  dans  des  égoût^,  et  plus 
parliculièiement  celle  des  latrines  publiques,  construites 
à  quelques  pas  avant  l'entrée  de  «  Dar  el  Maghzen  ». 

Ce  <'  Dar  el  Maghzen  »,  l'ancienne  habitation  du  Rogui, 
n'a  rien  de  fastueux,  ni  à  l'extérieur,  ni  à  l'intérieur,  mais 
ses  jardins,  dont  le  principal,  avec  bassin  et  jet  d'eau,  est 
actuellenicnl  planté  de  rosiers  en  fleurs  et  d'orangers. 
([u'arrosenl  des  séguias  à  l'eau  abondante  et  liiupide  en 
font  une  di^meure  seigneuriale  au  iTiilieu  de  la  ville. 

Les  seules  richesses  Csi  l'on  peut  ainsi  dire)  que  possédait 
le  «  Dar  el  Afaghzen  »,  lors  de  notre  airivée,  étaient  :  la 
chaise  à  porteurs,  le  fauteuil  et  l'artillerie  du  Rogui. 

T,a  chaise  à  porteurs,  à  deux  mules,  est  une  lourde  caisse 
parallélipipédique  en  bois,  sans  autre  ornement  que  les 
quelques  moulures  très  communes  des  vantaux. 

Le  fauteuil  Louis  XTV,  en  velours  grenat  et  bois  doré, 
rappelle  la  camelote  dont  se  sont  toujours  meublés  les 
beys  de  Tunis. 

L'artillerie,   comprenant  :  un   canon   Krupp   d«^   70.    un 


I   I.a   ville  P(>mblp  ;ivoir  environ   .^.ooo  linbitnnts. 


102  DE   T,A   FROÎSTIÈRE   OR  AN  AISE   A   TAZA 

autre  de  80  français,  deux  mitrailleuses  démolies,  des  cais- 
sons sans  roues,  des  caisses  à  munitions,  quelques  débris 
do  harnachement,  enfin,  une  centaine  de  petites  bombes 
sphériques,  le  tout  hors  d'usag'e  et  capable  tout  au  plus 
d'attirer  té  regard  d'un  chiffonnier  amateur  de  vieilles 
ferrailles. 

(Quelques  carreaux  de  céramique  (et  non  pas  de  mosaï- 
que) dans  quelques  pièces  de  «  Dar  el  Maghzen  »  ou  dans 
les  mosquées,  ne  méritent  pas  d  êtie  signalés. 

Revenons  sur  nos  pas,  sortons  de  k  Dar  el  Maghzen  »  et 
jetons  un  coup  d'œil  sur  les  dépendances  :  logements  des 
chaouchs,  arsenal,  prison,  corps  de  garde,  etc..  et  passons 
la  porte  surmontée  du  drapeau  tricolore.  Nous  sommes 
dans  une  rue  large,  habitée  par  les  autorités  municipales. 
A  droite,  un  immense  bassin,  réservoir  cimenté,  contient 
encore  quelques  mètres  cubes  seulement  d'une  eau  crou- 
pissante, quoique  pou\'ant  être  alimenté  par  des  sources 
abondantes,  situées  au  pied  des  contreforts  montagneux 
du  Sud  de  la  ville. 

Au  sujet  de  ces  sources,  qui  jouèrent  un  rôle  important 
dans  l'histoire  de  Taza,  voici  une  légende  qui  m'a  été 
racontée  par  un  Tazi,  quelques  jours  après  notre  occu- 
pation : 

«  Le  fameux  sultan  Noir,  qui  habitait  autrefois  la  région 

«  au  Sud  de  Taza,  avait  un  lils,  dont  le  nom  est  oublié,  tjui 

«  l'avait  quitté  à  la  suite  de  discussions  de  famille  et  était 

(c  venu  demander  asile  aux  Tazi. 

«   Le  père,  s'étant  mis  à  la  recherche  du  fugitif,  arrive 

«  un  jour  devant  Taza  et  menace  de  détruire  la  ville  si 

«  son  fils  ne  lui  est  pas  rendu  aussitôt.  Les  Tazi,  compie- 

((  nant  leurs  devoirs  d'hôtes,  entendent  les  faire  respecter  ; 

«  ils  ferment  leuis  portes  et  se  mettent  en  état  de  défense, 

«  persuadés  f[ue  la  position  de  leur  ville  peut  leur  permet- 

«  tre  de  résister  aux  assauts  les  plus  furieux.  Les  fortifi- 

((  cations    étaient    alors    en    bon    état.    Le    sultan    Noir, 

((  comprenant   cpiil    ne   réussirait   pas   dans   une   attaque 

((  brusquée  à  enlever  la  ville,  cpi'un  siège  en  règle  pourrait 

<(  seul  venir  à  bout  de  ses  adversaires,  détourne  de  leur 

((  cours  les  sources  et  cerne  complètement  la  ville,  de  façon 

«  à  empêcher  tout  ravitaillement  ])ar  l'extérieur. 

<(   N'ayant  pas  d'approvisionnements  de  vivres  dans  la 

«  place  et  ne  possédant  non  plus  aucune  réserve  de  four- 

((  rage  pour  leurs  animaux,  les  Tazi  étaient  bien  perplexes  ; 


DE   LA    FROMIKHE   OnANATSE    A    lAZA  103 

((  au  dcinirr  conseil  de  (lérnisc.  (|ii(l(|ii(-;  uns  parliiirnt 
((  inrnic  de  se  rendre  ou  ;ni  inoiii'^  de  livrer  le  \'\\<  du 
«  sulliiu  \oii'.  (lelLe  mesure  allait  èlre  ado[»lée,  (juand  l'un 
<(  d'eux  proposîi  [(>  strala<r''nK'  suivant  : 

«  On  allait  |»rendn'  un  taui'eau,  ie  plus  beau  des  Imn- 
((  peaux,  le  iiourrii'  d'orge,  de  uia'i's,  dp  fcvos,  lui  faire 
«  boire  de  I'inui  de  source  autant  (|u'il  pourrait  en  absorber-, 
«  puis  on  le  lâcherait  dans  l'armée  des  assiégeants  pouf 
«  leur  faire  constater  (|ue  les  vivres  ne  manquaient  pas 
«  aux  assiégés.  , 

«  L'animal,  ayant  été  nouiii  de  la  façon  indiquée,  fut 
«  auKMié  près  de  <i  Bab  er  Hih  ».  La  porte  lui  fut  Ç)uveite, 
((  il  fut  poussé  au-dehors  et  poui'suivi  par  des  gens  qui 
«  parvinrent  à  faire  croire  à  leurs  adversaires  que  le  tau- 
((  reau  s'était  échappé. 

«  Les  ennemis,  tout  joyeux  de  l'aubaine  inespérée  cpii 
((  se  présentait  à  eux,  s'emparèrent  de  l'animal  et  le  mirent 
<(  à  mort  immédiatement.  En  constatant  que  son  estomac 
«  renfeiniait,  en  grande  (juantité,  des  graines  de  premier 
<(  choix  et  de  l'eau  potable  non  encore  digérées,  ils  furent 
«  fort  surpris  et  s'empressèrent  de  faire  part  de  leur 
«  observation  à  leur  chef. 

<'  Le  sultan  Noir  se  rendit  à  l'évidence  et,  constatant  lui 
«  aussi,  qu'il  était  inutile  de  perdre  son  temps  à  tenter  de 
((  réduire  par  la  famine^  des  gens  (jui  avaient  du  bétail  dans 
((  un  état  aussi  florissant  et  nourri  de  celte  façon,  leva  le 
<(  siège  aussitôt  '.    •> 

Et  le  Tazi,  fier  de  cet  acte  intelligent  (jui  venait  de  ses 
ancêtres,  s'empressait  d'ajouter  :  «  La  luse  réussit  souvent 
mieux  que  la  force  !  » 

Tout  en  causant,  nous  sommes  entiés  dans  une  rue  plus 
étroite,  séparée  du  quartier  aristocratique  par  une  petite 
porte  qui  devait  être  fermée  autrefois.  Nous  sommes  main- 
tenant en  plein  rpiartier  commerçant,  dans  le  quartier  des 
souks,  très  pittoresque  avec  ses  bouticiues  étroites  dans 
lesquelles  le  vendeur  peut  à  peine  se  remuer,  entouré  de 
ses  marchandises,  et  où  il  ne  peut  pénétrer,  après  avoir 
ouvert  son  volet  qui  sert  d'auvent,  qu'en  se  hissant  au- 


I  II  est  curieux  de  rapprocher  celle  légende  de  celle  rel.Ttive  à  un  sit'j.'e 
soutenu  par  la  vieille  cité  de  Carcassonne  et  à  peu  près  identique  ;  au  lieu 
d'un  bœuf  on  <rava  un  coclxm  qu'on  jeta  par  dessus  les  lempnrts.  (Note  de 
la  Rédaction.) 


i04  DE    LA   FRONTIÈRE   ORANAISE   A  TAZA 

dessus  de  son  comptoir  au  moyen  d'une  corde  pendue  au 
plafond. 

Aux  heures  de  vente,  les  boutiques  sont  garanties  un 
peu  des  rayons  solaires  par  l'auvent  ou  une  vérandah  en 
branchages  ;  elles  restent  presque  toutes  fermées  pendant 
le  milieu  du  jour. 

On  y  vend  des  étoffes,  de  l'huile,  des  articles  de  bazar, 
des  chaussures,  de  l'épicerie,  de  la  menthe  en  herbe,  etc. 

Pendant  notre  promenade,  des  gamins  s'essaient  déjà 
à  nous  faire  le  salut  mihtaire.  En  voici  un  qui,  dix  mètres 
avant  d'arriver  à  notre  hauteur,  se  redresse,  raidit  son  bras 
droit,  allonge  sa  main  et,  tout  préoccupé  de  la  tâche  diffi- 
cile qu'il  s'est  imposé,  les  yeux  fixés  sur  nous,  passe  et... 
n'ayant  pu  saisir  le  moment,  ou  n'ayant  osé  le  faire  à  notre 
hauteur,  salue  alors  qu'il  nous  a  dépassés  de  deux  pas. 
Leur  timidité  et  l'embarras  de  ces  enfants  nous  font  rire  de 
bon  cœur.  Tls  rougissent  et  rient  avec  nous. 

Dans  la  rue  principale,  un  maicband  d'effets  d'occasion 
et  d'armes  indigènes  de  pacotille  s'est  installé  près  d'un 
bassin,  qui  seit  de  fontaine  ;  encouragé  par  de  naïfs  ache- 
teurs, il  vend  très  cher  des  armes  fabriquées  la  veille  : 
moukhalas,  faits  de  vieux  canons  et  de  batteries  à  pierre 
complètement  rouillées,  couteaux  emmanchés  et  gainés 
à  neuf,  le  tout  consolidé  à  l'aide  de  fer  blanc  provenant  de 
nos  boîtes  de  conserves  vides. 

En  face,  dans  deux  rues  perpendiculaires  à  l'artère  prin- 
cipale, se  trouvent  les  souks  de*  marchands  de  cotonnades, 
de  foutahs,  de  mouchoirs  de  soie,  d'étoffes  brodées.  La  rue 
de  gauche  se  prolonge  par  la  boutique  de  l'armurier,  qui 
ne  cesse  de  fabriquer  des  crosses  neuyes  pour  vieux  fusils, 
et  par  les  souks  de  deux  brodeurs  sur  cuir  et  de  tous  les 
bouchers  de  la  ville.  î>es  abattoirs  sont  situés  à  quelques 
pas  plus  loin,  entre  les  trois  murs  de  souks  abandonnés, 
sans  plafond,  ressemblant  à  des  boxes  aux  murs  élevés. 

Quelques  rares  métiers  à  tisser  l'étoffe  des  burnous  ou 
des  djellabas,  fonctionnent  à  certaines  heures. 

En  dehors  du  centre  commercial  assez  achalandé,  les 
rues,  dont  l«s  axes  correspondent  souvent  à  des  minarets, 
sont  très  calmes  ;  à  part  des  enfants  malpropres,  presque 
tous  teigneux  '.  et  ((iiehfues  maigres  haridelles,  on  n'y 
rencontre  personne. 


T  l,es  Tazi  sont  rie  lailln  élancée  (i"7o  en  moyenne)  et  bien   proporlionnép. 
D'nn   visape   agréable,   an   teint  mat   et  clair,   le?   cheveux   noirs    non   crépus, 


nE  r.A  ^HO^r^lKnE  oranaise  a  taza  105 

\.v  joui'  (le  iiolic  |»iisc  (le  [)(>ssc.ssion  cl  I<trs  (le  lii  \cniiL' 
(lu  ^(Miciiil  I.Niiiih'N,  lirsidciil  (iénéiiil,  les  iiiiiisons  ('laiciit 
loiilcs  |)ii\()is('('s  (le  muiicln  lii -;  tic  soie  iiiiill  ictili  nés,  iiiiiii- 
\('s.  jiuiiics,  roiiji^cs,  hiciis,  loscs  ;  à  (li'-lMiil,  ;i  I  iiidc  de 
iiiorcfaii.v  de  roloiuiadc  de  coiilciii,  i  ii[tidciii('id  ajii.slés, 
le  roiKjc  près  de  la  hanijx'  ! 

Nous  dr[)ass()ns  la  pclilc  [tlacc  du  niaidir,  en  itailic 
conNcilc  par  un  olixici'  (•('tilcnairc  cl,  Icnif^caut  une  pclilc 
inosiiiicc  doiil  le  minarcl  domino  la  luc,  nous  arrivons 
de\anl  la  ^laiidc  iiK  "^(|ii(''e  ;  nous  la  ci  mlonirions,  [)iiis(|Mc 
l'aeecs  en  est  irderdit,  cl  passons  dans  le  niellali  dord  [)as 
une  maison  n'est  dehoul.  ^Xueun  Juif  n'Iiabilail  Taza  lors 
de  notre  arrivée.) 

Près  de  l'extrémité  du  mollah  e(  au  Sud  r)ucs|,  une 
grande  propriété,  dont  tous  les  mius  sont  en  ruines, 
s'appelle  <(  Dar  es  Soltan  ». 

Tîn  peu  plus  loin,  l'esplanade  de  <(  Bab  or  fSih  »  dominant 
les  jardins  plantés  d'oliviers,  nous  permet  de  jouir  (V\\i\ 
coup  d'œil  merveilleux  sur  la  campagne  arrosée  par  l'oued 
Taza,  que  franchissent  les  ponts  des  pistes  de  Fez  et  de 
'Nlcknassa-Tahtania. 

l.a  visite  de  la  partie  de  la  ville  est  à  peu  près  teiminéc. 
Nous   avons   parcouru   Taza   selon    son    a\c    lonpfitudinal 
E.-S.-K.  W.-N.-W.,  la  «porte  du  Vent  ■■  clant  diamétra 
lenieni  o[)})oséc  à  <(  Bab  Khebor  >».   Mlous  xoir  les  jardins. 

liCs  jardins,  —  A  nos  pieds,  une  décrino^oladc  et  un 
amoncellement  de  rochers  énormes,  puis,  à  80  mètres  en 
contre-bas,  les  jaidins  plantés  d'oliviers  qui  servent  do 
tuteurs  aux  ceps  de  vii^iie,  dont  les  lianes  rrrimpont  et 
etdaccnt,  connue  dans  une  foret  équatoriale,  les  branches 
des  fîoruiors,  des  s^renadiers.  des  poiriers,  des  pêchers  et 
des  pruniers. 

Ces  jardins,  lies  bien  iirioiiés  au  moyen  de  séguias,  sont 
très  fertiles  et  pioduisont  des  légumes  :  fèves,  courges,  etc. 

A  l'Ouest,  l'oued  Taza  coule  à  pleins  bords,  entre  de? 
rives  couvertes  de  broussailles  enchevêtrées,  et  donne 
l'illusion  dune  rivière  de  France.  T. es  deux  ponts  sous  les- 
quels passi^  l'oued  lanpelh^nt  de  loin  rarchitecluro  l'omaine: 
sur  celui  de  droite,  le  plus  en  aval,  passe  la  piste  d«'  Mek- 


1,1  barlie  moyoniiomont  fntirnio.  ils  ont  les  sonrrils  ot  les  yeux  noirs.  Cepen- 
dant In  type  lilonfl  ?e  reni-onlre  aussi,  j'ai  vu  îles  enf.ints  !'U\  elievenx  ronx 
cl  aux  yenx  biens  on  verts  clairs.  î.es  fenniics  mit  rie  i"5o  à  t'Oo,  leurs  voiles 
Mi'ciiit   empèelié  fie  voir  leur  visfige. 


106  DE  LA   FRONTIÈRE   ORANAISE   A  TAZA 

nassa-Tahtania,  sur  l'aulrr,  la  pisic  de  Fez,  qui  va  con- 
louiiicr  au  Sud  le  c  Kern-Nesiani  »,  montagne  (jui  nous 
cache  la  vallée  de  l'Innaouen,  doul  l'oued  Taza  est  un 
aflluenl  de  gauche. 

Celte  «  (lornc  du  Nazaréen  »  a-t-elle  été  habitée  par  les 
Honiains  ?  Les  Tazi  le  disent  et  un  camp  romain  aurait  élé, 
d'après  eux,  établi  sur  le  plateau  qui  y  fait  suite  à  l'Ouest. 

Je  n'ai  l'ien  trouvé,  jusqu'ici,  qui  puisse  permettre  da 
confirmer  leurs  dires. 

Au  Xord-Est,  les  oliviers  sont  encerclés  par  l'oued 
Anemli,  petit  ruisselet  marécageux,  qui  prend  sa  source 
un  peu  en  amont,  et  sur  la  face  Est,  du  marabout  de  beri 
Aberri,  sur  le(juel  des  cigognes  ont  établi  leiu"  nid.  Cet 
oued  coule  ensuite  vers  le  Nord-Ouest  et  se  jette  dans 
l'oued  Taza,  en  aval  du  Camp  Girardot,  fpi'il  laisse  sur  >*a 
rive  droite. 

Le  Cainp  (iirardot  et  reniplacement  «le  la  nouvelle  ville 
européenne.  —  Le  camp  est  installé  sur  un  plateau  allongé 
entre  les  jardins  de  la  face  Nord  et  la  partie  inférieure  du 
cours  de  l'oued  bon  Ladjeraf  tpii,  un  peu  plus  en  aval,  for- 
me le  comuiencement  de  l'oued  ïnnaouen.  Les  koubbas  de 
Si  Kaddour  et  de  Sidi  Abdallah,  le  j^ère  et  le  fils,  sont  cons- 
Iruites  à  l'extrémité  Sud-Ouest  du  plateau  qui,  paraît-il, 
était  autrefois  occupé  par  une  partie  de  la  ville  de  Taza  qui 
déboidait  ainsi  jusqu'à  plus  de  lôoo  mètres  de  son  empla- 
cement actuel. 

Un  mamelon  rocheux,  situé  à  l'Est  du  marabout  de  Sidi 
ben  Aberii,  s'appelle  encoie  aujouid'hui  la  «  Porte  du 
cuivre  »,  mais  la  légende  ne  sait  plus  distinguer  si  le  souk 
(lu  cuivre  de  la  ville  ancienne  occupait  cet  (nnplacemenl, 
ou  bien  si  l'on  a  trouvé  du  minerai  de  cuivre  dans  les 
lianes  du  mamelon. 

Le  camp  se  transfoime  en  redoute  en  même  temps  (pie 
ses  prop(n'tions  diminuent,  par  suite  de  la  réduction  des 
effectifs.  La  partie  libre  à  l'Ouest  de  la  redoute,  jusqu'aux 
deux  koubbas  dont  j'ai  parlé  plus  haut,  serait  réservée  à 
la  construction  de  la  ville  française. 

L'Oriiiine  de  Taza.  —  Nous  avons  déjà  vu  que  les 
légendes  sont  très  répandues  à  Taza,  j'espère  qu'il  me  sera 
possible  d'en  recueillir  encore.  En  voici  une,  sur  l'origine 
de  la  ville  : 

Taza   serait  d'oiiyine  très  ancienne,   et   la  date  en  est 


DE   T.A    I  IU)\  I  IKKK    OUWMSK    A    ■\  \7.\  107 

oublier  iinjoiiid  Imi,  iiiiii^  flic  ;mi;iil  v[r  cré^'c  à  la  iiirincî 
épcKiiic  (lue  si.r  ;iiilics  \illc.s  de  r\tri(|iir  du  Niiid,  dont 
rim|K»iliiii<T  est  (oiimic  i.\i'  l<tii-  cl  dniil  le  iiuin  (ummcncc 
|)iU'  lin  V.  Midhciirciisciiiciil ,  tiMUi  iiilcrliiciilciii'  ii';i  |>ii  nie 
les  citei  Idiilcs.  Après  I  iiNoir  aide  ipielipie  [x'ii,  je  Unis  par 
j>ai'  iiolcr  ciit»!  •'•■  '''"^  \ill<'s  ipii  seraieiil  :  7''////.s,  Tlcinrcit, 
'r<ii(>ii(hinl .  Trloinin  cl  Trucs.  Il  m'a  élc  impossible  de 
roiiiiaili  ('  la  deinicie.    I']sl-ce  Taiig'ei"  i' 

La  Ta/a  priinitiv*'.  —  Pour  en  liiiir  a\ec  les  aboids 
immédials  de  Taza,  il  iioii>  l'aiil  jeler  un  coup  d'œil  sur  les 
liabilalions  lio^lod\  ticpiescieiisées  dans  les  loclieis  sur  tout 
le  j)ouitour  de  la  \ille  et  ipii  riirenl,  sans  doute,  les  pre- 
mières habitations  de  la  Ta/a  primiliNc  Sur  la  face  Est, 
elles  sont  très  pittoies(piciiiciil  superposées  en  cin(i  étages. 
Aujourd'hui,  ipiehpies-unes  seulement  de  ces  habitations 
sont  occui)ées  ;  elles  le  sont  [)lus  pailiculièienicnl  pai'  des 
femmes  aux  ukimus  faciles  (pie  le  service  sanitaire  aiiia 
à  siuveiller  de  près. 


Al-DKLA   I)K  TAZA 


ii'd  vallée  <le  l'hinaouen.  —  Notre  [jénétration  dans  le 
pays  a  été  grandement  facilitée  par  la  longue  dépression, 
orientée  Esl-Ouest,  reniontant  la  vallée  de  l'oued  Mçoun, 
depuis  la  Mouloina  jus(|u'à  Dai-el-Caïd,  et  descendant  en- 
suite parles  vallées  des  alTluents  de  ITnnaouen,  affluent»^  qui 
portent  les  noms  d'oued  Aghbal  et  oued  bon  Ladjeraf  les 
hautes  vallées  sont  opposées  et  la  dépression  qui  en  résulte 
fait  cornminn(pier  le  versant  méditerranéen  (IVloulouya), 
au  versant  atlanlicjue  (Sebou).  ('ette  voie  naturelle  fut 
probablemenl  utilisée  par  les  Romains  comme  frontière 
militaii'e  dans  la  Maurétanie  Tingitane  '. 

Prc^fitant  d'un  convoi  militaiie  (cnv  le  pays  n'est  pas 
encore  très  sur  avec  les  irréductibles  Riata\  nous  allons 
continuer  notre  exclusion  au-delà  de  Taza,  en  descendant 
le  coiu's  de  l'oued  Innaouen.  Comme  nous  l'avons  vu  de  la 
terrasse  de  «  Bah  rr  \V\h  >>,  nous  aurions  pu  suivre  la  piste 


T   Hisloirt'  aiiricnitr  de  /'.l/rii/KC  ilii  \<://;/,  pur  Sicpliaiio  (isell.    Tuiin-   i.  |>.  '^. 


108  DE  LA   FRONTIÈRE   ORANATSE   A   TAZA 

de  Frz  qui  contourne  le  «  Kern  Nesrani  »  au  Sud,  mais  le 
«  triq  Soltan  »  qui  passe  au  Nord  de  ce  mamelon,  est 
beaucoup  moins  accidenté,  par  conséquent  plus  commode 
au  roulement  des  charreltcs  marocaines  el  des  arabas  avec 
lesquelles  on  effectue  les  ravitaillements. 

Nous  nous  sommes  déjà  rendu  compte  (\uv  la  vallée 
paraît  fermée,  à  la  naissance,  par  des  barrages  naturels 
qui  seraient  les  hauteurs  de  la  rive  o-auche  de  l'oued  bou 
Ladjeraf,  puis  les  pentes  Nord  du  Kern  Nesrani  et  enfin, 
de  façon  plus  accentuée,  à  hauteur  du  col  de  Touahar. 

Jusqu'à  ce  qu'elle  arrive  à  ce  col,  la  vallée  de  l'Tnnaouen 
est  très  étroite  et  l'oued  lutte  constamment  contre  les 
contreforts  de  la  montagne  qui  l'enserrent  .  il  est  rejeté 
tantôt  à  droite,  tantôt  à  gauche,  et  décrit  des  méandres  si 
prononcés  que  le  «  triq  Soltan  »,  qui  ne  quitte  pas  la  vallée, 
traverse  l'oued  tous  les  mille  ou  douze  cents  mètres.  Les 
eaux  ont  fortement  érodé  les  collines  de  la  rive  gauche 
pour  laisser  à  droite  de  feitiles  coteaux  couverts  de 
moissons. 

C'est  aussi  sur  la  rive  droite  que  le  dernier  poste  du 
Maroc  Oriental,  celui  de  «  Bab  Merzouka  »,  a  été  installé 
lorsque  les  deux  colonnes  Baugmarten  et  Gouraud  ont 
(fuitté  le  camp  établi  en  commun  devant  la  casbah  des 
Beni-Mgara,  située  un  peu  plus  en  aval.  ' 

La  ride  peu  élevée  qui  s'abaisse  au  col  de  Touahar  se 
relie  aux  collines  des  deux  rives  et  l'étonnement  du  tomiste 
est  complet  quand  il  s'est  rendu  compte  de  ce  fait,  q\\\ 
semble  violer  les  lois  naturelles  :  l'Tnnaouen,  qui  ne  doit 
jamais  coulei-  en  torrent  (si  l'on  s'en  rapporte  à  l'aspect 
de  ses  rives  peu  élevé^sV  s'est  frayé  un  passage  dans  une 
gorge  rocheuse,  aussi  étroite  qu'encaissée,  qui  prend  fin  à 
6  ou  7  kilomètres  plus  loin,  au-delà  de  la  casbah  des  Beni- 
Mgara  . 

A  partir  de  ce  point,  TTnnaoucu  redevient  un  oued  qui 
possède  presque  toutes  les  qualités  de  nos  rivières  fran- 
çaises et  ne  p<^nse  plus  à  quitter  sa  vallée  natiuelle. 

Cette  haute  vallée  de  l'Tnnaouen  est  d'une  fertilité  extia- 
ordinaire  :  les  nombreuses  sources  qui  alimentent  le 
thalweg  principal  ont  formé  des  marais  en  maints  endroits 
et    donrKMit    naissanc(^   à    une    Tiiultitude   de   séguias.    Les 


I  ActuellpmPnt  c'est  Mçoiin  qui  est  le  rlernier  posre  du  M.iroc  Onenl.Tl. 
Taza  appartient  à  l'Ocridental,  depuis  le  t"  février  ir)i5.  (Nnfp  njrmtée  jienrlnnl 
Vimprpaainn.) 


1 


DE   1,A    rnoMIKKK   ()|<\>\IS|-;    \     I  \/A  It)'.» 

céicales,  ne  compi ciiaiil  (iiic  des  orges  et  de  niugiiifiqii<!S 
blés  bleus,  s  élaleiil  en  bortliire  de  l'oued,  ((juMenl  les 
collines  voisines,  gravissent  les  contierorts  niontugneux 
et  mordent  dans  les  [iri'niiers  buissons  de  la  foret. 

Les  "  nieelila  >>  leruies  isolées)  sont  habitées  |)ar  des 
eulli\alenrs  a\isés  (|iii  ont  laltourt-  \r>  liane.-  clés  coleauv 
en  élageant  sa\annnent  leurs  elianips  poui  iceueillii  le 
plus  d'eau  de  pluie  j)ossible  et  empêcher  le  ruissellement. 
lis  élèvent  des  biruls,  ainsi  (pic  ipichpics  iiMjiitons  cl  des 
chèvres.  Je  dois  ajouter  (pi'ils  manient  le  l'ii.-il  tout  aussi 
bien  que  la  charme. 

C'est  plus  particidièremcjd  à  la  tombée  du  jour  que-les 
pays  du  soleil  peuNcnl  être  admiiés,  car,  à  ce  niomenl, 
les  teintes  reprennent  leiu'  éclat  naturel  augmenté  par  les 
rayons  obliques  de  l'astie  trop  lumineux  quehiues  heures 
auparavant.  Le  coup  d'oeil  est  vraiment  féerique  :  au  fond, 
l'immense  ruban  d'argent  zigzague,  semblant  éviter,  ici, 
un  labouré  noir,  rouge  ou  violet,  qui  semble  fuir  vers  la 
montagne,  là,  un  chaume  dont  l'or  pâle  s'étend  à  perte 
de  vue  pour  se  heurter  au  vert  st)mbre  des  chênes-verts  ou 
des  arbustes  (jui  couronnent  le  faite  des  coteau.v.  Çà  et  là, 
les  rectangles  vert-jaune  des  vignes  alternent  avec  des 
blocs  de  rocheis  gris-blanc  et  le  vert-noir  des  cèdres  et  des 
pins  d'Alep  (|ui  se  prolilent  nettement  à  l'horizon  du 
Tazekka.  Ce  dernier  culmine  à  1.975  mètres,  à  une  dizaine 
de  kilomètres  au  Sud  de  la  casbali  des  Beni-Mgara. 

La  plaine  se  contiime  ainsi  juscjue  et  au-delà  de  lOucd 
Amelil  ',  aflhient  de  la  rive  droite  qui  conllue  devant  le 
premier  poste  du  Maroc  Occidental  «  Koudiat  cl  Abiod  ». 
Nous  n'irons  pas  plus  loin  ! 

Nous  avons  pu  nous  faire  une  idée  des  richesses  de  la 
plaine  par  l'agriculture  et  l'éhnage,  mais  nous  ignorerons 
encore  longtemps  celles  que  renferment  les  montagnes 
juscpi'ici  inexplorées  ;  néanmoins,  elles  ont  déjà  été 
étudiées  par  de  hardis  Kui()i)ccns  (|ui,  au  péril  de  leur  vie, 
ont  parcouru  les  régions  les  plus  sauvages.  C'est  ainsi 
qu'un  de  mes  camarades  me  lacontait  (|u'il  avait  rencontré 
à  Taza,  mi  Français,  originaire  de  Vichy,  qui  prospectait 
depuis  plusieurs  mois  pour  vme  société  minière. 

Cet  homme,  vêtu  comme  un  vulgaire  montagnard  Riata, 


I  8orait-C(>  l'oupd  .\niilo  ou  Amliloii  que  Tisaot  confoiifl  ;ivec  IVnifil 
Melloiiloii  ?  (Renvoi  (S,  page  78,  lonie  i,  Histoire  aitcieiine  de  i.i/riqiic  liu 
Nord,   par   Stéphane   Gsell. 


110  DK    l.\    I  HONTIÈRE    ORANAISE    A    T AZA 

avait,  les  ("lievcux  rasés,  la  tête  entouré  d'un  linge  sale 
formant  turban,  portait  la  moustache  et  la  barbe  coupées 
à  la  mode  arabe  ;  les  jambes  nues  sous  sa  djellaba,  les  pieds 
crasseux  dans  des  «  belghas  >.  (pantoulles)  piestjue  usées, 
il  était  assis  sur  un  mulet  chargé  de  ses  deux  «  chouaris  » 
habituels.  Interrogé,  il  raconta  qu'il  avait  déjà  explore 
le  Moyen  et  le  Haut-Atlas,  qu'il  avait  découvert  des  mines 
de  fer,  de  cuivre,  de  charbon  et  d'or,  qu'une  mine  de 
pétrole  existait  à  une  journée  de  marche  de  Taza  ! 

Il  avait  été  retenu  prisonnier  chez  les  Hiffains,  quelques 
semaines  auparavant,  en  allant  visiter  dans  leur  pays,  sur 
la  frontière  espagnole,  une  mine  de  platine  déjà  exploitée, 
disait-il,  du  temps  des  Romains.  11  était  descendu  dans  les 
galeries  et  y  avait  vu  une  statue  colossale  d'un  nègre,  dont 
les  yeux  étaient  des  pierres  précieuses,  jetant  des  éclats  de 
lumière,  et  le  nombril,  un  bloc  de  minerai  de  platine  pur  ! 

J'ai  dit  tout  à  l'heure  que  nous  étions  dans  le  pays  des 
légendes  !  Peut-être  serait-il  juste  de  classer  ce  récit  parmi 
elles  ! 

.le  terminerai  ce  court  voyage,  avant  de  faire  mes  adieux 
à  ceux  qui  ont  bien  voulu  m'accompagner,  en  racontant 
la  façon  dont  les  Marocains  opèrent  pour  moissonner  et 
battre  leurs  récoltes.  Pendant  nos  déplacements  de  juin, 
j'ai  vu  souvient  les  Tsoul,  tribu  lalliée,  faire  la  moisson 
des  orges  Riata,  par  ordre  du  Service  des  Renseignements, 
et  je  les  ai  vus  également  sur  leurs  propriétés.  Munis  d'une 
faucille  tenue  dans  la  main  droite,  ils  saisissent,  pour  les 
couper,  les  tiges  de  la  main  gauche.  Poiu"  éviter  les  bles- 
sures, les  trois  doigts  les  plus  menacés  de  la  main  gauche  ' 
sont  protégés  par  des  doigtiers  en  roseau. 

Un  tablier,  fait  d'une  peau  de  chèvre,  protège  les  jambes 
des  moissonneurs,  qui  sont  des  houmies  ou  des  femmes 
indistinctement. 

La  récolte  est  accumulée  en  petits  tas  et  le  dépiquage  se 
fait  sur  place  quelques  jours  après.  Parfois  cette  opération 
se  fait,  comme  en  Algérie,  là  où  il  n'y  a  pas  de  batteus-- 
mécanique,  c'est  à  dire,  aux  pieds  des  bêtes  ;  mais,  ce  que 
je  ne  m'attendais  certes  pas  à  voir,  et  qui  m'a  frappé,  c'i^st 
le  dépiquage  aux  pieds  des  femines  ! 

Elles  ont  devant  elles  les  immenses  plats  en  bois  dans 
lesquels  elles  font  le  couscous,  y  mettent  quelques  épis  et 


I   L'auriculaire,   rannuiaire   et    le   majeur. 


in".  i.\  I  HoNiiKiu:  (ti<\N\isi:   \   I  \zv  111 

les  roulL'iil  ;i\('c  Itiii'-  pii'd-  iiii->,  rn  -.c  diiiMlidiitil  iillci  ii.ili- 
vement  sur  lune  r\  rinilic  jamltc  juxiuà  ce  (juc  les  «.niiiii.s 
airnt  élé  (létiu"lu''s. 

l'ciulaiil  celle  (i|K''ral  ion,  as^c/  Iouj^iic,  les  hommes 
présciiU  se  li\i<'nl  à  un  lia\ail  Ix'aiicoiqi  moins  [x'-iiililc  : 
ils  sur\('ill('ii|  l'I  l'oiil  mcllrc  sépart'mi'iil  le  j.Taiii  dan-  des 
sacs  et  la  paille  batlue  eu  meule. 


(()N(  LISION 


domine  conclusion  à  celle  itVapilulalion  de  notes  prises 
au  jour  le  joui',  pendant  des  convois,  à  mes  heures  libies, 
parfois  pendani  un  combat,  el  éciiles  sans  aucune  préten- 
lion,  Je  lerminerai  en  souliailani  bien  sincèiemenl  auv 
(Iranais  et  à  la  ville  dOran  en  [larliculier,  de  voir  aboutir 
favoiabliMuenl  lems  désirs,  (pie  leur  commerce  prolile  de 
notre  nou\elle  coiupiète,  car  ce  sont  leurs  représentants 
au  Parlement,  ce  sont  leurs  soldats,  leurs  commerçants 
et  liMirs  colons,  qui  en  ont  été  les  [uemiers  artisans. 

Je  n'ignore  pas  que  la  Chambre  de  Commerce  d'Oran 
a  déjà,  à  maintes  reprises,  émis  le  vœu  que  les  voies  ferrées 
destinées  à  lelier  Taza  à  Oran  soient  étudiées  incessamment. 

La  Sociétt  de  Géogrupliie  et  (f  Archéologie  d'Oran,  elle 
aussi,  a  voté  des  j)rix  aux  nieijlcnrs  ouvrages  ^ur  la  jonction 
des  deux  Marocs  et  les  conclusions  (ju On  pouvait  en  tirer 
pour  le  coninierc(^  du  port  d'Oran. 

Tous  mes  vœux  st^nt  {)our  la  réussite  de  leurs  souhaits 
et  de  leurs  espérances  si  justifiées  ! 

Tn:a,  nitii-jiiin  lU  I  ?. 

M.  PETIT, 

Capitniiic  ;ni  Héginu'nt  de  nnirclic  l'.ii   i"  Etraiif^ur 


PROCÈS-VERBAUX  DES  RÉUNIONS 

(le    la    «  Société    de    Géographie    et    d'Archéologie    d'Oraii  » 


RÉUMON  MENSUELLE  DU  COMITE  ADMINISTRATIF 
Séance  bu  [\  Janvier   191 5 


Prrsiib'ncc  dt    M.   Doumeugui:,   pn'siili'nl 


La  séance  est  ouverte  à  5  heures  el  demie. 

Sont  présents  au  Comité  :  MM  Doumergue,  Flaiiault, 
Bére.nger,  Pock,  Tourmer,  Dangles,  DÉciiAri),  Dupuv,  Al)l»é 
Fabre,  Kriéger,  Pellet,  Pérez, 

Absents  excusés  :  MM.  Général  B\schUiNG,  Arambourg,  IIuot, 
de  Pachtere,  Roux-FREYsslx^E^G  mobilisés  ;  Lemoisson,  Levais, 
Pontet,  René-Leclerc. 

Absents  :  MM.  Lamur,  Pousse i  n.  D""  Sandras. 

Le  procès-verbal  de  la  séance  du  7  décembre  191/i  est  lu 
et  adopté. 

Avant  de  passer  à  l'examen  des  questions  portées  à  l'ordre 
du  jour,  le  Président  exprime  à  ses  collègues  du  Comité  ses 
souhaits  de  nouvel  An.  Ses  meilleurs  vœux  vont  aussi  aux 
so(;iélaires.  Il  exprime  l'espoir  que  bientôt  la  victoire  couronnera 
les  efforts  des  Alliés  et  que  prendra  fin  le' long  martyrologe  (pii 
plonge  dans  le  deuil  presque  toutes  les  familles  françaises. 

Le  Président  donne  ensuite  lecture  d'une  lettre  de  Madame 
veuve  Oliva,  lui  faisant  pari  de  la  mort  de  son  mari,  le  caj^itaine 
Oliva,  tombé  glorieusement  au  champ  d'honneur,  le  21  décem- 
bre  191/i.  Le  Comité  s'associe  à  la  grande  douleur  de  Madame 
Oliva  et  aux  condoléances  déjà  transmises  par  le  Président. 

Le  Secrétaire  généi'al  fait  connaître  qu'il  a  adressé,  au  nom 
du  Comité,  ses  bien  vives  condoléances  à  la  Société  Naiioruile 
(le  Gécxjraphie  de  Wasli.inglon,  (pii  vient  de  perdre  son  président. 

Notre  collègue  M.  Tournujr  remercie  le  Comité  pour  les 
marques  de  sympathie  qu'il  lui  a  témoignées  à  l'occasion  du 
deuil  cruel  (pii  vient  de  le  frapper. 

M.  Dotjmergue  donne  de  bonnes  nouvelles  de  M.  le  capitaine 
Mesmer,  de  M.  le  lieutenant  Masson  et  de  notre  collègue  M.  de 
Pachtere,  qui  sont  à  peu  près  rétablis  de  leurs  blessursiS 


PROCÈS-VEHBAUX  DHS  REUNIONS  DE   LA   SOCIÉTÉ  l  I  •< 

lisl  accepté  coiniiH'  iiiciiiIjic  lilulairc  : 

M.  le  lieulcnant  (juAPiMir,  adjoint  au  ('.oiiiiiiaïKlaiil  militaire 
(In   IViriloirt-  d  Aïn-Scfra,  [)rt''.xt'iil(''  dans  la  dernière  séance. 

Le  Coniilé  décide  de  suspendre  joutes  relations  avec  les  Sociétés 
correspondantes  Austro-Allemandes. 

Par  circulaire,  M.  le  Ministre  de  rinstruclion  l'uMique  nous 
annonce  que  le  Gonyrès  des  Sociétés  Savantes,  qui  devait  se 
tenir  à  Marseille,  en  avril  191;'),  n'aura  pas  lieu. 

Le  Président  fait  savoir  au  Comité  que  le  Bulletin  est  à  peu 
près  terminé  et  qu'il  pourra  être  distribué  sous  peu. 

Après  examen  de  la  situation  crét'e  à  la  S(x;iété  par  les 
événements,  la  séance  est  levée  à  6  heures  9.0  minutes. 

Le  Secrétaire  général,  Le  Président, 

Signé  :  BÉRENGKR.  Signé  :  DOUMERGUE. 


RÉUNION  MENSUELLE  DU  COMITÉ  ADMINISTRATIF 

SÉANCE   DU    I®""   FÉVRIEB    TOT  5 


Présidence  de  M.  Doumergue,  président 


La  séance  est  ouverte  à  5  heures  et  demie. 

Sont    présents    au    Comité  :    MM.    L)oumergue,    Flahault, 

BÉRENGER,    PoCK,    ToURMER,    DaNGLES,    KriÉGER,    LExMOISSO.N. 

Absents  excusés  :  MM.  Général  BaschuiNG,  Arambourg,  Huot, 
DE  Pachtere,  Roux-FreyssinExNg,  mobilisés  ;  Dupuy,  Abbé 
Fabre,  Levain,  Pérez,  René-Leclerc. 

Absents  :  MM.  Déchaud,  Lamlr,  Pellet,  Pontet,  Pousseur, 
D"^  Sandras. 

Le  procès- verbal  de  la  séance  du  li  janvier  est  lu  et  adopté. 

Avant  d'al>order  l'ordre  du  jour,  le  Président  nous  confirme 
la  mort  de  trois  de  nos  sociétaires  tombés  au  Champ  d'honneur. 
Ce  sont  :  MM.  le  colonel  Malrv,  le  héros  de  Menabha,  bien 
connu,  en  outre,  par  ses  recherches  géologiques  dans  le  Sud- 
Oranais  ;  le  commandant  Cottenest,  le  distingué  chef  des 
Affaires  Indigènes  à  Casablanca,  et  le  capitaine  Aubert  qui 
avait  quitté  depuis  peu  Bou-Denib,  à  l'occasion  de  sa  récente 
promotion. 

Le  Comité  s'associe  aux  regrets  exprimés  par  le  Président. 

8 


114  PROCÈS-VERBAUX   DES   REUNIONS  DE   LA   SOCIÉTÉ 

Lecture  est  donnéL'  d'une  lettre  de  M.  le  général  Heures,  qui 
remercie  pour  les  félicitations  qiii  lui  avaient  été  adressées  et 
assure  la  Société  de  tout  son  dévouement. 

Le  Président  annonce  que  M.  le  Gouverneur  Général  a  bien 
voulu  renouveler,  pour  i\)ià,  mais  à  titre  exceptionnel  étant 
donné  les  circonstances,  la  subvention  annuelle  de  5oo  francs. 

Le  Comité,  très  touché  de  cette  marque  de  bienveillante 
sollicitude  accordée  à  notre  Société,  s'associe  aux  remerciements 
transmis  à  M.  le  Gouverneur  Général  par  le  Président. 

Le  Président  nous  fait  part  d'une  bonne  nouvelle.  La 
construction  de  la  ligne  ferrée  à  voie  large  entre  Zoudj 
el  Beghal  et  Oudjda  est  commencée.  En  outre,  le  chemin 
de  fer  à  voie  étroite  du  Maroc  Oriental  vient  d'être  ouvert  aux 
transports  des  voyageurs,  jusqu'à  ïaourirt.  C'est  le  commen- 
cement de  la  réalisiation  du  vœu  de  tous  ceux  qui  voient  dans 
le  rail  le  meilleur  instrument  pour  unifier  notre  Afrique  du 
Nord.  Le  département  d'Oran  pourra,  bientôt,  être,  relié  plus 
étroitement  au  Maroc. 

Avec  le  compte  administratif  provisoire,  le  Trésorier  présente 
un  projet  de  budget  pour  l'année  iQiS. 

Après  examen  et  discussion,  ce  projet  de  budget,  qui  ne  peut 
être,  cette  année,  qu'un  budget  d'attente,  le  Comité  accepte 
les  chiffres  proposés. 

Projet  de  budget  de  1915 

Recettes 

Cotisatioas .  3 .  6oo  » 

Subventions    960  » 

Arrérages    (3oo  » 

Dépenses 

Bulletin    2 .  4oo  » 

Affranchissement  du  Bulletin    i5o  » 

Frais  de  recouvrement .^ 200  » 

Frais  d'expédition  et  de  correspondance  du  Bureau.  .  100  » 

Imprimés  et  frais  de  bureau    100  )) 

Frais  d'élections  (imprimés  et  affranchissement)    .  .  100  » 

Reliure   et   brochage    100  » 

Prix    5o  » 

Conférences    5o  » 

Abonnements  et  achat  d'ouvrages   i5o  » 

Concours 3oo  » 

Provision   pour  recherches  archéologiques 5o  » 

Loyer    fifio  » 

Impôts,  éclairage,  assurance,  entretien    200  » 

Traitement  du  gardien 36o  » 

Dépenses   imprévues    180  » 

Total 5 . 1 5o     )) 


PROCÈS-VBRBAUX   DKS   RÉUNIONS  DE    LA   SOCIP^TÉ  1  1 -^ 

]a'  lilid^fl  se  liiiliiiicf.  iMi  iccfltcs  il  (lt'|icns('S,  à  la  s<tiimic  de 
B.iTx)  francs  ;  mais,  a\t'c  iiiic  (lirtrrciicc  m  iiir)ins  <le  i.if»!  francs 
|»;ir  ra|)|>(iil  à  celui  Ai'  ii)i'i.  Des  ('c(ini>niics  scn»nl  rcali>;»'M'<  siii" 
les  (l(''|ifriscs  du  Hullrlin  cl  les  crédits  non  ntilisi''-«  |ici  incllrdiil 
de  relevei   ceux  des  chapitres  les  |)lns  inipdrlants. 

Sauf  eni|»è("heinent  nialt'riel,  le  Bnllelin.  (jnel<|ne  [len  réduil, 
paraîtra  ré^fnliènMuenl. 

\  ce  snjel,  le  PrésidenI  l'ail  connaîlic  la  c<  imposition  ilu 
hiillcliii  (In  i"  Irimesire  n)ir>.  Il  re;,n-ellc  ipie  rinsnffisitnce  des 
ressourci'S  ne  pciinelte  |»as  de  joindic,  anx  travaux  [tnliliés, 
les  intérej^sanles  illnslralions  qni  devaient  les  aeconipapner. 

En  lin  de  *éanrc,  le  Comité,  après  nn  [»remier  éclian^rc  de 
vues,  décide  de  nieltie  à  l'ordre  dn  jonr  de  la  prochaine  séance, 
la  ipieslion  de  la  date  des  élections  i>onr  le  renouvellenieirt 
tiieinial. 

L'ordre  dn  j'inr  étant  épuisé,  la  séance  est  levée  à  7  heures 

Le  Secrétaire  (jénérnl,  Le  Président, 

Siffné  :  BI^RENGER.  Siçné  :  DOUMERGUL. 


RÉUNION  MENSUELLE  DU  COMITÉ  ADMINISTRATIF 
SÉANCE   nr   i"  Mars   1916 


Présidence  de  M.  Doumergi'f.,  président 


La  séance  est  ouverte  à  5  heures  et  demie. 

Sont    présents    au    Comité   :    MM.    Doimergue,    Flaiiait.t. 

BÉRENC.ER,       POCK.       ToURMER,        DÉCHArD,       DuPUY,       KrIÉGER, 

Le  MOISSON. 

Absents  excusés  :  MM.  Général  Rasciiung,  Arambourg,  Hi'ot, 
DE  Pachtere,  Rot'x-Freyssineng,  mobilisés  ;  Dangt.es,  Levain, 
Pellet.  Pérez,  Renf.-Leclerc. 

Absents  :  MM.  Abbé  Fabre,  Lvmtr,  Pontet,  PorssEi'R, 
D""  Sandras. 

Le  procès-verbal  de  la  séance  de  février  est  lu  et  adopté. 

\vant  d'aborder  l'ordre  dn  ,iour,  le  Président  présente,  au 
nom  du  Comité,  ses  bien  vives  condoléances  à  M.  Flaiiailt. 
vice-président,  qni  a  perdu  sa  mère  depuis  la  dernière  réunion. 
M.  Flahatilt  remercie  ses  collègues  des  marques  de  sympathie 
qu'ils  lui  ont  témoignées  en  cette  douloureuse  circonstance. 

M.  DouMERGUE  rappelle  que  notre  collèg^ie,  M.  Dangles.  vient 
d'être    inscrit    au    tableau    d'avancement    pour    le    grade    de 


416  PBOCÈS-VERBAUX  DES  BEUNIONS  DE  LA  SOClÉxé 

topographe  principal  de  2^  classe  ;  il  lui  adresse,  au  nom  du 
Comité,  ses  bien  vives  félicitations. 

Sont  proposés  comme  membres  titulaires  : 

M.  Noël  A.  H.,  capitaine,  Chef  de  Bureau  des  Affaires  Tndi- 
frènes  à  Méchéria,  présenté  par  MM.  Doumergue  et  commandant 
Bérenger. 

M.  SoiJGNAc,  professeur  au  Lycée  de  Constantine,  présenté 
par  MM.  Cour  et  Doumergue. 

Le  Président  nous  annonce  qu'il  a  reçu,  pour  1915,  la 
subvention  que  M.  le  Haut  Commissaire  du  Maroc  Oriental  veut 
bien  accorder  annuellement  à  la  Société.  Le  Comité  s'associe 
aux  remerciementSi  adressés  par  le  Président. 

Elections.  —  En  prévision  d'élections  possibles  et  conformé- 
ment au  règlement,  il  a  été  demandé,  dans  le  courant  de  février, 
aux  membres  du  Comité  soumis  à  la  réélection  en  1915,  s'ils 
accepteraient  le  renouvellement  de  leur  mandat. 

M.  Levain,  fixé  définitivement  en  France,  demande  à  être 
remplacé.  MM.  Bérengeti,  Dupuy,  Pock,  Pérez,  Boux-Freyssi- 
NENG.  René-Lect.erc,  Tourivier,  membres  sortants,  acceptent 
d'être  candidats. 

Le  Comité  aborde  la  question  incrite  à  l'ordre  du  jour  :  En 
raison  des  événements  n'y  aurait-il  pas  lieu  de  remettre  le  renou- 
vellement triennal  à  plus  tard  ? 

Après  examen  des  avantages  et  inconvénients,  le  Comité 
décide  de  remettre  les  élections  au  mois  de  mai  1916,  suivant 
en  cela  l'exemple  des  grands  groupements  de  la  ville  d'Oran. 
Toutefois,  pour  respecter  l'esprit  des  statuts,,  les  membres  dont 
le  mandat  était  renouvelable  en  1915,  ne  seront  élus  que  pour 
deux  ans,  en  1916.  II  y  aura  donc,  au  mois  de  mai  1916,  à  élire 
8  membres  pour  3  ans  et  8  membres  pour  2  ans. 

Le  Comité  décide  l'achat  des  publications  relatives  à  la  guerre 
éditées  par  les  maisons  Haichette  et  Armand  Colin. 

Concours.  —  Le  Comité  décide  que  lès  concours  de  Mono- 
graphies de  communes  ne  seront  pas  interrompus.  Les  manus- 
crits devront  panenir  le  3i  mars  i9Tri.  Les  autres  sujets  seront 
fixés  lors  de  la  prochaine  séance  qui  csl  fixée  au  deuxième  lundi 
d'avril. 

L'ordre  du  jour  étant  épuisé,  la  séance  est  levée  à  6  heures  45. 

Le  Secrétaire  (jénéral.  Le  Préndent, 

Signé  :  BÉRENGER.  Signé  :  DOUMERGUE. 


Lieutenant  Colonel    WIAURY 


Mort  au  Champ  d'Honneur  ! 

\h\  (le  nos  soc  ié  la  ires.,  cl  non  des  nioindics,  vicnl  encore  de 
disparaître  dans  cette  terrible  tourmente  où  t^int  de  fils  de  notre 
lii'llr  France  nieiireut   |»<)nr  la  Patrie. 

l-c  lieuteMant-colonel  Mann  était  ne  à  l^iven  (Moi  lijlian).  Kils 
d'un  facteur  de  village,  il  se  destina  à  renseignement  et  entra 
à  rtcole  normale  primaire  de  Vannes. 

Appelé  à  accomplir  l'année  de  service  réglementaire,  il  fut 
distingué  par  ses  chefs  qui  l'engagèrent  à  rester  à  l'Armée.  Ce 
((u'il  fit.  Deux  ans  ajnès,  il  entrait  à  Saint-Alaixent.  Il  sortit 
premier  de  sa  promotion.  Désigné  pour  la  Légion,  il  fit  la  plus 
grande  partie  de  son  service  dans  l'Extrcme-Sud  Oranais,  où  il 
se  distingua  par  plusieurs  actions  d'éclat. 

Il  était  déjà  capitaine  et  chevalier  de  la  Légion  d'Honneur, 
lorsque  le  combat  de  Menabha  le  mit  définitivement  en  vedette. 
Ce  fut  lui  qui.  le  r(î  avril  1908,  à  la  tète  de  sa  compagnie  montée 
du  ■>*"  Régiment  Kliangrr,  fi  a\ec  Laide  de  la  batterie  du  lieute- 
nant Gerbenne,  sauva  la  situation  de  la  colonne  Pierron,  en 
emportant  d'assaut  le  mamelon  du  haut  du(piel  les  ennemis 
dominaient  a\  antageus(>menl  le  camp.  H  s'i  11  tira  axcc  deux  ltle.<- 
sures  légères  et  la  capote  trouée  par  une  douzaine  de  balles. 
Après  im  court  séjour  à  l'Hôpital  d'Oran,  il  rejoignit. sa  chère 
compagnie.  Sa  brillante  conduite  ne  tarda  pas  à  être  récompensée. 

Promu  commandant  après  trois  ans  de  grade,  il  se  trouva  un 
des  plus  jeunes  officiers  supérieurs  de  l'Armée  française.  Nommé 
à  Cherbourg,  il  passa  ensuite  nu  8>*  d'Infanterie  à  Tours,  où  le 
trouvait  la  déclaration  de  guerre.  Il  était  déjà  proposé  pour  le 
grade  de  lieutenant-colonel. 

Il  parfit  à  la  tète  du  «  bataillon  de  fer  i>  (pi'il  avait  formé  en 
vue  de  cette  guerre,  «  qui  devait,  disait-il  chaque  fois  qu'il  nous 
écrivait,  éclater  cette  année  ».  Sa  conviction  inébranlable  était 
qu'on  «  les  battrait  !  »  11  avait  foi  au  succès,  il  avait  confiance 
en  son  étoile  qui,  dans  toutes  les  circonstances  périlleuses,  l'avait 
préservé  de  la  mort. 


118  NÉCROLOGIE 

TTôlas  !  cominr  tiiiil  d'iuitrcs,  il  n'iniiil  |)as  assez  romptr  nxcc 
les  effets  de  la  mitraille,  tenant  les  bail  on  net  tes  à  distance.  Le 
20  août,  il  était  blessé  de  denx  balles  et  évacné  snr  Dijon.  Sa 
^niérison  lut  rapide.  Le  17  septembre,  il  rejoignit  le  front.  De 
ce  jour  est  datée  la  dernière  lettre  qu'il  adressait  à  un  ami  com- 
mun, lettre  011  il  traduit  son  état  d'âme  et  exprime  tous  ses 
espoirs.  ((  La  guerre,  écrivait-il,  est  certainement  une  chose 
terrible  !  mais  que  de  belles  choses  elle  nous  permet  de  voir. 
Comme  on  se  sent  réconforté  par  les  nobles  élans  de  toute  une 
nation  !  Quelle  belle  renaissance  va  éclore  après  ïa  guerre...  )' 

Hélas  !  il  ne  sera  plus  là  pour  contempler  la  moisson  <ju"il 
voyait  déjà  dorer  celte  noble  terre  de  France,  si  abondamnienl 
arrosée  du  sang  de  ses  enfants  ! 

Grièvement  blessé  en  novembre,  il  succomba  à  ses  blessures. 
Sorti  des  rangs  il  mourait,  à  4<'>  an.s,  lientenanl-colonel,  peut- 
être  même  colonel,  joignant  son  nom  à  la  liste  de  «  ceux  qui, 
pieusement,  sont  morts  pour  la  Patrie  ». 

Mais,  des  phalanges  de  héros  obscurs  qui  tombent  glori(Mise- 
ment  sur  les  champs  de  bataille  de  France  et  de  Belgique.  la 
mémoire  de  Maur\-  s'élèvera  au-dessius  de  la  gloire  commune  ; 
le  nom  du  héros  de  Menabha  restera  inscrit  au  Livre  d'Or  des 
Fastes  de  la  conquête  de  l'Extrême-Sud  Oranais. 

Le  lieutenant-colonel  Maur\'  ne  fut  pas  seulement  un  soldat, 
il  fut  encore  un  homme  de  science  et,  à  ce  litre,  il  a  aussi 
droit  à  notre  admiration  et  à  notre  reconnaissance.  De  bonne 
heure  il  avait  pris  goût  à  la  géologie  et,  lorsque  la  vie  des  camps 
lui  laissait  dos  loisirs,  il  cherchait  des  fossiles.  Mis  en  éveil  par 
la  première  découverte,  en  mai  1907,  de  terrains  houillers,  ])ar 
-M.  Flamand,  dans  les  environs  de  Kenadsa,  il  s'attacha  au  pro- 
blème de  la  houille.  Six  semaines  après,  en  faisant  creuser  des 
puits  et  ouvrir  des  chemins,  il  îuettait  au  jour  le  gisement  fossi- 
lifère de  Guelteb  Sidi  Salah  et,  peu  après,  avec  le  concours  du 
lieutenant  Huot,  les  magnifiques  gisements  de  Ghorassa  et  de 
Haci  Ratma,  où  les  lits  de  houille  étaient  indéniables.  Grâce  à 
l'énorme  quantité  de  matériaux  recueillis  et  distribués  par 
Maury,  l'existence  du  terrain  houiller  sur  une  vaste  étendue  au 
Sud  de  Colomb-Béchar  fut  définitivement  admise. 

La  mort  de  Maury  a  donc  été  une  double  perte  pour  la  Patrie 
et  pour  la  Science.  Puisse  son  sang  n'avoir  pas  été  versé  en  vain  ! 

.\u  soldat  loyal  et  valeureux,  à  l'homme  de  science,  à  un  grand 
ami  de  l'Algérie,  j'adresse  le  salut  de  la  Société  <h  Géngjvphie 
et  d'Archéologie  d'Omn  et,  à  l'ami  personnel,  le  souvenir  ému  de 
nos  affectueuses  relations. 

F.  DOUMEKGUE. 


I 


ISÉCROLOCIK  ll'J 


Commandant    COTTENEST 


Mort  au  (ïhanip  d'HoniKMir  ! 

Encore  un  vide  cniol  (juc  ccUf  mort  laisse  dans  le  corps  de 
nos  ofliciers  d'Afri(|ue  cl  dans  les  rangs  (l(;  noire  Société  de. 
Ciéograpliie. 

Le  coniniandanl  Çollenesl  était  né,  en  iiS-o,  à  liergues  (Nord). 
Klève  du  Prylanée  Militaire  de  la  Flèche,  il  s'engageait  en  iSHcj 
el  cuirait  à  l'Kcolc  M ilihiirc  (rFnraulcric  eu  i^[}.'i.  I'"n  iS()ô,  il  élail 
uouiuié  sous-lieutcuaut,  eu  i8t)7,  lieutenant.  Afiecté  à  l'Armée 
d'Afri(|ue,  il  (^ouuuaudai^,  en  1902,  le  maghzen  d'In-Salah, 
lorsque  les  Touareg  lloggar  pillèrent  deux  caravanes  de  gens  du 
Tidikclt,  qui  nous  étaient  soumis.  Cottenest  fut  chargé  de  la 
poursuite.  Quelques  jours  après,  il  infligeait  aux  rebelle*  un 
sérieux  châtiment  et  s'en  tirait,  pour  son  compte,  avec  une 
blessure  légère. 

Promu  capitaine,  en  1904,  il  passa  à  la  Section  des  \l'faires 
Indigènes  de  la  Division  d'Oran  et  fut  fait  chevalier  de  la  Légion 
d'Honneur,  en  1905. 

En  1908,  il  revint  dans  l'Extrème-Sud  comme  chef  d'Annexé 
à  Beni-Abbès.  Après  un  court  séjour  dans  ce  poste,  il  fut  appelé 
en  France,  d'oii  il  ne  tarda  pas  à  revenir  dans  l'Afrique  du  Nord. 
Vers  1910,  le  général  Lyauley,  qui  avait  eu  l'occasion  d'ai)précicr 
ses  qualités,  l'appela  au  Service  des  Renseignements  du  Maroc 
Occidental.  Placé  d'abord  à  la  tète  du  poste  de  Casbah  ben  Amed, 
il  fut  bientôt  nommé  chef  du  Service  des  Renseignements  de 
Casablanca,  où  il  était  encore  quand  la  guerre  éclata. 

Que  devint-il  depuis  ?  Comme  pour  bon  nombre  de  ses 
camarades  qui,  comme  lui,  sont  tombés  face  à  l'ennemi,  les 
renseignements  sont  restés  vagues.  La  nouvelle  de  sa  mort  resta 
longtemps  douteuse  et  nous  n'avons  pu  savoir  en  quelle  circons- 
tance il  fut  promu  chef  de  bataillon.  Ce  dont  nous  sommes 
convaincu,  c'est  (pi'à  la  tète  de  «  ses  Marocains  »,  il  fît  vaillam- 
ment son  devoir. 

Le  commandant  Collenest  n'était  pas  seulement  un  soldat, 
il  s'intéressait  à  toutes  les  œuvres  qui,  en  Afrique,  complètent 
l'oMivre  de  l'oflicier  combattant.  A  ses  heures  de  loisirs,  il  ne 
dédaignait  pas  d'écrire. 


120 


NECROLOGIE 


En  igoS,  il  puMiail,  sous  le  lilre  :  D'In-Salali  au  Iloggur,  le 
récit  tlélailli'  de  son  (•\[)é(lifi()n  ((uitic  les  Touareg  Hoggai-  ; 

En  190O,  étant  à  Maruia,  uue  Etude  historique  sur  le  Service 
des  Affaires  Indi(i('nes  cl  lu  f'.nlonisaiion  en  Algérie,  travail  qui 
ne  paraît  pas  avcdr  été  terminé. 

En  Chaouïa,  il  aida  à  l'organisation  du  Service  niéléorologi(jue 
et  favorisa  l'élude  des  questions/ d'ordre  économique.  Il  fit  béné- 
ficier notre  Bullelin  des  premiers  résultats  obtenus,  les  plus 
intéressants. 

Dans  tous  les  postes  qu'il  occu[)a,  le  commandant  Cotlenest 
se  montra  donc  un  des  plus  intelligents  et  des  plus  dévoués 
collaborateurs  de  l'œuvre  pacificatrice  de  la  France  au  Maroc. 

Aussi  la  perle  de  cet  officier  de  valeur  a-t-elle  été  vivement 
ressentie  par  tous  ceux  (pii  avaient  pu  l'apprécier. 

La  Société  de  Géographie  et  d'Archéologie  d'Oran  s'incline  bien 
bas  devant  le  soldat  tombé  glorieusement  sur  le  champ  de 
bataille  et  salue  avec  émotion  la  mémoire  du  collègue  qui  lui 
était  très  attaché.  Elle  s'associe  au  deuil  de  tous  ceux  qui  le 
pleurent. 


POL:ii    SKHVIK    A 

ITIiôtoire  des  Hamyan 

LA  RÉGION  QUILS  OCCUPENT  ACTUELLEMENT 


AVANT-FROPOS 


Les  Ilainyan  I 

Pour  tous  ceux  (jui  oui  séjourné  dans  le  Sud-Oranais,  à 
l'épo(jue  liéioïque,  ce  nom  sonne  en  fanfare  guerrière, 
faisant  éciore  des  visions  de  chevauchées  superbes  et 
d'exploits  de  guerre  splendides  ! 

Partout,  dans  notre  marche  progressive  vers  le  Sud,  on 
rencontre  ces  rudes  cavaliers,  rapides,  légers,  alertes, 
toujours  prêts  au  combat,  capables  de  tous  les  efforts  et 
susceptibles  de  tous  les  dévouements,  si  le  chef  français  qui 
les  commande  a  su  gagner  leurs  cœurs  par  son  énergie, 
sa  vaillance  et  sa  justice. 

Ecrire  leur  histoire  ne  saurait  être  l'œuvre  que  d'un 
lettré  ou  d'un  poète,  car  seules,  des  chansons  de  gestes 
conviendraient  à  leurs  hauts  faits. 

Orgueilleux,  frivoles,  peu  religieux,  ils  sont  avant  tout 
impulsifs. 

Ils  aiment  le  combat  pour  lui-même,  ne  craignant  pas 
le  danger,  mais  surtout  adorent  le  pillage,  la  razzia,  non 
seulement  pour  le  prolit  qu'elle  leur  donne,  mais  aussi 
pour  le  triomphal  retour  au  douar  qui  la  suit,  oii  les  youyou 
(les  femmes  remplissent  leur  cœur  d'une  joie  vaniteuse 
l't  leur  font  espérer  d'amoureuses  aubaines,  car  sous 
n'importe  quel  ciel,  la  Victoire  auréole  le  Guerrier  d'un 
nimbe  (pii  fait  naître  la  Passion. 

Quoique  relativement  peu  religieux,  les  Hamyan  redou- 
tent les  marabouts;  ils  les  entretiennent  avec  une  constance 
étonnante,  car  ils  craignent  leurs  sorcelleries  ;  le  cas 
échéant,  ils  peuvent  même  être  poussés  à  les  suivre  dans 
des  voies  fâcheuses  pour  notre  cause. 

9 


1:^2       DOCUMENTS  POLR  SERMR  A  l'uISTOIRE  DES  HAMY \N 

Grands  nomades  par  excellence,  leurs  douars  se  dépla- 
cent sans  cesse  à  travers  les  immenses  steppes  où,  par 
nécessité,  nous  les  obligeons  de  vivre,  malgré  le  manque 
d'eau  et  les  conditions  défectueuses  d'existence  qu'ils 
^  rencontrent. 

Seule,  la  ligne  étroite  et  rude  du  Djebel  Anlar,  continuée 
par  le  Djebel  Bou  Kliachba  et  le  Djebel  GuelUr,  rompt  vers 
l'Est  la  monotonie  de  cette  immensité  qui  semble  déser- 
tique et  où,  par  un  de  ces  hasards  que  prodigue  la  Nature, 
les  moutons  trouvent  cependant  le  moyen  de  vivre,  de  se 
nmltiplier  et  de  rapporter. 

Les  Hamyan  sont  possédés  de  la  passion  du  mouvement, 
presqu'autant  que  de  celle  de  la  razzia. 

L'hiver  les  voit  au  Gourara,  l'été  vers  Tlemcen  et  SebdcMi, 
le  printemps  et  l'automne  seuls  les  ramènent  à  peu  près 
sur  le  territoire  du  cercle  de  Méchéria,  transhumant  sans 
cesse  à  la  recherche  de  pâturages. 

11  y  a  peu  de  temps  encore,  c'était  sur  un  perpétuel 
(jui-vive,  l'œil  aux  aguets,  le  fusil  en  travers  de  la  selle, 
que  les  chefs  de  tente  effectuaient  leurs  déplacements. 

Ayant  sans  cesse  quelque  compte  à  régler  avec  leurs 
voisins,  quelque  revanche  à  prendre,  quelque  represaille 
à  exercer,  ils  devaient  veiller  toujours  et  leur  œil  habitué 
distinguait,  dans  le  lointain  des  grands  horizons,  l'ami 
ou  l'eimemi  qui  pouvait  être  proche. 

Aujourd'hui,  que  nous  avons  établi  la  sécurité  dans  toute 
cette  région,  le  Hamyani  engraisse,  il  prend  des  allures 
de  marchand  et  commence  à  savoir  commercer  comme 
un  Juif. 

Il  est  temps  d'écrire  son  histoire,  car  il  va  sombrer  dans 
la  médiocrité  qu'apportent  le  bien-être  et  les  conditions 
meilleures  de  l'existence. 

G'est  pourquoi  nous  avons  rassemblé  les  documents 
susceptibles  d'aider  un  jour  celui  qui,  vivant  en  poète,  se 
sentira  suffisamment  amoureux  des  épopées  et  qui  con- 
naîtra assez  ces  féodaux  pour  chanter  leurs  hauts  faits. 

Nous  avons  pensé  qu'il  ne  serait  pas  inutile.de  rechercher 
qui  les  avait  précédés  sur  cette  dure  terre  des  Hauls- 
I-'Iateaux  ;  mais  ce  que  nous  avons  pu  recueillir  à  ce  sujet 
n'est  guère  que  de  la  u  préhistoire  ». 

Tels  quels,  ces  renseignements  ont  leur  intérêt  et  notre 
travail  nous  aurait  semblé  incomplet  si  ntjus  ne  les  avions 
pas  mentionnés. 


DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  L'HISTOIRE  DES  HAMYAN 

et  de  la  Région   qu'ils  occupent 


PREMII^HF  PAHTIE 


CHAPITRE  I 
LES  OKKilNES.  —  L'OCCUPATION  ROMAINE 


Dans  leur  géographie  africaine,  les  Romains  appelaient 
<(  Gélulie  »  la  contrée  située  au  Sud  de  la  Numidie  et  de  la 
Maurélanie  et  formant  la  région  existant  entre  le  Tell  et  le 
Sahara,  qui  comprend  les  Hauts-Plateaux.  Les  Hauts- 
Plateaux  oranais  faisaient  donc  partie  de  cette  division  de 
l'Afrique  Septentrionale. 

Sous  le  nom  générique  de  «  Gétules  »,  on  comprenait  les 
peuples  de  la  première  race,  qui  devaient  donner  naissance 
aux  Rerbères  Sanhdja  et  Zénètes,  ainsi  qu'aux  diverses 
peuplades  Touareg  :  ils  ne  formaient  pas  un  ensemble, 
mais  étaient  simplement  groupés  en  familles. 

Les  Hauts-Plateaux  ont,  aux  époques  primitives,  maïqué 
la  limite  entre  deux  races  très  différentes  :  <(  Deux  groupes, 
dit  M.  Tissot,  ont,  à  l'époque  la  plus  reculée,^  peuplé  le 
massif  atlantique  ;  l'un  remontant  du  Sahara  vers  le  Nord, 
l'autre  descendant  de  ri'AHope  méridionale  vers  le  Sud.  Tel 
paraît  être  le  fond  primitif  de  la  race  berbère,  et  nous 
y  distinguons  dès  ce  moment  les  deux  éléments  ethniques 
dont  on  retrouve  la  trace  dans  les  traditions  des  âges 
suivants,  comme  on  les  leconnaîl  encore  dans  l'anthropo- 
logie africaine,  une  rarr  brune  européenne  et  une  race 
blonde  algérienne  '.   » 


I  II  a  jusqu'ici  été  impossible  d'établir  si  la  race  berbère  était  d'origine 
;ir\enne  ou  d'origine  sémitique,  mais  il  est  probable  qu'elle  a  subi  ces  deux 
influences. 


124       DOCUMENTS  POIR  SERVIR  A  l.'lITSrOIRE  DES  IIAMYAN 

Cette  différence  s'aeccnlua  encore  dans  la  suite  •  Les 
liabilants  du  versanl  scpIcnUional  reçurent,  en  effet, 
l'empreinte  des  civilisations  qui  les  niodilièrent  peu  à  peu. 
Ils  connurent  les  Phéniciens,  les  Grecs,  les  Carthaginois, 
les  Romains,  les  Byzantins,  les  Espagnols.  C'est  aussi  sur 
eux  que  pesèrent  le  plus  lourdement  les  invasions  des 
Vandales  et  des  Arabes,  ainsi  que  la  dominalion  lurque. 

Les  habilanls  du  versant  méridional,  au  contraiic, 
paraissent  avoir  été  à  l'abri  de  tous  ces  bouleversements. 
Indépendants,  les  Gétules  menèrent  de  tout  temps  une 
existence  sauvage  partagée  entre  l'élevage  des  troupeaux, 
les  luttes  contre  leurs  voisins  et  les  incursions  dans  le  Tell. 
Leurs  efforts  furent  isolés,  et  le  brigandage  forma  une  de 
leurs  principales  ressources. 

Cartilage  trouva  en  eux  des  auxiliaires  dans  sa  lutte 
contre  Rome.  Lorsque  LIamilcar  passa  en  Espagne,  en 
suivant  la  côte,  des  Gétules  se  joignirent  à  lui,  et,  dans 
cette  armée  considérable  qu'Annibal  emmena  à  la  Trébie, 
à  Trasimène,  à  Cannes,  ils  combattirent  à  côté  des  Gaulois, 
des  Ethiopiens,  des  cavaliers  numides  et  des  Frondeurs  des 
Baléares.  11  est  certain  que  ceux  des  Hauts-Plateaux  oranais, 
apprenant  le  passage  de  ces  masses  imposantes  d'hommes, 
d'éléphants,  de  bagages,  tinrent  grossir  leur  nombre.  De 
telles  expéditions,  dans  de  riches  contrées  et  commandées 
])ar  des  généraux  réputés,  leur  promettaient  des  occasions 
de  [)i liage  qui  suffisaient  à  les  attirer. 

Il  est  impossible  de  savoir  la  part  exacte  qu'ils  prirent 
aux  guerres  de  Massinissa,  de  Jugurtha  et  des  Rois  de 
Maurétanie,  mais  il  est  certain  que  leur  concours  ne  fut 
chaque  fois  que  momentané  et  isolé  ;  soit  que  la  défaite 
menaçât  leur  allié,  soit  que  le  succès  leur  eût  assuré  un 
riche  butin,  ils  s'empressèrent  toujours  de  revenir  sur  les 
Haut s-Plat eaux  poiu'  y  reprendre  leur  existence  indépen- 
dante. 

L'occupation  romaine  se  fit  lentement  de  l'Est  à  l'Ouest  ; 
sous  Claude,  l'Afrique  était  divisée  en  quatre  provinces  : 
la  Proconsulaire  (Tunisie  actuelle),  la  Numidie,  la  Mauré- 
tanie Césarienne  et  la  Maurétanie  Tingitane.  Alais  si  les 
tribus  du  Nord  paraissaient  se  soumettre  au  joug  des 
Romains,  il  n'en  fut  pas  de  même  des  Gétules.  Ceux-ci, 
renuiants  et  pillards,  étaient  restés,  depuis  Toiigine  des 
temps,  sans  progresser  sensiblement  et  se  (uontraient 
rebelles  à  toute  idée  de  civilisation. 


DOCUMENTS  POUR  SERVIK  A  u'illSTOIHK  DES  IIAMYAN       125 

Les  Romains  ourent  à  lutter  pour  repousser  leurs  iiuur 
sions  dans  le  Tell,  où  s'était  développée  à  cette  éporpic  une 
prospérité  inouie.  Ils  construisirent  dans  ce  bul,  aux 
litnilcs  de  la  région  colonisée,  des  «  castella  ou  burgi  i<  et  y 
installèrent  des  troupes  composées  en  majeure  piirlio 
d'indi<2(Mics  fauxilia)  ;  ces  posles  étaient  placés  de  façon  à 
comniandcr  les  passapres  dan^^ereux  et  à  surveiller  les  routes 
par  lescpielles  les  pillards  pouvaient  déboucher.  Ces 
ofarnisons  ne  se  contentaient  pas  de  rester  sur  la  défensive, 
mais  elles  se  mettaient  à  la  poursuite  des  assaillants  cl 
s'engagreaient  derrière  eux  dans  le  désert  ;  elles  furent 
amenées  à  faire  de  véritables  colonnes  dans  cette  rés^ion. 
(^est  ainsi  que,  sous  Claude,  les  Maures  de  l'Ouest  s'étani 
révollés,  le  général  Suétonius-Paullinus  jngea  ne  pas 
devoir  s'airêler  après  un  demi-succès  remporté  sur  eux  ; 
j)()ur  leur  donner  une  leçon  sérieuse,  il  se  lança  à  leur 
poursuile  dans  des  régions  ju?(]u'alors  inconnues  et  poussa, 
dil-on,  jusqu'à  l'Oued  Cuir.  Dans  cette  expédition,  il  uti- 
lisa ce  ((u'(m  appelle  aujourd'hui  les  «  Coums  ». 

Les  Romains,  comme  on  le  voit,  ne  firent  que  de  l'occu- 
pation restreinte.  Ce  système* devait  être  précaire  malgré 
le  déploiement  d'un  appareil  formidable  pour  l'époque 
et  malgré  les  pointes Tiardies  lancées  jusque  dans  le  Sahara. 
Il  ne  suffisait  pas  de  renforcer  les  postes,  de  les  reporter 
même  plus  au  sud  :  comme  devait  le  dire  beaucoup  plus 
tard  Bugeaud  :  "  la  paix  définitive  de  l'Algérie  est  dans  le 
Sahara  ».  Les  tiibus  nomades  se  massaient  à  la  limite  du 
déseï  t  et  tous  les  efforts  faits  par  les  Romains  pour  contenir 
les  Cétul(>s  ne  les  empêchèrent  pas  de  s'avancer  continuel- 
lement, par  un  mouvement  lent  et  irrésistible,  vers  le  Nord. 

Lorsque  l'Empire  Romain  entra  dans  la  période  de  la 
décadence,  par  groupes  isolés,  ils  s'étendirent  peu  à  peu 
dans  le  Tell  à  mesure  que  la  puissance  impériale  s'affai- 
blissait, rrest  d'ailleurs  là  une  tendance  naturelle  que  l'on 
constatera  souvent  chez  les  tribus  des  régions  désertiques. 

Lor'^qu'à  l'anarchie  politique  vint  s'ajouter  la  guerre 
religieuse  qui  acheva  la  ruine  de  la  domination  romaine, 
la  tentative  de  colonisation  et  la  vie  agricole  tentées  aux 
limites  des  Hauts-Plateaux  disparurent  bientôt  pour  faire 
place  aux  anciennes  mœm's  des  peuples  pasteurs.  Les  indi- 
gènes avaient  r(>pris  leiu'  vie  propre  quand  arrivèrent  les 
Vandales. 

Il  est  certain   cependant  que  la   Civilisation    Romaine 


126  DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

pénétra  chez  quelques  tribus  barbares  ;  au  vf  siècle,  en 
effet,  sous  les  derniers  rois  Vandales,  existait  au  Sud  du 
Tell  oranais  un  royaume  indépendant  que  gouvernait 
Masuna,  avec  le  titre  de  «  Roi  des  Maures  et  des  Romains  »  ; 
sur  un  monument  élevé  à  propos  de  la  construction  d'un 
château-fort,  on  a  découvert  une  inscription  rédigée  en 
latin  et  datée  par  l'ère  de  l'ancienne  province  (anno  pro- 
vincias),  et  l'on  y  a  retrouvé  les  formules  dont  on  se 
servait  pour  les  Césars  «  Pro  salutate  et  incolumitate  ». 


CHAPITRE  11 
LES  VANDALES  ET  LES  BYZANTINS 


Au  mois  de  mai  429,  les  Vandales  avec  leurs  alliés, 
Alains,  Suèves,  Goths  et  autres  Rarbares,  passèrent  le 
détroit  de  Gibraltar  et  débarquèrent  en  Afrique.  Sous  le 
commandement  de  Genséric,  ils  se  mirent  en  marche  vers 
l'Est.  Traversant,  comme  une  trombe  qui  détruit  tout  sur 
son  passage,  la  Tingitane,  les  Maurétanies  et  la  Numidie, 
ils  entraînèrent  avec  eux  une  foule,  d'indigènes  aux  yeux 
desquels  ils  représentaient  un  heiueux  élément  de  désordre. 
Tl  est  possible  que  comme  dans  toutes  les  circonstances 
semblables  qui  se  présentèrent,  des  groupements  sortis 
des  Hauts-Plateaux  oranais  les  suivirent.  Trop  longtemps 
contenus,  ils  trouvèrent  là  une  occasion  de  dévaster  encore 
le  Tell  et  d'anéantir  à  leur  profit  les  derniers  vestiges  de  la 
colonisation  romaine. 

Genséiic,  maître  de  l'Afrique  septentrionale,  fît  raser 
toutes  les  fortifications  et  divisa  son  empire  en  cinq  pro- 
vinces, parmi  lesquelles  la  Gétulie,  comprenant  le  Djerid 
(région  d'oasis  au  Sud  de  la  Tunisie")  et  tous  les  pays  méri- 
dionaux. Les  Vandales  ignorèrent  toujours  les  Hauts- 
Plateaux  oranais  et  ne  prirent  aucune  précaution  contre 
le  brigandage  de  ses  habitants.  Dans  cette  occupation 
éphémère,  ils  n'atteignirent  jamais  la  région  des  Chotts 


DOCTEMENT?  POT'T?  SFRMn  A  t'iTTSTOîRF  DFS  Ff  \l\n'AN       127 

or.innis,  fions  I;M(U('llr  cokiiiic  imiis  l"iiv()ns  \ii,  il  p\i«:(rnt 
;ni  \  i*"  sirclc  un  loy.innic  i  n(l('[)cti(l;inl  (pir-  ^ninvctniiit. 
Mnsun.i. 

Tnipnis<;inls  fi  nssnrcr  l'ordir  dans  cet  immense  onipiii' 
quo  rionsriic  avaif  mis  pon  do  tomps  n  conquérir,  ses 
snreessours  eurent  à  supporter  plusieurs  révoltes  des  Ber- 
bères :  ils  en  fnirnf  vite  réduits  à  la  seule  possession  du 
litl<^ral  et  rerlaines  tribus  Cétules  profileront  do  ootfo 
poiiode  troublop  pour  aller  se  fixer  dans  le  Toll. 

T/anaiebio  était  complète  quand  Justinien  sonfjea  à 
intervenir  on  Afrique  pour  restaïuvr  la  Province  romaine 
autrefois  si  prosjioi'o.  Kn  l'espace  d'un  an,  Bélisaire  dispersa 
ces  Vandales  qui,  après  la  conquête,  n'avaient  pas  su  orga- 
niser, mais  s'étaient  lancés  dans  des  courses  aventureuses 
on  Italie  et  dans  les  îles  de  la  Méditerranée.  Dans  les  ins- 
tructions qu'il  donna,  l'Empereur  disait  :  ((  Que  nos  offî- 
((  ciers  s'efforcent,  avant  tout,  de  préserver  nos  sujets  des 
«  incursions  do  l'ennemi  et  d'étendre  nos  provinces 
<'  jusqu'au  point  oi'i  la  République  Romaine,  avant  les 
((  invasions  des  Maures  et  des  Vandales,  avait  fixé  ses 
«  frontières.    » 

Mais  la  situation  du  pays  était  profondément  modifiée 
car  la  population  berbère  avait  reconquis  peu  à  peu  un.' 
partie  des  territoires  abandonnés  par.  les  colons  et  n'était 
nullement  disposée  à  les  restituer.  Rien  au  contraire, 
l'élément  indio-èue  se  resserrait  de  toutes  parts,  se  léu- 
nissait  mome  en  corps  de  nation  en  face  de  l'occupation 
étrangère.  Celle-ci  ne  s'étendit  jamais  au-delà  des  limites 
de  la  province  do  Constantine  et  encore  cette  réofion  fut-elle 
on  état  do  rébellion  poinianente. 

Zénètos  de  la  première  race.  —  La  province  d'Oran  ne 
connut  donc  jamais  les  Ryzantins  et.  quand  leur  domina- 
tion disparut  devant  l'invasion  arabe,  il  existait,  au  Sud 
de  Tlemceu  et  sur  les  Hauts-Plateaux,  dans  le  Maghreb 
central,  une  tribu  berbère,  k  les  Trnianes  »,  qui  vivait  dans 
une  complète  indépendance.  Les  détails  manquent  sur  son 
orifrine  et  sa  constitution  ;  on  la  rattache  aux  groupes  des 
anciennes  tribus  Zénètes  issues  des  Gétules. 


128       DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 


CHAPITRE  m 

L'INVASION  ARABE 

ET  LES  ZÉNÈTES  DE  LA  PREMIÈRE  RACE 


Après  l'entrée  de  Mahomet  à  la  iMecqiic,  l'islamisme  était 
fondé.  Par  la  persuasion  ou  par  la  force,  les  Arabes  durent 
adopter  le  nouveau  culte,  et  la  Guerre  Sainte,  imposée  à 
tous  les  croyants  comme  une  stricte  obligation,  allait 
ouvrir  la  voie  aux  conquêtes.  Les  nouveaux  convertis 
trouvaient  d'ailleurs  dans  leur  prosélytisme  la  satisfaction 
d'une  de  leurs  passions  favorites,  le  pillage.  Il  n'est  donc 
pas  surprenant  que  la  religion  mahométane  ait  fait  de  si 
rapides  progrès.  En  peu  de  temps,  l'Irak,  la  Mésopotamie, 
la  Palestine,  l'Egypte,  la  Tripolitaine,  l'Ifrikiya,  tombèrent 
au  pouvoir  des  Arabes.  Ils  fondèrent  Kairouan  et  c'est  do 
cette  ville  qu'ils  partirent  pour  entreprendre  la  conquele 
du  Maghreb. 

Deux  expéditions  paraissent  seules  s'être  aventurées 
jusque  sur  la  région  des  Hauts-Plateaux  oranais  ;  celle 
d'Okba,  en  68 1,  qui  s'avança  jusque  dans  le  Maghreb 
extrême  après  avoir  battu  les  Berbères  devant  Tiaret  et  qui, 
parvenue  dans  le  Sous,  revint  vers  Biskra  en  passant  par 
le  Zab  ;  et  celle  de  Moussa  ben  Noceir,  en  706,  qui  porta 
ses  armes  victorieuses  jusqu'aux  oasis  de  Sidjilmassa. 

En  un  peu  plus  de  cinquante  ans,  fut  consommé  l'asser- 
vissement du  peuple  berbère  aux  Arabes.  Mais  les  Zénètes, 
tout  en  se  laissant  extérieurement  arabiser,  restèrent 
berbères  comme  les  autres  tribus  ;  sinon  par  conviction, 
du  moins  par  cupidité,  ils  suivirent  en  Espagne  et  en  Gaule 
leurs  vainqueurs,  qui  croyaient  éprouver  l'ardeur  de  lems 
néophytes  en  les  employant  comme  auxiliaires  dans  !a 
Guerre  Sainte. 

Les  Berbères  ne  furent  pas  le  seul  obstacle  que  rencon 
trèrent  les  Arabes  dans  le  Maghreb  ;  il  existait,  en  effet, 
depuis  plusieurs  siècles  dans  cette  contrée,  une  race  Tudeo- 


DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  r,'lIISTOIRE  DES  HAMV^AN       129 

Rorbèro  :  dos  fribiis  juives  venues,  supposc-t-on,  de  l'Ara - 
bie  par  l'Etblopio,  émi<?rrront  succossivement  fn  Cyré- 
naïqiio,  on  lAbir  ;  les  Emporcuis  byznïitins  les  expulse 
rent  de  l'Tfrikiya.  Pour  fuir  la  perséeulion  dont  elles  étaient 
l'objet,  b(\'iuroup  d'entr'elles  se  réfufrièrent  dans  les 
massifs  nionlaoneux  :  marclianl  vers  le  Sud-Ouest,  les 
fraelions  d "avant-^arde  de  ce  mouA-^ement,  les  Mediounn 
et  les  Koiiima  allèrent  échouer  à  Tlemcen  et  sur  le  Plateau 
central  de  la  province  d'Oran.  De  là,  elles  s'étendirent, 
d'une  part,  jus({u'au  Sahara  et  au  Soudan,  jusque  dans  le 
Alairlireb  extrême,  d'autre  part.  Cette  race,  supérieure  à  la 
race  berbère,  fouinit  à  celle-ci  des  chefs  dans  la  lutte  cr)ntre 
les  Arabes,  et,  ainsi  que  l'affirme  Ibn-Khaldoun,  Dahia. 
Cette  femme  remarquable,  (fui  tint  en  échec  Kl  ïTaçane, 
était  d'orio^ine  juive,  comme  l'indique  son  surnom  de 
<(  La  Cahena  ». 

Ces  deux  éléments,  soumis  en  apparence,  n'attendaient 
qu'une  occasion  pour  se  révolter.  Les  Zénètes,  en  parti- 
culier, poussés  par  leur  esprit  de  résistance  à  l'envahisseur, 
étaient  tout  disposés  à  accueillir  les  hérésies  qui  divisèrent 
l'Islam  ;  ceux  du  Sud-Oranais,  après  un  semblant  de  con- 
version, se  rallièrent  au  Kharedjisme  de  la  secte  Sofrite, 
((ui  comy)tait  beaucoup  d'adeptes  dans  le  Masrhreb  extiéme. 
L(^s  Arabes,  d'ailleurs,  au  lieu  de  s'attacher  ces  nouveaux 
convertis,  les  traitèrent  en  vaincus.  Non  contents  de  leur 
enlever  leurs  filles,  de  décimer  leurs  troupeaux,  ils  firent 
des  expéditions  jusqu'au  Sous  et  dans  l'Extrême-Sud,  d'ofi 
ils  ramenèrent  de  riches  butins  et  un  nombre  considérable 
d'esclaves  ;  ils  voulurent  enfin,  outre  les  impôts  ré<ruliers. 
prélever  de  lourdes  contributions  sur  les  populations  La 
colère  des  Berbères,  trop  lon<^temps  contenue,  amena  des 
soulèvements  continuels  à  la  fois  relioieux  et  nationaux. 

Le  premier  éclata  en  7^0,  dans  le  Mao-hreb  extrême  ; 
Meceiia  en  fut  le  promoteur  ?  Dans  une  bataille  qui  fut 
appelée  la  «  journée  des  nobles  »,  le  succès  des  Berbères 
fui  décidé  pai'  l'aiiivée  de  renforts  Zénètes,  commandés 
par  Khaled  b(>n  TTarnid,  et  pai^mi  lesquels  fio-uraient.  sans 
nul  doute,  des  Irnianes.  Lo  mouvement  s'étendit  en  Ifrikiya 
el  en  Lspaofne.  \  partir  de  ce  moment,  le  IMaofhreb  demeura 
en  réalité  complètement  indépendant  et  le  Kharedjisme, 
au  lieu  d'étie  une  forme  d'hérésie,  devint  une  adaptation 
Iles  vao-ue  des  préceptes  de  l'Islam,  faite  difféi'emmeiit  par 
chaque  tribu. 

Les  révoltes  se  succédèrent  alors  d'une  façon  coiilinue 


130      DOCUMENTS  POIJB  SERVIB  A  l'hTSTOIRE  DES  HAMYAN 

fliaqiie  fois  que  les  Berbères  sentirent  faiblir  l'autorité 
ni'ab(\  A  deux  reprises,  Kaironan  fut  prise  y^ar  les  Khared- 
jites,  cl  dans  eette  hitle,  les  Zénètes,  Béni  Tfrène,  Magraoua, 
Irnianes  aeeonrnrent  du  Maghreb  central  pour  se  joindre 
à  eux. 

Mais,  au  cours  de  ce  réveil  de  l'esprit  national  berbère, 
on  voit  cette  race  abandonner  l'état  démocratique  pour 
former  de  petites  royautés.  A  Tiaret,  une  nouvelle  cité  fut 
bâtie,  ofi  s'installa  la  dynastie  Bostémide  ;  les  Béni  Ifrène 
fondèrent  Tlemcen  ;  les  Miknaça  formèrent,  au  Tafilalet, 
un  royauame  dont  Sidjilmassa  fut  la  capitale.  Ces  deux 
dernières  Iribus  furent  trop  faibles  pour  assurer  leur  doTii- 
nation  et  résistèrent  avec  peine  aux  entreprises  des  tribus 
des  Hauts-Plateaux  et  du  désert  qui  se  déclarèrent  bientôt, 
à  leur  tour,  indépendantes. 

Enfin,  Edriss  ben  Abdallah  fît  d'Oulili  (près  Fez)  le  siège 
de  la  dynastie  Fdrisside.  Ce  dernier  empire  était  appelé 
à  jouer  vm  rôle  prépondérant  dans  le  Maghreb.  Les  tribus 
des  Hauts-Plateaux  oranais  restèrent  en  dehors  de  toutes 
les  entreprises  qu'Edriss  fît  sous  prétexte  de  combattre  le 
Kharedjisme  ;  elles  furent  au  contraire,  semble-t-il,  le 
refuge  des  Kharedjites  persécutés,  que  protégeait  ouver- 
tement la  dynastie  de  Sidjilmassa.  Le  fondateur  de  Fez 
f»e  contenta  de  s'emparer  de  Tlemcen,  oTi  il  installa  son 
cousin  et  poussa  jusqu'à  La  Mina. 

Nous  manquons  de  renseignements  sur  le  rôle  que 
jouèrent  les  Iribus  des  Hauts-Plateaux  oranais,  dans  les 
mouvemenl'ï  politicfues  et  religieux  qui  agitèrent,  au 
x"  siècle,  le  Maghreb.  11  est  certain  ffue  cette  région  vit 
passer  les  expéditions  dirigées  contre  Sidjilmassa,  en 
particulier  celle  de  Abou- Abdallah,  en  qoq,  entreprise  pour 
délivrer  le  Mehdi.  Obeïdh  Mlah,  qui  fonda  en  Afrique  la 
dynastie  Fatémide,  et  celle  des  Magraoua  et  des  Béni  Ifrène; 
en  975.  Bou  Yezid  trouva  aussi,  parmi  ces  populations, 
comme  parmi  les  autres  tribus  berbères,  ses  plus  fidèles 
partisans  avec  lesquels  il  alla  s'emparer  de  Kairouan. 


* 

*  * 


La  deuxième  invasion  arabe  ne  fit  que  passer  sur  les 
Hauts-Plateaux  oranais. 

Les  Almoravides,  venus  de  la  région  du  Haut-Sénégal, 


DOCUMENTS  POIR  SFRMH  A   r'niSIOtRF  DES  HAMYAN       131 

iillciuiiiKiil  If  T;ilil;il<'l  cl  sCmparôrciil  de  Sirl jilniHssa. 
Miiîlir  tlii  S(ni<.  ils  l)(iii-(iil('niit  les  Jirni  Ifièiie  <iii  ToHIa, 
les  Miismoiidit  du  hcicii  d  les  lici  f/liouala  du  liilural 
occidental.  Voiissef  l)f ii  Taclicliii  Iniula  Maroc  cl  c fsl  de  là 
(|ii'il  [>arlil  pour  s'altacpici  aux  Magiaoua  cL  aux  Mikuaça 
du  Maghreb  ccnlial.  F.curs  partisans  les  plus  fidclcs  dan> 
celle  rcjunon  lurent  les  Judéo-Berbères. 

Quant  aii\  Mniolnides,  leur  berceau  tiil  la  partie  du 
nrand  Allas  occu[)ée  par  les  Masmouda.  Ils  eurent  à  lutter 
contre  les  Ahiioravides,  au  Mao-hreb  extrême,  et  lorsque, 
ai)rès  en  avoir  triomphé,  ils  voulurent  étendre  leur  domi- 
nation du  côté  de  l'Est,  ils  furent  arrêtés  par  les  \rabes 
llilaliens  qui  chassaient,  devant  eux,  tous  les  Zénètes  qu'ils 
rencontraient  sur  leur  passage. 

Zénètes  de  la  deuxième  race.  —  A  la  suite  de  tous  ces 
mouvements,  nous  trouvons,  vers  le  milieu  du  xf  siècle, 
les  Irnianes  refoulés  des  Ilauts-Plaleaux  jusqu'à  Sidjil- 
massa  ;  en  même  temps,  la  grande  tribu  des  Ouacines, 
Zénètes  de  la  deuxième  race,  apparaît  à  la  lisière  de  cette 
contrée,  s'avançant  dans  les  déserts  de  l'Oranie  ;  elle  a  dû 
abandonner  la  partie  méridionale  de  la  province  de  Cons- 
tanline  sous  la  poussée  des  Arabes  llilaliens. 

De  l'avis  de  M.  Piquet,  on  a  attribué,  à  l'arrivée  de  ces 
nouvelles  tribus,  une  importance  (ju'elle  n'eut  probable- 
ment pas  en  réalité,  au  dél)ut  tout  au  moins.  Cette  épocjue 
a  marqué  au  contraire  une  renaissance  de  la  vie  propre 
berbère  vl  la  prépondérance  d'une  nouvelle  race  :  Sanhadja 
et  Zénètes  de  la  seconde  race.  Néanmoins,  nous  devons 
reporter  toute  notre  attention  sur  cette  dernière  invasion 
aiabe,  car,  parmi  les  tribus  qui  la  composaient,  nous  trou- 
verons certains  groupements  qui  se  sont  fixés  sur  les  Hauts- 
Plateaux  oranais,  vers  le  xui*^  siècle  et  dont  quelques  mis 
furent  les  ancêtres  des  Hamyan  actuels.  Nous  allons  suivre 
la  genèse  de  leurs  migrations  à  travers  l'Afrique  septen- 
trionale. 


132       DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'iIISTOIRE  DES  HAMYAN 


CHAPITHE  IV 

LES  Zf]Nr/rKS  1)11  LA  DEl  Xir.ME  lîACE 
ET  LES  HILALIENS 


Les  tribus  des  Beni-Ilil;!],  iiiiisi  (jiu;  ('elles  des  Beni- 
Soleïm,  étaient  établies,  vers  l'époque  des  .\bassides,  dans 
les  déserts  du  Hedjaz.  D'après  Ibii-Khaldoun,  elles  se  divi- 
saient en  cinq  fractions  :  les  Athbedj,  les  Djocheni,  les 
l\iah,  les  Zorba  et  les  Makil  ;  parmi  les  Zorba,  on  trouve 
les  Ilainyan  i,  (jui  appartenaient  à  la  grande  famille  des 
Yezid.  L'état  normal  de  ces  tribus  était  le  brigandage,  elles 
ne  [XM'daieni  aucune  occasion  de  se  lancer  dans  le  désordre, 
de  prêter  appui  à  tous  les  agitateurs  et  de  rançonner  les 
caravanes. 

Poui'  se  débarrasser  de  ces  nomades  tuibulents,  El  Aziz 
les  envoya  d'abord  Ciuilonnei'  su]-  la  rive  droite  du  Nil, 
dans  le  Saïd  ou  Haute-Egypte  ;  ils  ne  laidèreiit  pas  à  rendre 
ce  pays  inhabitable  et,  pour  y  remédier,  le  khalife  fnlémide 
les  lança  sur  la  Berbérie. 

Il  est  ditricile  d'évaluer  approximativement  le  noud)re 
des  envahisseurs  de  ces  deux  grandes  tribus.  Certains 
nuîeurs  estiment  qu'ils  devaient  être  yri  million,  chiffre 
qu'il  convient  de  diminuer  eu  laison  des  guerres  qu'ils 
eurent  à  subir  en  Arabie  el  en  Syi'ie.  En  réalité,  ils  n'.m 
raient  compté  à  leur  ariivée  dans  l'Ifrikiya  rpic  :j,oo  ooo 
personnes,  dont  4-^ooo  guerriers.  En  raison  des  conditions 
meill(>ures  qu'ils  trouvèrent  à  leur  arrivée  en  Beibérie,  ils 
s'accnuenl  rapidement  et  les  tribus  mères  se  >ubdivisèrenl 
dans  la  suite  en  un  grand  nombre  de  fractions. 

Leur  entrée. en  Tunisie  est  définitive  ajiiès.leuf  victoire 
à  llaïdéraue  '  io53),  piès  de  (Tabès,  siu"  El  Moëzz.  Maîlres 
(l(>  Kairouan,  ils  signèreul  ime  Irève  avec  le  soiiV(Main  (ie 


I  Le  niiin  de  celle  Iribu  a  élé  orthog^raphié  de  diverses  façons  par  les 
ailleurs.  De  Slane  l'écril  «  Hameïaii  »  et  il  ajoute  que  si  l'on  admet  l'orlhographc 
ponniucc  telle  que  les  meilleurs  inanuscrils  la  présentent,  il  faut  le  prononcer 
«  Hameiyan  ».  L'orthographe  admise  aujourd'hui  est  celle  de  «  Hamyan  ». 


nociMEMs  \'oi  H  sKH\rn  \  1,'iiisroiiU':  dks  iiamya>     1^53 

Tripiili  cl  ^c  piirliii^rniil  leurs  coïKjuêtes.  Les  Zoiba  ciirrnl 
[xiiir  leur  |);iil  (liihrs  cl  lit  icj^ioii  ("ouipiisc  cnlrc  celle  \iljc 
cl   Tripoli. 

(^)iiel(|ii('s  aiiiiccs  ii|)!cs,  les  /orba  eiirciil  à  liiltcr  coiilrc 
les  hiali,  leuis  voisins.  (Pliasses  suceessis  cinciit  par  eux  de 
lou>  K'urs  (ei  riloiies,  ils  abaudonnèrenl  la  Tunisie  et  énii 
^lèienl  dans  le  llodna  et  sur  les  IJauts-l^lateaux  du 
Ma^lueb  cenlial.  Ils  y  menèrent  la  vie  nomade  et,  eiitie 
leins  mains,  ces  régions  furent  bientôt  changées  en  soli- 
tudes ;  les  Makil,  (pii  les  occupaient  au|)aravant,  se  massè- 
rent aux  en\  irons  du  Mont  liached  (Djebel  Amourj. 

Jusque  vers  le  milieu  du  xif  siècle,  les  Zorba  guerro- 
\èi-enl  conslammeni  coidrc  les  Riah  et  les  Alhbedj.  A  ce 
moment,  l'armée  en^allissante  d'Abdel  Moumene  s'avan- 
Vait  jusqu'à  Bougie  ;  voyant  instinctivement  dans  les 
Almohades  des  adversaires  redoidables,  les  Ililaliens 
oublièrent  leurs  querelles  et,  sous  prétexte  de  venger  Yahia, 
(Ici  niei'  souverain  llaminadite  qui  s  était  soumis  a[)rès  la 
prise  de  Constantine,  ils  se  concentrèrent  sur  les  versants 
de  i'Aurès  et  de  là  marcbèient  sur  Sétif.  Ils  se  heurtèrent 
à  l'armée  d'Abdallah,  iils  d'Abdel  Moumene.  l)n  combat 
acharné  dura  tiois  jours  ;  le  quatrième  jour,  les  Arabes 
cédèrent  sous  la  poussée  des  Almohades  (jui  les  poursui- 
\irciil  jusqu'à  Tébessa.  Quand  Abdel  Moumene  fut  rentré 
au  Maroc,  il  reçut  avec  bienveillance  les  députations  des 
tribus  arabes  venues  pour  lui  offrir  leur  soumission,  les 
Jlilaliens  rentrèrent  dans  leurs  douars  chargés  de  présents 
et  ramenant  à  leur  suite  les  prisonniers  de  Sétif. 

Les  Djochem,  les  Riah,  les  Athbedj  oublièrent  vite  leurs 
serments.  En  ii85,  quand  Ali  Ben  Rama  se  révolta  contre 
les  Almohades  et  s'empara  de  Bougie,  ces  tribus  se  jangè- 
rent  sous  sa  bannière  ;  seuls,  les  Zorba  demeurèrent  fidèles 
aux  souverains  du  Maroc  (M  défendirent  le  territoire  méri- 
dional du  Maghreb  du  milieu.  Deux  ans  après,  Abou 
Youssef  vint  rétablir  l'ordre  et  poussa  jusqu'en  Ifrikiya. 
l'n  chemin,  il  lallia  les  contingents  des  Arabes  Zorba  et, 
reiUré  des  territoires  usurpés,  il  châtia  avec  la  dernière 
sévérité  les  Arabes  qui  avaient  soutenu  son  ennemi.  Poui' 
les  mettre  dans  l'inqxissibilité  de  nuire,  il  se  décida  à  les 
exporter  au  Maghreb.  11  tixait  ainsi  l'élément  arabe  au 
cœur  de  la  race  berbère,  ce  (pii  allait  amen(>r  une  séri(^  de 
troid^les  et  affaiblir  l'empire   Mmohadc. 

Lorsqu'il  londja  en  i->tK),  les  Zorba  étaient  ainsi  repu  lis 
dans  le  Maghreb  cential  :  les  Yezid  l'occupaient  depuis  le 


134       DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

Djebel  Dira  jusqu'au  Dehous  et  à  la  vallée  de  l'Oued  Sahel.. 
touchant  à  l'Est  aux  liibus  Athbedj  et,  au  Sud,  aux  Daoua- 
ouda  avec  lesquels  ils  étaient  (onliiuicllement  en  guerre. 
Les  Ameur,  tribu  d'origine  Athbedj  passée  aux  Zorba, 
s'étendaient  du  Djebel  el  Akhdar  (à  l'Est  de  Médéah) 
jusqu'au  Djebel  liached  (Djebel  Amour  actuel). 

Nous  avons  vu  que  les  Zénètes  Ouaciens  avaient  été 
repoussés  des  déserts  de  la  province  de  (Jlonstantine  par  les 
Arabes.  Us  s'étaient  ensuite  fractionnés  en  trois  groupes 
principaux  :  les  Toudjine,  les  Béni  Merine  et  les  Abd-el- 
Ouad.  Ces  derniers  dominaient  sur  les  Hauts-Plateaux 
oranais  à  la  fin  du  xn'  siècle.  Ils  étaient  considérés  par  les 
Almohades  comme  leurs  partisans  les  plus  dévoués  dans 
le  Maghreb.  Un  de  leurs  cheikhs,  Djaber  Ben  Youssef, 
ayant  rétabli  leur  autorité  à  Tlemcen,  reçut  du  khalife  le 
gouvernement  de  cette  ville.  Les  Abd-el-Ouadites  allaient 
connaître  «  l'ivresse  du  pouvoir  ».  En  i235,  ils  proclamè- 
rent comme  chef,  ainsi  que  les  villes  du  Maghreb  central, 
Yarmoracène  Ben  Ziane  ;  sous  le  conmiandement  de  ce 
prince,  véritable  fondateur  de  la  dynastie  Abd-el-Ouadite, 
Tlemcen  s'éleva  au  rang  de  métropole. 

Abou-Zakaria,  sultan  de  l'Ifrikiya,  voyait  non  sans  ja- 
lousie cette  puissance  se  drcssej-  entre  lui  et  le  Maroc.  Pour 
la  détruire,  il  prétexta  Fin lercep lion  d'un  présent  envoyé 
par  lui  à  la  Cour  de  Fez.  11  (piiiia  Tunis  à  la  tête  d  une 
armée  régulière  nombreuse  ;  en  passant  par  le  Hodna  et  le 
Mont  Rached,  il  entraîna  sous  ses  étendards  les  Zorba,  les 
Souaid  et  les  Ameur.  Lorscjuc  ce  grand  rassemblement 
arriva  sous  les  murs  de  Tlemcen,  un  combat  acharné 
s'engagea  ;  mais  la  lutte  était  inégale.  Y^armoracène  dut 
abandonner  sa  capitale  après  s'être  ouvert  un  passage  à  la 
pointe  de  l'épée. 

Lorsqu'il  eut  livré  la  ville  au  pillage,  Abou  Zakaria 
s'aperçut  de  l'impossibilité  de  conserver  sa  nouvelle  con- 
quête el  quand  Y^armoracène  reparut  sur  les  hauteurs  qui 
dominent  Tlemcen,  le  prince  Hafside  accepta  ses  proposi- 
tions de  paix  et  reprit  la  route  de  l'Est.  Y^armoracène  se 
reconnaissait  son  vassal. 

Abou  Zakaria  mort,  les  Zoiba  devinrent  les  alliés  des 
Ouadites,  qui  trouvèrent  en  eux  des  auxiliaires  dans  les 
combats  qu'ils  eurent  à  livrer  contre  les  Toudjine  et  contre 
le  Sultan  mérénide  Abou  Y^oussef.  Ils  s'avançaient  alors 
dans  la  plaine  du  Chéliff  et  quelques  fractions  s'étendaient 
jusqu'à  Tlemcen.   Comme  les  Makil,   qui  occupaient  le 


DOCUMENTS  POl'H  SEKVJU  A  l.'ll  is  loi  M  |;  l)|>  IIWIVW        IMÛ 

h'iiil..iic  (I  \i|M..(l,  niiiplisvai.nl  [r  pays  de  dé-sui  (Jics  «,'l  de 
IroiiMcs,  ^;ii  iiionicèiM"  lil  \(iiir  |,^  |'„ni  Amcui  d  les 
•'■li'l'lil  «'iiliv  lui  «'L  les  Makil  ;  (|uci(iin;.s  lhmi>aii  se  j(ji;,Mii- 
iviil  à  ers  rinigianls.  Ces  deux  Uibus  s'iuslalJùienr  de 
uiaiiièie  à  protéger  TN.-uicen  conlre  toute  entreprise  hoslile. 

C'est  ainsi  que  la  région  des  Hauts-Plateaux  oranais  fui, 
à  eette  époque,  abandonnée  par  les  Béni  Anieur.  On  y  a 
lelrouvé  des  traces  noinbieuses  de  leur  séjour  ;  ils  construi- 
sirent en  elïet  des  ksour  un  peu  partout  :  à  ïaoussera,  a 
Asla  et  à  Touadjeur  ;  ils  creusèrent  des  puits  dont  l'un 
existe  encore  chez  les  lielvakra  d  un  autre  à  Aïn-Mécif, 
chez  les  Oulad  Messaoud.  Avant  leur  départ,  quelques-uns 
de  ces  puits  avaient  été  recouverts  avec  des  troncs  d'arbres 
et  de  la  terre  ;  d'autres  étaient  en  partie  comblés,  connne 
à  Oglat  Djedida. 

Les  Béni  Ameur  et  les  lianiyan  venus  vers  Tlenicen 
Vat tachèrent  à  la  foitune  d'Othnian,  comme  ils  avaient 
secondé  son  prédécesseur.  Ils  se  battirent  avec  lui  contre 
les  Toudjine,  contre  les  iMagraoua  et  contre  le  Sultan  Abou- 
Yacoub,  lequel  essaya  à  trois  reprises  de  s'emparer  de 
Tlemcen.  Cette  ville,  qui  avait  délié  toutes  les  attaques  des 
Mérénides,  tomba  en  leur  pouvoir  le  i"  mai  iSSy.  Son 
défenseur,  Abou-ïachefine,  trou\a  la  mort  avec  ses  deux 
fils  en  voulant  prolonger  la  lutte  jusqu'à  la  porte  du  palais. 

Le  trône  Zeyanite  renversé,  toutes  les  tribus  arabes  du 
Maghreb  central  tombèrent  sous  l'autorité  directe  des 
sultans  de  Fez.  Mais  cet  immense  Empire  manquait  de 
cohésion  ;  l'élément  arabe  avait  fait  son  œuvre  et  les  moin- 
dres incidents  allaient  déterminer  son  démembrement  ; 
aussi,  les  années  qui  suivirent  marquèrent-elles  une  sérié 
de  luttes  que  les  xMérénides  eurent  à  soutenir  contre  les 
Arabes. 

Les  Hamyan  et  les  Béni  Ameur  ne  s'étaient  jamais 
départis  de  leurs  sentiments  de  hdélité  envers  les  Zeyanites. 
Aussi,  quand  Abou-llammou  11  revendiqua  ses  droite  au 
trône  abd-el-ouadite  (i358),  se  rendit-il  au  milieu  des 
Arabes  qui  lui  organisèrent,  de  leur  mieux,  un  cortège 
royal.  Le  chef  des  Béni  Ameur  battit  même,  au  Sud  de 
riemcen,  les  Soueïd  (famille  sœur  des  Yezid),  qui  voulaient 
entraver  la  marche  du  prétendant.  Abou-Harnmou  put 
rentrer  en  possession  de  sa  capitale.  Elle  fut  néanmoins 
objectif  de  deux  nouvelles  expéditions  des  sultans  de  Fez 
Le  prince  Zeyanite  employa  chaque  fois  la  même  lactique  • 
Il  abandonna  Tlemcen  et,  avec  les  Béni  Ameur,  les  Hamyan 


136       DOCl  MEMS  POUR  SERVIR  A  l'iIISTOIRE  DES  IIAMYAN 

et  les  Makil,  alla  s'installer  soit  à  Oudjda,  soit  à  Gueiçif, 
menaçant  la  roule  de  Fez.  11  réussit  à  réoccuper  la  ville. 
Mais,  au  cours  de  cette  lutte,  il  eut  l'occasion  de  mettre  en 
doute  la  fidélité  des  Béni  Anieur  ;  aussi  fit-il  emprisonner 
leiu-  chef  Khaled  lorscjuc  Abou-Zeyane  marcha  contre  lui. 
Obligé  de  se  replier  sur  Tlemcen,  il  remit  Khaled  en  liberté 
sur  sa  promesse  formelle  de  détacher  sa  tribu  de  la  cause 
de  son  ennemi.  11  y  réussit,  mais  à  partir  de  ce  jour,  les 
Béni  Ameur  se  séparèrent  d'Abou  Hammou  ;  après  son 
insuccès  contre  Bougie,  la  rupture  fut  définitive.  Khaled 
entraîna  une  partie  des  Béni  Ameur  vers  le  Sud  et  s'unit 
aux  Soueid  ;   quelques  tentes  s'arrêtèrent  sur  les  Hauts 
Plateaux.  Certains  groupes  Hamyan  se  fixèrent  sur  le  terri- 
toire abandonné. 

Abou-Hammou,  chassé  plus  tard  de  Tlemcen,  chercha 
un  refuge  chez  ses  anciens  aUiés  ;  il  alla  jusqu'au  Sud  du 
Djebel  Raclied,  dans  les  oasis  que  les  Ameur  avaient  con- 
servées comme  fiefs  ;  mais  ceux-ci  l'abandonnèrent  et  il 
dut  s'enfuir  à  Tigourarine.  C'est  là,  qu'à  la  mort  d'Abd-el- 
Aziz,  ses  sujets  le  rappelèrent.  Khaled  essaya  d'insurger 
contre  lui  le  Maghreb  central,  mais  il  fut  vaincu  à  Kaloriat 
Houra  (N.-O.  de  Mascaraj  et  se  jeta,  avec  ses  partisans, 
dans  le  Djebel  Amour  (1875 ). 

Les  Béni  Ameur  devaient  revenir  sous  les  murs  de 
Tlemcen  avec  Abou  Tachefine,  qui  trouva  en  eux  des  auxi- 
liaires lorsqu'il  détrôna  son  père,  Abou-Hammou. 

Après  l'innuence  de  cette  tribu,  les  souverains  ouadites 
durent  subir  celle  des  Soueid  et  des  Makil.  En  effet,  pen- 
dant toute  cette  période  troublée,  les  princes  berbères, 
pour  combattre  leurs  voisins  ou  les  populations  de  leur 
race  employèrent  les  Arabes  toujours  disposés  à  la  guerre. 
Pour  les  récompenser  de  leurs  services  ou  s'assurer  de  leur 
concours  ils  leur  concédèrent  les  terres  des  vaincus.  Ainsi 
l'élément  berbère  fut  abaissé,  écrasé,  et  ces  Arabes,  devenus 
la  seule  force  de  leur  dynastie,  ne  tardèrent  pas,  suivant 
l'évolution  naturelle  des  choses,  à  devenir  un  danger  poui- 

leurs  maîtres. 

Dans  les  plaines,  les  Berbères  s'assimilèrent  les  mœurs, 
les  usages,  la  langue  même  de  leurs  envahisseurs  ;  la  fusion 
fut  complète  entre  eux.  Quant  aux  Hauts-Plateaux  ora- 
nais  ils  avaient  été  le  refuge  des  hérétiques,  le  dernier 
retranchement  de  la  race  zénète,  où  la  première  et  a 
deuxième  invasion  arabe  n'avaient  fait  que  passer  ;  ils 
allaient  devenir  au  contraire,  après  l'arrivée  des  Hilahens, 


DOCUMENTS  POln  SI:k\IU    \   l/ll  IS  I  <  »|  H  K   DIS  IIWIVW       137 

le   berceau   des    liihiis   jirahes    lo    plus    |iiiitN,    idlcs   que 
les  Hainyaii,  les  Oulad  Seioui   et  les  Akejina. 

Les  populalioiis  .ludéo-Herbères  (|iii  se  Iroiivaieril  dans 
ces  contrées  vers  le  x"  siècle,  curent  à  siipporler  la  [jersc- 
culion  des  Ahuoliades.  (leilaiues  se  eomcrlirenl  en  jriasse 
à  rislaniisnie  ;  d'aulrc<  Inreiil  e\lerMiinée>s  ;  Sidjilriiassa, 
foyer  de  la  science  jnixc  dans  I  l-Airème-Sud  marocain,  lui 
détruite  ;  à  Tlemccn,  eidin.  Ions  les  juifs  fuient  massacrés. 
Au  fanatisme  lelitrieux  des  Almohades  sajoulail,  en  effet, 
une  raison  politi(|ue  ;  celli>  d'anéantir  les  éléments  guerriers 
juifs,  essentiellement  dévoués  aux  Almoravides.  Conti-, 
nuant  leur  mouvement  vers  le  Sud-Ouest  que  nous  avons 
signalé  plus  haut,  les  survivants  émigrèrenl  peu  à  peu 
dans  la  vallée  de  TOued  Draa  et  dans  le  Sous. 


DEUXIÈME  PARTIE 


CHAPITRE  I 
L'ORIOINE  DES  HAMYAN  ACTUELS 


Il  nous  a  paru  nécessaire  d'indiquer  à  grands  traits  les 
événements  principaux  qui  eurent  lieu  en  Oranie  pour 
pouvoir  chercher  à  en  tirer  une  conclusion  permettant  de 
discuter  les  origines  des  Hamyan  actuels. 

Faut-il  voir  dans  les  Hamyan  qui  vinrent  avec  les  Arabe» 
Hilaliens  en  Afrique  septentrionale,  les  ancêtres  des  tiibus 
(jui  parcourent  aujourd'hui  le  cercle  de  Méchéria  ? 

La  question  prête  à  discussion.  Sans  nul  doute,  quelques 
éléments  de  cette  grande  invasion  s'y  fixèrent,  à  la  suite 
des  événements  que  nous  venons  de  raconter,  mais  trois 
versions  principales  sont  en  présence  et  peuvent  également 
se  soutenir.  Elles  se  basent  : 

La  première,  sur  les  données  très  sujettes  à  caution 
qu'ont  laissées  quelques  auteurs  arabes. 

La  seconde  et  la  troisième  sur  les  légendes  qui  se  sont 

10 


138       DOCUMENTS  POT  R  SERVIR  A  l/jUSTOIRE  DES  IIAMYAN 

transmises  jusque  chez  les  llaniyan  actuels,  el  (jui  n'ont, 
évidemment,  qu'une  valeur  historique  très  relative. 

Elles  n'inlirnient  en  lien  les  bases  générales  sur  lesquelles 
a  été  scientiliquenient  établie  la  marche  progressive  des 
diverses  invasions  arabes,  mais  ne  sauraient  cependant  être 
passées  sous  silence. 

Au  sujet  de  l'établissement  des  llaniyan  sur  les  Hauts- 
Plateaux,  Ibn  Khaldoun  et  Si  En  Naceli  donnent  la  version 
suivante  : 

«  Vers  Tannée  584  de  l'Hégire,  Yacoub  el  Mançour  ben 
«  Youssef  ben  Abd-el-Moumen  ben  A.li  commandait  à  la 
((  majeure  partie  des  tribus  de  l'ifrikiya  ;  ces  tribus  étaient 
((  divisées  en  deux  groupes  :  les  Béni  Salem,  à  l'Est,  et  les 
((  Béni  Hilal,  à  l'Ouest. 

((  A  celte  époque,  un  prétendant,  Ali  Ben  Ishac,  appelé 
«  aussi  Ben  Ghania,  appartenant  à  la  grande  tribu  des 
((  Molthimine  (gens  qui  se  servent  du  litham  ^),  chercha 
((  à  supplanter  Yakoub  el  Mançour. 

((  Les  Béni  Hilal  ben  Ameur,  abandonnant  ce  dernier, 
«  prirent  parti  pour  le  prétendant  ;  les  Béni  Salem  demeu- 
((  rèrent  fidèles.  Partant  de  Tunis,  qui  était  alors  sa  rési- 
«  dence,  Y^ikoub  el  Mançour  marcha  contre  son  adversaire 
«  et,  à  la  suite  de  nombreux  succès,  le  subjugua,  recouvra 
((  son  autorité  et  ramena  à  lui  les  Béni  Hilal  qui  l'avaieni 
<(  trahi.  Néanmoins,  pour  punir  ceux-ci  et  les  mettre  dans 
((  l'impossibilité  d'abandonner  de  nouveau  sa  cause,  il  leur 
«  intima  l'ordre  d'aller  camper  aux  confins  de  son  empire 
«  et  le  plus  près  possible  du  Maghreb  el  Akssa.  Les 
«  Hamyan,  qui  formaient  une  grande  fraction  des  Béni 
((  Hilal,  allèrent  d'abord  dans  le  Sahara,  puis  choisirent, 
<(  pour  s'y  fixer,  une  région  désertique  située  entre  Meçila 
«  (probablement  le  Djebel  Meçila,  au  Sud-Ouest  d'Oudjda) 
«  et  la  ville  de  Tlemcen.   » 

Mohammed  Abou  Bas  Ben  Ahmed  Ben  Abdelkader  En 
Nassi,  auteur  d'un  ouvrage  de  récits  historiques  sur  l'Afri- 
que septentrionale,  donne  les  renseignements  suivants  : 

«  Les  Homiâne  sont  une  branche  des  Béni  Y  azid,  fils  de 
((  Ab's,  fils  de  Zor'ba.  Les  pays  de  H'manza,  les  Dahous,  le 
«  pays  des  Béni  Hassane,  étaient  leurs  tributaires  avant  les 
«  Almohades. 


I  Lilhaiii.  —  Sorte  Je  vciilf  (iiu-  les  imlifrèiics  du  S:ili:ir.i  se  placenl  (le^;int 
le  visage  pour  «e  protéger  du  ?:d)le.  De  nos  jours,  les  Tou;ir.^g  eoiitiiiuciit 
%   l'employer. 


DOCUMENTS  l'OlK  SKU\  rU    \   l.'lllSKJllit;  DLS  HV.MYA.N       11^^ 

<(  Nous  allons  lacoiilcj  la  cause  de  la  nciiuc  des  Iloiiiiàiu.' 
«  dans  la  ronliée  qu'ils  (»('('ii[M'nt  aclufllcnienl. 

((  Lorsque  \ai'uu)iàcèn('  ben  Ziaue  devint  souverain  de 
((  Tlemcen,  les  Mak  il  (|ui  étaient  ses  voisins,  puiscju'ils 
<(  occupaient  le  territoire  d'Angad,  leniplissaient  ie  pays 
((  de  désordres  et  de  troubles.  Ce  prince  lit  alors  venir  les 
«  Heni  Ainei  du  Sahara  des  Béni  Yazid,  et  les  établit  entre 
u  lui  et  les  Ma'kil.  lin  elïel,  les  Zor'ba  s'étendaient  aupa- 
«  ravant  dans  le  désert,  depuis  Meyila,  à  l'Est,  jusqu'au 
<(  Sud  de  Tlemcen,  à  l'Ouest.  Au  moment  où  le  roi  de 
«  Tlemcen  attirait  au[)rès  de  lui  les  Béni  A'mcr,  la  tribu 
K  des  llomiàne,  branche  des  Bcni  Yazid,  se  joignit  h  ces 
«  émigrants  et  s'installa  entre  les  Ma'k'il  et  Tlemcen,  de 
»(  manière  à  servii'  de  bouclier  à  cette  ville,  de  repousser 
u  les  attaques  dirigées  contre  elle  et  de  la  protéger  contre 
((  toute  entreprise  hostile.  Ils  restèrent  sur  ee  territoire 
«  jusqu'au  jour  où  Abou-IIammou  le  jeune,  en  l'an  760 
u  et  quelques,  s'empara  de  la  souveraineté  sur  les  A'ïas, 
«  rois  des  Béni  Ziane,  que  Abou  l'nàne  avait  déjà  fort 
«  maltraités  et  même  presque  entièrement  exterminés. 
<(  Abou  llammou  chassa  les  Béni  A'mer  des  environs  de 
((  Tlemcen  et  les  établit  à  Tessala.  Les  terrains  de  parcours 
«  de  cette  tribu  arrivèrent  jusqu'à  lléidour,  montagne 
((  d'Oran.  line  portion  des  Homiâne,  branche  des  Béni 
((  Yazid,  se  fixa  sur  ce  nouveau  territoire,  à  El  M'ofra  et 
((  dans  les  localités  environnantes  ;  mais  la  plus  grande 
«  partie  qui,  du  reste,  ne  s'était  pas  joiante  aux  Béni 
«  A'mer,  lors  de  leur  première  émigration,  fut  reléguée 
«  dans  le  désert,  d'où  elle  n'a  point  bougé  jusqu'à  présent. 

«  Telle  est  l'histoire  des  Homiûne,  fils  de  O'k'ba  ben  A'bs 
«  ben  Zor'ba. 

«  Je  tiens  de  personnes  dignes  de  confiance,  dépositaires 
<(  des  traditions  du  pays,  que  les  Homiâne  ont  donné  nais- 
«  sance  aux  Madjamed,  établis  à  ll'addad,  aux  Béni  Korz, 
«  aux  Béni  Moussa,  aux  Meraba'  et  aux  Khachena,  qui  sont 
«  tous  originaires  des  Béni  Yazid.  Les  l'krima,  fils  d'A'bs, 
((  sont  frères  des  Homiâne. 

«  Le  commandement  appartint  d'abord  aux  O.i'.ad 
«  Lâh'ek',  puis  passa  aux  mains  des  Oulad  Ma'âfa,  et  enfin 
«  échut  à  la  famille  de  Sa'd  ben  Màlek,  descendant  de 
«  Mahdi  ben  Yazid  ben  A'bs  ben  Zor'ba.  Cette  famille  pré- 
«  tend  que  son  fondateur  est  Mahdi  ben  Abd-er-Rahmane 
«  ben  Abou  Bekr  Es-Siddik.  Mais  cette  origine  qu'elle 
u  s'attribue  est  combattue  par  cette  considération  que  le 


140       DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  UAMYAN 

(c  commandciiienl  aurait  ainsi  appartenu  à  une  maison 
((  étrangère  aux  tribus,  ce  qui  n'est  pas  admissible.  C'est 
«  là,  d'ailleurs,  l'opinion  d'ibn  Khaldoun,  dont  on  peut 
*(  consulter  l'histoire  pour  de  plus  amples  détails.   » 

Mais  les  llamyan  actuels  se  donnent  une  autre  origine. 
Il  circule  à  ce  sujet  une  légende  qu'ils  se  sont  transmis  de 
génération  en  génération  et  que  presque  tous  leurs  caïds 
connaissent  :  les  récits  qu'ils  en  l'ont  ne  dillerent  que  par 
l'abondance  des  détails  : 

((  A  une  date  qu'ils  ne  peuvent  préciser,  mais  antérieure 
«  à  la  domination  turque,  disent-ils,  les  Hauts-Plateaux 
u  étaient  occupés  par  quelques  familles  des  Béni  Anieur. 
<(  Cette  région,  pays  de  la  faim  et  de  la  soif,  était  d'ailleurs 
«  peu  habitée.  Un  nommé  Sidi  Maamar  ben  Alla,  frère 
u  d'un  marabout  de  Tunis,  quitta  celte  ville  et  s'établit  aux 
«  Arbaouat  (80  kilomètres  environ  au  Sud-Ouest  de  Géry- 
«  ville),  OLi  il  fut  enterré.  Il  avait  emmené  avec  lui  deux 
((  esclaves  nègres,  Rezine  et  Akram  ;  un  troisième  naquit 
((  en  route,  qui  reçut,  pour  cette  raison,  le  nom  de  Ziad. 
((  Sidi  Maamar  laissa  un  lils,  Sidi  Aïssa,  qui  mourut  à 
c(  quatre-vingts  ans  ;  sa  descendance  fut  la  suivante  : 
((  Boulila  ould  Aïssa,  Bel  Lahia  ould  Boulila,  Bou  Smaha 
((  ould  Bel  Lahia  et  Si  Sliman  ben  Bou  Smaha,  dont  la 
«  tombe  est  à  Beni-Ounif . 

((  Une  tente,  vers  la  même  époque,  vint  s'installer  dans 
«  la  région  des  Chotts  ;  son  chef  s'appelait  Ahmed  et  était 
((  originaire  de  Marrakech.  Son  fils  resta  au  Kreider  et  c'est 
((  son  petit-fils,  Khalifa,  qui  donna' son  nom  à  la  tribu  des 
«  Oulad  Sidi  Khalifa.  Quelques-uns  vinrent  à  Méchéria  et 
((  construisirent  un  ksar  (près  des  sources  de  la  pépinière 
((  du  génie). 

((  D'autres  gens  arrivèrent  de  tous  les  côtés  et  se  réuni- 
«  rent  à  l'une  ou  l'autre  de  ces  familles;  ceux  qui  se 
((  joignirent  à  Rezine  s'appelèrent  Rezaina  ;  Akram  donna 
((  naissaiice  aux  Akerma  ;  ceux,  enfin,  qui  reconnurent 
«  comme  chef  Ziad,  devinrent  les  Oulad  Ziad. 

((  Si  Sliman  Bou  Smaha,  de  son  côté,  eut  deux  fils  :  Si 
<(  Mohammed  ben  Sliman,  enterré  iÀ  Chellala  et  Si  Ahmed 
((  ben  Medjdoub. 

«  Toutes  ces  tentes,  au  bout  de  quelque  temps,  furent 
((  assez  fortes  pour  permettre  aux  nouveaux  émigrés  de 
((  chasser,  sous  la  conduite  de  Si  Ahmed  ben  Medjdoub, 
((  les  Béni  Ameur.  Ceux-ci,  après  avoir  bouché  tous  les 


l 


DOCUMENTS  POTIR  SERVIR  A  l/lflSTOIRR  DES  IIAMYAN       141 

«  puits  fju'ils  avaïpnt  rreusds,  so  réuniront  h  Aïn  Morif  d'où 
'(  ils  "•nofnèront  on  uno  journoo,  Hit-on,  Tossala.  Si  Alimofl 
«  bon  Mo^  jdôul),  inhuino  d'abord  h  Asla,  fut  dotorro  par 
«  los  pfons  de  Chellala,  qui  placèrent  sa  tombe  à  oolé  do 
«  celle  do  son  frère  ni"]  elle  est  encore  vénérée.  Son  flN. 
((  Mobamniod  Sidi  Choikb,  est  l'ancêtre  des  Oulad  Sidi 
«  Cbeikb.  Quant  aux  Boni  Ameiu',  ils  étendirent  leurs 
«  terrains  do  |iaroours  jusque  dans  le  Tell  i. 

('  Un  seul  Boni  Amour,  nommé  Bekar,  losla  dans  lo 
((  pays  ;  il  avait  une  grande  fortune,  de  nombreux  trou- 
('  peaux  et  plusieurs  femmes  ;  il  se  fixa  près  du  cbott  FI 
'(  niiarbi  et  son  hospitalité  fut  bientôt  connue.  Aussitôt 
((  des  nomades  vinrent  à  lui  et,  pour  se  les  attacher,  Bekar 
«  donna  à  quelques-uns  ses  filles  en  mariao-e.  Toutes  ces 
"  familles  formèrent  la  ""rande  tribu  des  Bokakra.  T. es 
«  douars  qui  la  composent  ont  conservé  leurs  noms  :  co 
«  .sont  :  los  Oulad  Salem,  dont  l'ancêtre  habitait  Oudjda  : 
<(  les  Moualek,  originaires  de  Seo'uiat-el-Amra  littoral 
"  atlantique  Sud-Marocain"^  :  les  Daamcba,  du  Oourara  : 
'(  les  Bozazo-a,  issus  de  doux  indisfènes  de  Marrakech,  Ali 
"  et  Boz/ousf  ;  les  Oulad  Bahma  ;  les  Aïssoiiat,  fils  d'Aouïss, 
«  de  la  tribu  dos  Chonanma  do  l'Oued  Biss  Tprès  Mascara")  ; 
((  los  Bouabah,  branche  dos  Oulad  Sidi  Khalifa  ;  enfin,  los 
«  Meharat,  qui  habitaient  le  Tell  2.   n 

D'après  cette  version,  ce  serait  à  tort  que  l'on  considé- 
rerait los  TTamyan  comme  issus  d'une  même  souche.  I-es 
éléments  primitifs  auraient  été  au  contraire  d'orio"inos  trè'^ 
diverses  et  dos  causes  différentes  auraient  poussé  tous  ces 
groupes  à  convoro-er  en  une  même  contrée  ;  les  uns  n'au 
raient  fait  que  suivro  leur  chef,  qui  redoutait  l'expiation 
d'un  méfait  dont  il  était  coupable  ;  los  autres  auraient 
cherché  à  échapper  à  la  rapacité  de  leurs  maîtres  ;  d'autres, 
enfin,  gens  de  sac  et  de  corde,  n'auraient  eu  d'autre  but 
que  d'ouvrir  un  champ  plus  vaste  à  leur  esprit  de  rapine 
et  d'aventvu'o,  ou  de  trouver  des  terrains  de  parcours  plus 
étendus  pour  leurs  troupeaux. 

^Nous  verrons,  au  chapitre  IV,  d'une  façon  plus  détaillée, 
los  différentes  orio-ines  des  tribus.') 


I  Récit  Hn  caïd  El  Mir  Oiilrl  El  Hadj  Naceiir,  des  Rezaïna  OhoraTia  et  de 
Mimed  bon  Mohammed,  chef  du  Maphzen  de  Méchérin. 

1  Documents  fournis  par  l'Apha  El  Hndj  Kaddotir  et  son  fils  BoufeKlja, 
caïd  des  Bekakra. 


142      DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOTRE  DES  HAMYAN 


Une  troisième  version  très  intéressante,  s'appuyant  éga- 
lement en  partie  sur  Ibn  Khaldoun,  donne,  pom-  l'origine 
des  Hamyan,  l'arbre  généalogique  suivant,  que  nous  repro- 
duisons intégralement. 


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DOCTJMEMS  POl  R  SI:RMI<   A   I  'il  I*- I  <  )|  H  K   HKS  ll\>rY\\       143 

l']llc  se  coniplrtc  |t;u  la  di Hiiiiiciilal ion  ci-afjrès,  trouvée 
clans  lin  iiiaiiii-«ciil  délcmi  actiirllciiicnl  |)ar  un  lalcb  do 
Saïda  : 

«  i"  l.t's  Cdial'aa  jxulcnl  le  nom  de  knir  premier  ancrlre 
<c   (|iii  csl  (Ihal'aa  ben  Ameur. 

((  Les  Djemba  (ce  mot  sio-nilie  côte)  sont  ainsi  nommés 
«  parce  que,  depuis  leur  venue  dans  le  pays,  ils  étaient 
«  toujours  à  c()té  des  Béni  Ameur.  fis  ne  se  séparaient 
«  jamais  d'eux,  les  suivaient  partout  oii  ils  allaient. 

<(  On  compare  les  Chafaa  à  un  chameau,  dont  les 
«   Djemba  seraient  les  côtes. 

((  Autrefois,  la  tribu  des  Béni  Ameur,  ainsi  que  celle  d<'s 
((  Kamyan,  se  trouvaiept  dans  le  Sahara  ;  elles  changèrent 
<(  de  campenuMil  et  allèrent  s'installei-  dans  les  environs 
«  d'El  Abiodh. 

«  A  ce  moment,  elles  étaient  commandées  par  Abou 
<(   Hammou  Lakhdar,  un  des  rois  des  Béni  Zian. 

<(  Le  loi  de  Tlemcen  envoya  la  tribu  des  Béni  Ameur  à 
«  Tessala  l'endroit  qu'ils  occupent  encore  aujourd'hui), 
<(  en  l'année  76a  de  l'ère  liégirienne. 

((  Dans  le  Sahara,  (jui  est  encore  occupé  par  les  TIamyan, 
«  restait  ime  partie  d(vs  Béni  Ameur  et  des  TIamyan,  tandis 
«   (pie  l'antre  |>artie  des  deux  tribus  était  allée  à  Tessala. 

<(  C'est  ainsi  (pie  ceux  des  Béni  Ameur  qui  étaient  restés 
<(  furent  appelés  Chafaa,  tandis  que  les  Hamyan  furent 
«  appelés  Djemba. 

«  Les  Reni  Metharef  seuls  et  ceux  qui  se  rattachent  à  eux 
«  sont  de  véritables  Chafaa. 

((  Ils  sont  originaires  des  Béni  Ameur  et  non  pas  des 
('  Hamyan. 

((  Ils  comprennent  les  Oulad  Chafaa  Ben  Ameur,  aux- 
((  (fuels  lemontcnt  l'origine  de  la  tribu  et  celle  des  Ameur 
«  ben  Zoghba  ben  Ali  Rabia  ben  Nahik  ben  Hellal. 

«  Les  Akerma  ont  une  origine  différente  et  ne  sont  pas 
«  des  Chafaa. 


"  Les  campements  des  Zoghba  se  sont  étendus  dans  les 
(f  plaines,  depuis  Bougie  jusqu'à  Ondjda. 

«  Ceux  qui  comprenaient  les  Hamyan  Chafaa  se  trou- 
((  vaient  à  l'Est  du  pays  de  Bougie. 

«  A  l'Ouest  de  cette  région  (de  Bougie)  se  trouvaient  les 
<(  tentes  des  Béni  Yazid. 


144      DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

«  Quant  aux  Djemba,  aux  Sendan,  aux  Âkerma,  ce  sont 
«  eux  qui  sont  les  îlamyan. 

((  Ils  ont  tous  trois  le  même  ancêtre,  qui  est  Ben  Okba 
«  ben  Yazid  ben  Aïssa  ben  Zoghba. 

«  L'ancêtre  qu'ils  ont  de  commun  avec  les  Béni  Ameur 
«  est  Ben  Ali  Babia  ben  Nahik  ben  Hellal. 

<(  Les  Akerma  sont  donc  les  frères  des  Djemba  et  des 
((  Sendan,  mais  ils  n'appartiennent  pas  aux  Cbafaa. 


((  Avant  leur  arrivée  dans  le  pays  de  Bougie,  les  Hamyari 
((  étaient  en  guerre  contre  leurs  voisins  les  Biah. 

«  Ces  derniers  invoquèrent  le  secours  des  Béni  Ameur 
((  et  avec  eux  vainquirent  les  Hamyan,  qui  furent  frappés 
«  d'une  contribution  de  guerre  annuelle  de  i.ooo  gharas 
«  d'orge. 

«  A  la  suite  de  cela,  les  Hamyan  quittèrent  le  pays, 
((  irrités  les  uns  contre  les  autres  par  suite  de  leur  défaite.  » 

Enfin,  une  quatrième  version,  venue  du  Sud,  donne  les 
renseignements  suivants  : 

«  Les  Hamyan  se  composaient  dos  tribus  suivantes  : 

((  Hamyan  Chafaa  ; 

«  Hamyan  Djemba  ; 

((  Arabes  Moucha  ; 

«  Trafî  ; 

«  Oulad  Djerir. 
((  Leur  nom  vient  de  la  racine  «  Hamya  »,  qui  veut  dire 
"   protection,  concours  ou  appui. 

((  Ce  sont  des  étrangers  qui  sont  venus  d'un  peu  partout. 

«  Les  Moucha  sont  venus  d'Orient,  c'étaient  des  Djouad 
«  ^noblesse  militaire). 

«  A  cause  d'une  femme  d'une  rare  beauté,  vme  querelle 
«  eut  lieu  entre  eux  en  Orient. 

((  A  la  suite  de  cette  querelle,  une  violente  bataille  fut 
((  livrée. 

((  Les  vaincus  furent  obligés  de  quitter  le  pays  et  vinrent 
((  se  réfugier  dans  le  Sud-Oranais. 
«  Hs  comprenaient  : 

((  Les  Oulad  Bahal  ; 

((  Les  Oulad  Embarek  ; 

«  Les  Chaareb  (des  Derraga  actuels)  ; 


DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN      145 

'(  Les  Oulad  Abdolkrini  ; 

«  Los  Megan  ; 

«   Les  Rczna  Tcles  Den  aga)  ; 

«   F.es  Guctali  fdes  I^cjii  .M.-(|);iref  acluels)  ; 

"  Les  Sebabha  Tdes  Derr;i<ra  Clieraga)  ; 

('  Les  Ameiir  oiilad  Aliat  : 

«   Les  Oulad  Djerir  oïdad  Bcdiar. 
"   Ils  étaient  issus  des  Zoghba. 
'<   On  les  appela  :  Arabes  Moueha  '. 
"    A    l'origine,    les    Sebabha,    les    Megan    et    les   Oulad 
«  Embarek  formaieni  une  seule  tribu  :  les  Oulad  Embarek. 

Au  sujet  de  leur  dispersion   actuelle,   on  donne  deux 
versions  : 

"   i"  On   raconte   que   les   causes   de   discoïde   qui    les 
"  avaient  fait  fuir  dans  le  Sud-Oranais  n'a  van  I  pas  oessé 
«   ds  se  battaient  très  fréquemment. 

'f  Un  marabout,  ayant  vainement  essavé  de  les  léeon- 
cdier,  les  maudit,  en  s'exprimant  de  la  manière  suivante  : 

«  Que  Dieu  disperse  les  gens  de  Moucha. 

"  Que  chaque  tente  de  leur  tribu  soit  pordue  dans  uru- 
"   tribu  étrangère. 

«  Que  ceux  auprès  desquels  ils  se  réfuo-ieront  les  aban- 
«  donnent  à  leur  sort  ». 

C'est  à  la  suite  de  celle  malédirtion  qu'ils  se  livrèrent  une 
nouvelle  bataille  et  qu'ils  se  dispersèrent  ensuite. 

'^J."  D'autres  traditions  rapportent  que  le  marabout  Sidi 
"  Sliman  ben  Bousmaha,  des  Oulad  Sidi  Cheikh,  possédait 
"  une  superbe  chamelle  blanche,  très  docile,  qu'il  aimait 
«  beaucoup. 

«  Cette  chamelle,  s'étant  un  jour  égarée,  aurait  été  trou- 
<'  vee  par  des  gens  des  Arabes  Moucha  qui.  sans  respect 
"  pour  son  saint  propriétaire,  l'auraient  tuée  et  mangée. 

«  A  la  suite  de  ce  fait,  Sidi  Sliman  ben  Bousmaha  amait 
"  appelé,  sur  l'ensemble  des  Arabes  Moucha.  In  colère 
«  divine  et  leur  aurait  lancé  l'anathème  suivant  : 

I  Au  sujet  de  rétymologie  cl,,  mot  <<  Moucl..  „,  rortair.os  ..orsorm.lilés  in.li. 
|rene..  ont  dit  qu'il  fallait  y  voir  le  mot  .<  Mechcha  ,,  ^  -^.^  m.i  ..,„, 
les  Arabes  du  Sud-Oranais,  signifie  «  Chatte  ,.. 

D'aulres    ont    prétendu    qu'il    fallait    y    voir    le    mot    «   Mâcha   »  ^,L^ 

désignant    «des    effets   de   peu    de   valeur..,   et.   en   l'espèce,  voulant    dle^^que 
''   ^'"'"'  '^'^•"^'' "  l'i""  •'•'^'i'-nt  P^M.vres,  ou  hieu  étaient  des  vauriens. 


146       DOfT  MEM*^  POT  R  SER^^R  A  l'iUSTOIRE  DES  HAMYAN 

«  Djaaltkoum,  la  Ârab  Moucha, 

«  Fi  koul  douar,  eùcha, 

((  El  archelladi  tcskenouth  ircha.   » 

Vous  deviendrez  par  moi,  ô  Arabes  Mouclia, 

Une  tente  misérable  par  douar  : 

La  tribu  que  vous  habitez  s  effritera. 

A  la  suite  de  cette  malédiction,  la  dispersiou  des  Arabes 
Moucha  se  serait  pi'oduite. 

Certains  tolbas  disent  que  l'auteur  de  cette  rnalédietlon 
fut  El  Hadj  Abdelhakem,  iils  de  Sidi  Cheikh,  et  non  pas 
Sidi  Sliman  bou  Smaha. 

En  ce  qui  concerne  la  séi)aialion  des  Oulad  Djerir  et  des 
Hamyan  actuels,  la  légende  donne  les  renseignements 
suivants  qui  ont  été  lacontés  par  l'agha  Si  Moulay,  de 
Tiout  : 

«  A  l'origine,  tous  les  Hamyan  actuels,  tous  les  Trafi, 
((  les  Oulad  Djerir  et  les  Arabes  Moucha  étaient  compris 
((  sous  la  dénomination  de  Hamyan.  Ils  nomadisaient 
«  ensemble,  l'hiver  dans  le  Sahara,  le  printemps  au  Nord 
«  de  la  Chaîne  Saharienne,  l'été  dans  le  Tell,  où  ils  allaient 
<(  chercher  leurs  céréales,  qu'ils  mettaient  ensuite  en  dépôt 
((  dans  les  ksour,  lorsqu'ils  y  passaient,  en  effectuant  leur 
<(  migration  d'hiver  vers  le  désert.  C'est  en  mars  qu'ils 
((  quittaient  le  Sahara  pour  se  diriger  vers  le  Nord  et  venir 
((  s'installer  autour  des  points  d'eau.  Les  uns  passaient  par 
((  Zoubia  (Duveyrier)  et  campaient  h  Dermel,  Djenien  Bou 
((  Rezg  et  El  Faïdja  ;  les  autres  prenaient  la  route  de  la  Gara 
«  Ghedioua  et  s'établissaient  à  Ain  Sidi  Brahim,  à  là  Gara 
«  Ghechoua,  à  Necissa,  Ismaïd,  Bouiba,  Ahmar  Kheddet, 
«  Oued  Somin.  Ils  se  dispersaient  ainsi  auprès  des  puits 
«  et  des  sources . 

((  A  une  époque  antérieure  à  Sidi  Bou  Smaha  ^1^70  ; 
<(  i/i5o  ?)  existait  chez  les  Oulad  Djerir  un  homme  du 
((  nom  de  «  Beddaoui  »,  coureur  d'aventures,  brigand  ré- 
«  puté  et  irrespectueux  du  bien  d'autrui,  qu'il  appartînt 
c(  à  des  étrangers  ou  qu'il  f"t  propiiété  de  ses  contribules. 
«  Ses  rapines,  longtemps  impunies,  devenaient  insuppor- 
<(  tables  à  tous  ;  elles  ne  manquaient  pas  d'attirer  les  repré- 
«  sailles  des  populations  voisines.  Ees  Hamyan  résolurent 
((  de  prendra  dos  mesures  à  l'encontre  d'un  personnage 
((  aussi  encouibrant. 

«  La   saison    était    venue   où    allait    s'effectuer   l'exode 


I 


nOCIMKNfS  l'oru   SKHMK    \   l.'ri  IS  I  (  )|  |(  K   l)i:s  ll\MV\N        147 

"  '""'"fl  (le  hi  CniilVdrr.ilidii  \ (>i S  le  \.,if).  Selon  l'iisago, 
«  les  rc[)i('HMi|:;rils  .l<-  chiMiiic  n|(,,i|„.  (Ic\aient  se  réiiirir' 
«  leiiir  conseil  et  tlécid,.,-  des  détiiils  de  la  migration.  Il  fui 
"  cMleiidii  .pie  l'on  picndrail  piélexte  de  celte  réunion  coii- 
«  lumière  pour  discuter  secrètement  de  la  ligne  de  conduite 
«  à  suivie  envers  Reddaoui. 

«  Une  gara  s'élève  près  de  P.oniba,  sur  la  rive  de  l'oued 
«  opposée  à  celle  où  se  trouve  actuellement  la  gare  du 
«  chemin  de  fer  (ligne  d'Aïn-Sefra  à  Beni-Oimif).  On  l'ap- 
(«  pelait  autrefois  «  Garet  Isnniïd  ...  |{l!e  fut  choisie  comme 
«<  lieu  de  rendez-vous,  parce  (pi'elle  occuf»ait  le  centre  des 
««  campements  llamyan  et  que  sa  position  isolée  en 
«  faisait  un  point  de  concentration  indi(|ué.  Le>  kébar  des 
"  douars  et  fractions  s'y  réunirent  et.  après  avoir  réglé  la 
'<  question  de  la  migration,  décidèrent  à  mots  couverts  de 
«  mettre  à  mort  le  Djei  iri  et  s'y  engagèrent  par  un  sern)(«nt 
«  réciproque. 

«  En  commémoration  de  cette  réunion,  un  redjem  fut 
i<  élevé  plus  tard  sur  la  Gara  Tsmaïd  e|  prii  [p  nom  de 
«  Redjem  el  Mouaïd  »  (  j._,_cl  ^_^_jl  ,^_^  :  le  redjem  des 
'(  députations).  ' 

<'  Mais,  aussi  bien  cpie  fût  gardé  le  secret  de  la  délibé- 
«  ration,  la  nouvelle  n'en  fut  pas  moins  apportée  à  Bed- 
«  daoui,  par  ses  enfants  qui  avaient  fait  partie  du  conseil 
"  et  à  qui  l'on  avait  tenté  de  cacher  par  dis  euphémismes 
»  habiles,  la  décision  prise  contre  leur  père.  Le  vieux  con- 
«  peur  de  roules  vivait  toujours  un  peu  à  l'écart  de  ses 
«  concitoyens  ;  l'isolement  était  nécessaire  à  la  préparation 
<<  et  à  l'exécution  de  ses  coups  de  main  :  il  était  alors  campé 
«  près  de  Sidi  Biahim  avec  les  Oulad  Djerir.  Sans  attendre 
«  plus  longtemps,  il  rassembla  ses  chameaux  et  ceux  de 
«  ses  enfants  et,  la  nuit  venue,  s'enfuit  avec  sa  famille  vers 
«  Figuig. 

»  A  la  nouvelle  de  la  disparition  du  fugitif,  les  Hamyan 
"  prirent  les  armes,  se  ruèrent  sur  les  Oulad  Djerir  demeu- 
"  rc'i  à  Sidi  Brnhim,  les  massacrèrent  et  pillèrent  leurs 
«  troupeaux.  Puis,  continuant  leur  course  vers  le  Sud.  ils 
"  rejoignirent  Beddaoui.  au  ksar  de  Zenaga  (Figuig)  et  le 
«  mirent  <à  mort. 

'<  Les  Oulad  Djerir,  parents  de  Beddaoui.  qui  avaient 
«  échappé  à  la  mort,  se  réfugièrent  dans  les  environs  de 
«  Béchar. 

«  Dans  l'asile  qu'ils  avaient  trouvé,  les  Oulad  Djerir 
"  proscrits  n'eurent  plus  qu'un  but  :  tirer  des  Hamyan  une 


148-     DOCUMENTS  POTÎR  SERVÎB  A  l/HlSTOmE  DES  HAMYAN 

((  éclatante  vengeance  du  meurtre  de  Beddaoui  et  du  mas- 
((  sacre  de  leurs  frères.  Mais  leur  haine  ne  pouvait  être 
«  satisfaite  par  leurs  propres  moyens,  car  leurs  ennemis 
«  étaient  forts  ;  il  leur  fallait  des  alliés  !  ^     ^ 

((  Par  des  députations,  par  des  sacrifices  d'animaux,  ils 
.  obtinrent  l'appui  des  tribus  de  l'Ouest  et  du  Sud  et  les 
,(  décidèrent  à  embrasser  leur  cause.  Et,  à  une  date  fixée, 
u  les  Doui  Menia,  les  Béni  Guil  Oulad  Farès,  les  Âmeur 
((  rBeni  Smir\  les  Béni  Guil  Béni  Chomracen,  les  Ait  Atta, 
c(  se  rassemblèrent  h  Figuig  en  une  seule  barka,  dirigée 
«  par  les  Onlad  Djerir  et  tombèrent  à  l'improviste  sur  les 
u  TTamyan  :  ce  fut  l'origine  du  Zegdou  et  sa  première  ma- 
«  nifestation.  Les  Hamyan,  battus,  pourchassés  jusque  sur 
«  l'oued  Zereoun,  =e  dispersèrent  pour  échapper  à  leurs 
u  ennemis  :  les  Trafi  ot  les  Hamyan  proprement  dits  for- 
,<  mèiont  dès  lors  deux  collectivités  distinctes  i.   » 


* 

*  * 


De  l'ensemble  des  légendes  et  des  traditions  que  nous 
venons  de  rapporter,  il  y  a  lieu  de  chercher  à  étabhr  d  une 
manière  approximative,  évidemment,  mais  cependant 
rationnelle,  l'exode  accompli  par  les  Hamyan  depms  le 
moment  où  ils  sont  entrés  en  Tfrikiya  jusqu  a  1  époque  ou 
ils  sont  arrivés  dans  le  pays  qu'ils  occupent  actuellement. 

■  Nous  savons  d'une  façon  précise  que  c'est  en  to/,8  que 
l'invasion  hilalienne  pénétra  en  Tunisie. 

A  cette  date,  les  Zoghba,  dont  faisaient  par  le  les  Ha- 
myan,   se    trouvaient    du    côté    de    Tripoli    (d  après    Tbn 

^  wTavons  aussi  que  ces  mêmes  Zoghba,  venus  vers 
Gabès,  ont  été  ensuite  dans  le  Sud  de  l'Aures. 

Des  probabilités  permettent  de  croire  qu  ils  ont,  veis 
T  T^o,  habité  sur  l'Oued  Ttel,  près  de  Biskra. 

En  1259,  Yarmoracène,  roi  de  Tlemcen,  .appelle  les  B.  m 
Ameur  à  son  secours  et  les  oppose  aux  Makil. 


:ir::n":ri:t;^:  ;:-Hi;n.  ,„.  »... ..».,  va™»,.... 

Inô;  DiLl  n.VI,ar.  C'csl  d'elle  q..o  de.cendraient  le.  Oul.d  n,e„r. 


DOCUMENTS  vovn  SEKN  ,u  a  i.'.nsr.Mru-:  oks  iiamvaa     nu 

Avec  les  Jieiii  Aii.eur,  aaivciil  les  Clialaa 

Les  Ojeiuba  so„L  encore  dans  Ja  régi,,,,  de  Co,.sla„ti,,e 

ni''  /  ;V  '  '  ""  ?^""^«"^  '^*'  'l^^lfe^",  nommé  Saada! 
pitltxtanl  la  relurme  des  mœurs  el  la  slriete  observance  de 
la  <c  sonna  .>,  se  soulève  conlre  le  sultan  hatside  de  Tunis 
et  est  appuyé  par  le  sulUu.  de  Tlenicen,  Abou  Tachlin 

Il  n  en  est  pas  moins  battu  par  le  gouverneur  du  Zab, 
Al,  Ben  Ahmed,  émir  des  Douaouida. 

A  partir  de  ce  inon,e„l,  sous  des  prétextes  religieux  voi- 
lant le  plus  souvent  lintérèt  personnel,   les  marabouts 
appuyés  par  les  Arabes,  ne  cessent  de  se  mêler  aux  mouve- 
ments politiques. 

La  lutte  continue  enti  e  les  Zeyanites  et  les  Ualsides  c'esl- 
a-dire  entre  Tlemcen  et  Tunis. 

Bougie  reste  le  point  autour  duquel  se  lencontrent  les 
ambitions  et  les  convoitises. 

Les  Arabes  hilaliens,  (|ui  sont  dans  le  pays,  mais  qui 
il  occupent  pas  encore  les  villes,  prennent  parti,  tantôt  pour 
les  uns,  tantôt  pour  les  auties,  pillent,  dévastent,  violent 
et  s  mliltrent  de  plus  en  plus  dans  la  race  berbère. 

Les  Zoghba,  bien  entendu,  ne  manquent  aucune  occasion 
de  se  hvrer  a  tous  ces  actes  répréhensibles.  On  en  retrouve 
quelques-uns  vers  iSiS-iSig,  qui  soutiennent  le  rebelle 
Berhoum,  lequel,  révolté  contre  Abou  Tachfin,  s'était 
retranché  à  Toukal,  dans  lOuarensénis. 

Toukal  est  pris,  Berhoum  mis  à  mort,  Abou  Tachfin 
s'avance  vers  l'Est,  mais  s'arrête  devant  Bougie,  quil  nose 
attaquer. 

En  i32i,  tous  les  Arabes  de  l'Ifrikiya  qui  se  trouvent 
dans  le  Sud  et,  parmi  eux,  encore  des  Zoghba,  se  soulèvent 
sous  la  conduite  d'un  chef  almohade  nommé  Mohammed 
ben  Ah  Amran  et  entrent  à  Tunis. 

Les  divisions  et  les  révoltes  qui  doivent  ruiner  peu  à  peu 
la  dynastie  hafside  continuent. 

D'autre  part,  les  discordes  entre  les  Mérinides  et  les 
Zeyanites  viennent  ajouter  un  élément  de  plus  aux  troubles 
existants. 

Les  influences  maraboutiques  se  développent  de  plus  en 
plus  et  viennent  s'opposer  aux  diverses  dommations. 

Enfin,  en  1870,  Abou  el  Abbès  rétabht  lunité  hafside  à 
Tunis  et  reste  seul  maître  de  cet  empire.  Il  s'occupe  à  faire 
rentrer  dans  la  soumission  les  partis  de  l'ancien  empire  qui 
s'étaient  détachés  et  il  soumet  successivement  les  tribus 
arabes  dont  l'orgueil  était  devenu  insupportable. 


150       DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  L'iIlSTOlUt;  DES  IIAMYAN 

C'est  à  ce  moment  que  les  Djemba,  Trali  el  autres  sont 
amenés  dans  le  Sud-Oianais  par  le  marabout  Si  Maamar 
ould  Sliman  ben  Alla  qui  s'installe  aux  A rbaouat  (Cercle 
de  Géryville)  et  aura  poui-  descendant  le  grand  Sidi  Cheikh. 
La  légende  raconte  que  Si  Maamar  ould  Sliman  ben  Alia 
quitta  la  région  de  Tunis  à  la  suite  d'une  discussion  qui! 
avait  eue  au  sujet  d'une  pastèque. 

Il  est  beaucoup  plus  probable,  et  l'on  peut  admettre  d'une 
façon  à  peu  près  certaine,  que  les  motifs  de  son  émigration 
sont  dus  au  rétablissement  du  pouvoir  d'Abou  el  Abbès  et 
au  mouvement  de  réaction  qui  se  lit  à  celte  époque  contre 
les  tribus  arabes  et  les  inlluences  maraboutiques. 

Les  Arabes  Moucha  semblent  être  arrivés  avant  les 
Djemba  et  les  Trali.  Leur  mouvement  a  dû  sopérer  par  le 
Sud,  mais  il  a  été  impossible  de  pouvoir  trouver  aucun 
document  les  concernant. 

Cependant,  si  on  écoule  certaines  histoires  j  aconlées  par 
des  marabouts,  soit  à  Saheli  (Guir),  soit  au  Touat,  on  peut 
penser  que  cette  fraction  Hamyan  a  formé  un  groupe 
séparé  qui,  lorsque  les  Zoghba  évoluaient  dans  la  région 
de  Biskra,  a  suivi,  vers  1187,  une  tribu  Hilalienne  toute 
différente,  les  Djochem,  laquelle  prit  parli  pour  les  Almo- 
ravides  contre  les  Almohades  et  soutint  la  famille  des  ibn 
Hamia  contre  Abou  Youcef  Yacoub  el  Mansour. 

Les  Ibn  Ramia  ayant  été  vaincus,  les  Djochem  auraient 
été  refoulés  vers  l'Ouest  et  les  Arabes  Moucha  vers  le  Guir 

et  le  Gourara. 

Les  Djochem  se  divisaient  en  dilférents  groupes,  dont 
deux  les  Sefian  et  les  Kholt,  devinrent  ennemis  et  répan- 
dirent le  désordre  et  la  terreur  dans  tout  le  Sud  marocain, 
prenant  suivant  les  occasions,  parti  soit  pour  les  Almo- 
•  hades,  soit  pour  les  prétendants  marocains,  mais  étant  sans 
cesse  opposés  les  uns  aux  autres.  . 

Il  finit  par  se  former,  dans  tout  le  Sud  du  Sahara  et  dans 
tout  le  Sud  Marocain,  deux  partis  : 

Celui  des  Sefian  ; 

Celui  des  Kholt,  (jui  prit  le  nom  de  Ihamed. 

Les  Almohades  el  les,  Mérinides  utiUsèrent  successive- 
ment ces  deux  partis. 

Actuellement  encore,  au  Touat  et  au  Gourara,  on  est. 
de  naissance,  soit  des  Sefian,  soit  des  Ihamed. 

De  no.  iours,  lorsque  les  Hamyan  vont  aux  Oasis  pour 
s'approvisionner  en  dattes,  les  Djemba  sont  du  parti  des 


Doc.MEvrsPOiHSKHMK  V  .•.M^n.,,,,.;  in>  u  ^^n  ^^      ir.| 

n.an.od  et  l.s  Cl.an.a.  ainsi  ,,„..  l.-s  lU-^aïna.  de  cvlni  des 
ocliaii. 

Vris   ,83:>  .1,.,.    ,N4S,  ,.,,ai..s  d<.  CCS  nomades  prirciil 
1  a.l  a  de  le,Tibh->  lulles  ,,Lii  éclalèrenl  au  Touat,  entre  les 

deux  pari,,  ,,u.,  avant  , mire  occupation,  coiaiiMièient  M, ur- 
denient  à  rivaliser  ent>e  eux,   non  seulement   a.iv  Oa.i. 
mais  même,  dit-on,  jus(|ue  dans  le  Sud  Tunisi..,. 


*   41 


^  En  résume,  tous  ces  groupes  occupent,  à  partir  de  iS-q 
a  peu  près  les  emplacements  où  ils  sont  actuellement  '  ' 
Il  y  aura  bien  encore  (pielques  mouvements  (,ui  amène- 
n-nt  des  déplacemenis  provisoires  ;  on  retrouvera  des 
amyan  vers  Oran  et  vers  Tessala  avec  les  Béni  Amem- 
1>  autres  suivront  les'.divers  conquérants  vers  l'Ouest  ou 
dans  le  Sud  et  reviendront  plus  tard  sur  les  Hauts-Plateaux 
Uranais. 

Il  se  produira,  par  suite,  un  mélange  constant  entre  ces 
gens  remuants  et  leurs  voisins,  si  bien  r,ue,  peu  à  peu   leur 
descendance  primiliv..  fendra  à  s'effacer  et  qu'une  série  de 
groupements    hétéroclites,    et    même   parfois   cahotiques 
limront  par  produire  la  race  actuelle  des  Hamyan 


* 


Revenons  à  l'arrivée  de  Sidi  Maamar  ben  Sliman  ben 
Alla. 

Cét<iit  un  descendant  dAbou  liekr  Es  Saddik,  l'un  des 
compagnons  du  Prophète,  surnommé  Abd-el-Kaba  et  l'un 
des  plus  respectés  des  Koreïchites.  Ses  descendants  avaient 
ete  expulsés  de  la  Mecque  à  la  suite  de  désordres  religieux 
dont  ils  avaient  été  les  instigateurs. 

Après  s'être  dirigés  vers  l'Ouest  et  avoir  habité  l'Egypte 
pendant  quehpies  années,  ils  se  retrouvaient,  dans  kcou- 
rant  du  xni<'  siècle,  en  Tunisie,  où  ils  jouissaient,  de  par 
leur  origine,  d'une  grande  considération  et  d'une  influence 
religieuse  très  marquée. 

Turbulents  et  gênants,  ils  avaient  été  obligés,  pour  les 
raisons  que  nous  avons  indiquées  plus  haut,  de  continuer 
leur  migration  vers  l'Ouest  pour  venir  s'installer  dans  la 
vallée  de  l'oued  El  Gouleïta  (Cercle  de  Géryville). 

Cette  arrivée  se  produit  à  l'époque  où  le  marabout isme 


152       nOGLiMEMS  POl  H  SEKMH  A  l/niSTOlKE  DES  HAMYAN 

se  développe  dans  toute  l'Afrique  du  Nord  d'une  façon 

extraordinaire.  .     j     i. 

Les  marabouts  viennent,  en  général,  de  1  Ouest,  de  la 

Sesfuiat-el-Hamra. 

Sidi  Maamar  ould  Slinian  ben  Alia  vient  en  sens  con- 

^'^Comme  les  aulres,  il  va  faire  souche  de  saints,  il  fondera 
une  immense  tribu  maraboulique  qui  représentera  un  pou- 
vou-  politique  nouveau  et  une  mission  religieuse  très  active, 
uui  voudra  son  indépendance  et  qui  jettera  souvent,  dans 
les  rivalités  futures  entre  Chérifs  et  Turcs,  puis  contre  nous, 

"si'^Maamar  ould  Slin.an  ben  Alia  divisa  en  un  certain 
nombre  de  groupes  la  cbentèle  considérable  q-  1  -a  ^ 
suivi  et  en  confia  l'administration  a  ses  bouabs,  tous  d  ori- 
g^ne  nègre.  (On  retrouve  actuellement,   entr  autres  che 
fes  Oulad  Sidi  Cheikh,  de  semblables  façons  de  procède. 

De  là  est  née  la  légende,  rapportée  précédemment,  des 
nègres  Akerm  et  Rezin.  En  réalité,  un  groupe  de  Bou 
Belxia  ou  autres  Djemba  fut  administré  par  un  nègre 
nommé  Akerm  et  prit  le  nom  d'Akeima. 

H  en  fut  de  même  pour  les  He/ama. 


* 
1(1  * 


Si  nous  pouvons,  avec  des  i,iobabilités  voisines  des  certi- 
tud  s    suivre  l'histoire  des  Djemba,  nous  nous  heurton 
pour  les  Chataa,  à  des  opinions  d'ordres  divers  qu  ,1  est 

'''tt^sfrîi  représente  les  Cbalaa  conune  étant  des 
Béni  Ameur  nous  paraît  la  plus  probable  k 

-TT;;^;;;;::^::^— An.eu. ...  ...e.  ae  A--^^'v"f"'"'  ''  " 

Kabia',  fils  de  Nabik,  fils  de  Ililal,  ms  '>';  ^-'^'.f  /^l  1   ,    nis    de    El' 
Les    S'as'asont    ^  ^-^;^^/^r^^.  H.  .e.Uoire  se  trouve 
l'krima,  fils  de  Yaz.d    fils  de  Ha     a    «  ^^  ^^^^^^  ^^^   ^^^^.    ^,^,_ 

.lans  le  Djebel  R'azouane,  près  de    1  aiel.  P  , 

lils  de  Bekr,  fils  de  Haouz.à.te,  chez  lesquels  le  1  rophe  e 

,«  Les    Béni    Yaco.d,,    qui    oui    donue    leur    nom 


et  autres 


DOCUMENTS  POIM  S1.H\  lu    \   I  ,'ll  IS  rO[  Mj;  DCS  ir\MVA\        l.")3 

Elle  e\pli(Hi(M;iil  (liuic  (iivoii  lies  nelle  le  piciiiicr  niou- 
vemoiil  dos  /on^liba.  Occupant  d'abord  la  i(;<r\on  actuelle 
du  cercle  de  Mcchéiia,  où  ils  auraient  clé  jetés  avec  l'avant- 
gardc  de  l'invasion  hilalienne,  les  Béni  Ameur  auraient  été 
heureux  de  piolilcr  de  I  appel  cpii  Icui-  était  fait  [)ar  Yarnio- 
racènc  poiu'  (juiticr  la  dure  réo-iun  des  llauts-Plaf,eaux  et 
aller  s'installer  daii<  le  Tell. 

Refoulés  i)lus  tard,  en  partie,  par  les  successeurs  de 
Yarnioracène  dans  les  réj^nons  du  Sud,  ils  seraient  retournés 
d'où  ils  étaient  venus  et  se  s(<raient  retrouvés  à  côté  des 
Djemba,  arrivés  [xMulaul  leur  absence. 

Cette  explication  de  l'origine  des  Chafaa  et  des  Djeiuba 
nous  semble  i)ouvoir  être  admise. 

•  • 

Quoi  qu'il  en  soit,  ces  groupes  ainsi  constitués  étaient 
loin  de  vivre  en  bonne  intelligence. 

Il  ne  se  passait  pas  de  jour  sans  que  l'un  d'eux  n'en 
razziât  un  autre,  b^quel  profitait  de  toutes  les  bonnes  cii- 
constances  que  son  ennemi  lui  offrait  pour  lui  rendre  la 
pareille  et  lui  enlever  ce  que  ce  dernier  lui  avait  pris  la 
veille.  Aussi  tous  ces  gens  étaient-ils  toujours  sur  le  qui- 
vive  :  ils  s'entouraient  de  précautions  infinies  et  étaient 
souvent  arrachés  à  leurs  occupations  par  le  «  Tiberguent  » 
ou  le  <(  Chaoula  »  '.  Les  bons  pâturages  et  les  meilleurs 
points  deau  étaient,  en  conséquence,  occupés  par  ceux-là 
seuls  (pii  pouvaient  s'y  maintenir. 

Les  tribus  des  alentours  ne  tardèrent  pas  à  souffrir  de  ce 
voisinage  ;  c'était  tous  les  jours  de  nouvelles  razzias  et  de 
nouvelles  surpiises  qui  les  privaient  d'une  quantité  consi- 
dérable de  troui)eaux.  Poussées  à  bout  par  les  déprédations 


plusieurs   de   leurs  frères,   par   suite,   alors,   de   leur   proximité   de   cette   ville, 
étaient  les  raïas  de  ces  mêmes  chrétiens.  (D'après  En  Nassi.) 

Le  commandement  de  tous  les  Béni  Ameur  appartenait  à  Daoud  Ben  llilal 
Ben  A'tt  af  Ben  Kerche  Ben  A'yad  Ben  Mani  Ben  Yacoub. 

I  Dans  le  Sud  de  la  province  d'Oran,  lorsque  le  pays  n'était  pas  sûr,  que 
l'on  avait  lieu  de  craindre  quelque  attaque  subite,  ou  que  l'on  était  en  guerre 
avec  le  voisin,  on  plaçait  sur  les  haiitetirs  dominant  les  alentours  du  douar 
des  vedettes  groupées  deux  par  deux.  Sitôt  qu'elles  croyaient  qu'il  y  avait 
danger,  elles  saisissaient  une  étoffe  blanche,  un  haïk,  par  exemple,  et  l'agi- 
taient. Tout  le  douar  accourait  immédiatement  en  armes,  c'était  le  Tiberguent. 
Le  Chaoula  consistait  pour  les  vedettes  à  allumer  subitement  un  feu  :  c'était 
l'appel  aux  armes  la  nuit. 

11 


154       DOCUMENTS  POV  K  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  IIAMYAN 

de  ces  brigands,  lassées  de  se  voir  iinpiinément  razziées, 
elles  résolurent  de  se  défaire  de  leurs  ennemis  et  commen- 
cèrent à  les  traquer.  Les  futurs  Hamyan  s'aperçurent  qu'il 
en  était  fait  d'eux,  s'ils  ne  se  groupaient  pas  de  façon  à 
résister  à  leurs  ennemis.  Cette  idée  de  group'^ment  se  pro- 
pagea parmi  cette  multitude  dans  ces  termes  :  ((  Hammi, 
nehamik  »  (chauffe-moi,  je  te  chaufferai  ;  ou,  protège-moi 
je  te  protégerai).  Ils  se  réunirent  donc  et  furent  ainsi 
connus,  dit-on,  sous  le  nom  de  Hamyan  i^gens  qui  se  sou- 
tiennent) ;  c'est  là,  d'après  eux,  l'origine  du  nom  qu'ils  ont 
conservé. 

A  quelque  temps  de  là,  les  Hamyan  se  divisèrent  en 
Cheraga  et  en  Gheiaba,  en  raison  de  l'extension  qu'ils 
avaient  pris. 

Après  cette  scission,  les  querelles  cessèrent  momenta- 
nément entre  les  Hamyan-Gheraba.  Forts  de  leur  supério- 
rité numérique,  ils  s'attaquèrent  à  tout  ce  qui  était  plus 
faible  qu'eux  et  se  vengèrent  des  défaites  qu'ils  avaient 
précédemment  subies.  Hs  eurent  aussi  avec  les  Trafi  des 
luttes  sanglantes,  dont  le  motif,  fut  la  possession  de  l'Ang- 
el-Djemel  et  du  point  d'eau  d'Ech  Chebour,  actuellement 
réclamé  par  les  Oulad  Sidi  Khahfa  ;  les  Hamyan  le  gardè- 
lent.  Plus  tard,  ils  eurent  encore  à  lutter  contre  les  tenta- 
tives des  Béni  Mathar  pour  les  points  d'eau  du  chott 
Chergui  ;  une  convention  passée  entre  les  deux  tribus 
décida  que  le  point  d'eau  de  Chaïb  serait  commun  aux 
belligérants  et  que  la  limite  passerait  par  le  milieu  du 
chott,  laissant  aux  Hamyan  les  points  d'eau  du  Sud,  dont 
Ech  Chebour. 

L'accord  se  rétabUt  entre  les  Hamyan-Cheraga  et  les 
Hamyan-Gheraba  jusqu'au  moment  où  une  question  reli- 
gieuse vint  les  séparer  définitivement. 

Quoique  issus  d'un  même  groupement,  les  Hamyan 
n'étaient  pas  tous  serviteurs  des  mêmes  marabouts.  Ceux 
de  l'Ouest  obéissaient  aux  Oulad  Sidi  Abd-el-Hakem,  de  la 
branche  cadette  des  Oulad  Sidi  Cheikh,  tandis  que  ceux 
de  l'Est  étaient  serviteurs  des  Oulad  Sidi  El  Hadj  Bon  Hafs, 
de  la  branche  aînée  des  Oulad  Sidi  Cheikh  ;  ces  divergences 
les  firent  en  venir  aux  mains. 

Les  campements  des  Gheraba  se  trouvaient,  à  l'époque 
dont  nous  parlons,  à  Touadjeur.  Sûrs  d'être  battus  s'ils 
combattaient  seuls,  les  Cheraga  soudoyèrent  les  Harrar, 
les  Djaffra,  les  Hassasna,  les  Boni  Mathar,  les  Angad  et  les 
Oulad  En  Nehar.  Toutes  ces  tribus  se  concentrèrent  à  Hassi 


Doci  mi:nis  i'oi  it  si;u\iit  \  i  "nis i diiti;  r»i;s  iiwn  w      lÔ.j 

l'^l  lliitln,  ail  Ndid  de  Ti^riK )uliiic,  cl  \imriit  lomber  à 
I  iin|)i(i\  isir  Mil'  les  (iliciaba.  \()rrs  iiii  coinbal  incnrli  icr. 
où  les  (Juliul  ScroLii  ol  lc>  liciii  MclhaicC  suiloul  rpiou- 
\('iciil  des  p(Ml«'s  considôrablcs,  les  (Uicrag-a  cl  leurs  alliés 
l'iirciil  CDiiipIcIcmcnl  dclails  cl  se  laissèrent  prendi'e  plii- 
sicuis  il  allalicii  >■,  dans  l'un  doscjiicls  se  trouvait  la  femme 
Ackeïa  qui,  dil-on,  fui  i^aitléc  pcndaiil  plusicuis  jours  sans 
manger  ni  boire. 

(  Ancienneuienl,  en  effel,  les  lribu>  (hi  Sud  auienaient 
des  femmes  montées  sur  des  chameaux  dans  des  palauquins. 
Elles  se  tenaient  sur  les  derrières  ;  leur  rôle  consistait  à' 
ranimer  le  courage  des  combattanis  et  à  arrêter  les  fuyards 
en  les  accablant  d'injures). 

Après  celte  défaite,  la  paix  rétablie  entre  les  deux  tribus 
ne  dura  pas  longtemps.  Excités  par  les  marabouts  et  jaloux 
de  venger  un  tel  insuccès,  les  Cheraga  tombèrent  une 
seconde  fois  sur  les  Gheraba  installés  à  Khebazza.  Ils  furent 
encore  défaits  et  se  laissèrent  prendre  quarante  attatich. 

La  concorde  devenue  désormais  impossible,  les  Gheraba 
et  les  Cheraga  se  séparèrent  ;  les  premiers  conservèrent  le 
nom  de  llainyan  et  se  subdivisèrent  en  Chafaa  et  en 
Djemba  ;  les  seconds  adoptèrent  la  dénomination  de  Trafi 
(à  cause  de  leur  position  à  l'extrémité  ou  «  Tarf  >»  de  la 
province  0,  d'Oulad  Ziad  et  de  Rezaïna. 

Leurs  rancunes  ne  cessèrent  que  lorsqu'il  leur  fallut 
lutter  ensemble  contre  les  Turcs. 


*  * 


Les  limites  approximatives  des  terrains  de  parcours  des 
Hamyan  paraissent  avoir  été,  à  cette  époque,  les  suivantes  : 
à  l'Est,  le  pays  des  Harrar  et  le  Djebel  Amour  ;  au  Nord,  le 
pays  des  Béni  Mathar  (Ras-el-Aïn)  et  la  partie  Sud  de  la 
plaine  de  Tafrata  ;  à  l'Ouest,  la  Moulouya  et  le  Guir  ;  du 
côté  Sud,  la  limite  était  des  plus  imprécise. 


I  11  existe  lieaiicniip  d'avilres  versions  relatives  à  l'étymolon-ie  du  nom  do 
«  Trafl  ».  Les  plus  intéressantes  sont  celles  données  par  le  Heulenant-colonel 
Wachi,  ancien  chef  de  Bureau  arabe.   (In-Revuc  Tuinsieiine   1902,  p.  3o3.) 


156       DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hiSTOIRE  DES  HAMYAN 


CHAPITRE  II 
hX  DOMINATION  TURQUE 


Pendant  que  les  querelles  intestines  divisaient  les  Ha- 
myan,  tout  changeait  en  Bcrbéiie.  Les  Turcs  étaient 
apparus  en  Ifrikiya  ;  les  Espagnols  occupaient  une  grande 
partie  des  côtes.  C'est  l'époque  oij,  selon  l'expression  du 
chroniqueur,  ((  la  liberté  des  Berbères  descend  au  sépulcre 
pour  jamais  ».  A  Tlenicen,  régnaient  les  derniers  Zeyani- 
tes  ;  en  i5i2,  cette  cité  envoya  en  Espagne  son  hommage 
de  vassalité  ;  elle  lut  contrainte  alors  de  fournir  des  vivres 
aux  garnisons  espagnoles. 

Mais  si  la  province  d'Oran  dut  subir  tour  à  tour  la  domi- 
nation des  Espagnols,  des  Turcs,  des  Sultans  Marocains, 
les  Hauts-Plateaux  restèrent  généralement  à  l'abri  de  ces 
vicissitudes.  Les  sultans  marocains  firent  sans  doute  quel- 
ques razzias  dans  ces  régions  ;  mais  les  nomades  se  ven- 
gèrent en  pillant,  à  plusieurs  reprises,  leurs  convois  et  en 
les  assaillant  toutes  les  fois  qu'ils  battaient  en  retraite. 
Certaines  fractions  llarnyan  furent  les  alliées  des  Espa- 
gnols. La  chronique  du  Cheikh  Ibn  Merzouk  raconte  qu'à 
la  suite  de  la  tentative  infructueuse  que  fit  Ibrahim  Pacha, 
pour  enlever  Oran  aux  Espagnols,  ceux-ci  construisirent 
la  forteresse  du  Murdjadjou  et  s'ingénièrent  à  la  rendre 
inexpugnable  ;  comme  il  était  très  difficile  de  se  procurer 
l'eau  nécessaire,  le  Cheikh  des  Hamyan  leur  en  apporta 
dans  des  outres. 

«  Ce  fait,  ajoute  le  chroniqueur,  doit  être  pour  le 
<(  musulman  un  objet  constant  d'étonnement  :  Dieu  est 
«  insondable  dans  ses  moyens.   y> 

11  est  aussi  narré  que  le  Commandant  des  troupes  espa- 
gnoles occupant  Oran  préparait  une  sortie  contre  les  gens 
d'Abou  Mehdi  Cheikh  Sidi  Aïssa  et  l'auteur  arabe  écrit  : 

«  Ce  duc  était  capitaine  des  chrétiens  à  Oran. 
((  Les  deux  plaines  qu'il  allait  ravager  sont  Sirat  et  les 
<(  contrées  contiguës  de  Meleta  et  d'El  K'a,  dépendant  du 


Émi\ 


DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOïRE  DES  HAMYAN       157 

«  territoire  de  Soucïd.  I.e  diu-  ainiail  contre  nous  les 
((  armées  des  ehrétiens  et  leurs  alliés,  les  Hoinaïarie,  les 
«  Kiza,  C-hafa  et  autres  méprisables  arabes. 

«  Et  ces  alliés,  ô  croyants,  étaient  des  tribus  musul- 
<i   mânes.   » 

Ces  Hamyan  étaient  ceux  ([ui  avaient  suivi  les  Reni 
Ameur  i. 

Ceux  restés  dans  le  Sud  n'étaient  pas  moins  hostiles  aux 
Turcs  cpii  leur  inspiraient  une  crainte  jusliliée.  S'ils  échap- 
pèrent d'une  façon  générale  à  leur  autorité,  ils  eurent  h 
leur  payer  à  différentes  reprises  de  lourds  impôts  et  ils 
n'ont  pas  oublié  les  procédés  qu'ils  employaient  pour  les 
percevoir. 

Des  espions  signalaient  au  Maghzen  l'emplacement  des 
douars  et  celui-ci,  aussitôt  renseigné,  opérait  de  fructueux 
coups  de  main.  T.es  Meghaoulia  ont  conservé  le  souvenir 
de  celui  dont  ils  furent  victimes  à  El  Agueur,  du  temps  du 
bey  (laghly  ^.  Ayant  trouvé  que  l'impôt  réclamé  était  exa- 
géré, ils  refusèrent  de  le  payer  ;  les  Turcs  les  attaquèrent 
et  les  Meghaoulia,  repoussés,  durent  se  replier  par  le  col 
du  Chameau  (entre  Méchéria  et  El  Agueur).  Le  passage 
était  Iro})  étroit  pour  permettre  l'écoulement  des  trou- 
peaux ;  la  moitié  resta  entre  les  mains  des  agresseurs  et, 
dans  la  lutte,  ^2  Meghaoulia  furent  tués  ;  les  autres  s'enfui- 
rent siu'  Tiout  et  Aïn-Sefra. 

Outre  les  contributions  qu'ils  venaient  lever  eux-mêmes 
sur  les  tribus,  les  Turcs  leur  réclamaient  un  impôt  de  oapi- 
tation,  appelé  <(  gharama  ou  lezma  )>,  toutes  les  fois  qu'ils 
venaient  faire  leur  approvisionnement  en  grains  dans  le 
Tell. 

Aussi  les  Hamyan  profitèrent-ils  des  luttes  entre  les 
Turcs  et  les  Sultans  de  l'Ouest  pour  prendre  parti  pour  ces 
derniers  toutes  les  fois  que  l'occasion  s'en  présenta. 

L'action  très  limitée  des  Turcs  sur  les  populations  des 
Hauts-Plateaux  n'empêcha  pas,  en  effet,  les  Marocains  de 
venir  guerroyer  à  deux  reprises  dans  cette  région. 

En  16^7,  le  chérif  saadien  Mouley  Mohammed  chercha  à 


1  II  existe  actuellement,  ihms  le  canton  d'Arzew,  au  Sud  de  Saint-Leu,  un 
groupement  Hamyan  et  im  point  appelé  :  «  Les  Hamyanes  ». 

Les  Arabes  Hamyan  qui  se  trouvent  là  avec  les  Menaceria,  descendent  de  la 
confédération  des  Hamyan.  Ils  entourent  une  vieille  tribu  berbère  :  les  Bettioua. 

2  Hécit  du  caïd  des  Meghaoulia. 


158       DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

étendre  son  autorité  vers  l'Est.  11  pénétra  chez  les  Angad 
et  entra  à  Oudjda  ;  continuant  sa  marche,  il  tomba  sur  les 
Béni  Ameur,  les  razzia  et  les  contraignit  à  chercher  un 
refuge  auprès  des  Espagnols  d'Oran.  11  lit  du  butin  dans  la 
campagne  de  Tlemcen  et,  l'hiver  terminé,  il  arriva  sur  les 
Hauts-Plateaux,  au  Sud-Est  de  Saïda.  Ses  succès  frappèrent 
l'imagination  des  tiibus  sahariennes,  en  excitant  leur  cupi- 
dité, et  éveillèrent  en  elles  le  désir  de  tirer  vengeance  d'an- 
ciennes querelles.  Mahmoud  ',  cheikh  des  Hamyan,  vint 
apporter  au  chérif  la  soumission  de  cette  grande  tribu  et 
ses  voisins,  les  Mehaya  et  les  Dakala,  l'imitèrent.  Dispo- 
sant ainsi  de  nombreux  contingents  de  cavaliers,  Mouley 
Mohammed  envahit  le  Tell  de  la  province  d'Oran,  et  s'a- 
vança ensuite  jusqu'à  Laghouat  et  à  Ain  Mahdi,  mettant 
toutes  ces  contrées  au  pillage.  Une  armée  turqu^  fut 
envoyée  d'Alger  contre  lui.  Pour  y  échapper,  il  se  décida 
à  prendre  le  chemin  de  Sidjilmassa.  Il  partagea  donc  le 
produit  des  rapines  entre  ses  alliés  et  donna  rendez  \ous 
aux:  Arabes  pour  le  printemps  suivant  dans  les  plaines 
d' Angad.  Les  Turcs  airivés  à  Tlemcen  y  furent  très  mal 
reçus  ;  la  population  leur  reprocha  de  n'avoir  pas  su  les 
défendre  contre  les  attaques  du  chérif.  Ne  s'étant  procuré 
sa  nouriiture  qu'au  prix  des  plus  grandes  difficultés, 
l'armée  rentra  fort  mécontente  à  Alger,  sans  avoir  pu 
recouvrer  le  moindre  impôt. 

Moulai  Mohammed  ne  ])ut  d'ailleurs  mettre,  l'année 
suivante,  ses  projets  à  exécution  ;  le  i"""  juillet  t6''i9,  battu 
par  Mohammed  El  Hadj,  il  fut  obligé  de  lui  abandonner 
sa  capitale. 

Trente  ans  après,  les  Marocains  reparaissaient  sur  les 
llouts-Plaleaux  et  trouvaient  chez  les  tribus  le  même 
accueil  ;  Moulai  Ismaïl  avait  réorganisé  les  forces  militaires 
du  Moghreb  ;  il  avait  constitué  avec  des  nègres  une  armée 
solide  et  bien  instruite  ;  sur  les  routes  et  aux  points  straté- 
giques, il  avait  placé  des  garnisons  et  construit  des  forte- 
resses. \près  avoir  pacifié  le  Sous,  il  se  transporta  dans  les 
régions  sahariennes  de  la  Haute-Moulouya  ;  son  armée  s'y 
grossit  des  contingents  indigènes,  en  particulier  des 
Ilamyan,  des  Amour,  des  Béni  Ameur.  Guidé  par  eux,  il 
s'avança  jus(|u'au  Djebel  Amour.  Mais  une  colonne  turque 


I  Mahmoud  était  originaire  des  Ghiatra  Oulad  Ahrneil.  Il  descendait  direc- 
tement du  marabout  Sidi  Maamar  lien  Alta.  C'est  de  là  que  vient  l'origine 
des  Djouad  qui  existent  actuellcmenl  elle/  les  Cliiatin. 


Il 


DOCUMENTS  POUR  SERVIR  \   r, 'HISTOIRE  DES  II\MYAN       159 

avait  suivi  son  iiionvcniciil  d  s'élait  établie  sur  la  rive 
droite  du  (IhélilT,  pour  lui  disputei'  le  passa^^c  au  lieu  dit 
(Jouïaa.  l,ors(pie  les  deux  années  se  trouvèrent  eu  présence, 
elles  s'observèrent  d'abord  ;  dès  (pie  la  nuit  fut  venue,  les 
Tui-es,  avec  un  <>iancl  renfort  de  cris  et  en  frappant  les 
tambours,  ouvrirent  le  feu  de  leur  artillerie  sur  le  camp  du 
chéiif.  (les  (lélonalions  répandirent  la  terreur  parmi  les 
Arabes  (pii  connaissaient  à  peine  le  nious(|uet  et  ils  prirent 
la  fuite  en  abandonnant  le  Sultan  du  Alaioc.  La  défection 
des  Arabes  entraîna  l'échec  de  l'expédition.  Moulai  Tsmaïl 
jura  de  ne  jamais  compter  sur  eux  et  de  leur  faire  payer 
chèiement  leui-  trahison.  Réduit  à  ses  troupes  régulières, 
il  fut  obligé  d'accepter  la  paix  (jui  lui  était  imposée.  Troi- 
ans  après,  il  trouvait  l'occasion  de  razzier  les  Béni  Ameiii 
Les  Arabes,  à  leur  tour,  se  mirent  à  la  poursuite  de  son 
armée,  quand  elle  fut  obligée  de  se  replier,  après  avoir 
essayé  vainement  de  prendre  Oran  aux  Espagnols  fiôg^  . 

Ces  expéditions  furent  vaines  et  ne  laissèrent  aucune 
trace  durable.  Si  les  chérifs  les  entreprirent,  ce  fut  surtout 
pour  donner  satisfaction  à  leur  désir  de  conquête  et  aussi 
pour  répondre  aux  vœux  des  populations  de  ces  contrées, 
fjui  supportaient  difficilement  le  joug  des  Turcs.  Mais  leur 
domination  ne  fut  jamais  qu'éphémère  ;  elle  disparaissait 
dès  fju'ils  s'étaient  éloignés  ;  à  peine  \c  Sultan  parti,  noma- 
des et  ksouriens  reprenaient  leur  antique  indépendance 

Pendant  cette  période,  les  Oulad  Sidi  Khalifa  allèrent  se 
fixer  défi niti veulent  dans  la  région  du  Kreider  et  se  divisè- 
rent en  Gheraba  et  Cheraga  ;  ces  derniers  bâtirent  le  ksar 
de  Sidi  Khalifa,  oîj  ils  vivaient  d'aumônes.  L'un  d'eux, 
nonuné  Embarek,  s'étant  brouillé  avec  ses  frères,  vint,  vers 
1771,  à  Ech  Chebour,  avec  quelques  fidèles  ;  ils  y  construi- 
sirent quelques  gourbis  qu'il?  abandonnèrent  sept  ans 
après  pom-  retourner  à  Sidi  Khalifa.  Le  point  d'eau  d'Ech 
Cheboiu'  resta  toujours  la  propriété  des  Hamyan. 


160      DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

CHAPITRE  III 
LE  XIX-^  SIÈCLE  Jl  SQl 'Al    TRAITÉ  DE   1845 


Les  terrains  de  parcours  des  Hamyan 


Au  début  du  xi-x""  siècle,  les  Hamyan  menaient  l'existence 
nomade  dans  toute  l'acceptation  du  terme  ;  mais  la  zone 
dans  laquelle  ils  vivaient,  offrait  à  leurs  troupeaux  des  pàtu- 
lages  si  peu  abondants,  qu'ils  étaient  obligés  de  transhumer 
fréquemment  ;  selon  la  saison,  ils  occupaient  telle  ou  telle 
partie  de  leurs  terrains  de  parcours. 

C'est  ainsi  qu'ils  estivaient  soit  à  Ras  el  Ma,  Taerziza  ovi 
El  Aricha,  soit  à  Tiouli  ou  dans  la  vallée  de  l'Oued  El  Haïdj, 
soit  encore  à  Meridja  et  Haouciat-ed-Diab  ".  En  un  mot, 
ils  occupaient  celui  des  points  précités  où  il  y  avait  de  bons 
pâturages  ou  qui  se  trouvait  le  plus  à  proximité  de  la 
région  oii  le  cours  des  grains  était  le  plus  bas. 

Aux  premiers  jours  de  l'aulonine,  approvisionnés  en 
orge  et  en  blé,  ils  levaient  le  camp  et,  s'ils  étaient  à  Ras 
el  Ma,  ils  allaient  au  Chott  Ech  Chergui  (Rouguern)  ;  s'ils 
étaient  à  Taerziza,  El  Aricha  ou  Tiouli,  ils  se  rendaient  à 
El  Reïda,  Oglat  en  Nadja,  El  Morra  et  Oglat  Moussa,  dans 
le  chott  Gharbi;  s'ils  étaient  près  de  l'oued  el  Haïdj,  Meridja 
ou  Haouciat-ed-Diab,  ils  allaient  les  uns  à  El  Mengoub,  les 
autres  au  chott  Tigri,  Mazar  et  Oglat  Moussa. 

A  la  fin  de  la  dernière  saison,  chaque  groupe  transhu- 
mait et  s'acheminait  par  petites  étapes  et  par  un  itinéiaire 
différent  vers  le  Sud  ;  les  Hamyan  du  chott  Tigri  suivaient 
la  vallée  de  l'Oued  el  Hallouf  et  passaient  par  Ich  et  Figuig, 
oii  ils  ensilaient  une  partie  de  leurs  grains  ;  ceux  du  chott 
Gharbi  se  dirigeaient  sur  Aïn-Sefra,  Tiout,  Moghiar  Tah- 
tani  et  Sfîssifa,  en  passant  par  Ain  ben  Khelil  ou  Galloul. 
A  l'instar  des  premiers,  ils  confiaient  une  partie  de  leurs 
orains  aux  ksou riens. 


I  Points  situés  ciilre   Hei'LniPnl   el  l>fli(liiii. 


DOCUMENTS  POUR  SERVIR    \  T,'tîlST01RF   nFS  IJXMYAN       161 

Au  début  âc  l'hiver,  ils  se  retrouvjiicut  ainsi  tons  à 
Klieneg  en  \anious,  point  désin^né  pour  la  concentration 
générale  el,  de  là,  ils  prenaient  la  direction  du  Gourara  et 
du  Touat,  en  descendant  la  \all('c  de  l'Oued  en  Nanious. 
S'ctant  ravitaillés  en  dalles  dans  les  diverses  oasis,  ils  re- 
montaient vers  le  xXord,  reprenant  dans  les  ksour  tout  ou 
partie  de  leurs  grains,  et  confiaient  à  leurs  gardiens  habi- 
tuels la  (juantité  de  dattes  conservée  comme  réserve  pour 
l'année  suivante. 

Dès  leur  arrivée  dans  la  région  des  ksour  «  si  le  vent  de 
paix  soufllait  »,  ils  se  sépaiaient  ;  dans  la  négative,  a{)rès' 
avoir  suivi  ensemble  la  vallée  de  l'Oued  El  Ilallouf  jusrpi'à 
Djenan  El  Adham,  ils  se  répandaient  dans  les  vallées  des 
oueds  Bon  Eardjeni  et  Bon  K.dkhal  (^t  s'installaient  pour 
passer  le  printemps  dans  la  légion  (fui  a  pour  centre  le 
Djebel    \nlar. 

Durant  de  nombreuses  années,  les  llamyan  menèient  ce 
gcMire  de  vie  (^t  lien  ne  fut  sensiblcMnenl  modifié  aux  gran- 
des lignes  de  le\ns  parcours  péiiodi(pies. 

Momentanément,  des  querelles  intestines  vinrent  mettre 
un  terme  à  cet  état  de  choses  ;  à  la  suite  de  cour)s  de  feu 
échangés  entre  différents  çoffs,  la  scission  enir  e  Djend)a  et 
Chafaa  s'accentua  et  même  certaines  familles  des  Oïdad 
Sei'our  et  des  Akerma  se  séparèicnt. 

Quant  aux  Bezaïna,  originaires  de  Bon  Semghoun,  lems 
parcours  s'étendirent,  de  Chellala,  Aers  le  Nord,  jusqu'à 
Sfid  ;  ils  étaient  les  clients  et  les  serviteurs  religieux  des 
Oulad  Sidi  Cheikh,  dont  le  marabout  avait  sa  tombe  à  El 
Abiod. 

Sur  tous  ces  nomades,  une  seule  autcn'ité  existait  :  celle 
des  marabouts. 

* 
*  * 

(iiàce  à  leur  iniluenee  religieuse,  bientôt  jointe  à  leur- 
iiinueiicc  politique,  les  marabouts  représentent  en  réalité 
le  seul  pouvoir  organisé,  dans  ce  |)ays  livré  à  ranarchie 

Ce  sont  eux  cpii,  dans  la  lutte  (|ui  va  opposer  les  Ohérifs 
aux  l'incs,  mettiont  les  llamyan,  ou  tout  au  moins  cer- 
taines de  lems  fractions,  au  service  de  causc^s  différentes. 

Xous  trouverons  ces  derniers  s'inféodant,  suivant  les 
nécessités  du  moment,  à  telle  ou  telle  confrérie  religieuse 
et  leurs  actes  leur-  seront  inspirés  pai'  des  raisons  sociales 
ipie,  seule,  l'auloiilé  maraboutique  aura  entrevues. 


162       DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

Dans  cet  ordre  d'idées,  les  Oulad  Sidi  Cheikh  devaient 
évidemment  injposer,  tout  au  moins  aux  Djemba,  leur 
autorité. 

Lorsque  mouru!  Si  Ben  Kddin,  cjiii  avait  succédé  à  Si  El 
lladj  Bouhafs,  de  la  branche  cadette,  la  biuaka  fut  trans- 
mise à  Si  El  Arbi. 

i Rappelons,  en  passant,  qu'après  Sidi  Cheikh,  ses  descen- 
dants s'étaient  divisés  en  deux  partis,  celui  de  Si  El  Hadj 
Bouhafs,  chef  de  la  bianche  aînée,  et  celui  de  Si  El  Hadj 
Abdelhakem,  chef  de  la  branch(>  cadette.) 

Les  descendants  de  Si  El  lladj  Abdelhakem,  jaloux  des 
prérogatives  attribuées  à  la  branche  aînée,  réclamèrent 
leur  part  des  revenus  perçus  annuellement  par  celle-ci. 

Leurs  prétentions  n'ayant  pas  été  admises,  le  chef  des 
Oulad  Abdelhakem,  Si  Sliman  ben  Kaddour,  Agé  de  19  ans, 
résolut  de  trancher  le  différend  par  les  armes. 

Il  gagna  à  sa  cause  les  Hamyan  et  marcha  à  leur  tête 
contre  les  Oulad  El  ITadj  Bouhafs,  doni  il  lazzia  les  trou- 
])eaux  sur  l'Oued  Seggucur. 

Si  El  Arbi  répondit  par  une  aulrc  lazzia  faite  sur  l'Oued 
Gharbi. 

Ces  deux  coups  de  main  furent  le  point  de  départ  de  la 
scission  qui,  désormais,  allait  sépiucr  les  (^ulad  Sidi  Cheikh 
en  deux  groupes  à  jamais  irréconciliables. 

Après  une  série  de  combats  indécis,  mais  dans  lesquels 
l'avanlage  resta  finalement  aux  Gheraba,  qui  étaient  sou- 
tenus par  les  Hamyan,  Si  El  Arbi  leur  céda  la  moitié  des 
revemis  de  la  zaouia  des  Oulad  Sidi  Cheikh. 

Si  Sliman  ben  Kaddour  fonda  alors,  dans  le  ksar  Gharbi, 
la  zaouia  de  Si  El  Lladj  Abdelhakem. 

Les  Oulad  Sidi  Cheikh  Cheiaga  se  prétendirent  lésés  par 
la  construction  de  cette  zaouia. 

De  nouvelles  luttes  s'engagèrent  entre  h^s  deux  branches 
et,  finalement,  une  troisième  zaouia,  consacrée  cà  Si  El  Hadj 
Bouhafs,  fut  créée. 

En  1766,  un  accord  finit  par  se  faire  et  on  convint  (|ue 
les  offrandes  seraient  partagées  en  trois  parts  égales  dont 
chacvme  serait  affecté  à  chaque  zaouia. 

Mais,  comme  la  zaouia  principale  de  Sidi  Cheikh  et  celle 
de  Si  El  Hadj  Bouhafs  se  trouvaient  à  côté  l'une  de  l'autre, 
dans  le  ksar  Chergui,  il  en  résulta  que  les  Oulad  Sidi  Cheikh 
Cheraga  eurent,  en  réalité,  deux  parts  et  les  Oulad  Sidi 
Cheikh  Gheraba  une  seule. 


DOCUMENTS  POtn  SERVIM    \  l/mSIOinF  DES  IIVMYAN       163 

(le  l'iiil  iiinciiii  tlt's  riviilil(''>  cl  des  C()iii[»('lili()iis  (l'inlorol 
(|in  cxi^lfiil  encore  de  Il(»^  joui's. 

Lu  i)riiici[)ide  cl  |)rcs(|iie  iiiii(|ii('  liiisoii  qui  [>ous;<a  les 
Ihmiyaii  h  s'inlT'oder,  h  celle  c|)()(]ue,  iiiix  Oulad  Sirli 
("dicikli  (  ilii'iidiii,  --C  li(>ii\e  iliiiis  rolïre  de  iii/zias  c(iii>^liiii- 
le>  (|iie  leur  lil  eiiliexoii   Si  Sliniaii  l»en  Kaddouf. 

« 
*  • 

|ji\ir(iii  (juaiaulc  ans  j)lus  lard,  nous  icliouvons  les 
llaniyaii  Cliafaa  se  metlanl  au  ser\  ice  d "une  autre  force 
inaraboulir|uc,  les  Derkaoua. 

N  ers  179'!,  -Moulay  Sliniau  couiuicuça  à  ié^'"uei  au  Maroc. 

Des  niarabouls  allachés  au  parli  des  Turc>  d'Alger,  les 
khelouatia,  avaienl  fait  leur  ai)pariliou  daus  l'Atlas  et 
suscité  des  uiouvemculs  populaires  qui  douiièrent  cer- 
taines craintes  au  Sultan,  lequel,  pour  y  remédier,  les 
expulsa. 

Désireux  de  se  mettre  en  garde  contre  eu\  e|  andii(ion 
lia  ni  aussi  de  s'agrandii-  vers  l'Rst,  Moulay  Sliman  entra, 
d'une  part,  en  relations  avec  le  bey  de  Mascara,  Moham- 
med el  Kébir,  cl,  en  inême  temps,  échangea  une  correspon- 
dance suivie  avec  le  chcrif  alide  des  Herkaona,  !\îohanin)ed 
el  Arbi,  ennemi  juré  des  Turcs,  qu'il  opposa  aux  Khelouatia. 

Pendant  fpiehpies  années,  Moulay  Sliman  envoya  des 
troupes  et  peiçul  l'impiM  dans  îa  région  des  Béni  Suiissen 
et  sur  Oudjda,  sans  (piaucunc  dilïicidlé  vint  à  se  ])roduiie 
entre  lui  et  le  bey  de  Mascara. 

Subitement,  en  1800,  à  l'appel  d'im  maiaboul  des  Der- 
kaoua. nommé  Abdeikader  ben  Chcrif,  des  révoltes  contre 
les  Turcs  éclatèrent  de  tous  cfMés  dans  la  région  de  l'Ouest 
de  la  Régence  d'Alger.  En  même  temps,  les  Kabyles  des 
Rabors  se  révoltèient  à  leur  t  )ur  à  l'instigation  d'un  chérif 
marocain,  El  Tladj  Mohammed  bcn  El  Arach,  surnonnné 
Bon  Dali. 

l.e  bey  de  Mascara  qui  avait  succédé  à  Mohammed  «^1 
Kébir.  El  Hadj  Mustapha,  ne  put  résister  au  soulè\ fincnl 
d(>s  Derkaoua,  commandés  par  Ben  Chérif. 

Il  fut  battu  à  Eorthassa.  Son  camp  fut  j)ris  et  pillé,  il  se 
retira  sur  Mascara  en  toute  hàtc,  ^é^acua  et  alla  se  retran- 
cher à  Oran. 

Ben  Chérif  profda  de  cette  faute  pour  s'emparer  de  Mas- 
cara et  en  faire  son  quartier  général. 

11  lança  ensuite  des  proclamations  dans  toutes  les  tribus. 


164      DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  L'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

les  appelant  à  la  Guerre  Sainte  contre  les  Turcs,  menaçant 
celles  qui  résisteraient. 

Les  Hamyan  Chafaa  se  jendirent  à  cet  a])pel. 

Les  relations  constantes  qu'ils  avaient  avec  les  gens  de 
Tlemcen,  oii  ils  trouvaient  à  s'approvisionner  en  majeure 
partie  de  grain,  les  avaient  mis  à  même  de  suivre  le  mou- 
venienl  qui  se  prépaiait  depuis  déjà  longtemps. 

On  leur  avait  raconté  que  le  bey  de  Mascara,  El  Hadj 
Khelil,  prédécesseur  de  Mohammed  el  Kébir,  avait  persé- 
cuté les  marabouts  hostiles  aux  Turcs  dans  la  région  de 
Tlemcen  et  que  le  marabout  derkaoui,  Mohammed  ben  Ali, 
avait  lutté  contre  lui  et  avait  réussi,  par  ses  incantations, 
à  le  faire  foudroyer. 

D'autre  part,  les  Tidjania,  (jui  régnaient  en  maîtres  sur 
les  Hauts-Plateaux,  n'avaient  pas  été  non  plus  épargnés 
[)ai-  les  Turcs  et  poussaient  les  tribus  nomades  du  Sud  à  se 
soulever  contre  ces  derniers. 

Enfin  en  sous-main,  le  Sultan  du  Maroc,  Moulay  Slinian, 
entietenait  des  relations  avec  les  insurgés. 

L'insurrection  fomentée  par  les  Derkaoua  gagna  de  plus 
en  plus  du  terrain  ;  tout  le  pays  était  en  révolte  depuis  la 
frontièie  marocaine  jusqu'au  Chélil'f. 

Le  bcy,  Mustafa,  assiégé  dans  Oran,  sollicita  du  Sultan 
Moulay  Sliman  son  intervention  auprès  des  insurgés. 

A  cette  nouvelle,  le  dey  d'Alger  destitua  El  Hadj  Mustafa 
et  le  remplaça  par  un  coulougli  nommé  Mohammed  Mekal- 
lech,  l'ude  homme  de  guerre,  qui  battit  Ben  Chérif  dans 
difféientes  rencontres,  souleva  contre  lui  toutes  les  tribus 
maghzen  et,  à  la  suite  d'un  coup  de  iinain  heureux,  reprit 
la  ville  de  Mascara. 

Ben  Chérif  se  retrancha  dans  la  zaouia  de  Mohammed 
ben  \ouda. 

Attaqué  par  le  bey  Mohammed  Mekallech,  il  subit  une 
défaite  écrasante  et  dut  s'enfuir  dans  la  région  de  la 
Yacoubia  (Sud  de  Saïda). 

Pendant  ce  teuips,  à  Tlemcen,  la  population,  excitée  par 
les  Béni  Ameur,  avait  fait  cause  comnnune  avec  les  Der- 
kaoua, avait  prêté  serment  de  fidélité  au  Sultan  du  Maroc 
et  assiégeait  la  garnison  turque  qui  était  enfermée  dans 
le  Méchouar. 

Mekallech  reprit  Tlemcen  après  avoir  livré  aux  Derkaoua 
inie  grande  bataille  à  l'Oued  el  Ahad. 

Lorsque  le  Sultan  Moulay  Sliman  apprit  le  succès  des 
Turcs,  il  jugea  inutile  de  soutenir  les  Tlemcéniens  et  s'em- 


DOGi'xMKMs  l'orn  sijioin  \  l'iiisK^iiu:  iM>  ii\M>.\\      J(;:» 

ploya  à  les  léconcilici  ;i\cc  le  bcy  de  Mascara,  peiidaiil  .jur 
les  Jiciii  Ameiir  rt' vol  lés  sCiirii\aiciil.  au  Maroc. 

Quoi(iiiil  se  lui  culouré  exciusivcznenl  de  Derkaoua  et 
(|u  il  lie  cessai  pas  dmli  dcuii  ,,,,c  correspondance  suivie 
avec  le  cliérif  dcrkaoïii,  Mohauinicd  Kl  Aibi,  le  .Sultan 
Moulay  Slin.an  ju-ea  plus  pi'oljtal.le  de  cesser  de  s'occupci 
lie  Ja  lutte  entreprise  par  la  confrérie  contre  les  Turcs  et 
prolila  des  embarras  suscités  à  ces  demicrs  pour  partir  faire 
la  conquête  de  Figui»^-  (,1805,),  (pi'il  dcNail  compléter  trois 
ans  plus  tard  par  celle  du  Gourara  el  du  Touat. 

C<>s  pays  furent  contre  les  Turcs,  un  foyer  d'intrigues,  <'t 
le  refuge  de  tous  les  agitateurs  des  diveis'i)avs  de  l'Afriau'- 
du  Nord.  ■  ^    ^ 

Quoique  n'ayant  plus  à  compter  qw  sur  eux-mêmes,  les 
Derkaoua  n'abandonnèicnt  cependant  pas  la  lutte.  Une 
grande  bataille  se  livra  au  Sud  de  Mascara,  dans  la  plaine 
d'Eghris  ;  les  Turcs  y  furent  vainqueurs. 

Une  autre,  livrée  à  la  Djidioua.  égalemenl  malheureuse 
pour  les  Deikaoua,  les  obligea  à  se  réfugier  vers  l'Ouest. 

Le  chef  derkaoui,  Ben  el  Arach,  qui  s'était  joint  à  Ben 
Chérif,  fut  rejoint  par  le  bey  sur  les  bords  de  la  Tafna  et 
fut  lue  au  cours  du  combat  qui  se  livra  à  cet  endroit. 
^    Poursuivis,  les  Derkaoua  furent  écrasés  de  nouveau  à 
Teuta. 

A  ce  moment,  le  dey  d'Alger,  trouvant  que  le  bey  de 
Mascara,  Mohanmied  Makallech,  devenait  trop  puissant,  le 
fit  arrêter  et  étrangler. 

El  Iladj  Mustafa,  (jui  avait  été  son  prédécesseur  mallieu 
reux,  le  remplaça.  C'était  un  homme  trop  faible  et  trop 
peu  énergique  pour  pouvoir  lutter  contre  l'insurrection. 
Les  Derkaoua,  qui  jadis  lui  avaient  enlevé  Mascara,  repri- 
rent l'avantage  et  le  dey  d'Alger  fut  obligé  de  destituer  de 
nouveau  El  Hadj  Mustafa  et  de  mettre  à  sa  place  le  bey  Bon 
Kabous(i8o8). 

Avec  ce  dernier,  les  Turcs  reprirent  à  leur  tour  l'avan- 
tage et  les  Derkaoua  furent  poursuivis  sans  relâche. 

Ben  Chérif,  qui  avait  trouvé  asile  du  côté  de  la  Yacoubia, 
dont  les  marabouts  avaient  pris  parti  poui-  lui,  en  fut  chassé 
par  le  bey  qui  le  rejeta  au  Sud  du  choit  Chergui. 

Ne  trouvant  pas  d'appui  chez  les  Oulad  Sidi  Cheikh,  il 
en  chercha  un  chez  les  Tidjania  et  se  rendit  à  Ain  Mahdi. 

Mais,  voyant  un  rival  en  lui,  les  marabouts  Tidjania  lui 
refusèrent  leur  aide  et  Ben  Chérif  dut  repartir-  vers  l'Ouest 
et  se  réfugier  chez  les  Béni  Snassen. 


166       DOCUMENTS  l'OLiJi  vSEKMl?  A  l'jIISTOIKE  DES  IIAMYAN 

Le  gendre  de  Ben  Chéiif,  Bon  Tcifas,  continua  la  lutte 
et  se  révolla  à  son  tour,  efntraînant  derrière  lui  les  Trara. 
Il  fut  bat  lu  paj'  le  bey  Bou  Kabous,  mais,  au  retour  de  cette 
expédition,  la  colonne  luiqiie  fut  décimée  par  la  neige  et 
rentra  en  désordre  à  Tlemccn,  après  avoir  abandonné  en 
route  la  plupart  de  ses  bagages. 

A  la  suite  de  cette  expédition,  il  se  passa  un  fait  diiricile 
à  expliquer.  Le  bey  Bou  Kabous  s'alTilia  secrètement  aux 
Derkaoua,  pactisa  avec  le  Sultan  Moulay  Sliman  et,  lors- 
({ue  le  dey  d'Alger  voulut  l'envoyer  dans  l'Est  contre  le  bey 
de  Tunis,  qui  venait  de  se  révolter,  refusa  de  marcher. 

Un  caïd  des  environs  de  Tlemcen,  nommé  \li  Karaba- 
ghli,  prit  parti  pour  les  Turcs,  s'enferma  dans  Nédromah 
et  résista  aux  insurgés.  Le  dey  d'Alger  envoya  Omar  Agha 
pour  rétablir  l'autorité  turque. 

Celui-ci,  aidé  par  Ali  Karabaghli,  s'empara  du  bey  Bou 
Kabous,  venu  à  Oran  pour  s'approvisionner,  et  le  fit  déca 

pi  ter. 

Ali  Karabaghli  fut  nommé  bey  et  la  paix  fut  maintenue, 
par  la  terreur,  pendant  qiiehpie  temps  dans  toute  l'Oranie. 

En  1816,  le  derkaoui  Bon  Chéri f  reparut,  souleva  une 
partie  des  nomades  du  Sud  et  les  llarrar,  marcha  de  nou- 
veau contre  les  Turcs,  fut  encore  battu  et  se  retira  définiti- 
vement à  Figuig. 

Les  nomades  du  Sud  qui  avaient  suivi  sa  fortune  et, 
parmi  eux,  les  liamyan  Chafaa,  voyant  baisser  le  prestige 
des  marabouts  derkaoua,  cessèrent  de  prendre  part  à  la 
lutte. 

*  * 

LesTidjania,  dont  l'innuence  sur  les  TIauts-Plateaux  était 
aussi  considérable  que  celle  des  Derkaoua  dans  le  Nord, 
n'avaient  pas  été  mieux  liaités  par  les  Turcs. 

Le  grand  marabout  d'Ain  Mahdi,  Tidjani,  avait  été 
chassé^'par  le  bey  Mohammed  el  Kébir  de  sa  zaouia,  puis  de 
Bousemghoun  oii  il  s'était  réfugié. 

Obligé  de  fuir  au  Maroc,  il  avait  été  très  bien  accueilli 
par  le  Sultan  Moulay  SUman  qui  lui  avait  donné,  à  Fez,  un 
de  ses  palais  pour  y  fonder  une  zaouia. 

Le  marabout  était  décédé  dans  cette  zaouia  en  i8i4. 

Tes  deux  fils  d'Et  Tidjani,  revenus  à  Ain  Mahdi,  à  la 
mort  de  leur  père,  étendirent  très  rapidement  leur  influen- 
ce dans  les  ksour  du  Sud-Oranais. 


a 


DOC  I  MF  M  s  l'OI   |<  SKMNIli    \   l.'niSlorKK  |»i:s  ii\\n  \\       107 

Les  'J'uifs  ne  l.irdrrcnl  |i;i-  i~i  piriidii'  (  uiiln  ii^jr  de  ce 
ii*)ii\  l'iiii  |)i  iii\  oir. 

I.c  liCN  (ic  Miixaiii,  lliissiiii,  successeur  d'Ali  K;uab:j<_rhli, 
lit  luer  tous  les  iiiokiidenis  de  cet  ordre  (|u"il  put  suipicii- 
dr'e.  puis  uiarchii  sur  \ïri  Mididi.  Il  sultil  un  ('cliee  cl  dut 
revenir  vers  le  Tell. 

Deux  ans  plus  lard,  le  \n\  de  Tillcii.  Hun  Mczraq, 
échoua,  lui  aussi,  devant  la  /aouia. 

Les  Tidjaiiia  attacjuèrent  alois  à  leur  tour  les  Turcs  et 
lirent  des  incursions  dans  le  Sud-Oranais. 

Ln  iS-îG,  les  llacheni  se  lévoltèrent  et  aj)[)elèrent  Tidjani- 
à  leui'  tête.  Celui-ci,  après  avoir  essayé,  en  vain,  de  s'em- 
parer de  Mascara,  l'ut  bat  lu  pai-  le  bey  d'Oran  cl  lue. 

Les  Tidjania  abandonnèrent  la  Itille.  mais  ne  furent  pas 

poursuivis  par  les  Turcs. 

* 
*  * 

Si  nous  avons  cru  devoir  insister  sur  ces  très  importimts 
mouvements  maraboutiques  qui,  quoique  certaines  frac- 
tions d(^s  llamyan  y  aient  été  mêlées,  sortent  de  Lhi-toire 
particulière  de  cette  confédération,  c'est  (jue  les  faits  qui 
ont  été  racontés  indiquent,  d'une  façon  très  précise,  îa 
manière  dont  furent  iiouv<Mnés  les  nomades  du  Sud  avant 
l'occupation  française. 

Deux  pouvoirs  rivaux  se  sont  constitués:  celui  des  Chérifs 
et  celui  des  Turcs  d'Âlg-er. 

('es  deux  pouvoirs  diu'ent  leur  fortune  à  une  léaction 
religieuse  contre  les  victoires  des  Chrétiens  qui  avaient 
chassé  les  Musulmans  d'Ibérie,  et  contre  les  entreprises  des 
Portugais  et  des  Espagnols  sur  les  côtes  de  l'Afrique  du 
Nord. 

TIs  ne  purent  s'établir  que  grâce  à  l'influence  des  con- 
fréiies  et  des  marabouts. 

Les  Turcs  et  les  Chérifs  étaient  fatalement  appelés  à 
entrer  en  lutte  les  uns  contre  les  autres. 

Les  Turcs  représentaient  les  sultans  de  Stamboul  :  les 
Chérifs,  issus  de  la  famille  du  Prophète,  représentaient, 
pour  les  populations  de  l'Afrique  du  Nord,  un  Gouverne- 
ment constitué  d'après  les  traditions  les  plus  pures  de 
l'Islam. 

Les  tribus  arabes  et  les  tribus  berbères,  jamais  bien  assi 
ses  les  vmes  à  côté  des  autres,  favorisèrent  tantôt  l'un,  tantôt 
l'autre  des  partis. 

Les  tendances  des  populations  nomades,  chez  qui  le  refus 


168       DOCUMENTS  l'Ol  K  SEIO  IK  A  l'iUSIOIHE  DES  IIAMYAN 

de  l'impôl  a  toujours  élé  considéré  connue  le  plus  sacré  des 
devoirs,  visaient  à  rindé])endance  absolue. 

Seule  l'inlluence  marabout ique  fui  (•a[)able  d'enrayer 
l'anarchie. 

C'est  pourquoi  les  sultans  marocains  envoyèrent  dans 
tout  le  Sud-Oranais  des  maiabouts,  agents  des  zaouia  de 
Fez,  pour  exciter  partout  les  populations  contre  les  Turcs 
et  foment(;r  des  révoltes.  Les  beys  ne  purent  recouvrer  les 
impôts  dans  ces  régions  qu'à  condition  d'aller  les  cherchei 
avec  de  fortes  colonnes  militaires. 

Enfin,  obligés  de  faire  face  de  tous  les  côtés,  attaqués 
par  Tunis  à  l'Est,  par  les  Espagnols  à  Oian,  par  les  Kabyles 
au  centre,  les  Turcs  durent  abandonner  à  peu  près  entière- 
ment le  Sud  ei  se  conlcnler  de  chercher,  dans  la  grande 
famille  des  Ouiad  Sidi  (_>heikh,  un  appui  contre  les  autres 
intluences  chérifiennes  ou  maiaboutiques. 

Les  sultans  marocains  ne  inancpièrent  pas,  à  plusieurs 
reprises,  de  profiter  de  celte  situation  embarrassée  de  leurs 
rivaux  pour  incursionner  sui'  les  llauts-Plateaux  Oranais, 
dans  les  ksour  et  aux  oasis.  Ils  opposèrent,  d'autre  pari, 
clandestinement,  marabouts  contre  marabouts  ;  ils  furent 
les  soutiens  des  Derkaoua  dans  le  Nord  et  ceux  des  Tidjania 
dans  le  Sud. 

Ils  firent  aussi  appel  à  rambition  des  grandes  familles 
locales,  leur  délivrant  des  cachets  et  des  diplômes,  leur  pro- 
mettant des  charges  importantes  futures. 

Les  Nomades  du  Sud  en  profilèrent  pour  refuser  le 
paiement  de  l'impôt  à  tout  pouvoir  constitué  en  dehors  de 
celui  des  marabouts. 

A  l'égard  des  Turcs,  ces  populations  se  déclarèrent  maro- 
caines ;  à  l'égard  du  sultan  de  Imv,,  elles  se  prétendaient 
sur  le  territoire  turc. 

Nous  retrouvâmes  les  mêmes  procédés  au  début  de  la 
conquête  française,  principalement  chez  les  Hamyan  K 

* 
*  * 

Lorsque  El  Iladj  Abdelkader  parut  dans  la  province 
d'Oran,  les  Hamyan  en  parcouraient  la  partie  méridionale, 
depuis  les  régions  de  Tlemcen  et  de  Debdou,  jusqu'au  Tafi- 


I  Cf.  A.  Cduk  :  n.v/MK/frs  cliérificiiiu-s.—  Il  y  n  lit-ii  df  noter  rinlluenro 
qu'exeivont  encore  de  nos  jours,  cliez  les  llainviin,  les  nKinilxmts  de  Kenadsa  el 
de  Kerzaz.  Lorsqu'une  difficulté  sérieuse  surgit  entre  deux  familles,  le  marabout 
Si  Brahim,  de  Renadsa,  est  généralement  pris  comme  arbitre. 


DOCUMENTS  V0\  \\  SKUMI\  A  l.'lMSKMru;  DKS  ;i\MV\.\       \H[) 

laloL  cl  au  louai.  Lcuiî;  ])uinls  d'eau  claiciil  à  peu  près  les 
suixauls  :  rendrai  a  Cîhaibia,  Ogial  Cedia,  Foum  Bezouz, 
l()u>  ceux  des  eliolLs  (iliaibi,  (llu'ryiii  <'l  l'ij^ni,  dAïu  Chair, 
d  Aïu  el  Oiak.  De  iioiui)i<'u\  llani\au  possédaient  des  pn;- 
piiélés  à  liou  Anaii,  El  lladjoui,  au  Medaghia  et  à  Figuig. 

Après  le  Irailé  de  ibo'>,  Abd-el-Kailer  organisa  son  Elat  ; 
les  tribus  llani;^an  revurcnt  des  caïds,  chefs  politi(pies  et 
militaires  nommés  par  l'Emir,  (^est  ainsi  que  Mebkhout 
Ould  Ahmed  commanda  a\i\  (Julad  ^hlnsuul•ah,  Demmou- 
che  Ould  Abdallah,  auv  Oulad  Khelif,  Ahmed  lien  Abdal- 
lah, aux  Akerma,  Bou  Smaha  Ben  Maachou,  aux  Béni 
Metharcf,  Aliloud  Ould  Laïredj,  aux  Meghouiia,  Moham- 
med Ben  i)if  AUah,  aux  Oulad  l\)umi  et  ^Mohammed  Ben 
Amara,  père  de  lagha  honoraire  El  lladj  Kaddom,  aux 
Bekakra. 

11  y  a  lieu  de  signaler  l'inlluence  dont  jouissait  déjà,  y 
celte  époque,  Mebkhout,  dont  on  lit  plus  tard  un  agha. 
u  C'était  lui  qui  était  chargé  de  négocier  d'abord  avec  les 
n  Turcs,  ensuite  avec  les  Français  ;  mais,  une  fois  rentré 
u  dans  sa  tribu,  il  devenait  simple  particulier  et  il  n'exer- 
«  çait  une  réelle  inlluence  que  dans  sa  fraclion.  »  '.Lettre 
de  la  Division  d'Oran,  ii  octobre  1869J. 

Dans  la  guerre  incessanle  qu'il  engagea  contre  nos  trou- 
pes, l'Emir  trouva  dans  les  llamyan  de  précieux  auxiliaire:; 
ils  durent,  cependant,  l'abandonner  momentanément  pour 
se  défendre  contre  les  troupes  du  Sullan  du  Maroc.  Lorsque, 
poursuivi  par  les  colonnes  françaises,  Abd-el-Kader  se  dé- 
cida à  se  rapprocher  du  Maroc,  sa  défaite  au  combat  de 
rOued  Melah  (11  novembre  i843)  réduisit  ses  troupes  à 
quelques  centaines  de  cavaliers  ;  avec  eux,  il  se  jeta  en 
désespéré  sur  les  Hamyan,  les  surprit  et  fit  sur  ces  derniers 
un  butin  considérable,  qui  lui  permit  de  pourvoir  pour  un 
moment  aux  besoins  des  siens.  Il  profita  alors  de  la  proxi- 
mité du  Maroc  pour  renouer  des  relations  avec  le  sultan 
Abder-Rahmane. 

Sa  smala,  considérablement  diminuée,  prit  le  nom  de 
((  Deïra  )>  (du  mot  douar)  ;  il  s'installa  près  d'Aïn-Ben- 
Khelil  et  obligea  les  Hamyan  à  lui  fournir  des  contingents 
(juil  lança  sur  les  tribus  des  Laghoual  et  sur  les  Oulad 
Ziad  Gheraba,  qui  perdirent  dans  celte  affaire  leur  chef, 
Ahmed  ben  Ameur. 

En  i8fi!i,  le  général  Lamoricière  établit  un  camp  per- 
manent à  Saida  et  un  autre  à  Sebdou  ;  un  poste  fut  créé  à 
Tiaret.  Abd-el-Kader  voulut  reprendre  la  lutte  ;  ne  trou- 

12 


170       DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  L  HISTOIRE  DES  HAMYAN 

vant  pas  d'éléments  suffisants  dans  le  Sud-Oranais,  il  se 
rendit  au  Maroc  et  parvint,  sous  un  prétexte  religieux,  à 
entraîner  le  Sultan  contre  nous.  Mais,  après  le  bombar- 
dement de  Mogador,  Abder-Ualimane  abandonna  la  cause 
de  l'Emir  en  signant  le  traité  de  Tanger  ;  une  clause  mettait 
Abd-el-Kader  hors  la  loi  dans  tout  le  Maroc  et  en  Algérie  i. 
Chassé  du  Maroc,  Abd-el-Kader  se  réfugia  chez  les  Béni 
Guil.  Le  3o  janvier  i845,  un  de  ses  djiouch  faillit  enlever 
en  plein  jour  le  poste  de  Sidi-bel-Abbès,  et  le  général  Lamo- 
ricière,  pour  protéger  la  vallée  de  la  Mékerra,  dut  établir 
un  camp  permanent  à  Daya.  Le  mois  suivant,  l'Emir  pas- 
sait en  personne  au  Nord  du  chott  El  Gharbi,  ralliant  en 
route  les  tribus  des  Hauts-Plateaux  ;  il  marchait  dans  la 
direction  de  la  vallée  supérieure  du  Chélilf.  Mais  il  trou>^a 
le  chemin  fermé  par  les  colonnes  Cavaignac  dans  le  Sud 
de  Tlemcen,  Lamoricière  dans  le  Sud  de  Mascara  et  Géry 
dans  la  région  saharienne  ;  il  lui  fallut  reprendre  la  route 
de  la  Deïra  sans  avoir  pu  tenter  le  moindre  raid.  Dans  les 
années  qui  suivirent,  bien  qu'il  sentit  sa  cause  compr.> 
mise,  il  continua  la  guerre  de  partisans,  à  laquelle  il  était 
réduit  depuis  le  désaveu  qu'il  avait  reçu  du  Sultan   du 
Maroc,  jusqu'au  jour  où  il  dut  se  rendre  au  duc  d'Aumaie 
Nous  hésitions  encore  à  aborder  ces  régions  ;  c'était  poui 
nous  le  seuil  du  désert,  où,  croyions-nous,  nos  troupes  ne 
pouvaient  s'aventurer  sans  de  grandes  difficultés  et  où  les 
Turcs,  nos  prédécesseurs,  n'avaient  fait  que  passer.  On  se 
contenta  d'imposer  les  troupeaux  ;  c'est  ainsi  que  dans  une 
lettre  en  date  du  lo  janvier  i845,  le  général  Lamoricière, 
commandant    la    Division    d'Oran,    rendit    compte    que 
«  l'agha  Taveb  ben  Guernia  avait  été  envoyé  avec  une 
((  centaine   de   chameaux   chez   les   Hamyan   Cheraga    et 
<(  Gheraba,  pour  faire  acte  d'autorité  sur  eux  en  réclamant 
((  le  paiement  de  l'impôt  zekkat.  »  On  s'explique  dès  lors 
pourquoi  le  traité  signé  le  i8  mars  i845  détermina  si  défa- 
vorablement pour  nous,  comme  nous  le  verrons,  le  sort 
des  Hamyan. 

I  L'Emir  Abd-el-Kader  avait  aussi  essayé  de  rallier  à  sa  cause  la  Confétlé- 
ration  des  Amour.  N'ayant  pu  y  parvenir,  il  les  avait  fait  raz/.ier  à  Galloul 
et  à  Forthassa  Gharbia,  par  les  Hamyan  Chaafa. 

Pour  .e  ven-er,  les  Amour  surprirent  les  Hamyan  au  moment  du  retour 
de^  caravanes  du  Gourara  et  raz.ièrent  les  Oulad  Khalif  à  Oglat-et-Tine,  au  Sud 
d'Aïn-Beu-Khelil.  Un  mois  plus  tard,  ils  attaquèrent  de  nouveau  les  Hamyan 
à  Rarnoug  et  leur  enlevèrent  un  butin  considérable. 

A  la  suite  de  ces  faits,  une  trêve  passagère  fut  conclue  à  Figuig  entre  Amour 
et  Hamyan. 


DOCUMENTS  l'orii  si;ii\iii  \  I  'msroihi:  ins  iiwn  w      171 

Notr  (-oinpl<'iHentair<>  sur  Irs  Icirciidcs  aiuinini's 
relatives  aux  llaiiivan 


Si  .MoliaiiuiH'd  ()iiltl  MiiiiiiKir  Hcn  Dalioii,  caïd  du  ksar 
de  Mog^hur  Tahlani  (aiiMcxo  dAïn-Sefraj,  a  cuinposL'  un 
intéressant  travail  encore  inédit  sur  les  origines  ('l  l'iiistoire 
de  son  ksar. 

Nous  en  avons  extrait,  à  titre  de  curiosité,  les  quelques, 
passages  ci-dessous  qui  se  rapportent  aux  origines  géné- 
rales   et    aux    relations    des    llamyan    avec    les    gens    de 
l'Extrême-Sud  : 

«  Dans  les  temps  anciens,  il  existait  dans  le  Sahara  des 
<(  populations  diverses.  Elles  étaient  réparties  à  Figuig  cl 
«  ses  environs,  à  Moghar,  Bou  Semghoun  et  le  Sahaia  et 
<(  habitaient  soit  dans  les  montagnes  ou  les  vallées,  soit 
«  dans  les  hammada  ou  les  espaces  désertiques.  Ces  peu- 
<<  pies  avaient  des  mœurs  distinctes  en  ce  qui  concerne 
«  l'alimentation  et  l'habitation.  Ils  étaient  païens,  n'a- 
((  valent  point  de  livres  saints  ;  nul  prophète  ne  leur  avait 
«  exposé  de  doctrine.  Les  uns  portaient  le  nom  de  <v  Ro 
((  mains  »,  d'autres  étaient  les  "  Majous  »  ou  adorateurs 
«  du  feu. 

((  Ils  avaient  coutume  de  construire  leur  maison  de  telle 
((  sorte  que  ^indi^idu,  lois(|u'il  se  trouvait  dépourvu  de 
«  vivres,  pouvait  s'ensevelir  sous  les  ruines  de  sa  demeure. 
«  Les  Majous  pratiquaient  une  forme  d'union  incestueuse  : 
«  ils  épousaient  leurs  lilles  ;  le  frère  et  la  sœur  se  mariaient 
«  ensemble.  Ils  étaient  vêtus  de  peaux  de  bêtes  et  de  plumes 
«  d'oiseaux;  les  pauvres,  parmi  eux,  se  couvraient  de  feuil- 
((  les  d'alfa  et  de  drinn  tressées.  Leur  nt>iuriture  consistait 
((  en  gros  gibiei-  et  en  nebeg  (baie  de  jujubier  sauvage  : 
«  sedra).  Ils  faisaient  une  huile  iwoc  le  guedin  et  leur  pain 
<(  était  à  base  de  farine  de  drinn.  Ils  apprêtaient  aussi  les 
«  herbes  qui,  à  cette  époque,  grâce  à  la  fréquence  des 
«  pluies,  étaient  très  abondantes. 

<(  Ces  peuples  vivaient  entièrement  séparés  les  uns 
((  des  autres,  n'ayant  aucun  rapport,  et  n'exerçant, 
«  les  uns  vis-à-vis  des  autres,  aucune  violence.  Ils 
«  n'avaient  point  de  souverain  (Ui  de  chefs  ;  et  nulle 
«  oppression,  nulle  iniquité  ne  s'appesantissaient  sur  eux. 


172      DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

«  Préoccupés  uniquement  de  leur  subsistance,  chacun 
u  d'eux  recueillait,  suivant  les  époques,  les  baies,  les  grai- 
«  nés  ou  les  herbes  qui  lormaient  la  base  de  leur  alimen- 
«  tation.  Leur  boisson  leur  était  fournie  par  l'eau  des 
«  sources  et  non  pas  par  leau  des  r'dirs. 

<(  Ces  autochtones  étaient  de  très  grande  taille  ;  par 
((  contre,  leurs  femmes  étaient  minces  et  courtes  Elles 
((  avaient  les  cheveux  abondants  et  les  yeux  bleus.  Elles  se 
((  couvraient  de  fourrures  ou  de  peaux  de  renard,  de  chacal, 
<i  de  hyène  et  de  lièvre.  Elles  préparaient  une  trame  de 
((  drinn  et  d'alfa  dont  les  hommes  se  revêtaient. 

«  On  raconte  que  ces  peuples  furent  décimés  par  un 
((  cataclysme.  Cependant,  une  partie  de  leurs  descendants 
«  survécut  et  habita  le  pays  qui  devint  désert  après  leur 
«  disparition.  Alors  arrivèrent  les  Ghleuh,  tribu  de  Ber- 
ce bères  Zouaoua  et  Ibadites.  Puis  ceux-ci  furent  subjugués 
(c  par  des  Arabes  des  Béni  Hilal,  Béni  Hachem,  Koréïchites, 
((  Haoumin,  Béni  Mekhzouni,  qui,  depuis  Tunis,  courbè- 
<(  rent  sous  leur  loi  les  lierbères.  Ces  derniers  fuyaient 
<{  devant  les  envahisseurs  qui,  parvenus  aux  monts  du 
«  Gharb,  s'installèrent  dans  le  Tell  et  le  SahcU'a,  conver 
((  tissant  à  la  Foi,  par  le  fer  et  le  feu,  tous  les  indigènes 
«  qu'ils  rencontraient.  Certains  Berbères  purent  gagner 
((  Figuig.  Le  pays  compris  entre  le  Guir  et  l'Oued  Segueur 
«  était  alors  occupé  par  les  Arabes  Béni  Ameur. 

((  C'est  au  iv*'  siècle  de  l'Hégire  que  les  Arabes  pénétrè- 
«  rent  en  Ifrikiya  et  se  répandirent  de  Tunis  à  Fez  et  Marra- 
((  kech,  lutlant  contre  les  Berbères  Zouaoua  et  Ibadites  qui 
«  sont  tous  des  Chleuh  et  qui  fureait  chassés  des  monts  et 
((  des  plaines. 

«  La  contrée  qui  forme  actuellement  les  cercles  de  Mé- 
'(  chéria,  d'Aïn-Sefra,  de  Figuig  et  de  Géryville  était  le  pays 
«  des  Béni  Ameur  qui  y  pratiquaient  la  culture  et  y  pros- 
((  péraient.  Au  vf  siècle,  ces  Béni  Ameur  émigrèrent  vers 
«  le  Tell,  du  côté  de  l'Oued  Melghir,  de  Sidi-bel-Abbès,  de 
((  Zefizef  et  du  Djebel  Filouïn.  Une  partie  d'entr'eux, 
'(  cependant,  les  Hamyan,  restèrent  dans  la  contrée  qu'ils 
«  peuplèrent. 

((  D'après  ce  que  nous  avons  appris  (et  Dieu  sait  mieux 
((  que  nous  toutes  choses),  la  descendance  des  hérétiques 
«  s'est  perpétuée  à  Figuig  ;  on  dit  que  des  descen- 
«  dants  des  Bomains  se  trouvent  à  Kçar  el  Abid  de  Figuig  ; 
<(  il  y  aurait  aussi  des  Ibadites,  ainsi  qu'à  Chellala  Dah 
((  rania. 


i 


DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l/lîTSIOinK  DES  HAMYAN       173 

«  Certains  Poinains  vivaient  sous  la  tente  comme  les 
«  Arabes.  Ils  possédaient  des  éléphants  qui  leur  servaient 
«  pour  leurs  transports  et  leurs  mirriations  et  ils  avaient 
<(  un  très  «,nand  nombre  de  ces  pachydermes  dont  la  vente 
((  leur  procurait  des  ressources  considérables.  Ils  avaient 
«  aussi  des  bœufs  et  des  moutons  ;  ces  derniers  étaient, 
«(  comme  les  mouflons,  dépourvus  de  laine  ;  on  les  nom- 
«  mait  u  jirafiya  ».  Tls  avaient  sur  le  sommet  de  la  tele 
«  deux  cornes  branchues.  Ces  animaux  donnaient  du  lait 
«  comme  les  vaches. 

«  r.es  peuples  précités  se  servaient,  pour  leurs  échanfres, 
«  de  disques  de  poudre  d'or  ;  chacune  de  ces  pièces  de 
((  monnaie  équivalait  à  cent  douros  (sesterce  ?).  Ils  fon- 
ce daient  le  minerai  d'or  sur  du  fer  rougi  et  utilisaient  le 
«  précieux  métal  pour  faire  des  bijoux. 

'<  Les  noms  des  «  Romains  »  et  ceux  des  «  Païens  >< 
<(  étaient  les  mêmes.  Leurs  demeures  et  leurs  tombeaux 
«  ont  été  désignés  sous  le  nom  de  «  Arjam  •»,  «  Ajdar  )>, 
((  Kerkour  ».  C'est  une  même  désignation  qui  s'est  con- 
((  servée  jusqu'à  nos  jours. 

i(  T.orsque,  dans  l'ancien  tem[)s,  certains  individus  en- 
«  treprirent  des  fouilles  dans  le  pays,  ils  découvrirent  des 
«  cadaATCs  sous  l'amas  de  matériaux  qui  les  recouvraient. 
<(  Ces  cadavres  étaient  revêtus  de  leurs  vêtements  et  d'" 
«  leurs  ornements  d'or  et  d'argent  :  à  leurs  côtés,  leurs 
«  armes. 

«  Les  kerkours  sont  construits  comme  des  maisons,  au 
((  moyen  de  pierres  superposées  en  cercle.  A  l'intérieur, 
<f  ainsi  que  nous  l'avons  dit,  on  découvre  des  squelettes, 
«  des  cendres  et  du  bois,  des  ustensiles  de  cuisine  brisés. 
«  Lorsque  1rs  décombres  recouvrent  des  ossements  fémi- 
"  nins.  on  voit,  autour  des  os  des  bras  et  des  jambes,  des 
"  bracelets  d'argent  ou  d'or,  de  corne,  de  bois  de  laurier 
((  Les  kholkhals  ('bracelets  de  cheville')  sont  aussi  en  un 
((  métal  usé,  jaune  comme  le  cuivre.  Tout  cela  est  détérioré, 
«  sans  aucune  valeur  et  inutilisable,  sauf  l'or  qui,  dégagé 
«  de  sa  gangue,  a  un  éclat  analogue  à  la  lueur  d'un  feu 
"  dans  la  nuit. 

"  Les  Arabes  de  nos  tribus  se  désintéressent  de  ce  genre 
"  de  fouilles.  Ceux  d'entr'eux  qui,  d'aventure,  ont  fait  de 
"  nos  jours  des  recherches  dans  quelques-uns  des  monu- 
((  ments  funéraires  sus-mentionnés,  n'y  ont  plus  rien 
"  trouvé.   » 


174      DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAIV 

Après  avoir  exposé  comment  furent  créés,  dans  une 
région  fréquentée  en  hiver  par  les  Hamyan,  le  ksar  et 
l'oasis  de  Moghar,  le  caïd  Si  Mohammed  Ould  Maamar  Ben 
Dahou  raconte  ce  qui  >uit  : 

«  Les  tribus  Hamyan,  qui  étaient  venues  dans  le  pays, 
((  trouvèrent  l'Oued  Moghar  habité.  Les  habitants  de  la 
«  nouvelle  agglomération  offrirent  une  diffa  aux  notables 
«  Hamyan.  Ceux-ci  se  montrèrent  très  satisfaits  de  voir  le 
«  pays  peuplé  et  invitèrent  à  leur  tour  les  habitants,  leurs 
((  enfants,  leurs  nègres  et  toutes  les  personnes  qui  se  trou- 
((  valent  avec  eux,  à  une  diffa  dans  leur  campement.  Ce  fut 
«  l'origine  de  l'amitié  des  deux  collectivités.  Elles  échan- 
«  gèrent  le  serment  de  foiiner  une  alliance  étroite  et  de 
((  se  prêter  mutuellement  main-foite  en  toutes  les  circons- 
((   tances. 

«  Par  suite  de  cet  accord,  les  Hamyan  creusèrent  des 
((  silos  chez  leurs  amis.  Chaque  année,  lorsqu'ils  rentraient 
((  du  Sahara,  vers  le  Nord,  ils  entreposaient  chez  ces  ksou- 
((  riens,  dans  leurs  silos,  de  la  laine,  du  beurre.  Quand  ils 
((  effectuaient  une  marche  inverse,  c'est-à-dire  redescen- 
«  daient  du  Tell  dans  le  Sahara,  ils  déposaient  entre  les 
«  mains  des  gens  de  Moghar  leur  blé  et  leur  orge.  Ces  der- 
((  niers  trouvaient  ainsi  chez  leurs  alliés  la  facilité  d'acheter 
f(  les  céréales  nécessaires  à  leur  subsistance  et  à  l'ensemen- 
«  cément  de  leurs  champs.  D'autre  part,  ils  avaient  coutu- 
«  me  d'acheter,  aux  tribus  nomades,  des  chameaux  qu'ils 
((  confiaient  aux  Hamyan  pour  les  faire  pâturer  ou  aller 
<(  sur  les  marchés  lointains  et  s'approvisionner  en  grains. 
<(  Chaque  année,  les  chameaux  des  deux  groupes  amis  >e 
<(  rendaient  à  Figuig,  .sous  la  conduite  des  Hamyan,  et 
«  rapportaient  des  dattes  et  des  rejets  de  palmiers.  C?s 
«  rejets  étaient  plantés  à  Moghar  ;  les  noyaux  des  dattes 
((  consommées  étaient  semés.  Le  sol  étant  propice,  la 
((  palmeraie  se  développa  rapidement. 

«  Le  nombre  de  la  population  s'accrut  aussi,  car  plu- 
«  sieurs  des  occupants  attirèrent  auprès  d'eux  nombre  de 
«  leurs  amis.  On  compta  bientôt  3o  maisons. 

<(  Les  habitants  de  Moghar  étaient  braves  et  généreux. 
«  Ils  donnaient  aussi  largement  l'hospitalité  qu'ils  com- 
«  battaient  sans  répit  les  inicpiités.  Par  leur  vaillance,  ils 
«  avaient  rendu  puissante  leur  petite  cité.  Hs  ne  se  permet 
«  talent  aucune  déprédation  ;  quand  un  rapt  d'animaux 
((  était  commis,  ils  n'avaient  de  cesse  c|u'ils  eussent  atteint 


DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  IIAMYAN       175 

«  et  tué  les  malfaiteurs.  Ils  rentraient  en  {iossessio/i  de  tous 
((   les  atiiuiaiix  (|ui  leur  étaient  volés. 

«  Les  llain\;ui  étaient  leurs  défens<'urs  contre  les  tribus, 
«  ils  les  considéraient  comme  leurs  frères.   » 

*  * 

«  Dans  les  premiers  jours  d'avril,  lorsrjue  les  llamyan 
«  quittaient  le  Sahara  et  remontaient  vers  le  Nord,  ces 
((  vastes  steppes  demeuraient  absolimient  désertes  jusfju'en 
«  octobre,  c'est-à-dire  pendant  la  période  des  chaleurs. 
«  Dans  celte  solitude  que  personne  ne  venait  troubler",  les 
«  autruches  se  multipliaient  et  formaient  de  nombreux 
('  troupeaux.  Tout  troupeau  comprenait  environ  une  cin- 
('  quantaine  de  têtes,  mâles,  femelles,  autruchons.  T.es 
«  habitants  de  l'Oued  Mosrhar  se  livraient  à  la  chasse  de  ces 
'<  coureurs  et  durant  toute  la  saison  chaude,  ils  y  ti'ouvaient 
(1  leur  vie  ;  ils  se  nourrissaient  de  la  chair  des  oiseaux  tués, 
«  vendaient  leurs  plumes,  et,  de  leur  graisse,  préparaient 
«  une  huile  qu'ils  appelaient  «  zahen  »  et  qui  avait  la  pro- 
('  priété  de  guérir  les  maux  de  quiconque  l'absorbait. 

«  En  outre,  l'antilope  bubale  abondait  ;  on  en  trouvait 
«  des  troupeaux  aussi  nombreux  que  des  troupeaux  de 
«  moutons.  De  même,  la  gazelle,  l'antilope  addax  et  l'ona- 
«  gre.  Aussi,  la  chasse  fournissait-elle  la  viande  nécessaire 
«  aux  repas  matin  et  soir.  Enfin,  les  abeilles  étaient  en 
«  grande  quantité  et  le  miel  était  aussi  abondant  que  l'eau. 
«  Les  gens  de  Moghar  étaient  seuls  à  le  récolter,  comme 
«  ils  étaient  seuls  à  chasser.  Dans  de  pareilles  conditions 
«  d'existence,  ils  n'étaient  jamais  malades  ;  la  chair  des 
«  animaux  sauvages,  l'huile  «  zahen  »  et  le  miel  les  préser 
«  valent  de  tous  les  maux  ;  la  mort  de  vieillesse  venait 
«  seule  les  surjirendre.  A  l'abri  de  la  maladie  et  du  souci, 
((  ils  atteignaient  les  limites  extrêmes  de  la  vie  humaine  : 
((  ils  vivaient  plus  d'un  siècle.   » 

'<  Quelques  années  après  la  mort  de  Sidi  Cheikh,  quand 
"  les  «  Zegdous  »  '  se  sont  rendus  dans  l'Est  pour  se  ven- 
"  ger  des  Hamyan  et  des  Trafis,  ces  Zegdous  sont  passés 
<'  par  Moghar  Tahtani,  où  ils  ont  enlevé  tous  les  moulons 
«  et  les  chameaux  et  où  ils  ont  massacré  un  grand  nombre 


1   Pour  r.'issociiition   comme  sous   le   nom   de   Zegdoii,  formée   spécialement 
contre  les  Hamyan,  voir  plus  loin. 


176      DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

<(  d'habitants.  Les  Zegdous  ont  en  eux-mêmes  plus  de  cent 
«  hommes  tués.  Le  sièg'e  de  Moefhar  par  les  Zegdous  a  duré 
((  huit  jours.  Pendant  ce  siège,  les  habitants  de  Moghar 
«  ont  creusé  dans  leurs  maisons  des  silos  dans  lesquels  ils 
«  ont  placé  leurs  céréales  et  leurs  objets  mobiliers,  puis, 
<(  profitant  d'une  nuit  sombre,  ils  se  sont  tous,  hommes, 
((  femmes  et  enfants,  enfuis  dans  le  Djebel  Mekter,  à  Aïn- 
«  Amba.  Le  lendemain  matin,  tous  les  Zegdous,  cavaliers 
«  et  piétons,  sont  entrés  dans  le  ksar  et  n'ont  rien  trouvé. 
"  Ils  ont  détruit  quelques  maisons  et  ont  abandonné 
«  ensuite  Moghar.  Les  ksouriens  sont  rentrés  chez  eux  çt 
(c  ont  reconstruit  les  maisons  démolies. 

«  Les  Zegdous  recommençaient  cette  attaque  tons  les 
«  ans  ;  aussi,  les  habitaants  do  Moghar  envoyaient-ils  n 
<(  Figuig  un  assas  (sentinelle),  chargé  de  signaler  la  harkn 
((  à  Figuig.  Au  signal  de  Tassas,  les  habitants  de  Moghar 
((  enfermaient  leurs  biens  dans  les  silos  et  s'enfuyaient  ^lan'; 
«  le  Djebel  Mekter,  à  Aïn-Amba.  Pendant  quatre  années 
«  consécutives,  les  Zegdous  ont  entièrement  détruit  les 
((  récoltes  de  Moghar.  Les  ksouriens,  découragés,  ont  alors 
((  envoyé  chez  les  Oïdad  Sidi  Cheikh  une  djemaa  cha'-gée 
<(  de  les  faire  réconcilier  avec  les  Zegdous. 

«  Les  Oulad  Sidi  Cheikh  se  sont  rendus  à  cheval  auprès 
((  des  notables  du  Zeg-dou,  dans  l'Oued  Giiir,  et  leur  ont  dit: 
«  Les  habitants  de  Moghar  Tahtani  vous  demandent  la 
(f  paix  ;  ces  gens  sont  les  amis  de  notre  père  Sidi  Cheikh, 
((  qui  leur  a  donné  une  séguia  et  qui  a  imploré  le  ciel  de 
«  leur  accorder  ses  faveurs  ;  ne  leur  faites  donc  pas  de  mal, 
((  car  nous-mêmes  nous  subissons  le  préjudice  que  vous 
«  leur  causez.  »  Les  Zegdous  ont  répondu  :  «  Moghar  est  un 
«  ksar  Hamyan.  T^es  Hamyan  nous  ont  tué  du  nnonde  et  se 
c(  sont  enfuis  sans  verser  la  dia  ;  ce  sont  donc  nos  ennemis. 
((  Mais  puisque  vous  intervenez  en  leur  faveiu',  nous  leur 
((  accordons  le  pardon.  Tls  n'auront  pas  à  s'enfuir  loin  de 
"  nous,  car  nous  ne  leur  ferons  aucun  mal.  Nous  agirons 
('   ainsi  par  considération  pour  votre  père  Sidi  Cheikh.    i> 

<f  La  paix  a  alors  régné  chez  les  habitants  de  Moghar. 
«  Ceux-ci,  voyant  qu'ils  étaient  l'objet  d'attaques  conti- 
((  nuelles  de  la  part  des  gens  de  l'Ouest,  ont  demandé  à 
((  tous  ceux  qui  voulaient  les  entendre  de  venir  habiter  à 
((  Moffhar  Tahtani,  oi"]  Une  maison,  une  parcelle  de  terre 
«  et  de  l'eau  leur  seraient  données  par  la  djemaa.  Moghai' 
«  s'est  ainsi  peuplé  et  il  y  eut  60  maisons.  Moghar  a,  dès 
«  lors,  pu  se  défendre  contre  ses  ennemis,  la  vie  y  est 


DOCUMENTS  POUR  SERVîn  A  T.'flISTOinF  DES  Ff  WTYAN       177 

«  devenue  facile  et  le  gibier,  tel  que  r.'iiilmehe,  y  ;i  existé 
"  jusqu'à  CCS  dernières  années  (70  ans).   <i 

Si  Mohammed  Ould  Maamar  Hcii  Daliou  conic  ensuit*.', 
au  ("ours  de  son  récil,  le  fait  suivant  (|ui,  sans  intéresser 
direcicmcnl  l'histoire  des  Ifamyan,  met  en  cause  les 
«   Aiahes  Moucha   »  : 

"  \  l'époque  des  Zegdous,  un  malfaiteiu'  du  riharb, 
'<  nouuué  Bahara,  vint,  se  disant  Sultan.  Tl  était  accom- 
((  pagné  de  Béraber  et  de  gens  des  Zegdous,  formant  ainsi 
«  une  forte  harka,  composée  de  deux  mille  cavaliers  et 
<(  trois  mille  piétons. 

«  Lorsqu'il  arriva  à  Figuig,  où  il  séjourna  pendani  dix 
«  jours,  il  ordonna  aux  habitants  de  nourrir  la  harka  du- 
ce rant  son  séjour.  Les  Figuiguiens  obéirent.  Ce  pîéten- 
('  dant  écrivit  ensuite  à  toutes  les  tribus  et  à  Ions  les  ksour 
«  la  lettre  suivante  :  ((  Venez  au  devant  de  moi  avec  voire 
«  soumission  et  des  cadeaux  ;  dans  le  cas  contraire,  je  m(- 
<(  verrais  obligé  de  m'emparer  de  vos  biens,  de  détruire 
«  vos  habitations  et  de  vous  combattre  ».  Lorsque  les  gens 
"  de  Sidi  Brahim  Orich  et  ceux  des  ksour  de  Khenetr  Na- 
«  mous  reçurent  cette  lettre,  ils  s'enfuirent  à  Mosrhar- 
«  Tahtani  poru"  s'entendre  avec  les  gens  de  ce  ksar,  soit 
<(   poru'  offrir  un  cadeau,  soit  pour  résister. 

('  En  arrivant  au  ksar  Sidi  Brahim  Grich,  le  préten- 
'(  dant  constata  que  ce  ksar  était  abandonné  ;  il  apprit  éga- 
«  lement  à  ce  moment  là  que  les  ksour  de-Kheneg  Namorr< 
<(   étaient  déserts. 

<'  Un  indigène  nommé  Mohammed  ben  Zian,  des  Oulad 
<(  Sidi  Cheikh,  qui  se  trouvait  alors  à  Moghar  Tahtani. 
«  monta  sur  sa  jument  et  alla  à  la  renc(mtre  du  piéten- 
"  dant,  (pi'il  trouva  entre  Sidi  Brahim  Grich  et  Moghar 
«  Tahtani.  Mohammed  ben  Zian  descendit  de  cheval,  salua 
«  le  prétendant  et  lui  dit  :  "  Je  vi<'ns  du  ksar  de  Mogh.ir 
<'  Tahtani  pour  faire  du  bien  ?  )i  Bahara  lui  répondit  : 
('  Ouel  est  le  cadeau  (pie  vous  nous  faites.  »  Mohammed 
<(  ben  Zian  rey^rit  :  «  Le  cadeau  sera  une  piière  ou  une 
'(  malédiction  :  si  vou<  leur  donnez  la  paix,  vous  serez 
"  dans  le  bien  et  si  vous  n'acceptez  pas  ma  demande,  Dieu 
«  vous  maudira.  »  Bahara,  après  avoir  entendu  ce«  paro 
«  les,  r'cgar'da  les  palmiers  et  se  jeta  dans  le  pays.  Les  gens 
((  de  Moghar,  prêts  à  se  défendre,  entorrrèrent  le  ksar  au- 
«  tovu-  duquel  se  trouvait  un  rempart  et  un  fossé  ;  la  pou- 


178       DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'iIISTOTRE  DES  HAMYAK 

«  dre  parla,  5  hommes  et  20  montures  du  goum  de  Bahara 
<(  furent  tués  ;  ce  goum  s'éloigna  alors  et  envoya  des 
«  vedettes  dans  l'Oued  Som  et  l'Oued  Semar,  mais  Bahara 
((  entra  dans  une  grande  colère  lorsque,  en  descendant 
«  de  son  cheval,  il  apprit  la  perte  des  5  hommes  et  des 
((  20  chevaux. 

«  Si  Mohammed  ben  Zian  monta  à  cheval  et  se  réfugia 
((  chez  les  Oulad  Sidi  Cheikh  et  les  Arabes  Moucha,  cam- 
((  pés  à  Ghandjiia,  et  les  mit  aussitôt  au  courant  de  ce  qui 
('  s'était  passé.  Bahara  leva  alors  tous  les  piétons  et  cava- 
«  tiers  qu'il  put  trouver  et  se  lança  sur  le  ksar  ;  la  poudre 
('  parla  jus(|u'au  moment  où  les  munitions  manquèrent 
«  aux  gens  de  Moghar,  (jui  furent  obligés  de  renvoyer  les 
«  femmes,  les  enfants  et  les  impotents.  Seuls,  les  hommes 
<c  valides  restèrent  pour  garder  les  postes. 

a  Mohammed  ben  Zian  activa  alors  le  courage  de  ses 
«  gens  et  des  Arabes  Moucha,  auxquels  il  ordonna  d'aller 
<(  immédiatement  au  secoius  de  Moghar.  Cavaliers  et  pié- 
<(  tons  se  mirent  en  route,  après  avoir  envoyé  leurs  tentes 
«  et  leurs  troupeaux  dans  le  Djebel  Chemakhikh.  Cent 
«  hommes  furent  chargés  de  garder  le  chemin  de  Bour- 
«  dodo,  tandis  que  la  harka  se  dirigeait  sur  Moghar,  où 
«  se  trouvait  Bahara.  Ils  marchèrent  toute  la  nuit  et  s'em- 
((  parèrent  des  vedettes  de  Bahara  qui  surveillaient  l'Oued 
«  Som.  Bahara  attaqua  avec  ses  guerriers  le  ksar  de  Mo- 
('  ghar  où  le  feu  éclata.  Les  défenseurs  du  ksar  se  batti- 
'(  rent  jusf[u'au  moment  où  les  munitions  manquèrent. 
((  Les  fantassins  de  Bahara  démolirent  la  porte  du  ksar  et 
((  les  remparts,  mais  pendant  ce  temps  Mohammed  ben 
((  Zian  tomba  avec  sa  harka  sur  le  camp  des  agresseurs, 
((  s'empara  des  chameaux  et  tua  les  gens  qui  gardaient 
((  les  tentes.  Un  cavalier  vint  prévenir  Bahara  que  les  gens 
«  chargés  de  la  garde  du  campement  avaient  été  surpris 
('  par  des  guerriers  courageux.  Bahara  se  rendit  immédia- 
((  tement  sur  les  lieux  et  des  coups  de  feu  furent  échangés. 
('  Après  un  combat  acharné  qui  dura  une  demi-heure,  la 
('  harka  de  Bahara  fut  mise  en  déroute  et  poursuivie  dans 
((  sa  retraite  par  les  Oulad  Sidi  Cheikh  et  les  cavaliers  des 
«  Arabes  Moucha,  jusqu'à  Fi  gui  g. 

('  Bahara  fut  tué  à  Bagdad  de  Figuig,  par  Ben  Mekaoïialc 
"  aïeul  des  Oulad    Redjal  l'on  Bahal).   Ce  dernier  monta 
('  sur  la  monture  blanche  de  Bahara,  lequel  fut  décapité  et 
((  brûlé.  Les  poètes  chantèrent  :  ((  La  jument  de  Bahara 
((  fut  ramenée  par  les  nobles  et  Bahara  fut  vaincu  par  des 


DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DFS  If AMYAN        Î79 

«  cavalicis  iiili  «'pidrs,  les  ()iilii(l  B(  nikckciir  ;  Iciii'  sang 
«  coula  dans  les  rivièics  c\  aucun  ca\ aller  n'c'cha[)j)a,  tons 
«  fnicnl  niassaci'cs.  ..  A  Icnr  rdonr  de  Kiguig,  les  cavalicis 
((  constatèrent  qne  les  tentes,  les  troupeaux,  les  armes  et 
((  les  provisions  avaient  été  rassemblés  et  partagés  par  les 
«  piétons..   » 

«  Dans  le  courant  du  mois  d'avril  de  la  soixantième 
«  aimée  dn  ix'  siècle,  im  orage  de  grêle,  dont  les  grêlons 
"  furent  de  la  grosseur  de  la  ItMe  d  un  chameau,  éclata 
I'  et  détruisit  les  jardins,  les  maisons,  le  banage  et  les 
<(  animaux.  Les  autiuches  (jui  se  trouvaient  dans  le  pays 
«  furent  tuées.  Le  gibier  n'est  icveiui  (pi'après  de  nom- 
«  breuses  années. 

«  A  la  suite  de  cet  orage,  une  grande  misère  régna  à 
((  Moghar  ;  la  gièle  tomba  depuis  le  Djebel  llamir  jus- 
«  qu'au  Djebel  Mektcr,  à  Chemakhikli  et  à  l'Ouest  de 
i<  Dcrmel.  Les  gens  de  Moghar  se  rendiient  auprès  des 
«  Hamyan,  qui  se  trouvaient  dans  le  Sahara  et  qui  n'a- 
«  valent  pas  été  touchés  par  cet  orage,  et  l(>ur  demandèrent 
((  des  moutons  et  du  grain,  r|u'ils  achèteraient.  Les  lla- 
«  myan  leur  donnèrent  à  boire  et  à  manger.  Les  gens  de 
«  Moghar  furent  poussés  par  la  misère  à  couper  les  routes  ; 
(I  ils  restèrent  bientôt  seuls,  car  les  Mamyan  remontèrent 
((  vers  le  Nord.  A  la  suite  de  cet  orage,  de  nombreux  pafu- 
«  rages  apparurent  chez  eux,  tandis  que  les  Doui  Menia 
((  et  les  Oulad  Djerir  en  furent  dépourvus.  Ces  derniers 
«  étaient  campés  dans  l'Oued  Guir,  à  Béchar,  dans  la  Zous- 
((  fana.  Les  cavaliers  provenant  de  ces  tribus,  partis  veis 
«  l'Ouest  pour  enlever  des  chameaux,  s'aperçurent,  en 
«  passant  dans  l'Oued  Som,  que  les  pâturages  y  étaient 
<(  abondants  ;  aussi,  en  arrivant  chez  eux,  ils  le  dirent  à 
<(  leurs  gens  qui  décampèrent  pour  se  rendre  dans  l'Oued 
«  de  Moghar,  oi^i  ils  arrivèrent  au  mom(>nt  de  la  récolte 
«  des  dattes  et  des  fruits.  Les  Doui  Menia  eidevèrent  nui- 
«  tannnent  toutes  les  dattes  et  tous  les  fruits  qu'ils  trou- 
«  vèrenf  à  Moghar  et  s'installèrent  à  Garet  cl  Ghechoua, 
«  dans  l'Oued  Selem,  et  à  Ghouba.  Un  soir,  trois  notable^ 
-'  de  Moghar  se  rendirent  auj)rès  du  kébii-  des  Doui  Menia. 
(.  égorgèrent  un  mouton  et  lui  racontèrent  ce  (pii  s'était 
<i  passé  ;  ce  kébir  avait  chez  lui  un  tambour  en  cuivre  sur 
"  lequel  il  frappait  pour  rassembler  ses  gens.  Le  kébir, 
<«  en  apprenant  ces  faits,  se  mit  en  colère  et  fit  batlie  le 
<i  tambour.  Tous  ses  gens  se  réunirent  et  lui  dirent  :  «  O 


180       DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

((  notre  Cheikh  Bou  Anane,  que  s'est-il  passé  ?  »  Le  kébir 
«  qui  s'appelait  alors  Cheikh  Bou  Anane,  leur  déclara  : 
<(  Ce  ksar  est  faible  et  ses  habitants  sont  très  nombreux  ; 
((  nous  avions  l'intention,  en  venant  camper  près  d'eux, 
((  de  leur  apporter  la  paix  et  la  tranquillité,  et  vous  leur 
((  avez  causé  un  dommao-e  en  dévastant  leurs  jardins. 
«  Actuellement,  les  gens  de  Moghar  sont  dans  l'attente 
«  et  je  désire  que  vous  les  dédommagiez.  »  Les  Doui  Menia 
«  se  conformèrent  à  cet  ordre,  après  avoir  déclaré  qu'ils 
((  se  trouvaient  avec  les  Oulad  Djerir,  les  Béni  Oumaras 
«  et  les  douar  des  Oulad  bel  Guiz,  quand  les  dégâts  furent 
«  commis.  Tl  leur  ordonna  de  faire  verser,  par  chacune 
«.  des  tentes  précitées,  un  chameau  ou  dix  moutons,  de  le? 
((  lui  amener  et  de  lui  signaler  les  gens  qui  refuseraient. 
((  ïi'ordre  fut  exécuté  :  200  chameaux  et  600  moutons  fu- 
"  rent  amenés,  sur  lesquels  100  chameaux  et  800  moutons 
<(  furent  remis  aux  notables  de  la  djemaa  de  Mogh^r 
((  et  5o  chameaux  et  t5o  moutons  furent  distribués  aux 
((  notables  des  Doui  Menia  ;  le  reste  fut  conservé  par  Bou 
«  Anane.  Les  gens  de  Moghar  invitèrent  Bou  Anane  à 
«  déjeuner  chez  eux  ;  celui-ci  monta  à  cheval  avec  ses 
<(  enfants  et  des  notables  (en  tout  60  cavaliers)  et  se  rendit 
((  à  Moghnr.  Là,  20  moutons  furent  égorgés,  soit  un  mou- 
((  ton  pour  trois  cavaliers,  et  on  leur  servit  plusieurs  plats. 
«  Tls  jugoient  bon  de  vivre  en  bonne  intelligence  avec  les 
((  gens  du  ks.ar.  Les  moutons  et  les  chameaux  furent 
«  partagés  entre  les  gens  de  Moghar. 

((  Dès  que  les  Doui  Menia  apprirent  le  retour  de?  Ha- 
f(  m  van  dans  le  Sahara,  ils  décampèrent  et  se  rendirent 
<(  dans  l'Oued  Zousfana.   » 


"  Pendant  le  printemps  de  la  dixième  année  du  xi"  siè- 
<(  cle,  les  Béni  Ghoméracène,  les  Béni  Goumi  et  les  ksou- 
"  riens  d'Aïn-Chaïr  formèrent  une  harka  qui  se  diri,<Tea 
((  vers  l'Oued  Namous.  Les  tribus  Hamyan  et  les  Oulad 
«  Sidi  Cheikh  s'enfuirent  dès  qu'il*  apprirent  l'arrivée  do 
((  cette  hnrka  et  se  rendirent  dans  l'Oued  Spggueur. 

((  Cette  harka,  à  laquelle  s'étaient  joints  les  Béni  Zeggou 
(f  et  les  Aït  Tafelman  CBeraber"),  ne  trouva  absolument  rien 
((  dans  l'Oued  Namous  :  elle  ne  rencontra  qu'un  seul  indl- 
((  vidu  des  Mouchn,  qui  recherchait  un  âne.  Interrogé,  ce 
«  dernier  déclara  que  les  tribus  étaient  rassemblées  dans 
«  l'Oued  Seggueur.  La  harka  se  rendit  à  Moghar  Tahtani 


DOCUMENTS  POrH  SKUMK   A   I  .'il  Is  I  (  >l  U  K  |)i;s  IIAMYAN       IHl 

((  cl  Mogliar  Foukani,  où  elle  ciilrva  tous  les  animaux, 
((  cliaiiicaux,  bœuls,  moulons  el  lit  périr  dr.  nombreuses 
"  personnes,  painii  lesquelles  se  Irouvaient  des  hommes, 
<(  des  femmes  el  des  enfanls.  La  liarka  qui,  elle-même. 
Il  avait  subi  des  [)eiles,  passa  par  l'ounassa  où  elle  pilla  et 
'(   jnassacra  les  Oulad  Azzi. 

«  Les  ksouriens  de  Mogliar  ne  Irouxaut  plus  rien  à 
((  manger,  se  rendirent  dans  le  Tell,  à  Uudjda  el  à  Tiemcen 
<(  où  ils  estivèrent  el  où  ils  purent  lamasser  des  céréales 
«  el  de  l'argent.  A  leur  retour,  ils  louèrent,  pour  trans 
<(  porter  leur  gain,  des  chameaux  anv  llamyan,  à  raison 
((  d'une  gliara  de  blé  ou  d'orge  par  chameau.  Méamnoins, 
«  en  rentrant  chez  eux,  ils  souffrirent  et  ce  ne  fut  qu'un 
«  an  après  que  les  palmiers  donnèrent  une  bonne  récolte 
«   à  Moghar  el  à  Figuig. 

«  Les  Hamyan  qui  s'étaient  rendus  dans  le  Tell,  dans 
«  les  environs  de  la  plaine  d'Angad  et  d'Oudjda,  furent 
«  alla(|ués  par  les  gens  des  Angad.  Ceux-ci,  qui  compre- 
«  naient  avec  eux  les  Mehaya  et  les  Béni  bou  Zeggou,  fu- 
«  rent  battus  et  prirent  la  fuite.  Les  montagnards  accou- 
««  rurenl  aussitôt  au  secours  des  Angad  et  chassèrent  les 
((  Hamyan  du  Tell  marocain.  Ceux-ci  s'arrêtèrent  à  Oglal 
«  Sedra  (Maghniaj,  oii  ils  furent  repoussés  de  nouveau.  Ils 
«  durent  se  rendre  à  Tiemcen.  Mais  là,  le  Maghzen  luic 
«  chassa  encore  les  Hamyan,  après  avoir  refusé  le  cadeau 
«  que  ceux-ci  lui  offraient.  Ces  derniers  rentrèrent  chez 
<(  eux  sans  rapporter  de  grains  et  allèrent,  au  mois  de 
«  septembre,  à  Moghar  Tahtani,  à  Moghar  Foukani  et  à 
«  Figuig.  Durant  toute  l'année  qui  succéda,  les  llamyan 
((  ne  mangèrent  que  des  dattes  et  un  grand  nombre  d'entre 
«  eux  tombèrent  malades.  Heureusement,  Dieu  leur  en- 
«  voya  au  mois  d'octobre  de  la  pluie  qui  lit  pousser  1  herbe 
«  dans  l'Oued  Namous.  A  cette  époque,  les  gens  man- 
«  geaienl  du  genièvre  et  des  glands  ;  puis,  au  mois  de 
«  novembre,  ils  mangèrent  des  herbes  et  se  rendirent  au 
«  Gourara. 

«  Au  retour  des  caravanes  du  Gourara,  les  brebis  ayant 
i<  mis  bas,  ils  purent  s'alimenter  de  lait  et  de  dattes.  Cette 
«  année  fut  appelée  «  année  de  la  soif  (el  aam  el  ateche)  », 
«  parce  que  de  nombreux  Hamyan  moururent  de  soif  en 
((  revenant  au  mois  d'août,  dans  le  Tell,  d'où  ils  avaient  été 
«  chassés. 

<(  Un  an  après,  Cheikh  Mahmoud,  cheikh  des  Hamyan, 
u   rassembla  loo  chameaux  et  5o  autruches  qu'il  alla  offrir, 


182       DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'iIISTOIRE  DES  HAMYAN 

u  en  compagnie  de  plusieurs  notables,  à  Taniel  du  Maroc, 

((  alin  d'obtenir  l'autorisation  d'acheter  du  grain  au  Maroc. 

((  Satisfaction  lui  fut  donnée  et  des  caravanes  de  Haniyan 

«  se  rendirent  dans  la  plaine  d'Angad  et  à  Oudjda,  où 

((  elles  achetèrent  du  grain  sans  aucune  dilliculté.   Puis 

((  Cheikh  Mahmoud  alla  encore  offrir  loo  chameaux  et  5o 

«  autruches  au  bey  turc  de  Tlemcen,  pour  obtenir  la  même 

«  autorisation  qui,   d'ailleurs,   lui  fut  accordée.   Les  Ha- 

((  myan  purent  vivre  dans  l'aisance,  les  gens  de  Moghar 

((  leur  achetèrent  des  grains  qu'ils  semèrent  ;  ils  eurent 

((  une  bonne  récolte  et  eurent  ainsi  les  moyens  d'acheter 

((  des  moutons  et  des  chameaux.   .> 


Enfin,  parlant  du  commeice  des  plumes  d'autruche  avec 
les  liamyan,  le  caïd  Si  Mohammed  Ould  Maamar  Ben 
Dahou  expose  comment  cet  élevage  se  faisait  : 

t(  Les  ksouriens  recherchaient  les  œufs  d'autruche,  lis 
«  les  faisaient  couver  pour  avoir  des  autruchons  ;  ils  s'a- 
«  donnaient  ainsi  à  l'élevage  de  lautruche.  Chaque  habi- 
((   tant  de  Moghar  possédait  de  lo  à  ko  autruches  qu'il  ven- 
((  dait  à  raison  de  5o  à  25o  francs  l'une.  La  femelle  qui 
((  s'appelait  «  loumada  »  produisait  de  deux  à  trois  œufs. 
«   Dix  roumadas  pondaient  dans  le  même  endroit  ;  l'une 
<(  d'elles  couvait,  tandis  que  les  neuf  autres  pâturaient.  La 
((  couveuse  ne  laissait  parailre  que  la  tête  et  le  cou.   Le 
«  chasseur  savait,   en  l'apercevant,   quelle  couvait  et  la 
((  laissait  ainsi  jusqu'à  l'apparition  des  autruchons  qu'il 
((  prenait  alin  de  les  élever.  Les  gens  de  Moghar  possé- 
«  daient  des  autruchons  comme  les  nomades  possèdent 
((  actuellement  d^es  moutons.  Les  commerçants  de  Tlemcen 
«  et  d'Oran  venaient  acheter  les  autruchons  à  Moghar,  oiî 
«  ils  louaient  les  gens  pour  les  élever.  Les  autruchons  se 
((  nommaient  u  el  fauchai)),  ils  connaissaient  la  voix  de 
«  la  personne  qui  les  élevait  et  la  suivaient  partout  oii  elle 
((  se  rendait.  Les  commerçants  avaient  de  gros  bénéfices 
((  dans  ce  genre  de  trafic.  On  élevait  l'autruchon  pendant 
«  un  ou  deux  ans.  Durant  ce  temps,  il  grandissait  et  appre- 
((  nait  à  connaître  ses  maîtres  et  l'habitation  de  ces  der- 
((   niers,  de  telle  sorte  qu'ils  allaient  au  pâturage  et  en  reve- 
((  naient    seuls.     Au    pâturage,    l'autruchon    rencontrait 
«  d'autres  autruchons  qu'il  ramenait  à  la  maison  de  son 
((  maître.    Celui-ci   s'en   emparait  et  les   égorgeait,    puis 
«  envoyait  l'autruchon  à  la  recherche  d'autres  animaux. 


DOCUMENTS  POUR  SER\IH    \   f/llISrOIhF  DKS  ir\MY\\       183 

((  Les  éleveurs  iiiairiuiiirnl  leurs  aiiliiulics  d'une  inarquc 
<>   rouge  (^u  verle,  afin  i|iir  les  chasseur>  ii<'  les  luent  pas. 

•«  Certaines  auliiiclics  allaient  pondre  dans  le  désert  et 
((  ramenaient  à  liiahitation  de  leurs  maîtres  leurs  petits 
u  (pi'on  égorgeait.  I.a  i'emelle  seide  rentrait  chez  ses  maî 
«  très,  tandis  que  le  mâle  restait  au  dehors  Aussi,  était-il 
«  égorgé  et  vendu  dès  (|u"on  le  saisissait.  Tels  étaient  les 
«  grands  avantages  tie  Télex  âge  de  laul  ruche  pour  les  gens 
«   de  Mogliar.    » 

* 
*  * 

11  y  a  lieu  de  remanpier  à  ce  sujet  ipie  le  pays  actuel  des 
Hamyan  était,  il  y  a  encore  environ  4o  ans,  très  peuplé  \>'A[ 
les  autruches.  Au  moment  de  l'insurrection  de  Bou  Amama 
en  1881,  il  y  en  avait  de  grandes  (piantités,  principalement 
dans  la  région  des  iMekmen,  entre  les  chotts  Chergui  et 
Gharbi,  et  vers  les  dunes  de  l'Aïn-Mahla  et  de  la  Sebkha  do 
Naama. 

Pour  des  causes  inexpliquées,  et  autres  que  la  chasse, 
elles  émigrèrent  brusquement  vers  le  Sud,  au-delà  du 
Sahara  et  sur  le  versant  du  Xigei'. 

Il  y  a  4  ou  5  ans  (,1910),  les  indigènes  racontaient  qu'il 
en  existait  encore  un  couple  dans  la  région  de  Tendrara 
(Béni  Guil). 

Ce  couple  a  disparu,  probablement  tué  par  les  indigènes. 


184       DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAIV 


CHAPITRE  IV 


LE  TRAITÉ  DE  1845 


AvanI  la  signaluic  du  traité  du  18  mars  1845,  nous 
n'avions  que  des  données  incertaines  sur  les  lianiyan. 
Celte  même  année,  le  général  Dumas,  dans  son  ouvrage 
intitulé  ((  Le  Saliaia  Algérien  »,  mentionne,  ainsi  que  la 
correspondance  olïicielle  de  l'époque,  le  partage  de  celte 
grande  tribu  en  deux  fractions,  les  llamyan  Cheraga  ou 
Trafi  et  les  Hamyan  Gheraba  ;  nous  avons  vu  dans  quelles 
conditions  ils  s'étaient  séparés.  Les  premiers  appartiennent 
actuellement  au  cercle  de  Géry  ville  et  les  seconds,  ainsi  que 
les  Rezaïna,  relèvent  du  cercle  de  Méchéria.  Voici  quelle 
était  levn-  composition  : 

Oulad  Abd-el-Kérim 


l/^  1    ]  V    ADerraga 


HAMYAN; 


Trali 


i  Rezaïna 


Chafc 


Djemba 


Oulad  Maallah 
Oulad  Serour 
Akerma 


Akerma 

Oulad  Mansomali 

Oulad  Khelif 

Bekakra 

Reni  Methaief 

Oulad  Serour 

Meghaoulia 
I Sendan 
l  Megan 
jOulad  Embarek 

jOulad  Tounii  ) 

I Oulad  Faiès    î  Reni  Ogba 

I  Frahda  \ 


Oulad  Messaoud 
1  Oulad  Ahmed 


Ghiatra 


à 


itoci  MKiMs  l'uin  si:ji\iu  a  I,  iiisioMu;  i)i;s  iiam^aa      185 

Cliul'uii  et  Djemba  avaicnl  suivi  juscjuà  ce  inoinent  ia 
nièiiic  roituiic  et  ils  scinbiaieiil  devoir  èlre  algériens  en 
raison  des  lenains  de  parcours  qu'ils  avaient  choisis  il  ne 
pouvait  plus  être  question,  à  celte  é[>oque,  de  leurs  oriyi 
nés  ;  elles  étaient  trop  peidues  dans  i'elïroyable  inél.inge 
d'individualités  que  des  siècles  d'anarchie  avaient  produit. 
Celles  des  Akernia,  des  Ik'kakra,  des  liezaïna  nous  sont  déjà 
connues  ;  quant  aux  autres,  elles  présentaient  un  extraordi- 
naire caractère  de  diversité.  Les  renseignements  que  nous 
donnons  à  ce  sujet,  ci-après,  le  prouvent  abondamment. 

MEGHAOULIA 

Les  Meghaoulia  sont  originaires  des  Oulad  Ali  du  Guir 
(7  kilomètres  de  Bou-Denib).  Leur  nom  actuel  veut  dire 
u  ogre  »  :  il  est  dû,  dit-on,  à  la  bravoure  qu'ils  déployaient 
jadis  dans  les  batailles  et  à  la  crainte  qu'ils  inspiraient  à 
leurs  ennemis. 

Ils  ont  été  chassés  de  leur  pays  d'origine  par  les  Bcrabex 
et,  avant  de  venir  dans  la  région  qu'ils  occupent  actuel- 
lement, ils  avaient  construit  un  ksar,  aujourd'hui  détiuit, 
à  Tenezzara  (80  kilomètres  à  l'Ouest  de  Figuig). 

Ce  sont  les  Oulad  Ali  qui  ont  été  Ja  base  d'origine  des 
Meghaoulia. 

Le  douar  Oulad  Sebaa  est  venu  des  Ait  Sebaa  (Beraber). 

Celui  des  Oulad  Mellouk  descend  des  Oulad  Sidi  Tadj 
(annexe  d'Aïn-Sefra).  Ses  ancêtres  auraient  été  appelés 
Oulad  Mellouk,  à  la  suite  du  fait  suivant  : 

((  Leur  aïeul,  invité  à  suivre  les  gens  des  Oulad  Sidi  Tadj 
((  qui  voulaient  quitter  leur  pays  d'origine,  ne  voulut  pas 
«  le  faire,  retenu  qu'il  était  par  Famour  qu'il  avait  pour 
((  une  femme  du  pays 

<(  Les  gens  des  Oulad  Sidi  Tadj  dirent  alors  :  «  Aban- 
((  donnons  ce  possédé  »  (mamlouk)  et  l'abandonnèrent.  » 

Les  Oulad  Daho  sont  des  descendants  d'un  derrer  (insti- 
tuteur), qui  avait  exercé  sa  profession  chez  les  Oulad  Sidi 
Daho,  de  Mascara. 

Les  Oulad  Ll  lladj  Messaoud  sont  venus  du  ksar  d'Où 
daghir  (Figuig). 

BENI  OGBA 

Après  avoir  été  séparées,  les  trois  tribus  composant  les 
Béni  Ogba  ont  été,  en  1913  et  1914,  réunies  de  nouveau 
et  ne  forment  plus  qu'un  seul  groupement. 

13 


186       DOCUMENTS  POLR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMY\N 

a)  Oulad  Farès.  —  Les  Oulad  Farès  sont  originaires  de 
Tunisie.  Leur  ancêtre  s'appelait  Ben  Haigoune.  C'est 
pourquoi  on  les  appela  d'abord  El  Haouaguine. 

Ils  furent  ensuite  appelés  Oulad  Farès  (enfants  de  cava- 
liers) pour  la  raison  suivante  : 

Les  Kessakisse,  les  Diania  et  les  Oulad  Mebarek  qui  for- 
maient les  Haouaguine,  ayant  été  chassés  de  Tunisie,  se 
groupèrent  ensemble  dans  le  Sud-Oranais. 

Dès  que  l'un  d'eux  montait  à  cheval  pour  régler  une 
affaire  personnelle,  ses  compagnons  ne  le  laissaient  pas 
partir  seul.  Par  suite  de  l'accord  qui  régnait  entre  eux,  tous 
le  suivaient  et  prenaient  son  parti,  comme  s'ils  étaient  les 
enfants  d'un  seul  cavalier. 

Ils  se  réunirent  plus  tard  aux  Frahda  et  aux  Oulad  Toumi 
pour  former  les  Béni  Ogba. 

Chez  les  Oulad  Farès  : 

Le  douar  Kessakis  descend  des  Béni  Ogba,  il  vivait  jadis 
avec  les  Laghouat,  de  Géry ville.  Ce  douar  comprend  aussi 
les  Haouach,  venus  de  Figuig  et  les  Rezazna,  originaires  de 
l'Oued  El  Abed,  près  de  Tagremaret  (Saïda). 

Le  douar  Oulad  Oulid  a  eu  pour  ancêtres  des  gens  du 
ksar  d'Anoual. 

Le  douar  Oulad  Saïd  a  pour  véritable  dénomination 
"  Oulad  Embarek  ben  Saïd  ».  Il  est  originaire  des  Amour 
d'Aïn-Sefra  (Oulad  Gottib). 

Le  douar  Rebaat  se  compose  : 

1°  Des  Rebaat,  originaires  des  Sedjaa,  près  de  El  Aïoun 
Sidi  Mellouk  (Maroc  Oriental)  ; 

2°    Des  Zouaid,  originaires  des  Mehaya  ; 

(Ces  deux  premières  fractions  forment  les  Rebaat  pro- 
prement dit). 

3°  Des  Diama,  venus  de  Seguiet  el  Hamra  ; 

4°  Des  Haouaguine,  venus  des  Trafi. 

Le  caïd  actuel  des  Béni  Ogba,  Yahia  Ould  Saïd,  descen 
dant  d'Ahmed  Ben  Kaskass,  appartient  à  une  famille  ori- 
ginaire des  Béni  Ogba,  ayant  eu  des  croisements  avec  les 
Laghouat,  de  Géryville,  et  ensuite  avec  les  Doui  Menia. 

b)  Frahda.  —  Le  douar  Oulad  Messaoud  et  le  douar 
Oulad  Abbou  ne  formaient  jadis  qu'un  seul  douar  appelé 
((  Oulad  Ghani  ».  Hs  descendaient  des  Béni  Ogba  ;  quelques 
tentes  venues  des  Sedjaa  (El  Aïoun  Sidi  Mellouk)  se  joigni- 
rent à  eux. 


I 


DOCUMENTS  POUR  SKUNIIt   A   l.'ll  IS  I  Ol  M  K  IM;s  ir\MV\.N        187 

Le  douar  Oulad  llcilal  sctait  originaire  des  Bmii  Ililal, 
du  Gourara. 

c)  Oulad  Toiimi.  —  Les  Oulad  Touini  '"ormaieril  Jadis, 
avec  les  Frahda  et  les  Oulad  Faiès,  une  petite  confédéi ati(jn 
appelée  «  Béni  Ogba  », 

Ainsi  que  nous  l'avons  dit  précédeirirnent,  ce  groupe- 
ment a  été  reconstitué  en  191 'j. 

La  fraction  Daïfallah  est  originaire  des  Laghouat  (Oéry- 
ville). 

La  fraction  Oulad  Larhi  descend  des  Béni  Ogba. 

La  fraction  Ziadna  vient  des  Oulad  Bou  Zid,  d'Aflou. 

Ces  trois  fractions  forment  le  douar  Oulad  Toumi. 

Le  douar  Oulad  El  Haouar  est  originaii-e  des  Ghouati, 
fraction  des  llarrar  (Tiarel). 

Le  douar  Oulad  Yahia  descend  des  Laghouat  (Géry ville). 

L'origine  de  la  tribu  vient  de  la  fraction  des  Oulad  Larbi, 
(|ui  s'allia  avec  Daïfallali.  Ce  dernier  fut  choisi  comme  chef 
pai'  les  notables  des  deux  groupes.  11  eut  deux  fils  jumeaux 
(touam),  d'où  le  nom  d'Oulad  Toumi  donné  à  ses  descen- 
dants. 

OULAD  EMBABEK 

Les  Oulad  Embarek  ont  un  seul  et  même  ancêtre,  mara- 
bout venu  de  Seguiet  cl  lïamra  avec  un  nègre  nonuné 
Embarek,  qui  était  son  bouab. 

Il  s'installa  à  Tiout  où  il  se  maria.  11  eut  trois  fils  : 

Radjaa  —  Allai  —  Mohammed 

Le  marabout  étant  venu  à  mourir,  ses  fils  furent  élevés 
par  le  nègre  Embarek.  On  les  appela,  par  suite,  les  Oulad 
Embarek,  en  souvenir  de  leur  père  adoptif. 

Radjaa  fut  le  premier  chef  de  la  tribu. 

Kaddour  ben  Allai  lui  succéda. 

A  cette  époque,  les  Oulad  Embarek  et  les  Megan  étaient 
réunis  et  ne  formaient  ffu'une  seule  et  même  tribu  dont 
il  était  le  chef. 

(^est  Kaddour  ben  Allai  qui,  fatigué  du  séjour  des  Ksoui', 
amena  la  tribu  dans  la  région  qu'elle  occupe  actuellemeiit 
et  la  fit  s'adonner  à  la  vie  nomade. 

AKERMA 

Avant  la  domination  des  Turcs,  tous  les  Akerma,  ceux 
de  Géryville,  ceux  de  Méchéria  et  ceux  du  Maroc  ne  for- 
maient qu'une  tribu. 


188       DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'iIISTOIRE  DES  HAMYAN 

Sous  la  domination  turque,  ils  se  partagèrent  en  trois 
groupes  :  le  premier  alla  se  fixer  non  loin  de  Fez,  le  deu- 
xième alla  avec  les  Trafi,  et  le  troisième,  avec  les  Hamyan 
Gheraba. 

Les  douars  Oulad  Zine  (El  Kohol;,  El  Aouameur,  Ez 
Zourg,  Kouader  Oulad  El  Hadj,  appelé  aussi  Djefafla 
(nommé  ainsi  à  cause  du  temps  très  court  qu'ils  passaient 
dans  chaque  campement  ;  ils  étaient  considérés  comme  des 
gens  excessivement  peureux  qui,  au  moindre  bruit  de 
guerre,  s'enfuyaient  et  abandonnaient  leur  campement), 
descendent  tous  des  compagnons  de  Sidi  Maamar  ben  Alla, 
dont  le  nègre  Akerm  avait  l'administration.  Ils  ont  donc  la 
même  origine  que  les  Akerma  de  Géryville. 
Les  Oulad  Ali  viennent  de  Figuig. 

Les  Remadna  sont  originaires  du  Gourara  (ksar  de 
Ksabi). 

Les  Guenatza  descendent  des  Oulad  Sidi  Ali  ben  Yahia, 
de  Géryville. 

Les  Oulad  Hammou  tirent  leur  origine  des  Djafra 
(Saïda). 

Le  douar  Oulad  Bou  Salem,  appelé  aussi  douar  Oulad 
Ameur,  comprend  deux  groupements  différents  : 

1°  Les  Oulad  Bou  Salem,  dont  l'ancêtre  Salem  appar- 
tenait aux  Akerma  purs  et  qu'on  dit  être  d'origine 
koréichite  ; 

2°  Les  Oulad  Ameur,  (jui  viennent  des  Oulad  Nehar 
(El  Aricha) . 

I/ancêtre  des  Oulad  Ameur,  auxquels  appartient  le  caïd 
actuel,  se  nommait  Ben  Aïssa  Ben  Amar,  des  Oulad  Yahia, 
fraction  des  Oulad  Sidi  Chadli,  de  Sidi  Amar  Chérif. 

Il  s'installa  dans  la  région  en  l'an  io32  de  l'ère  hégi- 
rienne,  fuyant  sa  tribu  où  il  avait  commis  un  meurtre,  il 
trouva  un  refuge  chez  les  Akerma. 

Le  douar  Daalize  a  pour  origine  des  bergers  qui  venaient 
de  la  zaouia  de  Kenadsa  et  qui,  employés  au  service  des 
Akerma,  se  fixèrent  parmi  eux  et  formèrent  une  fraction. 
Ils  fuient  appelés  Daalize  en  signe  de  mépris  parce  que  l'un 
d'eux,  ayant  trouvé  à  terre  un  croissant  de  métal,  affirma 
qu'il  était  tombé  des  cieux. 

OULAD  MANSOURAH 

Le  douar  Chouareb  est  en  partie  originaire  du  Gourara. 
Il  a  absorbé  les  Mokhaïssa,  qui  furent  jadis  les  premiers 


11 


DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l/llîSroilw:  r»i:s  ll\MY\N       18!' 

groiipomonts  dos  Oulnd  Maiisourah,  avoc  les  Klir|;ikliil  el 
les  Sahaba. 

F-o  douar  Kliclakhil  vient  de  Scffuiel  cl  Ifaima.  Od  pré- 
tend quil  a[)[tartiiil  aux  arabes  Moucba. 

T.c  douar  \o^''a<:za  \  irnt  des  Triffa. 

T,e  douar  Oulad  Ralagh  vient  de  la  (ribu  des  Oulad 
Balag^h  (Saïda). 

T.e  douar  Sehaba  vient  des  Djafra  f^Saïda). 

T.e  douar  Baraniine  vient  des  Oulad  Sidi  Aîohanimed  Im-h 
Sliman,  de  Géiyville,  et  d(>s  Oulad  Sidi  Moussa,  d'Oud  jda. 

Avec  le  douar  Chouareb  se  trouvaient  quelques  lentes 
des  Rezaïna,  des  Mehaya  et  des  Béni  Guil. 

OULAD  KHETJF 

T-e  douar  Oulad  Ben  Sliman  et  le  douar  Oulad  Amor 
tirent  leur  orioine  d(^s  Oulad  Kliaroubi  Oherao-a. 

Le  douar  Ababda  vient  des  Oulad  Afaallah  fcercle  de 
Géryville"). 

Le  douai-  Oulad  Taliar  vient  des  Angad  CEI  ArichaV 

Une  de  ses  fractions  dite  «  Bekakra  »  vient  des  Oulad 
El  Hadj  (M oulouya) . 

BENI  METHAREF 

Le  douar  El  Ataachate  est  originaire  des  Djafra-Oulad 
Daoud  ('Saïda). 

Le  douar  El  Messaadat  est  orifrinaire  de  Seguiet  el  Hamra. 

Le  douar  El  Guetati  descend  des  Haouara  TMaror 
Oriental). 

T,e  fondateur  de  ce  douar  portait  sur  le  sommet  du  crâne 
la  lonsrue  mèche  de  cheveux  a  guetaya  »  par  laquelle  les 
vrais  croyants  seront  portés  par  l'anofe  Gabriel  au  paradis 
Mais  cette  mèche  était  d'une  longueur  démesurée  et  il  fut 
surnommé  l'homme  à  la  mèche  fEl  Guetati). 

Les  Oulad  Attia  viennent  des  Béni"  Snouss,  non  loin  de 
Sebdou. 

Le  douar  El  Aouachir  vient  des  Oulad  El  Hadj,  de  la 
Moulouya  ''près  de  Debdou). 

Les  Oulad  Tahar  descendent  des  Mehaya. 

Avant  la  domination  turcpie,  la  tribu  campait  générrj- 
lement  à  la  tête  de  l'Oued  Namous. 

BEKAKRA 

Le  douar  Oulad  Salem  eut  pour  ancêtre  Salem  ben 
Amara,  des  INIezaouir,  habitant  chez  les  Angad  TOudjdaj. 


190      DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMY\N 

Cet  ancêtre  se  joignit  à  la  clientèle  de  Bekar.  L'ag-ha  El 
Hadj  Kaddour  ould  Bon  Feldja  fut  son  descendant  direct. 

Le  douar  Moualek  est  originaire  de  Seguiet  el  Ilamra 

Le  fondateur  de  ce  douar,  INIalek,  vint  se  joindre  aux 
gens  qui  se  groupaient  autour  de  Bekar. 

Le  douar  Daanicha  est  originaire  du  ksar  de  Deghamcha, 
dans  le  Gourai  a. 

Le  fondateur  avait  les  yeux  chassieux  «  daamech  »,  ses 
descendants  furent  désignés  sous  la  dénomination  de 
('  daamcha  »  (qui  ont  les  yeux  chassieux). 

Le  douar  Rezazga  est  originaire  de  Mariakcch. 

Le  fondateur  de  ce  groupement  élail  un  nommé  Bezoug. 

Le  douar  Oulad  Bahma  est  aussi  oiiginaire  de  Marra- 
kech. Son  fondateur  se  nommait  Ali.  11  mourut  en  laissant 
en  bas  âge  des  enfants  dont  sa  femme  Bahma  s'occupa. 

Le  douar  Debabda  avait  pour  ancêtre  un  nommé  Debab, 
venu  du  ksar  de  Bou-Anan  (Haut-Guir). 

Le  douar  Aouïssate  est  originaire  des  Ghenanma  (Oued 
Saoura) . 

Le  douar  Zelalta  avait  pour  ancêtre  im  nommé  «  Ben 
Zelat  »,  originaii'e  de  la  plaine  d'Eghris  (près  de  Mascara). 

Les  Abidat  et  les  Zelalta  ne  forment  qu'un  seul  grou- 
pement ;  les  Abidat  ayant  pour  origine  des  rejetons 
d'esclaves  ayant  appartenu  aux  Zelalta. 

Le  douar  Rouabah  est  originaire  des  Oulad  Sidi  Khalifa 
Cheraga  ('près  du  Kreiderl. 

Le  douar  El  Merahate  vient  de  la  tribu  des  Béni  Amevn-, 
campés  à  Tessalah,  dans  le  Tell  oignais. 

Des  Bekakra  s'installèrent  jadis  dans  la  vallée  du  Haut 
Guir.   Il   en  existe  encore   actuellement   au  ksar  de   Bou 
Anane.  Ils  sont  restés  en  relations  avec  leurs  parents  de 
Méchéria. 

OULAD  SEROUR 

Le  douar  Oulad  Ben  Sliman  est  originaire  des  Oulad  Sidi 
Ali  Ben  Samah,  des  Béni  Oukil,  de  la  kasbah  de  Sidi 
Makreuk,  près  d'Oudjda.  11  fut  conduit  dans  la  région  qu'il 
occupe  actuellement  par  un  nommé  Ben  Djebbar. 

Les  gens  de  ce  douar,  aïKjuel  appartient  le  caïd  actuel, 
Larabi  Ould  Tayeb,  se  disent  Cheurfa,  comme  descendani:^ 
de  Sidi  Ali  Ben  Samah,  enterré  à  MaUain,  au  Sud  des  Béni 


DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'iIISTOIRE  DES  HAMYAN       101 

Bou  Zcfigou  et  do  Debdou.  Ils  ne  peuvciil  pioiivn  leurs 
droits  à  ce  titre. 

I.e  douar  des  Oulad  lien  (llieikii  pK'Icnd  avoir  la  m'-nir 
origine  (|ue  le  douai-  des  Oulad  I5en  Slinian  et  ne  former 
qu'une  seule  branche  avec  eux. 

Les  Oulad  \eiradi  viennent  des  \nf;ad,  IVaetion  des 
Mezaouir. 

r.e  douar  llarakla  descend  en  partie  des  Doui  Menia 
ïdersa,  douar  Oulad  Kinbaiek,  et  en  partie  des  Sedjaa  (FA 
Aïoun  Sidi  ^b'ilouk). 

Les  douars  El  Maarif  et  Oulad  Bou  Az/a  ont  une  origine 
commune,  ils  sont  venus  de  Draa. 

Tous  les  Oulad  Serour  formaient  jadis  une  grande 
famille.  ïls  sont  actuellement  répartis  entre  :  Méchéria, 
GérN  ville,  Tcnira  et  Fez. 

OULAD  MESSAOUD  (GHL\TBA) 

T.e  douar  Oulad  l.akhdar  est  originaire  des  Angad. 

Des  deux  douars  des  Kenadsa  et  des  Khelakhil,  les  gen.? 
de  celui  des  Kenadsa  se  rattachent  comme  origine  aux 
descendants  de  Sidi  iNLnamar  bon  Alia  :  ils  eurent  comme 
ancêtre  le  nommé  Messaoud. 

L'ancêtre  des  Oulad  Bahal  est  originaire  des  Ghenanma 
fOued  Saoura). 

Tous  C(^s  gens  étaient  groupés  autour  de  Messaoud,  qu'ils 
avaient  choisi  pom'  chef. 

Après  sa  mort,  le  commandement  passa  à  Lakhdar  Ben 
Zaïd,  originaire  des  Mezaouïr,  fraction  des  Mehaya 
(Oudjda\  puis  à  son  fils  Ahmed  Ben  Lakhdar. 

T>a  tribu  actuelle  des  Oulad  Aîessaoud  et  celle  des  Oulad 
Ahmed  ne  formaient  jadis  qu'un  seul  groupement  appelé 
Ghiatra. 

OULAD  AHMED   fGHlATBA) 

Les  Oulad  Ahmed  disent  que  les  gens  du  douar  Oulad 
Ahmed  se  eom|>osent  exclusivement  de  Djouad  et  assurent 
ne  jamais  contracter  d'alliances  avec  des  étrangers. 

Le  douar  Oulad  Chaoui  est  venu  des  Chaouïa  (Maroc). 

Le  douar  Oulad  Ahmed  descend  directement  de  Sid- 
Maamar  Ben  \lia  ;  il  compte  dans  sa  lignée  le  fameux 
Cheikh  Mahmoud,  qui  commanda  à  tous  les  Hamyan. 

Le  douar  Oulad  Mimoun  se  serait  formé  dans  la  région 
de  Seguiet  el  Hamra. 


192      DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hTSTOTRE  DES  HAMYAN 

REZAINA  CIIERAGA  ET  GHERABA 

L'ensonible  des  deux  liibus  des  Rezaïna  se  groupe  en 
quatre  fractions,  descendant  d'une  façon  générale  des 
gens  qui  accompagnèrent  Sidi  Maamar  Ben  Alia  et  qui 
furent  administrés  par  son  bouab  Rezin. 

La  légende  raconte  cpie  Bezin,  installé  aux  Arbaouat, 
eut  quatre  fils  : 

Ahmed  —  Aoun  —  Hellal  —  Ameur 

Ceux-ci  se  marièrent  à  leur  tour  et  fondèrent  une  descen- 
dance :  ceux  d'Ahmed  s'appelèrent  les  Oulad  Saada,  parce 
(pie  la  femme  d'Ahmed  s'appelait  Saada. 

Les  descendants  d'Aoun  se  nonnnèrent  Oulad  Aoirn. 

Ceux  de  Hellal  prirent  le  nom  de  Oulad  HellaL 

Et,  enfin,  ceux  d'Ameur  s'appelèrent  Bessaïs. 

En  réalité,  les  gens  des  Bessaïs  sont  originaires  de  Rou 
Semghoun.  Leur  ancêtre  s'allia  avec  les  administiés  de 
Rezin  et  installa  son  campement  auprès  des  leurs. 

Actuellement  les  Oulad  Hellal  comprennent  les  douais  • 
Oulad  Mohammed,  oiiginaire  des  Oulad  Djcrir 
Khechaa  premier  ci  deuxième 
Merabaa,  originaire  des  Beraber  (Ait  Atta)  /         , 

Rezaïna 


Gheraga 


les 
Oulad  bel  Mehdi 

Oulad  el  Aïd 

Oulad  Nehari 

Hechalfa 

Chouaouka  ; 

El  Merakhis  -     ) 

Oulad  Khalfallah  >  des  Bezaïna  (îheraba 

Oulad  Moliammed  ben  Aïssa  ) 

Les  Oulad  Aoun  se  composent  de  : 

Oulad  Kouider,  originaires  des  Ou- 
lad Sidi  Ali  ben  Yahia  (Géryvillr 

El  Abs,  originaire  des  Angad  ,    ,      „       ..       ,,, 

T.r  des  tiezauia  (ilieraga 

Nouaoura  1 

Oulad  Ben  Dida  ' 

El  Maadna,  originaires  de  Krendidi 

Les  Oulad  Saada  comprennent  : 

Tserdane  ) 

Oulad  Djilali  >  des  Bezaïna  Gheraga 

El  Ababsa  ] 


nOCÎTMENTS  l>(MM<  SP.n\lll   A   l.'ll  IS  lOI  M  K  DF-.S  II\MYAN       1^^ 

Oiiliul  hcri  (!lit'k(tr,  •ni^^'-iii.iiics  drs 

(  ilit'iuiiiiii;i    (  ).  Siioin'ii  I 
Oiihul  Siiiulii,   iMciiiici-  ri   «lrii\iriii    '    «I'-  l^'Z.iïii.i  (;ii<'i;il»;i 
VA  Cwiiinal  \ 

Soiiiiril  / 

l.cs  Rossais  comproiuiciil  : 
Djolao-hia,  premier  cl  (Iciixirnic         j 
El"  Modjadil)  / 

Koiiahi  )  <l''^  Pic/aïria  (iliciaha 

khclaouit  \ 

Ayaïda  / 

Chez  les  Oularl  Saada  se  trovivenl  qiiel(|uos  faiiiilK-^  rui 
^iîiaires  des  ksniir  d'El  Amar  et  de  Bon  Kaïs.  Leurs  arieê- 
tres,  cpii  étaient  des  lolba,  vinrent  dans  la  Irihn.  s'y  fixèienl 
et  s'y  marièrent. 

Quelques  autres  indigènes  des  Oulad  Saada  eurent  un 
aneétre  originaiie  des  Angad  fies  TelohV 

Tous  les  autres  douars  des  Rezaïna,  pour  lesquels  une 
annotation  spéciale  n'a  pas  été  mise,  se  considèi-ent  eomrne 
descendant,  plus  ou  moins  directement,  de  la  famille  de 
Rezin  et  eoninie  frères  des  Oulad  Ziad. 

SENDAN 

Ea  famille  du  caïd  actuel  des  Sendan  est  originaire  de 
l'Egypte. 

Son  ancêtre,  \bdenahniane  Ren  Abdallah,  vint  se  fixer 
au  Gourara,  dans  la  région  de  l'Augueiout. 

Plus  tard,  la  branche  à  laquelle  appartient  le  ca'ïd  éniigia 
vers  les  Hauts-Plateaux  oranais,  oii  elle  forma  le  noyau  de 
la  tribu  des  Sendan. 

Elle  fut  conduite  par  \bderrahmane  Ren  Megtouf,  qui 
quitta  le  Gourara  pour  se  livrer  au  conmierce,  amassa  une 
grosse  fortune  et  se  fixa  dans  la  région  située  près  de  la  fête 
de  l'Oued  Namous. 

Ea  famille  du  ca'ïd  est  toujours  restée  léunie  dans  cette 
tribu.  Elle  constitua  la  fraction  des  Afegatif  dont,  acluelle- 
ment,  tous  les  membres,  à  l'exception  de  cinq,  soni  des 
parents  du  caïd. 

Ea  liaison  n'a  jamais  été  peidue  entre  les  Sendan  e| 
leurs  parents  de  l'Auguerout. 

Tous  les  ans  encore,  à  l'époque  des  grandes  caravanes, 
le  caïd  on  ses  frères  vont  visiter  l(*s  leurs  qui  jouissent  d'une 
grande  considération  au  Gourara. 


194       DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

Leur  cousin,  M'Hammed  Ould  Choikh,  est  actuellement 
raid  du  distric  de  l'Auguerout. 

Tous  les  caïds  qui  se  sont  succédé  dans  la  tribu  des 
Sendan,  avant  et  pendant  l'occupation  française,  ont 
appartenu  à  la  famille  du  caïd  acluel,  El  Iladj  Olliman. 

Autour  du  noyau  amené  par  Ben  Abderrahmane  Ben 
Megftouf  vinrent  se  grouper  : 

1°  El  Bachir  Ben  Younès,  venu  du  ksar  El  Amer,  qui 
fut  l'ancêtre  du  douar  El  Menacir  ; 

->."  Saad  bel  Berichi,  originaire  d'Oudjda,  fondateui  du 
douar  Berarcha  ; 

3°  Mohammed  ben  Bou  Yahia,  venu  du  Djebel  Ksel  (o\\ 
Kessal),  qui  fut  le  fondateur  du  douar  Oulad  Ben  Yahia  ; 

4"  Belgacem  Ben  Ali,  originaire  des  Oulad  Djerir,  qui 
fut  l'ancêtre  du  douar  Oulad  Belgacem. 

MEGAN 

T.es  Megan  ne  formaient  qu'un  seul  douar,  le  douar 
Oulad  Fekir.  T,eur  ancêtre,  venu  du  Gourara,  était  un 
savant  (fekir)  originaire  des  Oulad  Saïd  (TimimounV 

Ees  Bouaki  et  les  Behahza  furent  de  pauvres  gens  venus 
surtout  du  Tafîlalet  qui  se  groupèrent  autour  d'euv. 

Les  Oulad  Saad  viennent  d'El  Himer,  près  de  Marnia  ; 
ils  ont  des  parents  dans  la  commune  mixte  de  Chellala 
(département  d'Alger). 

Tvcs  M(>gan  et  les  Oulad  Embarek  ne  foimaient  jadis 
qu'un  seul  groupement. 

*  * 

11  eût  été  nécessaire  que  tous  les  renseignements  qui 
précèdent  fussent  connus  du  général  de  La  Biie,  chargé  de 
négocier,  en  i8/i5,  la  convention  spéciale  de  délimitation 
de  la  frontière  algérienne.  Cet  officier  général,  mal  docu- 
menté, fut  placé  dans  des  conditions  peu  favorables  pom 
menei-  à  bien  sa  mission  et,  faute  de  précisions  suffisantes, 
d(^s  difficultés  surgirent  bientôt  au  sujet  de  l'attribution  à 
la  France  de  la  totalité  des  Hamyan  Gheraba,  le  Maroc 
réclamant  les  Djemba.  Le  général  T>amoricière  avait  écrit 
le  ''i  janvier,  au  Ministère  de  la  Gueire,  sans  faire  de  dis- 
tinction entre  Chafaa  et  Djemba  :  «  La  tribu  des  Hamyan 
"  ne  nous  a  fait  aucune  soumission,  mais  elle  est  algé- 
'<  l'ienne  ».  On  ne  songeait  pas  encore  à  ce  moment  à 
occuper  les  Hauts-Plateaux. 

Le  traité  dut,  en  outre,  être  signé  à  la  hâte.  Pour  déter- 


DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  I-*IITSTOIRE  DES  HAMYAN      1^5 

mijior  les  tribus  du  Sud,  que  nous  étions  en  droit  de  récla- 
mer eomme  alf?ériennes  et  celles  que  nous  devions  recon- 
naître comme  marocaines,  les  renseignements  furent 
fournis  par  des  notables  indigènes  tels  que  le  caïd  de 
Tlemcen,  Si  TIaminadi  Sakals  et  l'agha  de  la  montagne  de 
l'Ouest,  Si  lien  Abdallah.  Tl  était  facile,  dans  ce  cas,  au\ 
plénipotentiaires  maiocains  de  tromper  la  bonne  foi  du 
négociateur  français. 

I.a  convention  laissa  sous  la  dépendance  du  Maroc  les 
Hamyan  Djemba  ;  les  Chafaa  furent  placés  sous  notre 
autorité.  Cotte  distinction  devait  créer  dans  la  suite  une 
situation  difficile.  L'article  -  offrait  sans  doute  un  palliatif  ; 
il  stipulait,  en  effet,  que  nous  étions  disposés  à  accueillir, 
en  n'importe  (fuel  nombre,  les  individualités  de  l'Etat 
voisin  qui  viendraient  se  réclamer  de  noire  autorité.  Cette 
mesure,  qui  visait  surtout  les  Djemba,  était  insufTisante. 

Peu  de  temps,  en  effet,  après  la  signature  du  traité,  le 
général  Pélissier  écrivait:  «  Dans  les  régions  sahariennes,  le 
((  traité  de  i845  a  laissé  se  créer  plusieurs  anomalies.  C'est 
«  ainsi  que  les  Djemba,  fraction  des  Hamyan  Gheraba, 
((  relèvent  du  Maroc.  Cependant  cette  fraction  campe 
((  toujours  sur  notre  territoire  ;  elle  a  toujours  fait  avec 
((  les  Chafaa  ses  approvisionnements  dans  le  Cherg  ;  du 
«  temps  des  Turcs,  comme  sous  la  domination  d'Abd-el- 
«  Kader,  elle  payait  le  zekkat  à  l'Algérie.  C'est  ce  que  peu- 
((  vent  témoigner  de  nombreux  fekkas.  autrefois  employés 
«  au  paiement  de  l'impôt  et  qui  se  trouvent  aujourd'hui  à 
<(  Tlemcen.  Ces  Djemba  devaient  donc  rentrer  sous  notre 
«  domination  ;  leurs  chefs  qui  ont  eu  avec  nous  de  fré- 
«  quents  rapports,  sont  disposés  en  notre  faveur  et  ne 
((  feront  certainement  aucune  opposition  du  jour  oii 
«  l'influence  hostile  de  l'Empereur  du  Maroc  et  les  intri- 
«  gués  de  Sidi  Cheikh  ben  Tayeb  n'empêcheront  plus  les 
«  Chafaa  dissidents  de  nous  revenir.   » 

De  son  côté,  M.  Bornée,  ministre  plénipotentiaire  n 
Tanger,  émettait  la  même  opinion  :  «  Pour  les  Hamyan 
"  Djemba,  disait-il,  ils  sont  nomades  ;  de  tout  temp>,  il* 
«  ont  erré  dans  le  Sahara  marocain  et  le  Sahara  algérien. 
«  Autrefois,  ils  dépendaient  des  beys  ;  cette  tradition  les 
«  rapprochait  de  nous  ;  mais,  d'autre  part,  le  traité  les 
«  attribue  à  l'Empereur  du  Maroc,  disposition  à  laquelle 
«  ils  n'ont  naturellement  pris  aucune  part.  Aujourd'hui. 
«  les  Hamyan  sont  venus  et  paraissent  s'être  définitivement 


106      DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

»  fixés  sur  la  partie  du  territoire  saharien,  oii  il  est  entendu 
(f  que  nous  dominons  ;  ils  ne  paient  rien  à  l'Empereur 
«  qui  ne  les  fait  pas  ehercher  si  loin.  Etrangers,  accueillis 
«  chez  nous,  ils  ne  figurent  pas  sur  nos  registres  d'impôts 
«  et  nous  n'exigeons  par  conséquent  rien  d'eux.  Cette 
«  condition  leur  convient  fort  et  ils  en  désirent  la  prolon- 
((  gation.  Pour  les  repousser,  nous  n'avons  aucune  bonne 
((  raison,  d'autant  moins  que  les  agents  de  l'Empereur  ont 
«  sur  eux  des  prétentions  si  modestes  qu'on  nous  a  adressé 
((  des  excuses  pour  avoir  tenté  de  les  rechercher  et  de  leur 
«  faire  payer  l'impôt  l'an  dernier.  Les  Djemba  s'éloignent, 
((  en  venant  chez  nous,  du  contact  des  tribus  avec  les- 
«  quelles  ils  sont  en  mauvais  termes  et  contre  lesquelles 
«  ils  luttent  quelquefois. 

((  Nous  les  accueillons,  mais  l'on  ne  peut  guère  partir  de 
«  là  pour  requérir,  par  la  voie  diplomatique,  l'Empereur, 
c(  de  nous  les  abandonner,  cela  (|uand  nous  lui  réclamons 
«  nous-mêmes  nos  tribus  émigrées.  S'il  y  avait  concession, 
((  nous  nous  trouverions,  il  est  vrai,  investis  du  droit  de 
((  leur  réclamer  l'impôt  ;  mais,  dans  le  Sahara,  l'impôt  est- 
«  il  bien  intéressant  ?  L'essentiel  est  qu'ils  achètent  chez 
((  nous.  Le  Sahara  me  semble,  avant  tout,  un  terrain  d'in- 
«  térêts  commerciaux.   » 

Les  difficultés  venaient  surtout  de  l'impossibilité  où  l'on 
était,  de  fixer  une  fiontièie  avec  des  populations  d'nri 
esprit  aussi  indépendant  que  les  llamyan.  En  répartissant 
mieux  les  tribus  et  les  ksour  (m  eût  évité  mêmç  de  songer 
à  vme  frontière.  Chaque  tribu  nomade  a  ses  parcours  défi- 
nis, ses  points  d'eau  consacrés,  en  un  mot  son  domaine 
pastoral  toujours  respecté  en  temps  normal  par  les  tribus 
voisines;  c'est  ce  qu'exprimait,  en  ces  termes,  M.  Wadding- 
ton,  ministre  des  Affaires  Etrangères  :  «  On  avait  reconnu 
('  dès  ce  moment  l'impossibilité  de  délimiter  ces  contréps, 
«  oii  la  terre  est  de  libre  parcours,  les  habitudes  et  les 
«  intérêts  des  populations  nomades  ayant  toujours  plus  de 
('  force  que  les  stipulations  diplomatiques.   » 

La  politique  à  suivre  devait  donc  être  désormais  d'attirer, 
de  capter  et  de  fixer  les  tribus  nomades  du  Sud. 

D'ailleurs,  l'absence  de  frontière,  si  elle  créa  des  diffi- 
cultés que  l'on  exagéra,  procura  aussi  des  avantages  réels. 
  plusiems  reprises,  le  Maroc  tenta  vainement  de  nous 
arrêter  et  nous  avons  pu  ne  pas  écouter  ses  réclamations  '^l 
poursuivre  notre  installation  dans  cette  contrée.  Malgré  )a 


uociîMEMs  l'OLU  si:io  iH  \  I   II is  I  ( )i li i:  i»i:s  ii\\iv\.\      lî'7 

clause  qui  les  l'aisail  Marocains,  les  bjtiuLa  sont  restés 
soumis  à  notre  aiilorilé,  nous  payant  les  impôts  et  accep- 
tant les  caïds  de  notre  choix.  Installés  presque  toujours  à 
ri'^t  des  Chafaa,  ils  portèrent  leurs  campements  souvent 
jus<pi"à  la  roule  (jui  unit  Saïda  à  (Jérj,  ville. 

Par  suite,  s'ils  étaient  vemis  à  se  réclamei  du  .Maroc, 
deu.v  cas  se  seraient  présentés  :  ou  bien,  continuant  à  vivre 
sur  leurs  terrains  de  parcours  habituels  connue  l'article  4 
leur  en  donnait  le  droit,  ils  se  seraient  trouvés  enclavés 
au  milieu  de  populations  reconnues  algériennes,  ou  bien, 
se  retirant  dans  l'Ouest  et  abandonnant  leur  pays,  ils  se 
seraient  installés  dans  ces  régions  au  détriment  des  pre- 
miers occupants.  Les  deux  solutions  n'étaient  pas  plus 
admissibles  l'une  (jne  l'autre,  car  dans  le  premier  cas  nous 
n'aurions  jamais  toléré  la  présence,  au  milieu  de  nos  admi- 
nistrés, de  fractions  étrangères  échappant  à  notre  domi- 
nation ;  dans  le  second,  les  inconvénients  qui  en  résul- 
taient pour  eux  étaieid  tels  que,  chaque  fois  (^ue  le  fait  se 
produisit,  ils  s'empressèrent  de  venir  d'eux-mêmes  se 
replacer  sous  notre  autorité. 

D'autre  part,  ainsi  que  le  constatait  le  général  Chanzy 
<(  les  Djeniba  fréquentaient  tous  les  marchés  de  l 'Ouest, 
«  mais  de  préférence  les  tribus  de  la  plaine  de  Sidi-bel- 
{(  Abbès  qu'ils  gagnaient  par  la  vallée  de  la  Mékerra  ',  dé- 
«  signée  par  eux  sous  le  nom  de  «  Foutoul  )>  et  celle  du 
«  Haut-Isser  ;  les  Chafaa  ont  toutes  leui's  relations  avec  les 
((  tribus  de  Tiemcen,  par  la  route  de  Sebdou.   >> 

Enfin,  tous  les  Hamyan  Gheraba  ensilotaient  dans  les 
ksour  du  cercle  d'A'in-Sefra,  dont  ils  partageaient  la  posses- 
sion avec  les  Amour. 

Il  y  a  lieu  de  remarquer  qu'au  moment  où  le  traité  île 
i845  fut  signé,  tout  le  Sud-Oranais  était  en  pleine  efferves- 
cence, et  qu'on  ne  pouvait  prévoir,  ce  qu'aurait  à  créer, 
dans  les  détails,  l'œuvre  de  pacification  que  nous  allions 
poursuivre.  (A  suivre). 


I  II  existe  dans  la  vallée  de  la  Mékerra  (cûmmuiic  de  Ténira)  une 
tribu  Ilamyan  qui  a  été  soumise  aux  opérations  de  délimitation  prescrites  par 
le  senatus-consulte  de  i863  et  qui  forme  actuellement  un  douar-conimune 
L'origine  de  cette  tribu  est  toute  récente. 

Abd-el-Kader  avait  trouvé  dispersé  dans  le  Tell  un  certain  nombre  de  terles 
originaires  des  Hamyan.  Ces  émigrants  étaient  venus  successivement  à  la 
suite  de  la  disette  dans  le  Sud.  L'émir  groupa,  en  iS/ia,  ces  clivers  éléments 
aux  environs  d'Aïn-Témouchent  et  en  forma  une  tribu  que  nous  cantonnâmes, 
en  18A8,  près  de  Ténira,  là  où  elle  est  encore. 


k 


LISTE    DES  VÉGÉTAUX 

recueillis  pendant  la  reconnaissance  de  M.  le  Capitaine  IVjARTlN 
dans  r£ro  Iguidi  (Satiara) 

(MARS-AVRIL     1913) 


AYANT-PROPOS 


Désigné,  ex  abrupto,  pour  accompagner  au  titre  du 
Service  de  Santé  la  reconnaissance-poursuite  de  M  le 
capitaine  Martin,  je  n'étais  pas  préparé  à  recueillii'  les 
plantes  que  je  pouvais  rencontrer  dans  notre  tournée.  C'est 
en  route  que,  tenté  par  une  abondance  tout  à  fait  excep- 
tionnelle de  plantes  d'acheb  (acheb  veut  dire  printemps, 
ensemble  des  pousses  piintanières  et  qu'on  ne  rencontre 
qu'au  printemps),  j'ai  fait  quelques  récoltes,  recueilli  des 
noms  indigènes  et  essayé  de  classer  un  peu  d'après  mes 
souvenirs. 

A  ma  rentrée  à  Timmimoun,  j'ai  mis  un  peu  d'ordre  dans 
mes  récoltes  et  mes  notes,  avec  laide  bien  insuffisante  des 
((  Documents  scientifiques  de  la  nilssion  FoJireau-Lamy  ». 

Je  n'ai  donc  pas  la  prélention  de  présenter  une  liste  de 
plantes  bien  déterminées  et  bien  classées,  mon  but  est 
simplement  de  signaler,  au  moins  par  lem^s  noms  indi- 
gènes, les  principales  plantes  qui  croissent  dans  l'Iguidi 
en  période  d'acheb. 

Les  déterminations  et  les  dénominations  indigènes  ont 
été  le  plus  souvent  rapportées  à  celles  données  par  Foureau. 

Certaines  plantes  non  retrouvées  dans  le  catalogue  de  la 
Mission  Foureau-Lamy  ont  été  rangées  dans  les  grandt-s 
familles  d'après  leurs  caractères  généraux.  D'autres  ne  sont 
citées  que  sous  le  nom  qui  a  paiii  leur  être  le  plus  souvent 
appliqué  par  les  indigènes. 

En  résumé,  ce  travail  esl  bien  incomplet,  mais  tel  qu'il 
est,  il  présente  l'ensemble  de  la  flore  d'acheb  dans  la  région 
de  l'Iguidi  et  les  régions  voisines. 

Timmimoun,  le  i^""  juin  191/1. 

D'  WATEAU, 

Médecin  aide-major  à  la  Compagnie  Saharienne  du  Goiirara. 


LISTE  DES  VÉGÉTAUX  RECUEILLIS  DANS  l'eRG  IGUIDI       199 

Liste  ûes  v6g6iaux  récoltés,  avec  leurs  noms  indigeoes 
ei  leurs  localités 


FAMILLE  DES  CRUCIFÈRES  » 

Moricandia  arvensis  D.  G.  (Gergir).  77. 

— ■      {Beggig).  —  Très  voisine  de  la  précédente,  mais  à  lleiirs 
plus  nombreuses. 

Henophyton  deserti  C.  et  Dr.  (Henna  el  djemel  ou  alga). 

Ces  trois  espèces,  comme  la  plupart  des  cru- 
cifères, constituent  la  meilleure  partie  de  Vacheh  '-i. 
Se  trouvent  dans  tous  les  ouidan  ^  de  liamada 

Savignya  longistyla  B.  et  R.  (Goulglàne).  —  Constitue  la  hase  de 
l'acLieb  dans  les  gacis  *  du  Grand  Erg. 
?       (Foui  el  djemel). 

Malcolmia  iEgyptiaca  Spr.  {Halma).  78. 

Matthiola  livida  D.  C.  [Naâmia),  81.  —  Très  menue    Les  pétales 
s'enroulent  sur  eu.\-mèmes.  Répandue. 

Sisymbrium  Irio  L.  {Chaliate).  82.  —  IIaci  Tilemsi 

Anastatica   hierochuntica    L.    (Kef  Lalla   Fathma).  83.    —  IL^ci 
Tilemsi.   Rare. 

Zilla  macroptera  Coss.    (Chobrom    ou   Chabrek).  81-85.  —    Deux 

variétés.  H  agi  Ouchtal. 
Brassica  oleracea  L.  (Kramb)  86   —  Les  Eglabs  "'. 

Senebiera  lepidioïdes  Cosson  [Harra  ou  haghagha) . 87.  -  Tabelbala. 
?      (Kerkas).  —   Ressemble   à  la  ravenelle    de  France.   El 

OuAHiLA.  et  les  gacis. 
?       (Regel  rhorrhal).  —  Haci  Occhtal,  IIaci  Tilemsi. 
?      (Heureha).  —  Ressemble  à  la  bourse  à  pasteur. 

Toutes  ces  crucifères  sont  très  recherchées 
par  les  animaux. 


1  Le^  noms  vulgaires  sont  en  italique  et  entre  parent lièsc.-.  Le  nonilire  (|ni 
Buit  est  le  numéro  correspondant  à  celui  donné  par  Foureau  :  in  Documents. 

1  Acheb,  veut  dire  printemps.  Les  plantes  d'aeheb  emistitucnt  les  meilleurs 
li.Uurages  de  l'année 

3  Ouidan  el  ondiane,  pluriels  synonimes  du  mot  arabe  oi/ei/  (cours  d'eau). 

à  Gacis,  terrain  plat  et  dur  qu'on  rencontre  dans  les  dunes  ou  à  leur 
bordure. 

y  Eqlabs,  pluriel  de  i/uei/i,  employé  comme  nom  propre  pour  désigner  la 
région  de  Clieuuclian 


200       LISTE  DES  VÉGÉTAUX  RECUEILLIS  DANS  l'eRG  IGUIDI 

FAMILLE  DES  CAPPARIDÉES 

Mserua  rigida  R.  Brown.  (Aggar).  35. —  Quelques  spécimens  dans 
l'oued  Chexachan  et  dans  quelques  endroits  ro- 
cheux des  Eglabs    Fleurs  en  mars. 

Capparis  spinosa  L   (Kabbar).  37.  —  Un  pied  [)ivs  l'oued  Ethel 

FAMILLE  DES  RÉSËDACÉES 

?       (Telma  ou  réséda),  —  Plante  d'acheb  de  tous  les  ouidap 
des  EuLABS.  Non  broutée  par  les  animaux 

FAMILLE  DES  CISTINÉES 
Helianthemura  sessiliflorum  Pers.  (Reguig).  45.  —  Rives  des  ouidan. 

FAMILLE  DES  FRANKÉNIACÉES 

Frankenia  thymifolia  Desf.  (Meleifa).  140  —  H.vci  Tilemsi  et  les 
Eglabs. 

FAMILLE  DES  MALVACÉES 
Malva  .^Igyptiaca  L.  {Naâmia).  H  agi  Tilemsi. 

FAMILLE  DES  GÉRANIÉES 
Erodium  glaucophyllum  Ait.  (McrkJi^rl).  142. 

FAMILLE  DES  PORTULACÉES 
Portulaca  foliosa  (RijlaJ.  344.  —  H  agi  Tilemsi 

FAMILLE  DES  RHAMNÉES 
Zizyphus  lotus  L.  fSeder,  SedraJ.  348.  —  Saab  el  Touil. 

FAMILLE  DES  TÉRÉBINTHACÉES 

Rhus  oxyacanthoïdes  Dum.  Cours.  (DJedari).  400. —  Quelques  pieds 
très  rares  dans  les  Eglabs.  Un  spécimen  à 
Chenaghan. 

FAMILLE  DES  PAPILIONACÉES 

Crotalaria  Saharae  Cosson.  (Bou-Kreïss).  223.  —  Haci  Tilemsi,  les 

Eglabs. 
?       (Haska  ou  Assek)   —  Le  fruit  est  enroulé  comme  celui  de 

la  luzerne,  mais  pourvu  de  piquants.  Haci  Tilemsi. 
?       (Habalia).   —  Très  voisine  de  la  précédente,   mais  plus 

merue. 


LISTE  DES  VÉGÉTAI  X  MECl  EILLIS  DANS  l'eRG  IGIIT)!       201 

Genista  Saharae  Coss.  (Merkh).  224.  —  Abondant  entre  Ei,  Modaï 
EL  Faiied  et  TouNASSiN.  Quclqucs  pieds  dans  le 
djebel  Ougauta.  Recherché  par  les  chameanx. 

Rétama  Retam  Webb.  iR'tam).  225. —  Répandu.  Les  ciiameau.x  ne 
mangent  que  les  fleurs. 

Acacia  tortilis  Hayne  (Talha).  226.  —  Très  abondant  dans  toutes 
les  parties  rocheuses.  Quehjues  aibros  avaient 
des  gousses  vertes. 
?  ( L'fouila  ou  quouila).  —  Plante  d'acheb  à  tige  et  feuilles 
veloutées.  Le  rhalya  serait  une  variété  plus 
grande  et  plus  vivace.  Haci  Ocachtal,  Erg  el 
Atcii  AN- 
FAMILLE  DES  ROSACÉES 

Neurada  procumbens  L.  iSaâdane).  ;551.  —  Regs  entre  Cuouikhia 
et  Bou  Bout.  Cette  plante  est  remarquable  par  ses 
calices  fruciiteres  qui,  frais,  sont  gonflés  de  suc 
et  très  recherchés  par  les  chameaux  :  secs,  ils 
reposent  sur  le  sable  par  leur  face  pleine,  tournant 
en  haut  une  face  hérissée  de  piquants  qui  se 
fixent  aux  pieds  et  aux  chaussures.  Leur  forme 
est  arrondie  et  leur  diamètre  varie  de  celui  d'une 
pièce  de  0  fr.  50  à  une  pièce  de  5  fr.  en  argent. 

FAMILLE  DES  TAMARISCINÉES 

Tamarix  gallica  L.  (Tarja).  397.  —  El  Gheirs,  El  Mouaï  El 
Fahed,  Ghemiles.  Les  chameaux  ne  mangent  que 
les  fleurs. 

Tamarix  articulata  Vahl.  (Ethel  ou  fersigue).  .398  —  A  donné  son 
nom  à  l'oued  Ethel,  le  long  duquel  il  forme  une 
ligne  boisée  qui  marquerait  le  cours  ancien  de  cet 
oued  sans  eau  et,  maintenant,  coupé  de  dunes. 
Les  chameaux  ne  le  mangent  pas. 

FAMILLE  DES  CUCURBITACÉES 

CitruUus  Colocynthis  L.  (Hadejj.  94.  —  La  coloquinte  Erg  el 
Atchan. 

FAMILLE  DES  OMBELLIFÈRES 

Fœniculum  officinale  L.  (Besbess).  318.  —  Le  fenouil.  IIaci  Ti- 
LEMSi.  Aurait  des  propriétés  diurétiques. 

Deverra  chlorantha  Coss.  et  Dr.  {Gou2zàh)  319.  —  Tout  I'Erg 
Iguidi.  Très  recherchée  par  les  chameaux. 

Au  moment  de  la  maturité,  les  animaux  qui  la 
broutent  reçoivent  des  graines  dans  les  yeux.  Ces 
graines  déterminent  la  formation  d'épaisses  faus- 

14 


202       LISTE  DES  VÉGÉTAUX  BECUEILLIS  DANS  l'eRG  IGUIDI 

ses  mem))ranes  qui  aveuglent  l'ankinal.  Les  indi- 
gènes   savent    la    nécessité    d'une    intervention 
chirurgicale  pour  enlever  les  excroissances. 
Daucus  carota  L.  tSennaria).  320.  —  Tabelbala 

f       iMadraigua).  —  Haci  Tilemsi,  lesouidan  des  Eglabs. 

Plante  rampante  dont  les  akènes  renfernaent 
des  graines  que  les  indigènes  recueillent  précieu- 
sement ;  ils  les  emploient  pour  aromatiser  les  ali- 
ments et  surtout  le  café.  C'est  le  succédané  de 
Vazir,  voisin  du  cumin,  qu'emploient  les  araljes 
des  Hauts-Plateaux. 

FAMILLE  DES  COMPOSÉES 

ZoUikoferia  resedifolia  Coss.  iAdhidlo.  'y2. —  Plante  d'acheb.  Toutes 
les  haniada. 

f       (Araïcha).  —  Voisine  de  la  précédente.  Haci  Tilemsi. 

?  iRadda).  —  A  etïlorescence  jaune  canari  ayant  la  consis- 
tance du  papier.  Les  Eglabs,  Kahal  Tabelbala. 

f  (Tasseka).  54.  —  Gros  chardon  ornemental  à  feuilles 
panachées.  Ei'gs  El  Ouahila,  El  Atchan.  Raoul 

?       [Gourga).  —  Chardon  artichaut. 

?  Deux  autres  espèces  de  chardons  plus  petits,  très  recher- 
chées des  chameaux.  Haci  Tilemsi. 

f       (Naggar).  —  Tient  du  chardon  et  de  l'armoise. 

Artemisia  herba  alba  Asso.  {Chihh)  58.  —  Plateaux  du  Noid . 
Saab  el  Touil. 

f  (L'bouibeta).  —  Sorte  de  camomille  soyeuse  Haci  Ti- 
lemsi. 

f       (Gaouen).  —  Deux  variétés.   Tous  les  ouidan  de  hamada. 

?  {Gartoja).  —  Deux  variétés  :  l'une  à  feuillage  velouté 
ighartofa)  ;  l'autre  ^  feuillage  lisse  (choueia). 
Cette  espèce  tient  à  la  fois  du  bouton  d'or  et  de 
l'armoise.  Très  odorante,  elle  est  très  recherchée 
par  les  indigènes  qui  l'emploient  dans  leurs  ali- 
ments. Tous  les  ouidan. 

f  (Chaïba). —  Involucre  soyeux  à  Heurs  jaunes.  Djebel  Ta- 
belbala. 

f       (Haar/euge). —  Plante  vivace  à  feuilles  très  petites.  Fleurs 
jaunes.  Saab  el  Touil. 
Asteriscus  graveolens  Forsk.  (Nouggoud).  55.  —  Très  belles  fleurs 

jaunes.  Répandue  en  hamada. 
Perralderia  coronopifolia  Coss.  et  Kral.  fTirrath  ou  tighertj.  — 
Localisée  entre  l'oued  Saoura  et  le  Kahal  Ta- 
belbala. 

La  plante  prend  vite  un  aspect  sale  ;  elle  em- 
poisonne l')s  chameaux,  surtout  à  l'état  sec.  Elle 


LISTE  DES  VÉOÉTAl'X  HECl  i:iLI.IS  I)\NS  L'ERf.  IGUJDI       203 

doteiTiiiiie  tous  les  ans  des  vides  dans  le  troupt-au 
do  la  Compagnie  de  la  Saouia    Elle  est  cotnplè- 
temeiit  inconnue  des  Chainhaas  du  Grand  Eig. 
?       (Tahaffa). —  Voisinedela  piécédentc  mais  moins  nocive. 

Il  ACl   Tir.EMSI  , 

FAMILLE  DES  ASCLÉPIADÉES 

Daemia  cordata  R.  Bv. jUalga  ou  Kkalijui.   'S.'>.  —  Piante  d'acjicli. 
Tous  les  ouidan  de  liamada 

FAMILLE  DES  CONVOLVDLACÉES 

!       (Cliachiet  et  dob).  —   Petit  liseron.   Fbc  Iguidi,   Haci  el 

GlIEiRS. 

FAMILLE   DES    BORRAGINÉES 

Arnebia  decurabens  Coss.  et  Kral.  yLuucham).  ;}0  —  Plante  d'acbcb 

tjvs  reclieiehée  par  les  animaux.  Commune  dans 

les  ouidan  et  dans  I'Erg. 
Lithûspermum  callosum  Vahl,  (Halma).  —  Plante  d'acheb,  vivace. 

Ouidan  de  la    Hamada  et  Evg.   Répandue    dans 

IEbg  Iguidi 

FAMILLE  DES  SOLANÉES 

Hyoscyamus  Faleziez  Coss.  (B'^ttimaJ.  'à^'Z.  —   Abondante  le  long 
de  loued  Saour.v  ;  rencontrée  à  Tilemsi. 
'    Toxique  stupéfiant.  Les  indigènes  en  préparent 
des  breuvages  qui  rendent  fou. 
.'       (Nouygeuf).  388.  —  Ouidan  des  Eglabs.  Toxique. 

FAMILLE  DES  OROBANCHÉES 

Phelipoea  lutea  Desf.  (Tidjellet).  325. —  Parasite  sur  les  racines  du 
^ita  ('Limoniastrum  Guyoriianum),  Serait  con- 
sommée par  les  indigènes  après  avoir  changé 
l'eau  d'ébullition. 

Orobanche  condensata  Moris.  ( Dhdnoune).  —  Fleurs  mauves. 

FAMILLE  DES   LABIÉES 

Marrubium  deserti  de  Noë.  tKhiatu).  '^19.—  Bou  Maolu  el  KsErB. 

FAMILLE  DES  PLOMBAGINÉES 

Limoniastrum  Guyonianum  Coss.  et  Dr.  (Zita).  339.  —  Jolie  plante 
à  fleurs  violacées  fleurissant  en  avril.  Abondante 
entre  Ben  Zohra,  Khettamïa  et  Choitikhia. 
ï       {Ratna).  —  Très  voisine  de  la  précédente,  mais  plus  pe- 
tite. Oued  Saol'ka. 


204       LISTE  DES  VÉGÉTAUX  RECUEILLIS  DANS  l'eRG  IGUIDI 


FAMILLE  DES  PLANTAGINÉES 

Plantago  ovata  Forsk.  (Halma).  338.  —  Très  abondante  surtout  en 
terrain  bien  tassé  de  reg  K 

FAMILLE  DES  SALSOLACÉES 

Anabasis  articulata  Moq    Tand.  {Adjerem).  366.  —   Abondante  et 

localisée    dans    la    hamada    entre    Tounassin    et 

Ghemiles. 

?       (Belhal).  471.  —  D'un  joli    port.     Fournit    beaucoup    de 

bois.    Les  indigènes  l'emploient  pour  la  teinture 

en    bleu    (avec    le    nila,    non   mangé). 

?  (Baguei).  —  Variété  grossière  du  belbal  :  fournit  encore 
plus  de  bois.  Grande  ressource  des  oasis  en  com- 
bustible. Abondant  à  Tounassin. 

Salsola  vermiculata  L.  (Gueddem).  —  Répandue. 
—      sodaL.  (Djell),  368.   —  Oued  Saoura. 

Traganum  nudatum  Del.  (Dhamrane).  369. —  Fleurs  en  mars-avril. 
Très  répandue.  Grosse  ressource  des  pâturages. 

?  (Agga'ia).  —  Très  semblable  au  dhamrane,  mais  non 
mangée  parles  animaux.  Feuilles  terminales  oran- 
gées. Chenachan^  Tabelbala. 

?  fAscof).  —  Souvent  confondue  avec  le  dhamrane.  Peu 
mangée.  Haci  de  I'Erg  et  Ouahila. 

Cornulaca  monacantha  Del.  (Hadd).  372.  —  Le  meilleur  fourrage 
d'été  pour  les  chameaux  qui  en  sont  friands.  Ne 
pousse  que  dans  I'Erg.  Très  abondant  dans  I'Erg 
Iguidi.  Les  pieds  naissants  étaient  très  nombreux 
lors  de  notre  passage  en  mars-avril  dans  I'Erg  el 
Atchan  et  I'Erg  Raoul  Par  contre,  les  pieds 
mouraient  dans  le  Ouahila,  où  il  n'avait  pas  plu 
depuis  longtemps.  D'après  les  indigènes,  le  hadd 
peut  résister  pendant  sept  ans  à  la  sécheresse. 

Halocnemum  strobilaceum  Moq.  Tand.  (Ghessal  on  rhessel).  373. — 
Gacis  (le  I'Erg.  Son  bois  serait  utilisé  poui'  laver 
le  linge,  d'où  son  nom. 

Atriplex  halimus  L   (GuetaJ).  372.  —  Oued  Saoura. 

Suaeda  fruticosa  Forsk.  (Souid)  374  bis.  —  Terrains  salés  des  seb- 
khas    Tabelbala. 


1   tieg,  terrain   plut,  cailloiiloii.x. 


LISTE  DES  VÉGÉTAUX  RECUEM.r.lS  DANS  l'eRG  IGTJIDI       205 

Caroxylon  articulatum  Moq.  Tand.  (Remcth  ou  Remtz)    374  ter.  — 
Intermédiaiie   oiitie    le  dlianuane  et   le    belbal. 
Oued  Saoura. 
?       (Chrira).  —  Voisine  du  dhamrane,  mais  plus  petite. 

La  famille  des  salsolac(^es,  représentée  par  de 
nombreuses  espèces,  fournit  la  seule  verdure  d'été 
du  Sahara.  C'est  une  précieuse  lessource  des 
pâturages. 

FAMILLE  DES  POLYGONÉES 

Calligonum  comosum  L.  (Artaj.  340.  —  Fleurit  en  mars.  I.os  clia- 
nieaux  mangent  les  fleurs.  Oued  Saoura,  KnET- 

TAMIA,   TOUNASSIN. 

?  (Mkhenza).  —  Très  voisine  de  l'aria,  mais  plus  petite.  La 
fleur  sent  très  mauvais.  Kahal  Tabei.bala. 

?  (  Azal).  341.  —  Croit  sur  les  buttes  élevées  que  le  vent 
dégrade,  ce  qui  laisse  voir  des  racines  de  dimen- 
sions énormes.  El  Ouahila. 

?       (Arich).  342.  —  Beaucoup  moins  importante  que  les  pré- 
cédentes. Elle  fleurit  au  sommet  des  dunes.  Erg 
EL  Atchan,  Erg  Raoul 
Rumex  sp.  ?  (Amouida).  —  Très  abondante  en  mars.  Comestible. 

FAMILLE  DES  EUPHOBBIACÉES 

?       (Moul  el  lebina).  —  IIaci  Ouchtal. 

?       (Keusber  el  bir  ou  lebbin).  130   —  Oued  Saoura. 

FAMILLE  DES  LILIACÉES 

Asphodelus  tenuifolius  L.  (Tâsia).  278.  —   Djebel  Olgarta,  Saab 
EL  TouiL. 
?       iKaikante).  —    Voisine  de  la  scille.   Kheneg   el   Etem, 
Kahal  Tabelbala. 

FAMILLE  DES  PALMIERS 

Phœnix  dactylifera  L.  (Nakhla).  327.  —  Le  dattier  Rencontré  sur 
tous  les  points  de  I'Ebg  Iguidi,  où  il  marque  la 
possibilité  d'obtenir  de  l'eau  dans  des  nebas  '. 

FAMILLE  DES  JONCÉES 
Juncus  maritimus  Lam.  [Smar).  217.  —  Tabelbala 


I  Nebas,  bas-foiuls  d'Erg  où   il  suffit  de  creuser  à   la  main  de  o"ao  à   o"5o 
pour  trouver  l'eau. 


206       LISTE  DES  VÉGÉTAlîX  RECUEILLIS  DANS  l'eRC  ICIIIDI 

FAMILLE  DES  CYPÉRACÉES 

Cyperus  conglomeratus  Rotta  {Saâd,  Ouargla),  (Bous  el  begra, 
Saourai  106.  —  Voisinage  des  puits  ou  nébas. 
El.  Ghkirs.  El.  MouAï  El.  Eaiied,  Haci  Olt.htal. 

FAMILLE  DES  GRAMINÉES 

Panicum  turgidum   Forsk.    <Mrekha}.  160     —  Près  los  puits   de 
rOuAuiLA. 
?       (Mrokha)   —  Variété  In'aucoup  plus  menue. 

Danthonia  Forskhalii  Vahl.  'Rahia)        Oudiau  des  Iuilabs,  dei)uis 

TlI.EMSI. 

Andropogon  laniger  Desf.  iLemmad).  156   —  Tabelbala. 

Arthraterum  plumosum  L.  (A^eçi).  169.  —  Espèce  très  abondante 
sur  les  hamada  et  les  ergs. 

—  pungens  Desf.  (Drinn).  170.  —  Le  drinn  est  surtout 

abondant  dans  I'Epg  el  Atchan  et  I'Erg  Raoul 
La  graine  ffoul),  très  consommée  par  les  Saha- 
riens, ue  mûrit  qu'en  mai. 

?       tiVeiness). —  Plante  plus  petite  que  le  drinu.  El  Ouahila. 

'  (Sbett).  171.  —  Moins  rude  que  le  drinn  El  Gheirs,  El 
Mou  AÏ  El  Fahed 

—  brachyatherum.  {Sffar).\12.  —  Avec  la  précédeitte. 
Ampelodesmos  tenax  L.  (Diss).  182.  —  Bou  Mahoud,  Tabelbala. 

?  (Nej'jem).  209.  —  Chiendent.  El  Mouaï  El  Fahed,  les 
Oasis,  Tabelbala. 

?  (Erchigue).  —  Croit  en  grosses  toutîes  autour  des  jiuits 
ou  nébas  de  I'Ouahi-la. 

:'  (Ha'rra  et  Qasba  el  kseib).  —  Deux  variétés  de  roseaux 
signalent  la  présence  de  l'eau  à  peu  de  profon- 
deur. El  Kseib,  El  Mou.vï  El  Fahed. 


FAMILLE  DES  GNÉTACÉES 

Ephedra  àlata  D.  G.  (Alenda).  143, 

^      fragilis  Desf.  (Alenda). 

Les   ephedras  fleurissent  en  mars.    Les  fleurs 
seules  sont  mangées  par  les  animaux. 

FAMILLE  DES  CHAMPIGNONS 
Lycoperdon  sp  ?  [Techt  ed  deba)  ~-    Sorte  de  vesse  de  loup.  Haci 

BOUBOUT. 


LTSTE  DES  VÉGÉTAUX  RECUKir.l.IS  DANS  l'eRC  ICUIDI       207 

Agaricus  sp.  ?  iGouh  el  d/emeh  —  IIaci  Boi-bout.  Ei.  Mouaï  ei- 
Fahei) 

Terfezia  sp  ?  iTerJes\.  —  Les  tiuttes  aficctioiiiicnt  les  tt-rrains 
pioi  TOUX,  bit'ii  tassas,  de  liamada,  les  rives  des 
oiiidaii  où  se  plait  le  reyuig  (Helianthemiim  sessi- 
liflorum)  sur  les  racines  duquel  elles  [taraissent 
vivre  en  parasite.  Les  truffes  ne  se  montrent  que 
dans  les  bonnes  années  d'acheb  On  en  distingue 
troisj[variétés  :  une  blanche,  une  prise,  une  noiie. 
Celte  dernière  est  la  plus  appréciée.  La  variété 
blanche,  seule  rencontrée,  est  très  abondante 
ilans  les  Eglabs  :  elle  est  comestible. 


PLANTES  TOUT  A  FAIT  INDÉTERMINÉES 

\lkenza.  —  Très  aljiiiidaiitp  ;i  IIaci  Tilemsi  et  aux  Eglabs. 

Cette  plante,  probablement  de  la  famille  des 
solanées,  serait  toxique  pour  les  animaux  qui  la 
délaissent,  d'ailleurs,  à  cause  de  son  odeur  nau- 
séabonde. 

Jada    —   Petit  arbrisseau  velouté  à  feuilles  sèches  engainant  l'in- 
florescence. Haci  Tilemsi  et  les  djebels. 

Charreque.  —  Petite  solanée  ?  Haci  Ouchtal. 

Orbeira.  —   Plante  en  touffes  très  basses,  feuilles  denses,  velou- 
tées. Très  répandue. 

Zitel  et  khrouj.  —  Voisine  de  la  précédente. 

Tjaïa.  —  Petite  légumineuse. 

AJerJorh.  —   Ressemble  au   mouron.   Capsule  pyxidaiie.    Primu- 

lacée. 
Fegel    —   ? 

Lesseur.   —  ? 


k 


CERCLE    DE    GÉRYVILLE 


itiution  à  FEloUe  de  l'Induslrie  pastorale  ea  Aloérie 


RÔLE  MÉCANIQUE  DES  VENTS  DANS  LA  RÉPARTITION 
DES  FOURRAGES  STEPPIENS.  —  COMMENT  DENSIFIER  LES 
HERBAGES. 


En  présence  des  crises  fourragères  qui,  de  temps  à 
autre,  sévissent  sur  nos  parcours  du  Sud,  le  problème  de 
la  subsistance  des  troupeaux,  en  période  de  disette,  a  été 
envisagé  de  différentes  façons  : 

a)  Les  uns  ont  proposé  la  constitution  de  réserves  foui  - 
ragères  sur  différents  points  des  aires  de  pacage. 

D'autres  ont  voulu  demander  à  certaines  méthodes 
culturales  (dry  farming)  le  moyen  de  faire  rendre  au  sol 
des  Hauts-Plateaux  ce  qu'il  ne  donne  pas  en  l'état  actuel 
des  choses. 

h)  D'autres,  enfin,  et  ce  sont  les  plus  pessimistes,  ont 
conclu  qu'il  n'y  a  rien  à  faire,  en  raison  de  la  dureté  du 
climat  dans  ces  régions,  de  l'irrégularité  des  précipitations 
pluviales,  etc. 

Or,  la  vérité,  nous  semble-t-il,  est  ailleurs  : 

c)  La  flore  des  parcours  du  Sud  est  adaptée  aux  condi- 
tions de  ce  milieu  spécial.  Mais  elle  est  clairsemée,  et  ses 
localisations  les  plus  riches  et  les  plus  denses  dépendent 
moins  de  l'abondance  des  chutes  d'eau,  que  de  l'action 
exclusivement  mécanique  des  vents. 

cl)  En  effet,  l'agitation  atmosphérique,  en  rendant  les 
graines  nomades,  continue  à  créer  une  végétation  dissé- 
minée sur  d'immenses  étendues,  ou  fort  concentrée  en 
certains  points  ;  de  là  l'errance  continuelle  des  troupeaux, 
à  la  recherche  de  leur  subsistance  et  l'existence  fatalement 
nomade,  des  pasteurs  indigènes  dans  ces  régions. 


CONTRIBUTION   A    I.'lII  DC    \>E    T.'l  M)T  S  ri'.Mv  209 


*  * 


T.es  vents,  dont  rion  ne  vient  tempérer  la  violence, 
exercent  leur  action  sur  des  terrains  nus,  plans  ou  presque 
plans,  non  abrités  ;  el  ee  ne  sont  pins  senleiiu-nt  les  praines, 
éparses  dans  les  ste|)pes,  rpii  se  ti'ouAeiil  ainsi  balayées, 
mais  eneor(>  la  Icrre  végétale  et  les  parlirnlcs  fertilisantes 
provenaril  du  croltin  (pic  le  bétail  (li'-pdsc  dans  les 
|)areours. 

La  graine,  ainsi  véhiculée,  ne  s'arrête  que  si  un  obstacle 
met  fin  à  sa  course  vapal)ond(>  ou  si  le  courant  atmosphé- 
rique, à  l'action  duquel  elle  obéissait,  cesse  de  soulTler. 
File  peut  alors  profiter  de  sa  fixité,  enfin  réalisée,  pour 
germer  et  prendre  possession  du  sol. 

Souvent,  la  terre  végétale  et  les  paicellcs  de  fumier 
roulées  avec  elle,  continuent  leur  trajet,  à  moins  que 
l'obstacle  qui  a  interrompu  la  translation  de  la  graine  ne 
présente  une  assez  large  surface  pour  endiguer  en  même 
temps  terre  et  poussières  fertilisantes.  Dans  ce  dernier  cas, 
la  graine,  avenir  de  la  plante  dont  elle  émane,  se  trouve 
dans  les  meilleures  conditions  pour  germer,  croître  et 
prospérer. 

Dans  la  majorité  des  cas,  la  graine  s'accroche  au  hasard 
des  aspérités  et  des  accidents  du  sol  qui  lui  sert  de  plan  de 
roulement.  Là,  les  conditions  réalisées  tout  à  l'heure  font 
souvent  défaut,  car,  dans  son  arrêt,  elle  se  trouve  généra- 
lement séparée  des  éléments  divers  balayés  avec  elle  ;  la 
graine. germe  tout  de  même,  moins  bien  cependant  que  si 
elle  était  venue  s'échouer  au  milieu  de  particules  amendées. 
On  comprend  donc  pourquoi  la  végétation,  qui  revêt  par 
îlots  les  surfaces  steppiennes,  ne  présente  ni  la  densifica- 
tion,  ni  la  luxuriance  de  celle  qui  croît  au  pied  des  larges 
obstacles  ou  au  niveau  des  accidents  géologiques  les  plus 
divers  Texcavations  ou  aspérités). 

Dans  la  steppe,  la  graine  ne  dispose  que  des  éléments 
puisés  dans  le  sol,  tandis  que  dans  les  points  oii  les  bala- 
yures des  parcours  ont  été  largement  endiguées,  cette 
même  giainc  se  trouve  englobée  dans  des  éléments 
d'apport  où  figurent,  en  plus  ou  moins  grande  quantité, 
les  poussières  d'humus. 


*  * 


h 


Dans  le  numéro  de  la  Rcî^Jie  Vétérinaire  de  Toulouse 
(octobre  1909),  sous  le  titre  :  Répartition  des  subsistances 


210  CONTRIBUTION   A   l'ÉTUDE   DE   l'iNDUSTRîE 

naturelles  du  sol,  sur  les  Hauts-Plateaux  fSud-Oranais), 
rôle  des  vents,  nous  avons  noté  l'action  des  vents  sur  là 
distribution  des  herbacées  à  la  surface  des  steppes  et  nous 
avons  insisté  sur  ce  fait  que  les  graines  roulées  ont  tendance 
à  saccumuler  dans  les  dépressions,  au  pied  des  remblais, 
autour  des  moindres  obstacles  (^pierres,  mottes  de  terre, 
touffes  d'alfa,  d'armoise,  de  drinn,  etc.),  et  nous  avons 
conclu  ainsi  : 

((  Si  donc  nous  voulons  rendre  la  végétation  spontanée, 
plus  dense,  plus  étendue,  en  nappe,  imitons  la  nature  ; 
multiplions  les  obstacles  et  les  accidents  de  terrain  pour 
arrêter  la  terre  balayée  et  les  graines  errantes  :  réalisons  les 
desiderata  que  nous  avons  formulés.  Puisque  les  cuvettes 
naturelles,  les  moindres  dépressions  du  sol,  le  pied  du 
moindre  talus,  sont  riches  en  herbes,  nous  pouvons 
exploiter  ces  données...   •>) 

Depuis  que  nous  avons  écrit  cela,  il  nous  a  été  donné 
de  constater  qu'une  simple  haie  à  claire-voie  suffît  pour 
endiguer  les  graines  fourragères,  les  parcelles  fertilisantes 
dissiminées  dans  les  parcoiu's,  et  la  terre  végétale. 

Inutile,  comme  nous  le  préconisions  alors,  de  faire  des 
semis  en  utilisant  les  aspérités  ou  les  dépressions  du  sol. 
L'obstacle,  tel  qu'une  haie  à  claire-voie,  suffit  pour  briser 
le  vent  et  arrêter  les  balayures  qu'il  entraîne. 

Toutes  les  haies  que  nous  avons  vues  dans  le  centre  de 
Méchéria  ou  dans  le  bled,  les  rebords  de  la  voie  ferrée, 
présentent  une  densification  notable  de  la  végétatioii  qui  y 
croît  sur  leur  face  S>nd  et  sur  leur  Joce  Ouest  en  particulier. 

11  semble  que  la  direction  doininante  des  vents  se  fasse 
du  Sud  au  Nord  et  de  l'Ouest  à  l'Est. 

Nous  possédons,  comme  nous  l'avons  déjà  dit,  à  la 
surface  des  Hauts-Plateaux,  une  flore  nombreuse  et  variée, 
acclimatée,  aux  conditions  météoriques  du  milieu,  par  ime 
sélection  naturelle  vigoureuse  ;  cette  flore  se  régénère  par 
l'éparpillement  spontané  des  graines,  en  dehors  de  toute 
intervention  de  l'homme. 

Le  vent  joue,  là,  le  rôle  du  semeur,  de  même  qu'il 
remplit  le  rôle  d'agent  de  translation  du  pollen  dans  la 
fécondation  des  flpurs  :  mais  c'est  un  semeur  capricieux  et 
sans  modération  ;  son  action  de  translation  à  l'égard  des 
graines  ne  se  trouve  graduée,  ni  tempérée  par  rien  et 
dépasse  souvent  le  point  optimum,  le  but  utile. 


i 


CONTRIBUTION   A   I.'kII  IH:    DE   l'iNDUSTRIE  211 

Selon  la  violence  et  la  dm  ce  des  courants  atmosphé- 
lifjiies,  fr(V|ii('nls  en  ces  lé^'-ioiis,  telle  zone,  heiheuse  une 
année,  sciit  nue  l'année  suivanle  :  les  <»rain('s  qui  juuaicnl 
))u  s"\  uiiiinlcnii'  oui  ('lé  hiihivc-cs  el  cnlfaînées  fort  loin. 
I.e  dé|)lacenicnl  de  l;i  \ éi^élalion.  souini>^e  ainsi  au  caprice 
des  vents,  (>\pli(jii('  liés  sou\ent  les  crises  fourragères  «jui 
frappent  Ici  [)oint  ;ui  profit  de  tel  aulre,  ou  bien,  les  semis, 
réalisés  p;u'  les  agitations  de  l'air,  se  trouvent  tellement 
é[);u|)illés  (|ue  les  troupeaux  sont  souvent  obligés  à  de  lies 
grands  déplacements  pour  trouver  de  quoi  se  rassasier. 

T/opportunité,  l'abondance  des  |)luies,  jouent  un  rôle 
indéniable  ;  mais  si  les  surfaces  humidifiées  ont  été  bala- 
yées de  leurs  graines,  et  de  leur  humus,  il  ne  croîtra  rien, 
ou  presque  rien. 

Or,  au  cours  de  nos  tournées  dans  le  bled,  et  de  notre 
assez  long  séjour  dans  le  centre  de  Méchéria,  nous  avons 
noté  combien  les  accidents  naturels  du  sol,  f)u  les  obtacles 
réalisés  par  l'homme,  peuvent  être  utiles  pour  endiguer 
les  balayures  du  sol,  concentrer  en  des  points  donnés  les 
éléments  fertilisants  qui,  autrement,  sciaient  perdus,  et 
densifîer  la  végétation. 

Mais  au  lieu  de  haies  à  claire-voie,  (pii  ne  tiendraient  pas 
contre  la  violence  des  vents  et  dont  les  nomades  auraient 
tôt  fait  de  faire  du  feu,  de  simples  murettes  de  o™  20  à  o""  3o 
de  hauteur,  en  terre  battue,  renforcées  par  un  petit  remblai 
de  terre,  pouiraient  rendre  les  mêmes  services  que  les 
obtacles  les  plus  larges  et  les  plus  variés. 

Le  terrain  serait  divisé  en  rectangles  dirigés  N.-S.  dans 
le  sens  de  la  longueur. 

L'essai  mérite  de  retenir  l'attention  des  pouvoirs  publics, 
en  raison  des  résultats  importants  qu'on  doit  en  attendre. 

L'immensité  des  parcours  ne  peut  être  un  obstacle  aux 
essais  qui  s'imposent.  L'application  des  méthodes  de  ((  dry 
farming  »  serait  autrement  difficile  et  onéreuse.  Mais  là,  il 
ne  s'agit  que  de  barrer  la  surface  des  steppes  de  remblais 
faciles  à  réaliser.  Et  les  vents,  facteurs  exclusifs  de  la 
grande  dissémination  des  herbages,  deviendront  pour 
l'homme  les  auxiliaires  sinon  indispensables,  du  moins  les 
plus  précieux,  pour  collecter  et  concentrer  aux  points 
choisis,  les  graines  éparses  dans  les  parcours,  ces  mêmes 
vents,  juscpi'alors  agents  de  dispersion  des  poussière^; 
minérales  et  des  poussières  fertilisantes,  permettront  d'uti- 
liser   avantageusement    les    débris    du    crottin    desséché, 


212  CONTRIBUTION    A   l'ÉTIJDE    DE    l'iNDUSTRIE 

rejeté  par  le  bétail  et  dont  la  destinée  n'était  rien  moins 
que  problématique. 

Avec  le  temps,  les  digues  ainsi  opposées  au  trop  large 
éparpillement  des  balayures  du  sol,  constitueront  plus  tard, 
autant  d'herbages,  où  le  stationnement  plus  prolongé  du 
bétail  permettra  le  dépôt  d'une  plus  grande  quantité  de 
crottin,  oià  la  plus  grande  partie  des  graines  restera  sur 
place  ;  nous  pensons  que,  dans  un  avenir  assez  prochain, 
le  revêtement  végétal  des  steppes,  instable  et  par  îlots,  fera 
place  à  une  végétation  à  localisation  fixe  et  en  nappe  con- 
timie.  Les  facteurs  météoriques  favorables  à  toute  végéta- 
tion, continueront  à  exercer  leur  action  comme  par  le 
passé  ;  mais  nous  aurons  contribué  à  faire  acquérir  aux 
graines  une  fixité  relative  en  les  soustrayant,  dans  une 
certaine  mesure,  à  l'action  mécanique  totale  des  vents. 

C.  BEN  DANOU, 

Ancien   Pvépiii<i\fnv  iVIIydiènc  r\  Zoolcchnic  à  l'Ecclc  ISiilionalc 

iTAiiricultiirr  de  MonipelUer, 

Vétérinaire   Vdccinnleiir  à  Méchéria  (Siud-Orannis). 


SUR    LA    PLAGE    D'AÏN-EL-TURCK 


Le  i8  avril  191a,  M.  JMaiiciic  iii'écnvail  : 

((  M.  Vassas.  maire  dAïii-i'l-'lurck,  m'annonce  qu'un 
raz  de  marée  a  enlevé  tout  le  sable  de  la  plage  et  a  mis  à  nu 
des  rochers  insoupçonnés  par  les  plus  vieux  habitants  de 
la  localité,  non  loin  de  l\'ndroit  où  je  signalais  les  luines 
d'anciennes  carrières  berbères.  En  cet  endroit  donc, 
-M.  Vassas  a  pu  se  rendre  compte  de  la  façon  donl  les 
Berbères  procédaient  pour  extraire  leins  meules  dans  ces 
carrières  de  grès  d'origine  marine. 

'  Ils  creusaient  dans  le  roc,  ajoute  M.  Vassas,  une 
circonférence  d'environ  o'"  10  de  profondeur  el,  au  moyen 
d'un  burin  quelconque,  probablement,  ils  soulevaient  le 
cercle.  Souvent  l'opération  donnait  un  mauvais  résultat  ; 
dans  ce  cas,  ils  abandonnaient  l'entreprise,  mais  plus 
souvent  aussi,  ils  réussissaient  et,  alors,  la  place  restait 
bien  nette  sous  forme  de  cuvette.   » 

Cette  communication  de  M.  Blanche  m'intrigua  fort,  car 
l'intéressante  observation  de  M.  Vassas  m'amenait  aussitôt 
à  envisager  certaines  hypothèses.  Aussi,  dès  que  j'en  eus 
le  loisir,  je  me  rendis  sur  les  lieux.  Je  parcourus  toute  la 
plage,  depuis  Saint-Roch  jusqu'au  Rocher  de  la  Bretonne, 
soit  sur  une  longueur  de  7  kilomètres.  Je  jugeai  inutile 
d'aller  jusqu'à  Falcon,  car,  du  Rocher  de  la  Bretonne, 
l'ensemble  de  la  cote,  à  l'Ouest,  me  parut  ne  pas  avoir 
subi  de  grandes  modifications.  D'ailleurs,  ce  détail  n'a 
aucune  importance  pour  l'étude  des  faits  que  je  veux 
mettre  en  relief  et  les  conséquences  que  j'en  ai  tirées. 

L'examen  des  lieux  et  1  étude  des  faits  qui  ont  précédé 
ou  accompagné  la  dégradation  de  la  plage,  m'ont  amené  à 
faire  quelques  observations  que  je  tiens  à  consigner. 

L  Description  et  constitution  géologique  de  la  plage. 
Etat  actuel.  Rectifications  à  apporter  à  la  carte.  —  Le 
substratum  de  la  plage  d'Aïn-el-Turck  est,  au  point  de  vue 


214  NOTE   SLR   LA   1>LA(.E   d'aÏN-EL-TURCK 

gcolog-iquc,  coiislilué  depuis  Saiiit-lioch  jusqu'à  Falcon  ', 
par  des  dépôts  quaternaires  d'origine  marine  (plage  sou- 
levée de  Poniei,  indiquée  sur  la  carte  géologique  au 
i/5o.ooo  d'Oran,  sous  l'indice  q„!.a  ).  Dans  certaines 
parties,  surtout  entre  la  ferme  Emerat  et  le  Rocher  de  la 
Uretonne,  les  bancs  quaternaires  s'élèvent  de  i  à  2  mètres 
au-dessus  de  la  mer,  formant  terrasse  et  basse  falaise. 

Vers  l'Est,  et  jusqu'à  Saint- Roch,  les  grès  quaternaires 
s'abaissent  presque  jusqu'au  niveau  de  la  mer  et  même 
au-dessous  ;  ils  dispaiaissent  presque  partout,  recouverts 
par  le  sable.  De  loin  en  loin,  émergent  de  petits  îlots,  très 
peu  saillants,  dont  chaque  coup  de  mer,  chaque  change- 
uient  de  direction  du  vent,  déplaçant  le  sable,  fait  varier 
ia  forme. 

Dans  les  parties  de  la  terrasse,  mises  à  nu  depuis  le 
Rocher  de  Ja  Bretonne  jusqu'à  3oo  mètres  à  l'Est  de  l'Aïn- 
Aounsar  =,  le  (quaternaire  marin  est  constitué  par  l'assise 
coquiUière  q  ],,  ,  à  pectoncles  très  nombreux.  J'y  m 
lecueilli  deux  exemplaires  du  Stroinbus  bubonius. 

Ce  niveau  n'était  nettement  apparent  jusqu'ici  que  sur 
les  falaises  Est  de  Falcon.  Maintenant  il  est  à  nu  sur  une 
longueur  d'environ  800  mètres.  Sur  tout  le  rest&  de  la 
terrasse  rocheuse,  l'assise  coquiUière  est  cachée  par  les  grès 
supérieurs  jaunes,  durs,  exploitables  dans  les  parties  attei- 
gnant par  places  i  à  2  mètres  d'épaisseur. 

La  dénudation  de  1916  jue  permet  donc  de  signalej' 
l'existence  des  couches  à  Stronibe  à  droite  et  à  gauche  de 
la  région  précitée,  oh  l'indice  q  ,î,.,i  doit  être,  sur  la  carie 
géologique  d'Oran,  remplacé  parq,,!  . 

Il  y  a  donc  là  une  nouvelle  station  du  Strombe,  espèce 
que  j'avais  déjà  récoltée  dans  l'assise  de  Falcon. 

Au  sujet  du  Strombe,  puisque  j'en  ai  l'occasion,  je  rap- 
pellerai que  dans  une  note  parue  dans  le  Bulletin  3,  j'ai 
signalé  la  récolte  que  j'avais  faite  d'un  exemplaire  de  cette 
espèce  à  la  surface  du  sol,  aux  abords  du  chemin  de  Falcon 
au  Pain  de  Sucre.  J'en  cherchai  alors  vainement  la  prove- 
nance. 

Depuis,  j'ai  tiouvé  le  Strombe  dans  le  banc  coquillier  de 
la  falaise,  sous  les  villas  de  Falcon,  ce  qui  m'a  conduit  à 
expliquer  la  provenance  de  l'échantillon  récolté  à  la  surface 


I    Voir  les  cartes  données  dans   le   nulietin   de   mars    i(|i:" 
"  2  Ferme  Emerat. 
3  Soc.  Géogr.  Oran  1908,  p.  248. 


NOTE  SI  R  i.A  ri>\(;i:  d'aïn-el-turck  215 

du  sol,  à  ôo-Oo  nièlics  d'altiludc.  Cet  cxcniplaiic  u  été,  sans 
doute,  ii'liiô  du  |)uiU  >ilué  sur  le  chemin  el  dont  le  cieu- 
scnieul  a  altciul  la  zone  ccxiuiliière.  1/assise  (jualernaiie 
doit  donc  s  étendre  sous  la  [jelite  plaine  au  Sud  du  phare, 
^e  cpii  permet  de  due  (|ue  le  cap  a  été  d'abord  une  île  de  la 
nier  (piaternaire,  contre  hujuelle,  comme  à  Arzew,  les 
dé[»ots  marins  sont  veims  légèrement  se  relever. 

il.  —  Au  sujet  de  la  carrière  à  meules.  —  J'ai  retrouvé 
facilement  la  carrière  à  meules  que  M.  Vassas  a  signalée  à 
M.  Blanche.  Elle  est  située  à  environ  3oo  mètres  à  l'Est  de 
l'Aïn-Aounsar,  devant  le  cabanon  de  M.  IJeineck,  à  l'extré- 
mité Ouest  du  faubourg  Saint-Maurice.  Les  bancs  qui  ont 
été  exploités  par  les  tailleurs  de  meules  s'étendent,  à  droite 
et  à  gauche  du  cabanon,  sur  une  longueur  totale  de  5o  à 
60  mètres.  La  largeur  de  la  terrasse  est  en  moyenne  de  5  à 
G  mètres. 

La  roche  coquillière  y  change  un  peu  d'aspect  ;  elle  est 
plutôt  constituée  par  des  débris  de  pectoncles  que  par  des 
fossiles  entiers.  En  outre,  la  lumachelle  est  intercalée  de 
lentilles  de  grès  jaunâtre  et  de  poudingue  de  gravier 
(juartzeux,  montrant  des  sections  d'huîtres,  il  en  résulte 
(|ue  l'ensemble  manque  d'homogénéité  ;  la  lumachelle 
blanche  est  bien  plus  dure  que  le  grès  jaune.  Aussi  l'enlè- 
vement de  meules  entières  devait-il  être  plutôt  rare. 

J'ai  compté  une  trentaine  d'emplacements,  marqués  par 
les  cuvettes  d'où  les  ouvriers  ont  réussi  à  extraire  les  meules 
ou  par  les  ébauches  mal  réussies  qu'ils  ont  abandonnées. 
Les  meules  ont  un  diamètre  de  o""  4o,  les  cuvettes,  près 
de  o'"5o.  Une  moitié  de  cuvette  a  un  diamètre  supérieur, 
environ  o'°70,  et  on  y  remarque  les  traces  du  procédé 
employé.  Sur  la  circonférence  limite,  l'ouvrier  forait,  de 
distance  à  distance,  des  trous  qu'il  multipliait  probable- 
ment jusqu'à  ce  que  tout  l'anneau  fût  évidé. 

Ces  meules  ont-elles  été  taillées  par  le^  anciens  Berbères 
d'A'in-el-Turck  et  par  eux  seuls  ?  Tout  en  l'admettant  dans 
une  certaine  mesure,  je  n'irai  pas  jusqu'à  l'afïirmer. 

Tout  ce  que  je  puis  dire,  c'est  que  les  indigènes  du  Tell 
viennent  encore,  sur  certaines  parties  du  littoral,  tailler 
des  meules  dans  des  roches  appropriées. 

En  1906,  j'ai  vu,  sur  un  îlot,  au  bord  de  la  mer,  au  pied 
de  la  montagne  des  Lions,  non  loin  de  la  Plâtrière,  un 
indigène  qui  taillait  des  meules  dans  un  banc  de  poudingue 
quartzeux,  à  éléments  provenant  du  permien,  très  homo- 


-16  NOIE   SUB    r.A   PLAGE   d'aÏi\-EL-TURCK 

gène,  d'un  beau  giuin,  très  dur,  qui  lui  olïrait  une  roche 
de  qualité  bien  supérieure  à  celle  de  la  lumaclielle 
d'Aïn-el-Turck. 

En  résumé,  les  indigènes  contemporains  continuent  à 
tailler  les  meules  comme  leurs  prédécesseurs  berbères.  La 
carrière  d'Aïn-el-Turck  a  donc  pu  être  exploitée  d'abord 
par  les  Berbères,  puis  par  les  Arabes.  Une  étude  patiente 
des  procédés  d'extraction,  de  la  facture  des  diverses  formes 
de  meules  employées  chez  les  indigènes  anciens  et  moder- 
nes, pourrait  seule  fournir  des  éléments  pour  étayer  une 
opinion  plus  précise. 

III.  Carrière  près  du  Rocher  de  la  Bretonne.  — 
M.  Blanche  a  signalé  entre  l'Aïn-Aounsar  et  le  Bochei-  de 
la  Bretonne,  une  carrière  de  pierre  d'appareil  qui  aurait  été 
exploitée  par  les  Berbères.  Il  y  a  lieu  de  noter  aujourd'hui 
qu'une  exploitation  toute  récente  paraît  avoii"  fait  dispa- 
raître les  traces  de  l'ancienne. 

IV.  Dénudation  de  la  plage.  La  situation  actuelle  est-elle 
définitive  ?  —  Avant  la  tempête  qui  a  balayé  la  côte,  une 
couche  de  sable,  d'épaisseur  variable,  recouvrait,  presque 
partout,  les  rochers  de  la  terrasse  quateinaire  ;  la  plage 
sablonneuse  était  plus  épaisse  et  sa  ligne  de  rivage  d'une 
régularité  parfaite. 

Aujourd'hui  la  terrasse  qui  s'étend  du  milieu  de  la  plage 
Saint-Maurice  au  Bocher  de  la  Bretonne  est  absolument 
nue,  partout  la  roche  quaternaire  montre  ses  angles  et  ses 
aspérités. 

Vers  l'Est,  jusqu'à  Saint-Boch,  la  terrasse  s'affaisse, 
disparaît,  pour  ne  réapparaître  que  de  distance  en  distance, 
à  travers  le  sable  qui  la  couvre  encore  dans  sa  plus  grande 
étendue.  De  la  Douane  à  Saint-Boch,  le  sable  a  quelque  peu 
diminué  d'épaisseur,  mais  il  est  loin  d'avoir  complètement 
disparu.  La  plage  a  surtout  perdu  de  son  harmonie,  les 
vagues  ayant  labouré  sa  surface  et  dentelé  la  gracieuse 
ligne  de  rivage  qui  en  augmentait  la  beauté  '. 

La  question  qui  se  pose  aujourd'hui  et  qui  passionne  les 
habitants  du  village  est  celle  de  savoir  si  le  mal  est  irré- 


I  La  plage  ne  m'étant  pas  tirs  familière,  je  ne  saurais  fixer  l'épaisseur 
(le  la  couche  de  sable  enlevée  sur  toute  son  étendue.  Mais  je  n'ai  constaté 
aucune  modification  sensible  dans  l'état  de  la  plage  de  la  Douane.  Celle  de 
Bonisscville,  sur  sa  plus  grande  partie,  sera  remise  en  état  par  un  apport  de 
o,i5  à  G, 25  centimètres.  Celle  de  Saint-Roch  a  très  peu  souffert. 


NOTE   SIH    I    \    l'I    \i.l     I)    \|N    i:i.    irU(  K  -1/ 

paiablc.  Pour  \  lépoiidic,  il  sullil  de  se  rajipchu"  la  cause 
qui  a  ciéc  la  silualion  actuelle. 

La  cause  ?  Elle  est  indéniahlc.  C'est  l'éternelle  action  de 
la  niei-  qui,  à  échéances  plus  ou  moins  longues,  se  rue  sur 
la  ((Me  et  niodilie  la  ligne  de  rivage.  Mais  ce  qu  une  leni- 
péle  démolit,  une  autre,  souvent,  U'  reconstruit  et  réci- 
proquement. Au  travail  (r('n>si()ii  l'ait  suite  le  travail 
d'édification. 

C'est  une  violente  tempête  du  .Nord-Est,  frappant  per- 
pendiculairement la  cote,  (pii  a  dénudé  la  plage  ;  c'est  une 
autre  moins  violente  qui  l'ensablera  de  nouveau.  En  atten- 
dant, l'action  permancMite  des  vagues  agitées  par  la  brise 
continuera  le  travail  de  reconstitution  déjà  commencé. 

Il  est  à  remarquer  (pie  la  dénudation  a  été  intense  dans 
les  parties  les  plus  étroites  de  la  plage  où  la  haute  falaise 
se  rapproche  le  plus  de  la  ligne  de  rivage. 

En  face  de  la  Douane,  de  Bouisseville,  de  Trouville  et 
Saint-Roch,  où  la  plage  est  au  moins  deux  fois  plus  large 
qu'à  l'Ouc-st,  les  vagues  en  s'étalant  davantage  ont  produit, 
en  se  retirant,  des  dégâts  bien  moindres. 

Reste  maintenant  à  savoir  si  la  situation  est  irrémédiable. 

D'abord,  à  mon  avis,  elle  n'est  pas  aussi  critique  (jue  le 
supposent  les  habitants  d'A'in-el-Turck  et  si,  sur  quelques 
points,  les  baigneurs  auront  cette  année  à  franchir  une 
terrasse  rocheuse  de  5  à  lo  mètres  de  largeur,  ils  trou- 
veront le  sable  eh  pénétrant  dans  l'eau.  Partout  ailleurs, 
les  enfants  pourront  continuer  à  jouer  sur  le  sable,  avec 
cette  différence  c^ue  le  tapis  sera  moins  beau  que  l'ancien. 

J'ajouterai  maintenant  que  la  situation  actuelle  n'est 
pour  moi  qu'accidentelle,  passagère.  Je  suis  convaincu 
qu'un  jour  ou  l'autre  l'ensablement  se  reproduira,  soit 
lentement  sous  l'action  des  brises  de  l'Ouest,  soit  brusque- 
ment sous  celle  plus  rai)ide  d'une  petite  tempête. 

J'appuie  mon  opinioji  surtout  sur  ce  fait  que  la  carrière 
à  meules  en  offre  la  preuve  la  plus  évidente.  Les  indi- 
gènes ne  l'ont  pas  dénichée  sous  le  sable,  ils  ne  l'ont 
exploitée  que  lorsque,  comme  aujourd'hui,  la  terrasse 
quaternaire  s'est  trouvée  à  nu,  et  à  une  époque  où  les 
grandes  dragues  n'étaient  pas  inventées.  Il  est  aussi  permis 
d'admettre  cju'à  diverses  reprises,  la  mer  les  a  obligés  à 
abandonner,  })our  un  certain  temps,  l'exploitation. 

A  ceci  j'ajout(>rai  qu'un  habitant  d'.Vin-el-rurck,  à  qui 
j'objectais  que  ce  n'était  sans  doute  pas  la  première  fois 

15 


218  NOTE   SUR   LA   PLAGE   d'aÏN-EL-TURGK 

que  la  plage  avait  été  dénudée,  me  répondit  aussitôt  : 
((  11  y  a  environ  3o  ans,  j'ai  vu  la  côte  nue  comme  au- 
jourd'hui ».  Quoique  ce  témoignage  ait  une  réelle  valeur, 
je  ne  veux  pas  le  retenir.  La  preuve  offerte  par  la  carrière 
à  meules  est  sulïisante. 

Donc,  à  mon  humble  avis,  la  situation  est  loin  d'être 
irrémédiable.  Ce  qui  permet  d'espérer  une  amélioration 
assez  rapide  de  la  situation,  c'est  que  la  plage  sous-marine 
se  reconstitue  manifestement  ;  à  marée  basse,  de  larges 
lambeaux  émergent  déjà  et  peuvent  être  parcourus  à  pied 
sec  entre  la  villa  Santocildes  et  le  Rocher  de  la  Bretonne, 
c'est-à-dire  dans  la  partie  qui  a  le  plus  souffert. 

Le  vent  aidant,  le  sable  s'étalera  sur  les  parties  basses 
et  les  nivellera.  Déjà  entre  Bouisseville  et  Saint-Roch,  où 
la  plage  est  moins  endommagée,  un  bourrelet  de  sable  est 
édifié,  en  bordure  de  la  ligne  de  rivage,  par  le  lent 
travail  des  vagues.  En  été,  quand  le  sable  sera  sec,  la  brise 
de  mer  l'étalera  sur  la  plage. 

* 

Je  terminerai  cette  note  en  félicitant  M.  Vassas  d'avoir 
attiré  l'attention  de  M.  Blanche  sur  sa  découverte  de  la 
carrière  à  meules.  Ce  fait  prouve,  une  fois  de  plus,  que 
toute  personne  de  bonne  volonté  peut  rendre  des  services 
à  la  science.  Il  est  regrettable  que  M.  Blanche,  trop  éloigné 
aujourd'hui  d'Aïn-el-Turck,  n'ait  pu  lui-même  aller 
recueillir  sur  place  les  éléments  d'une  note  plus  docu- 
mentée. Puisse  la  mienne  rassurer  la  population  et  les 
estiveurs  de  la  charmante  station  balnéaire  à  laquelle  la 
reconstitution  de  la  plage  et  la  construction,  à  bref  délai, 
de  la  voie  ferrée,  apporteront  bientôt  un  nouveau  surcroît 
de  prospérité. 

F.  DOUMERGUE. 


OBSKRVATION.S    MÉTÉOROLOGIQUKS 


219 


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OBSKRVATOIHE    DE    SANTA-CRUZ 


Étude  des  Vents  du  1^'  décembre  1914  au  i^''  juin  1915 


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BIBLIOGRAPHIE 


RÈCVEIL  Di:s  TEXTES  l.ECISLATIES  ET  .If  HflilQVES  (:f)i\CE^l\^^T  LES 
ISItAElJTES  DE  Tl'lSISIE  DE  1857  A  11)13,  ;,miolcs  et  rurumcntés  p,ir 
H.   Auuhti,   I    vnl.   iii-8°.  Tunis,   uii"). 

Tout  lo  monde  ?ait  que  les  Lstraëlites  de  Tunisie  sont  soumis  ii 
vnie  juridiction  spéciale  pour  ce  qui  concerne  leur  culte,  l'assis- 
tance publique,  leur  statut  personnel.  Mais,  jusqu'ici,  pour 
connaître  les  lois  et  règlements  applicpiaut  celte  juridiction,  il 
fallait  faire  de  longues  et  fastidieuses  recherches,  soit  dans  le 
Journal  Officiel  de  la  Régence,  soit  dans  les  divers  codes  tuni- 
siens. Il  manquait  un  ouvrage  réunissant  spécialement  cette 
matière  ;  c'était  une  lacune  regrettable  pour  ceux  qu'intéresse 
la  sociologie  tunisienne. 

M.  le  grand  rabbin  Arditti,  délégué  du  Gouvernement  tixnisien 
près  la  Caisse  de  Secours  et  de  Bienfaisance  israëlite,  a  comblé 
cette  lacune.  Son  livre,  présenté  sans  prétention,  est  cependant 
une  œuvre  importante  réunissant  tous  les  décrets,  arrêtés  et 
jugements,  faisant  jurisi)rudence  et  qui  s'appliquent  spéciale- 
ment à  ses  coreligionnaires  indigènes,  depuis  la  promulgation 
du  Pacte  fondamental  (i^""  septembre  1807),  jusqu'au  3i  décem- 
bre ipiS.  Ce  livre  est  en  quelque  sorte  le  Code  du  statut  personnel 
des  Juifs  tunisiens.  L'auteur  ne  s'est  pas  contenté  de  faire  œuvre 
de  compilation.  Il  a  joint  au  texte,  chaque  fois  que  l'utilité  s'en 
présentait,  des  note^  et  des  commentaires  auxquels  sa  connais- 
sauce  approfondie  des  questions  qu'il  traite,  donne  un  haut 
intérêt. 

La  première  partie  de  l'ouvrage  se  termine  par  un  projet  de 
réorganisation  du  Culte  et  de  l'Assistance  publique  Israélites  qui 
paraît  fort  bien  conçu,  s'accordant  tout  à  fait  avec  les  principes 
modernes  appliqués  chez  les  peuples  civilisés  (voir  pages  97  et 
suivantes).  En  dehors  des  vues  personnelles  si  intéressantes  qu'il 
renferme,  ce  projet,  par  contraste,  met  vivement  en  lumière  le 
caractère  insufTisant  et  archaïque  de  l'organisation  actuelle. 

TTn  index  alphabétique  des  matières  traitées  complète  le  livre, 
qui  sera,  croyons-nous,  d'un  grand  secours  à  l'administration 
locale,  au  sociologue,  à  l'historien,  à  la  magistrature,  au  barreau, 
à  tous  ceux,  en  \m  mot,  qui  ont  à  connaître  des  questions 
tunisiennes. 

A.  COUR. 


222  BIBLIOGRAPHIE 

LES  ARCHIVES  BERBÈRES.  Puhlicaliun  du  Comilé  d'Etudes  berbères  de  Rabat. 
Vol.    I,  fascicule   i   (191.")). 

Par  décision  de  M.  le  général  Lyautey,  Résident  général  de 
France  au  Maroc,  il  a  été  créé,  le  9  janvier  kjiB,  à  Rabat,  un 
Comité  d'Etudes  berbères. 

En  instituant  ce  Comité,  le  Résident  général,  qui  a  toujours 
favorisé  l'étude  scientifique  des  tenitoires  qu'il  a  commandés, 
((  s'est  donné  pour  but  de  centraliser  les  travaux  établis  dans  les 
différentes  régions  sur  les  populations  berbères  du  Maroc,  et 
d'en  retirer  des  résultats  pratiques  concernant  l'organisation 
et  l'administration  des  tribus.  » 

Le  Comité  aura  pour  organe  :  Les  Archives  Berbères,  dont 
l'administration  est  confiée  à  la  Direction  du  Service  des  Rensei- 
gnements. Le  budget  du  Protectorat  assurera  les  frais  de 
publication. 

Le  Comité,  nommé  par  le  Résident,  est  composé  de 
MM.  Gaillard,  président,  Loth,  Riarna\ ,  colonel  Simon,  com- 
mandant Rerriau,  Nehlil. 

On  ne  saurait  qu'applaudir  à  l'initiative  du  Résident  général 
et  faire  des  vœux  pour  qu'elle  soit  couronnée  de  succès,  La 
constitution  du  Comité  nous  est  un  sîir  garant  que  l'oeuvre 
prospérera. 

Le  premier  fascicule  des  Archives  est  présenté  par  un  article 
de  M.  le  colonel  Simon,  qui  expose  le  Inil  poursuivi  et  fait 
ressortir  l'utilité  des  Etudes  berbères,  an  point  de  vue  de  leur 
application  en  matière  de  politique  et  d'administration.  Nul 
n'était  mieux  (pudifié  que  le  colonel  Simon,  pour  une  telle  pré- 
sentation. Très  versé  dans  toutes  les  branches  de  la  question 
indigène,  directeur  du  Service  des  Renseignements  de  la 
Résidence,  il  sera,  pour  ses  collaborateurs,  le  guide  le  plus  sûr, 
le  plus  expérimenté. 

L'introduction  du  colonel  Simon  est  suivie  de  quelques  articles 
fort  intéressants  et  intitulés  :  Les  Chants  populaires  du  Rif,  par 
M.  Biarnay  ;  Le  Mariage  des  Berbères,  par  M.  Laoust  ;  L'Arzef 
des  tribus  berbères  du  Haut-Guir,  par  M.  Nehlil. 

Jusqu'ici  on  ne  connaissait  à  peu  près  rien  de  la  poésie  rifaine 
et  de  la  législation  coutiimière  des  tribus  du  Haut-Atlas.  On  ne 
peut  donc  que  féliciter  MM.  Biarnay  et  Nehlil,  d'avoir  publié 
ces  premiers  documents.  L'article  de  M.  Laoust  intéressera  aussi 
bien  les  profanes,  que  les  arabisants,  bcrbérisants  et  maroca- 
nisants. 

l"n  fait  que  nous  nous  plaisons  à  constater,  c'est  que  ces 
travaux  sont  sig'nés  par  d'anciens  élèves  de  l'Ecole  des  Lettres 
d'Alger  (aujourd'hui,  Faculté),  qui,  de|»iiis  longtemps,  sont 
prépaies  à  produire  des  études  plus  méthodiques,  plus  scienti- 
fiques, (jue  bon  nombre  de  celles  publiées  jadis  par  leurs 
devanciers. 


BIBLIOGRAPHIE  223 

Puisse  cette  savante  collaboration  être  le  présage  d'une  ample 
floraison  de  beaux  travaux  ;  puisse-t-elle  nous  apporter  l'assu- 
rance que  la  cloison  étanche  que  certains  rêvent  d  etiiblir  sur  la 
fnmlic'-n'  algéro-marocaine  ne  sera  [)as  élevoe.  Le  Maroc  <'t 
l'Al^iférie  sont  les  parties  d'une  même  France,  dont  nul  n'a  le 
droit  de  sacrifier  les  intérêts  généraux  à  la  satisfaction  des 
intérêts  égoïstes  de  quelques  pei-sonnalitcs.  Notre  nouveau 
protectorat  ne  doit  pas  être  complètement  tunisifié. 

Sauf  au  point  de  vue  administratif  et  financier,  dont  l'auto- 
noniic  régionale  est  encore  pour  longtemps  nécessaire,  notre 
Afrique  du  Nord  doit  tendre  à  s'unifier  dans  tous  les  domaines  de 
notre  action  civilisatrice  :  relations  économiques,  sociales, 
scientifiques,  doivent  trouver  les  frontières  ouvertes.  II  faut 
viser  à  développer  au  Maroc,  comme  en  Algérie  d'ailleurs,  une 
nuenlalilé  française  et  non  un  particularisme  marocain.  Le  pacte 
d'union  nationale  que  les  populations  de  l'Afrique  du  Nord 
scellent  de  leur  sang  sur  les  champs  de  bataille  de  la  Patrie 
meurtrie,  ne  doit  pas  être  rompu.  La  France,  reconnaissante,  ne 
le  permettrait  pas.  Aux  hommes  de  lettres,  aux  hommes  de 
scieiue,  d«'  semer  les  germes  de  l'unification  morale  futurt\ 
A  d'autres  de  préparer  l'unification  économique  et  politique. 

Nul  doute  que  le  Comiic  des  Etudes  berbères  tiendra  à  parti- 
ciper à  cette  œuvre  éminemment  patriotique.  Nos  meilleurs 
vfeux  l'accompagnent  dans  l'accomplissiement  de  la  tâche  qu'il 
s'est  assignée  ;  nous  souhaitons,  de  grand  cœur,  que  les  jeunes 
Arriiires  Berbères  deviennent,  bientôt,  le  digne  pendant  des 
belles  Archives  Marocaines. 

F.  DOUMERGUE. 


à 


PROCÈS-VERBAUX  DES  RÉUNIONS 

(le    la    «  Société    de    Géographie    et    d'Archéoloiçie    d'Oraii  » 


RÉUNION  MENSUELLE  DU  COMITÉ  ADMINISTRATIF 
Séance  du  12  Avril  1916 


Présidence  de  M.  Doumeugue,   président 


La  séance  est  ouverte  à  5  heures  et  demie. 
'     Sont  présents  au  Comité  :  MM.  Dolmergue,  Pock,  Tournier. 
DÉcnAUD,  abbé  Fabre,  Kriéger,  Pellet,  D""  Sandras. 

Absents  excusés  :  MM.  général  Basciiuing,  RéreiNger,  Aram- 
bourg,  Hi  or,  LcMoissoN,  de  Paciitere,  Roux-Freyssineng, 
mobilisés  ;  MM.  Flaiiault,  Dangles,  Dupuy,  Pérez,  René- 
Leclerc. 

Absents  :  MM.  Lami  r,  Pontet,  Pousseur. 

En  ouvrant  la  séance,  le  Président  annonce  au  Comité  que 
M.  le  Secrétaire  général,  commaniUint  Bérenger,  est  parti  en 
colonne  et  qu'il  y  aura  lieu  de  nommer  un  secrétaire  de  la  séance. 
Il  fait  aussi  connaître  que  KÎ.'Lèmoïsson  vient  d'être  mobilisé, 
ce  qui  porte  à  sept  le  nombre  des  membres  du  Comité  remplis- 
sant actuellement  leurs  obligations  militaires. 

M.  TouRNiER,  désigné  comme  secrétaire,  lil  !c  procès-verbal 
die  la  dernière  séance,  (fui  est  adopté. 

Avant  d'aborder  l'ordre  du  jour,  le  Président  rappelle  que  la 
Société  vient  encore  de  perdre  deux  de  ses  membres  :  M.  Carra - 
fang,  délégué  financier,  colon  à  Saïda,  et  M.  Ben  Rahou,  de 
Nemours.  Il  salue  la  mémoire  de  ces  denx  sociétaires  qui.  depuis 
de  longues  années,  étaient  dévoués  à  notre  œuvre. 

Sont  acceptés  comme  membres  titulaires  : 

MM.  le  capitaine  Noël  et  Solignac,  présentés  dans  la  séance 
de  mars. 

Est  proposé  comme  membre  lituluire  : 


PROCÈS-VERBAUX  DES  REUNIONS  DR   I.A   SOCIÉTÉ  225 

M.  Agostim,  diroctoiir  do  la  succursale  de  la  Banque  de 
rAlgérie,  à  Oran,  présenté  par  MM.  Rérenger  et  Doumergue. 

Le  Président  nous  fait  part  (pic  l'un  de  nos  sociétaires, 
M.  SKcirKT,  professeur-adjoint  au  Lycée  d'Oran,  sous-ofTîcler 
d'infanterie,  a  été  cité  à  l'ordre  du  jour  de  l'Armée,  pour  sa 
lirillante  conduite  pendant  l'assaut  d'une  tranchée.  Le  Comité 
charge  le  Secrétaire  général  de  transmettre  ses  félicitations  et 
ses  meilleurs  vœux  à  M.  Sicciikt. 

Le  Comité  vote  une  adresse  de  félicitations  à  M.  le  Préfet 
d'Oran,  ({ui  vient  d'être  élevé  au  grade  d'officier  de  l'ordre  italien 
des  Saints  Maurice  et  Lazare,  pour  le  dévouement  dont  il  a  fait 
preuve  à  l'occasion  de  l'affaire  du  Libano. 

Au  sujet  des  concours  ouverts  en  191/j,  aucun  manuscrit 
n'ayant  été  adressé,  il  est  décidé  cpie  les  mêmes  questions  seront 
maintenues  pour  l'année  igrô.  Le  programme  sera  rappelé  dans 
le  Bulletin  du  2®  trimestre. 

La  bibliothèque  a  reçu  : 

De  MM.  Hartert  et  W.  Rothschild,  deux  nouveaux  fascicules  de 
leur  publication  sur  VExplovaiion  scientifique  du  Sahara 
Algérien  ; 

De  M.  Ernest  Chantre,  deux  brochures. 

Des  remerciements  sont  votés  aux  auteurs  donateurs. 

La  bibliothèque  a  acquis  : 

]'oyaçie  au  Maroc,  par  M.  Oscar  Daniirbcl,  et  diverses  publi- 
cations sur  la  guerre  actuelle. 

La  commande  de  tî.ooo  fiches  pour  continuer  le  classement 
des  ressources  de  la  bibliothèque  est  autorisé  par  le  Comité. 

A  ce  sujet,  le  Pi-ésident  annonce  qu'en  outre  des  fiches  de  la 
grande  bibliothètpie,  il  a  été  établi  3. 000  fiches  concernant  les 
travaux  les  plus  importants  parus  dans  les  puldications  pério- 
diques. 11  espèn;  que  d'ici  à  la  fin  de  l'année,  le  nombre  total 
des  fiches  pourra  atteindre  le  chiffre  de  7.000,  ce  qui  triplera 
on  (piadruplera  la  valeur  de  noire  lubliothcque. 

îl  est  décidé  que  la  prochaine  séance  de  mai  tiendra  lieu 
d'Assemblée  générale,  la  réunion  annuelle  n'ayant  pas  lieu.  Le 
.■secrétaire  général  y  lira  son  rapport  et  le  Trésorier  présentera 
le  compte  administratif  relatif  à  l'année  191^. 

L'ordre  du  jour  étant  épuisé,  la  séance  est  levée  à  fi  heures  4o. 

Le  Secrétaire,  Le  Président, 

Signé  :  TOURNIER.  Si^né  :  DOUMERGUE. 


226         PROCÈS-VERBAUX  DES  REUNIONS  DE   LA   SOCIÉTÉ 

RÉUNION  MENSUELLE  DU  COMITÉ  ADMINISTRATIF 

Séance  du  3  Mai  igiD 


Présidence  de  M.  Dotimehgiîk,  président 


La  séance  est  ouverte  à  5  heures  et  demie. 

Sont  présents  au  Comité  :  MM.  Doumergue,  Flahault, 
Rérenger,  Pock,  TouRiMER,  abbé  Fabre,  Kriéger,  Lemoisson, 
Pellet,  D""  Sandras.  ■ 

Absents  excusés  :  MM.  général  RascuuiN(;,  Aramboirg,  Huot, 
DE  Pacutkre,  Roux-Freyssi\eng,  mobilisés  ;  Déchaud,  Dupuy, 
Pérez,  René  Leclerc. 

Absents  :  MM.  Dangles,  Lamur,  Pontet,  Pousseur. 

Le  procès-verlial  de  la  séance  du  12  avril  est  lu  et  adopté. 

Avant  d'aborder  l'ordre  du  jour,  le  Président  rappelle  que  la 
Société  vient  encore  de  perdre  un  de  ses  membres,  M.  Roman, 
directeur  des  Postes  et  Télégraphes  du  département  d'Oran. 
Il  annonce  aussi  le  décès,  survenu  à  Alger,  de  M.  Mantoz, 
directeur  des  Contributions  Diverses  en  retraite,  qui  fut,  jusqu'à 
ces  derniers  mois,  membre  de  notre  Société.  En  exprimant  les 
regrets  causés  par  la  disparition  de  ces  deux  hauts  fonctionnaires 
également  estimés,  il  renouvelle,  au  nom  du  Comité,  aux 
familles  atteintes  par  ces  deuils,  l'expression  de  ses  sincères 
condoléances. 

Est  accepté  comme  membre  titulaire  : 

M.  Agostini,  présenté  à  la  dernière  séance. 

Est  admis  comme  membre  à  vie  : 

M.  le  capitaine  Noël. 

Sont  présentés  comme  membres  titulaires  : 

M.  Dervieux  Henri,  agent  dépositaire,  boulevard  National,  à 
Oran,  présenté  par  MM.  Lauret  et  Soulier. 

M.  Dubois,  docteur  en  médecine,  boulevard  François  Le&cure, 
à  Oran,  présenté  par  MM.  Bérenger  et  D""  Sandras. 

MM.  Vassas,  propriétaire,  maire  d'Aïn-el-Turck,  présenté  par 
MM.  Sabouret  et  Pallary. 

Deux  manuscrits,  envoyés  pour  le  Bulletin,  sont  remis  à  des 
membres  du  Comité  pour  appréciation. 

Le  Président  annonce  qu'il  vient  de  recevoir  le  premier  fasci- 
cule des  Annales  Berbères,  publiées  par  le  Service  des  Rensei- 


PROCÈS-VERBAUX   DES   REflMONS   DE   I.A    SOCIÉTÉ  227 

gncments  du  Maroc.  Il  so  pn^iosede  consacrer  une  notice  hihlio- 
j,M-aj>lii([ue  à  ce  premier  fascicule.  Kn  adcndaiil,  le  Cf)rnif(' 
soiiliailo  le  plus  vif  succès  à  la  nouvelle  pid)li(  atioii. 

La  parole  est  ensuite  doniire  a\i  Secrélaire  général  [xiur  la 
lecture  du  rapport  annuel. 

^lis  aux  voix,  le  rap{)ort  est  adopté  et  le  Comité  vote  des 
félicitations  à  son  auteur. 

Le  Président  s'associe  tout  parliculièreinent  aux  sentiments 
exprimés  [)ar  le  (^.omité  ;  il  tient  à  faire  remarquer  que,  quoique 
mobilisé,  ayant  h  assurer  l'organisation  et  l'administration  de 
son  bataillon,  le  commandant  Béuengeh  a  rempli  ses  fonctions 
de  Secrétaire  général  avec  la  plus  stricte  ponctualité.  Il  se  fait 
un  devoir  de  lui  en  exprimer  toute  sa  reconnaissance. 

Le  Trésorier  lit  ensuite  le  rapport  financier  et  présente  le 
Compte  administratif  de  l'exercice  191/4. 

Les  chiffres  présentés  sont  admis  et  le  Comité  remercie  le 
Trésorier  de  son  dévouement. 

Le  Comité  décide  qu'étant  donné  le  déficit  à  prévoir  [)our 
i()i5,  le  reliquat  de  1914  sera  attribué  aux  recettes  de  1910. 

L'ordre  du  jour  étant  épuisé,  la  séance  est  levée  h.  7  heures. 

Le  Secrétaire  général.  Le  Président, 

Signé  :  BÉRENGER.  Signé  :  DOUMERGUE. 


Rapport  du  Secrétaire  Général 
sur  la  marche  et  les  travaux  de  la  Société  pendant  l'année  lOi^i 


Messieurs  et  chers  Collègues, 

Il  est  d'usage  que  le  Secrétaire  général  fasse  tous  les  ans, 
à  l'Assemblée  générale,  l'exposé  des  traA^aux  de  la  Société  pendant 
l'année  écoulée.  Le  Comité,  suivant  l'exemple  donné  par  les 
grands  groupements,  a  décidé  que  cette  réunion  annuelle  serait 
remise  à  l'année  prochaine.  Il  n'en  reste  pas  moins  qne  votre 
Secrétaire  général  a  le  devoir  de  vous  rendre  compte,  ainsi 
qu'aux  Sociétaires,  de®  résultats  obtenus  en  igi/i-  H  ne  saurait 
se  dérober  à  cette  obligation.  Mais,  auparavant,  il  vous  demande 
de  vouloir  bien  s'associer  à  lui  pour  saluer  rcspectueuscinent  la 
mémoire  de  ceux  de  nos  Sociétaires  qui  sont  tombés  glorieuse- 
ment sur  ks  champs  de  bataille  et  de  ceux  que  la  maladie  a 
cruellement  ravis  à  notre  affection. 


228  PROCÈS-VERBAUX  DES  RÉUNIONS  DE   LA  SOCIÉTÉ 

Les  notices  nécrologiques  qui  leur  ont  été  consacrées  dans  le 
Bulletin  me  dispensent  de  vous  ra])polor  leurs  qualités  et  les 
services  qu'ils  ont  rendus  à  la  Science  et  à  la  Patrie. 

Unissons-nous  donc  dans  une  même  pensée  reconnaissante 
pour  mieux  perpétuer  leur  souvenir  ;  adressons-leur  notre 
dernier  adieu  et  renouvelons  à  leurs  familles  l'expresision  de  nos 
vives  sympathies. 

En  votre  nom,  j'adresse,  à  ceux  de  nos  collègues  qui  font  leur 
devoir  à  la  frontière,  l'hommage  de  notre  admiration  et,  avec 
nos  meilleurs  souhaits,  l'expression  de  notre  affectueux  souvenir. 
Puissent-ils  contribuer  à  repousser  les  hordes  qui  se  sont 
ruées  sur  notre  belle  France  et  qui,  scientifiquement  organisées 
|>our  la  (lestniction  de  nos  villes  et  de  leurs  monuments,  font 
plus  de  ravages  que  les  grands  cataclysmes  de  la  nature. 

Ces  préliminaires  achevés,  je  vais  faire  rapidement  un  exposé 
de  l'état  et  des  travaux  de  la  Société  en  191/1. 

Effectif  numérique  de  la  SociéU'.  —  Le  nombre  de  membres 
était  :  an  i"  mai  191/1,  de  /jifi  ;  au  t®'  mars  t9i5,  de  ^21.  soit 
une  augmentation  de  5  membres. 

Quatre  sociétaires  ont  été  lues  à  l'ennemi  et,  pendant  le 
deuxième  semestre,  le  recrutement  a  dû  être  à  peu  près  suspendu. 

Du  fait  des  événements  actuels,  une  diminution  sensible  est 
à  prévoir  en  1915  ;  mais  il  y  a  lieu  d'espérer  (pi'après  la  guerre 
le  recrutement  sera  plus  actif.  Tl  faudra  faire  appel  à  tous  ceux 
(fui  auront,  enfin,  compris  que  la  science  est  un  des  éléments  de 
la  force  d'nn  pays. 

Erunions  du  Comitr  «dminisiratif.  —  Le  nombre  des  séances 
du  Comité  a  été  de  10.  en  dehors  de  l'Assemblée  générale,  avec 
une  moyenne  de  12  inembres  présents. 

Malgré  l'appel  sous  les  armes  de  7""  membres  du  Comité,  le 
(fiianlum  a  été  toujours  al  teint  et  aucune  séance  n'a  dû  rire 
ri'mise. 

Bulletin.  —  Produire  notre  Bulletin  a  été  la  pensée  constante 
de  notre  Comité  et  surtout  celle  de  notre  dévoué  Président. 

Les  deux  premiers  fascicules  de  1914  ont  été  distribués  en 
temps  voulu  ;  mais  la  mobilisation  ayant  désorganisé  le  per- 
sonnel de  l'imprimerie,  le  fascicule  du  3*^  tiimestre  n'a  pu  être 
composé.  Quand  l'atelier  a  rouvert  ses  portes,  il  a  fallu  réduire 
en  un  seul  les  fascicules  des  3®  et  ff  trimestres.  Cette  solution 
nous  était  d'ailleurs  imposée  par  la  diminution  inévitable  de  nos 
ressources. 

Les  trois  fascicules  de  l'année  igih  forment  néanmoins  im 
vohime  de  490  pages,  dont  l'intérêt  ne  le  cède  en  rien  à  celui 
des  bulletins  des  années  précédentes.  Vous  avez  pu  en  juger  par 


i'nocr':s-\  KRMAi  X  ui:s  iu':i  mons  de  i.a  sociiiiÉ        22U 

la    lecture   des    mémoires    publiés   el  doiil  je    vais    raftpeler   les 
[)iiueipaux. 

Capitaiue  Mksmkpv  :  Le  Territoire  militaire  d'Aïn-Sefra  (Sutl- 
Oranais).  Etude  ijâxjnipliiqne,  administrative,  sociale  et  jinan- 
cière,  de  1906  à  li)l'2.  —  Ce  travail  de  3oo  pages,  avec  Go  gra- 
phiques et  des  illustraliiius,  implicpie,  de  la  part  de  l'auteur,  un 
l'Iïorl  sérieux  et  une  documenlalion  à  laquelle  nous  sommes 
heureux  de  rendre  hommage.  Cest  une  étude  consciencieuse  el 
complète  de  la  situation  du  Territoire.  L'auteur,  après  avoir 
exposé  rapidement  et  méthodiquement  la  partie  gcnDgraphique  et 
historique,  fait  une  descriplion  scientifiijne  el  montn'  ce  qui 
a  été  l'ait  el  peut  être  fail  au  point  de  vue  de  l'utilité  praticpi»;.  - 
Mais  la  partie  la  plus  intéressante  de  son  mémoire  est  celh-  tpii 
montre  les  progrès  accomplis  au  point  de  vue  administratif, 
social  et  financier  dans  les  territoires  militaires  du  Sud,  sous 
rinllucnce  bienfaisante  du  nouveau  régime. 

En  félicitant  de  nouveau  Al.  le  capitaine  Mesmer,  pour 
l'œuvre  considérable  qu'il  a  réalisée,  nous  lui  souhaitons  vive- 
ment qu'il  puisse,  après  la  guerre,  nous  continuer  sa  savante  et 
précieuse  collaboration. 

A.  Cour  :  Un  acte  de  Horin  dclirré  à  un  hraîdite  par  un  Saïyd 
marocain.  —  La  lecture  de  ce  document  nous  montre  les  grandes 
tliUicultés  de  voyager  jadis  au  .Maroc,  sans  cette  pièce  protectrice 
qui  assurait,  à  celui  qui  en  était  nanti,  l'inviolabilité  de  sa 
personne  et  de  ses  biens. 

Dans  une  étude  fort  intéressante  :  Le  Préhistorique  au  Maroc 
Oriental  :  Ao<e  sur  la  station  de  Goutitir,  M.  le  capitaine  M.  Petit 
nous  décrit  d'importants  ateliers  de  silex  trouvés  dans  cette 
région.  C'est,  parmi  les  premières  publications  sur  la  préhis- 
toire marocaine,  une  des  plus  intéressantes.  Souhaitons  que  de 
nouvelles  découvertes  permettent  à  l'auteur  de  nous  envoyer 
bientôt  d'autres  communications. 

Comme  les  années  précédentes,  M.  TouRxNier  nous  a  donné  les 
Statistiques  du  mouvement  des  ports,  du  mouvement  com.m.ercial 
et  agricole  de  l'Oranie.  Nous  ne  saurions  trop  le  remercier  du 
soin  qu'il  apporte,  tous  les  ans,  à  établir  cette  documentation. 

MM.  Guillaume  el  Lhuillier  ont  continué  à  publier  les  résul- 
tats des  Observ<dions  météorologiques  de  Ui  station  de  Santa- 
Cruz  d'Oran.  Qu'ils  en  soient  remerciés. 

Bibliographie.  —  Les  ouvrages  offerts  à  la  bibliothèque  ont 
été  l'objet,  dans  la  mesure  du  possiible,  de  notices  bibliogra- 
phiques., dues  à  nos  collaborateurs  les  plus  dévoués. 

Certaines  sont  de  véritables  articles  qui,  malgré  leur  brièveté, 


230  PROCÈS-VETABAUX   DES   REUNIONS   DE    LA   SOCIETE 

renferment,    des    observations    et    des>    critiques    dont    l'intérêt 
s'ajoute  à  celui  du  mémoire  signalé. 

Que  MM.  CoLiR,  Doumkrgue,  abbé  Fabre,  Julien,  Lemoisson, 
à  qui  nous  devons  ces  analyses  bibliographiques,  veuillent  bien 
accepter  nos  remerciements. 

Bibliothèque.  —  D'importantes  améliorations  ont  été  appor- 
tées à  la  bibliothèque,  soit  au  point  de  vue  de  l'aménagement, 
soit,  surtout,  à  celui  de  l'acquisition  de  livreis.  Un  nouveau  corps 
de  bibliothèque  a  été  installé  dans  une  troisième  salle  et  le 
nombre  de  boîtes  à  fiches  a  été  augmenté. 

Pendant  l'année,  près  de  200  livres  et  brochures  sont  venus 
grossir  notre  collection  ;  les  uns  offerts  gracieusement  par  leurs 
auteurs  ;  les  autres,  et  le  plus  grand  nombre,  achetés  par  la 
Société. 

Malheureusement,  la  situation  actuelle  nous  oblige  à  restrein- 
dre, en  191 5,  les  dépenses  afférentes  à  l'achat  de  livres.  Aussitôt 
que  ce  sera  possible,  le  Comité  reportera  son  effort  sur  l'aug- 
mentation des  ressources  de  notre  bibliothèque  qui  est,  après  le 
Bulletin,  la  raison  d'être  de  notre  Société. 

En  attendant,  notre  dévoué  Président  s'occupe,  par  un  travail 
de  longue  haleine,  à  augmenter  la  richesse  de  nos  ressources 
bibliographiques. 

Concours.  —  Nous  avons  mis  au  concours  des  sujets  intéres- 
sant l'Algérie,  le  Sud-Oranais  et  le  Maroc.  Sur  deux  mémoires 
présentés,  vm  a  été  retenu  et  l'autre  renvoyé  à  son  auteur  pour 
être  revu  et  complété.  Un  prix  de  5o  francs  a  été  accordé  au 
lauréat,  M.  Blanche,  instituteur  à  Aïn-el-Turck,  pour  la  mono- 
graphie de  son  village. 

Cet  intéressant  travail  vient  d'être  publié  dans  le  i*""  fascicule 
du  Bulletin  de  1910  et  5o  exemplaires  ont  été  offerts  gratuitement 
à  son  auteur. 

Conférence.  —  Sous  les  auspices  de  notre  Société,  M.  Henri 
Mager,  ingénieur  en  hydrologie  souterraine,  a  fait  une  confé- 
rence sur  la  Recherche  des  eaux  souterraines  par  la  baguette,  le 
pendule  et  l'aiguille  aimantée,  qui  a  vivement  intéressé 
l'auditoire. 

Situation  financière.  —  Vous  n'ignorez  pas  que  l'état  de  guerre 
nous  a  valu,  pendant  le  deuxième  semestre,  un  fléchissement  des 
recettes  provenant  des  cotisations  non  encaissées  et  dont  le  mon- 
tant atteint  environ  le  quart  des  somnnes  à  recouvrer. 

Par  suite  de  ce  fléchissement,  le  Comité  s'est  vu  dans  l'obli- 
gation de  supprimer  ou  de  réduire  certaines  dépenses  pendant 
le  deuxième  semestre,  principalement  celles  relatives  au  Bulletin 
et  à  la  bibliothèque.  Par  ce  moyen  et  grâce  surtout  aux  subven- 
tions qui  nous  ont  été  intégralement  payées  et  aux  dons  reçus, 


PROCÈS-VERBAUX   DES   REUNIONS   DE    LA   SOCIÉjÉ  '231 

nous  avons  pu  effectuer  le  paieinenl  de  toutes  les  dépenses 
cnju^agées  et,  même,  enregistrer  un  léger  excédent  de  recettes. 

Mais,  eji  191  ô,  la  diminution  dos  ressources  ordinaires  jxjrU-ru 
sur  les  deux  semestres.  Comme  il  y  a  près  de  80  sociétaires  mobi- 
lisés, el  que  d'autres  peuvent  lëfre,  il  faut  escompter,  de  ce  côté, 
une  perte  d'environ  i.ooo  francs.  D'autres  ressources  peinent 
aussi  nous  faire  défaut.  Le  définit  est  donc  inévitable,  même  en 
rei>lreignant  le  plus  {K>ssil)le  nos  dépenses. 

La  situation  se  présente  donc  dans  des  conditions  moins  favo- 
rables que  pendant  l'année  qui  vient  de  s'écouler.  Aussi,  en  ces 
circonstances  pénibles,  le  Comité,  pénétré  de  l'utilité  de  l'œuvre 
intellectuelle  et  morale  qu'il  accomplit,  ne  doute  pas  que,  comme 
par  le  passé,  le  concours  éclairé  des  so<iétaires  et  celui  des 
Pouvoirs  publics  lui  restera  acquis.  Avec  leur  aide  la  Société 
continuera  à  participer  à  la  vie  intellectuelle  de  la  France,  de 
l'Algérie,  de  l'Oranie. 

Si  aucun  empêchement  matériel  ne  se  produit,  le  Bulletin  de 
igio,  pour  lequel  nous  avons  en  mains  la  copie  sulTisante,  sera 
publié  aussi  régulièrement  que  les  circonstances  le  permettront. 

Le  Comité  peut  donc  se  considérer  comme  satisfait  de  l'œiivre 
qu'il  a  pu  accomplir,  malgré  les  difficultés  de  l'heure  présente. 
Il  ne  doute  pas  qu'il  peut  compter  sur  le  concours  de  tous  les 
sociétaires  pour  réaliser  l'accomplissement  de  sa  tâche.  Il  les 
associe  au  voeu  qu'il  formule  :  que  la  victoire,  en  assurant  la 
prompte  libération  du  territoire,  nous  permette  de  nous  con- 
sacrer de  nouveau  entièrement  à  nos  oeuvres  de  paix.  En  leur 
nom  et  au  nôtre,  nous  adressons  notre  souvenir  ému  à  ceux  qui 
sont  tombés  au  champ  d'honneur,  nous  saluons  les  vaillants 
soldats  et  les  chefs  éminents,  qui  continuent  à  livrer  le  grand 
combat  pour  assurer  le  triomphe  de  la  justice,  du  droit  el  de 
la  liberté  des  peuples. 

Le  Secrétaire  général, 
BÉRENGER. 


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232  PROCÈS-VERBAUX   DES   REUNIONS   DE   I.A   SOCIETE 


Rapport  du  Trésorier 


J'ai  l'honneur  de  soumettre  aux  membres  de  la  Société  les 
comptes  de  l'année  igià- 

En  raison  des  événements  douloureux  qui  se  déroulent  dans 
notre  chère  patrie,  le  montant  des  cotisations  n'a  pas  atteint  le 
(hilTre  que  nous  avions  prévu  ;  un  grand  nombre  de  nos  socié- 
taires, étant  mobilisés,  n'ont  pu  être  touchés  par  les  recouvre- 
ments. Malgré  cela,  le  montant  de  toutes  les  recettes  est  supérieur 
à  celui  du  budget. 

Les  dépenses  ont  suivi  une  marche  normale,  ks  crédits  de 
trois  articles  n'ont  pas  été  épuisés  ;  par  contre,  le  dernier  article 
«  dépenses  diverses  et  imprévues  »,  a  dépassé  nos  prévisions,  par 
suite  de  la  confection  de  meubles-étagères  pour  la  bibliothèque, 
qui  prend  tous  les  jours  une  plus  grande  importance. 

L'excédent  des  recettes  sur  les  dépenses  s'élève  à  la  somme  de 
117  fr.  82.  Il  est  nécessaire  de  faire  remarquer  que  cet  excé- 
dent n'a  pu  être  réalisé  qu'en  réduisant  certaines  dépenses  du 
deuxième  semestre,  non  encore  engagées  :  bulletin,  reliure, 
achat  de  livres,  etc.,  et,  grâce  aussi  aux  subventions  annuelles 
qui  nous  ont  été  intégralement  versées  en  191 4- 

En  vertu  de  l'article  i4  de?  statuts,  je  me  tiens  à  votre  dispo- 
sition pour  l'affectation  de  c€t  excédent. 

Le  Trésorier, 
Siffné  :   E.   POCK. 


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236  PROCÈS-VERBAUX   DES   RÉUNIONS   DE    LA   SOCIETE 

HÉUMON  MENSUELLE  DU  COMITÉ  ADMIMSTUATIF 
Séance  du  7  Juin   1910 


Présidence  de  M.  Doumergue,  président 


La  séance  t^st  onvorlc  à  5  heures  et  demie. 
Sont    présenls    au    Comité   :    MM.    Doumergue,     Bérenger, 
TouRMEK,  Dangles,  Dupuï,  Kuiégek,  Pellet,  Pérez. 

Absents  excusés  :  MM.  général  Basciiung,  Arambourg,  Huot, 
Lemoisson,   de   Paciitere,    Roux-Frevssineng,    mobilisés  ;   Fla- 

UAULT,    POCK,    ReNÉ-LeCLERC,    D""   SanDRAS. 

Absents   :    MM.    Déciiaud,    abbé    Fabre,     Lamur,     Pontet, 

PoUSSEUR. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopté. 

Avant  d'aborder  l'ordre  du  jour,  le  Président  présente  à 
M.  Kriéger  les  meilleurs  vœux  du  Comité  pour  la  prompte 
^uérison  de  son  fils,  blessé  en  Orient.  Il  donne  des  nouvelles 
de  MM.  Arambourg,  Canal  et  Mesmer,  qui  se  rappellent  aux 
bons  souvenirs  des  membres  du  Comité. 

Il  nous  annonce  que  M.  Roux-Freyssineng  est  parti  pour  le 
front,  à  la  tète  de  sa  compagnie  de  Tirailleurs  et  que  M.  de 
Paciitere  a  été  promu  sous-lieutenant.  Leis  meilleurs  vœux  du 
Comité  accompagnent  nos  collègues. 

M.  le  capitaine  Noël  vient  d'être  nommé  chef  de  l'Annexe 
d'El  Aricha.  Le  Comité  est  tout  heureux  de  l'avancement  mérité 
dont  notre  distingué  collègue  et  collaborateur  vient  d'être  l'objet. 

Sont  acceptés  comme  membres  titulaires  :  MM.  Dervieux, 
Dubois  et  Vassas,  présentés  dans  la  séance  du  3  mai. 

De  la  part  de  M.  le  général  Lyauley,  Résident  (jénéral  de  la 
France  au  Maroc,  M.  Terrier,  directeur  de  l'Oflic  e  du  Gouver- 
nement Chérifien  et  du  Prot(;ctorat  de  la  République  Française 
au  Maroc,  nous  a  fait  parvenir  un  Rapport  sur  les  Commerces 
français,  (nuilais,  allemand  et  austro-hongrois  au  Maroc,  de 
1902  à  1913.  «  Ce  rapport,  dressé  par  le  Contrôle  de  la  Dette, 
est  destiné  à  faire  connaître  au  Commerce  et  à  l'Industrie  de  la 
Métropole  les  débouchés!  qui  s'ouvrei),t  à  t-ux  dans  le  Maroc 
français,  à  la  suite  de  la  disparition  du  commerce  austro- 
allemand.  )) 


i»ROCKS-VEnBAi)x  DKs  hi'i M(j>s  DK  i.A  sociKii';        2:57 

< ',(■  liiivilil  (''miiiii'ir  les  [iriii(i|i;iii\  |ii(i(liiiK  iniitoili's,  ceux 
ItivIV-n'-s  (les  iiidi^riics  :  il  iri(lii|ii<-  les  |)rix  coiiianls  cf  les  (•|li^fl••^s 
(ralïiiirrs  iw'-alisrs  |);ir  les  riiaisons  françaises  et  élran<,'ères.  La 
(liiriimi'iilalidii  (•<!  |iai  l'aile.  l'Ile  e<(  e<  inipit'iée  [tardes  f,Taviire>^ 
el  (les  ^'ia|)lii(|iiev  l'ni-se  l 'inil  iiitix  e  française  en  lirer  lonl  le 
parti  (l(''siral)le  el  <u|i|ilanler  ceux  (|iii  exploilaicnl ,  à  leur-  piolil, 
une  lerre  ai'rosée  du  sari^--  français. 

(".el  irnpoi'tanl  rapport  |)<)urra  èlre  ciuisMllé  à  la  hililiolln'uiitf 
par  les  s.(>ei(''laires. 

MM.  Hi':i<i:\<,i:ii  (I  Pcriirr  rendent  coniitle  d'nn  travail  sni- 
\o  Teliad,  présente''  dans  la  dernière  séance.  La  piil)liratif»n  au 
Hnlletin  en  est  décidée. 

M.  \\\.\  HwoT  a  envoyé  une  courte  note  concernant  la  dissé- 
iiiinalioii  >\i's  i.;iaines  sur  les  Haiits-Plaleaiix.  Ce  travail,  très 
int«''ressaut,  iirendia  place  dans  le  Rullefin  en  cours  d'impression. 

La  hihliollièipie  a  reçu,  de  M.  le  Sons-Secrétaire  d'Etat  aux 
Ueaux- \rts,  ini  ouvrai^c  intitulé:  f.cs  MIciiKuids  (leslriiclcins 
lie  cdllirtl raies  cl  de  li'rsnrs  du  fxisst'. 

Le.  titre  de  ce  lra\ail  en  (h'-cèle  le  contenu.  (Test  une  peinture 
lidèle  d(\s  actes  de  vandalisjne  coininis  par  ceux  (jui  ne  F"es[)ec- 
tent  même  pas  les  plus  Ixdles  productions  d'.\rt  dont  s'iionoi'c 
rininianité.  ('.es  documents  resteront,  pour  les  générations  futu- 
res, les  preu\cs  irrécusables  de  l'amoralilé  d'un  p<mple  qui,  au 
i;(''nie  humain  s'exerçani  en  manifestation  de  beauté,  préfère  le 
;^n''nie  malfai'^ant  qui  ne  se^  complait  que  dans  les  manifestations 
brutales  de  la  Force.  ATais  que  ces  exemples  soient  pour  nous. 
Frauçiiis,  une  liçon.  Redoublons  de  respect  et  d'atlacliernent 
pour  ce  palrimoine  national  que  constituent  nos  monuments, 
nos  nMis('-es  nos  richesses  archéoloi»'iques  et  naturelles  qui,  trop 
s(Mneut,  il  faut  l'avouier,  sont  laissés  à  l'abandon  par  ceux  à  (pii 
il  apparlient  d'en  assurer  la  conservation. 

Le  Coniil(''  décide  l'achat  de  (pielqnes  volumes  de  la  collection 
d'il.  Fabre,  sur  les  nueurs  des  insectes,  et  de  quelques  ouvrages 
de  vulgarisation  scientifupie. 

Après  examen  de  <piel(fues  (|uestions  d'administration,  l'ordre 
du  jour  est  (''puisé  el  la  séance  levé(>  à  (\  heures  5o. 

Le  Secn'tdire  (jcnéral,  Le  Président, 

Signé  :  BËRENGER.  Signé  :  DOUMERGUE. 


MOUVEMENT    DE    LA    BIBLIOTHEQUE 

2'"^  Semestre  1914 


1°    PERIODIQUES 

Pour  les  publications  périodiques,  voir  la  Liste  des  Sociétés 
correspondanles,  (Bull,   i'"'  trimestre  igiS,  p.  ig.) 


2      jS^ON     PERIODIQUES 

(Dons  et  Achats) 


GÉNÉUALITÉS 


Georges.  —  Elude  sur  (|iiekjues  espèces  chevalines.  (Ext.  des 
Annales  des  Sciences  Naturelles),  broch.  in-8°,  lio  p.,  4  pi- 
Paris,  1869. 

GuiMET  (Annales  du  Musée).  —  Conférences  faites  au  Musée 
Guimet  en  1912,  broeh.  in-i8,  276  p.  Paris,  Hachette  et  C'®,  igiS. 

—  Conférences  faites  au  Musée  Guimet  en  1918,  broch.  in-i8, 
388  p.  Paris,  Hachette  et  C*^  191/i. 

HuKT.  —  Liste  des  espèces  connues  et  décrites  dans  la  famille 
des  Antilopidés  présentées  par  régions.  (Extr.  du  Bull,  de  la  Soc. 
d'Acclimatation),  broch.  in-8°,  28  p.  Paris,,  1887. 

JoLY  (N.)  et  Lavocat  (A.).  —  Recherches  historiques,  zoologi- 
ques, anatomiques  et  paléontologiques  sur  la  Girafe  (Camelopar- 
dalis  çiirafa.  Gmelin),  i  vol.  in-/|°,  12/i  p.,  17  pi.  Strasbourg, 
Berger-Levrault,  i8/i5. 

JouRDY  (Général).  —  Coraux,  Mél'obésies,  Dolomies.  —  Coral- 
liaires  et  Corallicoles.  (Ext.  du  Bull,  de  la  Soc.  Géologique  de 
France),  broch.  in-8°,  3o  p.  Màcon,  Protat  frères,  igiS. 


MOUVEMENT    DE    I.\    Rim.IO  IIIÈQUE  2.'}!> 

LvBOKVrOIRE  DR  GtOLOCilK  DK  l,\  |-\(:i  |.|K  DK  GnENOnLK  (TlilV.lilX 
tlu).     lomc     \,      7()I  •>- Kjlii       l)|(l<ll.     ill-cS",     'S'h)     [).     rJifiHililc, 

Ollicr  l'n  Tes,   i  9  {  ]. 

Ma(;i;k  (llciui).  —  Une  nouvelle  iiiéllKJile  pour  l'élude  des 
terrains  millier!;  et  pour  la  reelierclie  des  minerais  enfouis  dans 
les  profondeurs  du  sol,  hroeli.  in-(S",  S  p.  I^aris,  Ofïiee  Inlerna- 
tional  de  la    Pre;ise,    1914. 

—  Quel(pies  souve.nii"s.  —  9.d  années  de  polilicpie  eolonialf. 
broch.  in-i>,  107  p.  Paris,  E.  Larose,  rgiS. 

M\M(;i.i.n   (l.oiiis).   —  Note   sur   U'   pétrole,    si-s  origines,   ses 
analyses,    ses   divers   gisements.    (K\t.    du    liiill.   de   la   Soc.   de 
l'Industrie   Minérale,    hroeh.    in-8°,    60   p.    Paris,    Chamerot  et  ■ 
Renouard,  1901. 

MoKTii.i.i;r  (Paul  de).  —  Ix>s  sépultures  préhistoriques.  Origine 
du  culte  des  morts.  (Bibliothèque  préhistorique) .  hroeh.  in-8'\ 
riy  [).,   I  i  pi.  Paris,  .T.  (lamher.   191/1. 

Pline. —  Histoire  naturelle.  Traduction  française  par  E.  Littré-. 
2  vol.  in-4°,  1.AA7  p.  Paris.  Firniin-Didot,   r855. 

Savary.  —  Mahomet,  {.e  Koran,  traduit  de  l'arabe,  précédé 
d'un  abrégé  de  la  vie  de  Mahomet,  broch.  in-ir>.  y.^?)  [».  Paris, 
Garnier  frères.   1910. 


AKliK^l  E  1)1    NOKD   (Alsérie.  Tiiiiisic,  .Marne.  Sahara) 


Amadk  (Général  d').  —  Campagne  de  1908-09  en  Chaonïa. 
(Rapport  du  Général  Commandant  le  corps  de  délvarquement), 
broch.  in-8°,  385  p.  Paris,  R.  Chajîelot  et  C'^  191 1. 

lUuGÈs  (l>'abl>é).  —  Aperçu  historique  sur  l'église  d'Afriipie 
en  général  et  en  particulier  sur  l'église  épiscopale  de  Tlemceu. 
broch.  in-8°,  46  p.  Paris,  J.  Lei"Oux  et  A.  Jouby.  i848. 

Rkrbrlgger  (Adrien).  —  Le  Tombeau  de  la  Chrétienne, 
mausolée  des  rois  mauritaniens  de  la  dernière  dynastie,  broch. 
in-8°.  90  p.,  o,  j)l.   I   plan.  Alger,  Raslide,   1867. 

Rernard  (Général).  —  Promenades  dans  le  Sud  Oranais. 
Zousfana,  Saoura,  broch.  in-8°,  18  p. 

RERTHivrx  (Paul).  —  Grattoirs  pédoncules  de  l'Extrèmc-Sud 
Oranais.  (Ext.  de  l'Homme  préhistorique) .  broch.  in-8°,  2  j). 
Paris,  J.  Gamber,   191 3. 

—  Découvertes  préhistoricpies  dans  les  Oasis  Saharienne.^. 
(Ext.  de  VHomme  préhistorique),  broch.  in-8°.  6  p.  Paris, 
J.  Gamber,  191 3. 


240  MOUVEMENT    DE    LA    BIBLIOTHEQUE 

Hesnier  (Maurice).  —  La  'l'iiiiisio  piiiii(|iie,  broch.  in-8°,  25  p. 

Besson  (Raoul).  —  L'hirik'rland  al^rio-iviarocain  (Oudjda, 
Martimproy,  Aherkaiic.  Pdit-Say).  broch.  in-8°,  /|S  p.  Oraii, 
R.  Resson,  t()io. 

Rlanctikt  (^r.).  —  Sur  quelques  [loiiits  l'oililiés  de  la  fronlièiv 
saharienne  de  l'empire  rom;dn,  broch.  in-S",  j'y  p.,  5  pi.  i  carte. 

Blasquez  (Antonio)  \  Delgado-Aguileua.  —  Prehistoria  de  la 
réî?ion  Node  de  Marruecos.  (Ext.  du  Bol.  de  In  Real  Sociedad 
Gcograficn) ,  broch.  in-8°,  •?.S  p.  Madrid,  191 3. 

Rlayac  (J.).—  Description  géolog-ique  des  régions  à  phosphate 
de  chaux  de  Tébessa  et  de  Bordj-bou-Arréridj  (Algérie).  (Ext.  dos 
Annales  des  Mines),  broch.  in-8°,  19  p.  avec  1  pi.  Paris,  Diirand 
et  P.  Vicq,  189/i. 

Rloch  (Isaac).  —  Les  Israélites  d'Oran,  de  1792  à  i8i5,  broeh. 
in-8°.  21  p.  Alger,  1886. 

RouLLÉ  (Lieutenant).  —  La  France  et  les  Beni-Snassien  (cam- 
pagne du  général  Lyaiifey),  broch,  in- 18,  69  p.  Paris,  H.  Charles 
Lavauzelle,  1908. 

BouRoiN  (Georges).  —  Les  documents  de  l'Algérie  conservés 
au>c  Archives  nationales.  (Ext.  de  la  Revue  Africaine) ,  broch. 
in-8°.  3o  p.  Alger,  Ad.  Jourdan,  1906. 

BouRGUiGNAT  (J.  R.).  —  Des  monuments  symboliques  de 
l'Algérie.  Souvenir  d'une  exploration  scientifique  dans  le  Nord 
de  l'Afrique,  brorh.   in-8°,   2^  p.,   3  pi.  Paris,  Challamel  aîné, 

i8fi8. 

Rrives  (A.).  —  Conférence  faite  à  Alger  sur  son  voyage  aux 
régions  inexplorées  de  lAtlas  Alarocain.  (Extr.  du  Bull,  de  la 
Soc.  de  Géographie  d' Alger),  broch.  in-8°,  2/1  p.  Alger.  S.  Léon, 
1907. 

BusQi  KT  (Raoul).  —  L'affaire  des  grottes  du  Dahra,  d'après 
les  documents  originaux.  (Extr.  de  la  Revue  Africaine) ,  broch. 
in-8°,  ,53  p.  Alger,  Ad.  Jourdan,  1908. 

Cat  (L.).  —  Histoire  de  l'Algérie-Tunisie-Maroc.  Tome  T. 
Avant  i83o,  t  vol.  in-12,  3/17  p.  :  Tome  II.  Après  i83o,  1  vol. 
in-T2,  394  p.  Alger,  Ad.  Jourdan,  1889. 

Castries  (le  Comte  Henri  de).  —  Les  sources  inédites  de 
l'histoire  du  Maroc,  i''®  série  :  Dynastie  saadienne.  2  vol.  m-fi°. 
591-654  p.,  T9  pi.  Paris,  E.  Leroux,   i9i3. 

CnwAGNAC  (le  Comte  Maurice  de).  —  De  Fez  à  Oudjda.  Œxtr. 
de  la  Géographie) ,  broch.  in-8°,  83  p.,  t  carte.  Paris,  t88i 

Coi  R  (A.).  —  Acte  de  Horm,  délivré  à  un  Israélite  par  un 
caïd  marocain.  (Extr.  du  Bull,  de  la  Soc.  de  Géographie  d'Oran). 
broch.  in-8°,  7  p.,  i  pi.  Oran,  L.  Fouque,  191/I. 


MOirvKMExr   i)K    i.\    lurwioriiKQïJK  241 

DviMvs  (fiént'-ral  K.).  —  T.o  frrand  d(''s<Ml.  Iliiit-iiiirc  (rmic 
caiavanc  du  Sahara  au  |>a\s  (!(<  nrj^Mcs  (royaiiiii»'  de  llaoïis.stj, 
I   vol.  iii-i'>,  oVi  |).,  .'i'^  rdilii'ii.   l'aris,   Miclid  L(''vy  fn'Tcs,   iSGo. 

Dkciiaii)  (Kd.)-  —  Oraii.  -nu  ixnl,  sdii  coiinncicc,  ImucIi. 
iii-S°,   i3'.<   p.,   :>.   plans.  Oraii,   I».   Ilriiit/..    ii)i'i. 

I  )i;i,UKi:i.  ((lahricl).  —  lie()<,rralia  j.;fMt'ial  de  la  piii\iii(ia  drj 
Mil'  \  Kahilas  (\v  ( iiiclaia-Ki'lidana-Mclilla  (Marniccos  scpt^Filrin- 
liai),  linicli.  iii-S",  I -S  p.,  I  carie.  MelilJa.  Iiiiprcnta  de  Kl 
Ti'le^fraina  dil  H  if.    i  <)  i  i . 

Dkiuiikx  (Cumiuaiidant).  —  La  région  algérienne;  travei'^ée 
par  k'  méridien  de  Paris.  (Exir.  de  la  Céoiirupltie) ,  l)rooh.  in-8°, 
Oo  [).,  I  |)lan.  Paris,  liiipriiiierie<  réiniies,  i885. 

Dkstaim;  (K.).  —  Dictionnaire  français-berbère  (dialecle  des 
Ueni-Snons).  (I^iihl.  de  lu  Faciillé  des  L^ltres  il'Ahjcr),  brocli. 
in-S",  ?>~'i  |).  Paris,  K.  Leroux,   191 4. 

-  Kinde  sur  le  dialecte  berbère  des  Beni-Snons.  (  l'tihl.  de  In 
Faculté  des  Lettres  d' Alcjer),  i  vol.  in-8°.  877  p.  Paris,  K.  Lerf>nx, 
1907. 

OoM.s  f(^,ainille).  —  Voyage  d'exploration  à  travers  le  vStbara 
occidental  et  le  Sud  Marocain.  (Extr.  de  la  Géographie) ,  brooh. 
in-8°,   1',  p.,   I  carte.  Paris,   1888. 

l)r  Pré  ue  Saint-Maur  (J.).  —  Lettres  au  journal  l'Akhlxtr. 
Adresise  à  M.  le  Comte  Le  Hon.  Constitution    nouvelle  de  l'Ai 
gérie.  Discours  prononcé  à  l'Exposition  agricole  d'Oran.  broch 
ir\-S°,  3i  p.  Oran,  Paul  Perrier,   1869. 

DrvKiiNov  (G.  L.)  el  A.  Lerkboui.let.  —  Notes  et  renseigne- 
ments sin-  les  animaux  v(M'tébrés  de  l'Algérie  (jui  ford  partie  dw 
Musée  de  Strasbourg,  t  vol.  in-4°,  71  p.  5  pi.  Strasbourg,  Berger- 
Levrault,  jSfi9.. 

DuvEYRiER  (Henri).  —  De  Tlemcen  à  Melilla.  en  1886.  (Extr: 
de  la  Géograpliie),  broch.  in-8°,  38  p.,  i  carie.  Paris,  Sociélé 
de  Géographie,  1893. 

Ett  (Colonel  d').  —  In-Salali  cl  le  ridikcjl.  .tournai  des  opé- 
rations suivi  d'une  instruction  pour  la  couduilc  des  eolomies 
dans  la  région  saharienne,  bi-f^ch.  in-8°,  147  p.,  i  carte.  Paris, 
B.  Chapelof  et  C'«,  1903. 

F\ii)ru;rnu:  (Général).  —  Becherches  anthropologiques  sur  les 
tombeaux  mégalithiques  de  Boknia.  (l^xtr.  du  Bull,  de  VAcad. 
d'Ilippnne) ,  broch.  in-8°.  80  p.,  t  carte,  t3  pi.  Bône.  1868. 

Fatre-Biot  ET  (Général  G.).  —  Histoire  d^e  l'Afrique  Septen- 
trionale sous  la  domination  musulmane,  broch.  in-8'',  fir>\  p 
Paris,  Henri  Charles  Lavauzelle. 

Fey  (Henri-Léon).  --  Notice  sur  les  nn'nes  romaines  d'Aïn- 
Témoirchent  (Oppidum  Timici  dv  la  Maurélanie  Césariemie), 
broch.  in-S",  i  5  {>.  Oran,  Paul  Perrier,  1860. 


k 


242  MOUVEMENT    DE    I.A    BIBLIOTHEQUE 

FiCHECR  (E.)  et  J.  Blayac.  —  Notice  sur  le  Suessonien  et  les 
terrains  à  phosphate  de  chaux  de  Sidi-Aïssa  et  Birin  (Alger)  et 
du  Djebel  Malidid,  près  M'Sila  (Constantine).  (Extr.  des  Annales 
des  Mines),  broch.  in-y",  28  p.,  2  pi.  Pari»,  Veuve  Ch.  Dunod  et 
P.  Vicq,  i8f)5. 

FiLLiAS  (Achille).  —  L'insurrection  des  Oulad  Sidi  Cheikh 
(i864).  Récits  militaires,  broch.  in-8°,  5o  p.  Alger,  A.  Bouyer, 
188A. 

Flamand  (G.-B.-M.).  —  La  position  géographique  d'In-Salah. 
(Extr.  de  la  Revue  de  Géographie  Universelle),  broch.  in  8°, 
63  p.  Paris,  Ch.  Delagrave,  içii'i. 

FoucAULD  (Vicomte  Ch.  de).  —  Itinéraires  au  Maroc,  r883-8a. 
(Extr.  de  la  Géographie),  broch.  in-8°,  9  p.,  i  carte.  Paris, 
Société  de  Géographie,  1887. 

GoDRON  (D.  A.).  —  L'Atlantide  et  le  Sahara.  (Extr.  des  Mém 
de  l'Acad.  Stanislas),  broch.  in-8°,  36  p.  Nancy,  Veuve  Raybois, 
1868. 

Gîoiivernement  Général  de  l'Algérie  : 

Statistique  générale  de  l'Algérie  (191 2),  broch.  in-8°,  887  p, 
Alger,  Victor  Heintz,  191/1. 

—  Discours  de  M.  Ch.  Lutaud,  Gouverneur  Général  de 
l'Algérie,  à  l'ouverture  de  la  session  des  Délégations  financières, 
le  22  mai  1914,  broch.  in-8°,  20  p.  Beaugency,  René  Barillier, 
1914. 

GuBB  (D''  A.  S.).  —  La  flore  saharienne.  Un  aperçu  photo- 
graphique, I  vol.  in-i8.  129  p.  Alger,  Ad.  Jourdan,  i9i3. 

GtiLi.AiME  (Lieutenant).  —  Conquête  du  Sud  Oranais.  La 
colonne  d'igli  en  1900,  broch.  in-S",  829  p.  Paris,  Henri-Cbarlcs 
Lavauzelle,  190T. 

Hartert  Œrnst).  —  Expédition  to  the  Central  Western 
Sahara  : 

XV.  Rhynchota  Heteroptera.  by  G.  lloi-wath,  broch.  in-S", 
8  p.   1918. 

XVI.  List  of  Saharan  hymenoptera,  by  F.  D.  Alorice,  broch. 
in-8°,  6  p.,  I  pi.  1918. 

XVII.  Orthoptères  par  Ignacio  Bolivar,  broch.  in-8°,  16  p. 
1918. 

XVIII.  Remarques  sur  la  liste  des  coléoptères  sahariens,  rap- 
portés par  le  D'"  E.  Hartert  en  191 2,  par  L.  Bedel,  broch. 
in-8°,  4  p.  1918. 

XIX.  Rhynchota.  On  a  remarkable  coccida  with  branclied 
antennae  from  the  Sahara,  by  Ernest  Green,  broch.  in  8°, 
2  p.,  I  pi.  1918. 


MOUVEMENT    DR    LA    BIBLIOTHEQUE  243 

XX.  On  the  diptera  colloclcd  in  tlic  Western  Sahara,  by 
D""  Ernst  Ilartert,  with  dvsciipfions  of  nevv  spocios,  hy 
l'.rnesl   I"..    \iis|en,  hiocli.  iii-S",    m  [). 

—  A  Zof)l()^M(al  tour  in  W  csl  \l;.n'iia,  li\  llic  lloii.  Uolhscliild 
F.  H.  S.  anrl  KinsL  Harlerl,  l.n.cli.  iii-S",  uS  p.,  2  pi.  rQiS. 

JvcQUETON  (G.).  —  [.'expédition  de  A.  Martinez  de  Angnlo 
contre  Tlemcen,  en  juin-juillet  i535.  (Extr.  de  la  Revue  Afri- 
caine), broeh.   in-8°,   n)  p.  Alf^er,  Ad.  .Tonrdan,  1892. 

Jacqiîot  (Eucien).  —  Les  sonterrains  d'Oran  :  T.  Le  labyrinthe 
d'Eckmiihl  ;  IL  le  souterrain  de  la  carrière  Soldini.  (Extr.  de  la 
Revue  Préhistorique) .  broeh.  in-S",  S  p.  Le  Mans,  Monnoyer, 
1 9 1 4 . 

Ladreit  de  Lacharrière  (Reynold).  —  Voyage  an  Maroc, 
1910-1911.  Le  long  des  pistes  inoghrébines.  Préface  de  M.  le 
Marquis  de  Segonzac,  l)roch.  in-i8,  3o6  p.  Paris,  E.  Larose,  1918. 

Lapène  (M.).  —  Tablean  historique  de  la  Province  d'Oran 
depnis  le  départ  des  Espagnols  en  179a,  jusqu'à  l'élévation 
d'Abd-cl-Kailer  en  i83i,  broeh.  in-8°,  62  p.  Metz.  S.  Lamort, 
1842. 

Leclerc  (D*"  L.).  —  Les  Oasis  de  la  province  d'Oran.  Les 
Oulad-Sidi-Cheikh.  (Extr.  de  la  Gazette  médicale  de  l'Algérie), 
I  vol.  in-8°.  8^  p.  Alger,  Tissier,  i858. 

Levaillant.  —  Introduction  à  l'histoire  des  mammifères  et 
des  oiseaux  du  Nord  de  l'Afrique  ou  recherches  sur  les  lois  de 
la  irravitafion  des  systèmes  naturels  par  la  reproduction  des 
germes  dans  les  milieux  variables,  biY)ch.  in-8°,  69  p.  Philippe- 
ville,  i85i. 

LiET'ssou  (A.).  —  Etudes  sur  les  poii.s  d'Algérie,  i  vol.  in  8°, 
107  p..  16  pi.  Paris,  Paul  Dupont,  i85o. 

Maxqufné  (.t.).  —  Caractères  agronomiques  des  terrains 
miocènes,  pliocènes  et  quaternairps  de  la  région  de  Mostaganem. 
(Publ.  de  la  Faculté  des  Sciences  d'Alger),  broeh.  in-8°,  07  p., 
T  carte.  Mostaganem,  Eug.  Prim.  1914. 

Marmol.  —  L'Afrique.  Traduction  de  Nicolas  Perrot.  Tome 
II.  I  vol.  in-/i°.  578  p.  Paris,  Louis  lîillaine,  \C)(\-. 

Massol  (Marquis  de).  —  Souvenirs  de  la  vallée  de  l'Ysser 
(province  d'Oran"),  broeh.  in-8°,  4  p.  i8o4. 

—  Souvenirs  de  la  province  d'Oran,  broeh.  in-8°,  4  p.   iS')'i. 

Mesnage  (le  R.  P.).  —  Le  christianisme  en  Afrique.  Origine, 
développement,  extension.  (Extr.  de  la  Rexuie  Africaine) ,  broeh. 
in-8°,  .SÔ2  p.,  I  carte.  Paris,  Eug.  Picard,  1914. 

Pellissier  (E.).  —  Mémoires  historiques  et  géographi<jues 
sur  l'Algérie.  (Exploration  Scientifique  de  l'Algérie,  i84o-42), 
I  vol.  in-4",  44o  p.  Paris,  Imp.  Royale,  i844. 


244  MOUVEMENT  DE  I-A  BIBLIOTHÈQUE 

Petit  (Capitaine).  —  Le  préhistori(|ue  an  Maroc  Oriental. 
Note  sur  la  s^tation  de  Goiititir.  (Rxir.  du  Bull,  de  ht  Soc.  de 
Géographie  d'Oran),  hroch.  in-8°,  8  (>.,  3  pi.  Oran,  L.  Fouque, 
ipi/i. 

Rabouruin  ([.iieicn).  — -  Algérie  et  Sahara.  La  question  afri- 
caine. Etude  poliliipie  et  économique.  Les  âges  de  la  pierre  du 
Sahara  Central.  Préhistoire  et  ethnographie  africaines.  Carte 
et  itinéraire  de  la  Mission  Flatters,  hroch.  in-8°,  i65  p.  Paris, 
Challaniel  aîné,  1882. 

Richard  (Ch.).  —  l'itude  sur  rinsunection  du  Dahra  (i8/|5- 
t8/|6),  hrocli.  in-8°,  ^oS  p.  Alger,  A.  Besoncenez,  \8/i(\. 

Uésidciuc  Générale  de  la  France  an  Maroc  : 

Rcnseigneiuents  statistiques  agricoles  sur  les  terres  de  la 
Chaoïiïa,  hroch.  in-S°.   18  p.  Casahlanca,  G.  Mercié,   1914. 

RoiîDAiRE.  —  La  dernière  expédition  des  chotts  (Algérie  ci 
Tunisie).  Complément  des  études  relatives  au  projet  de  mer 
inlérieure,   hiT)ch.   in-8'',    187   p.,   6   pi.   Paris,   Imp.   Nationale. 

1881. 

SvTAui\  (H.).  —  Les  monuments  d'Oudjda  (Marf)c).  (Kxir.  du 
Bull.  Arché(dogique) ,  hroch.  in-8°.  rî3  p.,  5  pi.  Paris,  Imp. 
Nationale,   1911. 

Tiio\T\s  (Philippe'!.  —  Etage  miocène  et  valeur  sliaiigraphiipic 
de  VOstrea  (■rassis.<<iitia  au  Sud  de  l'Algérie  et  de  la  Tunisir. 
(Extr.  du  Bull,  de  In  Soc.  Géologique  de  France),  hroch.  in-S", 
20  [).  Paris,  Société  Géologique  de  France.   1892. 

Varmer  (Maurice).  Exposé  de  la  situalion  du  Maroc  Oriental 
fin   1912,  hroch.  in-8°,  ,'^f)(i  p.  Oran,   D.  Heintz  et  fils,   191/^. 

VossK»  (Louis).  —  <(  Summum  jus  suiumum  injuria  ».  Si  cl 
Hadj  Mokrani  et  la  révolte  de  iS-i,  hrocli.  in-18,  118  p.  Paris, 
Augusiin  Challamel,  190,'!. 

Le    Bihlinlliéciurt'., 

A.  TOURNIER. 


Pierre  CARRAFANG 


La  graiuliost'  iiiaiiileslation  ilo  sympalliic  qui  a  nianiué  les 
(tltsôques  de  Fionv  (  lanaraiig,  o.\r)riniait  aillant  le  jiislc  liiltu 
(|iir  mérilail  riioimiir  de  hicn  (|ui  v<iiail  de  disparaître  que 
rmiivtMscllc  graliluilc  (iiii  s'adressait  au  représeiiL;iiit  honnête, 
aclil'  cl  dt'Miué  (pic  pcj'dait,  non  pas  seulement  la  région  (pii 
l'avait  élu,  mais  encore  l'Oianic  cidicrc. 

l'ils  de  ses  œuvres,  Carralani^  cul  dc^  ddiuts  dilTieiles,  mais 
grâce  à  une  activité  inlassai)le,  à  une  [jcrsévérance  qui  ne  s'est 
jamais  démentie,  grâce  aussi  ù  une  droilujie  sans  défaillance, 
il  jtul  surmonter  les.  épreuves  des  débuts  et  se  créer  un^'  sil nation 
morale  et  matérielle,  cpii  devait  le  désigner  pour  d<,'S  missions 
plus  élevées,  cpi  il  accomplit  du  reste  très  heureusement. 

Sa  jeune  activité  s'aiguilla  loul  tl'abord  vers  la  colonisaUon. 
Mais  ro.rganisation  et  la  direciinn  d  unt'  exploitation  agricole  ne 
pi )u\ aient  sulïire  à  racli\ité  dé\or.inle  de  cet  homme  d'action. 
\\ec  un  courage  et  un  es[)ril  d'initiative,  dont  il  est  aujourd'hui 
dillicile  d'apprécier  l'étendue,  il  s'élança  à  la  conquête  du  Sud- 
Oranais,  encore  si  |)cu  connu  et  si  peu  sur.  Rude  travailleur, 
espiil  nu'thodique,  il  dompta  les  dilhcultés  qui  s'élevaient  devant 
lui  et  mit  en  valeur  des  régions  qui  étaient  restées  jus([n'alors 
lii)rs  de  notre  iniluence  économique. 

(îarratang  aurait  pu,  après  de  si  longues  années  d'un  labeur 
incessant  et  fécond,  considérer  son  œuvre  comme  terminée, 
mais  cet  homme,  d'un  tempérament  si  extraordinaire,  mit  toute 
sa  \aste  inlelligence,  sa  force  de  pixxiuction  au  service  de  la 
défense  des  intérêts  ilu  Pays.  Sur  ce  point  encore,  il  accomplit 
sa  lâche  île  façon  parfaite,  et  c'est  justement  que  M.  Petit, 
délégué  financier,  a  |)u  dire  sur  sa  tombe  :  Pierre  Carrafang 
«  est  une  grande  ligure  algérienne  qui  disparaît  :  l'Oranie  plus 
((   particulièrement  perd  en  lui  un  de  ses  meilleui's  défenseurs.    ;) 

Certes,  oui,  Carrafang  était  un  bon  et  fidèle  ouvrier  de  la 
grande  teiivre,  de  la  mise  en  valeur  de  notre  chère  Colonie. 
fc]s]>rit  prati(pie  et  juste,  il  apportait  à  l'étude  des  grands  pro- 
blèmes ergonomiques  une  collaboration  féconde.  Il  s'intéressuit 
à  ttiutes  les  manifestations  de  l'activité  algérienne.  Depuis  de 
bien  longues  années,  il  appaiienait  à  la  Sociélk'  de  Géograpliie 
et  d'Arehédlofiie  d'Orun  et  dans  bien  des  circonstances,  nous 
avons  été  heureux  de  fair<'  ai)pel  au  concours  des  vastes  connais- 


246  NÉCROLOGIE 

sauces  de  cet  homme  si  documenté  sur  les  gens  et  les  choses  de 
t^elte  terre  d'Algérie  qu'il  cliérissait  profondément. 

Nous  pleurerons,  avec  ceux  qui  Uii  lurent  chers,  notre  excellent 
collègue  et  ami,  et  nous  souhait(ms  que  son  nom  reste  sur  cette 
terre,  encore  jeune,  coninic  le  symhole  de  l'honneur,  du  travail 
et  du  dévouement. 

Ed.  Déchaud. 


Jean-Noël  ROMAN 


Le  i5  avril  igio,  la  mort  est  encore  venue  faucher  dans  les 
rangs  de  notre  Société  de  Géographie.  M.  Roman,  directeur  du 
Service  des  Postes  et  des  Télégraphes  du  département,  est  décédé 
après  une  courte  maladie. 

M.  Roman  avait  débuté  dans  l'Administration  en  1877,  comme 
auxiliaire,  à  Tlemcen,  où  il  fut  nommé  commis.  Plus  tard,  il 
passa  à  la  Direction  d'Oran  en  qualité  de  rédacteur.  Sur  sa 
demande,  il  alla  à  Annecy. 

Doué  d'une  vive  intelligence,  d'une  grande  puissance  de 
travail,  d'une  indomptable  ténacité  mise  au  service  de  sa 
volonté,  il  prépara  l'examen  d'entrée  à  l'Ecole  Supérieure 
Professionnelle  de  Paris.  En  1897,  il  affronta  le  difficile  concours 
et  fut  reçu.  Il  avait  alors  36  ans.  Dix-huit  mois  après,  il  sortait 
de  l'Ecole  et  était  nommé  sous-inspecteur  à  Chambéry.  Succes- 
sivement, il  passa  inspecteur  à  Oran,  inspecteur  principal 
à  Alger,  directeur  à  Constantine  (1907)  et  enfin,  en  1909,  sur 
sa  demande,  directeur  à  Oran,  sa  ville  natale. 

Sorti  des  rangs,  M.  Roman  eut  le  grand  mérite  de  ne  pas 
oublier  ses  débuts  modestes.  Il  fut  un  chef  bon  et  bienveillant 
qui,  tout  en  exigeant  de  ses  subordonnés  le  maximum  de  travail, 
resta  toujours  pour  eux  un  directeur  paternel.  Il  sut  leur  inspirer 
cette  estime  réciprofjuc  qui,  de  chef  à  subordonnés,  permet 
d'assurer.,  avec  le  plein  gré  de  tous,  la  bonne  marche  des  services. 

Nous  saluons  respectueusement  la  méinoire  de  notre  cher 
collègue  trop  tôt  disparu.  A  tous  ceux  qu'atteint  ce  deuil,  à  la 
famille,  à  l'Administration  des  Postes,  nous  présentons  l'expres- 
sion des  sincères  condoléances  de  la  Société  de  Géographie. 


Concours  ouverîs  w  la  Sociètû  k  GéograDMe  et  û' Arcùéologie  û'Orao 


l,a  SucU'lé  de  Cicoijiaphic  d'Orait  met  au  concours  les  quoslioiis 
suivantes  : 

i"   (loiicours    aiimii'l    poni-     nji:"),     i<)i'i :    Monotjniphii' 

[léographique,  historique  et  économique  d'une  commune  de  lu 
province  d'Oran   (mixte,   plein  exercice  ou  indigène). 

Un  prix  de  5o  francs  et  un  diplôme  de  médaille  de  vermeil 
(ou  une  médaille  de  vermeil),  une  médaille  d'argenl  cl  une 
médaille  de  bronze  seront  altriliués  aux  meilleurs  travaux 
présentés. 

9.°  Pour  If)  16  :  Histoire  administrnlive  et  développement 
économiijue   du   Maroc   Oriental   depuis   l'occupation   française 

(1907)- 

Un   prix   de    100   francs   ou    ime   médaille  d'or   sera   attribué 

au  meilleur  mémoire.  Il  |tomra  être  accordé  des  médailles  aux 

travaux  non  primés. 

3°  Pour  If)  16  :  Histoire  d'Oran  avant  l'occupation  française, 
établie  surtout  avec  des  documents  inédits. 

fi°  Pour  1917  :  Histoire  de  la  ville  d'Oran  de  l'année  18i8  au 
recensement  de  i911. 

Un  prix  de  3oo  francs  (ou  une  médaille  d'or  d'égale  valeur) 
sera  attribué  au  meilleur  travail  sur  chacun  de  ces  de\ix  sujets. 

Les  conditions  générales  des  concours  sont  les  suivantes  : 

Les  sociétaires  et  les  personnes  étrangères  à  la  Société  peuvent 
y  participer. 

Les  manuscrits  devront  parvenir  le  3i  mars  au  plus  lard  tie 
chacune  des  années  fixées  pour  le  concours. 

Les  monographies  devront  être  inédites.  Elles  seront  dressées 
d'après  les  indications  générales  d'un  plan  qui  sera  commu- 
nifpié  aux  personnes  intéressées  qui  en  feront  la  demande  au 
Secrétaire  général. 

Le  manuscrit  portera  une  devise  qui  sera  répétée  dans  une 
enveloppe  fermée  contenant  à  l'intérieur  le  nom  de  l'auteur. 
Cette  enveloppe  ne  sera  ouverte  qu'après  le  classement.  Si  les 
travaux  présentés  ne  sont  pas  jugés  suffisants,  les  récompenses 
pourront  être  réduites  ou  supprimées.  L'original  f)u  un  double 
de  tout  travail  récompensé  devra  être  offert  à  la  Société  qui  se 
réserve  le  droit  de  le  publier  dans  son  Bulletin.  Dans  ce  cas. 
rio  exemplaires  seront  offerts  gratuitement  à  l'autfeur. 


DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  L'HISTOIRE  DES  RAFIYAN 

et  de  la  Région  qu'ils  occupent 
(Suiie) 


TROISIEME  PARTIE 


CHAPITRE  I 

PREMIERS  ESSAIS  DOHGAMSATION.  —  l)ftFE(TIO\S 

(1845-185;$) 


Après  la  signature  du  traité  de  i845,  noire  première 
{)réoceupati(>n  fui  d'organiser  les  llaniyan.  (3n  ne  pouvail 
guère  faire  qu'une  tentative  dans  ce  sens,  car  nos  postes 
extrêmes  ne  dépassaient  pas  la  limite  du  Tell  et  la  pacifi- 
cation ne  pouvait  pas  être  complète,  aussi  bien  chez  les 
Chafaa  que  chez  les  Djemba,  tant  que  nous  ne  nous  déci- 
derions pas  à  nous  installer  dans  ces  régions  des  Ilauts- 
IMaleaux.    (Carte   1.) 

Les  premières  soumissions,  très  rares  d'ailleurs,  des 
Hamyan  datent  de  i8/i5.  Au  fur  et  à  mesure  de  l'arrivée  de 
chacune  des  fractions,  le  général  Cavaignac,  commandant 
la  Subdivision  de  Tlemcen,  lui  laissa  pour  chef  le  caïd 
qu'elle  avait  sous  Abd-el-Kader  et  il  la  rattacha  au  comman- 
dement français  de  Sebdou,  que  l'on  venait  de  créer. 

Pour  arriver  à  tenir  ces  tribus,  sans  toutefois  vouloir  les 
transformer  en  sédentaires,  on  exigea  d'elles  qu'elles 
campassent  à  proximité  de  nos  postes  et  on  limita  l'étendue 
du  champ  de  leurs  migrations. 

Ees  points  extrêmes  où  il  leur  fut  permis  d'aller  étaieni 
les  suivants  :  Mengoub  (du  Choit  cl  Cbarbii,  Djenan  ei 
Adham,  Galloul,  Fritis  et  Oulakak. 

Ees  Généraux  et  les  Cc^mmandant.s  siq^érieurs  de  cette 

I époque  précisèrent  bien  aux  Hamyan  que  la  mesure  prise 
ne  leur  porterait  qu'un  préjudice  momentané,  que  leurs 
terrains  de  parcours  Irur  seraitiil  l'cndus  intégialemeul 
" ■■" 


17 


250       DOCUMENTS  POL  K  SERMR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

d'éviter  aux  nôtres  LouL  contact  avec  les  Marocains,  pour 
arriver  à  faire  régner  l'ordre  et  la  paix. 

((  Lorsqu'Algériens  et  Marocains,  avaient  ajouté  ces 
<(  oITiciers,  vivront  en  bonne  intelligence,  nous  songerons 
((  à  faire  valoir  les  droits  des  Hamyan  sur  les  pâturages  et 
((  les  points  d'eau,  à  l'Ouest  des  limiles  oii  nous  les  retenons 
c(  aujourd'hui  et  revendiquerons  pour  eux,  jusqu'à  la 
((  Moulouya  et  l'Oued  Guir,  le  libre  parcours  stipulé  par  le 
<(  traité  de  i8/|5,  dans  la  région  au  Sud  du  Tenict  Es 
«  Sassi.   » 

Expédition  des  iiénéraux  Cavaiî^nac  et  Kenault,  1847.  — 

Malgré  les  elTorls  tentés  pour  faire  régner  la  paix  sur  les 
Hauts-Plateaux,  le  voisinage  d'Abd-el-Kader  mainlenait 
toujours  une  apparence  d'agitation  ;  les  Hamyan  étaient 
pour  la  plupart  restés  ses  paitisans.  Pour  les  réduire  à 
composition,  le  général  Cavaignac  et  le  général  Renault 
([ui  commandait  à  Mascara,  conduisirent,  chacun  de  leur 
côté,  une  forte  expédition  dans  le  Sahara.  Ces  deux  olfi- 
ciers,  partant  l'un  de  Daya  et  l'autre  de  Saida,  devaient  agir 
indépendamment  l'un  de  l'autre,  mais  de  manière  à  reste?' 
autant  que  possible  en  communication,  afin  de  s'appuyer 
au  besoin.  (Annales  Algériennes,  §  III,  page  284.) 

La  colonne  du  général  Renault  se  mit  en  mouvement  le 
10  avril  1847  ^t.  arriva  le  i3  au  Kreider.  Le  i4,  elle 
traversa  le  Chott  Ech  Chergui  qui,  quoique  l'on  fût  au 
printemps,  était  praticable,  et  elle  arriva  à  El  Amra.  Con- 
tinuant toujours  à  avancer,  elle  se  trouva  le  16  avril  en  vue 
des  troupes  du  général  Cavaignac.  Le  17,  elle  s'arrêta  à 
Naama,  retenue  quelques  jours  par  la  neige  qui  se  mit  à 
tomber  en  abondance.  On  apprit  là  qu'Abd-el-Kader,  qui 
avait  paru  chez  les  Hamyan,  venait  de  rentrer  au  Maroc. 

La  colonne  se  lemit  en  mouvement  le  20  et  arriva  le 
lendemain  à  Chellala  ;  le  1?),  elle  était  à  Bou  Semghouii, 
ofi  elle  dut  livier  un  léger  combat,  mais  cotte  oasis  se 
soumit  comme  les  autres  ;  de  là,  le  général  Renault  se 
porta  à  El  Abiod,  ce  centre  de  domination  religieuse  des 
Oulad  Sidi  Cheikh.  Il  se  dirigea  ensuite  sur  Brezina  ;  enfin, 
après  une  expédition  de  plus  de  deux  mois  dans  le  Sahaia, 
il  rentra  à  Médéah. 

Le  général  Cavaignac,  (]ui  s'était  avancé  jusqu'à  Tiout, 
rentra  de  son  côté  à  Tlemcen. 

Le  but  des  opérations  de  ces  deux  généraux  avait  été  de 
prouver  aux  habitants  de  cette  région  que  nous  étions  tou- 


DOCLIMENTS  l'OI   M  sr:H\IH    \   l.'ll  IS  K  )l  l(  i:   liKS  l\\M\  \\       '2~>\ 

jours  en  niesiiif^  de  les  allciiidre  et  que,  pur  conséquent, 
ils  avaient  grand  fc^rt  de  se  eonipromettre  envers  nous,  en 
l'avoiisant  les  nouvelles  (Milreprises  qn'Ahd-el-Kader  [)oin - 
rail  former  sur  l'Algérie.  Aussi,  quel(}ues  tribus  s'ernprcs- 
sèrenl-elles  de  faire  leiu'  soninission. 

Les  autres  ne  furent  réduites  complètement  à  composi- 
tion (pi'en  i8/|8,  après  une  razzia  exécutée  sur  elles  au  mois 
de  juin  pai'  le  général  de  Mae-.Malion,  commandant  la 
Subdivision  de  Tlcnici  ii  ;  dans  celte  ville,  le  général  re^ut 
iMie  députation  (|ui  Ncnail  lui  offrir  des  chevaux  de  gada  et 
à  la  tète  de  la(pi('lle  se  trouvaient  Ahmed  ben  Abdallah, 
caïd  de«î  Akerma  et  Mebkliout,  caïd  des  Oulad  .Mansoiuali. 
D'autres  caïds  allèrent  faire  leur  soumission  à  Oran. 

Les  Djemba,  considérés  comme  Marocains,  furent  tenus 
en  dehors  de  la  convention  ;  ils  avaient  libre  accès  sur  les 
marchés  et  ne  devaient  payer  (jue  le  llak-et-Tenia.  Les 
Ghafaa  étaient  imposés  pour  une  somme  globale  de 
1  lo.ooo  francs  et  chaque  fraction  devait  foninii-,  en  outic, 
un  cheval  de  gada.  On  voulut  alors  essayer  d'une  organi- 
sation qui  plaçait  Mebkhout  à  la  tète  des  Hamyan  ;  (jualre 
cheikh  étaient  sous  ses  ordres  :  Demouche,  pour  les  Oulad 
Mansourah  ;  Ahmed  ben  Abdallah,  pour  les  Akerma  : 
Mohammeddin,  pour  les  Bekakra,  et  Ben  Oussen  Ould 
Cheikh,  pour  les  Béni  Metharef.  Mais  ces  dispositions 
n'eurent  pas  de  suite. 

Le  caïd  Boufeldja  ben  Amara,  des  Bekakra,  ne  voulut 
pas  reconnaître  l'Autorité  française. 

Sa  tribu  fut  alors  scindée  en  deux  ;  les  Moualck  et  les 
Lourarka.  Les  premiers  reçurent  Ahmed  ben  Youssef 
comme  caïd,  et  les  seconds  Kaddour  Ould  Boufeldja.  Celt'^ 
mesure,  qui  rie  donna  pas  de  bons  résultats,  fut  prise  à 
l'instigation  de  Mohammed  ben  llarrouki,  khodja  de 
Tlemcen  ;  ce  personnage,  très  en  faveur  auprès  de  l'Auto- 
rité et  très  lié  avec  Bon  Smaha  Ould  Maachou,  des  Béni 
Metharef,  avait  été  chargé  en  quelque  sorte  de  l'adminis- 
tration des  llamyan  ;  ce  partage  mécontenta  suitout 
Kaddour  Ould  Boufeldja. 

Le  souvenir  de  l'expédition  des  généraux  Cavaignac  vl 
Renault,  empêcha,  en  18^19,  les  llamyan  Gheraba  de  suivre 
le  chef  des  Oulad  Sidi  Cheikh,  Cheikh  Ben  Tayeb,  qui 
cherchait  à  se  faire  une  situation  indépendante  ;  il  voulait 
surtout  contrebalancer  l'inlluence  religieuse  de  Si  lïamza, 
avec  lequel   il   était  en   hostilité.    Pour  y  parvenir,   il   fit 


252       DOCUMENTS  POl  R  SERVII^  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

répandre  le  bruit  que  le  Sultan  du  Maroc,  Moulay  Abder- 
rahmane,  l'avait  nommé  khalifa  du  Sud.  Il  réussit  autant 
par  la  force  que  par  la  rus(>  auprès  des  Hamyan  Cheraga, 
mais  fut  moins  heureux  auprès  des  llamyan  Gheraba,  qui 
n'étaient  nullement  disposés  à  seconder  ses  vues  ambi- 
tieuses. l']n  présence  de  cet  insuccès,  il  tomba  sur  leurs 
caravanes  au  retour  du  Gourara  et  les  razzia  complètement. 
Réduits  à  la  misère,  lf;s  Hamyan  Gheraba  adressèrent, 
au  général  Pélissier,  commandant  la  Sid)division  d'Oran, 
une  réclamation  énergique  sur  la  façon  dont  Cheikh  Ben 
Tayeb  les  avait  traités.  Des  représentations  furent  faites  au 
Sultan  du  Maroc,  (}ui  s'empressa  de  blâmer  celui  qui 
s'intitulait  son  lieutenant.  Cette  sorte  de  désaveu  fut  d'au- 
tant plus  prompte  que  le  colonel  Maissiat,  commandant  la 
Subdivision  de  Mascara,  avait  dirigé,  au  conmiencement 
de  1849,  u^^^  expédition  contre  les  Rezaina  qui  avaient 
écouté  les  incitations  du  chef  des  Oulad  Sidi  Cheikh. 
Surpris  par  la  rapidité  du  mouvement  de  la  colonne  fran- 
çaise, les  Rezaïna  étaient  rentrés  dans  le  devoir  ;  on  les 
interna  au  Nord  du  Chott  Chergui  et  on  les  rattacha  admi- 
iiistrativement  à  l'aghalik  de  Frendah. 

Expédition  Pélissier,  18^9.  —  Aussitôt  après  le  passage 
de  l'expédition  du  colonel  Maissiat,  de  nouveaux  désordres 
se  produisirent  chez  les  Hamyan,  poussés  par  Sidi  Cheikh 
Ben  Tayeb.  Mebkhout  avait  jeté  le  masque  et  offert 
60  esclaves  au  chef  des  Oulad  Sidi  Cheikh  ;  les  Hamyan 
s'étaient  joints  aux  dissidents.  A  cette  nouvelle,  le  général 
Pélissier  organisa  trois  colonnes  ;  il  prit  le  commandement 
de  l'une  d'elles  qui,  foite  de  2.3oo  hommes,  46o  chevaux 
et  deux  sections  d'artillerie  de  montagne,  partit  de  Mas- 
cara ;  les  deux  autres,  sous  les  ordres  du  général  de  Mac- 
Mahon  et  du  colonel  Mellinet,  de  la  Légion  étrangère, 
furent  fournies  par  les  Subdivisions  de  Tlemcen  et  de  Sidi- 
bel-Abbès  ;  elles  coopérèrent  au  mouvement  en  s'établis- 
sant  sur  les  positions  d'Aïn-ben-Khelil  et  dTJ-Aricha. 

Les  raisons  rpii  motivaient  cette  expédition  étaient  les 
suivantes  :  les  Hamyan  Gheraba,  joints  à  quelques  frac- 
tions des  tribus  sahariennes  du  Maroc,  avaient  formé  dans 
le  Sud-Ouest  de  la  province  d'Oran,  un  foyer  d'hostilité 
qui  menaçait  de  s'étendre  rapidement  si  l'on  ne  prenait  de 
promptes  et  énergi(pies  mesures  pour  en  arrêter  le  déve- 
loppement. H  y  avait  donc  urgence  à  diriger  de  ce  côté  des 
forces   relativement  importantes,    et  le   général   Pélissier 


DOnriVïENTS  VOVU  SERVIR  A  I.  IIIS|T)II<E  DES  FIAMYAN 


253 


crut  do  son  d<'Noir  de  s'y  porter  lui-nièriif.  La  mise  à  cxé- 
ciilion  (In  [iiiijcl  (lu  (ÙM)éral  ('oinmaiidiiiil  l:i  |.iii\iii((' 
dOran  était  liàléc  par  la  défection  de  Mcbkhoul  :  de  plus, 
des  ïlamyan  C-heraira  étaient  venus  le  -S  février  rS'i») 
in^iiller  le  [)()-le  (le  lii  vi<:ie  (le  Dava. 

l/a<jfitiition  réi^nait  é^i-alement  chez  (juehpies  tribus  des 
llannan  Cheraga  ;  les  Oulad  Ziaii  avaient   tué  leur  caïd 
Ben  Omar,  (pii  avait  essayé  darrtMer  leiu    mouvement  de 
défection. 

I,e  y)lan  de  campagne  du  général  Pélissier  consistait  à 
jeter  les  llamyan  Chcraga  du  Sud-Est,  restés  fidèles,  sur 
les  fractions  i-elx^lles  (pi'elles  pousseraient  devant  elles  jus 
qu'à  complète  soumission.  11  réussit  à  renforcer  ses  troupes 
de  1.600  eoumiers  du  Tell  et  du  Sahara  et  24o  fantassins 
des  llanar  et  des  Atba. 

La  colonne  Pélissier  se  mit  en  mou\('ment  le  ir  mars  : 
le  24,  elle  campait  à  Naama,  où  elle  séjournait  jusqu'au 
/i  avril.  Pendant  neuf  jours,  un  vent  violent  du  Sud,  sou- 
levant des  trombe>  de  sable,  s'élevait  vers  10  heures  du 
malin  pour  ne  tomber  qu'au  coucher  du  soleil.  A  partii' 
du  22,  des  reconnaissances  formées  par  les  goums  furent 
envoyées  dans  toutes  les  directions  ;  le  r>4.  Si  Sliman  Ben 
Tayeb,  frère  du  marabout  révolté,  et  qui  marchait  avec  la 
colonne,  rentra  d'une  reconnaissance,  (^pi'il  avait  éta 
chargé  de  faire  sur  El  Abiod  Sidi  Cheikh. 

Nos  troupes  arrivèrent  le  6  avril  à  Tiout.  fpie  ses  habi- 
tants a^aient  abandonné  depuis  quelc|iies  jours.  Effrayés 
par  notre  pointe  sur  Galloul,  les  Hamyan  s'étaient  éloignés 
de  ce  ksar  sans  prendre  le  temps  d'emporter  leurs  appro- 
visionnements :  on  le  trouva  reîupli  d'orge,  de  blé,  de 
dattes  et  de  butin.  Pour  punir  les  Hamyan  et  les  gens  de 
Tiout,  chez  lesquels  ils  emmagasinaient,  de  leurs  persis- 
tance dans  l'insoumission,  le  généial  Pélissier  permit  aux 
troupes  et  aux  goums  de  piller  le  ksar. 

Continuant  vers  le  Sud.  la  colonne  parvint  an  k^^ar 
d'Aïn-Sefra  qui  fît  sa  soumission,  puis  à  Moghar  Tahtani 
et  <à  Aloghar  el  Foukani,  abandonnés.  Lorsqu'c^n  fut  revenu 
sur  Aïn-Sfissifa.  le  goum  du  Tell  et  les  fantassins  des  tribus 
furent  licenciés.  Dans  cette  campagne,  on  ne  put  rejoindre 
des  contingents  importants  ennemis  et  il  n'y  eut  pas  d'ac- 
tion décisive  ;  les  Hamyan  s'enfuirent  devant  nos  colornies 
et  allèrent  se  réfugier  siu-  le  t(Mritoire  du  Alaroc. 

Pendant  que  le  général  ï^élissier  marchait  ainsi  sur  les 


254       DOCUMENTS  POIH  SERVIU  A  l'iITSTOIRE  DES  HAMYAN 

ksour  du  Sud-Ouest,  qu'il  mettait  à  mal,  et  dont  les  popula- 
tions demandaient  l'aman,  le  ^éiiéial  de  Mac-Mahon,  par 
une  marche  rapide,  s'élait  porté  jusqu'au  Chott  des  Mehaya 
en  suivant  le  Chott  Chergui,  sur  toute  sa  longueur.  Celte 
pointe  avait  pour  hut  de  surprendre  quehjues  douars  des 
insoumis  qui  avaient  élé  signalés  dans  cette  région.  Quant 
à  la  colonne  de  Sidi-bcl-Abbès,  sous  les  ordres  du  colonel 
Mellinet,  elle  resta  en  observation  à  El-Aricha. 

Le  3  mai,  la  colonne  Pélissier  était  dissoute.  Mais  avant 
de  regagner  le  Tell,  le  général  constitua  deux  colonnes 
mobiles,  l'une  à  El-Âricha,  l'autre  au  Kreider,  afin  d'em- 
pêcher les  dissidents  de  rentrer  sm^  leur  territoire,  sans 
avoir  fait  leur  soumission.  Quelque  temps  après,  cette 
condition  ayant  élé  acceptée  par  la  plupart  des  gens  ayant 
fait  défection,  les  colonnes  mobiles  furent  rappelées  dans 
leurs  garnisons. 

Cette  longue  et  lointaine  expédition  dont  l'itinéiaiie 
avait  déjà  été  parcouru  en  iSf\i  par  la  colonne  Cavaignac, 
avait  eu  i>our  résultat  de  couper  court,  brusquement,  à  la 
défection  des  tribus  du  Sud-Ouest,  la(|uelle  avait  menacé 
de  se  propager  et  de  s'étendre.  Les  dissidents  de  Sidi  Cheikh 
Ben  Tayeb  étaient  refoulés  ;  ils  avaient  eu  à  supporter  de 
dures  privations  et  l'hospitalité  tfue  leur  avaient  donné»3 
les  tribus  marocaines,  leur  avait  été  très  onéreuse.  De 
plus,  nos  troupes  avaient  montré  aux  populations  saha- 
riennes qu'il  n'était  point  de  contrées,  si  reculées  qu'elles 
fussent,  où  elles  ne  puissent  les  atteindre. 

En  présence  des  violences  exercées  sur  les  Hamyan  Ghe- 
raba,  le  sultan  Abderrahmane  s'était  empressé  de  désa- 
vouei'  Sidi  Cheikh  Ren  Tayeb.  Après  l'expédition  du 
général  Pélissier,  il  attira,  sous  un  prétexte  quelconque, 
le  marabout  des  Oulad  Sidi  Cheikh  à  Fez,  oii  il  le  retint 
prisonnier.  Celui-ci,  rendu  à  la  liberté  ([uelques  mois 
après,  vécut  à  l'écart,  sans  cesser  toutefois  de  nous  être 
hostile  ;  il  usa  de  son  influence,  pour  nous  créer  des 
embarras,  toutes  les  fois  que  l'occasion  s'en  présenta;  mais, 
jusqu'en  i86/i,  il  ne  se  trouva  mêlé  personnellement  à 
aucune  action  de  guerre  contie  nous. 

Pendant  les  années  i85o  et  i85i,  la  situation  suv  les 
Hauts-Plateaux  s'améliora.  C'est  à  cotte  époque  (|ue  les 
Rezaïna  furent  partagés  en  deux  tribus,  les  ChiMaga  et  les 
Gheraba,  et  placés  dans  le  cercle  de  Saïda. 

On  essava  imc  nouvelle  organisation  des  Hamvan,  mais 


DOCTIMENTS  POUR  SERVIH  A  l.'ri  IS!  f)IHK  DES  IFAMYAN       -55 

coinmo  foiijouis,  on  fut  iinrir  par  la  dilTiciilIr  de  lioii\('r 
paimi  (Mi\  nn  chef  eapal)le  de  s'imposer  aux:  auli'es.  F/apha 
Mf)haiTinied  Hen  Abdallah,  des  Boni  Snouss,  sollicita  ce 
comiiiandemeid,  mais  le  général  de  Mac-Mahon  écarta  ses 
prétentions  parce  qu'il  reconnaissait  l'impossibilité  de 
mettre,  à  la  tête  de  ces  Sahariens,  un  étranger  et  surtout  un 
homme  du  Tell. 

On  chercha  également,  pour  obtenir  la  sécurité  dans  ces 
contrées,  à  utiliser  les  influences  locales  rpii  pouvaient 
nous  donnei'  la  prépondérance  sans  coup  férir. 

On  avait  constaté,  en  outre,  après  la  colonne  de  iS\~, 
combien  était  insufTlsante  notre  ligne  de  postes  de  Boghar 
à  Sebdou.  On  fut  ainsi  amené  à  s'adresser  à  Si  llamza  11 
était  le  descendant  du  plus  grand  Saint  du  Sud  Algérien 
et  l'héritier  de  son  influence  religieuse  :  il  avait  sous  sa 
dépendance  presque  tous  les  nomades  du  Sud  et  était, 
depuis  T8r>o,  khalifa  des  Oulad  Sidi  Cheikh  Cheraga.  Après 
bien  des  hésitations,  il  accepta  la  situation  qui  lui  était 
offerte  et,  pour  compléter  l'œuvre  ébauchée,  le  poste  de 
Géryville  fut  créé  cette  même  année. 

T.es  Hamyan  restèrent  en  dehors  de  l'action  de  ce  nou- 
veau poste.  D'ailleurs,  même  à  l'époque  des  Turcs,  leuis 
intérêts  les  avaient  plutôt  rattachés  à  la  région  de  Tlemcen. 
Bien  ne  fut  changé  à  cette  situation  et  ces  tribus  conti- 
nnèient  à  dépendie  du  cercle  de  Sebdou.  C'était  un  danger, 
car  a  la  merci  des  agressions  des  tribus  marocaines,  elles 
étaient  accessibles  aux  prédications  fanatiriues  des  agents 
de  la  cour  de  Fez.  T.e  Bureau  arabe  de  Sebdou  ne  pouvait 
faire  sentir  son  action  que  par  des  tournées  d'officiers  et  par 
la  perception  des  impots.  On  se  contenta  de  faire  changer 
les  campements  en  temps  utile  pour  éviter  les  razzias  ;  ou 
chercha  égalem.ent  à  les  grouper  afin  de  leur  permettre  de 
mieux  résister,  grâce  à  leui"  cohésion,  aux  attaques  venues 
de  l'Ouest,  dont  elles  pouvaient  être  l'objet,  l.e  but  direct 
que  l'on  poursuivait  était  surtout  de  couvrir  plus  euîcace- 
ment  nos  établissements  du  Tell. 

En  t85o,  la  situation  redevient  ce  (fu'elle  était  en  iS'jy. 
Tes  Bezaïna  avaient  abandonné  leui'  teiritoire  pour  aller 
camper  au  Maroc.  Chez  les  Hamyan.  les  Béni  Metharef, 
sous  la  conduite  de  leur  caïd,  Bon  Smaha,  donnèrent  le 
signal  de  la  défection.  Kaddour  Oïdd  Boufeldja,  mécontent 
du  partage  des  Bekakra,  partit  chez  les  Oulad  Sidi  El  Aibi 
fOulad  Sidi  Ben  Aïssa)  :  il  fut  remplacé  dans  le  comman- 


256      DOCUMENTS  POUR  SERVIH  A  l'hiSTOTRE  DES  HAMYAN 

dément  des  Louraïka  par  M'hammed  Ould  lîou  Tkhil  ; 
celui-ci  ne  tarda  pas  à  l'imiter  et  entraîna  avec  lui,  en 
septembre,  le  caïd  des  Moualek,  Ahmed  Ben  Youssef  ;  les 
Bekakra  se  rendirent  à  Figuig",  oi'i  rendez-vous  leur  avait 
été  donné  par  le  faux  sultan  Ben  Serour,  agitateur  venu  de 
l'Exlrême-Sud.  Les  Mei>haoulia,  les  Oulad  Farès,  les  Oulad 
Toumi,  les  Prahda  suivirent  le  mouvement. 

En  décembre,  les  dissidents  promirent  de  rentrer,  si  on 
leur  envoyait  Mebkhout  avec  une  lettre  d'aman  ;  on  leur 
accorda  ce  qu'ils  demandaient  et  les  deux  fds  de  Mebkhout 
furent  gardés  comme  otages  à  TIemcen.  Le  mois  suivant 
(janvier  i853),  comme  les  tribus  n'avaient  pas  tenu  leurs 
engagements,  les  principaux  chefs  Hamyan,  y  compris 
Mebkhout  en  personne,  eurent  le  même  traitement  ;  leurs 
tentes  et  leurs  troupeaux  furent  confiés  aux  Oulad  Ouriach 
et  aux  Oulad  En  Nehar.  Avant  même  d'entrc^r  en  pourpar- 
lers, on  leur  imposa  comme  condition  le  paiement  dune 
amende  de  too  francs  par  tente.  Malgré  trois  lettres  revê- 
tues du  cachet  du  Général  de  Division,  les  llamyan  n'ob- 
tempérèrent pas  aux  ordres  donnés  et  cherchèrent  à  gagner 
du  temps.  Quelques  jours  après,  Mebkhout  et  les  caïds 
réussirent  à  s'enfuii'  et  furent  rejoints  par  leurs  tentes, 
malgré  la  caution  de  l'agha  Ben  Abdallah.  Les  goimis 
lancés  sur  leurs  traces  ne  réussirent  qu'à  reprendre  quel- 
ques troupeaux. 

Les  Djemba  envoyèrent  au  mois  de  mars  une  députation 
à  TIemcen  ;  l'aman  ]our  fut  accordé  sous  la  réserve  de 
fournir,  à  titre  de  Hak-et-Tenia  et  avant  le  8  avril,  uik^ 
somme  globale  de  8/1.270  franc?;.  ()uant  aux  Chafaa,  les 
clauses  furent  les  suiA^ntes  : 

T°  Chaque  caïd  devait  payer  5oo  francs  et  chaque  tente, 
200  francs  ; 

î>°  Chaque  fraction  enverrait  dans  le  Tell  comme  otages 
cinq  veuves  qui  y  resteraient  jusqu'à  nouvel  ordre. 

Si  Hamza  trouva  à  ce  moment  ime  occasion  de  nous 
servir.  Soutenu  par  une  colonne  française,  aux  ordres  du 
Commandant  de  la  Subdivision  de  Mascara,  le  colonel 
Duiieu,  il  tomba,  au  mois  d'avril,  sur  les  fïamyan  Chafari, 
auxquels  il  prit  20.000  chameaux  et  3o.ooo  moutons.  Après 
cette  razzia,  quelques  fractions  rentrèrent  et  on  envova 
chez  eux  les  fils  des  caïds  gardés  comme  otages.  Comme  les 
Oulad  Mansourah  et  les  Oulad  Khelif  persistaient  dans  leur- 
insoumission,  on  augmenta  de  Ho  francs  pour  les  premiers 


DOCIIMEN'IS  POlMi  SKH\1K    \   I.'ll  IS  fT)!!?!-;   liKS  IIXMYAN       257 

raiiicndc  (|iii  ;i\;ti|  (''Ir  iniposrc  ù  cluiqnc  Iciilc,  cl,  pr)Ur  los 
seconds,  dii  se  {(iiilcnl;!  de  Liiiidci'  (•(nniiic  olaji^cs  les  lils 
de  Dcmouclic.  Pour  olilij^cr  les  douars  qui  avaiont  rejoint 
à  rcsior  lidMcs,  ordre  leur'  fui  donné  d'ensiloter  la  tnoilie 
de  leurs  approvisionnetnenis  sous  les  murs  de  Sebdoii.  I,c 
•'()  aoul.  une  partie  ties  liekakra  vint  se  soumettio  av^c 
Mxlallaii  lîen  llanira  ;  ce  dernier-  fut  nommé  caïd  de  toute 
la  tril)u  réunie  :  en  lémoignag^e  de  fidélité,  il  apportait  la 
correspondance  de  Ben  S(>r'our  avec  les  Ilamvan,  qu'il  avait 
saisie  à  l'i^ui^-  :  (piant  aux  deux  caïds,  ils  étaient  encore 
en  fuite  a\('c  plirsieurs  tentes. 

Mebkhout  demanda  îi  razzier-  les  Chafaa  dissidents  ; 
900  cavaliers  furenl  mis  à  sa  disposition,  mais  le  coup 
manqua  en  partie  par  suite  de  la  mauvaise  volonté  et  d(^ 
rindisei|)line  des  ooumiers  ;  il  ne  ramena  que  cinq  à  six 
millt^  moutons.  Totrtes  les  lentes  des  Oulad  TiMuiii  et  des 
Heni  Afetharef  faisaient  encore^  défection  à  ce  momenl.  Les 
riivaïna,  mal  accueillis  par"  les  Marocains,  rciragnèrent 
d'eux-mêmes  le  cercle  de  Saïda. 

On  l'énonça  alors  à  mettre  les  diverses  fractions 
ïlamyan  sous  un  même  chef  et  (^n  jugea  préférable  de 
laisser  les  caïds  sous  l'autorité  directe  du  Commandement 
français  de  Sebdpu.  Pour-  traiter  les  affaires  d'administra- 
tion intérieure,  les  caïds  étaient  réunis  en  djemaa  au  clief- 
li(Hi  du  cercle.  C'est  à  cette  époque  (lue  l'on  commença  à 
investir  olTiciellement  les  chefs  des  djemaa  dont  le  choix 
avait  été  laissé  jusque  là  au  Commandant  de  la  Subdivision 
de  Tleincen.  I.a  iK^mination  des  chefs  indigènes  fut  donnée 
aux  Généraux  commandant  les  provinces  ;  elle  leiii-  fut 
retirée  en  septembre  i864  :  mais  l'exécution  de  cette  me- 
sure, suspendue  prescpie  aussitcM,  ne  fut  rendue  obligatoire 
qu'en  juillet  1871. 

On  tint  compte  enfin  du  fractionnement  tel  qu'il  exis- 
tait :  les  Ghiatra  et  les  Alegan,  deux  des  plus  petites 
fractions,  eurent  chacune  leur  caïd,  Abdelouhab  et  Bon 
Tkhil  Ould  Bamdan.  Un  même  chef  était  donné  aux  deux 
tribus  Ghiatra  :  ce  chef  était  pris  indiffércMTiment  chez  les 
Oïdad  Messaoud  et  chez  les  Oulad  Ahmed.  Cette  situation 
augmenta  les  inimitiés.  Par'  contre  on  \ouhit,  au  mois 
d'août  i853,  scinder  les  Akerma  en  Oulad  Ben  Salem  et 
Djefala,  ayant  des  caïds  distincts  ;  mais  Alessaoud  Ben 
Bamdan,  nommé  au  commandement  des  Djefafla,  fut 
révoqué  le  •>f)  du  même  mois  comme  n'ayant  ni  l'énergi.', 


258       DOCUMENTS  POTIU  SEBVIK  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

ni  l'inlluence  nécessaires  ;  les  Akcrma  ne  formèrent  de 
nouveau  qu'une  seule  tribu  (|ui  leçut,  le  28  octobre, 
Boudjenia  Ben  Abdallah,  comme  caïd. 


CHAPITRE  II 
LA  (  RftATION  DU  POSTE  DAIN-BEN-MHKLII. 


Piéoccupés  par  l'idée  d'asseoir  notre  domination  dans  ie 
Sud,  les  Généraux  conunaiidanl  la  Division  d'Oran 
avaient  réclamé  la  création  dun  point  d'appui  dans  cette 
ré§:ion.  Dès  le  début  on  avait  fait  élever  un  caravansérail 
à  El-Ariclia  et  on  songea  à  établir  un  poste  à  Aïn-Sfissifa. 
Ce  projet  fut  écarté  par  le  maréchal  Randon  comme 
prématuré. 

On  se  rejeta  sur  Aïn-ben-Khclil,  situé  au  milieu  des 
tribus  Hamyan,  pour  y  construire  non  un  poste,  mais  une 
maison  de  commandement.  Cette  question  fut  traitée  en 
tS.")/)  |)ar  le  général  Cousin-Monlauban,  commandant  la 
Subdivision  de  Tlemcen  ;  il  considérait  cette  mesure 
comme  indispensable  |)()nr  suivciller  le  pays  au  delà  du 
Chotl  Gharbi,  pour  f)rotéger  la  joute  de  Figuig  et  main- 
tenir les  tribus  des  Hauts-Plateaux  oranais.  Il  proposait 
deux  combinaisons  :  la  première,  de  faire  jouer  à  Aïn-ben- 
Khclil,  à  l'Ouest,  le  rôle  que  jouait  Géry ville  dans  l'Est, 
en  y  plaçant,  avec  deux  compagnies  d'infanterie  et  un 
maghzen  de  5o  chevaux,  un  offîcier  duquel  relèverait 
diiecft^ment  chacun  des  caïds  des  Hamyan  ;  la  deuxième, 
de  nommer  Moulay  Seddik,  gendie  et  khalifa  de  l'agha 
Mohammed  Ben  Abdallah,  agha  des  Hamyan,  et  de  l'ins- 
taller dans  cette  maison  de  commandement. 

Suivant  l'avis  expi'imé  par  le  maréchal  Pvandon,  le  Minis- 
lic  (le  l;i  (iucrrc  rejeta  ces  pro|)<)siti()ns  :  d'après  lui,  les 
ccHnpagnies  placées  dans  le  nouveau  poste  allaient  se 
trouver  hors  de  toute  protection  en  face  des  populations 
turbulentes  du  Maroc  ;  en  outre,  les  communications  avec 
im  tel  poste  seraient  difficiles  et  un  jour,  pour  le  dégager. 


DOCUMENTS  l'OUH  SRRMK  A  F,  IIISIDIMK  DKS  IINMYAN 


250 


on  se  troLivciait,  poul-clrc,  cliins  la  iiéccssilé  d'organiser 
de  folles  coloniK'S. 

Les  coiisidéialions  (|iii  avaient  fait  ic[)oiis.s('i-  auparavaiil 
l'agha  Ben  Abdallah,  lirenl  abandonner  égalenienl  la 
combinaison  de  Moulav  Scddik.  Connne  on  voulait  laissci- 
à  Géryville  toute  son  action  dans  le  Sud,  on  se  décida  à 
essayer  dune  organisation  dont  les  éléments  seraient  pris 
exclusivement  dans  la  tribu. 

Au  mois  d(>  juillet  iSâ/i,  le  général  Pélissier,  comman- 
dant la  province,  investit  lui-même,  et  de  son  autorité, 
Mebkhout,  agha  des  Hamyan  ;  il  avait  sous  ses  ordres  deux 
caïds  :  Demouche,  pour  les  (Ihafaa,  (|ui  c(jmprenaient  les 
Oulad  Mansomah,  les  Oïdad  Klielif,  les  Bekakra,  les  Aker- 
nia  (>[  les  Béni  Metharef  (ces  derniers  venaient  de  faire  seu- 
lement leur  soumission)  et  Abd-el-Ouabab  poni'  lesDjemba, 
(pii  comprenaient  les  Megliaoulia,  Sendan,  Ghintra,  Oulad 
Farcs,  Oulad  Seiour,  Oulad  Toumi,  Fralida,  Megan  et 
Oulad  Embarek.  Les  ksour  étaient  :  Aïn-Siissifa,  Aïn-Sefra, 
Asla,  Tiout,  Moghar  Tahtani  et  Moghar  Foukani.  Le  nouvel 
agha  dut  s'établir  à  Aïn-Ben-Khelil.  Ce  qui  avait  été  fait 
fut  approuvé  par  le  Ministre  de  la  Guerre,  le  3  novembre. 
La  Division  décida  ensuite  que  les  Djemba,  ayant  reçu  une 
organisation  et  habitant  sur  notre  territoire,  payeraient 
le  zekkat  à  partir  de  i855.  Les  Chafaa  payaient  le  Hak-el- 
Tenia  en  rem[)lacement  de  l'impôt  achour  des  telliens. 
Tous  les  Hamyan  furent  autorisés  l'année  suivante  (juillet 
1855)  à  ne  plus  ensiloter  que  la  moitié  de  leurs  grains  à 
Sebdou,  moyennant  le  versement  d'une  somme  de 
s>5.ooo  francs. 

La  nomination  de  Mebkhout  était  loin  de  satisfaire  les 
Hamyan.  Dès  le  mois  d'octobre  i854,  ils  protestèrent  ;  il 
fallut  que  le  chef  du  Bureau  de  Tlemcen  se  rendît  à  Aïn- 
bi'U-Khelil  et  il  ne  parvint  à  lélablir  l'ordre  qu'en  rame- 
nant au  Méchouar  ^citadelle  de  Tlemcen)  seize  otages  piis 
chez  les  Djemba  les  plus  récalcitrants. 

Fn  i8r)r>,  malgré  de  nouvelles  oj)posilions  et  de  nouxclles 
dilïicultés  t|ui  entrainèrent  la  destitution  de  trois  caïds, 
dont  Tayeb  Ben  Sliman,  des  Oulad  Serour,  l'agha  Meb- 
khout réussit  à  se  maintenir  :  il  alla  même  cheri'her  jus- 
(pi'à  Figuig  les  lentes  restées  insoumises  et  r(H;ul  des  ouver- 
tures de  soumission  des  Doni  Menia  et  des  Oulad  Djeiir, 
«pii  lui  proposèrent  de  l'aider  à  ccunbaltre  les  paili-^ans  i\vs 
Oulad  Sidi  Gheikh  (iheraba  et  à  les  maintenir  au  delà  de 


2G0      DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOTRE  DES  HAMYAN 

l'Oued  Giiir.  Mcbkhont  obtint  enfin  la  soumission  du  ksar 
de  Moghar  Foukani. 

T. es  complications  léappannenl  dès  le  mois  de  juin  i856. 
Les  Hamyan  ne  voulaient  plus  d'agha,  ni  de  caïd  des  caïds; 
ils  se  dispersèrent,  malgré  les  efforts  de  Mebkhout  pour  les 
retenir.  Ce  chef,  en  voyant  son  impuissance  à  maintenir 
ses  gens  dans  le  devoir,  et,  craignant  pour  sa  popularité, 
prit  le  parti  de  les  suivre  dans  leur  émigration.  Abd-el- 
Ouahab,  de  son  côté,  avait  été  le  premier  à  lui  faire  de 
l'opposition  et  à  entraîner  les  Djemba  dans  le  cercle  de 
Géryville.  Demouche,  d'autre  part,  après  avoir  engagé  les 
Chafaa  à  faire  défection,  fut  tué  en  chargeant  à  la  tête  de 
S(^n  g(ium,  qui  voulait  protéger  contre  nous  la  fuite  des  Ha- 
myan. Enfin,  les  Oulad  Ahmed,  mécontents  d'être  réunis 
aux  Oulad  Messaoud,  assassinèrent,  le  ir>  juin,  leur  caïd 
Eddine,  frère  du  caïd  des  caïds  Abd-el-Ouahab,  qui  était 
venu  chez  eux  pour  percevoir  l'impôt,  et  firent  défection. 

Ee  Général  commandant  la  Subdivision,  en  apprenant 
ces  événements,  envoya  d'abord  à  El-Aricha  un  détache- 
ment de  spahis  avec  loo  hommes  d'infanterie,  pour 
assurer  la  communication  avec  Aïn-Ben-Khelil  ;  plus  tard 
fiQ  juillet  TSBfi"),  deux  escadrons  de  chasseurs  d'Afrique  el 
deux  bataillons  partirent  de  Tlemcen  pour  appuyer  le 
premier  détachement.  Ea  maison  de  Commandement  se 
trouvait  en  effet  au  milieu  d'un  pays  vide,  à  5o  lieues  de 
t(»iil  secours,  et  sans  cesse  exposée  aux  incursions  des 
lebelh^s  qui  étaient  allés  jusqu'à  attaquer  un  convoi  de 
ravitaillement  destiné  à  ce  poste.  En  outre,  les  tribus 
fidèles,  complètement  à  découveil,  étaient  sans  cesse  sur 
le  qui-vive.  On  se  hâta  donc  d'achever  les  constructions 
commencées  à  Aïn-Ben-Khelil,  en  leur  donnant  tout  le 
développement  nécessaire,  afin  de  faire  de  cet  endroit  un 
point  d'appui. 

Mebkhout,  ayant  réuni  une  partie  de  ses  gens,  demanda 
l'aman,  qui  lui  fut  accordé  ;  il  lui  fut  prescrit,  ainsi  qu'à 
ceux  qui  étaient  avec  lui,  de  venir  camper  à  Bou  Guern  o\ 
à  Chaïb.  Peu  de  temps  après,  le  caïd  des  caïds  Abd-el- 
Ouahab  réussit  à  son  tour  à  rentrer  avec  son  douar 
(.^o  tentes),  après  avoir  livré  à  El  Bridj  un  combat  dans 
lequel  il  perdit  5  hommes.  Quelques  Djemba  ne  tardèrent 
ésfalement  pas  à  fairt^  leur  soumission  et,  le  t®""  octobre,  ils 
obtinrent  l'aman  moyennant  une  amende  de  ^o  francs 
par  tente. 


DOCUMENTS  POUR  SEIUII;    \   l."ll  IS  TOI  M  i-;  dj/s  II\\1\a.n       'J<11 

KxiMMiitioli  (in  capiliiiiM'  de  (  oloiiil),  iSôii.  —  Mebkhuul 
j)arlil  biciilùl  de  iioum'uu  ni  dissidence.  Pour  mettre  un 
leiine  à  ces  délVcl ions,  le  eapilairie  de  Colomb,  Connnan- 
<lanl  supérieur  de  Ciéryviile,  ierut  l'ordre,  Je  28  octobre, 
après  les  fortes  chaleurs,  de  marcher  contre  les  insoumis  '; 
sa  colonne,  composée  surtout  de  eonlinc^ents  indigènes  dé 
son  cercle  et  de  cent  chevauv  du  eeicle  de  Saida,  était 
renforcée  d'une  compagnie  de  tirailleurs  et  de  quelques 
spahis  ;  son  plan  était  de  suiprendre  les  llamyan  et  de  les 
tourner,  afin  de  leur  couper  les  routes  du  Sud.  En  même 
temps,  1(>  capitaine  Leroux,  Commandant  supérieur  de- 
Sebdou,  à  la  tête  d'une  petite  colonne  de  3oo  chevaux,  de 
25  spahis  et  dune  compagnie  de  tirailleurs,  devait  se 
porter  à  Aïn-Ben-KheJil  et  prendre  les  dissidents  à  revers. 
Enfin,  le  sous-lieutenant  Nicolas,  chef  du  Bmeau  de  Saïda, 
se  tenait  en  réserve,  prêt  à  répondre  à  l'appel  des  deux 
autres  colonnes. 

L'opération  réussit  ;  le  8  novembre,  le  capitaine  de 
Colomb  altei'gnait  la  plus  grande  partie  des  Chafaa  à 
Timchetih,  entre  la  Chebka  de  Tioudadin  et  le  Djebel 
lendrara  Gharbia.  Après  un  engagement  assez  vif  l'ao-ha 
Mebkhout  qui  avait  rejoint  les  révoltés,  pressé  de  tous  côtés 
lit  sa  soumission  avec  tous  les  siens,  malgré  l'opposition 
des  Bem  Guil,  contre  les  attaques  desquels  il  fallut  ensuite 
protéger  les  Hamyan.  Les  Oulad  Mansourah,  les  Oulad 
Khehf,  les  Akerma  et  quelques  tentes  des  Oulad  Serour 
rentrèrent  dans  le  devoir. 

De  son  côté,  le  capitaine  Leroux  atteignit  les  Djemba  et 
les  insurgés  furent  ramenés  dans  leur  pavs  par  des  colonnes 
de  goums  envoyées  à  cet  effet. 

Expéditions  du  lieutenant  Burin  et  du  lieutenant-colonel 
Niqueux,  1857.  -  En  février-  de  Tannée  suivante  (i85--) 
nos  troupes  furent  de  nouveau  dirigées  dans  le  Sud  pour 
compléter  les  résultats  obtenus.  Le  20  de  ce  mois,  le  lieu- 
tenant Burin,  chef  du  Bureau  de  Géryville,  à  la  tête  des 
goums  de  ce  cercle,  appuyés  de  oô  tirailleurs  et  de 
10  spahis  commandés  par  le  maréchal-des-logis  La-erre 
atteignait  plusieurs  douars  à  l'Est  de  Figuig  et  leur  enlevaii 
îo.ooo  moutons. 

A  la  suit^  d'un  coup  de  main  exécuté  par  les  tribus  maro- 
caines du  Zegdou  contre  les  Oulad  En  Nehar  et  d'une  tenta- 
tive semblable  contre  les  llamyan,  deux  colonnes,  l'une 
sous  les  ordres  du  lieutenant-colonel  Niqueux    Comman- 


262       DOCUMENTS  POl  R  SERVIR  A  J.'lIISTOlRE  DES  HAMYAN 

danl  supérieur  de  Tiaret ,  l'autre  sous  les  ordres  du  capitaine 
de  Colomb,  furent  mises  en  mouvement.  Le  lieutenant- 
colonel  Niqueux,  après  s'êtie  avancé  jusqu'auprès  d'Âïn- 
Chaïr,  ramena  sa  colonne  sans  avoir  eu  aucun  engagement. 
Quant  au  capitaine  de  Colondj,  il  atteignit  au  pied  du 
Djebel  Béchar,  à  proximité  d'Ouakda,  les  Oulad  Djerir,  qui 
voulaient  lui  barrer  la  route,  et  leui-  infligea  un  cruel  échec. 
Cin(puuite-neuf  tentes  des  Ghiatra  avaient  fait,  au  mois 
de  mai,  leur  soumission  au  khalifa  Si  Hamza.  Leur  caïd, 
Ahmed' Ould  Lakhdar,  avait  été  tué  dans  la  razzia  exécutée 
par  le  Zegdou  ;  il  fut  remplacé  par  Djelloul  Ould  Lakhdar. 
Pour  donner  satisfaction  aux  Oulad  Ahmed,  on  les  sépara 
des  Oulad  Messaoud  (Décision  du  maréchal  Vaillant, 
ministre  de  la  Guerre,  17  août  i8r>7)  ;  ils  reçurent  comme 
caïd  Mohammed  Ould  En  Nouar  qui,  du  temps  d'Abd-el- 
Kader,  avait  déjà  rempli  cet  emploi. 

On  profita  de  ce  que  la  paix  paraissait  rétablie  dans  cette 
région,  pour  y  consolider  notre  établissement.  Il  était 
impossible  de  maintenir  Mebkhout  à  la  place  qu'il  occu- 
pait. Impuissant  à  retenir  les  révoltés,  qui  ne  voulaient  pas 
reconnaître  son  autorité,  il  avait  suivi  le  mouvement  ;  il 
fut  révoqué.  Le  généial  Cousin-Montauban  reprit  alors 
son  projet  de  donner  à  IMoulay  Seddik,  khalifa  des  Béni 
Snouss,  le  conmiandement  des  Hamyan  et  de  créer  un 
poste  important  à  Aïn-Ben-Khelil.  Au  mois  de  juillet,  il 
annonçait  au  Gouverneur  la  nomination  de  Moulay  Seddik 
et  l'achèvement  du  poste,  qui  se  composait  : 

1°  D'un  fort  en  maçonnerie  de  100  mètres  sur  80,  com- 
prenant une  caserne  pour  200  hommes,  une  manutention, 
une  poudrière,  un  pavillon  pour  les  officiers,  un  pavillon 
affecté  au  Bureau  arabe  ; 

2°  D'un  camp  retranché  ayant  également  100  mètres 
sur  80,  destiné  à  faire  camper  des  troupes  de  passage  et  à 
recevoir  les  approvisionnements  des  colonnes  opérant  dans 
le  Sud. 

Un  équipage  de  200  chameaux  était,  en  outre,  toujours 
prêt  à  marcher.  Le  généial  demandait  de  compléter  l'orga- 
nisation de  ce  poste  en  en  faisant  le  chef-lieu  d'une  annexe 
du  cercle  de  Sebdou.  Le  chef  de  cette  nouvelle  circons- 
cription eût  été  chargé  spécialement  d'administrer  les 
llamyan,  les  ksour  du  Sud-Ouest  et  les  Amour.  Mais  le 
budget  se  trouvait  déjà  grevé  par  de  nouvelles  dépenses 
à  prévoir  pour  d'autres  créations  projetées  ultérieurement  ; 


DOGI.'MENTS  l'OI   K  SKHNIH    \   I  "il  IS  K  )1  Ui;   |)KS  IIANH  A^       2(i.'5 

il  l'allul  ajoui  lier  la  c» ifislilulion  rôfjfiilière  de  l'annexe 
d  Aïii-Beri-Kliclil  cL,  (|ii(l(|iie  lf[n[)s  a()rès,  la  siluaticjii 
nioinenlaiiémciil  {)acili(|iu'  de  ces  légions  lit  ul)aiulonnei' 
C()ni[)lèl('iiu'iit  le  [)<)sle  |)rovis<)ire  (|ue  les  événenieiiLs  nous 
avaient  eonliaiiils  (In   iii>laller. 

En  effet,  au\  agitations  profondes  des  années  précéden- 
tes, succéda  une  périodi'  de  calme  relatif  due  surtout  à  la 
situation  des  partis  dans  le  Sahara,  l.e  seul  événement 
saillant  de  raniiée  iSàô  est  une  amende  de  ô.ooo  francs  à 
huiuellc  les  ilamyan  fiacnt  condamnés  pour  les  dégâts 
commis  à  Aïn-Ben-Khelil.  Le  général  Deligny  prescrivit 
en  même  temps  de  mainlenii'  les  tribus  marocaines  au  delà 
de  Mengoub  et  de  (ialloul. 

Moulay  Seddik,  loujouis  malade,  vivait  constamment, 
soit  à  Tlemcen,  soit  aux  Béni  Snouss  et  ne  dépassait  pas 
Sebdou.  Sa  présence  ne  souleva  (|ue  des  compétitions,  mais 
pas  de  grandes  complicatit)ns  ;  les  caïds  réglaient  géné- 
ralement leuis  affaires  directement  avec  le  Commande- 
ment français  de  Sebdou.  Celui-ci,  malgré  l'éloignement, 
parvint  à  se  renseigner  sur  ce  qui  se  passait  dans  les 
tiibus  et  à  nous  garder  la  lidélité  des  Hamyan,  qui  l'aidè- 
rent dans  toutes  les  dillicultés  qui  se  produisirent  avec  les 
tribus  voisines.  C'est  ainsi  (ju'ils  battirent,  en  juin  1860, 
le  Zegdou  et  en  août  de  la  même  année,  les  Béni  Guil,  qui 
étaient  venus  les  razzier.  Nous  n'eûmes  à  intervenir  (jue 
dans  trois  circonstances. 

Vers  le  milieu  de  l'année  1859,  une  femme  indigène 
nommée  Adda,  qui  essayait  de  jouer  le  rôle  de  sultane  chez 
les  Béni  Guil,  réussit  à  faire  quelques  prosélytes.  Elle 
affirma  son  autorité  par  lincendie  des  moissons  d'Aïn- 
Chaïr  et  par  des  exécutions  (notamment  celle  de  Mekhi,  des 
Oulad  Mansourah) .  A  la  même  époque,  les  tribus  furent 
travaillées  par  des  émissaires  du  prétendu  sultan  Si  Moham- 
med Ben  Abdallah.  Toutes  ces  causes  d'agitation  produisi- 
rent une  certaine  émotion  chez  les  Hamyan.  Pour  calmer 
l'effervescence,  le  général  Durieu  se  rendit  avec  une 
colonne  chez  les  Béni  Guil  et  les  razzia  le  5  novembre. 
L'agha  Ben  Abdallah,  de  son  côté,  ramena  quelques  douars 
qui  étaient  allés  camper  à  Oglat  Es  Cedra  (5o  kilomètres 
à  l'Ouest  de  Mengoub) . 

La  seconde  fois,  ce  fut  en  janvier  186 1  ;  le  commandant 
Dastugue  dut  se  rendre  dans  le  Sud  avec  une  escorte  com- 
posée d'un  peloton  de  i^f)  spahis  et  de  200  goumiers  pour 


264       DOCUMENTS  POl  U  SEKMlt  A  I. 'HISTOIRE  DES  IIAMYAN 

protéger  le  retour  des  caravanes  ;  il  visita  les  Moghar  aliii 
d'aviser  aux  movens  de  leur  donner  des  caïds.  En  décem- 
bre, le  Conimandiuit  supérieur  de  Sebdou  renouvela  son 
excursion  '. 

Enfin,  en  i863,  (juehjues  défections  isolées  s'étant  pro- 
duites, le  colonel  I)astugu(^  rejoignit  et  razzia  complète- 
ment les  dissidents  à  Djorf  el  Kehoul. 

Moulay  Seddik  étant  nioit  cette  même  année,  on  voulut 
essayer  sur  les  llamyan  de  l'effet  d'un  grand  nom.  On  leur 
donna  comme  agha,  le  i3  mars  1864,  le  fils  du  général 
Mustapha  Ben  Ismaël.  Le  nouveau  chef  devait  avoir 
10  khialas  (cavaliers)  pris  dans  son  aghalik.  Il  n'en  fut  rien 
et  les  Hamyan  affectèrent  de  ne  pas  lui  donner  plus  d'im- 
portance qu'ils  n'en  avaient  accordé  à  Moulay  Seddik. 

L'insurrection  éclata  dans  le  Sud  et  l'agha  Mohammed 
Ould  Mustapha  Ben  Ismaël  resta  à  Sebdou  jusqu'en  1867, 
complètement  étranger  à  ce  qui  se  passait  dans  son 
commandement. 


CHAPITRE  III 


L'INSURRECTION  DE8  OULAI)  SIDI  CHEIKH 
(1864-1870) 


L'expédition  du  Mexique  avait  forcé  le  Gouvernement 
français  à  dégarnir  l'Algérie  d'une  partie  de  ses  troupes. 
Lel3achagha  des  Oulad  Sidi  Cheikh,  Si  Sliman  Ben  Hamza, 
fils  de  Si  Hamza  ^qui  nous  avait  fidèlement  servis  jus(|u'à 
sa  mort,  en  i86i\  crut  le  moment  pro])ice  pour  appeler 
aux  armes  toutes  les  populations  qui  le  leconnaissaient 
coiumc  chef  religieux  et  militaire.  Le  colonel  Beauprétre, 
Commandant  supérieui-,  qui  avait  tenté  d'arrêter,  avec  une 
petite  colonne,  le  mouvement  insurrectionnel,  fut  surpris 


I  C'est,  en  iStio  qu'EI  Hini  j  lûulddiir  Oiiltl  IJouleliIjii,  le  'neilicur  et  le  ])liis 
dévoué  flos  chefs  iiidifrèiies  (jui  nous  ;iil  ('lé  donné  jimt  les  ]I:imyiin,  i'nt  nommé 
caïd  des  Bekakra. 


DOCUMEMS  VOl   H  SKHNIll  A   I,  lllSIOIIti:  DKS  IIWIVW 


'20 


lii  iiiiil  cl  poignard»'  à  lion  Mcin,  pt'iidiiiil  (jiie  t^es  soldais 
(Hairiil  iiiassaciés. 

L(!  liuieau  de  Sebdou  signalait  à  co  moiiKiil  l'alliludc 
des  Djcîiiiba,  qui  dé(larai<'iil  hauleinent  ne  relever  que  de 
Sidi  (^iic'ikli  Ben  Tajcb  ;  d'anlre  pari,  Moulay  Frah,  venu 
au  milieu  des  llanivan,  leur  annonça  qu'ils  élaienl  placés 
sous  le  connnandemenL  de  son  frère  Sidi  Cheikh,  l  ne 
centaine  de  cavalieis  des  Djemba,  une  vingtaine  des  Chafaa 
parmi  lesquels  des  caïds,  allèrent  rendre  visite  au  Mara- 
boiil.  Aussi,  au  mois  d'aviil,  le  Comniandant  su|)éri('ur 
Henri  fut-il  envoyé  à  Aïn-Ben-Khelil  avec  une  petite 
colonne  pour  raffermir  notre  autorité  dans  le  Sud  ;  une 
autre  colonne  fut  installée  à  Kl-.\richa,  où  on  retinl  en 
surveillance  quelques  caïds  des  liamyan.  Ces  mesures 
furent  insullisantes.  Cinquante  tentes,  qui  avaient  fait 
défcclion,  rejoignirent  le  mois  suivant  Sidi  Cheikh  Ben 
Tayeb  à  Céryville  et,  en  août,  Mohammed  Ben  Kendoussi, 
caïd  des  Oulad  Messaoud,  entraîna  avec  lui  une  partie  de 
sa  tribu  pour  ne  pas  payer  l'impôt. 

Le  Gouvernement  français  protesta  cette  fois  encore 
auprès  de  l'Empereur  du  Maroc,  contre  les  agissements  de 
Sidi  (Cheikh  Ben  Taycb,  qui  fut  mandé  à  Fez  pour  s'y 
expliquer.  Se  rappelant  l'accueil  (juil  avait  reçu  en  18^9, 
le  rusé  marabout  se  dispensa  de  répondre  à  l'appel  de  son 
souverain. 

Pendant  ce  temps,  le  général  Deligny,  commandant  la 
province  d'Oran,  avait  saccagé  le  ksar  d'El  Abiod  Sidi 
Cheikh,  foyer  de  l'insurrection,  et,  croyant  en  avoir  fini 
avec  la  révolte,  il  s'était  replié  sur  Saïda  et  avait  établi  ses 
troupes  sur  le  plateau  d'Aïn-el-Hadjar,  pour  y  prendre  ses 
quartiers  d'été. 

Mais  les  rebelles  ne  se  tenaient  pas  pour  vaincus  ;  ils 
avaient  seulement  battu  en  retraite.  Le.  but  du  marabout 
Si  Sliman  et  de  son  oncle  Si  Lalla,  qui  le  dirigeait,  était 
d'agir  sur  les  tribus  des  Hauts-Plateaux  qui  nous  étaient 
restées  fidèles.  De  son  côté,  le  général  Deligny  avait  orga- 
nisé deux  colonnes  d'observation,  l'une  à  Frenda,  comman- 
dée par  le  lieutenant-colonel  de  Colomb,  l'autre  à  Tafaroua, 
par  le  général  Jollivet. 

Vers  la  fin  de  septembre,  Si  Lalla  apparut  sur  le  Chott 
Chergui,  tentant  d'attirer  les  dernières  fractions  qui 
n'avaient  pas  encore  embrassé  sa  cause,  c'est-à-dire  les 
Rezaïna,  les  Djaffra  et  les  Bcnî  Malhar  (du  Télagh  actuel  1. 


18 


266       DOCUMENTS  POl  R  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

Expédition  JoUivct,  1864.  —  Le  général  Jollivet  se  porta 
alors  de  Tafaroua  sur  Je  Kreider  et  voulant  surprendre  les 
insurgés,  laissa  la  garde  de  son  camp  à  un  bataillon  du 
17"  d'Infanterie,  sous  les  ordres  du  commandant  Bressoles, 
blessé  d'un  coup  de  pied  de  cheval.  Avec  le  reste  de  ses 
troupes,  il  organisa  une  colonne  légère,  infanterie  sans  sac, 
composée  de  deux  bataillons  d'infanterie,  deux  escadrons 
de  chasseurs  à  cheval,  une  section  d'artillerie  et  4o  gou- 
miers. 

Le  29  septembre,  ii  se  mit  en  route  sur  Bedrous.  Arrivée 
en  ce  point,  la  colonne  aperçut  des  feux  nombreux  au 
Nord  du  chott.  Elle  s'engagea  dans  les  boues  gluantes  de 
la  sebkha.  Mais  au  lieu  des  lentes  de  Sidi  Lalla,  qu'il 
croyait  rencontrer,  le  général  ne  trouva  que  celles  des 
Rezaïna.  Il  les  envoya  camper  sous  la  protection  des  troupes 
du  Kreider,  pour  les  soustraire  aux  séductions  et  aux  vio- 
lences du  marabout,  et,  n'abandonnant  toujours  pas  son 
idée  de  surprendre  Si  Lalla,  il  remonta  plus  au  Nord  vers 
El  Kerch.  Comme  il  n'y  avait  pas  d'eau  en  ce  point,  il  se 
dirigea  sur  Aïn-Beïda,  où  le  caïd  des  Maalif  lui  avait  assuré 
qu'il  parviendrait  en  trois  heures.  La  chaleur  était  acca- 
blante, le  sirocco  souillait  avec  violence,  la  ration  d'eau 
était  épuisée  depuis  longtemps  et  les  traînards  jalonnaient 
la  route.  Après  vingt  heures  de  marche,  le  général  parvint 
enfin  aux  sources  ;  mais  pendant  qu'il  envoyait  un  esca- 
dron de  chasseurs  portei'  des  bidons  à  l'infanterie,  des 
cavaliers  sans  nombre  sortant  des  gorges,  des  ravins,  des 
replis  de  terrain,  débouchèrent  sur  la  plaine.  Laissant  de 
côté  les  troupes  qui  s'étaient  formées  en  carré,  Si  Lalla 
fonça  sur  le  convoi  qui  marchait  à  la  débandade  et  sur  les 
traînards.  Cent  vingt  de  nos  fantassins  furent  tués.  Tandis 
que  le  marabout  et  ses  contingents,  ivres  de  leur  succès, 
emportaient  avec  leurs  bagages  une  centaine  de  têtes  de 
nos  soldats,  la  colonne  reprenait  le  chemin  d'Aïn-el-Hadjar 
011  elle  parvenait  le  2  octobre  ;  le  3,  elle  était  à  Saïda. 

Ayant  appris  ce  désastre,  les  Rezaïna,  qui  avaient  exécuté 
le  mouvement  qui  leur  avait  été  prescrit  sur  le  Kreider, 
levèrent  le  masque  et  firent  ostensiblement  leurs  prépara- 
tifs de  départ.  Pour  les  en  empêcher,  le  commandant 
Bressoles  envoya,  le  i"  octobre,  une  compagnie  d'infan- 
terie en  avant  de  leurs  campements  ;  cette  compagnie 
conunit  la  faute  de  se  diviser  en  deux  groupes  qui  ne  pou- 
vaient se  prêter  réciproquement  aucun  secours.  Surexcités 


Doci  MEiMs  l'oi  H  si:i<\iK  A  l'iiisKuui:  i(i:s  iiwnw     207 

|)iu  [r.  Ii'i<)rii[)lic  (.le  Si  l.aiiii,  les  lic/.aïiiii,  (|iii  ('liiiciil  ii(-(|ijis 
depuis  l()ii^lcin[»s  à  su  ciiiisc  cl  comijljiinil  un  yiaïul  intui- 
brc  (le  l'usils,  alliH|uri  cul  \  i^ourcuscuicuL  cliatuti  (\t-> 
groupes  et  les  auéaulireul.  (  '.'esl  ainsi  (|ue  la  guinisou  de  la 
redoute  (lu  Krcidcr  pi  il  sa  part  du  désaslre  éprouvé  par  la 
niallieureusi'  colonne  de  l'^rcuda,  la(picllc  dut  être  rccoiis- 
liluée  dès  son  rclour  à  Saïda. 

I.e  général  Deligiiy,  de  son  côté,  avait  opéré  dans  lo 
cercle  de  Géry ville  et  y  avait  obtcMiu  (pielques  soumissions. 

Après  l'affaire  d'Aïn-Jieida,  Si  Lalla  avait  réussi  à 
entraîner  les  populations  indécises  des  Hauts-Plateaux.  Il 
voulut  tenter  d'envahir  le  Tell  de  Daya  ;  mais  le  général 
Joliivet  prit  sur  lui  sa  revanche  en  le  battant  sur  la  Mékerra 
et  le  rejeta  dans  l'I^xtrème-Sud. 

Au  mois  de  novembre  la  situation  s'améliora  ;  le  général 
Deligny  réinstalla  les  Oulad  Sidi  Khalifa  sur  leur  territoire; 
les  lîeni  Mathar  et  les  llarrar  demandèrent  l'aman. 

Sidi  Cheikh  Ben  Tayeb,  se  relâchant  de  sa  prudence 
ordinaire,  avait  commis  la  faute  de  se  rendre  au  Maroc  ; 
l'Empereur  lui  assigna  comme  résidence,  sur  les  instances 
du  (Consul  général  de  France  à  Tanger,  un  point  situé  près 
de  Kez,  où  il  devait  s'installer  avec  sa  famille.  Quatre  de 
ses  fds  furent  gardés  comme  otages  au  Maroc. 

A  la  fin  de  l'année  1864,  le  commandant  Morand  battit 
enfin,  à  Fekarine,  un  fort  parti  de  dissidents. 

Tandis  qu'au  début  de  i865,  toute  la  province  d'Alger 
était  rentrée  dans  le  devoir,  la  révolte  gagnait  la  province 
d'Oian.  Le  général  Deligny  vint  s'établir  à  Géryville  pour 
préparer  une  expédition. 

En  effet,  ce  cercle  presque  en  entier  était  en  état  d'insur- 
rection. Si  Mohammed  Ben  llamza  groupait  autoiu"  de  lui 
une  partie  des  tribus  ;  l'autre  partie  (Trafi  et  Oulad  Sidi 
Cheikh  Gheraba)  suivait  les  conseils  de  Sidi  Cheikh  Ben 
Tayeb  ;  celui-ci  devenu  libre,  après  les  avoir  entraînés  à  la 
rébellion,  s'abstint  d'y  prendre  part  ;  son  but  était  d'user 
ses  rivaux,  les  Oulad  Hamza. 

Expédition  du  jçénéral  Deligny,  18()5.  —  Le  27  janvier, 
le  général  Deligny  quitta  Géryville  pour  se  diriger  vers  1<^ 
Sud-Ouest.  Avec  ses  lioupes  régulières  marchaient  800  gou- 
miers,  à  la  tête  desquels  se  trouvaient  le  commandant 
Dastugue,  le  capitaine  Pan-Lacroix,  Si  Ahmed  ould  El 
Kadhy,  Si  El  lïadj  Kaddour  Ben  Es-Saharaoui  et  son  fils. 
Prenant  les  devants  avec  sa  cavalerie,   le  général   loiid)a 


208 


DOCUMENTS  l'OLK  SERVm  A  L  HISTOIRE  DES  HAMYAN 


sur  les  campements  de  Si  Mohammed  Ben  llamza,  à  Garet 
Sidi  Es  Cheikh,  entre  l'Oued  Ghaihi  et  l'Oued  Namous  ; 
après  un  combat  acharné,  où  le  marabout  fut  mortelle- 
ment blessé,  les  reljelles  furent  razziés.  Si  Mohammed 
mourut  vingt-deux  jours  après  il[  février)  et  son  frère  Si 
Ahmed  le  remplaça. 

('io\ant  le  calme  létabli,  le  général  legagna  Oraii,  non 
sans  avoir  toutefois  organisé  une  colonne  mobile  de  trois 
bataillons  et  de  deux  escadrons  de  hussards  qu'il  plaça 
sous  les  ordres  du  colonel  de  Colomb. 

Contrairement  aux  prévisions  du  Général  commandant 
la  province,  la  moTl  de  Si  Mohammed  n'amena  qu'une 
trêve  de  courte  durée.  Parmi  les  tiibus  qui  jurèient  fidélité 
à  son  successeur,  se  trouvaient  les  Rezaïna.  Par  contre,  les 
Oulad  Messaoud  demandèrent  l'aman,  qui  leur  fut  accordé 
sous  condition  de  payer  l'impôt  arriéré  et  20  francs  par 
tente  (mais  i86.5). 

Expédition  de  Colomb,  mars  1865.  - —  L'intention  des 
rebelles  était  d'inaugurer  le  commandement  de  leur  jeune 
chef  par  une  pointe  hardie  dans  le  Nord.  Pour  contrarier 
leurs  mouvements,  le  colonel  de  Colomb  partit  le  25  mars 
de  Géryville  et  arriva  le  lendemain  sur  l'Aïn  Sidi  Amar. 
Cincj  jours  après,  il  se  trouva  sur  le  Kheneg  Seouess,  oii  il 
bouscula  un  millier  de  cavaliers  des  Oulad  Sidi  Cheikh. 
Après  ([uel(]ues  escarmouches  à  El  Abiod  et  à  Chellala 
Dhahrania,  il  s'arrêta  sous  les  murs  des  jardins  de  Chellala 
(iin'bliii.  Il  ai)pri1  (jue  le  bivouac  de  Si  Lalla  se  trouvait  à 
Ain  en  Nadja,  à  dix  kilomètres  environ  de  son  camp  ; 
n'ayant  plus  d'approvisionnements  suffisants,  il  dut 
i"ononc(n'  à  toute  attaque  et  reprendre  le  lendemain,  8  avril, 
la  direction  d'Ain  Tazina  ;  en  route,  nos  troupes  furent 
assaillies  par  les  cavaliers  de  Si  Lalla  qui  furent  impuis- 
sants à  mettre  le  désordre  dans  leurs  rangs  et  battirent  en 
retraite,  laissant  de  nombreux  morts  sur  le  terrain  ;  elles 
ne  furent  plus  inquiétées  jusqu'à  leur  retour  à  Géryville. 

t'ettc  sortie  de  la  colonne  de  Géryville  produisit  d'heu- 
reux résultats  en  empêchant  les  Hamyan  Gheraba  de  se 
joindre  aux  insurgés  ;  bien  que  se  tenant  un  peu  à  l'écart, 
ils  avaient  toujours  eu  un  penchant  très  prononcé  pour  la 
Guerre  Sainte  et,  pour  le  chef  de  l'insurrection,  des  sym- 
pathies qu'ils  ne  se  donnaient  pas  la  peine  de  dissimuler. 
Il  ne  fallait  donc  j)as  s'illusionner  sur  leurs  sentiments  de 
fidélité.  C'est  par  leur  intermédiaire  que  les  rebelles  avaient 


DOCUMENTS  POUR  RERVIH  A  l'ilIS  lOIH  K  DRS  IIAMYAN       269 

|)ii  faire,  en  toute  sécurité,  leurs  approvisionnements  en 
plains  dans  le  Tel!  marocain  cl  sur  nos  marchés,  cl,  au 
mois  (le  mai,  ils  allciulaicnl  pour  siii\  re  le  iiKMivemenl  (pic 
leurs  ap|>r()\  isioiuicmciils  fiisscnl  aciicvés. 

[,"cp(»(pic  appiochait  d'ailleurs  où  leurs  caravanes 
allaicid  se  mettre  en  roiite  pour  le  Gourara  ;  pour  assurer 
1cm-  séjour,  il  ('lail  indispensable  que  les  nomades  fussent 
en  bons  Icrmes  avec  les  Oulad  Sidi  Cheikh,  qui  tenaient 
les  routes  de  rE\lrènie-Sud.  Il  valait  donc  mieux,  à  moins 
d'être  1(\><  plus  forts,  ce  qui  n'était  pas  le  cas  des  Hamyan, 
s'en  faire  des  alliés,  plutôt  que  de  s'exposer  à  être  razziés 
par  eux.  Ce  parti  au(picl  ils  s'arrêtèrent,  amena  de  nouveau 
leur  défection. 

Si  Ahmed  se  trouva  dès  lors  à  la  tête  de  foices  impo- 
santes. Le  bruit  se  répandit  bientôt  que  Si  Lalla,  accom- 
pa<i-né  de  son  neveu,  marchait  avec  Bo.ooo  hommes  sur  le 
Tell  de  la  province  d'Oran.  Informé  des  projets  présumés 
du  marabout,  le  Maréchal  Gouverneur  Général  prescrivit 
les  mesures  nécessaires  pour  couvrir  les  points  menacés, 
mesures  qui  consistaient  à  faire  appuyer  toutes  les  colonnes 
occupant  des  postes  avancés,  soit  vers  le  Sud,  soit  vers 
l'Ouest.' 

Expédition  L.ierotelle-de  Colomb,  1865.  —  Si  Lalla  tenta 
son  incursion  sur  le  Sud  de  Sebdou  et  gagna  Titen  Yahia, 
puis  Aïn-Tagonraïa  1 1>  i  octobre).  Ti'ouvant  le  Tell  gardé  cl 
surtout  deux  ou  trois  colonnes  à  ses  trousses,  il  se  hâta  de 
retourner  dans  le  Sud.  Il  était  pouisuivi  par  le  g^énéral  de 
l.acretelle  et  le  colonel  de  Colomb.  En  rdute,  il  se  débar- 
rassa des  Hamyan.  Ceux-ci  durent  chercher  à  s'abriter  eux- 
mêmes  contre  notre  atteinte.  Ils  furent  joints  le  8  novt^m- 
bre,  siu"  l'Oued  Bon  Lardjam,  à  l'Ouest  du  (]hott  Gharbi, 
|)ar  la  colonne  Lacretelle,  (pii  les  razzia  impitoyablement. 
La  colonne  de  Colomb  tombait  à  son  tour  sur  certains 
d  entre  eux,  le  lendemain,  à  Magroime,  au  Sud-Ouest  de  la 
Scbkha  de  \aama  et  leui"  iniligfeait,  en  hommes  et  en  butin, 
des  pertes  tellement  sensibles,  que  ces  tribus  firent  des 
offres  de  soumission. 

Le  colonel  de  Colomb  continua  sa  poursin'te,  harcelant 
les  Hamyan  qui  avaient  pu  échapper  à  ses  coups  ;  il  les 
atteigfnit  à  Galloul  (i\  l'extrémité  Sud  du  Djebel  Guettai), 
le  lô  novembre,  et  leur  tua  une  trentaine  d'hommes.  Ce 
châtiment  les  décida  à  demander  l'aman  qui  leur  fut 
accordé,  à  condition  (qu'ils  nous  renforceraient  de  leurs 


270      DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

contingents  pour  continuer  la  lutte  contre  les  Oulad  Sidi 
Cheikh,  qui  les  avaient  lâchement  abandonnés.  Les  cava- 
liers des  Hamyan  Gheraba,  indignés  de  la  trahison  de  leurs 
alliés  se  joignirent  à  la  colonne  de  Colomb  le  29  du  même 
mois,  à  Aïn-Sefra,  et  la  poursuite  des  rebelles  fut  reprise. 

Le  douar  de  l'ancien  caïd  des  Rezigat,  les  Oulad  Aïssa, 
le  douar  du  caïd  Yahia  Ben  Zidan,  des  Makna,  furent  sur- 
pris et  enlevés  avec  leurs  troupeaux,  dans  l'Oued  Namous, 
aux  environs  d'El  Hadjaïj  Tprès  Guétrane)  ;  les  Trafi,  les 
Mrazig,  les  Slamata,  les  Oulad  Ziane,  les  Oulad  Aoun,  les 
Béni  Ogba,  les  Oulad  Serour  subirent  le  même  sort.  A 
Dahyat  Tirsefsef,  le  colonel  de  Colomb  opéra  une  razzia 
considérable  et  obligea  46o  tentes  à  implorer  leiu'  pardon, 
puis  remontant  dans  l'Oued  Benoud,  par  Bou  Aroua  et  El 
Mengoub,  il  poussa  devant  lui  des  fractions  rebelles  qui 
n'eurent  d'autre  alternative  que  la  soumission  ou  la  mort. 

Les  goums  des  Hamyan  se  montrèrent  les  plus  acharnés 
et  nos  plus  actifs  auxiliaires  contre  les  Oulad  Sidi  Cheikh, 
leurs  anciens  alliés  ;  ils  y  trouvèrent  le  double  avantage  de 
se  venger  de  leur  ancien  abandon  et  de  se  refaire  des  pertes 
que  nous  leur  avions  fait  subir.  Ils  confirmèrent  ainsi  leur 
ruptvne  avec  Si  Ahmed  Ben  Hamza  et,  après  la  pointe  du 
colonel  de  Colomb,  ils  se  remirent  en  campagne  pour  leur 
propre  compte,  ramassant  les  épaves  provenant  des  frac- 
tions que  nous  avions  battues  et  dispersées.  Ce  genre 
d'opérations  amassa  contre  eux  des  haines  dont  ils  emenl 
plus  tard  à  subir  les  conséquences  et  qui  les  forcèrent  à 
chercher  notre  appui. 

De  toute  façon,  la  tactique  des  Oulad  Sidi  Cheikh,  con- 
sistant à  sacrifier  leurs  alHés,  leur  avait  réussi,  car,  tandis 
que  nos  troupes  s'attardaient  à  exécuter  les  Hamyan,  ils 
prirent  de  l'avance  et  s'enfoncèrent  à  leur  aise  dans  le 
Sud-Ouest. 

Au  moment  du  retour  des  caravanes,  certaines  fractions 
dissidentes  vinrent  établir  leurs  campements  sur  l'Oued 
Namous  ;  elles  occupaient  ainsi  la  route  du  Goura ra  et 
cherchaient  surtout  à  reprendre  aux  Hamyan  les  troupeaux 
qui  leur  avaient  été  enlevés.  Mais  leur  projet  fut  déjoué  et 
ces  derniers  purent  leur  échapper  et  rentier  dans  les 
premiers  jours  de  janvier. 

Sentant  son  influence  diminuer,  Si  Ahmed  Ben  Hamza 
écrivit  au  Général  conunandant  la  piovince  d'Oran  pour 
lui  faire  connaître  cpi'il  était  disposé  à  déposer  les  armes 


DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l.'ll  rs  lOIRK  DES  IIAMYAN      271 

à  condition  que  lo  commandomeni  dont  avait  été  investi 
son  père.  Si  Tlamza,  lui  soit  r(Hidu  dans  toute  son  étendue. 
Ce  qu'il  voulait,  c'était  se  constituer  un  petit  royaume 
saharien  et  être  pour  nous  un  allié,  traitant  d'éfral  à  égal. 
Il  étail  difficile  au  Gouvernement  français  d'admettre  de 
pareilles  f)ffres  (jui  n'avaient  poui'  nous  aucun  i nié? et.  Du 
reste,  à  la  mort  de  l'illustre  descendant  de  Sidi  Cheikli, 
on  s'était  empressé  de  changer  le  titre  de  c  khalifa  du 
v'>ud  »  contre  celui  de  «  bachagha  de  Géryville  ».  Les  pré- 
tentions de  Si  Ahmed,  f|ue  rien  ne  justifiait,  furent  donc 
accueillies  par  un  refus  catégorique.  Furieux,  il  résolut 
de  reprendre  l'offensive  et  voulut  tenter  un  dernier  et 
suprême  effort. 

Ayant  rassemblé,  outre  ses  cavaliers,  un  millier  de  fan- 
tassins des  Amour,  des  Oulad  Djerir  et  des  Doui  Menia,  il 
parut  le  t4  mars  à  Aïn-el-Ourak,  se  dirigeant  sur  le  Djebel 
Megrès,  à  environ  i''i  kilomètres  de  Géryville.  Dans  cette 
posili(m,  il  menaçait  de  se  porter  sur  la  route  de  Saïda,  par 
laquelle  on  attendait  un  convoi  de  ravitaillement  de 
3oo  chameaux.  Le  colonel  de  Colomb  chargea  aussitôt  deux 
compagnies  du  2®  Zouaves  de  se  porter  à  Kheneg  Azir  pour 
renfoicer  l'escorte  du  convoi  qui  devait  arriver  en  ce  poini 
le  i5  mars.  Le  soir  du  même  jour,  il  amenait  lui-même  en 
ce  lieu  six  compagnies  de  zouaves  et  un  escadron  de 
hussards  ;  il  trouva  campés  lé  convoi  et  l'escorte. 

Comme  Si  Ahmed  continuait  sa  marche  vers  le  Nord  par 
le  plaleau  de  TTaci  Ben  Aththab.  1<^  commandant  de  la 
colonne  de  Géryville  se  décida  à  lui  couper  sa  ligne  de 
retraite  sur  le  Sud-Ouest.  Après  quelques. heures  de  marche 
il  se  trouva  en  présence  de  toutes  les  ftuTes  du  marabout 
léunies  sur  la  gâada  de  Ben  Aththab.  L^ne  lutte  sanglante 
se  livra  à  la  suite  de  laquelle  les  rebelles  furent  repoussés  : 
mais  nos  troupes  regagnèrent  le  bivouac  de  Kheneg  Azir. 
fortement  éprouvées. 

Le  colonel  de  Colomb  rentra  à  Géryville  avec  le  désir  de 
venger  au  plus  tôt  îe  sang  lépandu  dans  la  journée  de  Ben 
Aththab.  Le  21  mars,  il  reprit  l'offensive.  A  Naama,  il  reçut 
les  goums  des  Hamyan  Gheraba  venus  à  son  aide,  et  avec 
eux  il  surprit,  à  El  Menaouara  (au  Nord  de  Figuig\  les 
campements  de  Sidi  Cheikh  Ben  Tayeb  ;  1.200  chameaux 
et  3.000  moutons  restèrent  au  pouvoir  de  nos  cavaliers. 
Remontant  vers  le  Nord,  il  tombn,  à  FI  Meharoug.  sur  une 
émigration    importante   dans    laquelle    se    trouvaient    les 


272      DOCUMENTS  POTIR  SERVIR  A  l'hISTOîRE  DES  IIAMYAN 

Rezaïna.  A  la  suite  de  ces  brillants  coups  de  main,  les 
fractions  qui  suivaient  encore  la  fortune  des  insurgés,  se 
dispersèrent  dans  le  Sud  par  petits  groupes  de  tentes. 

C'est  en  vain  que  Si  Ahmed  essaya  de  retenir  autour  de 
lui  ses  fidèles.  Réduit  à  l'impuissance,  il  tenta  de  nouveau 
auprès  du  cercle  de  Géryville  quelques  démarches  ;  mais 
ses  propositions  ne  furent  pas  écoutées.  Ses  partisans, 
harcelés  par  les  tribus  marocaines,  cherchèrent  d'un  autre 
côté  la  protection  qu'il  ne  pouvait  plus  leur  donner.  Tls 
s'adressèrent  à  Si  Sliman  Ben  Kaddour,  neveu  de  Sidi 
Cheikh  Ben  Tayeb  ;  mais  leur  situation  ne  fit  qu'empirer, 
car  les  Hamyan  allaient  les  attaquer  à  leur  tour. 

Au  mois  de  septembre.  Si  Sliman  tomba  sur  les  Oulad 
Sidi  Ahmed  Ben  Medjdoub  ;  les  llamyan,  mis  en  éveil, 
montèrent  à  cheval  et  allèrent  inquiéter  l'ennemi  par  une 
pointe  audacieuse  qu'ils  poussèrent  jusqu'à  l'Oued  Guir. 
Enhardis  par  ce  succès,  ils  ne  laissèrent  plus  un  moment 
de  repos  aux  insoumis  répandus  sur  la  frontière  du  Maroc, 
resserrés  entre  deux  périls  égalenaent  menaçants. 

Il  ne  restait  plus  aux  deux  chefs  de  l'insurrection,  Si 
Ahmed  et  Si  Sliman,  que  la  ressource  d'unir  leurs  efforts. 
Leur  but  commun  était  de  tenter  une  incursion  sur  les 
terres  des  Hamyan.  Si  Ahmed  apportait  d'ailleurs  avec  lui 
l'a|>pui  des  Béni  Guil  et  des  Amour.  Après  avoir  campé  à 
El  Ilaïieclî,  au  Nord  du  ksar  d'Aïn-Sfissifa,  les  deux  mara- 
bouts se  portèrent,  le  35  mars  1867,  sur  les  puits  d'El 
Agueur  et  y  surprirent  une  partie  des  Bekakra,  le  douar 
Mekid  ('Oulad  Khelif)  et  un  douar  des  Meghaoulia.  Le 
même  jour,  les  cavaliers  de  Si  Sliman  tombèrent,  à  Feka- 
rine,  sur  trois  douars  des  Béni  Mekhaoula.  Après  cette 
fructueuse  opération,  les  rebelles  reprirent  la  route  du  Sud. 

Sur  ces  entrefaites,  les  négociations  se  renouèrent  entre 
les  gouvernements  français  et  marocain  dans  le  but  de 
rechercher  les  moyens  permettant  de  porter  un  coup  déci- 
sif à  l'insiurection.  Sidi  El  Hadj  El  Arbi  ',  (Ils  aîné  de  Sidi 
Cheikh  Ben  Tayeb,  reçut  le  titre  de  khalifa  de  l'amel 
d'Oiidjda,  il  s'installa  à  Figuig  ;  les  Béni  Guil  entrèrent  en 
relations  avec  l'autorité  française. 

Tayeb  Ben  Sliman,  caïd  des  Oulad  Serour,  fut  nommé 
caïd  des  caïds  des  Hamyan  Djemba,  mais  avec  la  mission 
d'assurer  seulement  l'exécution  des  ordres  concernant  la 


I   Sidi    El    Hadj    El    Arl)i    était    depuis    Iniigtenips    dé1(-ii\i    à    ()iidj(l;i,    coinnii' 
otage,  par  \c  Gouvernement  marocain. 


DOCUMENTS  POT 'H  SEKMH  A  1.  niSTOIlU;  F)RS  HAMYAN 


273 


police  et  la  sécurité  du  Icniloiic  et  non  [xxii  être  employé 
comme  organe  admiiiislriilif  ciilic  l'agha  Si  Sliman  lien 
Abdallah  et  les  caïds. 

I^eiidaiil  (luelques  mois  de  l'iiniiée  1867,  il  y  eut  une 
suspension  âv^  lioslililés.  lue  escarmouche  eut  lieu  en 
N('j)lembr('  à  hermi'l,  t'ulre  les  [lamyan  et  un  posic  de 
dissidents  de  Rezaïna,  de  Doui  Menia  et  d'Oulad  Ziad  qui 
avaient  tenté  de  les  razzier.  Cheikh  Ould  Osman,  caïd  des 
Sendan,  Mamoun  ben  Salah,  caïô  des  Frahda  et  Ben  Gui- 
mali,  ex-caïd  de  la  même  tribu,  furent  tués  dans  cette  icn- 
contre.  Mais  ce  n'était  là  qu'une  tentative  isolée  des 
rebelles. 

T.a  plupart,  en  elïet,  étaient  fatigués  d'un  état  qui  mena- 
çait de  s'éterniser  ;  les  tribus  marocaines  leur  faisaient 
payer  chèrement  lem"  maigre  hospitalité  :  aussi,  songeant 
à  rentrer  sur  leur  territoire,  elles  engagèi'ent  Si  Sliman 
Ben  Kaddour  à  nous  demander  l'aman.  Cehii-ci,  sentant 
que  le  moment  appiochait  où  il  allait  jouer  un  rôle  pré- 
pondérant, n'hésita  pas  et,  le  10  novembie,  il  faisait  des 
ouvertures  à  l'Autorité  française,  qui  les  accueillit  favo- 
rablement. 

Il  ne  resta  plus  contre  nous  (pie  Si  Ahmed  Ben  Hamza. 
Voulant  venger  les  vexations  que  les  Harnyan  avaient  fait 
subir  aux  Oulad  Sidi  Cheikh,  il  lazzia,  le  17  décembre,  les 
Oulad  Mansouiaha,  les  Béni  Metharef  et  les  Oulad  Khelif, 
à  Magroune.  El  lladj  El  Habib  Ould  Mebkhout,  fils  de 
l'agha  Mebkhout,  alla,  de  son  côté,  se  réfugier  chez  le 
khalifa  Sidi  El  Had.j  El  Arbi,  et,  malgré  les  conseils  de  son 
père,  offrit  ses  services  à  Si  Ahmed  Ben  Hamza. 

I/année  1868  s'ouvrit  sous  d'heureux  auspices  :  Si 
Sliman  Ben  Kaddour  se  rendit  en  personne  à  Géryvillc, 
ramenant  les  fractions  des  Oulad  Abdel  Kerim  et  des 
Bezaïna  (pii  s'étaient  lalliées  m  lui. Ce  fut,  dit-on,  la  violente 
passion  inspirée  par  une  femme  qui  fut  cause  de  sa  venue 
dans  nos  rangs.  On  le  nomma  agha  de  Géryvillc  le  t"  avril 
1869.  Cette  conduite  inspira  à  Si  Ahmed  l'idée  de  tirer 
vengeance  de  la  trahison  de  son  cousin.  Dès  qu'il  se  sentit 
en  mesure  de  le  faire  avec  succès,  il  fondit  sur  les  Hamyan 
Chafaa  campés  dans  les  parages  d' Aïn-Ben-Khelil  et  fit  sur 
eux  un  butin  considérable.  Il  voulut  ensuite  surprendre 
les  Trafi  ;  mais,  la  marche  lapide  d'une  colonne  envoyée 
de  Géryvillc  à  \sla,  déjoua  ses  projets  o\  le  força  à  battre 
en  retraite.  Les  Chafaa  (pii.  tout  d'abord,  avaient  reconnu 


'274       nOCTïMENTS  POT  H  SERVI K  A  t/iIISTOIRE  DES  HAMYAN 

l'autorité  de  leur  vainqueur,  s'empressèrent  alors  de 
rabaïuloiiniM-  ;  le  Général  coiiiinandaiil  la  l)i\isi()n  les 
condamna  à  payer  t:>o.ooo  fiaiics  d'amende  et  la  part 
conlributive  des  Akerma  fut  doublée  ;  ils  reçurent,  en 
outre,  l'ordre  d'établir  leurs  campements  près  de  Géryville 
afin  d'être  à  l'abri  d'une  nouvelle  incursion  de  l'ennemi, 
('ertains  douars  dispersés,  lencontrés  pai'  Si  Sliman  Ben 
Kaddour,  furent  ralliés  par  lui  et  ramenés  à  Géryville. 

Expédition  Colonie»,  1808.  —  Les  Hamyan  furent  réor- 
fifanisés  et  il  fut  décidé  que  cette  ciui fédération  sérail  mise 
à  même  de  prendre,  avec  noire  concours,  sa  revanche  sur 
les  bandes  de  Si  Ahmed.  Une  ])ointe  dans  les  parages  de 
Figuig  ayant  été  autorisée  par  le  Gouvernement  Général, 
le  lieutenant-colonel  Colonieu  prit,  le  i"'  mars,  la  direction 
du  Sud-Ouest. 

Les  contingents  du  marabout  avaient  été  signalés  du 
côté  d'Aïn-el-Melah.  Nos  goums,  aux  ordres  de  Si  Sliman 
Ren  Kaddoiu%  les  rencontrèrent  à  Dayet  Moula  Djemâa  et 
les  attaquèrent  furieusement .  Ils  leur  enlevèrent  un  dra- 
peau, .STh)  chameaux  et  leur  tuèrent  t5o  hommes,  dont  leur 
ch(^f,  Si  Maamar  Ben  VA  Djedirl,  rjui  commandait  en  l'ab- 
sence de  Si  Ahmed  et  en  qualité  de  khalifa.  Après  ce  san- 
glant échec  les  débris  de  la  colonne  ennemie  reprirent  la 
roule  de  leurs  campements.  Mais  à  Aïn-Ben-Khelil  s'était 
posté  l'agha  de  Sebdou  ;  avec  son  goum,  il  coupa  leur 
retraite  et  acheva  de  les  dépouiller  de  ce  qu'ils  avaient  pu 
sauA'er  du  désastre  en  chevaux,  vivres  et  moyens  de 
transport. 

Après  ce  succès,  nos  goums  les  poursuivirent  dans  la 
direction  de  Galloul  et  Si  Sliman  battit  à  Dhayet  Ben 
Gourin  un  fort  parti  de  Béni  Guil.  Le  lieutenant-colonel 
Colonieu  s'avança  de  son  côté  jusque  sous  les  murs  de 
Figuig  ;  accueilli  avec  froideur  par  le  khalifa  qui,  au  lieu 
de  surveiller  les  agissements  des  tribus  pillardes,  avait  fait 
cause  commune  avec  les  chefs  de  l'insurrection,  il  renlra 
à  Géryville,  après  quaiante-deux  jours  de  marche. 

Fn  mai  t868,  des  Béni  Guil,  auxquels  s'étaient  joints 
des  Bezaïna  et  des  Oulad  Serour,  attaquèrent  les  Hamyan 
près  de  Dayet  el  Ferd.  Tayeb  Ben  Sliman  les  repoussa  après 
un  combat  sanglant. 

Dans  le  courant  d'octobre,  le  bruit  se  répandit  que  Si 
\hmed  était  mort  au  Tafîlalet  du  choléra  ;  en  réalité,  il 
aurait  été  empoisonné.  Si  Kaddoiu'  Ould  Hamza,  son  neveu 


DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  I, 'HISTOIRE  DES  ItAMYAN       275 

ot  successeur,  aidé  do  iiolic  irréconciliable  adversaire,  Si 
Lalla,  Icnla  de  sliniuicr  le  zèle  religieux  des  Kliouans  de 
Sidi  Cheikh,  uuiis  ils  reconuurenl  vite  (ju'iis  s'agitaieiil 
dans  le  vide  et  atlendiieut  des  jdurs  meilleurs.  Aussi 
rannée  i8()8  s'acheva-l-el!e  sur  les  Ihinls-Plaleaux  dans  le 
eahne  le  plus  absolu;  il  en  fui  de  rnènie  de  l'année  iHGj),  on 
la  lutte  se  déroula  dans  la  province  d'Alger  ;  le  colonel  de 
Sonis  repoussa  les  insurgés  jusfprà  Biézina. 

Dans  le  bul  d'assurer  la  paix  sur  nos  frontières  de 
l'Ouest,  le  (louvernemenl  français  prit  les  deux  mesures 
suivanles  :  il  fit  un  accueil  faxorable  à  la  démarche  de  Sidi 
Ciheikh  Ben  Tayeb,  (|ui  nous  demanda  d'obtenir  du  Sultan 
du  Maroc  l'élargissement  de  ses  deux  fils  retemis  encore  en 
qualité  d'otages  à  Fez  ;  en  outre,  le  ;>3  juillet  1869,  il  fit 
signer,  à  Oglat  es  Cedra,  une  convention  entre  les  Hamvan 
et  les  Sahari(^ns  maiocains,  pur  liKpielle  ils  se  jurèrent  sui' 
le  Coran  une  amitié  éternelle  :  elle  devait  durer  huit  mois. 
On  léunit  les  Oulad  Messaoud,  les  Oulad  Ahmed  et  les 
Megan  en  une  seule  tribu  (-^6  aoûti,  (pii  pril  le  nom  de 
Ghiatia-Megan  et  dont  le  commandcnient  fut  confié  à 
Djelloul  Ould  Lakhdar.  Le  successeur  de  Mustapha  Ben 
Ismaël  à  l'aghalik  des  Hamyan  était  toujours,  <à  cette 
épo(pie,  Si  Alohammed  Ben  Abdallah,  originaire  des  Béni 
Snouss. 

Nous  pensions  (|ue  Sidi  Cheikh  Ben  Tayeb,  trop  âgé  et 
satisfait  de  nos  bons  offices,  cesseiait  désormais  de  jouei 
contre  nous  un  rôle  actif.  Mais  il  fallut  bientôt  ajouter 
(|uelque  créance  à  des  bruits  qui,  pendant  la  première  quin- 
zaine de  janviei'  1870,  arrivaient  du  côté  de  l'Ouest  et  témoi- 
gnaient que  le  vieux  chef  fomentait  ime  agitation  et  lal- 
liait  à  sa  cause  le  groupenient  des  tribus  sahariennes 
connues  sous  le  nom  de  «  Zegdoii  ».  Si  Kaddour  Ben  Hamza 
piéparait,  de  son  côté,  un  coup  de  main  sur  les  Hamvan. 
On  apprit  bientôt  que  les  deux  agitateurs  avaient  fait  cause 
commune  et  avaient  enlevé  aux  Hamyan  :>,.ooo  chameaux 
et  16.000  moutons.  T/épouvante  régna  de  nouveau  dans 
le  Sud  et  nos  tribus  se  piéparèient  soit  à  émigrer  dans  le 
Tell,  soit  à  passer  à  l'ennemi. 

Expédition  de  AViinpfen,  1870.  —  Devant  la  gravité  de 
la  situation,  le  général  de  Wim[)fen,  (|ui  venait  de  prendre 
le  commandement  de  la  Division  d'Oran,  fournit  au  Gou- 
verneur Général  un  projet  (|ui,  dans  sa  pensée,  devait 
enlever  à  tout  janiais  aux  tribus  pillardes  le  goût  de  leuis 


276       DOCUMENTS  POTIK  SERV1H  A  î/lITSTOlRE  DES  HAMYAN 

incursions  sur  notro  territoire.  Le  Gouvernement  y  fit 
quelques  restrictions  qui  devaient  en  amoindrir  les  résul- 
tats ;  ainsi  il  était  interdit  d'entreprendre  quoi  que  ce  soit 
contre  les  oasis  sahariennes  et  éviter  toute  rencontre  avec 
les  sujets  du  Sultan.  Quoiqu'il  en  fui,  le  général  de  Winip- 
fen  quitta  Oran,  le  t5  mars,  avec  une  colonne  fortement 
constituée,  qu'il  orienta  vers  l'Oued  Guir. 

Malgré  ses  quatre-vingt-dix  ans,  Si  Tayeb,  secondé  par 
son  fils  Si  El  ITadjel  Arbi,  entama  les  hostilités  par  une 
démonstration  qu'il  tenta  le  80  mars  à  la  tête  des  Béni 
Guil,  cdiitie  la  colonne  du  colonel  de  l,a  Jaille,  près  du 
Djebel  Grouz  (Rst  d'Aïn-GJiaïr).  Après  quelrpies  étapes, 
nos  troupes,  qui  n'avaient  pas  encore  parcouru  cette  région, 
se  trouvèrent  subitement  en  présence  des  Doui  Menia,  des 
Onlad  Djerir  et  des  Amour,  qui  s'étaient  retranchés  sur  la 
l'ive  droite  de  l'Oued  Guir.  Une  leconnaissance  vigoureu- 
sement menée  permit  de  déconviir  un  gué.  Le  général 
arrêta  alors  ses  dispositions  d'attaque  ;  trois  colonnes 
s'ébranlèrent  sous  la  protection  d'un  feu  d'artillerie  très 
vif  et  enlevèrent  la  ligne  des  dunes  occupée  par  les  rebelles 
qu'ils  mirent  en  pleine  déroute  sur  la  rive  droite.  Sur  la 
rive  gauche,  le  général  Chanzy  lepoussa  tous  ceux  qui  se 
trouvaient  devant  lui  et  menaça  leur  ligne  de  retraite. 
Après  un  inutile  retour  offensif,  la  plupart  des  fractions 
alliées  firent  leur  soumission  et  remirent  entre  nos  mains, 
à  titre  d'otages,  onze  de  leurs  principaux  chefs.  Si  El  Hadj 
El  Arbi  était  tombé  au  milieu  des  siens  mortellement 
atteint  d'une  balle  au  front  (i5  août  1870). 

Apiès  avoir  parcouru  le  pays  \n^\\r  compléter  les  résul- 
tats acquis  dans  cette  province,  le  général  Wimpfen  se 
porta  vers  le  Nord  à  la  rcnconlredu  colonel  dcLaJaille,  (pii 
lui  amenait  un  convoi  de  ravitaillement  sur  les  puits  d'El 
Mengoub.  Le  2a  avril,  il  rentrait  à  Bou  Kaïs  (entre  Kenadsa 
et  Aïn-Ghaïi),  où  il  avait  laissé  une  partie  de  ses  ijn|)r(li- 
menta.  11  apprit  là  que  la  garnison,  sous  les  ordres  du 
capitaine  Pamard,  avait  été  l'objet  des  agressions  des  Benî 
Guil  et  des  Oulad  En  Naceur,  conduits  par  Sidi  Cheikh 
Ben  Tayeb,  en  personne.  Comme  il  passait  h  proximité  de 
ces  incorrigibles  pillards,  il  ne  voulut  pas  laisser  passer 
l'occasion  de  les  châtier.  H  marcha  donc  sur  l'oasis  d'Aïn- 
Chaïr  et  l'attaqua  sur  quatre  points  à  la  fois.  Nos  troupes 
n'obtinrent  qu'un  succès  très  relatif  et  le  28  avril,  la  co- 
lonne de  Wimpfen  reprenait  la  route  d'Aïn-Ben-Khelil, 


DOCUMENTS  POUR  SERMU  A  L  IIISTOIHE  OES  II AMV A.N       ^i  ' 

d'où  elle  regagna  ensiiilc  le  Tell.  (Jclle  ccjlonne  nous  coû- 
tait t\\  morts  et  \l^-  blessés.  11  était  cependant  permis 
d'espérer  (juc  ectle  camijagne  aurait  connue  résultat 
d'assurer  pour  (pielcpie  leiii|)s  la  liaïupiillité  dans  le  Sud 
de  la  province  d'Uraii. 

I.e  ra[)porl  ci-a[)iès,  établi  à  Sebilon  en  1870,  précise 
le  itMe  joué  plus  parliculièremenl  [)ar  les  llaniyaii,  au 
cdins  des  évéïieineiil»  «jui  \ieuiieiU  d  être  relatés  : 

M  Le  coinineiiceinent  de  l'année  itiyo  fut  signab'-  par  une 
incursion  des  dàssidenis,  sur  le  territoire  du  cercle  de 
Sebdou,  conduits  par  Si  kaddour  bcn  Ilamza.  Ils  tombé-, 
rent  le  '\  janvier  sur  le  douar  des  Oulad  Serour,  douar  de 
Tayeb  ben  Slimane  lUaniyan),  leur  mirent  So  boiunies 
hors  de  combat,  pillèrent  les  tentes  et  enlevèrent,  à  cette 
j)orlion  des  Hamyan,  i.3oo  chameaux  et  600  moutons.  La 
nouvelle  de  l'arrivée  de  Si  Kaddour  fut  annoncée  à  Sebdou 
le  5  janvier,  par  le  caïd  des  Béni  Metharef  (Hamyan).  Le 
(^.ommandant  Supérieur  partit  aussitôt  de  Sebdou.  Il 
arriva  à  Kl-Aricha  le  10  janvier.  H  y  trouva  l'agha  Si  Mo- 
hamuied  ben  Abdallah,  avec  (pielques  cavaliers  des  Oulad 
Lu  -Nehar  et  des  Hamyan.  Il  donna  aussitôt  l'ordre»  aux 
caïds  des  Oulad  En  Nehar,  des  Béni  Metharef,  des  Oulad 
Khelif,  des  Oulad  Mansourah,  des  Akerma,  des  Bekakra, 
des  Angad,  de  réunir  les  goums  et  tous  les  chameaux  dispo 
nibl(\s  et  de  les  amener  sans  retard  à  El-Aricha  avec 
10  jours  de  vivres.  Le  Commandant  Supérieur  envoyait 
également  une  reconnaissance  dans  la  direction  d'Aïn-Ben- 
khelil,  avec  mission  de  reprendre  et  de  suivre  les  traces 
de  l'ennemi. 

«  Les  7,  8  et  9  janvier,  les  caïds  arrivèrent  avec  leurs 
goums  et  leurs  chameaux.  Pendant  ce  temps,  la  colonne 
mobile  de  Sebdou.  sous  le  commandement  du  colonel  de 
La  .Taille,  quittait  El-\richa  le  11  janvier,  emmenant  avec 
elle  '|Oo  chameaux  et  tous  les  cavaliers  du  goum.  Celte 
colonne,  dont  faisait  partie  le  Commandant  Supérieur  du 
cercle,  s'arrêta  à  Aïn-Ben-Khelil.  Des  cavaliers  du  goum 
qui  avaient  poussé  des  reconnaissances  au  loin,  vinrent 
annoncer  au  colonel  de  La  Jaille  qu'ils  avaient  aperçu  les 
dissidents  du  coté  d'El-.\mba  ;  mais  le  commandant  de  la 
colonne  ne  crut  pas  devoir  entrepiendre  une  course  qui 
demandait  au  moins  deux  nuits  et  un  jour  de  marche 
rapide,  dans  un  pays  peu  connu  et  signalé  comme  très 
diiïîcile.  Il  craignait,  en  outre,  de  voir  ses  communications 


!27S        DOCl  MENTiS  POl  IÇ  SERVIU  A  r/l[lsrOIUK  DES  IIAMYAN 

coupées  avec  El-Aiiclia.  La  culoiinc  icvinl  sur  El-Aiicha  et, 
de  là,  sur  Sebdou  où  elle  arriva  lin  février.  Elle  navail  pas 
atteint  les  dissidents  pendant  leur  retraite. 

((  Quelques  jours  après,  une  elTervescence  extraordinaire 
était  signalée  dans  les  tribus  marocaines,  voisines  de  la 
frontière.  Les  Béni  liuil,  les  J)oui  Menia,  les  Oulad  iNaceur, 
les  Oulad  El  Hadj,  les  Beraber,  offraient  leuis  concours  à 
Si  Kaddour  ben  Uamza,  pour  marcher  avec  lui  sur  les 
llamyan  et  les  autres  tribus  de  l'Est. 

((  Les  Ilamyan,  effrayés,  songeaient  à  rentrer  dans  le 
Tell,  avec  leurs  immenses  troupeaux  qui  auraient  eu  à 
souffrir  du  manque  d'espace  et  de  pâturages. 

((  Le  général  de  Winqjfen,  cojumandant  la  Division 
dOran,  résolut  alors  de  frapper  un  grand  coup  et  d'aller 
trouver,  jusque  chez  eux,  les  agitateurs  pour  conjurer 
l'orage.  11  prit  le  comnuindement  d'une  forte  colonne, 
rassemblée  à  Aïn-Ben-Khelil. 

«  Les  goums  de  Sebdou,  composés  en  majeure  partie  de 
Hamyan,  furent  concentrés  à  El-Aricha  et  placés  sous  les 
ordres  directs  du  colonel  de  La  Jaille,  qui  eut  avec  lui,  pour 
le  seconder,  le  Commandant  Supérieur  du  cercle  et  le  Chef 
du  Bureau  arabe  de  Sebdou.  Ces  goums  opérèrent  d'abord 
une  reconnaissance  chez  les  Béni  (juil  et  revinrent  ensuite 
à  Aïn-Ben-Khelil,  pour  prendre  des  vivres  et  former  l'ar- 
rière-garde  du  corps  expéditi(jniiaire,  en  assurant  ses  der- 
rières et  en  maintenant  les  communications  avec  Aïn-Ben- 
Khelil.  Ils  eurent  en  même  temps  à  protéger  la  marche  des 
convois. 

«  La  colonne,  après  s'etie  avancée  jusque  sur  les  bords 
de  l'oued  Guir,  oii  (^Ih^  reçut  la  soumission  des  Doui  Menia, 
commença  son  mouvement  de  retraite. 

((  Elle  arriva  le  2.S  devant  le  ksar  d'Aïn-C'haïi-,  entouré 
par  une  cpiaiitité  considérable^  de  {)aliniers  qui  en  rendaient 
l'approche  dilïicile.  La  lésistance  des  assiégés  fut  très  vive. 
Les  munitions  d'artillerie  étant  insulFisantes,  on  ne  put 
battre  le  mur  en  brèche.  Les  zouaves  et  les  tirailleurs  eurent 
à  essuyei"  un  feu  teriible.  C'est  dans  ce  combat  d'Aïn-Chaïr 
(pie  le  commandant  SurteL  Commandant  supérieur  du 
(•(•rcl(>  de  Sebdou,  (pii  s'était  élancé  bravement  à  la  tête  des 
tirailleurs,  fut  blessé  mortellement  d'une  balle,  au  pied  des 
murs  du  ksar. 

<(  A  la  suite  de  cette  exi)édition,  il  était  nécessaire 
d'avoir,   en  face  des  tribus  marocaines,   une  force  sufli- 


DOCUMEMS  l'OUU  SEUNIH  A   I.  IIISIUIHK  IJliS  lIA.MVAiN 


27!) 


saiilr  |)iiiii'  poiiMi'n,  <('l()ii  les  ciici  (iislitiiccs,  <iii\('illcr 
rcmiciiii,    Ir   |ti(''\  ciiil    l'I    le  coillbiillic  iiii    hcsoiii. 

u  (Icllc  Idicc,  on  |»()ii\;iil  l'iiNoii  ilaiis  la  main  en  iiicl- 
laiil  à  la  Irlc  (l<'~-  llaiiiNari  iiii  clict'  assez  énPi'o'i(|U('  poiii'  les 
niiiiiilciiir  groupés,  assez,  iiilliM'iU  pour  se  iciiscigncr  an 
loin,  jouissant  dune  rrpntalion  de  hiaNdinc  i)it'n  ronnuc, 
capable  dinliniidcM    nos  ennemis. 

<(  ('/est  à  la  suite  de  ces  diverses  considérations  que  l'aiito- 
lilé  supérieure  plaça,  à  la  lin  de  juillet  1870,  Si  Sliman  ben 
kaddour  à  la  tète  des  iïamvan,  en  remplacement  de  lagha 
du  Sud-Ouest  et  des  llamyan,  Aloliannned  ben  Abdallali. 
(pii  prenait  le  titre  d'  «  Agha  du  Maklizen  et  du  Djebel  du 
Sud  »,  ayant  sons  ses  ordres  les  caïds  des  tribns  telliennes 
(Oulad  Ouriach,  lîeni  llediel,  Heni  Siiou^s,  Onlad  Fn  \eliar 
el  .\n<jad).    » 


CHAPITRE  IV 


OKGAMSATIOX  DES  HAMIAN 

PAR  LE  OfiNKKAL  CHANZY.—  LA  (  RËATIOX  DU  POSTE 

D'EL-ARICHA  (1870-1872) 


Pendant  toute  cette  période  de  troubles,  le  poste  de  Géry- 
ville  avait  eu  un  rôle  des  plus  dilïlciles.  Mais  si  l'on  voulait 
protéger  d'une  manière  certaine  nos  établissements  du 
Tell,  il  était  de  toute  nécessité  de  s'installer  sur  d'autres 
points  des  Hauts-Plateaux.  On  ne  s'y  décida  pas  encore, 
bien  que  l'on  eût  songé  im  instant  à  réoccuper  Aïn-Ben- 
Khelil.  On  se  contenta  de  chercher  à  organiser  Je  nouveau 
les  Hamyan  qui  continuèrent  à  relever  du  cercle  de  Sebdou 
et  à  les  placer  sous  l'autorité  d'une  personnalité  indigène 
marquante.  Mais  on  était  toujours  arrêté  par  la  même  dilli- 
culté  qui  était  de  trouver  l'homme  assez  influent  pour 
dominer  sans  conteste  tous  les  autres  chefs. 

Le  général  Chanzy,  nommé  au  Commandement  de  la 
Subdivision  de  Tlemcen,  prit  l'initiative  de  confier  ce  poste 


280       DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

le  i-  juillet  1870  ù  Si  Sliman  ben  Kaddour,  qui  uous  avait 
rendu  de  réels  services  dans  le  cours  des  dernières  années. 
L'agha  de  Géryville  était  eu  effet  gêné  par  la  proximité  du 
commandement  français  (pii  mettait  un  frein  à  ses  goùLs 
autoritaires  et  à  ses  dispositions  à  pressurer  ses  administrés; 
il  démontra  que  sa  présence  au  milieu  des  Hamyan,  dans  le 
voisinage  de  la  frontière  marocaine,  serait  beaucoup  plus 
utile  qu'à  Géryville  qui  n'a\ait  rien  à  redouter  des  incui- 
sions de  l'ennemi  et  ses  raisons  furent  goûtées.  Esprit 
aventureux,  homme  d'une  grande  énergie,  il  sut  d'abord 
grouper  autour  de  lui  les  nomades  des  Hauts-Plateaux  ;  sa 
qualité  de  membre  de  la  famille  des  Oulad  Sidi  Cheikh  lui 
donnait  une  grande  influence.  Grâce  à  lui  le  calme  régna 
sui'  les  Hauts-Plateaux  pendant  la  guerre  de  1870. 

Un  autre  motif  de  cette  paix  passagère  fut  la  mort  de  Sidi 
Cheikh  ben  Tayeb,  survenue  le  10  juillet  à  Figuig.  Son  fils 
Si  Maamar  était  dans  les  meilleurs  termes  avec  son  cousin 
Si  Sliman.  Cette  raison,  jointe  à  la  brutale  vigueur  du  nou- 
vel agha,  nous  évita  des  embarras,  dans  une  période  oii 
s'affaiblissait,  aux  yeux  des  indigènes,  notre  prestige  et  oi'i 
l'Algérie  se  dégarnissait  de  troiq)es. 

Les  modifications  suivantes  furent  faites.  Dans  l'aghalik 
des  Hamyan  furent  compris  les  Oulad  Sidi  Ahmed  ben 
Medjdoub,  les  Megan  furent  détachés  des  Ghiatra  et  Tayeb 
ben  Sliman  dut  lenoncer  à  sa  (jualilication  de  caïd  des  caïds 
pour  se  contenter  du  caïdat  des  Oulad  Serour. 

Le  général  Chanzy,  quelque  temps  après  sa  prise  de 
commandement,  rédigea  uu-  lapport  sur  la  situation  du  Sud 
de  la  Subdivision  de  Tlemcen  et  gur  la  nécessité  d'une  réoi- 
ganisation  des  populations  sahariennes.  Ce  document  est 
des  plus  intéressants  car  il  contient,  pour  la  première  fois, 
des  précisions  officielles  dont  la  valeur  ne  saurait  être  con- 
testée. Après  un  exposé  de  la  situation,  il  iiidique  ainsi  qu'il 
suit  les  limites  du  territoire  des  Hamyan  : 

«  La  contrée  dans  laquelle  les  Hamyan  se  meuvent 
((  s'étend  de  la  ligne  d'eau  jalonnée  par  les  points  de  Ma- 
«  goura,  El-Aiicha,  Taërziza,  Kersouta,  Ras-el-Ma,  au 
«  Nord  ;  aux  montagnes  des  ksour  au  Sud  ;  de  Bou  Guern, 
((  Fekarine  et  Naama  à  l'f^st  ;  à  Mesaksa,  Mengoub,  Galloul 
«  et  El  Ambaa  à  l'Ouest.  Les  Chafaa  ont  leur  territoire  le 
«  long  de  la  frontière,  leurs  campements  d'été,  de  Taërziza 
((  à  Magoiu^a,  leurs  magasins  à  Sfissifa,  aux  deux  Moghar 
«  et  paitie  à  Aïn-Sefra.  Les  Djemba,  qui  se  tiennent  à  l'Est 


DOCUMENTS  rOliH  SEK^1I5  A  l/lIISlOIlU:  DES  IIAMYAN       'i8  l 

((  (les  piciiiicrs,  (iiinix'iil  I  élr  sur  les  eaux  de  Kci-oula, 
<(  h.is-cl-Mii  cl  (»iil  une  l(ii(l;ui('c  à  se  proloii^n'r  sur  les 
((  llauls-I'lalcaux  de  Daya  jus(|u'à  h]|  llainuiaui  ;  ils  fié- 
((  (juculcnl  de  j) référence,  daus  les  chotls,  les  puits  de  la 
((  pointe  Ouest  du  chotl  (lliei^Mii,  poussent  leurs  troup(.'au\ 
((  jus(pi'à  l'ekarine,  Méeliéiia  et  Naainu  el  enimagasinenl 
(■   à  Asia,    iiont  et   Aïn-Selia.   » 

Voici  le  portrait  qu'il  trace  des  llamyan  : 

((  Le  lianiyan  est  le  t\p(î  du  saharien  :  excellent  cavalier, 
((  infatigable  avenluriei-,  [)illard,  d'une  religion  facile  qui 
u  ne  va  jamais  jusqu'au  fanatisme,  essentiellement  subor- 
((  donné,  supportant  dillicilement  toute  action  étrangère 
<(  et  n'admettant  comme  chefs  que  ceux  des  siens  qui  se 
«  sont  fait  une  réputation  de  bravoure  et  d'audace,  qui  lui 
«  inspirent  de  la  conliance,  et  qui  partagent  sa  vie,  ses  aven- 
«  tures  et  ses  dangers.  L'esprit  de  la  tribu  n'est  pas  mau 
«  \ais  en  ce  que  notre  domination  y  est  facilement  accep- 
«  lée  ;  on  doit  la  maintenir  en  la  commandant  avec  vi- 
«  gueur,  beaucoup  plus  qu'en  l'administrant  avec  détail.» 

Après  avoir  tracé  l'historique  des  Hamyan  et  étudié  la  po- 
litique sur  la  frontière,  il  proposa,  en  résumé,  les  réformes 
suivantes,  en  ce  qui  concernait  les  Hauts-Plateaux  et  le 
Sahaia  :  deux  commandements  indigènes,  relevant  chacun 
directement  du  Commandement  de  Sebdou,  seraient  créés; 
le  premier  comprendrait  les  Oulad  En  Nehar,  Jes  Oulad  Ali 
bel  Hamel  (Angad)  et  les  Oulad  Ouriach,  et  confié  à 
l'agha  Si  Mohammed  ben  Abdallah  ;  le  centre  de  ce  grou- 
pement serait  à  El-Aricha  oii  on  créerait  un  maghzen  de 
5oo  cavaliers  ;  le  deuxième  commandement,  comprenant 
les  llamyan  (Chafaa  et  Djemba)  et  les  Rezaïna,  serait  confié 
à  Si  Sliman  ben  Kaddour  qui  résiderait  à  Aïn-Ben-Khelil, 
dans  l'ancienne  maison  de  commandement. 

Malheureusement,  si  on  rencontrait  chez  Si  Sliman  ben 
Kaddour  les  qualités  qui  en  firent  un  chef  de  bande  renom- 
mé, il  n'avait  aucun  sens  politique  ;  il  était,  en  outre,  d'une 
cupidité  et  d'une  rapacité  extrêmes.  Rongeant  ses  admi- 
nistrés littéralement  jusqu'à  l'os,  il  les  razziait  et  détrous- 
sait les  caravanes  qui  s'aventuraient  à  proximité  de  ses 
campements.  Aussi  les  Hamyan  en  étaient-ils  arrivés  à  pré- 
férer à  la  paix  existante  les  incursions  de  leurs  voisins  du 
Maroc  ;  avec  eux,  ils  pouvaient  espérer  rentrer  dans  leius 
biens  par  une  opération  in\erse,  tandis  qu'avec  Si  Sliman, 
ce  qui  était  perdu  létait  à  tout  jamais  et,  réclamant,  ils 


19 


282       DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hiSTOIRE  DES  UAMYAN 

risquaient  de  s'alliier  des  désagréments  et  d'aggraver  leur 
situation. 

Dans  le  courant  de  février  187 1,  l'agha,  bien  que  nous  ne 
fussions  pas  en  guerre  avec  les  tribus  marocaines,  arrêta  de 
sa  propre  autorité,  et  à  son  profit, une  caravane  des  Anioui' 
qui  se  rendait  à  Tlemcen  avec  250  moutons  et  il  fit  jeter 
en  prison  les  marchands.  11  s'attribua,  en  outre,  une  part 
léonine  siu'  la  somme  de  226.000  francs  versés  entre  ses 
mains  par  l'Etat,  en  paiement  des  réquisitions  qu'avaient 
fournies  les  llamyan  |)()ur  l'expédition  de  l'oued  Guir. 
Djelloul  oiUd  l.akhdar,  caïd  des  Ghiatra,  fit  connaître  et 
appuva  les  piainles  de  ses  coiiliibuablcs  ;  Si  Slinian  l'ac- 
cusa d'entretenir  des  relations  avec  Kaddour  ben  Hamza  et 
Djelloul,  lévoqué,  dut  se  réfugiei'  chez  l(>s  Reni  Guil,  après 
avoir  pu  mettre  en  lieu  sûr  la  plus  grande  partie  de  s(\s 
moutons.  L'autorité  française  fit  toiil  ce  qu'elle  put  pour 
amener  Si  Sliman  à  rendre  gorge  ;  mais  il  fallut  patienter, 
car  on  avait  besoin  de  lui. 

Sur  ces  entrefaites,  Si  Kaddour  ben  Hamza  fit  au  général 
de  Mézanges  de  Saint-André,  commandant  la  province 
d'Oran,  des  ouvertures  de  soumission.  Rendez-vous  lui  fut 
donné  le  2/1  mars  à  Bou-Guern  où,  accompagné  de  Si  Sli- 
m.in  ben  Kaddour,  il  devait  se  rencontrer  avec  le  lieutenant- 
colonel  (iand,  le  commandant  Marchand  et  Kaddour  ould 
Adda,  agha  de  la  Yacoubia. 

Expédition  des  Méloizes,  1871.  —  Mais  arrivé  au  jour 
fixé,  Si  Kaddour  ben  Hamza  manqua  au  rendez-vous.  Il 
laissa  ses  campements  établis  à  Kheneg-El-Adha,  chez  les 
Béni  Mathai-  marocains  et  attendit  la  jonction  des  contin- 
gents (pi'il  avait  convoqués  pour  se  porter  confie  les  tri- 
bus des  cercles  de  Sebdou  et  de  Marnia. 

En  présence  de  cette  singulière  attitude,  le  colonel  des 
Méloizes,  qui  était  campé  à  El-Gor,  avec  une  colonne  forte 
de  700  hommes  d'infanterie,  de  644  chevaux  de  cavalerie 
régulière,  d'une  section  d'artillerie,  des  goums  de  Daya, 
Tlemcen,  Saïda  et  des  goums  à  pied  et  à  cheval  des  lla- 
myan, reçut  l'ordre  de  se  diriger  sur  Sidi-Djilali  et  sm* 
Magoiira.  Il  se  mit  en  inouvement  le  .6  avril  pom*  ce  dernier 
point. 

Une  seconde  colonne,  dite  «  d'El-Haçaïba ^  »,  venue  de 


I   El  nnçfiïba  Psl  le  nom  inilip-ÎTio  ilii  point  J'caii  situé  acfuplloment  an  village 
de  Magenta. 


DOCUMENTS  l'OLM  SERMH  A  l.'ll  IS  lOI  It  K  DES  lIAiMVAN       283 

Saïdii,  le  I cinplarii  h  Sidi  l>jiliili  ;  cllf  (|iiillii  ce  point  le 
i.S  avril  [)()in-  se  diri^ci  sur  i  aër/iza.  I^llc  conipicnail 
(Sçj-j  lioiniucs  cl'iiil'aiilcric,  une  scclioii  d  arlillcric  de  moii- 
la<>iu'  cl  :'4''  ('hf\aii\  du   >'  (  lliasscuis  d'Afriiiuc. 

I.c  \-  a\ril,  Si  Kaddour  h(!n  llaniza  (|uiUa  ses  canipc- 
nu'uls  de  KIhmu»^-I'I-  \dlia  cl  se  tlirij^ca  sur  les  plalcaux  qui 
s(»nl  silués  à  cnviioii  ">  i\il()nuMres  au  Nord  des  puils  d<* 
Ma<>()Uia,  tnonaçanl  ainsi  do  (M)up('r  les  ronitnunicalions  de- 
là colonne  des  Mcloizcs,  avec  le  posle  de  Sidi-Djilali. 

Un  rude  combal  s'engagea  :  il  est  resté  célèbre  dans  la 
légion.  Nous  croyons  ne  pouvoir  mieux  faire  que  de  cilej-, 
à  ce  sujet,  tel  qu'il  est,  le  récil  qui  en  a  été  recueilli  auprès 
d'indigènes  y  ayant  pris  paît  i. 

((  Sur  les  nouvelles  reçues  du  Sud  et  après  un  mouve- 
ment de  recul  vers  le  Tell  opéré  par  les  tribus  des  Hamyan, 
menacées  par  Si  Kaddour  ben  Uamza,  la  colonne  de  Sebdou, 
(pii  compienait  de  l'infanterie  (le  narrateur  n'a  pu  en 
donner  la  force),  deux  pièces  de  montagne  et  le  i""""  esca- 
dron du  2^  Spahis,  plus  une  partie  du  2"  escadron,  s'était 
portée  à  El-Gor.  dans  les  premiers  jours  du  mois  d'a- 
vrd  1871. 

«  Tandis  que  la  coloime  était  en  ce  point,  ariiva  la  nou- 
velle du  coup  de  main  opéré  par  Si  Kaddour  sur  les  Beni- 
bou-Saïd  ;  K^s  escadrons  de  spahis  furent  renvoyés  aussitôt 
à  Sidi-Medjahed  ;  il  ne  resta  à  la  colonne  que  t2  spahis  de  la 
smala  de  Chaaba  (dont  le  narrateui"  Si  Ahmed  ben  Ahmed 
faisait  partie),  conmiandés  par  le  maréchal-des-logis  Si 
Ahmed  ben  Kara  Mostefa.  La  colonne,  commandée  par  le 
lieutenant-colonel  des  Méloizes  (probablement  du  2^  Chas- 
seurs d'Afiique),  se  transporta  par  Sidi-Yahia,  Ain-Sba, 
Tadjertila,  à  Sidi-Djilali.  A  Tadjertila,  elle  fut  rejointe 
pai-  l'escadron  de  spahis  du  Télagh.  Elle  était  en  ce  dernier 
point  depuis  quatre  ou  cinq  jours,  lorsqu'elle  partit  pour 
Magoura,  011  elle  ne  fil  (jue  camper  un  jour,  pour  remontei- 
vers  Missiouïn.  A  Missiouïn,  les  Hamyan,  qui  ballaient  la 
plaine  en  éclaireurs,  revinrent  annoncer  au  commandant 
de  la  colonne,  que  Si  Kaddour  se  disposait  à  l'atlaquei-.  La 
colonne  revint  à  Magoura.  Elle  y  arriva  le  i5  avril,  y  passa 
la  nuit  et  le  jour  suivant,  et,  le  17  avril  aumalin,  on  signala 


I  Réiil  l'nil  |Kir  II'  Inii^adiiT  île  sp;iliis  Si  Alinifd  ln'ii  Muiifti ,  qui  participn 
au  ciiiDiiat  (le  Magoura,  étant  alors  ^^palii  à  l'osiadmii  do  «mala  do  Chaalia, 
et  confirmé  par  divers  autres  cavaliers. 


284       DOCUMENTS  POTR  SERVIR  A  l'hTSTOTRE  DES  HAMYAN 

de  la  poussière  au  delà  de  la  fioiilière,  dans  la  direction  du 
Kheneg-El-Adha.  La  poussière  s'approchait  de  plus  en 
plus  ;  puis  ce  furent  les  contingents  ennemis  qui  apparu- 
rent eux-mêmes  sur  les  hauteurs  qui  ferment  le  défilé  du 
Kheneg-el-Adha.  Il  pouvait  être  alors  dix  heures  du  matin. 

<(  Le  colonel  des  Méloizes  envoya  aussitôt  au-devant 
d'eux  les  goums,  les  spahis  et  une  troupe  d'infanterie  (peut- 
être  la  compagnie  Kauffmann,  car  Si  Ahmed  ben  Ahmed 
dit  que  cette  troupe  pouvait  comprendre  une  centaine 
d'hommes)  et  avait  avec  elle  un  canon. 

«  La  cavalerie  marchait  en  bataille  directement  vers 
l'ennemi,  les  goimis  à  gauche,  les  spahis  à  droite  ;  l'infan- 
terie marchait  à  droite  des  spahis.  La  cavalerie  était  au 
pas.  Pendant  ce  temps,  l'ennemi  que  l'on  avait  aperçu, 
défilant  par  le  flanc  devant  notre  ligne  et  dans  la  direct ioQ 
de  Missiouïn,  venant  du  Sud,  ayant  découvert  nos  troupes, 
fil  un  à  droite  et  se  trouva  face  à  ces  dernières,  vers  les- 
([uelles  il  s'avança  au  pas.  L'ennemi  avait  de  la  cavalerie 
et  de  l'infanteiie  ;  dès  qu'elles  furent  à  portée  de  tir,  les 
deux  lignes  ouvrirent  le  feu  l'une  contre  l'antre  ;  nos  trou- 
pes étaient  ainsi  arrivées  à  hauteur  d'un  petit  mamelon, 
situé  à  envi  ion  3  kilomètres  des  puits  de  Magoura,  lorsque 
les  deux  lignes  s'abordèrent.  Pendant  ce  temps,  la  troupe 
d'infanterie,  dans  le  but  de  prendre  l'ennemi  par  son  flanc 
gauche,  s'était  séparée  de  la  cavalerie,  pour  se  porter  vers 
la  droite  en  contournant  le  petit  mamelon  dont  il  vient 
d'être  parlé  et,  formant  le  carré,  fit  feu  sur  l'ennemi.  Celui- 
ci  se  retourna  alors  contre  cette  infanterie  qu'il  ne  put 
entamer  ;  voyant  qu'il  n'en  viendrait  pas  à  bout,  il  revint 
contre  les  goums  et  les  spahis  ;  la  mêlée  se  produisit  alors, 
dans  laquelle,  au  dire  de  Si  Ahmed  ben  Ahmed,  il  était 
difTicile  de  distinguer  les  amis  des  ennemis,  ce  dont  les 
Hamyan  profitèrent  pour  tirer  aussi  bien  sur  nos  gens  que 
sur  les  goums  de  Si  Kaddour.  Deux  officiers,  dont  un  capi- 
taine français  de  la  smala  du  Télagh,  furent  tués,  ainsi  que 
plusieurs  de  nos  spahis  et  de  nos  goumiers.  Si  Ahmed  ben 
Ahmed  dit  avoir  eu  son  cheval  blessé. 

<(  L'ennemi  traversa  notre  cavalerie,  se  précipita  sur  le 
camp,  installé  auprès  des  puits  de  Magoura,  gardé  par  le 
reste  de  l'infanterie,  mais  ne  put  y  pénétrer,  et  prenant  la 
fuite  gagna  le  Nord,  du  côté  de  Missiouïn,  laissant  sui' 
place  beaucoup  de  morts.  11  pouvait  être  alors  deux  heures 
de  l'après-midi.  Les  troupes  qui  gardaient  le  camp  ne  pu- 


DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'iIISIOIRE  DES  HAMYAN       285 

lent  lii( M  <iuarid  elles  furent  iitlaquces,  car  les  ennemis 
élaieiil  suivis  par  notre  cavalerie. 

((  La  colonni"  s'étant  reformée,  rentra  dans  les  campe- 
ments, passa  la  niiil  à  Magoura  et  le  lendeinain,  de  très 
boiuie  liriire,  pailit  pour  Sidi-Djilali.    » 

D'aj)rès  Si  Aiuiied  hen  Ahmed,  l'envoi  [)ar  le  lieutenant- 
colonel  (les  Méloizes,  d'une  troupe  d'infanterie  au-devant 
de  l'ennemi  avait  été  suggérée  à  cet  oiricier  supérieur,  par 
une  obseivation  (pie  lui  avait  faite  un  nommé  Mohammed 
Na'idja,  (pu  était  son  confident,  qui  plus  tard  devint  lieute- 
nant de  spahis  et,  après  sa  mise  à  la  retraite,  devint  caïd 
des  Djouidat,  oh  il  était  connu  sous  le  nom  de  Mohammed. 
Cette  obs(Mvation  était  celle-ci  :  «Que  l'ennemi,  qui  parais- 
«  sait  ne  pas  être  très  nombreux,  pouvait  s'être  fractionné 
((  et  se  proposer  de  prononcer  son  attaque  sur  plusieurs 
«  points  à  la  fois.  »  Sans  cette  circonstance,  toujours  au 
dire  de  Si  Ahmed  ben  Ahmed,  notre  succès  aurait  été  plus 
important,  car  on  aurait  pu  tuer  beaucoup  plus  d'ennemis. 

«  Rentrée  à  Sidi-Djilali,  la  colonne  y  resta  quatre  ou 
cin([  jours,  pendant  lesquels  les  Hamyan,  sous  la  direction 
de  Si  Sliman  ben  Kaddour,  leur  agha,  ou  tout  au  moins  «n 
son  instigation,  razzièrent  les  Méhaïa,  qui  étaient  venus 
chercher  sur  notre  territoire  un  refuge  contre  le  désordre 
causé  au  ATaroc  par  les  agissements  des  marabouts.  A  la 
suite  de  ce  fait,  le  colonel  des  Méloizes  envoya  Si  Ahmed 
bon  \hined  porter  une  lettre  à  un  général  fou  colonel)  qui 
anivail  i)ar  la  route  de  Sebdou.  (Celte  lettre  contenait  pro- 
bablement la  nouvelle  de  cette  razzia.)  Si  Ahmed  ben 
Ahmed  trouva  le  général  (ou  colonel)  déjeunant  à  Aïn-Sba, 
sous  des  arbres  ;  il  lui  remit  sa  lettre.  (Cet  officier  général 
ou  supérieur  n'avait  avec  lui  qu'une  escorte.)  Quand 
l'olTicier  général  eut  lu  la  lettre,  il  s'adressa  à  Si  Ahmed 
ben  Ahmed  sans  pouvoir  bien  se  faire  comprendre  en 
arabe,  mais  Si  Ahmed  ben  Ahmed  saisit  bien  qu'il  lui  di- 
sait, en  mettant  son  doigt  au-dessous  de  l'œil  :  «  Dis  au 
colonel  et  à  son  chien  de  Naïdja  que  s'il  disparaît  un  seul 
cheveu  des  Méha'ia,  je  les  en  rendrai  responsables.  »  Si 
Ahmed  ben  Ahmed  ayant  rapporté  cette  réponse,  sans  re- 
produire ce  qu'elle  pouvait  avoir  de  blessant  à  l'adresse  de 
Naïdja,  le  colonel  défendit  aussitôt  aux  ïlamyan  de  rien 
faire  disparaître  de  ce  qu'ils  avaient  pris  aux  Méhaïa, 
d'égorger  un  seul  mouton  ou  de  conserver  quoi  que  ce  fût. 
L'ordre  fut  donné  de  tout  restituer  aux  Méhaïa.  Le  général 


28G       DOCUMENTS  POUH  SERMR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

OU  colonel  arriva  lui-mêiiie  peu  de  temps  après  à  Sidi- 
Djilali  et  le  colonel  des  Méloizes  rentra  le  lendemain  à  Seb- 
dou,  accompagné  par  les  douze  spahis  de  Chaaba,  qui  lui 
avaient  été  laissés  à  El-Gor  et  (jui  l'avaient  accompagné 
jusqu'alors.   » 

*  * 

Après  cet  échec,  Si  Kaddour  repassa  la  frontière  à  Khe- 
neg-El-Hada  ;  la  sécurité  fut  momentanément  rétablie  dans 
le  Sud  du  cercle  de  Sebdou  et  dans  le  cercle  de  Géryville. 
Les  Hamyan  allèrent  se  grouper  à  l'Est  d'El-Aiicha  ;  leur 
agha  campa  sous  les  murs  du  bordj  avec  la  plus  grande 
partie  de  ses  goums.  Quelque  temps  après,  Si  Kaddoiu' 
opérait,  avec  une  audace  inouïe,  une  razzia  sur  les  Oulad- 
Sidi-Ahmed-ben-Medjdoub,  campés  à  Kersouta.  Au  mois 
de  juin,  une  nouvelle  colonne  partait  de  Sebdou  et  foiçait 
Si  Kaddour  à  quitter  ses  positions. 

L'Empereur  du  Maroc  signifia  à  Si  Kaddour  de  quitter 
Oglat-es-Sedra,  où  il  s'était  arrêté.  Le  chef  de  l'insurrection 
alla  se  réfugier  à  Matarka,  chez  les  Béni  Guil  ;  il  ne  put  les 
décider  à  reprendre  les  armes  et  dut  ajourner  l'agression 
qu'il  avait  méditée.  Si  Lalla,  de  son  côté,  en  était  réduit, 
pour  vivre,  aux  exploits  des  coupeius  de  route.  A  la  même 
époque,  Sid  Ez  Zoubir,  son  frère,  se  montra  disposé  à  en- 
trer en  pourparlers  avec  nous,  mais  le  souvenir  des  expé- 
riences précédentes  ne  donnèrent  pas  à  nos  représentants 
l'envie  de  reprendre  des  pouiparlers  dans  ce  sens. 

Pourtant,  des  négociations  étaient  entamées  entre  Si 
Sliman  ben  Kaddour,  les  filsde  Sidi  CheikhbenTayeb,dont 
deux  venaient  de  sortir  des  prisons  de  Eez,  et  les  Béni  Guil, 
dans  le  but  d'arriver  à  rétablir  les  bonnes  relations  (|ui 
existaient  autrefois  entre  eux  et  les  Hamyan.  Les  Marocains 
cherchaient  surtout  à  entraîner  cette  dernière  confédéra- 
tion dans  un  mouvement  de  défection.  Ces  tentatives  fu- 
rent déjouées  et  Si  Sliman  fut  invité  à  cesser  toute  négo- 
ciation de  ce  genre. 

Si  Kaddour  ne  put  pardonner  à  Si  Maamar  ben  Cheikh  de 
lui  avoir  refusé  son  concours  ;  pour  se  venger  de  cet  aban- 
don, il  surprit,  le  H  août,  ses  campenienis  à  Ogiat-Ren-Erh 
■Cheikh,    puis    il    alla    refaire    ses    approvisionnements    h 
Tafrata. 

Si    Maamar,    devenu    l'ennemi    moilel    de   son   cousin, 


DOCUMENTS  POUR  SERVIH  A  l/mSTOlUE  DES  HAMYAN      287 

sollicilii  l'iiuldi  i<;ili()ii  de  joindre  ses  ^oums  aux  nôtres 
lors(|in'  l'occasion  se  piéscntcrail  de  conibaltie  Si  Kaddour, 
et  s'établit  avec  sa  famille  et  ses  partisans  auprès  des 
iïamyan. 

Le  Couvernemenl  de  Fez  prescrivit  aux  coinmandanis 
des  amalats  de  la  frontière  de  s'opposer  à  toutes  les  cnl re- 
prises de  Si  Kaddour,  voire  même  de  s'en  emparer. 

Pendant  ce  temps,  les  Iïamyan  avaient  quitté  Kl-\riclia 
pour  se  porter  successi\  ement  à  Ras-el-Ma  dans  le  cercle  de 
Daya,  puis  à  Taërziza,  au  Sud-Est  de  Sebdou  (entre  Bedeau 
et  El- A  ri  ch  a). 

Pour  s'assurer  de  leur  fidélité  qui  semblait  douteuse,  les 
colonnes  de  Daya  et  d'El-Aricha  se  portèrent  en  avant  de 
leurs  campements. 

E'a»ha  des  Iïamyan  était  devenu  impossible,  non  seule- 
ment pour  ses  administrés  mais  aussi  pour  ses  voisins  :  il 
avait  élevé  le  vol  à  la  hauteur  d'une  institution  et  cette 
situation  ne  pouvait  durer  sans  compromettre  gravement 
nos  intérêts  dans  le  Sud  de  la  province  d'Oran.  Si  Abou 
Bekr.  caïd  des  Mehaya.  porta  plainte  auprès  du  Gouverneur 
(Général  et  une  commission  d'enquête,  présidée  par  le 
général  Dastugue,  fut  réunie  à  Sidi-Bel-Abbès  pour  exa- 
miner les  faits  reprochés  à  Si  Sliman  :  les  griefs  se  Irou- 
vèient  aggiavés  par  ce  fait  qu'à  la  suite  de  dissentiments 
entre  l'agha  et  quehjues  fractions  Hamyan,  celles-ci 
allèrent  rejoindre  Si  Kaddour  ben  Hamza. 

Deux  colonnes  furent  envoyées  aussitôt  à  leur  poiusuite  : 
l'une,  celle  de  Daya,  sous  le  commandement  du  colonel 
Ee  Toullec,  se  posta  à  Bou-Guern  :  l'autre,  celle  d'El-Ari- 
cha, remplacée  ensuite  par  un  bataillon  du  55*  d'Infanterie, 
campa  à  Oglat-En-\adja,  à  la  pointe  Est  du  chott  El-Ghaibi 
(novembie  iSyiV  C'est  en  arrivant  en  ces  points  que  nos 
colonnes  apprirent  la  jonction  des  dissidents  avec  Si  Kad- 
dour ;  ils  étaient  conduits  par  les  adversaires  de  Si  Sliman, 
Cheikh  ould  Embarek,  caïd  des  Akerma  :  Djelloul  ould 
I.akhdar.  caïd  des  Oulad  M(>ssaoud  :  Brekh  ben  Berkane 
et  Miloud  ben  Dimia,  des  Oïdad  Farès  :  tous  ces  caïds 
furent,  bien  entendu,  révoqués. 

Si  Kaddour  profita  de  cette  occasion  pour  repiendre  vi- 
goureusement la  campagne.  Dans  la  nuit  du  lo  au  ii  no- 
vembre, il  jiassa  entre  nos  deux  coloimes  et  poussa  dans  Je 
Nord  jusqu'à  Ras-en-Nouala  et  Marhoum  f/io  kilomètres 
Sud-Ouest  de  Saïda),  razziant  en  route  les  Béni  Mathar  et 


288       DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOîRE  DES  HAMYAN 

les  Ilamyan  de  Si  Sliiiian.  11  rcfjassa  le  cliott  Chergui  ou 
Kreider  et  retourna  dans  le  Sud-Ouest. 

Nos  colonnes  mobiles  allèrent  occuper  snr  les  lïauls- 
Plateaux  des  positions  permettant  de  icndre  la  tranquillilé 
à  nos  populations;  celle  de  Saïda  s'établit  à  Tafaraoua,  celle 
de  Daya,  à  El  Mouïlah,  près  de  Ras-el-Ma  ;  celle  de 
Sebdou  à  El-Aricha.  Les  fractions  des  Hamyan  restées  fidè- 
les étaient  campées  à  Kersouta  et  S<mïridjat. 

Dans  les  derniers  jours  de  novembre,  une  reconnaissance 
des  goums  de  Géryville  surprit  un  groupe  de  Hamyan 
insurgés  en  flagrant  délit  de  razzia  de  troupeaux  apparte- 
nant aux  tribus  du  cercle  ;  elle  lui  enleva  tout  le  butin  et 
lui  tua  deux  cavaliers. 

Les  préparatifs  ayant  été  poussés  activement,  une  expé- 
dition fut  décidée  contre  Si  Kaddour,  qui  s'était  avancé 
jusqu'à  El-Kherouah,  au  Sud-Ouest  d'El-Abiod-Sidi- 
Chcikh.  Nos  goums,  appuyés  par  les  colonnes  mobiles, 
attaquèrent  avec  vigueur,  à  Benoud,  les  campements  des 
insurgés.  Ils  étaient  entraînés  par  Si  Maamar  et  Si  Kaddour 
ould  Adda.  Après  une  heure  de  combat,  i5o  cavaliers  enne- 
mis étaient  tués.  Si  Kaddour  ben  Hamza  et  Si  Lalla  blessés, 
et  leurs  troupes  en  déroute.  Si  Kaddour  ould  Adda  con- 
tinua la  poursuite,  contraignant  les  douars  rebelles  à  venir 
faire  en  grand  nombre  leur  soumission  au  lieutenant- 
colonel  Gand. 

Cet  important  succès  fut  en  partie  annihilé  par  le  départ 
de  Si  Maamar  qui,  satisfait  de  la  part  active  qu'il  avait  prise 
au  combat  de  Benoud,  se  retira  au  Maroc,  et  par  la  nécessité 
où  l'on  se  trouva  de  retirer  à  Si  ,Sliman  son  commande- 
ment, ses  concussions  et  ses  exactions  ayant  été  mises  à 
jour  I.  Comme  il  avait  rendu  des  services  importants,  dans 
des  temps  difTiciles,  le  Gouverneur  Général  lui  laissa  son 
titie  d'agha  ;  il  alla  se  fixer  dans  le  Tell,  dans  la  plaine 
d'El-Mlata,  au  Sud  de  la  sebkha  d'Oran. 

La  colonne  mobile  de  Saïda,  installée  h  Tafaroua,  facilita 
le  rapatriement  et  le  groupement  des  tentes  rebelles  reve- 
nues sous  notre  autorité  après  la  journée  de  Benoud  ;  elles 
étaient  généralement  dans  un  état  de  misère  f|ui  n'avait  pas 
été  sans  peser  fortement  sur  leur  détermination  de  rentrer 
dans  leur  pays.  A  cette  même  époque,  les  Oulad  Mansourah 
et  les  Oulad  Khelif  furent  réunis  en  un  seul  caïdat,  confié 


I   II  fut  révoqué  le  aC  octobre   1871. 


IJOC 


jiiMEiMS  i>oru  sERNiu  \  i.'ii is I (;i H K  im:s  ii\myan     '280 


i'i   l'.l   ll;il)il)  oiild   Mrhkiioiil .   I.cs  l«('z;iïii;i,  de  nom ciiii  xm 
iiii<,  riiiciil  ralliicli(>  cdiiiiiic  iiiil  irfois  i\  Siiïdji. 

Les  cncls  du  loinhiil  de  Bcrioiitl  l'iiroiil  Icls  (juc  les  amircs 
i8-'.Ji  i'[  187,'^  rcsièrcnl  a.ssc/,  câlines.  Mids  la  mesure  prise 
à  ré«.'ar(l  de  Si  Slinian  Itiii  Kaddoni  reinellait  en  cause 
l'or^anif^aliiin  des  llaniyau. 

C'est,  dans  ce  hui  (|u;'  fui  cti'-t'e,  en  l'éxiier  i8-:>,  I  annexe 
d'|]l-\richa,  doid  le  clief  lui  le  ca[)ilaine  Mohauiincd  ben 
Daoïid. 


Les  postes  île  Seixluu  et  dFI-Aiiclia  ont  joué  un  lole 
tellement  important  dans  l'histoire  do  I  1  soumission  des 
llamyan,  que  nous  estimons  nécessaiie  de  l'exposer  ci- 
apiès,  en  re\enant  en  arrière,  dussions-nous  même  répéter 
en  partie  ce  (pie  nous  avons  déjà  dit  à  ce  sujet. 

Dès  les  premieis  jours  de  février  i85i,  le  cercle  de  Seb- 
dou  fut  organisé  conformément  aux  prescriptions  ministé- 
rielles du  6  jan\ier  i8r)i.  Tl  comprenait  : 

F -es  Béni  Snouss  (Azaïl,  Khémis,  Kef  )  ; 

Les  Boni  Ifédiel  ; 

Les  Oulad  Ouriach,  les  Oulad  Mi  ben  llamel  (Angad), 
les  Oulad  en  Néhar  ; 

Les  llaniyau  Glieraba    Chafaa  et  Djemba). 

Le  capitaine  de  Béhagle,  Commandant  Supérieur  du 
ceicle,  leçut  à  cette  époque  la  visite  des  chefs  des  Hamyan, 
des  Oulad  en  Néhar,  des  Oulad  Ali  ben  Ilamel  (Angad)  et 
celle  de  toutes  les  djemaas  de  l'aghalik  de  la  Montagne  du 
Sud.  Il  leur  fit  part  de  la  nouvelle  organisation  du  cercle 
et  leçut  les  protestations  de  fidélité  et  de  soumission  de  ces 
divers  chefs  indigènes. 

Jus(fu'en  i87r>,  la  tache  du  Commandant  Supérieur  de 
Sebdou  et  celle  du  Buieau  aiabe  ne  furent  pas  des  plus 
faciles.  ]|  s'agissait  d'administrer,  n\ec  fermeté,  les  tribus 
lelliennes  des  Béni  Snouss,  des  Béni  Tîédiel,  des  Oulad 
Ouiiach.  de  maintenir  sous  n<»lrt^  autorité  les  Oulad  En 
\éhar,  les  \ngad  et  leur  faire  aceeptei'  notre  domination  : 
dt'  surveiller  étroitement  les  Hamyan  et  de  prévenir  leur 
défection  :  enfin,  d'étendre  notre  influence  jusque  dans  les 
ksour  et  de  travailler  à  la  soumission  des  Amour. 

Nous   allons    rappeler   brièvement    les    faits    accomplis 


290       DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOTRE  DES  HAMYAN 

dans  le  cercle  de  Sebdou  pur  le  personnel  des  Affaires  indi- 
gènes ;  son  action  a  permis  de  mener  à  bien  celle  œuvre 
complexe. 

Des  ï 8.^)3,  la  nécessité  d'établir  un  camp  à  El-Aricha  et 
un  aulre  à  Méchéria  se  fit  sentir.  A  cette  époque,  en  effet, 
beaucoup  d'Hamyan  dissidents  promettaient  de  se  sou- 
mettre et  n'en  faisaient  rien.  Il  était  donc  urgent  d'inslaller 
à  El-Aricha  et  à  Méchéria  deux  goums  ayant  pour  mission 
de  chercher  à  razzier  les  Hamyan  dissidents  et  de  les  tenir 
éloignés  des  lieux  où,  ordinairement,  ils  trouvaient  des 
pâturages  pour  leurs  troupe;; nx.  Aussi,  pendant  le  mois 
d'octobre  i853,  deux  camps  furent-ils  formés  dans  le  Sud  . 
1°  Celui  d'El-Aricha  comprenant  500  hommes  des  goums 
du  cercle  de  Sebdou  et  8o  spahis  ;  5°  Celui  de  Méchéria 
qui  se  composait  de  6o  spahis  et  de  ooo  hommes  des  goums 
de  Bel-Abbès. 

Ces  goums  eurent  à  opérer  dès  le  mois  de  novembre 
t853,  avec  le  commandant  Defrance.  Tls  réussirent  à  sur- 
prendre les  ?Iamyan  dissidcuits  et  à  leur  eidever  7.600 mou- 
tons. Tls  firent  paitie,  ensuite,  de  la  colonne  du  géné- 
ral commandant  la  Subdivision  de  Tlemcen  (novembre, 
décembre  18.53')  qui  se  rendit  à  Aïn-Ben-Khelil.  Au  letour 
de  cette  colonne  les  cavaliers  du  gourn  fuient  renvoyés 
dans  leurs  tribus  et  le  camp  d'El-Aricha  fut  composé  de 
f>oo  cavaliers  indigènes  et  d'un  peloton  de  spahis  (décem- 
bre 18.53).  Tl  devait  surveiller  le  Sud  et  en  particulier  les 
Hamyan.  Le  commandement  de  ce  camp  fut  exercé  par  un 
officier  du  Bureau  arabe  de  Tlemcen.  Jusqu'en  i856  aucun 
fait  saillant  ne  se  produisit  dans  le  cercle  de  Sebdou. 

IK^fi.  —  Le  io  janvier  iS56  eut  lieu,  à  Aïn-Ben-Khelil, 
rétablissement  d'un  camp  français  installé  par  une 
colonne  venue  de  Tlemcen.  Le  ('ommandant  Supérieur 
de  Sebdou  eut  à  organiser  les  convois  chargés  de  ravitailler 
ce  nouveau  camp.  Ees  tribus  du  cercle  de  Sebd  ni  eurent  à 
fournil'  également  les  convois  nécessaires  à  la  colonne  de 
Tlemcen  (forte  de  i.ooo  hommes  environ)  qui  resta  pen- 
dant près  de  deux  mois  et  demi  à  5o  lieues  au  sud  de 
S(4)dou. 

l.e  18  juillet  î856.  le  Commandant  Supérieur  de  Seb- 
dou (capitaine  Lerou-x)  et  l'adjoint  du  Bureau  arabe  (lieu- 
tenant Croiizet)  informés  de  la  défection  et  de  la  fuite  des 
Hamyan,  se  mirent  à  leur  poursuite  avec  le  peloton  de 
spahis  de  Sebdou  et  200  hommes  du  goum.  La  poursuite 


DOCUMENTS  I>OUH  SRHMU  A  I,  IIISIOIHK  DES  IIAMYAN 


291 


fui    poiissrc  ;i(  li\('in»'iil   jusiiniiii  (llioll    (iliinhi,    iiiiiis  clic 
fui  sims  it''-^ii||;i|. 

l'.ii  s(>|>lcml)i('  i8r)fi,  fri-ricc  ;\  j'inlcrvonliori  vi\cr<:'\(\yu-  cl 
rapide  du  capiliiiric  Ijtoux,  les  Oulad  en  Néiiar  ne  purcnl 
|)asser  an  Marne  cl  Icni  (h'-fccliori,  an  lien  d'être  complète, 
ne  fut  (pie  [lailiclie  ;  une  lienlaine  de  lenles  rénssirenl  à 
passer  la  fionlière.  Ponr  enipèehei'  celle  défi-elion  des  On- 
lad  en  Ncliai ,  \c  capitaine  Leroux  se  porta  au  centre  de  la 
Irihn  a\('c  nn  escadron  de  chasseurs,  r^oo  hommes  (hi 
i^onni  de  Tlemceu  et  o.ôo  hommes  du  p-oum  de  Sehdon. 
Kn  (quelques  jours,  il  razzia  les  Oulad  en  Néhar  et  leur 
enleva  6.000  moutons  environ.  Après  ce  couyi  de  main, 
loul  lenira  dans  l'oidre  dans  la  trihu  des  Onlad  en  Néhar. 

1858.  —  Le  9.'?.  mai  iSfiS,  le  capitaine  (lolonieu,  alors 
Commandant  Supérieur  de  Sebdou,  partit  de  ce  point  avec 
une  colonne  de  ca^ale|•ie  indicrène  composée  de  3o  spahis, 
100  chameaux  de  choix  dn  o-oum  de  Tlemcen,  roo  che- 
vaux de  choix  du  oroum  de  Sebdou,  [)oui'  faire  nne  toni- 
née  dans  les  ksour  et  mettre  d'accord  les  caïds  des 
llainvan  et  ceux  des  Amour.  Tl  de^ait,  en  outre,  faire  la 
répartitio7i  d'une  amende  de  cinq  mille  franc-^  inflio^ée  aux 
llamyan  icndus  Tcsponsables  des  déoàts  conuuis  au  camp 
d'Aïn-Ben-Khelil. 

La  mission  rcnssll  parfaitcmeni  cl  fnl  l'objet  d'nn  rap- 
]hm\  tiès  dociuncnlé.  envoyé  au  Tiénéial  commandant  la 
Subdivision  de  Tlemcen. 

Dans  1(^  coui-ant  de  décembie  iS.^cS,  mi  petit  camp  fut 
établi  à  El-\richa.  Tl  était  com|)osé  d'un  escadron  de 
spahis  et  d'nnc^  compaijnie  de  tirailleurs.  Tl  resta  à  El-Aii- 
cha  iusnu'en  janvier  ii^'iq.  T.e  capitaine  Colonieu  profita 
de  la  présence  de  ce  camp  poni'  se  rendre  à  r]1-\richa  en 
fin  décembie  et  réffler  diveises  questions  concernant  les 
Ibimvaii.  Il  entama  éo-nlement  des  népoeiations  avec  le*; 
Reni  Yala 

1850.  —  L'année  suivante,  le  9  mai  T85q,  le  Comman- 
daiil  Snnérieui"  de  Sebdou  rrapitaine  Colonieu")  se  rendit 
chez  les  TTamyan  avec  une  colonne  léffère  composée  d'tm 
détachement  d'infantei-ie,  d'un  {)elotop  de  spahis,  d'un 
iroum  de  790  chevaux  des  tribus  du  Tt^Il.  11  reçut  à  \ïn- 
Rcn-Khelil  la  soumission  des  Oulad  \bdal1ah,  fraction 
des  \mour.  et  les  démonstrations  d'amitié  des  Reni  Cnil, 
des  Méhaya  et  même  des  Onlad  Djerir. 


292       DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'iIISTOIRE  DES  IIAMYAN 

En  octobre  185(1,  le  Bureau  arabe  de  Sebdou  eut  à  orga- 
niser les  goums  destinés  à  éclairei-  et  à  seconder  la  colonne 
du  général  Duirieu  qui  rayonna  dans  le  pays  compris 
entre  Sidi  Djilali  el  Ras-El-.Vïn  •  pour  châtier  les  tribus 
marocaines  limitrophes. 

Les  gf)umiers  du  cercle  séjournèrent  avecla  colonne  à 
Ras-El-Aïn  ;  ils  battirent  la  campagne  à  des  distances  con- 
sidérables et,  dans  ces  excursions  en  territoire  marocain, 
ils  purent  capturer  de  nombreux  troupeaux  et  faire  des 
prisonniers  aux  Béni  Mathar,  aux  Béni  Hamlil  et  aux 
Méhaya. 

1<S61.  —  En  janvier-février  T(S6t,  le  Commandant  Su- 
périeur du  cercle  (commandant  Dastugue)  fit  une  toiu'née 
de  trente-cinq  jours  dans  le  Sud,  avec  une  colonne  com- 
posée d'un  goum  de  /|Oo  chevaux  et  d'un  peloton  de 
•^5  spahis.  11  visita,  pour  la  première  fois,  depuis  1849, 
les  deux  ksour  de  Moghrar,  étudia  les  points  de  passage 
dans  les  montagnes  des  Amour  et  régla  à  l'amiable  diver- 
ses affaires  pendantes  entre  les  Hamyan,  les  ksour  et  les 
Amour.  îl  reçut,  pendant  sa  mission,  quelques  représen- 
tants des  tribus  marocaines,  ceux  des  Oulad  Sidi  Cheikh 
frheraba  et  des  Oulad  Sidi  El  Arabi.  Des  cavaliers  des 
Méhaya  se  joignirent  à  sa  colonne  à  Aïn-Sefra. 

lSr)2.  —  Un  an  plus  tard,  le  commandant  Dastugue 
i<'fit  la  même  tournée  dans  le  Sud.  Tl  était  accompagné 
du  Chef  du  Bureau  arabe  de  Sebdou,  d'un  peloton  d'e 
spahis,  de  200  cavaliers  des  Hamyan,  de  5o  cavaliers  des 
Angad  et  Oulad  En  \éhai\  Paiti  le  '^'\  décembre  1861  de 
Sebdou.  le  commandant  Dastugue  campait  le  6  janvier 
i86'>  à  Tiout,  le  9  à  Smin,  sur  le  versant  sud  du  Djebel 
Djana  :  le  ir>,  la  colonne  atteignait  Kheneg  Namous,  sur 
le  versant  de  l'oued  Namous  ;  le  t3,  elle  arrivait  à  Djorf 
El  KdIk'uI.  Le  lendemain  elle  reprenait  la  route  de 
Moghrar. 

Pendant  tout  le  trajet,  le  Commandant  Suj)érieur  n'eut 
fiu'à  se  loucM-  du  bon  accueil  que  lui  firent  les  caïds  des 
Hamvan  et  de^  ksoiu'  ainsi  que  la  plupart  des  caïds  des 
Amour. 

t8()4.  —  A  la  fin  du  mois  de  ïuai's  i86'i,  le  chef  de  ba- 
taillon Henry,  du  fi.^^  de  ligne,  alors  Commandant  Supé- 


I    Actuellement    Berguent. 


DOCUMENTS  l'OUR  SERMM   A   I.  rirsiOlUK  DES  UAMYAN 


29:3 


liciii  du  ('ciclc  de  Si-bduii,  se  rciidil  h  l]l-Alicllii  poiii  \ 
piciidi»'  le  coiiiiniiiidciiitiil  truiic  colonne  composée  d'une 
<'(tin[);iyiii('  de  /.i>iia\cs,  d'un  cscudion  de  chasseurs,  d'un 
cscadioii  de  >p;dus  cl  tic  loo  cavaliers  du  youni.  l/()ccu[)a- 
lion  d'KI-Ariclia  [);u  celle  colonne  avail  été  décidée  par  le 
(iénéral  cominaiidanl  la  l)iv"ision  d'Oran,  à  la  suite  des 
troubles  survenus  dans  le  cercle  de  (jéryville.  Il  s'agissait 
d'occuper  le  poste  d'Iil-Aricha  pour  uiainlenir  les  Uamyan 
et  en  imposer  aux  tribus  marocaines.  Malgré  les  elîorts  des 
Oulad  Sidi  (Uieikli,  auprès  des  Hamyan,  et  l'émotion  pro- 
duite par  le  massacre  de  la  colonne  Beauprélre  (8  avril j, 
la  présence  de  celte  colonne  suflit  pour  maintenir  les 
liamyan  dans  l'ordre  ;  70  tentes  seulement  de  cette  con- 
fédéialion  tirent  défection  et  se  rendirent  à  ra])pel  des  Ou- 
lad Sidi  C'iheikh.  Le  18  juillet  i864,  le  commandant  Henry 
rentra  à  Sebdou,  laissant  le  Sud  du  cercle  dans  une 
situation  relativement  bonne.  La  frontière  marocaine 
avait  été  respectée  ;  les  nomades  du  Sud  du  cercle  de  Seb- 
dou s'étaient  tenus  en  dehors  de  l'insurrection. 

1865.  —  Le  S  novembre  iS65,  le  lieutenant-colonel 
Maurandy,  Commandant  Supérieur  de  Sebdou,  surprit, 
avec  une  colonne,  les  liamyan  Djemba  insurgés  et  leur 
enleva,  à  Trarid,  100.000  moutons.  Au  retour  de  son  ex- 
pédition, le  lieutenant-colonel  Maurandy  se  rendit  dans 
la  tribu  des  Angad  pour  y  arrêter  des  indigènes  qui 
avaient  fait  défection,  lors  de  la  dernière  insurrection  de 
Si  Lala. 

1866.  —  Le  lieutenant-colonel  Maurandy  partit  de  Seb- 
dou le  8  septembre  1866,  avec  la  colonne  de  ce  poste  et  se 
rendit  à  El-Aricha  où  il  séjourna  jusqu'au  18  septembre. 
Le  Commandant  Supérieur  régla  les  différends  qui  exis- 
taient entre  les  Hamyan  et  les  tribus  voisines. 

Au  mois  de  décembre  de  la  même  année  le  Comman- 
dant Supérieur  organisa  le  Makhzen  du  cercle,  conformé- 
ment aux  instructions  du  Gouveineur  Général.  Cette  orga- 
nisation avait  pour  but  d'assurer  la  sécurité  sur  toute 
l'étendue  du  territoire  et  elle  devait  permettre  d'atteindre 
promptement  les  fractions  dissidentes  qui  voulaient  se 
lapprocher  de  la  frontière. 

Le  20  mars  1867,  le  lieutenant-colonel  Maurandy  par- 
tit avec  la  colonne  de  Sebdou  et  se  rendit  au  Ciiotl  El 
Charbi,  à  la  limite  septentrionale  des  campements  occupés 


k 


294       DOCUMENTS  POL]\  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

par  les  Hamyan.  (JcHe  soilie  avait  pour  but.  d'empêcher 
Si  Ahmed  bcn  llamza  de  lenler  dos  coups  de  main  sur  les 
Hamyan. 

1869.  —  A  partir  du  mois  d'avril  1869,  le  poste  d'El- 
Aiicha  fui  occcupé  d'une  façon  permanente.  La  maison 
de  commandement  fui  agrandie  et  transformée  en  un 
posle  pouvant  contenir  une  garnison  régulière  de  cent 
cinquante  hommes.  Cette  occupation  demandée  par  les 
Hamyan  produisit  le  meilleur  effet,  car  les  Hamyan  Ghe- 
raba  se  décidèrent  à  se  grouper  dans  les  environs  du  nou- 
veau poste,  puis  à  sinstallei-  dans  les  Chotts. 

1870.  —  En  1870  se  produisirent  les  événements  que 
nous  avons  racontés  précédemment  et  qui  aboutirent  ;i 
l'expédition  du  général  de  Wimpfen  sur  le  Guir  et  sur  Ain 
Chair. 

1871.  ' —  En  1871,  à  la  suite  de  la  révocation  de  l'agha 
des  Hamyan,  Si  Sliman  Ben  Kaddour,  des  dissensions 
existèrent  entre  les  tribus  et  l'insécurité  régna  sur  les 
Hauts-Plateaux  de  l'Ouest  ;  on  voulut  alors  réorganiser  le 
commandement  de  cette  confédération. 

Aussi  le  3o  décembre  1871,  le  capitaine  Ben  Daoud,  du 
•2"  Régiment  de  Spahis,  était-il  nommé  ((  commandant 
politique  et  militaire  d'El-Aricha  ». 

1872.  —  Il  prit  possession  de  son  poste  le  4  jan\ier  1872. 
Les  caïds  des  Hamyan  furent  piévenus  par  le  Comman- 
dant Supérieur  de  Sebdou  qu'ils  devaient  s'adresser  à  cet 
officier,  chargé  de  l'administration  de  leurs  tribus  et  qu'ils 
n'avaient  plus  à  correspondre  avec  l'administrateur  du 
district  de  Sebdou. 

Le  but  du  commandement  du  capitaine  Ben  Daoud  était 
de  concourir  à  la  reconstitution  des  Hamyan,  et  pour  faci- 
liter, à  ce  titre,  les  relations  entre  eux  et  lui,  le  Général 
commandant  la  Division  d'Oran  décida  qu'ils  seraient  pla- 
cés sous  son  autorité  directe,  de  même  que  le  capitaine 
Ben  Daoud  relèverait  directement  de  la  Subdivision  de 
Tlemcen. 

L'annexe  d'El-Aricha  fut  fondée  dès  le  mois  de  février 
1872.  Le  capitaine  Mohammed  Ben  Daoud  commença  aus- 
sitôt par  rassembler  les  tentes  des  Hamyan  rentrant  de  dis- 
sidence et  il  y  employa  toute  l'année  1872.  H  engagea  les 


DOCUMENTS  POUR  SERVIH  A   1,'rilS  I  OMU':  DES  HAMYA.N       295 

caïds  (les  ll:iin\iiii  à  conslriiiic  des  niaisoiis  à  l""d-Ari(lia 
sous  la  |)r()|('('ti()ii  de  la  «iaiiiisoii  pcrinaiiciilc.  Il  lit  crcusci' 
des  silos  an  pied  de  la  icdoutc  cl  les  Ihuiiyaii  durcid  y 
emina^asiiicr  leurs  ^^laiiis. 

(Au  j)oinl  de  \  ne  adiiiiiiisialif,  le  cercle  de  Sebdou  avait 
élc  modilié  une  pi'cinièrc  l'ois  le  'S  scplcinbrc  i(S7r^.  (loimnc 
les  llaiii\aii  ne  rele\  aient  plus  de  ce  cercle,  un  aiièlé  du 
(Jouveiiieur  (  iénéral,  [nis  à  celte  date  sur  la  proposition  du 
Général  coniinandant  la  Dixision  d'()ian,conslilua  en  une 
annexe  le  cercle  de  Sebdou.  ('elle  annexe  comprenait  les 
li'ibus  suivantes  :  lîeni  Snouss,  Oulad  Ouriach,  Béni  Hé- 
diel,  Angad,  Oulad  en  Neliar,  elle  rele\ait  directenieid  du 
ccuruuandant  de  la  Subdivision  de  Tlenicen.) 

Le  capitaine  lien  Daoud,  ser^iteur  relifjieux  par  sa 
famille  du  marabout  de  Kenadsa,  usa  de  l'inlluence  du  clicf 
de  l'Ordre  dans  l'Ouest,  pour  faire  venir  à  El-Aricha  des 
députalions  des  tribus  marocaines  limitrophes. 

Au  mois  de  mars  1872,  des  délégués  des  Amour  se  ren- 
dirent auprès  de  lui  à  Daïat  El  Garad,  près  de  Bou  Guern, 
pom'  faire  des  offres  de  soumission.  Les  conditions  posées 
à  ce  sujet  par  le  général  Osmont,  commandant  la  Division 
d'Oran,  ne  furent  pas  acceptées. 

Le  27  juin  1872,  une  nouvelle  entrevue  eut  lieu  à  El- 
Aricha.  Les  Amour  unis  aux  Doui  Menia  et  aux  Oulad 
Djerir,  vinrent  pour  conclure  un  pacte  de  paix  avec  les 
Hamyan. 

Le  19  octobre  1872  le  capitaine  Ben  Daoud  fit  .signer 
une  convention  entre  les  Hamyan  et  les  Béni  Guil  d'après 
laquelle  toutes  facilités  seraient  données  pour  la  fréquen- 
tation des  marchés.  D'autre  part,  il  s'efforça  de  maintenir 
groupés  les  Hamyan,  et,  en  récompense  des  services  qu'il 
rendit  comme  Chef  d'annexé  à  El-Aricha,  il  fut  nommé 
le  26  novembre  1878  Commandant  Supérieur  du  cercle 
de  Sebdou  '^emploi  vacant  par  oiganisation). 

1873. —  Les  deux  annexes  de  Sebdou  et  d'El-Aiicha,  par 
arrêté  du  2 A  novembre  1878,  avaient  été  de  nouveau  réu- 
nies en  un  seul  cercle  qui  f)rit  le  nom  de  <(  Cercle  de  Seb- 
dou »  et  conqirit  les  tribus  de  l'ancien  cercle  du  même 
nom. 

Cet  arrêté  portait  le  considérant  suivant  : 
«  Considérant  que,  dans  les  circonstances  actuelles,  par 
suite  des  événements  du  Maroc  et  des  complications  qu'ils 


296       DOCUMENTS  POUK  SERN  lU  A  j/lIISTOlRE  DES  HAMY.VN 

peuveiil  produire  dans  le  Sud-Oia^sl  de  l'Alg-éiie,  il  est  né- 
cessaire de  léunir  sous  liinilé  daction  et  de  commande- 
ment les  tribus  aljiéiiennes  (|ui  [X'uplent  cette  zone  de  la 
frontière...  » 

L'arrêté  du  i^'i  noveuihre  fSy3  portait  (pie  l'un  des  ofli- 
ciers  placés  près  du  (lommandanl  Supérieur  de  Sebdou 
pourrait,  selon  le  cas,  être  détaché  à  El-Aricha,  oii  il  serait 
plus  spécialement  chargé  de  la  surveillance  et  de  l'admi- 
nistration des  [lani\an,  sous  la  haute  direction  du  Com- 
mandant Supérieur  de  Sebdou. 

Une  circulaire  du  (iénéral  commandant  la  Division 
d'Oran  prescrivit  (|ue  les  ofliciers  adjoints  du  Bureau  arabe 
de  Sebdou  et  les  interprètes  seraient  employés  alternati- 
vement à  Sebdou  et  à  El-Aricha,  de  sorte  qu'il  y  eut  en 
permanence,  à  datei-  du  19  déc(>mbre  1871^,  un  adjoint  et 
un  interprète  détachés  à  El-Aricha.  Après  trois  mois  de 
résidence  dans  ce  poste,  ils  rentraient  à  Sebdou  et  étaient 
remplacés  par  leurs  collègues. 


* 
*  * 


Ce  résumé  chronologique  (ail  rt\ssortir  nettement  quelle 
fut  l'importance  du  poste  d'El-Aricha  sur  la  soumission 
des  liamyan  et  le  rôle  heureux  joué  par  le  capitaine 
Mohammed  Ben  Daoud. 


CTÏAPTTBE  V 


FIN   DE   r/INSl  RRECTION    DES  OULAD  J^lDl  (  TIEIKH 
DIFFICULTES  AVE(    LE  (iOUYERNEWENT  .>IAUD(;V1\ 


Après  une  brouille  passagère  avec  son  frère  Si  Eddin 
et  ses  oncles,  Si  Kaddour,  réconcilié  avec  eux,  s'était  retiré 
à  El  Goléah.  Il  se  sentait  abandonné  par  la  plupart  de  ses 
adhérents  ;  sa  fortune  était  notablement  diminuée  par  les 


UOCUMENTS  POUR  SERMH  A  l'iIISFOIRK  DES  HAMYAN      297 

razzias  iinpoilaiilcs  opriécs  sur  x-s  biens.  Aussi  avail-il 
songé  à  l'aut'  lic  iiou\*'au  des  oUrcs  de,  sounii.sssion  ;  uiais 
il  avail  compris  <|uc  I  auloiilô  Irauviiist;  ne  sciait  plus  dis- 
poscc  à  se  laisser  jouer,  rourlanl  les  délégués  des  Oulad 
Sidi  Clhcikh  Chcraga,  sous  la  direction  de  Si  Kddiii,  airi- 
vcrent  à  Alger  le  \  janvier  \f^~[\  ;  ils  \eiiaicnt  d'Oian  où  le 
(Jénéral  connnandanl  la  l)i\i>ioii  lem'  avait  notilié  les 
conditions  exigées  [)our  obtenir  1  aman,  lis  rct<juriièrenl  à 
.Mi'llili  [)our  les  faire  connaître  à  lems  j)arlisans.  Un  délai 
de  trois  mois  lem  tul  accordé  pour  j)rcndrc  une  décision, 
(lomine  les  insurgés  de  la  province  de  Constantine,  réfu- 
giés également  à  l"!l  (ioléah,  axaient  iini  pai'  faiie  ({uebpie 
peu  cause  commune  avec  les  rebelles  du  Sud-Ouest,  une 
colonne  expéditionnaire  sous  les  ordresdugénéial  de  Galli- 
fet  marcha  sm-  celte  oasis.  Elle  y  arri\a  le  i>/|  janvier  et  fut 
accueillie  avec  enthousiasme  par  les  Arabes  sédentaires. 
Clelfe  opération  obligea  Si  Kaddour  à  se  rendre  au  Gourara 
où  il  attendit  le  résultat  des  négociations  entamées  par  son 
frère  ;  le  bruit  courut  qu'il  cherchait  à  se  rapprocher  des 
Doui  Menia.  ^éanmoins  les  caravanes  parties  pour  Figuig 
et  le  Gourara  ne  furent  pas  inquiétées  ;  les  sokhars  venus 
de  ce  point  rapportèrent  que  Si  Kaddour  était  campé  à 
l'Ouest  d'El  Mguiden.  Le  délai  fixé  expiré,  Si  Eddin  adressa 
(9.1  mai)  au  Gouverneur  Général  une  lettre  par  laciuelle  il 
l'informa  que  ses  gens  ne  s'étaient  pas  encore  décidés, 
mais  que,  lui,  persistait,  pour  son  propre  compte,  dans 
ses  intentions.  Lue  lettre  d'aman  lui  fut  adressée  pour 
l'autoriser  à  effectuer  son  retour  sur  notre  territoire. 

Les  Rezaïna  cherchèrent  cette  même  année  à  faire  défec- 
tion; mais  ils  en  furent  empêchés  grâce  aux  mesures  prises 
à  temps  par  lautorité  militaire  :  l'agha  de  Saïda,  Kaddour 
ould  Adda  et  les  caïds  des  llassasna,  à  la  tète  d'un  gonm 
de  loo  chevaux,  leur  barrèrent  la  route  du  Sud. 

L'ex-agha  des  Hamyan,  Si  Sliman  ben  Kaddour.  (]ui 
s'était  retiré  dans  le  Tell,  fut  repris  de  nouveau  par  son 
humeur  aventuieuse.  Avec  sa  famille,  il  disparut  au  .Maroc. 
Il  était  facile  de  prévoir  (pie  ce  tempérament  actif  ne  pour- 
rait s'éteVniser  dans  un  repos  incom|)atibIe  avec  son  carac- 
tère. Get  incident  causa  une  vive  émotion  parmi  les  indi- 
gènes. On  racontait  également  que  Bon  Ghoucha  avait  fait 
des  démarches  auprès  des  Oulad  Sidi  Cheikh  poui-  les  auK^- 
ner  à  agir  contie  nous  de  concert  avec  lui. 

C'est  sur  ces  incidents  que  se  termina  l'année  1878. 


20 


298       DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'iIISTOIRE  DES  HAMYAN 

Au  mois  de  mars  i<S7/t,  Si  Slimaii  tomba  tout  à  coup  sur 
nos  tribus  campées  aux  environs  de  l'oued  Cheriàa  et  les 
razzia  ;  mais  nos  gounis  lancés  à  sa  poursuite  l'alleignirent 
à  iNefich  et  lui  tuèrent  trente-huit  cavaliers,  parmi  lesquels 
Si  Maamar  ben  Cheikh,  redevenu  notre  adversaire  ;  Si  Sli- 
man  fut  blessé  et  son  convoi  capturé. 

A  leur  tour,  les  llamyan,  conduits  par  le  capitaine  Ben 
Daoud,  se  lancèrent  sur  les  douars  ennemis  campés  à  la 
frontière  du  Maroc  et  lirent  sur  eux  un  butin  considérable. 

Dans  le  courant  de  la  même  année,  le  bruit  d'un  voyage 
de  l'Empereur  du  Maroc  jeta  la  perturbation  parmi  les  tri- 
bus qu  il  devait  visiter  dans  le  sud-est  de  son  empire  ;  l'agi- 
tation gagna  les  Hamyan  dont  ([uelques  tentes  partirent  en 
dissidence.  Arrivées  à  iNaama,  elles  rebroussèrent  chemin 
et  ne  persévérèrent  pas  dans  leur  projet  dont  elles  redou- 
taient les  conséquences.  Elles  rentrèrent  dans  leurs  tribus, 
abandonnant  Cheikh  ould  Boubekeur  et  Kaddour  ben 
Allah  qui  les  avaient  entraînées. 

Ces  succès  furent  complétés  par  l'habile  intervention  du 
chérif  d'Ouezzan,  Moulay  Abdesselem,  qui  amena  Si  Sli- 
maii  à  accepter  d'établir  ses  campements  aux  environs  de 
Fez  (1876).  Si  Kaddour  ben  Hamza,  de  son  côté,  toujours 
retiré  sur  l'oued  Cuir,  s'en  tenait  pour  le  moment  aux  offres 
de  soumission  (|ue  Si  Eddin  avait  faites  au  nom  de  ses  par- 
tisans ;  il  ne  fallait  pas  s'illusionner  sur  leur  sincérité. 

Jusqu'alors  le  Gouvernement  du  Maroc  n'avait  jamais 
cherché  à  s'appuyer  sur  les  termes  du  traité  de  i845  pour 
adresser  des  revendications  au  sujet  des  Hamyan  Djemba 
qui  avaient  été  reconnus  Marocains.  Au  cours  de  cette 
insurrection  nous  avions  été  amenés  à  différentes  reprises 
à  faire  appel  à  l'autorité  du  Sultan. 

On  lui  avait  signalé  les  méfaits  commis  par  ses  sujets, 
on  lui  réclama  ensuite  des  réparations  pécuniaires  ;  et  on 
l'amena  ainsi  peu  à  peu  à  se  mêler  de  la  vie  des  populations 
qui  lui  avaient  toujours  échappé.  En  jésumé  on  lui  rap- 
I)ela  qu'il  existait  une  convention  de  Ealla  Marnia  qui  ré- 
glait nos  relations  de  voisinage.  Ce  changement  d'attitude 
décida  le  Maroc  à  utiliser  à  son  tour  les  clauses  qu'elle 
contenait. 

Ce  revirement  dans  la  politique  du  Maghzen  marocain  se 
produisil  en  1876,  à  la  suite  du  voyage  fait  à  Oudjda  par  le 
sultan  Moulay  Hassan.  Des  cavaliers  marocains,  poiteurs 
de  lettres  de  leur  souverain  furent  bientôt  signalés  chez  les 


DOCUMENTS  POl'H  SKR\  IH  A  l/lIlS  r  Ol  IU-;  DKS  IIAMYAN      2!>i) 

IhiniNiiii  hjcinhii.  l/('iicr<^i(iii('  i/ilri\ciili(»ri  de  notre  Mi- 
iiislrc  fi  \'v/.  ohli^L^ca  MoiiliiN  Hassan  à  ordo/iiicr  leur  ia()|)('l. 
Mais  la  louriini'c  (iiic  pril  (('Ile  allaiic  nous  cunli  ai<.Miil,  à 
notre  loni'.  à  ne  [)liis  conipicndi  ••  an  nonibro  de  n(»s  admi- 
nistrés (|n('  ((Mix  des  Dji'inha  (|ni  conlinncraiciit  à  vivic 
snr  notre  tcniloirc.  ('/était  donner  nn  j)r('t('xle  à  cette  frac- 
tion ponr-  écliaijper  à  notre  autoiilé.  Klle  ne  s'en  fit  pas 
faute  et,  étant  donné  nolic  indécision,  elle  avait,  il  faut 
l'avouer,  des  raisons  pour  agir  ainsi. 

Le  malaise  s'accentua  '  et  gagna  tous  les  Ilamyan.  En 
effet,  les  Oulad  Sidi  Cheikh  Cheiaga  reprenaient  leurs 
incursions  sui"  les  Hauts-Plateaux,  aidés  par  les  tribus  ma- 
rocaines. 11  fut  interdit  à  nos  Iribus  d'exercer  aucune  repré- 
saille  contre  leurs  agresseurs.  C'était  tiansformer,  par  une 
simple  décision  administrative,  les  habitudes  séculaires  de 
nos  nomades  qui  ne  virent  là  qu'une  marque  de  faiblesse. 
Aussi  |)rolitèrenl-ils  de  la  première  occasion  pour  mani- 
fester leur  mécontentement. 

A  la  suite  d'un  incident  qui  eut  lieu  à  El-Aricha  (octo- 
bre 1876)  (Mitre  un  officier  du  Bureau  arabe  et  El  lladj  El 


I  Au  c.mis  (In  voNM^n-  <lu  .SiiIImm  .In  M;iror  ;,  Im  rrunticT,-  nlgri-ionno  pon- 
ilaiil  l'i.nnée  iSh;,  um  niiilnis.-  coi.s.lnnt  n';iv;.i|  rossé  dVxislor  (ii.ns  l.-s  relalioiis 
exislMiiles  rnlr,.   I.-   CI,,!    ,1..   posl,.  .i'Kl-AncI,:,   et    les   (hefs   Hnniynn. 

An  mois  .i\>nnl,  les  D.jonil.a  soumis  cU.ienI  allés  opérer  uue  ra/.zia  chez  les 
Amour  n)alt:ré  la  .léfeiise  qui  leur  eu  avait  été  faite  par  le  lieutenant  Saintl 
.lames. 

A  la  lin  .le  septembre  des  .liflieuilés  surgirent  au  sujet  de  la  mise  dans  les 
silos  dl-1-Arieiui  des  grains  formant  les  approvisionnements  des  Hamyan. 
Ces  «lerniers  tentèrent  d'échapper  à  .-.'Ite  mesure  de  précaution  destinée  à  em- 
pêcher les  .léparts  en  .lissi.lene.-.  L.'urs  caï.ls  les  soutinrent  en  disant  que  les 
grains  leur  étaient  Nolés  dans  ces  silos  et  que,  par  suite,  leurs  gens  refusaient 
lie  leur  obéir. 

En  cette  occasion,  le  caï.l  FI  Hadj  Lazereg  ould  Othmane,  des  Sen.lan,  se 
lit  remarquer  par  son  ins.ilen.e  et  dut  être  momentanément  emprisonné.  D'an- 
tre part,  des  intrigants  répan.lirent  le  bruit  que  les  dissidents  avaient  obtenu 
•lu  Sultan  la  promesse  que  les  Ilamyan  .)l)éiraient  bientôt  à  son  autorité,  que 
Ch.'ikh  ould  Houbekenr  deviendrait  le  chef  des  Djemba,  et  qu'KI  lladj  Ahmed 
oul.l  Mebkhoiit,  frère  du  caïd  des  Oïdad  Mansourah,  FI  Hadj  Ilabih  oul.l 
Mehkhout,    serait    n.mimé    agha    des    Chafaa. 

Kl  lladj  Ahmed  ould  Mehkhout  (décédé  en  i.,!:")  comme  mufti  à  Méchéria) 
continuait  sans  cesse  ses  intrigues,  poussait  les  Hamyan  à  s'insurger  contre 
l'autorité   de   son    frère,   et    leur   promettait    toute    la    bienveillance   du    Sultan. 

Ces  procé.lés  avaient  .-u  le  duti  de  surexciter  l'esprit  .lu  caïd  El  Hadj  El 
Habib  .luld  Mebkhout  «lui,  d'autre  part,  voyait  h^s  Hamyan  profiter  de  notre 
iu.lécision  pour  u'.)béir  à  personne,  (l.c  plus  li.l.'lc  de  u,,s  serviteurs,  FI  Ha.lj 
Kaddour  .nild  Hou  Feldja,  caïd  des  liekakra,  .lev.nu  d.puis  agha  honoraire  et 


300       DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

Habib  ould  Mebkhoul,  caïd  des  Oïdad  Mansouiah,  ce  chef 
indigène  fit  défection  et  entraîna  avec  lui  un  grand  nom- 
bre de  tentes,  tant  des  Chafaa  que  des  Djemba.  La  nouvelle 
des  événements  qui  se  déroulaient  en  Turquie  d'Emope 
augmentait  d'ailleurs  encore  l'agitation. 

Pour  rétablir  l'ordre,  une  colonne  conunandée  par  le 
général  Flogny,  de  la  Subdivision  de  Tlemcen,  et  forte  de 
3.4oo  hommes  fut  mise  en  mouvement  dans  la  province 
d'Oran.  Le  i5  février  1877,  elle  partit  d'El-Aricha  et  alla 
visiter  les  ksour  du  Sud-Ouest,  les  deux  Chellala,  Asla, 
Tiout  et  les  deux  Moghar.  Cette  démonstration  arrêta  les 
projets  des  fauteurs  de  désordres.  El  lladj  El  Habib  ould 
iMebkhout  et  Djelloul  ould  Lakhdar,  des  Oulad  Messaoud, 
rentrèrent  en  personne,  mais  la  plupart  des  tentes  restèrent 
en  dissidence.  Il  fallut  pour  les  ramener  le  coup  de  main 
de  Tanekh  (loufa,  en  août. 

La  règle  précédemment  adoptée  en  ce  (jui  concernait  les 
tribus  pillardes  du  Maroc  et  (jui  substituait  l'action  diplo- 
matique à  l'action  guerrière,  non  seulement  indisposait 
contre  nous  les  Hamyan,  mais  n'était  pas  faite  pour  mettre 
un  terme  aux  agressions.  C'est  ainsi  qu'en  janvier  1878, 


assassiiu''  ;i  iVlécli(''ri:v  im  n,)i/i,  iivail,  \e  .10  septembre  1876  offert  sa  démission 
parce   (pi"il   ne  se   sentait   pas   snfdsamnient    soutenu.) 

Un  événement  ])articulier  amena  le  départ  en  rlissidence  du  caïd  El  Hadj  El 
Habib  ould  Mebkiiout  (devenu  pins  lard  a" ha  des  Cliafaa,  puis  déecdé  comme 
bach  agha  honoraire  en   1912). 

Le  iS  octobre  1876,  El  Hadj  El  Habib  oïdd  Mebkbout  se  rendait,  avec  plu- 
sieurs de  SCS  parents,  dans  la  maison  d'un^  commerçant  israélite  d'El-Ariclia 
nommé  Simon  I)ray,lui  eonleslait  l'exactilnde  d'une  facture,  puis  le  rouait  de 
coups  et  le  menaçait  de  mort.  A  la  >uite  de  la  plaiide  portée  par  Simon  Dray,le 
lieutenant  Brager,  chef  du  |)oslc  d'El-Aricha,  faisait  comparaître  El  Hadj  El 
Habib  ould  iMebkhoni  qui  se  |>résentai1  accompagné  de  deux  de  ses  parents, 
El    Hadj    Abdelkader  el    El    iladj    Mahi. 

Au  cours  de  rinlerrogaloire  (pii  tut  fait,  El  Hadj  El  Habib  oïdd  Mebkhout , 
craignant  d'être  arrêté,  saisit  son  pistolet,  bouscula  le  greffier  et,  suivi  de  ses 
deux  parents,  renversa  la  sentinelle  de  la  porte  extérieure  après  avoir  tiré  sur 
elle   un   coup   de  feu   sans   l'atteindre. 

Le  lieutenant  lîragcr,  qui  l'interrogcail ,  prit  son  revolver  et,  à  son  tour, 
tira  sur  El  Hadj  El  Habib  otdd  Mebkhout  sans  le  blesser.  Cet  officier  fui 
immédiatement  couché  en  joue  jiar  Kl  Hadj  Abdelkader.  H  voulut  tirer  sur 
cet    indigène,  mais  son  revolver  rata. 

i;i  Hadj  El  Habib  ould  Mebkhout  el  ses  conipagu'ins  rejoiguiieut  un  gnmpe 
de  cavaliers  qui  stationnaient  dans  le  village  et  s'enfuirent  vers  l'Ouest.  Avant 
de  partir,  El  Hadj  El  Habib  avait  crié  au  lieulenant  Hrager  :  «  Sacré  bon  Dieu 
(eu  fraiiçai>)  nous  t'i'U  donnerons,  de  la  pou. Ire  !  Va  te  ])lain(lre  à  ton  gé- 
néral. » 


DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  T.'lMSTOIRE  DES  HAMYAN      301 

le  Zc^doii  vint  ;iltii(|ncr  nos  Iribiis  ;  bion  que  ballii  i\  VA 
\j2:iiriir,  il  n'en  cmiiiciia  pas  moins  iirif  ^Tatidc  (|iiarilil('' 
de  moulons  el  de  chameaux. 

Pour  é\it(>r  des  complications  di|)Iomali(pi(>s  em(»pé"n- 
nes,  on  \oulnl  régler  ces  questions  par  des  indemnités  au 
pi'ofil  dvs  victimes  ;  le  (^ouveiriement  maiocain  înil  d'au- 
lanl  plus  d'emiiressemenr  à  les  payer  que  celte  jxtlitique 
lui  |»einiellail  ainsi  de  faire  acte  de  souveiainelé  sui\des 
tiibus  (pii  lui  avaieni  toujours  échappé  ;  mais  il  lui  était 
inqK)Ssil)le  d'empé(dier  le  letour  de  tous  ces  méfaits. 

Nos  indigènes,  de  leur  côté,  constataient  que  nos  rap- 
ports avec  le  Maroc  s'étaient  transformés  et  que  loin  d'im- 
poser nos  volontés  comme  par  le  passé,  nous  acceptions 
maintenant  de  discuter  sur  le  moindre  incident.  Ils  sui- 
vaient de  f)rès  cette  évolution  à  laquelle  ils  se  trouvaient  les 
f)rcmiers  intéressés  et  où  ils  estimaient  aussi  que  notre 
prestigfe  était  diminué. 

T.es  Marocains  n'attaquaient  pas  seulement  nos  noma- 
des. Le  17  septembre  1879,  un  rezzou  d'une  quarantaine 
de  cavaliers  franchissant  la  frontière  à  El  Maofoura,  tomba 
entre  El-Aricha  el  Sebdou  sur  un  convoi  de  quatre  pro- 
l(^n<>-es  du  train  des  équipaoes  conduit  par  huit  soldats  et 
un  maréchal-des-logis  :  deux  hommes  furent  tués.  T-e 
(Y)mmandant  du  poste  d'El-Aricha,  ir)fornié  trop  tardive- 
ment, n'arriva  que  pour  ramener  à  son  camp  les  cadavres 
mutilés. 

Un  mois  après,  une  colonne  commanclée  par  le  ofénéral 
T-ouis,  fut  charofée  de  parcourir  le  pavs, entre  Tlemcen  et 
Sebdou  et  la  frontière  du  Maroc  el  de  s'opposer  à  toute 
a»r(>ssion  ;  il  était  éofalement  décidé  que  sur  un  point  du 
parcours,  le  général  recevrait  les  excuses  du  représentant 
de  l'Emperem'  du  Maroc,  ainsi  que  la  somme  convenue 
poui"  indoînniser  les  familles  des  victiiiies.  Cette  rencontie 
eut  lieu  |)iès  de  Sebdou  :  Si  Xbdesselaam  Baïes  exprima  les 
r(>grels  du  Sultan  et  remit  la  somme  de  19.000  francs. 

Cette  démarche  n'empêcha  pas  les  Zona  Cheraga,  sous 
la  conduite  de  Si  Eddin,  de  venir  razzier  en  décembre  un 
millier  de  chameaux  appartenant  aux  mokhazenis  des  Der- 
laga  et  il  falhit  négocier  à  nouveau  la  restitution  de  ces 
animaux  avec  un  cousin  du  Sullan  envoyé  à  cet  effet  à 
Oran. 

On  envoya  au  printemps  de  t88o  le  lieutenant  de  Cas- 
tries  avec  quelques  goums  sur  les  Hauts-Plateaux  ;  il  réus- 


302      DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

sit  à  ramener  un  instant  le  calme,  le  Gouverneur  Général 
lui  témoigna  sa  satisfaction  dans  les  termes  suivants  : 

<(  J'apprécie  à  leur  valeur  les  résultats  obtenus  par  cet 
<(  ofTîcier  dans  sa  mission,  résultats  (jue  vous  résumez  par 
<(  la  remise  en  main  du  pays  des  ITamyan,  par  l'affirma- 
((  tion  de  votre  autorité  dans  cette  région  des  ksour.  Je 
((  vous  prie  de  vouloir  bien  témoigner  à  Monsieiu'  le  lieu- 
«  tenant  de  Castries  toute  ma  satisfaction  pour  la  vigueur 
«  et  le  talent  dont  il  a  fait  preuve  en  ces  circonstances.  » 

Dans  l'allocation  des  indemnités  qui  furent  alors 
allouées,  les  Hamyan  Djemba  furent  systématiquement 
exclus.  Cependant,  à  la  suite  de  prétentions  présentées  par 
l'amel  d'Oudjda  relativement  à  l'observation  du  traité  de 
i8/i5,à  leur  sujet,  ils  avaient  déclaré  qu'ils  désiraient  rester 
Algériens.  L'autorité  supérieure  ayant  observé  le  mutisme 
le  plus  complet,  ces  tribus  ne  comprirent  pas  pourquoi 
nous  les  abandonnions  tout  d'un  coup  après  les  avoir  si 
longtemps  accueillies.  Elles  nous  supposèrent  l'intention 
de  les  livrer  au  Sultan  ;  elles  préférèrent  prendre  les 
devants  et  se  réclamèrent  de  la  nationalité  marocaine. 
Leur  empressement  fut  d'autant  plus  grand  que  le  Général 
commandant  la  Division  d'Oran  avait  prescrit  d'arrêter  les 
caïds  El  Hadj  Lazereg,  des  Sendan  et  El  Badaoui,  des 
Meghaoulia. 

Pourtant  dès  1878,  le  général  Gérez,  à  qui  le  bien-fondé 
des  griefs  des  Hamyan  n'avait  pas  échappé,  avait  fait  obser- 
ver qu'une  telle  situation  ne  pouvait  se  prolonger  ;  il  nous 
fallait,  d'après  lui,  poursuivre  directement  par  nos  moyens 
d'action  les  modifications  de  froritière  devenues  nécessaires 
pour  assurer  le  rétablissement  de  notre  autorité. 

Pour  mettre  un  terme  à  ces  difficultés,  M.  Albert  Grévy, 
gouverneur  général  de  l'Algérie,  pensa  trouver  le  remède 
dans  l'installation  d'un  nouveau  poste  permanent  dans  le 
Sud  et  dans  une  mesure  dont  il  prescrivit  l'application 
immédiate.  Elle  consistait  à  considérer  dorénavant  comme 
frontière  hypothétique  la  ligne  qui  joindrait  le  Teniet  es 
Sassi  à  un  point  situé  à  égale  distance  entre  Ich,  ksar  maro- 
cain et  le  dernier  ksar  algérien  désigné  dans  la  convention 
de  t8/i5. 

La  création  d'un  poste  ne  pouvait  avoir  qu'un  heureux 
résultat  en  nous  donnant  une  action  directe  sur  des  popu- 
lations sur  lesquelles  nous  n'avions  jamais  eu  qu'une 
action  éloignée.  En  outre,  l'inconvénient  grave  pour  les 


DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN      303 

troupes  d'avoir  à  fuiie  plusieurs  (Mapes  sans  eau  pour  aller 
(l"l'l-\iicha  aux  ksour  avait  déjà  l'ail  sonjjer  à  établir  uu 
j)Oste  à  Méchéiia.  On  jx-nsait  aussi  utiliser  ce  point  poui- 
y  {(lacer  à  dein(>ure  un  oHicier  des  Affaires  indijjènes, 
chargé  du  coniiuanderuent  des  llainyau. 

I.e  projet  n'aboutit  pas  parce  que  l'on  considérait  (juune 
^rarnison,  même  de  deux  compagnies  de  tirailleurs  et  de 
cavaleiie,  nauiait  (pi'un  rayon  d'action  tiès  limité  et  (pie 
son  ravitaillement  j)ourrait  devenii  diflicile.  Une  auti'e 
cause  fit  met  Ire  en  suspens  l'exécution  de  cette  idée  au 
point  de  \  ne  (]c>  affaires  indigènes.  On  considéra  que  le 
ravitaillement  de  la  nouvelle  place  s'opérerait  plus  faci- 
lement par  na>a  (pie  par  Sebdou  ou  El-Aricha,  ce  qui  amè- 
nerait à  l'attacher  à  ce  premier  cercle  le  nouveau  poste.  On 
se  décida  à  attendre  pour  créer  Méchéria  d'avoir  des  voies 
plus  sûres  et  {)lus  rapides. 

T.es  nouvelles  défections  des  Hamyan  et  l'insurrection  de 
Bou  Amama  allaient  démontrer  l'urgence  de  l'application 
de  ces  mesures. 


(A  suivre.) 


COHTRIBUTION  A  L'ÉTUDE  DE  L'INDUSTRIE  PASTORALE 

EN     A-LOÉRIB 


DES  NAPPES  D'HflLFA  ET  DE  LEUR  ROLE  AU  PAYS  DU  MOUTON 


UTILISATION    DU     BOUSS    D  HALPA 


Tout  se  tient  dans  le  monde,  et  l'on 
peut  dire  que  la  loi  de  l'interdépen- 
dance est  une  loi  univei'selle.  Il  ne 
s'agit  que  de  dépister  les  liens,  les 
rapports  qui  existent  entre  les  fac- 
teurs en  apparence  les  plus  éloignés 
et  les  plus  étrangers  l'un  à  l'autre 
pour  en  déterminer  l'enchaînement. 

B,  D. 


Lorsque  l'on  parcourt  les  steppes  du  Sud  Oranais,  on  est 
frappé  par  la  nature  quasi  plane  du  sol  et  par  le  défaut  total 
d'abris  naturels.  Cependant,  en  examinant  les  choses  moins 
en  surface,  on  est  amené  à  subdiviser  les  aires  parcourues 
parles  troupeaux,  en  trois  zones  bien  distinctes: 

A.  —  Une  zone  immensément  étendue,  couverte  d'halfa. 
(D'après  M.  Trabut,  l'Algérie  posséderait  5  000.000 d'hectares 

d'halfa.  Le  département  d'Oran  seiil  aurait  une  mer  d'halfa, 
s'étendant  sur  400  kilomètres  de  long  et  170  de  largeur  d'un 
seul  tenant.  On  estime  qu'un  hectare  de  steppe  renferme 
de  3  à  5,000  pieds  ou  souches,  rendant  500  à  l  .000  kilogrammes 
de  feuilles  sèches.  La  production  totale  de  l'Algérie,  en  feuilles 
sèches  serait  de  400.000  tonnes.  Ces  chiffres  nous  serviront 
plus  loin  pour  nos  calculs.) 

B.  —  Une  zone  de  moindre  tenant  n'offrant  pas  la  continuité 
de  la  précédente,  ni  sa  densité,  ni  sa  capacité  d'abri,  à  l'égard 
du  sol  peuplée  exclusivement  de  chih  {Arlemisia  herba  alha). 

C.  —  Enfin  une  zone  étendue,  ne  présentant  aucune 
végétation  vivace,  à  sol  complètement  découvert,  parsemée 
de  plantes  herbacées  accrochées  au  sol  au  hasard  de  la 
direction  des  vents  et  des  obstacles  opposés  à  l'errance 
désordonnée  des  graines  roulées. 


coNTrMBunoN  A  l'éti'dr  de  l'inui'stjuk  305 


La  Zone  Halfatière 

A  la  surface  des  Hauts-Plateaux  Sud  Oranais  où  l'action 
des  vents  s'exerce  avec  toute  sa  violence,  la  graminée  halfa 
(Stipa  tenacissima)  est  parvenue,  au  cours  de  nombreux 
siècles  d'adaptation  à  conquérir  la  fixité  nécessaire  et  à  prendre 
définitivement  possession  du  soi.  Admirablement  armée  pour 
lutter  contre  la  déshydratation  en  été  et  contre  les  congélations 
en  hiver,  renforcée  en  quelque  sorte  par  sa  richesse  en 
cellulose,  ayant  presque  concentré  toute  sa  vie  dans  sa  portion 
aérienne,  dans  ses  feuilles,  réduisant  ainsi  ses  racines  à  un 
rôle  secondaire,  la  plante  halfa  s'est  multipliée  à  tel  point  que 
ses  peuplements  recouvrent  d'immenses  étendues  dénommées 
si  justement  mers  d'IiaJfa. 

Le  sol  y  est  perméable  (bled  r'Iida)  ;  les  eaux  de  pluie  s'y 
collectent  parfois,  mais  n'y  stagnent  jamais  longtemps  en 
raison  de  leur  infiltration  rapide  dans  le  sous-sol.  Les  trombes 
qui,  après  les  chutes  pluviales  abondantes,  balayent  en  nappes 
déferlantes,  les  régions  à  sol  dur  (bled  r'guigua  ou  bled 
meurte)  ainsi  que  les  îlots  limoneux  (nappes  de  chih)  ne  se 
produisent  pas  en  région  d'halfa.  Et  l'on  comprend  que  le 
nomade  considère  les  régions  haltatières  comme  un  bled 
providentiel  où,  en  cas  de  tourmente  (zerra)  il  pourra  se 
réfugier  avec  son  bétail.  Aussi,  lorsque  le  temps  menace  ou 
que  les  frimas  s'annoncent,  les  pasteurs  indigènes  cheminent- 
ils  à  proximité  des  peuplements  d'halfa. 

Nous  avons  eu  l'occasion  de  faire  ressortir  que  les  abris 
artificiels  ne  sont  susceptibles  de  jouer  un  rôle  efficace,  en 
région  de  parcours,  que  si  les  troupeaux  peuvent  s'y  rendre  à 
n'importe  quel  moment  et  oîi  ils  pourront  y  trouver  refuge  en 
cas  d'alerte;  d'où  la  nécessité  d'en  multiplier  le  nombre  en  tous 
sens  et  de  les  situer  à  peu  de  distance  les  uns  des  autres.  Ces 
conditions,  au  point  de  vue  économique,  sont  impraticables. 
Mais  les  nappes  d'halfa,  par  leur  immense  étendue,  par  leur 
continuité  surtout,  réalisent  les  desiderata  que  les  abris 
artificiels,  même  en  nombre  considérable,  ne  sauraient  jamais 
combler.  Elles  sont  comme  une  forêt  illimitée,  en  boidure  de 
laquelle  vivent  gens  et  bêtes,  et  sous  les  feuilles  de  laquelle,  à 
tous  moments  ils  peuvent  s'abriter  en  cas  de  danger. 

Les  animaux  qui  mènent  une  existence  fort  près  de  l'état  de 
nature,  et  même  ceux  qui  vivent  à  l'état  libre,  ont  bien  été 
armés  par  la  sélection  naturelle,  au  cours  des  âges,  pour  lutter 
contre  les  intempéries  ;   mais  les  moyens  naturels  dont  ils 


306  CONTRIBUTION    A    l'ÉTUDE    DE    l'iNDUSTRIE 

disposent  ne  leur  suffisent  pas  toujours  et  ils  sont  amenés 
instinctivement  à  utiliser  au  maximum  les  avantages,  même 
infimes,  que  leur  ofTre  parfois  le  milieu  ingrat  où  ils  évoluent. 
En  régions  riches  en  accidents  naturels  de  toute  nature 
(forêts,  bouquets  d'arbres,  anfractuosités  rocheuses,  collines 
ou  montagnes,  etc.),  gens  et  bêtes  sont  assurés  de  trouver,  le 
cas  échéant,  l'abri  utile;  mais  dans  les  steppes  du  Sud  la 
configuration  du  sol,  la  morphologie  de  la  végétation  font  que 
les  abris  naturels  s'offrent  sous  l'aspect  le  plus  inattendu 
et  voilà  qui  explique  pourquoi,  après  un  examen  rapide, 
l'observateur  qui  parcourt  les  steppes  du  Sud,  les  croit 
déshéritées  et  dépourvues  de  tout  abri  ;  c'est  que,  venant  de 
régions  favorisées,  il  a  dans  l'œil  l'image  des  forêts,  des 
taillis,  des  grottes,  et  son  regard  ne  rencontre  plus  rien  de 
pareil.  Et  pourtant  ces  nappes  halfatières  sont  bien  le  pendant 
des  forêts  telliennes  ;  elles  en  possèdent  tous  les  avantages.  Il 
ne  s'agissait  donc  que  de  les  découvrir  et  d'en  utiliser  toutes 
les  ressources.  Le  nomade  l'a  reconnu  depuis  longtemps  et 
c'est  tout  naturellement  qu'il  s'enfonce  avec  ses  troupeaux 
sous  le  fouillis  des  feuilles  d'halfa  (irellad)  en  vertu  de  ce  dicton  : 

El  halfa  r'ta,  d'fa  ou  oufa. 

L'halfa  est  un  abri  qui  chauffe  et  qui  nourrit. 


* 
*  * 


Pendant  les  tourmentes,  et  lors  de  la  mauvaise  saison,  les 
gens  et  les  bêtes  surpris  en  terrain  découvert  (bled  r'guigua 
ou  bled  meurte)  courent  de  graves  dangers.  Les  précipitations 
pluviales,  en  peu  de  temps,  déterminent  la  formation  de 
nappes  d'eau  qui  déferlent  avec  violence  emportant  tout  sur 
leur  passage.  Si  le  vent  souffle,  le  refroidissement  rapide 
amène  l'engourdissement  et  fréquents  sont  les  désastres  qui 
se  traduisent  annuellement  par  la  perte  de  vies  humaines  et 
même  de  troupeaux  tout  entiers. 

A  l'abri  des  touffes  d'halfa,  rien  de  pareil  ne  se  produit  ; 
l'action  des  vents,  des  eaux  et  des  neiges  est  brisée  par  le 
rideau  que  l'halfa  leur  oppose. 

Mais  pour  que  le  refuge  des  nappes  d'halfa  remplisse 
pleinement  et  efficacement  son  rôle,  il  faut  qu'il  demeure 
en  possession  de  sa  conti^^uité,  de  son  touffu,  de  sa  luxuriance 
si  l'on  peut  dire. 

Quelle  protection  offrirait  la  plus  belle  forêt  dont  on  aurait 


h 


CONTRIBliTION    A    L'iiTlDE    DE    l/lNnUSTRIE  307 

émondé  les  branchages  pour  n'en  laisser  que  les  troncs V 
De  même  quelle  p^'otection  offrirait  le  plus  beau  peuplement 
d'halfa  du  jour  où  par  Varrachar/e  industriel  de  ses  feuilles  on 
aurait  réduit  sa  capacité  d'abri  à  moijis  que  rien,  en  la 
faisant  choir  d  l'aspect  rabougri  d'une  nappe  de  chih  ?  Il  faut 
donc  lie  toute  riécessité  conserver  à  la  mer  d'halfa  sa  densité, 
son  fouillis  inextricable. 

Que  devient  une  zone  d'halfa  exploitée  industriellement? 
Il  suffit  d'y  jeter  un  simple  coup  d'œil  ;  on  ne  peut  plus 
la  comparer  à  une  mer  d'halfa  ;  les  feuilles  n'ont  ni  la 
longueur,  ni  la  densité  qu'elles  offriraient  sur  des  souches 
vierges.  Les  pieds  sont  bien  nelU-ment  dénombrables  et  la 
capacité  d'abri  étant  annulée,  la  zone  halfa  qui  devait  être 
bled  r'iida  devie^it  bled  r'guigua  ou  meurte,  incapable  d'offrir 
le  moindre  refuge  à  un  seul  mouton.  Tandis  que  les  troupeaux 
cheminant  en  zone  vierge,  disparaissent  littéralement  sous  les 
touffes  d'halfa.  En  zone  exploitée  ces  mêmes  troupeaux  se 
trouvent  à  découvert  comme  en  terrain  nu  ou  en  zone  à  chih. 

Les  feuilles  acquièrent  peut-être  des  qualités  d'ordre 
industriel,  mais  sous  le  rapport  des  qualités  qui  intéressent 
l'élevage  du  mouton,  tout  se  passe  comme  si  le  peuplement 
ainsi  réduit,  avait  complètement  disparu. 

Pour  que  l'halfa  soitr'ia  et  d'fa,  c'est-à-dire  pour  qu'il  puisse 
abriter  et  chauffer,  il  faut  empêcher  qu'on  l'émonde,  qu'on 
l'élague  de  ce  qui  lui  tient  lieu  de  branches,  qu'on  n'arrache 
pas  ses  feuilles. 

Il  appartiendra  à  l'organisation  future  qui  aura  la  charge  de 
surveiller  les  nappes  halfatières,  d'utiliser  l'incinération 
opportune,  ou  tout  autre  moyen  pour  vivifier  et  entretenir  la 
vitalité  des  nappes  ;  mais  l'arrachage  industriel  qui  conduit 
nos  souches  au  rabougrissement  et  nos  nappes  à  la  ruine, 
devra  être  proscrit. 

Capacité  Alimentaire  des  Nappes  Halfatières 

El  halfa  oufa. 
L'halfa  nourrit. 

Tous  les  ans,  au  printemps,  la  graminée  halfa  produit  des 
épis  qui,  en  été,  fructifient  Or,  on  sait  que  tant  que  les 
graines  n'ont  pas  été  formées  l'épi  possède  le  maximum 
comme  valeur  alimentaire.  Mais  dès  l'instant  où  les  graines  se 
sont  formées  l'épi  est  réduit  au  rôle  de  support  ;  c'est 
pourquoi  les  pailles  et  chaumes  sont  autrement  moins  nutritifs 


308  CONTRIBUTION    A    l'ÉTUDE    DE    l'inDUSTRIE 

que  les  grains.  Les  épis  de  l'iialfa  s'appellent  boitss  et  l'on  peut 
voir  dans  les  centres  comme  Méchéria,  Géryville,  Aïn-Sefra, 
les  petits  indigènes,  les  femmes  nomades  aller  cueillir  des 
bottes  de  ces  épis  pour  les  vendre  sur  les  marchés. 

Dans  le  bled,  en  tribu,  les  animaux  sédentaires  (chevaux, 
ânes,  mulets,  souvent  les  brebis  nourrices  tenues  momenta- 
nément en  stabulation),  reçoivent  chacun  une  poignée  de  bouss. 

Pratiquement,  une  botte  d'épis  d'halfa,  susceptible  de  tenir 
debout  dans  une  musette  ordinaire,  possède  une  valeur 
nutritive  égale  à  4  kilos  d'orge.  Elle  a  en  outre  l'avantage 
d'offrir  du  volume,  et  c'est  là  un  point  important,  car  une 
ration  ne  vaut  pas  seulement  par  sa  teneur  en  éléments 
nutritifs  mais  aussi  par  son  volume.  Et  cela  prouve  une  fois 
de  plus  combien  chimériques  sont  les  espoirs  de  remplacer  un 
jour  les  aliments  par  des  tablettes  minuscules  ou  par  des 
comprimés. 

En  outre  le  prix  de  revient  d'une  botte  de  bouss  ne  dépasse 
guère  0  fr  20  à  Ofr.  25  et  comme  elle  représente  la  ration 
journalière  complète  d'une  tête  de  bétail,  elle  est  donc, 
comparée  h  l'orge,  huit  fois  moins  onéreuse.  Mais  les  calculs  ne 
doivent  point  partir-  de  cette  base.  Le  houss  n'est  relativement 
cher  que  parce  qu'il  est  cueilli  par  quelques  mesquines. 
Et  comme  il  n'apparaît  qu'au  printemps  et  qu'en  cette  saison 
les  nomades  sont  rarement  dans  le  besoin,  la  quantité  apportée 
sur  les  marchés  est  forcément  dérisoire. 

Le  restant  de  l'année,  à  défaut  de  bouss,  les  indigènes  vont, 
aux  environs  des  centres  habités,  arracher  du  gueddime 
c'est-à-dire  le  chavme  ou  gaine  qui  recouvre  la  base  des 
feuilles  d'halfa.  Ces  chavmes  ont  l'aspect  jaunâtre  et  la 
consistance  des  racines  de  graminées  ordinaires  ou  des 
pailles.  Les  animaux  les  consomment  à  l'exclusion  des  feuilles 
d'halfa  qu'ils  se  contentent  de  mâchonner. 

Les  nomades  prétendent  que  ces  gueddime  ou  gaines  sont 
riches  en  matières  grasses  et  que  si  le  houss  permet  au  bétail 
de  faire  surtout  de  la  viande,  le  gueddime  permet  de  faire  de 
la  graisse.  Les  gaines  du  sen'ra  (fol  halfa)  ou  (Lggeum  spartum) 
ne  posséderaient  pas  la  même  valeur  alimentaire  que  les 
gaines  de  l'halfa  (Stipa  tenacissimn).  A  défaut  de  chaumes 
d'halfa,  le  bétail  qui  a  pu  se  rassasier  de  bouss  ferait  de 
la  graisse  avec  n'importe  quel  autre  fourrage.  Nous  citons  ces 
observations  émanant  des  nomades  pour  mémoire  seulement  ; 
l'expérimentation  et  l'analyse  chimique  peuvent  seules  les 
infirmer  ou  les  confirmer. 

Mais  ce  que  nous  devons  retenir  c'est  que  le  bouss  ou  épi  de 


coM'iuHi  iroN   A   i/i';ri  dp:   dk   r,'iM)rsri<iK  '509 

riialfa  vrai  constitue  un  aliment  de  premier  ordre  dont  la 
valeur  a  été  consacrée  par  la  pratique  séculaire  des  pasteurs 
nomades,  et  par  l'expérience  de  tous  les  jours.  Que  les 
nomades  n'aient  pas  songé  à  mieux  tirer  profit  d'une  telle 
ricliesse,  il  n'y  a  pas  là  de  quoi  nous  surprendre.  Les  na|)pes 
d'halfa  étant  immenses,  le  champ  de  cette  précieuse  graminée 
devenait  trop  vaste,  et  le  pasteur  se  contentait  de  mener  ses 
troupeaux  en  zone  chih  et  en  zone  meurte,  (juitle  à  fouler 
avec  son  bétail  les  mers  d'halfa  pour  utiliser  leur  capacité 
d'abri. 

Le  chameau,  le  cheval,  peuvent  s'attaquer  au  bouss,  en 
raison  de  leur  taille  ;  les  chèvres  se  dressent  aisément  sur' 
leurs  pieds  de  derrière,  le  mouton  seul,  lorsqu'il  est  talonné 
par  la  faim,  imite  la  chèvre  pour  manger  le  bouss,  ou  les 
sommités  épanouies,  lorsque  la  saison  est  avancée.  Quant  au 
berger,  il  ne  tente  aucun  effort  pour  améliorer  la  situation 
de  son  troupeau.  Il  se  contente  de  le  suivre  nonchalamment. 
11  ne  produit  en  réalité  un  peu  de  travail  que  lors  de 
l'abreuvement  quand  il  tire  l'eau  des  puits  à  l'aide  d'une  corde 
et  d'une  peau  de  bouc. 

Nos  éleveurs  nomades  ont  donc  à  leur  portée  un  champ 
immense,  peuplé  d'une  graminée  vivace,  qui  n'exige  aucun 
travail  du  sol,  aucun  semis,  qui  est  admirablement  adaptée 
au  milieu,  et  qui,  à  chaque  printemps,  donne  des  épis  d'une 
valeur  alimentaire  incontestable. 

On  estime  à  5.000.000  d'hectares  l'étendue  des  mers  d'halfa 
d'Algérie  ;  on  évalue  à  3.000  ou  5.000  le  nombre  de  pieds 
d'halfa  par  hectare  de  steppe.  En  bonne  production,  quatre 
souches  peuvent  donner  en  bouss  de  quoi  nourrir  une  tète  de 
bétail  pour  une  journée.  Il  est  donc  aisé  de  calculer  ce  que  la 
production  de  bouss  de  5.000.000  d'hectares  pourra  nourrir  en 
un  an.  On  arrive  au  chiffre  de  15,000.01)0  de  moutons  ou  tètes 
de  bétail.  Il  faudrait  que  l'halfa  puisse  tous  les  ans  donner 
sa  récolte.  Or,  il  est  avéré  qu'un  pied  d'halfa  menattar, 
c'est-à-dire  exploité  par  l'arrachage,  met  trois  à  quatre  ans 
avant  de  redonner  du  bouss.  Et  c'est  là  que  réside  l'intérêt  des 
halfatiers;  ils  préfèrent  les  plants  qui  n'ont  pas  fait  de 
«  roseaux  »,  c'est  ainsi  qu'ils  nomment  les  épis  ou  bouss 
lignifiés.  Or,  sous  le  rapport  élevage  des  ovins  l'intérêt  réside 
dans  les  touffes  des  halfas  non  exploités  (meharrerine)  où  l'on 
puisse  trouver  abri  et  où  la  production  du  bouss  soit  assurée 
tous  les  ans.  Et,  pour  réaliser  ces  conditions,  les  pieds  ne 
doivent  pas  être  dépouillés  de  leurs  feuilles,  Varracliage  doit 
être  interdit. 


310  CONTRIBUTION    A    l/ÉTUDE    DE    I.'iNDUSTRIE 

L'halfa  fourrager  devra  être  progressivement  substitué  à 
l'halfa  papyrogène. 

Si  l'on  supprime  l'exploitation  industrielle  des  halfas,  telle 
qu'elle  se  fait  encore,  on  privera  le  commerce  d'exportation 
de  l'Algérie  de  400.000  tonnes  de  ce  textile,  soit  environ 
8  à  9.000.000  de  francs  par  an.  D'autre  part,  on  enlève  à  une 
population  indigène  assez  nombreuse  et  besogneuse,  des 
ressources  régulières  sur  lesquelles  elle  compte  chaque  année 
pour  traverser  la  période  de  morte-saison  Juillet- Janvier.  Le 
trafic  des  chemins  de  fer,  le  charroi,  etc.,  y  perdront  aussi. 

Nous  n'en  disconvenons  pas  ;  mais  il  est  possible  de 
substituer  à  une  exploitation  ruineuse  à  tous  égards  et  dont 
l'étranger  seul  profite,  l'exploitation  avantageuse  d'une  matière 
plus  utile,  destinée  à  ne  pas  quitter  notre  colonie,  et  à  procurer 
en  même  temps  à  notre  élevage,  une  source  de  subsistance 
inestimable,  sans  pour  cela  léser  un  seul  instant  les  populations 
indigènes  dont  la  situation  est  évidemment  digne  d'intérêt.  Les 
nomades,  au  lieu  d'arracher  les  tiges  d'halfa,  se  borneraient  à 
cueillir  les  inflorescences  (bouss)  et  le  chantier,  qui  devra  être 
administratif,  le  lui  achèterait  comme  l'halfatier  achetait  l'halfa 
textile.  L'emmeulage  ou  l'ensilage  serait  adopté  et  les 
milliers  de  tonnes  de  ces  épis  remarquablement  alimentaires 
serviraient  à  parer  aux  crises  fourragères.  Les  points  d'achats 
demeureraient  les  mêmes  que  ceux  assignés  pour  f  exploitation 
des  feuilles. 

Hâtons  nous  d'ajouter  que  la  cueillette  du  bouss  ne 
préjudiciera  en  rien  au  plant  qui  conservera  sa  luxuriance,  sa 
capacité  d'abri,  sa  vitalité  et  sa  faculté  de  donner  annuellement 
^es  inflorescences. 

La  constitution  de  ces  réserves  qui  ne  demandent  qu'à  être 
exploitées,  ne  dispensera  pas  les  troupeaux  de  nomadiser 
comme  d'habitude  à  travers  les  zones  chih  et  les  zones 
meurte  pour  y  brouter  en  période  pastorale  herbeuse.  Le 
bouss  permettra  de  donner  aux  affaiblis,  aux  mères  nourrices 
et  aux  sujets  destinés  à  être  poussés  à  l'engraissement  un 
supplément  alimentaire  très  riche.  Pendant  les  agnelages,  les 
mères  n'auront  plus  à  circuler  durant  des  journées  pour 
trouver  de  quoi  fournir  en  lait  la  khima  et  l'agneau.  La  meule 
ou  le  silo  de  bouss  permettront  de  tenir  les  brebis  suitées  à 
prox  imité  des  poi  nts  d'eau  et  d'y  recevoir  des  rations  abondantes. 
Le  bouss  est  loin  de  présenter  la  même  tendreté  que  l'épi-vert 
des  céréales  ;  nous  savons  que  la  nécessité  de  vivre  dans 
ce  milieu  si  spécial  des  Hauts-Plateaux,  lui  a  donné  une  consis- 
tance coriace  exigeant  une  bonne  denture  incisive  surtout. 


CONTRIBUTION    A    l'ÉIIDE    DE    l'inDUSTRIE  311 

Les  hache-paille  seront  indispensables  pour  morceler  l'épi 
ou  inflorescence  d'halla  et  le  rendre  plus  préhensible  aux  ovins. 
Chez  les  petits  ruminants  l'inclinaison  et  la  forme  des 
incisives  permet  la  préhension,  ou  plutôt  l'incision  des  herbes 
les  plus  réduites,  même  au  ras  du  sol.  Les  molaires  jouent 
ensuite  leur  rôle.  Mais  si  ces  incisives  sont  ébréchées, 
branlantes,  usées  ou  si  elles  sont  rasées  et  arrondies,  le 
mouton  spécialement  ne  peut  plus  se  nourrir.  S'il  est  obligé  de 
s'attaquer  à  des  branchages,  à  des  tiges  ou  au  bouss  par 
exemple,  il  n'arrive  pas  à  les  entamer.  Donnez  à  un  mouton, 
dans  ces  conditions  de  l'orge  en  grains,  il  s'alimentera  et  téra 
de  la  graisse.  Avec  ses  lèvres  il  prendra  l'orge  et  ses  molaires  . 
la  broieront.  Ses  incisives  ne  sont  plus  indispensables  et  leur 
rôle  devient  nul.  Si  donc  aux  ovins  usés  nous  donnons  le 
bouss  préalablement  haché,  tout  se  passera  comme  pour 
l'orge. 

Jusqu'ici,  les  ovins  à  denture  usée,  étaient  voués  à  l'inanition. 
Ni  les  herbes  réduites,  ni  les  plantes  exigeant  l'incision,  ne 
pouvaient  être  prises  par  eux.  Et  le  nombre  est  toujours 
grand  de  sujets  mal  armés  sous  le  rapport  de  la  denture 
incisive,  qui  succombent  annuellement  à  l'entrée  de  la 
mauvaise  saison.  Du  jour  où  on  leur  donnera  des  aliments 
hachés,  réduits,  ils  s'alimenteront  et  le  stock  général  de 
viande  représenté  par  le  cheptel  ovin  s'accroîtra  d'autant  plus. 
On  voit  quelles  perspectives  s'ouvrent  à  notre  élevage 
et  quelles  richesses  représentent  nos  peuplements  d'halfa 
jusqu'ici  considérés  comme  bons  tout  au  plus  à  taire  du  papier 
ou  des  objets  de  sparterie.  C'est  un  devoir  impérieux  pour 
nous  de  chercher  à  augmenter  la  capacité  de  production 
alimentaire  de  notre  colonie,  à  lui  donner  ainsi  les  moyens 
d'entretenir  un  cheptel  plus  nombreux  et  plus  beau. 

Certes,  l'innovation  dont  il  s'agit  aura  besoin  d'être  étudiée, 
dans  les  détails  de  sa  réalisation.  L'organisation  qui  aura  à 
s'occuper  des  halfas  devra  mettre  en  œuvre  les  moyens 
d'entretenir  vivaces  et  productifs  nos  peuplements  d'halfa; 
de  déterminer  le  rendement  en  bouss  par  hectare  ou  par 
souche  ;  fixer  les  conditions  de  la  cueillette  intégrale  ou 
partielle  du  bouss;  fixer  par  des  analyses  la  teneur  des 
inflorescences  d'halfa  en  principes  nutritifs,  et  déterminer  les 
meilleurs  procédés  de  conservation  (emmeulage  ou  ensilage). 
Pour  l'instant  nous  ne  devons  relenir  que  le  fait  suivant  : 
Les  nappes  d'halfa  ofTrent  à  l'élevage  sur  les  Haufs-Plateaux 
une  ressource  inestimable  comme  abri  et  comme  champ  de 
production  alimentaire.  Sachons  en  tirer  tous  les  avantages 


312  CONTRIBUTION    A    l'ÉTI  DE    DE    l'inDUSTRIE 

qu'elles  comportent  pour  le  plus  grand  profit  de  notre  élevage 
national. 

N.  B.  —  Les  indigènes  disent  fort  justement  d'ailleurs,  que 
le  hous&  consommé  en  son  temps,  a  la  plus  grande  valeur 
alimentaire  mais  que  desséché  il  ne  vaut  plus  rien.  C'est  exact, 
m.ais  les  indigènes  considèrent  le  hou&s  sur  pied.  Il  est  évident 
que  l'épi  en  question,  tant  qu'il  ne  s'est  point  épanoui  en 
panache,  tant  qu'il  n'a  pas  graine,  est  doué  de  tous  les 
principes  nutritifs  voulus  ;  mais  une  fois  graine  sur  pied 
il  tombe  au  rang  de  support  ligneux.  Par  conséquent  le 
séchage  du  bouss  cueilli  avant  fructification  ne  peut  lui  enlever 
ses  principes.  Et  c'est  là-dessus  que  la  confusion  doit  être 
écartée.  L'indigène  parle  du  bouss  desséché  et  mijri  sur  pied, 
tandis  que  nous,  nous  parlons  du  bouss  détaché  alors  qu'il 
est  tout  à  fait  nutritif  et  c'est  dans  cet  état  qu'il  devra  être 
emmeulé  ou  ensilé. 


Rapport  entre  l'Exploitation  des  Nappes 

Halfatières   et  les    Fluctuations  numériques 

du  Cheptel 

Etant  donné  que  l'exploitation  abusive  des  peuplements 
d'halfa  entraîne  fatalement  une  diminution  du  cheptel  les 
diagrammes  établis  à  cet  effet  devraient  le  noter  de  façon  quasi 
mathématique.  Cependant  les  statistiques  nous  montrent 
parfois  par  des  chiffres  que  sur  telle  zone  jadis  prospère,  mais 
aujourd'hui  appauvrie,  sinon  ruinée  par  une  exploitation 
abusive,  le  troupeau  s'est  maintenu  à  peu  de  chose  près  à  son 
chiffre  normal. 

Cela  prouve-t-il  que  l'appauvrissement,  voire  même  la  ruine 
du  peuplement  halfatier,  a  été  sans  influence  sur  les  variations 
de  ce  troupeau?  Evidemment  non  ;  car  si  la  statistique  semble 
par  des  chiffres  rigides  nous  renseigner  sur  l'état  numérique 
du  cheptel,  ces  mêmes  chiffres  nous  laissent  dans  l'ignorance 
la  plus  absolue  sur  la  valeur  intrinsèque,  sur  le  rendement  net, 
sur  le  stock  de  viande  ;  en  un  mot  sur  tout  ce  dont  le  troupeau 
est  la  valeur  représentative  vivante.  En  effet  un  lot  peut 
demeurer  numériquement  le  même,  mais  son  rendement  peut 
varier  de  50  %  et  le  chiffre  rigide  ne  peut  prétendre  soumettre 
à  sa  rigidité  même  cette  matière  si  variable,  si  déformable 
qu'est  l'organisme  vivant  !  Lorsqu'on  suit  le  cheptel  dans 
ses  modifications  incessantes,  on  note  l'amaigrissement,  le 
dépérissement,  la  réduction  du  format,  la  mortalité  au  seuil 


CONTRIBUTION    A    l'ÉTUDE    DE    l'inDUSTRIE  313 

des  inanvais  jours  ;  le  troupeau  diminue  mais  le  nomade 
comble  les  vides  par  les  apiiorls  élran^^ers;  l'élevage  marocain 
est  là  pour  lui  fournir  moutons,  bœufs  et  chameaux.  Kt  le 
tioupeau  numériquement  reconstitué  grâce  à  ses  (jualilés 
nomades,  ne  se  cantonne  pas  là  où  les  conditions  de  subsistance 
sont  devenues  précaii'es  ;  il  \;i  [iliis  loin  à  la  recherche  des 
zones  plus  hospitalièies.  Et  le  statisticien  est  aï  rivé  trop  t;ird 
pour  marquer  les  per-tes.  Tout  est  revenu  dans  l'ordre  quand 
celui-ci  entre  en  scène.  Cependant,  si  grâce  à  sa  vie  errante  le 
bétail  du  Sud  peut  parer  aux  ruines  des  herbages  et  des  zones 
d'abri,  le  moment  arrivera,  si  l'on  n'y  met  bon  ordre,  oii  le 
milieu  deviendra  inhabitable  pour  lui. 

En  efïet,  si  l'on  examine  la  carte  des  pacages  habituels  au 
cheptel  et  la  carte  des  zones  d'halfa  livrées  à  l'exploitation 
industrielle,  on  constate  que  ces  cartes  se  superposent 
complètement.  Ce  qui  rend  les  aires  de  parcours  praticables 
au  bétail  ce  sont  les  points  d'eau  ;  et  ce  qui  perniet  l'installation 
de  chantiers  ce  sont  également  les  points  d'eau.  Et  il  arrive 
que  précisément  c'est  dans  les  zones  fréquentées  par  les 
troupeaux  que  l'arrachage  des  feuilles  d'halfa  enlève  au 
peuplement  de  ce  textile  leur  capacité  d'abri,  si  nécessaire  au.x 
troupeaux  nomades  et,  aussi,  leur  faculté  de  production  de  bouss, 
source  précieuse,  mais  insuffisamment  exploitée,  d'aliments  de 
premier  ordre.  Il  est  urgent  de  songer  enfin  à  utiliser  celle 
richesse  inestimable  que  représentent  nos  5  millions  d'hectares 
d'halfa  en  en  réservant  l'exploitation  pour  l'usage  exclusif  de 
notre  cheptel  tout  entier  car  ce  que  nous  avons  dit  à  cet 
égard,  touchant  les  ovins,  s  appliq  le  au  chameau,  au  bœuf, 
au  cheval. 

Dans  ce  qui  précède,  nous  avons  fait  ressortir  le  rôle 
alimentaire  des  inflorescences  de  l'halfa  et  le  rôle  d'abri 
des  feuilles  à  l'égard  des  troupeaux,  nous  n'avons  fait  que 
relater  le  résultat  de  nos  observations  propres  et  de  l'expérience 
séculaire  des  nomades.  Or,  il  se  trouve  que  les  différentes 
affirmations  émises  au  cours  de  notre  travail,  cadrent 
parfaitement  avec  les  données  de  la  science. 

La  plante  «  lialfa  »  qui  est  hydrotuge,  c'est-à-dire  qui  n'aime 
pas  l'humidité  et  ne  se  complaît  qu'en  milieu  sec  et  chaud, 
absorbe  surtout  par  ses  feuilles.  La  chlorophylle  (cette 
substance  verte  à  laquelle  les  feuilles  doivent  leur  coloration) 
a  la  propriété,  sous  l'influence  des  rayons  solaires,  de 
décomposer  l'acide  carbonique  de  l'air  en  ses  éléments 
carbone  et  oxygène  et  de  «  tixer  dans  les  tissus  de  la  plante  le 
carbone  qui  devra  servir  à  la  constitution  de  la  cellulose  et 


21 


314  CONTRIBUTION    A    l'ÉTUDE    DE    l'inDUSTRIE 

des  corps  congénères  qui  constituent  les  9/10''  de  la  plante 
sèche  ».  (Trabut.) 

Or,  ce  sont  les  feuilles  persistantes  de  l'iialfa,  les  feuilles 
adultes  qui  jouent  ce  rôle  fixateur  de  carbone  et  qui 
concourent  ainsi  à  la  nutrition  de  la  plante.  «  Les  jeunes 
feuilles  n'interviennent  que  plus  tard.  »  Et  en  hiver,  où  les 
radiations  solaires  sont  intermittentes,  ce  sont  les  feuilles 
anciennes  qui  permettent  à  la  plante  de  profiter  des  moindres 
rayons  pour  emmagasiner  du  carbone.  «  Le  froid  (trois  ou 
quatre  mois)  et  la  sécheresse  (trois  ou  quatre  mois)  ralentissent 
cette  nutrition...  Il  faut  donc  que  durant  le  cours  laps  de 
temps  qui  lui  reste,  la  plante  puisse  emmagasiner  les  réserves 
nécessaires  à  sa  floraison,  grâce  à  ses  feuilles  persistantes;  mais 
si  elle  doit  perdre  le  tenips  à  former  ses  feuilles,  on  comprend 
que  sa  floraison  se  trouve  retardée.  »  (Trabut.)  Voilà  qui 
nous  explique  scientifiquement  cette  remarque  des  nomades, 
à  savoir:  que  le  houss  (inflorescence  de  l'halfa)  n'apparaît  que 
tous  les  trois  ou  quatre  ans  chez  les  plants  ménatterine 
c'est-à-dire  débarrassés  de  leurs  feuilles  par  arrachage. 

Donc,  pour  conserver  an  plant  d'haï  fa  sa  puissance 
d'absorption  ;  pour  lui  laisser  toute  sa  force  d'emmagasinemcnt 
de  carbone  et  sa  faculté  de  produire  annuellement  des 
inflorescences,  il  est  tout  indiqué  de  ne  pas  le  dégarnir  de  ses 
feuilles,  de  ne  pas  l'exploiter. 

En  outre,  en  lui  laissant  ses  feuilles  on  lui  conserve  toute  sa 
capacité  d'abri  tant  à  l'égard  des  plantes  qui  croissent  à  sa 
base  ou  à  son  voisinage,  qu'à  l'égard  des  troupeaux. 

Les  feuilles  adultes  ont  encore  un  avantage,  c'est  qu'étant 
admirablement  armées  pour  résister  aux  intempéries,  elles 
peuvent  assurer  la  nutrition  de  la^plante  durant  le  jour,  sans 
risquer  de  périr  la  nuit  ;  ce  que  les  feuilles  tendres,  non 
encore  pourvues  de  tous  leurs  moyens,  sont  incapables  de 
réaliser  parce  que  très  vulnérables.  Mais  si  elles  se  trouvent 
parfaitement  et  largement  abritées  par  les  feuilles  persistantes, 
elles  remplissent  de  leur  côté  le  rôle  de  fixatrices  de  carbone 
et  la  nutrition  de  la  plante  s'en  trouve  accrue. 

Au  point  de  vue  des  qualités  industrielles,  les  feuilles 
jeunes  sont  plus  recherchées  que  les  feuilles  coriaces  ;  mais 
sous  le  rapport  de  la  vitalité  de  la  plante,  et  de  sa  con.servation, 
l'arrachage  en  démunissant  le  plant  de  ses  organes  de  fixation 
du  carbone  l'expose  non  seulement  au  rabougrissement,  mais 
encore  à  la  ruine.  Et  comme  le  fait  remarquer  M.  Trabut  «  les 
halfas  vierges  sont  longs,  larges,  durs,  grossiers,  plus 
cassants  ;  dès  qu'on  les  exploite  et  que  la  souche  s'épuise,  ils 


CONTIUBUTTON    A    l'ÉTUDE    DE    l'inDUSTRIE  315 

perdent  de  leur  longueur,  deviennent  plus  fins,  moins 
cassants,  plus  uniformes».  L'industrie  y  trouve  peut-être  son 
compte  mais  la  richesse  que  représente  la  na[)pe,  et  l'élevage, 
y  perdent  et  sont  voués  à  une  ruine  certaine. 

Il  est  un  autre  tait  noté  par  les  botanisles  :  «  Dans  les  zones 
en  exploitation,  les  glumelles  ne  s'ouvrent  pas,  les  organes 
floraux  sont  desséchés  sans  qu'il  y  ait  épanouissement.  Cette 
mort  précoce  des  organes  fioraux  est  un  signe  d'épuisement  de 
la  plante  qui  manque  des  réserves  nécessaires  pour  la 
maturation  des  ovaires.  »  (Trabut.)  Voilà  qui  vient  encore  à 
l'appui  de  ce  fait,  savoir  que  les  plants  exploités  par  arrachage 
mettent  trois  ou  quatre  ans  avant  de  donner  du  bouss. 

Ces  déductions  scientifiques  en  concordance  parfaite  avec 
les  observations  des  nomades,  nous  conduisent  à  comprendre 
pourquoi  l'incinération  des  tiges  âgées,  ne  rend  pas  les  services 
qu'on  devrait,  théoriquement  en  attendre.  L'incinération 
donne  des  cendres  riches  en  sels  de  potasse  et  en  phosphates 
qui,  repris  par  le  sol,  Feiirichissent  au  bénéfice  de  la  plante  ; 
mais  il  faut  que  l'incinération  ait  lieu  en  temps  opportun, 
pour  que  la  pluie  ou  l'humidité  suffisante  du  sol  retiennent 
les  cendres  et  les  empêchent  d'être  éparpillées  par  le  vent. 

Mais  le  flambage  des  tiges  vieilles  ou  mortes,  prive  le  plant 
de  ses  organes  de  fixation  de  carbone  ;  le  rhizome  pousse  bien 
par  ses  bourgeons  dormants  qui  se  réveillent  ;  mais  le  pied  se 
trouve  dénudé,  exposé  aux  intempéries  et  à  la  dent  du  bétail 
qui  ne  se  contente  pas  des  jeunes  pousses,  mais  attaque  aussi 
les  rhizomes. 

Les  plants  ont  des  moyens  extrêinement  remarquables  pour 
renouveler  et  s'étendre  et  n'ont  guère  besoin  de  l'arrachage 
que  les  halfatiers  représentent  comme  un  procédé  utile,  sinon 
indispensable,  à  la  reconstitution  et  à  la  conservation  des 
nappes,  et  qui  est  tout  simplement  désastreux. 

Les  auteurs  qui  se  sont  occupés  de  l'halfa  et  nous  ont 
renseignés  sur  sa  biologie  si  intéressante,  n'ont  eu  en  vue  que 
le  côté  industriel  de  ce  textile  dans  ses  rapports  avec  la 
conservation  des  nappes.  Mais  aucun  d'eux  n'a  soupçonné 
la  valeur  alimentoire  des  inflorescences  de  cette  stipée  et  tout 
ce  que  l'élevage,  en  régions  steppienties,  est  en  droit  d'en 
attendre. 

INous  nous  expliquons  parfaitement  pourquoi  le  côté 
industriel  et  papyrogène  a  eu  le  pas  sur  le  côté  fourrager  de  la 
question.  Si  nous  consultons  les  ouvrages  d'agriculture 
algérienne  nous  lisons  au  mot  bouss  (appellation  arabe  de 
l'inflorescence  de  l'halfa)  ;  «  inflorescence  de  l'halfa,  récoltée 
; 


316  CONTRIBUTION    A    l'ÉTUDE    DE    l'inDUSTRIE 

pour  les  chevaux)-).  Et  c'est  tout.  Mais  il  faut  avoir  habité  le 
Sud,  parcouru  les  steppes,  pour  constater  que  le  6oms.s  joue  un 
rôle  alimentaire  indéniable  non  seulement  dans  l'entretien  des 
chevaux,  mais  de  tous  les  ruminants  élevés  dans  ces  régions. 
Le  chameau  qui,  au  printemps,  n'a  pas  mangé  de  «  boms  »,  ne 
ait  pas  sa  bosse  et  n'est  pas  en  mesure  de  franchir  la  saison 
froide,  à  moins  de  transhumer  au  Sahara  ou  dans  le  Tell.  Le 
bœuf,  le  mouton,  la  chèvre,  trouveraient  dans  le  bouss  un 
aliment  riche,  fort  précieux,  si  le  nomade  pouvait  être 
maté)'ieUement  en  mesure  de  le  leur  donner.  Le  bouss,  avant 
la  formation  des  graines,  offre  le  maximum  comme  valeur 
alimentaire  et  c'est  à  ce  moment  qu'il  s'agit  de  l'utiliser;  mais 
il  y  en  a  tellement  que  les  possesseurs  de  troupeaux,  même 
s'ils  le  voulaient,  n'auraient  ni  le  temps  matériel,  ni  les  moyens 
de  le  cueillir  assez  vite  pour  le  faner  et  l'emmeuler  ou  l'ensiler 
avant  la  maturation  des  graines.  Ils  n'utilisent  le  bouss  cueilli 
par  les  mesquines  que  pour  le  cheval,  bête  noble  et  dont 
la  valeur  justifie  une  dépense  journalière  de  0  fr.  25  à  0  fr.  30. 
Mais  ils  ne  peuvent  plus  opérer  de  même  dès  qu'il  s'agit  de 
nourrir  un  troupeau  et  l'on  sait  que  les  ruminants,  chameaux 
et  bœufs  compris,  ne  se  comptent  pas  par  unités  mais  par  lots 
plus  ou  moins  nombreux.  Toutes  ces  raisons  nous  permettent 
de  comprendre  pourquoi  les  nomades  qui  ont  reconnu  aux 
inflorescences  de  l'halfa,  une  valeur  alimentaire  (affirmée  par 
une  expérience  séculaire  et  par  la  pratique  de  tous  les  jours), 
n'en  ont  pas  usé  davantage  pour  assurer  l'entretien  de  leur 
bétail. 

Nous  le  répétons,  la  durée  de  l'état  d'inflorescence  de 
l'halfa  est  courte  et  ce  n'est  que  par  une  coopération  efficace, 
effective,  s'opérant  en  même  terrîps  sur  toute  la  surface 
peuplée  d  halfa,  qu'il  sera  possible  de  cueillir  en  temps  voulu, 
et  avant  que  la  graine  se  soit  formée,  tout  le  bouss  possible. 
Et  cette  récolte  de  l'inflorescence  de  l'halfa  qu'il  faudra 
entreprendre  pourra  être  réalisée  en  opérant  comme  les 
halfatiers,  avec  cette  différence  que  la  cueillette  du  bouss  sera 
substituée  à  l'arrachage  des  feuilles. 

La  Mise  en  Réserve  et  la  Conservation 
des  Inflorescences  (Bouss)  de  l'Halfa 

Tant  que  des  expériences  n'auront  pas  fixé  de  façon  précise 
les  modes  de  conservation  des  inflorescences  (bouss)  de 
l'halfa,  il  serait  prématuré  d'indiquer  lequel  des  deux  procédés 
(emmeulage  ou  ensilage)  est  à  préférer. 


CONTRIBUTION    A    l'ÉTUDE    OE    I.'lNDUSTRlE  317 

Les  deux  peuvent  ù\ve  en  ployés  concurramment  ;  mais 
le  mouton  du  Sud,  accoutumé  à  consommer  le  «  bouss  » 
en  nature  (en  admettant  que  l'ensilage  donne  d'excellents 
résultats),  acceptera-1-il  un  fourrage  fermenté  V  En  temps 
ordinaire,  on  éprouve  déjà  de  grosses  difficultés  à  faire 
manger  aux  troupeaux  du  Sud  de  la  paille  et  du  foin.  Nous 
avons  eu  l'occasion  de  le  constater  très  souvent  ;  ce  n'est 
qu'après  deux  ou  trois  jours  d'abstinence  que,  talonnés  par  la 
faim,  nos  ovins  du  Sud  se  résignent  à  prendre  paille  ou  foin. 
Ils  montrent  les  mêmes  répugnances  lors  de  l'abreuvement 
dans  des  bassins  ou  des  ustensiles.  Mais  c'est  l'afTaire  de 
quelques  jours  de  les  obliger  à  changer  leurs  habitudes.  Nous 
ne  pensons  pas  que  ce  soit  là,  pour  l'avenir,  un  obstacle  à 
considérer. 

L'ensilage  en  fosse  sera- t-il  préféré  à  l'ensilage  sous  hangar? 
Nous  ne  saurions  nous  prononcer  à  ce  sujet.  Cependant,  au 
point  de  vue  économique  et  même  pratique,  nous  pensons  que 
l'usage  des  fosses  doit  être  choisi  de  préférence  à  l'autre.  Il  y 
aurait  lieu  naturellement,  une  fois  en  possession  de  tous  les 
éléments  du  problème,  d'éduquer  l'indigène  pour  l'amener 
à  utiliser  judicieusement  les  fourrages  (bouss,  en  l'espèce) 
fermentes.  L'indigène  répugne  à  tout  ce  qui  est  fermentation  ; 
pour  lui  c'est  synonyme  de  putréfaction.  Arrivera-t-il  à 
comprendre  que  l'ensilage  rend  plus  alibile  un  aliment 
coriace?  L'avenir  nous  l'apprendra.  Mais  des  essais  s'imposent 
de  toute  nécessité,  car  la  Métropole  et  l'Algérie  ont  besoin  de 
viande. 

BEN  DANOU. 


VERS    LE    TCHAD 


A  Bord  de  1'  «  Europe  » 

Bordeaux,  26  juillet  i9iS.  —  Après  plusieurs  ajournements 
successifs  de  l'heure  du  départ  nous  avons  enfin  quitté  Bor- 
deaux hier  soir,  à  9  heures,  salués  par  un  vibrant  coup  de  canon. 

Appuyés  sur  les  bastingages  nous  causons.  Nous  sommes  là 
quatre  ou  cinq.  Le  capitaine  G...,  des  Spahis,  le  lieute- 
nant L...,  des  Chasseurs  d'Afrique,  le  vétérinaire  L...,  qui 
seront  mes  compagnons  de  voyage  jusqu'au  Tchad. 

Bientôt,  silencieux,  je  rêve  ;  ma  pensée  se  reporte  vers  ceux 
que  j'ai  quittés.  A  cet  instant  le  capitaine  G...  s'écrie  :  <-  C'est 
égal  nous  sommes  heureux  d'être  plusieurs.  Que  ce  serait  triste 
si  chacun  de  nous  était  seul.  »  Et  comme  précisément,  le  cœur 
serré,  je  songe  à  ceux  que  je  viens  de  quitter,  je  trouve  qu'il 
a  raison  et  j'ai  un  peu  la  krme  à  l'œil.  Mais,  je  l'espère,  ce 
sera  là  ma  seule  minute  de  faiblesse,  car  je  dois  considérer 
comme  une  chance  inappréciable  le  fait  d'avoir  avec  moi  trois 
compagnons  de  route  dont  deux  ont  l'expérience  du  pays  que 
je  suis  appelé  à  parcourir. 

Cependant  les  lumières  de  Bordeaux  s'éloignent,  réfléchies 
par  les  eaux  silencieuses  et  miroitantes  de  la  Gironde.  Le 
navire  glisse  rapidement  devant  les  bateaux  qui  s'alignent  le 
long  des  quais. 

Le  ciel,  sombre  dans  la  journée,  s'est  éclairci.  Nous  en  pro- 
fitons pour  faire  une  promenade  sur  le  pont.  Vers  10  heures, 
nous  passons  au  fumoir  et,  après  une  courte  causerie,  chacun 
de  nous  regagne  sa  couchette. 

Vers  5  heures  et  demie  je  me  suis  éveillé  n'ayant  fait  qu'un 
somme.  Un  coup  d'œil  j^'té  à  l'horizon  me  rassure  sur  l'état  de 
la  mer  dont  la  surface  est  à  peine  ridée. 

Ma  matinée  s'écoule  à  m'instailer  dans  ma  cabine  très  confor- 
table où  j'ai  comme  compagnon  le  vétérinaire  cité  plus  haut. 

iO  heures.  —  Le  repas  nous  réunit  dans  la  luxueuse  salle  à 
manger  où  les  tables,  avec  les  passagers  qui  s'y  sont  groupés 
la  veille,  resteront  telles  jusqu'à  la  fin  du  voyage  Après  quel- 
ques minutes,   un   léger  brouhaha  s'élève  et,  rapidement,  la 


I   Carnet  de  rouie  d'un  Orimais. 


b 


VERS    TE    TCHAD  ^lU 

salle  devient  bruyante.  Ce  n'est  déjà  plus  le  silence  et  la  gène 
de  la  veille.  Avec  la  perspective  d'une  longue  traversée,  on 
a  vite  lié  connaissance:  Nous  sommes  là  une  cinquantaine 
de  passagers  de  i'^^  classe  :  officiers,  administrateurs  colo- 
niaux avec  leur  famille,  commerçants,  employés  de  factoreries. 
Tout  ce  monde,  remis  par  un  séjour  de  six  mois  à  un  an  en 
France,  ne  paraît  nullement  avoir  été  éprouvé  par  les  climats 
tropicaux  et  cela  me  rassure. 

En  quittant  la  table,  nous  avons  l'agréable  surprise  d'enten- 
dre de  la  musifpie.  Une  jeune  demoiselle  de  16  ans  à  peine, 
fille  d'un  fonctionnaire  colonial  qui  rejoint  le  Dahomey  avec 
sa  famille  après  un  séjour  au  Sénégal,  s'est  mise  au  piano. 

Notre  entrée  paraît  l'intimider,  mais  elle  est  vite  remise  et 
cause  hardiment,  avec  le  capitaine  G...,  des  pays  oii  chacun 
de  nous  se  rend.  Après  quoi,  elle  exécute  de  nouveaux 
morceaux. 

Le  57,  4  heures  du  soir.  —  La  nuit  dernière,  le  temps  s'est 
gâté,  la  sirène  a  mugi,  mais  cela  ne  m'a  nullement  empêché 
de  dormir.  Au  matin  l'horizon  est  encore  brumeux  et  le  brouil- 
lard va  s'épaississant  jusque  vers  11  heures.  De  temps  en  temps 
la  sirène  fait  entendre  son  cri  lugubre.  La  température  est  gla- 
ciale et  les  passagers  les  plus  courageux  désertent  le  pont  pour 
s'installer  au  fumoir. 

Après  déjeuner,  le  ciel  et  la  mer  passent  du  gris  au  bleu  et 
le  soleil  vient  agréablement  réchautTer  nos  membres  engour- 
dis par  le  froid  du  matin. 

Midi.  —  Nous  sommes  à  hauteur  du  Cap  Finistère  :  quatre 
vapeurs  et  un  voilier  se  montrent  à  l'horizon  pour  bientôt 
disparaître. 

Je  commence  à  trouver  le  temps  un  peu  long  car  je  nai 
même  pas  la  ressource  de  bouquiner  de  l'arabe,  mes  livres 
étant  enfermés  dans  les  cantines  déposées  en  cale. 

7  heurea.  —  La  soirée  promet  d'être  plus  gaie  que  celle  de 
la  veille  car  on  pianote  et  an  chante. 

Le  28,  10  heures.  —  Un  soleil  tout  souriant  est  venu  ce 
matin  inonder  de  clarté  notre  cabine.  Il  fait  bon  respirer  sur  le 
pont.  L'Océan,  caressé  par  la  brise,  ondoie  légèrement  comme 
une  étoffe  de  soie. 

Midi.  —  Nous  sommes  à  hauteur  du  Cap  Saint-Vincent. 

Le  2.y,  à  2  Jienres  —  Journée  ensoleillée,  mer  calme,  brise 
tiède.  Le  temps  s'écoule  monotone  et  uoas  fait  désirer  avec 
impatience  l'heure  oii  nous  toucherons  à  Ténériffe  :  demain, 
vers  midi,  suivant  les  prévisions  du  capitaine. 

Pour  rompre  cette  monotonie  et  sur  l'initiative  du   com- 


dS?. 


320  VERS    LE    TCHAD 

mandant  du  bord,  on  organise  une  fêfe  au  profil  delà  «  Caisse 
des  Sauveteurs  de  terre  et  de  mer  ». 

Hélas  !  je  n'ai  rien  à  oftVir  pour  enrichir  le  programme  ; 
n'étant  ni  chanteur,  ni  déclamateur,  ni  instrumentiste,  je  ne 
pourrai  qu'apporter  ma  bonne  volonté  à  participer  à  l'œuvre 
pour  laquelle  le  commandant  se  met  en  frais. 

Ici  se  termine  le  récit  de  mon  séjour  sur  V Europe  depuis 
notre  départ  de  Bordeaux  jusqu'au  29  juillet  à  3  heures.  Je 
reprendrai  ma  relation  de  voyage  après  notre  passage  à 
Ténérifîe. 

Ténériffe 

Le  30  juillet,  8  heures  du  matin.  —  La  mer  est  belle,  le 
ciel  est  d'azur,  de  la  légère  brume  qui  borne  l'horizon  émerge 
la  masse  rocheuse  de  Ténériffe.  A  mesure  ijue  nous  appro- 
chons, les  formes  se  précisent.  Vue  du  Nord,  l'ile  à  un  aspect 
désolé  :  c'est  un  énorme  amas  de  rochers  déchiquetés,  cahotés, 
surplombant  la  mer  à  pic,  un  ensemble  de  teintes  grisàli'es 
ou  rougeâtres  semées  de  vagues  taches  vertes.  Peu  ou  point 
de  végétation,  c'est  le  sol  aride  dans  toute  sa  beauté  sauvage. 

Mais  nous  avançons,  nous  contournons  une  pointe  et  Santa- 
Gruz  de  Ténérifîe  se  découvre  à  nos  yeux  charmés.  En  un 
immense  éventail  les  maisons,  s'étagent  sur  les  flancs  du 
rocher,  s'étendent  autour  de  la  baie,  jetant  sur  un  fond  triste, 
la  note  gaie  de  leurs  murs  blancs,  jaunes  ou  roses,  de  leurs 
toits  d'un  rouge  vif,  de  leurs  jardins  d'un  vert  sombre. 

10  heures.  —  L' Europe  \etle  l'ancre  au  milieu  de  la  baie.  Une 
nuée  de  barques  viennent  accoster  le  paquebot  et,  en  un  clin 
d'œil,  les  ponts  sont  envahis  parune^horde  de  marchands  qui 
étalent  leur  pacotille,  tranoiormant  rapidement  le  bateau  en  un 
immense  bazar. 

En  prévision  de  cette  invasion  les  cabines  ont  été  fermées  : 
la  confiance  règne... 

Tous  ces  marchands,  au  teint  bronzé,  d'un  type  qu'il  est 
impossible  de  déterminer,  mais  qui  se  rapproche  assez  du 
gitano,  nous  accrochent,  nous  harcèlent,  demandent  des 
sommes  folles  de  marchandises  qu'ils  laissent  à  un  prix  très 
faible  :  draps,  robes  brodées,  écharpes,  bourses,  réticules  en 
soie,  kimonos,  cartes  postales,  fruits,  etc. 

12  h.  30.  —  Après  déjeuner  nous  prenons  passage  sur  un 
petit  canot  à  vapeur  qui,  moyennant  2  francs  aller  et  retour, 
nous  transporte  à  terre. 

Après  l'achat  de  cartes  postales  et  leur  mise  à  la  poste,  nous 


VERS    I.E    TCIîvn  ^21 

visitons  rapidement  la  ville.  Les  rues  sont  étroites,  les  mai- 
sons peu  élevées,  mais  |)resrpui  toutes  avec  un  tiall  où  sont 
disposés  des  |)almiers  et  autr-t\s  piaules  exotiques.  Santa-Cniz 
possède  des  Ir-atns  électriipies  (pii.  mai^fré  leur  aspect  auti(iue 
en  même  temps  que  vénérable,  me  i;q)pellenl  nos  chers 
tramways  oranais. 

L'uniforme  fies  soldats,  otliciers,  gendarmes,  surtout  celui 
de  ces  derniers,  nous  frappe.  Très  originales  aussi  les  frui- 
tières qui  portent  sur  leur  tète  d'immenses  paniers  sur  de 
petits  clia|)eau.\  à  fond  minuscule. 

Après  une  visite  à  la  Cathédrale,  une  station  au  «Café  belge  a 
où  un  harpiste  avisé  exécute  la  «  Marseillaise  i\  nous  rejoignons, 
le  bord  vers  3  heures. 

Nous  y  retrouvons  nos  tenaces  marchands  qui,  à  force  de 
persévérance,  réussissent  à  traiter  quelqufs  alTaires.  Nous 
passons  près  d'une  heure  à  nous  amuser  comme  de  petits  fous 
à  riposter  à  leurs  demandes  fabuleuses  par  des  offres  ridicules. 

Mais  la  sirène  mugit  :  c'est  le  départ  Rapidement,  comme 
ils  sont  venus,  les  marchands  disparaissent  et  le  bateau  s'éloi- 
gne majestueusement. 

S  heures.  —  Nous  sommes  en  pleins  préparatifs  en  vue  de 
la  fête  qui  aura  lieu  demain  soir.  Le  modeste  et  peu  intelli- 
gent rôle  de  numéroter  des  billets  pour  la  tombola  m'échoit. 
Je  m'en  console  en  badinant  avec  deux  demoiselles  qui  plient 
les  numéros  au  fur  et  à  mesure  qu'ils  sont  prêts. 

Le  31.  S  lienres.  —  Les  oscillations  de  ma  couchette  m'ont 
éveillé.  Nous  roulons  sérieusement,  mais  cinq  jours  de  traver- 
sée nous  ont  tait  le  pied  marin  et  personne  ne  manque  au 
déjeuner. 

J'ai  encore  passé  la  matinée  à  faire  des  billets.  La  vente 
va  à  merveille.  La  récolte  des  lots  donne  aussi.  Les  aimables 
solliciteuses  parviennent  à  en  réunir  une  quarantaine. 

3  heures.  —  Les  amateurs  qui  doivent  prêter  leur  concours 
répètent  pendant  que  le  capitaine  G...,  qui  se  révèle  lin  cari- 
caturiste, croque  quelques  sujets  humoristiques  de  program- 
me. L.a  silhouette  d'un  passager  qui  est  loin  d'être  un  Apollon, 
obtient  un  beau  succès. 

8  heures.  —  Un  coup  de  cloche  annonce  le  commencement 
du  concert.  Chansonnettes,  monologues,  musique  se  succèdent. 
Puis  a  lieu  le  tirage  de  la  tombola.  Cette  opération  terminée 
le  pont  est  débarrassé  de  tout  ce  qui  pourrait  gêiier  les  dan- 
seurs. Vers  10  heures,  la  sauterie  commence  et  dure  jusqu'à 
2  heures  ! 

Et  vers  2  heures  et  demie,   lorsqu'en  chantant  les  scies  à 


322  VERS    LE    TCHAD 

la  mode,  nous  regngnons  nos  cabines,  j'ai  bien  plus  l'impres- 
sion d'être  en  fête  à  Oran  que  d'être  sur  le  plancher  d'un 
bateau  au  milieu  de  l'Océan. 

•/er  août,  9  heures.  —  Je  ne  me  suis  éveillé  qu'à  8  h.  20 
l'esprit  encore  un  peu  lourd  des  excès  de  la  veille. 

La  mer  fortement  houleuse  hier,  s'est  un  peu  calmée,  mais 
le  ciel  brumeux  reste  d'un  gris  désespérément  triste. 

Nous  pensons  toucher  à  Dakar  demain,  vers  10  ou  11  heures. 
C'est  l'agréable  perspective  d'un  après-midi  qui  ne  s'écoulera 
pas  inoccupé. 

Dakar 

2  août.  —  Distrait  par  un  passager  qui  chante  admirable- 
ment en  s'accompagnant  au  piano,  j'ai  peine  à  tracer  quelques 
lignes. 

Je  me  suis  éveillé  ce  matin  la  tête  un  peu  lourde. 

De  bonne  heure  j'ai  été  chassé  de  ma  cabine  par  la  chaleur 
étouffante  qui  y  règne  et  que  nous  vaut  sans  doute  l'approche 
de  l'Equateur. 

Du  pont,  où  nous  nous  sommes  tous  réfugiés,  j'admire  le 
paysage  côtier,  l'île  de  Gouix.  paquet  de  verdure  d'où  émer- 
gent quelques  toits. 

Lentement,  très  lentement,  après  bien  des  virages  et  des 
évolutions  à  travers  la  rade,  VEurope  vient  s'amarrer  le  long 
des  quais. 

Quelques  élégantes  de  Dakar  sont  noyées  dans  la  foule 
bariolée  des  nègres  aux  vêtement-^;  les  plus  disparates.  Et, 
dominant  cette  foule  noire,  de  nqajestueux  parasols,  de 
couleurs  non  moins  criardes,  étendent  une  ombre  relative. 

Après  le  repas  nous  descendons  à  terre.  Après  la  tradition- 
nelle visite  aux  marchands  de  cartes  postales  et  à  la  poste  où 
je  trouve  un  Oranais,  M.  Fédérici,  j'entreprends  en  compagnie 
du  lieutenant  L...  une  promenade  à  travers  la  ville.  Si  ce 
n'était  cette  foule  nègre,  aux  vêtements  pittoresques,  qui  déam- 
bule à  travers  les  rues,  encombre  les  guichets  postaux,  et  se 
rencontre  dans  toutes  les  boutiques,  on  se  croirait  dans  la 
plus  européenne  des  villes. 

Les  remarques  de  mon  compagnon  marié  à  une  artiste  et 
artiste  lui-même  me  font  goûter  davantage  l'intérêt  et  le  char- 
me que  les  groupes  de  nègres  offrent,  à  nos  yeux  amusés,  dans 
la  rue.  au  marché,  dans  les  boutiques  ou  dans  leurs  intérieurs. 
Aussi  ma  bobine  de  pellicules  s'épuise  rapidement  et,  lors- 
qu'un groupe  de  cavaliers  et  piétons  nègres,  merveilleux  de 


b 


VERS    I.E    TfMIAD  323 

couleur  locale,  ?e  présente  devant  nnns,  je  suis  navré  de  ne 
pouvoir  fixer  ce  ta])ieau  (|ui.  rendu  par  un  bon  peintre,  obtien- 
drait un  succès  de  fou  rire. 

Vers  6  heures  nous  rentrons.  Deux  cent  cinquante  sénégalais 
avec  leurs  femmes  ont,  entre  temps,  été  embarqués.  Tout  ce 
monde  entassé,  empilé,  remue  en  un  grouillement  noir  d'où 
se  dégage  une  forte  odeur  de  poisson  faisandé. 

A  8  heures  la  sirène  fait  entendre  son  mugissement  rauque 
et  nous  partons. 

Dî/  3  aoiit.  —  Demain  dans  la  matinée  nous  toucherons  à 
Konakry  où  une  partie  des  passagères  qui  faisaient  les  char- 
mes du  bord,  débarqueront. 

La  mer  est  houleuse.  Le  temps  est  lourd.  Nous  tanguons 
fortement  et  sommes  légèrement  incommodés. 


Konakry.  —  Tabou 

Du  4  août.  —  Nous  arrivons  de  bonne  heure  en  vue  de 
Konakry.  Une  brume  assez  épaisse  voile  le  paysage.  Une  pluie 
fine  et  serrée  rend  le  séjour  sur  le  pont  désagréable.  La  marée 
nous  oblige  à  mouiller  au  large,  à  environ  un  mille  et  demi 
du  quai.  La  pluie  qui  ne  cesse  de  tomber,  la  mer  qui  est  assez 
démontée,  rendent  l'embarquement  sur  les  chaloupes  et  les 
transports  à  terre  très  difficile.  Et  pourtant  la  visite  de  Kona- 
kry ne  manquerait  certainement  pas  d'intérêt  :  ses  toits  rou- 
ges, apparaissant  timidement  derrière  un  rideau  de  verdure, 
dénoncent  un  site  charmant. 

Dès  8  heures,  les  passagers  les  plus  courageux  s'embar- 
quent, la  pluie  fait  rage  et  leur  frêle  esquif  balloté  par  les 
vagues  avance  péniblement. 

Un  moment  d'accalmie  encourage  d'autres  passagers  à  ris- 
quer la  descente  à  terre.  Une  partie  d'entre  eux  sont  à  peine 
installés  que  la  danse  recommence.  Une  fillette  mnnque  de 
tomber  à  l'eau  et  reste  en  panne  avec  sa  mère  sur  ['Europe 
tandis  que  le  père  part  dans  le  canot.  Une  dame  voit  ses  jupes 
retroussées  jusqu'à  la  ceinture  par  une  forte  lame  et  prend 
un  fameux  bain  de  siège. 

F.nfin,  vers  midi,  les  derniers  passagers  destinés  à  Konakry 
favorisés  par  un  temps  calme  arrivent  à  débarquer  et  nous 
repartons. 

Du  5  août.  —  Décidément  cela  ne  va  plus.  La  mer,  qu'on 
nous  avait  annoncée  comme  devant  être  d'huile  à  partir  de 
Dakar,  est  au  contraire  très  houleuse.  Le  roulis  et  le  tangage 


324  VERS    LE    TCHAD 

combinée,  nous  font  éprouver  des  sensations  qui,  pour  être 
nouvelles,  n'en  sont  pas  moins  désaiiréables.  La  salle  à  munger 
n'est  plus  aussi  fréquentée  à  l'heure  des  repas,  mais,  jusqu'à 
présent,  j'ai  tenu  le  coup,  quoique,  par  moments,  je  sente  un 
vague  à  l'âme  peu  rassurant. 

Du  6  août.  —  La  monotonie  du  voyage  m'oblige  à  écourter 
ma  relation  quotidienne.  La  mer  continue  à  nous  secouer  de 
la  façon  la  plus  désagréable.  Dès  7  heures,  nous  filons  le  long 
des  côtes  couvertes  d'une  végéfalion  qu'à  la  lunette  je  juge 
luxuriante.  Nous  comptons  sept  à  huit  villages  nègres  dissé- 
minés le  long  de  la  lisière  de  la  forêt,  leurs  cases  grises  sont 
rendues  presque  invisibles  par  la  brume. 

Vers  8  heures,  nous  mouillons  à  un  mille  de  Tabou  (Côte 
d'Ivoire)  où  rien  n'a  été  fait  pour  faciliter  un  débarquement 
que  la  barre  lend  très  périlleux.  Il  y  une  huitaine  de  jours 
une  embarcation  a  chaviré  entraînant  la  mort  de  trois  ou  qua- 
tre Européens  qui  y  avaient  pris  place. 

Taljou  est  un  simple  petit  poste  sur  lequel  flotte  le  drapeau 
tricolore  et  qui  compte  trois  ou  quatre  bâtiments  en  pierre  dis- 
séminés dans  le  bois  et  flanqués  à  droite  et  à  gauche  de  cases 
nègres  :  les  unes  rondes  à  toit  conique,  les  autres  affectant  la 
forme  de  constructions  en  pierre  d'aspect  rectangulaire. 

A  Tabou,  V Europe  embarque  soixante  auxiliaires  nègres  qui, 
jusqu'à  Matadi  et  retour,  remplaceront  les  chauffeurs,  souliers 
et  autres  ouvriers  blancs  du  bord  dont  la  besogne  est  rendue 
très  pénible  par  la  chaleur. 

On  m'annonce  que  nous  toucherons  à  Bassam  demain  de 
bonne  heure.  Je  me  hâte  donc  de  terminer  mon  récit  pour  que 
le  bateau  belge,  passant  le  12,  emporte  ma  correspondance  qui 
parviendra  à  Oran  alors  que,  par  la  voie  fluviale,  je  voyage- 
rai à  travers  le  continent  noir. 

Depuis  Dakar,  nous  portons  le  casque.  Je  m'habitue  diffici- 
lement à  cette  coiffure  aussi  encombrante  qu'incommode. 


Grand-Bassam.  —  Cotonou 

Décidément  la  mer  si  gentille  au  début  persiste  à  bouder  et 
cela  ne  va  pas...  Ce  n'est  pas  tout  à  fait  le  mal  de  mer,  mais 
une  lourdeur  de  tête  qui  me  rend  incapable  de  tout  travail. 

Ce  matin,  de  bonne  heure,  nous  avons  mouillé  à  hauteur  de 
Grand-Bassam,  mais  là  encore,  une  barre  dangereuse  rend  le 
débarquement  difficile.  Pour  remédiera  cet  inconvénient,  une 
société  a  construit  un  \varf  métallique  qui,  partant  de  la  terre, 


k 


VERS    T.K    TCHAD  -325 

s'avance  au  delà  de   la  barre  et  pennel   aux   voyageurs  de 
débarquer  sans  risquer  la  dernière  baignade. 

Dans  une  nacelle  en  bois,  assez  semblable  aux  landeaux  des 
manèges,  quatre  passagers  prennent  place.  Au  moyen  d'un 
palan  ce  panier  est  déposé  dans  une  pirogue  qui  transporte 
contenant  et  contenu  jusipi'au  warf.  Là  par  ce  même  procédé 
le  panier  est  hissé  sur  le  pont  oii  les  [passagers  débarquent 
définitivement.  Cette  petite  opération  coûte  10  francs  par 
personne. 

Pour  les  tirailleurs  sénégalais  et  leurs  familles  on  prend 
moins  de  gants  :  colis,  passagères  et  passagers  s'entassent, 
s'empilent  dans  un  panier  de  gros  cordages.  C'est  à  la  fois, 
comique  et  honteux:  honteux  parce  qu'à  moins  d'être  inhumain 
absolument,  on  ne  peut  voir  sans  pitié  ces  malheui'euses  né- 
gresses pressées  les  unes  contre  les  autres  avec  leurs  mioches 
qui  hurlent  à  moitié  étranglés  par  les  cordages,  étouffés  par 
les  corps  au  milieu  desquels  ils  dis[iaraissent  ;  c'est  comique, 
parce  que  l'entrée  en  contact  du  panier  et  de  la  pirogue  s'accom- 
pagne toujours  d'un  choc  qui  amène  l'écroulement  de  cette 
grappe  humaine  et  c'est  alors  un  fouillis  de  bras,  de  jambes, 
de  tètes  crépues  émergeant  d'un  chaos  de  colis  de  toutes  sor- 
tes. L'etïarement  des  pren)iers  débarqués  est  encore  plus  drôle 
car,  dès  qu'un  nouveau  panier  opère  sa  descente,  ils  le  consi- 
dèrent avec  inquiétude  se  demandant  s'il  ne  va  pas  leur  tom- 
ber sur  la  tête. 

Heureusement  pour  eux,  ils  prennent  la  chose  très  philoso- 
phiquement et,  bientôt,  leur  face  s'éclaire  du  plus  large 
sourire. 

A  midi,  nous  repartons  sur  Cotonou.  La  soirée  se  passe 
assez  agréablement  au  salon  où  quelques  jeux  sont  organisés. 

Du  S  août.  —  Le  temps  est  encore  brumeux.  Un  pâle  soleil 
argenté  la  surface  de  la  mer  qui  paraît  se  calmer. 

L'après-midi  se  passe  encore  sur  le  pont,  à  jouer  au  «  furet» 
et  autres  facéties  du  même  genre.  Les  enfants  exclus  du  jeu, 
sont  tout  ahuris  de  nous  voir  leur  faire  concurrence. 

Dans  la  soirée  la  mer  se  calme,  le  soleil  brille  et  une  bande 
de  marsouins  suit  le  bateau  se  livrant  à  des  ébats  que  nous 
suivons  avec  le  plus  grand  intérêt. 

Du  a  août.  —  Depuis  hier  soir,  à  7  heures,  nous  sommes 
en  vue  de  Cotonou.  L'immobilité  complète  du  bateau,  une 
fraîche  brise,  un  beau  clair  de  lune  nous  ont  permis  de  vivre 
quelques  heures  délicieuses. 

De  bonne  heure  nous  nous  sommes  levés  pour  assister  au 
départ  de  la  famille  G...  Avec  le  départ  de  ces  demoiselles 


326  VERS    LE    TCHAD 

finissent  les  longues  causeries,  le  badinage,  les  jeux  de  socié- 
té, la  musique,  etc.  C'est  un  peu  la  gai  té  du  bord  qui  s'en 
va  avec  elles... 

Du  10  août.  —  Je  n'ai  rien  de  saillant  à  noter  aujourd'hui. 

Encore  cinq  jours  et  celte  longue  et  fastidieuse  traversée 
prendra  fin  ! 

Demain  escale  à  Libreville. 

Du  il  août.  —  Nous  mouillons  à  hauteur  de  la  capitale  du 
Gabon  vers  5  heures.  A  6  heures,  un  officier  en  grande 
tenue  monte  à  bord  avec  une  escorte  de  sénégalais.  Il  vient 
prendre  le  drapeau  du  régiment  du  Gabon  reçu,  à  Paris,  par 
la  délégation  envoyée  à  la  revue  de  Longchamps. 

Nous  nous  disposons  à  descendre  à  terre  pour  assister  à  la 
prise  d'armes  qui  doit  avoir  lieu.  Mais  à  notre  grand  désap- 
pointement, l'accès  des  canots  de  la  flottille  nous  est  interdit 
et  nous  restons  à  bord  toute  la  journée. 

Du  i2  août  —  Ayant  quitté  Libreville  la  veille  à  6  heures 
du  soir,  nous  touchons  à  Cap  Lopez  dans  la  nuit,  et,  dès  4  heu- 
res du  matin,  c'est,  à  bord  du  bateau,  un  branle-bas  de  tous 
les  diables  qui  nous  empêciie  de  dormir. 

Là  encore  pas  de  service  privé  pour  la  descente  à  terre. Gap 
Lopez  présente  le  même  aspect  que  les  autres  ports  oia  nous 
avons  fait  escale  :  c'est  toujours  un  éparpillement  de  maisons 
dans  une  masse  de  verdure  très  luxuriante. 

Du  13  août.  —  Nous  voilà  de  nouveau  en  pleine  mer.  Vrai- 
ment, on  ne  se  croirait  pas  dans  les  régions  équatoriales.  Il 
fait  un  froid  de  loup  qui  nous  oblige  à  tenir  les  cabines  fer- 
mées et  à  nous  vêtir  de  vêtements  de  drap.  Ma  vareuse  colo- 
niale m'est  en  cette  occasion  d'un  précieux  concours. 

Nous  entrerons  demain  tnatin  dans  l'estuaire  du  Congo  et 
nous  toucherons  à  Matadi  dans  la  soirée. 

Ce  sera  la  fin  de  cette  monotone  traversée  que  je  trouverai 
peut-être  plus  longue  à  mon  l'etour,  mais  que  je  ferai  d'un 
cœur  plus  allègre.  In  cha  Allah  ! 

Du  14  août.  —  Depuis  ce  matin  nous  remontons  le  Congo. 
Evidemment  ce  n'est  plus  le  Chélitï,  ni  la  Moulouya.  Tout  le 
long  de  la  rive  c'est  un  décor  merveilleux,  un  panorama  féeri- 
que. Il  semble  que  l'on  fait  défiler  devant  nos  yeux  émerveillés 
un  film  cinématographique  interminable. 

Leileuveesttout  parsemé  d'îlots  recouverts  d'une  végétation 
puissante  et  entre  lesquels  ['Europe  suit  lentement  et 
prudemment  son  chemin. 

Nous  avons  dépassé  Bassam  et  Boma  ;  dans  trois  heures 
nous  atteindrons  .Vlatadi  après  avoir  franchi  le   «  Chaudron 


VERS    LE    TCHAD  327 

d'Enfer  »  formidable  goiitfre  où  le  Con^o  alleiiit  un  fond  de 
plus  de  1. 100  mètres  parait-il. 

Il  sera  troptard  pour  débarquer  et  nous  coucherons  à  bord, 
.l'aime  autant  cela.  Pour  nous  occuper  de  nos  affaires  nous 
aui'ons  plus  de  temps  et  nous  ne  serons  pas  bousculés  |)ar 
l'approche  de  la  nuit. 

Matadi.  —  Brazzaville 

Du  15  août.  —  Nous  av'ons  débarqué  ce  matin  à  Matadi. 
Nous  quittons  là  VEaroije  qui,  son  voyage  terminé,  repartira 
pour  Bordeaux  d'ans  quelques  jours. 

Matadi  (Congo  Belge)  est  infiniment  plus  agréable  que  le 
livre  du  capitaine  Deschamps  ne  le  ferait  croire.  Il  est  vrai 
que  tout  est  relatif  dans  la  vie.  J'ai  eu  le  bonheur  d'y  arrivei- 
à  la  bonne  saison  ;  température  agréable,  pas  de  moustiques, 
expédition  facile  des  bagages  sans  paiement  d'excédent,  com- 
pagnie de  camarades  expérimentés.  Par  exemple  il  ne  faut 
pas  être  difficile  au  sujet  des  hôtels  :  lits  et  matelas  en  crin, 
moustiquaire  retapée,  pas  toujours  de  siège  et  pas  de  serviette 
de  toilette.  Quanta  la  nourriture.  .  à  l'avenant.  Le  tout  pour 
la  modique  somme  de  15  francs  par  jour. 

Matadi  est  vraiment  curieux  avec  ses  maisons  en  bois 
couvertes  de  tôle  endulée  ;  celles  en  pierres  sont  rares.  On 
sent  la  nécessité  qu'on  y  éprouve  de  se  mettre  à  l'abri  des 
rayons  du  soleil  et  des  bestioles  plus  ou  moins  désagréables 
qui  pullulent  dans  le  pays. 

Toutes  les  maisons  sont  à  véranda.  Celles  en  planches  se 
distinguent  des  autres  au  matelas  d'air  ménagé  sous  la  cons- 
truction qui  est  supportée  par  des  piliers  en  briques. 

Quant  aux  rues  :  quelques-unes  sont  larges,  dallées;  la  plu- 
part grimpent  en  se  tortillant,  creusées  dans  le  rocher. 

Après  une  journée  passée  à  l'expédition  des  bagages,  nous 
prenons  le  train  pour  Thysville.  Au  début  nous  côtoyons  le 
Congo,  puis  l'abandonnons.  Tout  le  personnel  du  train  est 
nègre  :  mécaniciens,  chauffeurs,  serre-frein  ;  sauf  en  quelques 
stations  importantes,  les  chefs  de  gare  le  sont  aussi. 

Habitué  aux  trains  algériens  et  marocains,  la  lenteur  des 
trains  belges  ne  me  préoccupe  guère.  De  temps  en  temps  nous 
avons  des  pannes;  un  boulon  saute,  nos  nègres  le  remplacent 
par  une  ligature  en  fil  de  laiton  et  nous  continuons  à  mar- 
cher. Plus  loin  c'est  le  train  qui  nous  précède  qui  a  un  acci- 
dent de  machine.  Le  chef  de  gare  nous  offre  alors  une  audition 


I 


328  VERS    LE    TCHAD 

de  phonographe  pour  tromper  notre  attente.  Enfin,  cahin- 
caha!  nous  atteignons  Thysville  vers  7  heures  du  soir.  Là 
l'hôtel  est  confortable,  mais  la  nourriture  moins  bonne  encore 
qu'à  Matadi  et  c'est  15  francs  pour  le  dîner,  la  chambre  et  le 
repas  du  matin. 

Lelendemain  à6  heuresetdemie  nousquittonsThysvilledont 
je  n'ai  guère  vu  que  l'hôtel.  Dans  les  mêmes  conditions  que 
la  veille  nous  fiions  sur  Kinshassa  que  nous  atteignons  vers 
4  heures  du  soir.  Là,  nous  retrouvons  le  Congo.  A  5  heures, 
nous  prenons  passage  sur  un  bateau  à  roues  qui  nous  trans- 
porte à  Brazzaville,  où  nous  arrivons  à  la  nuit  tombante. 

Du  n  août.  —  Brazzaville  s'élend  en  boidure  du  fleuve  sur 
une  longueur  de  4  à  6  kilomètres  coupée  de  vastes  espaces 
sans  constructions. 

Le  seul  hôtel  qui  y  existe  est  distant  de  3  kil.  500  des  diffé- 
rents services  auxquels  nous  avons  affaire.  Les  fonctionnaires 
fixés  à  Brazzaville  se  font  transporter  en  pousse-pousse:  véhi- 
cule composé  d'un  fauteuil  reposant  sur  une  ou  deux  roues 
caoutchoutées.  Une  paire  de  brancards  se  trouve  à  l'avant, 
une  autre  paire,  à  l'arrière.  Deux  nègres,  l'un  traînant,  l'autre 
poussant,  véhiculent  le  client  à  travers  la  ville,  au  pas  ou  au 
trot,  au  gré  du  promeneur. 

Quant  à  nous,  pauvres  passagers,  nous  n"avons  à  compter 
que  sur  la  vigueur  de  nos  jambes  et,  à  la  fin  de  la  journée,  le 
chemin  parcouru  se  chiffre  par  18  à  20  kilomètres  sur  des 
routes  couvertes  d'une  poussière  grise  qui  a  tôt  fait  de  changer 
lacouleur  de  nos  vêlements.  Nous  allons  rendre  la  visite  obli- 
gatoire au  Général  et  au  Gouverneur.  Celui-ci,  dans  un  court 
entretien  me  fait  entrevoir  une  prochaine  tournée  en  compa- 
gnie du  colonel  Largeau  à  travers  tout  le  pays.  Il  est  probable 
que  je  resterai  à  Fort-Lamy. 

Notre  journée  s'est  passé  hier  et  se  poursuit  aujourd'hui  à 
compléter  nos  approvisionnements  et  refaire  nos  bagages. 

Dans  neuf  jours,  il  faudra  recommencer  à  Bangui. 

Dit  18  août.  —  Enfin  je  viens  d'achever  l'expédition  de  mes 
bagages,  ce  n'est  pas  un  mince  soulagement.  Le  prix  du  trans- 
port est  de  365  francs  la  tonne  avec  un  droit  de  transport 
gratuit  de  400  kilogrammes.  On  peut  donc  avoir  à  payer  un 
supplément  pour  excédent  important,  si  on  n'arrive  pas  à  le 
repartir  entre  voyageurs.  iJne  autre  dépense  s'impose  ;  c'est 
celle  relative  à  la  rétribution  due  aux  porteurs  supplémen- 
taires que  l'on  doit  utiliser  sur  la  route  d'étapes  pendant  dix 
jours,  à  raison  de  8  à  10  francs  :  environ  80  francs. 

21  août.  —  Encore  deux  jours  et  je  quitterai   Brazzaville 


I 


VERS    LE    TCHAD  329 

qui  est  biea  le  lieu  le  plus  désagréable  du  voyage.  Aussi  quit- 
lei-ai-je  la  capitale  de  rAt'ri(]ue  Ecjualoriale  avec  la  plus  vive 
satisfaction,  souhaitant,  tout  de  même,  y  revenir  en  bonne 
santé  dans  deux  ans!  Je  dis  deux  ans  parce  que,  renseigne- 
!nents  pris,  le  séjour  de  vingt-quatre  mois  ne  compte  que  du 
jour  (le  notre  arTivée  ici  et  ne  prend  lin  que  le  jour  de  notre 
retour  dans  ce  centre. 


A  bord  de  1'  «  Alexandre  Fondère  » 

25  août.  —  Voilà  exactement  un  mois  que  je  me  suis  embar-' 
que  à  Bordeaux  et  il  me  semble  que  mon  voyage  dure  depuis 
une  éternité.  Dieu!  que  cette  oisiveté  me  pèse  et  combien  il 
me  tarde  d'atteindre  le  but  pour  m'occuper. 

Me  voici  à  bord  du  Fondère  en  route  vers  Bangui,  chef-lieu 
de  rOubangui-Ghari-Tchad. 

Noire  bateau  est  un  vapeur  muni  à  l'arrière  de  deux  roues 
qui  lui  servent  d'appareil  de  propulsion.  Il  mesure  45  mètres 
de  long,  environ  10  de  large  et  compte  deux  ponts.  Sur  le 
premier  logent  le  personnel  nègre  du  bateau  et  les  passagers 
de  même  race.  Tous  gisent  épars  au  milieu  des  marchandises 
et  du  bois  employé  comme  combustible  à  la  chaufferie.  Sur  le 
second  pont,  superposé  au  premier,  se  trouvent  18  cabines, 
qui  reçoivent  chacune  deux  passagers,  le  réfectoire,  la  salle 
de  douche,  etc.  Enfin,  surmontant  le  tout,  se  trouve  le  loge- 
ment du  capitaine.  Sauf  celui-ci,  tout  l'équipage  est  noir, 
chauffeurs,  mécaniciens,  hommes  de  peine,  cuisiniers,  maitre 
d'hôtel  et  serviteurs.  Ces  derniers,  très  graves  dans  leurs 
fonctions,  ont  tous  le  cou  immobilisé  par  un  faux  col  impec- 
cable, mais  vont...  pieds  nus. 

Flanqué  à  bâbord  et  à  tribord  de  deux  couples  de  balei- 
nières, qui  ressemblent  à  autant  de  nageoires,  notre  bateau, 
vu  de  haut,  doit  paraître  un  énorme  cétacé. 

Tous  ces  canots  sont  destinés  à  recevoir  le  bois  et  les  passa- 
gers nègres  que  l'on  n'a  pu  loger  sur  le  premier  pont. 

Après  de  pénibles  efforts  pour  se  décoller  d'un  fond  de  sable 
['Alexandre  Fondère  quitte  Brazzaville  le  Si3  vers  9  heures. 

Jusque  vers  midi,  c'est  le  même  paysage  d'îlots  verdoyants, 
de  rives  le  long  desquelles  s'étend  un  étroit  rideau  d'arbres 
masquant  de  vastes  étendues  broussailleuses. 

Au  milieu  du  jour,  nous  arrivons  au  premier  des  postes  à 
bois  qui  s'échelonnent  le  long  des  rives  jusqu'à  Bangui  et  où 


22 


'^30  VERS    LE    TCHAD 

les  nombreux  petits  vapeurs,  qui  remontent  et  redescendent 
le  Congo,  s'approvisionnent  en  combustible. 

Après  un  arrêt  de  deux  heures,  notre  bateau  ayant  fait  son 
plein  de  bois,  nous  repartons.  Le  lit  du  Congo  se  rétrécit 
(c'est-à-dire  qu'il  n'a  plus  que  12  à  1.500  mètres  de  largeur); 
nous  nous  engageons  dans  le  couloir  dont  nous  sortirons 
vers  5  heures. 

Le  couloir  est  un  passage  que  s'est  creusé  le  Congo  à  travers 
une  longue  file  de  collines  peu  élevées.  Ne  connaissant  pas  la 
vitesse  du  bateau,  je  ne  puis  apprécier  la  longueur  du  couloir. 

Dès  que  nous  le  quittons,  le  lit  du  fleuve  s'élargit  de  nou- 
veau pour  redevenir  ce  que  je  l'avais  vu  au  début. 

Du  36  août.  —  Les  rives  du  Congo  ont  disparu;  à  droite  et  à 
gauche,  de  tous  côtés,  nous  ne  voyons  plus  que  des  îles.  Les 
berges  sont  loin,  très  loin,  nimbées  d'une  buée  bleue  qui 
s'élève  au  pied  des  montagnes  qui  bornent  l'horizon. 

Depuis  le  matin,  nous  côtoyons  ces  îlots  qui  me  paraissent 
se  ressembler  tous.  .Te  me  demande  comment  le  commandant 
du  bateau  peut  reconnaître  sa  route  dans  ce  labyrinthe.  Il  est 
vrai  qu'il  y  a  plus  de  dix  ans  qu'il  navigue  sur  le  Congo.  Il 
doit  commencer  à  le  connaître. 

Vers  midi  nous  nous  arrêtons  à  Bolobo,  en  territoire  belge. 
De  nombreux  boys  nègres  viennent  nous  proposer  des  cannes 
en  ébène  ou  en  acajou  à  poignée  d'ivoire.  Je  juge  inutile  de 
m'en  encombrer  maintenant. 

Le  capitaine  éprouve  une  déconvenue  à  Bolobo.  Sa  provision 
de  bois  touche  à  sa  fin  et  il  n'y  trouve  pas  la  quantité  sur 
laquelle  il  comptait  pour  continuer  sa  route. 

Nous  repartons  vers  1  heure  et,  peu  de  temps  après,  nous 
apercevons  au  large  une  bande  de^  cinq  hippopotames  qui 
naviguent  de  conserve.  Le  capitaine  G...  arme  sa  carabine, 
mais  réfléchit  et  ne  tire  pas.  Ils  sont  trop  loin,  dit-il,  ce  serait 
un  meurtre  inutile  et  surtout  une  balle  perdue  sans  aucun 
profit. 

Un  peu  plus  loin  je  fais  connaissance  d'un  nouveau  repré- 
sentant de  la  faune  aquatique  congolaise,  le  canard  à  aiguille. 
Noir,  d'une  forme  allongée,  cet  oiseau  vole  en  rasant  les  flots, 
plonge  et  disparaît,  ne  laissant  émerger  que  son  bec  efîilé  qui 
se  dresse,  tel  une  pointe,  hors  de  l'eau. 

Des  compagnons  de  voyage  moins  favorisés  que  moi  ont  déjà 
un  contact  plus  intime  avec  les  insectes  du  pays.  Quatre  ou 
cinq  d'entre  eux  ont  du  se  débarrasser  de  puces  chiques,  insec- 
tes indiscrets  et  peu  gênés  dont  le  capitaine  Deschamps  décrit 
les  mœurs  dans  son  ouvrage. 


I 


VERS    LE    TCHAD  331 

Nous  arrivons  au  soir-  n'ayant  plus  de  bois.  Force  est  de 
nous  arrêter  et  de  passer  la  nuit  auprès  d'un  iiotoij  le  person- 
nel nègre  du  bord  tait  une  provision  qui  nous  permettra 
d'atteindre  demain  Massaka,  le  prochain  poste  à  bois. 

Du  27  août.  —  Vers  0  heures,  nous  avons  eu  un  orage.  Une 
pluie  abondante  est  venue  à  point  rafraîchir  la  température 
qui  s'élève  à  mesure  que  nous  remontons  le  Congo. 

A  11  heures,  nous  atteignons  Massaka  où  le  bateau 
prend  son  bois.  Nous  repartons  vers  2  heures  et  sommes  dis- 
traits par  les  ébats  d'hippopotames  dont  l'énorme  mufle  seul 
émerge  de  l'eau.  Le  capitaine  G...  s'arme  de  sa  carabine,  puis 
la  remet  en  place  déclarant  que  le  gibier  est  trop  éloigné. 
Ce  sera  pour  une  autre  fois. 

Une  troisième  fois  les  hippopotames  se  montrent.  Notre 
capitaine  se  laisse  tenler  par  la  distance  et  en  tire  un.  Le  coup 
est  très  court  et  l'animal  effarouché  disparaît  sous  l'eau  un 
certain  temps  pour  ne  plus  montrer,  à  de  longs  intervalles, 
qu'une  faible  partie  de  son  énorme  tête. 

Du  28  août.  —  Après  avoir  passé  la  nuit  à  Loukolé,  nous 
atteignons  Liranga  vers  le  milieu  du  jour.  Nous  y  débarquons 
deux  passagers,  l'un,  administrateur,  l'autre,  directeur  des 
travaux  publics  qui  doivent  s'occuper  de  l'installation  de  la 
T.  S.  F. 

Rien  de  saillant  pendant  cette  journée  qui  se  termine  par 
un  magnifique  coucher  de  soleil.  Il  me  faudrait  la  plume 
d'un  Chateaubriand  pour  le  décrire.  Les  derniers  i-ayons 
viennent  caresser  la  surface  de  l'eau  qui  ondule  en  un 
chatoiement  de  soie  moirée  et  le  battement  des  roues 
laisse  derrière  notre  vapeur  une  traînée  qui  brille  de  mille 
feux. 

Du  29  août.  —  A  Liranga,  nous  avons  quitté  le  Congo  pour 
le  Bangui.  Le  paysage  n'a  guère  changé,  mêmes  eaux  limo- 
neuses, même  abondance  d'îles.  Toutefois  celles-ci  sont  plus 
resserrées,  nous  ne  naviguons  plus  que  dans  une  série  de 
couloirs  qu'elles  ont  creusés  et,  de  quelque  côté  qu'on  se  retour- 
ne, l'horizon  est  barré  par  un  rideau  impénétrable  de  verdure. 
J'ai  vu,  dans  la  matinée,  mon  premier  caïman.  Il  reposait  sur 
un  banc  de  sable  ;  notre  approche  lui  a  fait  regagner  l'eau 
avec  précipitation,  mais  non  sans  lourdeur. 

A  10  heures,  nous  touchons  à  Djoungo  où  le  bateau  fait  sa 
provision  de  bois.  Je  tire  une  veuve,  petit  oiseau  à  longue 
queue  noire  à  reflets  bleuâtres,  et  un  autre  passager  me  remet 
un  gendarme  à  tête  noire,  gorge  rouge  veloutée,  ventre  jaune 
et  dos  jaune  et  gris.  Malheureusement  le  formol  et  la  seringue 


332  VERS    LE    TCHAD 

que  j'ai  achetés  à  Bordeaux  sont  dans  une  cantine  au  fond  de 
la  cale  et  ne  pouvant  rien  faire  pour  conserver  ces  gentilles 
bestioles,  je  suis  obligé  de  m'en  défaire. 

Nous  quittons  Djoungo  vers  midi  et,  peu  de  temps  après, 
faisons  la  rencontre  de  deux  bateaux  à  peu  près  de  même  type 
que  le  nôtre.  Les  commandants  se  connaissent  sans  doute, 
car  ils  se  font  signe,  s'ariètent,  se  rapproc  hent  et,  d'un  bord 
à  l'autre,  font  la  causette. 

C'est  franchement  amusant  ;  cela  me  rappelle  l'arrêt  de 
deux  diligences  se  croisant  sur  une  route,  la  petite  conversa- 
tion entre  les  cochers  qui  arrangent  la  mèche  de  leur  fouel, 
et  l'impatience  des  voyageurs  qui  pestent  et  les  envoient  à 
tous  les  diables. 

Nous  reprenons  notre  route  et,  pour  la  deuxième  fois  au 
cours  de  notre  voyage,  franchissons  l'Equateur  ;  mais,  main- 
tenant, pour  entrer  dans  l'hémisphère  boréal. 

Du  30  août.  —  Rien  de  bien  intéressant  aujourd'hui.  Dans 
la  soirée  nous  avons  été  surpris  par  un  fort  orage.  Une  énor- 
me quantité  d'eau  est  tombée  en  quelques  heures.  La  nuit 
très  noire  ne  permet  plus  aux  barreurs  de  conduire  la  marche 
du  bateau  et  la  prudence  oblige  le  commandant  à  accoster. 

Du  3i  août.  —  Partis  de  bonne  heure  nous  arrivons  à 
8  heures  à  Ifondo  (  Desbordevillej,  très  gentil  coin  où,  avec  de 
faibles  moyens,  les  coloniaux  se  sont  installés  aussi  conforta- 
blement que  possible. 

Le  capitaine  commandant  d'armes  nous  fait  visiter  sa  tuile- 
rie où  :  briques,  tuiles  rondes,  tomettes  pour  carrelage, 
colonnettes  pour  vérandas  sont  en  fabrication.  L'absence  de 
la  pierre  dans  ces  terrains  d'alluvion  oblige  à  faire  de  la  cons- 
truction en  briques.  La  forêt  qui  environne  le  poste  fournit 
le  bois  de  charpente  ;  avec  le  feuillage  des  arbres  on  fait  une 
couverture  de  fortune  qui  donne  à  ces  constructions  le  meil- 
leur aspect.  De  petites  cases  individuelles  pour  chaque  ménage 
de  sénégalais  sont  correctement  alignées  et  leur  entourage 
de  verdure  leur  donne  un  cachet  de  gaieté  que  l'on  ne  ren- 
contre guère  dans  les  camps. 

Vers  2  heures,  nous  atteignons  un  second  poste  mili- 
taire: Doungou.  Celui-ci  est  encore  mieux  installé  que  l'autre  ; 
les  jardins  surtout  sont  admirablement  entretenus  et  pour- 
raient rivaliser  avec  les  plus  jolis  parterres. 

Gomme  dans  la  plupart  des  points  où  nous  sommes  déjà 
passés,  nous  trouvons  des  citronniers  chargés  d'innombrables 
petits  citrons  très  juteux  avec  lesquels  nous  faisons  de  déli- 


VERS    I.E    TCHAn  333 

cieuses  citronnades.  Ces  fruits  ne  nous  cofitent  quo  la  peine 
de  les  ramasser. 

Du  4  septewhvp.  —  Nous  sommes  firrivés  hier  à  T3an^ui.  En 
compagnie  de  mes  compagnons  de  voyage  hors  cadi-es,  j'ai 
dîné  chez  le  Gouverneur  Intérimaire,  qui  a  été  très  aimable 
pour  tous. 

Du  5  septembre.  —  Nous  avons  quitté  Bangui  à  bord  d'un 
infect  petit  bateau  à  vapeur,  à  roues,  sans  cabines  et  dont  la 
chaufferie,  placée  au  beau  milieu,  nous  incommode  fortement 
pendant  les  heures  chaudes  de  la  journée.  C'est  le  luxe 
décroissant  :  après  VEuroje,  le  Pondère,  après  le  Pondère,  la 
Lorraine.  Quel  sacrilège  de  donner  un  pareil  nom  à  un  pareil 
bateau . 

Heureusement  nous  n'en  avons  eu  que  pour  la  journée.  Nous 
venons,  en  elTet,  d'arriver  à  Danga  où  s'improvise  un  camp 
en  plein  air.  Le  bateau  décharge  toutes  les  marchandises  qu'il 
transporte,  ainsi  que  les  bagages  des  passagers,  car  il  ne  peut 
traverser  le  Rapide  de  VEléphant;  ce  serait  trop  dangereux. 
Des  baleinières  conduites  par  des  pagayeurs  nègres,  d'une 
habileté  remarquable  dans  ce  genre  d'exercice,  transporteront 
le  tout  jusqu'à  M'bata  point  où  l'Oubangui  est  navigable. 

Du  6  septembre.  —  De  bonne  heure  les  bagages  ont  été 
chargés  sur  les  baleinières,  nous  nous  rendons  à  pied  à  M'bata 
préférant  user  de  ce  moyen  de  locomotion  plutôt  que  de  partir 
avec  les  embarcations. 

On  m'avait  parlé  d'une  douzaine  de  kilomètres,  mais  je 
m'aperçois  au  bout  de  trois  heures  de  marche  que  ces  12  kilo- 
mètres sont  élastiques.  La  chaleur  les  a  sans  doute  dilatés.  En 
réalité  il  y  en  a  bien  18. 

Quel  enchantement  que  cette  promenade  à  travers  cette 
forêt  tropicale  où  nos  regards  sondent  sans  pouvoir  pénétrer 
au  delà  de  2  ou  3  mètres.  De  temps  en  temps  le  sentier,  à 
travers  bois,  est  coupé  d'un  ruisseau  large  de  3  à  4  mètres 
que  nous  traversons  sur  de  modestes  ponts  en  branchages. 
Lorsque  le  marigot  est  moins  large  le  pont  se  réduit  à  trois 
ou  quatre  solives  plus  ou  moins  flexibles  fixées  ensemble  par 
des  lianes  et  jetées  en  travers.  La  passerelle  fléchit  sous  nos 
pas  et  nous  n'avançons  qu'avec  la  prudence  de  danseurs  de 
corde.  Cela  n'empêche  pas  le  vétérinaire  de  perdre  Téquilibre 
au  passage  d'un  de  ces  marigots  et  de  s'enfoncer  une  jambe 
dans  la  vase  jusqu'au  mollet. 

Parfois  le  bois  s'interrompt,  la  piste  traverse  la  brousse 
immense  couverte  de  graminées  qui  atteignent  jusqu'à 
3  mètres  de  haut  et  du  milieu  desquelles  s'élancent  des  arbres 


334  VERS    LE    TCHAD 

de  diverses  essences.  La  traversée  de  la  brousse  est  plus 
pénible  que  ceHe  des  bois.  Dès  que  le  soleil  est  un  peu  haut, 
il  fait  évaporer  toute  l'humidité  qui  s'est  répandue  sur  cette 
V  égétation  pendant  la  nuit  et  l'on  sent  une  chaleur  d'étuve 
monter  de  la  terre. 

Du  7  septembre.  —  Nous  avons  quitté  M'bata  ce  matin  sur 
un  petit  vapeur  à  roues  également  dépourvu  de  cabines,  mais 
moins  incommode  que  le  précédent  ayant  ses  chaufferies  à 
l'arrière,  séparées  de  l'avant  par  la  chambrette  du  capitaine. 

Vers  4  heures,  nous  arrivons  à  Possel  en  même  temps  que 
le  nouvel  administrateur  qui,  ayant  été  notre  compagnon  de 
voyage  depuis  Bordeaux,  se  montre  fort  aimable,  nous  envoie 
quelques  légumes  de  son  jardin  et  nous  fait  parvenir  un  beau 
cuissot  d'antilope. 

Du  9  septembre.  —  Nos  porteurs  sont  arrivés  enfin  dans  la 
matinée  et,  vers  10  heures,  nous  partons. 

Montés  sur  de  petits  chevaux  de  la  taille  d'un  bel  àne, 
nous  trottinons  derrière  nos  porteurs  qui,  peu  à  peu,  se 
sèment  et  font  de  multiples  haltes.  Nous  continuons  notre 
chemin  sans  trop  nous  préoccuper  de  nos  hommes  et  nous 
arrivons  vers  4  heures  à  la  première  étape. 

Le  commandant  B...,  dont  le  boy  est  un  gaillard  assez  âgé, 
a  ses  bagages  dès  son  arrivée.  Il  n'en  est  pas  de  même  pour 
ses  quatre  compagnons  de  route.  Nos  bagages  n'arrivent 
qu'un  à  un.  Trois  quarts  d'heure  après,  nous  sommes  rejoints 
par  le  capitaine  G...  suant  sang  et  eau  à  tirer  son  pousse- 
pousse  dont  les  pneus  ont  crevé. 

Cependant  nos  bagages  n'arrivent  toujours  pas  et  nous 
regardons  avec  anxiété  la  route.  Un -premier  groupe  paraît, 
l'un  des  porteurs  m'apporte  mon  lit.  J'aurai  au  moins  la 
satisfaction  de  me  reposer.  Vers  6  heures  mes  derniers  colis 
arrivent.  Je  ne  vous  en  cacherai  pas  ma  joie.  Le  vétérinaire 
peut  avoir  lui  aussi  tous  les  siens,  grâce  à  la  présence  d'esprit 
de  son  petit  boy  qui,  de  sa  propre  initiative,  est  allé  au  village 
voisin,  chercher  deux  porteurs  pour  remplacer  ceux  qui 
s'étaient  enfuis. 

iO  septembre.  —  Ce  matin  six  colis,  dont  deux  au  capi- 
taine G...  et  quatre  au  lieutenant  L...,  étant  restés  en  panne,  le 
commandant  décide  que  le  vétérinaire,  lui  et  moi  partions 
tandis  que  nos  malchanceux  compagnons  s'occuperont  de  leurs 
bagages  abandonnés  sur  la  route. 

Il  est  ainsi  fait;  mais,  ayant  encore  eu  le  tort  de  ne  pas 
talonner  nos  porteurs,  ceux-ci  n'arrivent  à  l'étape  que  vers 


VERS    LE    TCHAD  335 

2  heures,  ce  qui  nous  oblige  à  nous  nietlre  à  table  à  2  heures 
et  demie  seulement. 

A  M'broun,  nous  changeons  de  porteurs.  Rendu  méfiant 
par  les  deux  premièi-es  journées,  je  surveille  tnoi-méme  la 
marche  des  miens  qui,  cette  fois,  arrivent  au  but  à  peu  près 
en  même  temps  que  moi,  nialgré  les  nombreux  arrêts  aux 
abords  des  champs  de  mil,  maïs,  haricots,  patates,  dont  les 
propriétaires  leur  offrent  généreusement  les  produits  qu'ils 
mangent  crus. 

.l'ai  pu  remarquer  que  les  nègres,  menteurs,  chipeurs, 
voleurs  ont  le  mérite  de  ne  pas  être  égoïstes  et  de  toujours 
partager  avec  leurs  frères  ce  qu'ils  ont  comme  nourriture. 

J'en  avais  déjà  fait  l'observation  chez  nos  boys  dont  je  vous 
parlerai  avec  plus  de  détails  dans  la  lettre  que  je  pense  vous 
adresser  dans  six  jours  de  Fort-Crampel  où, l'attente  probable 
des  baleinières,  nous  obligera  à  faire  un  petit  séjour. 

i^  septembre.  —  Nous  sommes  arrivés  hier  à  Fort-Sibut 
après  une  étape  de  30  kilomètres.  Nos  camarades,  laissés  en 
route,  nous  ont  rejoints  aujourd'hui  ;  tandis  que  nous  parti- 
rons demain  matin,  eux-mêmes  nous  suivront  avec  une 
journée  de  retard. 


De  Fort-Sibut  à  Fort-Crampel 

Après  une  journée  de  séjour  à  Fort-Sibut,  nous  nous  som- 
mes mis  en  route  le  15  sur  Grampel.  Cette  fois  ce  n'est  plus  la 
piste  à  travers  bois  que  nous  suivons.  Au  pas  saccadé  de  nos 
petits  chevaux  qui  ne  voulaient  pas  quitter  le  poste,  ruant  et  se 
cabrant,  nous  allons  sur  une  route  presque  droite,  large  de 
plus  de  8  mètres,  plate  comme  un  billard,  tracée  pour 
servir  à  la  circulation  des  camions  automobiles  qui,  faute  de 
matériel  et  de  personnel,  restent  inutilisés. 

La  ligne  télégraphique  suit  cette  route  sur  laquelle  s'éche- 
lonnent, de  kilomètre  en  kilomètre,  les  hangars  à  poteaux  où 
huit  à  dix  de  ceux-ci  sont  tenus  en  réserve.  C'est  qu'il  s'en 
fait  une  belle  consommation  par  la  faute  des  termites  qui 
ont  tôt  fait  d'en  miner  la  base.  Aussi  de  temps  en  temps 
rencontrons-nous  un  groupe  de  nègres  substituant  un  poteau 
sain  à  un  autre  hors  d'usage. 

Sur  cette  superbe  route  où  de  beaux  et  solides  ponts  en 
pierre  ont  succédé  aux  rustiques  ponts  de  branchages  des 
pistes  nègres,  nous  rencontrons  des  voitures  Lefèvre  (toutes 


336  VERS    LE    TCHAD 

en  fer  à  cause  des  termites)  les  unes,  traînées  à  bras  par  des 
nègres,  les  autres,  attelées  de  trois  ou  quatre  chevaux.  Ce  che- 
min confortable,  ces  voitures  qui  circulent  nous  donnent 
l'illusion  que  nous  sommes  en  pays  civilisé. 

Partant  le  matin  de  bonne  heure,  nous  ne  passons  guère 
sur  la  route  qu'une  partie  des  heures  chaudes  de  la  journée  et 
atteignons  généralement  le  gîte  d'étape  vers  11  heures  ou 
midi.  De  cette  façon  nous  ne  souffrons  pas  du  manque  d'om- 
brage qui  différencie  tant  la  route  moderne  de  la  piste  à 
travers  bois. 

Les  gîtes  d'étapes  sont  construits  pour  la  plupart  sur  le 
même  modèle  et  sont  composés,  en  outre  du  logement  du 
gardien  nègre,  de  trois  ou  quatre  cases  pour  passagers,  avec 
des  hangars  pour  leurs  chevaux  et  leurs  porteurs.  Ces  cases 
en  torchis,  rondes  ou  carrées,  .sont  recouvertes  de  chaume 
et  constituent  des  abris  peu  luxueux  mais  suffisants. 

Six  étapes  séparent  Fort-Sibut  de  Crampel.  Nous  nous 
reposons  un  jour  à  Dékoa  (3«  étape)  et  arrivons  le  sixième 
jour,  soit  le  21  septembre,  à  Fort-Crampel  vers  11  heures  et 
demie. 

En  arrivante  Fort-Crampel,  le  commandant  B...  va  voir  l'ad- 
ministrateur qui  l'avise  qu'il  a  reçu  du  colonel  Largeau  un 
télégramme  le  réclamant  d'urgence  et  l'invitant  à  m'emmener 
avec  lui  si  je  voyage  en  sa  compagnie.  L'administrateur  est 
embarrassé  car  il  n'a  qu'une  baleinière  sous  la  main  et  le 
commandant  a  droit,  à  lui  seul,  à  une  embarcation  en  qualité 
d'officier  supérieur.  Ce  dernier  résout  la  difficulté  en  décla- 
rant que  nous  nous  accommoderons  tous  deux  d'une  seule 
baleinière. 

Il  m'apprend  la  nouvelle  en  me  r-ejoignant  à  la  case  où 
nous  sommes  installés.  Quoique  j'eus  été  heureux  de  prendre 
quelque  repos,  je  prépare  immédiatement  le  départ  et,  nos 
bagages  ayant  été  pesés  et  embarqués,  nous  prenons  congé,  le 
lendemain  22,  à  7  heures,  du  brave  vétérinaire  f|ui  est  partagé 
par  le  regret  de  se  séparer  de  nous  et  la  satisfaction  de  pren- 
dre un  peu  de  repos. 

Je  l'ai  eu  comme  compagnon  de  cabine  sur  VEurope  ;  à 
Brazzaville  nous  avons  partagé  la  même  chambre  d'hôtel  ; 
sur  le  Fondëre  nous  avons  été  voisins  de  cabine  ;  à  Bangui 
nous  nous  sommes  de  nouveau  trouvés  réunis  dans  une  même 
chambre  et,  enfin,  dans  la  plupart  des  gîtes  d'étapes,  nous 
avons  logé  sous  le  même  toit.  En  sorte  que  nous  nous  sommes 
habitués  l'un  à  l'autre,  aussi  la  séparation  m'a-t-elle  été 
pénible. 


VERS    r,E    TCHAD 


337 


Sur  le   Gribingui 

Nous  voilà  donc  en  baleinière  sur  le  Gribingui.  L'embarca- 
tion, en  tôle  d'acier,  mesure  de  8  à  10  mètres.  Les  bagages 
sont  entassés  moitié  à  l'avant,  moitié  à  l'arriére  avec,  entre 
les  deux  tas,  un  espnce  de  1  m.  50  i\  2  iTiètres  où  le  comman- 
dant et  moi  avons  pris  place.  Nous  sommes  protégés  contre 
le  soleil  par  le  chimbeck,  sorte  de  toit  arrondi  fait  de  chaumes 
tressés. 

Nous  sommes  plus  ou  moins  commodément  installés  dans 
cet  espace  exigu,  à  peine  assez  large  pour  que  nous  nous 
y  placions  côte  à  côte  sur  nos  chaises.  Pour  comble,  nous 
sommes  envahis  par  les  mouches  tsé-tsé  et  je  ne  tarde  pas  à 
soufTrir  de  démangeaisons  insupportables.  Ne  pouvant  y 
tenir,  nous  installons  le  second  jour  une  moustiquaire  qui 
ferme  à  l'avant  notre  réduit.  Nous  préférons  étouffer  qu'être 
harcelés  par  les  désagréables  insectes.  Les  mouches  arrivent 
néanmoins  à  se  glisseï-  à  l'intérieur  et  nous  voilà,  toute  la  jour- 
née, le  commandant  et  moi,  aies  rabattre  contre  la  moustiquaire 
oîi,  prises  entre  les  plis,  elles  perdent  tous  leurs  moyens  et  se 
laissent  prendre  et  détruire.  Quelle  agréable  occupation  pour 
un  homme  de  46  ans  et  un  garçon  qui  en  n  26  ! 

La  navigation  est  lente  sur  le  Gribingui.  En  raison  des 
faibles  pluies,  il  y  a  peu  d'eau  et,  en  outre,  le  lit,  semé  de 
rapides,  oblige  à  une  navigation  prudente  qui  nous  ménage 
de  vives  émotions  lorsque  nous  passons  à  travers  tous  ces 
écueils.  Aux  rapides  de  l'Iréna,  les  plus  sérieux  du  parcours, 
notre  baleinière  est  prise  dans  le  remous,  ramasse  un  bon 
paquet  d'eau  par  l'avant,  donne  contre  un  rocher  à  l'arrière 
et  passe  néanmoins  sans  sérieux  accident.  Nous  avons  eu  là 
dix  secondes  de  véritable  angoisse. 

Le  commandant,  à  qui  on  a  dit  que  le  bateau  qui  tait  le 
service  entre  Fort-Lamy  et  Fort-Archambault  doit  quitter  ce 
dernier  point  le  29,  fait  tout  son  possible  pour  que  nous  y 
soyons  avant  le  départ  du  29.  Nous  partons  donc  tous  les 
matins  de  très  bonne  heure  et  ne  nous  arrêtons  que  le  soir 
à  la  nuit  tombante,  campant  sur  la  berge  où  les  moustiques 
et  un  tas  de  bestioles  qui  se  plaisent  dans  la  verdure  nous 
assaillent  et  nous  dévorent.  Mes  bras,  mes  jambes,  mes 
mains,  mes  cuisses  sont  couverts  de  piqûres  qui  provoqent 
des  démangeaisons  aussi  désagréables  qu'exaspérantes.  La 
nuit  j'en  perds  le  sommeil  et  mes  tourments  ne  prennent  fin 


338  VERS    LE    TCHAD 

que  lorsque  m'étant  jïratté  jusqu'au  sang  j'éprouve  une  brû- 
lure bien  plus  supportable  que  le  prurit. 

Pendant  mes  insomnies,  j'ai  pour  me  distraire  le  grogne- 
ment de  l'bippopolame  qui  barbotte  dans  l'eau  à  proximité 
des  berges,  ou  bien  le  mugissement  du  lion  en  chasse  au  loin 
dans  la  forêt. 

Dans  la  journée,  c'est  un  autre  geni-e  de  distraction,  tantôt 
ce  sont  des  bandes  de  cynocéphales  qui  courent  sur  les  bords 
de  la  rivière,  tantôt  un  caïman  qui  sommeille  la  gueule  ouverte 
sur  un  banc  de  sable  et  plonge  précipitamment  lorsque  le 
bruit  de  notre  approche  le  réveille.  D'autres  fois,  ce  sont  de 
petites  troupes  d'antilopes  venues  boire  à  la  rivière  qui  nous 
regardent  passer,  puis  s'éloignent  de  leur  allure  gracieuse  et 
légère,  non  sans  s'arrêter  plusieurs  fois  pour  nous  suivre  du 
regard.  Lorsqu'on  les  tire  elles  font  quelques  bonds  au  bruit 
de  la  détonation,  puis  s'arrêtent,  se  retournent  pour  se  défiler 
ensuite.  Le  commandant,  qui  ne  connaît  pas  encore  bien  le 
Lebel  africain  qu'il  a  acheté  avant  son  départ,  n'est  pas  heu- 
reux dans  son  tir.  Et  pourtant  il  n'est  pas  mauvais  tireur, 
car  il  n'est  pas  de  jour  où,  avec  son  fusil  de  chasse,  il  n'abatte, 
quelque  pigeon  vert  ou  quelque  pinlade.  Ce  dernier  gibier 
est  très  abondant  et  on  le  retrouve  dans  tout  le  pays  par 
bandes  de  dix,  douze  et  plus. 

Au  moment  précis  oîi  je  termine  cette  phrase,  les  boys 
nous  signalent  une  bande  d'antilopes.  Elles  sont  à  environ 
400  mètres,  .l'en  compte  quatorze  à  la  jumelle.  Le  commandant 
descend  à  terre  et  tire  avec  son  Lebel.  Il  n'a  pas  plus  de 
chance  que  les  fois  précédentes.  Je  le  rejoins  et  lire  sans  être 
plus  heureux.  En  tout,  huit  cartouches  brûlées  sans  que  ces 
pauvres  bêtes,  groupées  par  trois  oQ  quatre  aient  tenté  de 
s'enfuir.  Le  commandant  navré,  prend  alors  son  fusil  de 
chasse,  mais  celui-ci  se  trouve  inutilisable,  des  grains  de  sable 
ayant  pénétré  dans  les  batteries. 

Force  nous  est  de  renoncer  à  cette  proie  bien  tentante  et  de 
poursuivre  notre  chemin. 


Sur  le  Chari 

Aux  Irénas.  le  Gribingui  reçoit  le  Bamingui  avec  lequel  il 
forme  le  Chari.  La  rivière  devient  plus  large  et  les  bancs  de 
sable  se  multiplient  arrêtant,à  chaque  instant,  notre  baleinière. 
Les  pagayeurs  sont  alors  obligés  de  se  mettre  à  l'eau  et  de 
pousser  notre  embarcation  pour  la  renflouer. 


VERS    LE    TCHAD  339 

Enfin  nous  arrivons  le  28  soplembre  à  Fort-Archanibault, 
où,  à  notre  grande  surprise,  nons  apprenons  que  le  bateau 
que  nous  comptions  prendi'e  le  lendefriain  est  parti  le  25; 
nous  avions  été  mal  renseignés  et  le  29  est  la  date  de  départ 
du  vapeur  de  Fort-Lamy  pour  Fort-Archambault. 

Mais  le  (-ommandant  ne  veut  pas  attendre  jusqu'au  8  ou 
10  octobre  et  télégraphie  au  colonel  Largeau  pour  l'informer 
de  la  situation. 

Nous  passons  donc  la  journée  du  29  à  P'ort-Archambault 
où  le  capitaine  M...,  commandant  la  circonscription,  nous 
reçoit  â  sa  table,  ce  qui  nous  permet  de  récupérer  les  forces 
perdues  sur  le  Gribingui. 

Dans  la  soirée  arrive  la  réponse  du  colonel  Largeau  nous 
enjoignant  de  gagner  d'urgence  Fort-Lamy.  Sur  le  vu  de 
cet  ordre,  l'agent  de  la  Compagnie  concessionnaire  des  trans- 
ports fluviaux  remet  à  notre  disposition  la  baleinière  qui  nous 
a  amenés  de  Fort-Crampel. 

Après  un  nettoyage,  l'exhaussement  du  chimbeck  et 
l'installation  d'une  natte  neuve,  notre  réduit  nous  paraît 
plus  habitable. 

Le  30,  à  9  heures  du  matin,  nous  prenons  congé  du  capi- 
taine M...  ainsi  que  du  lieutenant  d'artillerie  T  ..  Celui-ci 
parti  de  Bordeaux,  le  25  juin,  en  même  temps  que  le  colonel 
Largeau,  traîne  en  route  faute  de  moyen  de  transport,  et 
partis  un  mois  après  lui,  nous  le  précéderons  de  quelques 
jours  à  Fort-Lamy. 

Le  commandant  B...  qui  sent  bien  que  j'aurais  assez  aimé 
prendre  quelque  repos  à  Fort-Archambault  me  taquine  sur 
la  rapidité  de  notre  voyage.  Je  lui  réponds  qu'en  efTet  je 
n'aurais  pas  été  fâché  de  regarder  autour  de  moi  plus  à  loisir 
et  me  plains  de  n'avoir  pas  encore  vu  tous  les  échantillons  de 
cette  immense  ménagerie  qu'est  l'Afrique  centrale  ;  des 
hippopotames  je  n'ai  vu  que  le  mufle  et  entendu  le  grogne- 
ment ;  l'existence  du  lion  ne  m'est  confirmée  que  par  de  loin- 
tains et  sourds  rugissements  ;  des  éléphants  je  n'ai  vu  que  les 
énormes  traces  et  des  défenses  versées  par  les  indigènes  com- 
me impôt,  enfin  je  n'ai  pas  aperçu  le  moindre  buffle,  ni  la 
moindre  panthère,  ni  la  plus  petite  girafe.  Pour  son  plus  grand 
amusement  je  lui  avoue  que  j'en  suis  profondément  vexé. 

Le  ciel  ayant  sans  doute  entendu  mes  doléances,  nous 
tombons  le  lendemain  matin  à  la  pointe  du  jour  sur  un 
troupeau  d'une  vingtaine  d'hippopotames  qui  sommeillent 
à  la  surface  de  l'eau.  La  baleinière  passe  à  une  centaine  de 
mètres  au   plus  d'eux   et  je   peux,  à  loisir,  contempler   ces 


340  VERS    LE    TCHAD 

monstrueuses  bêtes.  L'une  d'elles,  la  plus  grosse,  une  femelle 
sans  doute,  surveille  nos  mouvements.  Nous  nous  gardons 
bien  de  les  inquiéter,  car  ce  serait  un  jeu  d'enfants  pour  ces 
énormes  pachydermes  d'envoyer  la  baleinière  et  son  contenu 
voir  ce  qui  se  passe  au  fond  de  l'eau. 

Deux  jours  après,  vers  midi,  le  commandant  étant  descendu 
à  terre  je  l'entends  me  crier:  «  Djian,  Djian,  venez  donc  voir 
un  lion  !  »  Je  ne  me  fais  pas  attendre  et  en  quelques  secondes 
je  le  rejoins,  ,1'arrive  assez  à  temps  pour  voir  le  roi  du  désert 
s'éloigner  lentement  et  majestueusement.  A  150  mètres  de 
nous,  le  lion  se  retourne  une  dernière  fois  pour  nous  regarder 
et  s'éclipse  dans  les  hautes  herbes. 

Nous  étions  tous  les  deux  sans  armes  et  lorsque  le 
commandant  l'aperçut,  il  était  à  peine  à  50  mètres  de  lui,  le 
regardant  venir. 

Je  pourrai  donc  dire,  pour  l'avoir  vu,  qu'en  effet,  le  lion 
n'attaque  pas  l'homme... 

Et  maintenant  nous  voilà  aux  deux  tiers  du  cours  du  Chari. 
La  nature  a  changé  d'aspect,  l'herbe  est  moins  haute  et 
l'horizon  plus  découvert,  l'on  ne  voit  plus  que  les  arbres 
rabougris  épars  dans  la  plaine. 

Quelques-uns,  d'assez  belle  venue,  se  montrent  encore  sur 
les  berges,  mais  ils  se  font  de  plus  en  plus  rareè.  C'est,  me  dit 
mon  aimable  compagnon  de  voyage,  rasi)ect  de  la  région 
centrale  du  territoire  du  Tchad. 

En  route,  le  commandant  reçoit  un  mot  d'un  officier  de 
l'entourage  du  colonel  Largeau  lui  disant  que  celui-ci  l'attend 
avec  impatience  pour  l'accompagner  au  Kanem,  région  située 
au  nord  du  lac  Tchad,  dont  il  aura  le  commandement.  J'en 
conclus  que  je  ne  moisirai  pas  à  Fort-Lamy,  car  si  le  colonel 
me  réclame  également  d'urgence  avec  autant  d'insistance, 
c'est  qu'il  a  besoin  de  moi  Or,  oîi  peut-il  avoir  besoin  de  mes 
services?  Ce  ne  peut  être  par  conséquent  qu'au  Borkou  (sud 
de  la  Tripolitaine,  région  voisine  du  Tibesti)dont  l'occupation 
se  prépare. 

Tandis  que  le  gros  de  la  colonne  expéditionnaire  s'achemi- 
nerait d'Abéché  sur  Aïn-Galakka,  le  colonel  Largeau,  avec  une 
escorte,  irait  la  rejoindre  en  un  point  quelconque  de  la  route 
après  avoir  traversé  le  Kanem. 

11  y  a  donc  de  fortes  chances  pour-  que  je  passe  encore 
quelque  temps  en  compagnie  du  commandant  B...  qui  me 
laissera  le  souvenir  d'un  homme  fort  aimable  et  d'un  supérieur 
aussi  distingué  que  bienveillant. 

Ceci  dit,  je  me  demande  si  mon  séjour  à  la  colonie  ne 


VERS    LE    TCHAD  341 

s'écoulera  pas  en  entier  au  Borkou,  où  l'on  va  sans  doute  me 
laisser  pour  toute  la  durée  de  la  période  d'organisation. 

Au  point  du  vue  ciimatérif|ue,  cette  région  doit  être 
excellente,  mais  je  doute  qu'elle  vaille  le  reste  du  territoire  au 
point  de  vue  facilité  de  vie  et  abondance  de  vivres. 

Toutefois  la  question  de  mon  séjour  au  I3orkou  n'est  encore 
qu'une  simple  hypothèse  de  ma  part  et,  je  serai  iixé  sur  ce 
point  dans  trois  jours,  peut-être  dans  deux,  car  il  est  très 
probable  que  nous  toucherons  au  but  le  8  octobre  au  soir. 

Pendant  que  je  songeais  à  ces  probabilités,  le  commandant 
a  tiré  une  sarcelle,  deux  canards  et  une  superbe  oie  armée  ; 
autant  de  victuailles  qui  donneront  des  forces  aux  pagayeurs- 
et  stimuleront  leur  zèle. 


Fort-Lamy 

9  octobre.  —  Quelle  déception  à  mon  arrivée  à  Fort-Lamy 
de  ne  trouver  aucune  lettre  de  vous  ?  Il  y  aura  bien  un  nou- 
veau courrier  dans  huit  jours,  mais  à  cette  date  je  serai  déjà 
parti. Combien  de  temps  vais-je  encore  rester  sans  nouvelles? 

Le  colonel  Largeau  m'a  fort  aimablement  reçu  et  m'a  appris 
que  son  intention  était  de  m'emmener  avec  lui  au  Borkou. 

Mes  prévisions  étaient  justes  en  ce  qui  concerne  l'itinéraire 
qu'il  suivra.  En  résumé  voici  :  nous  partirons  lundi  après- 
midi  à  cheval  ;  nous  traverserons  le  Kanem  de  la  même  façon 
jusqu'à  un  point  nommé  «Ziguey»,  là  nous  laisserons  les  che- 
vaux pour  prendre  les  méharis  comme  montures.  Nous 
joignant  à  la  colonne  partie  d'Abéché,  nous  nous  engagerons 
dans  le  grand  désert  pour  atteindre,  dans  une  trentaine  de 
jours,  le  Ksar  d'Aïn-Galakka,  but  de  l'expédition  (750  kilo- 
mètres de  Fort-Lamy). 

Les  forces  que  doit  emmener  le  colonel  étant  assez  impor- 
tantes, il  est  probable  que  l'occupation  de  ce  poste  se  fera 
sans  coup  férir.  Le  but  de  cette  expédition  est  de  contenir  les 
Snoussistes  qui,  des  oasis  du  Borkou  où  ils  nichent,  opèrent 
razzias  sur  razzias  contre  les  populations  soumises. 

Ils  viennent  encore  de  recevoir  dernièrement  deux  leçons 
et  il  est  probable  que  nous  les  trouverons  assagis. 

Du  Borkou,  le  colonel  Largeau  s'acheminera  par  l'Ennedi,  sur 
l'Ouadai  et  me  laissera  à  Abéché. 

J'aclièverai  donc  dans  ce  dernier  poste  mon  séjour  au  Tchad. 
J'emporte,  pour  celte  raison,  les  bagages  et  les  approvisionne- 


I 


342 


VERS    LE    TCHAD 


ments  qui  me  seront  nécessaires  pendant  cette  tournée,  tandis 
que  le  reste,  laissé  ici,  sera  acheminé  sur  ma  future  résidence, 
où  je  retrouverai,  je  l'espère  du  moins,  un  peu  de  repos. 


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VERS    LE    TCHAD  343 

En  route  pour  le  Borkou  1 
Massakory.   —  Mao 

L'après-midi  d'hier  s'est  passée  en  visite  aux  officiers  de 
la  garnison. 

Le  soir  je  retrouve  à  la  table  du  commandant  B...,  comman- 
dant le  régiment  du  Tchad,  plusieurs  officiers  que  j'ai  vus 
dans  la  journée.  Je  passe  avec  eux  un  agréable  moment. 

Jusqu'au  13,  je  serai  l'hôte  du  lieutenant  D...,  deuxième 
adjoint  au  colonel.  Cet  officier  a  une  case  ronde  entourée 
d'une  véranda  et  coupée  en  deux  par  une  cloison  médiane  en 
nattes.  Il  m'a  installé  dans  l'une  des  deux  chambres  ainsi 
formées  taudis  que  lui-même   occupe   l'autre. 

Du  10  octobre.  —  Je  commence  dès  maintenant  à  faire  mes 
cantines.  Je  dois  emporter  une  partie  de  mes  effets  et  de  mes 
vivres  de  route.  Le  reste  de  mes  bagages  sera  dirigé  sur 
Abéché  en  même  temps  qu'un  convoi  de  ravitaillement  pour 
le  colonel,  le  capitaine  F...  et  le  lieutenant  D  ..  qui  trouve- 
ront ainsi,  dans  la  capitale  du  Ouadai,  des  effets  propres  et  des 
vivres  pour  rentrer  à  Fort-Lamy. 

Le  préposé  payeur  M.  G...,  qui  a  autrefois  vécu  en 
Algérie,  est  heureux  de  me  causer  de  gens  et  de  choses  dont 
il  a  gardé  un  bon  souvenir.  Lui-même  parle  l'arabe  et  il  est 
heureux  de  converser  dans  la  langue  qu'il  entendait  parler  à 
Orléansville  et  les  diverses  localités  qu'il  a  habitées. 

A  Fort-Lamy,  on  parle  un  arabe  impossible.  C'est  un 
simple  assemblage  de  mots  et  de  termes  nègres  se  suivant 
sans  respect  aucun  des  règles  de  la  phraséologie  et  de  la 
déclinaison  arabes.  .Aussi  est-ce  avec  un  vrai  plaisir  que 
j'entame  une  conversation  avec  un  tripolitain  de  Fezzan, 
dont  le  parler  correct  et  pur  est  un  vrai  régal. 

Comme  je  ne  dois  pas  rester  à  Fort-Lamy,  c'est  sans  hési- 
tation que  j'accepte  d'aller  prendre  une  tasse  de  café  chez  lui, 
en  compagnie  du  préposé  payeur.  Par  contre  je  lui  refuse 
très  poliment  une  caissette  de  biscuits  qu'il  m'otTre  pour 
joindre  à  mes  provisions  de  route. 

Du  H  octobre.  —  J'ai  commencé  à  remplir  mes  fonctions 
aujourd'hui.  Je  recueille  les  réclamations  que  les  indigènes 
viennent  présenter  directement  au  commandant  du  Territoire 
et  les  soumets  à  l'examen  de  celui-ci.  Le  plus  pouilleux  des 
indigènes  peut  le  voir  et  lui  parler.  Ce  petit  détail  ine  montre 


344 


VERS    LE    TCHAD 


qu'il  connaît  son  aiïaire  et  qu'il  veille  à  ce  que  les  indigènes 
ne  soient  aucunement  molestés. 

En  compagnie  du  lieutenant  D...,  je  visite  dans  la  soirée  la 
ville  arabe.  Fort-Lamy  est  un  mélange  hétéroclite  de  toutes 
les  races  du  Tchad.  On  y  voit  des  maisons  en  pisé  et  des 
cases  ;  des  négresses  affreuses  et  des  femmes  arabes  très 
sveltes  et  presque  blanches. 

Aujourd'hui  dimanche,  je  déjeune  en  compagnie  de  mon 
hôte  et  du  commandant  B...  chez  le  capitaine  G...  qui  a  passé 
une  partie  de  sa  jeunesse  en  Algérie.  Lui  aussi  a  fait  de 
l'arabe  et  cela  nous  rapproche. 

Gomme  il  sait  que,  manquant  d'expérience,  je  ne  suis  pas 
approvisionné  de  vivres  comme  le  voudrait  le  genre  de  vie 
que  je  vais  mener  pendant  quatre  mois,  dans  un  pays  dénudé 
de  toutes  ressources,  il  m'oblige  à  accepter  une  provision 
respectable  de  farine,  de  légumes,  de  julienne  Revêt  et  de 
potages  Maggi.  L'abondance  des  vivres  qu'il  m'offre  me  gêne 
et  je  n'ose  les  accepter.  Il  me  les  fait  porter  le  lendemain  par 
son  boy  et  comme  je  lui  demande  ce  que  je  lui  dois,  il  me  fait 
cette  jolie  réponse:  «  Kien,  vous  n'aurez  qu'à  en  faire  autant 
avec  un  camarade,  si  l'occasion  se  présente.  » 

Le  12  au  soir,  le  capitaine  G...  et  le  vétérinaire  L...  arrivent. 
Je  suis  heureux  de  les  revoir. 

i3  octobre.  —  Mes  bagages  sont  prêts.  Les  boeufs  porteurs 
nous  attendent.  Nous  ne  savons  pas  à  quelle  heure  nous 
partirons. 

A  3  heures,  tous  les  officiers  sont  réunis,  prêts  à  saluer  le 
colonel  Largeau  et  à  nous  dire  au  revoir. 

A  4  heures  et  demie,  après  les  adieux  d'usage,  nous  nous 
mettons  en  route. 

Nous  bivouaquons  au  bout  de  deux  heures  auprès  d'un 
village  oii  nous  sommes  ravitaillés  en  lait,  œufs  et  volailles. 

i4  octobre.  —  Nous  partons  à  3  heures  du  matin.  La  lune 
éclaire  notre  marche.  Vers  8  heures  nous  atteignons  Djeddada 
où  nous  nous  arrêtons  pour  reprendre  notre  chemin  ce  soir  à 
4  heures. 

Ce  point  d'eau  n'est  autre  chose  qu'une  dépression  conte- 
nant une  eau  noirâtre  et  boueuse.  Ce  qui  fait  le  charme  de  ce 
coin,  ce  sont  les  verts  mimosas  qui  le  décorent,  et  exhalent  un 
parfum  suave, 

A  4  heures  nous  nous  remettons  en  rout«.  Au  bout  de  quel- 
ques kilomètres,  le  colonel  qui  marche  toujours  en  tête  aper- 
çoit une  énorme  tortue  qui  traverse  la  piste.  Elle  pèse  au 
moins  25  à  30  kilogrammes.  Renversée  sur  le  dos,  nous  la  lais- 


( 


I 


VERS    LE    TCHAD  -345 

sons  dans  cette  position  sous  la  garde  d'un  l)oy  qui  la  confiera 
au  convoi. 

Nous  arrivons  au  bivouac  peu  de  temps  après  le  lever  de 
la  lune.  En  attendant  le  convoi  qui  arr'ivera  longtemps  après 
nous,  le  Fekili  Nahim,  homme  de  couliance  du  colonel,  va 
jusqu'au  au  campement  voisin  pour  chercher  du  lait  que 
nous  buvons  avidement  pour  le  grand  bien  de  nos  estomacs 
vides  et  de  nos  intestins  à  ménager, 

15  octobre.  —  Nous  repartons  à  3  heures  du  matin  et  arri- 
vons vers  7  heures  au  campement  de  Massaguet.  fMusieurs 
villages  aux  populations  d'origines  difTérentes,  sont  installés 
à  proximité  de  ce  point  d'eau. 

Aussi,  peu  de  temps  après  l'arrivée,  voyons-nous  arriver 
avec  une  certaine  satisfaction  de  nombreuses  écuelles  de  lait 
ainsi  que  des  œufs  et  de  la  volaille. 

Mais  si  j'ai  l'avantage  de  boire  du  lait  à  satiété,  j'ai  aussi  par 
conti'e  à  recueillir  les  réclamations  de  nombreux  plaignants. 
Pour  cela...  un  interprète  !  m'est  adjoint.  A  Massaguet,  on 
commence  à  parler  un  arabe  très  pur.  Mais  les  indigènes  le 
causent  avec  un  tel  accent,  conséquence  des  croisements 
avec  les  nègres,  que  j'ai  peine  à  les  comprendre. 

La  lin  des  entretiens  de  notables  indigènes  avec  le  colonel 
m'amuse  assez.  Chaque  fois  que  celui-ci  a  fini  de  parler  les 
arabes  répondent  par  ce  mot  «Sami»  (C'est  bien,  c'est  par- 
fait) qu'ils  accompagnent  d'applaudissements  lents. 

Du  16  octobre.  —  Nous  couchons  dans  le  bled,  ayant  quitté 
Massaguet  à  5  heures.  En  attendant  le  convoi  nous  essayons 
de  préparer  un  emplacement  dans  la  brousse  en  la  débarras- 
sant des  krams-krams  (petits  piquants  dans  le  genre  de  ceux 
qu'on  trouve  dans  la  laine  des  moutons)  dont  le  contact  avec 
ia  peau  est  extrêmement  désagréable,  car  ils  s'y  implantent 
comme  des  aiguilles  après  avoir  traversé  les  vêtements.  Pour 
aller  plus  vite  nous  mettons  le  feu  à  l'herbe  sèche.  Malheuieu- 
sement  le  vent  se  lève  à  ce  moment  et  en  un  clin  d'œil  l'in- 
cendie prend  des  proportions  assez  sérieuses.  Nos  palefreniers 
armés  de  paquets  de  paille,  parviennent  à  se  rendre  maîtres  du 
feu,  pendant  que  nous-mêmes,  craignant  pour  nos  harnache- 
ments, les  transportons  en  un  lieu  où  ils  n'ont  rien  à  risquer. 

Des  11  et  18.  —  Nous  arrivons  de  bonne  heure  à  Massakory. 
L'adjudant  commandant  le  poste  ne  nous  attendait  pas,  un 
malentendu  lui  ayant  fait  croire  que  nous  ne  passerions  pas 
par  là.  On  s'explique  et  tout  s'arrange.  Nous  prenons  là  un 
repos  réparateur  de  deux  jours.  Ce  temps  m'a  suffi  pour  me 
faire    préparer   quelques   kilos    de    couscous  de    Guerchala 


23 


346  VERS    LE    TCHAD 

(semoule  grossière  dans  laquelle  il  reste  encore  un  peu  de 
son).  Gela  me  permettra  de  me  passer  de  pain  lorsque  dans 
le  cours  de  la  traversée  du  désert,  le  manque  de  combustible 
nous  empêchera  d'en  faire. 

Nous  repartons  le  19  de  grand  matin;  la  température  com- 
mence à  se  rafraîchir  dans  la  nuit,  dès  que  nous  nous  enga- 
geons dans  une  dépression,  il  fait  froid. 

Au  petit  jour,  une  biche  nous  regarde  passer  avec  la  plus 
parfaite  sérénité.  Elle  est,  au  plus,  à  200  mètres  de  nous. 
Chacun  se  sent  une  belle  envie  de  manier  son  fusil.  Mais 
hélas  !  le  colonel  ne  veut  pas  qu'on  chasse  en  route.  «  Les 
officiers,  dit-il,  abandonnent  le  fusil  de  chasse  pour  le  fusil 
de  guerre  avec  trop  de  facilité  et  des  accidents  sont  à  crain- 
dre. »  11  s'en  est  d'ailleurs  produit  et  le  colonel  Largeau  dit, 
à  juste  raison  :  «  Je  suis  moi-même  chasseur  et  du  moment 
que  je  me  prive  du  plaisir  de  chasser,  les  autres  peuvent  en 
faire  autant.  » 

Nous  passons  la  journée  à  Voulisome,  petit  village  de  sept 
à  huit  cases,  et  allons  coucher  à  quelques  kilomètres  de  là. 

Du  20.  —  Nous  entrons  maintenant  dans  la  région  du 
Kanem,  pays  d'élevage  par  excellence.  C'est  aussi  la  seule 
région  du  territoire  qui  produise  du  blé.  Ce  blé  est  bien 
inférieur  à  celui  des  régions  tempérées,  mais  la  farine  qu'il 
donne  a  l'avantage  de  ne  coûter  que  5  à  6  sous,  tandis 
que  celle  de  l'administration  coûte  le  modeste  prix  de  3  francs 
le  kilogramme.  Et  encore,  bien  qu'en  boites  soudées,  elle 
n'est  pas  exempte  d'un  certain  goût  de  moisi.  Il  est  regrettable 
qu'Abéché  soit  trop  éloigné  de  cette  région  sans  quoi,  pendant 
toute  la  durée  de  mon  séjour  au  Tchad,  je  ne  mangerais  guère 
que  du  pain  fait  avec  le  blé  du  pays. 

Bien  rares  sont  les  Kanembous  qui  parlent  l'arabe.  Pourtant 
bien  qu'assez  noirs  ils  ont  le  type  arabe. 

Du  21.  —  Après  une  nuit  passée  à  quelques  kilomètres  de 
Kalimboa,  nous  partons  de  bon  matin  pour  Kéa.  La  journée 
est  assez  chaude.  Il  fait  40°  sous  les  cases,  mais  comme  la 
chaleur  est  sèche,  elle  ne  nous  incommode  pas  trop. 

Nous  étant  remis  en  route  à  la  même  heure  que  les  jours 
précédents  nous  atteignons  N'gouri  à  la  nuit  noire.  Le  lieute- 
nant qui  commande  ce  poste  est  sur  le  point  de  terminer  sa 
troisième  année.  Il  a  deinandé  à  en  faire  une  quatrième  ! 
Malgré  tous  les  charmes  que  peut  avoir  le  pays,  nous  trou- 
vons que  c'est  exagéré.  Quatre  ans  loin  de  sa  famille  et  de 
son  pays  !  quatre  ans  sans  aucun  contact  avec  le  monde  civi- 


VERS    LE    TCHAD  347 

lise!  Le  lieutenant  ne  voit  comme  blanc  que  son  sergent  et 
les  rares  passagers  qui  vont  au  Kanem  ou  à  Fort-Lamy. 

Nous  passons  avec  lui  la  journée  du  22  et  repartons  dans 
la  soirée. 

Da23.  —  Nous  séjournons  à  (Puits-Loury  ».  Le  gîte  est  des 
moins  confortables,  ce  qui  oblige  le  colonel    à  s'installer  sous 
les  arbres. 
Le  thermomètre  marque  38°  à  l'ombre. 
Nous  nous  remettons  en  roule  à  5  heures,  pour  aller  cou- 
cher à  0  kilomètres  plus  loin. 

Du  24.  —  Nous  arrivons  à  Mao  vers  7  heures  du  matin.  On 
nous  installe  dans  des  cases  assez  confortables  que  nous 
habiterons  pendant  trois  jours.  Nous  allons  user  d'un  nou- 
veau moyen  de  locomotion.  Etant  donné  l'impossibilité 
d'abreuver  chaque  jour  les  chevau.K,  nous  échangeons  nos 
montures  contre  des  chameaux.  Nous  n'abandonnerons  ceux- 
ci  que  dans  deux  ou  trois  mois  lorsque,  approchant  d'Abéché, 
nous  avons  quitté  la    zone  désertique. 

Déjà  rahlas  et  bassours  sont  alignés  devant  le  perron  de  la 
case  très  confortable  qui  va  devenir  l'hôtel  du  commandant  B... 
désigné  pour  l'administration  de  la  région  du  Kanem  dont 
Mao  est  la  capitale. 

C'est  avec  regret  que  je  quitte  cet  homme  aimable  et  de 
bon  conseil,  gai  compagnon,  chef  modeste  et  bienveillant. 

Quelle  admirable  chose  que  la  T.  S.  F.  !  Au  moment  où 
j'écris,  on  me  communique  les  Havas  du  20  annonçant  la 
catastrophe  d'un  Zeppelin,  l'évacuation  de  l'Albanie  par  les 
Serbes,  la  promotion  de  Santos  Dumont  au  grade  de  Com- 
mandeur de  la  Légion  d'Honneur  et  d'autres  nouvelles  de 
moindre  importance. 

27  octobre.  —  A4  heures  les  bagages  sont  préparés,  les 
chameaux  conduits  devant  nos  cases  et  chargés.  Ah  !  ce  n'est 
plus  comme  au  Maroc  où  je  n'avais  à  me  soucier  de  rien. 
L'ordonnance  préparait  ce  que  j'avais  à  emporter  et  le  bon 
tringlot  s'occupait  d'arrimer  le  tout  sur  ses  mulets.  Et  ces 
braves  Mokhazenis  où  sont-ils?  Ici  il  faut  se  débrouiller  à  peu 
près  seul.  J'ai  un  boy  qui  est  loin  d'être  d'ordonnance.  Aussi 
faut-il  que  je  me  donne  beaucoup  de  mouvement  pour  de 
faibles  résultats.  Enfm  j'y  arrive  quand  même.  Je  dois  d'ail- 
leurs le  reconnaître,  les  deux  officiers  du  colonel  Largeau, 
le  capitaine  F...  et  le  lieutenant  D...  qui  sont  déjà  passés 
deux  ou  trois  fois  par  là,  font  tout  ce  qu'ils  peuvent  pour  tne 
tirer  d'ambarras.  Seul   le  colonel  conservera  son   cheval.  A 


348  VERS    LE    TCHAD 

4  heures  et  demie  il  prend  les  devants  et  cela  nous  permet 
d'achever  nos  préparatifs  sans  précipitation. 

Ma  monture  est  prête.  Gomment  la  mise  en  selle,  ou 
plutôt  en  bassour  va-t-elle  s'opérer?  .le  passe  une  jambe,  je 
me  carre  bien  sur  mon  coussin,  ma  monture  se  relève  et  pan  ! 
me  voilà  entraîné  avec  mon  siège  presque  sur  le  cou  de  l'ani- 
mal. Le  bassour,  mis  par  un  chamelier  improvisé,  n'a  pas  été 
fixé  en  arrière  par  une  corde  passée  sous  la  queue.  Pendant 
dix  secondes  ma  situation  est  plutôt  critique.  C'est  du  moins 
ainsi  que  j'en  juge  personnellement.  Les  camarades  qui  assis- 
tent à  la  scène,  la  trouvent  comique  et  viennent  à  mon 
secours  en  se  tordant.  Enfin  je  ne  sais  trop  comment  je  par- 
viens à  mettre  pied  à  terre. 

Cette  fois  le  siège  est  fixé  suivant  les  règles  et  l'opération 
se  fait  sans  anicroche. 

Je  remets  pied  à  terre  avant  le  départ,  pour  prendre  un 
verre  de  Champagne  offert  par  le  commandant  B...  .Te  ne  sais 
comment  le  remercier  de  ses  bienveillantes  attentions  à  mon 
égard. 

Je  fais  un  départ  d'ancien  et,  quoique  peu  d'aplomb,  au 
début,  je  me  familiarise  assez  vite  avec  ma  monture  balancier. 

Nous  arrivons  à  la  nuit  au  gîte  d'étape  où,  comme  par 
hasard,  je  trouve  une  plaignante.  Je  l'expédie  aussi  vite  que 
mon  modeste  souper  et  vais  immédiatement  me  reposer. 

Du  28.  —  Réveil  à  3  heures.  Départ  à  4.  Les  boys  qui  la 
veille  ont  fait  le  chemin  à  pied,  sont  dotés  d'un  chameau. 

Mon  boy,  malgré  mes  averti.ssements,  persiste  à  vouloir  se 
hisser  sur  son  bassour  sans  le  fixer  à  l'avant  et  à  l'arrière. 
Le  résultat  prévu  se  produit,  il  tombe  et  son  siège  se  casse. 
Heureusement  qu'il  ne  s'est  pas  fait  de  mal. 

Arrivée  à  Yonno  vers  8  heures  et  demie  sans  incident. 
Départ  à  4  heures  el  demie.  A  noter  l'eau  claire  et  limpide  que 
j'ai  bue  avec  délices  ici  et  à  Mao.  Arrivée  à  l'étape  à  9  heures, 
dîner  rapide  et  repos. 

Du  29.  —  Réveil  à  3  heures.  Départ  à  4.  La  route  suivie 
est  accidentée.  C'est  une  suite  de  Ouadis  (petits  vallons)  cou- 
verts de  verdure  :  palmiers  dattiers,  doums,  souak...  Ces 
taches  vertes  forment  un  assez  joli  contraste  avec  l'aspect 
désertique  que  prend  la  dune  tout  à  l'entour. 

Décidément  le  chameau  n'est  pas  la  monture  rêvée.  Quelle 
allure  fatigante  !  Lente  à  la  montée,  rapide  et  saccadée  à  la 
descente,  elle  ne  devient  guère  supportable  qu'en  terrain  plat. 

Vers  8  heures,  nous  bivouaquons  dans  un  oued  charmant 


VERS    LE    TCII\n  340 

où  nous  n'avons  que  l'embarras  fin  choix  pour  monter  notre 
tente  à  l'ombre  des  palmiers. 

Départ  à  4  heures  du  soir.  Nous  arrivons  à  l'étape  vers 
minuit.  .l'avais  pris  la  précaution  de  souper  avant  de  partir. 
Comme  je  suis  fatigué,  cela  me  permet  de  me  coucher  aussitôt 
mon  lit  monté. 

Du  30  octobre.  —  Départ  à  4  heures  du  matin.  De  bonne 
heure,  nous  ariivons  à  Zigueï  sans  autres  incidents  que  ceux 
qui  agrémentent  la  marche  d'un  convoi  de  chameaux,  cordes 
qui  cassent,  animaux  qui  se  couchent,  méharis  qui  tombent. 

Le  poste  a  une  physionomie  particulière  avec  son  pavillon 
pour  officiers  et  sous-officiers,  aux  bordures  et  terrasses 
dentelées  ;  et  ses  cases  de  tirailleurs,  basses  et  longues,  cons- 
truites en  hadd  (herbe  dont  les  tiges  ressemblent  à  celles  du 
fenouil). 

Très  aimables,  les  camarades  de  Zigueï  nous  reçoivent  à 
déjeuner.  A  mesure  que  nous  avançons  le  manque  de  confort 
se  fait  de  plus  en  plus  sentir  !  Et  dire  qu'ils  sont  nombreux 
les  officiers  qui  font  des  troisième  et  quatrième  années,  sur 
leur  demande,  dans  ces  régions  désertiques.  A  Mao  encore, 
un  officier  sur  le  point  de  rentrer  après  sa  troisième  année 
a  été  tout  heureux  de  voir  sa  demande  de  quatrième  année 
accueillie  favorablement. 

Du  31  octobre.  -  Séjour  à  Zigueï.  Nous  sommes  rejoints 
par  la  4«  Compagnie  partie  de  Mao  un  jour  après  nous.  On 
sent  ici  le  branle-bas  de  combat,  ce  n'est  partout  que  cous- 
cous qui  sèche,  caisses  de  vivres  alignées,  lits,  guerbas 
(outres)  étendues  au  soleil,  viande  qui  boucane. 

Mon  boy  se  plaint  de  dysenterie,  mais  c'est  une  dysenterie 
d'un  caractère  particulier,  puisqu'à  l'annonce  qu'il  sera  rem- 
placé le  lendemain,  un  mieux  sensible  se  manifeste  dans  son 
état. 

Il  est  temps  que  je  m'en  aille  d'ici,  car  les  chefs  des  tribus 
du  cercle  de  Mao  me  connaissent  trop  déjà.  Or  vous  savez  ce 
que  l'on  gagne  à  être  populaire  parmi  ces  gens,  c'est  toute  la 
journée  un  défilé  incessant  de  pouilleux  qui  viennent  vous 
exposer  leur  doléances. 

L'un  d'eux  m'amuse  particulièremenf.  Arrêté  à  dix  mètres 
de  la  porte  de  ma  case,  il  me  salue.  Je  réponds  et  baisse  le 
nez  sur  mon  travail  feignant  de  ne  plus  m'occuper  de  lui. 
Cela  ne  le  décourage  pas,  mon  salut  lui  a  permis  de  s'appro- 
cher un  peu.  Petit  à  petit,  sans  avoir  l'air  de  rien,  il  arrive  à 
la  porte  et,  à  la  fin,  lorsque  je  me  décide  à  lever  les  yeux, 


350  VERS    LE    TCHAD 

mon  bonhomrr.e  est  à  l'intérieur  de  la  case  comnnençant  son 
discours  :  «  Enta  habibi  bezzaf  »  (Tu  es  mon  grand  ami.) 

Du  i*""  novembre.  —  On  ne  se  douteraitpas  que  c'est  aujour- 
d'hui la  Toussaint,  je  suis  certain  qu'autour  de  moi  personne 
n'y  pense. 

On  se  livre  aux  dei'niers  préparatifs  de  départ.  De  bon 
matin  j'ai  à  examiner  l'affaire  d'une  femme  à  laquelle  un 
homme  a  fait  disparaître  un  chameau.  Comme  l'affaire  se  ter- 
mine à  son  avantage,  elle  découvre  que  mes  yeux  révèlent 
que  je  suis  pas  un  nenani  (chrétien)  mais  un  meslem 
(musulman). 

J'ai  pour  ordonnance,  un  sénégalais,  un  bambara  de 
1  "ï80.  énergique  et  zélé,  comprenant  le  français  et  le  causant 
suffisamment  pour  que  nous  nous  comprenions.  Il  est  vrai 
qu'avec  les  mots  :  gagner  et  content  on  peut  exprimer  pas  mal 
d'idées.  Chez  les  Noirs,  soldats  ou  boys,  le  mot  gagner  a  le 
sens  d'acheter,  gagner,  perdre,  attraper,  recevoir  (une  bles- 
sure\  contracter  (une  maladie),  etc.,  etc.  Dites  à  votre  boy  : 
«  Moi  y  a  content  gagner  oignons.  »  Il  comprendra  immédia- 
tement: «Je  serais  très  heureux  que  tu  m'achètes  des  oignons.» 
De  même  il  vous  dira  :  «  Moi  content  faire  café  «  pour  «  Je 
voudrais  faire  le  café.  » 

A  4  h.  35,  après  bien  des  hésitations,  des  malentendus  et 
des  ordres  incompris,  la  colonne  se  met  en  branle.  Tout  le 
monde  est  à  chameau,  personne  ne  va  à  pied.  Aussi  faut-il 
voir  avec  quelle  vitesse  nous  avançons.  Heureusement  que  la 
nouvelle  lune  vient  éclairer  notre  marche  pendant  les 
premières  heures  de  la  nuit.  Nous  arrivons  à  l'étape  vers 
10  heures  et  demie. 

S  novembre.  —  Départ  à  4  heures  du  matin,  arrivée  à  l'étape 
à  8  heures  et  demie  (Boufoumine).  Nous  faisons  ici  notre  plein 
d'eau,  car  nous  n'arriverons  à  Hacha  que  le  4  au  soir  et,  d'ici 
là,  nous  ne  trouverons  pas  un  seul  point  d'eau.  II  est  fort 
probable  que  demain  et  après-demain  je  n'en  gaspillerai  pas 
beaucoup  pour  me  débarbouiller. 

3  novembre.  —  Nous  passons  la  journée  à  30  kilomètres  de 
Boufoumine  ayant  parcouru  cette  distance  en  deux  étapes.  La 
température  est  de  plus  en  plus  supportable  dans  la  journée, 
et  les  nuits  sont  très  froides.  Malheureusement  le  vent  qui 
rafraîchit  la  température  a  l'inconvénient  de  soulever  le  sable 
et  de  le  véhiculer  dans  l'air.  Il  se  lève  vers  9  heures  du  matin 
pour  cesser  au  coucher  du  soleil  et,  pendant  tout  ce  temps, 
l'atmosphère  est  obscurcie  par  la  poussière  en  suspension. 


VERS    T,E    TC\\.\n  351 

Aussi  le  salilp  onfro-t-il  poni*  iino  cort;iino  part   maintenant 
dans  notre  alimentation. 

De  plus  en  plus  c'est  le  désert.  Nous  ne  marchons  plus  que 
sur  le  snble  mouvant,  plus  de  sol  ferme.  Et  quelle  véjifétation  ! 
Quelques  toutTes  d'herbes  sèches  comme  si  elles  avaient  été 
passées  au  four,  des  arbres  (exclusivement  des  épineux)  qui 
atteignent  3  mètres  au  maximum  et  dont  les  feuilles  sont  de 
plus  en  plus  imperceptibles. 

4  novembre.  —  Deux  étapes  nous  ont  portés  à  35  kilomètres 
du  bivouac  de  la  veille.  Le  pâturage  est  moins  beau  que  celui 
d'hier  et  la  poussière  plus  intense. 

5  novembre.  —  Nous  voilà  à  Hacha.  Les  chameaux  ont  de 
quoi  se  nourrir  et  les  hommes  vont  pouvoir  se  reposer.  Nous 
devons  séjourner  ici  jusqu'au  7  au  soir. 

î.es  puits  sont  rapidement  creusés,  car  à  moins  d'un  mètre, 
on  trouve  la  couche  aquifère.  L'eau  est  fraîche  et  limpide 
mais  dès  qu'on  l'avale  on  sent  le  goût  désagréable  du  sulfate 
de  soude  qui  entre  dans  la  composition  du  natron.  Nous  voilà 
donc  tous  soumis  à  une  cure  purgative.  Gela  ne  fera  peut-être 
pas  trop  de  mal  à  nos  intestins. 

Nous  ne  manquerons  pas  d'eau,  mais  il  n'en  sera  pas  de 
même  pour  le  bois.  Les  boys  sont  obligés  de  faire  pas  mal  de 
chemin  pour  en  rapporter  quelques  brindilles.  11  est  vrai  que 
ce  soir  ils  n'auront  qu'à  parcourir  le  pâturage  pour  ramas- 
ser le  crottin  des  chameaux.  Desséchés  par  le  soleil  et  le  vent 
sec  qui  ne  cesse  de  souffler,  ces  excréments  feront  un  excel- 
lent combustible.  Voilà  une  utilisation  des  restes  qui  n'est  pas 
à  dédaigner. 

Ce  voyage  à  travers  ces  contrées  désertiques  m'assure  un 
repos  complet  de  l'esprit.  Inhabitées,  elles  suppriment  les 
plaignants  et  me  permettent  de  vous  consacrer  ma  pensée. 
Peut-être  notre  séjour  à  Hacha  permettra-t-il  à  un  courrier 
de  nous  y  atteindre.  Gomme  je  serais  heureux,  s'il  m'appor- 
tait quelques  nouvelles  de  vous  tous  !  G'est  que  voilà  exacte- 
ment cent  deux  jours  que  je  n'en  ai  pas  ! 

Un  boy  resté  en  arrière  ce  matin  au  départ  du  campement 
n'a  pas  encore  rejoint. 

Des  partisans  Teddas  (gens  de  la  région)  envoyés  à  sa 
recherche  rentrent  vers  9  heures  du  soir  sans  l'avoir  retrouvé. 

Du  6  novembre.  —  Le  malheureux  qui  s'était  perdu  hier 
est  rentré  ce  matin  exténué  de  fatigue  et  à  moitié  fou  de 
terreur.  Après  avoir  erré  toute  une  matinée,  il  a  pu  retrouver 
nos  traces  et  nous  rejoindre.  Sans  cet  heureux  hasard,  il  eût 
été  condamné  à  mourir  de  faim  et  de  soif. 


352  VERS    TE    TCHAD 

Le  séjour  à  Hacha  est  désagréable  avec  ce  vent  qui  souffle 
continuellement.  En  deux  heures  la  natte  en  doum  étendue 
dans  ma  tente  a  entièrement  disparu  sous  le  sable.  Lorsque 
l'on  mange,  le  sable  craque  sous  la  dent  ;  ce  n'est  pas  bien 
agréable,  mais  on  s'y  fait  difficilement  toutefois.  Je  soup- 
çonne fort  qu'un  séjour  prolongé  dans  de  pareilles  régions 
aurait  des  conséquences  regrettables  sur  les  nerfs  des  gens. 

Du  7  novembre.  —  Maudite  poussière  !  Ce  matin  au  moment 
où  je  prenais  une  photo,  je  me  suis  aperçu  qu'un  grain  de 
sable  avait  enrayé  le  système  de  fermeture  de  l'obturateur. 

Mes  progrès  sont  plutôt  lents  en  photographie  et  les  diffé- 
rences de  luminosité  des  contrées  où  j'ai  opéré  jusqu'à  présent 
sont  peu  faites  pour  les  hâter.  D'ailleurs  les  piètres  résultats 
obtenus  par  le  colonel  me  consolent  de  mes  déboires  de 
débutant. 

Du  8  novembre.  —  Nous  avons  quitté  Hacha  hier  Deux 
étapes  nous  en  ont  éloignés  de  40  kilomètres.  11  nous  en  faudra 
faire  encore  deux  fois  autant,  et  en  deux  jours,  pour  atteind?'e 
le  prochain  point  d'eau.  Nous  sommes  bien  dans  le  pays  de 
la  soif  !  Ce  matin  nous  avons  fait  plusieurs  kilomètres  sans 
voir  la  moindre  touffe  d'herbe.  Ce  n'est  pas  le  maigre  pâtu- 
rage qui  entoure  le  bivouac  qui  nourrira  aujourd'hui  le  trou- 
peau de  bœufs  amené  par  les  troupes. 

Quel  froid  ce  matin  au  départ  !  Huit  degrés.  A  un  certain 
moment,  nous  avons  tous  pu  supporter  nos  pelisses  de  drap 
jusqu'à  9  heures.  A  2  heures  de  l'après-midi,  le  thermomètre 
marque  de  25  à  26"^  sous  la  tente.  A  l'extérieur  la  brise  qui 
souffle  d'une  façon  constante  rend  la  température  encore  plus 
agréable. 

J'ai  abandonné  la  plume  pour  le  crayon  qui  dans  ces 
régions  sèches  et  sablonneuses  est  bien  plus  pratique. 

Le  départ  nous  offre  chaque  jour  quelques  instants  de 
récréation  au  retour  des  chameaux  du  pâturage.  Quel 
concert  font  ces  bêtes  lorsqu'on  les  ramène  vers  le  camp  ! 
On  ne  s'entend  plus.  Et  la  poursuite  !  De  tous  côtés  on  voit 
tirailleurs  et  conducteurs  se  lancer  après  leurs  bêtes  qui 
fuient  stupidement.  Ils  les  rejoignent,  se  cramponnent  à 
leur  queue,  font  la  pirouette,  s'affalent  à  terre,  se  relèvent 
et  se  relancent  à  leur  poursuite  en  les  couvrant  d'impréca- 
tions. C'est  tordant  ! 

Moins  réjouissant  est  le  retour  du  pâturage  de  ces  gra- 
cieuses bêtes  lorsque  nous  séjournons  à  t'étape.  A  leur  arrivée 
on  les  voit  se  répandre  dans  le  camp  à  droite,  à  gauche,  de 
tous  côtés.    L'air  suffisant,  elles  s'empêtrent  dans  les  colis, 


\ 


VERS    I.E    TCItAD  Hô^ 

s'égarent  auprès  des  cuisines,  font  sauter  les  cordes  des  tentes 
et  continuent  un  cert.iin  tetnps  leurs  allées  et  venues,  chas- 
sées et  maudites  [)ar  tous. 

Du  9  novembre.  —  Quel  hi/.nrre  pays  que  celui-ci,  hier 
c'était  le  désert  dans  toute  son  aridité  et  aujourd'hui,  sur  une 
longueur  de  plusieurs  kilomètres,  nous  avons  vu  le  sol  couvert 
de  touffes  d'herbes  dont  nos  chameaux  vont  se  régaler. 

Pas  un  arbre  depuis  Hacha.  Les  racines  de  hadd  (plante 
aromafi(pie  dont  les  chameaux  sont  très  friands)  nous  appro- 
visioiuieut  en  combustible.  Gela  n'empêche  pas  mon  boy  de 
simplifier  autant  que  possit)le  les  menus.  Sa  cuisine  n'est  pas 
mauvaise,  mais  il  ne  se  lave  pas  tous  les  jours  et  de  temps  en 
temps,  se  mouche  avec  les  doigts  ;  en  tournant  la  tête  on  ne 
s'en  aperçoit  pas. 

Quant  à  l'ordonnance,  l'assurance  avec  laquelle  il  répond 
«  oui  »  à  tputes  mes  questions  m'avait  trop  fait  présumer  de  sa 
force  en  français.  La  façon  dont  il  me  sert  à  table  m'a  édifié. 
Qu'il  comprenne  ou  non  ce  que  je  lui  demande,  il  me  rapporte 
quelque  chose:  serviette,  pain,  sel,  etc.  Peu  lui  importe  que 
ce  soit  une  chose  ou  une  autre  que  je  lui  aie  demandée.  Cela 
m'amuse  et  je  ne  me  fâche  jamais  car  il  m'est  bien  dévoué. 

Du  10  novembre.  —  Nous  devions  arriver  au  point  d'eau 
d'Yousoufoury  ce  matin,  mais  une  légère  erreur  d'orientation 
vers  l'Est  des  guides  nous  a  fait  laisser  ce  point  à  l'Ouest,  tout 
en  nous  rapprochant  du  puits  d'Amzao 

Du  il  novembre.  —  Nous  avons  atteint  Amzao  hier  soir 
vers  8  heures  après  un  joyeux  départ  occasionné  par  un 
chameau  récalcitrant.  Deux  fois  pris,  deux  fois  échappé,  sept 
ou  huit  conducteurs  se  mirent  à  sa  poursuite  pour  le  reprendre 
et  l'entraver.  L'ayant  rejoint,  ils  furent,  en  un  clin  d'œil,  tous 
cramponnés  à  la  bête  affolée:  deux  étaient  sur  la  bosse,  un 
troisième  sur  le  cou,  un  quatrième  lui  maintenait  la  ()atte 
antérieure  gauche,  le  cinquième,  suspendu  au  tlanc  droit  de 
l'animal,  était  coincé  contre  un  de  mes  chameaux  chargés  ; 
quant  au  sixième,  c'était  le  plus  amusant,  ayant  pris  le 
chameau  par  la  queue,  il  s'était  arc-bouté  de  ses  deux  jambes 
contre  les  cuisses  de  l'animal.  Quelle  élasticité  et  quelle  agilité 
merveilleuses  chez  ces  gens-là  !  Pendant  toute  celte  scène  des 
plus  divertissante,  ils  ont  été  aussi  souples  de  corps  que 
comiques  de  pose. 

A  proprement  parler,  ici  comme  à  Hacha,  les  puits  n'existent 
pas.  Mais  la  proximité  de  la  nappe  aquifère  permet  d'en 
creuser  rapidement  dans  le  sable,  autant  que  l'on  veut,  sans 
autres  instruments  que  les  mains. 


354  VERS    LE    TCHAD 

Là  encore  l'eau  est  natronée  et  c'est  un  léger  goût  saumâtre 
qui  domine. 

Ce  golit  se  retrouve  dans  le  lait  de  chamelle  que  l'on 
m'apporte  chaque  soir  et  qui  me  permet  le  matin,  pour  mon 
petit  déjeuner,  de  prendre  café  au  lait  ou  chocolat  au  choix. 
Je  puis  bien  me  payer  cette  petite  compensation  en  prévision 
de  mes  deux  repas  au  sable  de  la  journée. 

Du  12  novembre.  —  Séjour  à  Amzao.  Je  passe  ma  journée  à 
recueillir  les  éléments  d'un  petit  travail  dont  m'a  chargé  le 
colonel  Largeau  :  une  étude  monographiquesur  une  des  tribus 
du  Borkou.  Bien  qu'un  vent  extrêmement  violent  et  chargé  de 
sable  vienne  me  contrarier  sous  la  tente,  je  poursuis  ma  petite 
enquête  avec  acharnement. 

Du  13  novembre.  -  Nous  nous  transportons  à  Tekia  à  10  ki- 
lom.  d'Amzao.'ll  souffle  un  vent  assez  violent,  glacial  durant 
la  première  partie  de  la  matinée.  J'éprouve  toutes  sortes  de 
difficultés  à  monter  ma  tente,  mes  piquets  en  fer  ne  tenant 
pas  dans  le  sable.  Vers  11  heures,  elle  est  jetée  à  bas.  Le 
colonel  s'en  aperçoit,  me  demande  ce  qui  se  passe  et  m'engage 
à  demander  aide  à  un  camarade  tout  en  me  recommandant 
de  ne  pas  rester  au  soleil,  .le  le  remercie,  le  priant  de  ne  pas 
s'inquiéter  de  moi,  mais  deux  minutes  après,  je  le  vois 
ramenant  le  lieutenant  D...  et  le  capitaine  F...  avec  leurs 
boys.  J'en  suis  tout  confus  et  trouve  cela  charmant  de  sa  part. 

Du  14  novembre.  —  Deux  demi-étapes  nous  transportent 
à  mi-chemin  de  Ickia-Tizimi.  Journée  délicieuse,  léger  vent 
frais  et  pas  de  sable. 

Du  15  novembre.  —  Arrivée  à  Tizimi.  Paysage  un  peu  plus 
gai  du  fait  de  quelques  arbres  disséminés  aux  environs  d'un 
point  d'eau.  Le  temps  est  aussi  agréabfe  qu'hier. 

Du  16  novembre.  —  Nous  quittons  Tizimi  l'après-midi, 
après  y  avoir  passé  la  nuit.  Est-ce  l'effet  de  la  pleine  lune? 
Toujours  est-il  que  la  température  est  moins  basse  et  le  vent 
moins  violent  depuis  deux  jours.  Ce  dernier  avantage  surtout 
est  appréciable,  car  il  nous  permet  d'absorber  une  nourriture 
moins  sablée  que  les  jours  précédents.  Les  indigènes  préten- 
dent que  les  périodes  de  vent  de  sable  alternent  régulièrement 
avec  les  périodes  de  temps  clair.  Chacune  serait  de  neuf  jours. 

Du  11  novembre.  —  Deux  demi-étapes,  soit  une  trentaine 
de  kilomètres,  et  nous  sommes  arrivés  à  Moledinga.  Le  beau 
temps  persiste. 

Mais  ce  qui  dure  trop  hélas  !  c'est  le  temps  que  le  courrier, 
attendu  avec  impatience,  met  à  nous  parvenir. 

Avant  notre  départ  pour  Ghicha    (point  d'eau  suivant)  le 


VERS    LE    TCHAD 


355 


colonel  nous  fait  remarquer  un  effet  do  niirafîe.  A  2  ou  3  kilo- 
mètres de  nous,  en  un  point  où  nous  sommes  passés  le 
matin,  une  superbe  nappe  d'eau  s'étend,  reflétant  les  touffes 
de  hadd  qui  l'environnent,  un  ruisseau  vient  s'y  jeter  ell'onde 
semble  se  vider  sous  l'influence  d'une  brise  ;  l'illusion  est 
complète  !  Ce  spectacle  m'a  fait  comprendre  la  déception  que 
doivent  éprouver  les  voyageurs  qui,  en  proie  à  une  soif 
ardente,  croient  arriver  au  terme  de  leurs  soufTrances. 

Du  18  novembre.  —  Comme  à  Ti/Jmi,  quelques  arabes 
indiquent  la  présence  de  l'eau  à  une  faible  profondeur.  L'herbe 
d'un  vert  foncé  en  est  un  autre  indice. 

J'admire  la  prudence  du  colonel.  Bien  qu'une  attaque  soit 
peu  probable,  il  redouble  de  précautions  à  mesure  que  nous 
approchons  du  but  de  l'expédition.  Toutes  les  nuits,  en  outre 
des  sentinelles  postées  à  environ  250  mètres  du  camp,  des 
patrouilles  de  cavaliers  circulent  aux  environs  dans  un  rayon 
de  2  kilomètres.  Si  une  surprise  se  produit,  ce  ne  sera  pas  la 
faute  du  chef. 

Nous  quittons  Chicha  à  4  heures.  Le  vent  se  lève  vers  le 
coucher  du  soleil.  Mauvais  présage  disent  les  arabes,  c'est 
du  sable  pour  demain. 

Du  19  novembre.  —  La  prédiction  des  indigènes  s'est 
réalisée  et  notre  journée  à  Millemée  est  marquée  par  une 
tempête  de  sable.  Nous  éprouvons  bien  des  difficultés  à  mon- 
ter nos  tentes  et,  aussitôt  qu'elles  sont  dressées,  nous  nous 
y  enfermons.  L'aspect  du  camp  est  assez  morne  ;  tout  est  gris 
de  poussière.  Les  tentes  continuellement  secouées  ont  un 
aspect  lamentable.  Les  bassours,  tout  ce  qui  émerge  de  terre, 
forme  autant  d'obstacles  contre  lesquels  s'accumule  le  sable. 
Boys  et  tirailleurs  se  sont  enfouis  la  tête  sous  des  couvertures, 
des  peaux  de  bouc,  des  outres  à  vivres,  mais  autour  de  leur 
corps,  le  sable  s'amasse. 

Du  W  novembre.  —  Nous  voilà  à  Yeggo.  Nous  y  séjournerons 
trois  jours  et  y  serons  rejoints  par  la  seconde  partie  de  la 
colonne  à  laquelle  nous  devions,  d'après  les  ordres  précé- 
dents, nous  réunir  à  Bokhalia,  à  30  kilomètres  d'ici.  Le 
capitaine  L...  partira  cette  nuit  avec  une  escorte  pour  l'avertir 
de  ce  changement  de  programme.  Nous  sommes  encore 
gratifiés  d'une  tempête  de  sable  plus  forte  que  celle  de  la 
veille.  Vers  2  heures  on  ne  distinguait  plus  rien  à  150  mètres. 

Du  21  novembre. —  Même  temps  que  la  veille. 

Du  22  novembre.  —  Un  courrier  envoyé  par  le  capitaine  L... 
annonce  qu'il  a  opéré  sa  jonction  avec  les  troupes  du  Ouadaï 
et  qu'ils  arriveront  ensemble  aujourd'hui. 


356  VERS    LE    TCHAD 

A  7  heures  du  matin,  ils  étaient  en  vue  et  à  7  heures  et  demie 
ils  nous  rejoignaient.  Avec  eux  sont  venus  des  indigènes  de 
Faya,  oasis  située  à  environ  50  kilomètres  d'Aïn-Galakka. 
Ils  viennent  demander  l'aman  et  nous  donnent  quelques 
renseignements  intéressants,  s'ils  sont  exacts  :  «  La  majeure 
partie  des  guerriers  de  Faya  a  été  emmenée  à  Aïn-Galakka 
par  les  Khouans  snoussistes.  Ceux-ci  seraient  déterminés  à 
résister  derrière  leur  forteresse  et  attendraient  des  renforts 
des  populations  du  Tibesti.  «  Tant  mieux  !  TafTaire  offrira  plus 
d'intérêt  et  j'aurai  l'occasion  d'admirer  la  vaillance  des 
Sénégalais.  Toutefois  il  est  à  craindre  que  les  Khouans  ne 
renoncent  à  leur  projet  de  résistance  lorsqu'ils  sauront  qu'ils 
auront  à  lutter  non  seulement  contre  les  troupes  du  Ouadaï, 
mais  aussi  contre  les  nôtres  dont  ils  ignorent  sans  doute  la 
venue. 

Du  23  novembre.  —  Nous  reprendrons  cet  après-midi,  à 
3  heures,  notre  marche  en  avant.  Nous  nous  porterons  dans 
la  direction  de  Faya  oi!i  nous  arriverons  vers  le  27  sans  doute. 
Nous  ne  serons  plus  alors  qu'à  deux  étapes  d'Aïn-Galakka. 

Du  Î6  novembre.  —  Erreur  !  ce  n'est  pas  sur  Faya  que 
nous  avons  marché,  mais  bien  sur  A'in-Gaiakka  dont  nous  ne 
sommes  plus  qu'à  25  kilomètres.  Demain,  In  challah  !  le  80  de 
montagne  chantera  une  aubade  aux  Khouans,  si  toutefois  ils 
nous  ont  attendus. 

Aïn-Galakka  ! 

Du  28  novembre.  —  Nous  sommes  à  Aïn-Galakka  depuis 
hier.  Nous  étions  vers  6  heures  du  matin  en  vue  de  la  zaouïa. 
Ses  gens  ne  s'attendaient  pas  à  notre  arrivée.  Quatre  jours 
auparavant  ils  avaient  dépêché  une  quarantaine  des  leurs  aux 
Khouans  de  Faya  qui,  croyant  que  nous  devions  passer  chez 
eux,  demandaient  du  secours. 

Le  nombre  de  nos  adversaires  était  donc  diminué  d'autant. 
L'affaire  n'en  a  pas  moins  été  très  chaude. 

Après  que  plusieurs  brèches  eurent  été  pratiquées  dans 
le  mur  par  le  80  de  montagne,  l'assaut  fut  donné. 

Ce  fut  une  ruée  d'un  admirable  élan,  aussi  bien  de  la  part 
des  officiers  que  de  ces  braves  sénégalais.  Aux  côtés  du 
colonel,  je  suivis  toutes  les  péripéties  de  l'affaire  :  le  capitaine 
Ferrandi,  avec  son  escorte,  allant  aux  mâles  accents  du  clairon, 
planter  nos  couleurs  sur  le  mur,  la  8^  Compagnie,  arrêtée  par 
une  épaisse  fortification  qui  n'apparaissait  pas  de  loin,  dut 
se  fusiller  à  bout  portant  avec  les  défenseurs.  Ce  fut  ensuite 


VERS    1,12    TCHAD  ^iî7 

une  conquête  de  maison  par  maison,  la  prise  de  l'étendard 
snoussiste,  puis  l'incendie  gagnant  de  tous  les  côtés.  Bref, 
ce  fut  la  guerre  dans  toute  son  horrible  beauté.  Môme  au 
Maroc,  il  ne  m'avait  pas  été  donné  de  voir  quelque  chose 
d'aussi  militaire,  ni  d'aussi  «  t'uria  française  ». 

Muni  (le  ma  jumelle  et  de  mon  appareil  photographique, 
je  ne  me  servais  ni  de  l'un,  ni  de  l'autre,  .le  ne  pouvais 
détacher  mes  regards  de  ce  qui  se  passait  devant  moi  et  ne 
songeais  nullement  à  fixer  sur  des  clichés  un  durable 
souvenir. 

Malheureusement  nous  avons  eu  à  déplorer  la  mort  du 
capitaine  Maignan,  celles  du  lieutenant  Berrier-Fontaine  -et 
de  l'udjudant  Boncou  et  de  neuf  sénégalais.  Parmi  les  blessés  : 
le  lieutenant  Dufour,  deux  sergents  et  une  vingtaine  de 
sénégalais. 

Quant  aux  défenseurs  de  la  zaouïa,  ils  ont  été  exter- 
minés. Il  y  a  bien  eu  quelques  femmes  (très  peu)  ou  enfants 
tués,  mais  nous  avons  pu  néanmoins,  à  la  grande  joie  du 
colonel  Largeau,  sauver  163  femmes,  200  enfants  et  54  esclaves. 

L'enterrement  des  tués  a  eu  lieu  ce  matin.  C'est  la  même 
cérémonie  imposante  dans  sa  simplicité  que  j'ai  eu  hélas  ! 
l'occasion  de  voir  maintes  fois  au  Maroc. 

Depuis  la  prise  d'Aïn-Galakka  je  suis  sur  les  dents.  Je  n'ai 
pas  une  minute  de  repos. 

Du  7  décembre.  —  Décidément,  je  suis  tombé  de  Gharybde 
en  Scylla.  Après  le  Maroc,  oij  la  besogne  ne  manquait  pas, 
je  suis  tout  aussi  surmené  au  Tchad.  Le  travail  ne  m'elTraye 
pas  mais  je  préférerais  que  la  besogne  fût  répartie  également 
sur  chaque  jour.  Ici  ce  n'est  pas  le  cas.  Depuis  la  prise  de  la 
zaouïa,  je  suis  pris  du  lever  du  soleil  jusqu'au  coucher. 

Aussi  je  n'ai  pas  pu,  comme  précédemment,  tenir  à  jour 
mon  journal  de  route. 

Le  l*""  décembre,  nous  avons  quitté  Galakka  pour  nous 
rendre  à  l'oasis  de  Faya  située  à  60  kilomètres  à  l'Ouest.  Les 
Khouans  qui  y  étaient  instruits  par  la  leçon  que  leurs  frères 
avaient  reçue  quelques  jours  auparavant,  ne  nous  ont  pas 
attendus  et  se  sont  enfuis  vers  Koufra  où  se  trouve  le  siège  de 
la  confrérie. 

A  notre  arrivée,  le  'S  au  soir,  par  un  chemin  impossible  à 
décrire,  à  travers  les  rochers,  nous  avons  trouvé  la  zaouïa 
évacuée  et  nous  nous  y  sommes  installés. 

Nous  partirons  demain,  à  6  heures,  pour  entreprendre  une 
tournée  de  pacification  d'une  trentaine  de  jours,  dans  l'extré- 
mité orientale  du  Tibesti  et  la  trouée  qui  est  située  entre  ce 


358  VERS    LE    TCHAD 

massif  montagneux  et  l'Ennedi  qui  se  trouve  à  l'Est,  entre  le 
Borkou  et  la  région  du  Ouadaï. 

Les  guides  me  disent  que  les  chemins  que  nous  suivrons 
pendant  la  première  partie  du  voyage  sont  encore  plus  acci- 
dentés que  ceux  qui  conduisent  de  Galakka  à  Faya. 

Du  '25  décembre.  —  J'ai  quitté  Faya  avec  le  colonel  et  une 
partie  de  la  colonne,  le  8  décembre  au  matin. 

Le  parcours  Faya-Gouro  m'a  fait  voir  le  désert  sous  un 
nouvel  aspect.  C'est  d'abord  le  désert  plat  et  sablonneux,  sans 
aucun  pâturage,  puis,  un  pays  d'aspect  absolument  fantastique  : 
des  rochers  noirâtres  taillés  en  dentelle  par  le  vent  et  le  sable, 
des  collines  basses  faites  d'une  roche  essentiellement  ferru- 
gineuse dont  la  couleur  donne  aa  pays  la  physionomie  d'une 
contrée  dévastée  par  un  immense  incendie. 

Nous  traversons  ensuite  une  région  où  les  plateaux  sont 
couverts  de  petits  cailloux  aux  vives  arêtes,  qui  rendent  la 
marche  pénible  aux  hommes  et  aux  animaux. 

Enfin,  le  13,  après  avoir  franchi  une  dernière  ligne  de  crêtes 
rocheuses  nous  arrivons  en  vue  de  Gouro.  Le  14,  au  matin, 
nous  sommes  à  2  kilomètres  de  la  zaouïa.  C'est  trop  tard.  Le 
Mokaddem  Si  Mohammed  Senni,  qui  a  été  prévenu  de  notre 
arrivée,  s'est  enfui  avec  sa  famille. 

Une  compagnie  se  lance  à  sa  poursuite.  Ses  fils  et  ses 
captifs,  favorisant  sa  fuite,  se  sont  installés  sur  les  pentes  du 
plateau  rocheux  qui  domine  la  zaouïa  et  bravement  retardent 
par  leur  feu  la  marche  des  sénégalais.  Ceux-ci  avancent 
pourtant.  Leur  tir  mieux  dirigé  que  celui  de  leurs  adversaires 
met  une  grande  partie  de  ceux-ci  hors  de  combat.  Les  femmes 
et  les  enfants  sont  bientôt  pris,  ainsi  que  deux  fils  du  Mokad- 
dem, âgés  de  30  à  35  ans,  blessés  l'un  au  bras,  l'autre  à  la  cuisse. 

Quant  au  père  et  au  reste  des  fugitifs  ils  ont  réussi  à  se 
mettre  hors  d'atteinte. 

La  zaouïa  est  alors  livrée  au  pillage,  un  fusil  de  guerre 
italien,  un  tapis  (grande  carpette)  usagé  et  une  écritoire  arabe 
en  cuivre  m'échoient  comme  part  de  prise.  Mais  hélas  !  il 
m'échoit  aussi  le  dépouillement  d'une  très  volumineuse 
correspondance  arabe  aussi  intéressante  qu'édifiante.  Il  y  a 
trois  h  quatre  mille  lettres  qu'il  faut  que  je  déchiffre  et  dont 
je  dois  traduire  les  plus  importantes.  J'en  ai  au  moins  pour 
six  mois. 

Mais  ce  n'est  pas  là  la  conséquence  la  plus  drôle  de  la  fuite 
de  Si  Mohammed  Senni.  Son  harem  et  ses  enfants  sont 
emmenés  comme  otages  et  c'est  moi  qui  en  ai  la  charge. 
Non  !  mais  me  voyez-vous  en  Marsoul  des  Mille  et  une  nuits, 


VERS    LE    TCUAD  359 

presque  en  eunuque  ?  Le  personnel  féminin  comprend  : 
deux  femmes  arabes  de  Tripoli,  une  femme  téda,  une  femme 
ouadaïenne,  petite  lille  d'un  sultan,  sept  captives  noires.  Voilà 
pour  les  femmes  de  Si  Motiammed  Senni  et  leur  domesticité. 
J'ai  en  outre  les  trois  filles  du  vieux  snoussiste  dont  l'ainée 
âgée  de  18  ans,  est  déjà  veuve  et  mère  d'un  enfant.  Cette  der- 
nière a  une  physionomie  vraiement  fine. 

L'ordre  qui  m'a  installé  dans  mes  (onctions  actuelles  com- 
porte pour  moi  l'obligation  de  rester  en  permanence  auprès 
de  mon  harem,  de  lui  distribuer  la  pitance,  de  veiller  à  ce 
qu'il  ne  manque  ni  de  bois,  ni  d'eau  et  ce  qui  est  le  plus 
délicat...  de  mettre  la  vertu  de  ces  dames  à  l'abri  des  entre-- 
prises  du  personnel  masculin  de  la  colonne  ! 

Gomme  les  femmes  tripolitaines  sont  des  hadriates 
(citadines)  et  (ju'elles  m'ont  vu  leur  causer  avec  compétence 
de  rechta,  boukettouf,  keddid  (mets  arabes)  que  je  leur  ai 
vu  faire,  elles  sont  persuadées  que  je  suis  un  musulman 
algérien.  Gomme  d'autre  part,  leur  sort  me  fait  pitié  et  que 
je  tâche,  autant  que  possible,  de  l'adoucir,  je  m'entends  toute 
la  journée  souhaiter  El  Djenna  (le  paradis). 

Mais  en  attendant  le  paradis  je  gagne  des  poux.  G'est  pour 

l'instant  le  résultat  le  plus  clair  de  mes  attentions  pour  elles. 

Je  ne  sais  si  tout  ce   monde  sera  emmené  plus   loin  que 

Faya,  mais  malgré  leur  côté   intéressant,  il  me  tarde  d'être 

débarrassé  de  ces  fonctions  qui  sont  une  véritable  sujétion. 

Le  20  au  soir,  nous  avons  quitté  Gouro  et  le  24  au  matin 
nous  sommes  arrivés  à  l'oasis  d'Oujanga,  oîi  nous  séjourne- 
rons jusqu'au  l*^""  janvier. 

Pendant  cette  période,  de  petits  détachements  seront 
envoyés  en  reconnaissance  dans  toutes  les  directions. 

Du  iO  janvier  1914.  —  Notre  séjour  à  Oujanga  a  duré 
jusqu'au  31  décembre  après-midi.  Cela  m'a  fait  près  de  huit 
jours  de  repos  physique  seulement,  car  là  aussi  j'ai  récolté 
du  travail,  pour  moins  de  temps  qu'à  Gouro  peut-être,  mais 
suffisamment  pour  m'occuper  un  mois  de  plus. 

Mes  occupations  ne  m'ont  pas  permis  d'admirer  ce  joli  coin 
d'Oujanga  autant  qu'il  l'aurait  mérité.  Au  milieu  d'un  décor 
sauvage  d'énormes  rochers,  en  bordure  d'un  lac  aux  eaux 
d'azur,  une  palmeraie  s'étend,  dressant  vers  le  ciel  sa  verte 
chevelure.  Vous  ne  sauriez  vous  imaginer  avec  quel  plaisir  on 
aperçoit  ce  coin  délicieux  lorsqu'on  a  de  Faya  à  Gouro  et  de 
Gouro  à  Oujanga,  parcouru  près  de  300  kilomètres  dans  un 
horrible  pays  rocheux  oii  l'on  ne  trouve  de  maigres  pâturages 
épineux  et  de  diss  que  tous  les  40  ou  60  kilomètres. 


360  VERS    LE    TCHAD 

Pendant  qu'une  partie  des  troupes  séjournait  à  Oujanga 
bon  nombre  de  camarades  avec  leurs  tirailleurs  et  leurs 
chameaux  battaient  le  pays,  les  uns  pour  le  reconnaître,  les 
autres,  pour  nous  mettre  à  l'abri  d'une  surprise  de  150  à 
200  irréductibles  qui  restent  réfugiés  dans  les  rochers  du  Tibesli. 

Partis  d'Oujanga  le  31  décembre,  nous  nous  sommes  trou- 
vés en  route  le  h""  janvier  au  matin,  échangeant  nos  vœux  à 
la  lueur  des  feux  du  bivouac  et  pensant  avec  envie  à  ceux  qui, 
à  l'abri  du  froid  et  du  sable,  fêtaient  le. Jour  de  l'An  en  famille. 

J'étais  pourtant  moins  triste  que  mes  réflexions  pourraient 
le  faire  croire  et,  à  midi,  nous  étions  réunis  avec  quelques 
camarades  autour  d'un  confortable  couscous,  et  devisions 
gaiement  sur  les  infortunes  de  mes  prisonnières. 

Du  l^""  au  4,  il  a  fait  chaud,  mais  à  partir  de  cette  dernière 
date,  le  temps  se  remettait  au  vent  et  au  froid  ;  le  7,  à  l'heure 
du  déjeuner,  nous  étions  gratifiés  d'une  tempête  de  sable. 

Le  même  jour  prenant  les  devants  avec  le  colonel,  l'état- 
major  et...  ma  smala  nous  arrivons  à  Faya  après  le  coucher 
du  soleil. 

C'est  aujourd'hui  le  12,  voilà  quatre  jours  que  nous  sommes 
ici.  Je  continue  ma  besogne  de  déchiffreur  de  grimoires, 
troublé  à  chaque  instant  par  les  trop  nombreux  plaignants 
qui  viennent  présenter,  avec  une  audace  imperturbable,  les 
plus  fantastiques  réclamations. 

Hier  j'ai  dû  abandonner  mon  travail  pour  préparer  le 
départ  direct  sur  Fort-Lamy  de  mes  prisonnières  et  prisonniers; 
ils  y  seront  conservés  comme  otages,  ils  me  quitteront  après- 
demain  sans  doute. 

Malheureusement  le  colonel  s'est  laissé  fléchir  par  l'une  des 
femmes  qui,  originaire  du  Ouadaï,  a  demandé  à  nous  suivre 
jusqu'à  Abéché  où  elle  sera  rendue  à  sa  famille. 

Me  voilà  donc  chargé  de  cette  femme  de  sa  belle-sœur  et  de 
ses  trois  esclaves  pendant  quarante-cinq  jours  encore. 

Du  i6  janvier.  —  Nous  avons  quitté  Faya  hier  après-midi 
vers  4  heures  et  sommes  ailés  coucher  à  environ  8  kilomètres 
de  là.  Nous  avons  abandonné  notre  bivouac  de  nuit  ce  matin, 
vers  4  heures,  et,  après  8  heures  de  chameau,  avons  atteint  un 
lieu  de  pâturage  où  nous  passerons  la  nuit. 

Me  voilà  presque  complètement  débarrassé  des  fennnes, 
les  six  restées  avec  nous  ayant  été  confiées  aux  partisans 
indigènes. 

il  janvier.  —  L'étape  n'a  pas  été  longue  ce  matin.  Nous 
avons  fait  tout  au  plus  trois  quarts  d'heure  de  chameau  à 
travers  un   terrain    rocheux.  L'imprécision  des  déclarations 


I 


VERS    LE    TCHAD  361 

des  giiidfis  nous  a  l'ail  pi^-ili-e  là  iiikî  inatiriée  puisque  le  pelit 
eflbrt  t'ait  ce  matin  eût,  loul  aussi  bien,  |)u  être  accompli  hier. 
X  mon  départ  j'ai  en  nne  petite  émotion.  I^'esclave,  (\\\(î  j'ai 
chargée  d'an  jeune  Tonhon  ahandonné  à  Gouro  par  ses 
parents,  est  venue,  au  réveil,  m'avertir  que  l'enfant  avait 
disparu  hier  dans  la  soirée,  .(c  me  mis  à  faire  des  recherches, 
mais  elles  n'aboutirent  pas.  .l'étais  navré  car,  ni'étant  en 
somme  chargé  de  ce  négrillon,  je  voyais  déjà  ce  pauvre  petit 
errant  dans  le  désert  et  mourant  de  faim  et  de  soif.  Je  me 
portai  alors  sur  le  passage  de  la  colonne  interrogeant  tout  le 
monde.  La  colonne  avait  entièrement  défilé  et  je  n'avais  reçu 
de  chacun  qu'une  l'éponse  négative  lorsque,  arrive  enfin  le 
sergent-major  Gh...  qui,  ayant  trouvé  le  gosse,  venait  de  le 
confier  au.\  captives.  Je  poussai  alors  un  soupir  de  soulagement. 

Je  dois  faire  une  petite  rectification  :  j'exagère  lorsque  je 
prononce  le  mot  colonne.  Gelle-ci  a  été  disloquée  le  8  et  nous 
n'avons  plus  avec  nous  (avec  le  colonel  et  son  état-major) 
qu'un  détachement  de  80  hommes  destiné  à  tenir  garnison 
à  Fada,  poste  dont  la  création  est  imposée  par  le  remaniement 
des  divisions  administratives  du  territoire  par-  suite  de  l'occu- 
pation de  Borkou. 

Du  18  janvier.  —  Deu.\  étapes  de  plus  à  travers  le  même 
pays  désertique,  mêmes  horizons  de  rochers,  mêmes  paysages 
de  sable,  agrémentés  de  maigres  pâturages  et  de  chétifs 
épineux  qui  me  l'appellent  ces  arbres  avortons  qui,  dans  les 
postes  du  sud  algérien  où  des  hauts  plateaux  marocains, 
s'obstinent  à  ne  pas  vouloir  pousser  malgré  la  constante 
sollicitude  des  officiers. 

19  janvier.  —  Départ  à  2  heures  et  demie  du  matin  par  un 
beau  clair  de  lune.  Défilé  silencieux  à  travers  des  chemins  où 
les  rochers  éclairés  par  la  lumière  blanche  de  la  lune 
prennent  des  aspects  fantastiques  Arrivée  à  l'étape  à  9  heures 
un  quart.  Déjeuner  en  compagnie  du  lieutenant  D...  qui,  pour 
la  seconde  fois  depuis  notre  départ  de  Faya,  me  fait  [)iirtager 
son  repas  relevé  d'un  plat  de  viande  fraîche  (mouton  ou 
poulet)  qu'il  a  pu  se  procurer  avant  notre  départ. 

Notre  menu  est  des  plus  simples  et  il  nous  tarde  d'arriver 
dans  des  contrées  plus  riches.  Nous  sommes  à  peu  près  tous 
réduits  au  régime  du  couscous,  riz,  boîtes  de  thon  ou  de 
sardme,  viande  de  conserve.  Et  encore,  j'ai  eu  la  veine  de 
tomber,  la  veille  du  jour  où  nous  devions  quitter  Faya,  sur  un 
sous-officier  qui  m'a  passé  une  petite  provision  de  beurre 
sans  quoi  j'en  serais  réduit  au  couscous  et  au  riz  cuit  à  l'eau 
et  au  sel. 


24 


362  VERS    LE    TCHAD 

Ce  brave  sous-officier,  un  des  liéros  de  Galakka  proposé 
pour  le  grade  d'officier  à  la  suite  de  cette  affaire,  n'a  accepté 
qu'avec  bien  des  difficultés,  les  petites  choses  que  j'ai  pu  lui 
donner  en  compensation. 

20  janvier.  —  Départ  à  2  heures  trois  quarts  du  matin, 
arrivée  à  l'étape  vers  midi.  La  matinée  a  été  plutôt  froide  et 
j'ai  dû,  pour  ne  pas  souffrir  de  l'abaissement  de  la  tempéra- 
ture, me  revêtir  de  ma  djellaba  par-dessus  ma  vareuse  de  drap. 

21  janvier.  —  Partis  ce  matin  à  2  heures  et  demie  nous 
arrivons  à  l'important  point  d'eau  d'Oueyta  caractérisé  par 
deux  mares  et  deux  bons  pâturages  distants  l'un  de  l'autre 
de  deux  à  trois  kilomètres.  Nous  ne  tardons  pas  à  nous 
apercevoir  de  la  présence  désagréable  de  moustiques  et  nous 
nous  empressons  de  fuir  le  voisinage  des  mares  pour  installer 
notre  petit  camp  en  haut  d'une  dune. 

Nous  ne  repartirons  d'Oueyta  que  demain  soir.  Cela  permet- 
tra aux  chameaux  de  pâturer  et  de  se  reposer. 

Les  pauvres  bêtes  sont  bien  fatiguées  et  l'énorme  bosse 
qu'elles  avaient  au  départ  est  maintenant  réduite  à  sa  plus 
simple  expression. 

Le  vent  qui  rendait  la  température  glaciale  hier  matin,  s'est 
calmé  dans  la  nuit.  Aussi  il  fait  aussi  chaud  ce  matin  qu'il  fai- 
sait froid  hier.  Le  climat  est  vraiment  capricieux.  Heureuse- 
ment qu'on  n'en  souffre  pas. 

Le  retour  des  chameaux  du  pâturage  nous  a  valu  une  inva- 
sion de  moustiques  et  chacun  s'empresse  de  sortir  sa  mousti- 
quaire qui  était  remisée  depuis  bientôt  trois  mois. 

2)2  janvier.  —  Le  vent  s'est  levé  ce  matin  mettant  en  fuite 
ces  désagréables  autant  qu'importunes  bestioles.  Comme  quoi 
ce  qui  nous  contrarie  par  moments  peut  nous  être  d'un  grand 
secours  en  maintes  circonstances. 

Nous  repartirons  vers  1  heure  de  façon  à  arriver  demain  au 
pâturage  d'Oum  Ladam,  où,  en  mai  dernier,  le  lieutenant  D... 
a  tué  soixante-quatorze  Khouans  contre  deux  tués  et  un 
blessé  de  son  côté.  C'est  précisément  le  nom  du  lieu  qui  le 
prédestinait  à  être  jonché  d'os.  Son  nom  doit  venir  d'ailleurs 
des  os  d'animaux  qu'on  trouve  généralement  dans  les  lieux 
de   pâturages. 

23  janvier.  —  Partis  à  4  heures  du  matin,  nous  sommes 
arrivés  à  Oam  Ladam  à  9  heures.  Nous  touchons  à  la  lisière  de 
l'Ennedi  et  déjà  apparaissent  à  l'horizon  ces  œuvres  d'architec- 
ture que  la  fantaisie  du  vent  et  du  sable  a  taillés  dans  le  roc. 
Plongés  dans  la  légère  brume  du  matin,  leurs  masses  me 


VERS    LE    TCHAD  363 

rappellent  les  édifices  géants    d'une  grande   ville  endormie 
dans  le  brouillard  d'une  matinée  de  novembre. 

Très  appréciée  des  cbameaux,  leau  d'Ain  Ladam  ne  l'est 
guère  des  Européens  EUeu  une  odeur  et  un  goût  particulière- 
ment désagréables.  Les  animaux,  depuis  longtemps  privés 
d'une  nourriture  suffisante,  mangent  à  satiété. 

24  janvier.  —  Après  une  nuit  passée  à  Oum  Ladam,  nous 
nous  remettons  en  route  cet  après-midi  vers  4  heures.  Dans 
trois  jours  nous  serons  à  Fada  où  nous  laisserons  le  lieute- 
tenant  D... 

25  janvier.  —  Nous  avons  abordé  TEnnedi  ;  c'est  une  série  de 
rochers  fantastiques,  taillés,  déchiquetés  de  la  façon  la  plus 
bizarre,  de  la  manière  la  plus  curieuse.  Le  même  rocher  a 
différents  aspects,  suivant  qu'on  le  regarde  d'un  côté  ou  de 
l'autre.  L'un  donne  l'illusion  d'une  usine  avec  sa  haute  chemi- 
née, l'autre  se  dresse  en  pyramide,  plus  loin  on  croirait  aper- 
cevoir un  vieux  château  démantelé  ou  un  gigantesque 
rempart  écroulé. 

Vers  4  heures,  après  avoir  gravi  une  rampe,  nous  aperce- 
vons à  nos  pieds  l'Oued  Ndou  que  marque  une  large  bande 
verte  bordée  par  une  première  ligne  de  rochers.  Dans  le  loin- 
tain, d'autres  escarpements  surgissent  élevant  vers  le  ciel 
leurs  formes  étranges. 

Je  ne  partage  pas  l'avis  du  capitaine  F...  qui  trouve  ce 
pays  ignoble.  Au  contraire  je  trouve  merveilleux  ce  paysage 
et  son  décor,  après  les  immensités  nues  et  arides  du  Borkou. 
Celui-ci  possède,  il  est  vrai  des  palmeraies  qui  forment  autant 
de  jolis  coins,  mais,  entre  chacunes  d'elles,  s'étend  l'espace 
immense  qui  fatigue  par  son  uniformité.  Ici  l'aspect  varié  de 
ces  rochers  anime  le  désert,  la  tache  sombre  des  épineux, 
des  euphorbes  géantes,  vient  y  jeter  une  note  relativement 
gaie. 

26  janvier.  —  Nous  avons  traversé  la  vallée  du  Ndou  dans 
la  nuit  et  l'aurore  blanchissait  l'horizon  lorsque  nous  avons 
atteint  la  ligne  rocheuse  que  j'apercevais  hier.  Pendant  près 
d'un  quart  d'heure  nous  avons  défilé  à  travers  un  champ 
d'étranges  monuments  qui  se  détachaient  comme  des 
ombres  sur  un  écran.  Les  tirailleurs  sénégalais  ne  pouvaient 
eux-mêmes  s'empêcher  d'admirer  ce  tableau,  échangeant  les 
réflexions  les  plus  naïves.  Quel  merveilleux  spectacle  l'Ennedi 
nous  eût  offert  en  cet  endroit  par  un  beau  clair  de  lune  ! 

Nous  atteignons  au  jour  une  nouvelle  vallée  où,  en  dehors 
des  iphènes  (genre  de  palmiers),  les  véritables  arbres  commen- 
cent à  réapparaître.  Des  oiseaux  voltigent  dans  les  airs,  des 


364  VERS    LE    TCHAD 

tourterelles  roucoulent  dans  les  acacias...  Nous  avons  quitté 
le  désert. 

Vers  9  heures  et  demie,  nous  atteignons  le  puits  de  Fada 
où  nous  retrouvons  la  partie  de  la  8»  Compagnie  qui,  ayant 
quitté  Faya  quelques  jours  avant  nous,  était  venue  ici  pour  y 
préparer  la  rencontre  des  notables  des  populations  du  Djebel 
avec  le  colonel. 

Nous  resterons  là  quatre  ou  cinq  jours.  Peut-être  enfin  y 
serons-nous  rejoints  par  un  courrier  qui,  passé  par  le  Borkou, 
m'apportera  des  nouvelles. 

28  janvier.'  —  Nous  avons  quitté  le  point  d'eau  de  Fada 
hier  vers  3  heures  et  demie,  mais  nous  ne  sommes  sortis  de  la 
vallée  que  ce  matin  pour  nous  engager  entre  des  hauteurs 
qui,  par  leur  aspect  calciné,  m'ont  rappelé  les  paysages  du 
Borkou  et  de  l'extrémité  orientale  du  Tibesti. 

Du  i«''  février.  —  Nous  sommes  arrivés  ce  matin  dans  la 
vallée  d'Archéi  oi^i  les  rochers  sont  encore  plus  taillés  et 
déchiquetés,  plus  tourmentés  que  dans  les  sites  précédents. 

A  Archéi,  l'eau  nous  est  fournie  par  des  mares  qui  se 
trouvent  au  pied  des  rochers  et  qu'alimenteraient  des  sources. 
La  mousse  verte  qui  les  couvre  nous  empêche  de  voir  les 
caïmans  qu'on  dit  y  fourmiller. 

Nous  coucherons  ici  et  ne  repartirons  que  demain  soir 
pour  ne  trouver  de  l'eau  qu'à  Oum  Ghalouba  distant  de  quatre 
jours  de  chameau.  Les  froids  ont  pris  fin  et  la  chaleur  com- 
mence à  se  faire  sentir. 

Dit  3  février.  —  Gomme  je  vous  Fav^ais  fait  prévoir,  nous 
avons  quitté  Archéi  hier.  Une  erreur  de  guides  nous  a  fait 
faire  une  demi-heure  de  marche  inutile,  mais  nous  a  valu 
d'admirer  de  près,  au  clair  de  lune,  les  derniers  rochers  de 
l'Ennedi  dont  nous  sommes  complètement  sortis.  Nous  voilà 
dans  la  plaine  du  Mortcha  recherchée  par  les  nomades  à 
cause  de  la  richesse  de  ses  pâturages. 

Malheureusement  je  suis  tombé  sur  une  année  de  séche- 
resse et  la  terre  n'offre  que  des  herbes  brûlées  par  le  soleil. 
Le  sol  redevient  ferme  avec  une  couche  superficielle  de  sable. 

Dit  4  février.  —  Décidément,  nos  guides  ne  connaissent 
guère  le  pays.  Hier  soir,  pendant  notre  marche  de  nuit,  ils 
ont  complètement  perdu  le  Nord.  C'était  vraiment  le  cas  de 
le  dire,  car  ils  le  plaçaient  à  l'Est.  Comme  à  un  certain  moment 
ils  nous  reconduisaient  tout  simplement  sur  Fada  leur  erreur 
nous  est  apparue  tellement  évidente  que  nous  les  avons 
laissés  aller  à  leur  guise  et  avons  marché  en  nous  servant  de  la 


VERS    LE    TCHAD  365 

boussole.  Nous  a\ons  retrouvé  la  bonne  direction,  mais  perdu 
deux  bonnes  heures  de  sommeil. 

Ce  matin  nous  avons  fait  deux  rencontres.  D'abord  une 
superbe  biche  qui,  détachant  sa  blanche  silhouette  sur  la 
plaine  jaune,  nous  a  placidement  regardé  passer.  Ensuite  un 
beau  chat  sauvage:  «elguettouche»  comme  l'appellent  les  indi- 
gènes qui.  blotti  au  pied  d'un  toutfe  d'herbe  et  signalé  par  le 
colonel,  n'a  pris  la  fuite  qu'au  moment  où  j'ai  fait  «  baraquer  » 
mon  chameau  pour  le  photographier. 

La  température  est  plus  supportable  ici  grâce  au  vent  qui 
souffle  en  permanence. 

Nous  avons  bivouaqué  ce  matin  près  de  l'oued  Oum  Ahdjar,- 
ainsi  dénommé  à  cause  des  blocs  de  granit  amoncelés  en 
divers  points  de  son  lit. 

Du  5  février.  —  Après  avoir  couché  à  Oued  Honache,  nous 
nous  sommes  portés  ce  matin  sur  l'Oued  el  Hadid  à  travers 
un  pays  qui  a  toujours  le  même  aspect  depuis  que  nous  avons 
quitté  l'Ennedi.  Quelques  termitières  émergent  çà  et  là  nous 
rappelant  que  le  désert  n'est  pas  seul  à  avoir  des  inconvé- 
nients. La  température  est  plutôt  basse  aujourd'hui  et  j'ai  dû 
à  nouveau  me  revêtir  de  mon  paletot  de  drap  et  de  ma  djellaba* 
Je  préfère  cela  à  la  chaleur. 

Nous  serons  demain  à  Oum  Chalouba,  nous  rapprochant 
peu  à  peu  du  but.  Mon  Dieu!  qu'il  me  tarde  d'arriver!  Que  ce 
voyage  maintenant  sans  but,  h  travers  des  espaces  infinis  et 
inonotones,  est  fastidieux  !  Bercés  par  nos  chameaux  durant 
des  étapes,  nous  allons,  n'ayant  rien  à  lire,  l'œil  vague,  la 
pensée  errante  et  vagabonde.  Nul  point  ne  vient  retenir  le 
regard  et.  sur  la  route,  les  heures  s'allongent,  uniformes, 
insipides. 

Du  6  février.  —  Nous  arrivons  à  Oum  Ctialouba  par  une 
matinée  assez  froide  après  avoir  traversé  un  champ  de  blocs 
granitiques.  Le  puits  nous  fournit  une  eau  bourbeuse  sans  que 
le  goût  en  soit  désagréable.  L'oued  est  garni  d'épineux  mais 
le  pâturage  est  plutôt  rare.  Il  est  vrai  qu'il  doit  disparaître 
rapidement  en  raison  de  la  présence,  en  ce  point,  de  campe- 
ments permanents  de  nomades. 

Du  7  février.  —  Après  une  nuit  passée  à  Oum  Chalouba, 
nous  repartirons  ce  soir  sur  Arada. 

Le  courrier  venu  de  ce  point  n'a  pas  apporté  de  lettres, 
mais  en  revanche  quelques  légumes  (aubergines,  tomates  et 
salades)  que  le  chef  de  poste  a  eu  l'amabilité  de  songer  à  nous 
envoyer. 

Du  H  février.  —  Nous  sommes  à  Arada  depuis  hier  matin. 


366  VERS    LE    TCHAD 

Pour  que  ma  description  soit  complète  je  vous  dirai  qu'entre 
Oum  Chalouba  et  Arada  il  n'y  a  rien  de  remarquable.  C'est  le 
même  pays  que  les  jours  précédents  ;  étendues  plates,  avec 
des  traces  de  pâturages,  coupées  de  temps  en  temps  par  de 
légers  thaï  w^egs  marqués  par  une  ligne  d'épineux  et  pompeu- 
sement décorés  du  nom  d'Ouadi  (oueds).  Cela  me  rappelle 
l'appellation  de  «  Boulevard  ^>  donnée  audacieusement  par  les 
Oranais  à  des  artères  qui  méritent  le  nom  plus  approprié 
de  rues. 

En  approchant  d'Arada,  le  pays  devient  tout  de  même  un 
peu  accidenté  et  légèrement  ondulé.  Nous  avons  été  reçus 
au  poste  par  ce  brave  sous-lieutenant  B...  qui  avait  eu  la 
pensée  de  nous  faire  parvenir  des  légumes  à  Oum  Chalouba 
et  qui,  ne  s'en  tenant  pas  à  cette  gentillesse,  nous  hébergera 
pendant  les  trois  jours  que  nous  resterons  ici. 

Un  petit  accroc  vient  d'arriver  qui  peut-être  aura  pour 
conséquence  de  prolonger  de  quelques  jours  la  durée  (cin- 
quante à  soixante  jours  au  maximum)  que  mettaient  à  arri- 
ver à  Fort-Lamy  les  lettres  de  France.  Malgré  cela  la  voie 
anglaise  restera  la  plus  rapide  à  destination  du  Tchad.  Voici 
ce  qui  se  passait  : 

Depuis  deux  ans,  à  la  suite  d'un  accord  franco-anglais,  le 
courrier  de  France  à  destination  du  Tchad  était  mis  en 
dépêches  à  Paris  (Bureau  étranger)  et  de  là  dirigé  en  sacs 
fermés  sur  Liverpool  qui,  à  son  tour,  le  dirigeait  sur  la  colonie 
anglaise  de  Nigeria  où  il  arrivait  à  Kano  par  les  voies  régu- 
lières. De  Kano  à  Fort-Lamy  il  était  acheminé  par  des 
porteurs.  Au  début,  tout  alla  bien,  il  n'y  avait  guère  que 
sept  à  huit  sacs  de  lettres  par  courrier,  mais  la  rapidité  avec 
laquelle  la  correspondance  arrivait  (quarante-cinq  jours  au 
lieu  de  quatre-vingt-dix  par  la  voie  du  Congo)  suggéra  aux 
Européens  de  se  ravitailler  en  vivres  de  conserve  par  le  moyen 
de  la  lettre  à  1  kilogramme.  Bien  mieux,  un  commerçant  fit 
venir  sa  marchandise  par  cette  voie.  Finalement,  le  nombre 
de  sacs  de  dépêches  est  passé  de  sept  à  quatre-vingts!  Les 
Anglais  ont  patienté  ;  mais  lorsqu'ils  se  sont  rendus  compte 
que  cela  devenait  permanent  et  non  pas  accidentel,  ils  ont 
avisé,  au  dernier  courrier,  que  les  difficultés  qu'ils  éprouvaient 
à  recruter  le  personnel  de  porteurs  nécessaires,  ainsi  qu'à  le 
nourrir,  ne  leur  permettaient  plus  d'assurer  le  service  du 
transport  de  nos  dépêches.  C'était  fatal  :  et,  dès  mon  arrivée, 
à  Fort-Lamy  j'avais  entendu  autour  de  moi  exprimer  des 
craintes  à  ce  sujet. 

Ce  n'a  donc  pas  été  une  surprise  et  nous  avons  même  trouvé 


VERS    I-E    TCHAD  367 

les  Anglais  fort  aimables  de  nous  proposer  de  nous  avertir 
quinze  jours  à  l'avance  du  nombre  de  sacs  qui  arriveront  à 
Kano.  Ce  qui  nous  permettra  d'y  diriger  sans  trop  grande 
perte  de  temps  l'équipe  nécessaire  de  porteurs. 

Du  19  février.  —  Demain  je  serai  à  Abéché  et,  dans  quelques 
jours,  liuit  jours  au  plus,  je  serai  fixé  sur  mon  affectation 
définitive.  Ce  que  j'ai  vu  ou  entendu  dire  me  fait  désirer 
retourner  fi  Fort-Lamy.  Abéché  très  épprouvée  par 
l'insurrection  du  Ouadaï,  et  l'occupation  française,  ne  s'est 
pas  relevée  depuis  et,  pour  comble,  la  région  dont  elle  est 
la  capitale  est  une  des  plus  atteintes  par  la  séclieresse.  Déjà  à 
Arada.  nous  en  avons  constaté  les  premiers  effets  :  quelques 
morts  dans  les  villages  voisins.  Puis,  lorsque  nous  nous  som- 
mes remis  en  route,  cela  a  été  une  série  de  villages  complè- 
tement désertés  par  leurs  populations.  Parfois  des  malheureux, 
squelettiques,  décharnés,  trop  faibles  pour  fuir  vers  des 
régions  plus  fortunées,  se  traînaient  lamentablement  devant 
nous  mendiant  quekjue  nourriture. 

A  Bilten,  nouveau  poste  à  deux  jours  d'Arada,  sur  la  route 
d 'Abéché,  le  capitaine  R...  nous  dit  que  des  enfants  meurent 
de  faim  auprès  des  cuisines  des  tirailleurs,  autour  desquels  ils 
rôdent,  guettant  quelque  aumône. 

Enfin  hier,  un  vieillard  que  le  colonel  Largeau  interrogeait, 
nous  apprenait,  que  dans  son  village,  les  malheureux  en 
étaient  réduits àse  nourrir  de  baies  desséchées  et  pulvérisées: 
vingt-huit  personnes  sont  mortes  depuis  que  la  nécessité 
oblige  les  gens  à  se  nourrir  de  cette  façon. 

Si  la  misère  est  aussi  grande  à  la  campagne,  qu'est-ce  que 
cela  doit  être  dans  une  agglomération  d'environ  10.000  habi- 
tants ?  Et  quelles  ressources  doit-on  y  trouver  ? 

A  Fort-Lamy  on  a  moins  souffert  de  la  sécheresse  et  là  on 
est  assuré  d'avoir  constamment  œufs,  poulets,  beurre,  lait  et 
poisson  sans  compter  que  je  peux  faire  venir  du  blé  du  Kanem 
et  me  faire  faire  du  couscous  ou  des  pâtes. 

A  partir  d'Arada  le  pays  change.  Ce  ne  sont  plus  les  mêmes 
espaces  nus  et  plats.  Peu  à  peu  le  terrain  est  devenu  rocheux, 
accidenté  et  se  couvre  d'une  végétation  chétive  mais 
assez  dense.  De  tous  côtés  l'horizon  est  borné  par  une  ligne 
de  collines  granitiques  formées  de  blocs  énormes  entre  les- 
quels croissent  des  arbrisseaux  dépouillés  de  feuilles. 

Arrivé  à  Abéché,  le  20  février  au  matin  je  quitterai  la 
capitale  du  Ouadaï  le  4  mars  prochain.  J'en  suis  heureux,  car 
je  ne  me  trompais  guère  sur  les  charmes  de  cette  résidence. 
La  solution  que  je  souhaitais  a  été  facilitée  par  le  retour  au 


368  VERS    LE    TCHAD 

Tchad  d'un  ex-interprète  à  trois  galons  qui,  après  un  .séjour 
de  sept  à  huit  ans  au  Tchad  ou  à  Zinder,  s'est  fait  nommer 
administrateur  colonial.  Pris  de  la  nostalgie  du  pays,  il  y 
revient  en  cette  qualité.  Comme  il  a  déjà  été  employé  au 
Ouadaï  il  est  tout  naturel  qu'il  y  retourne  ! 

Du  13  mars.  —  Nous  avons  quitté  Abéché,  le  4  comme  je 
l'avais  dit  plus  haut.  La  r'oute  a  commencé  à  devenir  inté- 
ressante du  jour  où  nous  avons  atteint  le  Batha  (7  mars) 
rivière  assez  large  par  endroits.  En  ce  moment  elle  est  à  sec, 
elle  ne  coule  qu'environ  un  mois  pendant  la  saison  des  pluies 
(août-septembre).  Néanmoins  les  berges,  couvertes  d'une 
végétation  assez  dense  d'épineux,  lianes,  ficus  géants,  en  sont 
assez  riantes.  Nous  voyons  fréquemment  des  bandes  de  cinocé- 
phales  prenant  leurs  ébats,  et,  sur  la  route,  des  biches  qui 
fuient  à  notre  approche;  des  pintades,  qui  picorent  audacieu- 
sement  à  quelques  pas  de  nous,  viennent  nous  distraire, 
tandis  que  la  brise  chargée  des  effluves  odorantes  des 
mimosas  parfume  l'atmosphère. 

Pour  vous  la  bonne  saison  a  commencé,  la  campagne  rever- 
dit, les  froids  de  l'hiver  ont  fui  et  les  hautes  températures  de 
l'été  sont  encore  loin.  Bientôt  vous  allez  fêter  Pâques.  Ici.  .  . 
c'est  la  mauvaise  saison  qui  approche,  la  chaleur,  dont  je 
n'avais  presque  pas  eu  à  souffrir  depuis  le  début,  commence  à 
se  faire  rudement  sentir.  Mais  contrairement  à  ce  qui  se  pas- 
sait à  Relizane,  mon  appétit  loin  d'en  décroître  semble 
augmenter.  C'est  bon  signe. 

Du  10  mars.  —  Nous  avons  atteint  le  poste  d'Ain  Hadjer 
dontlecommandant,lelieutenantR..,  a  séjourné  quatre  ans  au 
Maroc  occidental,  ce  qui  nous  a  permis  de  causer  ensemble  de 
choses  connues  de  tous  deux.  Il  nous  à  donné  Thospilalité  la 
plus  large  pendant  les  deux  jours  passés  auprès  de  lui.  Nous 
avons  fort  apprécié  les  produits  de  ses  jardins.  Le  12  après- 
midi  nous  lui  avons  fait  nos  adieux  et  repris  notre  vie  errante. 

W  mars.  —  Nous  voilà  à  mi-route  d'Abéché  à  Fort-Lamy, 
nous  sommes  arrivés  ce  matin  à  Ati,  situé,  comme  Ain  Hadjer, 
sur  le  Batha. 

Nous  avons  quitté  Ati  le  23  mars.  Depuis  cette  date  nous 
avons  laissé  le  Batha,  pour  nous  engager  à  Yao  dans  la  région 
du  Fitri,  qui  est  l'une  des  plus  intéressantes  que  j'aie  vues.  Il 
y  a  trois  ans  une  lagune  de  30  kilomètres  de  long,  sur  environ 
15  kilomètres  de  large,  y  couvrait  une  superficie  de  450  kilo- 
mètres carrés.  La  sécheresse  des  trois  dernières  années  a  iTiis 
ce  lac  à  sec  fournissant  aux  indigènes  un  terrain  de  culture 
d'une  richesse  admirable.  Ceux-ci  ont  su  en  profiter  et,  tandis 


VERS    LE    TCHAD 


369 


que  dans  plusieurs  réfjicns  voisines  c'est  la  misère  oji  la 
disette,  au  Fitri  c'est  l'abondance.  Le  sous-sol  a  en  effet  con- 
servé une  luHDidité  suffisante  i)Our  que  le  nnil,  les  pastèques 
et  di(Véreutslé{j;uines  viennent  en  cette  saison  avec  une  vigueur 
surprenante. 

A  pi'opos  de  mil,  je  serai  curieux  de  savoir  si  celte  variété 
est  cultivée  en  Algérie,  .l'en  doute.  C'est  la  seule  céréale  qui 
soit  cultivée  ici  par  la  grande  masse  des  populations  du  terri- 
toire. Ou  en  distingue  deux  sortes,  le  petit  et  le  gros  mil. 
Celui-ci,  inférieur  au  premier,  est  donné  de  préférence 
aux  cfievaux.  L'orge  est  à  peu  près  inconnue  sauf  au  Borkou 
où  elle  a  été  importée  par  les  Snoussistes.  Quant  au  blé,  on 
le  cultive  un  peu  au  Borkou,  au  Kanem  et  au  Ouadaï.  Si  le  mil 
du  Fitri  n'est  pas  cultivé  en  Algérie  je  crois  qu'il  y  aurait  un 
essai  à  faire  qui  aurait  son  importance,  le  rendement  étant 
de  trente  à  cinquante  quintaux  à  l'hectare  pour  un  demi- 
quintal  semé.  Il  pourrait  concurrencer  l'orge  pour  l'alimen- 
tation des  indigènes  et  être  surtout  cultivé  pour  la  nourriture 
des  chevaux,  avec  cette  diflerence  avantageuse  qu'à  poids  égal, 
il  est  plus  nutritif. 

Revenons  au  Fitri  qui  a  à  sa  tête  comme  chef  indigène  le 
Sultan  Hassan  qui  prend  son  rôle  au  sérieux  vis-à-vis  de  ses 
sujets  (25.000  peut-être,  y  compris  les  femmes  et  enfants). 
Il  habite  comme  le  comiuun  des  mortels  de  son  royaume 
dans  une  case  en  paille.  Mais  il  ne  ferait  pas  un  efîort  pour 
enfiler  se^  babouches,  et  alors  il  est  fort  plaisant  de  voir  deux 
de  ses  dignitaires  le  soutenir  sous  les  bras,  taudis  que  deux 
autres  qui  se  sont  précipités  à  ses  pieds  lui  enfilent  ses 
beighas  (ses  babouches)  avec  assez,  de  peirie,  car  il  ne  soulè- 
vera pas  son  pied  d'un  millimètre  pour  leur  faciliter  la  tâche. 
Il  est  vêtu  de  vêtements  arabes,  gandouras  en  coton  tissé 
dans  le  pays  ou  en  indienne  pleine  d'apprêts.  Sur  sa  tête,  une 
énoi'me  amama  est  enroulée  avec  un  désordre  qui  dénote 
l'absence  totale  de  goût. 

Une  autre  chose  qui  a  excité  ma  curiosité.  La  lagune  dont 
je  parle  plus  haut  était  parait-il  extiêmemeut  poissonneuse. 
Elle  était  habitée  par  une  espèce  unique:  le  silure*.  Tout 
naturellement  on  serait  porté  à  croire  que  l'eau  ayant  disparu 
les  poissons  avaient  dû  périr.  Pas  du  tout  !  Ils  se  sont  tout 
simplement  constitué  des  niches  dans  la  terre  et  là,  entourés 


1  Les  silures  sont  des  Malacoptérygiens  II  est  donc  fort  probable  que  ce 
nom  est  impropre  dans  le  cas  actuel.  U  sagit  plutôt  d'un  poisson  de  l'ordi-e 
des  Dipuoi,  très  probablement  un  protoptère. 

(Note  du  Comité  de  Rédaction). 


I 


370 


VERS    LE    TCHAD 


d'une  membrane,  comme  une  chrysalide  dans  son  cocon,  ils 
conservent  une  espèce  de  sommeil  léthargique  jusqu'au  jour 
où  les  indigènes  viennent  les  dénicher.  La  réapparition  de 
l'eau,  grâce  à  un  bon  hiver,  viendra,  peut-être  dans  quatre 
ou  cinq  mois  dissoudre  les  blocs  de  glaise  où  ils  se  sont 
enfermés  et  les  rendre  à  la  vie  aquatique.  A  notre  passage  à 
Yao,  les  gens  du  Sultan  Hassan  nous  en  ont  montré  quelques- 
uns  qu'ils  avaient  déjà  extraits  de  leurs  cachettes  et,  prévoyant 
notre  curiosité,  ils  en  avaient  apporté  un  enfermé  dans  son 
bloc  de  glaise.  Devant  nous,  ils  ont  ouvert  la  motte  et  en  ont 
retiré  le  silure  qui,  jeté  dans  l'eau,  s'est  mis  en  mouvement. 

Lorsqu'on  m'en  avait  parlé  la  veille,  j'avais  formé  le  projet 
d'en  rapporter  un,  mais  j'ai  été  effrayé  par  l'encombrement 
que  cela  m'aurait  causé  lorsque  j'ai  vu  qu'il  s'agissait  d'em- 
porter un  bloc  de  12  à  15  kilogrammes  et  non  une  motte  de 
2  à  3  kilogrammes  comme  je  le  supposais  tout  d'abord.  Vous 
vous  contenterez  donc  du  récit  et  vous  vous  passerez  de  la  vue 
qui...  aurait  pu  fort  bien  être  accompagnée  de  l'odeur,  car 
je  ne  sais  tout  de  même  si  la  résistance  de  ce  bizarre  poisson 
irait  jusqu'à  être  encore  en  vie  en  septembre  1915...  La  chair 
du  silure  rappelle  par  sa  saveur  celle  du  merlan  ;  elle  est 
un  peu  plus  fade,  mais  un  peu  plus  ferme. 

Après  avoir  quitté  le  Fitri,  nous  nous  sommes  engagés 
dans  le  Baguinni  et  sommes  arrivés  le  30  mars  à  Bokoro  où 
j'ai  eu  l'occasion  de  voir  une  jeune  girafe  apprivoisée. 
Libre,  «  Joséphine  »  reste  parait-il  des  quinzaines  de  jours 
absente,  pâturant  dans  la  brousse,  puis  revient  au  poste  faire 
une  visite  à  ses  propriétaires  et  s'en  retourne  de  nouveau 
savourer  sa  liberté. 

Après  une  journée  et  demie  passée  à  Bokoro,  nous  nous 
sommes  mis  en  route  et  nous  voilà  aujourd'hui  à  trois  étapes 
de  Fort-Lamy  que  nous  atteindrons  le  samedi  11  avril  c'est-à- 
dire  la  veille  du  dimanche  de  Pâques. 

C'est  avec  plaisir  que  je  goûterai  enfin  un  peu  de  repos 
corporel  car,  en  ce  qui  concerne  le  repos  intellectuel,  la 
correspondance  snoussiste  trouvée  à  Aïn-Galakka  m'en  a 
fait  perdre  la  perspective  pour  une  bonne  partie  de  mon  séjour. 

DJIAN, 

Interprète  militaire. 


OBSERVATIONS    MÉTÉOROLOGIQUES 


371 


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Étude  des  Vents  du  1"  Juin  au  30  Novembre  1915 


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MOUVEMENT  DE  LA  NAVIGATION 


DANS    LES 


PORTS 

ciu    Département    d'Oran 


MOUVEMENT     COMMERCIAL 


374 


MOUVEMENT    DE    LA    NAVIGATION 


Mouvement  de  la  Navigation  du  port  d'ORAN,  par  pavillon,  pendant  l'année  1914 


INDICATION 
du 

PAVILLON 


Français. ...... 

Anglais 

Autrichien 

Allemand   

Espagnol 

Italien 

Grec 

Norvégien    , 

Belge 

Danois 

Hollandais.. 

Suédois 

Russe 

Américain 

Portugais 

Brésilien 

Marocain 

Totaux  on  1914. 
—      en  1913, 

Différence  1914, 


ENTREES 


NOMBRE 
de 

navires 


2.021 

449 

101 

100 

289 

67 

57 

53 

16 

36 

18 

17 

9 

1 

2 

3 
1 


3.240 
3.839 


599 


Tonnnge 


1.819.648 

875.635 

237.849 

163.603 

119  330 

70.662 

103.074 

70.538 

18.238 

34.14:. 

11.084 

18  835 

11.337 

1.788 

190 

1.333 

3 


3.557.302 
3.826.964 


269.662 


SORTIES 


NOMBRE 

de 
navires 


2.014 
445 

101 

102 

286 

66 

57 

50 

18 

37 

20 

18 

9 

1 

3 

3 

1 


3.231 
3.826 


595 


Tonnage 


1.818.861 

869.638 

237.849 

166.227 

119.186 

69.749 

103.074 

68.163 

21.656 

36.124 

12.458 

20.032 

11.337 

1.788 

558 

1.333 

3 


3.558.036 
3.815.793 


—  257 . 757 


Entrées  et  Sorties  réunies 


NOMBRE 

(le 
navires 


4.035 

894 

202 

202 

575 

133 

114 

103 

34 

73 

38 

35 

18 

2 

5 

6 

9 


6.471 
7.665 


1.194 


Tonriasic 


3.638.509 

1  745.273 

475.698 

329  840 

238.516 

140.411 

206.148 

138.701 

39.894 

70.269 

23.542 

38.867 

22.674 

3.576 

748 

2.666 

6 


7.115.338 
7.642.757 


—  527.419 


MOUVEMENT    DE    LA    NAVMGATrON 


375 


Relevé  total  du  Mouvement  des  ports  du  département  d'Oran,  pendant  l'année  1914 

iKiitrées  ot  sorties  réunies) 


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STATISTIQUE  DU  MOUVEMENT  COMMERCIAL  DES  PORTS 

du  déparlement  d'Orau,  pendant  l'année  lî)14 

comparé  au  mouvement  de  l'année  d913,  et  par  nature  de  marchandises 


EXPORTATIONS 


NATl]RE  DES  MARCHANDISES 


Animaux 
vivants 


bêtes  de  somme 


Bestiaux 


race  bovioe. 


UNITÉS 


ovine  et  antres 
Peaux  Brutes  tralcûes  ou  sècHes  ■ . . 

Laine  en  masse 


Téie 


Kilos:. 


Poissons  \    ^^'^^^ 

de  mer     (    jjjgg  qU  COUServéS.- 

Os,  sabots,  cornes  de  bétail 

;    froment    

Céréales     ^    avoine 

en 
grains       /    oi'g® 

maïs •  •  •  • 

Farine  de  froment 

Semoules  en  gruau 

Légumes  secs  et  leurs  farines 

Pommes  de  terre 

Fruits  frais  de  table 

Marcs  de  raisin  et  moûts  . 

Fruits  secs  ou  tapés 

Graines  et  fruits  oléagineux 
Tabac  en  feuilles 

—  faVjriqué 

Huile  fixe  d'olives 

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—  de  graines  grasses . . .  I 


Quintal 


KiloÊT. 


A     DESTI 

(le  France 


1.80Ô 
8.005 
317.999 
788.800 
2.444.600 
161.100 
101.700 
765.400 
547.402 
501.351 
137.171 
4 
42.505 
112.800 
682.900 
533.600 
6.923.500 
1.926.000 
447.500 
79.900 
1.000 
25.700 
111.700 
20.500 


NATION 

(le    l'Étranger 

et 
(les  Colonies 


3.824 

143 

5.049 

146.200 

145.500 

)) 
498.800 
71.100 
80.923 
80.573 
282.138 
13.532 
86.281 
4.496.100 
2.101.700 
1.672.900 
2.344.500 
101.100 
183.500 
900 
57.600 
1.635.800 
171.400 
180.200 


Tolaiix  en  1914 


3.629 
9.440 
323.048 
935.000 
2.590.100 
161.100 
600.500 
836.500 
628  325 
581.924 
419.329 
13.536 
128.786 
4  608.900 
2.784.600 
2.206.500 
9.268.000 
2.027.100 
631.000 
80.800 
58.600 
1.661.500 
363.100 
200.700 


.-     lés 


Tolaux  en  1913 


je 


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4.504 

7.626 

520.891 

1.043,700 

3.958.300 

181.210 

788.100 

860.800 

909.58cS 

466.703 

583.952|* 

I2.89i! 

160.34q. 

4.250.00C 

4.830.00( 

1.651.20( 

15.461.801 

2.278.501 

291.201 

420.00' 

16.90 

1.427.80 

263.20 

227.21 


1 

MOUVEMENT    COMMERCIM- 

EXPORTATIONS 

:]77 

NATOKE  DES  MARCIUXDISES 

UNITÉS 

A      DESXI 

(le  Kranee 

NATION 

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lolaiii  ni  1*11  i 

Totaiiicii  \m 

Rt'siin^s  et  [u-oduits  résineux 

Racines,  ùerfies  et  Ilenrs  médiclDales. 
Lirge 

Coton 

Crin  végtMal 

Alfa 

Écorces  à  tan 

Légumes  frais 

Fourrages 

Son 

Drilles 

Mistelles 

Vin  ordinaire 

Kilog 
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0 

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0 

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Litre 

0 
0 
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0 

Kilog. 

0 
0 

» 
» 

» 

Quintal 

Kilog. 

» 

» 

Nombre 

Kilog. 

2i)0.100 

1.S.200 

110.000 

2.000 

3.798.800 

130.000 

1.917,500 

9.670.800 

15.600 

10.432.300 

506.300 

4.054.700 

141.051.900 

464.800 

411.200 

371.000 

251.200 

220.100 

» 

0 

419.676.000 

» 

3.000 

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54.893 

1.226.100 

267.600 

379 '.600 

67.150 
388.472 

10.300 

11.600 

.S9.000 

3.000 

22.730.300 

76.503.100 

527.100 

686.300 

31.000.200 

608.000 

277.300 

9.200 

9.960.300 

87.700 

372  200 

19.100 

20.600 

510.000 

2.820.000 

10.000 

21.986.000 

» 

4.000 

1  702.000 

9.201 

354.600 

169.500 

246.200 

18.599 

114.795 

330. 100 

2y..soo 

199.000 

5.000 

26.529.100 

76.633.100 

2.464.600 

10.357.100 

34.015.800 

11.040.300 

783.600 

4.063.900 

150  176.200 

552.500 

783.400 

390.100 

271.800 

830.100 

2.820.000 

10.000 

581.954.000 

» 

7.000 

1.702.000 

64.094 

1.580.600 

437.100 

625.800 

85.749 

503.267 

171.720 

35  210 

262.000 

6.500 

40.663.100 

94.201.800 

3.944.300 

9.680.900 

22.437.200 

16.540.580 

1.021.900 

4.724.300 

158.172.300 

476.400 

1.840.900 

445.413 

648.000 

752.200 

4.983.000 

280.000 

581.954.000 

a 

675.000 

7.527.000 

56.720 

1.315.900 

503.700 

654.000 

92.962 

508.587 

—   de  li(|ueni's 

Eaux-ûe-Vle  et  splritneux  (alcool  pun 

Esprits  de  toutes  sortes 

Marbres  bruts 

Kaolin,  terre  à  infusoires  . . 

Bripes,  plâtre,  cùaux,  cimeDls  . . . 

Goudron  minéral 

'   de  fer 

\    de  cuivre 

1    de  plomb 

\   de  zinc 

Sel  brut  et  raffiné 

Lie  de  vin 

Tartre  brut      

Ouvrage  en  sparterie 

Colis  postau.x 

Id 

1 

25 

378 


MOUVEMENT    COMMERCIAL 


IMPORTATIONS 


NATllRE  DES  MAIICIIANDISES 


'bêtes  de  soiunie. 


Animaux 

vivants  )  Bestiaux 


Irace  bovine. 


fovine  et  autres 
Vlanûes  salées  et  conservées  — 


Graisses     aiiiinales     autres 
que  de  poissons , 

Beurre  et  fromages 

PolssoDS  fle  mer  salés  ou  conservés 

Céréales  en  grains 

Farines 

Semoules  et  pâtes  d'Italie.. 

Riz 

Légumes  secs  et  leurs  farines 

Marrons  et  châtaignes.    .    . 
Pommes  de  terre 

Fruits   v    f''^'''^ 

DE  TABLE  |      ^^^^  ,jy  ^.-^p^^ 

Sucres 

Cafés 

Chocolat 


Poivre,  cannelle,  muscafle,  clous  de 
girofle,  macis  et  vanille 


Thés 

Taliacs  en  feuilles  ou  en  côtes   . . . 

Tabac  fabriqué  . . .  -. 

Huile  fixe  d'olives 

Huiles  de  graines  grasses.. 

Bois  à  construire     

Mei-rains  de  chr-ne  et  autres 


UNITES 


Tète 


Kiloir. 


Quinlal 

» 
Kiloii'. 


1.000  K. 
Kilo-. 


(le  France 


861 
749 

308.400 


342.300 

121.600 

1.317.600 

299.600 

1.095.100 

280.900 

20.252 

275.257 

20.043 

109 

1.708.200 

23.900 

1.219.000 

1.094.100 

2.954.400 

2.199.600 

490.000 

19.500 

6.999.700 

2.498.100 

387.000 

•3.226.200 

324,000 

617.000 

22.580.500 

941.300 

600 

3.827.000 

504.700 

1.900 

13.500 

172.000 

3.200 

340.400 

» 

1.388.300 

13.100 

122.800 

48.900 

221.200 

6.846.600 

25.700 

21.939 

235 

453.800 

1.025.900 

NANX 

de  l'Étranger 

Toiaiix  (Ml  19i4 

et  (le.s  Colonies 

2.202 

3.063 

338 

1.087 

119.852 

119.852 

30.600 

309.000 

121.600 

463.900 

1.617.200 
1.376.000 

295.509 

20.152 

1.732.100 

2.313.100 

5.154.000 

509.500 
9.497.800 
3.713.200 

941.000 

23.521.800 

3.827.600 

506.600 

185.500 
343.600 

1.388.300 
135.900 
270.100 

6.872.300 
22.174 

1.479.700 


Tolaiixeii19'l3 


8.731 

1.401 

147.230 

417.900 

807.. 500 
1.710.900 
1.015.400 

290.963 

98.528 

2.524.200 

7.518.700 

5.478.300 

558.200 

11.023.200 

4.210.400 

926.500 

26.646.000 

4.785.800 

629.000 

166.300 

868.100 

2.132.500 

79.000 

262.800 

7.358.700 

32.483 

1.657.860 


I 


I 


.MOUVKME.NT   COMMERCIAL 


IMPORTATIONS 


379 


PROVENANT 

NATURE  DES  MARCHANDISES 

UNITÉS 

(le  Kraricc 

de  IKlraiiger 
it  (les  Colonies 

Totaux  en  1914 

Totaox  en  I9i;{ 

jé^iiiiii's  frais  ou  «■uii.sciscs 

Kilo-. 

207.-100 

462.000 

669.400 

719.200 

/ins  ordinaii'e.s 

Liirc 

199.000 

116.200 

315.200 

466.200 

/in.s  (io  li(|u<Mir 

- 

485.700 

31.500 

517.200 

555 . 700 

Ucool,     eaux -do -vie      el 

esprits  (le  toutes  softe.s 

» 

2.442.700 

9.600 

2.452.300 

3.908.800 

ilau.x  iiiiiiérales 

Kilo- 

1.869.100 

12.300 

1.881.400 

2.155.100 

Matériaux  ^\o   constiuction 

» 

63.774.600 

868.200 

61.642.800 

107.140.000 

loufi-e 

M 

3.706.000 

1) 

3.706.000 

12.615.000 

louille  crue  et  agglomérée 

Quintal 

3.530 

4.257.630 

4.241.140 

5.162.220 

luiles  minérales  raffinées. 

IIcclol. 

28.694 

22.361 

51.0.55 

57.283 

luiles  lourdes 

Kilog. 

1.614.000 

4.847.500 

6.461.500 

1.990.300 

ers,  tontes  et  aciers.  .    . . 

» 

29.254.200 

1.023.100 

30.277.300 

37.670.900 

iarbure  de  calcium   ..... 

1) 

1.720.800 

100 

1.720.900 

2.454.500 

ulfate  de  cuivre 

» 

316.000 

0 

316.000 

431.000 

iperpùospliates  et  engrais  

i; 

5.930.700 

» 

5.930.700 

.  13.609.100 

170DS  de  parlomerle  et  antres . . . 

)) 

5.861.600 

43.800 

5.905.400 

6.858.000 

ilcorée  ûrûlée  ou  moulue 

)) 

406.300 

800 

407.100 

468.300 

ougies  de  toutes  sortes  . 

v 

1.496.300 

12.900 

1.509.200 

1.815.300 

iteriBs,  faïences  et  porcelaines... 

Ù 

4  018.300 

573.700 

4.592.000 

9.424.200 

erres  et  cristaux 

» 

2  773.700 

81.200 

2.851.900 

3.873.800 

ils,  ficelles  et  cordages.. 

» 

1.605.900 

1.600 

1.607.500 

1.092.700 

acs  vides  en  jute  ..... 

» 

1.655.400 

383.900 

2.039.300 

4.222.000 

issus  de  lin  et  do  chanvi-e 

» 

148.900 

2.500 

151.400 

160.300 

—      de  coton  

» 

2.227.000 

146.000 

2.373.000 

3.683.700 

—      de  laine 

» 

165.000 

24.400 

189  400 

248.500  1 

—     de  soie 

» 

4.500 
312.100 

100 
48.200 

4.600 
360.300 

14.000 
438.900 

'Henients  et  lingeri.> 

» 

ipieret  ses  applications. . 

1) 

5.122.900 

117.000 

5.239.900 

6.208.000 

inx  et  pelleteries  ouvrées  

i> 

517.600 

56 . 800 

1 

574.400 

901.500 

380 


MOUVEMENT    COMMERCIAL 


IMPORTATIONS 


I 


NATURE  DES  M\RCIIA\DISES 


Bijouterie  et  horlogerie...      Kiloj 

Machines  et  mécaniques.. 

Autres  ouvrages  en  métaux 

Meubles  et  ouvrages  en  bois 

Ouvrages   de  vannerie,  de 
sparterie  et  de  corderie.. 

Carrosserie 

Blinlieloterle,  taDletterie  et  ûrosserle 

Colis  postaux |  Nombre 

Id.  Kilog. 


PROVENANT 


UNITÉS 


le  France 


42.160 
2.020.100 
5.090.900 
2  428.100 

29.800 
281.600 
228.200 
271.795 

2.053.688 


de  IKlranger 

et 
de?  Ciiloiiies 


420 
1.805.000 
4.688.200 
2.624.800 

438.800 

90.700 

29.000 

7.250 

40.463 


Tolaiix  en  11)1  i 


42.580 
3.825.100 
9.774.100 
5.052.900 

468.600 
372.300 
257.200 
274.045 
2.094.151 


Tolaiu  ni  1913 


54.970 

4. 969. 800 

11.956.500 

5.127.600 


A.  TOURNIER. 


BIBLIOGRAPHIE 

(Ouvrages  offerts  à  la  Société) 


Le  Maroc,  par  M.  Auîîustin  Hkhnaiu),  professeur  à  la  Facilités  des  l^pllres 
d'Alper,  cliai'gé  du  Cours  de  Ceogriaiiliie  de  l'Afrique  du  Nord  à  la  Sorbfmiie. 
(I  volnnie,  Alcan  Levy,  Paris). 

M.  Aiiuiislii)    Horuaril  qui  a  apporté  uiio  si  large  et   si   féconde 
roiitiihution  A  la  diffusion  de  l'étude  des  questions   marocaines', 
vient  de  puhlier  une  nouvelle  édition  de  son  important  ouvrage  : 
0  Le  Maroc  » 

Le  succès  d'une  œuvi-e  qui  renferme  en  elle,  tout  ce  qu'on 
peut  et  qu'on  doit  connaître  du  grand  pays  (jui  complète  si  heu- 
reusement notre  empire  du  Nord  de  l'Afrique,  est  d'autant  plus 
légitime  que  l'auteur  y  a  réuni  une  documentation  aussi  complète 
que  possible. 

La  nouvelle  édition  de  «  Le  Maroc  »  retiendra  l'attention  de 
ceux  que  préoccupe  la  q  uestion  Marocaine  car  \L  Augustin  Bernaid 
l'a  mise  fi  jour,  et  les  événements  qui  doivent  découler  de  la 
terrible  guerre  qui  ébranle  le  monde  entier,  y  sont  envisagés 
très  sagement  dans  leurs  conséquenses  présentes  et  futures. 

On  ne  peut  que  féliciter  l'éminent  écrivain,  d'avoir  eu  l'excellente 
initiative  de  reprendre  la  publication  d'un  intéressant  ouvrage 
d'initiation  au  moment  même  où  on  peut  envisager  une  reprise 
prochaine  dans  notre  œuvre   de  pénétration  marocaine. 

Nous  ne  dirons  pas  à  nouveau  tout  le  bien  que  nous  pensons  de 
cet  ouvrage  :  le  succès  (|u'ont  obtenu  trois  éditions  successives 
est  le  meilleur  hommage  qu'on  puisse  lui  rendre. 

Ed.  Déchaud. 


L'Allemaerne  d'Outre-Mer,  grandeur  et  décadence,    par  Camille  Fidel, 
préface  de  M.  Lucien  Hubert.  Sénateur.  Avec  six  cartes.  Boivin  et  C'*,  Paris 

Dans  cette  brochure  d'actualité,  l'auteur  s'est  efforcé  de  donner 
une  idée  exacte  et  complèiede  la  valeur  économique  et  du  degré 
de  développement  des  colonies  allemandes,  aujourd'hui  presque 
complètement  conquises  par  les  Alliés,  ainsi  que  des  ambitions 
coloniales  de  nos  ennemis  en  général,  et  notamment  en  Chine,  en 
Turquie  d'Asie  et  en  Afrique.  11  était  nécessaire  de  répandre  ces 
notions  dans  le  public  français,  et  pour  y  réussir  MM.  Boivin  et  C" 


382  BIBLIOGRAPHIE 

ne  pouvaient  mieux  faire  que  de  s'adresser  à  un  de  nos  publi- 
cistes  coloniaux  les  plus  actifs  «  qui,  depuis  de  longues  années, 
dit  M.  le  Sénateur  Lucien  Hubert  dans  sa  préface,  a  approfondi 
les  questions  coloniales  dans  leurs  rapports  avec  la  politique  inter- 
nationale et  s'est  en  particulier  consacré  à  l'étude  de  la  colonisa- 
tion allemande  » 

Nous  partageons  entièrement  cette  façon  de  voir,  et  nous 
pensons  que  pour  être  sommaire,  l'étude  de  M.  Fidel  n'en  est  pas 
moins  fort  intéressante,  et  susceptible  de  diffuser  dans  les  milieux 
français  une  connaissance  suffisante  de  la  situation  de  l'Allemagne 
au  point  de  vue  Colonial. 

Ed.  Déchaud. 


Deux  stations  nouvelles  de  pierres  écrites  (gravures  rupestres) 
découvertes  dans  le  cercle  de  Djelfa  (Algérie),  par  O-B-M  Flamand. 
(Extrait  de  V Anthropologie,  T.  xxv,  pp.  433-458,  Paris  1914.) 

Aux  nombreuses  notes  qu'il  a  publiées  jusqu'ici  sur  les  «  pierres 
écrites  »  notre  savant  confrère,  M.  G.-B.-M.  Flamand,  vient  d'en 
joindre  une  nouvelle  qui  ajoute  au  vif  intérêt  des  précédentes. 

Les  gravures  signalées  se  rapportent  à  deux  stations  de  la  région 
de  Djelfa  et  appartiennent  à  trois  périodes  :  néolithique  ancien, 
libyco-berbère,  moderne. 

La  première  station  décrite  est  celle  de  Ksar-Zaccar  découverte 
par  M.  Magny,  ancien  juge  de  paix  à  Djelfa.  Elle  a  offert 
24  gravures  dont  14  anciennes.  Trois  de  ces  dernières  sont 
remarquables  par  la  netteté  du  trait  et  la  pureté  du  profil  On  y 
reconnaît  parfaitement  une  antilope  bubale,  un  lion,  une  autruche 
et  un  mouflon.  Avec  ceux  d'autres  cavicornes  très  mal  caractérisés, 
tous  ces  dessins  représentent  une  partie  de  la  faune  du  début  du 
néolithique. 

Dix  autres  dessins  en  pointillé  sont  des  productions  de  l'art 
libyco-berbère.  Les  deux  derniers  sont  modernes. 

La  seconde  station,  relevée  par  M  Flamand  lui-même,  est  celle 
de  Daïet-es-Stel.  On  y  voit  deux  gravures  dont  une  représente 
le  demi-corps  d'un  personnage,  qui  n'est  pas  mal  profilé. 

M.  Flamand  termine  par  des  conclusions  du  plus  grand  intérêt. 
Il  résume  les  déductions  de  ses  longues  études  sur  l'âge  des 
pierres  écrites  anciennes  en  rapport  avec  l'existence  du  buffle 
antique.  Il  admet  que  cette  espèce  était  abondante  à  l'extrême 
terminaison  des  temps  pléistocènes  et  que  sa  disparition  du  Sahara 
a  coïncidé  avec  l'instauration  du  i^égime  climatérique  qui  a  créé  le 
désert  actuel. 

Enfin  il  constate  la  contemporanéité  de  l'existence  des  troupeaux 
de  buffles  et  de  l'homme  à  la  hache  polie  des  gravures  rupestres  ; 
ce    qui   le    conduit  à    admettre   l'hypothèse,    formulée    déjà   par 


BTBLIOGRAPHTE  383 

G.  de  Mortillet,  pour  le  chelléen  de  TeniifiiiG,  que  le  dobiit  du 
néolithique  ancien  do  l'Algérie  est  antérieur  à  celui  du  néolithitiue 
de  l'Europe. 

Ce  sont  là  des  conclusions  que  je  suis  loin  do  contredire. 

En  terminant  il  me  reste  ;i  souhaiter  que  mon  savant  ronfirre 
et  ami  publie  bientôt  le  magistral  ouvrage  qu'il  a  en  piéparation. 
depuis  des  années,  sur  les  Hadjrat  Mektouhat.  Tous  ceux  qui  s'inté- 
ressent k  la  préhistoire  l'attendent  avec  impatience. 

F.  DOUMERGUE. 


Recherche  par  leurs  Influences  des  Eaux  souterraines,  des  Corps 
enfouis  ou  dissimulés,  des  Gisements  métallifères,  par  Henri  Magkr, 
I  vol.  in  S'  broché,  'JSÔ  pages,  \Ti  figures.  —  H.  Dunod  et  E.  Pinat,  éditeurs, 
Paris. 

M.  Henri  Mager  vient  de  réunir  en  un  volume  les  résultats  de 
ses  recherches  sur  le  Pendule  et  la  Baguette  utilisés  pour  la 
découverte  des  eaux  souterraines,  des  corps  enfouis  et  des 
gisements  métallifères.  Mais  c'est  plutôt  l'exposé  de  la  théorie  et 
de  la  docti-ine  que  le  résumé  des  résultats  pratiques  obtenus. 
Aussi  est-il  difficile  de  condenser  en  quelques  lignes  les  principes 
d'une  science  que  le  savant  ingénieur  liydrologue  construit  de 
toutes  pièces. 

L'ouvrage  a  plutôt  l'allure  d'un  traité  de  physique  que  d'un 
manuel  de  V Art  de  découvrir  les  sources. 

La  première  partie  traite  de  l'historique  de  l'emploi  du  pendule 
et  de  la  baguette  dans  la  recherche  des  eaux  et  des  minéraux. 

Le  chapitre  premier  est  consacré  au  pendule,  aux  influences  qui 
le  mettent  en  action,  aux  divers  mouvements  qui  dénotent  les 
influences  particulières  des  corps  étudiés.  Une  foule  d'expériences 
montrent  l'intérêt  passionnant  de  cette  étude. 

Le  deuxième  chapitre  traite  de  la  baguette,  de  la  branche  de 
coudrier  fourchue  tournant  entre  les  mains  de  certaines  personnes 
soumises  à  certaines  influences,  la  vieille  Baguette  divinatoire. 

Après  avoir  décrit  les  diverses  sortes  de  baguettes  urilisées  et 
expliqué  l'action  des  influences  agissant  sur  l'instrument,  ^L  Mager 
expose  sa  technique  opératoire  pour  la  recherche  .des  eaux 
souterraines 

J'avoue  que  le  système  est  bien  compliqué  et  les  déductions  à 
tirer  des  graphiques  tracés  par  la  baguette  ne  me  paraissent 
pouvoir  être  saisies  que  par  M.  Mager  lui-même.  Ce  n'est  que 
par  une  pratique  de  plusieurs  années  qu'un  novice,  doué  d'une 
puissante /acM/ié  d'action,  arrivera  à  appliquer  les  règles  tracées 
par  l'auteur  de  la  méthode.  Il  aura  surtout  à  se  mettre  en  garde, 
pendant  longtemps,  contre  une  multitude  d'erreurs  possibles.  " 

Une   bonne  partie   du   chapitre   est  consacrée  au  résumé  des 


384  BIBLIOGRAPHIE 

études  faites  par  M.  Mager  en  Tunisie,  en  Algérie  et  principalement 
en  Oranie. 

C'est  dans  la  région  d'Oran,  et  çà  là  dans  le  département,  que 
M.  Mager  a  découvert  ce  qu'il  appelle  les  cheminoes  d'appel  à 
geysers  souterrains.  A  ce  sujet  il  émet  une  théorie  que  la  consti- 
tution géologique  et  stratigraphique  des  régions  considérées,  soit 
aux  environs  d'Oran,  d'Ai-zew,  de  Saint-Leu,  ne  permet  guère 
d'expliquer. 

Je  veux  bien  admettre  que  sur  certains  points  la  baguette  soit 
influencée  par  des  eaux  profondes  ascendantes,  d'origine  triasique, 
mais  sur  aucun  point  de  la  région  d'Oran  ces  eaux  n'atteignent 
les  grands  niveaux  aquifères  du  sahélien  et  du  pliocène,  les 
seuls  que  M.  Mager  a  plus  spécialement  étudiés. 

Un  autre  chapitre  traite  de  la  recherche  des  minéraux  dont  la 
méthode  a  été  exposée  par  l'auteur  dans  un  livre  récent  que  j'ai 
déjà  eu  l'avantage  de  signaler.  (Bull,  de  décembre  1914.) 

Le  dernier  chapitre  est  consacré  à  «  La  Matière  ».  M.  Mager 
admet  que  «  la  Baguette  et  le  Pendule  permettent  l'étude  des 
influences  émises  par  la  Matière  »  ce  qui  lui  permet  d'expliquer  les 
influences  particulières  émises  par  les  divers  corps. 

Enfin,  l'ouvrage  se  termine  par  une  série  de  91  questions  à 
résoudre,  d'expériences  à  tenter  avec  les  Pendules  et  les  Baguettes 
afin  d'arriver  à  contrôler,  modifier,  compléter  les  principes  exposés. 

Le  livre  de  M.  Mager  est  un  essai  d'explication  scientifique  de 
phénomènes  qui,  quoique  souvent  niés,  ne  peuvent  être  mis  en 
doute.  Comme  pour  d'autres,  jusqu'ici  inexpliqués,  la  science  finira 
par  leur  donner  droit  de  cité. 

Quel  que  soit  le  sort  réservé  aux  théorie?  nouvelles  émises  et 
soutenues  par  M.  Mager,  le  savant  hydrologue  aura  le  mérite 
d'avoir  jeté  les  bases  d'une  science  nouvelle.  Son  livre  sera  lu  avec 
grand  intérêt  et  provoquera  de  nouvelles  recherches 

>.  DOUMERGUE. 


Khamissa,  Mdaourouch,  Announa,  fouilles  exécutées  par  le  Service  des 
Monuments  hi.storiqups  de  l'Algérie.  —  Preniière  partie:  Khamissa,  texte 
explicatif  par  M.  Stéphane  Gsell;  plans  et  vues  par  M.  Charles-Albert  Joly. 
(Premier  fascicule).  Alger.  Ad.  Jourdan  ;  Paris,  Fontemoingr  et  C'»,  ltt!4. 

Le  Service  des  Monuments  historiques  de  l'Algérie  vient  de 
publier  la  première  partie  des  recherches  qu'il  fait  exécuter.  Ce 
premier  fascicule  est  consacré  à  Khamissa,  l'antique  Thubursica 
Numidarum.  M.  Ch.  Joly,  qui  est  chargé  de  ces  fouilles,  a  fourni 
les  vues  et  les  plans.  Le  texte  explicatif  a  été  ajouté,  à  ces 
illustrations,  par  M.  S.  Gsell,  que  l'on  rencontre  partout,  lorsqu'il 
s'agit  des  documents  archéologiques  de  l'Algérie. 


BIBLlOr.RAPIlTE  385 

Tliuliuisirn  t'tait  un  honr^;-  indippno  (ruiif  rfilainf-  iriipoitaiirr>, 
qui  plus  tard  dovint  ritô  inmaiiio.  Fait  curieux  î'i  ipmar(|uep.  il  n'y 
eut  pas  à  Tliuhuisira  un  nppoit  de  san^-  lomain.  Los  indij.'-f^nos  se 
romanisf'ront,  s'assimileront  d'oux-mômos  :  ot.  choso  rai'O,  ce  fut 
sans  sooousso  quo  ros  Numides  dovini-ont  romains. 

Thuhursioa  fut.  dTs  l'an  10('.  uiio  cité  romaine,  ainsi  qu'une 
inscription  le  rappelle  :  Cinitos  Thubvrsitona.  Il  y  avait  donc  l.'i. 
un  contre  urliain  avec  des  institutions  municipales.  l'no  inscription 
cite  encore  des  o  [uineipes  pontis  Numidorum  ».  qui  étaient 
pput-éti-e  des  chefs  ou  édiles  Iiéiéditaii-es. 

Quoiqu'il  en  soit,  en  109.  sous  Trajan,  hi  Civitas  fut  clianprée  en 
Municipe.  lorsque  1(^  proconsul  d'Afii(|ue  vint  faire  la  dédicace  des 
statues  du  Capitole. 

I/histoire  de  la  ville  devint  ensuite  plus  oliscuie.  A  peine  sait-on, 
par  les  statues  qui  y  furent  retrouvées,  que  cette  cité,  composée 
d'indigènes,  éleva  un  temple  à  la  triade  romaine.  Jupiter,  .lunon. 
Minerve. 

Aucune  inscription  chrétienne  n'est  venue  appoi-ter  un  peu  de 
clarté  dans  la  prédication  du  christianisme.  Tout  an  plus,  nous 
connaissons  qu'il  y  eut.  au  iv^  siècle,  denx  évoques  et  que 
saint  Augustin  y  vint,  par  deux  fois,  y  soutenir  une  controverse 
avec  les  évoques  donatistes. 

La  première  partie  des  fouilles  fut  consacrée  à  la  Platea  Vetos, 
dont  le  nom  est  indiqué  par  une  inscription.  C'est,  suivant  l'usage, 
une  place  qnadrangulaire  de  près  de  30  mètres  sur  2\,  entourée 
de  portiques  sur  trois  côtés.  Dos  salles  formaient  d'un  côté  les  porti- 
ques. Ces  salles  de  grandeur  différente,  contenaient  des  statues. 
Quelques-unes,  plaquées  de  marbre,  servaient  de  locaux  aux 
réunions  des  diverses  curies.  On  a  trouvé  tout  autour  des  tables 
de  mesure,  des  fragments  de  statues  énormes.  .Tupiter.  Minerve 
et  Junon  sans  doute.  Près  de  la  basilique  qui  fermait  le  foium, 
existait  encore  une  vingtaine  de  socles. 

Outre  cette  place,  le  théâtre  a  été  l'objet  d'une  étude  spéciale. 
Ce  théâtre  se  trouvait  tout  près  des  grandes  salles  et  des  portiques 
qui  entourent  les  grands  bassins  d'Aïn-Youdi.  Les  anciens  croyaient 
que  la  Medjerda,  le  Bagrada  Africain,  prenait  sa  source  à  cet 
endroit. 

Quant  au  théâtre,  il  peut  soutenir  la  comparaison  avec  ceux,  si 
beaux,  de  Dougga  et  de  Djimila. 

Il  mesure  70  mètres  de  large.  De  l'hémicycle  au  gradin  le  plus 
élevé  on  compte  57  mètres.  Celui  do  Timgad  est  à  peine  plus 
grand.  M.  Gsell  pense  que  jamais  il  ne  fut  achevé,  car  le  portique 
extérieur  n'existe  pas.  Il  pouvait  contenir  2.900  personnes,  mais 
était  assez  mal  aménagé,  sans  escaliers  ni  dégagements  suffisants. 
Le  rideau  même,  au  lieu  de  tomber  du  portique,  devait  consister 
en  deux  voiles  qui  se  tiraient  l'un  à  droite,  l'autre  à  gauche. 
Bref,  ce  tlîéàtre  ne  reçut  pas  la  décoration  ordinaiie:  un  citoyen 
riche,  un  édile  fortuné  a  fait  défaut  pour  l'embellir.  Puis,  vint  la 


386  BIBLIOGRAPHIE 

ruine,  au  moment  où  le  christianisme  progressait,  et  si  nous  en 
croyons  saint  Augustin,  les  théâtres  furent  abandonnés.  Rares 
étaient  les  cités  où,  de  son  temps,  se  donnaient  encore  des 
spectacles. 

Ce  premier  fascicule,  consacré  à  Khamissa,  fait  bien  augurer  de 
ceux  qui  suivront  et  apporteront  à  la  connaissance  de  l'Afrique 
romaine,  un  appoint  très  apprécié.  Tout  en  félicitant  MM.  Gsell 
et  Joly,  nous  exprimons  le  vœu  de  l'apparition  prochaine  des 
fascicules  suivants. 

Abbé  FABRE. 


Discours  sur  l'évolution  des  connaissances  en  Histoire  Naturelle, 
par  Georges  Pennetier.  (Actes  du  Muséum  d'Histoire  Naturelle  de  Rouen, 
1911-1915). 

M.  Georges  Pennetier,  directeur  du  Muséum  d'Histoire  Natu- 
relle de  Rouen,  en  entreprenant  l'histoire  de  l'évolution  générale 
des  connaissances  en  Histoire  Naturelle,  s'est  proposé  de  montrer 
que  ('  les  sciences  ne  se  sont  pas  accrues  par  bonds  successifs  ; 
«  par  sortes  de  révolutions  dues  aux  quelques  génies  privilégiés 
«  dont  le  nom  est  parvenu  à  la  connaissance  de  tous  ;  mais  que 
«  les  découvertes  se  sont  accumulées  lentement  par  un  mouve- 
«  ment  continu  et  progressif  :  par  le  labeur  incessant  d'une  foule 
«  de  chercheurs  ». 

Tel  est  le  programme  que  l'auteur  a  développé  dans  une  œuvre 
déjà  considérable,  quoique  encore  inachevée.  Il  a  divisé  son 
ouvrage  en  plusieurs  parties  qui  ont  été  publiées  successivement 
depuis  1911,  et  dont  voici  l'indication  sommaire  : 

Impartie.  —  L'Antiquité  et  le  Moyen  Age  (1911). 

2"  partie.  —  Renaissance  (1912). 

3'  partie.  —  xvii'  siècle  (1913). 

4'  partie.  —  xviii-xix°  siècle. 

1°  Aperçu  général.  —  Doctrines  l)iologi(iues  (1913). 

2°  Géologie  (1915). 

Il  reste  donc  à  publier  pour  le  xvnr  et  le  xi.k'  siècle  les  cha- 
pitres relatifs  à  la  Botanique  et  à  la  Zoologie. 

Il  ne  peut  être  question  d'analyser  dans  une  courte  notice  le 
travail  considérable  de  M.  Pennetier,  qui  embrasse  déjà  plus  de 
600  pages.  Nous  dirons  seulement  que  l'auteur  s'attache  de 
préférence  au  côté  philosophique  de  son  étude,  mais  que  le 
lecteur  y  trouvera,  outre  les  exposés  historiques  des  doctrines  et 
des  découvertes,  qui  justifient  le  titre  de  l'ouvrage,  une  précieuse 
documentation  bibliographique. 

E.  FLAHAULT. 


PROCÈS-VERBAUX  DES  RÉUNIONS 

(le    la    «  Société    de    Géographie    et    d'Archéologie    d'Oran  » 


RÉUNION  MENSUELLE  DU  COMITÉ  ADMINISTRATIF 

Séance  du  5  Juillet  1915 


Présidence  de  M.  Doumergue,  président 


I 


La  séance  est  ouverte  à  5  heures  et  demie. 

Sont  présents  au  Comité  :  MM.  Doumergue,  Bérenger,  Pock, 
TouRNiER,  Abbé  Fabre,  Kriéger,  Pellet,  D"^  Sandras,  Flahault. 

Absents  excusés  :  MM.  le  Général  Baschung,  Arambourg, 
HuoT,  Lemoisson,  de  Pachtere,  Roux-Freissineng,  mobilisés  : 
Dupuy.  Pérez.  Pousseur,  Rexé-Leclerc. 

Absents  :  MM.  Dangles.  Déchaud,  Lamur,  Pontet. 

M.  Flahault  est  désigné  comme  seorétaire  en  attendant  le 
retour  de  M.  le  Commandant  Bérenger. 

M.  le  Président  fait  part  de  la  mort  de  S.  Exe.  Don  Marcel 
DE  Azcarraga  y  Palmero,  président  de  la  Société  Royale  de 
Géographie  de  Madrid  11  a  adressé  à  ce  corps  savant  Ips 
condoléances  de  notre  Société. 

Il  rappelle  que  notre  excellent  collègue,  M  Dupuy,  vient  d'avoir 
la  douleur  de  perdre  son  beau-frère,  M.  Honnart,  et  lui  renouvelle 
au  nom  du  Comité  l'expression  de  ses  douloureuses  sympathies. 

Est  admis  comme  membre  titulaire  ; 

M.  DE  Saugy  Louis,  négociant  en  produits  œnologiques, 
2,  rue  Pasteur,  à  Oran,  présenté  par  MM.  Dandine  et  Doumergue. 

Il  est  donné  lecture  d'une  circulaire  de  M.  le  Ministre  de 
l'Instruction  Publique  et  des  Beaux-Arts,  appelant  l'attention  des 
Sociétés  Savantes  sur  l'intérêt  que  présenteraient  des  notes 
recueillies  par  leurs  soins  sur  les  événements  actuels  ;  elles 
apporteraient  ainsi  une  contribution  éclairée  à  la  vaste  enquête 
que  poursuit  le  Comité  des  Travaux  Historiques  et  Scientifiques. 

Des  instiHictions  et  un  plan  sont  à  la  disposition  des  personnes 
qui  voudraient  s'adonner  à  cette  tâche.  C'est  surtout  dans  les 
villages  que  les  documents  les  plus  intéressants  pourraient  èlre 
notés  par  les  instituteurs. 

La  bibliothèque  a  reçu  : 

De  M.  le  Gouverneur  Général  de  l'Algérie  :  Khamissa  Mdaou- 
rouch,  Announa  (première  partie:  Khamissa).  par  M.  Stéphane 
Gsell,  illustrations  de  M.  Charles-Albert  Joly  ; 


388  PROCÈS-VERBAUX  DES  REUNIONS  DE  LA  SOCIÉTÉ 

Dp  m.  le  Résident  Généval  do  la  Répiibliquo  Française  au 
Maroc  une  publication  dn  «  Service  Econonni(|ue  de  la  Résidence  », 
intitulée  :  Le  Commorce  au  Maroc.  Co7iseils  aux  industriels  et 
négociants  de  la  Métropole. 

Cette  publication,  qui  vient  ;'i  son  lieiire,  a  poui'  but  d'aider  le 
connmerce  français  à  supplanter  le  commerce  allemand.  Les  rensei- 
gnements fournis  sont  des  plus  précieux.  Puissent-ils  être  utilisés  ! 

De  la  Société  de  Géographie  de  Toulouse,  une  notice  de 
M.  de  Rev-Pailhade  sur  Yemploi  de  la  montre  décimale  et  du 
soleil  pour  la  direction  des  anions. 

Des  remerciements  sont  votés  aux  donateuis. 

Sur  la  pi'oposition  du  Président,  le  Comité  arrête  la  composition 
du  prochain  bidletin  dont  aucun  empêchement  matériel  ne  paraît, 
à  ce  jour,  devoir  retarder  la  publication. 

Le  Président  annonce  qu'il  va  recevoir  un  travail  de  AL  Cabcopino 
parti  comme  lieutenant  aux  Dardanelles  et  que  d'autres  travaux 
lui  parviendront  dans  le  courant  des  vacances. 

Avant  de  lever  la  séance.  M.  le  Président  rapjielle  que  M.  le 
commandant  Dérenger  vient  d'être  désigné  pour  aller  prendre  un 
commandement  à  Tlemcen.  Au  nom  du  Comité  et  en  son  nom 
personnel  il  exprime  à  M.  le  Secrétaire  général  les  vœux  que  font 
tous  ses  collègues  pour  le  voir  bientôt  revenir  prendre  sa  place 
aux  réunions.  M.  Bérenger  remercie  et  renouvelle  l'assurance  de 
son  entier  dévouement  à  la  Société. 

Le  Comité  entrant  en  vacances,  la  prochaine  séance  est  fixée  au 
lundi  4  octobre  1915. 

L'ordre  du  jour  étant  épuisé,  la  séance  est  levée  à  6  heures 
et  demie. 

Pour  le  Secrétaire  (/énéral.  Le  Président, 

SiCTé:  FLAHAULT  Sisné  :  DOUMERGUE. 


RÉUNION  MENSUELLE  DU  COMITÉ  ADMINISTRATIF 

Séance  du  4  Octobre  1915 


Présidence  de  M.  Doumergue,  président 


La  séance  est  ouverte  à  5  heures  et  demie. 

Sont  présents  au  Comité:  MM.  Doumergue,  Flahallt,  Pock, 
TouRNiER,  Déchaud,  Pérez,  D'  Sandras. 

Absents  excusés  :  MM  le  général  Baschung,  Béhenger, 
Arambourg,  Huot,  Lemoisson,  de  Pachtere,  Roux-Freissineng, 
mobilisés  ;  Dupuy,  Pellet,  René-Leclerc. 


PROCÈS-VKnB.VUX   DES   ItÉUiMONS   DE    LA   SOCIÉTÉ  389 

Absents;  MM.  Dangles,  aMié  Fabue,  Kkiéuer,  Lamur,  Pontet. 

Le  proct's-vei'bal  de  la  séance  du  5  juillet  est  lu  et  adopté. 

Avant  d'aborder  l'oidie  du  jour,  le  Piésideiit  rappelle  que  la 
Société  a  pei-du,  depuis  le  commencenK-Mit  de  juillet,  MM.  Vallois, 
Capifam,  Pousseur,  Marcuanu,  Louis  Say,  décédés. 

Il  i-appelle  que  tous  ct-s  anciens  lurent  des  niendjres  dévoués  à 
notre  Société,  que  NL  Capifali  lit  partie  du  Comité  et  que 
^L  Pousseur  lut  un  des  premiers  apôtres  de  l'utilité  d'une  Société 
de  Géoiiraphie  à  Oran  ;  il  en  fut  pendant  les  premières  années 
l'Arcliiviste  et  le  Ti'ésorier  et,  de  1879  à  1915,  son  dévoui.-ment  aux 
intérêts  de  la  Société  ne  se  démentit  pas. 

Le  Président  remercie  son  collfjiuc  M  Flahault  d'avoir  Iden 
voulu  prononcer  sur  la  tombe  de  notre  regretté  collègue  les 
paroles  d'adieu  qu'il  eut  le  cliagrin.  se  trouvant  en  France,  de  ne 
pouvoir  prononcer  lui-même 

Il  salue  enfin  la  mémoire  de  M  Louis  Say,  le  créateur  de 
Port-Say,  dont  le  remarquable  esprit  d'initiative  fut  constamment 
soutenu  par  une  indomptable  énergie.  Puisse  son  œuvre,  survivre 
k  la  disparition  de  celui  ([ui  l'avait  conçue  et  mise  à  exécution. 

Le  Président  donne  de  bonnes  nouvelles  de  MM.  le  comman- 
dant Bérexger  et  le  lieutenant  Arambourg,  actuellement  en 
Orient. 

Il  félicite  ensuite  M.  le  D''  Sandras  dont  le  tils  Louis,  médecin- 
major,  vient  d'être  décoré  de  la  Légion  d'Honneur. 

Sont  proposés  comme  membres  titulaires  : 

M.  Amram  Lucien,  professeur  de  langue  kabyle  à  Constantine, 
présenté  par  MM.  Doumei^gue  et  Flahault. 

Le  Service  ijes  Renseignements  ue  l'Etat-Major  du  Maroc 
Oriental,  présenté  par  MM.  le  capitaine  L.  Voinot  et  Doumergue. 

Le  Comité  s'associe  à  deux  vœux  émis  par  la  Société  Préhisto- 
rique Française  : 

Le  preiTiier  tendant  à  maintenir  le  nom  de  «  Marnien  »  pour 
désigner  la  première  partie  du  deuxième  âge  du  fer,  en  réservant 
le  nom  de  «  La  Tène  «  exclusivement  pour  la  deuxième  partie  de 
cette  période. 

Le  deuxième  tendant  à  ce  que  «  lors  de  toute  fouille  de 
monument  préhistorique,  les  travaux  de  consolidation  et  de 
restauration  jugés  nécessaires  soient  très  minutieusement  Récrits 
et  publiés  de  manière  à  éviter  d'induire  en  erreur  les  savants 
à  venir  ». 

Le  Président  rend  compte  des  difficultés  qu'il  éprouve  à  faire 
paraître  le  bulletin.  L'imprimerie  a  épuisé  le  papier  réservé  à 
notre  publication  et,  par  suite  de  la  mobilisation,  le  personnel 
ouvrier  est  insuffisant.  Malgré  ces  entraves  il  espère  qu'un 
fascicule  pourra  paraître  avant  la  fin  de  l'année. 

Il   présente   ensuite   deux   travaux  d'archéologie   de    MM.    le 
D'  Carton  et  Carcopino  destinés  au  bulletin. 


390  PROCÈS-VERBAUX  DES  RÉUNIONS   DE   LA   SOCIETE 

Un  troisième  manuscrit  inachevé  sera  retourné  à  son  auteur 
pour  qu'il  veuille  bien  le  soumettre  complet  à  l'appréciation  du 
Comité. 

La  bibliothèque  a  reçu  : 

De  MM.  Augustin  Bernard,  Camille  Fidel,  G.-B.-M.  Flamand, 
Georges  Pennetier,  divers  ouvrages  qui  feront  l'objet  de  notices 
bibliographiques. 

Delà  Chambre  de  Commerce  Française  du  Canada,  un  Bulletin 
spécial  de  propagande  patriotique  dont  le  titi-e  dit  toute  l'étendue, 
toute  la  noblesse  du  but  poursuivi. 

La  Société  a  acheté  pour  la  bibliothèque  :  Les  Balkaniques,  par 
M.  le  Général  Niox. 

L'ordre  du  jour  étant  épuisé,  la  séance  est  levée  à  6  heures 
trois  quarts. 

Pour  le  Secrétaire  général,  Le  Président, 

Signé  :  FLAHAULT.  Signé  :  DOUMERGUE. 


RÉUNION  MENSUELLE  DU  COMITÉ  ADMINISTRATIF 

Séance  du  8  Novembre  1915 


Présidence  de  M.  Doumehgue,  président 


La  séance  est  ouverte  à  5  heures  et  demie. 

Sont  présents  au  Comité  :  MM.  Doumergue,  Flahault,  Pock, 
TouRNiER,  abbé  Fabre,  Pellet,  Pérez,  D"^  Sandras. 

Absents  excusés  :  MM.  le  général  Baschung,  Bérenger, 
Arambourg,  Huot,  Lemoisson,  de  Pachtere,  Roux-Freissineng, 
mobilisés  ;  Dangles,  Dupuy,  Kriéger,  René-Leclerc. 

Absents  :  MM.  Déchaud,  Lamur,  Pontet. 

Le  procès-verbal  de  la  séance  du  4  octobre  est  lu  et  adopté. 

Avant  d'aborder  l'ordre  du  jour,  M.  le  Président  adresse  un 
souvenir  ému  aux  victimes  du  Mereian  et  du  Caleados  et  exprime 
la  part  que  la  Société  prend  au  deuil  qui  frappe  les  familles  des 
soldats  alliés.  Le  Comité  s'associe  aux  paroles  du  Président  et 
aux  sentiments  de  haute  sympathie  que  la  population  d'Oran  a  si 
unanimement  manifestés  à  l'occasion  des  funérailles  des  victimes. 
Il  charge  M.  le  Président  de  transmettre  à  M.  Barber,  consul 
d'Angleterre,  les  condoléances  de  la  Société. 

M.  le  Président  rappelle  ensuite  au  Comité  les  deuils  nombreux 
qui  viennent  d'affliger  la  Société  :  MM.  le  commandant  Jeanney 
et  le  lieutenant  Pagan,  tués  en  Champagne  par  un  même  obus  ; 


PROCÈS-VERBAUX   DES   R Kl  NIONS  DE   LA   SOCIÉTÉ  "^ni 

M.  SoiPTEUR  (I6c6clé  à  TIcmcen.  Lo  Comité  adi-esse  un  souvenir 
ému  aux  roiilVri-os  disparus  et  ses  bien  vives  (îoiidoléances  à  leui-s 
familles. 

M  le  Président  annonce  en  ouli-e  la  mort  de  M.  Kriégek  lils, 
tue  aux  Dai'danelles.  L(>  Comilé  s'associe  au  di'uil  de  M.  Khiéoeh, 
membre  du  Comité,  ol  de  sa  lamillo. 

II  rappelle  que  le  général  Maucha^d,  mi'uibre  d'honneur  <le  la 
Société,  a  été  blessé  le  25  sepiendire  en  (Jliampagne  et  lait  des 
vœux  pour  son  prompt  rétablissement 

11  lait  connaître  en  outre  iiue  M  le  sous-litmtenant  Séché  a  été 
blessé,  que  M  Arambourg  a  été  évacué  du  Iront  des  Dardanelles 
pour  cause  de  maladie,  que  M.  le  Docteur  Peyrot  a  été  décoré  de 
la  Légion  d'Honneur  et  M.  le  Docteur  Paire  cité  à  l'ordre  du  jour 
et  déi'oré  de  la  Croix  de  Guerre  ;  enfin  que  M.  le  commandant 
Bérenger  a  été  nommé  Gouverneur  de  l'ile  de  T  ...  Le 
Comité  adresse  à  MM  Séché  et  Ar.vmbourg  ses  vœux  de  prompte 
et  complète  guérison,  et  à  MM.  Peyrot,  Paire  et  Bérenger  ses 
félicitations. 

Le  Comité  vote  aussi  des  félicitations  au  général  Lyautey,  Rési- 
dent Général  du  Gouvernement  de  la  République  au  Maroc,  qui  a 
reçu  la  Médaille  Militaire  en  récompense  des  brillants  services 
qu'il  ne  cesse  de  rendre  à  la  cause  du  Protectorat. 

Passant  à  l'ordre  du  jour,  le  Comité  admet  comme  membre  à 
vie  M.  Vassas,  déjà  membre  titulaire. 

Sont  admis  comme  membres  titulaires  : 

M.  Amram  Lucien,  professeur  de  langue  kabyle  à  Constantine  ; 

Le  Service  des  Renseignements  de  l'Etat-Major  du  Maroc 
Oriental  à  Oudjda,  présentés  dans  la  séance  précédente. 

Sont  présentés  comme  membres  titulaires  : 

M.  Gilbert  Lucien,  géomètre  des  Domaines,  Mazagan  (Maroc 
Occidental),  présenté  par  MM.  Griguer  Jules  et  Doumergue. 

M.  Griguer  René,  rédacteur  à  la  Résidence  Généi^ale  à  Rabat, 
présenté  par  MM.  Griguer  Jules  et  Doumergue. 

M.  Mantoue.  inspecteur  d'assurances,  présenté  par  MM.  Auzas 
et  Harburger. 

Sur  la  proposition  de  M.  le  Président,  des  remercieinents  sont 
votés  à  M  Fabre  la  Maurelle,  pour  la  collaboration  qu'il  a  bien 
voulu  lui  apporter  en  recopiant  500  fiches  de  la  bibliothèque,  et  à 
M.  le  Docteur  Sandras,  qui  a  offert  à  la  Société  un  certain  nombre 
de-bulletins 

Le  Comité  ayant  pris  connaissance  d'un  mémoire  de  M.  Ben 
Danou  vétérinaire  à  Méchéria,  sur  l'utilisation  du  o  bouss  »  d'alfa 
pour  l'alimentation  d'hiver  des  moutons  des  Hauts-Plateaux, 
s'associe  aux  propositions  de  l'auteur.  II  émet  le  vœu  : 

«  Que  M  le  Gouverneur  Général  fasse  expérimenter,  dès  le 
«  printemps  prochain,  le  procédé  préconisé  par  M.  Ben  Danou,  et, 
«  si  les  expériences  sont  concluantes,  en  fasse  faire  le  plus  tôt 
«  possible  l'application  pratique.  Toutefois  le  Comité  croit  devoir 


:^92  PROCÈS-VERBAliX   DES   REUNIONS   DE   LA   SOCIETE 

((  faire  des  réserves  au  sujet  des  intérêts  de  l'industrie  alfatière 
«  qui  pourraient  être  menacés,  et  qu'il  y  a  lieu  de  sauvegarder 
«  étant  donnée  la  crise  que  subit  l'industrie  du  papier  depuis 
«  plusieurs  aimées.  Mais,  pour  si  respectables  que  soient  ces 
«  intérêts,  ils  ne  doivent  pas  primer  les  intérêts  supérieurs  à  la 
«  défense  desquels  M.  Ben  Danou  consacre,  depuis  des  années,  les 
«  ressources  de  sa  science  et  de  son  inlassable  énergie.  » 

Le  Comité  décide  que  le  mémoire  de  M.  Ben  Danou  sera  publié 
le  plus  tôt  possible  dans  le  bulletin  de  la  Société,  et  vote  des 
félicitations  à  l'auteur,  dont  l'énergique  et  savante  initiative 
s'applique  à  résoudre  cette  question,  depuis  si  longtemps  débattue, 
de  l'élevage  intensif  du  mouton  dans  les  steppes  algériens. 

M.  le  Président  signale  de  nouveau  les  difficultés  que  rencontre 
la  publication  du  bulletin,  par  suite  de  l'insuffisance  du  personnel 
ouvrier  de  l'imprimerie.  Néanmoins  il  espère  qu'on  va  pouvoir 
aboutir.  M.  Fouque  vient  de  donner  des  ordres  pour  que  le 
nécessaire  soit  fait,  mais  en  nous  imposant  une  forte  augmentation 
dont  le  taux,  qui  n'a  qu'un  caractère  provisoire,  a  été  accepté.  Le 
Comité  espère  qu'il  sera  tenu  compte  du  sacrifice  consenti  et  que 
le  fascicule,  tant  attendu,  sortira  des  presses  le  plus  tôt  possible. 

La  Société  a  reçu  : 

Du  Gouvernement  Général  de  l'Afrique  Occidentale  Française 
les  deux  ouvrages  suivants  : 

Rapport  d'ensemble  annuel  présenté  par  le  Gouisernement 
Général  de  l'Afrique  Occidentale  Française  pour  Vannée  1912. 

Ce  travail,  absolument  remarquable,  montre  les  énormes  progrès 
réalisés  dans  nos  colonies  de  l'ouest  de  l'Afrique. 

Histoire  de  la  presqu'île  du  Cap-Vert  et  des  origines  de  Dakar, 
par  M.  Claude  Faure. 

De  M.  le  Ministre  de  l'Instruction  Publique  : 

La  Science  Française,  ouvrage  édité  à  l'occasion  de  l'Exposition 
de  San-Francisco  et  dans  lequel  sont  résumés  les  travaux  des 
grands  savants  français  qui  ont  le  plus  contribué  aux  progrès  des 
diverses  branches  des  connaissances  humaines. 

Il  a  été  acheté  pour  la  bibliothèque  l'ouvrage  J'accuse  par  un 
Allemand,  traduit  en  français  par  X. 

Ce  mémoire,  dans  lequel  l'auteur  analyse  les  documents 
officiels  concernant  les  pourparlers  diplomatiques  qui  ont  précédé 
la  déclaration  de  guerre,  est  un  magistral  réquisitoire  contre 
l'Autriche  et  l'Allemagne,  que  l'auteur  accuse  formellement,  avec 
preuves  à  l'appui,  d'avoir  voulu  la  guerre. 

L'ordre  du  jour  étant  épuisé,  la  séance  est  levée  à  7  heures. 

Pour  le  Secrétaire  général,  Le  Président, 

Sisné  :  FLAHAULT.  Signé  :.  DOUMERGUE. 


PROCÈS-VEBBAUX   DES   RÉUNIONS   DE    LA   SOCIÉTÉ  "W^ 

RÉUNION  MENSUELLE  DU  COMITÉ  ADMIXISTHA  l'Il-" 
Séance  du  6  Décembre  1910 


Présidence  de  M.  Doumergue,  président 


La  séance  est  ouverte  à  5  heures  et  demie. 

Sont  pi'éseiits  au  Comité  :   MM    Doumeroue,   Fl.\iia.ui.t,    Pock, 

TOURNIER,   LeMOISSON,    Dl'I'UY,    PeLLET,    PÉRIiZ 

Absents  excusés  :  MM.  le  généial  liAScnuNO,  Bj^renger,  Hljot, 
Arambourg,  de  Pachtere.  Roux  Freissinen'g,  mobilisés;  Dangles, 
Rexé-Leclerc. 

Absents:  MNL  Déchaud,  abbé  Fabre,  IvRiÉiiER,  Lamur.  Pontet, 
D'  Sandras. 

Le  procès-verbal  de  la  séance  du  8  novi-mlire  est  lu  et  adopté. 

M.  le  Président  rappelle  que  pendant  le  mois  écoulé  la  Société  a 
perdu  encore  un  de  ses  membres,  M.  Désiré  IIeintz,  maître 
imprimeur.  Il  fait  aussi  part  du  décès  de  Aotre  ancien  collègue 
^L  GiLLOT  qui  fut  Vice-Président  de  notre  Société.  II  renouvelle 
aux  familles  atteintes  par  ces  deuils  les  condoléances  de  la  Société. 

II  donne  ensuite  des  nouvelles  de  quelques  sociétaires  qui  se 
trouvent  au  front  :  M.  Valette,  capitaine,  a  été  fait  chevalier  de 
la  Légion  d'Honneur  ;  M.  Carcopino,  lieutenant,  a  été  cité  à 
l'ordre  du  jour  de  l'Armée  ;  ^L  Arambourg,  lieutenant,  complè- 
tement remis,  a  regagné  les  lignes  de  combat. 

Sont  acceptés  comme  membres  titulaires  : 

MM.  Gilbert  Lucien,  Griguer  René  et  Mantoue,  jiiésentés 
dans  la  séance  précédente. 

^L  le  Président  donne  lecture  de  la  réponse  de  M.  le  Consu 
d'Angleterre  remerciant  la  Société  pour  les  condoléances  qu'elle 
lui  a  adressées  et  souhaitant  «  que  l'union  étroite  de  nos  deux 
Pays  nous  permette  de  mener  â  bien  la  rude  tâche  qui  nous 
incombe  et  de  délivrer  du  joug  de  l'oppresseur  nos  braves  alliés 
Belges  et  Serbes...  La  victoire  commune  réunira  plus  étroitement 
encore  la  France  et  l'Angleterre,  et  rendra  indissolubles  les  liens 
éti^oits  qui  nous  unissent  »  . 

Lecture  est  aussi  donnée  d'une  lettre  de  NU  le  Gouverneur 
Général  accusant  réception  du  vœu  émis  par  le  Comité  dans  la 
dernière  séance,  au  sujet  de  l'utilisation  du  «  bouss  »  d'alfa 
préconisée  par  M.  Ben  Danou.  «  Cette  question  paraissant 
intéressante  »  M.  le  Gouverneur  Général  est  «  tout  disposé  à  la 
faire  mettre  à  l'étude  »  et,  dans  cette  intention,  a  demandé 
communication  du  mémoire  de  NU  Ben  Danou.  Satisfaction  lui  a 
été  donnée  immédiatement. 

Par  lettre  M.  Ben  Danou  remercie  le  Comité  pour  les  félicitations 
qu'il  lui  a  fait  transmettre  par  M.  le  Président. 

M.  le  Président  informe  le  Comité  ([ue  des  travaux  de  terrasse- 


26 


394  PROCÈS-VERBAUX  DES  RÉUNIONS   DE   LA   SOCIETE 

ment  ont  été  entrepris  sui-  remplacement  des  ruines  romaines 
de  Mina.  Quelques  monnaies  et  divers  objets  archéologiques, 
de  peu  d'importance  il  est  vrai,  ont  été  mis  à  jour.  La  seule 
inscription  connue  est  une  stèle  funéraire,  avec  médaillon,  dont 
il  ne  reste  que  quelques  lettres  paraissant,  à  première  lecture, 
sans  valeur  documentaire.  Comme  il  arrive  souvent,  en  pareil  cas, 
chacun  s'est  servi .  Il  y  a  toutefois  lieu  d'espérer  que  la  municipalité 
(le  Relizane,  qui  s'intéresse  aux  fouilles,  s'efforcera  de  mettre  à 
l'abri  la  plus  grande  partie  des  objets  trouvés. 

Le  Comité  prie  son  Président  de  féliciter  M.  le  Maire  de 
Relizane,  de  la  louable  initiative  qu'il  a  prise  de  s'assurer  de  la 
conservation  des  documents  trouvés,  et  de  l'engager  à  persévérer 
dans  cette  bonne  voie. 

Malheureusement  la  plupart  des  objets  récoltés  subiront  le  sort 
de  ceux,  hélas  !  trop  nombreux,  qui,  depuis  la  disparition  du 
regretté  commandant  Demaeght,  n'ont  pas  été  et  ne  sont  plus 
recherchés  et  pieusement  recueillis.  Notre  Musée  qui  fut  le 
plus  beau  et  le  plus  riche  de  l'Algérie,  dont  la  Ville  d'Oran 
s'enorgueillissait,  a  aujoui^d'hui  ses  collections  éparses  et  les 
oranais  l'ignorent.  Les  hommes  de  science  n'ont  plus  à  leur  libre 
disposition  cet  instrument  de  travail  ;  le  pubhc  ne  peut  plus 
bénéficier  des  leçons  de  cet  établissement  d'enseignement  par 
l'aspect  qu'était  pour  lui  le  Musée  ;  le  touriste  le  cherche  en  vain. 

«  A  quoi,  d'ailleurs,  peuvent  bien  servir  ces  vieilleries?  »...  A  aller 
enrichir,  si  on  n'y  prend  garde,  le  Musée  des  Antiquités  d'Alger 
où  l'Etat,  plus  soucieux  de  conserver  nos  richesses  nationales,  les 
fera  transporter  un  jour. 

M.  le  Président  donne  des  nouvelles  du  bulletin  dont  la 
composition  n'avance  pas.  Toute  sa  diligence  se  bute  à  l'insuffisance 
des  moyens  à  laquelle  l'imprimeur  n'arrive  pas  à  remédier.  C'est 
un  préjudice  réel  (jue  la  Société  subit  de  ce  fait,  non  seulement 
pour  ce  qui  est  de  sa  bonne  administration,  mais  aussi  des 
inconvénients  résultant  du  retard  apporlé  à  la  publication  de 
certains  travaux  importants  dont  les  auteurs  veulent  bien  honorer 
son  bulletin. 

Si  l'amélioration  souhaitée  n'est  pas  obtenue  il  faudra  reprendre, 
en  1916,  la  composition  en  caractères  mobiles  de  tout  le  bulletin, 
ce  qui  lui  enlèvera  ce  cachet  esthétique  que  l'imprimerie  avait 
réussi  à  lui  donner  i. 

Après  examen  de  quelques  questions  d'administration  intérieure, 
la  séance  est  levée  à  6  heures  trois  quarts. 

Pour  le  Secrétaire  général,  Le  Président, 

Signé  :  FLAHAULT.  Si^né  :  DOUMERGUE  . 


1  L'imprimerie  a,  depuis,  recouvré  tous  ses  moyens.  {Note  ajoutée  pendant 
le  tirage  ) 


MOUVEMENT    DE    LA    BIBLIOTHEQUE 

I"  t;l  2'   Semestres  IDIÔ 


1*  PERIODIQUES 

Pour  le?   pultliraliims   priioilitiiics,   voir  la   Liste  des  Socirtt's 
corresp^iiiddiilcs.  (hnll.    i''    Iriiiicslrc   ii)i5.    j».    19.) 


2     ^ON    PERIODIQUES 

(Dons  et  Achats) 


GÉNÉRALITÉS 


BiTARD  (Adolphe).  —  Histoire  populaire  des  sciences.  Inven- 
tions et  découvertes  depuis  les  premiers  siècles  jusqu'à  no? 
jours,   I  vol.  jLrrand  in-^",  71»)  p.  Paris,  A.  Fayard. 

Pabue  (J.  h.)  —  La  vie  des  insectes,  Itrooh.  in-S°,  291  p. 
Paris,  Ch.  Delagrave,  1916. 

—  Les  merveilles  de  l'instincl  chez  les  insectes,  hrooh.  m-8^, 
271  p.  Paris,  Ch.  Delagrave,  1916. 

—  Les  ravageurs,  broch.  in-8°,  284  p.  Paris,  Ch.  Delagrave, 
1915. 

—  Mœurs  des  insectes,  broch.  in-8°,  284  p.  Paris,  Ch.  Dela- 
grave, 191 5. 

Lasteyrie  (Robert  de)  et  Alexandre  Vidier.  —  Bibliographie 
générale  des  travaux  histori(jues  el  archéologicpies  publiés  par 
les  Sociétés  savantes  de  la  France  (Publ.  du  Ministère  de  l'Ins- 
truction Publique),  broch.  in-Zj",  /400  p.  Paris.  Imp.  Nationale. 
1915. 

Laubeuf  (M.)  —  Sous-marins  et  submersibles,  broch.  in -8°, 
100  p.,  8  pi.  Paris,  Ch.  Delagrave,  1915. 

Mager  (Henri).  —  Les  inlluences  des  corps  minéraux.  Re- 
cherches par  leurs  influences  des  eaux  souterraines,  des  corps 


396 


MOUVEMENT  DE  LA  BIBLIOTHEQUE 


enfouis  ou  dissiinuh'^;,  des  gisements  métallifères,  broch.  in-8°, 
236  p.  Paris,  H.  Dunod  et  L.  Pinat,  1914. 

Pennetier  (D""  Georges).  —  Discours  sur  l'évolution  des  con- 
naissances en  histoire  naturelle  (Actes  du  Muséum  d'histoire 
naturelle  de  Rouen).  5  vol.  in-8°.  Rouen,  .1.  Girieud  et  A.  Gal- 
lier,   1911-1915. 

—  Un  débat  scientilicjae.  F.  A.  Pouchet  et  î,.  Pasteur  (Actes 
du  -Muséum  d'histoire  naturelle  de  Rouen),  broch.  in-8°,  55  p. 
Rouen,  J.  Girieud,   1907. 

Rev-Pailuade  (.1.  de).  —  Sur  l'emploi  de  la  montre  décimale 
et  du  soleil  pour  la  direction  des  avions,  broch.  in-i8°,  9  p. 
'loulouse,  M.  Ronnet,  1915. 


EUROPE 


Allemand  (Un).  —  J'accuse  !  broch.  in-S",  334  P-  Paris, 
Pavot  et  C/^  191 5. 

Andler  (Ch.)  —  Le  pangermanisme.  Les  plans  d'expansion 
allemande  dans  le  monde,  broch.  in-8°,  80  p.  Paris,  Armand 
Colin,  1915. 

RÉDiER  (.Toseph).  —  Les  crimes  allemands.  Comment  l'Alle- 
magne essaye  de  justifier  ses  crimes  (Etudes  et  documents  sur 
la  guerre),  broch.  in-8°,  48  p.  Paris,  Armand  Colin,  1915. 

Congrès  national  des  Sociétés  françaises  de  Géographie 
(Paris,  i5-i9  juillet  191 3).  - — ■  Comptes  rendus,  broch.  in- 8°, 
35i  p.,  6  cartes.  Paris,  Masson  et  C"',  1914. 

Denis  (Ernest).  —  La  guerre,  causes  immédiates  et  lointaines, 
broch.  in-i8°,  356  p.  Paris,  Ch.  Delagrave,  1915. 

DuRKHiciM  (E.)  et  E.  Denis.  —  Qui  a  voulu  la  guerre  ?  Les  ori- 
gines de  la  guerre  d'après  les  docimients  diplomatiques  (Etudes 
et  documents  sur  la  guerre),  broch.  in-8°,  65  p.  Paris,  Armand 
Colin,  1915. 

Fidel  (Camille).  —  L'Allemagne  d'outre-mer.  Grandeur  et 
décadenc>e,  broch.  in-8°,  78  p.,  6  caries.  Paris,  Boivin  et  C'*, 
1915. 

Gautier  (Raoul).  —  Résumé  météorologicjue  des  annéeis  191  3- 
1913  pour  Genève  et  le  Grand  Saint-Rernard,  broch.  in-8°, 
i49  p.  Genève,  Société  Générale  d'Imprimerie,   1914. 

Gautier  (R.)  et  H.  Diaime.  —  Observations  météorologiques 
faites  aux  fortifications  de  Saint-Maurice  pendant  les  années 
i()i:>-i()i3  CExtr.   des   Archives  des  Sciences  ]>hysi(pics  et   nafu- 


MOUVEMENT    DE    I,A    IMIU.IOTIIÈQUE  307 

relies),  hroch.  in-S",  i  i  ;^  p.  (Jcih'nc,  Sdcii'h'-  f  ;rii<'-i;ilc  il  liii[iri- 
iiicrie,   i()i  |. 

Lavisse  (\\.)  et  r;h.  AvDLi'H.  —  l'riili<|iie  cl  (l<i(liiri(<  ;illcin;m- 
(les  (le  hi  i^iieiii-  n^liidrs  cl  (locmiiciiis  siii'  l;i  ;j-iicnc),  lirficli. 
in-8°,  .\-]  [).  Paris.  Arniand  (>>liii,  i ()!;'». 

MiMSTÈBR    DKS     AfI'AIHKS     KTHANCiKHKS.     I  ><  ici  1 1 1  icn  j  <     (li|il()- 

nialiqiie^  i',)i'i-  la  ^Mierre  européenne.  Pièces  relalives  aux  né- 
•/ociatioMS  (|iii  nul  [iri-ccdc  la  déclaralidn  de  j/iicnc  de  l'Alle- 
ma^Mie  à  la  Russie  et  à  la  France,  hroch.  in-S'',  hj'i  [».  Paris, 
Hachelte  el  ^/^    ii)i5. 

MiMSTKRK  DE  i.A  Matumc.  —  Annuaire  îles  marées  des  côles 
de  France  (Service  hydroffraphique  de  la  Afarine),  i  vol.  in-iS". 
4')^  p.  Paris,  Imp.  Nationale,  iç)i/j. 

Moi'MEn  (Jules).  —  Notre  belle  patrie.  Sites  pittoresques  de 
la  France,  r  vol.  in-S°,  ?,o.o  p.  Paris,  Hachette  et  C'^  1888. 

Nadatllac  (Marquis  de).  —  La  dernière  élection  municipale 
de  Pompéi.  (Ext.  du  (^correspondant) ,  hroçli.  in-8°,  28  p.  Paris, 
de  Soye  et  fils,  1895. 

Nicole  de  la  Croix  (l'abbé).  —  Céoirraphie  moderne  et  uni- 
verselle contenant  les  états  de  rFurope  situés  au  Nord  et  à 
l'Orient,  i  vol.  in-ra,  755  p.  Lyon.  Rolland  et  Rivoire  aîné,  1806. 

Niox  (Général).  —  Géographie  militaire.  Les  pays  balkani- 
ques, broch.  in-i8.  188  p.  Paris.  Ch.  Delagrave,  1915. 

Pennetiek  (D""  Georges).  —  Le  Muséum  de  Rouen  en  1900, 
(Actes  du  Muséum  d'histoire  naturelle  de  Rouen),  broch.  in-8°. 
100  p.  Rouen,  .r.  Lecerf.   1900. 

—  Documents,  manuscrits  et  publications  relatifs  au  Mu- 
séum d'histoire  naturelle  de  Rouen  (Actes  du  Muséum  d'his- 
toire naturelle  de  Rouen),  broch.  in-8°,  89  p.,  4  pi.  Rouen, 
J.   Girieud.    1906. 

—  Naturalistes  normands  (xv^'-xx^  siècles).  (Extr.  des  Comptes 
rendus  du  Conjrrès  du  Millénaire  normand),  broch.  in-8'',  ^i  p. 
Rouen.  Léon  Gy,  191  r. 

ScHMiDT  (Ch.  Eug.).  —  Les  villes  d'art  célèbres.  Cordoue  et 
Grenade.  Traduction  Henri  Peyre.  i  vol.  in-8°.  i53  p.  Paris, 
Renouard  et  H.  Laurens,  1902. 

Sous-Secrét\ri\t  n'F.TAT  des  Beatx-Arts.  —  Les  Allemands 
destnicteurs  de  cathédrales  et  de  trésors  du  passé,  broch.  in- 
folio, 78  p.  Paris.  Hachette  et  C'^   1910. 

Weiss  (André).  ■ —  La  violation  cfe  la  neutralité  belge  et 
luxembourgeoise  par  l'.Mlemagne  (Etudes  et  docmnents  sur  la 
guerre),  bioch.  in-8°.  .'^7  p.  Paris,   Armand  Colin.   t9i5. 


^508  MOUVEMENT    DE    LA    RIRLIOTHÈQUE 

AFRIQUE  DU  ISORD  (Algérie,  Maroc,  Tunisie,  Sahara) 


Archives  Berbères.  —  Publication  du  Comité  d'études  ber- 
bères de  Rabat,  i''*  année,  i"  faseicule,  liroch.  in-8°,  96  p. 
Rabat,  1916. 

Ardiïti  (R.)  —  Recueil  des  actes  législatifs  et  juridiques  con- 
cernant les  Israélites  de  Tunisie  de  1807  à  igiS,  broch.  in-8°, 
264  p.  Tunis,  B.  Borrel,  1915. 

Ben  Danou  (C).  —  Contribution  à  l'étude  de  l'industrie  pas- 
torale en  Algérie.  Rôle  mécanique  des  vents  dans  la  distribution 
des  fourrages  steppiens.  (Extr.  du  Bull,  de  la  Soc.  de  Géofjraphie 
d'Oran),  broch.  in-8°,  7  p.  Oran,  L.  Fouque,   1915. 

Bernard  (Augustin).  —  Le  Maroc,  liroch.  in-8°,  ^20  p.  Paris, 
Félix  Alcan,  1916. 

Blanche  (Ferd.)  —  Monographie  de  la  commune  d'Aïn-el- 
Turck  (Extr.  du  Bull,  de  la  Soc.  de  Géographie  d'Oran),  broch. 
in-8°,  73  p.  Oran.  L.  Fouque,   igiB. 

Brault  (D''  J.)  —  Pathologie  et  hygiène  des  indigènes  mu- 
sulmans d'Algérie,  broch.  in-8°,  200  p.  Alger,  Ad.  Jourdan, 
1905. 

Carton  (D''  L.)  —  Le  Monte  Testaccio  de  Sousse  (Extr.  du 
Bull,  de  la  Soc.  archéologique  de  Sousse),  broch.  in-8°,  69  p. 
Tunis,  Imp.  Rapide,  igiô. 

—  Onzième  chronique  archéologique  nord-africaine  (Extr. 
de  la  Revue  Tunisienne,  broch.  in-8°,  5.^  p.  Tunis.  Imp.  Ra- 
pide, 1915. 

Chantre  (Ernest).  —  Le  docteur  Bertholon  (185^-191 4).  ?a 
vie  et  ses  œuvres  (Extr.  de  la  Revue  Tunisienne),  broch.  in-8°, 
22  p.  Tunis,  Imp.  Rapide,  1915. 

—  La  Tunisie  à  l'Exposition  internationale  de  Lyon,  broch. 
in-8°.  35  p.  Tunis,  Imp.  Rapide,    191^. 

Damichel  (Oscar).  —  Voyage  au  Maroc.  Le  Maroc  d'autre- 
fois et  le  Maroc  d'aujourd'hui,  broch.  in-8°.  199  p.  Bône, 
J.  Chanbron,   191 5. 

Fl,\mand  (G.  B.  M.)  —  Deux  stations  nouvelles  de  pierres 
écrites  découvertes  dans  le  cercle  de  Djelfa  (Extr.  de  V Anthro- 
pologie), broch.  in-8°,  26  p.  Paris,  Masson  et  C®,  1916. 

Gouvernement  Général  de  l'Aigérie.  —  Discours  prononcé 
par  le  Gouvjemeur  Général  de  l'Algérie  à  l'ouverture  de  la  ses- 
sion ordinaire  des  Délégations  Financières,  le  7  juin  1915. 
broch.  in-8°,  34  p.  Beangency,  Barillier,  T915. 


MOUVRMKNT    I)K     l.\     lil  Kl  M»  I  II  l'OlJK 


Mon 


GsKi-L    (Sl('pliano)    et  Cliarlcs    Albert    Joly.    —    Klmmissa, 

Mdrioiiroiich,     Sniioima.  Ffniillcs   oxéciitrcs    par   le   Service   des 

Momiiiicnls    lii<|iiii(jii(-^  de    l'M^'érie   CPiihl.    du    Cfnivernemenl 

Céné.ral  de  l'AI^rérie),    r  vol.   iii-folin,    r  r 'i   [>.    Mjrer,    Ad.   .Four- 
dan,  rc)\fi. 

Hartert  ((Ernsf).  —  Tri  Altreria  lorl.  \  journey  \><  llie 
M'Zal)  coiinfry  and  over  the  eenlral  W\ph  Plateau?  (F'aIp.  de 
yoi'ildft's  ZooI^Kficne),   iiroeh.   in-'i°,    rf|  f»..    i()i5. 

^[^^I^I■:l,  i  l.ndovic'l.  —  \ii  ^iijet  d'un  iiiiir  intiiiiiu  du  foif 
Sainte-Thérèse  à  Oran  fRxtr.  du  jonmal  u  I.e  Petit  Oranais  »), 
1    pi.  Oran,  Tnij).  du  «  Petit  Oranais  )),    i<)i'i. 

MKSMF.r.  fCapitaine").  —  Mnnon-rapliie  d\i  territoire  d'\ïn-Sé- 
fra  (Extr.  du  Bull,  fie  la  .*^oc.  de  Géo(intphi<'  (VOmn).  hrfwli. 
in-8°,  3io  p.  Oran,  T..  Fonque,   191/1. 

MicREAT  x-Ri:T.r,AirtE  CFd.)  —  Les  liabous  de  Tanjrer.  I  Texte 
arabe.  IT  Analyse  et  extraits  (Pnbl.  de  la  ^îission  scientifique  du 
ÎNIaroc),  broeb.  in-8°.  '>5o  p.  Paris,  F.  Leronx,   iqi^. 

Petit  (capitaine).  —  De  la  frontière  oranaise  à  Taza  (Maroc) 
(Extr.  du  Bull,  de  la  Snc.  de  Gcoçimphie  d'Oran),  broch.  in-8°, 
0.0.  p.  Oran,  L.  Fonqne,  I0i5. 

René-Lect,erc  (Ch.)  —  Fe  commerce  au  Maroc.  Conseil?  anx 
industriels  ot  anx  néfrnciants  de  la  "Métropole,  broch.  in- 18°, 
:»/j  p.  Paris.  Tmp.  de  la  Bourse  de  Commerce,  ipiB. 

RÉSIDENCE  GÉNÉRALE  w  Maroc.  —  Rapport  sur  les  commer- 
ces français,  anslai?,  allemand  et  au?tro-hono-rois  au  Maroc  de 
i()oo  à  Tdi.S  fPnbl.  du  Contrôle  de  la  Dette),  broch.  in-8°,  187p. 
Paris.  Tmi).  de  la  Bourse  de  Commerce,   t9t5. 

SvRTw.  —  Fa  question  du  Maroc  en  tqot  Œxtr.  du  Bull,  de 
la  Bévue  d'Etudes  Algériennes),  broch.  in-8°,  f^!^  p.  Oran.  Tmp. 
Centrale,    Tçior!. 

Wateat'  (D"").  —  Liste  des  véo-étaux  recueillis  pendant  la 
reconnaissance  de  M.  le  capitaine  Martin  dans  l'Ero-  Ttruidi 
(Sahara).  fExtr.  du  Bull,  de  la  Snc.  de  Géographie  d'Oran), 
broch.  in-8°,  12  p.  Oran.  L.  Fouque,  ipiB. 


AFRIQUE 


RoRV  DE  Saint-Vincent  (M.).  —  Sur  l'anthropolon-ie  de  l'Afri- 
que française,  broch.  in-8°.  m»  p..  3  pi.  Paris,  d^  Fain  ei 
Thunet,   iShb. 


400  MOUVEMENT    DE    lA    BIBLIOTHEQUE 

Chanoine  (Capitaine).  —  Mission  Voulet-Chanoine.  (Extr.  du 
Bull,  de  la  Soc.  de  Géographie)^  broch.  in-8°,  6  p.  Paris,  Société 
de  Géographie,  1899. 

Faure  (Claude).  —  Histoire  de  la  presqu'île  du  Cap-Vert  et 
des  origines  de  Dakar,  broch.  iii-8°,  iG/i  p..  2  cartes.  Paris, 
E.  Larose,   191^. 

Frey  (Colonel).  —  Côte  Occidentale  d'Afrique.  Vues,  scènes, 
croquis,  broch.  in-4°,  543  p.  Paris,  C.  Marpon  et  L.  Flamma- 
rion. 1890. 

Gouvernement  Général  de  l'Afrique  Oocidentale  Française  : 

Annuaire  du  Gouvernement  Général  de  l'Afrique  Occidentale 
Française  (1912-13),  broch.  in-8°,  1.012  p.  Paris,  Emile  Larose, 
1914. 

—  La  Mauritanie,  broch.  in-8°,  92  p.  Corbeil,  Ed.  Crété,  1907. 

—  Rapport  d'ensemble  annuel  1912,  i  vol.  broch.  in-8°,  948  p. 
Paris,  E.  Larose,  1916. 

Maclaud  (D'  Ch.).  —  Les  mammifères  et  les  oiseaux  de 
l'Afrique  Occidentale  Française,  broch.  in-12,  352  p.,  i  carte. 
Paris,  Augustin  Challamel,  T906. 

MiNTSTÈRE  DES  CoLOMEs. —  Note  sur  le  graphite  à  Madagascar, 
broch.  in-4°,  2  p.  Paris,  Tmp.  du  Journal  Officiel,  1913. 

Struckf  (G.).  —  Etude  sur  les  Cafres  du  Zambèze  (Région  de 
Quelimane).  broch.  in-8°,  8  p. 


ASIE 


.TotTVEAiT-DTTBREuii,  (G.).  —  Etudcs  archéologiqucs  du  Sud  de 
l'Inde.  2  vol.  in-8°  :  Tome  L  192  p.,  64  p1.  ;  Tome  II,  216  p., 
44  pi.  Paris,  Paul  Geuthner,   191 4. 

Lelièvre  (A.  L.)  et  Ch.  A.  Clôt  oueur.  —  Pagode  de  Dakao 
(Publ.  de  la  Soc.  des  Etudes  indochinoises),  broch.  in-folio, 
25  p.  Saïgon,  C.  Ardin,  1914. 

Renaud  (J.).  —  Les  ports  du  Tonkin  :  Haï-Phong,  Quang-Yen, 
Hone-Gac  ou  Port-Courbet,  broch.  in-8°.  28  p.,   ^  carte. 

Wessels  (C).  —  Antonio  de  Andrade,  S.  J.  viajante  no 
TTimalaine  no  Tibetc  (1624-1630),  traduzido  do  original  holandès 
por  Gonçalves  Viana,  broch.  in-12,  25  p.  Lisboa.  César  Piloto, 
1912. 

—  Antonio  Vaz  Monteiro  Gomes.  Reply  to  the  Duchess  of 
Bedford's  statement,  broch.  in-8°,  58  p.  Lisboa,  Imprensa 
Nacional,   igiS.  , 


MOUVIÎMKM     1)1-;     LA     MIHLIOTIIEOUE 


401 


AMr:i:i(iLiE 


(.ii\Miiiii:  m;  (  ".ommkuci:  Fh\m:\isi:  di;  Momukal.  —  [,(•  nMc 
(lu  ('.iiiuidii  (li'|iiiis  le  (l(''lnil  de  la  «.micii!',  IuucIi.  j/hiikI  in-'i'. 
.^«1   p.    Mdiiliviil,   (  lodiii-Mcsiiard.    i()i5. 

MiMSTKiiK  1)1-;  i.Insiiu  ci  ion  Pi  BLioiE  ET  DKS  Bem'x-Ahts.  — 
La  scienct'  fiaiiraisc  à  i'lv\|Kisili(t!i  univorsolle  inlcrnalinnalc  de 
San   Francis(((,    :>.   vol.    iii-S°.    ,S()(i-'|o.'i   p.    Paris,    iqir». 

Sir.vERs  (Wilhcm).  —  Reisc  in  Pcni  imd  Fxiiador,  broch. 
in-8°,  4ii  p.,  14  pi-  et  cartes.  Leipzig,  Dunker  et  Humblot,  -i(|i'4. 


CARTES 


Caries  pror)isoit'es  des  Confins  aliiéro-nuirocnins,  au  i/ioo.ooo: 

Région  de  Debdou  ; 

—  de  Taourirt  ; 

—  d'El-Aïoun-Sidi-Mellouck  ; 

—  de  Toulal  ; 

—  d'Anoual   ; 

—  du  Haiit-Guir-Aïn-Chaïr  : 
(hi  Haut-Guir-Bou-Denib   ; 

—  du  Haut-Guir-Kenadsa. 

Caries  du  Maroc,  au  i/5oo.ooo  : 

Mazagan.  Oued  Noun. 

Marrakech.  Oued  Dra. 

Tafilelt.  Oued  Saoura. 
Figuig. 


Le  Bilyiiolhécaire, 

A.  TOLRMKH. 


Angélique    CAPIFALI 


Le  1"  juillet  1915  est  décédé  à  Coité  fCorse),  M.  Angélique 
Capifali,  un  des  plus  anciens  membres  de  notre  Société.  Né  à 
Calvi,  M.  Capifali  se  destina  à  l'Administration  des  Postes.  Le 
1"  octobre  1867  il  était  surnuméraire  à  Constantine.  En  1882, 
il  débutait  à  Oran  où,  en  1883.  il  était  promu  commis  principal. 
Successivement  receveur  à  Mascara,  à  Tiaret,  à  Tlemcen  il  fut, 
en  récompense  de  ses  bons  et  loyaux  services,  appelé  en  1902,  à 
la  direction  de  la  Recette  d'Oran-Karguentah.  Il  occupa  ce  poste 
de  choix  jusqu'à  l'époque  de  son  admission  à  la  retraite,  eu  1911. 

A  ses  heures  de  loisir  M.  Capifali  ne  dédaignait  pas  les  choses 
de  l'espint  et  s'intéressait  surtout  au  mouvement  scientifique. 
Aussi  dès  son  arrivée  à  Oran  en  1882,  se  fit-il  inscrire  à  notre 
Compagnie.  Il  en  sortit  lorsqu'il  s'éloigna  d'Oran  et  y  revint  plus 
tard. 

Très  dévoué,  il  fut  élu  membre  du  Comité  en  1909  et  fit  partie 
de  la  Commission  des  Finances.  Lorsqu'il  se  retira  à  Corté  il 
continua  jusqu'à  sa  mort  à  compter  à  notre  effectif,  montrant 
ainsi  en  quelle  estime  il  tenait  notre  Société. 

Tous  ceux  qui  ont  connu  M.  Capifali  sont  unanimes  pour  rendre 
hommage  à  ses  qualités  de  cœur  et  d'esprit,  à  sa  parfaite  urbanité, 
à  l'empressement  qu'il  mettait  à  rendre  service  chaque  fois  qu'il 
lui  était  permis,  de  par  ses  fonctions,  de  se  rendre  utile.  Lorsqu'il 
quitta  Oran  les  vœux  du  Comité  l'accompagnèrent  dans  sa  retraite. 

Au  collègue  bien  regretté  la  Société  adresse  son  plus  recon- 
naissant souvenir  et,  en  son  nom  et  au  mien,  je  renouvelle  à  la 
famille,  si  cruellement  éprouvée,  l'expression  de  nos  plus  sincères 
condoléances. 

F.  D. 


Gustave   VALLOIS 


Le  8  juillet  1915  est  décédé  à  Sanvic  (Seine-Inférieure),  M.  Gus- 
tave Vallois,  capitaine  en  retraite,  qui  appartenait  à  notre  Société 
depuis  l'année  1886. 

Le  capitaine  Vallois  était  un  vieil  habitant  de  la  ville  d'Arzew 


nécuologif;  403 

où  il  s'était  fixe  lors  do  sa  mise  à  la  i-olraite.  Ayant  dos  intérêts 
dans  le  pays,  il  s'y  était  af taché  ot,  tout  en  s'occupaiit  de  ses 
piopres  affaires,  il  s'était  consacré  à  celles  de  sa  ville  d'adoption. 

Très  dévoué,  ti'és  accueillant, d'une  urbanité  parfaite, ne  comptant 
([ue  des  amis,  il  avait  acquis  une  juste  notoriété.  Ses  concitoyens 
l'honorèrent  en  l'appelant  à  la  direction  des  affaires  municipales. 
Il  fut  élu  maire,  puis,  conseiller  général. 

Dans  l'accomplissement  de  ses  fonctions  électives  il  eoutiiiua 
à  se  faire  l'omarquei-  par  son  aideur  au  travail  et  sou  dévouement 
ilésiiitéressé  aux  affaires  |)u1)li(iues. 

Aussi  la  population  d'Arzew,  profondément  atteinte  par  ce 
deuil,  conservera  pieusement  le  souvenir  de  l'un  de  ceux  qui 
l'ont  le  mieux  servie. 

La  Société  de  Géographie  n'oublieia  pas  la  profonde  marque 
d'estime  et  de  confiance  que  lui  témoigna  le  capitaine  Vallois 
penilant  27  ans.  A  sa  famille,  à  tous  ceux  (|ui  le  pleurent  elle 
adresse  l'expression  de  ses  condoléances  attristées. 

F   D. 


Louis    ROUSSEUR 


Notre  liulletin  trimesti-iel  relate  aujourd'hui  les  nombreux  deuils 
qui  frappent  la  Société  de  Géographie  d'Oran.  Il  en  est  un  qui 
nous  est  particulièrement  cruel.  La  mort  nous  a  enlevé,  l'été  dernier, 
un  des  membres  fondateurs  do  notre  Compagnie,  M.  Louis 
Rousseur,  qui  a  rempli  avec  tant  de  distinction  et  de  dévouement, 
pendant  trente-six  ans,  les  fonctions  de  Directeur  de  la  Société  du 
gaz  et  d'électricité  d'Oran. 

Il  a  succombé  à  Paris  où  il  était  allé,  en  juillet  dernier,  demander 
à  la  Science  le  soulagement  d'une  gi^ave  maladie  dont  il  était 
atteint  depuis  quelques  années. 

Sa  dépouille  mortelle,  ramenée  à  Oran,  a  été  accompagnée  au 
champ  de  repos  par  une  foule  d'amis  et  do  connaissances  à 
laquelle  s'étaient  jointes  toutes  les  autorités  de  la  ville. 

De  nombreux  orateurs  ont  retracé  la  longue  et  très  honorable 
carrière  de  notice  confrère  comme  ingénieur,  comme  chef  d'un 
nombreux  personnel  et  comme  mutualiste.  Ils  ont  rappelé  aussi 
qu'il  avait  été  volontaire  en  1870  et  qu'il  avait  fait  vaillamment 
son  devoir. 

Notre  Société  lui  a  rendu  l'hommage  ému  qui  était  bien  dû 
à  l'un  de  nos  plus  vigilants  administrateurs.  C'est  notre  distingué 


404  NÉCROLOGIE 

confrère  M.  Flahault  (|ui  a  éloquemment  exprimé  sur  la  tombe  de 
Pousseur  nos  regrets  unanimes  et  l'hommage  de  nos  renierciments 
à  notre  ancien  trésorier.  11  a  rappelé  surtout  ([ue  Pousseur  était 
de  cette  petite  phalange  d'Oranais  t[ui  eurent  l'initiative,  il  y 
aura  bientôt  (luarante  ans,  de  fonder,  k  Oran,  la  plus  ancienne 
.aujourd'hui  des  Sociétés  de  Géographie  de  l'Algérie.  Ses  fondateurs 
comprenaient  combien  importante  était  l'cBuvre  de  vulgarisation  à 
accomplir  dans  cette  ville  si  considérablt;  de  l'Africiue  du  Nord, 
l'un  do  ses  grands  ports  non  seulement  pour  TOranie  mais  pour  le 
Maroc. 

M.  Flahault  a  résume  notre  pensée  à  tous  par  ces  mots  ;  «  Nous 
perdons  en  Pousseur  un  excellent  collègue  et  la  Société  de 
Géographie  un  de  ses  meilleurs  soutiens.  » 

Que  pourrait-on  ajouter  de  plus  juste  et  de  plus  vrai  en  saluant 
encore  une  fois  dans  ce  bulletin  la  mémoire  de  notre  regretté 
confrère. 

Th.  MONBRUN. 


Louis   SAY 


Le  3  octobre  1915  est  décédé  à  Port-Say,  M.  Louis  Say,  lieute- 
nant de  vaisseau  de  réserve. 

Apr-ès  avoir  appartenu-pendant  plusieurs  années  au  cadre  des 
officiers  de  notre  marine  nationale,  M.  L.  Say  démissionna  pour 
devenir  colon 

A  la  suite  d'un  voyage  dans  la  région  du  Kiss  il  avait  eu  l'idée 
de  créer,  dans  ce  pays  abandonné,  sur  ce  leri-itoire  plutôt  marocain 
qu'algérien,  un  centre  de  colonisation  française.  L'affaire  n'allait 
pas  sans  risques  et  sans  danger  car,  à  cette  époque,  la  frontiéie 
était  loin  d'être  respectée  par  les  Marocains  et  les  Bocoyas 
vivaient  encore  de  piraterie. 

Possesseur  d'une  grosse  fortune,  L  Say  tenta  de  réaliser  son 
projet.  En  1900  il  s'installa  au  bord  de  la  nier,  traça  les  plans  d'un 
village  qui  petit  à  petit  sortit  de  terre,  provoqua  un  mouvement 
d'affaires,  créa  le  petit  portMpii  devait  être  le  débouché  de 
l'hinterland  de  Port-Say,  où  de  hardis  colons  avaient  déjà  défriché 
quelques  hectares. 

Dans  la  réalisation  de  son  projet  L.  Say  fit  preuve  d'une 
énergie,  d'une  volonté,  d'une  ténacité  peu  communes.  Malheu- 
reusement, après  quelques  années  de  prospérité  relative,  l'œuvre 


NKCROI.Or.IE  405 

sembla  péricliter,  les  lésultats  n'étaient  plus  en  proportion  des 
elïorts.  L'insuflisance  îles  ressources  «l'une  région  peu  colonisée 
il  l'arrière,  les  (lélfCluosités  du  petit  havre,  sans  cesse  menacé 
par  les  sables  et  ouvert  à  tous  les  vents,  ne  pui-enl  entrelenii' 
qu'une  pi-ospérité  iclalivc  à  Port-Say.  En  outre,  une  direction  tiop 
tracassièi-e,  nianrjuant  de  souplesse,  ce  qui  est  trop  souvent  la 
caractéristique  de  la  <-olonisation  privée,  fit  perdi-e  en  partie  le 
bénéfice  des  résultats  adjuis  Nombi-eux  lurent  ceux  qui,  petit  à 
petit  abandonnèrent  Port-Say,  tandis  i\iu'  d'autres  allèrent 
s'installer  autour  de  la  Kasba  de  Saïdia,  en  territoire  marocain, 
oïl  un  nouveau  centre  tend  à  suppLuiter  son  voisin  de  la  rive 
droite. 

Puisse  Port-Say,  mieux  adniiinslré.   siir\ivre  à  son  tbndaleui-  ! 

Quoi  qu'il  advienne,  le  nom  de  riioinme  entreprenant,  énergique, 
qui  eut  l'audace  d'aller  jilanter  sa  lente  sur  les  rives  du  Kiss, 
pour  y  étendre  la  prédominance  française,  doit  rester  inscrit 
au  Livre  d'Or  des  grands  colons  algériens.  Le  souvenir  de  L.  Say 
ne  disparaîtra  pas;  malgré  les  erreurs  commisses  son  œuvre 
ne  doit  pas  être  condamnée  à  périr. 

La  Société  de  Géographie,  dont  M.  L.  Say  faisait  partie  depuis 
1904,  salue  la  mémoire  de  ce  vaillant  champion  de  la  colonisation 
française,  et  présente,  aux  familles  atteintes  par  re  deuil, 
l'expi^ession  de  ses  sincères  condoléances. 

F.  D. 


Commandant  JEANNEY.  -  Lieutenant  PAGAN 


Le  4  octobre  1905,  sur  le  froiu  do  Champagne,  un  obus  allemand 
a  fait  deux  glorieuses  victimes  parmi  les  membres  de  la  Société  de 
Géographie  d'Oran. 

Sous  un  violent  bombardement  le  commandant  d'Artillerie 
Jeanney  et  le  lieutenant  d'Artillerie  de  réserve  Pagan,  son  adjoint, 
pour  r-elever  l'énergie  de  leiu's  hommes  ébranlés,  et  leur  donner 
l'exemple  du  sang-froiil  et  du  mépris  du  danger,  avaient  parcouru 
le  front,  à  découvert  sous  la  pluie  de  fer.  Ils  venaient  de  se  mettre 
au  travail  avec  l'adjudant-chef  de  la  batterie  et  un  canonnier, 
lorsqu'un  obus  pénétrant  dans  leur  abri,  tua  sur  le  coup  les  deux 
orticiers,  blessanfmortellement  l'adjudant-chef,  et  blessant  giiève- 
nient  l'artilleur. 

Fils  de  ses  œuvres,  le  commandant  Jean-Baptiste  Jeamiey  avait 
fait  toute  sa  carrière  dans  l'Artillerie.  Appelé  au  corps  le  3  novem- 


406  NÉCROLOGIE 

bre  1879,  il  conquit  rapidement  les  premiers  grades,  et  le 
31  mars  1888,  au  sortir  de  l'Ecole  de  Versailles,  il  était  nommé 
sous-lieutenant.  En  1894  il  était  envoyé  à  Oran  comme  lieutenant, 
passa  capitaine  en  1897,  fit  partie  des  colonnes  d'opération  de  Figuig 
en  1903,  et  des  colonnes  opérant  dans  l'Amalat  d'Oudjdaen  1907  et 
1908.  En  1911  il  était  nommé  au  commandement  de  l'Artillerie  des 
Confins  Marocains  et  du  Groupe  de  marche  d'Oudjda.  Le 
commandant  Jeanney  avait  pris  part  au  bombardement  de  Zenaga 
et  aux  affaires  de  Foum-Sefrou,  d'Aïn-Sfa,  de  Béni-Ouzzian,  de 
Bou-Denib  et  d'Aïn  El  Arba. 

A  l'occasion  de  ce  dernier  combat,  il  était  cité  à  l'ordre  du  jour 
des  troupes  d'occupation  du  Maroc,  et  proposé  pour  le  grade  de 
lieutenant-colonel.  Il  fut  retraité  le  26  mai  1914,  puis  rappelé  à 
l'activité  à  l'occasion  de  la  guerre  contre  l'Allemagne  et  l'Autriche, 
et  cité  il  l'ordre  du  jour  de  son  Corps  d'Armée. 

Le  commandant  Jeanney  était  Officier  de  la  Légion  d'Honneur 
et  Officier  d'Académie. 

Marié  à  Oran,  il  était  attaché  à  l'Oranie  par  les  liens  de  la 
famille  et  par  de  nombreuses  relations  d'amitié. 

Il  appartenait  à  la  Société  de  Géographie  depuis  l'année  1906. 


Ingénieur  de  l'Ecole  Centrale  depuis  l'année  1904,  Guillaume 
Pagan,  après  avoir  participé  à  la  construction  du  chemin  de  fer  de 
Tlemcen  à  Marnia,  puis  des  chemins  de  fer  de  la  province  de 
Palencia  (Espagne)  était  appelé  à  Oran  comme  secrétaire  à  la 
Direction  de  la  Compagnie  de  l'Ouest  Algérien. 

Ses  merveilleuses  qualités  de  travail,  sa  haute  intelligence,  la 
sûreté  de  son  jugement  et  l'élévation  de  son  caractère  semblaient 
le  destiner  aux  plus  hautes  fonctions  dans  cette  Compagnie,  et  lui 
assurer  le  plus  brillant  avenir. 

Il  s'était  fait  inscrire  à  notre  Société  peu  après  s'être  fixé  à 
Oran,  en  1913. 

La  guerre  vint.  Pagan,  par  sa  situation,  était  non  mobilisable, 
mais  impatient  de  défendre  la  France  par  les  armes,  il  se  fit 
réintégrer  dans  le  service  actif.  Vaillant  officier,  il  ne  tarda  pas  à 
être  nommé  lieutenant,  et  son  commandant  l'ayant  particuliè- 
rement distingué,  se  l'attacha  personnellement. 

Ils  sont  morts  ensemble  ! 

Nous  saluons  ces  glorieux  soldats,  unis  dans  le  suprême 
sacrifice,  et  nous  leur  adressons  l'hommage  de  notre  reconnaissante 
admiration. 

A  leurs  familles,  à  leurs  veuves,  nous  offrons  l'expression  émue 
et  chaleureuse  de  notre  profonde  condoléance. 

E.  FLAHAULT. 


i 


NÉCROLOGIE  407 


HiLAiRE    SOIPTEUR 


^  Le  4  octohio   1915  est   décédé,  à  lape  de  86  ans,  M.  Ililaire 
Soiptour,  l'un  des  plus  anciens  membres  de  notre  Société. 

Originaiiv  du  Doubs,  notre  regretté  collègue  s'était  installé 
comme  pharmacien  à  Tlemcen  en  1859.  Sa  culture  scientifique  le 
porta  bientôt  vers  les  études  agricoles  er  son  cœur  généreux 
l'mcita  à  participer  aux  œuvres  de  mutualité.  Avec  le  regretté 
M.  Havard  il  créa  le  Syndicat  Agricole  et  Viticnle  de  Tlemcen 
qui  est  resté  un  des  plus  tîorissants  de  l'Algérie. 

M.  Soipteur  fut  un  de  ceux  (pii  comprirent,  les  premiers  les 
avantages  (jue  devait  apporter  la  culture  de  la  vigne  en  Al-érie 
et  dans  la  région  de  Tlemcen  en  particulier  Suivant  son  exemple 
les  colons  de  la  plaine  de  Tlemcen  plantèrent  de  la  vigne  et 
s'assurèrent  une  large  aisance. 

A  la  Société  de  Secours  Mutuels,  M  H.  Soipteur  apporta  le 
concours  le  plus  dévoué  et  en  fut  un  des  plus  fervents  soutiens 
Aussi  il  ne  tarda  pas  à  mériter  l'estime  de  ses  concitoyens  Obli-é 
d'accepter  les  fonctions  de  Conseiller  municipal,  il  fut  élu  Maire 
de  Tlemcen  et  le  demeura  de  1871  à  1880.  Il  fut  aussi  Conseiller 
général  et  Vice-Président  de  cette  As.semblée.  Partout  il  se  fit 
remarquer  par  la  connaissance  approfondie  qu'il  avait  des  questions 
d  ordre  économique. 

Le  Gouvernement  de  la  Républi.jue  avait  reconnu  ses  services 
en  le  faisant  Chevalier  de  la  Légion  d'Honneur. 

Retiré  des  fonctions  publi-iues  il  resta  avant  tout  agriculteur- 
viticulteur,  il  mit  en  valeur  ses  terres  qu'il  exploitait  sci.mtili- 
quement,  il  en  fit  des  champs  d'expérience  où  les  colons  vinrent 
s  instruire  pour  mettre  ses  leçons  à  profit.  Il  fut  de  toutes  les 
associations,  de  tous  les  groupements  ayant  pour  but  de  servir 
luiteret  général.  Bon,  généreux,  affectueux,  il  est  mort  en 
emportant  l'estime  et  les  regrets  de  tous  les  hommes  de  bien. 
La  xûle  de  Tlemcen  et  les  villages  de  la  banlieue  ont  perdu  en 
M.  H.  boipteur  un  des  hommes  qui  se  sont  le  plus  dévoués  corps 
et  ame  à  la  prospérité  de  la  région. 

Au  nom  de  la  Société  de  Géographie  je  salue  la  mémoire  de 
notre  bien  regretté  collègue  et  renouvelle  à  sa  famille  l'expression 
de  nos  condoléances  attristées. 

F    D. 


408  NÉCROLOGIE 


Henry-Joseph    GILLOT 


Le  6  novembre  1915  s'est  éteint  à  Nice,  après  une  longue 
maladie.  M.  Henry  Gillot,  ancien  Vice-Président  de  notre  Société. 

Henry  Gillot  était  né  au  Havre  en  1851.  De  bonne  heure  il 
montra  les  qualités  qui  devaient  faire  de  lui,  un  homme  d'action. 

En  1870,  à  dix-neuf  ans,  il  s'engagea,  fit  campagne  et  se  fit 
remar(juer  par  sa  brillante  conduite.  Après  la  guerre  il  reprit  ses 
études  et  se  destina  à  l'enseignement.  Reçu  à  l'agrégation,  il 
exerça  d'abord  dans  plusieurs  Lycées  de  la  Métropole.  Des 
intérêts  de  famille  lui  firent  demander  une  chaire  au  Lycée  d'Oran, 
où  il  débuta  le  1"  octobre  1888.  Pendant  vingt-deux  ans,  jusqu'à 
son  admission  à  la  retraite,  en  1910,  il  se  dévoua  à  sa  tache  et  sut 
développer  chez  ses  élèves  les  qualités  de  cœur  et  d'esprit  qui  le 
distinguaient  lui-même. 

Mais  l'accomplissement  des  fonctions  universitaires  ne  suffisait 
pas  à  satisfaire  l'activité  débordante  du  professeur  de  rhétorique. 
Gillot  consacra  ses  loisii's  à  diverses  œuvres  postscolaires.  Il  prit 
surtout  en  mains  la  direction  et  l'administration  de  la  Société  pour 
l'Enseignement  par  l'Aspect  et  lui  donna  un  développement 
et  une  vitalité  qu'elle  retrouvera  difficilement. 

Au  mois  de  mai  1892  il  s'était  fait  admettre  à  notre  Compagnie. 
En  1898,  élu  au  Comité,  il  fut  nommé  Secrétaire-adjoint  pour  la 
Section  de  Géographie  et,  le  2  octobre  1899,  élevé  à  la  2''  Vice- 
Présidence. 

En  1902,  sur  la  proposition  de  notre  Société,  et  à  l'occasion  du 
Congrès  des  Sociétés  françaises  de  Géographie  tenu  à  Oran,  il  fut 
fait  Chevalier  de  la  Légion  d'Honneur. 

En  1903,  peu  satisfait  de  la  fâcheuse  direction  imprimée  à  la 
Société,  il  démissionna  du  Comité. 

En  1905,  voyant  le  mal  s'aggraver,  il  consentit,  sur  ma  demande, 
à  être  candidat  au  Comité.  Elu  il  ne  voulut  accepter  que  la 
1"  Vice-Présidence.  Il  conserva  cette  charge  jusqu'à  la  veille  de 
sa  mise  à  la  retraite,  en  1910. 

Dans  toutes  les  fonctions  qu'il  occupa,  dans  toutes  les  manifes- 
tations de  son  activité,  Gillot  se  fit  remarquer  par  une  grande 
puissance  de  travail  servie  par  une  vive  intelligence  et  par  une 
grande  facilité  d'élocution.  Il  se  montra  aussi  brillant  conférencier 
(ju'habile  administrateur  Comme  tout  homme  il  eut  ses  qualités  et 
ses  défauts  ;  s'il  fut  un  temptirament,  s'il  fut  un  caractère,  il  n'était 
pas  toujours  d'humeur  commode.  Très  personnel-,  parce  que  très 
sur  de  lui-même,  il  supportait  mal  la  contradiction  ;  mais  ses 
défauts  étaient  corrigés  par  la  notion  exacte  qu'il  avait  du  devoir, 
par  l'énergie  farouche  avec  laquelle  il  savait  défendre  ses  droits  et 


NÉCROLOGIE  400 

.sauvoi^îirihM-  son  iii(l{'|(i'iiil;uici'.  par  If  (lovoiiomoiii  ipi'il  apporiait 
aux  œuvres  (riiilérèt  général,  |iar  los  services  qn'i!  se  plaisait  à 
rondro  h  coiix  (|iii  faisaient  appel  à  son  coneoui's. 

Ponr  ma  pari  je  n'oublierai  jamais  —  et  la  Société  ne  doit  pas 
roul)lier  —  U)  service  que  Gillot  nous  rendit  en  190.").  Ce  lut  <rràce 
;ï  lui,  dont  les  opinions  poliii(|ues  étaient  liir-n  connues,  que  nous 
pûmes  déinontriM-  (jue  la  Répui)lii|iii'  ii'i-lait  nulli'MK'iit  i-n  danger 
parce  que  nous  voulions  luainii'uir  la  Sociélé  dans  la  voie  de  la 
neutralité  qui  lui  est  iiaciM'  pai'  ses  statuts. 

Pendant  les  cinq  années  (pi'il  exerça  la  Vice-Piésidence,  (iillot 
apporta  au  Comité  le  concours  éclairé  et  dévoué  do  son  tali-nl  et 
de  son  expérience.  Il  fut  mon  collaborateur  dans  l'élaboration  des 
nouveaux  statuts.  Gillot  doit  donc  compter  au  nombre  de  ceux  (|ui 
ont  le  mieux  servi  la  Société.  A  ce  titre,  je  salue  au  nom  de  tous 
les  sociétaires,  et  en  mon  notii  tout  particulièrement,  la  mémoire 
de  notre  bien  regretté  collègue  et  renouvelle  à  sa  veuve  et  à  sa 
famille  l'expression  de  nos  plus  vives  sympathies  et  de  nos 
condoléances  attristées. 

F.  DOUMEKGUE 


DÉSIRÉ    HEINTZ    Fils 


Un  nouveau  deuil  de  dixième  depuis  le  mois  de  juillet)  est  venu 
frapper  notre  Société.  M.  Désiré  Heintz  tils,  maître  imprimeur  à 
Oran,  est  décédé  subitement  à  l'âge  de  51  ans,  le  28  novembre  1915. 

Grande  fut  la  surprise  de  tous  ceux  qui  l'avaient  vu  encore 
la  veille,  travaillant  dans  ses  ateliers,  car,  né  dans  le  métier, 
le  connaissant  à  fond,  il  n'avait  pas  cessé,  quoique  patron,  <le 
manier  le  composteur.  Vivant  au  milieu  de  ses  ouvriers  il  était 
fier  d'en  être  l'ami.  Sous  des  apparences  rudes,  Désiré  Heintz 
cachait  un  cœur  d'or;  sa  bonté  était  légendaire.  La  condition 
modeste,  en  laquelle  il  se  plaisait,  ne  l'empêcha  pas  de  diriger  avec 
intelligence,  avec  le  sens  des  besoins  du  jour,  la  maison  paternelle 
dont,  lui  et  quatre  de  ses  frères  avaient  pris  la  succession  à  la 
mort  de  leur  regretté  père  Désiré  Heintz  survenue  en  1907  ; 
il  s'appliqua  à  en  améliorer  les  louages,  à  en  développer  les 
ressources,  à  satisfaire  une  clientèle  commerciale  de  plus  en  plus 
exigeante. 

A  rencontre  de  ce  que  l'on  constate  malheureusement  trop  sou- 
vent, la  réussite  dans  les  atlaires  n'étoufta  pas  en  Désiré  Heintz  les 


410  NÉCROLOGIE 

sentiments  généreux  ijui  l'avaient  toujoiu-s  distingué  ;  il  aimait, 
après  ses  journées  bien  remplies",  à  chercher  le  repos  dans  les 
satisfactions  intellectuelles,  il  consacrait  ses  soirées  à  apporter 
son  concours  à  diverses  œuvres  d'intérêt  pubhc.  Il  fut  le  fonda- 
tinn-  de  la  société  musicale  1'  w  Association  Artistique  d'Oran  » 
(jui,  avec  son  appui,  ne  cessa  de  prospérer.  Il  en  fut  le  Vice- 
Président.  En  récompense  des  services  rendus  il  reçut  les  Palmes 
Académiques. 

La  Société  de  Géographie  dont  il  fut  le  membre  fidMc  lui  restera 
reconnaissante  d'avoir  bien  voulu  y  prendre  la  place  de  son  père 
et  d'avoir  associé  ses  fils  à  l'appui  moral  et  pécuniaire  qu'il  lui 
apportait. 

A  Madame  Veuve  Désiré  Heintz,  à  ses  enfants,  à  ses  frères,  k 
toute  la  famille  la  Société  renouvelle  l'expression  de  ses  plus 
sympathiques  condoléances. 


TAIJU:   DES  MATIÈRES 


SOCIÉTÉ   DE   GÉOGRAPHIE    ET   D'ARCHÉOLOGIE 


PROVINCE     DORAN 


TOME  XXXV.  —  1915 


Pages 

Burciiii   et  Comité   adminisfmlif  de   la   Société    3 

Liste  générale  des  Mombres  de  la  Société    4 

Sociétés    correspondantes     iq 

Procès-verbaux  des   réunions  de  la   Société    iia,   22/1,  38; 

Compte  rendu    de   l'année    191  '1    22- 

Mouvemenl    de    la    Bibliothèque    288,  3f)5 

Concours   de    la    Société    en    1915    2/17 

Ferdinand    Blanche.    —    ^fonographie    do    la    commune 

d'Aïn-el-Turck     :>  i 

M.  Petit  (Capitaine).  —  De  la  frontière  oranaise  à  Taza.       <(> 

Noël  (Cajtitaine).  —  Documents  pour  servir  à  l'histoire 
des  Hamvan  et  de  la  région  qu'ils 
occupent  (à  fniivre)    121,     ^^q 

D""  \A  ATEM-,  —  Liste  des  végétaux  recueillis  pendant  la  re- 
connaissance de  Monsieur  le  capitaine 
Martin  dans  VErg  /guirfi (Sahara), mars- 
avril    igiS    i()S 

C.  Ben  Danou.^ —  Contrihntion  à  l'étude  de  l'industrie  pas- 
torale en  Algérie.  Rôle  mécanique  des 
vents  dans  la  répartition  des  fourra- 
ges steppiens.  Comment  densifier  les 
herbages     206 


ll'i  TABLE    DES    MATIERES 

Pages 

F.  DouMERGUE.  —  Note  sur  la  plage  (rAïn-el-Tiirck   ....      2i3 

Guillaume  et  Luuillier. —  Observations  météorologiques 

faites  à  la  station  de  Santa- 
Cniz    219,     371 

C.  Ben  Dvnou.— Contriliiiliou  à  rrliidc  de  l'industrie  pas- 
torale en  Algérie.  Des  tiappes  d'halfa 
et  de  leur  rôle  au  pays  du  mouton.  Uti- 
lisation du  bouss  d'halfa   3o4 

G.  Djian.  —  Vers  le  Tchad 3i8 

A.  TouRMER.  —  Mouvement  de  la  naA'igation  dans  les 
ports  du  département  d'Oran  pendant 
l'année  igi/i.  Mouvement  commer- 
cial          373 


BIBLIOGRAPHIE 


A.  Cour.  —  Recueil  des  texte?  législatifs  et  juridiques 
concernant  les  Israélites  de  Tunisie  de 
1867  à  191 3,  annotés  et  commentés  par 
R.   Arditti    221 

F.  Doumergue.  —  Les  Archives  Berbères,   par  le  Comité 

d'étnde!^   berbères  de  Rabat    -222 

Ed.  DÉciiAUD.  —  Le  Maroc,  par  \\iguslin  Rfrnard 38i 

—  L'Allemagne   d'Outre-Mer,    grandeur   et 

décadence,    par  Camille  Fidel    ....      38i 

F.  Doumergue.  —  Deux  stations  nouvelles  de  pierres 
écrites  (gravures  rupesires)  décou- 
vertes dans  le  cercle  de  Djelfa  (Al- 
gérie),  par  G.-B.-M.   Flamand    .  .  .     382 

—  Recherche    par    leurs    influences    des 

eaux  souterraines,  des  corps  en- 
fouis ou  dissimulés,  des  gisements 
méitallifères,    par  Henri   Mager...      383 


TABf.E    DES    MATIÈRES  413 

Pagee 

\1)Im''  l'vHni:.  —  Mi;iiiii<<;i.  MdiK  niiomli,  \iiii()iiii;i.  Pro- 
miric  [liiilif  :  Kliiiinissa  (|)rcmicr  f;is- 
ciiiilc).    ii;ii-    Sl(''[(li;in('    Csi-i,! ^H/i 

I!.  Fi.\ii\i  r.i.  —  |)i-((iiirs  <iir  rr-vuliitidii  des  rrmnaisp.'in- 
(■(•<  en  liisloirc  naliin'llc.  par  Geor- 
y^cs    l*iiNNKTii:u    ?>Ht\ 


-\ÉCHULUGIK 


Lieutenant-Colonel  Maury    117 

Commandant  Cottenest    1 19 

Pierre   Carra fang    o45 

Jean-NniM   Roman     o/i6 

Angélique  Capifalji     4o.< 

Gustave   Vallois    4o;î 

Louis   Pou?seur    4o3 

Louis   Say    'jo't 

Commandant   Jeanney    ^o5 

Lieutenant   Pagan    4o5 

'i;i',<'^î"/^  Soipteur    ',07 

Henry-.Idsepli    Gillol    4o8 

Désiré  Heintz  fils   4o() 


CARTE    DE    LA     RÉGION     PRINCIPALE    D'ÉVOLUTION     DES    HAMYAN 


SOCIÉTÉ 


DE 


D'ARCHÉOLOGIE 


DE 


LA     F»FlOVI]NrGE     D'ORAPsT 


fondée:    en    1SV8 


TOME     XXXVI.     —     1916 


ORAiN 


Imprimerie    Typographique    et    Lithographique    L.    FOUQUE 
Il  et  6,  Rue  Thuillier  (Place  Kléber) 


Société  de  Géographie  et  d'Archéologie 

DE    LA    PROVINCE    D'OR  AN 
7,  Rue  Schneider,  ORAN 


COIVirTE    ADMINISTRATIF    DE    LA    SOCIETE 

1915- 19  h; 


MM.   Arambouih;  Camille. 
Bascuung  (Général). 
BiiHE.M;F;K(C()inmand'). 
Dangles. 
déciiaud. 
dolmekgl'e. 
DiPLY  Charles 
Fabre  (Abbé). 
Flahault. 

H  LOT. 
KniÉGER. 


MM.    Lami  i\  l.Diiis. 

LEMOrSîSON. 
UE    PaCIITERE. 

Pellet. 

PÉREZ. 
POCK. 

Pontet. 

René-Leclerc. 

Roux-Freissineng. 

Sanduas  (Docteur). 

TOUR.MER. 


BUREAU    DE    LA    SOCIÉTÉ 


Président 


MM.  Doumergue. 


1"  Vice- Président  : 

2"   Vice-Président  : 

Secrétaire  général  : 

Trésorier  : 

Bibliothécaire-archiviste  : 

Secrétaire  pour  la  Section  géographique 

Secrétaire-adjoint  id. 

Secrétaire  pour  la  Section  archéologique 

Secrétaire-adjoint  id. 


Général  Baschung. 
Flahault. 

Com'  BÉRENGER. 
PoCK. 
TOLRMER. 
DÉCHAUD. 

Le. MOISSON. 
.Vbbé  Fabre. 
Aramboi  KG. 


COMMISSION    DU     BULLETIN 


MM.     DOU.MEHGUE. 

Baschung  (Général) . 
Flahault. 


ALM.     BÉRENGER. 
DÉCHAUD. 

.\bbé  Fabre. 


COMMISSION     DES    FINANCES 


MM.    Dangles. 
Pontet. 


PRÉSIDENTS    D'HONNEUR 

MM.   Le  Gouverneur  général  de  l'Algérie. 

G.   IIanoïaux,   membre  de  l'Académie  Française,   ancien 

ministre  des  Affaires  Étrangères,  i5,  rued'Aumale,  Paris. 

Le  général  Lyautey,  Résident  général  de  France  an  Maroc. 


VICE-PRÉSIDENTS    D'HONNEUR 

MM.   Le  Préfet  du  département  d'Oran. 

Le  Général  commandant  la  Division  d'Oran. 
Maurice  Varnier,  Haut  Commissaire  du  Gouvernement  de 
la  République,  Oudjda  (Maroc  Oriental). 


MEMBRES    D'HONNEUR 

MM.   Le  Sénateur  du  département  d'Oran. 

Les  Députés  du  département  d'Oran. 

Le  Président  du  Conseil  général  d'Oran. 

Le  Maire  d'Oran. 

A.  HÉRON  DE  Villefosse,  membre  de  l'Institut,  i5,  rue 
Washington,  Paris, 

René  Cagnat,  membre  de  l'Institut,  96,  boulevard  Mont- 
parnasse, Paris. 

Le  Général  Marchand,  explorateur,  20,  rue  du  Comman- 
dant Marchand,  Paris. 


PRÉSIDENT    HONORAIRE 

M.  MoNBRUN  Théogène,  avocat,  3,  rue  El  Moungar,  Oran. 


MEMBRES    HONORAIRES 


MM.  Binger,  explorateur. 
Caron,  id. 

Monteil,       id. 


MM.   Nansen,  explorateur. 
Trivier,         id. 
Verminck,      id. 


i 


DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  L'HISTOIRE  DES  RAMYAN 

et  de  la  Région  qu'ils  occupent 
(Suite  et  Carie  -J ) 


Cil  \]MTI;k  VI 

I/INSI  KKIXTION   ni:  HOl    A.^IAMA 


En  février  1881,  le  lieiilciiaiit  de  Bannières,  du  lînrean 
arabe  de  Sebdou,  fut  envoyé  snr  les  llauls-I'laleaux,  acconi- 
[la^^né  de  linterprèle  ^  alJet.  Il  avait  pour  instructions  de 
eliereher  à  rassurer  les  popidations  d  d'étudier  éjj-alenient 
quel  eniplaeenienl  conviendrait  le  mieux  j)our  l'inslalla- 
lion  d'un  nouveau  poste. 

Comme  chef-lien  du  nouveau  cercle  que  Ion  désirait 
créer  dans  celte  région,  il  préconisa  Tiout  ;  on  ajiHuna 
momentanément  la  construction  du  poste  projeté,  car  de 
Dfiaves  événements  obligèrent  à  faire  face  à  um^  nouvelle 
situation. 

  la  fin  de  188 1,  le  général  Delebecque  choisit,  au  lieu  de 
Tiout,  Aïn-Sefra  comme  étant  le  point  le  mieux  placé  pour 
surveiller  tous  les  débouchés.  Au  cours  des  troubles  qui 
agitèrent  alors  cette  contrée,  on  se  contenta,  ainsi  cpi'on  le 
verra,  de  réoccuper  Aïn-Ben-Khelilabandonnédepuis  1807. 

Les  prévisions  du  général  Gérez  s'étaient,  en  effet,  justi- 
fiées. Le  6  avril  188 1,  le  bachagha  de  Frenda  avisait  le 
commandant  de  la  Division  d'un  complot  ourdi  à  l'instiga- 
tion du  marabout  Bon  Amama  et  dans  lequel  étaient  en- 
trées toutes  les  tribus  du  cercle  de  (léryville  et  les  Rezaïna 
de  Saïda.  Quehjucs  jours  après,  le  lieutenant  Weinbrenner, 
du  Bmeau  de  Géryville,  détaché  chez  les  Djerama,  était 
assassiné.  Au  mois  de  mai.  les  Hamyan  Djemba  insoumis 
venaient  à  Moghar  grossir  les  rangs  des  insurgés. 

Sans  perdre  un  instant,  on  forma  des  colonnes  pour  châ- 
tier les  dissidents  et  donner  confiance  aux  tribus  restées 
fidèles.  Leur  concentration  eut  lieu  à  Sebdou,  Daya,  déry- 
ville,  Frenda  et  Tiaret. 

Tandis  que  la  colonne  de  Géryville,  sous  les  ordres  du 
général  Collignon,  se  dirigeait  sur  Ghellala,  la  colonne  de 
Daya  opérait  dans  la  région  des  Ghotts  oranais. 


6  DOCLiVIENTS  POUR  SERVIR  A  l'iUSTOIRE  DES  HAMYAN  ^ 

Colouiies  de  Da.va  et  de  («éry ville  (mai  18S1).  —  Celte 
dernière  fut  réunie  le  6  mai  1881,  sous  tes  ordres  du  colonel 
Mallaret,  de  la  Légion  étrangère  ;  elle  comprenait  le  3''  ba- 
taillon de  la  Légion,  un  escadron  de  chasseurs,  deux  esca- 
drons de  spahis  et  200  goumiers  des  Béni  Mathar.  Elle 
gagna  Bou  Guern  le  12,  puis  rétrograda  à  El  Hammam  où 
elle  leçul  un  lenfoil  de  deux  compagnies  du  i*"""  Balaillon 
d'infanterie  légère  d'Afrique  et  une  section  d'artillerie  de 
montagne. 

Après  avoir  suivi  l'Oued  El  Hammam  jusqu'à  Djerf-El- 
Korab,  elle  arriva  le  20  mai,  en  contournant  les  bords  sud 
du  clîott  Ghergui,  à  Oglat  Serour.  Elle  franchit  le  Djebel 
Amrag  et  fit  séjour  à  Eekarine  pendant  que  la  cavalerie, 
envoyée  à  Bir-el-Amia,  ramenait  un  convoi  de  vivres  venu 
de  Saïda. 

Le  29,  elle  était  rejointe  par  la  colonne  de  Géryville  dont 
le  commandement  était  passé  au  colonel  Innocenti.  Gelui- 
ci  avait  pris  la  direction  que  nous  avons  indiquée  plus  haut 
et  s'était  heurté,  le  19  mai,  aux  bandes  de  Bou  Amama,  à 
Mouallak,  défilé  en  avant  de  Ghellala.  L'engagement  fut 
rude  et  les  deux  partis  s'en  attribuèrent  le  succès.  L'ennemi 
perdit  dans  ce  combat  200  hommes  ;  la  colonne  qui  avait 
eu  de  son  côté  60  morts  et  22  blessés  se  porta  le  lendemain 
sur  Ghellala,  puis  sur  Asla,  d'où  elle  remonta  plus  au  Nord 
pour  s'arrêter  à  Eekarine. 

Le  3o  mai,  les  deux  colonnes  se  portèrent  siu'  Bir-el- 
Amra  au-devant  du  général  Déirie,  f|ui  arrivait  d'Oi-an 
pour  prendre  le  commandement  des  troupes  du  colonel 
Innocenti. 

Pendant  cette  marche,  l'insurrection  avait  pris  des  pro- 
portions inattendues.  Bou  Amama  avait  exploité  comme 
un  succès  le  combat  de  Mouallak  et  rallié  de  nouveaux  par- 
tisans. Dans  le  but  de  cerner  le  marabout,  cinq  groupes 
furent  formés  et  répartis  de  la  manière  suivante  : 

i''''  Gioupe  fcolonne  de  Tlemcen)  eut  la  surveillance  de  la 
zone  comprise  entre  la  frontière  marocaine  et  Bou  Guern  ; 

2"  Groupe  (colonne  du  colonel  Brunetière)  fut  installé  à 
Medrissa,  face  à  Géryville  ; 

?>^  Groupe  fcolonne  du  colonel  Mallaret")  eut  la  suiveil- 
lance  de  la  zone  compiise  entre  Bou  Guein  et  Sfissifa  ;  il  fut 
chargé  de  ravitailler  le  5^  groupe  et  de  lui  prêter  son  con- 
cours ;  il  élaii  installé  au  KreidcM-  ; 

f\^  Groupe  l'coloime  venant  de  la  province  d'Alger)  occupa 
Tiaret  ; 


Koci  \ii;n  I  s  i><M  it  --i:u\  m  \  i   iii>r(^inF  des  m  \mv\n  / 

y  (JroujK'  icoloiiiic  l(''}4('i('  (iii  ^M'-néiiil  Dririci  ciil  pour 
mission  tic  clicrclicr  le  (((iilacl  de  rciiiifini  cl  de  le  poiii- 
Sllivrc.  l'olllH'c  (le  r;iii(iciiiic  ((ildiiiic  liiiiocciili,  ccllr 
lioiipc  (-oiii|ii'ciiail  un  hal.'iilloii  du  ■>.''  Tiiailicui  s,  un  halail- 
lon  du  •''  Zouaves,  deux  couipa^niics  du  i"  lialaillon  d'Afii- 
tpie,  un  escadron  de  spahis,  trois  escadrons  de  ehasscins 
<r\t'ii(pie  e|   deux   ^e(li<i|i-  d  aililleiie  île  inojda^Tlc. 

Coloiiiies  Détric  et  .>lallaret  (juin  ISSI).  —  Des  coinrieis 
annoncèreni  alors  la  |)i<''sence  de  Hou  Ainania  à  Hen  llallal). 
A  celle  nouxclle,  la  colonne  Mallurel  se  mil  en  foule  sur 
Tismouline  |)ar  Ogial  Mcnesia  cl  llaci  lladri. 

I']n  même  tcm[)s  i  iti  juini  le  {jfcncral  Dctric  parlil  à  la 
rccheiche  du  uKuaboul.  Arrivé  à  Ben  llallal)  sans  avoir 
ri(Mi  rencontre,  il  s'arrèla  à  Kheneg  Azir,  où  il  laissa  son 
con\()i  avec  un  bataillon  de  Légion  sous  les  ordres  du  com- 
maniianl  l.al'on.  ('elui-ci  eut  avec  rpielques  rebelles  un 
(Migagemenl  peu  important  [i  i  juin),maisqui  dénota  aussi- 
tôt le  voisinage  de  Bou  Amama,  lequel  remontait  en  effet 
vers  le  X(Md.  Prévenu  par  dépêche,  le  général  Déliic  crui 
avoir  bienlôl  le  contact  qu'il  désirait. 

Four  parer  à  toute  éventualité,  le  commandani  Lafon 
remoida  jus(|u"à  Sfissifa  et  le  colonel  Mallaret  l'cvini  sui'  ses 
pas  au  kreider,  éclairé  toujours  i)ar  les  goums  des  B(Mn 
Mathar. 

Pendant  ce  temps,  poussant  audacieusement  leur  mar- 
che vers  le  Nord,  les  contingents  d(^  Bou  Amama  ra/ziaienl 
les  chantiers  d'alfa,  brûlaient  la  station  de  Kralfallah,  n)as- 
sacralenl  les  Européens  qui  n'avaient  pas  voulu  fuir. 
D'ajirès  un  renseignement  foiuni  |)arlecommandant Lafon, 
ils  abandonnaient  ensuite  la  dircclion  du  Nord  pour  retour- 
ner à  Cdiaïi',  pai"  El  May  et  Sidi-Klielifa  ;  le  i8  juin  ils 
étaient  à  Fekarine  après  être  passés,  le  i5  juin,  à  portée  de 
fusil  de  la  colonne  Mallarel,  dont  le  chef,  pour  des  raisons 
ine\pli(piées.  refusa  d'ordonner  d'atta(pier. 

C'esl  en  \ain  (pie  nos  colonnes  cherchèrent  à  les  attein- 
dr(\  Après  (piehpies  avantages  remportés  sur  des  groupes 
isolés  de  dissidents,  le  général  Délrie  arriva,  le  19  juin,  au 
Kreider  que  le  colonel  Mallaret  venait  d'abandonner  pour 
s(>  lancer  très  tardivement  à  la  poursuite  de  l'insaisissable 
marabout  :  il  ne  pouvait  que  le  suivre  d'étape  en  étape. 
C'était  en  outre  la  période  des  fortes  chaleurs,  aussi  l'ordre 
fut-il  donné  d'interrompre  les  opérations.  La  colonne  de 
Mallaret,  dont  le  chef  fut  relevé  de  son  commandement  et 
mis  à  la  reiraite  d'olTice,  devini  colonne  d'observation  et 


O  DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  L  IflS  l'OIRE  DES  HAMYAN 

fut  envoyée  à  Ras-el-Ma  ;  le  lieutenant-colonel  .Tanin  en 
reçut  le  commandement  (6  juillet). 

Pour  proléger  le  Tell,  quatre  fortes  colonnes  fiuent  alors 
établies  sûr  les  points  suivants  : 

Ras-el-Ma  (Lieutenant-colonel  Janin)  ; 

Kreider  (Colonel  Swiney)  ; 

Tiaret  (Colonel  Brunetière)  ; 

Géryville  (Commandant  Tadieu,  en  altendanl  l'arrivée 
du  colonel  de  Négrier  nommé  à  la  Légion). 

Bou  Amama,  pendant  ce  temps,  avait  rassemblé  ses  con- 
tingents à  Touadjeur  ;  par  une  série  de  coups  de  main,  il 
parvint  à  recruter  de  nouveaux  partisans,  plus  par  la 
crainte  (pie  par  la  persuasion.  Le  5  juillet,  il  descendit  jus- 
qu'à Méchéria  ;  le  7  il  remonta  à  Fekarine  et  voulut  sur- 
prendre la  garnison  du  Kreider.  Celle-ci,  composée  de  trois 
compagnies  de  tirailleurs  (commandant  Jac(piey),  gardait 
le  convoi  de  la  colonne  Détrie  partie  en  reconnaissance.  Le 
marabout  subit  un  échec  et  se  retira  sur  Bedrous. 

Il  voulut  s'en  venger  sur  les  Harraf  Gheraba  restés  fidè- 
les, en  allant  vider  leurs  silos  à  Zindi,  au  Sud  de  Tiaret  ;  il 
ne  put  y  parvenir  et  dut  se  contenter  de  razzier  quelques- 
uns  de  leuis  troupeaux  à  Aïn-el-Hadid.  Ce  fut  son  seul  suc- 
cès. Le  géncial  Détiie  le  força  à  se  rabatlre  vers  l'Est  (i5  juil- 
let) et,  à  Medrissa,  la  colonne  et  les  goums  de  Tiaret  le  bous- 
culèrent et  l'obligèrent  à  s'enfuir  vers  le  Sud  sans  avoir  pu 
emporter  son  butin. 

Colonne  Ducliesiie  (Juillet  à  octobre  1881).  —  Le  lieute- 
nant-colonel Duchesne  qui  avait  pris  le  commandement 
de  la  colonne  de  Ras-cl-]Ma  ne  put  donner  à  ses  troupes  le 
repos  qu'elles  méritaient.  11  dut  chercher,  vainement  d'ail- 
leurs, à  couper  par  El  Thmimam  la  route  aux  Rezaïna  qui 
venaient  de  partir  en  dissidence,  abandonnant  la  colonne 
Swiney  C[u'ils  étaient  chargés  d'éclairer. 

Il  est  intéressant  d'insister  sur  cet  incident  qui  a  été 
raconté  de  la  façon  suivante  par  M.  le  commandant 
Graulle,  ancien  Chef  de  Bureau  arabe  : 

«  Les  Rezaïna,  comme  toutes  les  tribus  sahariennes  voisi- 
(I  lies  du  Tell,  avaient  appris  dans  les  derniers  jours  de  juin 
<(   ([ue  Bou  Amama  préj)ara!t  une  nouvelle  expédition'. 


I  On  les  nv:iil  prévcmi?  f|iio  Ifp  rolicllps  nvnioiil  f:ii(  ferrer  leurs  chevaux.  Or, 
les  Sahariens  ne  font  ferrer  leurs  nuintmes  ([n'nn  rïiomcnt  de  partir  en  expé- 
dition. Chez  eux,  l'expression  :  «  Ils  font  ferrer  »  on  simplement  :  «  Ils  fer- 
rent )i  (en  arabe  «  isemerou  »),  signifie  :  «  Ils  vont  se  mettre  en  campagne  ». 


DOCUMENTS  POIR  SKRVIH  A  r.'ll  fs  IT  )I  KF  DES  HVMVAN  9 

"  (  li;ii^ri;iiil  |miiii  Iniis  ciiiiipciiiciiN,  <|iii  se  1 1 1  )ii\  ;iiriil 
iilois  h  'l'iin(.lliis  et  (lu'ils  tic  jnun  iiinil  piolr^ici'  ciiv  jiir- 
iiics,  ciir  ils  rlîiiciil  cmploN t's  ;'i  hi  ((iloimc  du  krci<lf,i 
;i\cc  Irms  ciiN  iilicr-,  les  ciiïds  de  ces  d(ii\  liihils  siip- 
plit'-rciil  r;iiilni  iU'  de  leur  pcriiiclli  c  d'ciiN  <i\  ci  Iciir.s  fcm- 
\\\i-^.  Iiiiis  cnriiiils  cl  Iciiis  lr(tii[)c;iii\  ;m  Nord  de  Siiïdii, 
cil  Iciriloirc  c'nil.  où  ils  x'iaiciit  en  >rirelé.  Le  (loiii- 
iiiaiidiiiil  Sn|)i'>i  ieiii  li'iiiisiiiil ,  le  :>.-  Juin,  leur  deiiiMiide 
au  (léiicral  i\v  I^i\  isioii  dans  les  Ici'nies  sui\  aiils  : 

«  Los  caïds  Sassi  ef  >f()hamnied  bon  Chakor,  des  Hozuïna, 
\ioinienl  d'anivor  à  Saïda,  a[jrès  axoir  obtenu  inie  per- 
mission lie  liuil  jonrs  du  commandant  de  la  colonne  du 
Kreidor.  ('os  doux  chefs  indi<îonos  m'ont  manifesté  dos 
craintes  sérieuses  an  sujet  do  leurs  troupeaux  et  m'ont 
demandé  lautorisation  d'inslalloi'  leurs  campi^ments 
elle/,  les  Oulad  Kraled  (".heraga  (Nord-Est  do  Saïdaj. 
«  Le  caïd  Sassi,  f)articulioromont,  a  beaucoup  insisté. 
\ Oici  le  résumé  de  sa  conversation  : 

<<  Bon  Amaina  est  furieux  contre  nous,  les  Rezaïna,  et  a 
juré  do  nous  razzioi'.  Les  colonnes  que  vous  pourrez  pla- 
cer le  long  du  cliotl  ne  nous  protégeront  pas.  Le  mara- 
bout passeia  facilement  entre  vos  troupes,  soyez-en  sûr, 
ef  viendra  nous  prendre,  n'importe  oià  nous  serons,  à 
moins  cependant  que,  prévenus  à  temps,  nous  puissions 
nous  réfugiei"  sous  les  murs  de  Saïda.  Nous  ne  sommes 
pas  on  sûreté  dans  nos  campements  actuels  au  Nord  do 
Tafaroua. 

«  Vous  verrez  (juo  le  marabout  viendra  nous  prendre  et 
nous  obligera  à  le  suivre.. Nous  serons  forcés  do  nous  sou- 
met Ire  i'i  lui.  .le  tiens  à  vous  prévenir  du  danger  qui  nous 
menace.  Si  vous  no  pouvez  nous  autoriser  à  nous  établir 
chez  les  Oulad  Kraled,  laissez-nous  aller  au  milieu  des 
Hamyan.  Si  vous  doutez  de  notre  fidélité,  nous  vous  lais- 
serons nos  enfants  en  otage. 

«  Avec  les  Hamyan,  nous  ne  craignons  rien  et  mémo,  si 
vous  voulez  nous  adjoindre  le  gouni  des  Boni  ]Mathar, 
nous  nous  chargerons  d'aller  razzier  les  Traffi.  .Te  tiens  h 
vous  le  répéter,  Bon  Amania  ne  fera  aucun  cas  de  vos 
colonnes  et  il  ira  très  loin  dans  le  Tell.  11  sait  que  vos 
troupes  ne  peuvent  pas  lutter  do  vitesse  avec  les  siennes 
et  que  les  Arabes  du  Tell  sont  des  feniincs  ;  ils  no  lui  tire- 
ront pas  un  coup  de  fusil.  11  iia  tios  loin. 
(I  Enfin,  si  vous  no  pouvez  pas  nous  laissoi-  aller  ni  chez 
(  les  Oulad  Kraled,  ni  chez  les  Hamvan,  mettez  au  moins 


10         DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'iIISTOIRE  DES  HAMYAN 

((   une  colonne  devant  nos  canipcnients,  à  El  Beïda  ou  à 
«   Sfid,  car  celle  du  Kieider  ne  nous  protège  pas. 

<(  Avant  peu,  vous  verrez  que  tout  ce  ({ue  je  vous  prédis 
((  arrivera. 

((  Tel  est  le  langage  que  m'a  tenu  le  caïd  Sassi,  et  il  a 
((  beaucoup  insisté  pour  que  je  vous  rapporte  ses  paroles. 

<(  Le  Général  de  Division  aurait  voulu  donner  satisfaction 

«  aux  Rezaïna,  mais  il  ne  put  le  faire  parce  que  l'autorité 

((  civile  s'y  opposa.  Elle  refusa  de  recevoir,  même  tempo- 

((  rairement,  des  indigènes  sur  son  territoire  et  contraria, 

«  en  outre,  l'action  de  l'autorité  militaire  lorsqu'elle  vou- 

((  lut,  pour  protéger  ses  administrés,  transporter  la  colonne 

«  du  Kreider  à  Sfid. 

<(  La  colonne  du  Kreider,  écrivait,  le  ?>o  juin,  à  la  Divi- 
((  sion,  le  Commandant  Supérieur  de  Saïda,  est  beaucoup 
((  trop  éloignée  du  Tell  pour  pouvoir  le  protéger  d'une 
((  manière  efficace.  Entre  ce  point  et  la  région  oii  sont  ins- 
((  tallés  les  premiers  campements  de  nos  tribus  (Timetlas), 
<(  se  trouve  une  bande  de  terrain  de  plus  de  cinquante  kilo- 
<(  mètres  de  largeur,  nue,  déserte  et  d'accès  facile  à  la 
((  cavalerie. 

«  Les  contingents  ennemis  pourront,  évitant  notre 
((  colonne  du  Kreider,  par  une  marche  hardie  et  rapide, 
«  arriver  au  milieu  de  nos  tribus  et  être  maîtres  de  la  situa- 
«  tion,  au  moins  pendant  quarante-huit  heures  ;  puis,  une 
((  fois  leur  coup  de  main  fait,  retourner  dans  le  Sud  sans 
«  courir  aucun  danger. 

«  De  plus,  le  Kreider  est  marécageux  et  malsain  surtout 
((  pendant  la  saison  des  chaleurs.  Pour  toutes  ces  raisons, 
((  la  colonne  me  semblerait  mieux  pl-acée  à  Sfid  ou  à  El 
((  Beïda. 

u  Le  général  se  rendit  à  ces  raisons  et  donna  l'ordre,  le 
<(  !*'■  juillet,  à  la  colonne  du  Kreider  de  s'établir  à  Sfid. 
«  Mais  le  maire  de  Saïda  ^  protesta  contre  ce  déplacement, 
«  faisant  valoir  que  l'abandon  du  Kreider  laisserait  àdécou- 
«  vert  Marhoum,  oh  la  Compagnie  Eranco-Algérienne  pos- 
«  sédait  quelques  établissements  a  et  il  fit  appuyer  sa  récla- 
«  mation  par  le  Préfet. 

<f  Le  général  Gérez,  qui  était  à  ce  moment  attaqué  d'une 


I   C'était  M.  Engler,  directeur  de  l'exploitation  de  l'alfa. 
T  Elle  avait,   en   effet,  à   Marhoum,  tête  de   ligne  de  son    cvploitalion,   une 
demi-douzaine  de  mauvaises  baraques  en  planches. 


DOCUMENTS  POUR  SKHVIR  A  l'il  IS  I  <  )|HE  DES  HAMYAN  1  t 

«  fiiroii  \i(»l('iil('  |)iir  lii  |)ic'ssi'  oraiiaisc,  n'osa  pii^  (l('(il.iii(' 
((   à  ce  liaiil  f(tii(li(tiiiiaii('  cl  donna  conlrc-ordic 

«  La  ((lionne  S\\inc\  icsla  (ionr  au  Ktcidcr,  laissant  en 
((    prise  les  Irihns  du  lenitoiic  de  cotninandcrnent. 

('  Aussi,  le  (i  juillet.  lors(|ue  eclles-ci  appiirent  la  niai- 
((  elle  du  niaïahout,  elles  décani()èrent  pr(''(ipilanuuent  et 
((  \ini'enl  sinslidlei'  elle/  les  l)oui  l'Iiabet,  à  :>  kilomètres 
(I  au  Sud-KsI  de  Saïda,  sur  un  [tialeau  loelieux,  entrecoupé 
«  de  ravins  escarpés  et  ne  renfermant  que  de  mai<;res  cl 
«    rares  cuit  mes,  ce  (pii  écailait  toute  crainte  de  débats. 

((  Malgré  cette  circonstance,  l'autorité  civile  exigea  (pi'on 
<(  chassât  ces  tiibus  de  son  territoire  et  mit  l'autorité  mili- 
<(    taire  en  demeure  de  le  faire. 

((  Je  l'cprodnis  une  partie  de  la  correspondance  échangée 
((  à  ce  sujet.  Klle  montrera  le  mauvais  esprit  dont  fit  preuve 
«  l'administration  ci\ile,  en  refusant  son  concours  [)our 
«  protéger  des  tribus  (|ui,  après  s'être  compromises  à  notre 
«  service,  se  trouvaient  sérieusement  menacées. 

((  Je  cite  d'abord  la  demande  qu'adiessa,  le  i^""  juillet,  le 
((  Conuuandant  Supéii(>ur  de  Saïda  à  l'Administrateur  de 
((  cett(^  counnune  mixte  pour  le  prier  de  donnei'  asile  aux 
«  Rezaïna  sur  son  territoire  : 

«  Monsieur  l'Administrateur, 

<'  J'ai  l'honneur  de  vous  prier  de  vouloir  bien  me  faire 
«  connaître  si,  (hi  cas  de  besoin,  je  pourrais  autoriser  les 
«  T^ezaïna  à  aller  camper  momentanément,  à  Dra-Ed-Driss, 
«   tribu  des  Oulad  Kraled  Cheraga. 

((  Ces  deux  tribus  craignent  un  coup  de  main  des 
«  rebelles  et,  dans  les  endroits  de  mon  cercle  oii  je  pour- 
((  rais  mettre  leurs  troupeaux  à  l'abri,  il  n'y  a  ni  eau,  ni 
«  pâturages. 

«  J'ai  déjà  écrit  à  ce  sujet  à  M.  le  Général  commandant 
«   la  Division,  qui  m'a  prescrit  de  m'entendre  avec  vous.  » 

(I  L'Administrateur  refusa  et,  lorscpie  les  Oulad  Daoud  et 
«  les  Piezaïna,  forcés  par  les  circonstances,  vinrent  se  réfu- 
«  gier  sur  le  plateau  rocheux  dont  j'ai  parlé  plus  haut,  il 
«  prolesta  auprès  du  Commandant  Supérieur  ;  n'obtenant 
((  pas  satisfaction,  il  s'adressa  au  Sous-Préfet  de  Mascara, 
((  qui,  le  II  juillet,  écrivit  la  lettre  suivante  au  Général 
«  commandant  la  Subdivision  : 

«  Monsieur  le  Général, 

»  Monsieur  l'Administrateur  de  la  commune  mixte  de 
<(  Saïda  m'informe  que  les  Oulad  Daoud  sont  entrés  en 


12         DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

«  territoire  civil  dans  le  douar-communc  des  Doui  Thabct, 
«  et  qu'ils  ont  campé  avec  leurs  troupeaux  au  milieu  des 
«  champs  d'org-e  et  de  blé,  qui  sont  aujourd'hui  ravagés. 

«  Ces  mêmes  Oulad  Daoud  ont  l'intention  de  prendre 
((  les  troupeaux  du  douar  partiel  des  Djebarat  ;  le  président 
«  du  douar-commune  de  Doui  Thabet  me  l'affirme  i. 

«  Je  vous  prie,  Monsieur  le  Général,  de  me  faire  con- 
<(  naître  quelles  sont  les  mesures  que  vous  pouvez  prendre 
((  pour  arrêter  ces  vols  et  ces  déprédations  qui,  depuis  quel- 
((  que  temps,  deviennent  journaliers. 

((  Si  vous  vous  croyez  impuissant  à  les  réprimer,  je  vous 
«  serai  reconnaissant  de  me  le  faire  savoir  pour  que,  de 
«  mon  côté,  je  prenne  les  dispositions  nécessaires  pour 
((  faire  respecter  les  récoltes  et  les  troupeaux  de  mes  admi- 
«  nistrés.  » 

Lettre  de  l'Administrateur  au  Commandant  Supérieur  de 
Saïda,  à  la  date  du  12  juillet. 

((  Monsieur  le  Commandant  Supérieur, 

((  M.  le  Général  commandant  la  Subdivision  a  dû  vous 
<(  conununiquer  hiei-  une  lettre  de  M.  le  Sous-Préfet  de 
((  Mascara,  au  sujet  du  campement  du  douar  des  Oulad 
«  Daoud,  dans  le  territoire  du  douar-commune  de  Doui 
«  Thabct,  et  vous  donner  des  ordres  pour  faire  rentrer  ces 
((  indigènes  en  territoire  de  commandement. 

((  Ces  ordres  n'ont  pas  été  exécutés  ;  en  effet,  un  cavalier 
«  que  je  viens  d'envoyer  sur  les  lieux  m'informe  que  la 
'<  famille  du  caïd  El  Bou  Anani  est  elle-même  campée  en 
{(  territoire  civil  et  que  les  frères  de  celui-ci  ont  formelle- 
ce  ment  déclaré  qu'ils  resteraient,  quand  même  et  malgré 
<(  vous,  dans  le  douar-commune  de  Doui  Thabet  -. 

«  Conformément  aux  prescriptions  de  la  dépêche  de 
((  ]M.    le   Général    commandant    la    Subdivision,    en    date 


1  La  tribu  dos  Oiilar]  Dnoticl  était  l;i  plus  sage  et  In  plus  dévouée  de  toute  la 
contrée  ;  c'était  en  outre  la  plus  influente.  Le  caïd  des  Doui  Thabet,  mis  en 
demeure  de  désigner  les  indigènes  de  cette  tribu  qui  avaient  manifesté  l'in- 
tention de  voler  des  troupeaux  à  ses  administrés,  se  récria,  disant  qn'il  n'avait 
jamais  formulé  une  plainte  de  cette  nature.  Il  avait  simplement  signalé  les 
dégâts,  peu  importants  du  reste,  commis  par  les  Oulad  D:Toiid  dans  les  cul- 
tures de  ses  gens,  afin  que  ceux-ci  fussent  indemnisés. 

2  Voici  exactement  ce  que  les  frères  du  caïd  avaient  répondu  au  cavalier  de 
l'Administrateur   : 

«  Nous  paierons  tous  les  dégâts  que  nous  commettrons,  mais  nous  ne  pou- 
vons pas  partir.  Nous  aimons  mieux  subir  les  pimitions  que  no\is  inflisera 
l'autorité,  plutôt  que  de  nous  exposer  à  être  pris  et  massacrés  par  les  TrafTi.  » 

Pour  comprendre  la  frayeur  qu'avaient  des  rebelles  les  parents  du  caïd  Bou 


DOCTT>fENrS  POTIR  SKHVIR  A  l.'llISTOlRE  DES  HAMYAN         13 

((  (I  hier,  Je  prends  l;i  lilx'ih'",  diins  lu  circoiislaiM'c,  de  vous 

«  dciiiaiHlcr  de  mcllif  à  iii;i  disposition  la  loicc  supplétive 

<i  dt)rd  \()iis  dis|)os('/.,  (jour  ictiAoycr  de  la  coiiiiminc  inixic 

>'  les  litiit  douais  des  ()uiad   Daoud,   cpii   sy  sont   installés 

<<  iiré^ndiricmcnt.  J'aurai  llioîmcur  de  vous  adrcssci'  pro- 

<'  ciiainciiH'nt  la  liste  di'<  dégâts  commis,  j)our  (pie  les  (iio- 

■  piiétaires  du  blé  et  de  l'orge  cnle\és  ou  ia\agfés  par  les 
"  Oulad  Daoud  soient  i  iidemiljsés.  >> 

>'   ]|  est  bon  de  faire  reniarf|uer  ((u'au  moment  où  l  auto- 

■  ri  lé  civile  s'acharnait  à  demander  le  lenvoi  dans  le  Sud 
«  des  Oulad  Daoucï,  les  rebelles  se  trouvaient  à  El  Amial 
«  ('herguia,  à  jo  Hloinèties  de  Tafaroua,  campement  liabi- 

((   tiiel  de  ("elle  liibu.  T.e  général  G (pi;  command<iit   la 

<(  Subdivision  de  Mascaia,  était  nouvellement  arrivé  de 
«  France  et  ne  connaissait  rien  aux  choses  do  l'Algérie. 
«  C'était  un  homme  quinteux  et  bilieux,  ayant  constam- 
«  ment  la  menace  à  la  bouche  et  très  arabophobe  par-des- 
((  sus  le  marché.  De  plus,  il  avait  une  telle  crainte' de  l'au- 
"  torilé  civile  (pie,  pour  rien  au  monde,  il  n'aurait  voulu 
«  entrer  en  conflit  avec  elle  :  aussi,  obéissant  à  ce  senti- 
«  ment,  il  donna  l'ordre  de  tracjuer  comme  des  bêtes  fau- 
«  ves  tous  les  indigènes  du  territoire  militaire  qui  s'étaient 
<<   l'éfugiés  sur  le  territoire  de  la  commune  mixte. 

«  De  son  cM6,  le  Commandant  Supéiieur  de  Saïda,  ou 

«  plut(')t  l'oiruMer  (pii  en  remplissait  les  fonctions,  en  l'ab- 

I'  sence   du   lieutenant-colonel   Quarant(>   parti   en   congé, 

"  éiiiii  nn  vieux  chef  de  bataillon  d'un  légiment  de  T-igne, 

«  M.  Euzière.  (pii  venait  d'arriver  de  France  et  qui,  lui  non 

((  plus,  n'entendait  rien  aux  affaires  arabes. 

'<  Je  dois  dire  cependant  que  c'était  un  homme  fonci('- 

<(  rement  honnête  et  qui  ne  manquait  pas  de  fermeté.  Il 

'(  trouva  très  exagérés  les  ordres  du  général  ;  mais  n'étant 

<(  pas  sûr  de  lui,  il  n'osa  faire  entendre  aucune  protesta- 

«  tion.  Tl  apporta  toutefois  beaucoup  de  tempérament  à 

«  l'exécution  de  ces  ordres,  cheichant  à  concilier,  dans  la 

'(  mesur(>  du  possible,  les  devoirs  de  la  discipline  avec  ceux 

«  de  l'humanité  ;  mais  il  eut  beau  faire,  les  vieillards,  les 

"  f(Mnm(>s  et  les  enfants  des  Rezaïna  et  des  Oulad  Daoud 


Aiiiiiii.  il  f;mt  se  r;ippeler  que  ce  fut  uii  des  frères  de  ce  clief  indijrèue.  notnuié 
Djelldul,  qui  lira  le  premier  coup  de  fusil  nu  combat  de  Sfissif^i  cl  qui  \\i,<  le 
ravalier  des  Derrapa  qui  délinil  notre  iroum  eu  brandissant  son  arme. 

De])uis  cette  affaire,  les  Tralïi  en  voulaient  beaucoup  à  celte  famille  et  il 
est  certain  qu'ils  auraient  tué  impitoyablement  tous  ceux  de  ses  membres  qu.i 
seraient  tombés  entre  leurs  mains. 


14;         DOCUMENTS  POT  R  SERVIR  A  l'iIISTOIRE  DES  HAMYAN 

n'en  fuient  pas  moins  expulsés,  très  brutalement,  du 
plateau  rocheux  auquel  ils  se  cramponnaient,  par  peur 
des  rebelles,  e{  renvoyés,  malgré  leurs  supplications, 
leurs  larmes  et  leurs  gémissements,  dans  le  Sud,  où  ils  se 
IrouvaienI  sans  protection  ;  tous  leurs  goumiers  étaient 
absents,  ils  faisaient  le  service  d'éclaireurs  à  nos 
colonnes. 

«  Inutile  de  dire  le  sentiment  qu'éprouvèrent  les  cava- 
liers de  ces  tribus,  lorsqu'ils  apprirent  que  leurs  familles 
avaient  été  traitées  en  parias  à  Saïda.  La  surexcitation  fut 
surtout  très  viv^e  chez  les  Rezaïna,  qui  sont  excessivement 
vindicatifs.  Ils  n'en  laissèrent  rien  voir  ;  mais  ils  déci- 
dèrent séance  tenante  de  quitter  notre  territoire  et  d'aller 
se  réfugier  chez  leurs  amis  les  Doui  Menia. 
«  Le  12  juillet,  après  leur  départ  de  vSaïda,  ils  allèrent 
s'installer  à  l'Est  de  Timetlas,  à  i5  kilomètres  environ  de 
la  colonne  Swiney  qui,  ce  jour-là,  campait  à  Sfid  et,  le 
lendemain,  ils  gagnèrent  le  Kieider  en  suivant  la  vallée 
de  l'Oued  Falet. 

((  Poiu'  quitter  la  colonne  Swiney,  à  laquelle  ils  étaient 
attachés,  sans  éveiller  la  défiance  de  cet  officier  supérieur, 
les  cavaliers  des  Rezaïna  employèrent  la  ruse  suivante  : 
Le  i3  juillet,  vers  2  heures  de  l'après-midi,  alors  que 
leurs  campem(Mits  étaient  arrivés  avi  Kreider,  leurs  deux 
caïds  Sassi  et  Mohammed  bèn  Chakor  se  précipitèrent 
vers  la  lente  du  colonel  et  lui  demandèrent  l'autorisation 
d'aller  reconnaître  un  fort  parti  ennemi  que  leurs  éclai- 
reurs  venaient  d'apercevoir,  disaient-ils,  dans  la  direc- 
tion du  Sud.  Non  seulement  le  colonel  Swiney  accorda 
retl(>  autorisation,  mais  il  prescrivit  à  tout  son  gouiu  dese 
joindre  aux  Rezaïna.  Arrivés  à  [\  kilomètres  de  Sfid,  le 
caïd  Sassi  se  tournant  vers  les  goumiers  étrangers  à  sa 
tribu  leur  dit  : 

«  Il  est  inutile  que  vous  alliez  plus  loin  ;  retoura^z 
auprès  du  colonel  qui  a  sans  doute  besoin  de  vous  ;  quant 
à  moi  je  v^ous  fais  mes  adieux.  )> 

«  Les  caïds  du  goum,  comprenant  à  ces  paroles  que  les 
Rezaïna  partaient  définitivement,   supplièrent  Sassi  de 
renoncer  à  son  projet  et  de  revenir  avec  eux  au  camp. 
"Ce  n'est  pas  ma  tribu  qui  s'en  va,  répondit-il,  c'est 
l'autorité  française  qui  la  chasse.  » 
«  Et  il  continua  sa  route. 

<(  Le  lendemain,  il  écrivit  une  lettre  très  digne  au  com- 
mandant Euzière,  dans  laquelle  après  avoir  exposé  les 


DOCUMENTS  POUR  SKRVIK    \  I, 'HISTOIRE  DES  IIAMYAN         1") 

«  liiisoiis  (|ui    rii\;ii('iil   (l('(i(l('   i\    piiilii,    il   ;iiiiii)ii(;iiil   son 

«  iiilciilioM  crallcr  se  li\<'i  clic/  les  |)uiii  Mciiia  cl  jmail  de 

«  ne  pas  [(rendre  [)ail   à   rinsinrci  lion.    Il   i  cn  ieiidi  ail  sur 

■  nolic  leniloii'c  loi^i|iie  I  ordre  sciail  lélahli. 

>'    l.c  caïd  Sassi  linl  sa  paiole'.  l'endanl  son  scjoin-  chez 

«  les  Doiii  Meiiia.  il  aida  ces  nomades  à  coniballre  plusieurs 

.  de  lcni>  voisins,  iiolainni(>nt  les  Oulad  Sidi  (Ihcikii  Clie- 

(.  ra^a,   avec  lcs(piels  ils  olaieni   en  lullc,   mais  il  resta  à 

('  l'écail  des  rei)ellcs  cl  résista  même  aux  instances  pres- 

«  saules  de  Si  Sliman.  chef  religieux  des  Rezaïna,  c|ui  le 

«  priait    de    \('nii-    se    joindre    à    lui    |)our    attaquer    nos 

«  Ilamyan. 

<(  En  mai  1882,  Sassi  revint  siu'  nolie  territoire  avec  tous 

«  ses  genS".  » 

Pendant  (]ue  tous  ses  faits  se  déroulaient,  les  ilamyan 
étaient  gardés  j)ar  une  colonne  envoyée  d'EI-Aricha.  Cette 
surveillance  ne  fut  pas  toutefois  sufTisanle  pour  ein|)èc]iei' 
un  parti  de  dissidents  de  cette  liibu  (le  venii-  lazzier  les  Béni 
Mat  haï'.  Ceux-ci,  en  effet,  retenus  dans  nos  langs  par  leur 
sei\  ice  de  goumiers,  avaient  laissé  sans  défenseurs  leurs 
troupeaux  et  leurs  familles  qui  les  accompagnaient  au 
pacage. 

Tl  était  à  craindre  que  les  Béni  Mathai-.  mécontents  que 
nous  n'ayons  pu  les  protéger  contre  Icnu  s  agresseurs,  déser- 
tassent à  leur  tour.  Le  colonel  Duchesnc  jugea  prudent  de 
rester  dans  Ja  région  de  Bas-el-A[a,  envoyant  à  plusieurs 
reprises  des  reconnaissances,  soit  pour  protéger  les  Béni 


I  Personnollomcnf ,  cnr  les  Rezaïna  ne  se  firent  pas  fante  d'aller  grossir  les 
rangs  des  dissidents  et  d'attaqner  nos  colonnes. 

a  A  leur  rentrée,  les  Rezaïna  ne  furent  pas  inquiétés  et  aucune  punition  ne 
fut  proposée  à  leur  encontre.  L'anforité  civile  en  prit  prétexte  pour  entamer 
iitic  violente  campagne  de  presse  cunlre  l'autorité  militaire,  l'accusant  de  fai- 
jilesse,  et  réclama  un  châtiment  exemplaire  contre  ces  deux  tribus,  surtout 
conire  le  caïd  Sassi.  Emu  de  ce  bruit,  le  nouveau  Gouverneur  fiénéral,  M.  Tir- 
man,  demanda  des  explications.  L'autorité  militaire  lui  envoya  le  dossier  des 
Rezaïna  en  lui  disant  qu'il  lui  suiTlrait  de  lire  les  pièces  le  constituant  pour 
se  convaincre  que,  dans  la  circonstance,  ces  deux  tribus  avaient  été  plus 
malheureuses  que  coupables. 

M.  Tirman,  qui  était  un  administrateur  très  fin,  très  hal>ile  et  en  mêmic 
temps  un  homme  très  .juste,  partagea  celte  manière  de  voir.  Ne  voulant  pas. 
toutefois,  heurter  de  fmnt  l'opinion  publique,  il  décida  que  Sassi  ne  serait  pas 
rétabli  immédiatement  dans  ses  fonctions  de  caïd  (il  ne  le  nomma  que  trois 
mois  après),  mais  qu'il  resterait  le  chef  de  sa  tribu  jusqu'à  nouvel  ordre. 

L'opinion  publique  fut  enchantée  de  cette  solution  et  l'aulorilé  mililairi' 
aussi,  car.  au  fond,  il  n'y  a  pas  plus  de  différenc»-  entre  un  raid  et  un  chef  de 
tribu  qu'entre  bonnet  blanc  et  blanc  bonnet. 


16         DOCI  MENTS  POTTR  SERVIR  A  t/hISTOIRE  DES  HAMYAN 

Matliai'  coiitte  les  incursions  de  leurs  voisins,  soit  pour 
enlever  à  celle  Iribu  toule  intention  de  partir  en  dissidence. 

Au  mois  d'oclobre,  la  colonne  Duchesne  ([uilta  la  région 
des  (-holls  pour  se  diriger  sur  Méchéria.  De  nou\'elles  opé- 
lations  s'y  préparaient  sous  la  direelion  du  général  Dele- 
becfjue.  Il  fallait,  en  (uitre,  hàlei'  les  travaux  que  l'on  avait 
commencés  en  ce  point  pour  conlenir  les  approvisionne- 
ments nécessaires  aux  colonnes  du  Sud. 

On  voulait  en  finir  avec  Bou  Amama.Du  reste,  le  prestige 
du  marabout  élait  sérieusemenl  compromis  par  son  der- 
nier échec  et  les  défections  commençaient  à  éclaircir  ses 
langs  pour  grossir  le  nombre  des  partisans  de  Si  Sliman 
ben  Kaddour  qui  avait  profilé  de  tous  ces  désordres  pour 
reparaître. 

Colonne  de  Xéurier  (novembre  1S81  à  mars  18S2).  —  T^e 

comuiandement  de  la  colonne  destinée  à  opérer  dans  le 
Sud  Oranais  fut  confié  au  colonel  de  Négrier.  Son  ordre  de 
uiarcbe  est  resté  célèbre  et  a  servi  de  modèle  pour  les  opé- 
r-alions  conduites  ultérieurement  dans  cette  région. 

Les  troupes  étaient  divisées  en  deux  parties:  l'une  formait 
l'escoite  du  convoi  et  avait  pour  mission  de  le  défendre  en 
cas  d'altaque  ;  l'autre,  l'échelon  de  manœuvre,  devait 
rechercher  l'ennemi,  l'attaquer  et  le  poursuivre.  Cet  éche- 
lon marchait  habituellement  sur  le  flanc  le  plus  menacé, 
prêt  à  se  montrei'  partout  où  se  porterait  l'ennemi,  léger, 
n'ayant  pas  de  bagages,  débarrassé  même  de  ses  malingres 
laissés  au  convoi,  il  élait  très  mobile.  L'infanterie  marchait 
toujours  par  le  flanc  des  subdivisions  et  par  sections  acco- 
lées autant  que  possible. 

Au  départ  de  Méchéria,  accompagnaientje  conv^oi  :  deux 
bataillons  de  Légion  étrangère,  une  batterie  d'artillerie,  un 
escadion  de  cavalerie.  Ils  étaient  répartis  ainsi  qu'il  suit  : 
l'escadron  de  chasseurs  en  avant  et  sur  la  droite  de  la  direc- 
tion suivie  par  la  colonne  ;  un  bataillon  de  garde  au  convoi 
(une  compagnie  en  tête,  deux  sur  chaque  flanc,  la  dernière 
formant  la  quatrième  face  du  carré).  La  batterie  et  un 
bataillon,  fournissant  une  compagnie  d'arrière-garde  de  la 
colonne,  se  trouvaient  à  l'échelon  de  manœuv're. 

Les  compagnies  marchaient. par  le  flanc  droit  et  par  sec- 
lions,  les  chefs  de  section  à  la  queue  de  leur  unité.  La  garde 
de  jiolice  ayanl  les  hommes  punis  sous  sa  surveillance, 
marchait  en  tête  de  la  pi'cmière  face  derrière  le  guide. 

Enfin,  l'ordre  indiquait  à  chaque  fraction  sa  place  dans 
la  colonne,  l'emplacement  au  campement  en  arrivant  à 


DOCIJMEMS  |.()I   |{  si:in  IH    \   I.IIISTOIUK  DKS  lf\.MVA\  17 

rt'lilpc  et  rnitlidil  DM  se  lictlduiil  |r  cdloiirl  ))rii(liiii|  |;i  i,,j|,- 
clic.  Les  biillciics  cl  sdiiiiciic^  riiiciil  rcnipliicccs  p;ir  un 
seul  coup  (le  hiiijuiic. 

l'oiii  le  bi\(iiiiic,  if  caiiii»  (''|;iit  jiiloiirir  à  ra\;iiicc  pai  (jiia- 
h-ccavali.  rs  iiidifpiaiii  les  iHi^Hcs.  (  :iia(|iic  conipa^rnic  devait 
rocoimaîlrc  iimiicdialciiierit  son  em|)lacenicid  et  sans  s'oc- 
cuper de  sa  voisine.  Celle-ci,  si  elle  clail  d'anière-garde, 
pouvait  installer  ses  tentes  après  ralij^nenient  des  fais- 
ceaux, sine  de  n'être  pas  dérangée  [dus  tard. 

I.e  col()nel  de  -Négri(>r  (piitta  Méchéria  Je  3o  novembre. 
II  suivit  l'itinéraire  diiecl  i)ar  .\aama  et  Arekalis  et  arriva  le 
:>.  décembre  à  Aïn-8efra  aprè.s  avoir  longé  le  Djebel  Aïssa  ; 
sur  I  un  des  sonnnels  de  cette  chaîne,  on  pouvait  apercevcwr 
alois  le  nouveau  poste  optique  qui  venait  d'être  créé  pour 
nielire  en  communication  Aïn-Sefra  et  Méchéria. 

Le  lendemain,  la  colonne,  après  s'être  réapprovisionnée, 
quittait  ce  poste  pour  aller  opérer  dans  le  Nord  ;  le  4,  elle 
était  à  Magroun,  le  5,  à  Aïn-Iîen-Khelil.  L'ancienne  redoute 
étad  complètement  abandonnée  ;  les  murs  seuls  restaient 
debout  servant  de  perchoirs  à  de  nombreux  pigeons  sau- 
vages. La  toiture  et  les  fenêtres  avaient  été  enlevées  pen- 
dant la  dernière  insurrection  par  Si  llamza,  qui  les  avait 
fait  porter  à  Tiout. 

Un  arrêt  de  trois  jours  en  ce  point  fut  employé  à  consti- 
tuer une  section  franche  sous  les  ordres  du  cai)itaine  Lafcr- 
rière,  du  lieutenant  Massone  et  du  sous-lieutenanl  Chabrol. 
A  l'effeclif  de  54  hommes,  montés  sur  des  mulets,  elle  com- 
prenait les  six  meilleurs  tireurs  de  chacjue  compagnie, 
quatre  caporaux  et  deux  sergents.  Elle  était  destinée  à^opé- 
i-er  avec  la  cavalerie  et  le  goum  du  commandant  Sch un- 
dans  des  raids  et  comme  avant-garde. 

Le  9  décembre,  le  colonel  de  Négrier  repartait  en  recon- 
naissance vers  le  chott  Gharbi.  Après  avoir  fait  loo  kilo- 
nièties  en  quarante-huit  heures  en  dissimulant  sa  marche, 
le  conunandant  Schurr  tomba  avec  le  goum,  la  cavalerie  et 
la  section  franche  sur  les  Mehaïa  à  la  pointe  du  troisième 
jour.  Sinpris,  ces  nomades  s'enfuirent  abandonnant  tout. 
Le  reste  de  la  colonne  le  rejoignit  bientôt  et  les  /,.ooo  mou- 
tons lazziés  furent  ramenés  à  Aïn-Ren-Khelil. 

Après  un  court  séjour  pendant  lequel  les  convois  de  ravi- 
taillement eurent  à  supporter  des  bourrasques  de  neige,  la 
colonne  prit,  le  i»;  janviei-  1882,  la  direction  du  Sud-Ouest 
par  Forlhassa  Charbia  et  llaci  Sefra.  L'objectif  était  un 
parti  de  Béni  Cuil  signalé  vers  le  chott  Tigri.  Le  goum, 


18  DOGLMEM'S  POUR  SERVJK  A  l'iIISTOIRE  DES  IIAMYAN 

passé  sous  les  ordies  du  capitaine  Lafenièie,  fut  chargé  de 
prendre  à  icvers  les  dissidents.  Le  coup  de  main  réussit 
coniplèlenient  ;  un  seul  goumier  fut  tué  ;  l'ennemi  eut 
/40  hommes  hors  de  comhat  et  la  razzia  fut  évaluée  à 
100.000  francs  ;  il  y  avait  g. 000  moutons  et  600  chameaux. 

Nos  troupes  ne  prirent  pas  le  temps  de  se  reposer  ;  le 
3o  janvier,  elles  traversèrent  le  chott  entre  Haci  Sefra  et 
Oglat  Moussa  et  regagnèrent  Aïn-Ben-Khelil  (2  février)  par 
Garet  Rima,  Galloui  et  Chaïb  Rassa. 

Le  20  février,  l'ennemi  fut  signalé  vers  l'Ouest.  Aussitôt 
le  colonel  de  Négrier  prit  les  disposi lions  suivantes  :  il  laissa 
à  Aïn-Ben-Khelil  une  garnison  de  /|00  hommes  dans  le  but 
de  parer  à  toute  éventualité  au  cas  oîi  l'ennemi,  évitant  la 
colomie,  viendiait  tenter  une  razzia  sur  les  Hamyan.  Avec 
le  reste  de  ses  troupes  il  se  porta  sur  El  Atticha,  Oglat  El 
Guetta  et  le  chott  Tigri. 

Nos  cavaliers  bousculèrent  dans  le  chott  Gharbi,  à  Oglat 
Moussa  ('>'-  février),  des  contingents  rebelles  et  la  section 
franche  appuya  cette  charge  en  couronnant  des  mamelons 
successifs  d'où  elle  faisait  des  feux  de  salve  sur  l'ennemi. 
Dix-huit  mille  moutons  et  5oo  chameaux  furent  capturés 
dans  cette  affaire.  Voulant  à  tout  prix  en  finir  avec  les 
insurgés,  la  colonne  continua  sa  marche  sur  Haci  Badda  et 
Mengoub.  Là,  on  apprit  qu'un  combat  livré  sous  Figuig 
par  le  commandant  Marmet,  venu  d'Aïn-Scfra,  rendait 
toute  poursuite  inutile.  Les  partisans  de  Bou  Amama  sur- 
pris avaient  dû  lutter  en  désespérés  pour  le  sauver  ;  ils 
avaient  abandonné  ainsi  62  cadavres  cl  80  tentes  dont  celle 
de  leur  chef. 

La  colonne  de  Négrier  rentra  à  Aïn-Ben-Khelil  (10  mars). 

Combat  du  chott  Tiîïri  (avril  1882).  -^  A  quelque  temps 
de  là,  une  mission  topographi(|uc  fut  envoyée  avec  le  capi- 
taine de  Gastries  qui,  avant  linsurrection,  avait  essayé 
d'arrêter  Bou  Amama,  les  lieutenants  Brosselard  et  Del- 
croix,  pour  relever  le  pays  parcouru  et  prendre  des  notes 
nécessaires  à  l'établissement  d'une  carte.  Elle  opéra  d'abord 
autour  d' Aïn-Ben-Khelil.  Après  une  revue  passée  par  le 
général  Saussier,  accompagné  des  généraux  Colonieu  et 
Gand  et  de  l'agha  Sahraoui,  de  Tiaret,  la  mission  fut  auto- 
risée à  partir,  le  18  avril,  poui"  le  chott  Tigri. 

Son  escorte,  commandée  par  le  capitaine  Barbier,  était 
composée  de  deux  compagnies  de  Légion,  d'une  section  de 
la  compagnie  franche  (lieutenant  Massone),  de  10  chas- 
seurs d'Afrique  et  10  goumiers.  Le  26  avril,  à  Ghoua  ben 


DOCl  MK.\JS  l'OlR  SKUVIK    \   l.'ll  IS  I  (  )l  lU;  IJES  IIAMYAN         19 

\la»li(iii(l,  elle  r;i/./iii  des  Uoupcaiix  (11111  paili  de  Mnii  (iiiil 
(|iii  ii°a\iiil  |ias  pris  [tari  à  l'iiisiii  ri-(-li«)ii  cl  caiiipa,  deux 
joins  apirs,  ;'i  Iliiri  hcii  Salem.  Les  lra\aii\  rlaiil  (ciiiiiiirs, 
le  caiiiii  lui  l(\('',  le  '(')  a\ril,  (lès  l'aube  el  la  iiiarelie  prise 
dans  j;i  direelion  de  loi  I  liassii  (iharhia. 

I.a  edidiiiie  eiilière  élail  en  inowveiiienl  lorsipie  lavanl- 
<jai(ie  se  licmla  aux  Heni  (Jiiil  enihuscpiés  deirière  une  série 
do  plis  de  leiiain  banani  le  [lassaj^c.  lin  niènie  lenips,  d'au- 
tres indigènes  atlacpiaienl  ta  colonne  de  liane. 

Va\  voyant  les  j)nsilions  occupées  j>ar  l'euneini,  h;  capi- 
taine Barbier  ordonna  une  volte-face  complète  et  résolut  de 
se  diriger  sm-  (lallonl  alin  d'éviter  les  gorges  très  diniciles 
dans  les(pielles  il  (>ùl  été  dc^  [)lus  dangei(>ux  de  s'engagei  . 
l,'a\  ant-garde,  composée  de  la  section  franche,  de\ijit 
ariièi  e-garde  et  dut  contenir  rennemi.  (lelui-ci,  voyant  la 
maïKx'iivre,  attacpia  avec  furie  cette  petite  troupe  et  la 
déborda  pour  euvelop|)ei-  le  con\oi. 

Les  légionnaires  souliiireiit  vaillamment  le  choc  ])oiu' 
])ermellre  à  la  colonne  de  [)reiidre  ses  dispositions  de  com- 
bat. ]*res(pie  tous  fuient  massacrés  et  le  lieutenant  Massone 
tomba  l'un  des  premiers.  Le  sous-lieutenant  Mcsnil,  (pii 
commandait  le  convoi,  s'arrêta  pour  soutenir  l'airière- 
garde  ;  un  grand  nombie  de  ses  hommes  furent  tués  et  lui- 
même  reçut  une  balle  à  J'épaule.  Il  dut  bientôt  battre  en 
retraite,  traînant  toujours  sa  razzia  qu'il  ne  voulait  pas 
abandonner. 

Cependant  le  nombre  des  Béni  Guil  augmentait  tou- 
jours ;  ils  s'élançaient  sur  les  rangs  de  la  petite  troupe  en 
vociférant  et  en  tirant  presque  à  bout  portant.  Des  femmes, 
acciochées  aux  selles  des  cavaliers,  encomageaient  les 
assaillants  par  leurs  cris.  C'était  un  vacarme  assourdissant. 

l.e  lieutenant  Weber  tomba  à  son  tour,  blessé  griève- 
ment à  la  cuisse.  Pour  éviter  une  catastrophe,  le  capitaine 
Barbier  ordonna  à  l'avant-garde  d'occuper  une  gara  aperçue 
à  quelques  centaines  de  mètres  en  avant  ;  il  voulait  y  placer 
son  convoi,  et  comme  cette  ])osition  commandait  bien  trois 
directions,  il  pensait  pouvoir  iitiliseï"  alors  la  supériorité  de 
notre  armement  et  sa  longue  portée. 

Avec  dix  hommes  le  lieut(Miant  Delcroix  se  lança  à  l'as- 
saut de  la  gara  et  au  cri  de  <<  En  avant  la  Légion  !  »  l'enleva 
à  un  gro>q)(>  (Minemi  (pii  l'occujjait  déjà.  C'était  le  salut  ! 
Toute  la  colonne  garnit  bientôt  la  position  et  put  arrêter 
ainsi  l'élan  d(\s  Béni  Cuil  ;  ceux-ci  se  jetèrent  sur  le  convoi 
et  reprirent  les  moutons  qui  leur  avaient  été  razziés  deux 


20         DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

jours  avant.  Le  capitaine  Barbier  fut  frappé  d'une  balle  en 
plein  cœur  et  le  capitaine  de  Castries,  dont  la  conduite  au 
cours  de  l'action  avait  été  des  plus  brillantes,  prit  le  com- 
mandement et  ordonna  la  retraite  sur  Galloul. 

Ce  combat  nous  coiàtait  cinquante  et  un  morts  et  vingt- 
sept  blessés.  Pendant  trois  heures,  les  légionnaires  avaient 
lutté  contre  un  ennemi  dix  fois  supérieur  en  nombre  et  lui 
avait  fait  perdre,  assure-t-on,  deux  cents  hommes. 

Une  dépêche  annonça  le  26  avril,  à  3  heures,  ces  événe- 
ments au  poste  d'Aïn-Ben-Khelil.  Une  colonne  partit  deux 
heures  après  et  trouva  au  bout  de  quarante-cinq  kilomètres 
le  détachement  campé  et  complètement  exténué.  Le  colonel 
de  Négrier  aurait  voulu  poursuivre  les  Béni  Guil,  mais  il 
reçut  l'ordre  formel  de  rentrei'.  Il  ramena  à  Aïn-Ben-Khelil 
les  corps  du  capitaine  Barbier  et  du  lieutenant  Massone  qui 
furent  inhumés  dans  le  cimetière  du  bordj.  (Un  monument 
fut  ékné,  par  les  légionnaires,  à  Méchéria,  au  pied  du 
Djebel  Antar,  pour  commémorer  l'héroïque  défense  de 
l'escorte  de  la  mission  topographique.) 

ColoniU'  Coloiiieu  (mars  1882). —  Lin  peu  plus  tard,  trois 
coloimes  fur(Mit  forjuées  sous  la  direction  du  général  Dele- 
becque  et  furent  concentrées  dans  la  région  d'Aïn-Sefra 
sous  le  commandement  des  généraux  Louis,  Colonieu  et  du 
colonel  de  Négrier  pour  essayer,  encore  une  fois,  de 
capturer  Bou  Amama. 

La  colonne  de  Négrier  eut  la  cojnposition  suivante  : 

i"  Avant-garde  :  une  compagnie  montée  à  mulets,  deux 
escadrons  de  chasseurs  d'Afrique,  3oo  goumiers  ; 

2°  Gros  de  la  colonne  :  deux  bataillons  de  Légion  étran- 
gère, une  compagnie  dû  4i"  de  L'igné,  une  section 
d'artillerie. 

Bou  Amama  était  signalé  entie  Bou  Arfa  et  le  Djebel 
Ghals,  à  Mader  Msarine.  La  colonne  se  dirigea  donc  sur  Aïji 
Defla.  Arrivés  là,  les  goumiers  trouvèrent  des  traces  ([ui 
indi(piaient  que  les  contingents  du  marabout  s'étaient  scin- 
dés en  deux  parties  ;  l'une  avait  pris  la  direction  du  Nord 
sur  Aïn-el-Orak  et  le  Djebel  Lakdar  ;  l'autre,  celle  du  Sud- 
Ouest  sur  Tannezaïa. 

C'est  la  première  fraction  que  le  général  Colonieu  prit 
comme  objectif.  11  installa  le  10  mai  son  bivouac  à  Aïn-el- 
Orak  et  chargea  l'avant-garde  d'aller  razzier  les  Oulad  Sidi 
Ali  dans  le  Djebel  Lakdar.  L'opération,  conduitepar  le  capi- 
taine Laferrière,  réussit  et  les  objets  trouvés  dans  les  douars 


DOGl  MEMS  POl  R  SEIU  lit  A  L'jlISiOtlΠ DES  HAMYAiN         21 

IKTiuiinil  dv  cuiislaU'i-  (jijc,  parmi  les  fuyards,  se  trou- 
Viiioiil  des  aj^rcssciirs  du  délacliciiicMl  du  capilaiiic  Jiailjiei'. 
I.e  capilaiiie  l.arciTièrc  sappièlail  à  icjoindre  le  gros  de- 
là colonne  (juand  le  colon. 1  de  \éoii,.i  lui  lit  parvenir  un 
billcl  ainsi  conçu  :  «  Accourez  a\ec  les  escadrons  de  chas- 
seurs el  les  gouuiiers  ;  iJou  Aniania  est  devant  moi.  Passez 
piu-  Aïn-el-Orak,  mais  ne  vous  y  arrêtez  pas.  » 

l.a  poursuite  recommença  avec  plus  d'ardeur  ;  le  1 1  mai, 
la  colonne  arrivait  à  Mengoub  et  y  étail  rejointe,  d'abord 
par  l'avanl-garde  (jui  lui  ramenait  3.ooo  moutons  enlevés 
en  roule  au\  Oulad  Sidi  Brahim  et  aux  llamyan  dissidents, 
et  ensuite  par  la  colonne  Marmet,  venue  d'Aïn-Sefra.  Celle- 
ci  venait  de  capturer  aux  Djcmba  ujo  chameaux,  et 
:S.ooo  moulons  près  d'Aïn-Chair. 

Hou  Amama  se  sentant  incapable  de  continuer  la  lutte, 
alla  chercher  un  refuge  dans  l'Exlrème-Sud.  Le  colonel 
-Marmet  reprit  la  roule  d'Aïn-Sefra,  tandis  que  l'autre 
colonne  remontait  sur  Aïn-Ben-Khelil  U9  niai)  k 

Pendant  ce  temps  les  troupes  d'El-Aricha  commandées 
par  le  lieutenant-colonel  Duchesne,  atteignaient,  le  17  mai, 
sur  l'Oued  Charef,  pour  venger  les  morts  du  chott  Tigri,  un 
parti  de  Béni  Guil  qu'elles  mettaient  en  déroute.  Ce  fut  la 
dernière  rencontre  sérieuse  de  cette  campagne. 

Au  cours  de  celte  lutte,  les  Djemba  qui  avaient  fait  une 
première  soumission  après  l'affaire  de  Medrissa,  étaient 
partis  en  dissidence,  à  la  nouvelle  de  l'arrestation  du  caïd 
des  Megan  pris  comme  otage.  Un  parti  rejoignit  Bon 
Amama,  les  autres  allèrent  retrouver  Si  Sliman  ben  Kad- 
dour.  Ils  furent  ramenés  par  les  caïds  Tahar  ould  Cheikh 
des  Oulad  Toumi,  et  El  Kébir  ould  llammou.  A  la  On 
de  1882, près  de  huit  cents  lentes  des  Djemba  étaient  venues 
se  placer  sous  notre  conunandement  ;  il  n'en  restait  plus 
que  deux  cents  au  Maroc. 

Pendant  ce  temps.  Si  Sliman  ben  Kaddour  avait  quitté 
la  ville  du  Maroc  où  il  était  interné  et  avait  réuni  autour  de 
lui  un  certain  nombre  de  dissidents  qui  n'avaient  plus  con- 
fiance dans  la  «  baraka  »  de  Bou  Amama. 

Parti  le  16  novembre  de  Mengoub,  à  l'Est  du  chott 
Charbi,  il  longea  le  choit,  puis  l'Antar  et  le  Djebel  Amrag 
et,  le  17  novembre  188 1,  à  la  tête  d'environ  200  cavaliers'i 
exécuta  un  coup  de  main  heureux  sur  les  Hamvan  restés 
fidèles,  campés  à  Ang-cl-Djemel  ;  c'étaient  tous  les  Beka- 

i  Nous  retrouverons  plus  loin  Bou  Amnma  opérant  contre  nous  dans  VEx- 
trême-Sud,  puis  dans  l'Ouest. 


ii2         DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  LllISTOIRE  DES  HAMYAN 

kia,  quelques  Beui  Methaief,  des  GiiiaUa,  des  Akerma,  des 
Oulad  Maiisourali  el  des  OuJad  Farès.  Jugeant  inutile 
d'atleiidre  nos  colonnes,  il  disparut  piécipitaninient  vers 
la  frontière  marocaine  par  le  col  d'El  Uuassa  doù,  par  la 
ligne  des  Meknien,  il  regagna  le  choit  Gliarbi,  jonchant 
sa  route  de  cadavres  d'animaux. 

Le  colonel  Jacquey,  qui  commandait  à  Méchéria,  envoya 
à  sa  poursuite  une  petite  colonne,  laquelle,  parvenue  à 
Fekarine,  dut  rebrousser  chemin  ;  il  lui  était  impossible 
de  regagner  l'avance  qu'avait  Si  Sliman.  Une  colonne 
envoyée  d'El-Aricha  ne  fut  pas  plus  heureuse. 

Les  victimes  de  Si  Sliman  adressèrent  à  l'autorité  fran- 
çaise une  réclamation  ;  on  leur  avait,  en  effet,  défendu 
depuis  1S77  toute  tentative  de  représailles.  Une  enquête 
minutieuse  fut  faite  par  le  capitaine  Cauchemez  pour  éta- 
blir l'importance  des  pertes  subies  ;  elles  furent  estimées  à 
.4^9.745  francs.  Conformément  à  la  politique  adoptée, 
M.  Ordéga,  notre  ministre  à  Tanger,  léclama  au  sultan  du 
Maroc  les  réparations  pécuniaires  dues  aux  llamyan.  Le 
Sultan  s'engagea  à  payer  intégralement  cette  somme  el 
prescrivit  à  l'amel  d'Oudjda  de  verser  immédiatement  un 
acompte  de  100.000  francs. 

Toutefois  il  présenta  en  même  temps  une  réclamation 
s'élevant  à  plus  de  1.800.000  francs  pour  pertes  inlligées 
par  nos  troupes  à  diverses  tribus  marocaines.  Des  pour- 
parlers et  des  discussions  sans  lin  s'engagèrent  entre  le 
Gouvernement  Général,  le  Ministère  des  Affaires  Etran- 
gères et  la  cour  de  Fez.  En  iS84,  la  question  n'avait  pas 
encore  reçu  de  solution  el  le  général  Détrie  au  cours  d'une 
tournée  fut  saisi  personnellement  d'une  réclamation  du 
caïd  des  Oulad  Mansourah  ;  il  transmit  la  requête  à  Paris. 
Deux  ans  après,  le  Maghzen  envoya  la  copie  d'une  lettre  de 
Si  Jiargach,  dans  laquelle  le  ministre  marocain  informait 
son  souverain  que  M.  Ordéga  avait  abandonné  le  reliquat 
de  l'indemnité  qui  restait  à  payer  après  le  premier  acompte 
de  100.000  francs. 

L'effet  moral  produit  par  celte  nouvelle  sur  nos  popula- 
li<ms  fut  assez  fâcheux.  Il  n'amena  heureusement  aucune 
(•onq)licalion  à  cause  de  notre  présence  permanente  dans 
ces  régions  et  à  cause  des  revenus,  souvent  considérables, 
qu'avaient  procurés  aux  nomades  le  service  de  nos  colonnes 
et  le  ravitaiUemenl  de  nos  li'oupes;  les  chameaux  de  ré(pii- 
sition  étaient  alors  payés,  en  effet,  à  raison  de  3  francs  par 
jour. 


DOCUMENTS  l'Ol  U  SlilU  \l\  A  Lllisiomt;  UtS  II  AMVA.N         5^-^ 

En  it'suiiié,  coiiiiiu'  iKJiis  ra\(jn6  l'iiil  ic66(nlir  précédeni- 
lueiil,  la  polilicjue  qnv  l'on  avait  suivie  dans  nos  relations 
de  vt»isinage  avec  le  Maioc  avait  été  une  des  causes  piinci- 
[)al('.s  de  l'accueil  revu  par  Hou  Amaina  chez  nos  adininis- 
Irés  dans  le  Suil  Uranais.  Dans  un  rapport  d'ensenibl»;  sur 
l'insurrection  de  i8î>i  adressé  le  i  "^  août  i88i5  au  Ministèn" 
des  Allaires  iiltiangères,  on  relè\e  le  passage  suivant  : 

<i  iNous  signalerons,  au  premier  plan  des  causes  qui  ont 
((  pu  favoriser  le  mouvement  insurrectionnel,  notre  res- 
«  pect  peut-être  excessif  dans  ces  dernières  années  du 
u  traité  de  i845  avec  le  iMaroc,  respect  résultant  d'une 
«  interprétation  sans  doute  trop  littérale  de  cet  acte  iriter- 
u  national.  A  une  attitude  généralement  très  énergique, 
«  on  a  cru  pouvoii',  dans  un  but  d"a[)aisement  et  de  conci- 
<(  liation,  substituer  l'action  presque  e.vclusive  de  la  diplo- 
((  matie.  Celle  action  comporte  forcément  une  certaine 
((  lenteur,  une  sorte  de  temporisation  sur  laquelle  nos 
«  sujets  ont  bien  pu  se  méprendre.  Les  gens  mal  inten- 
<t  tionnés  n'ont  pas  manqué  de  leur  représenter  ce  chan- 
«  gement  dans  notre  manière  d'être  comme  un  indice 
<(  d'impuissance  et  de  faiblesse  de  notre  part. 

«  Cette  application  des  clauses  du  traité  de  i84o  a  placé 
a  toutes  nos  populations  nomades  dans  une  sorte  d'infé- 
«  riorité  vis-à-vis  de  leurs  voisins.  En  interdisant  aux 
((  nôtres  le  droit  de  représailles  immédiates  pour  y  substi- 
<(  tuer  des  revendications  réclamées  par  la  voie  diploma- 
((  lifjue,  réparations  souvent  éludées  ou  accordées  tardive- 
<(  ment  et  d'une  manière  incomplète,  nous  avons  fait  le 
((  jeu  de  nos  ennemis.  Nous  avons  permis  à  ces  derniers  de 
«  propager  leurs  mensonges  sur  notie  situation  effacée 
((   depuis  nos  revers  en  Europe.  » 


* 

*  * 


Il  \  a  lieu  de  parler  ici  dune  mesure  que  les  nécessités  de 
la  situation  nous  contraignirent  de  prendre  en  1881  :  l'in- 
terdiction de  nos  marchés  aux  tribus  marocaines  qui  prê- 
taient aide  et  assistance  à  nos  insurgés  ou  leur  servaient 
d'intermédiaires  pour  se  ravitailler. 

«  Au  moment  où  l'insurrection  éclata,  cette  mesure  était 
déjà  appliquée  aux  Hamyan  Djembàa,  qui  s'étaient  retirés 
au  Maroc  ;  nous  dûmes  bientôt  l'étendre  à  presque  toutes 
les  tribus  de  la  frontière,   telles  que  Doui  iMenia,  Oulad 


24         DOCUME.M'S  POUU  .SERVIR  A  l'hJSTOIRE  DES  IIAMYAN 

Djerir,   Béni  GuiJ,  Mehaïa,   Angad,   Berii  bon  Hamdoun, 
Beiii  Jlamlil,  Béni  Malhar,  Béni  Yala  et  Sedjâa. 

((  Ce  furent  les  Mehaïa  qui  provoquèrent  les  premiers 
l'application  de  celte  prohibition.  Avant  l'insurrection,  ces 
nomades  nous  avaient,  en  plusieurs  circonstances,  mani- 
festé leurs  bonnes  dispositions,  mais,  au  fur  et  à  mesure 
que  le  mouvement  insurrectionnel  prenait  de  l'extension  et 
que  l'hoslililé  des  partis  marocains  s'accentuait  davantage, 
nous  dûmes  reconnaître  que  les  Mehaïa  ne  conservaient 
plus  à  notre  égard  la  même  attitude  qu'autrefois  et  que 
leur  caïd,  Saheli  ould  Bou  Beker,  en  particnlier,  usait  de  sa 
grande  influence  sur  les  tribus  de  la  région  pour  nous  alié- 
ner les  fractions  encore  hésitantes.  Malgré  cela,  il  conti- 
nuait à  rester  en  relations  avec  nous,  ne  cessant,  dans  ses 
lellies,  de  protester  de  son  dévouement  à  notre  cause.  Nous 
nous  refusâmes  longtemps  à  croire  à  une  pareille  duplicité 
et  ce  ne  fut  que  lorsque  nous  eûmes  la  preuve  de  la  con- 
duite^ déloyale  des  Mehaïa  et  de  leur  chef,  qui  avaient  pris 
une  pari  active  au  coup  de  main  exécuté  sur  notre  terri- 
loire  pai'  Si  Sliman  ben  Kàddour,  le  17  novembre  1881, 
([ue  nous  dûmes  décider  que  nos  marchés  de  la  frontière- 
leur  seraient  fermés  jusqu'à  nouvel  ordre. 

((  Cette  interdiction  fut  prononcée  d'un  commun  accord, 
avec  l'amel  d'Oudjda  qui,  de  son  côté,  avait  intérêt  à  tenir 
les  partisans  du  dést^rdre  le  plus  éloignés  possible  de  son 
lei  litoire  et  qui  avait,  du  reste,  reçu  à  ce  sujet  des  instruc- 
lious  foinielles  de  son  souverain.  En  ce  qui  nous  concer- 
nait, nous  ne  pouvions  admettre  que  des  caravanes  de  gens, 
dont  le  caractère  d'hostilité  nous  était  bien  connu,  fussent 
autorisées  à  venir  sur  notre  territoire,  pour  ravitailler  les 
rebelles  ou  se  ravitailler  elles-mêmes. 

«  Cette  mesure,  dont  les  Mehaïa  avaient  été  avisés,  dut 
recevoii"  son  exécution  dans  toute  sa  rigueur  et  c'est  pour  ce 
motif  (\uc  les  caravanes  cjui  n'en  ont  pas  tenu  compte  en  y 
contrevenant,  ont  été  arrêtées  et  saisies  chaque  fois  qu'elles 
ont  été  rencontrées  en  deçà  de  la  frontière,  au  Nord  de  la 
latitude»  de  Teniet  es  Sassi. 

('  En  avril  i883,  le  calme  étant  revenu  dans  l'Ouest  et  le 
Sud-Ouesl,  et  la  tranquillité  paraissant  rétablie,  le  Gouver- 
neui-  (^lénéral,  M.  Tirman,  sur  les  instances  de  l'amel 
d'Oudjda,  venu  le  saluer  à  son  passage  à  Lalla  Marnia,  leva 
l'inlerdiction  de  fréquenter  nos  marchés  prononcée  contre 
les  Mehaïa  et  tous  les  autiTS  ressortissants  marocains  de  ce 
fonctionnaire,  depuis  Figuig  jusqu'à  la  mer. 


DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l/niSTOlBE  DES  HAMYAN         25 

-'  On  ne  pciil  se  (lis>i  iniil»'i-  (|ii«'  ce-  iiicsiiio  [>i(  iliihil  iv<'s, 
iiii|Mis{M->  piir  les  iiécossités  (.lu  moiiicnl,  n'aient  eu  une. 
iiilliiciicc  l'àchciist'  sur  nos  roliilioiis  corniucrciulcs  iivcc  Ir- 
Miiioc,  cl  cclii,  (i'iuiliinl  plus  (|u"cll('s  onl  clé  [)ris('s  [)i('s(|uc 
iiu  iiKuiiciil  où  ri'lspiitjiic  l'iiisiiil  (le  Mclilla  un  poil  fiiinc'.M 


CMAFITHR  VII 

LE  (  i:i{(  i.i;  im:  )ir^;rnr:;KLV 


Nous  soiunies  obliges  de  revenir  Jégèicmcnt  en  arrière 
{)our  e\pos(;r  l'organisalion  adniinislralivc  à  laquelle  fui 
due  la  {^réalion  du  cercle  de  Méchéria. 

La  décision  du  général  Delebecque  concernant  la  créa- 
lion  du  posie  d'Aïn-Sefra  fui  suivie  d'une  exécution  immé- 
diate. !,('  l 'i  décembre  t88i,  nos  colonnes,  après  avoir 
opéré  dans  tout  le  massif  montagneux  entre  Aïn-Sfissifa  el 
Icli,  connnencèrent  la  construction  d'un  mur  d'enceinte 
provisoire  :  c'est  là  que  se  trouvent  actuellement  la  redoute 
et  les  établissements  militaires  de  cette  place.  L'endroit 
cboisi  ré[)ondait  en  tous  points  aux  nécessités  du  moment  : 
inlerinédiiiire  entre  Aïn-Sfissifa  et  Tiout,  Aïn-Sefra  se 
trouvait  au  centre  de  cette  région  de  ksour  où  nous  allions 
avoir  à  exercer  une  active  surveillance  ;  elle  avait,  en  outre, 
l'avantage  de  nous  installer  au  milieu  de  populations  où, 
jusfpi'alors,  toutes  les  bandes  de  malfaiteurs  avaient  trouvé 
un  refuge  assuré. 

Celle  installation  fut  ccmiplétée  par  l'établissement  de 
postes  intermédiaires  destinés  à  assurer  les  communica- 
tions et  à  couvrir  notre  flanc  vers  l'Ouest.  Le  plus  impor- 
tant de  ces  postes  fut  Méchéria,  situé  au  cœur  du  pays 
Hamyan.  Le  général  Colonieu  fut  chargé  de  l'organiser. 
A  son  arrivée,  il  ne  trouva  qu'un  ksar  en  ruines,  ayant  une 
source  assez  abondante  et  de  mauvaises  pistes  à  peine 
tracées. 

Méchéria  était  appelé  à  jouer,  au  début,  un  rôle  impor- 
tant au  point  de  vue  militaire,  non  scndement  ct^mme  cen- 
tre de  ravitaillement,  mais  encore  comme  première  base 


I  Lamartinièbe  et  Lacroix. 


26         DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'iTïSTOIRE  DES  HAMYAN 

d'opérations  au  Sud  des  chotts.  Ses  communications  en 
arrière  étaient  facilitées  par  l'existence  du  poste  du  Kreider 
et  par  l'établissement  de  la  voie  ferrée  que  l'on  devait  pro- 
longer. En  effet,  une  loi  du  8  août  i88t  avait  autorisé  le 
Ministre  de  la  Guerre  à  faire  construire,  comme  ligne  stra- 
tégique, un  chemin  de  fer  reliant  Méchéria  avec  la  ligne 
Arzew-Saïda.  Elle  fut  achevée  au  début  de  1882,  après  avoir 
été  concédée  à  la  Compagnie  Franco- Algérienne. 

Les  travaux  de  la  redoute  terminés,  grâce  à  l'activité  du 
colonel  Couston,  le  centre  administratif  des  Hamyan  fut 
reporté  d'Aïn-Ben-Khelil  à  Méchéria.  Dès  lors  cette  confé- 
dération allait  se  trouver  directement  en  contact  avec 
l'autorité  française  ;  les  causes  qui  avaient  pu  nous  con- 
duire à  chercher  à  réunir  dans  une  même  main  ces  turbu- 
lents nomades  allaient  disparaître  et  nous  allions  pouvoir 
les  maintenir  sous  notre  autorité  mieux  que  nous  n'avions 
pu  le  faire  jusqu'à  ce  jour. 

La  même  année  TtSSi)  des  postes  optiques  furent  ins- 
tallés aux  points  A,  B,  C  du  Djebel  Antar. 

Le  capitaine  Cauchemez,  les  lieutenants  Pémartin, 
Lechère  et  Cottin  de  Melleville  furent  les  premiers  officiers 
du  nouveau  poste.  Leur  tâche  fut  lourde  ;  de  toutes  parts 
les  difficultés  surgissaient  ;  difficultés  d'organisation,  diffi- 
cultés d'aménagement.  Immédiatement  ils  se  mirent  à 
l'œuvre  ;  sous  leiu'  direction,  des  pistes  furent  améliorées 
ou  créées,  des  points  d'eau  creusés.  Leur  présence  cons- 
tante au  milieu  des  tribus  produisit  les  meilleurs  effets 
et  permit,  en  peu  de  temps,  de  rétablir  à  peu  près  le  calme 
et  la  tranquillité. 

Dans  une  sphère  plus  élevée,  le  généra]  Thomassin, 
placé  à  la  tête  de  la  Division  d'Oran,  fut  chargé  de  procé- 
der, à  l'aide  de  moyens  pacifiques,  au  repeuplement  des 
territoires  du  Sud  Oranais.  Des  négociations  habilement 
conduites  par  l'intermédiaire  du  bachagha  de  Frenda, 
Si  Ahmed  ould  Cahdi,  aboutirent  au  retour  intégral  des 
Oulad  Sidi  Cheikh  Cheraga  et  des  nombreux  Hamyan  qui 
étaient  aA'cc  eux. 

Deux  événements  heureux  pour  notre  politique  complé- 
tèrent les  résultats  obtenus  ;  d'une  part,  Si  Sliman  ben 
Kaddour,  le  chef  militaire  des  Zoua  Gheraba,  fut  assassiné 
par  les  Beraber  ;  Bou  Amama,  d'autre  part,  sentant  la  lutte 
impossible,  alla  chercher  un. refuge  au  Gourara  dans  le  dis- 
trict de  Deldoul. 

Pour   tourner   la    difficulté,    en   ce   qui    concernait   les 


DOCUMENTS  POTIR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN         27 

Djciiiba,  on  al)iiiul(>iiii;i  nioiiiciilaiiriiiciit  vcliv  dciiomi- 
iialioii  ;  on  iurepla,  en  vcrlu  de  l'arlicle  7  du  Lrailé  de  lS'i.") 
loiUes  les  iiidividualilés  (le  celle  fraction  qui  venaieiil  s<' 
soumellrc  à  noire  aulorilé,  et,  pour  les  besoins  du  service, 
on  les  ré{)arlit  en  oi(„,|)(<s  auxquels  on  donna  les  noms  de 
certaines  familles. 

Nous  pouvions  nous  considérer  désormais  comme  maî- 
tres des  llauls-Plateaux. 

Le  i"  septembre  1885,  le  cercle  de  Sebdou  fut  supprimé 
et  le  poste  de  Méchéria,  transformé  en  annexe,  fut  la Ha- 
ché au  cercle  d' Aïn-Sefra  et  à  la  Subdivision  de  Mascara. 
Le  premier  chef  d'annexé  fut  le  capitaine  Empérauger. 

Des  (lillicultés  surgirent  à  ce  moment  avec  le  sultan  du 
Maroc  à  propos  de  l'édification  d'un  poste  à  Djenien  bon 
Rezff  :  on  crut  devoir,  pour  parer  à  toute  éventualité,  déler- 
min(M'  à  l'avance  la  limite  que  nous  pourrions  assigner,  !e 
cas  échéant,  à  nos  revendications.  Dans  une  étude  particu- 
lière qu'il  fit  à  ce  sujet,  le  Général  commandant  la  Divi- 
sion écrivit  :  «  Entre  les  Béni  Guil  et  les  Hamyan,  la  ligne 
médiane  de  ce  territoire  indécis  passe  à  peu  près  par  Oula- 
kak,  Eorthassa  Gharbia  et  l'Oued  Bou-Kholkhal.  Cette 
ligne  donnerait  d'ailleurs  satisfaction  aux  désirs  comme 
aux  besoins  des  îTamyan  :  aller  plus  loin  serait  peut-être 
pousser  les  Béni  Guil  aux  moyens  extrêmes.  »  Mais  aucune 
décision  ne  fut  prise. 

Ce  ne  fut  qu'en  mars  1887,  à  la  suite  des  réclamations 
de  certaines  tribus  marocaines,  que  le  caïd  de  Figuig, 
Driss  bel  Kouri  Cherardi,  posa  nettement  la  question.  Le 
général  lui  lépondit  en  prescrivant  au  Commandant  Supé- 
rieur d'Aïn-Sefra  de  limiter  les  migrations  des  populations 
des  deux  empires  à  une  ligne  qui,  paifant  de  Galloul,  pas- 
serait à  Oulakak,  Dar  Nouichen,  Oued  Sidi  Abdallah, 
Djebel  M'zil,  Hadjerat  el  M'guil  et  l'Oued  Dermel.  Le  kha- 
lifa  de  Figuig  déclara  que,  puisque  nous  mettions  en  dis- 
cussion une  des  clauses  formelles  du  traité  de  i845,  il  se 
voyait  dans  la  nécessité  d'en  référer  au  Sultan. 

Les  choses  en  étaient  là  quand  on  apprit  que  le  caïd 
marocain  des  Mehaïa  avait  reçu  de  Fez  l'ordre  d'aller  cam- 
per avec  sa  tribu  à  Djenan  el  Adham,  point  situé  au  Sud  du 
chott  Gharbi  et  occupé  de  tout  temps  par  les  Hamyan.  Le 
caïd  El  Hadj  Saheli,  alors  en  mésintelligence  avec  l'amel 
d'Oudjda,  refusa  d'exécuter  cet  ordre  sous  prétexte  qu'il 
ne  voulait  nous  donner  aucun  sujet  de  mécontentement. 

Pour  mettre  un  terme  à  ces  discussions,  le  Gouverneur 


28         DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hTSTOIRE  DES  HAMYAN 

Général  recommanda  de  veiller  à  ce  que  les  Hamyan  occu- 
passent toujours  les  premiers  ce  point  dès  le  commence- 
ment de  la  saison  des  pâturages,  leur  seule  présence  devant 
suffire  à  tenir  à  dislance  les  nomades  marocains. 

Ceux-ci  profitaient  du  désaccord  existant  entre  le  Sultan 
et  notre  Gouvernement  pour  faire  des  incursions  sur  notre 
territoire  et  razzier  à  tout  propos  nos  tribus.  En  avril  1891, 
des  douars  marocains  furent  signalés  entre  Kesdir,  Djenan 
el  Âdham,  Daït  Oum  Ech-Chérif  ;  il  fallut  leur  réitérer 
l'ordre  de  se  retirer  dans  l'Ouest  pour  les  décider  à 
s'éloigner. 

Cette  même  année,  les  Hamyan  résolurent  d'envoyer  une 
grande  caravane  faire  des  achats  de  dattes  au  Tafilalet. 
Partis  le  26  novembre,  ils  se  partagèrent  en  deux  groupes  : 
l'un  comprenant  les  Bekakra  et  les  Ghialra  prit  la  route  de 
Figuig  et  de  l'Oued  Guir  ;  l'autre  suivit  le  chemin  qui  passe 
par  Talzaza. 

Arrivés  dans  le  Tafilalet,  au  Ghorfa,  les  Hamyan  auxcjuels 
s'étaient  joints  en  route  une  caravane  des  Doui  Menia, 
furent  bien  reçus  par  les  habitants  de  ce  district,  alliés  à 
ces  derniers.  Mais  les  dits  habitants  se  déclarèrent  dans 
l'impossibilité  d'entamer  avec  nos  gens  aucune  transac- 
tion en  raison  des  ordres  donnés  par  Moulay  Réchid,  grand- 
oncle  du  sultan  Abd-el-Aziz,  gouverneui'  du  Tafilalet.  En 
même  temps  nos  nomades  apprenaient  que  des  lettres  de 
Moulay  Réchid  avaient  été  lues  dans  toutes  les  mosquées 
de  la  région,  prescrivant,  sous  les  peines  les  plus  sévères, 
de  ne  lien  vendre  aux  Hamyan,  qui  étaient  des  Mézanates 
(serviteurs  de  mécréants).  On  avait,  de  plus,  répandu  le 
bruit  que  deux  officiers  français  déguisés  se  trouvaient  avec 
eux. 

Le  10  décembre,  une  troupe  composée  de  i.ooo  à 
1.200  fantassins  et  de  60  cavaliers,  principalement  de  Bera- 
ber,  déboucha  de  Dar  el  Bcïda  et  vint  atta(juer  les  Hamyan  ; 
mais  les  assaillants  étaient  mal  armés  de  fusils  à  pierre,  de 
faucilles  emmanchées  et  de  couteaux.  Pendant  que  les 
Hamyan  faisaient  vivement  prendre  à  leurs  chevaux  la 
direction  du  Nord-Est,  70  à  So  de  leurs  cavaliers  se  prépa- 
rèrent à  faire  face  à  l'attaque.  A  la  première  décharge  le 
désordre  se  mit  parmi  les  assaillants  ;  deux  de  leurs  cava- 
liers avaient  été  tués,  les  autres  prirent  la  fuite,  bousculant 
les  fantassins  ;  ceux-ci  après  avoir  fait  mine  de  résister, 
lâchèrent  bientôt  pied.  Leurs  pertes  furent,  dit-on,  de 
i4o  tués. 


DOCUMENTS  POUR  SEMvm  A  f,  HISTOIRE  DES  HAMYAN 


2f) 


Le  niinhiil  Iciiiiinr,  les  IhniiMiii  ciiii^^iiiml  un  rcl(jui 
nlIViisif  se  miiciit  en  irli;iilf  \cis  l'Oued  (îuir.  \À\,  ils  se 
sépaièrcdl  :  nu  i^ionpc  ^airnii  Kcnadsa,  liccliai' cl  Onakda  ; 
un  nuire  se  lendil  aux  Reiii  (l(»unii,  le  troisième  pril  la 
diieelion  de  Figuig. 

l'n  n(MiveI  incident  allait  bientôt  se  produire  parmi  ceux 
(pii  s'étaieid  rendus  à  lîéchai .  Ln  homme  des  lîekakta, 
croyant  reconnaître  dans  une  jument  d'un  indigène  des 
Oulad  Djerir,  celle  (pi'il  avait  perdue  à  Oar  el  Beïda,  sauta 
dessus  et  s'enfuit  en  criant  aux  Tlamyan  ciu'ils  étaient 
trahis.  Dans  le  premier  moment,  il  y  eut  une  panirpie. 
Avant  que  le  calme  fut  rétabli,  les  gens  de  Béchar  s'étaient 
emparés  d'une  paitic  de  ce  qui  appartenait  auv  Hanrryan, 
particulièicment  des  arrhes  qu'ils  avaient  déjà  versé  en 
piévision  de  leurs  achats. 

Ces  faits  motivèrent  une  nouvelle  demande  de  répara- 
tions au  Gouverïiement  maiocain.  Quoiqu'ils  n'aient  à  j>eu 
près  rien  perdu,  les  dommages  subis  par  nos  gens  furent 
évalués  à  233-745  francs  ;  l'indemnité  fut  payée  en  sep- 
lembie  r89>.  Afais  comme  nous  demandions  la  destitution 
de  Moulay  Réchid,  le  Sultan  fit  remaïquer  que  celui-ci 
a\ait  résigné  depuis  longtemps  ses  fonctions  de  gouver- 
neur du  Tafilalet.  Ces  événements  montrent  l'esprit  d'ani- 
mosité  (|ni  existait  contre  nous  et  nos  administrés.  Ils  expli- 
(|uent,  en  outre,  pourquoi,  dans  les  années  qui  suivirent. 
nos  noniades  ne  se  rendirent  plus  dans  cette  région. 

Celte  animosité  existait  non  seulement  chez  les  tribus 
marocaines,  mais  encore  à  la  com*  de  Fez.  Elle  se  mani- 
festa à  propos  d'une  question  de  frontière  qui  fut  soulevée 
de  nouveau  (^1892)  par  l'amel  d'Oudjda,  Sid  Abdesselem 
ben  Bou  Cheta.  Dans  une  lettre  adressée  au  Général  com- 
mandant la  Subdivision  de  Tlemcen,  ce  fonctionnaire 
marocain  revendiqua  comme  dépendant  du  Alaroc  les 
points  d'Oulakak,  Callonl,  Djenan  el  \dham  et  Mengoid)  ; 
(>n  même  tem])s  les  Mehaïa,  sans  plus  attendi<\  s'instal- 
lèient  à  Djenan  el  Adham. 

Fn  transmettant  cette  léclamation,  le  général  Délrie  fil 
remarquer  que  nos  droits  sur  les  trois  points  d'Oulakak. 
Calloul  et  Djenan  el  Adham  étaient  incontestables  :  de 
temps  immémorial,  ils  étaient  occupés  par  nos  nomades  (pii 
y  avaient  leuis  cimetières.  Quant  à  Mengonb,  les  ITamyan. 
ajoutait-il,  s'y  étaient  fréquemment  installés,  et,  pour 
couper  C(Mnl  à  toute  discussion,  il  proposa  de  faii'c  occuper 
par  nos  tribus  les  points  d'eau  contestés  dès  le  commence- 


30         DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'uISTOIRE  DES  HAMYAN 

ment  de  lu  saison  des  pâturages,  afin  d'éviter  de  voir  péri- 
mer leurs  droits  par  défaut  d'oceupaficm. 

r.e  Gouverneur  Général  et  le  Mi  ni  sire  des  Affaires  Etran- 
gères approuvèrent  ees  mesures  et  celui-ei  eonclut  ce  (jui 
suit  :  <(  Les  localités  dont  il  s'agil  se  trouvant  au  Sud  du 
«  Teniet  es  Sassi,  et  n'étant  pas  comprises  par  conséquent 
«  dans  les  territoires  attribués  au  Sultan  par  le  traité 
((  de  1845,  il  est  de  toute  évidence  que  nos  nomades  sont 
«  fondés  à  y  exercer  leurs  droits.  » 

L'occupation  des  points  en  litige  fut  prescrite  d'une  façon 
permanente  et,  pour  exécuter  cet  ordre,  les  Hamyan  durent 
refouler  devant  eux  les  douars  marocains  qu'ils  rencontrè- 
rent. î>e  Maghzen  marocain  protesta  et  proposa  la  réunion 
d'une  commission  mixte  de  délimitation.  Ces  ouvertures 
n'aboutirent  pas  plus  que  les  précédentes.  En  raison  de  la 
malveillance  de  la  cour  de  Fez  on  ajourna,  pour  le  moment, 
tout  arrangement  de  ce  genre. 

En  T90T,  un  premier  protocole  fut  signé  ;  il  fixait  les 
limites  de  la  façon  suivante  :  ligne  du  Teniet  es  Sassi  à  Ich  ; 
puis  d'Ich  à  Fi  gui  g  fTch  et  Figuig  restant  marocains)  ;  de 
Figuig  à  Sidi  ed-Daher,  traversée  de  l'Oued  Kerroua  et 
ligne  d'EI  Kerroua  à  El-Morra  (conlluent  de  l'Oued  Talzaza 
et  du  Guir\  rive  occidentale  du  Guir  depuis  le  confluent  de 
l'Oued  Talzaza  jusqu'à  i5  kilomètres  au-dessus  d'Tgli. 

L'année  suivante  (janvier  i()0!>)  une  nouvelle  commis- 
sion franco-marocaine  fut  convoquée.  Le  général  Cauche- 
mez  en  eut  la  présidence  ;  le  chef  de  la  mission  marocaine 
fut  Si  Mohammed  El  Guebbaz  :  parmi  les  membies  figu- 
raient les  capitaines  Farriau,  du  Jonchay,  Ducloux,  de 
Susbielle.  Les  prescriptions  du  précédent  protocole  furent 
virtuellement  détruites.  On  créa  une  zone  d'influence  dite 
«  zone  des  marchés  »  oii  l'action  des  deux  gouvernements 
serait  comnmne,  à  savoir  un  marché  français  à  Aïn-Sefra, 
un  marché  marocain  à  Figuig  et  des  marchés  mixtes  le 
long  de  la  voie  ferrée  d'Ounif  à  Kenadsa.  En  fait,  cette  solu- 
tion lamenait  au  traité  d(^  t8/|5  et  il  n'y  avait  [)as  de  fron- 
lièrc  ucllemcnt  délimitée  dans  le  Sud  entre  l'Algérie  et  les 
confins  algéro-marocains. 

* 
*  * 

Pendant  ce  temps,  poiu'  mettre  fin  aux  incursions  des 
Ijandes  du  Touat  et  du  Gouraia  et  pour  donner  plus  de  sécu- 
rité à  nos  caravanes,  nous  avions  été  amenés  à  prolonger 


DOCT7MENTS  POXm  SERVIR  \  î.'iriSTOTRE  DES  nAMYAN         31 

vcis  ri'Alirrno-Sud  noire  orfiipation  ;  iiolic  siluatiori  fui 
Kitl'oici'c  [liir  la  création  de  la  Subdivision  d'Aïn-Sofra. 

Kn  iSc)."»,  j'annoxo  de  Mécliéria  d('\inl  nn  roicle  lallaché 
à  la  Subdivision  d'Aïn-Sofra  (>t,l'anncc  suivante, le  Général 
commandant  la  Subdivision  décida  que  la  limite  Sud  do  ce 
cercle  sérail  provisoirement  la  suivante  :  Djebel  Doug, 
Oulakak,  El  Aud)aa  et  le  Hjebel  Mo^rbad. 

* 

*  * 

A  paitir  de  cette  époque,  cbez  les  Hamyan,  l'action  du 
commandement  est  devenue  plus  facile ctn'aplus rencontré 
les  dilTicullés  d'autrefois  ;  on  peut  dire  actuellement  qu'ils 
sont  à  peu  près  complètement  ralliés  à  notre  cause.  On 
connaît  le  portrait  que  le  général  Chanzy  a  tracé  de  ces 
indioènes,  il  y  a  peu  de  chose  à  changer  aujourd'hui. 

r.eurs  instincts  belliqueux  sont  devenus  moins  aidents 
que  par  le  passé.  Tls  les  ont  mis  à  notre  service  et  sont  deve- 
nus pour  nous  do  précieux  auxiliaires.  En  différentes  cir- 
constances, leurs  qualités  militaires  ont  été  mises  en  relief. 
Eeurs  caïds  ou  les  descendants  des  grandes  familles  tinrent 
à  honneur  de  les  conduire  au  feu,  prouvant  ainsi  qu'ils 
étaient  restés  ce  qu'Abd-el-Kader  les  avait  faits  :  des  chefs 
militaires  bien  plus  que  politiques. 

Dans  cotte  période  de  tâtonnements  et  de  contiaintes 
})oliti(pies  vis-à-vis  dos  gens  de  l'Ouest,  ils  jouèrent  un  rôle 
d'autant  plus  actif  que.  tout  en  nous  servant,  ils  y  trouvè- 
rent l'occasion  de  fructueuses  razzias. 

De  1900  à  1904,  très  brillamment  commandés  par  le 
capitaine  Sarton  du  Jonchay\  auquel  ils  ont  conservé  un 
souvenir  des  plus  fidèles,  d'autre  part,  rudement  menés 
par  l'agha  El  ITadj  El  Habib  ould  Mebkhout,  qu'ils  crai- 
gnaient, ils  opérèrent  une  série  de  coups  de  main  contre 
les  Boni  Guil  et  facilitèrent  notre  progression  vers  l'Ouest. 

Il  est  nécessaire  d'entrer  dans  quelques  détails  ?»  ce  sujet  : 

l.oisqu'en  i88:>,  Bou  Amama  s'était  réfugié  au  Gourara, 
dans  le  district  de  Deldoul,  l'insurrection  était  virtuelle- 
mont  terminée.  Nous  devions  cependant  continuer  h  sur- 
veiller très  attentivement  les  faits  et  gestes  de  ce  marabout 
qui  avait  réuni  autour  de  lui  une  bande  do  pillards  et  de 
bandits  de  toute  sorte. 

Au  début,  il  n'avait  pas  été  accueilli  avec  grand  enqiros- 
sement  pai-  la  p(niulation  gourarienne,  d'origine  berbère. 


I   AitiiellPiTiPnl  fir)ifi)  rol(-)nol  cnmnumdnnl  le  V  Rcpiment  âe  Spahis. 


32         DOCUîMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hTSTOIRE  DES  HAMYAN 

composée  en  majeuie  partie  de  serviteurs  des  chérifs 
d'Oiiazzan. 

Il  avait  avec  lui  quelques  tentes  des  Oïdad  Ziad  Cheraga 
fDjeramna),  des  Onlad  Sidi  Cheikh  Cheraga  et  Cheraba 
et  8/|  tentes  de  Chaamba  dissidents. 

Bou  Amama  n'avait  pas  tardé  à  étendre  ses  relations  dans 
le  Sud  Marocain  et  s'était,  surtout,  lié  intimement  avec  le 
grand  chef  des  Derkaoua  du  Medaghra,  Si  Mohammed  el 
Arbi. 

Il  avait,  de  plus,  reçu  des  Beraber  de  l'Ouest  et  des  Toua- 
reg Ahaggar,  à  l'Est,  des  propositions  pour  venir  s'installer 
parmi  eux  ;  d'autre  part,  toutes  les  caravanes  venant 
annuellement  des  Hauts-Plateaux  Oranais  au  Gourara  le 
comblaient  de  ziaras  et  d'offrandes,  ce  qui  n'empêchait  pas 
ses  Chaamba  de  s'allier  aux  Ait  Khebbach  et  autres  bandits 
du  Sud  pour  piller  et  détrousser  ces  nomades  lorsqu'ils 
remontaient  vers  le  Nord  avec  leurs  approvisionnements 
de  dattes. 

A  cette  époque,  nous  commencions  à  poser  la  question 
de  l'occupation  du  Touat  et  dès  difficultés  diplomatiques  se 
{produisaient  à  ce  sujet  entre  nous  et  le  sultan  du  Maroc, 
Moulay  Hassan.  Ce  dernier  redoutait  que  nous  ne  profltions 
de  l'agitation  produite  dans  la  région  des  oasis  par  la  pré- 
sence de  Bou  Amama  pour  y  envoyer  nos  troupes,  e4, 
d'autre  part,  cheichait  à  diminuer  la  puissance  des  Der- 
kaoua. C'est  dans  ce  but  (ju'il  avait  entrepris  au  Sud  de 
Méquinez  une  lude  campagne  contre  les  Béni  M'Guild  et 
([u'il  s'était,  en  iSq.*^,  rendu  au  Tafîlalet. 

Moulay  Hassan  enjoignit  finalement,  en  189/1,  ^  ^ou 
Amama  de  quitter  Deldoul,  pour  nous, enlever  ainsi  toul 
prétexte  d'ingérence  dans  cette  région.  Le  marabout  alla 
camper  à  Mérimine,  dans  la  Saoura.  Il  avait  assez  souvent 
affecté  de  se  rapprocher  de  nous  ;  il  était  même  allé  jus- 
(pi'à  nous  adresser  des  demandes  de  soumission  vers  1889  ; 
mais  il  avait,  en  même  temps,  étendu  son  influence  et 
recruté  beaucoup  de  partisans  chez  les  Doui  Menia,  les 
Oulad  Djerir,  les  Béni  Guil,  les  Ghenanema  de  la  Saoura, 
les  Beraber,  les  Oulad  Sidi  Cheikh  Gheraba  et  les  Mehaïa. 
Sa  présence  dans  l'Oued  Saoura  était  par  suite  encore  plus 
gênante  que  lorsqu'il  était  au  Gourara. 

De  plus,  la  mort  du  sultan  Moulay  Hassan,  et  son  rem- 
placement par  le  jeune  Moulay  Abd-el-Aziz  nous  fît  perdre 
l'espérance  de  pouvoir  compter,  pendant  longtemps,  sur 
le  Gouvernement  chérifien  pour  rétablir  l'ordre. 


UOCl  MEMS  l>Ol  R  SEin  IM    V  l.'llISTOIUE  DES  UAMYAN         33 

(  )ri  ciiN  i>;i;j:t';i  alors  lidéc  de  iccctiisliUicr  le  r<tininund('- 
jiu'iil  (|iii,  en  iN<»7,  a\;iil  él»'  doiun'  à  Si  Ei  lladj  l.aibi,  lils 
iiîiK-  lie  Si  (llieilvh  lien  Tayeb. 

(  happeloiis  jjDiir  inéiiioire  (jiie  des  négociations  avaient 
élé  eiilaiiiées  a\ec  Ir  (loii\  ernenienl  marocain,  en  i8()7, 
{)oin  arièler  linsin  reelioji  des  Oïdad  Sidi  (ilieikh  et  faire 
l'entrer  tians  K  devoir  les  tribus  marocaines  toujours  dis- 
posées à  [>rèter  leur  concours  an\  rebelles.  Comme  résultat 
de  ces  négociations,  Si  Kl  lladj  Larbi,  qui  était  depuis 
longtemps  déteiui  à  Oudjda,  l'ut  relâché  et  nommé  khalifa 
de  l'amel  d'Oudjda  à  l'iguig.  (Jn  réunit  sous  son  comman- 
dement, non  seulement  les  ksour  de  l-'iguig,  mais  encore 
les  Oulad  Djei  ii-,  les  Béni  Guil,  les  Doui  Menia,  les  Amour 
et  tous  les  ksour  de  IF-xtrème-Sud  »  Béchar,  Ouakda,  Bon 
Kaïs, etc.  KiCtte  tentât i\(' d'organisation  n'eutaucun  succès.  ) 

L'idée  de  reprendre  ce  projet  et  de  mettre  Bon  Amama  à 
la  place  d'El  lladj  Larbi  échoua  aussi  ;  on  talonna  trop, 
et,  même,  les  diverses  autorités  françaises  ne  purent  arri- 
ver à  s'entendre  entre  elles. 

Opendant,  les  Oasis  ayant  été  occupées  par  nos  troupes, 
Bon  Amama  avait  fpiitté  la  Saoura  et  était  allé  s'installer  à 
Figuig,  toujours  suivi  de  ses  dissidents  pillards  et  voleurs. 
En  1899,  en  voyant  que  nous  progressions  de  nouveau  dans 
le  Sud,  il  écrivit  à  M.  Laferrière,  Gouverneur  Général,  qui 
lui  accorda  l'aman.  Cette  mesure  de  clémence  fut  vaine  et 
ne  modifia  rien. 

Lu  1901,  une  commission  franco-marocaine  parcourut 
la  frontière  du  Sud  pour  établir  un  protocole  au  sujet  du 
territoiie  des  Oïdad  Djerir  et  des  Doui  Menia. 

Les  commissaires  français  réussirent,  à  ce  moment,  à 
faire  éloigner  de  Figuig  notre  vieil  ennemi  de  1881  qui 
n'avait  pas  voulu  profiler  de  l'aman  qu'on  lui  avait  accordé 
en  1899. 

Sui'  notre  demande,  Si  Mohammed  Guebbaz,  chef  de  la 
mission  marocaine,  invita  le  marabout  à  quitter  Figuig  ou 
à  se  soumettre.  Bon  Amama  préféra  gagner  par  étapes  suc- 
cessives la  région  nord  du  Maroc  Oriental  où  il  alla  faire 
cau.se  commune  avec  le  Prétendant  Bon  ITamara,  égale- 
ment conrni  sous  la  désignation  de  «  Rogui  »  ou  de  «  Mou- 
lay  ^l'hammed  »'.  C'est  principalement  à  ce  dernier  fait 

I  Bon  Amama,  de  Figuig,  alla  «ncressivement  à  la  gada  de  Debdoii.  puis  .1 
M(5ridja,  do  là  sur  l'Oued  El  Haï  (Ouefaïf),  enfin,  par  Foum  Bezzouz,  aux 
environs  de  Meflili  des  Béni  Yala,  où  il  résidait  encore  en  190/1,  lorsque  nous 
occupâmes  Berguenf.  Plus  tard  il  installa  définitivement  sa  zaouïa  à  El  .\ïoun 
Sidi  Mellouk,  où  elle  se  trouve  encore  actuellement. 


34  DOClJiME.MS  POLIl  SERVIR  A  l'uISTOIRE  DES  HAMYAN 

(|ue  le  cercle  de  Mécliéiia  dut  d'avoir  à  veiller  tout  particu- 
lièrement sur  sa  frontière  de  lOuest. 


En  elïet,  pai  suile  de  ce  déplacement,  deux  marabouts 
se  trouvaient  en  présence  dans  cette  région  du  Maroc 
(Jriental  : 

Si  Allai,  chef  des  Zoua  Ciheraba,  descendant  d'unegrande 
famille,  et  liou  Amama,  d'ojigine  obscure,  mais  considéré 
comme  étant  le  personnage  religieux  ayant  pu  résister  à 
nos  armes. 

D'autre  part,  les  lieiii  (juil,  lesquels  voisinaient  en  mau- 
vais termes  avec  les  llamyan  depuis  fort  longtemps, 
avaient  au  même  moment,  parmi  eux,  un  chef  nommé 
Abderrahmane  qui  aspirait  à  devenir  le  maître  de  toute  la 
confédération  des  Béni  (juil.  Enfin,  dans  cette  même 
région,  le  prétendant  Bou  llarnara  cherchait  à  progresser 
et  le  représentant  du  Sultan  à  Oudjda,  Si  Ahmed  Rokina, 
tâchait  de  soutenir  les  intérêts  de  son  maître,  sans  cepen- 
ilant  montrer  une  grande  énergie. 

Nous  ne  pouvions  rester  simples  spectateurs  de  ce  qui  se 
passait  chez  nos  voisins  de  lUuest  parce  que  toute  une  série 
de  djiouch  et  de  rezzous  ne  cessaient  de  commettre  des 
déprédations  à  l'encontrc  des  troupeaux  et  des  biens  des 
llamyan  et  des  gens  de  lannexe  d'El-Aricha  et  du  cercle  de 
iMarnia. 

Le  général  O'Connor,  commandant  la  Division  d'Oran, 
avait  comme  but  principal  de  sa  politique  indigènel'anéan- 
tissement  de  la  prépondérance  de  Bou  Amama. 

Le  capitaine  Sarton  du  Jonchay  (quijut  successivement 
chef  du  Bureau  des  Affaires  indigènes,  puis  Commandant 
Supérieur  du  cercle  de  Méchéria)  suivait  l'orientation  qui 
lui  était  donnée  et  rêvait,  disait-on,  de  s'emparer  lui-même 
de  la  personne  du  vieux  marabout. 

El  Hadj  El  Habib  ould  Mebkhouti  et  les  principaux  chefs 
indigènes  Hamyan  profitèrent  de  l'état  d'esprit  qui  régnait 
à  cette  époque,  par  suite  du  but  poursuivi,  pour  prétendre 
sans  cesse,  et  beaucoup  plus  souvent  à  tort  qu'avec  raison, 
([u'ils  avaient  été  pillés  ou  razziés  par  les  Béni  Guil,  et  pour 


I  El  Hadj  El  Habib  ould  Mobkhoul  arriva  à  se  faire  nommer  le  3o  dcto- 
bre  1908,  agha  des  Hamyan  Chafaa.  Son  commandement  ne  s'étendit  pas  sur 
les  Bekakra  et  son  ennemi,  le  vieil  El  Hadj  Kaddour  ould  Boufeldja  fut  nom^iic 
agha  honoraire,  pour  compenser  les  effets  de  la  nomination  d'El  Hadj  El 
Habib  ould  Mebkhout  comme  agha. 


DOCl  iMEMS  l>OLR  SLUVIll  A   l'iIISTOIIIE  DES  IIAMYAN         35 

(ipt'ici-  coiilic  eux  de  soi-disaiil  it!\  iiiiclics  aussi  fructueuses 
<ju  iiiju?>lili(''cs.  (^es  procédés  uc  pouvaient  auieiicr  que  des 
r('[)iésaill('s  cl  laiic  se  iiiaiiileiiir  un  état  de  haine  constante 
elle/  les  Ueiii  (iiiil,  les(juels  restaient,  pour  la  plupart,  très 
soumis  à  I  iiinueiiee  de  la  baraka  de  Hou  Aniania. 

D'aulie  pari,  les  partisans  du  Ivogui,  Bou  llaniara,  et  les 
coupeurs  de  loule  de  Bou  Aniania  menaçaient  sans  cesse 
(rincursioiinei   sur  noire  territoire. 

()n  cherelia  d'aboid  à  empêcher  Bou  Amama  de  pouvoir 
retourner  vers  Figuig  et  le  (iuir. 

Avec  raj)pui  du  chef  Béni  (uiil,  Abdeiialiiuane  i-ll  Vtnbi, 
(pii,  comme  nous  l'avons  éciil  précédemmeni,  ambilioii- 
nail  de  réunir  tous  les  Béni  (!uil  sous  son  commaridemeiil 
on  commença  à  s'avancer  en  pays  Béni  Cuil. 

\  lauloinne  iQoa,  le  eommandani  Pierron  et  le  capi- 
taine du  .lonchay  avec  5oo  goumiers  llamyan,  un  escadron 
de  (-hasseurs  d'x\frique  (.soutien  restant  à  Forlhassa)  mar- 
chèrent contre  les  contingents  de  Bou  Amama  cami)és  à 
Nécissa  (près  du  Djebel  Kakhdaii.  On  se  contenta  de  lazzier 
une  partie  des  troupeaux  du  marabout  qui  étaient  entre  Bou 
Arfa  et  Haci  Badda  et  on  n'attaqua  pas  son  campement  qui 
resta  à  Nécissa.  Les  animaux  razziés  furent  ramenés  à  Aïn- 
Ben-Khelil  et  vendus  aux  enchères. 

En  juin  1908,  pendant  les  opéiations  contre  Figuig,  le 
commandant  Pierron,  à  la  tête  d'une  petite  colonne,  partit 
de  Méchéiia  et  s'avança  jusqu'à  INIazzer,  piès  du  massif  de 
Tendrara,  en  passant  par  Galloul,  Forthassa  et  Oglat 
Moussa,  dans  le  chott  Tigri. 

Le  commandant  Pierron  resta  de  sa  personne  à  Oglat 
Moussa  avec  la  compagnie  montée  et  un  escadron  de  chas- 
seurs ;  le  govnn  s'avança  jusqu'à  Mazzer  pour  surveiller  les 
Béni  Guil. 

A  la  tin  de  1908,  et  au  commencement  de  1904,  l'action 
se  précipite. 

Vers  décembre  1903,  une  razzia  est  opérée;  à  Ouzdate 
i^entre  Berguent  et  Méridja)  par  les  goums  Hamyan  Chafaa, 
menés  par  l'agha  El  Haljib,  qui  pillent  les  Oulad  Sidi  Ali 
(Béni  Gui  P. 

Le  caïd  Bou  Medien,  des  Akcrma,  est  tué  au  cours  de 
cette  razzia.  Son  corps  est  brûlé.  (2./400  chameaux  et 
10.000  moutons  sont  razziés.) 

Deux   politiques    différentes    entrent    en   présence,    Le 


36  DOCLME^TS  POI  R  SERVIR  A  l'rISTOIRE  DES  HAMVAN 

général  l.yautey  a  pris  le  comniandeiiieiit  de  la  Subdivision 
d'Aïn-Sefra.  Avec  le  capitaine  Berriau  et  l'agha  de  Tioiit, 
Si  Mouley,  il  cherchera  à  rétablir  la  paix  sur  la  frontière 
Ouest  en  se  servant  de  procédés  autres  que  ceux  qu'avaient 
envisagés  le  général  O'Gonnor  et  le  capitaine  du  Jonchay. 

Vu  miad  des  Béni  (îiiii  conduit  par  Abderrahniane  El 
Voubi  vient  à  Ain-Sefra  se  présenter  au  général  Lyautcy 
et,  en  janvier  190/1,  un  pacte  de  paix  est  passé  avec  l'auto- 
rité française. 

Mais,  peu  après,  tous  les  gounis  llaniyan  sont  réunis  pour 
parer  aux  éventualités  que  peuvent  laisser  craindre  l'appro- 
che vers  Ras-el-Aïn  (des  Béni  Mathar)  des  contingents  de 
Bon  Amama  et  du  Roguii. 

Si  Allai,  (jui  touche  régulièreinent  de  nous  une  fort,e 
mensualité,  soutient  noire  cause  dans  cette  région,  en 
même  temps  que  la  majorité  des  Béni  Guil  rompent  entiè- 
rement avec  Bou  Amama  et  Bou  Hamara. 

Le  généra]  Lyautey  veut  éviter  l'emploi  de  la  force  parce 
(ju'il  juge  que,  si  elle  est  utilisée,  elle  se  terminera  fatale- 
ment par  des  razzias  qui  entretiendront  toutes  les  haines.  Il 
estime  que  le  fait  seul  d'avoir  détaché  la  majorité  des  Béni 
Guil  de  la  cause  de  Bou  Amama  agira  sufîisamment  sur  les 
populations  marocaines  du  Nord-Ouest  pour  que  nous 
n'ayons  pas  à  craindre  de  les  voir  envahir  le  territoire 
algérien. 

Mais,  pendant  que  le  capitaine  du  Jonchay  est  mandé  à 
Forthassa  par  le  général,  pour  recevoir  des  instructions  sur 
la  conduite  à  tenir,  tous  les  goums  Hamyan  commandés 
par  le  capitaine  Toulat,  ayant  été  rassemblés  à  Mengoub, 
marchent  sur  Méridja  i^environ  .Ho  à  35  kilomètres  à  l'Ouest 
de  Berguent)  et  opèrent  une  immense  razzia  sur  les  Oulad 
Ahmed  ben  Abdallah  (21  février). 

Les  deux  lettres  suivantes  du  capitaine  du  Jonchay, 
Commandant  Supérieur  du  cercle  de  Méchéria,  à  Monsieur 
le  Général  commandant  la  Subdivision  d'Aïn-Sefra,  indi- 
(pient,  d'une  façon  très  précise,  !(>  but  pouisuivi  pai-  les 
autorités  du  cercle  de  Méchéria. 


I  De  plus  les  Béni  Guil  devaient  se  rapprocher  de  nous  dans  un  délai 
donné.  A  l'expiration  de  ce  délai,  leurs  promesses  n'ayant  pas  été  tenues,  le 
caïd  Abdenahmane  El  Yonbi  demanda  qu'il  fut  prolongé,  ce  qui  lui  fut 
accordé. 

A  la  suite  de  cette  prolongation,  les  promesses  faites  n'étant  pas  encore 
tenues,  le  général  Lyautey  les  menaça  d'employer  la  force  et,  à  cet  effet,  auto- 
risa le  rassemblement  des  goums  Hamyan. 


DOCUMENTS  POUR  SER\  IJA  A  l'iIISKJIUE  DES  HAMYAN         'M 

Première  Lettre 

((  .l'ai  riioiiin'ur  de  vous  reiidie  coinplc  (jne  je  suis  arrivé 
((  ce  malin  au  douar  du  caïd  Abdcriuhniaii,  après  avoir 
«  traversé,  dans  le  ciioll  Tigri,  plus  de  Irenle  tloiiars  i\i'> 
«  Béni  Guii. 

«  C'est  bien  la  misèi'e  (jui  a  décidé  la  niasse  de  la  Irihii 
u  à  se  résigner  à  la  soumission. 

((  C'est  une  véritable  soumission,  en  elTet,  et  nous  avons 
«  été  reçus  partout  en  maîtres. 

((  Mais  quelles  pauvres  gens  !  Ils  n'ont  plus  de  (pidi  se 
((  vêtir  et  à  peine  de  quoi  manger. 

i(  ils  vivent  en  ce  moment  de  ce  (jue  leurs  caravanes  ont 
«  apporté  de  Figuig  pendant  que.  le  miad  était  auprès  de 
«   vous. 

((  ils  se  rapprochent  de  nous  en  décanqjant  par  échelons 
«  successifs,  tant  leurs  chameaux  sont  faibles. 

((  ils  n'ont  plus  que  très  peu  de  chevaux  capables  de  les 
<i  porter.  Je  n'en  ai  pas  vu  plus  de  cinquante  en  tout  et, 
u  sauf  ceux  des  notables,  ils  sont  dans  un  état  piteux. 

<(  Quoiqu'il  en  soit,  si  nous  savons  leur  sauver  la  face 
«  niaghzen,  nous  pourrons  profiter  des  circonstances  (jui 
u  nous  les  amènent  pour  les  apprivoiser  définitivement. 

«  La  misère  est  poignante,  mais  ne  durera  pas.  Les  Béni 
«  Guil  ont  encore  beaucoup  de  cheptel.  Ce  sont  les  mar- 
((  chés  qui  leur  ont  manqué. 

«  Je  cherche  à  les  attirer  le  plus  vite  possible  et  le  plus 
«  nombreux  possible  à  Méchéria. 

«  J'ai  été  reçu  par  le  caïd  Abderrahman  ayant  autour  de 
«  lui  tous  les  principaux  notables.  Tous  ont  exprimé  leur 
«  vive  satisfaction  de  voir  enfin  une  paix  solide  s'établir 
«  et  nous  ont  donné  l'assurance  que  le  passé  d'inimitié 
((  entre  eux  et  les  Hamyan  était  oublié. 

((  J'ai  répété  aux  notables  les  propos  que  vous  aviez  fait 
((  tenir  au  miad  venu  à  Aïn-Sefra  et  j'ai  résumé  de  la  façon 
«  suivante  au  caïd  Abderrahman  les  bases  du  modus 
«  Vivendi  adopté. 

<'  J'ai,  en  premier  lieu,  répété  à  Abderrahman  (|u"il  pou- 
«  vait  dès  maintenant  préparer  les  Béni  Guil  à  accepter  sa 
«  prépondérance  en  ajoutant  que,  dans  ce  sens,  je  suivrais 
«  moi-même  ses  indications  pour  régler  mes  relations 
((  avec  les  autres  chefs.  Il  propose  de  leur  faire  maintenir 
<(  le  titre  de  caïd  sous  sa  suprématie. 

<(  J'ai  ensuite  insisté  sur  l'intérêt  (\ne  vous  attachiez  à 
«  maintenir    l'accord    franco-marocain,    tout  en    laissant 


38  DOCUMENTS  POLIR  SERVI  H  A  l/lIlSTOlRE  DES  IIAMYAN 

«  noltement  enlendro  que  notre  action  doit  être  prédomi- 
((  nante  et  qu'elle  assure  à  la  fois  les  intérêts  personnels  et 
((  les  intérêts  généraux  de  la  tribu  ;  que  nous  nous  atta- 
«  cherons  dès  maintenant  à  assurer  le  développement  éco- 
((  nomiqiie  du  pays  par  des  moyens  appropriés  et  sans 
<(  toucher  à  la  suzeraineté  du  Sultan. 

<(  Enfin  j'ai  représenté  au  caïd  (jue  l'action  immédiate 
((  des  Béni  Guil  marchant  sous  ses  ordres  contre  Bon 
«  Amama  est  la  seule  consécration  possible  des  paroles 
((  échangées  à  Aïn-Sefra  et  la  manifestation  immédiate  et 
«  nécessaire  de  la  sincérité  de  leurs  engagements. 

((  Abderrahman  a  parfaitement  saisi  nos  intentions  et 
<i  pour  bien  préciser  son  intelligence  des  vues  (jue  je  lui 
«  avais  exposées,  il  m'a  dit  qu'il  s'était  déjà  fixé  une  ligne  de 
«  conduite  vis-à-vis  de  nous,  sachant  bien  que  le  Gouver- 
<(  nement  marocain  était  la  faible  plante  (pie  le  vent  eut 
«  brisé  si  Dieu  n'avait  pas  fait  pousser  auprès  d'elle  un 
((  grand  arbre  qui  sert  à  l'arbuste  d'abri  contre  la  tempête; 
«  moi-même,  ajoute-t-il,  rejeton  de  l'arbuste,  c'est  sur  le 
((  grand  arbre  que  je  compte  pour  me  peipétuer  dans  mes 
<(   fils  sous  sa  sauvegarde. 

((  En  ce  qui  concerne  l'action  contre  Bou  Amama, 
«  Abdenahman  la  juge  de  toute  urgence  ;  il  m'a  demandé 
«  l'appui  des  Hamyan,  me  promettant  d'entamer  la  ques- 
«  tion  aussitôt  apiès  réception  de  la  réponse  de  ses  contri- 
«  bules,  les  Oulad  Youb.  Ceux-ci,  bien  que  séparés  de  Bou 
«  Amama,  n'ont  pas  leurs  campements  auprès  d'Abderrah- 
«  man  ;  ils  ignoiaient  les  engagements  pris  par  leur  caïd 
«  vis-à-vis  du  Gouvernement  français. 

((  11  vient  de  les  aviser  et  il  a  abordé  lui-même  la  ques- 
«  tion  du  secours  (pie  nous  pourrions  Jui  apporter  dans 
«  l'action  contie  Bou  Amama  à  laquelle  il  paraît  aussi 
«  décidé  (ju'à  Aïn-Sefia.  » 


Deuxième  Lettre 

«  J'ai  l'honneur  de  vous  rendre  compte,  comme  suite  à 
((  mes  lettres  du  9.9.  janvier  datée  de  Mengoub,  du  ?>i  jan- 
«  vier,  d'Aïn-Sefra,  que  les  démarches  soumises  des  Béni 
«  Guil  avaient  amené  dans  le  Nord-Ouest  du  cercle  une 
«  situation  qui  vient  de  se  dénouer  d'une  façon  très  heu- 
((  reuse  et  qui  ])araîl  lies  complète.  Bou  Amama  se  trouvant 
'(  acculé  dans  une  position  f<^rt  difficile,  menacé  à  l'Ouest 
«  par  les  razzias  des  Beraber,  à  l'Est  par  le  caïd  Abderrah- 


i)0<JiMKMs  i>()i  II  si:iuin  \  i.'iiisioinK  i)i:s  ii\mv\n       3!> 

(I  iiKiii  cl  l(">  P>i'iii  (liiil  (jni  I  iihiiiidi  tiiiniiciil  iiscc  liMCiis, 
((  clKMcliiiil  depuis  lii  lin  (ii-ccmbrc  i"i  bioiiillcr  les  ciiilcs  du 
((  colé  du  cliol!  (Iliiuhi  cl  à  (h'cidcr  le  l'irlciidanl ,  ii\  cr 
((  lc(|uci  M  liiil  ciiuxcoiinnunc,  à  s  ;i\  anccr  sur  l»as-c|-.\ïu, 
<(  des  Ucui  Malliar.  Si  Allai,  jaloux  L\i'  uxtulrcr  sou  dôvouc- 
«  niciil  à  uotif  cause,  loul  eu  iiiiuaul  riidlueucc  ri\ale  de 
«  Bou  Auiania,  nous  a\ail  leiuis  au  courant  des  ugisse- 
((  uiculs  lie  ce  deruiei .  Il  a\ail  sollicilé  noire  appui  en  cas 
«  (le  besoin  conlre  ceux  (jiii  le  luenayaienl.  Il  avait  égale- 
(>  nuMil  l'ail  [jail  de  ses  craintes  au  repiésenlani  du  Sullan 
<i   à  Oiuljda,  Si  Ahtned  Uokina. 

((  Cv  dernier'  l'avait  incité  à  s"as>iu('r  l'appui  des  llani\an 
(I  et  lui  avait  proniis  d'envoyer  de  son  c(Mé  une  colonne 
«  chérilienni'  à  l»as-el- Ain  ofi  elle  devancerait  les  partisans 
"  du  liogui  et  de  Bou  Atuauia.  Mais  tandis  (pie  lîokiua, 
<(  |)réte\lant  le  mauvais  teni|)s,  ajouinait  rexécution  de 
(I  celle  promesse,  les  [)aitisans  du  lîogui  s'avançaient  de 
«  Taza  par  Debdou  et  Bezzonz  ;  leiu-  avant-garde  était  com- 
<(  posée  d'un  goum  nombreux  sous  les  ordres  de  Si  Tayeb, 
«(  lils  de  Bou  Amama.  I^^lle  s'était  fait  précéder  de  lettres 
<(  excitant  les  tiibus  contre  le  Maghzen  et  contre  Si  Allai, 
«  r(>préseiité  conune  vendu  aux  chrétiens. 

«  L'effet  ne  se  lit  pas  attendre  ;  des  djioucli  nondjreux 
<i  appartenant  surtout  à  la  grosse  fraction  des  Béni  (iuil, 
<(  les  Oulad  Ahmed  beu  Abdallali,  et  aux  Oulad  Sidi  Ali 
«  Bou  Ghenafa,  encore  attachés  an  parti  du  Prétendant,  se 
«  l'épandirent  dans  l'Ouest  du  chotl  Gharbi,  forçant  Si 
«  Allai  à  se  l'cplier  sur  Kasdir  et  vers  les  campements  de 
«  l'agha  El  Hadj  Lahbib.  Gelle  reculade  ne  fit  (pi'aug- 
<(  menler  l'audace  d(\s  (Ijiouch  qui  poussèrent  plus  avant 
<(  leurs  incursions  et  midti[)lièrent  tellement  leuis  méfaits 
«  ((ue  le  chef  du  Bureau  arabe  de  Méchéria  n'hésita  pas  à 
((  lever  les  goums  pour  se  rendri^  compte,  à  leur  tête,  de  la 
((  situation. . 

<<  Je  me  trouvais  de  ma  personne  dans  le  choit  Tigri,  en 
((  palabie  avec  le  ca'id  Abderrahman,  au  moment  où  ces 
«  derniers  événements  se  déroulaient.  J'avais  donné  len- 
«  dez-vous  au  capitaine  Toulat  '  au  campement  de  l'agha, 
((  au  choit  Gharbi,  pour  combiner  avec  lui,  le  cas  échéant, 
«  une  action  contre  Bou  Amama  dont,  suivant  vos  ins- 
«  Iructions,  l(>  ca'id  AbdiMiahmaii  devait  s(^  préoccuper  en 
((  ce  moment  même. 

((   J'apj)ris  (Ml  loutc,  à  r\jenan  cl  Adliam,  (pie  le  ca|)itaine 


I   Le  ciipitaine  Toulat  élnil  i-iu'f  du  lUiroau  arabe  de  Méchéria. 


40  DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  u'illSTOlRE  DES  HAMYAN 

((  Toulat  avait  cru  devoir  se  porter  contre  les  djiouch  dans 
((  la  direction  de  Mengoub.  Je  le  rencontrai  quelques 
((  heures  après  à  El  Hamra. 

((  11  me  rendit  compte  des  mesures  énergiques  prises  par 
«  lui.  Il  m'énuméra  les  méfaits  des  djiouch  qui,  la  veille 
((  encore,  avaient  assassiné,  puis  brûlé  un  de  nos  gens  qui 
«  rentrait  seul  et  sans  arme,  de  son  troupeau  à  son  douar. 
((  Il  ajouta  qu'à  Si  Allai  et  aux  Hamyan  venaient  de  se 
((  joindre  un  groupe  important  de  Mehaïa,  que  la  seule 
((  nouvelle  de  la  concentration  des  goums  avait  détaché 
((  définitivement  de  la  cause  des  agitateurs  et  qui  avaient 
((  fait  à  Si  Allai  l'offre  de  se  joindre  à  lui,  sous  la  conduite 
((  du  caïd  Bou  Souar,  pour  agir,  de  concert  avec  les 
((  Hamyan,  contre  les  djiouch  qui  empoisonnaient  la 
((  région. 

«  Cette  offre  ayant  été  acceptée,  le  capitaine  Toulat  se 
({  trouvait  à  la  tête  de  forces  suffisantes  pour  parer  à  toutes 
«  les  éventualités,  malgré  leur  gravité. 

«  Il  ressortait  nettement  de  la  situation  que,  si  nous  ne 
((  prenions  pas  une  vigoureuse  offensive,  nous  aurions 
<(  bientôt  sur  notre  flanc,  s'appuyant  sur  la  position  de 
c(  Ras-el-Aïn,  les  contingents  de  Bou  Amama  et  de  Bou 
<(  Ilamara  comprenant  toutes  les'  forces  disponibles  des 
«  Oulad  Ahmed  ben  Abdallah,  des  Oulad  Sidi  Ali  Bou  Ghe- 
«  nafa,  des  Béni  Mathar. 

((  (Convoqué  moi-même  à  Forthassa  Gharbia,  je  laissai  au 
«  capitaine  Toulat  la  direction  des  opérations  en  lui  recom- 
«  mandant  de  prendre  le  contact  le  plus  tôt  possible  av3C 
«  les  djiouch,  de  les  pomsuivie  jusqu'à  leurs  campements, 
«  d'entrer  en  relations  avec  les  tribus  et  de  chercher  à  obte- 
((  nir  un  accord  dans  le  genre  de  celui  intervenu  récem- 
((  ment  à  Figuig  avec  les  Béni  Guil. 

«  Je  laissai  le  capitaine  Toulat  juge  des  moyens  à 
((  employer,  le  connaissant  assez  pour  pouvoir  être  certain 
«  que  cette  opération  de  police  serait  dirigée  de  façon  à 
((  obtenir  des  résultats-  sérieux  par  des  procédés  oii  la 
«  ligueur  ne  tiendrait  que  la  place  strictement  nécessaire. 
'<  Je  limitais  en  même  temps  son  action  vers  le  Nord  au 
«  point  de  Bas-el-Aïn  des  Béni  Mathar,  qui  est  sensiblement 
((  sur  la  ligne  des  chotts,  dont  la  reconnaissance  était  inté- 
«  ressante  et  qui  pouvait  lui  fournir  à  l'occasion  un  point 
«  d'appui  sérieux  et  à  portée  de  secours. 

«  J'étais  d'ailleurs  certain  qu'il  ne  pouvait  pas  y  avoir 
«  de  complications  avec  le  Maghzen  chérifîen.  Si  Rokina 


DOCUMENTS  POUR  SKIUIU  A  l'illS  lOI  KK  DES  HAMYAN         41 

«  ;iy;iiil  Irinoi^iK'  liaiiliinciil  de  sa  l'criiic  volonlc'-  (l"ii|)- 
<(  pioiivci  l(»iil  ce  (|iii  serait  fuil  [)ar  Si  Allai  pour  lamciirr 
«  la  paix  dans  ct'tic  région  troublée,  soit  seul,  soit  de  eoii- 
(I   cert  avec  les  autorités  algériennes. 

((  .le  ia|)[)elai  enlin,  en  terminant  mes  instructions  au 
<(  capitaine  Toulat,  de  ne  pas  oublier  que  Bou  Aniama  n'a 
<(  |)as  cessé  d'élre  l'âme  de  toutes  les  révoltes,  que  c'est,  en 
('  somme,  contre  lui  (|ue  se  joue  en  ce  moment  la  partie. 
«  Fn  exécution  de  ces  ordres,  le  capitaine  Toulat  se  porta 
«  avec  ses  ijoums  dans  la  direction  de  Mengoub,  précédé 
«  de  fortes  |)alrouilles  (|ni  léussiient  à  atteindre  cin<| 
«   djicheurs. 

«  Ces  indiofènes  avaient  été  entourés  par  le  goum  et  pris 
«  avant  d'avoir  pu  se  défendre,  ils  déclarèrent  appartenii- 
«  à  l'entourage  de  Bon  Amama.  Ils  sont  originaires  des  Béni 
«  Guil,  fraction  des  Oulad  Ramdan. 

((  Afin  de  bien  donner  l'impression  qu'il  ne  voulait  user 
«  autant  (jue  possible  que  de  clémence,  le  capitaine  Toulat 
«  les  remit  à  Si  Allai  fjui  s(>  chargea  simplement  de  leur 
«  garde. 

«  \a'  goum  laniena  également  trois  cavaliers  des  Oulad 
('  Bel  T.ahcènc  Béni  Cuil,  mais  ceux-ci  piotestèrent  de  Icnus 
«  bonnes  intentions.  Ils  venaient,  disaient-ils,  apporter  à 
«  Si  .\llal  et  aux  Hamyan  des  nouvelles  de  l'Ouest. 

((  Ces  nouvelles  qui  sont  résumées  ci-dessous  et  dont 
«  l'exactitude  fut  démontrée  par  la  suite,  peimircnt  au 
«  capitaine  Toulat  d'arrêter  son  plan  d'opérations. 

'<  Bou  Amama  avait  eu  le  pressentiment  d'une  action 
(1  })rochaine  du  caïd  Abderrahman  contre  lui,  à  la  suite 
«  de  l'entrevue  de  Figuig. 

'<  Il  avait  écrit  à  toutes  les  tribus  Béni  Guil,  encore  en 
«  dehors  de^  l'action  de  ce  chef  fet  de  plus  aux  Oulad 
"  Ahmed  ben  Abdallah,  Béni  Mathar,  IMehaïa,  Oulad  Sidi 
<(  Ali  Bou  Chenafa\  leur  disant  : 

<(  Le  caïd  Abderrahman  s'est  vendu  aux  Français.  Si  vous 
«  désirez  le  triomphe  de  la  cause  de  la  religion,  tombez  sur 
«  les  trou[)eaux  des  Hamyan  et  de  tous  ceux  qui  se  sont  l'ap- 
((  proches  d'eux.  ■Mon  fils  s'est  rendu  auprès  du  sidtan 
a  Moulay  M'hammed.  Il  se  portera  à  votre  secours  avec 
((  une  colonne  commandée  par  le  fils  d'El  Hadj  .\bdel- 
((  kader,  qui  est  au  service  du  Sultan  '.  Nous  razzierons 
«  ensemble  tous  ceux  qui  ont  fait  la  paix  avecles Français.» 

I  II  s'agissait  frAbdelmak-k  ould  El  HaH.j  Abdclkader.  artiiellement  à  In 
solde  des  .\llemands  et  des  Turcs  et  opérant  contre  nous  au  Nord  de  Taza. 


42 


DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  I,  HISTOIRE  DES  RAMYAN 


((  Ce  sont  ces  excitations,  ajoutaient  les  informateurs, 
(jui  ont  causé  tous  les  djiouch  dont  vous  avez  eu  à  vous 
plaindre. 

((  Quant  à  nous  (Oulad  bel  Lahcène  et  Oulad  Farès)  nous 
nous  sommes  séparés  de  Bou  Amama  dès  que  nous  avons 
su  la  paix  qui  avait  été  faite  à  Fig'uig"  et  (pi'Abderrahman 
avait  dit  :  «  Si  Dieu  nie  prête  vie,  je  foulerai  le  sol  du 
tnerah  (milieu  du  douar)  de  la  zaouïa  de  Bou  Amama.  » 
«  Ensuite,  (fuoiqu'après  quelques  hésitations,  ces  gens 
indiquèrent  au  capitaine  Toulat  les  emplacements  et 
l'importance  des  campements  d'où  partaient  les  djiouch 
dont  le  passage  continuel  en  était  venu  à  effrayer,  à 
rendre  indécis  et  flottant  le  groupe  des  Oulad  belFahcène 
et  des  Oulad  Farès. 

((  Ces  campements,  oh  l'on  se  déclarait  hautement  pour 
Bou  Amama  et  pour  Bou  Ilamaia,  comprenaient  les 
Oulad  Ahmed  ben  Abdallah,  les  Oulad  Djabeur,  les 
Alouana,  les  Oulad  Ramdan,  les  Oulad  Mahjoub  des 
Oulad  Youb,  des  Oulad  Khreider,  des  Oulad  Hadji,  for- 
mant un  groupe  de  3oo  tentes  installées  au  delà  du  Djebel 
Tiskennit,  les  Oulad  Sidi  Ali  Bou  Chenafa  installés  à 
Méi'idja  et  comprenant  Boo  tentes.  Ces  divers  campe- 
ments attendaient  la  venue  de  Si  Tayeb  ou  de  Bou 
Amama  qui,  pour  triompher  des  efforts  en  sens  inverse 
du  caïd  Abderrahman,  faisait  annoncer  son  arrivée  tous 
les  jours.  Mohammed  ould  Dahman,  le  plus  notable  des 
trois  cavaliers  qu'avaient  lamené  les  patrouilles  ne  put 
donner,  d'ailleurs,  malgré  sa  bonne  volonté,  aucune 
indication  sûre  sur  les  progrès  de  Si  Tayeb,  tandis  qu'il 
fit  entendre  nettement  que  si  Bou  Amama  lui-même  ne 
recevait  pas  immédiatement  des  secours  du  Prétendant  et 
des  tribus  ci-dessus  désignées  favorables  au  Bogui,  il 
était  acculé  à  une  impasse,  se  trouvant  abandonné  par  la 
grande  majorité  de  ses  anciens  compagnons  Béni  Guil  et 
Zona  qui  rejoignaient,  les  premiers,  le  caïd  Abderrah- 
man, les  seconds.  Si  Allai. 

«  Tels  sont  les  renseignements  (pie  recueillit  le  Chef  du 
Bureau  arabe  de  Méchéria  auprès  diupiel  Si  Allai  insista 
vivement  sur  l'urgence  d'une  action  immédiate  qui  ne 
manquerait  pas  de  donner  le  dernier  coiq)  au  prestige  de 
Bou  Amama  et  d'arrêter  le  mouvement  en  avant  pro- 
noncé par  Si  Tayeb  et  les  partisans  du  Bogui. 
<'  Le  capitaine  Toiilat  n'hésita  pas  et  partit  pour  Oglat 
Cedra. 


DOCUMENTS  POIR  SERVIR  A   l/ll  IS  lOI  RE  DES  FIAMYAN         43 

"  Il  >  icrill  iiti  iiiiad  (!(••.  Oiil.id  hcl  l.iili crue  cl  des  Oiilnd 
«  l''iii('s  (lîcni  (iiiil)  sons  |ji  coiidiiilc  du  |;dcl)  Mchiirrk,  ijnj 
«  se  j()i<iiii|  de  sji  pcrsomic  aii.v  jrounis  cl  fil  diiip'i  les 
(<  campcnicnls  de  ces  fraclions  vers  ceux  du  caïd  Aljdcr- 
«   ridiiiiiiii. 

"  Les  Oïdiid  \liriicd  hrti  Vhdidiali,  an  conl  taire,  an  lieu 
"  <!'•  M'tiii  se  piéscnici'  [tour  rcccxoii'  l'aman,  comme  ils 
«  \  avaient  clé  invilcs,  dccampèrcnl  pour  se  rél'n;.'ier  dans 
(I    la  ffada  de  Delxlon  par  l^tnin  Be/zon/. 

"  f.e  capilaine  Tonlal  les  allcjonil  par  nne  maiclie  de 
<i   nuit  très  pénible  dans  la  neige,  par  un  froid  rigoureux. 

('  n  les  rejoignit  (lans  les  gorges  à  l'Ouest  de  Méridja, 
«'  au  lever  du  jour,  le  :>  i  février,  et  fut  reçu  par  une  Vive 
((   fusillad(\ 

«  Mais  les  goums,  ayant  à  leur  léle  l'agha  El  Habib,  se 
«  lancèrent  avec  beaucoup  d'élan  et  les  douars  furent 
"  enlevés  et  razziés. 

<'  L(>  eauipemenl  fut  dressé  le  soir  sur  l'Oued  Sidi  Ali, 
«  (l'on  Ion  envoya  prévenir  les  Oulad  Sidi  Ali  Bon  Chenafa 
«  (pi'ils  eussent  à  faire  connaître  leurs  intentions,  que  nous 
«  étions  décidés  à  imposer  la  paix,  ainsi  qu'ils  devaient 
«  déjà  le  savoir  par  les  lettres  du  caïd  Abderrahmaii. 

«  Le  lendemain,  le  camp  fut  porté  au  point  d'eau  de 
<(  Méridja  où  je  lejoignis  le  capilaine  Toulat  et  d'où  je  me 
«  hâtai  de  vous  télégraphier  par  le  cavalier  du  caïd  des 
"  Béni  ATathar.  qui  se  chargea  de  faire  poilcM'  notre  cour- 
«   rier  à  El-Aricha. 

«  Ce  chef  indigène  ayant  appris  le  mouvement  offensif 
"  des  ofoums  de  Si  Allai  et  des  Hamyan,  rendu  très  inquiet 
«  par  l'attitude  louche  de  ses  gens  pendant  les  événements 
«  de  ces  derniers  jours,  venait  protester  de  son  dévouement 
'(  au  i>aili  de  l'ordre  et  demander  l'aman. 

«  Je  le  rencontrai  à  Oglat  Cedra,  tandis  (pie  je  me  por- 
«  tais  sur  les  traces  du  capilaine  Toulat. 

«  .Te  lui  promis  inmiédiatement  l'aman  en  ajoutant 
«  (fu'en  ce  (pii  c(Uicei'nait  le  règlement  de  ses  affaires  avec  le 
«  Maghzen  chérifien,  il  devait  s'adresser  à  Si  Allai,  que, 
<<  (pianl  à  nous,  notre  but  unique  était,  pai  l'application  du 
'<  droit  de  suite,  de  faire  respecter  la  paix  sur  notre  leiri- 
«  toire,  que  d'ailleurs  les  boimes  relations  qui  existaient 
«  entre  les  deux  Gou\(>rjit>menls  français  et  chérifien  mefai- 
«'  saient  espérer  que  le  Maghzen  tiendrait  compte  de  nos 
«  avis  sur  la  façon  de  traiter  les  Béni  Mathar. 


44         DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'uISTOIRE  DES  HAMYAN 

«  Je  tins  le  même  discouis  au  caïd  Bou  Souar  qui  avait 
pris,  sur  l'ordre  de  Si  Allai  et  en  présence  du  capitaine 
Toulat,  certains  engagements  vis-à-vis  du  Maghzen  et 
vis-à-vis  de  nous. 

«  Je  leur  fis  comprendre  à  tous  que  nous  n'avions  pas  à 
intervenir  dans  les  affaires  intérieures  du  Maghzen,  mais 
que,  toutefois,  nous  ne  pouvions  (fue  leur  conseiller  la 
soumission  la  plus  complète  à  ses  ordres,  car  il  était  plus 
évident  que  jamais,  après  ce  qui  venait  de  se  passer,  que 
le  Prétendant  n'était  qu'un  dangereux  révolté,  puisqu'il 
acceptait  de  lier  ses  intérêts  à  Bou  Amama,  dont  l'atti- 
tude depuis  vingt  ans  était  notoirement  hostile  au  bien 
et  à  la  paix. 

((  Cependant  les  Oulad  Sidi  Ali  Bou  Chenafa,  effrayés 
par  le  sort  des  douars  razziés  à  l'Ouest  du  Djebel  Tisken- 
nit,  avaient  envoyé  une  lettre  protestant  de  leur  dévoue- 
ment au  Sultan  Moulay  Abd-el-Aziz  et  du  désir  où  ils 
étaient  de  rester  dans  le  bien  et  dans  la  paix. 
('  Je  fis  dire  aux  notables  de  venir  et  je  restai  un  jour  de 
plus  en  station  à  Méridja  pour  les  attendre.  Au  lieu  de  se 
présenter,  ils  se  retirèrent  plus  loin  dans  la  direction  de 
Debdou.  Un  espion  nous  apprit  ce  mouvement  en  ajou- 
tant que  les  Oulad  Sidi  Ali  tenaient  à  rester  au  parti  du 
Prétendant  et  avaient  envoyé  demander  l'appui  de  Si 
Tayeb  ould  Bou  Amama. 

((  L'espion  ajoutait  que  Si  Tayeb  après  s'être  avancé  vers 
l'Est,  dans  la  direction  de  Foum  Bezzouz,  étîiit  revenu  à 
Debdou  où  il  devait  se  trouver  encore,  que  ceux  qui 
venaient  de  là  avaient  affirmé  qu'il  n'avait  avec  lui  qu'un 
faible  goum. 

((  Il  est  presque  certain  que  la  colonne  annoncée  par  Bou 
Amama  était  un  des  bluffs  dont  il  est  coutumier  pour 
pousser  les  Arabes  dans  les  aventures. 
«  Pour  essayer  encore  d'agir  pacifiquement,  j'ai  adressé 
une  lettre  aux  Oulad  Sidi  Ali  Bou  Chenafa. 
"  Déjà   en   rejoignant  le  capitaine  Toulat,   j'avais  fait 
appeler  le  taleb  Mebarek  Cnotable  des  Oulad  Farès,  Béni 
Guil,  qui  marchait  avec  le  capitaine  Toulat)  et  je  l'avais 
envoyé  au  caïd  Abderrahman  porteur  d'une  lettre. 
((  Dans  ces  conditions,  j'espère  que  tous  seront  bien  fixés 
sur  nos  intentions.  Tl  ne  peut  faire  de  doute  pour  per- 
sonne que  la  présente  action  a  été  déterminée  par  des  cir- 
constances   urgentes,    indépendantes  de  notre  volonté, 
mais  dont  nous  avons  profité  pour  prouver  notre  force  et 


DOCUMENTS  POtIR  SERVIR  A  l'iiisTOIRE  DES  HAMYAN         45 

«   la    fcriiic    iiili'iilidii    où    nous    sommes    de,    nous    faire 
«  respecter. 

'<  ('cite  (léiiioiislralioii  n'aura  pas  coûté  nn  sou  et  n'«'n 
«  aura  pas  moins,  j'eii  suis  persuadé,  un  très  grand  elTet 
«  utile. 

«<  Le  eapilaine  Toulal,  (pii  s'était  bien  |)énétré  de  vos 
«  idées  sur  ee  point,  mon  généial,  n'a  pas  perdu  de  vue  un 
«  seul  inslani  (|ue  l'action  contre  Mou  Amama  était  votre 
«  principal  objectif  ;  si,  malgré  cela,  il  na  pas  pris  le  parti 
«  d'agir  immédiatement  C(»ntre  lui,  c'est  après  avoir  réllé- 
"  chi  sérieusement. 

«  La  distance  à  laquelle  se  trouvait  Bon  Amama  était  trop 
«  grande  pour  (ju'il  put  l'atteindre  avec  des  g(»ums  levés 
«   très  rapidement,  presque  sans  vivres. 

"  l.e  marabout  était  forcément  sur  ses  gardes,  par  suite 
«  du  reloiu'  chez  lui  de  tous  les  djiouch  (jue  le  nK)Uvement 
«  des  Kamyan  avait  repoussés. 

(<  Parmi  les  contingents  de  Si  Allai  se  trouvaient  des 
'<  Zoua  séparés  très  récemment  de  Bon  Amama  par  la 
«  misère  plutôt  que  par  la  désaffection.  Ces  ferments  pou- 
<'  vaient,  dans  le  goum,  faire  lever,  même  chezlesHamyan, 
"  où  les  amis  de  B<ni  Amama  sont  encore  nombreux  dans 
«  certaines  tribus,  des  éléments  de  discorde  d'autant  plus 
■<  dangereux  que,  malgré  nos  efforts  persévérants,  le  goum 
('  était  encore'à  l'état  de  horde. 

'<  Dans  ces  conditions,  le  capitaine  Toulat  préféra  se  bor- 
'<  ner  aux  opérations  ipii  ont  été  relatées  ci-dessus  et  qu'il 
"  avait  la  quasi  certitude  de  mener  à  bien,  plutôt  (jue  de  se 
«<  lancer  dans  une  aventure  au-dessus  de  ses  forces. 

«  L'opération  que  vient  de  tenter  avec  succès  le  capitaine 
«  Toulat,  les  résultats  heuieux  qu'il  a  obtenus,  permettiont 
«  dans  quelques  jours,  de  marcher  de  nouveau  avec  les 
'<  goums  dans  des  conditions  beaucoup  meilleures. 

«  Les  contingents  ont  reçu,  pendant  les  journées  qui 
«  viennent  de  s'écouler,  une  instruction  sérieuse  qui  se  per- 
<'  fectionnera  encore  au  retour  et  qui  les  rendra  plusmania- 
«  blcs,  moins  sujets  à  une  panique,  toujours  à  craindre 
«  lorsqu'on  marche  contre  un  ennemi  aussi  aguerri  (pie 
»  le  noyau  de  coui)eurs  de  route  qui  forme,  pour  ainsi  dire, 
«  la  ^arde  d'honneur  de  Bon  Amama. 

"  Nos  gens  ont  été  mis  en  confiance  par  ]o  netfovage  qui 
«  vient  d'être  fait  dans  la  région  de  l'Ouest. 

"  Ils  peuvent  maintenant  s'éloigner  plus  au  Sud  sans 


46         DOCUMENTS  POIR  SERVIR  A  l'iIISTOTRE  DES  HAMYAN 

((  avoir  lu  piéoccu|)ali(>n  de  penser  (in'iiii   iiiitre  ennemi 

((  iiienaee  leurs  campements  dégarnis. 

«    l"]nlin,  le  caïd  Abderiahman  a  le  temps  d'agir  ou,  s'il 

((  ne  se  sent  pas  assez  fort,  de  saper  la  puissance,  grande 

i<  encore,  de  Bon  Amama  dans  la  région.  S'il  réussit  à  pur- 

((  ger  le  pays  de  l'agitateur,  il  devra,  à  moins  de  mauvaise 

(I  foi,  reconnaître  (pi'il  a  été  puissamment  aidé  dans  son 

((  action  par  l'opération  de  police  (pi(>  nous  venons  de  faire, 

«  et  s'il  n'obtient  pas  de  lésnllats,  nous  serons  prêts,  mon 

((  général,  soit  à  l'appuyer,  soit  à  le  suppléer. 

«  Les  circonstances  étaient  telles  cpie  toute  action  contre 
«  Bou  Amama  devait  forcément  compiendre  deux  opéra- 
ce  lions  :  la  première,  vers  l'Oucsl,  que  j'appelle  l'action 
«  défensive,  puisqu'elle  était  destinée  seulement  à  parer 
<(  aux  agissements  agressifs  du  marabout,  que  je  vous 
('  signalais  depuis  deux  mois,  la  deuxième,  offensive,  (jue 
('  j'aurais  combinée  d'ensemble  avec  la  première  et  d'ac- 
('  cord  avec  le  caïd  Abderrahman,  si  je  n'avais  pas  été  pré- 
ci  venu  par  les  événements  qui  ont  amené  le  capitaine 
«  Toulat  à  i)rendie  l'initiative,  très  justifiée,  d'une  action 
((  immédiate.  » 


Malgré  toutes  ces  explications,  l'action  de  guerre  (jui 
avait  été  opérée  fut  jugée  contraire  à  la  politique  générale 
suivie  et  les  llamyan  fui'cnt  obligés  de  restituer  les  trou- 
peaux qu'ils  avaient  razziés. 

T.e  capitaine  du  Jonchay  en  voyant  que  la  politique  (pi'il 
avait  suivie  jus(ju'alors  était  désaNouée,  (piitta  le  comman- 
dement du  cercle  de  Méchéiia. 

1/aglia  El  Habib  ould  Mebkhoul  resta  pendant  six  mois, 
à  Algei',  en  disgi'ace,  éloigné  de  son  commandement. 


*  * 


A  paitii'  de  cette  épo(pie,  le  changement  survenu  dans 
l'oiientation  de  notre  politicpie  obligea  les  Hamyan  à  des 
lelations  meilleures  avec  leurs  voisins  et  marqua  la  fin  de 
l'époque  héroïque  et  heureuse  où,  suivant  l'expression  de 
l'un  d'eux  :  c  avec  un  bon  fusil  et  un  cœur  sans  crainte, 
l'homme  pauvie  hier  pouvait  devenir  riche  aujourd'hui  ». 

TIs  ne  se  plière?il  d'ailleurs  qu'avec  regret  à  celte  nouAclle 
façon  de  vivre. 


DOCI    MI;MS  l'Ol    R  SKUMh    \   1,'lllSTfHUE  lues  n\MY\N  i7 

C/csl  iiiii-^i  (inCii  Miiiis  H)'>7,  1<'  ((iiiiiiiiiikIjiiiI  l'ciii'  dut 
l'ciidn'  ('()iii|)l('  iiii  (iriK'iiil  (-(iiiiiiiiindiiiil  lii  hivisioii  (jiic 
dc^  iiidii^riic^  de-  (  )(d;i(l  M;i  lisoiiiîdi  iiviMciil  V(tl<''r)Vl  rrioii- 
liiiis  iiii\  liciii  (iiiil.  Il  idiiiiiil  i-ii  niriiir  Irinps  riiilcMlioii  du 
«>(''iit''i  ;il  -III-  l'iiHiliidc  t''(|ui\n(|iic  d'Id  Ihidj  Id  Hiihil)  (|iii 
nllciidil,  |i(Mii   >i;4iiiilci-  le  fjiil,  (|iic  ridïiiirc  lui  (''\  cjitrr'. 

l'Iiis  liird,  Ifs  llamNiiii  rt''|)ii  iidii  ciil  clicz  leurs  Noisiiis  le 
hi'iiil  (|ii<'  les  sii^iiiiiix  ((•iisl  luils  piir  les  missions  ^«-«''odôsi- 
(|U(>s  ;i\ai(-iil  pour  ohjcl  de  tuiiicpicr'  une  di'diiiiiliilioii  ciiln' 
les  Icniloiirs  des  deux  <iidii[)ciii('iils.  Il»  eu  piolitriciil  pour 
porter  leurs  campeiueiils  n  I Ouest  de  leur  zone  luihitiielle 
de  paca^ic.  Mécontents,  les  Heiii  (Juil  détruisirent  à  plusieurs 
reprises  ces  sjornaux.  Le  j^énéral  Alix  dut  inviter  le  Coni- 
niaiidanl  Supéiieur  de  Méchéria,  eu  rinforiuanl  de  cet  inci- 
dent (5  janvier  U)io\  à  niainlenij-  sfiicteinent  les  Ilamyan 
dans  leius  territoires  '. 

Il  fallut  leur'  rappeler  le  mois  suivant  les  niénies  piescrip- 
tions  à  la  suite  d'une  rixe  sérieuse  qui  venait  d'éclater  entre 
bei'tJ^ers  des  Ale<)iiaoulia  et  des  Béni  (liiil  Oiijad  l'eues  pour 
la  possession  de  r'dirs  peu  altoiidaiits  evislaid  dans  lOued 
Rou  l.ardjaru. 


*  * 


]/.\  création  des  postes  de  lî<>roiienl  et  de  l^'oitliassa  (lliar- 
hia  eu  190/1  contribua,  d'ailleurs,  à  obliger  les  Uaïuyan  à 
\i\re  en  meilleurs  teiuies  avec  leurs  voisins  de  l'Ouest. 

Reroiieut  d'aboid  dépendant  exclusivement  du  cercle  de 
Mécliéria  fut,  plus  tard,  rattaché  à  l'annexe  d'EI-Aricha 
jus(|u'au  .jour  ofi  il  fut  remis  au  Maroc  Oiiental. 

Son  action  s'étendit  sur  les  tribus  marocaines  des  Béni 
Mathar,  des  Mehaïa  ^sauf  les  Oulad  Boubaker  d'El  Hadj 
Aliloudi,  les  Béni  Yala  Oulad  Uakti.  les  Oulad  Amor  Djebel 
Mekami,  les  lîeni  Guil  du  Dahra,  les  Sedjaa  d"FI  Xïoun  Sidi 
Mellouk,  les  Zekkara,  les  «jens  de  Debdou. 


1  fili)rifiis('mi'iit    liinilii''  coiiniic  iiiluiici.   en    nii.'.  ;'i    Cairncy. 

2  II  y  ;i  lieu  (lo  iMjipc'îcr  (iiii-ii  lévrier  ii;)oi<  un  évciiernoiit  CHiaiiiih-iix  se 
pi'iuliiisit  sur  \c  Ipriitoirc  «lu  cei-cl<'.  lue  compHfrnie  du  ■:>'  Hépimoiil  Etnmpor 
ronim:iii(i«''o  par  le  capitaine  Capillery  ipii,  venant  de  lîerfrnent.  npérail  uii 
tliaiiirenieiit  de  «rarnison,  fut  «nrprise  par  nue  tempête  de  nei^'e,  entre  Aïn- 
Heii-Klielii  el  F(>''tliassa  Charbia.  vers  Haci  Sféïa,  et  «e  débanda.  Ounranle 
léfjidnnaires  moururent  de  frnid.  Les  autres  furent  seecinrus  par  b-s  Vkerma 
(|ni    montrèrent   en   rette  circonstance   un   remarquable   dévouement. 


48         DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

De  plus,  sur  le  tcrii luire  de  Bcrguenl  même,  et  à  i5  kilo- 
mètres environ  à  l'Ouest,  était  fixée  une  partie  des  Oulad 
8idi  Cheikh  Gheraba  marocains,  avec  Si  Allai  ;  l'autre  partie 
était  avec  Bou  Amama. 

Dans  l'Oued  Charef,  oii  les  Hamyan  algériens  possèdent 
des  droits  de  pacage  concurremment  avec  les  Béni  Mathar, 
les  Béni  Guil  et  les  Zona  i  marocains,  l'action  française 
s'exerça  surtout  par  la  voie  commerciale. 

La  prospérité  du  marché  de  Berguent  augmenta  tous  les 
jours.  11  faut  reconnaître  qu'elle  dépendait  en  grande  partie 
de  Bou  Amama  qui,  par  suite  de  ses  bonnes  relations  per- 
sonnelles avec  le  capitaine  Gauthier  (J.  B.  A.),  chef  du 
Bureau  des  Affaires  indigènes  de  Berguent  ^,  laissait  les 
indigènes  circuler  en  paix  et  commercer  en  toute  sécurité. 

Presque  toutes  les  tribus  qui  frétfuentaient  ce  marché,  ou 
qui  étaient  installées  dans  les  environs,  appartenaient  au 
parti  du  Rogui,  toutes  subissaient  la  très  grande  influence 
religieuse  de  Bou  Amama. 

Il  n'existait  aucun  représentant  du  Maghzen  ;  certains 
caïds  avaient  des  cachets  du  Piétendant,  tel  le  caïd  El 
Amraoui,  des  Oulad  Amor. 

Tout  ce  fju'il  était  possible  d'obtenir  de  ces  populations 
était  de  garder  la  neutralité.  Toute  tribu  (fui  demandait  à 
fréquenter  notre  marché  était  tenue  de  ne  plus  pr(Midre  une 
part  active  dans  les  luttes  de  l'Ouest  entre  le  Maghzen  et  le 
Rogui . 

La  paix  ne  fut  tioublée  qu'en  iqoB,  par  une  razzia  opérée 
par  3oo  cavaliers  et  rîoo  fantassins  du  Maghzen  sur  une 
caravane  des  Oulad  Amor  revenant  du  marché  de  Ber- 
guent et  ne  prenant  pourtant  aucune  part  active  au  mou- 
vement roguiste. 

L'action  française  fut  de  plus  en  plus  active  et  efficace 
sur  la  confédération  des  Béni  Guil. 

L'amel  de  Figuig,  dont  ils  dépendaient  nominalement, 
n'avait  aucune  influence  sur  eux. 

Les  Béni  Ghoméracen  (Oulad  Youb  et  Oulad  Hadji)  plus 
éloignés  de  nous,  subissaient  moins  notre  contact,  restaient 
plus  accessibles  aux  influences  hostiles. 

En  1906,  le  commandant  Pein,  Commandant  Suy^érieur 
du  cercle  de  Méchéria,  se  rendit  chez  eux  et  séjourna  à 
Métarka. 


I    Zona,  ((  Gens  âc  lu  Zaonïa  »,  expression  employée  pour  flésiprner  les  Onlad 
Sidi  Cheikh. 

a  En   191.'),  Chef  île  l'annexe  d'Aïn-Sefra. 


DOCUMENTS  POUR  SERN  IH  A  l/ HISTOIRE  DES  IIAMYAN         49 

LuiiR'l  de  Figuig  essaya  de  piuluslt'i- ' . 

Iji  i()()<S,  1«'6  IViKiioiis  dri  Bciii  <iiiil  (ilieraba  i^Oulad 
^oub,  Uiilad  lladjii  cl  Oulad  Aliiiicd,  canipécs  en  iiiai.s 
dans  la  région  du  landcll,  cMNoNcrenl  à  la  liaïka  de  Sidi 
Mohaniiiicd  bcn  Sobaï  (juclques  cunlingiMils  sans  que  la 
masse  lil  lien  pour  s'y  opposer.  iAlïaire  de  Jiou  iJenibj 

Kn  jnènie  temps  les  bruits  les  plus  fantaisistes  circulaient 
à  Heiyuenl  chez  les  Béni  Malhai ,  sur  le  succès  certain  de 
I  agitateur  et  sur  noire  évacualion  piochaine  du  pays. 


1  La  lellro  Mii\imtc  ;ulrc*sée  p;ir  le  cluikli  .Muliiuuiiied  Itcu  lliil)ib  (Ji'>  Oiilinl 
Faiès,  des  Oulad  AUlcinilimaiic  au  (Jlicf  des  .MTaiies  iiidigèues  dWïii-Sffia 
est  caractéristique  à  cet  endroit   : 

«  Je  vous  aunouce  que  l'ainel  de  Fiyuig  mous  a  inlligé  une  amenj»;  d<- 
«  i.ooo  francs,  pour  nous  être  présentés  au  commandant  Fein  et  à  vous,  Inrs 
«  de  votre  reconnaissance  de  Metarka.  Nous  n'attachons  aucune  inqjortance  à 
«  cette  amende  que  nous  ne  paierons  pas  ;  cependant,  comme  nous  sommes 
((  unis  avec  le  Gouvernement  français  et  que  nous  suivons  la  même  voie,  nous 
«  vous  demandons  de  traiter  l'amcl  conmie  il  l'a  fait  injustement  à  notre  égard, 
«  pour  l'empêcher  de  recommencer.  » 

A  la  lin  d'une  réunion  tenue  par  les  chioukh  des  lieni  Guil  à  Deiilia,  lors- 
qu'ils eurent  prêté  serment  de  tout  sacrifier  pour  conserver  notre  amitié,  un 
soldat  de  l'amel  vint  prier  le  caïd  Ahderrahman,  de  la  part  de  son  maître,  de 
se  rendre  à  la  casba  pour  y  recevoir  une  lettre  du  Sultan  lui  renouvelant  l'inves- 
titure de  caïd  qui  lui  avait  été  donnée  en  iSijlt.  Ahderrahman  donna  l'ordre  à 
ce  messager  de  se  retirer  et  d'aller  dire  à  l'amel  qu'il  n'avait  que  faire  di'un 
parchemin  sans  valeur. 

Cette  réunion  avait  lieu  en  igoô,  à  Defilia,  à  quelques  kilomètres  à  l'Ouest 
de  Figiiig  ;  le  moment  était  grave,  les  tribus  très  surexcitées  par  les  bruits 
répandus,  on  pouvait  craindre  qu'il  n'en  sortit  la  rupture  du  pacte  de  t((o4. 
Elle  se  prolongea  du  S  au  12  janvier,  au  milieu  d'un  immense  douar  formé 
de  tentes  appartenant  à  toutes  les  tribus  de  la  confédération.  Le  caïd  Ahder- 
rahman prit  la  parole  :  «  Notre  attitude  passée,  dit-il,  ne  nous  a  valu  que 
«  haines  et  misères.  Bon  Aniama  nous  avait  couverts  de  sa  baraka  el  nous 
I'  avons  été  ruinés.  Nous  avons  razzié  les  tribus,  les  colonnes  et  les  troupes 
»  françaises  mêmes,  au  nom  du  faux  marabout  el,  quelques  mois  après,  nous 
«  sommes  venus  en  mendiants  implorer  les  autorités  que  nous  avions  insul- 
«  lées.  C'est  moi  qui  vous  y  ai  conduit  parce  que  c'est  moi  seul  que  vous 
«  écoutez  dans  les  jours  de  détresse  et  de  danger.  Nous  avons  enfin  trouvé  la 
n  paix  et  le  bien-être.  Je  vous  conjure  de  ne  pas  céder  aux  dangereuses  solli- 
«  citations  des  gens  du  dehors  et  de  resserrer  encore  les  liens  qui  nous  unissent 
«  aux  Français.  » 

A  la  suite  de  cette  harangue,  tous  les  <  liiuukli  présents  jurèrent  solennellement 
sur  le  Coran  de  travailler  sans  relâche  au  maintien  de  la  paix,  de  rester  sourds 
à  l'appel  des  séditieux  et  de  prêter  leur  concours  le  plus  dévoué  au  Gouverne- 
ment français  qui  les  avait  si  généreusement  accueillis.  Ils  s'engagèrent  à 
nous  assurer,  dans  toutes  les  occasions,  l'appui  de  leurs  goums,  à  donner  la 
chasse  aux  djiouch  et  a>ix  rezzous  qui,  ayant  nos  tribus  pour  objectif,  cher- 
cheraient à  passer  sur  leur  territoire  et  à  déférer  à  toutes  les  réquisitions  que 
nous  pourrions  avoir  à  exercer  sur  eux.  Il  fut  décidé  que  les  Oïdad  Ben  Abdal- 
lah qui  avaient  négligé,  malgré  l'invitation  qui  leur  avait  été  faite,  de  se  faire 
représenter  à  la  réunion  par  leurs  chefs,  seraient  considérés  jusqu'à  nouvel 
ordre  comme  étrangers  à  la  confédération. 


^0  DOCIMEMS  POUR  SERVI  K  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

Par  mesure  de  répression  eolleelive  el  pour  donner  à 
tous  linipression  (ie  noUc  eonliance  en  nous-mêmes,  les 
troupeaux  des  ik'iii  (iuil  (iheraba,  venus  sur  le  marché  de 
Herguenl  le  i!\  mai,  i'urenl  saisis  el  avis  lui  donné  aux  frac- 
lions  des  Béni  Guil  compromises  que  l'aman  ne  leur  seiait 
accordé  qu'après  le  paiement  d'une  amende  de  600  mou- 
lons (pie  des  députalions  de  loules  les  fractions  devaient 
amener  à  Mélarka  le  10  juin. 

L'ne  reconnaissance,  partie  de  Berguenl  le  3  juin,  devait 
à  cet  effet  se  renconlier  à  Mélarka  avec  le  groupement  de 
Berguenl  el  les  goiuns  des  llamyan  de  retour  de  Bou  Dcnib. 

Le  programme  primitif  de  celle  dernière  colonne  com- 
portait la  reconnaissance  d'Anoual  ;  mais,  en  raison  de 
l'effervescence  de  cette  région  et  de  l'effectif  relativement 
faible  de  son  groupe,  le  commandant  Pein  dut  se  borner  à 
pousser  de  Tioudadin  une  pointe  rapide  sur  Anoual  et  à  se 
replier  vers  l'Kst  sans  avoir  séjouiné  à  Anoual'. 

La  situation  des  Ait  Bou  Chaouen,  (jui  avaient  fait  le  vide, 
restait  ainsi  inchangée,  mais  l'effet  moral  produit  sur  les 
Béni  Guil  par  la  jonction  de  Mélarka  et  par  l'importance 
des  goums  llamyan,  leurs  ennemis  irréductibles,  amenés 
au  cœur  du  pays,  permit  de  solutionner  de  façon  heureuse 
et  très  énergique  les  conditions  imposées  aux  Béni  Guil. 

Les  engagements  pris  à  cette  époque  par  toutes  les  dépu- 
talions, l'occupation  de  Métarka  qui  se  prolongea  pendant 
deux  mois,  la  construction  en  ce  point  d'une  redoute  som- 
maire, assurèrent  pendant  tout  l'été  la  tranquillité  absolue 
de  celle  légion  et  les  Béni  Guil  et  les  tribus  voisines  à  qui 
ils  donnaient  le  mot  d'ordre,  restèrent  neutres  lors  de  la  for- 
mation de  la  deuxième  harka  venue  à  l'attaque  de  notre 
])oste  de  Bou  Denib. 

En  même  temps,  l'installalion  à  El  Aouïnet  d'un  poste 
provisoire  eut  les  plus  heineux  effets  sur  les  tribus  indé- 
pendantes de  l'Ouest. 

Le  mouvement  halidiste  qui  se  piopagea  bientôt  à  l'insti- 
gation des  agents  du  Maghzen  d'Oudjda  vint  malheureuse- 
ment détruire  ces  premiers  résultats  ;  l'installation  à  lîer- 
guent  d'un  marché  mixte  el  d'agents  des  douanes  chéri- 
fiennes  devait  cependant  rassurer  les  tribus  de  l'Ouest  sur 
nos  intentions  de  conquête. 

Dès  lors,  les  Béni  Guil,  sans  se  départir  cependant  d'une 


I  Une  première  reconnaissance  avait  été  faite  au  commencement  de  mai  if|oS 
sur  Anoual  par  le  lieutenant,  Noël,  avec  un  goum  composé  d'Hamyan  et  de 
mokhazenis  de  Beni-Ounif,  au  cours  des  colonnes  sur  Bou  Denib. 


DOCl  MEM'S  l'Ol   U  SKKNIU    \   I  "il  IS  lOI  UK  DKS  IIV.NH  AN  •">  I 

iiHilii(|(  l'di  I  (ttircclc,  liiis>ri  l'iil  ciilriHlif  (|U  ils  (iL'siriiiciil 
j^aidfi  leur  plfiiic  iiult'pciKliiiKi'  cl,  [)()iii  ailiriiicr  ci-s  sciili- 
inciils.  [tciil-èlrt-  aussi  pour  sr  soustraire  aux  droils  d<'  iiiai- 
clirs  t'Iahlis  à  hci'^iniil ,  il>  (Icssiiièrciil  vers  \v  Sud  un  iiioii- 
M'UH'iil  d Cxodc  <|ii "aiiciiiir  aiilic  raison   ne  jusliliail. 

(■/(■si  ()()ur  ôludici  leur  l'Iat  d  r-|»iil  cl  leurs  dis[>()Sili<»tis 
(|u"iiiic  r((oiiiiais>aiiec  de  ea\alei  ie  partit  de  Hei'guenI  dans 
rintenlioii  de  \isiter  les  (aniix'nients  des  B<'ni  (Juil  el  ceux 
de  leurs  Noisins  iniiuéiliids  les  Oulad  Sidi  Moliannued  Ik-ii 
\liined  et.  les  Oulad  Sidi  Ali  lioii  (Ihenafa. 

\a  :>.')  ncjveiubre,  le  e(»mnuuidanl  l>inau\,  (ioniniandant 
Supérieiu'  du  eercle  de  Méchéria,  (|uittail  Heigiienl  aNcc 
80  spaliis  et  •>.()  inokliazenis  dans  le  ImiI  de  faire  chez  les 
lîeni  (luil,  les  Oulad  Sidi  Ali  Hou  (.Ihcnafa  et  les  Oulad  Sidi 
Moliaïunied  bon  Aluned  une  lournée  politique.  Apiès  avoir 
poussé  jus(ju'en  vue  de  Oebdou,  la  reconnaissance  des- 
cendit vers  AïKJual.  Partout  laccueil  des  tribus  avait  été 
l'aNorable. 

La  réception  faite  par  les  ksouriens  d'Anoual  fut  égale- 
ment empressée. 

Le  •>  décembre,  au  rciour,  au  jiassage  de  l'Oued  Tizeri- 
bine,  à  environ  10  kilomètres  d'Anoual,  la  rec<jnnaissance 
fut  assaillie  par  un  fort  rassemblement  de  Heraber.  Malgré 
la  fusillade  intense,  les  cavaliers  purent  se  dégager  et  s'en- 
fuir. Xos  pertes  dans  celte  affaire  furent  de  6  spahis  indi- 
gènes tués,  dont  le  maréchal  des  logis  Ben  Daoud,  lils  du 
colonel  Mohammed  Ben  Daoud,  l'ancien  chef  de  l'annexe 
(ILI-Aricha. 

Sans  doute  les  Béni  Guil  (iheraba  avaient  prévenu  les 
Ait  Bou  Chaouen  de  l'objectif  de  la  reconnaissance  ;  peut- 
être  mèm(^  quelques  isolés  avaient-ils  pris  part  à  l'affaire  de 
l'Oued  Tizeribine,  mais  toute  idée  de  complicité  effective 
ou  tacite  de  la  masse  était  à  écarter  :  les  Béni  Guil  cherchè- 
rent jusqu'au  dernier  moment  à  dissuader  la  reconnais- 
sance de  pénétrer  sur  le  territoire  des  Ait  Bou  Chaouen  ;  les 
guides  (pi  ils  eurent  à  fournir  lirent  preiive  d'une  loyauté 
absolue. 

En  résumé,  en  lin  i()o8,  sur  les  confins  ouest  du  cimcIc 
de  Méchéria,  où  les  llamyan  se  mélangeaient  souvent  aux 
Béni  Guil,  la  situation  restait  incertaine  ;  la  reconnaissance 
de  Moulay  Halid  y  t'Iait  considérée  comme  un  échec  pour 
notre  ])olitique  et  l'evécution  des  accords  de  içjo-.^  semblait 
devoir  y  rencontrer  i\('^  dilliciiltés.  même  si  Moulay  Halid 
faisait  im  jour  appel  à  notre  iiiler\ cnlion. 


52         DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'rISTOIRE  DES  IIAMYAN 


* 


La  riiorl  de  Bon  Amania,  suivie,  peu  de  temps  après,  de 
celle  du  Rogui,  coinuieucèreut  à  ramener  le  calme  dans 
l'Ouest. 

La  progression  de  nos  IrcMipes  dans  le  Maroc  Oriental, 
l'occupation  de  Taourirt,  puis  celle  de  Debdou,  en  même 
lem})s  (]ue  l'organisation  des  Béni  Snassen  et  du  territoire 
de  Bou  Denib,  modiiièrenl  siMisiblement  les  sentiments  de 
nos  adversaires. 

En  même  temps  rpie  la  zone  de  paix  s'élargissait,  une 
nouvelle  organisation  des  confins  algéro-marocains  détour- 
nait du  cercle  de  Méchéria  l'aclion  politique  qui  avait  été 
menée  jus([u'alors  et  le  calme  le  plus  complet  ne  tarda  pas 
à  régnei'  dans  la  i'égi(»n  du  cliotl  (ïliaibi  <]ui  avait  été  si 
troublée. 


CHAPlTUi:  VIII 


CHRONIQUE  DKS  FAITS  Ql  I  SE  DÉROULÈRENT  DANS 
LA  RfiOION  NORD  Dl  MAROC  ORIENTAL  DE  18U5  à 
l'.m  ET  QUI  ( ONTRIBUKRENT  A  TROUBLER  LA  PAIX 
SI  R  LE  FRONT  01  EST  DU  CERCLE  DE  MÉCHÉRIA. 


Pour  permettre  au  lecteur  de  mieux  saisir  ce  que  furent, 
sur  la  frontière  ouest  du  cercle  de  Méchéria,  ces  années  de 
désordre  et  de  troubles  dont  nous  avons  essayé  de  faire  une 
esquisse,  nous  avons  rasseud)lé,  année  par  année,  depuis 
iSgf)  jusqu'à  la  moit  de  Bou  Amama  et  du  Prétendant,  les 
principaux  faits  qui  marquèrent,  dans  la  région  nord  du 
Maroc  Oriental,  la  période  d'anarchie  à  laquelle  l'occupa- 
tion, par  nos  troupes,  de  toute  la  région  mit  fin. 

Ce  résumé  chronologique  facilitera  la  liaison  des  évé- 
nements qui  se  déroulèrent  dans  le  «  bled  siba  n  avec  ceux 


DOCI MKMS  l'dl  H  SKIUII!    \  (,ll  I>  loi  UK  l)p;s  ll\>n  AN         53 

iiii\(|iicls  fuiciil  nirl('s  II'.-  lliiiiiNiiii  iiciidiiiil  lii  j)(''ri()iic  roi- 
rcspoïKliiiitc. 

Isl)'».  --  I..1  ^iliiiilidii  piilil  ii|ii<'  ne  cessa  pas  d'être  hniiiie 
(iii  ('('(lé  algérien  |ieiMlaiil  I  année  iNjj.'».  l  ii  siMil  l'ail  (|iii 
aurait  pu  troubler  les  relations  des  indij^rèiies  du  cercle  de 
Mécliéiia  avec  les  pojjulations  dr^i  Heiii  (iuil,  se  produisit 
au  mois  de  juin  ;  mais  il  était  imputable  aux  Haniyan  qui, 
à  cette  épo(jue.  séjournaient  dans  lannexe  d'Kl-Aricha  cl 
([ui  en  profitèrent  pour  l'accomplir.  Ln  parti  de  :>.'  cava- 
liers d(>s  liekakra.  Béni  Mcthaicf,  Oïdad  .Mansonrah, 
Mejîhaoïdia  et  Sendan  lazzièrenl  une  caravane  des  Béni 
(iuil,  à  rOued  lîerrioug,  près  d'EI  Mengoub  icholl  Gliaibi). 
Les  liamvan  eurent  un  bonune  et  deu\  chevaux  tués  ;  ils 
massacièrent  trois  indigènes  des  lieni  (Juil,  enlevèrent 
\\  chameaux,  -j.  chevaux  et  6  juments  et  emmenèrent  leurs 
prises  dans  leurs  douais  (pii,  pai-  crainte  de  représailles  de 
la  part  des  Béni  Guil,  relluèrent  au  Nord  d'El-Aricha.  Les 
Béni  (iuil,  sachant  bien  (|ue  les  auteurs  de  ces  coups  de 
main  appartenaient  aux  llamyan,  et  (fue  ceux-ci  n'occu- 
paient pas  leurs  emplacements  habituels  de  campement, 
ne  firent  aucune  tentative  contre  eux,  ce  qui  évitaàrannexe 
d'El-Aricha  des  incursions  que  l'on  avait,  un  instant, 
redoutées. 

Au  Maroc,  la  situation  l'ut  troublée  pendant  les  premiers 
mois  de  l'année,  d'abord  dans  la  ville  même  d'Oudjda, 
dont  les  habitants  n'étant  soumis  à  aucune  autorité,  depuis 
le  départ  de  l'amel  Si  Abdesselam  Ben  Bou  Cheta,  cherchè- 
rent à  se  venger  siu-  les  tribus  nomades  des  environs  du 
dédain  que  ces  tribus  leur  témoignaient.  La  ville  resta  fer- 
mée pendant  près  d'un  mois  aux  nomades  dont  quelques- 
uns  eurent  à  se  repentir  des  tentatives  qu'ils  firent  pour  y 
entrer.  L'arrivée  du  nouvel  amel,  Si  Driss  Ben  Yaïch,  au 
mois  de  février,  rétablit  l'ordre  ;  la  ville  s'ouvrit  de  nou- 
veau, et  les  transactions  de  son  marché  reprirent  leur  cours. 

La  tribu  des  Béni  Bou  Zeggou  avait  été,  en  189/1,  le 
théâtre  de  désordi'es  importants  :  la  fraction  des  lladdun 
s'était  mise  en  rébellion  ouverte  contre  son  ca'ïd,  Hanio- 
nada,  qu'elle  avait  réduit  à  se  cantonner  dans  sa  maison  ; 
le  fils  de  ce  ca'id  obtint,  au  mois  de  février  189."),  du  sultan 
>roulay  Abd-el-Aziz,  l'envoi  d'une  colonne  pour  mettre  les 
rebelles  à  la  raison.  Cette  troupe,  commandée  par  Moulay 
Arafa,  oncle  du  Sultan,  se  rendit  à  El  A'ïoun  Sidi  Mellouk  : 


04  UOCUxMEiNTS  POUR  SERVIR  A  L  HISTOIRE  DES  HAMYAN 

elle  ne  lit  aucune  opéiatioii.  Sa  présence,  toutefois,  empê- 
cha le  retour  des  actes  de  rébellion  qui  s'étaient  produits, 
précédemment,  chez  les  Béni  Bou  Zeggou,  mais  ne  ramena 
pas  dans  le  devoir  les  ennemis  du  caïd  Hamonada.  Les  Béni 
lîou  Zeggou  restèrent  divisés  en  deux  partis  dont  l'inimitié 
se  manifesta  par  des  conllits  fréquents,  mais  sans  grande 
importance. 

Au  mois  de  mars,  la  fraction  des  Achache,  de  la  tribu 
des  Mehaïa,  dejjuis  longtemps  opposée  au  caïd  de  cette 
tribu,  El  Uadj  Saheli  ould  Bou  Bekeur,  se  sépara  de  ce  der- 
nier, entraînant  dans  son  parti  les  Béni  Mathar,  qui,  jus- 
qu'alors, avaient  subi  l'iniluence  de  ce  caïd.  Les  Achache 
allèrent  chercher  appui  auprès  des  Angad,  ennemis  des 
Mehaïa.  Le  g  mai,  un  engagement  eut  lieu  entre  les  deux 
partis  (Angad  et  Achache,  réunis  contre  les  Mehaïa)  à  Aïn- 
Sefia,  sur  le  territoire  des  Bessara  ;  les  Angad  perdirent 
12  hommes  et  5  chevaux  tués  ;  les  Mehaïa,  i4  hommes  et 
16  chevaux  tués.  Au  nombre  des  morts,  parmi  les  Angad, 
se  trouvait  le  nommé  Ben  Dali  ould  Bou  Terfa,  guerrier 
(pi'on  disait  d'une  très  grande  valeur  et  frère  d'Abdelkader 
ould  Bou  Terfa,  caïd  des  Mezaouir,  ainsi  que  trois  autres 
parents  de  ce  même  caïd.  A  la  suite  de  ce  combat,  lesMehaïa 
(jui  n'y  avaient  pas  eu  l'avantage,  conclurent  des  alliances 
avec  les  lie  ni  Bou  Zeggou  et  les  Béni  Khaled  ;  cet  accroisse- 
ment de  la  force  des  Mehaïa  détermina  les  Angad  à  con- 
clure la  paix  à  laquelle  d'ailleurs  les  conviaient  les  mara- 
bouts des  Jieni  Bou  llamdoun.  Le  5  juin,  les  Angad  et  les 
Mehaïa  se  réconcilièrent  ;  mais  les  Achache,  tout  en  renon- 
çant à  rester  en  lutte  avec  leur  caïd,  ne  consentirent  pas  à 
rentrer  sous  son  autorité.  Cette  situation  était  encore  la 
même  à  la  fin  de  l'année,  bien  que  les  Achache  aient  réoc- 
cupé leur  pays,  (|u'ils  avaient  auparavant  abandonné  pour 
se  joindre  aux  Angad. 

Ces  événements  avaient,  comme  toujours,  déterminé  la 
venue,  sur  notre  territoire  de  nombreux  douars  des  Mehaïa, 
que  les  cavaliers  partis  en  liarka  contre  les  Angad  avaient 
envoyé  se  mettre  sur  le  tenitoire  de  l'annexe  d'El-Aricha, 
à  l'abri  de  toute  agression  de  la  part  des  Angad.  La  pré- 
sence de  ces  douais  et  de  leurs  troupeaux,  en  deçà  de 
la  frontièie,  était  une  gêne  pour  nos  populations.  A  phi- 
sicius  injonclions  à  eux  faites  par  le  caïd  de  la  tribu  des 
Oïdad  En  Nébar  Cheraba  et  par  les  agents  du  Bureau  arabe, 
(ra\()ir  à  (juitler  le  teiriloire  algérien.  I(\s  Marocains  avaient 
répondu  par  des  refus.  Lne  démonstration  armée  fut  effec- 


tuée  (•(Hilrc  ciiv,  ;'i  lii  siiilc  de  liiiiloi  is;ilioii  (Ioiiik'c  p;ii- 
r Aulorilr  sii[)('Mi('iii(',  les  •>  cl  'S  juin,  avec  les  j,'^i)ums  (1(! 
r;uni('\r  cl  le  (Icliiclicmciil  de  s[)aliis  d'I^H-Ariclui.  f.os 
(louai  s  iiiaioeaiiis  ne  lésislèrenl  [)as  devant  la  ccMtitude  cpii 
leiii  l'iil  donnée,  (|ue,  s'ils  ne  cédaienl  pas  à  celle  dériiori.s- 
Iration,  la  forée  serai!  employée  pour  les  y  conlraindre.  Ils 
repassèrcnl  la  Irontière  le  S  juin. 

Depuis  celle  opocpie  justpi'à  la  lin  de  l'année,  la  situa- 
lion  politique  de  l'ainalal  d'Oudjda  ne  fut  pas  troublée, 
l  ne  rnesurc  éner<2i(pie,  piiso  au  mois  d'août  par  l'amel, 
contribua  à  niainlenii' cet  étal  de  calme.  î.o  12  aoù|,Si  Driss 
Ben  Yaïcii  s'eni|)aia  de  la  personne  du  caïd  des  Mé/.aoun 
(An^ad),  Abdelkadei-  Uou  Terl'a.  (piil  retint  |iiisonnici'  à 
Oudjda,  dejniis  celte  épofjuc  ;  il  attribua,  avec  quehpie 
^  I  aiseml)lance,  à  l'esprit  de  désordre  d(>  ce  caïd  les  coiillils 
périodi(pies  survenus  depuis  plusieurs  années  entre  les 
\noad  et  les  Mehaïa.  Quel  (pi'ait  été,  d'ailleurs,  le  bien- 
fondé  de  ce  jugement,  l'action  qui  en  fut  la  conséquence 
eut  pour  effet  d'amener  à  réflexion  les  chefs  marocains 
voisins  d'Oudjda  qui,  par  crainte  d'un  sort  semblable  à 
celui  d'Abdelkader  Bon  Terfa,  se  montrèrent,  poin*  le 
monu'ut,  peu  disposés  à  rencniveler  les  désordres  anté- 
lieuis.  1/amalat  d'Oudjda  jouit,  à  la  suite  de  cet  acte  d'au- 
lorité,  du  moins  dans  la  partie  qui  avoisine  immédiatement 
le  chef-lieu  de  ce  Gouvernement,  d'un  calme  relatif. 

ISîMk  —  T-cs  tribus  des  Béni  Guil  continuaient,  dans  les 
premiers  mois  de  l'année,  à  exercer  des  actes  de  brigandage 
contre  les  liibus  des  Ilamyan  et  ajournaient  l'exécution 
d'uiu'  convention  passée  avec  ces  derniers,  en  189^,  à  Kas- 
dir  l'chott  Gharbi). 

Pour  mettre  fin  à  celte  situation,  le  Gouverneur  Général 
de  l'Algérie  décida  que  si,  dans  un  délai  qui  expirerait  le 
i."i  mai,  l(s  BcTii  Guil  n'avaient  pas  exécuté  leur  convention 
iwcc  les  ITaniyan  et  cessé  leurs  déprédations,  notre  terri- 
toire et  nos  marchés  leur  seraient  interdits.  Cette  mesure 
fut  rigoureusement  applirpiée  et  ses  résultats  ne  se  firent 
pas  attendre. 

En  effet,  le  ?.6  juillet  et  jours  suivants,  conformément 
aux  instructions  de  Monsieui"  le  Général  commandant  la 
Division,  une  entrevue  avait  lieu  entre  le  Commandant 
Supérieur  de  Méchéria  accompagné  des  principaux  nota- 
bles des  TTamyan  et  l'amel  d'Oudjda,  accompagné  des 
notables  des  Béni  Guil,  en  vue  de  l'exécution  des  clauses 


56         DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'uISTOIRE  DES  HAMYAN 

de  la  convention  sus-visée  et  du  règlement  des  revendica- 
tions postérieures  à  cette  convention,  intéressant  exclusi- 
vement les  Hamyan. 

Cette  entrevue  eut  un  plein  succès,  grâce  à  l'habileté,  à 
la  courtoisie  et  à  l'esprit  de  conciliation  des  représentants 
des  deux  Gouvernements.  Les  différends  ayant  été  réglés, 
la  levée  de  l'interdiction  aux  Béni  (iuil  de  notre  territoire  et 
de  nos  marchés  fut  prononcée  par  Monsieur  le  Gouverneur 
Général  à  la  date  du  7  septembre. 

Il  ne  s'est  pas  produit  au  cours  de  l'année  1896  de  trou- 
bles, parmi  les  tribus  marocaines,  sur  la  frontière.  Le  caïd 
El  Hadj  Salieli,  des  Mehaïa,  qui  semblait  tout  puissant 
dans  sa  tribu,  a  perdu  à  un  moment  donné  la  confiance  de 
la  majorité  de  ses  administrés.  Craignant  qu'il  ne  soit  pris 
contre  lui  des  mesures  violentes  il  a  brusquement  aban- 
donné sa  tente  et  s'est  réfugié  dans  la  ville  d'Oudjda  ;  mais 
il  est  reparti  clandestinement  de  cette  ville,  après  quehjues 
jours,  pour  regagner  sa  tribu  où  le  calme  avait  semblé 
renaître. 

1897.  —  Dans  l'amalat  d'Oudjda,  des  troubles  assez  gra- 
ves se  produisirent,  provoqués  par  l'attitude  énergique  de 
l'amel  vis-à-vis  des  tribus  vivant  depuis  longtemps  dans 
l'anarchie. 

Le  caïd  des  Mehaïa,  El  Hadj  SaheliBouBekeur,  fut  amené 
à  prendre  la  tête  du  mouvement  contre  l'amel,  à  la  suite 
de  la  lecture  dans  sa  tribu,  par  ordre  de  ce  dernier  fonc- 
tionnaire, d'instructions  venues  du  Sultan  et  le  destituant 
de  ses  fonctions. 

La  tribu  des  Mehaïa  se  partagea  en  deux  partis  à  peu  près 
d'égale  force,  l'un  qui  resta  fidèle  à  El  Hadj  Saheli,  l'autre 
qui  prit  le  parti  de  l'amel  et  qui  avait  à  sa  tête  El  Hadj 
Miloud  ould  Bou  Bekeur,  frère  et  rival  de  Saheli. 

A  la  même  époque,  et  pour  des  causes  diverse*,  toutes  les 
tribus  de  l'amalat  s'étaient  rangées  soit  du  côte  de  l'amel, 
soit  du  côté  des  dissidents. 

Au  mois  de  mars,  une  première  rencontre  eut  lieu.  D'un 
côté  se  trouvaient  les  soldats  de  l'amel  et  les  Mehaïa  d'El 
Hadj  Miloud.  De  l'autre  se  trouvaient  : 

Les  Béni  Attigue  (fraction  des  Béni  Snassen)  ; 

LTne  partie  des  Béni  Mengouch  (fraction  des  Béni 
Snassen)  ; 

Une  partie  des  Sedjaa  ; 

T^es  Mezaouir  (fraction  des  Angad). 


DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN         57 

'-"'  P<"»i  <'••  li'incl  srnil.l;,  i.voir  ofr  xichuiciix 

]  n   s,r„ncl    CMnl.i.l    ,.,,1    li,,,    ;.,.    mois   d.vril  ;  i:i  I(,.li 

M.v.ao,M,rl   l.-s   M..|,.u  ,||,|   Ihulj  S.l.Hi  ,,,u  n.pouss.V,.,,! 
leurs  ii^Tcssctirs. 

A  (Nulir  clr  (Tlh.  ,-.,.,K|u,,  I..S  ,.no,(s  drs  dissidonis  se  con- 
'•;'"'7!"';'  '-"""  ''•  "  'l.u  do.  Zekk.n.,  .vslé..  fidèlo  ■.  l'aincl 
H  .so  ....  dans  srs  n.onl.^nuvs.  |...  .o  avril.. ..s  derniers  fu.vnt 
--.'U.lel.M.M.nl  hadus.  Ms  offrirent  n.ême,  pour  obtenir  la 
l»^MX.  ..ooo  francs  et  ro  eh-vaux  à  l.urs  adversaires  ;  niais 
«-.'ux-c.  refusèrent.  F.es  Zekkara  furent  à  nouvran  battus  .t 

'.•nneM.   d  Kl-Ar.cha,    sous    la    protection    du    c.oun.    uni 
<  ypms  quelque  temps,  avait  été  réuni  à   la  fr.u.tière  afiri 
d  en  prévenu-  toute  violation  et  de  protéc^or  nos  tribus    le 
eas  échéant.  A^.;c  les  Zekkara  se  trouvaient  quelques  fra  ! 
t.<ms  des  Hen,  lala,  Boni  Hou  Ze^c^ou  et  Reni  Snas.cn 

>'    lan.el,    ni    El   Iladj   Miloud   n'avaient   tenté  d,.   l',,,. 
fi<^iler  secours  lorsqu'ils  avaient  été  attaqués 

Le  o  mai,  les  Zekkara  ayant  refusé  de  se  soumettre  aux 

œndd.ons  qu,  leur  étaient  posées  pour  séjourner  sur  notre 

;rr.ton-e.  repassèrent  la  frontière  et,  le  même  jour    opé- 

;"-"t  "ne  razz.a  sur  les  Béni  Hamiil.  qui  n'avaient  ju  Jue 

la  pris  aucune  part  à  la  lutte.  •'      ' 

A  partir  de  cette  époque,  le  caïd  Ran.dan,  avec  les  Zek- 
kara et  les  cpielques  fractions  qui  lui  étaient  alliées    campa 
ans  la  région  de  Missiouïn,  dans  le  voisinage  immédiat  le 

\2?     \  '"*^"'  '^'''''^'''  J^"'-  ^  ""^  ^««H"^  au  parti 

adverse  et  n  osa.t  pas,  étant  donné  ses  faibles  fo-ces   quitte 
le  campement  qu'il  avait  c-hoisi  et  dans  lequel  il  se  senta 

^ô  é  ^ait  r'r"  'T  '""'"^-  ^'  H^^A^iioud,  d": 

cote  seta.t  également  rapproché  de  notre  frontière  sem- 
blant éprouver  les  mêmes  craintes  que  les  Zekkara    ma  < 
.  <.sant  s  unu>  A  eux.  Il  campai,  au  Sud-Ouest  de  Sidi  \" 
dans  la  plame  de  Tiouli  et  du  côté  de  Mechra  cl  Har^laï;;" 
Mais,  le  i4  mai,  les  Béni  Yala  et  les  Béni  Snassen    alliés 

^^J^ejendemain   .5,   les  Béni  Bon  Zeggou  le  quittaient  à 

.^o^iJ^^nr^'"'^"'^'"'''*^'^^ 
nans  les  journées  du  ,3  e,  du  li.  le  caïd  Ramdan  avait 


58         DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

vainement  tenté  de  décider  El  lladj  Miloud  de  s'nnir  à  hii, 
pour  prendre  l'offensive. 

Aussi,  se  sentant  trahi  par  les  siens,  et  voyant  qu'il  ne 
devait  espérer  aucun  secours  de  personne,  le  caïd  Ramdan 
vinl  le  16  mai,  dans  l'après-midi,  déposer  ses  armes  à  El 
Bouilli,  à  environ  20  kilomètres  au  Nord  de  Magoura  et  à 
(S  kilomètres  à  l'Est  de  Sidi  Aïssa,  en  suppliant  (pi'on  lui 
accordât  sur  la  terre  française  une  hospitalité  qu'il  avait 
honteusement  violée  (jnelques  jours  auparavant.  Tl  déclara 
se  soumettre  à  toutes  les  conditions  qu'on  pourrait  exiger 
de  lui  ;  mais  il  ne  devait  rester  que  peu  de  temps  sur  notre 
territoire,  où  on  l'avait  fait  camper  aux  environs  de  Taër- 
ziza.  En  effet,  le  i^""  août,  il  était  autorisé  à  repasser  auMaroc 
avec  toutes  ses  tentes. 

A  partir  de  l'entrée  des  Zekkara  sur  notre  territoire,  El 
ITadj  Miloud  fit  tous  ses  efforts  pour  se  rapprocher,  du 
moins  en  apparence,  de  son  frère  El  Hadj  Saheli,  et  se  fit 
l'intermédiaire  entre  celui-ci  et  les  diverses  fractions  qui 
avaient  fait  cause  commune  avec  les  Zekkara.  Peu  à  peu  les 
grandes  agglomérations  de  tentes  se  dispersèrent  et  la  tran- 
quillité revint.  Toutefois  El  Hadj  Saheli  razzia,  chaque  fois 
([u'il  le  put,  les  fractions  qui  avaient  refusé  de  s'unir  à  lui. 

Ee  bruit  courut  pendant  ce  tem|)s  (fu'une  colonne  était 
dirigée  par  le  Sultan  sur  Oiidjda  pouj-  châtier  ceux  qui 
s'étaient  révoltés  ;  mais  il  n'en  était  rien.  Cependant,  au 
commencement  du  mois  d'août,  le  chérif  Abdesselam  El 
Merani,  envoyé  par  le  Sultan,  arrivait  à  Oudjda  avec  cent 
cavaliers  du  Makhzen.  Ees  divers  partis  marocains  envoyè- 
rent alors  à  Oudjda  des  représentants  qui  furent  unanimes 
à  déclarer  au  chérif  qu'ils  ne  voulaient  plus  de  l'amel  Si 
Driss  Ben  Yaïch.  Ee  chérif  promit  de  leur  donnei' 
satisfaction. 

Des  renseignements,  venus  d'Oudjda  le  t.'î  aoiit,  firent 
connaître  que  les  Mehaïa,  les  Angad,  les  Sedjaa,  les  Béni 
Snassen,  les  Béni  Yala,  les  Béni  Bon  Zeggon  et  les  Zekkara 
s'étaient  réconciliés  entre  eux  sous  l'influence  du  chérif  et 
que  chaque  tribu  s'était  engagée  à  rentrer  sur  son  terri- 
toire. Ee  chérif  avait  en  outre  déclaré  aux  Mehaïa  qu'ils 
continueraient,  comme  par  le  passé,  à  obéir  aux  ordres  d  El 
Hadj  Saheli. 

Ee  parti  d'El  ?Tadj  Miloud  essaya  bien  de  résister  à  cet 
ordre  et  tenta  d'instituer,  pour  assurer  le  service  de  police 
et  de  sécurité  dans  1îi  tribu,  une  assemblée  de  notables  : 
mais  finalement,  an  mois  de  décembre,  les  Mehaïa  se  réuni- 


1. 


DOCLMEMS  l'OlU  SKIU  lU  A  l/lIISTOIlŒ  DES  HAMYAN  Tjî) 

K'iil  Ions  j>()iir  plier  \:\  ll;iilj  Salicli  de  rcîpreiidre  le  coni- 
iiiiiiKli-mciil  (le  sii  liiliii.  loiis  les  cliels  d<;  fiacliori  el  l«'.s 
|»iiiici|)iiii\   iiolahlcs  lui   |)i(Mri('iil  sciincnt  de  lidélilé. 

I,('  •>  I  iK  »\  ciiiiiic  I  ^1)7  ,  I  il  II  ici  (I  (  )iidj(lii  (|iii!l;iil.  son  coni- 
inandcMK'iil  el  allait  s CinhaKiiicr  à  .N(uaoui.s,  pour  sf  icu- 
ili'f  à  Taiij^cr.  Il  l'ut  iciiiplaeé  j)ar  Si  Ji(tu  Hi'kcur  ould  \A 
llabbas,  (jui  airi\a  au  siège  de  s(.)ii  (•oiiiiiiaïKlcmciij  dans  le 
couiaut  du  mois  d<'  tléceiiibi'e. 

lfSl)8.  ^  Il  lit'  se  pioduisil  dans  l'amaJat  d'Oudjda  aucun 
fait  <>ra\'i'  ;  la  lian(piillité  ue  ees^a  de  régnei'  dans  le  voisi- 
nage de  notre  frontière  ;  les  troubles  «pii,  Tannée  précé- 
dente, avaient  mis  l'Autorité  Française  dans  la  nécessité  de 
faire  ôiganiser  un  service  de  surveillance,  ne  se  reprodui- 
sirent pas.  Le  caïd  El  lladj  Saheli  oulil  Bon  Bekeur,  de  la 
tribu  des  Mehaïa,  cpii  avait  été  l'un  des  principaux  auteurs 
des  troubles,  reprit  le  commandement  de  sa  tribu  dans 
laquelle  aucune  opposition  ne  lui  fut  faite  ouvertement 
Le  nou\('l  amel  d'Oudjda,,  Si  Bon  Bekeur  ould  El  llabbas, 
installé  depuis  le  mois  de  décembre  1897,  '^^^  faire  régner 
partout  une  tranquillité  relative. 

Le  bruit  se  répandit  chez  les  indigènes  algériens  et  dans 
l'amalat  d'Oudjda,  vers  le  mois  de  juillet  1898,  que  le  (Jou- 
vernement  chérifien  avait  concédé  à  l'Allemagne  le  {josIc 
de  Saïdia,  à  l'Ouest  d'Adjeroud,  et  le  droit  d'occupation  sur 
tout  le  territoire  compris  entre  notre  frontière  ouesl  cl  la 
Moulouya.  Ce  bruit  fut  démenti  ofliciellement  dons  nos 
tribus  j)ar  les  soins  du  (louvernement  français. 

1899.  —  L'année  précédente,  vers  le  miois  de  novembre, 
les  Mehaïa  et  leurs  alliés,  les  Béni  Mathar,  étaient  tombés 
sur  les  Sedjaa  et  leur  avaient  enlevé  un  grand  nondjre  de 
troupeaux  de  moutons. 

Les  Sedjaa  usant  de  représailles  s'emparèrent  de  200  à 
800  chameaux  ajjpartenant  aux  Mehaïa.  A  la  suite  de  cette 
affaire,  les  Sedjaa  voulurent  conclure  avec  les  Mehaïa  un 
arrangement  basé  sur  la  restitution  réciproque  des  prises. 
Un  miad,  composé  de  notables  de  leur  tribu,  vint  à  cet 
(>ITet  trouver  les  Mehaïa  (pii  ne  voulurent  entendre  parler 
de  rien. 

La  guerre  était  dès  lors  déclarée  entre  ces  deux  fractions, 
l-llle  aboutit  à  la  défaite  des  Mehaïa  qui,  au  mois  de  mai, 
durent  entrer  sur  le  territoire  algéiien,  après  avoir  subi  un 
échec  sérieux  à  Aïn-Sfa  (3o  kilomètres  environ  à  l'Ouest 


tiO         UOCUMEiNTS  POUR  SERVIR  A  l'iiISTOIRE  DES  HAMYAN 

d'Oudjtlaj.  Cet  échec  leui'  fut  iiilligé  par  les  Sedjaa  et  leurs 
alliés,  les  Haouara  et  les  Oulad  El  Hadj.  Ces  Mehaïa  devaient 
être  dirigés  sur  Mécliéria  el  Gérj  ville  ;  mais,  arrivés  près 
de  Mahdjoub  {!^o  kilomètres  .\ord-Ouest-Ouest  d"El-ArichaJ 
ils  refusèrent  de  rejoindre  les  campements  qui  leur  étaient 
assigïiés.  Ils  furent  alors  refoulés  au  Maroc,  après  avoir 
payé  une  indemnité  pour  leur  séjour  sur  notre  territoire. 
Mais  la  vengeance  des  Sedjaa  n'était  pas  assouvie.  A  la 
fin  du  mois  d'octobre  de  celte  même  année,  ils  tombèrent 
de  nouveau  sur  les  Mehaïa  établis  près  de  Missiouïn,  lem* 
tuèrent  leur  chef,  El  lladj  Saheli  oïdd  Bou  Bekeur,  avec 
quelques  cavaliers  et  eidevèrent  de  nombreux  troupeaux 
de  moutons.  A  la  lin  du  mois  de  novembre,  ils  tombèrent, 
près  de  Ras-el-Aïn  iBerguent),  sur  les  Béni  Mathar,  mais 
ceux-ci  se  tenaient  sur  leurs  gardes  et  purent  repousser 
cette  agression.  11  y  eut  quelques  tués  de  part  et  d'autre  ;  en 
outre  deux  troupeaux  de  moutons  furent  enlevés  aux  Béni 
Mathar. 

1900.  —  Les  Béni  Guil  tombèrent  le  a  avril  1900,  sur  les 
Haouara  et  leur  enlevèrent  des  tentes,  une  grande  quantité 
de  chameaux  et  de  moutons  ;  ils  leur  tuèrent  en  outre  vingt 
cavaliers. 

Le  i*"^  mai,  les  Mehaïa  et  les  Béni  Mathar  razzièrent  a 
Thoual  (Ouest  de  Sidi-Moussa)  le  douar  Hamidan,  des  Sed- 
jaa, auxquels  ils  prirent  2o5  chameaux,  6.000  moutons, 
des  tapis,  des  tentes  et  massacrèrent  un  nombre  considé- 
rable d'hommes  et  d "enfants. 

Les  agresseurs  eurent  -i  hommes  blessés  et  4  chevaux 
tués. 

A  la  suite  de  cette  razzia,  une  amende  de  4.000  douros 
fut  inlligée  aux  Mehaïa  par  le  chérif  Si  Abdesselam  El 
Merani,  commandant  la  coU^nne  mai^ocaine  qui  se  trouvait 
à  Oudjda,  venant  d'El  Aïoun  Sidi  Mellouk. 

A  la  hn  du  mois  d'août,  Si  Allai  ould  Sidi  Cheikh  Ben 
Taïeb  et  le  chérif  Si  Abdesselam  El  Merani  se  réunirent  et 
opérèrent  une  réconciliation  entre  les  Mehaïa  et  les  Sedjaa. 

Le  chef  de  l'annexe  d'El-Aricha  eut,  le  18  novembre,  à 
Saheb  El  Korrichat  (Sud  du  Djebel  Sidi  El  Aabed)  une 
entrevue  avec  Si  Allai,  ainsi  qu'avec  le  caïd  et  les  notables 
des  Mehaïa. 

Cette  entrevue,  demandée  par  les  Marocains,  avait  pour 
objet  le  règlement  de  quelques  questions  de  pâturages.  Les 
résultats  furent  très  satisfaisants. 

(A  suivre.) 


LES  FABRIQUES  DE  LAMPES 

DANS  L'ANCIENNE  AFRIQUE 


I.  —  ÏA'urs  (  ar.U'trrcs 

^  Parmi  les  objets  de  pelilcs  diiiiciisions  (|iie  nous  a  légués 
l'antiquilé,  il  ne  s"en  trouve  peiit-ètie  pas  ele  plus  iioni- 
breu\  (pie  les  lampes  en  terre  enite.  On  pourrait  être  tenté 
de  croire  que  cette  abondance  est  due  à  la  seule  fréquence  de 
Icnr  emploi  dans  la  vie  domestique.  11  n'en  est  rien,  elle 
l'est,  avant  tout,  soit  aux  croyances  piiilosophicpies  et' reli- 
gieuses des  anciens,  soit  aux  traditions  cpii  en  déeoulèicni 
cl  qui  leur  survécurent. 

On  sait  en  effet  que  c'est  dans  les  nécropoles  antitpies 
(ju'on  en  rencontre  le  plus.  La  croyance  à  une  autre  vie, 
l'idée  (pi'on  se  faisait  des  conditions  dans  les(pielles  celle- 
ci  se  passait  obligeaient  en  quehpie  sorte  à  en  déposer  dans 
chaque  sépulture.  Bien  plus,  parmi  tous  les  autres  objets 
de  mobilier  funéraire,  ce  petit  vaisseau  paraît  avoir  été  le 
plus  important,  le  plus  significatif,  puisque  quand  tons  les 
autres  disparaissent,  c'est  lui  seul  qu'on  trouve  à  côté  des 
restes  périssables  :  squelette  ou  cendres. 

Je  n'ai  pas  à  insister  ici  sur  les  explications  différentes, 
ou  tout  au  moins  multiples  —  et  sans  doute  justes  la  plu- 
part, suivant  le  point  de  vue  où  on  les  envisage  —  qui  ont 
été  données  de  la  coutume  de  placer  un  mobilier  dans  les 
tondues.  Mais  il  est  intéressant  de  s'arrêter  ici  à  l'une  d'entre 
elles,  très  simple,  au  delà  de  laquelle  n'allait  pas  la 
plupart  des  Africains,  et  qui  voulait  que  le  défunt  fni  à 
même,  dans  sa  dernière  demeure,  de  suivre  rexisicnce 
qu'il  menait  de  son  vivant. 

On  a  cité  des  cas  où  cette  explication  s'impo.se  ;  il  n'en 
est  peut-être  pas  de  plus  suggestif  que  celui  d'un  cav(>au 
africain,   que  j'ai  découvert  à  Gurza  '. 


I  V.   D'  L.  Carton.  Bull.  Soc.  Archéol.  de  Som.e,  ir,oo.  Les  Nécropoles  de 
Ourza,  p.  ag. 


62        LES  FABRIQUES  DE  LAMPES  DANS  l'aNCIEINNE  AFRIQUE 

Quand  j'y  pénéliai,  après  avoir  écarté  la  dalle  qui  en  fer- 
mait l'entrée,  je  nie  liouvai  en  présence  d'un  véritable 
baiHiuet  funèbie.  Les  personnages,  ou  plutôt  leurs  restes 
et  tout  l'appareil  du  repas  étaient  disposés  comme  ils 
devaient  l'être  certainement  dans  les  réelles  habitations 
des  vivants  1 

Des  bancs  taillés  dans  le  tuf  formaient  un  Inciiniam,  et 
sur  eux  les  corps  parés  de  leurs  bijoux  étaient  couchés, 
ayant  auprès  d'eux  la  coupe  des  festins,  des  assiettes  en 
terre  samienne  et  une  lampe.  D'autres  lampes,  d'un  char- 
mant dessin,  avaient  été  placées,  allumées,  dans  une  niche 
creusée  derrière  chaque  convive  aux  dépens  de  la  paroi. 
Dn  réchaud  du  type  brasero,  tout  à  fait  semblable  aux 
modernes  «  canouns  »  des  Arabes,  avait  été  allumé  auprès 
de  la  porte.  Jl  portait  un  grand  plat  en  terre.  Au  centre  de 
la  pièce,  sur  une  table  de  bois  qui  a  disparu  '  se  trouvait 
toute  une  vaisselle  de  grands  bols  et  de  grands  plats  en 
terre  ou  en  métal,  qui  ont  été  retrouvés  à  terre.  Deux 
grandes  amphores  qui  avaient  contenu  le  vin  et  l'eau 
gisaient  à  c(Mé  d'eux.  On  sait  quel  grand  usage  les  anciens 
faisaient  des  parfums  au  cours  des  repas.  (.)n  en  fut  parti- 
culièreiuent  prodigue  ici,  puisque  plus  de  3oo  iinguen- 
taria  en  verre  parsemaient  le  sol  et  les  bancs. 

C'était  donc  un  véritable  festin  que  l'on  avait  préparé, 
les  corps  étant  probablement  paies  de  lleurs  comme  ils 
étaient  oints  de  parfums  '. 

Dans  les  tombes  puniques  ou  punico-romaines  sembla- 
bles à  celle  dont  il  vient  d'être  question,  le  mobilier  était 
complexe  et  très  abondant,  et  il  se  simplifia  ensuite  de  plus 
en  plus  [)our  disparaîtie  avec  le  christianisme.  La  lampe  est 
l'élément  (pii  persista  le  plus  longtemps. 

Elle  fut  [leiidant  plusieurs  siècles,  avec  l'urne  cinéraire, 
le  dernier  vestige  des  anticjues  croyances  païennes  à  la  vie 
future. 

Après  les  tombes,  c'est  dans  les  sanctuaires  que  le  petit 
luminaiie  se  rencontre  le  plus  souvent.  Il  semble  que  les 
fidèles  en  apportaient  chaque  fois  qu'ils  accomplissaient 
les  rites  sacrés.  Comment  s'expliquer  autrement  que  dans 


I  Dans  beniiriiii|i  i\o  c:ivt';iir\  l'iuK'raires  do  niir/.a,  il  y  n  de  petites  menme 
iaillces  dans  le  tuf. 

a  Cette  pic-rc,  par  so7i  exif.'i)ïlé,  l'emijlni  de  petites  tables  jioiir  placer  les 
mets,  et  celui  de  bancs  pour  s'asseoir,  avec  le  brasero  auprès  de  la  porte,  rap- 
pelle du  reste  complètement  la  disposition  des  petites  demeures  arabes.  Un 
habitant  d'Akouda,  la  Gurza  moderne,  s'y   serait  trouvé  chez  luli. 


LES  FABRIQI  ES  DE  I.AMl'ES  DANS  L  ANCIENNE  AFRIQl  E 


63 


cerlaiiis  cjis  (rciilrc  eux,  conimc  celui  d'El  Kenissiu,  par 
oxcmplc,  on  en  iiil  IroiiN»'  plusieurs  milliers  dans  un  espace 
(\v  (piehpies  mètres  i'  ' 

Un  Uuuve  encore  les  lampes  en  abondance  dans  deux 
autres  catégories  (ie  gisements  :  les  dépots  d'immondices 
jetés  au.v  abords  des  villes  et  les  alenlouis  des  fours  dans 
lesquels  on  les  fabriquait. 

Ces  petits  objets  ikhis  sont  parvenus  en  aussi  giand 
nombre,  non  seulement  à  cause  des  usages  dont  il  vient 
d'être  question,  mais  aussi  en  raison  du  peu  de  valeur  de 
leur  matière,  (jue  l'on  ne  cherchait  pas  à  refondre,  connue 
le  métal  ou  à  retailler  comme  le  marbic,  (juand  ils  étaient 
brisés. 

En  outie,  les  fragments  en  avaient  une  assez  grande 
solidité  car  la  terre  cuite  résiste  très  bien,  on  le  sait,  aux 
alta(pies  des  agents  qui  altèrent  si  facilement  le  bronze  ou 
le  marbre. 

Enlin,  circonstance  précieuse  pour  les  études  archéolo- 
giques, les  lampes  et  leurs  fragments,  si  nombreux  et  si 
durables,  ont  souvent  une  valeur  documentaire,  soit  parce 
qu'ils  permettent  de  dater  les  ensembles  où  on  les  trouve, 
soit  parce  que  les  sujets  qu'ils  portent  nous  renseignent 
sur  la  vie  des  anciens,  soit  enfin  parce  (jue  les  estampilles 
«pi'ils  portent  peuvent  nous  faire  connaître  certaines  voies 
ou  certains  centres  commerciaux. 

Leur  collectionnement,  leur  classement,  leur  compa- 
raison, l'examen  des  sujets  et  des  estampilles  qu'ils  portent 
sont  donc  d'un  réel  intérêt  et  on  peut  s'étonner  qu'on  n'en 
ait  pas  encore  entrepris  une  étude  générale.  C'est  que  la 
chose  offre  de  réelles  difficultés.  Ainsi,  pour  les  lampes  les 
plus  répandues  dans  les  musées,  les  romaines  des  pre- 
mière et  deuxième  périodes,  une  remarque  s'impose 
d'abord.  C'est  que  la  plupart  des  estampilles  qu'elles 
offrent  ont  été  rencontrées  non  seulement  en  Afrique,  mais 
aussi  dans  d'autres  provinces  de  l'empire  romain.  A  défaut 
d'autres  renseignements,  leur  découverte  ne  permet  pas, 
à  elle  seule,  de  situer  lem-  lieu  de  fabrication,  ce  qui  fait 
qu'on  ignore  d'où  la  majeure  partie  des  lampes  à  estam- 
pilles sont  sorties,  à  part  quelques  présomptions  pour  deux 
ou  trois  marques. 


I  V.  Carton.  Acad.  des  [user.  Mémoires  préseihtés  par  divers  snvants,  t.  xii, 
i"  partie  ;  Le  SanctiMire  de  Tanit  à  El  henissia.  p.  ai)  et  Bull.  ArchéoL  du 
Comité,  1908,  p.  4 10  et  suiv. 


64        LES  FABRIQUES  DE  LAMPES  DANS  l'aNCIENNE  AFRIQUE 

Bien  plus,  il  existe  paifois  d'assez  fortes  raisons  pour 
croire  que  beaucoup  des  ateliers  qui  les  ont  produites 
étaient  hors  d'Africpie.  (Test  ainsi  que  les  jolies  lampes  de 
la  première  période,  (jui  datent  du  i"  siècle  et  d'un  peu 
avant,  apparaissent  brusquement  sans  avoir  été  précédées 
d'un  type  sporaditjue,  doù  elles  auraient  dérivé.  Comme 
on  sait  d'auti-e  part  que  les  importations  de  négociants 
italiens  en  Afrique  étaient  déjà  cornantes  dès  la  fin  de  la 
ré|)ubliquc  ',  on  es!  poilé  à  admettre  que  cette  épocpie  fut 
celle  de  l'importation  des  produits  italiens  et  de  l'éducation 
des  artisans  africains  ;  les  lampes  ayant  quelque  caractère 
devaient  venir  du  dehors. 

C'est  à  la  période  suivante,  (juand  le  pays  commence  à 
produire  lui-même,  qu'il  est  difficile  de  savoir  si  les  lampes 
viennent  de  l'un  ou  l'autre  des  deux  pays. 

Les  indices  qui  peuvent  renseigner  à  ce  sujet  sont  de  plu- 
sieurs ordres.  Quand,  dans  une  région  la  terre  à  potier 
abonde  et  oii  de  nos  jours  des  fouis  existent,  on  trouve  des 
dépôts  de  lampes  antiques  considérables,  comme  celui  d'El 
Kenissia,  on  doit  penser  (|ue  celles-ci  ont  été  faites  sui' 
place  ;  on  n'auiait  du  reste  sûrement  pas  pris  la  peine  d'y 
importer  de  loin  des  vases  de  (pialité  inférieure.  Ailleuis, 
comme  à  Ilenchir  Srira,  ce  sont  et  la  présence  de  moules 
et  les  caractèies  mêmes  du  dépôt  renfermant  des  ratés  qui 
indi(pient  que  l'atelier  ne  saurait  être  éloigné. 

Je  vais  tenter  d'indif{uer,  ci-dessous,  les  caractères  que 
peuvent  présenter  ces  petits  luminaires  quand  ils  sont 
d'origine  africaine  et  les  points  dont  certains  d'entre  eux 
paraissent  pio venir.  Une  question  se  pose  au  préalable. 
Ne  fabriquail-on  (pie  des  lampes  dans  ces  ateliers  ?  Le 
potier  n'étendait-il  pas  son  industrie  à  d'autres  formes  de 
vases  P 

11  est  un  fait  à  peu  jjrès  général,  c'est  que  les  noms  gra- 
vés sur  les  lampes  ne  sont  pas  les  mêmes  que  ceux  qui  sont 
sur  les  autres  poteries,  même  quand  les  deux  sont  juxtapo- 
sées. La  réciprocpie  existe  aussi  ailleurs,  par  exemple  pour 
les  poleries  gauloises  et  arrétines.  Cette  séparation  —  tout 
au  moins  apparente  —  des  lieux  de  production  des  poteries 
poiiiint  des  marques  répandues,  ne  s'applique  du  reste  pas, 
on  le  verra,  à  ceux  des  ateliers  africains  que  l'on  connaît. 

C'est  ainsi  que,  pour  le  plus  grand  de  ceux  (pie  l'on  peut 


I  V.  Merlin.  Acad.  des  Inscr.  Comptes  rendus  des  séances,  1911,  p.  889. 


I 


LES  Fvmuoi  i:s  dk  i.\mim:s  dws  t.  ancienne  ai'hiqi'E 


65 


(•(»iisi(l('ici  comiiic  aviiiil  cxi-^tr  cii  \rri(|iic,  celui  do  l'nl- 
Iciii,  on  il  lr(»ii\t''  l'c'sl;im[)illc  à  lit  l'ois  sur  <l<'s  hiiiiprs  cl 
(raulrcs  Icircs  ciiilcs,  ---  bien  plus  soUNcnlJl  faut  le  recon- 
naîlic,  dans  la  premier.'  silualion.  La  même  juxtaposition 
de  lampes  et  île  vases  d'aulies  formes  a  élé  constatée  dans 
les  fours  du  C-éramique  dv  (larlhatj»',  les  premières  y  élanl 
celle  fois  moins  nombreuses.  ï>es  ateliers  (pii  onl  alimenli'- 
le  sanclnairc  d'V.\  Kenissia  onl  snremeni,  en  deliois  de 
lampes  à  lidis  becs,  {)r(Hluil  des  brùle-|)arfums.  (!<•> 
umjm'uUirUi  cl  de  petites  amphores.  \  rflenchir  Si-ira, 
SiinUfii,  Thnbnrnic,  il  y  avait  le  même  mélanf^e  de  formes. 

On  s'evplicpic  (pic  la  spécialisation  n'ait  pas  été  néces- 
saire dans  ces  pelites  olficines  et  qu'elle  ne  dut  l'être  <\xir 
(piand  les  pioduits  prenaient  un  véiitable  caractère  d'arl. 
1!  csl  (  erlain  aussi  qn'ime  fabricpie  de  lampes,  même  assez 
inipor  lanl(\  ne  devail  pas  occnper  une  place  considérable. 
Des  fours  de  petites  dimensions,  comme  ceux  du  Djebel 
Oust,  capables  d'en  contenir-  une  cinquantaine  eussent  pu 
facilement  en  produite  div  mille  par  an,  le  nombre  (\('> 
ouNi'ieis  (Miq)loyés  à  ce  travail  étant  reslreinl. 

(Vesl  plnl('i|  l'amas  des  pièces  de  rebul  (pii  en  sif^nale- 
rail  remplacement,  si  celles-ci  n'a^'ai(M1t  élésouNcnl  portées 
à  distar)ce,  comme  on  le  verra  j)om'  ITenchir  Srira,  ou  vei- 
sées  dans  des  lavins,  des  trous,  les  excavations  d'ofi  on 
avait  retiré  la  terre  à  potier. 

On  a  donc  reconim,  en  Afrique,  rexistence  d'ateliers  de 
lampes  à  plusieurs  indices  :  soit  pai'  les  amas  de  pièces  de 
rcl)ut,  sans  qu(^  le  four  ail  été  découvert,  soit  par  la  pré- 
siMice  de  fours  sans  amas  de  ratés,  soit  plus  rarement  par  la 
coexistence  de  ces  deux  conditions. 

En  ce  qni  concerne  les  estampilles,  on  peut  en  recher- 
cher l'oiiorine  en  étudiant  leiu'  répartition  géographique  cl 
Icm-  densité  lelative  dans  chaque  province.  On  sait  que 
les  iiom<  (|ui  y  sont  o-ravés  sont  ceux  ou  des  fabricants  ou 
des  chefs  d'ateliers  —  qui  étaient  le  plus  souvent  des  affran- 
chis —  ou  des  néo^ociants  «pii  vendaient  les  lampes.  T/ap- 
plication  des  récries  de  l'épio-raphie  aux  lampes  trouvées  en 
Afritpie  monlrv^  que  l»eaucoup,  pi'o\enant  du  même  pio- 
priétaire,  portent  les  noms  de  ces  affranchis  '. 

Pour  piendre  les  exemples  les  plus  connus,  les  auteurs 
du  t.  VviTT  du  Corpus  Îf)sc7'.  Infin.,  cc^nstatant  que  les  mar- 


-  Cpiix-ci  prenaient  le  nom  du  patron,  leur  ancien  nom  formant  le  surnom. 


66       LES  FABRIQUES  DE  LAMPES  DANS  l' ANCIENNE  AFRIQUE 

ques  des  Pulleni,  des  Aori,  des  ISundinarii  sont  plus  répan- 
dues en  Afrique  que  dans  les  autres  provinces,  admettent 
qu'elles  en  sont  originaires.  On  connaît,  d'autre  part,  les 
nombreuses  relations  (|u'eut  cette  contrée  avec  la  Sardai- 
gne,  qui  en  a  même  été,  économiquement,  une  dépen- 
dance. La  découverte  de  ces  marques  dans  cette  île  ne  peut 
donc  que  renforcer  l'idée  de  leur  origine  africaine.  Quand 
enfin  l'épigraphie  nous  a  appris  que  les  familles  qui  por- 
taient ces  noms  avaient  poussé  de  profondes  racines  dans 
le  pays,  qu'elles  y  possédaient  de  grands  domaines  et  que 
certains  de  ses  membres  y  occupaient  de  hautes  fonctions, 
on  s'est  cru  autorisé  à  admettre  que  quelques-uns  d'entre 
eux  devaient  y  avoir  des  fabriques  de  lampes. 

Une  telle  méthode  a  pu  donner  de  fortes  présonqjlions 
au  sujet  de  certains  noms,  elle  ne  me  paraît  avoir  fourni 
aucune  certitude.  Elle  n'a,  notHmment,  jamais  pu  per- 
mettre de  savoir  en  quel  point  du  pays  se  trouvaieut  les 
ateliers.  Du  reste,  la  dissémination  a  dû  s'en  faire  bien  plus 
par  les  grandes  voies  qui  sillonnaient  le  pays  queparrayon- 
nement,  ce  qui  rend  difficile,  géographiquement,  de  leur 
assigner  un  centre  d'expansion. 

Aussi,  le  dépouillement  de  Vïnsfnnncntuin  dornesticum 
du  t.  viu  du  Corpus  Ii}scr.  lat'ni.,  ne  m'a  ])as  donné  à  ce 
point  de  vue  de  résultats  très  significatifs.  On  remarque 
pourtant  que  les  marques  les  plus  répandues  se  retrouvent 
le  long  des  voies  les  plus  im])or1antes,  ou  dans  les  ports  :  à 
Carthage,  BuUa  l\egia,  Tebessa,  lladrumète  tandis  qu'elles 
sont  plus  rares  dans  les  localités  isolées  où  les  lampes  à 
estampilles  des  grands  ateliers  sont  souvent  remplacées  par 
des  récipients  de  fabrication  locale  r.  , 

A  vrai  dire,  les  lampes  indigènes  j)araissent  aussi  avoir 
été  l'objet  d'un  commerce  assez  actif,  puisque  M.  Haute- 
cœiu"  croit  en  avoir  retrouvé  en  Sicile  et  en  d'autres  points 
de  l'empiic,  mais  il  s'agit  des  produits  d'une  basse  époque, 
à  laquelle  les  grands  ateliers  avaient  périclité. 

Tl  faut  enfin  tenii"  compte  ici  des  lampes,  tout  à  fait 
pareilles  à  celles  qui  ont  des  estampilles,  mais  qui  n'en. 


I  La  Colonin  Thuhiirnicn  étnil  iioiiiiniit  Ir  l<iii<j-  d'iiiic  grande  voie,  celle  qui 
allait  (le  Carthage  à  Hii)[)ont'.  Mais  cotte  petite  cité  était  soumise  à  des 
iniluences  locales  toutes  particulières,  comme  je  l'ai  exposé  ailleurs.  (V.  Car- 
ton. Mém.  de  la  Soc.  Nal.  des  Ântiq.  de  France,  ioi3,  p.  i/ii.  Varl  indiqène 
sur  les  lampes  de  la  «  Colonia  Thuburnica  ».)  On  voit  combien  la  question  est 
complexe. 


LES  FABRIQUES  DE  L\MPES  DANS  î/aNCIENNE  AFRIQUE       67 

oITiciit  |»iis.  \.c  ridinhir  en  est  coiisidriîihlc.  Sur"  i.oo/i  lam- 
pes (lu  (•;il;il(»^Mc  (lu  Mus(''('  AlîKiui,  non  (•()iu[)ris  celles 
tl'llencliir  Siii;i  (junl  on  (•(nuiiiît  l'oii^^ine,  il  y  ;i  seuleiuent 
/i/|0  cslinnpillf  -  :  un  nni^^t'c  de  Sfjiv  ()ft  sur  .'"lio,  dans  la  col- 
leclion  de  l'aj^cs  ()i  sur  y.^)'\,  dans  les  irMiSi'-es  de  Sousse  ."><) 
sui'  j-li,  ce  (|ui  repiéseule,  en  ^mos,  le  (ieis.  Le  nius('e  de 
Conshinline  ne  doinie.  lui,  (|ue  p»  niar(|ues  sur  ](>(^  lam- 
pes :  je  n()nd)i('  ties  lampes  ('(iiîununes  sans  sujets  ou  à 
sujets  simplement  ornementaux  y  est  donc  iclalix cment 
grand,  (iomme  on  sail,  d'iuilre  j)art,  (pie  dans  beaucou[)  de 
musées  on  écarte  les  lampes  sans  estampilles  et  sans  sujets, 
ce  rpii  ne  paraît  |)as  avoir  été  fait  ici,  on  |)eut  admettre  que 
celte  collection  donne  une  idée  plus  evacte  de  la  pr(»p()r- 
tioii,  (|ui  seiail  donc  pluliM  d'un  di\i(''me  (pie  du  tiers. 

('omment  s'e\pli(|uer  ce  l'ail  ?  Doil-on  penser  ipie  les 
lampes  sans  cachet  étaient  souvent  des  imitations  ou  même 
des  coïilicfac^ons  (]r^  produits  des  friands  ateliers  ?  Il  n'y  a 
pas,  en  effet,  de  raison  pour  (\uc  ceux-ci  n'aient  pas  mis 
leur  iiuuque  sur  tous  leurs  produits.  On  sait,  d'autre  part, 
(pie  la  plu])îut  des  ateliers  indioèucs  ne  le  faisaient  pas. 
J'ai  même  reneonlré  })arfois  âi'^^  maicpies  (pii  paiaissaient. 
être  une  grossière  imitation  des  estampilles  conrmes  :  de 
loin  le  cachet  paraissait  net  ;  de  près,  on  n'y  voyait  que 
(piehpies  hastes  informes.  On  sait  aussi  que  l'on  vendait 
des  moules,  non  de  lampes,  mais  de  sujets  destinés  à  être 
placés  sur  le  discpie  âv^^  lamj)es  '.  J'en  ai  moi-même  trouvé 
une  dans  laquelle  la  sui)erposition  sur  le  disque  est  évi- 
dente '.  Enfin,  certains  marchands  d(^  lampes  vendaient 
des  moules  destinés  aux  petits  potiers  de  l'intérieur.  A  Cai- 
thage,  en  t()o8,  le  It.  P.  Delattre  a  rencontré'^  un  dép(')t  de 
lampes,  de  statuettes  et  do  moules  aussi  remarf|uables  par 
leur  nombre  que  par  la  variété  et  la  beauté  de  certains 
sujets.  Ce  dé[)ol  na  srncment  pas  été  le  magasiu  d'une 
fabrique  coniUK^  (ur  la  su])posé,  car  la  facture  et  les  estam- 
pilles n'en  sont  pas  uniformes.  S'il  s'était  agi  d'un  atelier, 
on  y  eut  tout  au  moins  trouvé  sa  mar(pie  en  grande  majo- 
rité. Il  s'agit  donc  d'ol)jets  provenant  d(>  fabritpies  diffé- 
rentes, et  qui  ont  été  mis  en  vente  à  la  même  époque.  Les 


I   N'.   'l"nir\i>.   /;i   SiKjlio.  Diclinn.   des  Antiq.   Rom.,  Liicerua. 

:>  V.  CAmoN.  Mém.  Soc.  Nnl.  Aiiliq.  de  France,  1900,  p.  23o.  Slalucltes  en 
terre  cuite  de  la  Nécropole  d'Hadrumète. 

3  V.  Delvttre.  Acad.  des  Inscr.  Comptes  rendus  des  séances,  1908,  p.  601. 
Cf.  Ren.\ult.  m*  Cahier  d'Archéol.  Tun.,  p.  ii3.  IIautecceur.  Musée  Alaoui, 
Supplément,  Lampes  n°'  S08,  816,  1.088,  etc. 


68 


LES  FABRIQUES  DE  LAMPES  DANS  L  ANCIENNE  AFRIQUE 


moules  qui  se  trouvaient  parmi  eux,  dans  le  magasin  d'un 
commerçant  (]ui  ne  fabriquait  pas,  étaient  par  conséquent 
aussi  destinés  à  la  vente.  On  saisit  que,  grâce  à  eux,  les 
petits  artisans  de  l'intéiieur  aient  pu  imiter  plus  ou  moins 
heureusement  les  produits  sinon  tous  beaux,  du  moins  les 
})lus  corrects  des  giands  ateliers.  D'autre  part,  s'il  y  avait 
de  ces  derniers  en  Africpie,  ils  ont  pu  s'en  assimiler  plus  ou 
moins  la  technique. 


II.  —  Lampes  Libyco-Berbères 

Le  type  le  plus  ancien  et  le  plus  récent  des  luminaires 
africains  ne  pro\ient  pas,  h  piopremenl  parler,  d'ateliers. 
11  a  du,  autrefois,  comme  il  l'est  de  nos  jours,  être  façonné 
et  cuit  par  les  femmes  des  indigènes.  C'est  un  récipient  en 
fornu'  de  tasse  ou  de  verre,  avec  ou  sans  pied,  pincé  ou  non 
en  un  ou  deux  })oinls  de  ses  bords  —  ce  qui  rappelle  les 


j>'l.L- 


Fig     I 


Fig.  2 


diverses  culégoiies  de  la  lampe  jjunicjue,  qui  doit  en  être 
un  perfeclioniiement  —  de  manière  à  former  un  ou  deux 
becs  destinés  à  retenir  la  mèche.  11  était  fabrifpié  à  la  main, 
à  l'aide  d'une  boule  d'argile  pétrie  et  cuite  soit  sous  un  feu 
de  bois,  soit  dans  les  petits  fours  semblables  à  ceux  où  les 
femmes  arabes  A)nl  leur  pain,  ("ette  forme  a  été  trouvée 
dans  des  dolmens  Hnlérieius  à  l'épofjue  romaine  —  et  je 
Viù  rencontrée  nombre  de  fois  dans  les  tombes  modernes 
des  santons  musulmans. 


T.KS  FAHÎUOI  ES  DE  LAMPES  DANS  i/aNCIENNE   M  lUOrr,        00 


III.  —  Ati'lijTs  <lc  rK|HM|ii<'  Piiiii(|ii<' 

I  lie  licmciisc  (IrcoMVcrlc  l'iiilc  ;'i  (  linlhii^fi',  dans  le  (|iiar- 
litT  (lu  (  li'i  ;iiiii(|iic  il  iiiniiliM'  toute  une  série  de  grands  fours 
à  potier  renrermani  encore  les  objets  tels  (|u'ils  avaient  éti'- 
placés  poin  èlre  cuils  au  moment  de  leur'  abandon  qui  doit 
correspoiidr'e  à  la  prise  (ie  (  "uutlia<i;e. 

Le  (piai'tier'  du  (lér'ami(pie  était  à  [)i'o\imité  du  liavrc  cjui, 
d  après  lue-^  l'cclierclies  '.  l'ut  le  picmiei-  port  de  (iarlhao'e, 
et  rroii  loin  de  la  néciopole,  c"est-à-dii «■  à  portée  des  vais- 
seaux (pii  pouvaierrt  en  charger"  les  produits  el  des  clients 
(pii  \()ulaient  en  «^ar  riic  les  sépultures. 

Les  fours  ',  en  l)ii(jues  eriies,  formaient  un  foyei'  ellip- 
ti(pie  erd'oncé  dans  le  sol  et  rceouver-f  de  voùlelettes  d'arprile 
soutenues  piu'  un  pilier  cerdral.  Au-dossrrs  se  trouvait  le 
labor-atoire,  large  cheminée  rylindriffue  qu'une  eonpole 
devait  recouvrir  et  dans  laquelle  s'élevait  une  colonne 
tubidaiie  divisée  en  deux  étages.  1,'air'  el  la  fumée  du  foyer 
passaient  d'abord  par  des  canaux  dans  le  laboratoire  garni 
de  poteries  grossières,  puis,  par  des  trous  plus  petits,  dans 
la  coloinie  (pii  renfiMinait  les  lampes  et  les  statuettes. 

ï.e  foyer-  donnait  ()ar'  une  partie  étroite  sur*  la  chandjre 
(le  chauffe,  oTi  Ton  a  trouvé  les  restes  du  bois  préparé  pour' 
le  feu  ainsi  cpie  des  ratés.  Au-dessus  de  ces  pièces  était  l'ate- 
lier oi'i  l'on  avait  préparé,  sur  des  ray(^ns,  les  vases  non 
cuits,  en  les  isolant  sur-  des  rondelles  d'os  et  où  l'ou  entas- 
sait sur-  le  sol  les  poteries  cuites  porn-  les  classer  dairs  les 
magasins.  Ceux-ci  étaient  reliés  par  un  couloir  renferruant 
des  moules,  des  pots  de  couleurs  et  des  poteries  rangées  pai- 
milliers.  Parmi  celle«;-ci  on  remarquait  de  grands  flam- 
beaux d'une  forme  particulière.  Les  lampes  ressemblaient 
à  celles  de  la  nécropol(>  de  l'Odéon,  ce  qui  permet  d'admel- 
ti'c  que  les  fours  ont  fonctionné  jusqu'à  la  destruction  de 
Carthag-e  3. 


I  V.  C\ni<i\.  Hrriir  A  rclirnlogiqur .  n.iii,  t.  ii.  I.e  pnrl  rnarrhntni  et  Ir  mur 
ilr  iiirr  de  Carihafic  et  Rcvae  Tunhicmie,  t()ii.  DncumcniK  pour  xcnùr  à 
Vétiidp  deK  parla  et  de  Venceiiile  de  la  Carlhage  pinuqne.  p.  '(o'i.  (Ii,  Bihlin- 
Ihèque  de  l'Instiltil  de  CarlhiKie.  C.   Loionv.  étliilour,  Piiris.) 

a  V.  HuiCKLKu.  Seii'ice  des  AnliqiiUéa.  Compte  rendu  de  la  marche  du  Ser- 
vice en  I90t,  p.  7  el  Tierue  Archéol.,  loo-»,  f.  ii.  Les  fituillex  en  Tunisie,  p.  ;^7. 
nvec  pinn  ef  roiipe. 

■<  A  rOdéoii.  les  lampes  élaient  de  ydiisieiirs  formes  :  rhodiennes,  puniques, 
Irifolées  on  à  deux  becs,  (^iaiirkler  ne  dit  pns  «ommeiit  sont  celles  i^n'il  a 
décdiivertes  an  Ci-ramique. 


70 


LES  FABRIQUES  DE  LAMPES  DANS  L  ANCIENNE  AFRIQUE 


On  a  lencoiitrc  assez  souvent,  à  Carihage,  des  lampes 
grecques  ou  puni(jues  poiiaul  sui'  le  (lis([ue,  à  la  base  du 
bec,  divers  symboles  tels  que  l'emblème  triangulaire,  le 
caducée, etc.,  qui  paraissent  avoir  été  fabriquées  à  Carthage 
ou  dans  les  environs.  Mais,  d'une  manière  très  générale, 
les  lampes  de  l'époque  punique  ne  portent  aucune  estam- 
pille foiniée  du  nom  ou  des  initiales  du  potier. 

J'ai  découvert  moi-même,  aux  portes  de  Tunis  et  à  envi- 
ron i5  kilomètres  de  Carthage  '  un  vaste  ensemble  de  fours 
à  potiers,  dont  une  dizaine  étaient  bien  visibles.  J'y  ai 
trouvé  un  grand  nombre  de  débris  d'amphores,  notam- 
ment des  anses  portant  des  estam]iilles  formées  le  plus  sou- 
vent de  lettres.  Mais  je  n'y  ai  pas  rencontré  de  restes  de 
lampes.  Le  gîte  n'a  du  reste  été  exploié  par  moi  qu'à  la 
surface. 

Une  grande  ville  comme  ITadrumète  devait  certainement 
avoir  des  ateliers  de  potiers,  soit  à  son  intérieur,  soit  dans 
ses  envii'ons.  0?i  ne  connaît  l'emplacement  d'aucun 
d'eux,  mais  on  a  découvert  dans  les  «Mivirons  un  gisennent 
considérable  de  lampes  dont  la  situation  et  l'homogénéifé 
peuvent  donner  une  idée  des  fabii(|ues  de  la  région  ^.  C'est 
dans  le  sanctuaire  punique  d'El  Kenis- 
sia,  à  Ksibet-Soussa.  Dans  un  entasse- 
ment de  six  mille  poteries,  que  les 
fidèles  y  avaient  déposées,  j'ai  trouvé 
tiois  mille  lampes  puniques  3  de  for- 
mes diveises  avec  ou  sans  pied.  Tous 
ces  petits  récipients,  de  formes  diver- 
ses, sont  en  une  pâte  d'un  jaune  clair, 
assez  cuite,  sortant  évidemment  des 
mêmes  ateliers.  (Fig".  3  et  PI.  1.) 
A  Sousse,  dans  un  sanctuaire  punique,  a  été  rencontré 
un  dépôt  analogue,  lis  sont  mêlés  à  des  poteries  indigènes 
bien  caractérisées,  qui  ne  proviennent  pas  de  grands  al(>- 
liers,  et  à  des  lampes  romaines. 

Des  poteries  en  aussi  grande  quantité  et  de  qualité  très 
commune  n'ont  évidemment  pas  dû  être  transportées  de 


Fit 


p.    i8o.   Eslawpilles  puniques 


1  \.   F)""  C\T\Toy.  Revue  Archéoh,   189^,  1. 
sur  aiiscf!  d'amphnies  trouvées  au  Belvédère. 

•î  Dans  la  tranchée  du  chemin  de  fer,  auprès  de  la  maison  Balzan,  on  voit, 
des  traces  de  fours  à  potier,  mais  les  débris  qui  en  proviennent  paraissent 
relativement  modernes.  Peut-être  s'en  trouve-t-il  de  plus,  anciens  dans  le 
voisinage. 

3  V.  D""  Carton.  Acad.  des  Inscr.  Mém.  publiés  par  div.  savants.  Le  Sanc- 
tuaire de  Tanil  à  El  Krnissia,  p.  qô  et  Bull.  Soc.  Archéol.  de  Sousse,  p.  78. 


T.F5;  FNRHiot  ES  DE  !.\^fI'F,s  nws  lV\ny:ie\ne  \riuoi  F.     71 


PI.  1.  Lampks  iHMQi  i:s  d'Kl  Kkmssiv  fpp.Ès  Soisst) 
(PI.  extraite  du  Bullciin  de  la  Société  Archéologique  de  Soiissc,   1007,  p.  66) 


72 


LES  FABRIQUES  DE  LAMPES  DANS  L  ANCIENNE  AFRIQUE 


loin,  (l'aiitarit  plus  (fii'il  y  a  paitout  dans  le  pays  des  bancs 
(Taiii-ilc  |)lasti<|n('.  Elles  sériaient  donc  d'ateliers  situés  à 
lladiumèLe  ou  aux  environs. 


IV.  —  Epoque  Romaine 

On  sait  que  l'on  divise  en  deux  grandes  classes  les  lam- 
pes païennes  de  l'époque  romaine.  Celles  de  la  première 
période,  antérieures  ou  postérieures  au  commencement  de 
l'ère  chrétienne,  rondes,  sans  (pieue,  en  pâte  fine,  dure  et 
légère  offrent  souvent  des  sujets  artistiques,  ne  portant  que 
très  peu  d'estampilles,  réduites  le  plus  souvent  à  une  lettie 
ou  à  un  signe.  Elles  forment  donc  à  ce  point  de  vue  la  tran- 
sition entre  les  lampes  puniques  et  les  suivantes  dont  c'est 
la  caractéristique  de  présenter  souvent  un  cachet. 

Les  lampes  de  la  deuxième  période,  de  pâte  plus  épaisse, 
sont  caractérisées  par  la  queue  forée',  l'abondance  et. la 
variété  de  la  décoration  ;  beaucoup  d'entre  elles  peuvent 
être  africaines.  Mais  comme  on  n'a  pu  jusqu'ici  retrouver 
aucun  des  ateliers  d'où  elles  sont  sorties,  il  faut  recourir  à 
d'aiitres  indices  pour  en  déceler  l'origine. 

Ee  i)remier  moyen  auquel  on  ail  pensé  pour  se  procurer 
ces  renseignements  est  le  classement  et  l'examen  des 
estampilles.  11  ne  paraît  pas  avoir  donné  tous  les  résultats 
auxquels  (^n  pouvait  s'attendie,  mais  il  ne  semble  pas  qu'on 
ait  fait  ce  travail  avec  toute  la  méthode  et  l'ampleur  dési- 
rables. On  a  pu  cependant  arriver,  dans  quelques  cas,  à 
des  conclusions  d'un  certain  intérêt. 

Ees  estampilles  ont  été  le  plus  souvent  imprimées  sur  le 
fond  extérieur  à  l'aide  d'un  cachet.  Elles  comprennent 
alors  en  général  une  seule  ligne.  Ailleurs,  moins  fréquem- 
ment, elles  forment  deux  ou  trois  lignes  tracées  à  la  pointe 
ou  sm"  le  côté. 

Ces  marques  peuvent  offiir  l'initiale  du  praenomen,  le 
(icnfillce  et  le  cor/zKi/xrrf,  écrits  souvent  en  abrégé  par  leurs 
premièi'es  lettres.  Ailleuis,  il  n'y  a  (pi'un  seul  genfilicc  ou 
bien  un  coçiiioincn.  Ce  qui  est  le  plus  intéressant,  c'est  que 
le  même  geiitiUce  o^\  tantôt  seul,  au  singulier  ou  au  plu- 
riel, tantôt  au  singulier,  accompagné  et  suivi  d'un  surnom. 
On  a   pensé,   avec   laison,   semble-t-il  ^,   que  les  premiers 


1  II  y  en  a  encore  (inel(|iics-nncs  de  In  même  époqne  qni  n'ont  pas  de  queue, 
mais  c'est  l'except.ion. 

2  V.   Merlin  ef   PnmssiiT.    /.('.<;  insriijilions   rVlJchi   Majus,  p.   88. 


LES  1  AHUIOl  ES  l)i:   l.\MI>l>  l)\\S  I.' \  \(  .lENNE  MRIOl  E        7:5 

roprésciilcnl  [)ciil  rire  le  roiidiitciii  de  la  lirnic,  J(;s  seconds 
une  assorialioii  de  ses  lils,  le  lioisièuie,  divers  alelieis 
ai>|)ai  leiiaiU  aux  lils,  ou  dirigés  pai-  des  affranchis  dont  le 
nom  a  élé  ajouté  à  la  inai<iue. 

(lerlains  gToup<'s  de  lampes  (pii  paraissent  appartenir  à 
{{{"i  péiiodes  assez,  longues,  piéscnteni  l«;s  mêmes  noms  et 
les  mêmes  prt'iioms,  a\cc  (\v>  sm  noms  différents.  Il  est 
possible  —  mais  il  n'est  |)as  démontré  —  (pie  le  fy«'/i//7/ce 
soil  celui  du  propiiélairc  et  If  surnom  celui  des  alïianchis 
ou  cliefs  d'ateliers. 

Parfois,  au  lieu  de  noms,  reslam[)ille  offre  la  représen- 
tation de  certains  objets  tracés  en  grallite  avant  la  cuis- 
son :  trois  palmi'ttes,  par  exemple,  et  môme  des  figura- 
lions  plus  ou  moins  compli(piées,  connue  im  buste,  un 
personnage  debout,  etc.  (]e  sont  là  des  raretés  dont  il  ne 
sei'a  i)as  tenu  compte  ici. 

('erlaines  des  lampes  qui  portent  de  ces  estampilles  ont 
été  lianspoitées  au  loin,  telles  celles  des  Pullein.  Cette  der- 
nière mar(jue,  (pii  a  une  grande  diffusion  dans  l'espace,  l'a 
également  dans  le  temi)s,  puisfpi'on  la  voit  sur  des  lumi- 
naires de  la  première  éj)oque  et  sur  d'autres  du  in*"  siècle. 
On  conçoit  que,  durant  deux  ou  tiois  siècles,  une  firme  ait 
pu  subir  plusieurs  transformations,  et  passer  du  père  au 
fils  et  aux  affranchis. 

Quoiqu'il  en  soit,  on  peut  observer  avec  les  auteurs  du 
t.  vni  du  Corpus  li)srr.  latin,  que  si  beaucoup  de  marques 
trouvées  en  Africpie  l'ont  été  ailleurs,  il  en  est  un  certain 
nombre  (jui  n'ont  été  rencontrées  que  dans  cette  région. 
Il  est  possible  (jue  ce  soit  l'effet  du  hasard,  mais  il  est  plus 
probable  qu'il  s'agit  d'estampilles  frappées  dans  ce  pays. 

Il  faut  eidin  remarquer,  avec  ces  mêmes  autems,  (pie  la 
Sardaigne  ayant  pris  ses  poteries  courantes  à  l'Afrique 
plutôt  qu'à  l'Italie,  les  découvertes  de  produits  communs 
aux  deux  pays  sont  une  présomption  de  plus  en  faveui-  de 
l'origine  africaine. 

l)'autr(\s  estampilles  trouvées  en  certain  nombre  en  Afri- 
que, l'ont  été  en  plus  grande  (piantité  ailleurs.  Tl  est  pos- 
sible (pie  de  nouvelles  découvertes  changent  ces  propor- 
ti(ms.  Je  ne  m'occuperai  ici  que  de  celles  qui.  par  leur 
répartition,  paraissent  avoir  eu  l(Mir  maximum  d'expan- 
sion en  ce  pays,  (pioi(pie  ce  critérium  ne  puisse  encore 
donner  toute  certitude,  des  ateliers  italiens  ayant  pu  avoir 
leur  principale  clientèle  en  Afrique,  et  les  ateliers  africains 
à  l'étranger. 


74        LES  FABRIQUES  DE  i.AMPES  DAiNS  J.'aNCIEINNE  AFRIQUE 

Enliii,  le  lecleur  doil  èLie  prévenu  que  le  dépouillement 
des  estampilles  portées  au  Corpus  est  loin  de  donner  une 
idée  exacte  du  iioiiibrc  de  lampes  trouvées,  et  par  consé- 
quent de  leur  répartition  eu  Afrique.  On  sait  que,  très  sou- 
vent, des  fouilles  clandestines  ont  dépouillé  des  nécropoles 
importantes  entières,  et  que,  même  quand  les  recherches 
ont  été  faites  olïicieJlemcnt,  beaucoup  de  lampes  ont,  pour 
des  raisons  que  je  n'ai  pas  à  indiquer  ici,  passé  dans  les 
collections  privées,  ou  chez  les  marchands,  sans  avoir  été 
signalées.  Je  me  bornerai  à  rappeler  tous  ces  objets  prove- 
nant des  cimetières  antiques  d"Ei  Djem,  de  Leinta,  qui  ont 
été  colportés  par  des  courtiers  à  travers  la  Tunisie. 

Les  lampes  intéressantes  qui  n'ont  pas  été  publiées  for- 
ment certainement  un  nombre  double  ou  triple  de  celles 
(]ui  sont  connues. 

On  sait  enlin  (jue  toutes  les  nécropoles  africaines  sont 
loin  d'avoir  été  explorées,  et  que  par  conséquent  il  n'est 
pas  possible  d'établir  la  densité,  pour  chaque  région,  des 
luminaires  qui  y  ont  été  trouvés. 

Pour  toutes  ces  raisons,  les  conclurions  tirées  de  l'étude 
des  estampilles  ne  peuvent  avoir  qu'une  précision  toute 
relative.  On  verra  pourtant  que  (juelques-unes  d'entre  elles 
ont  un  réel  intérêt.  Ln  grande  quantité  d'exemplaires  que 
l'on  connaît  permet,  en  outre,  d'établir  dès  maintenant  des 
listes,  et  comme  un  cadre  dans  lequel  pourront  rentrer  la 
l)lupart  des  découvertes  ulléi  ieures.  C'est  pourquoi  j'ai 
indiqué,  pour  chaque  marque,  le  lieu  de  sa  découverte 
avec  le  degré  de  fréquence. 

Il  eût  été  précieux  de  poursuivre  la  comparaison  avec  les 
découvertes  faites  en  d'autres  provinces  de  l'empire  ;  je  n'ai 
pu  me  procurer  à  Tunis  ni,  en  raison 'des  circonstances 
actuelles,  consulter  ailleurs  tous  les  tomes  du  Coi'piis  Inscr. 
latin,  qui  m'eussent  permis  de  le  faire  i. 

J'ai  tenté  de  dresser  des  tableaux  permettant  de  trouver 
dans  l'identité,  la  ressemblance  ou  la  répétition  des  sujets 
des  indications  relatives  à  leur  origine.  Je  dois  avouer  que 
ce  travail  ne  m'a  pas  donné  les  résultats  que  j'en  attendais. 
Le  sujet  adopté  paraît  être  plutôt  une  question  de  mode, 
ou  d'époque,  que  de  fabrique,  les  sujets  et  les  moules  ayant 
pu,  du  reste,  passer  d'un  atelier  à  l'autre.  11  aurait  fallu 
pouvoir  comparer  entre  eux  et  même  rapprocher  les  exem- 
plaires des  musées  et  collections,  en  examiner  la  couverte, 


I   Ce  regret  est  atténué  p:ir  ]e  fait  que  beaucoup  de  ces  tomes  ne  correspon- 
dent plus  du  tout  à  l'état  des  découvertes  actuelles. 


LES  IM<HIOl  ES  DE  LAMPES  DANS  l'aNCIENNE  AFRIQl  E        7o 

la  pùlc,  la  cuissidii  l'I  lii  riHliuc.  Je  n'ai  pas  eu  la  possibilité 
tic.  le  l'aire. 

Qu()i(|u  il  en  .-ttil,  Noiei  (piel(pie.—  iiii.s  tles  résultats  ilii 
classeineiil  (|iie  j'ai  Inilé.  .le  n'y  parle  (pie  des  estampilles 
(jiiil  y  a  plus  ou  moins  de  raisons  [)oui  considérer  comme 
africaines  '. 

L  I-AHIUS  i.AETUS.  l  ne  trouvaille  l'aile  à  Cartilage 
donne  peut-être  le  nom  d'un  l'ahiieanl  de  lanij^es  de  celte 
ville.  Le  U.  P.  Delattre  ■'  y  a  rencontré  une  série  de  formes 
nettement  puniques  et  offrant  aussi  les  symboles  de  la  reli- 
gion carlliaginoisc'.  l'allés  portent  toutes  la  marque  ci-des- 
sus. Il  s'agirait  d  ujie  des  plu.s  anciennes  fabriques  de 
l'Afi  iipie,  puiscpTelle  exislait  à  une  épo(jue  oii  persistaient 
de  manièic  si  \  ivace  les  croyanc«'s  de  la  première  Cartilage. 

DEIUSOUIS.  Trouvée  deux  fois  en  Afrique  {Kd,  Bulla 
lU'gia)  et  non  ailleurs.  Le  gculUicc  Deiisor  a  été  rencoiiLix'' 
dans  un  texte  d'Lchi  Mains,  en  un  point  où  une  autre 
famille  de  potiers,  les  PuUeiii,  avaient  de  grands  domaines 
et  non  loin  par  conséquent  du  lieu  de  la  découverte  des 
deux  lampes  qui  le  portent. 

CCOIA  \  US.  Trouvée  à  Carthage  seulement. 

AlACIS.  Six  fois  en  Afrique  (Carthage  4,  Bir  Tabenk  6), 
une  fois  à  Rome  ;  est  peul-êlrc  africaine.  Marque  paifois 
en  gralïile  sur  les  côtés  de  la  lampe. 

CHETASl  et  SEX  CHETASl.  Cinq  fois  en  Afrique  (Car- 
thage et  ma  collection)  et  une  fois  à  Rome. 

NUNDLNARIUS.  (Haïdra,  Tebessa,  Khenchela,  Medracen, 
Mdaourouch,  Khamissa,  Guelnia  et  Sétif).  Les  auteurs  du 
Corpus  disent  que  ce  nom  n'est  pas  rare  en  Afriqui'  '■'  el 
que  cette  marque  n'a  pas  été  rencontrée  ailleurs.  Ils  en  con- 
cluent que  les  lampes  qui  la  portent  sont  d'origine 
africaine.  On  peut  rapprocher  XL>iDIiM  (Carthage  ')  et 
Bon  Korneïn)  et  NAxNDLM. 

Ce    cognomen    vient    de    \iin(linac,    marché.    On    sait 


1  Pour  ne  pas  augmenter  indéfiniment  le  nombre  des  renvois,  je  no  donne 
pas  les  références  relatives  au  Cor/)i;s  Insrr.  ]aL,  au  Catalogue  du  Musée  Alaoui, 
à  l'article  de  Gauckler  publié  dans  les  Nouvelles  Archives  des  Missions  Scienii- 
fiqucs,  t.  XV,  fasc.  4,  Bapport  sur  les  inscripl.  lat.  découvertes  en  Tunisie  de 
1900  à  î'.)0^  et  au  Supplément  du  Catal.  du  Musée  Alaoui  publié  par  M.  Merlin 
dans  le  Bull,  de  la  Soc.  Archéol.  de  Soiisse,  1910,  n°  i5,  p.  60,  qui  forment  les 
pniiicipales  sources   auxquelles  j'ai   puisé. 

2  V.  Delattre.  Uevue  Tunis.,  if)i3,  Lampes  romaines  trntivées  à  P.urdj- 
Djedid,  p.   i85. 

3  .Tai  relevé,  dans  une  épitaplie  de  la  Colonia  Thuhurnira,  les  noms  de 
C  Julius  Nondinarius.  On  sait  qu'il  y  a  eu  des  potiers  dans  cette  ville. 


76        LES  lAlUUQl  ES  DE  i,AMl»ES  DANS  E'A^(:IE^^E  AFRIQUE 

l'iniportance,  at lestée  par  plusieurs  inscriptions,  qu'ont  eue 
et  celle  qu'ont  encore  les  marchés  dans  le  pays  essentielle- 
ment agricole  (pi'esl  IWIricpie.  On  remarquera  que  la  pjc- 
■niière  variante  n"a  été  trouvée  (jue  dans  le  centre  et  le  sud 
de  l'Afrique  et  pas  sur  le  lilloial,  ce  (]ui  est  en  faveur  de 
son  origine  africaine. 

LPOMFEILS  PO-MIANUS  iCarthage  i,  Bulla  Regia  i), 
cf.  POMPEIUS  a:i  r)jem  oj,  PONTIANI  (Carthage  5,  Cher- 
chell  I,  Uammam-Lif  i).  Fréquent  en  Sardaigne,  inconnu 
à  Rome,  remaïquable  par  son  extension  en  Afrique. 

LHORTENSIUS  (Carthage  5,  Bulla  Regia  2)  n'a  pas  été 
rencontré  ailleurs,  sauf  en  Sardaigne,  ce  (|ui  confirmerait 
son  origine  africaine.  Ce  ncmi  est  fréquent  dans  l'épigra- 
phie,  dans  des  conditions  montrant  qu'il  était  porté,  non 
par  des  individus  isolés,  mais  par  les  membres  de  familles 
établies  dans  le  pays,  l/une  d'elles  résidait  à  Gighti  •,  sur 
le  forum  de  laquelle  elle  avait  des  statues  de  ses 
représentants. 

Une  autre  possédait,  aux  environs  de  Tipasa,  un  domaine 
renfermant  de  grands  vignobles  -. 

GMARRUPO.  Douze  fois  en  Afrique,  très  dispeisée  (Car- 
thage, Sousse,  El  Djem,  Ras  Dimas,  Timgad,  Cherchell, 
Constantine).  N'a  pas  été  trouvée  à  Rome,  mais  en  Breta- 
gne, sur  le  Danube,  en  Sardaigne,  en  Sicile,  aux  environs 
de  Naples,  à  Ostie.  On  peut  admettre  qu'elle  est  provinciale 
et  {)eut-être  africaine. 

ANGIIIAL.  Douze  exemplaires  dispersés  (Carthage, 
Iladjeb-el-Aïoun,  Tebessa,  Khenchela,  Sousse,  El  Djem). 
Marquée  parfois  au  grafïite  ou  à  la  pointe.  J'ai  cru  devoii- 
placer  ici  cette  estampille  qui  paraît  n'avoir  été  rencon- 
trée dans  aucune  autre  province,  quOiiiue  les  autems  du 
Corpus  ne  l'aient  pas  mise  à  ccMé  d'autres  (pii  se  liouvenl 
dans  les  mêmes  conditions. 

L  PEDI  SEC  écrit  parfois  FEDI  SEC.  Dix-sept  exem- 
plaires très  dispersés  (Carthage,  Bon  Kornine,  Bulla  Regia, 
Ilaïdra,  Tebessa,  Timgad,  Cherchell,  Sousse,  Oran),  cf. 
Gauckler,  Nouv.  Arch.  des  Miss.,  xv,  p.  /|5:^.  L  PEDHJ^S, 
qu'il  lit  Fed(i)  Jus(ti). 

Cette  marque  serait  })lus  fréquente  en  Afrique  qu'ail- 
leurs. Elle  fait  penser  à  une  fonction  mentionnée  dans  les 
épitaphes  du  cimetière  des  Ofjiciales  :  pedisequa. 


I  V.  Gauckler.  Loc.  cit. 
a  Cf.  GsELL.  Tipasa,  p.  422. 


LES  lAHIv  >l  KS  1)K   LXMI'KS  ItWS   I.    WCIKNM;    \IHI<)I   i; 


77 


Les  C.clsi.  -  C.i'lsiis  est  iiii  nom  cl  Cflsius  un  surnom.  Il 
y  ;i  pliisicui  •  l'oiincs  ":  r/y'ix)',.'.. ',''.',.  yii  ciMiiclôrcs  giirs  (cinci 
rvcmphiiics,    M;ili(liii.   S;il;ikl;i,    Sou».-   j  \  .  '!'(•//.    Arrlirol. 
(lu  ('.Dinilr,    i()o,->,   [t.    17^1',   sr   icnconlic  dans  la  camjT.i- 
^iw  naj)oJilainc  cl  en  Sicile  ;  h  1  ()|"l(;i  (IKLS  (C^urlhagc)   ; 
c)  (]  SdANT  C.I.I.SI  |)iiiroi<  cri  ^rallilc  C-arlhagc),  li-ouvcc 
aussi  en  C-aniiianic,  ce  (|ul  la  rapproche  de  n)  ;  d )  (}  NA  Ml 
(jEI.S  =  O.   \tiini(liis  t)\\  \iiiiii<lins  Cclsiis,  j 5  exemplaires, 
dispersés  iSoussc,  Sl'ax,   Riilla   Hcfjia,  Tebessa,   Kas  Dimas, 
Sidi  cl  llani  (ma  collcclioii    1.  a  ('!<'  icticoni  lée  en  plu>ieuis 
parlies  de  ]'em[»ii('. 

Les  Fdhricii.  —  Seize  exemplaiics  a\('c  on  sans  cogno- 
meii  :  I.  KABMIC  (Soussc,  Tobcssa).  I.  l'Mil'.l  AKVE  (Aex^el- 
jnslij  iSoussc).  I.FAHHFA  «Baltaria).  I.  FAHHICIVS  G 
(Djebel  Djelloud,  v.  lU-vuc  Tunis.,  1910,  p.l'|6).  L  FABlilC 
MASC  (Carthage,  Bulla  Begia,  lienchir  Meskal).  K  FABlil 
\rT  (Carthage).  F  FABBJC  NASO  (Bulla  Begia,  Tebessa, 
(^herehell).  On  a  houvé  celte  estampille  à  F^ome  cl  dans 
plusieurs  provinces,  notammcnl  en  Sardaignc.  File  païaît 
donc  èli'c  plul«M  ilalienne  (juafricaine. 

Les  AureHi.  —  AVR  —  WBE  —  AVBELI  —  A\  BFFI 
LASCIVI  —  LÂSCIVI.  Dix-huil.  1res  dispersées  (Carthage, 
Lemia,  ^olubilis,  Tebessa,  Djerba,  FI  Djcm,  Bulla  Begia). 
Le  Corpus  ne  donne  malhcmeusemenl  {)as  la  répaililion 
dans  le  reste  de  rcm|)ii'e.  Si  c(Mte  nun(|ue  est  rare  ailleurs, 
elle  pourrait  ètic  afiicaine. 

Al  (!lvM)I.  hix-huit  idarihage,  lîou  Kornine,  Sidi 
Daoud,  Bulla  Regia,  Le  Kef,  Tigzirl,  Ksar  Renia  Céder, 
Bou-Grara,  Sfax,  Gafsa,  Bir  bon  Rekba,  v.  Bull.  Archéol. 
du  CoDiilé,   100;^,  p.   iiti).  Trouvée  à  Borne,  Oslie,  Luna. 

AG.BI.  Paifois  accompagné  du  swaslika.  L  11c  fois  on  a 
trouvé  la  forme  P  AGRL  \ingt  exemplaiics  très  dispersés 
iCarIhage  9,  Dougga  [V-  Rei'ue  Tunis.,  1890,  p.  ')\-->.], 
Teboursouk,  Cherchell,  Goiiraya,  Saint-Leu,  Tebessa.  FI 
Djem,  Tlîina,  Korbous  [Bewi  lt,  if  cahier,  p.  ô5j). 

M.Poinssot  est'  particulièrement  alTIrmatif  sur  l'origine 
de  cette  marque,  qu'il  place  à  côté  de  celle  des  Pulleni  et 
des  A'undinarii,  comme. communes  à  l'Afrique  et  à  la  Sar- 
daignc. Cependant,  on  l'a  trouvée  à  Ostie,  en  Lusitanie.  en 
(laule  Narbonnaise.  Ce  qui  viendrait  à  l'appui  de  l'opinion 
de  M.  Poinssot,  c'est  que  le  nt^m    [grios  est  relalivemeiil 


lievue  Tunis.,  1S90,  p.  5io. 


78 


LES  FABRIQUES  DE  LAMPES  DA\S  L  A^C1EMV    \FRIQI'E 


fréquent    dans    l'épigraphie    africaine.    ()i   la    lencontré 

d'après  les  tables  du  (jri^fii:  uâns  les  régions  d'IIaïdra, 

Sélif,  Stgu;^  tîaïnbèse,  Le  Kef,  et  c'est  peut-êtie  de  ce  côté 

(pi'iiarail  été  situé  l'atelier  ;  la  voie  de  C'^ailhage  à  Théveste, 

(pii   passait   tout   au])rès  de  Thugga  en   aurait    facilité  le 

transport. 

Les  Victores.  —  VICTOR  —  \  ICTORIS  —  VICTOR  F  — 
VICTOR  I  —  VICTOR  P  —  VICTOR  X.  En  tout  27  estam- 
pilles de  Victor,  et  peut-être  ses  alTranchis  ou  descendants 
(Carlhage,  Lemta  [dont  trois  avec  l'F],  Rulla  Regia,  Sousse, 
Ilenchir  Meskal,  Rir  bon  Rekba,  Zarxis,  llaïdra).  Cette 
estampille  est  très  répandue  en  Sardaigne,  ce  qui  peiinet  de 
penser  fpi'au  moins  une  paitie  de  ces  mar(|ues  est  africaine. 

Les  Sejnpronii.  —  SEM,  !^  fois  (Rulla  Regia,  Bou  Kor- 
nine).  LV  SEMPRONI,  8  fois  (Cartbage).  LSEM  HA,  3  fois 
(Rou  Kornine,  Cherchell,  Djebel  Djelloud).  Q  SEMPRON, 
4o  fois  [:i?>  fois  à  Carlhage,  puis  Kelibia,  Rulla  Regia,  Le  Kef, 
Tebessa,  Ain  Reïda,  Arbal). 

II  s'agit  peut-être  des  ateliers  d'une  même  famille.  On 
iemar(piera  à  ce  sujet  la  position  des  estampilles  sur  la 
queue  de  la  lampe,  qui  est  à  la  fois  particulière  et  com- 
mune aux  deuxième  et  ([uatiième  maïques.  Les  Senipj'onii 
sont  fiéquents  dans  ré[>igraphie  du  t.  vin  du  Corpus  et 
cette  marque  est  en  outre  très  rare  en  Italie.  Il  y  a  donc  des 
chances  pour  qu'elle  soit  africaine. 

Les  Luccei  et  les  MauricL—  LVCC  (Rulla  Regia).  LVCCI 
(Rir  bou  Rekba).  EX  OFFI  LVCCEI  et  LVCCEI  (Cartbage, 
Huila  Regia,  Thigibba,  Tbelepte,  Tebessa,  Cherchell,  Sfax, 
Dougga,  El  Djem,  llaïdra).  LVCCEIORUM  (Rulla  Regia, 
Tebessa).  LVCCEI  FELIX  (Thigibba,^  Henchir  Cheffaï). 
LVCCEI  MAVPdCI  et  LVC  MAVRICI  (Cartbage,  El  Djem, 
Tebessa).  MAVRICI  (Cartbage,  Sousse,  Sfax,  Rulla  Regia, 
Le  Kef,  Thala,  Tipasa,  El  Djem,  Khanguet). 

C'est  d'après  les  auteurs  du  t.  vui  du  Corpus,  que  les 
lAiccei  ont  été  rapprochés  des  Maurici. 

La  marcfue  portant  le  premier  nom  a  été  signalée  en 
Sicile  et  en  Saidaigne,  les  Luc.  Maur  à  Pisauruin,  les  Mau- 
rici à  Rouie,  eu  Saidaigne,  à  Sagonte  et  Ilicium.  Lucceius 
Feliœ  n'est  pas  connu  hors  de  l'Afrique.  Peut-être  s'agit-il 
d'une  maison  italienne  ou  même  lomaine  ayant  eu  des 
ateliers  en  Africpie.  L'n  lot  de  huit  lampes  à  deux  becs,  dont 
sept  avec  la  marque  Maurici,  trouvé  au  Khanguet,  mérite 
une  mention  spéciale. 


LKS  l"\l<KI(U  KS  1)1     I    \MI-i:s  l)\\S   1.  WCIKWt;  AlUKjl   E 


79 


\<.\TII()|'  il  liKi  \(i\T.  I.o  iiiilciirs  (lu  dnpus,  (jiii 
lappnicliciil  CCS  i.\v\i\  iii;m|iic--,  cilcul  h  pr(»p(js  d'elles  un 
(,'.  liiciiiits  l(/a///(»/>(/.s,  dr  Home.  On  a  trouvé  en  Afrique 
')  exenipiaii'cs  de  la  |irciiiièrc  ((^uiihage,  liulla  Kegia)  cl 
■>.')  lie  la  seconde  i  ( '.arlliay-e,  Kl  Djeni,  Huila  Hegia,  Tebessa, 
Clierchell,  Djehel  Djelloud,  Ifatninani-Lir  i /i(///.  \iclii'ol ., 
1908,  lue.  cil.],  Soussei.On  a  signale  à  (iagliari  Testa  m  pille 
A(l  \T()\  et  la  seconde  niar(|ue  à  Itonie,  en  Sardaigne  cl 
ailleurs.  Il  aurait  été  inléi'cssant  de  savoir  combien  de  l'cris, 
s'il  s  agit  d  un  policr  de  Home  a\aul  eu  des  ateliers  en 
Afrique. 

Il  est  à  noici'  que  celte  mar(|Ue  est  fré(|ueide  sur  les 
grandes  amphores,  cttnnne  on  le  Miia  [join  celles,  des 
Doniitii  et  des  Ti'ophiini. 

L  CAPR  et  CAlÛiAHI.  Onze  e\enq)laires  de  la  {)remière 
(Sidi  el  llani,  lladjeb-el-Aïoun,  Sousse,  Kl  Djem,  Sfaxi,  el 
i4  de  la  seconde  niaïque  (Carlhage,  Bulla  Hegia,  Médéa). 
Lune  paraît  localisée  au  centre  de  la  Tunisie,  et  n'a  notam- 
ment pas  été  trouvée  à  Carlhage  ;  elle  n'aurait  pas  été  ren- 
contrée en  dehors  de  lAfiique  et  beaucoup  de  sujets  qui 
ornent  les  lampes  ont  un  caractère  africain  :  buste  de  l'Afri- 
que, Hercule  ou  ses  emblèmes.  Il  pomiail  donc  s'agir  d'un 
atelier  de  cette  contrée.  La  seconde  des  \  ariantes  a  été  trou- 
vée bien  j)lus  souvent  que  je  ne  l'indiciue  ici,  car  je  l'ai 
relevée  dans  plusiems  collections  j)articulières.  Klle  n'a 
été  rencontrée  hors  d'Afri(iue  qu'en  Saidaigne.  Il  pourrait 
donc  aussi  s'agir  d'un  atelier  africain. 

Les  Phronli.—  AV  FIR).\,  20  fois  (Carthage  [Bull.  Arch., 
1904,  p.  197]'  ^'*ii  Daoud,  Sousse  [Bull.  Soc.  Archéol. 
Sousse,  1909,  p.  i:>.i],  Has  Dimas,  Sfax,  Tebessa,  Constan- 
tine  [Recueil  de  Not.  et  Méui.  de  la  Soc.  AiThéol.  de  Cons- 
lantine,  190/1,  p.  •.>4o],  Cherchell,  Oran,  Guetna,  Bir  bon 
liekba).  PHROXI,  4  fois  (Carthage,  Bulla  Regia).  FROM, 
FROMM,  souvent  retourné  et  donnant  MINORF  ont  été 
relevés  6  fois  à  Carthage,  El  Djem  et  Cherchell.  On  sait 
que  cette  estampille  est  au  nom  de  Aufidius  Phronimus. 
Les  auteurs  du  t.  vni  du  Coi-pus  disent  que  la  première 
marque  a  été  rencontrée  à  Rome,  Ostie  et  Luna  ;  ils  ne 
parlent  pas  de  la  seconde  ;  les  troisièmes  ont  été  vues  en 
Sicile  et  en  Sardaigne.  Donc  elles  pourraient  è\i'c  afiicaines, 
ce  que  conliiiueraient  beaucoup  de  leurs  sujets  (pii  con- 
viennent à  r  \fri<|ue  :  sanglier,  bouc,  antilope,  cerf,  lièvre. 
hyène,  etc.,  mais  aussi,  faut-il  le  reconnaître,  à  d'aulres 
pays  riverains  de  la  Méditerranée. 


80        LES  FABRIQLES  DE  LAMPES  DA^S  l'aNCIENNE  AFRIQUE 

Les  Domitii.  —  Trente-cinq  fois  :  DOMIT  (Lemta). 
DOMJT...  (El  Djeni  [Revue  Tunis.,  n"  65,  p.  /i/|6]).  D(3MIT- 
NVIC-  iSonsse).  LDOM  (Sfax).  L  DOMITI  (Sousse,  El 
Djeni,  Thina  [Bull.  Archéol.,  1908,  p.  clxxxvhJj.  L  DOMI- 
TIA  (Lemla,  Eniidaviile,  SbeïUa,  Gui'za  [Carton.  BuU. 
Soc.  Archéol.  Sousse,  1909,  n"  /|ilj.  L  DOMITI  F  (Lemta). 
L  DOMITI  B  (8beïtla).L  DOMITI  P  (Sousse,  Lemta,  El 
Djem).  L  DOMITI  PAVLI  (Sousse,  Guiza).  L  DOMITI  PON- 
(Sousse).  LD0MITIS(E1  Djem,  Henchir  Meskal).  LDOMITI 
SES  (Mahdia,  El  Djem).  L  DOMI  (El  Djem).  L  DOMiS  (El 
Djem    [Revue  Tunis.,  n°  65,  p.  /j/ji]).  C  DOMITIS  (Thina). 

A  part  la  dernière  qui  a  un  praenomen  diiîérent,  ces 
marcjues  peuvent  se  rapi)c)iter  à  la  même  personne.  Il  n'est 
pas  dit,  au  Corpus,  que  quelqu'une  d'entre  elles  ait  été 
lencontrée  hors  d'Afrique,  sur  des  lampes.  Elle  aurait  donc 
pu  appartenir  à  cette  contrée.  D'autre  part,  leur  répartition 
donne  un  maxiuuuu  de  fréquence  dans  le  Sahel,  c'est  donc 
là  (ju'auiait  été  silué  l'aleliei'  ou  le  port  d'importation. 

On  sait  (pic  la  gens  Doniitia  est  célèbre  par  l'atelier  de 
bii(|ues  (jui  portent  son  nom.  Or,  le  gentilice  Domilius  est 
très  réj)andu  en  Afri(iue  et  le  chef  de  cette  gens  portait  le 
nom  d'/l/c/'  '. 

Dojnitia  IjiciUa,  une  des  héritières  de  ce  jjersonnage, 
éj)ousa,  on  le  sait,  Marc-Aurèle,  ce  qui  rendit  les  empe- 
reurs propriétaires  de  la  briqueterie. 

Il  est  possible  qu'un  membre  de  cette  famille  ait  installé 
des  atelieis  en  Afiicpie. 

GABINIA  (Carthage  [:>7  fois],  Sousse,  Lemta,  Hadjeb-el- 
Aïoun,  Bidla  Bcgia,  Bir  Oimi  Ali,  El  Djem,  Médenine, 
Sfax  et  Thina,  Djebel  DjcUoud  [ma  collection]).  CAVINIA 
(Garthage,  Bulla  Regia).  GABÏN  (Tipasa).  GAB  MERG  (Gar- 
thage,  Utique,  Sousse,  Gherchell,  Oran)  :  en  tout  cin- 
(fuante-trois  exemplaires. 

Le  Corpus  ne  cite  que  quelques  exemplaires  à  Rome.  Si 
cette  marque  n'a  pas  été  trouvée  ailleurs,  elle  pourrait  être 
africaine.  Notez  que  la  confusion  du  B  et  du  V  dans  Cavinia 
cl  Cnhinia,  si  fréquente  dans  l'épigiaphie  du  pays,  confîr- 
meiait  cette  origine. 

Les  Pu.lleni.  —  L^s  (>slampilles  qui  portent  ce  nom  sont 
très  nombreuses,  (^n  vn  signale  72,  mais  le  nombre  de  celles 
{fui  ont  été  ti'ouvées  et  sont  dans  les  collections  particu- 
lières est  bien  plus  considérable. 


I  V.  Descemet.  Marques  de  briques  relatives  à  une  partie  de  la  gens  Domitia. 


T.ES  FARRIO,  KS  DR  T,  VMPES  DANS  I.'ancevnr  AFRIf,!  F        81 

I*IM.\|<N[.      Ci. , (,,,;, ni. •-Iniii      .Acinplaires     rC;,rtlia^(. 
l  l.qm'   Sous-,..  Z.,Ai>.  |.<.,,,is  >r.o,,;,,  Ho,,,.,  (),„)..„,,  M^,,; 
'1'.'.  H.ilh,  Krni,,   IVIm.ss;.,  Ch.Mrlu.II,  Cou.aïa,  I)j..|>,.|  |)j,.I_ 
l'^nd.   IJ  Dj.Mi,.  Si.li  lhn.,,,1.  Mi,-  b„„  Mekba,  Sidi  Your.-f 

PM.I.EM  POSSKSSOI',  ,Ca,(l,a,c.,.  r.-  nom  dr  Po.s.s.4,- 
;'•"  "'■  ''•""^''  ^'"-  ""<•  l'""I"-  '!••  I5.>'.H..  a  rfo  l.ouvc  à  Car- 
li^o  su,-  u.,r  |,.,iv  ruilr  rr|„('.s<.nl.inl  uu  jounir  d'orgue 
hvd.aul,.|nr.  l'I  I.I,K\()HVM  a^arlhaor,  Bulla  Hrc^la ,  1  a 
"iMiquo  P//7/c/,f  est  aussi  sur  une  slatueftc  de  CaHham-  .'1 
IKiiail  avou-  («xislp  sous  la  forme  OFFVLENI,  avee  uur  lirr;,- 
t'"!^'  àv  \  v[  I..  ,,ui  H  ,^(é  rencontrée  en  Xarbonnaise  C)n 
vo.l  (,ue  a  répartilion  ru  Afrique  est  très  générale.  On  en 
a  trouve  beaucoup  aussi  en  Sardaii.ne  et  quelques-un.vs  en 
NcUe,  a  Ost.e,  Home,  Dalmatie,  dans  la  Transpadane  et  en 
'raule  -Naibonnaise  i. 

1/examen   des    (ables   des   différents   tomes   du   Corrws 
niontn>  •>  (,u  il  n  y  avait  pas  de  Pulleni  établis  hors  d'Afri- 
que. D  autre  part,  ce  nom  est  très  fréquent  dans  l'éi,ima- 
ph.e  afr,eame.  Une  inscription,  que  j'ai  découverte  dans  1. 
theaUv  d,>  Thugga  >,   po.te  le  nom  d'un  personnage  (,ui 
dova.  .  co,ume  le  pense  M.  Poinssot.  appartenir  à  la  même 
fanulle  r,ue  les  PuUeni  dont  j'ai  trouvé  le  nom  gravé  sur 
a  porle  d  un  domain,-  '-.  11  avait  été  palron  du  pagus  et^de 
^incitas  de  la  ville.  Il  exerça  aussi  des  fonctions  civile,  et 
religieuses  a  Carfhage.  La  même  famille  devait  posséder  un 
autre  domaine  non  loin  du  premier,  en  un  point  où  j'ai 
^■ouve  une  inscription  relative  à  l'éreclion  d'un  temple  à 
(--ères  o,  ou  si  elle  n'y  avait  pas  de  propriétés,  le  personnage 
don    ,1  es   question  dans  ce  texte  devait  apparemment  habi- 
ter dans  le  voisinage.  A  Uchi,  il  y  avait  d'autres  membres 
d<   la  même  famille  et  M.  Poinssot  a  montré  quels  liens  d.. 
parenle  paraissent  les  réunir.  Un  autre  domaine,  situé  au 
Ket,  ap,.artenait  à  un  L.  Pulhiemis  Fdix,  dont  le  nom  a 
ete  Irouve  encore  dans  des  villes  de  la  région  :  Thignica, 

T  '  '^"' J^-/~''  '"'■  '■"■■  '"'i  ■'  i""i^I"é  .eue  .•n.Hi.ion.  Par  contre 
t">i  paiiiciiluTc  a  1  Afrique. 

.V.  Mkhl,>  h  P.,.^,,ot.  Lr.  insni,,liuns  ,rir},i  M„ju.,  ,..  ,  ,  ^  L.  form.- 
In  plus  corroc.e  de  ce  nom  leur  paraît  ^tre  Pullnirnus. 

3  ^  CvuTON.  Acad.  ries  Insc.  Mém.  présentés  par  div.  savant.  le  théâtre 
romain  de  Dtnigga.  l'uatre 

■Soc  'de?77  f.7'""''!-:  ^rioraphle,.  et  arché.d.  faites  en  Tunisie  in  Mém. 
soc    des  Se.  de  L,lle,  p.   ,:>4,  „"   /,.,-,   „s„-,^  ;„,,,    j^^,,,^, 

»  \.  Carton.  Découvertes,  etc.,  p.  276,  n°  Bi". 


^2        LES  FABRTQT  ES  DE  LAMPES  DANS  l'aNCIEINNE  AFRIQUE 

Aradi,  Uciibi  et  T.e  Kef  même.  M.  Poinssot,  qui  a  fait  Iôus 
ces  rapprochements,  i  emarque  à  ce  propos  que  nulle  région 
d'Afrique  ne  ])résenle  un  ensemble  d'inscriptions  concer- 
nant les  Pulleni  comme  celle  d'Uchi  Mains.  On  peut  donc 
se  demander  si  l'atelier  d'ofi  sont  sorties  les  lampes  qui  por- 
tent ce  nom  ne  s'y  trouve  pas.  L'exploration  minutieuse  de 
la  surface  du  sol  ne  m'a  donné  aucun  indice  à  ce  sujet. 
D'autre  part,  il  serait  étonnant,  si  cet  atelier  avait  existé  ici, 
(|u'on  ne  trouve  pas  dans  tout  le  pays  un  grand  nombre  de 
lampes  portant  le  cachet.  Tl  n'en  est  rien.  Les  fouilles,  peu 
étendues  du  reste,  que  J'ai  faites  dans  la  nécropole  d'Uchi 
ne  m'en  ont  fourni  pas  plus  que  celles  que  M.  Poinssot  et 
moi  avons  faites  dans  les  cimetières  de  Thugga. 

Les  Junii.  —  CTVN  ALEX,  doit  se  lire  C.  Jiinius  Âlcxius, 
()\  fois,  très  disséminée.  TCarthage,  Bir  bou  Rekba, 
Sousse  [17],  Lemta,  El  Djem,  Sidi  el  TIani,  Ras  Dimas, 
Bulla  Regia,  Le  Kef,  Mahdia,  Sfax,  Thina,  ligne  de  Sfax- 
Gafsa  [17],  ITadjeb-el-Aïonn,  Eoriana,  Médenine,  Tebessa, 
Khenchela,  Constantine,  Cherchell.  Rus^i;  mais  avec  pré- 
dominance notable  dans  le  centre  de  la  Tunisie.  Eréqnente 
en  Sardaigne,  rare  à  Rome,  cette  marque  manque  dans  le 
reste  de  l'Ttalie.  Elle  a  donc  les  caiactères  d'une  origine 
africaine  que  confirme  la  fréquence  de  certains  suiets  : 
ITercide  ou  ses  emblèmes,  buste  de  Celestis,  buste  de  l'Afii- 
<pie,  antilope,  lion,  autruche,  croissant. 

C  TVN  DRAC  se  lit  C.  Junins  Drnci,  S->.  fois,  avec  la  même 
répartition  générale  que  la  maifjue  précédente  fCarthage, 
Sidi  Daoud,  Souk  el  Abiod,  Rir  bou  l^ekba,  Sousse,  El 
Djem  [:h>],  Sfax  et  Thina  [8.5],  Salakta,  Sidi  el  Hani, 
Mahdia,  Tîadieb-el-Aïoun,  Philippeville,  Cherchell,  Lemta, 
Ras  Dimas,  Bizerte,  Constantine,  Djerba).  Tl  y  a  aussi  ici 
prédominance  des  mêmes  sujets  africains.  En  outie  les 
lampes  ont  une  grande  ressemblance  de  factiu^e,  et  beau- 
coup des  sujets  rtu'elles  offrent  leur  sont  communs.  T^a 
répartition  hors  d'Afrique,  d'après  le  Corpus,  fréquente  à 
Rome,  en  Ttalie  inférieure  et  en  Sardaigne,  se  rapproclie 
de  colle  de  la  marque  précédente.  On  doit  enfin  remarquer 
que  ces  deux  Junii  ont  le  même  prénom.  Tl  doit  donc  s'agir 
probablemeni  de  deux  ateliers  d'une  même  fabrique 
exploités  ou  dirigés  par  deux  des  membres  ou  les  affran- 
chis d'une  niême  famille. 

D'autres  marques  portent  encc^re  ce  gentilice,  mais  leur 
rareté  ne  permet  pas  de  faire  de  rapprochements.  D'autres 
aussi  offrent  les  cognomine  Alex  et  Drar  ci-dessus. 


LES  FARRFQT  KS  DE   r.AMI'KS  DANS  i/aNCIEWE  AFRIQIE        H3 

En  soniiiic,  les  (l(Mi\  («sliiinpillcs  des  .lunii  ont  élo  relevées 
i7(>  fois  el  leiii  ;il)(tii(liince  localisée  à  mie  région  de  la 
'rimisie  me  parnil  plaider,  plus  peut-êlre(|ue  les  faits  relevés 
|)otir  les  atilics  eaeliels,  en  faveur  de  leur  origine  africain". 

Les  0/>/>f/.  —  (  )|>|>|  ,.(  r.r  OFICJXA  OPPIOfUIM,  celte  der- 
nière» en  gialTile.  On  reniar(|ue,  comme  pour-  les  ÎAH'ccl  el 
les  Piillcni.  |;i  forme  du  génitif  pluriel  relatif  à  un  ou  [jIu- 
sieurs  meiidjies  de  la  famille  ou  à  ses  affranchis,  ou  à  une 
associât i(.n  (\r<,  uns  et  des  autres.  Les  lampes  qui  portent  le 
nom  seul  sont  peu  nombreuses,  et  disséminées  fCarthage, 
Constanline,  Ti[)asa,  ffammam  ]V\vn,  Cherchell,  Sétif, 
Gurza). 

C  OPPT  RES,  lof)  exemplaires  très  disséminés  fCartKage, 
Uticpie,  Hou  Korneïn,  Sousse,  Giuza,  Sheïtla,  Teboursouk, 
El  Djem,  Ileiichir  iMeskal,  Bii-  bou  Rekba,  Ilenchir  Tungai-, 
Chaouach,  Brdia  Regia,  Constantine,  Kellbia,  Leplis 
INIagna,  Djebel  Ojelloud,  Médenine,  Djerba,  Thala,  Sfax 
el  Thina,  Souk  Ahras,  Ksiba  [ma  collection],  Sidi  el  Ilanii. 

On  a  trouvé  d'aulres  marques  au  nom  des  Oppii,  mais 
comme  le  surnom  diffère  des  précédents,  il  est  difTicile  d'en 
indi(pier  les  rapports.  îls  ont  pu  appartenir  à  la  ménu' 
famille  de  potiers,  les  affranchis  ayant  pris  le  prénom  d'un 
de  ses  membres  et  le  nom  d'un  autre.  M  OPI  S\S  ;  M  OPPI 
ZOSI  ;  T,  OPPI  RES. 

Cette  (estampille  devait  au  moins  être  signalée  ici  à  cause 
de  sa  fré([uence  relative  en  Afrique. 

Les  Novii.  —  NOVIUS  ;  M  NOVI\  S  (Ilenchir  Meskal,  El 
Djem).  Cette  martfue  est  peut-être  la  contraction  de  Novius 
Justus  I. 

M-  NOV-  GERM.  Douze  exemplaires  fSousse,  El  Djem, 
Eemta,  Henchir  Meskal,  Constantine,  Ras  Dimas,  Sbeïtla, 
Djebel  Djelloud  )  seulement  ont  été  publiés,  mais  je  l'ai  vu 
un  grand  nombre  de  fois  dans  les  collections  privées. 

M-  NOVIVSTI.  Cent  treize  fois  (Carthage,  Sousse,  Lemta, 
Thysdras,  Sidi  el  Ilani,  IIadjeb-e1-\ïoun,  Teboursouk,  Bulla 
Regia,  Tebessa,  Constantine,  Cuelma,  Philippeville,  Cher- 
chell, Henchir  Meskal,  El  Djem,  Thala,  Sidi  el  Hani,  Dje- 
bel Djelloud,  SfaxV  Cette  marque,  si  fréquente  en  Afrique 
et  rare  à  Rome,  a  été  trouvée  en  Sardaigne,  en  Sicile,  en 
Campanie. 

nSTI.    Dix-neuf  exemplaiies   l'Carthage.    Réja,    I.emta, 

I  Voir  ci-après. 


84        LES  FABRIQUES  DE  LAMPES  DANS  L  ANCIENNE  AFRIQUE 

lladjeb-el-Aïoun,  llaïdia,  Ilenchir  cl  (hiiz,  Feriana.Tcbessa, 
Constantine,  Phi]i|)pe\ille,  Clieichell,  Sousse,  Tunisie). 
Le  Corpus  signale  quelques  exemplaires  à  Ostie  et  à 
Clusium. 

Les  L.  Mnnafil.  —  L-  MVÂDIEC,  se  lit  :  L.  Munatius 
Adjectus  I.  C'est  une  marque  assez  disséminée.  Cin- 
(juante-six  exemplaires  (Carthage,  Monastir,  Teboursouk, 
Sousse  ['^7],  Lemta,  Ilenchir  Meskal,  Béja,  Zarxis,  Sidi  el 
llani,  Enflda,  Bulla  Regia  [t6],  Chemlon,  Sbeïtla,  Feriana, 
Bir  Oum  Ali,  Tebessa  [7],  Khenchela,  Khamissa,  Constan- 
tine, Seriana,  Cherchell,  Djebel  Djelloud,  LIaïdra,El  Djem, 
Thala,  Souk  Ahras,  LTadjeb-el-Aïoun).  Elle  a  été  trouvée 
dans  plusieurs  provinces  de  l'empire. 

L  MUN  PHILE.  Quarante-cinq  fois  (Carthage,  Utique, 
Bon  Kornine,  Souss(>,  Lemta,  lladjeb-el-Aïoun,  Bulla 
Regia,  Tebessa,  Dellys,  Djebel  Djelloud,  Djerba,  Sfax, 
Souk  Ahras,  Gurza,  El  Djem). 

Les  sujets  des  lampes  qui  ont  la  marque  des  Munatii  sont 
souvent  les  mêmes  (juc  ceux  des  produits  des  Junii.  La 
plupart  de  ces  luminaires  seraient  sans  queue,  ce  qui  per- 
mettrait d'attribuer  à  cet  atelier  \ine  ancienneté  relative. 
Philelus  n'est  pas  rare  dans  l'épigraphie  africaine,  ce  doit 
être  un  nom  d'affranchi  d'origine  grecque.  Cette  marque 
serait  îissez  fréquente  en  Ralie. 

L-  M-  REST  ,  Ml  ^  A  RES7  .  Tirnte  exemplaires  (Carthage, 
Sousse,  T.emta,  Sidi  el  llani,  Henchir  Meskal,  Thigibba, 
Henchir  Cheffaï,  Bulla  Regia,  Constantine,  El  Djem, 
Djebel  Djelloud,  Llaïdra,  Souk  Ahias).  Marque  rare  à 
Rome,  existe  dans  quelques  autres  provinces  ;  vue  deux 
fois  en  Sai'daigne.doit  être  rapprochée,  par  son  cognomen, 
de  la  marque  C  OPPI  RES. 

L-  MUN-  SUC-.  Vingt-neuf  fois  fCaithage,  Lemta,  Bulla 
Begia,  Le  Kef,  Thigibba,  Tebessa,  Djebel  Djelloud,  Sousse, 
Gurza,  SfaxV  Beaucoup  moins  fréquente  à  Rome  qu'en 
Afrique. 

MUN-  TREPT.  Trente  et  un  exemplaires  (Carthage,  Uti- 
(|ue,  Sousse,  Lemta,  Bulla  Regia,  Tebessa,  Cherchell,  Saint- 
Leu,  El  Djem).  Marque  frécpuMite  à  Rome,  rencontrée  en 
Sardaigne  et  ailleurs. 

Quelques  autres  estampilles  plus  raies  doivent  être  indi- 
quées ici.   L-  MUN  (^Carthage,   El   Kautaia).    L  MUNL...I 


I   Les  auteurs  du  Cnriiux  rulmetlent   qu'une  nutre  estampille  assez  fréquente, 
C  MADIEC,  est  une  rorruc  vicieuse  de  celle-ci. 


T,ER  FMUUOI  RS  DE  T.AMPES  I)\\S  F,  ANCIENNE  AFRIQUE 


85 


(Hullii  Wr^hu.  I.  MW  \VG  rSousse).  MVN-  IIEL  fCar- 
Ihage).  IMW  IIIJ.I  Hir  bon  nokba).  ]..  MVN  A  MAR 
fSoiisso).  |ji  n'simir,  siif  les  ciiKi  cslampillos  de.  f|iiel(jii(' 
ri(''(|iicii(('  porlaiil  cr  iiotii,  deux  ayant  les  cognomina  Res- 
liliis  cl  Siicccssiis  sciaiciil  considérrcs  comme  africaines, 
(l('ii\  aiilics  le  sciaicnl  moins  sûrement  ;  Threptus  sérail 
plulol  romain,  (l'esl  à  propos  d(^  ce  nom  qu(^  M.  Toutain  ' 
se  (lemande  si  \r<  rotjnoniiua  ffrecs  de  beancoup  de  ces 
eslampilles  ni'  soiil  pas  celles  d'affranchis  doni  le  (fenlUice 
(■on)mun  indicpierail  (pie  les  fabricpics  (pii  les  ont  fra[)pées 
étaient  aj)parenlées  enire  elles,  ou  des  succursales  d'une 
même  fabricpie  doni  ces  affranchis  auraient  été  les 
di  lecteurs. 

Les  Clodii.  —  CT.O  TTEIJ,  CU)  IIEFJAX.  Vin<,4-qnatre 
fois  (('arthaf>-c,  BuUa  lU-^ia,  El  Djem,  llaïdra,  Cheria, 
('onstantine,  T(>bessa\  A  été  souvent  rencontrée  à  Rome, 
el  aussi  ailleurs.  HEE,  C  IIEI.T,  C-  ÏIEE,  TTETJ  doivent  se 
rapporter  à  C-  IIELVIVS  ÏANVAP.IVS  plutôt  (pi'à  la  pié- 
sent(^  estampille. 

C-  CEO-  SUC.  Cent  viuot-neuf  fois.  C'est  la  marque  la 
plus  souvent  rencouliée  iCarthaoe  [76],  Djebel  Djelloud, 
Hou  Koruiue,  rti(pic,  El  Djem,  Sousse  [i3],  Eemia,  Ksour- 
sef,  Bidla  Hegia  [i4j,  Thigibba,  Dougg-a,  Teboursouk, 
Thala,  llaïdia,  Sfax,  Sidi  Aïeh,  Gunifidia,  Ras  Dimas, 
Tebessa,  Aurès,  Philippeville,  Cherchell,  Oran,  Consian- 
fiue.  Souk  Aluas,  Çurza).  On  en  a  liouvé  à  Rome  et 
ailleurs,  d'après  le  Corpus  (\\n,  malheureusement,  n'indi- 
(pie  pas  dans  (pielles  proportions.  Ea  fréffuence  de  cette 
mar<pie  dans  le  cimetière  des  OJJlcialcs,  à  Carthage.uiontî-c 
l'ancienneté  de  cet  atelier  et  la  variété  des  formes  (pii 
s'él(Mid  de  la  piemièie  période  à  la  période  de  tiansitioii 
iudi(|ue  (ju'il  a  eu  un(^  grande  durée.  Pour  cette  marque, 
comme  pour  la  plupart  de  celles  (|ui  ont  été  fabriquées  en 
\fiique,  on  notera  que  cette  fré(|uence  e\isl(^  suitout  dans 
N^s  grandes  villes  :  Carthage,  Sousse,  Bulla  Regia,  etc., 
sans  (pTclle  y  soit  i)i'o|)ortionnelle  au  nombre  des  autres 
estanq)illes.  Ou  ne  peut,  à  mon  sens,  et  pour  le  momeut, 
n'en  tirer  qu'une  conclusion,  c'est  ([ue  les  grands  ateliers 
avaient  des  dépots  dans  les  villes  importantes  ou  rpie  leurs 
|)roduits  étaient  les  plus  recherchés. 

Je  n'allongerai  pas  plus  cette  liste  de  mai(pies  relevées 
sur   (l(^s   k'uupes   afiicaini^s.    en    laissaîil    dv   rn\ô   (pichpies 

I   Loc.   cit. 


86        LES  FABRIQUES  DE  LAMPE.^  DANS  l' ANCIENNE  AFRIQT  E 

autres  qui  auiaienl  pcui-otie  pu  trouver  place  ici  en  raison 
de  leur  fré(pieiiee,  mais  (jui,  pour  d'auties  raisons,  ne 
paraissent  pourtant  pas  devoir  être  considérées,  jusqu'à 
nouvel  ordre,  comme  africaines. 

Après  ces  lampes  dont  on  soupçonne  l'origine  indigène, 
sans  qu'il  ait  été  possible  jusqu'ici  de  localiser  leur  point 
de  fabrication,  en  voici  dont  on  connaît  le  nom  du  lieu 
d'origine. 

Découvertes  à  El  Djem,  à  (picue  f(^rée,  offrant  les  bustes 
d'isis  et  Serapis  se  faisant  face  dans  un  encadrement  de  fers 
h  cheval  juxtaposés,  elles  présentent  au  revers  cette 
inscription  : 

RX    OFICI 

NA    C-Y-S 

AB  AQVAS 

REGIAS 

La  mai(|ue  G-  V-  S  se  rapporte  peut-être  au  n°  2?., 644,  335 
du  t.  MU  du  Corpus,  trouvé  sur  une  lampe  de  Carthag(>  : 
G-  VALERISAN  '.  L'emplacement  âWquae  Regiae,  point 
situé,  d'après  Tissot,  à  l'entrecroisement  des  routes  qui 
traversent  la  Byzacène,  n'a  pas  encoie  pu  être  fixé  ;  on 
hésite  pour  le  localiser  entre  l'IIenchir  Baboucha,  l'Ain 
Rhoral),  J'Itenchir  Khatera  et  d'autres  endroits.  C'est  vers 
cette  région  —  il  peut  être  intéressant  de  le  signaler  ici  — 
cfue  l'on  a  trouvé  l'atelier  d'iîenchir  Srira,  dont  il  sera 
bienlcM  tpiestion. 

Les  Anicii.  —  Une  lampe  trouvée  à  Carthage,  en  terre 
grise,  munie  d'un  anneau,  ayant  ponr^sujet  un  léopard 
porte  la  marque  ANICIO  /RUM-  Le  R.  P.  Delattre,  en  la 
signalani,  ajoute  2  ;  (,  ()u  sali  «pie  les  domaines  des  Anicii 
étaient  considérables  en  Afri(|ue.  »  La  famille  de  ce  nom 
a  foiuni  au  pays  une  longue  suite  de  fonctionnaires  que 
signalent  de  nombreuses  inscriptions,  notamment  à 
Teboursouk,  Uzappa,  Timgad,  Lambèse  ^.  L'un  d'eux, 
Q.  Anicius  Fausfiis,  remporta  plusieurs  victoires  sur  les 
indigènes.  Une  inscri|)lion  de  Rome  qualifie  un  membre 


I  V.  Mehlin.  liulJ.  Archéi'l.  ,lu  Comité,  n,)ii,  P-  ccxii.  Cf.  Caial.  Musée  de 
Sfax,  Lampes,  n°  o^. 

s   /}i(//.  lie  la  .Soc.  iSnIirm.  ilea    \ntiii..   ipio,  p.  2^6. 

3  \.  Cl(''niont  Pali.u  de  Lessert.  Fasfes  des  Prov.  Afric.,  I,  pp.  5  et  291, 
-ii3,  etc. 


r.ES  FNUmor-ES  DE  LAMPES  DANS  T.  ANCIENNE    \FRIOri: 


K7 


dp  {•(•Ile  riimillc  (le  \nifific  (Joiniis  ruliin'n  '.  (Vosl  le  iiirnic 
(ini  l'iil  |)i()C(»ii^iil  cl  (loiil  [)Hilc  (-hiiiHiiis  '  diiris  un  piissii^n- 
(|iii  se  Ici  iniiu'  par  ces  mois  :  cl  '/".s  (ir<it    \jricae  cauipn. 


,1c  (lois  placer  ici  une  série  de  lampes  diiri  type  parti- 
culier, (pii  me  paraissent  l'oinu'i  un  mo\eii  Icrnu-  entre 
les  lam[)es  de  la  deuxiènu'  période  et  celles  (pie  l'on  dési^Mie 
sous  le  7iom  de  lampes  de  transition.  C-e  «rioupe  offre  en 
effet  des  ciuacl(res  bien  paiticidiers  indi(piant  (pi'ils  sont 
d'un  atelier  ou  de  plusieuis  ateliers  situés  dans  une  ré^'^ion 
déleiininée.  I.a  pâte  des  petits  vaisseaux  est  d'un  jaune  pale 
ra|)pelanl  les  lamjx's  [)uni(pios  d'EI  Kenissia,  peu  homo- 
gène, épaisse,  un  peu  grossière,  mais  très  cuite,  d,ui-e  et 
sonore.  Elle  ne  paraît  pas  avoir  clé  icvèlue  d'une  couveilo. 
l/ol)jcl  |»araîl  avoir  été  fait  en  li'ois  parties  :  la  suj^érieuic 
ou  (iis(pie,  l'inféricuie  ou  cuNcIte  et  la  (pieue. 

Le  corps,  circvdairc,  se  rapproche  de  la  forme  des  lain- 


'n  ei  r> 


pes  d'éjMxpie  anléiieure  et  s'éloigne  de  celles  de  transition, 
(pii  tendent  \ers  l'ellipse.  Le  diamètre  en  est,  en  général, 
voisin  de  8  centimètres  et  la  hauteur  de  3  centimètres.  En 


I    V.   C.  I.   /...  VI.    i.v.ô.V 

■j  In   C.ovsnbiln   (Uylnii  et  Pvobhii. 


88        LES  l'ARRlQl  KS  DE  LAMPES  DANS  l'aA'CIEINNE  AFRIQUE 

revanche,  le  fond,  lisse  ou  simplement  entouré  d'un  cercle 
en  creux  dans  les  lampes  de  l'épocpie  précédente,  l'est  ici 
par  lui  bourrelet  saillant,  bordé  de  deux  rainures  entourant 
l'estampille.  Le  b(c,  plus  petit  qu'antérieurement,  est 
séparé  du  corps  par  deux  lignes  convexes  circonscrivant 
deux  lobes  et  lui  donnant  vaguement  l'aspect  d'un  cœur  ; 
dans  les  périodes  antérieures,  ces  lignes  se  terminent 
extérieurement  par  deux  volutes.  Dans  le  petit  méplat 
(|ui  les  sépare  de  la  cuvette  apparaît  un  tout  petit  trou 
(|ui  paraît  bien  être  un  lion  d'aérat'.on  ',  prototype  de 
celui  (fui,  dans  les  lampe;  postérieures,  s'agiandira  et 
se  juxtaposera  au  trou  unifjue  d'alimentation  des  lampes 
de  la  première  période.  La  queue,  forée  dans  les  lurai- 
naiies  plus  anciens,  est,  cette  fois,  pleine  et  la  crête  en  est 
ornée  de  deux  sillons  parallèles  ;  à  sa  partie  inféiieure,  un 
rcnllement  ou  talon  levét  la  silhouette  de  la  proue  d'un 
cuirassé.  Sous  le  bec,  à  sa  base,  une  ligne  d'oves  encadrée 
de  deux  lignes  en  forme  de  cable  lui  forme  comme  un 
collier. 

La  giande  majorité  de  ces  lampes  a  la  cuvette  entourée 
de  faisceaux  de  lauriers  grossièrement  stylisés  ;  la  tige,  les 
feuilles  et  les  liens,  bien  spécialisés  antérieurement,  sont 
réduits  ici  à  une  tridigilation  coiqjée  de  tiois  traits  Irans- 
veisaux:  à  sa  base,  les  baies  n'étant  presque  plus  visibles. 
Le  sujet  qui  orne  la  cuvette  est  variable,  mais  le  choix  en 
trahi!  che/  le  potier  une  piédilection  marquée  pour  les 
animaux,  et  même  certains  animaux  '. 

Les  sujets  les  plus  fréquents  sont:  cerf,  bubale  debout, 
couché  ou  galopant,  nombreux  chiens,  coq,  panthère, 
dauphin,  chèvre,  antilope,  sanglier.  D'autres  sont  fran- 
chement païens  :  croissant  sur  le  disque,'  génie  funéraire 


I  V.  I)i;  CAnuAin.Ac.  Ihill.  Sac.  Ccoi)r.  Oivii ,  i8(_)0.  Hisl.  de  la  lampe  antique 
en  \fri(iiir,  ii"  -^çid.  Apres  avuir  l'iiil  «iiichiiics  expcTiciices  ;i  le  sujet,  je  crois 
ipic  ce  nt'sl  ](Ms  il  [irojH-ement  parler  mi  trou  il'Hération  qiifi  n'avait  pas  sa 
raisuii  il/trc,  le  li-oii  (l':ilimenlaliion  devant  permettre  largement  à  l'air  d'arriver 
ihiiis  le  lécipieiit  à  iiiosiiie  que  l'huile  eu  était  consommée.  Ce  petit  trou  me 
|i;Hiu'l  plulc'il  .ivciir  ('11''  il<'sliin('  :ui  dé^ageuu'ut  des  bulles  d'nir  qui,  s'écluq)- 
paut  lie  riiuile  surchaiilït'c,  se  seraient  sans  cela  accumulées  à  la.  partlie  la  plus 
élevée  de  la  cuvette  intérieure  et.  en  s'écliappant  brusquement,  troubler  la 
régularité   de   la   comliuï-lidii. 

;',  C'est  évidemment  une  buupe  de  cette  catégorie  que  Gauckler  a  signalée 
(  Irc/u'c.  (tes  Miss.,  t.  \v,  |).  ?<cn)).  Mais  il  ne  peut  s'agir,  comme  il  le  prétend, 
d'un  vaisseau  chrétien,  ni  même  de  l'époque  de  transition.  Cet  auteur  avait, 
du  reste,  très  bien  remarque  le  caractère  particulier  de  ce  groupe  de  lampes, 
qu'il  consiidcrait  déjà  comme  de  fabrication  africaine. 


F, ES  i'\i?uioi  i;s  1)1-:  i.\mi'i;s  dws  i.'ANciii.NM-;  aiukm  i:      î^iJ 

a|)[)U\(''  sur  un  llauilx'aii,  husic  de  Mcrcuic  avec  le  caducée, 
Diane  chasseresse,  (îcleslis,  lùnope  sui'  le  lauicau,  faune 
leiiani  un  lliyise  cl  jouant  de  la  llùle  de  l'an,  scène  lubii- 
(|ue,  iVniiue  assise,  les  seins  nus,  ayant  à  droite  et  ù  gauche 
deux  personnages  agenouillés  et  élevant  les  mains  vers 
elle.  Beaucoup  de  ces  sujets  ont  été  finis  à  i'ébauchoir.  On 
rcniaïquera  (jue  les  premiers  d'entre  eux  peuvent  être  soit 
chrétiens,  soit  païens. 

.le  possède  dans  ma  collection  trois  lampes  (|ui  sortent 
(lu  même  moule'.  Ivlles  ne  p()rtcn[  pas  le  même  sujet-', 
mais  ont  une  mar(jue  curieuse,  signalée  par  (iauckler'\  et 
sur  la(|uel!e  j'ai  moi-même  appelé  l'allention  '.  (lomnie  je 
l'ai  signalé,  c'esl  dans  le  centre  de  la  'Junisie  qu'on  a  tiouvé 
le  plus  de  lampes  de  ce  lypc.  Aussi  est-ce  dans  le  Musée;  de 
Sousse  (ju'il  y  t<n  a  le  phis,  et  là  que  je  les  ai  étudiées. 

La  plupart  d'entre  elles  correspondent  à  la  description 
donnée  plus  haut.  (]hez  quehjues-unes  la  leire  est  rose.  Il 
\  en  a  aussi  qui,  au  lieu  d'être  de  dimensions  moyennes, 
sont  de  grand  module.  Elles  ont  souvent  alors  une  couverte 
biune.  Line  variante  assez  fréquente  c'est,  au  lieu  du  fais- 
ceau de  lauriers,  un  encadrement  formé  par  une  série  de 
canaux  ou  de  fers  à  cheval. 

Ces  lampes,  d'un  type  si  uniforme,  ne  portent  pas  tou- 
jours de  marques.  Quand  elles  en  ont,  c'est  le  plus  souvent 
celle  dont  il  vient  d'être  parlé.  J'en  donne  plus  loin  la  des- 
cription. Voici  d'abord  les  autres  estampilles  : 

Encadrement  de  lauriers  pas  aussi  stylisé  que  sur  les 
autres  luminaires,  buste  de  Mercure  R/  :  PONT. 

Encadrement  de  lauriers  stylisé,  coq  ;  au  revers,  trois 
espèces  de  cyprès  ou  de  palmiers.  Une  autre  lampe,  oITranI 
aussi  un  coq,  n'a  que  deux  cyprès  (v.  fig.  /i  et  5). 

Génie  funéraire  portant  un  flambeau  R/.  Lignes  formant 
une  croix  dans  un  cercle  et  chargées  elles-mêmes  de  petits 
cer'cles. 

Faune  tenant  le  thyrse,  etc.  :  EX  OFJ//CINA//P\PITO// 
NIS. 


I  Elles  offiviit  ct(  i  (le  iinrlicnlicr  (lu'ollos  présentaient  une  grande  quantité 
(le  petit.s  trous,  défntils  ([ni  ont  été  boncliés,  avant  la  cuisson,  à  l'aide  de  bou- 
lettes d'arg-,ilo. 

:'  Deux  oui  lo  l)iili:ili-,  le  Iroisiînjc  un  l.usic.  On  sait  que  le  sujet  de  la 
cuvette  pouvait  être  obtenu  à  l'aide  d'iui  petit  moule  spécial,  différent  de  celui 
qui  a  servi  à  obtenir  le  reste  de  la  lampe. 

3  L«c.   cit. 

4  Carton.  Bull.  Soc.  Archéol.  Sousse,  1910,  p.  26. 


90        LES  FAHUIQI  ES  DE  LAMPES  UA^S  I,'am;1E>NE  AIRIQIE 

Tête  de  Méduse  11/  :  sii2:ne  eJi  l'orme  de  hache  à  deux  tran- 
chants. (D'apiès  une  lauipe  de  ma  collection.) 

Une  marque  se  ien(M)ntre  assez  fréquemment  en  dehors 
de  la  principale  dont  il  va  être  question  :  SABBA//T]  ou 
SÂBBA//T1CIS.  Je  l'ai  relevée  sur  deux  lampes  portant 
l'une  une  panthère,  l'autre  un  vaisseau  avec  proue  à  tête 
de  cygne  '. 

Voici  enlin  les  fac-similé  de  la  manpie  de  beaucoup  la 
plus  répandue  sur  ces  lampes. 


FIl;.  (i  à    II.    RsTVMiMi.LLs  prii   iami'Es  afuicaines  mi   Sahel 


I    Vne  Hiilri-  liiiiipi',  [nulniil   cvacleiMciil   le  niùnie  sujet,  et   traitée  de  même 
façuii  [joite  la  marque  Q.  NLMIGEL. 


l.Ks  rsMiiioi  |.;s  i)K  i,\\i|.i>  i,\x..  i.an,;,enne  ai  hioi  e      !U 

•If  li'is-^''  ;i  (le  |.lns  (•..;ii|,.'.|.'nls  \v  s.»iji  ,|,.  ivcIumcIr.,  rr 
que  soin  ccvs  .•iii;.(|,.,vs  .'•iiiu.„uli,,ues.  Sagit-il  de  lettres 
iK'()-puni(|uos  on  h.tiiu-s  c.irsives  i'  M.  Eiisèbe  Vassel  n.. 
pense  pas  (piil  sa^^iss..  di-  caraetères  n6o-puiii(pios  il  ^,. 
demande  si  ee  nesl  p,.inl  h,  ivpiés..nlali..n  baiba...  d<.  nl„- 
sienrs  objets  de  niélicr. 

Les  textes  néo-puin<p„.s  se  lisant  de  droite  à  gauche    je 
me  SUIS  demandé  •  si  ee  ne  serait  pas  1.  nom  dv  Sahhaliciis 
des  cms.ves,  ée.il  m  ee  sens,  les  deux  caractères  en  forme 
d  W  retournes  correspondant  à  la  lioaturc  des  lettres  a  h  et 
''  a  de  ce  mot. 

l^a  seule  concb.sion  IVrmc  à  laqu,.]],  „n  puisse,  à  mon 
.IMS  s  arrêter  m  ce  rpn  concerne  ce  groupe  de  pote^ries, 
c  est  (pie  celles-e.  soi.t  les  produits  de  l'atelier  ou  de.rateliers 
d  un  seul  potier  ayant  des  contremaiires  différents  dont  les 
"on.s  sont  sur  le  fond  des  petits  vaisseaux,  ou  plutôt 
quelles  eonstituent  un  type  qui,  adopté  à  un  moment 
donne  dans  le  8ahel,  essaima  jus(,ue  dans  la  région  de 
>beitla  ou  son  module  s'agrandil. 

Je  rappelle,  à  ce  propos,  (pi'il  parait  v  avoir  eu,  dans  les 
régions  de  Kasserine,  Sbeïtla,  Feriana  et  Thala  d'impor- 
tants ateliers  ayant  fourni  en  abondance  de  grandes  pote- 
ries d  excellente  facture,  d'un  rouge  vif,  en  forme  de  vases 
a  verser  avec  col  et  anses  élancées  ou  de  grands  plats  On 
en  a  découvert  à  certain  moment  une  si  grande  quantité 
que,  m  a-t-on  dit,  les  Arabes  en  vendaient  sur  les  marchés 
comme  vaisselle  d'un  usage  courant,  ce  que  je  croirais 
volontiers,  ayant  vu  moi-même,  chez  des  Français  am- 
ont habite  le  pays  et  n'étaient  pas  collectionneurs,  des  piles  ' 
de  ces  plats,  de  ces  assiettes  et  des  rangées  de  ces  vases 

1  our  en  revenir  aux  lampes,  celles  dont  il  vient  d'être 
question  paraissent  former  une  transition  entre  les  païen- 
nes et  les  chrétiennes  ;  aussi  bien  par  leur  forme  que  par  la 
prédominance  de  certains  sujets. 


y.  ~  Lampes  de  Fabrication  Indiirèno 

Beaucoup  de  petits  luminaires  africains  se  distinguent 
Lictme,  la  quai, te  de  leur  pâle,  leur  épaisseur,  leur  degré 

I   L'oxe.nple  .lu  non.  d.  ,a  ville  .le  Cahuna  (Guelma)  est  bien  connu. 


92 


LES  FABRIOI  ES  DE  LAMPES  DANS  L  ANCIENNE  AFllKM  E 


de  cuisson,  (jiie  pui;  les  sujets  (|u'ils  piésenteiit.  Je  renvoie 
les  personnes  (]ui  voudraienl  se  l'aiie  une  idée  de  lu  lampe 
indigène  à  l'élude  détaillée  (jue  jai  faite  de  celles  de  Thii- 
hiirnlca  '  dont  les  l'I.  Il  et  III  donnent  une  idée. 

Elle  est  reniarcjuable  ])ai-  une  certaine  lourdeur  de  poids 
et.  de  forme,  l'imperfoiation  de  la  (jueiie,  la  présence,  sur 
son  fond,  de  ce  boudin  en  forme  de  paiera  qui  sera  coils- 
lant  sur  les  lampes  chrétiennes,  une  décoration  à  la  fois 
naïve  et  originale,  non  dépomvue  de  quelque  élégance, 
caractères  qui  la  différencient  complètement  de  la  lampe 
romaine.  Comme  je  lai  indiqué,  une  grande  partie  de 
ceux-ci  ne  sont  pas  seulement  dus  à  l'inhabileté  des  arti- 
sans ;  ils  constituent  les  premiers  balbutiements  de  cet  art 
africain  que  l'extension  de  la  civilisation  romaine  a  étouffé 
à  ses  débuts. 

Je  n'ai  pas  retrouvé  les  ateliers  d'oîi  sont  sorties  les  lam- 
pes de  la  Coloiiia  Tluiixiriiica,  mais  leur  caractère  ti'ès  loca- 
lisé indifiue  (juils  existaient  sûrement  -\  On  rencontre  du 
reste  un  peu  partout,  dans  le  pays,  d'excellente  terre  à  potier 
dont  se  servent  les  femmes  aiabes.  Je  crois  avoir  démontré 
que  ces  petites  fabriques  ont  foiictionné  pendant  plusieurs 
siècles,  leuis  produits  portant  le  rellet  atténué  des  modifica- 
tions de  formes  subies  par  les  lampes  romaines  proprement 
dites  qu'on  vendait  dans  les  villes  du  voisinage. 

Je  n'ai  noté  qu'une  seule  marque  offrant  le  nom  de 
Victo)%  en  gralïlte.  Il  semble  en  effet  que  les  potiers  indi- 
gènes, qui  du  reste  signaient  rarement,  ne  se  servaient  pas 
de  cachets,  comme  cela  se  faisait  généralement  pour  les 
lampes  romaines,  mais  gravaient  l(>ur  nom  avant  la  cuis- 
son, à  l'aide  d'une  pointe. 

A  Bulla  Regia,  situé  à  une  (piarantaine  de  kilomètres  de 
la  Colonia  Thuhiintica,  les  nécropoles  ont  offert  des  lampes 
païennes  typiques  avec  les  estampilles  courantes  dans  le 
leste  de  l'Afrique.  Fait  curieux,  ces  lampes  qui,  ailleurs, 
ont  la  queue  forée,  présenlent  ici  une  queue  pleine.  Doit- 
on  en  conclure  qu'elles  ont  été  fabriquées  sur  place  par  des 


I  V.  D'  Cahton.  Mcm.  Snc.  Nnl.  dcx  Aniii].  rie  France,  igiS,  p.  i/|i.  IJArt 
iiulifirite  xur  les  lampes  de  la  a  Colania  Thulnirnica  »  et.  Bev.  Tunis.,  ii,)i5,  p.  97. 
Les   lampes  d'art   indigène    irouvées   à    TJniburnic   et   à   C/iem/on. 

a  On  vient  d'en  trouver  une  ceriniiic  ipinniilé  à  nne  (piinzaine  de  kilti- 
mètfes  il  l'ouest  de  Thnbiu'nir,  tout  à  fait  semblables,  en  général,  à  celles 
que  j'ai  décrites.  M.  l'alibc  Laverdure  a  bien  voulu  m'en  communiiquer  les 
exemplaires. 


I.KS  I  MUilOt  KS  l)K  I.VMI.KS  |,VN>  ,  'an.iknnk    \i  hk.i  i:        !I;{ 


94 


.ES  FAHRK)L  ES  1)K   LAMPES  DANS  I.   ANCIENNE    AFRIOC'E 


î.Es  1  \nnioi  Ks  UK  i,\mim:s  I)A^s  i.'wciknm.;  m  moi  k      Or> 

siicciii'salcs  (les  •<ir;iii(ls  Jilclicis,  (|iir  (ciix-ci  iiii|)<ir  hiiciil 
(J'iiillciiis  (les  limiiiiiiircs  fii^oiiiirs  un  '^oùi  des  «rcri-  du 
piiNs,   DU  (|iril   s'iio-il   siinplciiicrtl   de  conl icfaroiis    ? 

\  Siiiillii,  siliK-  cnlrc  les  dcii\  aidi"s  cilrs,  les  lampes 
soid.  par  Iciiis  (•aracl('T<-s,  inlcrmrdiaiics  à  ccllr-.  des  villes 
voisines. 


l-ii  lésmiié.  celle  ('Inde  de  jji  (ahrieal  ion  (le<  lampes  dans 
ime  léirion  lendraii  à  mordrei'  (pià  eolé  de  celles  de  type 
romain,  (jiii  élaieid  imporlées  de  i^rands  ateliers  romains 
ou  africains,  il  \  .«n  a\ail  (pii  élaienl  fahiicpiéos  siu-  place. 
On  devait  en  elTel  favonner  prestpie  [)ailout  ces  pelils 
objels.  Dans  la  région  dont  il  vient  d'elic  (pieslion  j'ai 
soiivejd  rencontré  les  restes  de  fours,  noianimeni  an  snd 
de  Thiiburnic,  sui-  les  bords  de  roue(J  p:nja,  sni-  ceux  de 
l'oned  El  Hammam,  et  non  loin  de  Souk-el-Arba,  à  l'IIen- 
chir  Merzoug-  '. 

■l'iii  déjà  parlé  ()récédennnenf  des  fours  à  polie,-  de  |'[Ien- 
chn-Jîab-Klialled,  .pie  j,.  n'ai,  à  mon  çrand  recrret,  p,,s  eu 
le  temps  d'exf)lorer -.  Ils  sont  situés  an  centre  de  la  petite 
vdie.  .I'n    ai  surtout   recueilli  anlonr  d'eux  des  fragnieîd'* 
de  carreaux  à   reliefs  et   des  débris   de  lampes.    Dans   I,«s 
thermes  antiques  et  dans  un  petit  sanctuaire  de  Mrrrurins 
Silvaniis  i'iù  trouvé  un  certain  nombre  d'autres  luminaires. 
Tous  offrent  les  caractères  de  la  fabrication  locale   :  terre 
d  un  jaune  ou  d'un  rose  pale,  épaisse,  assez  fortement  cm-te. 
J»'''-  '"I  '|'i.>ne  courts  et  l.xnds,  la  seconde  imperforée,  dis- 
que sui)érieur  pres((ue  plat,  avec  deux  trous  égaux.   Sou- 
vent,   sur    un    diamètre    transversal,    l'ornementation    est 
redude  à  un  encadrement  de  oiobules.  satis  sujcM  ceidral 
OfxMidant  un  motif  m'a  frappé,  car  il  existe  assez  souvent 
sur  l(>s  lampes  cbrétiennes.  C'est  une  feuille  «  morte  m  doid 
les  nervures  forment  un  fin  réseau  très  saillant,  encadrév 
de    palmes    ou    de    lauiiers    très    sommairement    exécutés 
avant  la  cuisson.  Ces  poteries  paraissent,  comme  celles  de 
Tbuburmc.  être  contemporaines  des  lampes  romaines  des 
pi-emière.  deuxième  périodes  et  période  de  transition 


.  V.  Dr  L.  Carton-.  Bull.  irchéoL  du  Comité,  ,80 1.  Es.ai  ,1c  lnf,..„ra,,hic 
,inheolr,,i,q„e  sur  la  région  dr  Snuk  el  Arha.  p.  o'iS. 

•  N.  D'  L.  CAnTuN.  issor.  Franc,  p.  l'avanr.  des  Sciences.  C.nngrè'<  de  Clrr- 
monl-Ferranl,   1908.   Fouilles  exécutées  en   Tunisie  en   1907. 


06       LES  FABRIQUES  DE  LAMPES  DANS  l'aNCIENNE  AFRIQUE 


M.  —  Lampes  Césariennes 


Ce  sont  de  petits  vaisseaux  en  une  pâte  assez  grossière, 
de  forme  lourde,  à  queue  non  forée  et  percées  sur  la  cuvette 
d'un  ou  deux  trous.  Le  fond  est  orné  de  deux  cercles  con- 
centriques. Ce  qui  donne  à  la  plupart  d'entre  elles  un  carac- 
tère tout  particulier^  c'e^st  la  présence  d'une  inscription 
disposée  en  cercle  autour  de  la  cuvette. 

La  formule  qu'on  lit  le  plus 
souvenl  est  la  suivante  •  :  eiiillc 
incernas  roJalas  (il>  assc.  C'est, 
on  le  voit,  une  invitation  à 
acheter  le  petit  vaisseau  au  prix 
indiqué  d'un  as. 

11  y  a  des  variantes  :  ab  assené 
liicernas  vénales  {{[g.  i:i),  (pi'on 
peut  lire  :  soit  al>  asse  etne..., 
soit  nh  Assené,  le  dernier  mot 
étant  le  nom  du  marchand.  Une 
autre  inscription,  assez  fré- 
(picnte,  montre  qu'il  faut  s'arrê- 
ter à  ce  dernier  sens  :  Lucernas 
^'^'-  ''■'  colatas  de  of(f)i(ci)na  Asseni. 

Une  série  dont  les  ii-ttres  entouient  une  coquille  marine  • 
donne  un  détail  intéressant  :  Endte  lucernas  coUatas  icônes, 
montrant  que  le  marchand  vendait  des  statuettes  en  même 
temps  que  des  lampes,  comme  dans  l'atelier  de  Carthage 
dont  il  a  été  question  au  début  de  ce  travail.  Ce  renseigne- 
uKMil,  lapproché  de  celui  (pii  donne  ie  prix  de  l'objet, 
montie  que  c'était  fort  probablement  le  potier  lui-mêuK^ 
(pii  vendait  ses  produits,  car  il  est  difficile  d'admettre  qu'il 
ait  imposé  un  prix  de  vente  à  un  intermédiaire. 

Un  de  ces  récipients,  de  grand  module,  trouvé  à  Cher- 
ehell,  porte,  autour  d'une  grande  coquille  marine,  des 
ornements  circulaires,  décoration  rare  sur  les  lampes 
païennes,  fréquente  sur  les  lampes  de  transition  et  chré- 
tiennes et,  sur  le  fond,  le  monogramme  constantinien 
ent(Hiré  d'une  double  auréole  —  description  qui  doit  se 
rapporter  aux  deux  cercles  concentriques  qui  se  voient  sur 
les  lampes  de  même  épcxjue  ^  à  l'intérieui'  de  la(|u<^ll('  on 


I    V.  '.'.  /.   /..,  t.  vni,  a^-fi/i"?.  Il"  /|. 

:,    V.    null.     \rrhénl.   tlu   CninUé,    i8f)3.   p.    jc<?,. 


I.KS  I    \hUI()l   KS  UE  l.\MIM>   l»\NS  r.    WCIKNNK    \l   HKM   1. 


97 


lit  :  />'///<■  hoitof  ni  )  tu (  le )l(iri(  uin  } ,  acliclc/  une  Ij(»iiih' 
piôraulictii  U'oiitrc  les  IimiMiics  ou  ICspril  tiiiiliii  ou  conti'C 
tous  les  (loiix  '). 

Un  objet  (léciil  paf  |)ciuii(';^lil  •  i|ui  (lorlail  le  luono- 
j?raniui('  avec  l'inscription  :  <iiil  fccerU  vivat  et  emerit, 
cl  dont  il  donne  le  dessin,  paraît  être  un  moule  l'fipf.  i.Hi,  il 


Fis.  i3 


provient  d'Arbal.  C'est  ])eut-ètre  de  ce  côté  qu'était  la  fabri- 
que, quoique  ce  petit  objet  fut  facilement  Iransportable. 
l.e  nom  de  caesa  rie  unes,  (pion  donne  à  ces  lampes  vient  de 
l'appellation  anticpie  de  Cheichell  (Caesan'a) .  On  a  trouvé 
dans  cette  localité,  auprès  de  l'iiippodronie  -^  une  lampe  à 
anse  non  foiée  dont  le  disfpie  supérieur  est  orné  de  cercles 
concentriques,  et  (\u'\  porte  sur  le  fond  une  inscription  en 
cercle  :  Vita  Donaio  coroinngisivo  V  Coroiitaçjister  signifie- 
rait d'après  Rossi  -^  le  chef  des  coroplastes,  c'est-à-dire  le 
potier  du  peuple. 

Deux  autres  lampes  du  même  type,  découvertes  l'une  à 


I   V.   Bull.  ArchcoL,  Inc.   cit.,  p.    la'i. 

a  V.  Bull.  Snc.  Génçir.  et  Archéol.  Oran,  i8o5,  p.  aaa. 

3  V.  Bull.  Archéol.  du  Comilé,  i8oô,  p.   i.^o. 

'i  V.  C.  I.  L..  I.  VIII,  9.2.643,  n°  5. 

:")   Bull.    hisl.    Arrh.    i885,  p.   55. 


98        LKS  l-AHHKH  KS  l)K   LAMPES  DANS  1     ANCIENNE  AFRIQIE 

CheiclioU,  l'aulre  en  Espagne,  portent  le  même  nom  de 
potier  :  Lucernas  coUatas  de  of(fi)cina  Donati. 

M.  Gsell,  (}ui  a  trouvé  dans  la  basilirpie  de  Tipasa  i  une 
cinquantaine  de  ces  lampes  en  signale  seize  ayant  l'une 
des  inscriptions  ci-dessus.  Les  autres  portent  diverses  déco- 
rations :  encadrement  de  postes  en  relief,  rien  au  centre  ; 
encadrement  de  palmes,  une  petite  palme  semblant  faire  le 
tour  du  bec  ^  ;  encadrement  de  branches  d'olivier,  de  lau- 
riers, ou  de  petits  cercles  ombiliqués  ;  pas  d'encadrement, 
mais  disque  couvert  de  stries  rayonnantes  imitant  une 
co([uille  ;  d'autres  exemplaires  n'ont  aucune  ornementa- 
tion ;  une  lampe  à  deux  becs  en  terre  jaune,  avec  trois 
petits  trous  au  centre,  offre  une  tête  de  femme  sur  l'anse. 

M.  Gsell  dit  que  d'autres  lampes  du  même  type  portaient 
des  symboles  chrétiens  :  dauphin,  calice,  monogramme. 
Elles  dateraient  du  iv^  siècle  •^.  On  en  a  trouvé  avec  elles, 
dans  l'église,  d'autres  en  terre  rouge  de  la  forme  si  répan- 
due à  Cartilage,  et  ([ui  dateraient  du  \f  siècle.  Les  lampes 
césariennes  doivent  donc  être  placées  au  début  de  l'époque 
chrétienne.  L'étude  de  leur  répartition,  d'après  le  Corpus, 
est  instructive'"  :  Cherchell  17,  Tipasa  i4,  Frika  4,  Sidi- 
Ferruch  (près  Alger),  Tiklat  (près  Bougie),  Bosquet  (près 
Mostaganem),  (jouraïa,  Berja  (Espagne),  Ilici  (Espagne). 
On  doit  ajouter  à  cette  liste  la  moitié  supérieuredunelampe 
de  ma  collection,  trouvée  à  Carthage  et  qui  porte  l'inscrip- 
tion :  ab  Assote  '\ 

Cette  répartition  fait  {)eiiser,  ou  (pi'il  y  eut  plusieurs  ate- 
liers le  long  de  la  côte,  à  l'Est  et  à  l'Ouest  de  Cherchell,  ou, 
avec  M.  Gsell,  (pie  la  fabrique  était  dans  cette  dernière  loca- 
lité. Il  est  possible  (pie  le  nom  du  fabricant  ou  d'un  des 
fabricants  ait  été  Donatus. 

VU.  —  Lampes  d'iteneliir  Srira 

En  iQof),  un  colon  de  la  région  située  entre  Sousse  et 
Sbeïtla,  M.  Deniau,  m'apporta  un  panier  plein  de  lampes 


1  Recherches  archéologiques  en  Algérie,  p.  6i. 

2  Mol  if  fréquent  à  Henchir  Srira,  au  Djebel  Oust,  etc. 
'à  V.  Ibitl.  Bull.  Archéol.  du  Comité,   jqoi,  p.  clxi. 

/i  Je  n'y  ajoute  point  les  ilécouvertes  postérieures  à  la  publication  de  ce 
volume  qui  n'apprendraient  rien. 

5  On  a  trouvé  quidques  lampes  du  même  genre  que  celles  de  Cherchell, 
mais  avec  une  formule  différente,  à  Rome  et  en  Etrurie  (C.  I.  L.,  xv,  ô.vfis  et 
X,  16.60O)  n°  /)•  Le  R.  P.  Delattre  vient  de  m'apprendre  qu'il  possède  quelques 
fragments  d(>  lampes  do  ce  type,  trouves  aussi  à   Carthage. 


"KSI    VMMIU,   KS„K,    VXM.K.   „VN>,VN,,KNN,:    M,,,..,,: 


99 


Ul-        uW...  .,M    a^.,,  Innavs  d.Ms  .a  ,>n,,Hi,^,,V  11  pa,ai,. 

sa      l>u...aprd  un  alH.n,  K  J.  signalais  d..  suite  cette 
Wc.uvc.rle    a    la    Socm'.!,'-    Nali..uHl..    ch.    Auli.ju.in.s    de 

'■'■":"'•■  '■  ^'-  '^•""'"-""•"-.  -n  u.on.•<>u...il.sa<|^n,u- 
ve^teauN>nicvdos  Auli.,nil.^..  ,,n,  li.  .xplon.,  !..  ,|.VÙI 
par  iM.  Ilaul(>i'œur. 

I^es  ruin,.s  d,.  Ill..,nh„  S.i.a  .mlrnnrul  drux  u.onl,- 
cule.  ■  doni  un.  n.rsu.anl  Tk,  ,uèl,rs  sur  60  de  dian.èln-, 
elait  fonue  dr  lan.pes  de  rebut  olï,anl  des  défa.ds  l.ès 
^"^^-.  hM.I..(  ,.||,.s  étaieni  collées  deux  à  deux,  lanlot  le 
s..|c|l  r  a„  u.al  venu,  ou  bien  le  vaisseau  cabossé,  écn,  né  ou 
b.iile.  (.es  objels  n  avaient  pas  élé  jetés  aux  abords  des  ale- 
»'';>S  (|.u  elau-nl  dans  la  ville,  mais  dans  un  de  ces- dépots 
d  nnmondicc^,  si  fréquents  auprès  des  iestes  des  villes 
d  Ainque  et  dont  j  ai  étudié  c|uelques-uns  -\  On  a  trouvé  à 
oote  de  ces  lampes,  beaucoup  de  moules  en  plàl.v  plutôt 

.  Is  du  cote  exter.eur  et  découpés  en  silhouettant  le  profil 
hoM/onlaLde  I  objet.  Ln  fin  revêtement  de  plâtre  à  l'inté- 
iKMir  servait  a  rehausser  l'ornementation 

Quand  ces  v^tisseaux  sont  bien  venus,  ils  sont  en  terre 
ou.e  et,  quand  ds  on,  été  brûlés,  .ris  ou  noirs.  I.es   w^ 
e     sont  épaisses,  ce  qui  les  alourdit.  La  cuvette  n'  n  e 
pl   s  ronde,   connne  dans  les  lampes  païennes,   ou  dan 
celles  de  la  région  du  Sahel  dont  j'ai  parlé  plus  haut    e 
ces    cet  allongement  c,ui  doit  les  faire  considérer         Je 
posteneures  à  celles-ci.  Le  bec  se  soude  par  une  ba  e  élar"  e 
a  la  cuvette,  à  laquelle  son  orifice  est  relié  par  une  tu 
•e..,  dispc>s;tion  qui,  lorsque  l'huile  sortait  ,L  ce  l^^, 
n  la  MU  te  dun  heurt  ou  d'une  inclinaison  trop  forte    1- 
'•'menait  à  l'intérieur  du  récipient 

Voilà  un  caractère  qui  apparaît  pour  la  première  fois  sur 

clmt  ei^'l  r     ^"'    "'   '?   s'accentuant  sur  les  récipients 
cil     t  ens.  La  queue  n'a  plus  les  deux  rainures  des  lamnrs 

:':  ::neM  M  7t'  ^^-v^*  ^^^^^  ^—  ^--  ^  !-p 

païennes!  ,3  fois)  et  tantôt  pleine  h--  fois)  comme  dans  les 
^mp^  chrétiennes.  Le  talon  prend  nettement  la  siC^^ 

"•  Hement  différences  précédemment  sont  devenus  d'égale 

r  V.  Cv„,o..  Bail.  Soc.  ^a,ion.  A,,,,  ,,.  f,,„,,,  ,,^,  ^^^ 

2   \.   llAiTEcœrR.    Mé]    rly   ;-F,vi;„  ^     d  •'        1     ■-'^- 

Srira,  p.  383.  "''•    "^""-   ^''  ''"'"''■'  ''''   "'•"'■''<> 

^   V.  Dr  L.  Carton.  /?„//.  ^,,  /„  Vor     i,rl,J  i     i     c 

/a<<-/„  de  Sou.se.  ■""'•"''  "^'^-  ^'^  ^'""''  Tes- 


100 


LES  I  AHKIQIES  DE   I  A.Ml'ES  DANS  L  ANCIENNE  AFUIQl  K 


grandeur  et  placés  tantôt  sur  l'axe  transversal,  tantôt  sur 
l'axe  longitudinal.  L(^  bourrelet  qui  entoure  le  fond  se 
poursuit  jusqu'à  la  saillie  de  la  queue  pour  former  la 
paiera. 

Cette  forme  date  probablement  de  la  fin  du  iv"  ou  du 
début  du  v^  siècle.  L'ornementation  corrobore  cette  déter- 
mination. L'encadrement,  interrompu  par  la  gouttière, 
forme  deux  branches  qui  se  rattachent  à  la  queue.  Le  motif 
en  dérive  évidemment  des  lampes  antérieures,  mais  com- 
bien altéré.  La  feuille  de  laurier  a  fait  place  à  une  simple 
palmelte,  les  pampres  à  une  série  de  postes  ;  très  souvent 
on  s'est  borné  à  tracer  une  suite  de  liaits  obliques  par  rap- 
port aux  rayons  de  la  lampe,  et  parallèles  entre  eux. 

Cette  décoration  a  parfois  été  obtenue  par  moulage  ;  le 
plus  souvent,  elle  a  été  faite  après  en  creux,  à  l'ébauchoir. 
C'est  l'effet  d'une  régression  vers  les  procédés  primitifs, 
comme  l'on  voit  sur  les  lampes  de  Thuburnic  et  du  Djebel 
Oust.  Les  sujets  sont  en  majeure  partie  païens  '  ;  les  uns 
sont  religieux,  ils  représentent  Serapis  ou  Pluton  coiffé  du 
mndiiis,  llélios  radié,  Proserpine,  Diane  tirant  l'arc.  Mars, 
Léda  et  le  cygne,  Bacchus,  une  prêtresse  debout  tenant  une 
palère,  un  personnage  appuyé  sur  un  Hermès.  D'autres, 
non  religieux,  sont  fréquents  sur  les  autres  lampes  païen- 
nes :  moissonneur,  cratère.  D'autres  rappellent  ces  motifs 
de  style  alexandrin  qui,  dès  le  i"  siècle,  dominent  en  Afri- 
que dans  les  sépultures,  les  mosaïques,  la  céramique,  les 
lampes  surtout,  et  dans  lesquels  figurent  des  amours,  assis, 
tenant  un  vase,  assis  près  d'un  panier  de  fruits,  tenant  une 
couronne,  etc.  On  a  relevé  encore  des  sujets  communs  aux 
lampes  païennes  et  chrétiennes  :  bélier,  bœuf,  cerf,  che- 
val, chien,  co(|,  lévrier,  lièvre,  sanglier,  lion,  cartouche 
vide  à  bords  dentelés,  rosace  à  sept  ou  huit  pétales. 

Si  on  laisse  de  côté  les  motifs  sûrement  indifférents  ou 
qui,  étant  à  la  fois  païens  et  chrétiens,  ne  peuvent  pas  don- 
ner d'indications,  il  reste  des  sujets  païens  indiscutables 
auxquels  on  ne  peut  en  opposer  un  seul  qui  soit  sûrement 
chrétien.  Il  est  possible  que  les  lampes  étaient  destinées  à 
une  clientèle  appartenant  aux  deux  religions,  les  adeptes 
de  la  seconde  ne  tenant  pas  encore  sans  doute  à  afficher 
leurs  croyancc^s  [lar  l'achat  d'emblèmes  trop  précis.  En 
tous  cas,  si  on  peut  donner  à  ces  poteries  le  nom  de  lampes 


I  V.  HArxEcoEun.  Miixée  Alanui,  Supplément,  p.  a8o.  Carton.  Bull.  Soc. 
Naf.  lira  Anliij.  rie  France,  1906,  p.  laa.  RENtiui.T.  m'  Cahier  rrArchéol.  Tunis., 
p.   j->.'i.  Nicolas.  Revue  Tunisienne,  1007. 


LES  !•  Aiiuioi  i:s  Di:  i,\Mi'i:s  hws  l,'^^(ME^^E  ai  rviQiE    l'Ji 

(le  Iraiisilioii,  rien  iriiuioiisc  h  leur  donriei-  (•('lui  de 
tlucli(;nnes. 

(loiiirnc  l'a  n'iiiiii(|ii(''  M.  Ilaiilccœui',  les  iiiuiijiics  ne 
(loimciil  jamais  le  iHim,  elle-  vont  rôdilitcs  à  une  initiale  : 
M,  N,  \.  Y,  ou  à  lin  (iiiiriiiciil  :  liMlc  à  trois  ou  (|ualic 
Il  iiillc-,  iialiiicllc,  cioiv  sciilt'  ou  canloniK^'iî  de  points,  ou 
(Il  idicl'  Mil  une  paliiiclti".  .l'ai  relevé  inoi-même,  sur  des 
laiii|)('s  (le  ma  collcclidii,  les  lettres  A  B  C,  ABCS, 
\  B  C  T  ' . 

Il  l'aiil  iccoiiiiaîli  (•  (|iic  les  cai  aclt'ics  de  ces  iiiai(|U('s  sou! 
Idiil  à  l'ail  ceux  (|ii'oii  a  relcvi^'s  sui'  iUs  laiiijK's  fiancheniciil 
du •('•liciiiH's.  Ici,  comme  au  Djebel  Ousl,  les  [)olieis  (jui 
fal)ii(|uaien|  les  luminaires  faisaieul  aussi  des  vases  d(jnt  on 
a  lrouv(''  de  iioml)reux  di^bris  '.  D'apri's  les  noms  i-elevés 
dans  l't^pi^iaphie  de  la  pelile  ville  anti(pje,  l'aiileur  pense 
tpie  les  potiers  élaienl  i\c^  indigènes  el  il  faut  reconnaître 
(pie  le  caractère  de  leurs  iirodiiits  iaf)pelle  ceux  des  aitisaiis 
de  Thuburnie  et  du  Djebel  Oust. 

Ou  peut  se  demander  si  ces  lampes  ont  été  exportées  au 
loin.  M.  ITautecœur  dit  en  avoir  trouvé,  dn  même  type 
(pi'elles  à  SbeïtIa.  El  Djem.Carthaa'e  et  en  delicMs  de  l'Afri- 
ipie.  à  Palerme,  Syraeuse  et  Rome.  Plusieurs  portaient  des 
sujets  rpTil  n'a  pas  rencontrés  à  Henchir  Srira,  ce  qui 
l'amène  à  conclure  (fu'elles  ne  proviennent  pas  de  cette 
localité,  car  il  serait  étonnant  qu'une  bourgade  ait  eu  le 
monopole  de  ce  type.  Mes  propres  observations  eorrobo- 
lent  cette  opinion.  J'ai  en  ce  moment  sous  les  yeux  une 
série  de  lampes  provenant  de  Kasseiine,  Alactar.  Carthage, 
(iu  Djebel  Seidj,  (jui  paiaissent  identiques  à  celles  de 
Henchir  Siira,  à  un  piemier  examen.  Mais  elles  offrent  des 
différences  tendant  à  montrer  que.  comme  pour  le  o"rou])e 
de  lampes  à  la  maicpie  si  ciuieuse  décrites  plus  haut,  il  a 
ilù  eu  être  fabri(pié  du  même  fvpe,  à  un  moment  doiiri('. 
eu  |tiusieui<  poinis  d'une  région  de  r\fri(pie. 

Tin.  —  Atelier  d'ithiiia 

A  Oudeua,  auprès  de  Tunis,  en  déblayant  les  (her- 
nies  anti(pies    dans    lescpiels    a    été    trouvée    la    mosaïque 


I    Pour   Hniili'Cii^nr,   S   et    T  seiïiifiit    pciil-rtn-   le-;   inilinle?   du    prifior. 

1  Ces  (léliris  rappollpnt  toiif  îi  fait  par  ]e)ir  ornpmtMitatinn  en  pal  mettes, 
damier  et  ronds  quadrillés  les  tessf»ns  rhrcliens  de  Cartliatre.  les  roiileiirs.  la 
nature  et  la  cuisson  de  la  ])àte  sont  identiques.  Les  ateliers  rrHeucliir  Srira 
auraient-ils   donc   exporté   dans    !a   capitale    ? 


102      (ES  FABRIQUES  DE  LAMPES  DANS  L'A^(;IE^^E  AFRIQUE 

dite   des    Labcrii,    on    a    leiicontié    un    atelier    de   potier 
chrétien  i. 

La  ville  a  élé  ruinée,  au  milieu  du  iv'  siècle,  |)ar  l'inva- 
sion vandale.  T.es  thermes  cessèrent  de  fonctioimer,  tout 
en  restant  debout,  et  c'est  là  que  s'installa  l'arlisan  ;  sa 
fabrique  lesla  en  pleine  activité  jusqu'au  jour  où  un  incen- 
die la  détruisit  complèlement.  Les  voûtes,  en  s'ciïondrant, 
écrasèrent  un  entassement  considérable  de  vases,  plats, 
lampes,  statuettes,  cachets  et  moules. 

Parmi  ces  débiis,Gaucklei-  a  remartpiéplus  de  trois  cents 
plats  oinés  au  fond,  sur  le  pourtour  ou  le  marli  d'estam- 
pilles chrétiennes,  quatorze  types  différents  de  monoofram- 
nies  du  Christ  ou  de  croix  siinples,  le  swastikadansuucarré, 
l'agneau,  le  lièvre,  le  coq,  la  colombe,  l'autel,  le  palmier, 
le  lion,  le  renard,  le  chrisme  accosté  de  l'a  et  de  l'w,  un  clerc 
tenant  le  calice  à  deux  mains,  le  Christ  et  l'àme  fidèle 
(un  lièvre  dans  les  bras),  le  Bon  Pasteur,  le  Christ  accosté 
de  deux  anges,  saint  Michel  tiansperçant  le  dragon, 
l'agneau. 

Parmi  les  cachets  à  estampilles  l'un  porte  les  trois  lettres 
PER. 

A  côté  de  moules  de  lampes  chiétiennes  en  plâtre,  il  y 
avait  des  moules  de  vases  à  parfums  et  toute  une  série  de 
formes  à  potiei'  ',  dont  plusieurs  ])ortent  des  gialTites  ou  le 
chrisme  et  la  palme. 

On  \()it  (pie  dans  cet  atelier,  on  ne  faisait  pas  seulement 
des  lampes,  mais  aussi  d'autres  poteries.  Il  devait  probable- 
ment en  être  ainsi  de  tous  les  petits  ateliers  indigènes,  la 
spécialisation  dans  la  pioduction  n'ayant  pu  exister  que 
pour  des  établissements  importants  ^. 

A  côté  des  lampes  chrétiennes  de  forme  typique,  on  en  a 
trouvé  ici  en  forme  «  de  bol  tronc-conique  fermé  par  un 
dôme  également  tronc-conique  percé  de  deux  trous,  l'un 
au  centre,  l'autre  dans  la  rigole,  ])our  la  mèche,  ou  encore 
recouvert  d'un  dôme  tronc-conique  également  surmonté 
d'un  goulot  ».  Tl  est  intéressant  de  noter  cette  juxtaposi- 


I  V.  (iALCKLEK.  Le  ddinaine  fies  Liiherij  <)  Ulhina.  Bull.  Archéol.  du  Coin., 
'■'^UT'  p.  ''i-'^  pt  siiiv.  Calai,  du  Musée  Maoui,  p.   ir)/i  et  suiv. 

'•  IhsI ruinent  en  terre  cuite  de  lo  centimètres  de  longneur  environ,  en  forme 
d'ellipse  aplntie  suivant  deux  faces  concaves  destinées  à  recevoir  les  doigts. 
Cet  instrument  servait  à   modeler  l'argile  tournant  à   l'aide  d'un  tour. 

3  Si  ou  fe'en  rapporte  au  catalogue  du  Musée  Alaoui  par  Hautecœur,  on 
aurait  découvert  uii  autre  atelier  de  j)otier  de  l'époque  clirétienne  h  Carthage. 
I^es  renseignements  (pii  m'ont  élé  fourni?  ii  ce  sujet  semblent  indiquer  qu'il 
s'agit   d'une  erreur. 


LEis  I-  vHnioi  Ks  i)i;  i,\\i|.|:s  i>\\s  i.'\n(  ie>m.:  mhioi  k    103 

li'Mi  (lc(lcn\  l'oniics.  riiii.déiivanl  (Ic:^  liimpos  antéri(Mires, 
l'aulic  (jiic  l'on  e<ni,si(Jt'rc  coinnie  vaiHliilc,  suis  «ju'il  \  iiil 
(le  l\|)('  (le  Iransilioii  cnlrc  les  deux. 

On  iir  ronnaîl  pas.  vu  A(ii(iuf,  d'autres  ateliers  de 
lampes  l)\  zaïilines. 

.I<'  IK-  puis  à  la  lislc  ,1,.  ral)ii(pics  de  lampes  (pij  pircède 
ajouter'  la  (leseiipli,,ii  ,|,.  ,1,.,,\  d'eiiire  elles,  dont  on  m'a 
signalé  ICxislenee.  L'iiiio  a  lomiii  plusieurs  centaines  de 
lampes  païennes  dans  la  tranchée  d'une  route  aux  environs 
immédiats  de  Mactar.  L'autre  a  été  signalée  à  M.  Hietlmann 
par  un  gisement  de  luminaires  de  basse  épcxpie,  vandales 
ou  arabes,  à  Sousse,  au  pied  du  Monte  Testaccio. 

.le  ne  tirerai  (prune  conclusion  de  ce  (|ui  précède,  c'est 
qu'à  C(Mé  des  ateliers  à  produits  de  caractères  franchement 
romains,  il  a  existé  en  \t'ri(jue  des  tabrifpies  de  poteries 
indigènes.  Les  lampes  s'en  éloignaient  plus  ou  moins  du 
type  de  la  lampe  romaine.  Les  formes  souvent  antérieures 
aux  premières  semblent  s'en  être  développées  à  mesure  cpie 
les  importations  l't  rinlliience  italiennes  ont  diminué. 

D'  L.  CARTON, 

Conespoiulanl  de  ilit^ililut  de  Francg. 


BIBLIOGRAPHIE 

(OuiuïKies  (ifjcrfs  à  l<t  Sorich') 


MELANGES    AFiUCAIiSS    ET    OliIE!\TAi\,    par    René    Bassft,   i   vol.   in-8', 
ritjo  p.   Paris,  J.   JVlaisoiHH'iivi'  et   tils,   igiô. 

Cet.  ouvrage  est  formé  par  la  réunion  d'articles  parus  de  1882 
à  1907  dans  différentes  publications  périodiques,  en  France  ou 
à  l'étranger.  Ainsi  que  cela  arrive  presque  toujours,  de  tels  tra- 
vaux, malgré  leur  importance,  restent  dispersés  et  souvent, 
introuvables  pour  les  étudiants,  ou  tout  au  moins  hors  de  leur 
portée.  L'auteur  et  l'éditeur  ont  donc  été  bien  inspirés  en  les 
réunissant  en  volume.  Us  en  ont  ainsi  facilité  la  diffusion  parmi 
les  travailleurs  auxquels  ces  articles  seront  une  source  d'infor- 
mation des  plus  précieuses  pour  l'histoire  politique  ou  littéraire, 
l'ethnographie  ou  le  folk-lore  des  populations  islamiques  en 
particulier.  C'est  ce  dernier  caractère,  cette  préoccupation  de  ce 
qui  concerne  l'ethnographie  ou  le  folk-lore,  qui  forme  en  quel- 
que sorte  l'idée  llominante.  le  lien  qui  relie  entre  eux  ces  tra- 
vaux, ail  premier  aspect  si  divers. 

Le  premier  article,  un  résumé  de  l'histoire  de  L'Algérie  arabe, 
depuis  la  premièi'e  invasion  arabe  jusqu'au  xvi^  siècle,  où  com- 
mence la  conquête  turque,  avait  été  demandé  à  l'auteur  pour  la 
collection  L'Algcrie  et  ses  jnonuinents,  collection  que  le  Gouver- 
nement Général  de  l'Algérie  a  publié  à  l'occasion  de  l'Exposition 
Universelle  de  1900.  Il  n'est  {)as  possible  de  présenter  en  vingt-six 
pages,  avec  autant  de  clarté,  un  tableau  plus  complet  et  plus 
vrai  de  l'histoire  politique  d'une  période  qui  s'étend  sur  un 
espace  d'environ  sept  siècles.  Le  deuxième  article  sur  La  Littéra- 
ture populaire  berbère  et  arabe  datts  le  Maghreb  el  chez  les  Mau- 
res d'Espagne,  seul  travail  d'ensemble  existant  sur  ce  sujet,  nous 
montre  une  autre  face  de  l'histoire  des  mêmes  populations.  Ces 
deux  chapitres  servent  comme  d'une  introduction  pour  la  con- 
naissance de  pays  ou  de  populations,  dont  Un  prétendu  chant 
populaire  arabe  (III),  un  essai  sin-  Les  T(dba  d'autrefois  (IV), 
des  Notes  de  voyage  (V)  en  Tunisie,  en  Algérie,  au  Maroc,  font 
connaître  le  côté  légendaire  ou  pittoresque. 

Des  comptes  rendus  bibliographiques  suivent,  mais  dépassent 
la  simple  critique  littéraire,  par  les  nouveaux  aperçus  de  l'au- 
teur, par  l'indication  de  sources  inédiles.  Les  Cheikhs  du  Maroc 
an  XVI*  siècle,  notamment,  sont  im  véritable  chapitre  d'hisloire 


BIBLIOGRAPHIE  105 

iilisoiiiniriil  iKniscMii  (\  lii>).  hiiiis  lui'  rlrtjic  (inmiirciisc  il'lhn 
Sii'iil  ('H-\iis  lions  iiMMis  \.i  |iiiiiiirir  Iriidiirl  ii  m  de  ce  poriiiriN  II). 
Les  Sniircrs  (inihcs  de  l-'laiic  cl  ilc  lildiirhcllnr  (\lll)  iinii-  iiii»ii- 
Iri'iit  le  processus  de  ces  soilc-;  ilc  h'^Tiidcs  ;i  IraNcrs  les  clu-iniiis 
obscurs  de  la  liaditioii  ou  de  la  lilh'-ialiin-  popnlairc  depuis 
l'Oiiciit  jiisipraiix  tciiitoircs  do  l'Oucsl  ciiropcK'ii.  l  n  nip|)nr| 
sui'  une  .\/(>n/(i/i  ttii  Sriininl  (l\l,  la  crirnpic  d'un  livre  sur 
L<'.s  Bainbdid  (\)  eoniplctcnl  le  ^M'oup(  d'articles  se  rap|)oilaul  à 
l'AI'ricpie  du  Nord-Ouesl.  Deux  éludes  sur  L'Ishiin  ou  Le  Malm- 
DK'lisine  (XI)  d'après  les  li\|-es  de  MM.  de  ("-asiries  ftu  (larra  de 
Vaux,  et  sur  Deiw  pliilnsophes  anihes  (\ll)  de  ce  d(  rnier,  don- 
nent à  M.  René  Bassel,  non  seidenient  l'occasion  de  pass<T  en 
revue  les  sources  cilé(  s  pai'  les  auleiirs.  celles  cpi'ils  auraieni  pn 
utiliser,  mais  encore,  tout  en  l«'ur  rendant  la  |)ail  d'élo'/es  qu'ils 
inérilent,  de  redresser  nomltre  d'erre^urs. 

In  article  (Mil)  sur  la  reine  de  Saha,  à  piopos  du  livre  de 
H.  Le  Roux.  sert,  de  transition  entre  les  étud<'s  précédentes  con- 
cernant les  pays  musulmans  et  des  études  sur  les  rellffion.s  orien- 
tales, apocryphes  éthiopiens  (XIV  à  XVI),  littérature  co|)te  et 
syriaque  (XVII  et  XVIII),  NosaïrLs  (XIX),  études  persanes  (XX  à 
\XIV),  etc.  L'ouvra^'^e  se  termine  par  un  article  nécrolot^irpie  snr 
.'\.  (le  Calassanti-Alotylinski.  dij^ne  liomma'i'e  d'un  savant  à  un 
antre  savant,  son  ami. 

Est-il  utile  d'ajouter  (pie  les  notes  au  bas  des  pages  sont  une 
mine  de  renseignements  bibliographiques  et  que  ces  notes  ont 
été  complétées  et  mises  à  jour  lors  de  la  réunion  des  articles  en 
vohmie,  en  191 5  ? 

Il  nous  eut  fallu  de  noinl)reuses  pag(  s  j)our  donner  un  compte 
rendu  tin  peu  détaillé  des  articles  qui  composent  ce  volume. 
Xous  nous  sommes  bornés  à  en  souligner  objectivement  l'impor- 
tance et  les  grands  services  que  p(Mivent  en  rdirer  les  arabisants. 

A.  COUR. 


LES  .lC77iS  D'UOSTIUTÉ  DES  ËMlGïiÉS.  ET  DES  MAROCAINS,  SVnTOUT 
DES  HEM  SÎWSSEN,  ET  LES  OPEIi^TIO^S  EFFECTVP.ES  PAU  LES 
FnA^ÇAIS,  !\OTAMMENT  EN  I8:>6,  par  le  capitaine  L.  Voinot,  i  brocli. iu-S", 
iKf  1).  (l-'xlr:nl   de  la  licviii'    \fri(<iiiie,  ■>'  Irim.    n.ii'i).   A.  .loiinlan.   Alper. 

Avec  ce  volume,  l'auteur  nous  donne  nn  chapitre  fort  intéres- 
sant, et  encore  absolument  inédit,  de  l'histoire  des  relations  de 
fronti('re  franco-marocaines  entre  les  années  1862  et  i858. 

Kn  i85a,  les  Béni  Snassen  et  les  Boni  Mathar  avai(Mit  reçu  une 
maîtresse  correction  pour  les  méfaits  commis  le  long  de  noire 
frontii''re.  Refoulés  sur  leur  teriitoire,  ils  se  tinrent  d'abord  tran- 
(^uilies.  Mais,  non  tenus  en  main  par  le  pouvoir  central  niaio- 
cain,  l'anarchie  continua  à  sévir  chez  eux,  et,   petit  à  petit,   ils 


10(j  BIBLIOGRAPHIE 

s'eiihai'diieiil  el  rccdiiiiueiicrii'iil  leurs  incursions  hostiles  chez 
nous.  Ponr  cela,  ils  Irciiivèicnl  des  alliés  naturels  dans  lesi  nom- 
breux émigrés  t[ui  avaient  quitté  le  territoire  algérien  par  haine 
des  chrétiens.  Ces  émigrés,  pour  faire  la  guerre  sainte,  s'étaient 
transformés  en  cou|)eurs  de  route,  dévaliseurs  de  diligences 
entre  Marnia  et  .Nemours.  Les  autorités  françaises  voulurent 
remédier  à  ce  désordre  par  un  acte  d'énergie  :  l'enlèvement  du 
chef  des  émigrés.  Cet  enlèvement  réussit  mais  provoqua,  même 
chez  nos  indigènes,  une  recrudescence  d'hostilité  et  un  plus 
grand  nombre  de  dissidents.  En  i85(i.  la  tribu  marocaine;  des 
Kebdana,  aidée  par  les  Ouled  Bon  Azza,  vint  razzier  le^ii  Msirda 
sur  notre  propre  territoire.  Ihi  contre-rezzou  fit  payer  aux  Ouled 
liou  Azza  les  pertes  des  jMsirda.  Mais  cette  action  était  insuffi- 
sante comme  châtiment  ;  cependant  le  commandement  supé- 
rieur français  était  hostile)  à  toute  action  énergique  contre  les 
Marocains  et  avait  interdit  formellement  à  nos  troupes  de  dépas- 
ser, à  la  poursuite  des  Marocains  hostiles  ou  des  émigrés  algé- 
riens, la  frontière  marocaine.  Etait-ce  de  notre  part  respect 
exagéré  des  traités  .''  Craignait-on.  au  moment  de  rexi)édition 
de  la  Grande-Kabylie,  de  créer  des  complications  supplémen- 
taires ?  L'auteiu'  ne  nous  le  dit  pas.  mais  il  nous  montre  très 
bien  que  notre  politique  peu  énergique  obligea  à  une  concentra- 
tion de  troupes  françaises  et  à  roiganisation  de  deux  groupes  de 
colonnes  (jui  durent  opérer  des  actes  de  répression  en  i858, 
l'une,  au  rsord.  chez  les  Béni  Snassen,  l'autre,  au  Sud,  chez  les 
Hamiyan. 

M.  le  capitaine  L.  Voinot  a  fait  suivre  son  si  curieux  travail 
de  cinquante-deux  pièces  justificatives  tirées  des  Archives  du 
(louvernement  Général  de  l'Algérie  ou  des  Archives  du  cercle  de 
Marnia.  Nous  ne  saurions  trop  le  féliciter  du  grand  service  qu'il 
a  rendu  ])ar  sa  publication  à  tous  ceux  qui  s'intéressent  à  l'his- 
toire de  noire  belle  colonie. 

,       A.  COUR. 


l._   DV   DBOIT   DE    CITÉ    ACCORDÉ   PAU    LES    BOMAINS    AUX   PEUPLES 
CONQiUS  El'  SES  EFFETS,  pnr  M.  .1.  CAricopiNo.  A.  Joiinliiii,  Alger. 

II.  _  DEUX  UMSr.lUPTIONS  DU  DEPARTEMENT  DE  CONSTANTINE  BÊCEM- 
MENT  PUBLIEES.  Imprimerie  Nalioniile,  l'aiis. 

III.  —  MELANGES  D'EPIGBAPHIE  ALCEBIENNE.  A.  .Immliin,  Alg:er. 

IV.  _  isoTE  SUR  UNE  MOSAÏQUE  BECEMMENT  DECOUVEBTE  A    TIPAZA. 
Impiirneric  Nationale,  Paris. 

Les  quatre  études  que  M.  Jérôme  Carcopino  a  publié  toiit 
ié(MMiiment  présentent,  un  réel  iiitérèt.  Et  d'abord,  la  question 
(lu  iDoil  (Je  cité  accordé  pai-  les  Piomains  attirera  l'attention  de 
t(jus  ceux  qui  s'occupent  de  législation.  Après  avoir  dit  que  Rome 


RlRT.rOr.RAPIIIF,  107 

Il  iiccniiliiil  s,i  |)to|('('|  idii  (|ii';"i  icii\  (|iii  ^ii  1 1|  m  uliiici  1 1  |i's  cliiiriM'- 
|mlilii|ii(--  <(i\i(c  iiiilihiirc  cl  |iairiii(-iil  tlii  viii^Miriiic  sur  les 
siicccssidiis,  M.  Ciiicdiiiiiu  iriilii|ii(>  les  ('•t.;i|M's  (ju'a  dû  snliif  If 
(Iroil  (le  cili'-.  Le  mol  de  iiiiiniripc,  (railleurs,  st-niMc  iiiilii|iii  r 
lis  (livcis(s  cliaivics  liiiposi'-cs  aux  ciloyciis  romains. 

.Iiisijii'à  lladrifii,  j'i'lian;:!'!-  siiliissail,  avant  d'acquérir  ji'  titiv 
de  ciloyru  loniaiii.  inir  iiiilialimi.  une  évolnlion.  Ce  fut  (iara- 
ralla  (|iii  lomaiiisii  d'un  seul  ((inp  lous  les  liommes  libres  de 
rempire.  Il  en  excluait  ce[)cndanf  les  piujnni,  ceux  que  nous 
a|i|)cloiis  paysans.  Iialiilant  les  villafrcs  et  les  nomades. 

M.  ('areopino  fait  rcmanpior  que  celte  extension  du  droit  de 
cité  (  ut  lieu  au  mnmcni  de  la  décadence  de  la  puissance  romaine, 

alors  (pic   le-;  Barliarcs  c mençaient   à   presser  l'empire,   alf)rs 

qu'il  fallait  des  hommes  et  de  Tarèrent. 

Ainsi  cette  courte  étude  fixe  un  des  |)oiiils  importants  de  la 
vie  pul)li(jue  romaine. 

Deux  auli-es  brochures  (1(>  AT.  Carcopinos'oceupent.d'épifrraphie 
afri(^aine.  T/ini(>  de  e(>s  brochures,  d'apn'-s  l'inscription  d'Wii- 
Aziz-Rcn-Tellis,  fixe  la  source  de  VAmpsiujn,  qui  serait  un  des 
petits  aflluents  du  Rhunuuel,  l'Oued-bou-^frab  et  non  le  Rhum- 
mcl  lui-m(*me.  Une  deuxi(''Miie  inscription,  celle  d'Aïn-Melonk, 
indi(pie  la  création,  sous  la  protection  de  la  déesse  Celestis,  d'un 
viens  sièpe  de  numJinœ. 

Dans  les  McJnnçies  (J'Epiiimphie  africaine,  M.  Carcopino  étudie 
une  inscriplion  de  Cirta.  D'après  lui,  le  premier  Africain  (jui 
obtint  le  ran^r  suprême  dans  la  hiérarchie  des  magistratures, 
serait  le  consul  Aurelius  Pactunieius  Fronio,  de  Cirta.  en  So 
apn'-s  .T.-C. 

Enfiîi.  IVliide  sur  la  mosaïque  de  Tipaza,  documentée  et  exacte 
uKli([ue  bien  la  destination  de  r(Hlifice  qui  la  renfermait.  Ce  n'est 
pas,  d'apnXs  M.  Carcopino,  une  basilique  chrétienne  mais  un 
inommienl  païen,  une  basilique  civile.  Divers  détails  semblent 
rindùpuM-  :  l'abside  réservée  aux  magfistrats  et  la  salle  ouverte  au 
pnblic  tant(M  servant  de  salle  d'audience,  tantôt  de  promenoir 
pour  les  oisifs.  Af.  Carcopino  pense  même  dater  cette  basili(pic 
du  i"""  <i(Vle,  ce  (pii  la  placerait  parmi  les  plus  anciens  monu- 
nienls  de  l'Afrique  romaine. 

La  mosaïque  qui  semble  contemporaine  de  l'édifice  présente 
une  surface  de  5  m.  70  de  longueur  sur  une  profondeur  de 
3  m.  ()().  Le  centre  de  la  mosaïque  est  formé  de  trois  fioaires  de 
captifs  eiudiaînés,  entourés  de  douze  têtes  de  personnages,  hom- 
mes ci  fenunes.  Ces  captifs  représentent-ils  des  vaincus.  Maures 
ou  MiisiilniK's^  rebelle?  des  environs  de  Tipaza,  ou  comme  le  veut 
M.  Rnllu.  des  justiciables  de  ce  tribunal  ?  La  question  n'est  pas 
résolue  bien  que  M.  Carcopino  penche  pour  la  première 
hypothèse. 

Abbé  FABRE. 


PROCÈS-VERBAUX  DES  RÉUNIONS 

de    la    «  Société    de    Géographie    et    d'Archéologie    d'Oran  » 


RÉUNION  MENSUELLE  DU  COMITÉ  ADiMINISTRATIF 
SÉANCE  DU  '6  Janvier  1916 


Présidence  de  M.  Doumergue,  président 


La  séance  est  ouverte  à  5  heures  et  demie. 

Sont  présents  au  Comité  :  MM.  Dot  merglie.  Flakault,  Pock, 
TouRMER,  Dangles,  Al)bé  Fabre,  Pellkt,  Ferez,  D""  Saindras. 

Absents  excusés  :  MiM.  Général  Baschuisg,  Réreinger,  Aram- 
BOURG,  HuoT,  Lemoissoa,  DE  Pachtere,  Roux-Freissineng,  mobi- 
lisés ;  René-Legeerc. 

Absents  :  MM.  Déciiaud.  Dri'uv,  Kriéger,  Lamur,  Pontet. 

Le  procès-verbal  Je  la  séance  du  6  décembre  est  lu  et  adopté. 

M.  le  Président  donne  lecture  d'une  lettre  de  M.  le  Maire  de 
Relizane  informant  que  les  travaux  exécutés  dans  les  iniines  de 
l'ancienne  Mina  ont  fait  découvrir  un  certain  nombre  de  docu- 
ments lapidaires,  qui  sont  déposés  en  partie  entre  les  mains  de 
M.  Martin,  chef  de  section  des  Chemins  de  fer  de  l'Etal  à  RelizaTie. 

M.  le  Président  ajoute  à  ces  indications  qu'à  sa  connaissance  il 
aurait  été  trouvé  dans  ces  fouilles  deux  inscriptions  funéraires. 

M.  le  Président  rend  compte  de  l'état  des  ^pourparlers  engagés 
avec  le  propriétaire  du  local  de  la  Société  au  sujet  du  renouvelle- 
ment du  bail. 

Après  un  échange  de  vues,  le  Comité  charge  M.  le  Président 
de  continuer  ces  pourparlers  et  lui  donne  tout  pouvoir  pour  con- 
clure au  mieux  des  intérêts  de  la  Société. 

M.  le  Président  annonce  ((u'il  a  reçu  de  M.  le  lieutenant  Canr- 
pardou,  par  l'intermédiaire  de  M.  le  commandant  Mougin.  un 
travail  sur  le  préhistorique  à  Taza  (Maroc).  H  est  chargé  de 
l'examiner. 

L'ordre  du  jour  étant  épuisé,  la  séance  est  levée  à  7  heures. 

Pour  le  Secrétaire  général,  Le  Président, 

Signé  :  FLAHAULT.  Si<rné  :  DOUMERGUE. 


t»nocES-M;i<M\i  X  dks  m'i  mo\s  di;  i,\  sociiiii':        KM) 
RI- 1  \I0\  .MK.\S[  KI.IJ':  1)1    COMIir:   \l)MIM<Tli\Tl|. 

Sl'vNCI-;    in      ~    FkVUIKH     |()|(i 


Présidence  de  M.  Doi  mek(;ie,  président 


La  séance  est  ouverte  à  5  Iieiires  ef  dtrnie. 

Sont  présents  au  Comité  :  MM.  Doimerguk,  Pock,  Tolh.meii, 
DÉciiAin.  Lkmoisson,  Pkllkt,  Pérez,  Flaiiault. 

Absents  excusés  :  MM.  Général  Basciiing,  Bére.ngeu.  Aham- 
BouRG,  HuoT,  DE  Pachtere,  Roix-Freissineng,  mobilisés  r  Dan- 

(iLES,   ReNÉ-LeCLERO. 

Absents  :  MM.  Dupuv,  Abbé  Fabre,  Kriéger,  Lami  r,  Pontet, 
D""  Sam)ras. 

Le  procès-verl)aI  de  la  séance  du  3  janvier  iyi(j  est  lu  et  adopté. 

Le  Président  rappelle  que  MM.  Argoud  et  Pariexté,  membres 
de  la  Société,  ont  été,  le  premier,  inscrit  au  tableau  d'avance- 
nii'ut  pour  la  Légion  d'honneur,  et  le  second  décoré  de  la  Croix 
de  n-„,.vre,  pour  leur  brillante  conduite  en  Orient.  Notre  jeune 
collègue  M.  Camille  Arambourg  a  été  aussi  l'objet  d'une  citai iou 
à  l'Ordre  de  l'Armée  et  a  reçu  la  Croix  de  guerre. 

M.  le  Président  donne  lecture  d'une  lettre  par  laquelle  M  le 
commandant  Mougin,  chef  du  Service  des  Renseignements  à 
Taza,  assure  la  Société  qu'il  veillera  de  tous  ses  efforts  à  la  conser- 
vation de  la  ville  indigène  de  l^aza  qui  présente  un  réel  intérêt 
archéologique  et  historique. 

M.  le  Président  ajoute  que,  grâce  à  l'intelligente  initiative  du 
Commandant  un  musée  régional  est  en  voie  de  création  à  Taza. 
Le  préhistorique  en  forme  le  premier  noyau.  Le  Comité  est  heu- 
reux d'a|)prendre  cette  bonne  nouvelle  et  souhaite  que  l'œuvre 
soit  prospère. 

-M.  le  Maire  de  Relizane  nous  annonce  que  de  nouvelles  trou- 
vailles ont  été  faites  aux  ruines  de  Mina.  On  a  exhumé  quelques 
^leles  funéraires  dont  les  bas-reliefs  sont  p'iis  intéressants  que 
les  inscriptions. 

II  est  ensuite  rendu  compte  du  résultat  des  pourparlers  en^'a^és 
entre  le  Président  el  le  propriétaire  du  local  occupé  par  la  Société 
pour  le  renouvellement  du  bail.  Le  renouvellement,  pour  3,  6  ou 
9  années,  a  été  accepté  avec  une  augmentation  de  (lo  franco  par 
an  qui  ne  sera  exigible  qu'après  la  signature  du  traité  de  paix 
Le  loyer  sera  donc  porté  à  720  francs. 

Le  Trésorier  présente  le  compte  administratif  provisoire  de 
1  exercice  i()t5  non  .-ncore  clos,  mais  qui  laissera  un  léger  excé- 
dent du  fait  de  la  suppression  d'un  fascicule  du  Ruiletin.  Il  sou- 
met aussi  un  projet  de  budget  pour  iqi6. 


110  l'HOCÈS-VEKBALX   DES   REUMOPsS   DE    LA   SOCIETE 

11  inonlre  combien  il  est  diiïicile  d'établir  un  étal  à  peu 
près  exact  des  recettes  pour  l'année  qui  commence.  Le  Comité 
est  d'avis  qu'il  faut  continuer  à  faire  les  dépenses  indispensables, 
tout  en  persistant  dans  le  syslème  des  économies  qui  a  permis  à 
la  Société  de  maintenir  son  activité  et  de  couvrir  les  dépenses 
pendant  l'année  191 5. 

Le  Président  fait  aussi  remarquer  que  si  les  subventions  nous 
font  défaut,  la  rentrée  des  cotisations  est  relativement  bonne. 
Rares  sont  les  sociétaires  qui,  non  mobilisés,  sont  en  relard  avec 
la  caisse. 

Après  examen  des  propositions  du  Trésorier,  le  projet  de  bud- 
get est  adopté  avec  les  cliiffres  ci-après  : 

Pro,j«  t  de  IJudiïot  do  1916 

Recettes 
Approximatives /i  •  /ioo     n 

DÉPENSES 

Bulletin    2.3oo     » 

Affranchissemenl i5o     » 

Frais  de  recouvrement 180     » 

Frais  de  correspondance 100     » 

Imprimés,  frais  de  bureau 5o     » 

Reliur»'   100     » 

Prix  au  L^cée »     » 

Conférences »     » 

Abonnements    fio     » 

Achats  de  livres 1 5o     » 

Concours »     » 

Recherches  archéologiques 

Frais  d'élections" 

Loyer    ^ 

Impôts,  éclairage,  assurance,  entretien 

Gardien  de  la  bibliothèque 

Dépenses  imprévues 

Total f^.  /^oo     )) 

La  Société  a  reçu  les  ouvrages  suivants  : 

De  M.  Guebhard  :  'Sur  une  petite,  mais  importante  améliora- 
tion à  apporter  aux  signes  de  la  u  Légende  palœ-etthnologique 
internationale  ». 

—  Applications  nouvelles  de  la  radiographie  à  l'histoire 
naturelle. 

—  Carte  structurale  des  environs  de  Co.steilane. 

De  M.  Ben  Danou  :  Les  Laines  Algéro-Marocaines. 

De  M.  Louis  Gentil,  membre  correspondant  :  Notes  de  géolo- 


DO 

» 

660 

180 

3  60 

60 

l>nOCÈs-\  KKHM  X    DES    HKl   MONS    UE    I,A    SOClKlÉ  111 

(/(('  imimoiiiie,  Skiuks  \    cl   \l.  daiis  IcsiiiicHos^  suiil  iriiiiics  liiiil 
coiMimiiiiialions  à  rAcadt'iiiic  des  Sciv'iices  (iyi:>.  à   nji;')). 
— •  Esquisse   hydniUigique   <lc   la   n''(jion  de.   MeUnès. 

—  La  rechei elle  scienlifique  au  Munie. 

—  L<i  C.niie  dit  Munx-  à  réi'liellc  de  I .lll)ll.nnir\  |.;,r  llciiiy 
lîiinri'c.  \nlic('  sur  hi  l'.ousl ruclioii  dr  In  Ciirte  et  Index  hibùio- 
(irnphiiiuc  itn'crdt's  <rnin'  rue  d'eiiseiiible  sur  le  relief  du  Maroc. 

hc  M\I.  I.(iiii<  (Iciilil  cl  l'crcira  :  Sur  les  efjejs  au  Maroc  du 
(jrand  IreDihleiiieiil  de  lerre  en  Porluijal  (I7~)'t). 

Joutes  ces  iidlos  seront  consul tccs  avec  prolil  |»;ir  tous  ccu\ 
qu'inlcrcssc  la  ^V-olo^'ic  marocaine. 

De  vils  remercieinents  sont  votés  au\  auteurs  donateurs. 

Le  Président  rend  compte  de  quelques  acquisitions  de  livres 
qu'if  a  laites  pour  la  hihliolliccpie  de  la  Société. 

Le  Omiité  décide  de  remettre  au  mois  de  mai  i()i7  les  éleetions 
pour  le  renouvellement  partiel  du  Comité. 

Les    membres    sortants    (mi    ii)i6    étaient  :    AL\L    AaA>nioL'KG, 

DkCIIAID,        KuiÉOER,        LaMTR,        LeMOISSON,        PELLET,        Po.NrET, 

D''  Sandras'. 

M.  DouMERGUE  rend  comple  du  travail  de  \l.  !<■  liculciuuit 
Campardou  présenlé  à  la  dernière  séance.  Il  en  |)ropose  l'impres- 
sion dans  un  de  nos  prochains  bulletins.  Il  en  est  ai.nsi  décidé. 

A  cetic  occasion,  le  Président  fait  remarquer  que,  parmi  les 
territoriaux  de  France  qui  ont  été  appelés  au  Maroc,  se  trouvent 
plusieurs  membres  de  Sociétés  Savantes  françaises  qui  consa- 
crent leurs  loisirs  à  l'étude  scientifique  des  régions  qu'ils  occu- 
pent militairement.  Il  a  été  heureux  de  répondre  aux  diverses 
demandes  de  renseignements  adressées  à  la  Société  par  la  ])lupart 
d'entre  eux. 

L'ordre  du  jour  étant  épuisé,  la  séance  est  levée  à  6  h.   io. 

Pour  le  Secrélaire  gênerai.  Le  Président, 

Signé  :  FLAHAULT.  Signé  :  DOUMERGUE. 


RÉUNION  MENSUELLE  DU  COMII R  ADMINISTRATIF 
SÉANCE  1)1'   i.S   Mars  njif) 


Présidence  de  M.  Doumerct  e,  président 


La  séance  est  ouverte  à  f)  heures  et  demie. 
Sont  présents  au  (^.omilé  :  MM.  Doi  mergie,  Toirmer.  Abbé 
Fabre,  Kriéger,  Pellet,  Pkrez,  D'  Sandras,  Flahault. 


11-  l'HOCÈS-VEKBALX   DES   REUMONS   DE    LA   SOCIETE 

Ahstnts  excusés  :  MM.  Général  Basciiing,  Béremier,  Aram- 
BouRG,  HuoT,  Lemoisson,  DE  Pachti^ire.  Roux-Freissi^e^îg, 
mobilisés  ;  Dupuy,   Pock,   ReiNÉ-Leclerc. 

Absents  :  MM.  Dam;ees.  Déciiaud,  Lamur,  Pontet. 

Le  procès-verbal  de  la  séance  du  7  février  est  lu  et  adopté. 

Avant  d'aborder  l'ordre  du  jour,  i\t.  le  Président  annonce  le 
décès  de  deux  de  nos  sociétaires  :  M.  Léo})old  Français  et  M.  Je 
Commandant  Paul  Bertiion,  ce  dernier  tué  le  26  mai  hji.")  aux 
Dardanelles.  Le  Comité  s'associe  aux  sentiments  de  condoléance 
exprimés  par  le  Président. 

M.  le  Président  transmet  au  Comité  les  excellentes  nouvelles 
qu'il  a  l'eçues  de  M.  le  Commandant  Bérenger  et  de  M.  Aram- 
BOiRG.  Le  premier  a  recueilli  à  Moudros  des  bois  fossilisés  qu'il 
a  adressés  à  M.  le  Préfet  dOran.  M.  Aramboirg  a,  de  son  côté, 
fait  une  découverte  très  importante.  En  faisant  creuser  des 
tranchées  dans  la  région  de  Saloniquf  il  a  niisi  à  jour  une  riche 
faune  de  mammifères  tertiaires  dimt  il  a  pu  recueillir  (!<•  nom- 
breuses pièces.  Ces  précieux  documents  feront  sans  doute,  plus 
tard,  l'objet  d'une  savante  étude  de  notre  jeune  collègue. 

Kst   proposé  comnie  membre  tilulairf   : 

-M.  Cambrou  Jean,  directeur  de  l'école  Saint-Antoine,  à  Oran, 
présenté  par  MM.  Doumergne  et  Conrrech. 

M.  le  Président  rtiid  compte  des  nouvelles  difficultés  que  va 
rencontrer  la  publication  du  Bulletin.  Il  donne  lecture  d'une 
lettre  de  M.  Fouque,  im|)rimeur.  par  laquelle  il  nous  avise  que 
l'augmentation  de  20  %  ([ue  nous  avons  acceptée  sera  portée 
à  33  %  après  la  publication  du  premier  fascicule  de  191 6. 
Cette  augmentation  est  motivée  par  ce  fait  que  le  papier  et  les 
couvertures  ont  subi  une  forte  hausse,  ce  qui  ne  justifie  pas  une 
augmentation  de  t3  ",'  sur  le  prix  glolial  de  la  facture.  Le 
Comité  trouve  cette  augmentation  sur  le  prix  global  injustifiée. 
Il  charge  M.  le  Président  de  présenter  ses  observations  à 
M.  Fouque,  espérant  qu'il  pourra  en  obtenir  des  conditions 
moins  onéreuses.  Le  Comité,  pour  faire  preuve  de  sa  bonne 
volonté,  accepte  d'avance  l'augmentation  sur  le  prix  des 
couvertures. 

M.  Pellet  rend  conijttf  d'une  correspondance  échangée  au 
sujet  des  fouilles  qui  s'exécutent  en  ce  moment  à  Relizane.  Le 
Comité  prie  M.  Pellet  de  vouloir  bien,  lors  de  son  prochain 
voyage  à  Relizane,  étudier  sur  place  cette  question. 

Le  Service  Météorologique  de  l'ihiiversité  d'Alger  annonce 
qu'il  commence  une  nouvelle  publication  périodique  des  relevés 
de  la  pluie  pour  l'Afrique  du  Nord.  Pour  répondre  aux  besoins 
de  l'agriculture,  il  sera  publié  trois  relevés  par  an,  se  rappor- 
tant aux  trois  périodes  agricoles  : 

De  prépanilinn,  allant  du  i^''  septembre  au  i"  décembre. 

De  (léveloppemenf,  allant  du  i*^""  janvier  au  3o  avril. 


PROGÈS-VKURAIX    UKS    lu'ilMO.NS   I)E    I,\   SOCIKIK  M^ 

J)c  n'snildis,  Mlliiiil  (In   i  ""  iiiiii  an  '.U  aunl. 

l  II  (jiialrit'iiu'   icIcNi'  ildiiiicia    les   (itlaiix   aiiiiiicls. 

(Iclle  anu'lioratidii  ilfs  plus  lii'in'<'iiscs  sera  jiisiciiiciil 
appit'ciri'. 

La  Socirl»'  a  iccn  pour  sa  liiMinl  |ir«|iic  les  (unia^n-s  sni\aiils   : 

De  \l.  (larcopiiio  :  SIn  Inix  lnii<'s  sur  di'^^  siiji'ts  épiî^ra|)lii(|U('s 
DU    ai(li(''(»loLri(pirs    rdiicci  iiaiil    iM^t'-ric   <•!    la    Tiillipie. 

|)c  lord  Hotiiscliild  :  l  ne  iiolc  sur  Les  Lépidaplères  <lii  (iiiell- 
cs-Slcl  (Sahara  cru  Irai  al^i'-ricii). 

|)(  -M.  le  capilaiiic  NOiiiol  :  Les  iicics  (l'Inislit.ilr  îles  éiiiKirrs 
cl  lies  MiiKKitins,  siiriniil  des  lieiii  Snassen,  et  les  opéralioiis 
effevliiées   par   les   Franrais,    luilnnimeiit    en    iS'tH. 

Des  renieiriemonls  sont   volés  aux   aulfiirs  (lonalcnrs. 

Klanl  iloiiiiéc  la  (lirficulli''  (IV'Ialilir  les  adresses  cxaclcs  triin 
irraiid  uoiiihrc  de  luciiilircs.  inol)iiisés  ou  non,  que  les  circons- 
tances acinelles  oui  cloi-rné  de  leur  domicile,  le  ('oiiiilé  décide 
(pi'il  ne  sera  pas  puMié  celle  année  une  liste  des  nicinltres  de  la 
Société.  Des  raisons  dt'Cdiiomie  rincitent  aussi  à  prendre  celle 
nicsnre. 

T.'ordri-  {\\]  Jour  élan!  épuisé,  la  séance  est   le\ée  à  (i  li.    (."). 

j'diir  le  Serréiaire  (jéiiéniL  Le  I^résidenl, 

Signé  :  FLAHAILÏ.  Si^nié  :  I)01MI-:K(;L  H. 


Commandant  Paul  BERTHON 


Mdi'l  ,111  cliiiiiip  (riiiMiiiciir  ! 

I.i-  cnicl  destin  a  oncort*  fraj)})»'-  parmi  cimix  di"  nos  sociélairrs 
(|ui,  au\  premiers  ran<rs  de  la  li(anes(|iie  mêlée,  ()[){)()senl,  à  la 
rnée  des  hordes  teiilonnes,  le  rem|)ait  de  leurs  [)oilrines  l'ran- 
çaises.  l.e  eommandani  Berthon  fl'anl- André- Antoine),  a  été 
Iné  à  l'ennemi  le  r>(i  mai   i9t5. 

Né  à  Alger  en  1889,  Paul  Berllion  se  destina  à  la  carrière  des 
armes.  Admis  à  l'Ecole  spéciale  militaire  de  Saint-C\r,  il  en 
sortit  en  1S90.  Nommé  sons-lienlenant,  il  se  consacra  d'aliord 
lont  entier  à  ses  fonctions  militaires,  ce  qui  ne  l'empêcha  |)as 
(le  poursui\re  certaines  des  études  commencées  à  Saint-Cyr. 
'["ravailleur  inl'atigahlc,  il  ])répara  la  licence  es  s<'icnces  et 
l'ohlint.  Versé  pins  particulièj'cinent  dans  les  sciences  topogra- 
])hiques,  il  se  fît  remarquer  par  un  important  travail  pour  lequel 
il  obtint  un  jiremier  prix  de  la  Société  de  Topo^-raphie  de 
France.  Ses  connaissances  spéciales  lui  valurent  d'être  nonmié 
membre  de  la  mission  militaire  française  au  Pérou,  dont  il  fil 
partie  de  1903  à  1908. 

Rentré  en  France,  il  fut,  quelques  années  après,  envové  an 
Maroc  où.  comme  capitaine,  il  fit  la  campairne  de  1912.  Trois 
fois  il  fut  cité  à  l'ordre  du  jour. 

La  «guerre  actuelle  1(>  ramena  en  France  avec  les  Iroujx's  du 
Alaroc.  Il  ])rit  part  aux  premiers  combats  et  fut  de*  la  bataille  di^ 
la  Aîarne  oîi,  le  6  septembre  1914,  il  tombait  grièvement  blessé. 
Sa  brillante  conduite  lui  valut  une  citation  à  l'Ordre  de  l'Armée. 
A  peine  remis  de  ses  glorieuses  blessures,  le  commandant  lîer- 
Ibon  demanda  à  reprendre  du  service  et,  à  la  tète  d'un  bataillon 
d'infanterie,  fit  partie  du  corps  expéditionnaire  des  Dardanelles. 

Hélas  !  il  ne  devait  pas  revoir  la  lielle  terre  de  France.  Le 
lif)  mai   191.").  il  tombait  frappé  à  mort  devant  Scdduil  Bahr. 

Ainsi  se  termina  une  carrière  si  bien  remplie  et  tro])  loi  biisée. 

Les  services  rendus  par  le  commandant  Berthon  avaient  été 
hautement  reconnus,  ainsi  (pi'en  témoignent  les  distinctions 
ipii  lui  avaient  été  accordées. 

Ofïicier  de  la  Légion  d'honneur,  il  était  aussi  titulaire  de  la 
Croix  de  guerre,  de  la  Médaille  du  îMaroc,  de  la  Médaille  colo-. 
niale,  de  la  l'osette  d'officier  de  l'Instruction  publique  et  de  la 
Médaille  de  la  IMutualité. 

Aux  justes  liommai/es  qui  ont  été  rendus  au  comman<laul 
Berthon,.  la  Snricfé  de  Ccoijrnphie  et  frArclicologie  d'Ornn  se  fait 
im  devoir  de  joindre  les  siens.  Ft  c'est  a^ec  un  sentiment  de 
profonde  affliction,  (jii'au  nom  de  tons  les  sociétaires,  je  renou- 
velle à  Ahidame  veuve  Berthon  et  à  sa  famille  l'expression  de  nos 
condoléances  les  plus  attristées. 

F.  D. 


NECROLOGIE 


115 


léopold  français 


'>''•"  iV'Niicr  i,,i(l  r<i  ,|r,-,'.,l--.  ;,  On.ll,  -,  IV.rr,.  ,|,.  f,-,  an-, 
M.  I.r()|)..l(l  Fraiiriiis.  en  I  iviMctinir  .le  (ni\ini\  |)n|.|i,s,  „i,.Mil>ir 
(le  lioirc  Socu'lr. 

-Noire  codl'irn    riait   iir  à  Oraii. 

CoiMiiic  son  [)èic.  (ioiil  il  a  élé  |».  din^ne  successeur,  M.  Léopold 
iM-aiiçais  laisse  Ja  ivi.iilalioii  .iMn  enlreprenenr  instniil  cl 
inhVre  incapal.jc  d.-  sacrifier  la  .lualilé  de  ses  c(.iislni(li..iis.  soil 
''  '"  '■•■<'l'-nlie  dun  l-énéliee  exa-érc,  soil  mèiiie  aux  exi-cnces 
'!'■  i'iopnélaires.  s(.u\e,il  pins  soucieux  d  ecoiioii,i.-s  injusiifiées 
«!"<■  '!<■  la  slal.ililé  et  dv  la  l.on.ne  constnictiou  de  |,.,„.s  iuimeu- 
Mcs.  Inirailahie  sous  er  rapport,,  il  prélerail  s'ahsleiiir  cl 
'■'•""■'«vr  aux  .•ntrepris,.s  ,p,i  auraient  pu  nuire  à  s.m.  l.on  renom 
de  constructeur. 

Modeste  et  réservé,  il  sVtail  t..ujours  dérohr  aux  honneurs  e| 
aux  fonctions  pnl.li.p„.s  aiix.piell.s  sa  coinpélence,  son  carac- 
tère et  sa  sdualion   indé()endante  paraissaient   le  destiner 

Au  unui  ,1e  la  Société,  nous  saluons  sa  niénioin-  et  renouve- 
lons a  tous  I..S  siens  l'expression  d,.  „(.s  condoléances  altrisl.'.es 


M'  Charles   MESRINE 


In  de  nos  bien  sympathiques  confrères  vient  encore  de  nous 
être  ravi,  c  est  AP  Mesrine,  le  distinoné  avoné  d'Oran,  décédé  je 
22  mars  1916.  ■ 

Depuis  .son  installati..n  ,lans  n,.tre  ville,  il  v  a  six  on  sept  ans 
Il  avait  tenu  à  faire  partie  de  notre  Société,  dont  il  comprenaii 
1  action  s.  utile  dans  cette  partie  de  l'Afriqne  du  Nord.  Ses  occu- 
pat.ons  nombrenses  rempéchaient  de  prendre  une  part  active  à 
nos  travaux,  mais  nous  savons  par  quelqnes-uns  de  ses  collè-nes 
qii  II  s  y  intéressait  vivement. 

Cela  ne  nous  surprend  pas,  W  Mesrine  était  un  homm,- 
d  affaires  d  une  très  hante  valeur  et  sa  disparition  a  été  un  <leuil 
h  en  cruel  pour  le  monde  judiciaire  oranais,  pour  les  justicia- 
l.les  qu,  recherchaient  les  conseils  avisés  de  ce  très  distinfrué 
pral.cie^^  Il  a  été  enlevé  dans  la  pleine  maturité  de  son  tahMit 

et  de  ses  nombreux  amis. 

Tu.  :\I. 


CERCLE    DE    MÉCHÉRIA 

13X3 


1 


DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  L'HISTOIRE  OES  HAMYIIN 

et  de  la  Région  qu'ils  occupent 


Cil  M'Illii:  Mil   (Snilc) 


lîMH.  —  Au  coiiiniciicciiiciil  (le  riiiiiiéc,  les  Boni  Ciiiil 
savaiicèicnt  ncis  ritiicst,  Mir  U^  Icriiloire  du  cercle  de 
Mécliéiiii,  [)lus  loiu  (|u"il>  navaieul  coutume  de  le  faire. 
Ce  niom  (Miiciit  amena  une  ccrlaiiic  aj^nlalion  (|ui  lit  crain- 
dre des  inleiitious  hostiles  de  leur  pail.  Pour  parer  à  tout 
é\éii('m('tit,  plusieurs  colonnes  lurent  formées.  L'une 
(rdles,  composée  essenlielicment  de  deu\  compagnies  de 
I. railleurs  et  d'un  escadron  de  chasseurs,  séjourna  tem[)<»- 
raircment  à  l']l-Aricha  ;  les  mouvements  des  Hcni  (iuil 
n  amenèrent  aucune  complication. 

Au  mois  de  juillet,  Si  Allai  lien  Cheikh  Ben  Ta\eh,  chef 
des  Zoua  Gheraba,  vint  s'installer  à  Magoura  (^annexe  d'EI- 
Aricha)  avec  son  douar  comprenant  environ  aoo  tentes.  Il 
fut  autorisé  à  creuser  des  silos  en  cet  endroit.  Il  (juilla 
Magoura  au  commencement  d'octobre  ;  ses  relations  avec 
les  indigènes  algériens  ne  laissèrent  rien  à  désirer. 

Au  Maroc,  une  lazzia  fut  opérée  au  mois  de  mai,  près  de 
Debdou,  sur  les  Ilaouara  et  les  Oulad  El  lladj  par  les  Béni 
Guil,  les  Mehaïa,  les  Béni  Mathar  et  les  Zoua  GluMaba  de 
Ben  Fekchiche. 

Les  Béni  (iuil  et  leurs  alliés  enlevèrent  une  centaine  de 
chameaux  à  leurs  ennemis  après  un  combat  où  ils  euient 
sept  tués,  tandis  que  leurs  adversaires  en  avaient  eu  neuf. 

Au  mois  de  juin  mourut,  à  la  suite  d'une  courte  maladi(\ 
Mohannned  Ben  Felvchiche,  neveu  de  Si  Allai,  dont  il 
s'était  séparé  avec  i?.o  tentes. 

Après  sa  mort,  '40  lentes,  constituant  la  fraction  des 
Oulad  Sidi  El  lladj  Biahim,  levinrent  dans  le  douar  de  Si 
Allai. 

Les  Béni  (mil,  désireux  d'assurer  leurs  approvisionne- 
ments de  giains,  se  rendiriMit.  au  nombre  de  /|00  cavaliers, 
auprès  du  caïd  des  Mehaïa  ipTils  iiMiconlièrenl  à  Tiouli,  au 
mois  d'août. 

Ils  allèrent  ensuite  lous  ens(iid)le  à  (")udjda.  A  la  suite 
de  celte  démarche,  le>  Béni  (îuil  purent  ïn'wv  tranquille- 
ment leurs  achats. 


10 


118       DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  IIAM^XN 

Au  mois  d'août,  les  Scdjaa  et  les  Béni  Attigue,  sous  les 
ordres  du  caïd  Boulenouar  ould  El  Habib,  razzièrent  quel- 
ques douars  des  Béni  Snassen. 

Au  mois  de  novembre,  un  djich  de  ko  hommes,  des 
Oulad  Sidi  Ali  Bou  Chenafa,  enleva  un  troupeau  de  mou- 
tons aux  Béni  Mathar,  près  de  Bas-el-Aïn  (Berguent). 

La  mort  de  l'amel  d'Oudjda,  survenue  à  la  fin  de  l'année, 
ne  provoqua  aucun  incident. 

1902.  —  Au  commencement  de  l'année  1902,  les  tribus 
avoisinant  le  cercle  de  Méchéria  traversèrent  une  période 
d'agitation.  Les  tribus  campées  près  du  chott  Gharbi  étaient 
très  mécontentes  de  l'installation  des  Hamyan  au  chott  et 
dans  l'Oued  Mesakhsa. 

Le  caïd  El  Iladj  Miloud  voulut  profiter  de  cet  état  de 
choses  pour  pousser  sa  tribu  vers  l'Est,  mais  il  ne  put  y 
réussir,  pas  plus  qu'à  entraîner  dans  ce  mouvement  Si  Allai 
et  le  caïd  Abderrahman,  des  Béni  Guil. 

Tayeb  ould  Bon  Amama,  arrivé  chez  Si  Allai  à  la  fin  de 
janvier,  lui  offrit  un  cheval  de  gada  ;  le  sujet  de  son  voyage 
était  d'arriver  à  réunir  toutes  les  fractions  des  Oulad  Sidi 
Cheikh  Gheraba  sous  les  ordres  de  Si  Allai. 

Tayeb  ould  Bou  Amama  passa  ensuite  chez  les  Mehaïa  et 
les  Béni  Guil  où  il  recueillit  de  grosses  ziaras. 

En  mars,  Bou  Amama  qui  était  installé  à  Bel  Ghiada, 
reçut  des  miads  des  Mehaïa  et  des  Béni  Guil  et  leur  déclara 
qu'il  attendait  les  instructions  du  Sultan  sur  la  conduite 
qu'il  devait  tenir  et  sur  le  lieu  oii  il  se  fixerait.  Il  refusa  le 
concours  de  quelques  chefs  Beraber  qui  lui  proposaient 
une  expédition  contre  les  Français. 

Les  Beraber  se  déclarèrent  ouvertement  indépendants  et 
dirent  qu'ils  ne  voulaient  plus  entendre  parler  du  Sultan, 
puisque  celui-ci  avait  refusé  de  les  aider  à  repousser  les 
Français  de  chez  eux. 

Ils  se  réconcilièrent  avec  les  Béni  Guil  à  la  suite  de 
démarches  faites  de  part  et  d'autre,  mais  surtout  grâce  à 
l'intervention  de  Bou  Amama. 

En  avril,  le  bruit  se  répandit  dans  l'amalat  d'Oudjda  que 
la  Commission  Franco-Marocaine  était  allée  à  Kenadsa  pour 
s'entendre  avec  les  Beraber,  mais  que  Si  Mohammed  Gueb- 
baz  avait  an  partir  sans  y  avoir  réussi. 

En  mai,  les  Mehaïa  quittèrent  le  chott  Gharbi  pour 
remonter  vers  Tiouli  et  s'installer  aux  environs  de  ce  point. 

Les  Beraber,  qui  ne  tenaient  plus  compte  de  Moulay 
Bachid,  agirent  en  maîtres  au  Tafilalet  et  cherchèrent,  en 


DOCLMEN  J  s  1>01  R  SERN  IR  A  1,'llISTOIRE  DEî?  Il AMYAN        l  lU 

vain  d  ailK'iirs,  à  i)i<)V(j(jii(>r  des  Inuiblcs  chc/  les  liil>ii<  qui 
les  avoisinaionl. 

En  juillet,  le  bruit  courut  qu'une  colonne  allait  être 
envoyée  par  le  Sultan  à  Oudjda.  Le  nouvel  amel,  arrivé 
depuis  le  cominencenieiit  de  Tannée,  faisait  dans  ce  but, 
disait-on,  des  approvisionnements  d'orge. 

Des  actes  de  brigandage  furent  commis  à  la  frontière 
algérienne  par  des  malfaiteurs  marocains  et  quelques-uns 
d'entre  eux  s'avancèrent  même  jus(pren  territoire  civil 
(communes  mixtes  de  Sebdou  et  du  'réiagli). 

Le  •22  juillet,  plusieurs  Marocains  enlevaient  un  trou- 
peau de  moutons  et  de  chèvres  près  du  Khémis  cercL;  d<; 
jMarniaj,  mais  le  caïd  des  Oulad  .Néhar  (Jheraba  prévenu, 
reprenait  les  moutons  à  Saheb  Dahmane. 

Bou  Amama  élail  toujours  campé  aux  environs  de 
Nécissa  ;  il  ne  disait  rien  sui'  la  conduite  (piil  tiendrait,  cai- 
il  craignail  également  le  (iouxernement  français  et  celui  du 
Sultan. 

De  leur  coté,  les  Beraber  ne  parvenaient  pas  à  s'entendre 
pour  organiser  un  coup  de  main  sérieux  contre  nous. 

Le  19  août,  une  harka  composée  de  Hamyan  quitta  Aïn- 
Ben-Khelil  pour  razzier  des  Oulad  Djerir  du  campement  de 
Bou  Amama,  cpii  leur  avaient  enlevé  des  chameaux. 

Il  n'y  eut  aucune  rencontre,  mais  les  Hamyan  enlevèrent 
20  chameaux  et  2.000  moutons. 

Avant  ce  mouvement,  Bou  Amama,  prévenu,  dit-on,  par 
les  Meghaoulia,  avait  quitté  Nécissa  pour  Bel  Gorin  el  Bel 
Ghiada. 

Les  tribus  voisines,  les  Mehaïa  et  les  Béni  Guil,  se  mon- 
trèrent mécontentes  de  la  razzia  des  Hamyan,  opérée  sur 
des  serviteurs  de  Bou  Amama.  On  prétendit  que  ce  dernier, 
à  la  suite  du  mouvement  des  Hamyan,  avait  autorisé  son 
entomage  à  user  contre  nous  de  représailles  et  à  pillei-  tout 
ce  qu'ils  pourraient  surprendre. 

En  septembre,  les  tribus  marocaines  manifestèrent 
toutes  leur  déplaisir  de  voir  le  sultan  Moulay  Abd-el-Aziz 
interdire  aux  Beraber  toute  attaque  contre  nous. 

En  octobre,  les  bruits  les  plus  divers  circulèrent  chez  les 
Mehaïa  et  les  Béni  Guil  au  sujet  du  Sultan  ;  on  prétendit 
qu'il  avait  été  détrôné  ou  allait  l'être,  et  personne  ne  cachait 
le  peu  de  sympathie  qu'on  avait  pour  lui. 

Enfin  la  nouvelle  se  répandit  que  le  Sultan  avait  été  rem- 
placé, (pi'il  avait  été  fait  prisonnier  et  allait  être  mis  à  mort. 

En  décembre,  les  Mehaïa  assurèrent  que  c'était  le  propre 


120     DOCL.ME.vrs  POUR  SERVIR  A  l'justoike  des  hamyan 

frère  du  Sullaii  (lui  s'ûtail  lebellé  contre  lui,  et  non  un 
agitateur  quelconque. 

On  apprit  peu  après  l'exode  annuel  des  Béni  Guil  pour  le 
Sahara,  au  Sud  du  Talilalct. 

lîou  Ainania,  à  la  même  époque,  reçut  une  lettre  éma- 
nant, disait-on,  du  frère  de  Moulay  Abd-el-Aziz,  Moulay 
M'hannned,  mais  on  en  ignora  le  contenu.  Cependant,  en 
signe  de  contentement,  l'entourage  de  Bou  Amama  mani- 
festa ouvertement  la  plus  grande  joie  pendant  les  deux 
jouis  (pii  suivirent  sa  réception. 

Les  Mehaïa  disaient  que  Bou  Amama  allait  sortir  de  sa 
tranquillité,  et  connnencer  à  combattre  les  infidèles  ;  ils 
annonçaient  sa  rentrée  à  Figuig. 

Si  Allai,  (]ui  était  venu  se  réinstaller  à  Magoura  en  mai, 
(piitta  de  nouveau  ce  point  de  campement  dans  les  dernieis 
jours  d'octobre  pour  se  rendre  à  l'Oued  Mesakhsa. 

En  résumé,  nos  voisins  de  l'Ouest  ne  firent  au  cours  de 
cette  année  aucune  tentative  sérieuse  contre  nous  et  les 
intentions  hostiles  qu'ils  manifestaient  au  commencement 
de  Tannée  ne  furent  pas  suivies  d'exécution. 

Il  ne  fallait  du  reste  attribuer  ce  résultat  (ju'au  manque 
absolu  d'entente  entre  les  divers  groupes,  dont  quelques- 
uns  a^  aient  une  crainte  salutaii'c  de  nos  armes. 

WW'i.  —  Le  début  de  l'année  1908  fut  marqué  au  Maroc 
•Oriciilal  par  une  certaine  effervescence,  due  à  l'apparition 
et  à  la  réb(  Jhon  du  Prétendant. 

La  personnalité  de  ce  derniei'  resta  inconnue  et  les  bruits 
les  plus  divers  ne  cessèrent  de  circuler  à  ce  sujet  ;  mais 
|)our  piesque  tous  les  indigènes,  marocains  ou  algériens,  il 
était  Moulay  M'hammed,  le  frère  du  Sultan,  échappé  des 
prisons  de  Méquinez. 

Les  Marocains  venant  chez  nous  exprimèrent  l'opinion, 
généralement  répandue  paimi  eux,  que  Moulay  Abd-el-Aziz 
était  déjà  battu  et  que  son  frère  sciait  bientôt  le  maître  du 
Maroc, 

Cependant,  nos  voisins  immédiats,  Mehaïa  et  Béni  Guil,- 
se  bornèrent  à  faire  des  vœux  pour  les  succès  du  Préfen- 
dant, sans  lui  prêter  aucun  appui. 

Quant  aux  Béni  Snassen,  ils  lui  livrèrent,  vers  la  mi- 
janvier,  une  lutte  sanglante  au  Nord  du  Djebel  Béni  Snas- 
sen et  le  caïd  Boulenouai-  ould  Lliabil)  fut  tué. 

Bou  Amama  adressa  à  Si  Allai  des  lettres  pressantes  et 
des  envoyés  pour  le  décider  à  se  joindre  à  lui.  On  lui  attri- 


DOCUMENTS  POUR  SFRVIK    \  r.'llis  tOIHK  URS  l!\MV\N       121 

l)ii;i  ririlciilioii  de  miiiclu'r  contre  nous,  (1rs  (|iic  le  iiiiii;i- 
hoiil  (les  /oiiii  (ilicial);i  rauiiiil  rejoint. 

Les  Heni  (iiiil,  dans  le  l)iil  de  d(''eider  Si  \llal  à  les 
lejoiiidre,  lui  ra//,ièrenl  douze  troupeaux  de  moulons,  mais 
les  lui  rendiieni  peu  a[)rès,  en  lui  envoyant  un  miad 
iionibceux. 

Vax  février,  une  scission  complète  se  fil  entre  les  iieiii 
Ci'uil  et  les  Ilam\an,  par  suite  du  refus  de  ra<îha  de  Méché- 
ria,  blessant  pour  les  Béni  Guil,  de  venir  s'entendre  avec 
eux,  pour  le  lèii'Iement  de  leurs  intérêts  chez  Si  Allai. 

Pendant  ce  temps,  Bon  Amama  reçut  de  nombreuses 
lettres  du  Préteiidanl,  mais  il  ne  parvint  pas,  malgré  ses 
efforts,  à  s'attacher  complètement  les  Béni  Ciuil  e|  les  Bera- 
bei'.  n  se  lappi'ocha  de  Kiguig  et  on  lui  })réta  l'intenlion  d'y 
entrer. 

Si  Abdelmalek  ould  El  Iladj  Abdelkader,  descendant  de 
l'émir  VA  Uadj  Abdelkader,  rejoionit  le  marabout  cl  campa 
avec  lui. 

On  raconta  (fue  le  Prétendant  était  à  Taza,  on  lui  attribua 
des  victoiies  successives  et  complètes  sur  les  troupes  du 
SuHan,  mais,  malgré  ces  bruits  flatteurs,  les  tribus  maro- 
caines voisinc's  ne  se  décidèrent,  tout  d'abord,  à  prendre 
[)arli  ni  pour  l'un,  ni  pour  l'autre  des  combattants. 

L'arrivée,  en  mars,  de  Moulay  Arafa  à  Oudjda,  ne  vint 
pas  relever  le  prestige  du  Sultan  et  le  bruit  comut  même 
(jue  son  envoyé  avait  été  arrêté  et  emprisonné  par  ordre  de 
Moulay  M'hammed. 

Les  ïlamyan  se  prétendirent  à  plusieurs  reprises  razziés 
par  les  Béni  Guil  v\  leurs  alliés,  et  les  partisans  de  Bon 
Amama  exécutèrent  de  nombreux  coups  de  main  autour  de 
Figuig  et  dans  le  Sud. 

Bon  Amama,  qui  était  installé  près  de  Bel  Ghiada,  suscita 
et  dirigea  toutes  ces  attaques  ;  celles  du  Sud  furent  exécu- 
tées par  les  gens  de  son  entourage. 

En  avril,  on  annonça  l'arrivée  du  Prétendant  à  Oudjda, 
mais  il  s'arrêta  chez  les  Béni  Bon  Zeggou,  puis  se  rendit  aux 
environs  de  Melilla. 

Moulay  Arafa  qui  avait  essayé  de  former  une  harkaciintic 
l(^s  Béni  Bon  Zeggou,  les  Sedjaa  et  les  Béni  Mahiou,  vif  ses 
contingents  battus  par  suite  de  la  défection  des  Mehaïa. 

El  Hadj  Mohammed  Ben  Bachir,  des  Béni  Snassen.  fui 
obligé  de  chercher  un  refuge  sur  notre  territoire  et  Moulay 
Arafa  se  retira  également  à  Marnia  pom-  s'embarquer,  peu 
après,  pour  Tanger. 


122       nOCl  MENTS  POUR  SERVIU  A  l'jUSTOIRE  DES  HAMYAN 

Après  Ja  défaite  de  la  harka  formée  par  le  Makhzen,  les 
Mehaïa,  ainsi  que  presque  toutes  les  tribus  qui  avoisinaient 
notre  territoire,  embrassèrent  la  cause  du  Prétendant  Mou- 
lay  M'hammed. 

Seuls,  les  gens  d'Oudjda,  certainement  par  crainte  de 
voir  arriver  le  Prétendant  et  de  subir  des  amendes,  restè- 
rent fidèles  au  Sultan,  espérant  que  le  Makhzen  ne  les  aban- 
donnerait pas. 

Si  Allai  se  rendit  à  Sidi  Yahia  Ben  Younès  pour  avoir  une 
entrevue  avec  Moulay  Arafa,  le  représentant  du  Makhzen  ; 
ce  dernier  lui  demanda  de  s'employer  pour  la  cause  de 
Moulay  Abd-el-Aziz  et,  au  besoin,  de  l'aider  de  ses  forces. 

La  situation  s'envenima  entre  les  Hamyan  et  les  Béni 
Guil,  à  la  suite  de  nombreux  vols  réciproques. 

Bou  Amama,  pendant  ce  temps,  annonçait  les  succès  du 
Prétendant  et  lançait  les  gens  de  son  entourage  sur  nos 
convois  et  nos  postes  du  Sud. 

En  mai,  le  marabout  transporta  ses  campements  à  Bou 
Grara  ;  de  là,  il  continua  à  diriger  le  pillage  et  les  attaques 
contre  nos  caravanes  du  Sud. 

Nos  indigènes  algériens  marquèrent  leur  surprise  de  ce 
que  nous  ne  réprimions  pas  les  actes  de  brigandage  commis 
depuis  le  Teniet  Sassy  jusqu'au  Sud  de  nos  possessions  et 
attribuèrent  cette  inaction  au  prestige  de  Bou  Amama, 
contre  lequel  ils  pensèrent  que  nous  ne  pourrions  rien. 

Le  Prétendant  se  tenait,  de  son  côté,  toujours  loin 
d'Oudjda  quoique  sa  venue  dans  cette  ville  fut  constam- 
ment annoncée. 

Son  retard  était  évidemment  causé  par  le  peu  d'empres- 
sement que  mettaient  à  le  rejoindre  les  contingents  qu'il 
avait  demandés. 

11  attendait  ses  renforts  à  Selouane  et,  de  là,  par  Gherraa, 
devait  bientôt  arriver  sur  Oudjda. 

Le  bruit  se  répandil  qu'il  n'était  pas  le  fière  du  Sultan  et 
que  ce  dernier  était  actuellement  à  la  cour  de  Fez  ;  de  nom- 
breux indigènes  qui  l'avaient  approché  confirmèrent  ce 
renseignement,  mais  il  n'en  resta  pas  moins  populaire  et 
toutes  les  tribus  qui  nous  avoisinent  embrassèrent  ouver- 
tement sa  cause  et  lui  envoyèrent  de  nombreux  présents. 

Le  Prétendaul  niiillipha  ses  lettres  à  tous  ;  il  en  fit  par- 
venir à  Bou  Amama  avec  des  cadeaux,  il  en  adressa  à  Si 
Allai,  ainsi  (ju'à  toutes  les  tribus  et  même  à  ceux  de  nos 
indigènes  des  llamyan  les  plus  en  vue. 

Cependant,  la  réunion  faite,  en  avril  if)o3,  au  Kreider,  à 


DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN       123 

l'occasion  de  la  venue  du  Président  de  la  République  et  la 
revue  des  nombreuses  troupes  qui  y  fut  passée,  ranimèrent 
la  confiance  de  nos  administrés  qui  continuèrent  à  rester 
calmes  en  présence  de  l'agitalion  croissante  de  nos  voisins 
de  l'Ouest. 

Si  Allai  ayant  reçu,  par  j'inlermédiaire  de  Si  Ahmed  Ro- 
kina,  des  lettres  du  Sultan  l'invitant  à  pièter  son  concours 
à  sa  cause,  se  rendit  avec  une  partie  de  son  goum  à  Oudjda, 
d'ori  il  revint  le  i3  juin. 

Le  Prétendant  arriva  enfin  à  Oudjda  le  26  juin,  pendant 
que  son  lieutenant,  El  Hadj  Abdelkader  Ren  Hacira,  inlli- 
geait  une  défaite  aux  troupes  du  Makhzen  commandées  par 
Omar  El  Youssi. 

Rou  Amama  envoya  au  Prétendant  victorieux  des  lettres 
et  des  présents  ([iii  lui  furent  portés  par  son  frère  utérin, 
Si  Mohammed  Ren  Zian.  Le  miad  comprenait  aussi  les  fils 
du  caïd  Abderrahman,  des  Reni  Guil,  qui  lui  remirent  des 
chevaux  et  des  cadeaux. 

L'attaque  de  Zenaga  et  le  bombardement  de  foasis  de 
Figuig,à  la  suite  de  l'attentat  contre  le  Gouverneur  Général, 
M.  Jonnart,  n'eurent  pas  de  retentissement  chez  les 
Hamyan,  ni  chez  leurs  voisins  de  l'Ouest  ;  du  reste,  pour 
eux,  ce  châtiment  n'atteignit  pas  les  coupables,  et  ils  furent 
toujours  convaincus  que  Rou  Amama  et  ceux  qui  lui  obéis- 
saient étaient  en  dehors  de  nos  moyens  d'action.  La  conti- 
nuation des  nombreux  et  nouveaux  méfaits  dans  le  Sud, 
commis  par  les  gens  de  l'entourage  du  marabout,  sembla 
leur  donner  raison. 

Une  caravane  de  Moul  Sehoul,  du  Guir,  apporta  dans 
notre  région  les  nouvelles  que  la  tranquillité  n'était  pas 
troublée  au  Tafilalel  et  que  Moulay  Rachid  s'occupait  de 
former  un  goum  destiné  à  être  envoyé  à  Fez. 

Pendant  le  séjour  du  Prétendant  à  Oudjda,  les  bruits  les 
plus  divers  circulèrent  sur  ses  intentions  ;  suivant  les  uns, 
il  devait  se  rendre  à  Ras-el-Aïn  (Rerguent)  pour  y  faire 
construire  une  casbah  ;  suivant  les  autres,  il  devait  repren- 
dre sa  route  vers  le  Nord. 

Mais  on  apprit,  le  12  juillet,  que  Moulay  M'hammed  avait 
quitté  Oudjda  depuis  deux  jours  et  qu'il  s'était  retiré  sur 
l'Oued  Za  pour  se  rendre  ensuite  à  Taza. 

D'autre  part,  on  annonçait  qu'Abdelmalek,  petit-fils  de 
l'émir  Abdelkader,  fatigué  de  l'inaction  qui  lui  était  impo- 
sée chez  Rou  Amama.  s'était  enfui  poui"  rejoindre  le  Pré- 


124      DOCUMENTS  POIR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

tendant  à    El    Aïoun    Sidi    Mellouk  et   ([u'il    avait  reçu  le 
conimandenienl  dune  colonne. 

Quant  à  Moulay  JM'liamniod,  son  sort  n'était  pas  connu 
depuis  ce  moment  ;  les  uns  disaient  que,  blessé,  il  avait  été 
gravement  malade,  mais  qu'il  s'était  complètement  réta- 
bli ;  les  autres  assuraient  f|u'il  était  mort  des  suites  de  ses 
blessures. 

En  tous  cas,  si  ses  nombreuses  lettres  continuaient  à 
alîiuer  dans  toutes  les  tribus  marocaines,  nul  ne  pouvait 
se  vanter  de  l'avoir  vu,  en  personne.  Quelques  uns,  même, 
disaient  qu'il  était  en  fuite  vers  le  Sud.  Environ  un  mois 
après  le  départ  de  Moulay  M'hammed,  Oudjda  était  réoc- 
cupé par  les  troupes  du  Makhzen. 

Bou  Amama  vint  s'installer  à  Métarka  avec  yjresque  tous 
les  Béni  Guil.  Tl  continua  de  prêcher  la  guerre  à  son  entou- 
rage qui,  uni  aux  Beraber,  faisait  de  nombreuses  attaques 
contre  les  nôtres  dans  le  Sud. 

Une  harka  considérable,  composée  de  Doui  Menia  et  de 
Chaamba  de  l'entourage  de  Bon  Amama  et  de  Beraber, 
attaqua  dans  la  Saoura  le  poste  de  Taghit,  le  i8  août  ;  mais 
elle  fut  démoralisée  par  une  résistance  qu'elle  ne  s'attendait 
pas  à  trouver  et  par  les  nombreuses  pertes  que  lui  fit  subir 
l'héroïque  capitaine  de  Susbielle,  chef  de  l'annexe  de 
Taghit  ;  elle  se  retira  et  se  disloqua  peu  après. 

Malgré  l'insuccès  de  cette  entreprise;  Bou  Amama  et  ses 
gens  n'en  firent  pas  moins  courir  le  bruit  qu'il  y  avait  eu 
un  nombre  considérable  de  victimes  chez  les  nôtres.  Sa 
version  était  d'autant  plus  écoutée  qu'un  groupe  dé  la 
harka  de  Taghit  qui,  après  la  levée  du  siège  de  cette  place, 
avait  attendu  l'occasion  d'effectuer  unt^oup  de  main,  avait 
attaqué  un  des  échelons  de  la  colonne  de  secours  à  Moun- 
gar  ;  le  combat  avait  duré  toute  la  journée  et  les  assaillants 
n'avaient  été  mis  en  fuite  que  par  l'arrivée,  vers  f\  heures  du 
soir,  des  goums  de  Taghit.  La  compagnie  montée  du 
•>*  Etranger,  commandée  pai-  le  capitaine  Vauchez,  avait  été 
cruellement  éprouvée. 

Si  Allai  qui  était  parti  chez  les  Angad  à  la  rencontre  du 
représentant  du  Makhzen,  depuis  la  fin  du  mois  de  juillet, 
rentra  le  •?.  août  à  Magoura,  après  avoir  eu  certaines  dilfi- 
cultés  avec  Si  Ahmed  Bokina. 

Ees  Béni  Guil  enlevèient  quelcjues  troupeaux  au  Sud  des 
chotts  et  commirent  plusieurs  vols  aux  environs  d'El-Ari- 
cha,  au  préjudice  des  Hamyan. 


DOCUMENTS  POUR  SERVIH  A  u'niSTOlRE  DES  HAMYAN      125 

\a'  brilil  se  irpandil  (|iic  le  rrriciidant  avait  conquis 
Ta/.;i  ;  aussi  s»>s  pailisniis  icpi  iicnl-ils  les  hostilités. 

Le  •'.  scpicmbrc,  une  liaïka  du  Maklizcii  marocain,  com- 
posée do  soldais  cl  de  j4(>iiins  des  Anfifad  et  des  iVlehaïa,  fut 
défaite  par  les  Béni  Hou  Ze-ifiou  (jui  firent  \  soldats  prison- 
niers et  enlevèrcjit  3  pièces  de  ciinon. 

Mais  le  '>o  septembre,  le  Makhzen  icpiit  l'avantage  sui- 
tes partisans  de  Moulay  M'hammed  et  leur  fit  subir  d'assez 
grosses  [)ertes. 

(iC  succès  mit  fin,  en  [)artie,  aux  razzias  et  aux  combats 
isolés  qui  avaient  lieu  entre  les  partisans  du  Sultan  et  ceux 
du  Prétendant. 

r.es  Béni  (iuil  eurent  une  caravane,  reveuani  de  Marnia, 
razziée  le  i3  octobre,  près  d'Oudjda,  |)ar  les  Mcbaïa  et  les 
soldats  du  ]\[akhzen. 

D'autre  i)art,  les  Béni  Guil  enlevèrent,  près  de  (Jalloul, 
treize  troupeaux  de  moutons  aux  Ilamyan  et  commirent 
deux  aufn^s  vols  de  moutons  près  du  chott  Gharbi  et  dans 
l'Oued  El  Ilarmel  (cercle  de  Méchéria). 

T,es  Oulad  Mansourah  et  les  Béni  Metharef  se  miicnt  à 
la  poursuite  des  voleurs,  les  dispei'sèi-ent  à  Ouziane,  mais 
ne  purent  ramener  les  troupeaux  par  suite  de  l'arrivée  des 
Béni  Mathar  qui  vinrent  aider  les  voleurs. 

Sur  ces  entrefaites,  les  Béni  Guil  engagèrent  des  pour- 
parlers avec  Si  Allai  pour  arriver  à  faire  la  paix  avec  les 
Hamyan,  mais,  au  moment  où  les  négociations  s'enta- 
maient, un  groupe  de  20  cavaliers  Béni  Guil  se  détacha 
d'une  caravane  qui  se  rendait  à  Mainia  et  vint  de  nouveau 
lazzier  les  Hamyan. 

Ceux-ci  poursuivirent  les  malfaiteurs  et  reprirent  leurs 
moutons  près  de  Bas-el-Aïn  des  Béni  Mathar  fBerguent). 

L'agha  El  Hadj  El  Habib  ould  Mebkhout  prétendit  alors 
(pie  Bon  Amama,  craignant  que  la  paix  se  fasse,  prêchait 
la  Guerre  Sainte  à  son  entourage  et  cherchait  à  réunir  des 
Béni  Guil,  des  Oulad  Djerir  et  des  Chaamba,  en  tout  près 
de  T. 000  fantassins  et  too  cavaliers,  pour  les  lancer  sur 
Aïn-Ben-Khclil. 

Sous  prétexte  de  faiie  échouer  son  plan,  il  réunit  les 
Hamyan  et,  avant  (pi'aucun  rassemblemi^nt  n'ait  été  effec- 
tué chez  nos  voisins  de  l'Ouest,  il  se  lança  sur  eux  et  les 
razzia. 

Pendant  ce  temps,  un  autiT  goum  des  Hamyan  sm-prit 
d'autres  Béni  Guil  à  Oglal  Cedra  et  leur  enleva  un  immense 


126       UOGUMEM'fi  l»OI   K  SERVIi^  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

butin  compreiuuil  :^.20o  chameaux  et  environ  vingt-cinq 
mille  moutons. 

En  iin  novembre,  les  Ilamyan  se  retirèrent  à  l'Est  des 
cholts  et  les  lieni  (luil,  avec  Hou  Amama,  s'installèrent  à 
ïradit  en  attendant  l'arrivée  du  Prétendant  à  Oudjda,  qui 
était  annoncée  pour  la  iin  du  liamadan. 

Le  bruit  courut,  à  la  lin  de  l'année,  que  3oo  cavaliers  des 
Béni  Guil  avaient  été  envoyés  par  Bou  Amama  auprès  de 
Moulay  jM'hammed  pour  le  ramenei'  à  Oudjda,  mais  ce 
bruit  fut  démenti. 

Ea  colonne  du  Makhzen,  (|ui  était  allée  à  El  Aïoun  Sidi 
Mellouk,  rentra  à  Oudjda,  laissiint  une  g-arnison  à  la  casbah, 
mais  l'arrivée  des  colonnes  du  Prétendant  fut  sulïisante 
pour  que  les  troupes  du  Sultan,  qui  n'étaient  plus  soldées, 
lissent  défection  et  vinssent  s'enrôler  dans  les  bandes  des 
lieutenants  du  [\ogui,  Moulay  M'hammed. 

Ces  lieutenants  étaient  toujours  Abdelmalek  ould  El 
Hadj  Abdelkader  et  El  Hadj  Abdelkader  Ben  Hacira.  Le 
premier,  après  avoir  pillé  Debdou,  était  arrivé  à  l'Oued  Za, 
où  il  avait  été  rejoint  par  le  second. 

Les  Béni  Bon  Zeggou  pactisèrent  à  nouveau  avec  les 
envoyés  du  Prétendant  et  quoique  Hammader  eût  sollicité 
et  obtenu  le  pardon,  ils  le  pillèrent  et  le  chassèrent.  Ils 
firent  répandre  le  bruit  que  Moulay  M'hammed  devait  venir 
à  Oudjda,  après  l'Aïd,  en  même  temps  que  se  propageait 
la  nouvelle  de  l'évacuation  d'Oudjda  par  le  Makhzen. 

En  résumé,  la  situation  actuelle  des  partis  chez  nos  voi- 
sins de  l'Ouest  était,  en  fin  d'année,  la  suivante  : 

Le  Makhzen  à  Oudjda  ne  savait  trop  que  faire  de  ses  trou- 
pes qu'il  ne  nourrissait  pas  et  qui  pillaient  pour  vivre.  Ne 
pouvant  les  diriger,  il  essayait  de  les  éloigner  d'Oudjda 
pour  les  embarquer  à  destination  de  Tanger. 

Les  partisans  du  Sultan  n'étaient  pas  nombreux  chez  les 
Mehaïa  ;  il  n'y  avait  que  le  çof  du  caïd  E)  Hadj  Miloud. 
Chez  les  Angad,  ils  diminuaient  cha(|ue  jour  et  semblaient 
devoir  disparaître  lorsque  s'eiïectuerait  le  départ  de  la 
mehalla  d'Oudjda. 

Moulay  M'hammed  était-il  vivant  ou  mort  ?.  On  l'igno- 
rait. Ses  lettres  nombieuses  continuaient  d'arriver,  mais 
depuis  son  départ  de  l'Oued  Zii,  en  juillet,  nul  ne  s'était 
vanté  de  l'avoii'  vu  en  personne. 

Les  Achache  'Mehaïa)  avaicnl  envoyé  un  miad  pour 
s'assurer  ([u'il  élnit  loujouis  vivant  :  mais  ce  miad  n'était 
pas  encore  revenu. 


i)o(:[  mi:n  is  i»oi  R  skh\  lu  \  i.'nisroinK  des  hamyan     127 

On  |)()ii\ail  (lire  (\uv  tout  le  Maioc  Oriental  était  avec  le 
Rogui  et  (|ue  son  retour  lui  uiuèneruit  prescjue  ceitaine- 
ment  la  petite  ininoiité  (jui  n'était  restée  lidclc  au  Makhzen 
qu'à  cause  de  la  présence  de  ses  représentants. 

Bon  Amania  s'employait  à  liilliei-  les  patlisatis  du  Pié- 
tendanl  ;  il  envoyait  aussi  des  lelties  et  des  rnokaddenis 
dans  toutes  les  tribus  qui  nous  avoisinaient  ;  il  annonçait 
rarri\('i'  [)rocliaine  de  Moulay  M'hainmed  et  disait  (|u'il  se 
joindrai!  à  lui  au  moment  de  sa  verme. 

En  somme,  pendant  toute  l'année  iQoS,  on  pouvait  dire 
que,  sauf  de  lares  accalmies,  le  désordre  avait  constam- 
ment régné  chez  nos  voisins,  et  qu'il  était  probable  qu'il  se 
continuerait  pendant  longtemps  si  on  n'y  remédiait.    . 

On  ne  pouvait  attiibuer  cet  état  de  choses  qu'à  l'anarchie 
qui  avait  toujours  régné  dans  l'Ouest  et  à  l'incurie  dont 
faisait  preuve  le  Makhzen,  lequel  était  incapable  de  prendre 
des  mesures  sérieuses  pour  airéter  le  progrès  des  fautevu'S 
de  troubles  et,  surtout,  pour  faire  disparaître  les  agitatems 
(pii  en  étaient  la  cause. 

11)04.  —  Fiant  donné  tous  les  désordres  (jui  régnaient 
dans  tout  l'Ouest  et  jusqu'à  la  iMoulouya,  pendant  l'an- 
née 1903,  on  pouvait  craindre  un  moment  qu'il  en  résultât 
au  début  de  190^,  pour  la  sécurité  de  nos  régions  frontiè- 
res, les  conséquences  les  plus  graves. 

Le  Rogui  Moulay  M'hammed  et  son  associé  Bou  Amama, 
le  plus  actif  propagateur  de  sa  cause,  multipliaient  les 
menaces  à  l'adresse  des  tribus  nous  avoisinant.  Il  fallait 
craindre  de  voir  l'importante  confédération  des  Béni  Guil 
entrer  en  composition  avec  eux  ;  mais  dès  le  mois  de 
février,  grâce  à  d'habiles  pourparlers,  cette  dernière  con- 
clut un  arrangement  avec  le  Gouvernement  français. 

C'est  en  vain  qu'à  bout  d'arguments,  Bou  Amama  la 
menaça  d'une  harka  à  laquelle  il  avait,  par  l'intermédiaire 
de  son  fils,  Si  Tayeb,  prié  le  Rogui  d(>  se  joindre  :  les  Oulad 
Ahmed  Ben  Amor  et  les  Oulad  Ahmed  Ben  Abdallah  (|ui, 
seuls,  avaient  hésité  à  suivre  leurs  frères  dans  la  voie  de 
l'ordre,  vinrent  à  leur  tour  offrir  leurs  services  à  Si  Allai, 
chef  des  Zoua  Gheraba,  devenu  un  de  nos  auxiliaires  dans 
rOuesl. 

l/objeclif  du  Kogui,  vrai  ou  faux,  j)arut  dès  le  mois  de 
mars  être  Ondjda.  A  cette  date,  une  mehalla  se  mit  en 
route  de  Taza  dans  cette  direction,  sous  le  commandement 
de  Si  Tayeb  et  d'Kl  lladj  Abdelkader  ;  son  arrivée  jeta 
l'alarme  dans  \]\  Aïoun  Sidi  Mellouk  et  \v  caïd  des  Béni  Bou 


128      DOCUMENTS  POUR  SERVI  H  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

Zeggou  menaça  Si  Rokiiia,  amel  d'Oiuljda,  de  se  rendre 
aux  rebelles,  si  des  secoius  ne  lui  parvenaient  pas  immé- 
diatement ;  les  troupes  du  Makhzen  (|u'El  Bagdad!  con- 
duisit jusqu'à  la  Moulouya,  n'inspirèrent  confiance  à 
personne. 

Bou  Arnama  lui-même  s'était  avancé  vers  l'Est,  à 
Méridja  ;  une  véritable  effervescence  avait  gagné  les 
Mehaïa,  voire  même  une  partie  des  Zoua  de  Si  Allai,  qui 
refusaient  à  cette  époque  de  (juiller  Magoura  (annexe  d'El- 
Aricha)  pour  un  point  situé  plus  à  l'Est  ;  tous  voulaient 
rester  à  proximité  du  vieux  marabout  que  la  fortune  parais- 
sait vouloir  favoriser  sans  cesse. 

Ea  défaite  infligée  à  la  mehalla  chérifîenni»  d'Oudjda 
vers  le  i^  mai,  à  Aïn-Sfa,  par  Si  Tayeb,  augmenta  encore  le 
discrédit  du  Makhzen  ;  200  tentes  des  Mehaïa,  3oo  des  Béni 
Mathar  vinrent  se  joindre  à  la  mehalla  rebelle  campée  sur 
l'Oued  Hay  ;  Si  Ahmed  Bokina  sembla  perdre  confiance  et 
prévint  en  hâte  les  Mehaïa  et  les  Angad  encore  fidèles  d'avoir 
à  se  mettre  en  garde  contre  des  rezzous  de  Bou  Amama. 

E'occupation  de  Berguent  par  les  goums  d'El-Aricha  et 
de  Méchéria  et  par  une  colonne  d'infanterie  et  de  cavalerie 
surprirent  quelque  temps  les  gens  du  Bogui  ;  mais  Bou 
Amama  donna  des  ordres  pour  qu'aucun  des  siens  ne  s'oc- 
cupât de  nos  faits  et  gestes  ;  il  tenait  à  ce  que  nous  sachions 
bien  (pie  sa  cause  et  ses  projets  n'avaient  aucun  rapport 
avec  ce  que  nous  pouvions  faire  sur  la  frontière.  Cependant 
après  les  affaires  de  Guefaït,  (piand  circulèrent  dans  le  pays 
les  bmits  de  l'évacuation  prochaine  de  Berguent  par  les 
troupes  françaises,  l'audace  des  bandits  qui  suivaient  les 
armées  des  rebelles  ne  connut  plus  de  bornes  ;  les  djiouch 
vinrent  enlever  des  troupeaux  aux  Béni  Metharef ,  à  Bas-el- 
Mesakhsa,  et  des  chevaux  à  trois  kilomètres  d'El-Aricha  . 
enfin,  le  10  août,  une  harka  de  Bou  Amama  contre  les  Béni 
ITamlil  et  les  Oulad  Kaii,  campés  au  Nord-Ouest  de  Mis- 
siouïn,  pénétra  en  partie  sur  notre  territoire  et  razzia  le 
douar  des  Oulad  Sidi  Ahmed  Miloud,  des  Oulad  Néhar 
Gheraba  l'annexe  d'El-Aricha")  ;  elle  se  retira  ensuite  sans 
être  inquiétée,  et  le  goum  des  Oulad  Néhar  Gheraba  levé  à 
la  hâte  sous  la  direction  du  caïd  Si  Yahia  ould  Bel-Abbès, 
de  l'annexe  d'El-Aricha,  ne  put  que  rassurer  les  douars 
installés  près  de  la  frontière  qui  avaient  été  pris  de  panique 
à  la  nouvelle  de  cet  audacieux  coup  de  main. 

Bou  Amama,  établi  dans  le  Djebel  Zekkara,  continua  à 
terroriser  les  tribus  qui  s'entêtaient  encore  à  rester  fidèles 


uuci -MLMs  poi  11  si:m\  ir(  \  i/ikstoire  des  iiamyan      129 

;iu  Siillaii  ;  il  leur  adressa  des  iii\  ilaliuiis  à  se  soumetire 
<»ii  laiivii  ses  partisans  sur  leurs  troupeaux,  pour  les  coii- 
liaiiidic  par  la  l'orce.  I.e  désordre  le  plus  grand  régna  dans 
la  lé-^ioii  (lOudjda,  des  Béni  Snassen,  d'El  Aïoun  Sidi  Mel- 
louk.  Au\  pillages  organisés  par  le  marabout  et  le  liogui, 
le  eaùl  des  JJeni  Bon  Zeggou  répondit  en  septembre  par  un 
horrible  guet-apens,  où  il  attira  un  grand  nombre  de 
parents  et  d'amis  de  .Moulav  .M'hammed  (|ui  furent  assas- 
sinés pendant  la  nuit  par  les  gens  qui  les  avaient  hébergés, 
mais  le  caïd  eut  juste  le  temps  de  se  réfugier  à  Oudjda  pour 
échapper  aux  représailles,  et  ses  biens  furent  impitoyable- 
ment razziés. 

La  politique  des  rebelles  fut  admirablement  secondée 
par  les  Chaamba  de  Bou  Amama,  sorte  de  commando  par- 
faitement organisé,  très  bien  armé,  très  mobilisable,  qui 
multiplia  ses  coups  de  main  sur  les  douars  qui  hésitaient  à 
se  ranger  sous  l'étendard  de  la  révolte.  Ainsi  menacées  par 
eux  et  pillées  déjà  en  partie,  70  tentes  des  Mehaïa  se  virent 
obligées,  en  octobre,  de  se  réfugier  sur  notre  territoire  ; 
d'autres  les  suivirent  (Oulad  Embarek,  Oulad  Braz,  Moulav 
llaehem)  dans  leur  exode  ;  on  les  installa  à  Marnia  d'abord, 
puis  sur  la  limite  de  l'annexe  d'El-Aricha  et  du  cercle  de 
Méchéria  à  Haci  Sidi  M'hammed,  à  Taërziza  et  à  Kerbaya. 

Pendant  ce  temps,  la  mehalla  du  Rogui  s'emparait, 
après  un  long  siège,  d'El  Aïoun  Sidi  Mellouk  tandis  qu'ui'i 
parti  attirait  l'armée  du  Makhzen  au  Nord  de  la  Casbah  et 
la  défaisait  complètement. 

Ees  bruits  continuèrent  à  circuler  au  sujet  d'une  attaque 
possible  sur  Oudjda,  mais  aucun  commencement  d'exécu- 
tion n'eut  lien.  Il  .•sembla  que  le  bruit  de  ce  projet  avait  été 
répandu  à  dessein  et  que  la  nouvelle  en  avait  été  entretenue 
très  habilement  par  le  Bogui  lui-même  pour  obliger  l'amel 
à  conserver  près  de  lui  les  troupes  dont  il  disposait,  pour 
les  immobiliser  à  Oudjda,  abandonner  toute  la  région, 
entre  notre  frontière  et  la  Moulouya,  à  la  libre  influence  du 
Piélendant  et  permettre  à  ses  partisans  de  la  dévaster 
impunément. 

Au  mois  de  décembre,  la  nouvelle  parvint  (|ue  le  Rogui 
et  Bou  Amama  avaient  l'intention  de  mettre  enfin  à  exé- 
cution leur  projet  d'enlèvement  de  la  ville  et  d'obliger 
ensuite  la  Erance  à  évacuer  Berguent.On  disait  même  que, 
dans  ce  but,  les  rebelles  se  préparaient  à  lever  des  contin- 
gents chez  les  tribus  dévouées  à  leur  cause  et  leur  avaient 
imposé   des   contributions   de   guerre   tiès   élevées,  qu'ils 


130       DOCLMENTS  POUR  SERVIR  A  l'iJISTOIRE  DES  HAMYAN 

s'étuicnl  pourvus  de  lentes  au|)rès  de  la  garnison  espagnole 
de  Melilla,  enlin  (piils  avaient  placé  entre  Saïdia  et  Oudjda 
une  l'orée  imposante  de  cavaliers  destinée  à  couper  cette 
dernière  place  de  ses  communications  avec  la  mer  et  Tan- 
ger. CiCs  bruits,  (|ui  étaient  tendancieux,  ne  furent  pas 
conlirmés. 

En  résiuné,  Tannée  190^  l'ut,  comme  l'année  précédente, 
une  aimée  de  troubles.  Tandis  (jue  le  Hogui  et  Bou  Amania 
tenaient  la  campagne  avec  leurs  partisans  audacieux,  le 
Makhzen  restait  inaclif  à  Oudjda  ;  les  quelques  sorties  que 
ses  troupes  avaient  risquées  avaient,  d'ailleurs,  été,  pour  la 
plupart,  très  malheureuses. 

Les  llamyan  avaient  pris  leur  part  de  ces  désordres  dans 
l'immense  razzia  qui  avait  été  dirigée  par  le  capitaine 
Toulat  et  qui  avait  amené  le  désaveu  de  la  politique  suivie 
par  le  capitaine  du  Jonchay,  Commandant  Supérieur  du 
cei'cle  de  Méchéria. 

1905.  —  L'année  1900  tiouva,  à  ses  débuts,  tout  l'Ouest 
en  effervescence. 

Le  Makhzen  et  le  Prétendant,  en  présence  sous  les  murs 
d'Oudjda,  se  battaient  pour  la  possession  de  cette  ville  et, 
dans  l'idée  de  nos  populations,  chez  lesquelles  d'ailleurs  le 
crédit  du  Prétendant  s'était  accru  d'une  façon  prodigieuse, 
la  prise  d'Oudjda  par  ce  dernier  ne  faisait  plus  aucun  doute. 

Mais  dès  le  début  de  l'année,  le  Makhzen,  tout  en  pas- 
sant par  des  alternatives  de  succès  et  de  revers,  sentit  sa 
situation  morale  s'accroître  singulièrement. 

Lue  giandc  paitie  des  Béni  Snasseu,  fatiguée  probable- 
ment des  exigences  du  Prétendant,  l'abandonnèrent  ouver- 
tement et  passèrent  à  l'ennemi.  Puis  Si  Abdelmalek,  petit- 
fils  de  l'émir  Abdelkader,  se  déclara  pour  le  Makhzen,  (jui 
le  reçut  avec  empressement  ;  Si  Tayeb  ould  Bou  Amama 
lui  même,  entra  en  pourparlers  avec  les  autorités 
d'Oudjda,  par  l'entremise  du  marabout  de  Guefaït,  réfugié 
dans  cette  ville,  puis  s'y  rendit  lui-même. 

Le  Makhzen  posséda  même  pendant  un  certain  temps 
sur  SOS  adversaires  une  supériorité  numérique  dont  il  per- 
sista à  ne  pas  profiter. 

Le  Prétendant,  au  contraiie,  surpris  par  la  défection  des 
Béni  Snassen,  fut  obligé  de  s'éloigner  d'Oudjda  de  quel- 
ques kilomètres  ;  il  en  profita  pour  se  rapprocher  de  Bou 
Amama  qui  semblait  vouloir,  désormais,  associer  sa  cause 
à  celle  du  Rogui. 

Les  rencontres  entre  les  partisans  du  Makhzen  et  du  Pré- 


nOCI^MENTS  l>OI  U  SER\  lli    \  l/lllSTOIRE  DES  IIA.MVAN        liU 

tciulaiil  luiciil  assez  t'rcqueiiles,  mais  sans  résullats  déci- 
sifs. Chaque  parti  s'attribua  du  reste  la  victoire.  Une  des 
a  (Ta  ires  les  plus  sérieuses  fut  celle  du  9  avril,  où  il  y  eut 
cm  iron  So  hommes  tués  de  part  et  d'autre. 

('cite  silualion  resta  sensiblement  la  même  Jus(ju'à  la 
mi-juillcl,  épo(|uc  à  laquelle  le  ['retendant  et  Bou  Amama, 
ne  se  sentant  plus  en  sécurité  à  la  suilt;  d'un  succès  du 
IMaklizen  U*"^  juillet),  s'éloignèrent  vers  l'Ouest,  le  premier 
à  l'^I  A,ïoun  Sidi  Mellouk,  le  second  au  Nord  du  Djebel 
Zekkara. 

Le  poste  de  lîergucnt,  tout  en  rendant  les  bandits  maro- 
cains plus  circonspects,  ne  put  empêcher  maintes  incur- 
sions plus  ou  moins  fructueuses  sur  notre  teiritoire. 

Le  la  février,  200  moutons  ou  chèvres  appartenant  aux 
Oulad  Néhar  (annexe  d'El-Aricha)  furent  enlevés  près  de 
Sidi-Djilali  ;  le  18  du  même  mois,  un  groupe  de  cavaliers 
s'empalèrent,  au  Sud  de  Mahdjeroub,  de  7.'îo  moutons  ou 
chèvres  appartenant  aux  mêmes  Oulad  \éhar. 

Dans  la  nuit  du  19  au  20  mai,  un  djich  composé  de 
80  indigènes  de  l'entourage  de  Bou  Aniauia  lit  une  incur- 
sion sur  notre  territoire.  Dans  cette  affaire,  les  nôtres  eurent 
2  tués  et  2  blessés,  mais  reprirent  leurs  troupeaux. 

Le  10  juin,  les  gens  de  Bou  Amama  volent  deux  juments 
aux  Oulad  Néhar,  près  de  Sidi  Abdallah,  le  12,  ils  volent 
6  bovins  appartenant  également  aux  Oulad  Néhar. 

Le  i';  août,  des  Béni  Yala  nous  enlèvent  m  moutons  ; 
le  -fo  seplembre,  4  vaches  ;  le  26  octobre,  une  jument  d'une 
certaine  valeur.  Un  cheikh  des  Oulad  Sidi  Ali  Bou  Chenafa, 
revenant  d'EI-Aricha,  est  tué,  le  26  septembre,  par  un 
djich  de  8  piélons  au  Sud-Ouest  du  Teniet  Sassi.  La  trouée 
Tiouli-Missiouïn  semblait  attirer  i)articulièrenient  les  ban- 
dits marocains. 

On  constata  également  que  les  djiouch  étaient  plus  nom- 
breux au  moment  où  les  troupes  du  Rogui  et  de  Bou  Amama 
occupaient  les  environs  d'Oudjda. 

A  partir  du  i5  juillet,  les  rebelles  s'étant  éloignés  vers 
l'Ouest,  les  coups  de  main  furent  moins  nombreux.  Au 
mois  de  septembre,  Bou  Amama  s'installa  chez  les  Béni 
Bou  Zeggou,  et  le  Prétendant  à  l'Ouest  de  la  Moulouya, 
laissant  ainsi  toute  liberté  aux  troupes  du  Makhzen,  qui 
montrèrent  beaucoup  plus  de  hardiesse  pour  s'emparer  des 
troupeaux  des  partisans  du  Prétendant  que  pour  s'attaquer 
à  la  petite  armée  de  celui-ci. 

La  mehalla  chérifienne  poussa  même  ses  razzias  (3  no- 


13*2       DOCUMENTS  POl  R  SERVIR  A  l'iIISTOIRE  DES  HAMYAN 

venibie;  jii^(jirà  Mûiidju,  à  20  kilomètres  de  Berguent, 
s'allaquaiil  ainsi  aux  iiRligèiies  (|ui,  cherchant  la  tranquil- 
lité, étaient  venus  depuis  quelque  temps,  en  assez  grand 
nombre,  se  mettre  sous  la  protection  de  notre  poste,  ainsi 
qu'aux  connnerçants  qui,  proiitant  de  l'essor  de  notre  nou- 
veau marché  de  Berguent,  s'y  étaient  installés.  Cette  affaire 
coula  la  vie  à  un  juif  et  à  onze  Oulad  Amor.  Les  gens  de 
cette  dernière  tribu  désertèrent,  depuis,  le  marché  de  Ber- 
guent. Ce  manque  de  sécurité  n'arrêta  cependant  pas  le 
mouveuR'nt  qui  conduisait  les  tribus  marocaines  à  venir  se 
mettre  sous  notre  protection  à  Berguent  ou  à  nous  deman- 
der l'hospitalité  sur  notre  territoire. 

La  guerre  de  razzias  qui  sévissait  depuis  le  mois  de  juillet 
avait  mis  nos  voisins  dans  un  état  de  dénuement  complet. 
Aussi  venaient-ils  chercher  chez  nous,  soit  un  coin  de  terre 
pour  les  labours,  soit  un  peu  de  travail  pour  vivre. 

Bou  Amama  se  trouvait  à  l'Oued  Mestigmeur,  chez  les 
Boni  Bou  Zeggou  et  quoiqu'on  annonçât  constamment 
soit  son  départ  vers  le  Sud,  soit  son  retour  vers  l'Est,  il  ne 
semblait  pas  vouloir  se  déplacer. 

Quant  au  Bogui,  (jui  était,  disait-on,  à  Selouanc,  la  nou- 
velle de  son  départ  sur  Oudjda  ou  Saïdia  arrivait  chaque 
jour,  mais  cette  annonce  n'était  jamais  justifiée. 

Le  Makhzen,  enlin,  restait  toujours  dans  l'inaction  qui 
lui  était  habituelle.  11  ne  voulait  et  ne  pouvait  rien  tenter 
contre  l'ennemi. 

De  nombreuses  tentes  des  Mehaïa  et  des  Moulay  Achem 
continuèrent  cette  année  à  user  de  l'hospitalité  qui  leur 
était  donnée  sur  le  territoire  algérien. 

r^a  politique  qui  consistait  à  acccpter-chez  nous  les  gens 
cherchant  à  gagner  leur  subsistance  ne  pouvait  être  que 
favorable  à  notre  influence  dans  l'Ouest. 

Notre  conflit  avec  l'Allemagne  avait  provoqué  chez 
les  indigènes  des  racontars  souvent  ridicules,  toujours 
inexacts,  émanant,  sans  aucun  doute,  des  autorités  maro- 
caines ayant  intérêt  à  diminuer  notre  prestige,  et  pour 
lesquelles  nous  étions  l'ennemi  le  plus  proche. 

(A  partir  de  1906,  les  faits  s'embrouillent  tellement  <pie 
nous  les  citons  mois  par  mois,  poui-  chercher  à  donner  un 
peu  plus  de  clarté  à  ce  lelevé  d'actes  n'ayant  que  peu 
de  liaison  entre  eux.) 

1900  :  Janvier. —  Une  colonne  peu  importante  du  Makh- 
zen, sous  les  ordres  de  Moulay  Boubeker,  quitte  Oudjda  et 


DOCUMENTS  POLR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  IIAMVAN       V.V.' 

va  s'inslaller  à  Aïn-Berdil  pour  y  attendre  les  renforts  pro- 
mis par  les  Angad  marocains,  à  la  fin  des  semailles. 

Le  Prétendant  s'immobilise  dans  son  camp  de  Selouanc. 

Bon  Aniama  reste  chez  les  Béni  Bon  Zejjgou  ;  la  situation 
des  gens  de  son  entourage  est  peu  prospère. 

Le  i6  janvier,  une  mehalla  du  Makhzen  tombe  sur  une 
caravane  venant  du  camp  du  marabout  et  se  rendant  à 
Melilla  ;  elle  lui  prend  ses  chameaux  et  massacre  3o  cara- 
vaniers ;  mais  le  goum  de  Bou  Amama  rejoint,  au  retour, 
les  j)artisans  du  Makhzen,  en  tue  quatre  et  leur  reprend 
tout  le  butin. 

Vers  le  20  janvier,  le  marabout  envoie  des  émissaires 
chez  les  Béni  Snassen  pour  savoir  s'il  pourrait  s'installer 
sans  coup  férir  à  la  casbah  d'El  Aïoun  Sidi  Mellouk.  La 
réponse  est  favorable,  mais  la  zaouïa  ne  peut  lever  son 
camp  par  suite  du  mauvais  temps. 

Février.  —  La  rentrée  des  Chaamba,  après  leur  surprise 
de  l'Oued  Nesly  (opérée  par  le  groupement  de  Berguent  sur 
des  Chaamba  de  Bou  Amama  qui  rentraient  d'une  expé- 
dition de  pillage  effectuée  dans  le  Sahara  algérien)  ne 
produit  pas  grande  impression  dans  l'entourage  de  Bou 
Amama  ;  cependant  celui-ci,  installé  à  Irsan,  près  d"El 
Aïoun  Sidi  Mellouk,  s'en  montre  fort  mécontent  et  écrit 
au  Rogui,  lui  reprochant  de  l'avoir  incité  à  une  politique 
pacifique  à  notre  égard. 

Le  Prétendant  reste  à  Selouane,  annonçant  une  marche 
très  prochaine  sur  Saïdia,  puis  sm*  Oudjda,  mais  déclare 
vouloir  tout  d'abord  ramener  à  sa  cause  les  Béni  Snassen. 

La  mehalla  de  Moulay  Boubeker  s'installe  à  Cherraa. 

Mars.  —  Dès  que  la  nouvelle  de  la  création  d'un  poste  à 
Sidi  Aïssa  ou  à  El-Bouihi,  à  10  kilomètres  au  Nord  de 
Magoura  s  est  connue  dans  l'Ouest,  les  Mehaïa  de  Bou 
Amama  nous  font  savoir  qu'ils  demanderont  à  venir  se 
mettre  sous  la  protection  de  nos  troupes,  pour  échapper  à 
la  fois  à  Bou  Amama  et  au  Makhzen  et  pouvoir  cultiver 
leurs  terrains  d'autrefois,  dans  les  plaines  de  Tiouli  et  de 
Missiouïn,  sur  nos  confins. 

Bou  Amama  campe  toujours  à  Irsan  ;  beaucoup  de  ses 
partisans  manifestent  un  vif  désir  de  le  quitter. 

Le  Rogui  ne  bouge  pas  de  Selouane  :  son  prestige  a  beau- 
coup diminué. 


I  Frontière  marocaine,  annexe  d'El-Aricha. 

11 


134      DOCLMENTS  POUR  SERVIR  A  l'iIISTOIRE  DES  HAMYAN 

Avril.  —  Bon  Amaina  réussit  à  attirer  de  nouveau  à  lui 
les  Zekkara  et  une  partie  des  Béni  Yala, 

Le  Rogui  n'a  pas  quitté  Selouane  ;  les  émissaires  envoyés 
par  lui  pour  lever  des  contingents  sont  partout  mal  reçus. 

Des  engagements  peu  sérieux  ont  lieu  sur  la  Moulouya 
entre  les  troupes  du  Makhzen  et  celles  du  Prétendant, 
qui  cherchent  mutuellement  à  détruire  les  cultures  de 
l'adversaire. 

Mai.  —  Bou  Amania,  malade  de  rhumatismes,  est  tou- 
jours dans  la  région  des  Zekkara  ;  il  défend  à  ses  partisans 
de  tenter  quoique  ce  soit  contre  les  Français.  Son  groupe- 
ment semble  se  désagréger  ;  ses  Mehaïa  cherchent  à  le 
quitter.  Seuls,  ses  Chaamba  lui  restent  vraiment  fidèles, 
et  font,  pour  approvisionner  la  zaouia,  des  coups  de  main 
heureux. 

Le  6  mai,  les  gens  de  Bou  Amama,  attaqués  par  ceux  du 
Makhzen,  perdent  4 "^4  chameaux. 

A  la  suite  de  cette  atïaire  et  par  crainte  de  représailles,  les 
Béni  Hamlil  viennent  s'installer  à  Missiouïn  (5  kilomètres 
de  Sidi  Aïssa),  puis,  quelque  temps  après,  remontent  un 
peu  au  Nord. 

Le  Rogui  ne  quitte  toujours  pas  Selouane.  Les  escarmou- 
ches entre  ses  troupes  et  celles  de  Moulay  Abd-el-Aziz  sont 
continuelles. 

Le  7  mai,  la  mehalla  du  Makhzen  a,  avec  celle  du  Préten- 
dant, un  engagement  assez  sérieux  à  Mechera  Guerma,  au 
Sud  de  la  Moulouya  ;  elle  perd  une  vingtaine  d'hommes. 

Le  25  mai,  un  goum  parti  d'Oudjda  enlève  aux  Oulad 
Bakhti  une  cinquantaine  d'animaux. 

Le  Makhzen  commence  à  montrer"  de  mauvaises  dispo- 
sitions à  notre  égard. 

La  mise  en  liberté  de  Si  Tayeb  ould  Bou  Amama,  vive- 
ment commentée  par  les  indigènes,  est  attribuée  par  eux  à 
rinfluence  des  représentants  du  Makhzen  à  Oudjda.  Les 
autorités  françaises  répandent  de  tout  leur  pouvoir  la  vérité 
sur  cette  affaire. 

Juin.  —  Le  Prétendant  campe  toujours  à  Selouane  ;  Bou 
Amama  est  rétabli.  Le  3  juin,  une  harka  partie  de  ses  cam- 
pements attaque  les  Béni  Moussa  et  les  Béni  Ourimèche  à 
Sidi  Bou  ïlourria,  près  d'Aïn-Berdil  ;  elle  leur  tue  ii  hom- 
mes et  en  blesse  i6.  Elle  enlève  i5  mulets,  ii  ânes,  3  cha- 
meaux et  prend  ii  fusils.  Le  caïd  des  Hadahda,  M'hammed 
ould  Ahmed  El  Anoual,  qui  en  fait  partie,  est  grièvement 
blessé. 


DOCliMEMS  l'Ol  R  Sl!:iU  lit   A   l'i!  IS  lOl  lUi  l)p:S  IIAMVAN        135 

l'ne  seconde  liaïka,  [)iirlie  aussi  de  (liez  Bou  Ainaiiia, 
attaque,  à  Feidf  El  Abiod,  les  Béni  Yahia,  partisans  du 
Makhzen,  et  leur  tue  un  ou  deux  hommes.  Trente  cavaliers 
des  mieux  montés  poussent  jusqu'aux  environs  d'Oudjda 
et  reviennent  après  s'être  heuités  aux  Angad  marocains. 

Le  mouvement  de  la  colonne  française  de  Berguent  sur 
Mataïka  produit  une  excellente  et  salutair(!  impression, 
spécialement  sur  les  Béni  Cuil. 

Le  Makhzen  nous  nianifeste  toujours  une  sourde 
hostilité. 

Juillet. —  Au  commencement  du  mois,  les  escarmouches 
sont  plutôt  favorables  au  Rogui. 

Mais  le  20  juillet,  les  troupes  du  Makhzen  attaquent  sa 
colonne  principale  commandée  par  le  caïd  Azzouz  El 
Glîiatsi  et  lui  iniligent  un  sérieux  échec.  Le  Piétendant 
perd  une  tientaine  de  tués,  des  tentes,  des  cartouches  et 
quelques  fusils.  Ses  troupes  rétrogradent  sur  Selouane.  La 
mehalla  chérilienne  revient  à  Cherraa. 

Bou  Amama  se  montre  très  satisfait  de  ce  que  nous  avons 
fait  pour  son  lils,  Si  Tayeb  ould  Bou  Amama.  Si  Tayeb 
avait  été  emprisonné  par  le  Makhzen  et,  à  la  suite  de  notre 
inteivention,  avait  été  remis  en  liberté.  Sa  famille  fait 
montre  des  mêmes  sentiments  à  notre  égard.  Ses  partisans 
opèrent  quelques  incursions  dans  les  tribus  marocaines 
voisines  de  notre  frontière.  Ils  enlèvent  aux  Béni  Ouri- 
mèche,  la  Anes  et  44  moutons,  et  aux  Béni  Bou  Hamdoun 
2  mulets  et  7  ânes. 

Les  Ghaamba  du  marabout  tentent,  sans  y  réussir,  un 
coup  de  main  contre  les  Béni  Hamlil. 

Les  mauvaises  dispositions  du  Makhzen  envers  nous 
s'accusent  de  plus  en  plus  nettenient. 

Août.  —  L'attitude  du  Makhzen  amène,  au  commence- 
ment du  mois,  la  rupture  des  relations  commerciales  entre 
Marnia  et  Oudjda. 

Le  Prétendant  lève  des  impots  chez  les  Guelaya  et  les 
tribus  voisines  pour  réorganiser  son  armée  et  achète  des 
fusils  et  des  chevaux.  Il  est  en  relations  très  suivies  avec 
Bou  Amama. 

Ce  dernier  campe  à  Sidi  Makhoukh.  Le  28  août,  ses 
troupeaux  sont  enlevés  dans  l'Oued  Boureddin  par  des  cava- 
liers du  Makhzen  et  ne  peuvent  être  repris  qu'après  un 
combat  assez  vif  à  Magraz. 

Septembre.  —  Bou  Amama  porte  ses  campements  au 


136       DOCl  MEMS  l'Ol  R  SER\  IR    \  l.'lUSlOIUE  DES  H  \MYAN 

Sud  et  à  environ  8  kilomètres  de  la  casbali  d'Ei  Aïoun  Sidi 
Melioulv  ;  il  profite  de  toutes  les  occasions  pour  nous  mani- 
fester sa  bonne  volonté,  spécialement  dans  la  recherche 
des  assassins  de  l'inspecteur  des  Eaux  et  Forêts  Dubois  et 
du  brigadier  Barbier,  assassinés  dans  la  forêt  du  Télagh, 
à  l'instigation  du  chaouch  de  l'inspecteur,  par  un  bandit 
réfugié  chez  Bon  Amama. 

Une  scission  se  produit  entre  les  Mehaïa  et  leur  caïd  ; 
cent  tentes  environ  viennent  s'installer  près  de  Sidi  Aïssa, 
puis  en  repartent  en  raison  des  pluies. 

Le  Rogui  reste  sur  la  Moulouya,  au  gué  de  Cherraa  ;  de 
nombreuses  défections  se  produisent  dans  ses  contingents. 

Les  dispositions  du  Makhzen  restent  hostiles  à  notre 
égard  ;  il  fait  répandre  le  bruit  que  le  Sultan,  avec  l'aide  de 
l'Allemagne,  va  nous  rejeter  sur  nos  anciens  postes. 

Néanmoins  l'interdiction  de  commercer  entre  Marnia  et 
Oudjda  est  levée. 

Octobre.  —  Malgré  les  ordres  et  les  menaces  du  Rogui, 
les  Béni  Guil  et  les  Oulad  Sidi  Ali  Bon  Chenafa  ne  lui 
envoient  pas  de  contingents. 

Beaucoup  de  ses  gens  se  sont  dispersés  pour  les  labours. 
De  son  côté,  la  mehalla  du  Makhzen,  démoralisée,  vit  dans 
la  crainte  perpétuelle  de  Moulay  M'hammed. 

Bon  Amama  est  à  Irsan  et  toujours  en  bonnes  relations 
avec  nous. 

Le  Makhzen  leste  inactif. 

Trente  tentes  des  Mehaïa  de  Berguent,  avec  Ben  Abdal- 
lah ould  Boubeker,  s'installent  près  de  Sidi  Aïssa. 

Des  Mehaïa  de  Bou  Amama  (douar  Hadahda)  demandent 
l'autorisation  de  venir  à  Tiouli,  ainsi  qu'un  groupe  des 
Béni  Yala,  les  Oulad  Moussa  ben  Amor. 

Novembre.  —  Le  Rogui  est  installé  à  Selouane  avec  un 
détachement  au  gué  de  la  Moulouya  ;  presque  tous  ses  con- 
tingents sont  dispersés. 

Le  Makhzen  conserve  toujoms  son  attitudje  passive.  Bou 
Amama  se  montre  très  froid  à  l'égard  du  Prétendant  et  est 
inf|uiet  à  son  sujet. 

Des  gens  du  Tafîlalet  apportent  à  Bou  Amama  et  à  Mou- 
lay M'hammed  des  lettres  émanant  de  Moulay  Réchid, 
oncle  du  Sultan,  pour  les  exhorter  à  prendre  parti  contre 
nous.  Le  marabout  ne  répond  pas.  Cent  tentes  des  Mehaïa 
(groupe  de  Rouhafs  ould  El  TIadj  Saheli")  viennent  s'ins- 
taller près  de  Sidi  Aïssa  :  de  même  un  groupe  de  sept  tentes 
des  Reni  Yala  avec  le  caïd  Ahmed  Rouzian. 


l)0<;i  MEMS  l'Ol  H  SEH\IH    \   I.III^IOIHK  DES  ll\>n.\>        \'il 

Décembre.  —  l>e  Hogui  icroiinc  sa  iiu'halla,  s'occupe  de 
ranicncr  à  lui  les  Iribus  lilTaiues  cl  se  prépaie  à  occuper 
foilciueul  les  gués  de  la  Moulouva. 

11  iullige  aux  Guelaya  uu  échec  complet,  leui-  lue  un 
grand  nombre  d'hommes,  dévaste  tout  le  pays  et  fait  un 
gros  butin  qu'il  vend  à  Melilla.  Il  est  en  relations  excel- 
lentes avec  les  Ks{)agnols  ;  le  biuil  court  (pi'il  reçoit  d'eux 
des  subsides. 

Bou  Aniama  a  décidé  d'hiverner  à  Mélarka,  mais  ne  s'y 
transporte  pas  encore.  Il  a  reçu  de  nouvelles  lettres  plus 
pressantes  de  .Moulay  lUVhid,  mais  a  éconduit  les  envoyés. 

Le  -Makhzen  reste  toujours  dans  l'inaction  et  continue 
de  répandre  contre  nous  des  bruits  défavorables. 

Il  est  à  remarquer  que  nos  relations  avec  les  tribus  maro- 
caines voisines  de  la  frontière  se  sont  améliorées  pendant 
l'année  1906. 

Il  y  a  lieu  de  noter  spécialement  l'atlilude  de  Bon  Amama 
qui  s'est  complètement  modifiée  à  notre  égard,  et  dont  les 
gens  évitent  scrupuleusement  toute  incursion  sur  notre 
territoire  et  toute  attaque  contre  nos  administrés. 

11)07  :  Janvier.  —  Bou  Amama  installe  son  campement 
dans  l'Oued  Boureddin.  Un  groupe  de  Ghaamba  est  parti 
de  chez  lui  en  décembre  1906  pour  aller  en  rezzou  à  l'Ouest 
du  Tafilalet. 

Le  Rogui  reste  inactif,  mais  ses  émissaires  parcourent 
les  tribus. 

Le  Alakhzen  ne  bouge  pas  non  plus  ;  il  se  contente  de 
continuer  à  faire  répandre  des  bruits  défavorables  à  notre 
égard  et  fait  raconter  que  Si  El  Guebbaz,  à  la  tête  d'une 
forte  mehalla,  doit  venir  nous  chasser  des  points  que  nous 
avons  indûment  occupés. 

Février.  —  Le  Prétendant  est  toujours  à  Selouane  et 
annonce  sa  marche  sur  Oudjda.  Son  camp  souffre  de  la 
misère  ;  Moulay  M'hammed  a  donné  deux  grandes  fêtes,  la 
première  pour  célébrer  la  naissance  d'un  rejeton  mâle,  la 
seconde  en  l'honneur  d'un  envoyé  du  Sultan  de  Stamboul, 
lui  apportant,  paraît-il,  des  lettres  annonçant  que  <(  des 
«  troupes  de  l'empire  ottoman  allaient  incessammentvenir 
«  à  son  secoms  ».  Le  Prétendant  aurait  envoyé  une  cen- 
taine de  cavaliers  à  Bou  Amama. 

Ce  dernier  a  reçu  un  goum  de  Marnia  lui  apportant  des 
lettre?  des  autorités  françaises  lui  proposant  le  })ardon  com- 
plet et  l'envoi  à  son  camp  d'un  officier  supéiieui"  pour  fiai- 


138       DOCIMENTS  POIR  SERVI  K  A  LflISTUlHE  DES  HAMYAN 

ter  de  toutes  les  questions  annexes.  Les  cavaliers  bien  reçus 
ont  été  renvoyés  sans  réponse. 

Le  marabout  voit  échouer  les  démarches  faites  par  lui 
près  des  Béni  Snassen  et  des  Angad  pour  avoir  la  libellé  de 
fré(iuenler  le  marché  d'Oudjda. 

Mars.  —  Les  Mehaïa,  divisés  sur  cette  dernière  question, 
se  sont  réconciliés  entre  eux  et  avec  les  Angad  et  les  Sedjaa, 
et  se  sotil  réunis  aux  environs  de  Sidi  Moussa  Ben  Ali,  où  les 
pâturages  sont  abondants. 

Le  Prétendant  est  resté  dans  ses  campements  ;  sa  situa- 
tion est  meilleure.  Un  mouvement  se  dessine  chez  les 
Meliaïa  réunis  pour  se  détacher  de  lui  et  de  leur  caïd. 

Avril.  —  Oudjda  a  été  occupée  par  les  Français,  à  la  suite 
de  l'assassinai  du  docteur  Mauchamp  à  Casablanca,  et  cette 
nouvelle  a  produit  une  vive  émotion  dans  l'Ouest.  Bou 
Amama  a  dû  calmer  ses  gens  qui  voulaient  prendre  les 
armes.  Il  a  envoyé  des  courriers  au  Rogui  pour  lui  deman- 
der son  aide.  De  nombreux  envoyés  des  tribus  marocaines 
et  même  des  gens  d'Oudjda  cherchent  à  l'entraîner  contre 
nous. 

L'impression  dans  les  tribus  algériennes  est  bonne. 

Les  Chaamba  de  Bou  Amama,  partis  en  décembre  1906, 
ont  enlevé  des  chameaux  aux  Touareg,  les  ont  vendus  au 
Talilalct  et  doivent  rentrer  à  la  zaouïa  par  le  district  d'El 
Reteb.  Ils  rapportent  la  nouvelle  que  les  tribus  du  Tafilalet 
seraient  d'accord  poui'  nous  combattre,  mais  nous  atten- 
draient chez  elles. 

Mai. —  Le  bruit  court  que  les  Béni  Snassen  refusent  d'en- 
trer en  relations  avec  nous,  et  qu'ils  veulent  nous  faire 
patienter  jusqu'au  moment  011  ayant  ensilé  leurs  grains,  ils 
pourront  se  déclarer  contre  nous. 

Bou  Amama  reste  inactif  ;  quant  au  Rogui,  une  recon- 
naissance partie  de  chez  lui  a  soutenu  un  combat  peu 
sérieux  avec  les  gens  du  Makhzen. 

Juin.  —  Une  partie  des  Mehaïa  viennent  camper  à 
Tiouli,  près  de  leurs  récoltes.  Plusieurs  douars  des  Béni 
Yala  se  rapprochent  de  Sidi  Aïssa.  Bou  Amama  ne  bouge 
pas  ;  son  fils  Si  Tayeb  arrive  à  Marnia. 

Le  Liogui  lesle  toujours  à  Selouane.  Le  9.5  juin,  nu  nou- 
veau combat  assez  sérieux  s'engage  entre  les  troupes  du 
Sultan  et  celles  du  Prétendant.  Ce  dernier,  persuadé  de  la 
complicité  des  Guelaya  avec  le  Makhzen,  envoie  chez  eux 


DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  [.'HISTOIRE  DES  HAMYAN       139 

une  harka  qui  leur  lue   i8  hommes,  pille  leurs  biens  et 
incendie  les  maisons. 

Juillet.  —  Les  indigènes  commenlenl,  avec  animation, 
mais  de  façons  dllférenlcs,  le  séjoiu'  à  Oudjda  de  Si  Tayeb 
ould  Bou  Amama. 

Août.  —  Bou  Amama,  qui  campe  toujours  aux  mêmes 
endroits,  négocie  avec  les  Béni  Guil,  qui  ont  pillé  au  pas- 
sage les  C^haamba  revenant  du  Talilalet  et  obtient  d'eux  la 
restitution  des  animaux  et  objets  enlevés  à  ses  gens  reve- 
nant de  rezzou. 

Ses  relations  avec  le  Bogui  sont  très  suivies.  Le  Préten- 
dant a  beaucoup  de  troupes,  mais  manque  de  munitions. 
Ainsi  s'explique  son  inaction  en  face  de  la  mehalla  chéri- 
fienne  dénuée  de  tout. 

Septembre.  —  Bou  Amama  est  toujours  à  El  Aïoun  Sidi 
Mellouk  et  l'incident  avec  les  Béni  Guil  semble  définitive- 
ment réglé.  Il  paraît  vouloir  recenser  ses  fidèles. 

Le  Bogui  ne  fait  pas  parler  de  lui.  Mais  les  événements 
de  Casablanca,  rapportés  d'une  façon  très  défavorable  à 
notre  cause,  provo(juent  une  certaine  effervescence  chez  les 
Oulad  Amar,  chez  les  Béni  Guil  et  au  Tafilalet.  Les  Beraber 
semblent  se  mettre  d'accord  pour  marcher  contre  nous. 

Octobre.  —  Bou  Amama  ne  change  pas  ses  campements. 

Des  gens  des  Oulad  Néhar,  auxquels  des  moutons  ont  été 
enlevés  à  Garet  Soltana  (12  kilomètres  au  Nord  de  Ber- 
guent),se  rendent  près  de  lui  pour  obtenir  la  restitution  de 
leurs  animaux.  Des  lettres  des  Béni  Snassen  annonçant 
qu'ils  ont  infligé  un  échec  aux  Français  étant  arrivées  à 
son  camp,  les  gens  du  marabout  organisent  des  réjouis- 
sances et  ce  dernier  renvoie  les  propriétaires  des  animaux 
volés  sans  vouloir  leur  rendre  justice. 

Le  Bogui  reste  toujours  dans  l'expectative. 

Les  indigènes  commentent  les  incidents  des  Béni  Snas- 
sen et  s'étonnent  que  nous  n'infligions  pas  à  ces  derniers 
une  dure  leçon.  De  nombreux  émissaires  des  Béni  Snassen 
sont  envoyés  à  Bou  Amama  pour  lui  demander  de  s'inter- 
poser entre  nous  et  eux. 

Novembre.  —  Bou  Amama  ne  déplace  pas  ses  campe- 
ments. Il  conseille  la  paix  aux  Béni  Snassen,  à  une  fraction 
desquels  (Béni  Khaled)  nous  avons  d'ailleurs  accordé 
l'aman  moyennant  une  amende  de  5. 000  francs.  Le  bruit 
court  chez  tous  les  indigènes  que  cette  amende  ne  sera  pas 
payée  et  qu'une  harka  serait  formée  pour  nous  attaquer. 


140       DOCUMENTS  POUR  SEKVIH  A  l'iIISTOIRE  DES  HAMYAN 

Décembre.  —  On  dit  que  la  colonne  du  Makhzen  qui  est 
à  Selouane  a  été  attaquée  par  le  Prétendant  et  qu'il  y  a  eu 
beaucoup  de  tués.  Le  Hogui  aurait  déclaré  que  les  Béni 
Snassen  avaient  tort  de  nous  combattre,  car  fatalement, 
tôt  ou  tard,  nous  commanderions  jusqu'à  la  Moulouya. 

Hou  Aniama  établit  ses  campements  à  Mesquen  Chouala, 
enlre  lOued  Boureddin  et  Sidi  Houria.Son  fils  Tayeb  dirige 
d'importants  travaux  de  canalisation  et  de  culture.  Le 
marabout  reste  sourd  aux  sollicitations  de  nos  ennemis, 
mais  la  plus  grande  partie  de  ses  contingents,  ainsi  que  des 
cavaliers  des  Kebdana,  Guelaya  et  Sedjaa  se  préparent  à 
rejoindre  les  Béni  Snassen. 

Les  Mehaïa  et  les  Béni  Yala  se  tiennent  dans  l'expectative 
et  attendent,  pour  se  prononcer,  d'avoir  vu  la  tournure  que 
prendra  la  lutte. 

Ainsi  la  situation  des  tribus  marocaines  voisines  de  la 
frontière  n'a  guère  changé  depuis  un  an  ;  seule,  l'occupa- 
tion d'Oudjda  par  nos  troupes,  a  procuré  la  paix  et  l'ordre 
aux  Mehaïa  et  aux  Angad  marocains.  Malgré  la  proximité 
des  agitations,  nos  tribus  algériennes  n'ont  cessé  de  con- 
seiver  la  plus  correcte  des  attitudes  et  de  fermer  l'oreille 
aux  sollicitations  marocaines. 

1908  :  Janvier.  —  Le  combat  d'Aïn-Sfa,  en  même  temps 
qu'il  a  abattu  les  Béni  Snassen,  a  mis  fin  à  tous  les  com- 
mentaires plus  ou  moins  favorables  à  notre  cause  qui 
étaient  mis  en  circulation  parmi  les  tribus  frontières.  La 
conduite  réservée  de  Bou  Amama,  qui  se  rendait  certaine- 
ment compte  du  résultat  final  de  notre  intervention  aux 
Béni  Snassen,  n'a  pas  été  sans  inlluer  siu'  ce  revirement 
d'opinion.  Les  Mehaïa,  définitivement  rassurés  et  avertis 
sur  la  conduite  à  tenir,  ont  fait  bon  accueil  aux  différentes 
patrouilles  circulant  le  long  de  la  frontière. 

Février.  —  Les  Mehaïa  colportent  et  commentent  les 
nouvelles  suivant  lesquelles  la  mehalla  d'Abd-el-Aziz  ins- 
tallée à  la  Mar  Chica  se  serait  déplacée  vers  l'Ouest  après 
avoir  vendu  ses  armes  aux  Espagnols.  D'autre  part,  le  caïd 
Bou  Souar,  des  Mehaïa  de  Bou  Amama,  aurait  uni  sa  cause 
à  celle  du  Bogui  et  offert  son  cheval  à  ce  dernier  en  signe 
d'hommage. 

Mars.  —  De  tous  les  bruits  mis  en  circulation  sur  la 
conduite  du  Bogui,  de  Bou  Amama,  il  résulte  clairement 
que  les  secrètes  espérances  de  ces  agitateurs  sont  contre 
nous   et   que,   tout  en   ne   prenant  part   ouvertement   ni 


DOCIME.MS  l'Ol   M  SKIUIK    \   l'illSIOlKE  DES  IIAMYAN       141 

pour  Abd-cl-Aziz  ni  pour  notre  inllucncc,  ils  se  réservent, 
suivani  les  eiicoiisl;inces,  de  se  ralliei'  nioinenlaiirnK'iil  n 
l'un  ou  à  l'aulie  paiti.  Cette  expectative  est  eneoi-e  entre- 
teiuie  par  les  bruits  (jui  circulent  sur  la  harka  formée  au 
Talilalet  par  les  Bcraber,  laquelle  doit  venir  à  Berguent  et 
à  Oudjda  nous  chasser  définitivement  de  ces  postes.  Néan- 
moins, auciuie  in(piiétude  n'apparaît  parmi  les  popula- 
tions algériennes. 

Avril.  —  L'ne  vive  agilati(^n  se  produit  dans  tout  l'Ouest 
et  surtout  chez  les  Béni  Guil  au  sujet  de  la  harka  des  Bera- 
ber,  de  son  effectif,  de  ses  objectifs  qui  sont  Bou  Denib, 
Colomb-Béchar,  Aïn-Sefra.  On  sait  que  la  harka  est  com- 
posée non  seulement  de  Beiaber,  mais  encore  d'un  certain 
nombre  de  Béni  Guil.  A  la  suite  de  ces  nouvelles,  les  Béni 
Omimèche  écrivent  à  Bou  Amama  et  au  Bogui  pour  leur 
demandei-  la  conduite  à  tenir  ;  Bou  Amama  leur  répond 
d'agir  à  leur  guise  et  le  Bogui,  au  contraire,  leur  conseille 
d'intervenir  et  d'accueillir  nos  reconnaissances  à  coups  de 
fusil.  Il  fait  surveiller  très  étroitement  tous  nos  mouve- 
ments dans  la  région  de  la  Basse-Moulouya  ;  en  particulier 
lorsqu'une  reconnaissance  partie  de  Taforalt  s'est  rendue 
jusqu'à  cette  rivière,  elle  a  été  observée  de  la  rive  opposée 
par  700  cavaliers  sous  le  commandement  des  caïds  Azouz 
et  Ben  Lefia. 

Mai.  —  La  nouvelle  de  l'affaire  de  Mennabah  s'est  pro- 
pagée rapidement  en  avril  iQoS.fLacolonnedulieutenanl- 
colonel  Pierron,  de  Colomb-Béchar,  avait  été  attaquée  au 
petit  jour  par  la  harka  de  Moulay  Lahcène  El  Seba'i  et,  tout 
en  subissant  de  très  fortes  pertes,  avait  repoussé  victorieu- 
sement l'ennemi  qui  s'enfuit  et  abandonna  son  camp  de 
Mengoub,  dans  la  plaine  du  Tamlelt.  La  prise  de  Bou  Denib 
fut  notr(>  liposte  à  l'attaque  de  Mennabah.  D'abord  envi- 
sagée, d'après  les  bruits  mis  en  circulation,  comme  un 
échec  pour  nos  armes,  elle  ne  tarda  cependant  pas  à  être 
connue  sous  son  vrai  jour.) 

En  apprenant  la  retraite  de  la  harka  Beraber,  les  Béni 
Guil  et  les  gens  de  Debdou  qui  s'apprêtaient  à  renforcer  de 
leurs  contingents  ceux  dont  dispose  encore  Moulay  Seba'i, 
se  sont  résolus  à  prendre  une  attitude  plus  réservée.  Les 
Béni  Guil  même,  craignant  des  représailles,  se  sont  retirés 
avec  leurs  campements  sur  la  gada  de  Debdou  pour  être 
plus  éloignés  de  nos  troupes. 

Bou  \mama  et  le  Bogui  continuent  I(mus  menées,  mais 
le  deriiiiM'  d'une  façon  plus  effective  :  il  prêche  la  révolte  et 


142       DOCUMENTS  POI  R  SERVIR  A  T/HISTOIRE  DES  IIAMYAN 

conseille  à  toutes  les  tribus,  sur  lesquelles  il  a  de  l'inlluence, 
de  sarmer  et  de  se  tenir  prêtes  pour  la  Guerre  Sainte. 

Juin.  —  La  confirmation  de  la  nouvelle  de  la  prise  de 
Bou  Denib  par  les  Français  a  fortement  modéré  les  ardeurs 
anti-françaises  des  mois»  précédents. 

L'arrivée  à  Fez  de  Moulay  Hatid  est  commentée  par  les 
indigènes,  surtout  par  le  désir  de  connaître  l'attitude  que 
vont  prendre,  en  raison  de  ce  rapprochement,  Bou  Amama 
et  le  Bogui . 

Les  uns  représentent  le  Bogul  comme  devant  se  lendre  à 
Fez  par  Taza  pour  faire  sa  soumission  à  Moulay  Halid;  d'au- 
tres, au  contraire,  veulent  qu'il  vienne  s'installer  à  Cherraa 
avec  toute  sa  mehalla  et  ses  partisans  pendant  qu'il  enver- 
rait un  fort  détachement,  composé  de  piétons  et  de  5oocava- 
liers,  chez  Bou  Amama. 

Du  côté  de  ce  dernier,  la  situation  serait  plus  calme  ;  les 
indigènes  se  demandent  (|uelle  va  être  la  position  du  mara- 
bout vis-à-vis  de  nous,  si  le  Bogui  vient  s'installer  à  Cherraa 
ou  en  tout  autre  point  situé  dans  notre  zone  d'influence. 

Il  est  certain  que  ces  déplacements,  très  commentés,  ne 
sont  pas  sans  causer  une  certaine  émotion  parmi  les  Mehaïa 
eux-mêmes. 

Juillet.  —  Les  mêmes  bruits  du  changement  des  cam- 
pements du  Bogui  et  de  Bou  Amama  continuent  à  circuler, 
sans  que  rien  de  décisif  ne  puisse  être  connu  au  milieu  de 
tous  ces  racontars. 

Août.  —  11  est  de  nouveau  question  du  rassemblement 
d'une  harka  Berabei"  très  importante  qui,  dès  sa  concen- 
tration, marcherait  svu'  Bou  Denib.  D'après  les  nouvelles 
en  circulation,  Moulay  Lahcène  El  Sebaï  prendrait  le  com- 
mandement en  personne.  Le  bruit  court  également,  quoi- 
qu'il soit  faux,  de  la  mort  du  chérif  de  Bou  Denib,  Moulay 
Ahmed  El  Driss,  lequel  a,  dit-on,  été  assassiné,  la  nuit, 
par  un  inconnu,  dans  sa  demeure  à  Bou  Denib.  Les  Béni 
Guil  attribuent  ce  crime  imaginaire  à  la  vengeance  moti- 
vée par  les  services  qu'il  nous  a  rendus  lors  de  l'occupation 
de  Bou  Denib.  Chacun,  au  Maroc  Oriental,  escompte  le 
succès  des  Beraber  qui  est  considéré  comme  certain. 

On  ne  parle  plus  ni  de  l'exode  de  Bou  Amama,  ni  de  celle 
du  Bogui  ;  les  deux  agitateurs  ont,  du  reste,  entre  eux,  des 
rapports  assez  tendus  motivés  par  une  perception  de  droits 
sur  les  troupeaux  et  denrées  de  la  zaouïa  que  le  Bogui  aurait 
voulu  lever. 


I)OCi:mem's  poi  r  seiuih  a  i.iiisrorKE  des  hamyan     14:3 

Septembre.  —  l.a  iioiivelif  dv  la  dcfaile  complète  de  la 
deuxième  harka  de  Bou  Deiiib  au  combat  de  Djorf  '  a 
atterré  tous  les  faiiali(|ues  (|iii,  noyant  à  une  intervention 
divine,  s'attendaient  à  un  succès  complet  des  armes  isla- 
miques. Mais,  malgré  ce  sanglant  échec,  les  fanatiques  et 
les  illuminés,  soit  pai'  conviction,  soit  surtout  par  intérêt, 
ne  désarment  pas  et  prétend<'nt  que  la  harka  n'était  (ju Une 
partie  des  troupes  considérables  que  Moulay  Hafid  va  lever 
contre  nous,  pour  venir  reprendre  Oudjda  et  tous  les 
territoires  (pie  nous  avons  progressivement  f)ccupés 
depuis  1900. 

Octobre.  —  Bou  Amama  meurt,  (le  fait  produit  une  forte 
émotion  sur  les  indigènes  de  l'Ouest,  quoique  ce  dénoue- 
ment fut  prévu  et  attendu  depuis  longtemps.  Le  marabout 
ayant  pu  publicpiement,  avant  sa  mort,  déclarer  qu'il  dési- 
gnait son  fils  Si  Tayeb  comme  son  successeur,  aucune  con- 
testation ne  s'est  produite  et  tous  les  indigènes  de  la  zaouïa 
ont  reconnu  leur  nouveau  chef. 

Les  bruits  les  plus  contiadictoires  circulent  sur  le  Rogui  ; 
tantôt  on  le  représente  comme  vainqueur,  dominant  jus- 
qu'à Taza  et  envoyant  une  mehalla  sur  Fez,  tantôt,  et  c'est 
le  bruit  le  plus  répandu,  comme  ayant  subi  de  graves 
échecs  (pii  feraient  douter  de  sa  puissance. 

Décembre.  —  Les  Mehaïa  auraient  cherché  au  milieu  de 
tous  les  bruits  qui,  depuis  six  mois,  leur  parviennent  un 
peu  de  tous  les  côtés,  à  se  rendre  un  compte  exact  de  la 
situation  à  l'Ouest  de  la  Moulouya.  Ils  auraient  envoyé  un 
rekkas  à  Fez  pour  se  renseigner  à  ce  sujet.  Ce  rekkas  serait 
revenu  et  leur  aurait  assuré  que  l'autorité  de  Moulay  Hafîd 
était  sans  conteste,  qu'il  disposait  de  ressources  matérielles 
considérables,  de  mehallas  importantes.  Tout  le  Moyen- 
Maroc  lui  serait  définitivement  acquis  et  il  n'aurait  trouvé 
quelque  résistance  que  chez  les  Beraber  qui  désireraient  de 
lui,  avant  de  le  reconnaître  pour  chef,  une  intervention  vers 
nos  nouvelles  possessions. 

Si  Tayeb  aurait  mis  fin  aux  dissensions  qui  existaient,  il 
y  a  quelques  mois,  entre  son  père  et  le  Bogui.  Il  aurait 
envoyé  à  ce  dernier  un  cheval  en  présent,  comme  indice 
des  bons  rapports  ((u'il  compte  entretenir  avec  le  Préten- 
dant. Une  correspondance  très  active  serait  échangée  entre 
le  camp  de  ce  dernier  et  la  zaouïa  d'El  Aïoun  Sidi  Mellouk. 

I   Pivs  K..11  Deuil.. 


144       DOCL.ME.MS  POI  R  SERVlM  A  LHISTOIKE  DES  II AMYAN 

1900  :  Jativier-Féurier-Mars-Avnl.  —  Aucun  fait  saillant 
nosl  à  signaler  ;  les  indigènes  s'entretiennent,  sans  y  pren- 
dre grand  intérêt,  des  péripéties  de  la  lutte  engagée  entre 
le  liogui  et  le  Sultan. 

Mai.  —  Quatre  prospecteurs  européens,  sous  la  conduite 
de  M.  Quijison,  ingénieur  de  la  Compagnie  Hovale  Astu- 
rienne,  sont  attaqués  près  de  Guel'aït  par  les  Oulad  Amor. 
Deux  sont  blessés  et  pris  ;  ils  sont  ensuite  rendus  au  poste 
de  Berguent. 

Juin-Juillet.  —  La  lutte  entre  le  Rogui  et  le  Sultan  entre 
dans  une  période  plus  active.  Le  premier  s'est  rapproché 
de  Fez  avec  toutes  ses  forces.  On  raconte  que  les  Espagnols 
cherchent  à  élargir  leurs  moyens  d'action  autour  de  Melilla. 

Août.  —  Les  nouvelles  des  combats  livrés  par  les  Riffains 
aux  Espagnols  dans  la  région  de  Melilla  sont  l'objet  de 
commentaires  défavorables  à  ces  derniers,  dont  les  échecs 
sont  connus. 

Septembre.  —  La  défaite  et  la  capture  du  Rogui  par  les 
troupes  de  Moulay  Hafid  sont  les  faits  saillants  du  mois. 

Octobre.  —  Le  bruit  de  la  mise  à  mort  du  Rogui  est  peu 
commenté  ;  on  dit  cependant  que  certaines  tribus  maro- 
caines ont  reçu  des  lettres  démentant  cette  mort  et  les  enga- 
geant à  ne  pas  se  soumettre  à  Moulay  Hafid,  mais  on 
apprend  ensuite  d'une  façon  certaine  le  supplice  subi  par 
le  prisonnier. 

* 

*  * 

Ainsi  (|ue  nous  l'avons  déjà  écrit,  la  mort  de  Bon  Amama, 
et  celle,  à  peu  de  distance,  du  Kogui,  furent  les  préludes 
de  la  paix,  cjue  notre  occupation,  en  s'étendant  progressi- 
vement, allait  très  ra})idement  faire  régner  dans  cette 
région  qui  avait  été  si  troublée. 


DOCUME.M'S  l'OLK  SLKVIIl  A  I  .'il  IS  I  (  )l  lU:  KKS  IIXMVAN       145 

CHAPlTHi:  l\ 
Q l  KSI  10 \S  A I )>! I MSTR ATI VES 


Pendant  la  dernière  période  dont  nous  venons  d'essayer 
d'esquisser  l'histoire,  le  cercle  de  Méchéria  subit,  au  point 
de  vue  aduiinislralif,  dilïérents  changements  ou  fut  sou- 
mis à  certaines  réglementations  cpie  nous  croyons  utile, de 
rappeler  ci-dessous. 

Il  importait  en  effet  de  limiter  les  parcours  immenses 
qu'avant  notre  domination,  les  Hamyan  n'avaient  cessé 
d'utiliser. 

La  colonisation  (|ui  s'était  avancée  vers  le  Sud  leui'  inter- 
disait désoimais  la  vallée  de  la  Mekerra  et  les  environs  de 
Tlemcen,  ainsi  que  ceux  de  Ténira  ofi,  cependant,  existe 
toujours  un  douar-commune  Hamyan. 

Vers  l'Ouest,  nous  les  restreignions  et  leur  interdisions 
d'aller  dans  la  vallée  de  l'Oued  Charef. 

Au  Sud,  ils  n'avaient  plus  de  raisons  pour  ensiloter  dans 
les  ksour  Amour,  et  des  questions  d'administration  locale 
faisaient  restreindre  d'une  façon  excessive  leurs  mouve- 
ments annuels  d'achaba  dans  le  Sahara. 

Une  série  de  mesures  durent  être  prises  pour  régler  leurs 
rapports  avec  leurs  voisins. 

MODI  s  VIVENDI   ADOPTÉ   ENTRE   MÉCHÉRIA   ET   El-ArICHA 

Après  la  création  de  l'annexe  de  Méchéria  (i885),  on 
adopta,  pour  éviter  toute  contestation  entre  les  Hamyan 
d'une  part,  et  les  Angad  et  les  Oulad  En  Néhar,  d'El-Aricha, 
de  l'autre,  un  modus  vivendi  qui  fut  sanctionné  par  le 
général  Détrie,  commandant  la  Division  dOran  (1886). 

Les  dispositions  qu'il  contenait  sont  toujours  en  vigueur 
et  sont  les  suivantes  : 

1°  La  limite  Nord  des  parcours  des  Hamyan  est  jalonnée 
par  les  points  d'eau  Magoura,  Mechera  el  Ahmar,  El-Ari- 
cha,  Kerbaïa,  Taërziza,  Kersouta  et  Ras-el-Ma  (Crampel)  ; 

2°  La  limite  Sud  des  parcours  des  Angad  et  des  Oulad 
En  Néhar  est  formée  par  la  rive  Nord  des  deux  chotts  et  par 
une  ligne   droite  reliant   ces   chotts  de   Bou   Guern   à   la 


146       DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  u'iIISTOIRE  DES  H AMYAN 

koubba  de  Sidi  Ahmed  Ben  Miloud  (chott  Gharbi)  et  pas- 
sant par  Dayet  El  Chereg  ; 

3°  Par  suite,  il  existe  une  région  commune  où  Hamyan, 
Angad  et  Oulad  Néhar  peuvent  campei',  faire  pacager  et 
abreuver  leurs  troupeaux  ; 

4"  Les  points  d'eau  de  la  limite  Nord,  de  même  que  ceux 
situés  dans  les  deux  chotts,  sont  communs  aux  nomades 
des  deux  annexes  ; 

5°  Les  migrations  de  ces  nomades  s'eiTectueront  d'après 
la  règle  suivante  : 

Lorsque  les  Angad  et  les  Oulad  Néhar,  qui  ne  se  rendent 
(]ue  temporairement  dans  la  région  commune,  habituelle- 
ment au  printemps  et  à  l'automne,  désireront  y  conduire 
levus  troupeaux  et  y  camper,  ils  en  feront  la  demande  au 
chef  d'annexé  d'El-Aricha  qui  préviendra  son  collègue  de 
Méchéria.  Celui-ci  prendra  les  mesures  voulues  pour  satis- 
faire aux  demandes  qui  lui  seront  transmises  ;  il  assignera 
aux  demandeurs  les  campements  et  les  points  d'eau  dont 
ils  pourront  disposer  ;  il  déplacera  au  besoin  les  Hamyan  ; 
enfin  il  s'efforcera  d'éviter  tout  sujet  de  rixes  et  de 
contestations  ; 

6°  L'action  des  ofïiciers  du  bureau  d'El-Aricha  s'exercera 
de  la  manière  suivante  au  point  de  vue  de  la  police  judi- 
ciaire :  elle  s'étendra  jusqu'à  la  limite  Sud  de  la  région 
commune  pour  toutes  les  affaires  intéressant  les  indigènes 
relevant  de  l'annexe  d'El-Aricha.  Elle  sera  limitée  vers  le 
Sud  à  la  ligne  Magoura,  Teniet  es  Sassi,  El  Fedeg,  Mechera 
el  Konak,  Mechera  el  Ghomari,  Mechera  es  Sloughi, 
Mechera  ben  el  Soit  an,  Timezirine  et  Ras-el-Ma  pour  les 
affaires  intéressant  quoique  ce  soit  ; 

7°  L'action  judiciaire  des  officiers  de  l'annexe  de  Méché- 
ria s'étendra  jusqu'à  la  limite  qui  vient  d'être  indiquée 
(celle  des  Mechera)  pour  toutes  les  affaires  concernant  les 
Hamyan  et  les  étrangers,  à  l'exception  de  celles  réservées 
aux  officiers  de  l'annexe  d'El-Aricha  par  le  paragraphe 
précédent  ; 

8°  Lorsque  dans  une  même  affaire  judiciaire  ayant  son 
origine  dans  la  zone  comprise  entre  la  ligne  des  Mechera  et 
la  rive  Nord  des  chotts,  se  trouveront  compris  des  indigènes 
des  deux  annexes,  l'instruction  en  sera  faite  par  le  bureau 
dont  dépendent  les  prévenus  ou  les  coupables  ; 

9°  En  dehors  des  migrations  des  troupeaux  et  de  la  police 
judiciaire,  rien  n'est  changé  aux  errements  établis. 


DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN        147 


Ce  iiiodus  vivondi  fut  complété  de  la  façon  suivante  par 
le  général  O'Connor,  commandant  la  Division  d'Oran 
(n°  429,  du  3  mai  igoS)  : 

((  Les  llamyan,  lorsqu'ils  se  rapprochent  de  la  ligne  d'El- 
«  Aricha-Bedeau,  sont  placés,  pour  le  bon  ordre,  sous  la 
«  juridiction  administrative  du  chef  de  l'annexe  d'El-Ari- 
«  cha,  dès  qu'ils  arrivent  sur  le  versant  méditerranéen, 
«  c'est-à-dire  dans  la  région  où  les  eaux  coulent  vers  le 
«  Nord.  Les  caïds  ou  chefs  de  douars  doivent,  en  s'y  in'stal- 
«  lant,  aviser  sans  aucun  retard  le  chef  d'annexé  d'El-Ari- 
«  cha  de  leur  arrivée. 

«  Il  reste  d'ailleurs  entendu  qu'en  dehors  de  cette  bande 
((  de  territoire  assez  étroite,  et  à  cause  même  du  peu  de  lar- 
«  geur  de  cette  zone,  les  Hamyan  doivent  obéir  aux  ordres 
«  que  le  chef  de  l'annexe  d'El-Aricha  peut  avoir  à  leur 
((  donner  dans  des  circonstances  exceptionnelles  dont  il 
«  aura  à  rendre  compte  immédiatement  au  Général  de 
«  Division.  » 


* 
*  * 


En  190Ï,  après  l'occupation  des  deux  Forthassa  par  les 
Hamyan,  les  limites  du  cercle  de  Méchéria  sont  modifiées 
de  la  façon  suivante  : 

Au  Nord,  la  limite  est  constituée  par  la  chaîne  de  mon- 
tagnes qui,  partant  du  Teniet  Sassi,  suivant  le  DjebelSidi 
El  Abed  et  passant  par  El-Aricha,  décrit  un  vaste  demi-cer- 
cle dont  la  convexité  est  tournée  vers  le  Sud  ;  au  Nord-Est, 
elle  est  formée  par  une  ligne  inclinée  Nord-Ouest-Sud-Est, 
partant  de  Ras-Nouala  et  passant  par  Bou  Guern. 

A  l'Est,  la  limite  est  constituée  par  la  réunion  des  points 
de  Fekarine  et  Aïn-Malah. 

Au  Sud,  par  une  ligne  allant  d'Aïn-Meçif  à  Galloul. 

A  l'Ouest,  du  côté  du  Maroc,  la  frontière  reste  encore 
imprécise.  Nous  avons  vu  plus  haut  qu'on  s'était  contenté 
de  créer,  en  1901,  une  zone  d'influence  dite  «  zone  des 
marchés  ». 

Toutefois  les  droits  de  pâturage  et  de  parcours  des 
Hamyan  furent  maintenus  dans  toute  la  région  comprise  au 


148       00<:i   MKMS  POl   H  SKKNIM  a   l.'lllSIOlKE  DES  HAMVAN 

Noid  dv  la  lijiiu'  Djebel  Doiigli,  Oulakak,  El  Ambaa,  Djebel 
Moighad  et  Mekalis. 

A  ce  nioment,  on  chercha  à  entamer  une  action  contre 
les  Béni  Guil  et  on  envisagea  à  cet  effet  l'occupation  per- 
manente de  l'orthassa  Gharbia.  Lorsque  ce  poste  fut  créé 
en  1904, le  général  Lxautey  réunit  les  caïds  des  Béni  Metha- 
ref,  des  Meghaoulia  el  des  Akerma  ;  il  leur  expli(jua  que, 
pour  poursuivre  sa  polilicpie  vis-à-vis  des  Béni  Guil,  il  était 
obligé  de  rattacher  le  nouveau  poste  à  Aïn-Sefra,  mais  que 
les  Hamyan  conserveraient  tous  leuis  droits  sur  les  terrains 
situés  au  Nord  de  la  ligne  sus-indiquée.  A  la  fin  d'avril  1906, 
il  réitéra  ses  déclarations  à  l'agha  El  Hadj  El  Habib  el  aux 
caïds  des  Hamyan. 

Quelques  années  plus  tard,  les  gens  du  Makhzen  de  For- 
thassa  cherchèrent  à  éliminer  les  Hamyan  et  ils  semblè- 
rent, un  certain  moment,  être  arrivés  à  leurs  fins,  sans  que 
cependant  rien  de  régulier  n'ait  été  fait  à  ce  sujet. 

Limites  actneUes  du  cercle.  —  A  la  suite  de  tous  ces 
changements,  les  limites  actuelles  du  cercle  de  Méchéria, 
non  compris  les  droits  de  parcours  des  Hamyan  sur  les 
régions  environnantes,  sont  devenues  les  suivantes  : 

1°  Avec  l'Algérie  :  Du  Teniet  es  Sassi  à  Oglat  Taërziza 
(abreuvoirs  sur  la  route  d'El-Aricha  à  Bedeau)  par  la  crête 
du  Djebel  Sidi  El  Abed  et  par  Oglat  Kerbaïa,  et  en  laissant 
El-Aricha  au  Nord.  D'Oglat  Taërziza  en  ligne  droite  sur 
Bas-Nouala,  dans  le  Djebel  Timezirine  ;  de  ce  dernier  point 
la  limite  suit  l'Oued  Nouala,  l'Oued  Hammam,  les  bords 
Ouest  et  Sud  du  chott  Chergui,  traverse  celui-ci  en  face  du 
débouché  de  l'Oued  Kounifat,  suit  le  bord  septentrional  du 
chott,  contourne  le  Kreider  au  Sud  et  atteint  la  voie  ferrée 
h  Bou  Ktoub  qui  reste  au  cercle  de  Géryville  ^  ; 

2°  Avec  le  cercle  de  Géryville  :  De  Bou  Ktoub  à  l'inler- 
section  de  la  route  Méchéria-Géryville,  aux  puits  de  l'Oued 
Kheiba  ^rectification  du  6  mai  191 1).  Ligne  droite  de  l'Oued 
Khei  l)a  à  l'Aïn-Melah,  commun  aux  deux  cercles.  De  cette 
source  ;iu  conlluent  de  l'Oued  Bidan  et  de  l'Oued  Boighat 
(6  kilomètres  à  l'Ouest  de  l'Aïn-Méridja)  ; 

3°  Avec  l'annexe  d'Aïn-Sefra  :  Du  continent  de  ces  deux 
derniers  oueds  à  Aïn-Meçif  ;  de  ce  point  à  Mekalis  par  le 
Teniet  el  Khlakh  en  laissant  Mekalis  à  Aïn-Sefra. 


I  Un  niinvpini  projet  de  délimitnlioii,  soumis  au  Gouvornpur  Général,  attribue 
purement  et  simplement  le  bord  méiidional  du  chott  Chergui  jusqu'au  péri- 
mf'tre  du  coidn'  de  Wi<\\  Klnuli,  comme  liiiiitc  du  cercle  de  Méchéria. 


DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'iUSTOIRE  DES  HAMVAN       149 

Nous  avons  vu  dans  quelles  circonstances  le  poste  de 
Forthassa  fut  mis  sous  les  ordres  du  chef  de  l'annexe  d'Aïn- 
Sefra.  En  1907,  le  général  Lyautey  maintint  sa  décision 
en  précisant  que  :  l'administration,  l'état-civil  et  l'action 
politique  appartenaient  à  cette  mémo  annexe,  la  justice 
seule  dépendant  de  Méchéria.  En  réalité,  au  point  de  vue 
politique,  le  poste  de  Forthassa  ne  recevait  d'ordres  que 
directement  du  Général  commandant  le  territoire  d'Aïn- 
Sefra. 

Cet  état  de  choses  dura  jusqu'en  1909.  date  à  laquelle, 
étant  donné  la  personnalité  du  chef  de  l'annexe  d'Aïn- 
Sefra,  le  capitaine  Berriau  \  la  direction  politique  du  poste 
de  Forthassa  et  la  police  judiciaire  lui  furent  confiées. 

La  limite  provisoire  de  1896  (qui  n'avait  pas  été  sanc- 
tionnée d'ailleurs  par  le  Gouverneur  Général)  est  rempla- 
cée par  une  ligne  tout  aussi  provisoire,  partant  de  Mekalis, 
passant  au  Sud  de  Taoussera  et  de  Galloul  pour  aboutir  à 
l'Oued  Bon  Kholkhal,  en  laissant  Galloul  à  Méchéria.  Mais 
les  droits  de  parcours  des  Hamyan  restent  entiers  sur  toute 
la  région  située  au  Nord  de  ligne  Oulakak-Djebel  Dough  ; 

4°  Zone  d'influence  vers  l'Ouest  :  Pas  de  limite  admi- 
nistrative ;  une  zone  de  police  limitée  à  l'Ouest  par  la  ligne 
Teniet  es  Sassi,  Mengoub,  Brazzia,  Oued  Bou  Lardjam, 
Oued  Bou  Kholkhal. 

En  comparant  ces  limites  à  l'immense  zone  dans  laquelle 
les  Hamyan  ont  gravité  autrefois,  on  est  frappé  de  l'exi- 
guité  et  surtout  de  la  pauvreté  de  la  région  où  ils  ont  été 
cantonnés  par  des  décisions  successives,  dont  l'effet  ne 
devait  être  que  provisoire  et  qui  menace  de  s'éterniser.  La 
contrée  qui  leur  est  affectée  est  presque  désertique  et,  sauf 
pendant  les  années  exceptionnelles,  les  pâturages  y  sont 
maigres  et  les  points  d'eau  trop  éloignés  les  uns  des  autres 
et  peu  abondants.  Les  endroits  où  autrefois  ils  condui- 
saient de  préférence  leurs  troupeaux  leur  sont  maintenant 
interdits  et  il  serait  à  désirer  poiu'  eux  qu'on  leur  permit 
d'étendre  leurs  terrains  de  parcours  plus  au  Sud,  puisqu'au- 
cun  changement  ne  peut  plus  être  apporté  aux  limites 
Nord,  Est  et  Ouest. 


I   ActncUenient    lieutenant-colonel,    flirectenr    du    Personnel    Militaire    et    du 
Service  de?  Renseitrnement?,  à   la  Résidence  Générale  du  Maroc,  à  Rabat. 


12 


150      DOCUMENTS  POl  R  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN 

CHAPITRE  X 
LES  HAMYAN  ACTUELS 


La  période  de  paix,  de  calme  et  de  tranquillité  qui  suc- 
céda à  l'ère  troublée  et  aux  grandes  expéditions  contre  leurs 
voisins  de  l'Ouest,  n'a  pas  arrêté  l'humeur  batailleuse  et 
l'amour  du  bien  du  voisin  innés  chez  les  Hamyan. 

L'autorité  française  a  eu,  à  maintes  reprises,  à  employer 
pour  son  service  ces  gens  remuants  et  hardis  et,  bien  enca- 
drés, ils  ont  donné  toute  satisfaction  en  fournissant  de 
nombreux  goums  tant  pour  la  conquête  du  Maroc  que  pour 
la  lutte  contre  l'Allemagne. 


* 

*    :t 


El  Hadj  Mohammed  ould  El  Hadj  Ahmed,  caïd  des  Oulad 
Khelif,  et  Ben  Miloud  ould  El  Aïd,  caïd  des  Meghaoulia, 
marchèrent  à  la  tête  du  premier  goum  qui  débarqua  à 
Casablanca  en  1907  et  qui  prit  part  aux  combats  de  Sidi 
Brahim,  Tadarit  et  Sidi  Moumen. 

Pour  la  campagne  contre  les  Béni  Snassen  (décem- 
bre igo8),  les  indigènes  du  cercle  de,  Méchéria  envoyèrent 
un  goum  à  pied  et  un  goum  à  cheval,  commandés  par  les 
caïds  Larabi  ould  Tayeb,  des  Oulad  Scrour,  El  Mir  ould  El 
Hadj  Naceur,  des  Rczaïna  Gheraba  et  par  Abd-el-Hamid, 
des  Bekakra,  l'un  des  fils  do  feu  l'agha  El  Hadj  Kaddour 
ould  Boufeldja. 

A  la  première  colonne  du  Haut-Guir  (mars  à  juin  1908), 
quatre  goums  Hamyan  marchèrent  avec  nos  troupes. 

En  191 1,  cette  même  confédération  eut  un  goum  sur  la 
Moulouya  (septembre  à  décembre)  avec  les  caïds  Boufeldja, 
des  Bekakra,  El  Hadj  Demouche,  des  Oulad  Mansourah 
et  Zoghmane  ould  El  Hadj  El  Habib,  fils  de  l'agha  El  Hadj 
El  Habib  ould  Mebkhout,  et  un  autre  en  Chaouïa  (octobre 
19TT  à  janvier  T912)  avec  les  caïds  M'hammed  ould  El 
Hadj  Abderrahmane,  des  Megan,  et  Yahia  ould  Saïd,  dos 
Oulad  Farès. 


DOCUMENTS  POUR  SERVIK  A  l'uISTOIRE  DES  HAMVAN       151 

Kniiii,  CM  i<)i.H,uii  dcnii-goiim  tlamvaii,  au(|ucl  prit  part 
Abdelkader  ould  El  Mahi,  des  Oulad  Mansourah,  de  la 
famille  des  Oulad  Mebkhout,  combattit  à  Maharidja,  Sidi 
Youssef,  Nekhila  et  Moul  el  Bâcha  (mars  à  juin),  Maroc 
Oriental  (occupation  de  M'çoun). 

* 

*  * 

La  déclaration  de  guerre  de  l'Allemagne,  en  191 4,  permit 
aux  Hamyan  et  aux  Rezaïna  de  montrer  leur  loyalisme. 

Deux  cents  spahis  auxiliaires  levés  dans  le  cercle,  parti- 
rent, en  septembre,  en  Flandre,  sous  le  commandement  du 
capitaine  du  Vigan,  ancien  adjoint  au  Bureau  des  Affaires 
indigènes  de  Méchéria. 

Les  quatre  pelotons  composant  cet  escadron  étaient  com- 
mandés par  El  lladj  Demouche  ould  El  Hadj  El  Habib, 
caïd  des  Oulad  Mansourah,  El  Hadj  Mohammed  ould  El 
Hadj  Ahmed,  caïd  des  Oulad  Khelif,  Boubekeur  ould  El 
Hadj  Miloud,  caïd  des  Akerma  Gheraba  ;  Ahmed  ould  El 
Aïd,  frère  du  caïd  des  Meghaoulia.  (Ce  dernier  fut  tué  en 
décembre  1914,  au  cours  d'une  reconnaissance  exécutée 
près  de  Nieuport.) 

D'autre  part,  environ  i.ooo  indigènes  du  cercle  de  Méché- 
ria s'engagèrent  aux  Tirailleurs  algériens  pour  la  durée  de 
la  guerre. 

En  même  temps,  deux  des  officiers  adjoints  du  Bureau 
des  Affaires  indigènes  de  Méchéria,  le  lieutenant  Mieg 
Robert,  avec  les  spahis  auxiliaires,  et  le  lieutenant  Bernard 
Fernand,  avec  le  6^  Tirailleurs  algériens,  partaient  pour  le 
front. 

Le  lieutenant  Bernard  est  glorieusement  tombé  en  char- 
geant à  la  tête  de  son  peloton  de  tirailleurs  contre  la  Garde 
prussienne. 

* 

*  * 

Travaillés  par  des  inlluences  restées  peu  connues,  et 
s'appuyant  sur  le  renouvellement  semestriel  du  paiement 
d'une  prime  d'engagement,  une  partie  des  goumiers  et 
tirailleurs  enrôlés  pour  la  durée  de  la  guerre  de  1914  pré- 
tendirent, au  bout  de  six  mois,  qu'ils  ne  s'étaient  engagés 
que  poiu-  vm  semestre  et  non  pour  la  durée  de  la  guerre  et 
cherchèrent  à  créer  une  équivoque  et  du  désordre. 

Energiquement  réprimée,  cette  tentative  d'intrigue 
avorta  et  chacun  servit  ensuite  d'une  façon  pai'faite. 


152     uocuMExrs  poir  skrn  tu  a  t.'histoire  des  ii\myan 


Depuis  plus  de  Ueiile-trois  ans  que  nous  avons  placé  sous 
noire  doniinalion  une  région  qui  avait,  jusque  là,  échappé 
à  toute  action  administrative,  les  conditions  d'existence 
des  populations  ainsi  soumises  à  notre  contrôle  et  à  notre 
autorité  immédiate  ont  subi  des  modifications  notables. 

Dès  que  le  bien-être  a  pénétré  chez  les  indigènes  des 
Hauls-Plateaux,  des  changements  très  visibles  se  sont  pro- 
duits dans  leurs  usages  et,  de  là,  se  dégagent  les  symp- 
tômes d'une  évolution  vers  le  demi-nomadisme  et  l'aban- 
don des  grandes  transhumances. 

Ces  gens  étant  et  ne  pouvant  être  que  pasteurs,  ne 
deviendront  jamais  sédentaires.  Mais  ils  sont  arrivés  à  la 
période  des  parcours  à  amplitude  restreinte  sur  un  péri- 
mètre dans  l'intérieur  duquel  ils  séjournent  d'une  façon 
répétée  sur  les  mêmes  points. 

Ils  ont  subi,  sans  s'en  apercevoir,  le  contact  constant  des 
courtiers  commerciaux  ;  les  colportems  kabyles  leur  ont 
apporté  les  produits  du  Tell  ;  ils  ont  été  attirés  sur  tous  les 
marchés  européens  environnant  leurs  steppes,  et  leurs  cou- 
tumes et  leius  mœurs  en  ont  reçu  une  impression  qui  n'a 
cessé  de  modifier  leur  genre  de  vie. 

Une  moindre  fré(|uence  des  migrations,  une  réduction 
de  leur  étendue,  une  rareté  des  séjours  dans  le  Sahara,  une 
tendance  vers  la  culture,  et  par  suite  vers  la  possession  pri- 
vative du  sol  par  droit  d'occupation  et  d'usage,  une  plus 
grande  recheiche  dans:  l'alimentation  et  les  vêtements, 
l'acquisition,  par  les  riches,  d'immeubles  dans  les  centres 
européens,  une  amélioration  de  la  mentalité  indigène  en 
ce  qui  concerne  le  respect  de  la  vie  humaine  et  du  bien 
d'autrui,  l'abandon  progressif  des  instincts  belliqueux,  tels 
sont  aujourd'hui  les  effets  les  plus  caractéristiques  de  notre 
influence  chez  les  Hamyan. 

Le  contact  de  la  civilisation  leur  a  créé  des  besoins  et 
leur  existence  est  maintenant  moins  frugale  que  jadis. 

L'usage  du  café,  du  thé,  du  sucre  à  peine  connu  à  l'épo- 
que de  l'indépendance,  a  d'abord  pénétré  sous  les  tentes 
des  riches  et  s'est  répandu,  peu  à  peu,  comme  un  besoin  de 
première  nécessité,  chez  les  gens  de  moyenne  aisance. 

Les  vêtements  sont  plus  recherchés  et  la  facilité  de  se 
procurer  à  Méchéria  même,  à  Aïn-Sefra,  à  Géryville,  ou 
dans  le  Tell,  des  tissus,  des  étoffes,  des  tentures  diverses,  a 
excité  la  convoitise  de  tous. 


DOCLMEM'S  POl  R  SERVIR  A  l'iIISTOIRE  DES  HAMYA.N        153 

Celle  uUiraiice  vers  un  ^^uperilu  que  le  nomade  ignorait 
dans  la  première  moitié  du  siècle  dernier  est  devenue  géné- 
rale et  elle  va  croissant. 

L'abondance  a  pénétré  sous  la  lente  du  pauvre  qui  peut 
maintenant  s'employer  sans  crainte  soit  comme  sokhar, 
soit  comme  cueillcur  d'alfa. 

Une  situation  embnrrassée  avail  pesé  sur  les  indigènes  à 
la  suite  de  la  disette  de  1897.  Les  nombreuses  colonnes  qui 
opérèrent  dans  le  Sud,  à  partir  de  1900,  et  pour  lesquelles 
de  très  importants  convois  de  chameaux  furent  réquisi- 
tionnés dans  1(^  cercle,  tiienl  affluer  largenl  el  ramenèrent 
la  prospérité. 

Les  besoins  ont  subi  une  progression  ;  ce  qui  constituait 
le  superflu  est  devenu  aujourd'hui  indispensable  par 
l'accoutumance. 

L'ère  des  coups  de  main,  des  entreprises  hasardeuses,  des 
fructueuses  razzias  étant  close,  l'indigène  ne  peut  trouver 
l'augmentation  nécessaire  de  ses  ressources  (jue  dans  son 
labeur. 

* 
*  * 


Cette  évolution  de  la  vie  des  nomades  entraîne  peu  à  peu 
un  assoupissement  de  l'esprit  d'indépendance,  de  l'amour 
des  aventures  et,  par  suite,  une  disparition  des  instincts 
pillards  et  belliqueux. 

Les  aspirations  vers  la  liberté  absolue,  hors  de  toute  auto- 
rité, sont  maintenant  étouffées. 

Il  ne  reste  dans  l'esprit  de  la  génération  actuelle  qu'une 
vague  vision  de  l'époque  d'anarchie  durant  laquelle  la  force 
était  la  seule  loi. 

L'affaiblissement  des  énergies  guerrières  entraîne  sans 
cesse  une  disjonction  plus  marquée  des  groupements  jadis 
étroitement  unis  dans  la  période  de  luttes. 

Le  lien  qui  joignait  tous  les  Hamyan  est  purement  vir- 
tuel de  nos  jours.  Il  n'existe  plus  qu  à  l'état  de  souvenir. 

L'esprit  de  particularisme  se  développe  chaque  année 
davantage. 

Cet  état  de  choses  ne  saurait  être  que  favorable  au  déve- 
loppement de  la  situation  économique. 

L'élevage  assure  un  capital  qui,  bien  que  peu  solidement 
assis,  procure  des  ressources  suffisantes. 

L'augmentation  du  nombre  de  points  d'eau,  qui  s'est 
poursuivi  sans  interruption,   a  permis  l'utilisation  d'une 


154       DOCUMEM'S  POL  R  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMWN 

grande  partie  des  pâturages  qui  jadis  étaient  délaissés  par 
suite  de  la  dilliculté  d'abreuvement. 

En  résumé,  les  Hamyan  sont  entrés  dans  une  ère  de 
prospérité  dont  ils  nous  sont  entièrement  redevables. 

Dans  ce  pays  oiî  des  ksour  existèrent  jadis  (par  exemple 
à  Touadjeur,  Taoussera,  Aïn-Meçif,  dans  l'Oued  Korima, 
etc.,  etc.)  et  oii  la  population  préhistorique  a  laissé  de  très 
nombreux  vestiges  (tumuli  ou  bazinas  abondants  dans 
l'Oued  Korima  aux  environs  de  Touadjeur,  de  l'Oglat 
Mehaïa,  elc,  etc.),  nous  ne  devons  pas  espérer  voir  revenir 
une  population  sédentaire. 

La  transformation  du  régime  des  eaux,  l'abaissement  de 
la  nappe  aquifère  ont  trop  agi  sur  tous  les  Hauts-Plateaux 
pour  qu'il  soit  possible  d'espérer  y  tirer  un  profit  quelcon- 
que de  l'agriculture. 

Les  Hamyan  resteront  pasteurs,  mais  ils  pourront  aug- 
rnenter  et  développer  leur  cheptel  dans  de  larges  condi- 
tions. Cette  richesse,  quoique  toujours  un  peu  précaire,  est 
cellp  qui  s'adapte  le  mieux  à  leur  tempérament  et  à  leurs 
aptitudes. 

Nous  ne  les  verrons  plus,  si  ce  n'est  dans  nos  goums, 
combattant  comme  jadis. 

Cependant  nous  ne  devons  pas  oublier  qu'ils  restent  sou- 
mis aux  influences  maraboutiques  et  qu'ils  sont  toujours 
susceptibles  d'être  entraînés  dans  l'orbite  d'intrigants  per- 
sonnages, même  s'ils  sont  hostiles  à  notre  influence. 

C'est  à  nous  qu'il  appartiendra  d'arriver  à  faire  dispa- 
raître ces  derniers  vestiges  de  la  marque  profonde  qu'avait 
creusée  chez  eux  le  maraboutisme. 


CHAPITRE  XI 


LA  QUESTION  DES  GRANDS  CO>DIANDEMENTS 
CHEZ  LES  HAMYAN 


La  question  des  Grands  Commandements  chez  les 
Hamyan  n'a,  jusqu'à  présent,  jamais  été  résolue  d'une 
façon  satisfaisante,  par  suite  de  l'impossibilité  où  l'on  s'est 
toujours  trouvé  de  pouvoir  mettre  à  leur  tête  un  chef  dont 
l'autorité  soit  acceptée  sans  conteste. 


DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN       155 

Chaque  tribu  a  sans  cesse  voulu  conserver  son  indépen- 
dance relative  ;  chaque  caïd  a  toujours  prétendu  ne  vouloir 
à  aucun  prix  d'un  intermédiaire  entre  l'Autorité  française 
et  lui,  et  tout  ce  qu'on  a  tenté  pour  faire  agréer  sans  res- 
trictions un  agha  a  échoué. 

La  question  avait  été  remarquablement  traitée,  en  1870, 
par  le  général  Glianzy  dans  son  projet  d'organisation  des 
Hamyan  ;  mais  les  divers  essais  auxquels  on  se  livra  n'abou- 
tirent à  rien  de  durable. 

Nous  avons  vu  précédemment  se  succéder  Mebkhout, 
Sidi  Cheikh  Ben  Tayeb,  de  nouveau  Mebkhout,  puis  Mou- 
lay  Seddik,  Mohammed  ould  Mustapha  Ben  Ismaël,  Tayeb 
Ben  Sliman  [chez  les  Djemba),  Ben  Abdallah,  Si  Sliman 
Ben  Kaddour,  sans  arriver  à  imposer  d'une  façon  définitive 
un  chef  réel  à  ces  nomades. 

L'esprit  d'indépendance,  l'idée  de  féodalité,  le  besoin 
d'intriguer  sans  cesse  étaient,  et  sont  encore,  trop  ancrés 
dans  les  coutumes  des  caïds  en  fonction  pour  qu'ils  puis- 
sent admettre  d'avoir  à  se  soumettre  à  quelqu'un  qui  ne 
soit  pas  de  leur  parenté.  Encore  même  des  discussions  intes- 
tines existent-elles  souvent  dans  les  grandes  familles,  et 
voit-on  des  frères  et  des  cousins  se  déchirer  entre  eux  pour 
s'enlever  les  uns  aux  autres  une  parcelle  de  pouvoir. 

Le  seul  moyen  à  employer  était,  semble-t-il,  de  renoncer 
à  créer  un  ou  des  aghas  et  à  faire  de  l'administration  directe 
avec  les  chefs  indigènes  de  chaque  tribu. 

11  y  avait  même,  à  notre  avis,  un  intérêt  puissant  pour 
nous  à  laisser  chez  les  Hamyan  chaque  caïd  vivre  dans  une 
complète  indépendance  vis-à-vis  de  son  voisin,  à  lui  per- 
mettre de  conserver  aussi  jalousement  qu'il  le  voudrait  son 
indépendance,  si  féodale  puisse-t-elle  paraître,  pourvu 
qu'il  eût  toujours  les  yeux  toinnés  vers  nous  dès  qu'il 
sentirait  son  autorité  ébranlée. 

En  résumé,  il  fallait  avoir  «  de  la  poussière  de  tribus  »  et 
non  pas  des  Grands  Commandements  ;  le  principe  «  Divi- 
ser pour  régner  »  devait  être  pour  nous,  chez  ces  nomades, 
une  ligne  de  conduite  constante,  l'époque  de  la  conquête 
étant  achevée,  et  la  période  de  simple  administration 
devant  totalement  remplacer  la  période  de  «  politique 
indigène  ». 

(L'idée  que  nous  exposons  ici  ne  vise,  bien  entendu,  que 
les  Hamyan  qui,  par  suite  de  leurs  origines  très  diverses, 
n'ont  jamais  eu  de  grande  famille  établie  depuis  des  siècles 
parmi  eux  et  pouvant  s'imposer  à  tous.) 


156       DOCUMEMS  POLR  SERVIH  A  l'hISTOIRE  DES  HAMïVN 


* 
*  * 


Après  la  lévocalion  de  Si  Slimaii  Ben  Kaddour,  celte 
façon  de  procéder  sembla  admise. 

Les  chefs  indigènes  durent  entrer,  peu  à  peu,  en  relations 
directes  avec  les  ofliciers  du  Bureau  arabe. 

Mais  le  fils  de  l'agha  Mebkhout,  El  Hadj  El  Habib  ould 
Mebkhout,  ambitionnait  de  jouer  un  rôle  politique  supé- 
rieur aux  fonctions  de  caïd  de  la  tribu  des  OuladMansourah. 

Ses  intrigues,  son  astuce,  jointes  d'ailleurs  à  de  remar- 
quables qualités  d'homme  de  guerre  et  à  une  très  vive 
intelligence,  finirent  par  lui  faire  obtenir  sa  nomination 
au  titre  d'agha. 

Mais  il  ne  put  arriver  à  commander  que  quatre  tribus 
des  Hamyan  Chafaa,  les  Oulad  Mansourah,  les  Oulad  Khe- 
lif,  les  Akerma  et  les  Béni  Metharef ,  et  encore  rencontra-t-il 
des  résistances  violentes. 

Quant  aux  Bekakra,  dont  le  chef,  El  Hadj  Kaddour  ould 
Boufeldja,  était  son  adversaire  politique,  ils  furent  mis  en 
dehors  de  son  commandement  et,  pour  contrebalancer  la 
nomination  d'El  Hadj  El  Habib,  on  éleva  El  Hadj  Kaddour 
ould  Boufeldja  à  la  dignité  d'agha  honoraire. 

El  Hadj  El  Habib  ould  Mebkhout  créa,  comme  agha,  de 
nombreuses  difficultés  à  l'Autorité. 

Violent,  impulsif,  grugeant  durement  ses  administrés, 
nous  cachant  bon  nombre  de  faits  dont  il  tirait  bénéfice,  il 
finit  par  lasser  à  peu  près  tout  le  monde. 

Sur  la  fin  de  sa  carrière,  pour  s'en  débarrasser  tout  en  lui 
tenant  compte  des  services  de  guerre  qu'il  avait  rendus,  on 
le  nomma  bachagha  honoraire,  sans  aucun  commandement. 

A  sa  mort,  il  ne  fut  pas  remplacé. 

Quelques  années  après,  l'agha  honoraire  El  Hadj  Kad- 
dour ould  Boufeldja,  qui,  quoique  n'exerçant  pas  de  com- 
mandement, avait  heureusement  contrebalancé,  par  son 
influence,  l'activité  trop  grande  d'El  Hadj  El  Habib  ould 
Mebkhout,  fut  assassiné  en  juin  19 14,  dans  une  rue  de 
Méchéria,  par  un  fou  originaire  des  Bekakra  lequel,  en 
venant  lui  embrasser  l'épaule  en  guise  de  salut,  lui  tira  à 
bout  portant,  dans  les  reins,  un  coup  de  pistolet. 

T>' Autorité  supérieure  qui  avait  envisagé  depuis  un  cer- 
tain temps  la  réorganisation  des  Grands  Corhmandements 
chez  les  Hamyan  voulut,  de  plus,  donner  une  compensa- 
lion  à  la  famille  de  cet  excellent  serviteur  et  fit  nommer 


UOCl  AJE.MS  l»OL  R  !>EKVIU  A  l.'lIlSTOlKK  DES  II  \  \n  \N        137 

aghu  des  ciiui  Uibus  des  ll;imy;iii  Chufaa  luii  de  ses  lils, 
Bouleidja  ould  El  lladj  Kaddour,  caïd  des  Bekakia. 

Cette  nomination  mit  en  émoi  les  caïds  des  quatre  autres 
tribus  des  Chalaa. 

En  effet,  le  caïd  des  Oulad  Mansourah  était  l'I  Hadj 
Dcmouche  ould  El  Hadj  El  Habib,  lils  de  feu  El  Hadj  El 
Habib  ould  Mebkhout  ;  le  caïd  des  Oulad  Khelif  était  El 
Hadj  Mohammed  ould  El  Hadj  Ahmed,  neveu  d'El  Hadj 
El  Habib  cndd  .Mebkhout  ;  le  caïd  des  Akerma  était  Boube- 
keur  ould  El  Hadj  Miloud,  marié  à  la  nièce  d'El  Hadj  El 
Habib  ould  Mebkhout  ;  le  caïd  des  Béni  Metharef  était 
Boudjema  ould  Bou  Smaha,  beau-frère  d'El  Hadj  El  Habil) 
ould  Mebkhout. 

Ils  prétendirent  que,  puisque,  lorsqu'El  Hadj  El  Habib 
ould  M(>bkhout  était  agha,  on  ne  lui  avait  pas  donné  le 
conmiandement  des  Bekakra,  il  n'y  avait  pas  de  raison  pour 
qu'on  donnât  au  caïd  actuel  des  Bekakra  le  commande- 
ment de  tous  les  Chafaa. 

L'opposition  la  plus  vive  se  produisit  ;  des  caïds  refusè- 
rent d'obéir  au  nouvel  agha,  des  intrigues  sans  nombre  se 
renouvelèrent,  et,  il  fallut,  en  1916,  prendre  des  mesures 
de  rigueur  pour  détendre  la  situation. 

En  même  temps  qu'elle  avait  fait  normner  Boufeldja 
ould  El  Hadj  Kaddour  agha  des  Ilamvan  Chafaa, l'Autorité 
supérieure  avait  fait  élever  à  la  dignité  d'agha  honoraire 
des  Hamyan  Djemba,  le  caïd  des  Sendan,  El  Hadj  Ôth- 
mane  ould  Cheikh. 

Quoique  cette  nomination  fut  purement  honorifique, 
elle  provoqua  des  protestations  de  la  part  des  caïds  des 
Djemba,  qiu  redoutèrent  de  voir  le  titulaire  de  cet  honneur 
arriver,  par  ses  intrigues,  à  obtenir,  à  un  moment  quelcon- 
que, que  son  titre  d'agha  honoraire  se  transformât  en  celui 
d'agha  titulaire.  Cette  crainte  n'était  pas  sans  fondement, 
El  Hadj  Othma^ne  ould  Cheikh  ayant  tenté  quelques  démar- 
ches dans  ce  sens  et  ayant  dit  à  ses  amis  :  «  Le  général  m'a 
«  mis  une  musette  vide  sous  le  nez  en  me  faisant  nommer 
«  agha  honoraire  :  il  faudra  qu'il  la  remplisse.  » 

En  plus  de  ces  deux  causes  de  dissensions,  le  caïd  Ben 
Miloud  ould  Laïd,  caïd  des  Meghaoulia,  qui  avait  depuis 
longtemps  sollicité  les  fonctions  d'agha  et  était  dépité  de 
son  échec,  mena  de  son  côté  une  série  d'intrigues  et  contri- 
bua à  rendre  difficile  l'action  du  commandement  local. 

En  somme,  la  nouvelle  tentative  faite  pour  créer  des 
Grands  Commandements  chez  les  Hamyan   n'a,   jusqu'à 


158       DOCUMENTS  POL  K  SEUVIU  A  l/llISTOTRE  DES  H AMVAIV 

présent,     pas    été    plus    couronnée    de    succès    que    les 
précédentes. 

* 

Nous  résumons  ci-uprès  la  vie  de  quelques  personnalités 
indigènes  ayant  joué  un  rôle  important  dans  la  question 
du  commandement  chez  les  Hamyan. 

El  Uadj  El  Habib  ould  Mebkiiout.  —  El  Hadj  El  Habib 
ould  Mebkhout  appartenait  à  une  famille  de  Cheurfa. 

l/origine  de  cette  famille,  établie  par  un  arbre  généalo- 
gique dont  la  valeur  a  été  discutée,  et  dont  nous  donnons 
une  copie,  remonterait  donc  à  Fatima  Zohra,  fille  du 
Prophète. 

Le  descendant  de  celle-ci,  Idriss  le  Grand,  venu  d'Arabie 
à  Fez,  serait  l'ancêtre  de  toute  la  lignée  qui,  après  avoir 
donné  Moulay  Ali,  venu  de  Fez  au  Touat  (où  il  est  enterré 
et  a  une  koubba  à  El  Obbat),  a  produit  ensuite  Moulay 
Abdelkrim,  venu  du  Touat  au  Sahara  algérien,  chez  les 
Hamyan,  et  a  abouti  à  Mebkhout  et  à  El  Hadj  El  Habib. 

La  famille  est  sortie  de  la  zaouïa  de  Touki,  près  de  Del- 
doul  (Gourara) . 

Dès  le  temps  des  Turcs,  Ahmed  ould  Abdelkrim  et  son 
fils,  Mebkhout  ould  Ahmed,  étaient  les  premiers  person- 
nages des  Chafaa  ;  ils  traitaient  directement  avec  les  Beys 
d'Oran,  lorsqu'en  été  les  Hamyan  avaient  à  faire  des  achats 
de  grains. 

Mebkhout  eut  même  un  jour  un  différend  avec  le  Bey  de 
Tlemcen,  Mohammed,  qui  vint,  avec  une  colonne,  l'atta- 
quer à  Gara  Beïda  (au  Nord-Est  d'Oglat  Nadja,  dans  le  chott 
Gharbi)  :  un  combat  violent  s'engagea  où  Mebkhout  eut 
deux  chevaux  tués  sous  lui  ;  les  Chafaa  eurent  quel- 
ques morts  et  la  colonne  turque  subit  des  pertes  assez 
considérables. 

Lorsqu'arriva  le  règne  de  l'émir  Abdelkader,  Mebkhout 
fut  son  lieutenant  dans  le  Sud-Ouest  et,  avec  les  Chafaa,  le 
servit  fidèlement. 

Ce  fut  même  là,  dit-on,  vme  des  principales  causes  de 
l'attribnlion  des  Hamyan  Chafaa  à  la  France. 

Eu  effet,  lors  des  négociations  qui  devaient  aboutir  au 
traité  de  t845,  il  fut  stipulé  que  tout  le  domaine  des  Turcs 
et  de  l'Emir  reviendrait  à  la  France. 

P;u-  stiilc,  lc>s  Chafaa  et  leur  chef,  MebkhonI,  devinient 


DOCUMENTS  POUR  SEKVIH  A  1.  HISTOIRE  DES  HAMYAN      159 


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El  Had]  MoUamnied      Bou  Be^eur 

caïil  des  (Uilad  Klidif  mort 

et  des  Oulad  Alansourah 

Otnmane    Zine-el-ADldlne 

mort 


S       ^,         El  Had]  Demouclie       ZogùmaDe 

«  _    '5:  1  raid  lies  (Miliiil  Maiiso  irali, 

ca  ^.^2  V  revoqiii-  m  liilii 

^  1 1  £  MoHainnied  Djelloul 

™  J=^/  'chaîna  des  Oiilad  M^nsoiirah. 

^       ~  BraHim     ElMaûl 

I  ï  i  =  i  s    Ben  M'Hammeil    Ben  Ziane 

S  ^^^i  '  AJdallati 


^  ||.^  ^   Afidelkader    Moùammed    BenSefla 
1  1=^!  /  M'Hamined    Ali 

J  g  i    El  Had]  Laired]     Kaddour    Moliamnied 
«  =  '   Saîû   Moùammed 


gNï-:\   AMallaù  ElHâd]D]lllali   Sliman 
Wiîit/     MoHammed    Said    BeDMllouil 

B3     H  ~  -s  r 


Kaddonr 

jS     '       ex-cliaouclidesOulad  Mansouiali,  rémquéen  1913 


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El  Hadj  Hadani  onid  Madaol 

\       ancien  khaliia  de*  Oulad  Mansourali, 
I     devenu  boiteux  a  la  suite  d'une  chute 
dans  un  liain  maure  a  Tleuicen 


Monammed    ADdelkader 


100       DOCl  MKMS  l>OLR  bEKN  lU  A  LlIISlOiaE  DES  II AMYAN 

sujets  l'iaiirais,  alois  que  les  Djeuiba  <}ui  n'avaient  pas  suivi 
jusqu'au  bout  Ja  l'oiiune  de  rEiuir  restaient  Marocains. 

LoisquAbdelkader  se  fut  livré  aux  Français,  Mebkhout 
se  réfugia  près  du  sultan  du  Maroc,  Moulay  Abderralunane, 
mais  ce  dernier  l'infonna  (jue  son  ambassadeur,  Si  llamida, 
avait  des  ordres  pour  nous  remettre  tous  les  sujetsde  l'Emir, 
parmi  lesquels  il  était  compris  ;  il  dut  par  suite  quitter  la 
cour  de  Fez. 

Mebkhout  vint  alors  se  présenter  ajux  Autorités  fran- 
çaises, lit  partie  de  la  députation  qui,  en  i848,  amena  au 
général  de  Mac-Mahon  des  chevaux  de  gada  en  guise  de 
soumission  et  fui  nommé  caïd  des  liamyan. 

IV'u  de  temps  après,  il  fut  nonmié  agha,  à  la  suite  des 
opérations  d'une  colonne  mobile  sortie  de  Tlemcen,  qu'il 
avait  ravitaillée  sur  les  ressources  de  sa  tribu  et  guidée  jus- 
que dans  le  chott  Tigri  où,  sous  le  commandement  du 
général  Uesmichels,  elle  avait  razzié  les  Zoua  Gheraba  et  les 
Hamyan  dissidents. 

I/un  de  ses  fils,  El  lladi  Dielloul  ould  Mebkhout,  fut,  en 
1855,  nommé  caïd  des  Oulad  Mansourah,  pius  révoqué. 

On  proposa  alors  un  autre  de  ses  fils,  El  Habib  ould  Meb- 
khout, pour  remplir  ces  fonctions. 

Nous  avons  exposé,  dans  le  chapitre  11  de  la  troisième 
partie  du  présent  travail,  le  rôle  joué  par  l'agha  Mebkhout 
pendant  les  débuts  de  la  conquête  :  nous  ne  reviendrons 
pas  ici  sur  celt(^  r|nestion. 


El  Hadj  El  Habib  ould  Mebkhout  î-at  nommé  caïd  des 
Oulad  Mansourah  en  18.57,  à  l'âge  de  16  ans. 

H  avait  déjà,  malgré  sa  jeunesse,  été  khalifa  de  son  père. 
Il  avait,  en  i8.55,  été  conservé  comme  otage  à  Tlemcen  à  la 
suite  d'une  défection  de  l'agha  Mebkhout. 

n  ne  tarda  pas  à. se  faire  remarquer  par  sa  bravoure.  Le 
«  Zegdoii  »  ayant  fait  incursion,  en  juin  1860,  sur  le  terri- 
toire des  Plamyan,  le  caïd  des  Oulad  Mansourah  contri- 
bua vaillamment  à  le  repousser  et,  pour  le  récompenser  de 
sa  conduite,  le  Général  commandant  la  Subdivision  lui  fit 
présent  d'un  fusil  d'honneur. 

Pendant  l'insurrection  des  Oulad  Sidi  Cheikh,  tandis  que 
la  révolte  s'étendait  sur  les  Hauts-Plateaux,  El  Hadj  El 
Habib  resta  quelque  temps  fidèle  à  notre  cause.  Sous  les 
ordres  du  colonel  Michel,  il  coopéra  à  une  razzia  faite  sur 


DOCl  MEMS  POl  R  SEHVIU  A  I.IIISIOIRE  DES  HAMYAN        101 

Sidi  (llicikli  lien  Tayeb  ;  il  lui  ble>:>é  le  ia  juin  i864  en 
allant  combattre  les  Harrar  dissidents  à  Freiha.  En  i865, 
nous  le  trouvons  encore  à  cùté  du  génériil  Diuieu  lorsijue 
celui-ci  se  lança  contre  les  Angad  et  les  Meliaïa,  à  Méchéria 
et  à  Ilarchaïa.  1/année  suivante,  il  fut  décoré  de  la  Légion 
d'honneur  et  son  attitude  lui  valut  des  éloges.  En  1867,  un 
goum  des  Oulad  Sidi  Cheikh,  vcjui  pour  razzier  les  llarnyan 
à  Taoussera,  l'ut  obligé  de  se  replier  et  un  parent  de  Si 
Ahmed  Ben  llauiza  fut  tué  dans  la  lutte  de  la  main  même 
d'El  Iladj  El  Habib  ould  Mebkhout. 

Trois  mois  s'étaient  à  peine  écoulés  après  ce  haut  fait  que 
le  caïd  des  Oulad  Mansourah,  malgré  les  conseils  de  son 
père,  partait  en  dissidence  et  allait  se  léfugier  chez  El  Iladj 
El  Arbi,  khalifa  du  Sultan  dans  le  Sud  ;  en  même  temps, 
il  demandait  l'aman  à  Si  Ahmed  Ben  llamza. 

11  l'abandon ua  bientôt  à  la  suite  du  succès  d'une  colonne 
envoyée  de  Géryville  qui  força  le  chef  des  rebelles  à  battre 
en  retraite.  Mais,  en  1869,  on  le  signala  de  nouveau  comme 
faisant  de  l'opposition  à  l'agha  Si  Mohammed  Ben  Abdallah 
et  engageant  les  Hamyan  à  la  désertion.  Sa  conduite  était 
inspirée  par  le  dépit  qu'il  ressentait  de  n'être  pas  placé 
comme  agha  à  la  tête  des  Chafaa.  Il  fut  révoqué  et  mis  en 
surveillance  au  Méchouar  de  Tlemcen,  sous  la  prévention 
d'intrigues  politiques  (20  février)  ;  on  l'interna  ensuite  à 
Cherchell,  pendant  que  son  frère,  El  Hadj  Djelloul,  était 
interné  à  Sainte-Marguerite.  Sa  famille,  qui  l'avait  suivi, 
fut  autorisée  à  rentrer  le  22  avril  1870  et  le  2  juin  de  la 
même  année,  la  même  permission  lui  fut  accordée. 

Le  10  décembre  187 1,  il  fut  replacé  à  la  tête  des  Oulad 
Mansourah  auxquels  on  joignit  les  Oulad  Khelif  pour  en 
former  une  seule  fraction.  Pendant  cinq  ans,  il  commanda 
sa  tribu  avec  fermeté  et  sut  s'y  faire  respecter.  Mais,  en 
1876,  le  voyage  du  sultan  du  Maroc  sur  les  contins  algéro- 
marocains  ayant  créé  une  certaine  agitation,  et  son  frère, 
El  Hadj  Ahmed  ould  Mebkhout,  ne  cessant  d'intriguer 
auprès  des  éléments  marocains  dans  le  but  de  le  renverser 
et  de  prendre  sa  place,  il  crut  que  la  situation  qu'il  avait 
acquise  en  nous  servant  allait  être  ruinée,  et  prétextant  un 
incident  qu'il  eut  avec  un  officier  du  Bureau  d'El-Aricha, 
et  que  nous  avons  relaté  dans  un  chapitre  précédent,  il  fit 
défection,  entraînant  avec  lui  un  grand  nombre  de  tentes 
tant  Chafaa  que  Djemba.  Pour  ramener  les  dissidents  dans 
le  devoir,  il  fallut,  comme  nous  l'avons  vu,  l'envoi  d'une 
forte  colonne  de  2.400  bornâmes  commandée  par  le  général 


'1()2       DOClMIiMS  l>Ol  R  SEHN  lU  A  l/lIlSTOlRE  DES  HAMYAiN 

Flogny.  Le  caïd  des  Oulad  Maiisourah  rentra  en  personne 
le  i5  juillet  1877  et  fut  maintenu  à  son  poste. 

A  dater  de  ce  jour,  il  nous  servit  sans  arrière-pensée  de 
dissidence.  Excellent  cavalier,  audacieux,  très  énergique, 
il  réunissait  toutes  les  qualités  de  ce  l'homme  de  poudre  », 
précieux  surtout  pour  les  coups  de  main  hardis.  N'ignorant 
rien  de  sa  valeur  personnelle,  il  considérait  les  autres  caïds 
Hamyan  comme  ses  inférieurs  et  n'aspirait  à  rien  moins 
qu'à  les  commander.  Il  ne  nous  servait  que  par  intérêt  ; 
néanmoins,  il  prêta  une  aide  efficace  à  ceux  des  officiers  qui 
surent  liier  parti  de  ses  qualités  en  l'employant  dans  les 
colonnes  du  Sud  Oranais. 

Il  opéra  également  pour  son  propre  compte  et  son  goût 
des  aventures  frisait  le  brigandage  ;  il  fallut  même  réfréner 
son  ardeur  à  razzier  ses  voisins,  en  particulier  les  Béni  Guil. 
Le  cercle  d'Aïn-Sefra  transmit  à  ce  sujet,  à  plusieurs  repri- 
ses, les  doléances  de  ces  derniers.  Obligée  de  le  ménager, 
l'Autorité  locale  eut  souvent  des  difficultés  occasionnées  par 
son  caractère  emporté  et  son  humeur  batailleuse. 

C'était  un  homme  décidé,  énergique,  orgueilleux  et  bru- 
tal, qui  avait  su  s'allacher  beaucoup  d'Hamyan  par  les  ser- 
vices qu'il  leur  avait  rendus. 

En  1897,  sa  grande  fortune  lui  permit  de  faire  vivre  de 
nombreux  indigènes  qui,  par  suite  de  la  sécheresse  et  de  la 
mévente  des  troupeaux,  se  trouvaient  dans  le  plus  grand 
dénuement. 

De  phis,  pour  permettre  à  certains  caïds  de  payer  leurs 
impôts,  il  leur  avança  des  sommes  dont  le  total  ne  s'éleva 
pas  à  moins  de  3o.ooo  francs. 

A  côté  de  ces  actes  de  générosité,  il  faisait,  en  maintes 
autres  circonstances,  preuve  de  cupidité  et  d'avarice,  était 
mauvais  payeur  et  souvent  recevait  fort  mal  ses  créanciers. 

Ses  administrés  qui  le  redoutaient  n'adressèrent  jamais 
contre  lui  une  réclamation  sérieuse.  Il  est  bon  d'ajouter 
qu'il  avait  toujours  soin  d'établir  ses  campements  le  plus 
loin  possible  des  postes  français,  de  manière  à  éviter  sans 
doute  que  l'on  ne  vit  tout  ce  qui  se  passait  dans  sa  tribu. 

Sa  bravoure,  l'origine  chérifienne  et  le  renom  de  sa 
famille,  sa  fortune,  lui  donnèrent  une  influence  considé- 
rable, non  seulement  chez  les  Hamyan,  mais  aussi  chez 
diverses  tribus  marocaines  de  la  frontière.  Serviteur  reli- 
gieux et  dévoué  du  marabout  de  Tiout  auquel  il  fiança  une 
de  ses  filles,  il  était  aussi  affilié  à  l'ordre  de  Kerzaz. 

Il  était  marié  à  la  nièce  du  caïd  Sliman  ould  Abdelkrim, 


DOCUME.M'S  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYAN        lti3 

de  Géi\ ville.  Une  autre  de  ses  femmes  était  fille  du  caïd  de 
la  tribu  des  Oulad  Mimoun  (Lamoricièrej. 

Une  autre  était  la  sœur  du  caïd  Boudjemaa  ould  Bou 
Smaha,  dos  Béni  Metharef. 

H  avait  une  de  ses  filles  mariée  à  son  ex-khalifa  et  neveu, 
El  Iladj  Madani  ould  Madani,  une  autre  à  son  cousin 
Mohammed  ould  El  Hadj  Djelloul. 

La  Erance  le  combla  d'honneurs  dans  sa  vieillesse  ;  il  fut 
élevé  à  la  dignité  de  commandeur  de  la  Légion  d'honneur, 
par  décret  du  9  octobre  1896.  Agha  des  Ilamyan  Chafaa, 
moins  les  Bekakra,  le  3o  octobre  1908,  il  fut  nommé  ensuite 
bachagha  honoraire  en  1908.  Il  mourut  à  Tlemcen  en  1912. 
Son  fils,  El  Hadj  Demouche,  fut  nommé  caïd  des  Oulad 
Mansourah,  mais  le  véritable  chef  de  la  famille  fut  un  de 
ses  autres  fils,  Zoghmane  ould  El  Hadj  El  Habib  i.  Lors- 
qu'El  Habib  fut  nommé  bachagha  honoraire,  la  tribu  des 
Oulad  Mansourah  fut  de  nouveau  scindée  en  Oulad  Man- 
sourah et  Oulad  Khelif,  à  la  suite  des  intrigues  d'El  Hadj 
Ahmed  ould  Mebkhout. 

El  Hadj  El  Habib  ould  Mebkhout  n'eut  peut-être  pas,  de 
son  vivant,  de  pire  ennemi  que  son  frère  El  Hadj  Ahmed. 

Ce  dernier,  né  vers  1855,  jalousa  toujours  la  gloire,  la 
renommée  et  les  succès  d'El  Hadj  El  Habib. 

D'un  caractère  faux,  sournois,  très  intrigant  et  très  rusé, 
El  Hadj  Ahmed  avait  fait  parler  de  lui,  vers  1875,  en  enle- 
vant de  vive  force  Khadra  Bent  El  Hadj  Ameur,  fille  d'un 
homme  influent  des  Akerma. 

Cette  femme  sut  prendre  sur  l'esprit  d'El  Hadj  Ahmed 
une  maîtrise  complète  et  contribua,  pour  une  large  part,  à 
lui  faire  suivre  des  voies  fâcheuses. 

Comme  nous  l'avons  déjà  exposé,  El  Hadj  Ahmed  ould 
Mebkhout  profita,  en  1876,  du  voyage  du  sultan  du  Maroc, 
pour  chercher  à  soulever  les  Chafaa  contre  l'autorité  de  son 
frère. 

Craignant  à  juste  titre  d'être  ensuite  arrêté  et  interné,  il 
partit  en  pèlerinage  à  La  Mecque. 

A  son  retour,  il  prit  une  attitude  fanatique  et  prétextant 
qu'il  ne  voulait  plus  résider  sur  un  territoire  occupé  par  les 
chrétiens,  il  alla  se  fixer  chez  les  Béni  Oukil,  dans  l'amalat 
d'Oudjda. 


I  El  Hiul.j  Demouche  a  été  révoqué  en  igi6  pour  opposition  à  l'agha  Bou- 
feld.ja  ould  El  Hadj  Kaddour,  et  la  tribu  des  Oulad  Mansourah  a,  de  nouveau, 
été  réunie  à  celle  des  Oulad  Khelif. 


1G4       UOCl  MEMS  rOUR  SERVIR  A  l'uISTOIRE  DES  HAMYAjN 

11  y  eut  divers  avalais  et  lui  même  un  instant  emprisonné 
par  l'amel. 

Son  frère  El  lladj  El  Habib  intervint  auprès  des  autorités 
françaises  et  lui  lit,  en  1880,  accorder  l'aman. 

Un  an  après,  en  1881,  il  dut,  pour  sauver  sa  tête  et  ses 
biens,  faire  luoinentanémenl  sa  soumission  à  Si  Sliman  qui 
était  venu  razzier  les  Ilamyan  à  Ang  El  Djemel  (près  du 
chott  Chergui,  au  Sud  du  Krcider). 

El  Jladj  Ahmed  ould  Mebkhout  fulmokaddemdelacon- 
frérie  des  Derkaoua.  Etant  donné  ses  sentiments  franco- 
phobes, il  fut  accueilli  avec  enthousiasme  par  feu  Si 
Mohammed  ould  Larbi,  le  célèbre  chef  de  la  zaouïa  des 
Derkaoua  de  Ghamet  Allah  (Talilalet,  district  du  Medagha). 
Pour  recevoir  le  titre  de  mokaddem  de  l'Ordre  et  le  droit  de 
distribuer  des  chapelets,  il  alla  au  Tatllalet,  en  1897,  l'^i^idre 
visite  à  Si  Mohammed  ould  Larbi,  et  ce  fut  ce  dernier  (jui 
le  désigna  comme  mokaddem  de  la  confrérie  des  Derkaoua 
chez  les  Hamyan. 

Le  capitaine  du  Jonchay,  Commandant  Supérieur  du 
cercle  de  Méchéria,  chercha  à  l'utiliser  comme  conciliateur 
entre  les  tlamyan  et  les  Béni  Guil  et  lui  fit,  à  plusieurs  repri- 
ses, légler  des  contestations  survenues  entre  les  deux 
confédérations. 

Il  le  lit  ensuite,  en  190H,  loujom\s  sur  la  demande  de  son 
frère,  El  lladj  El  Habib,  et  dans  le  but  de  nous  l'attacher 
par  une  prébende,  nommer  mufti  de  Méchéria,  cjuoicju'il 
ne  fut  ni  lettré,  ni  instruit. 

On  a  raconté  tpi'à  la  mort  de  Si  Mohammed  ould  Larbi, 
les  Derkaoua  furent  sur  le  point  de  le  n,ommer  chef  de  la 
zaouïa  du  Medagha  et  que  sa  candidature  n'échoua  que 
parce  qu'il  résidait  sur  un  territoire  occupé  par  les 
chrétiens. 

Cette  version  est  actuellement  totalement  démentie  et 
aurait,  paraît-il,  été  lancée  par  El  Hadj  Ahmed  ould  Meb- 
khout lui-même  pour  faire  croire  aux  Autorités  françaises 
qu'elles  lui  devaient  une  compensation  par  suite  de  l'échec 
de  sa  candidature. 

El  Hadj  Ahmed  ne  dut  sa  situation  qu'à  l'influence  de 
son  frèr'e.  Il  ne  lui  en  montra  aucune  reconnaissance,  le 
vola  effrontément  à  diverses  reprises,  sema  la  haine  et  la 
discorde  dans  la  famille  des  Oulad  Mebkhout  et  son  attitude 
fut  une  des  causes  de  la  décadence  actuelle  d'une  lignée 
qui  fut  brillante.  îl  est  mort  à  Méchéria  en  fin  îqt."). 


DOCl  ME.M'S  POUR  SEK\  114  A  j/lIlïTOIKE  UE6  IIA.MVAN       105 

El  11 adj  Kaduour  ould  Bôufeluja.  —  Une  seule  famille, 
chez  les  Chafaa,  fut  capable  de  conlrebalancer  l'inlluence 
des  Ouiad  Mebkhout  ;  c'est  celle  qui  fui  représentée  par  le 
vieil  ag^ha  honoraire  Kl  Hadj  Kaddour  ould  Boufeldja.  Cette 
famille  était  oiiginaire  des  Angad  marocains,  fraction  des 
Mezaouir  (Nord  d'Oudjda).  Son  ancêtre  Amara  eut  un  fils, 
Salein,  qui  donna  son  nom  à  un  douar  des  Bekakra.  Le  père 
de  l'agha  El  Hadj  Kaddour,  Boufeldja  ould  Amara,  était 
caïd  des  Bekakra  sous  Abdelkader.  Ne  voulant  pas  recon- 
naîlie  l'Autorité  française,  il  laissa  à  son  lils  trois  chameaux 
pour  toute  foitune  et  se  retira  chez  les  Merinat  (Amour). 

La  tribu  des  Bekakra  fut  une  des  premières  à  faire'  sa 
soumission  en  i8/|8.  Elle  fut  alors  fractionnée  en  Moualek 
et  Lourarka  ;  le  commandement  de  ces  derniers  fut  confié 
à  El  Hadj  Kaddour  i.  Mécontent  de  ce  partage,  celui-ci 
écouta  les  conseils  de  Bon  Smaha  ould  Madani,  père  du  caïd 
actuel  des  Béni  Metharef  ;  il  partit  chez  les  Oulad  Sidi  El 
Arabi  (Oulad  Sidi  Ben  Aïssa)  et  fut  remplacé,  à  la  tête  des 
Lourarka,  par  M'hammed  ould  Bon  Ktib  (1862) .  Le  nou- 
veau caïd  suivit  l'exemple  de  son  prédécesseur  et,  avec 
Ahmed  Ben  Youssef,  caïd  des  Moualek,  tous  les  Bekakia 
se  rendirent  à  Figuig  oii  l'agitateur  Ben  Serour  leur  avait 
donné  rendez- vous  dans  le  but,  disait-il,  de  régénérer 
l'Islam. 

Abdallah  Bel  Meiah,  ayant  ramené  les  Bekakra  en  i853, 
fut  nommé, caïd  de  toute  la  tribu  réunie.  l\  paya  presque 
toutes  les  amendes  infligées  à  sa  tribu  pour  sa  défection, 
mais,  impuissant  à  maintenir  ses  administrés  dans  l'obéis- 
sance, il  fut  en  outre  accusé  par  eux  de  trafiquer  fraudu- 
leusement sur  les  laines.  Comme  il  ne  tint  aucun  compte 
des  admonestations  qui  lui  furent  adressées,  il  fut  révoqué 
en  1860  2. 


I  Le  commandement  de  la  tribvi  des  Bekakra  fut  exercé  successivement  par 
la  famille  des  Merah  et  par  oelle  des  Oulad  Boufeldja.  Ces  deux  familles  devin 
rent  alliées  à  la  suite  du  mariage  d'une  fille  d'Abdallah  Bel  Merah.  Malgré 
cette  alliance,  El  Hadj  Kaddour  ould  Boufeldja  n'hésita  pas  à  faire  arrêter 
une  vingtaine  de  membres  de  la  famille  des  Merah  qui  partaient  en  dissidence 
chez  les  Mehaïa. 

a  Abdallah  ould  Meraii,  après  sa  révocation,  devint  le  véritable  chef  des 
Hamyan  dissidents. 

Ce  fut  lui  qui  conduisit  la  plupart  des  djiouch  qui  vinrciit  attaquer  les 
Hamyan  et  les  Oulad  Néhar  qui  nous  étaient  restés  fidèles. 

II  fut,  le  i.H  mars  i863,  puni  de  deux  mois  de  prison  pour  avoir  provoqué 
des  désordres  chez  les  Hamyan.  H  fit  défection  en  1S76. 

Rentré  en   jS8o,  il  fut  arrêté  et  traduit  en  conseil  de  guerre  sous  la  préveu- 


13 


106       DOCUMENTS  l>Ol  R  SERVIR  A  l'iIISTOIRE  DES  IIAMYAN 

El  lladj  Kaddour  lui  alois  remis  à  la  tête  des  Bekakia  et, 
depuis  lois,  ne  cessa  de  les  comiiiaiider  avec  fermeté  et  de 
nous  servir  avec  zèle.  Homme  de  guene  valeureux,  comme 
El  lladj  El  Habib,  il  prit  part,  en  i865,  au  combat  de 
Benoud  sous  les  oidres  du  général  Deligny  ;  c'est  dans  cette 
alïaire  (]ue  fut  tué  Mohammed  Ben  Hamza.  Avec  le  colonel 
Colonieu,  il  razzia  en  1867  les  Oulad  Sidi  Cheikh  à  Tiout, 
à  Métarka  et  à  El  Guessif.  U  accompagna  le  colonel 
de  La  .Taille  dans  la  plaine  du  Tamlelt  et  à  Maader  el  Messa- 
rin,  le  général  de  Wimpfen  à  Aïn-Chaïr  en  1870,  et,  en 
1871,  le  colonel  des  Méloizes  à  Magoura. 

Après  l'opération  d'El  Hamad,  dans  laquelle  il  seconda 
le  colonel  Gand,  il  fut  promu  chevalier  de  la  Légion  d'hon- 
neur. Il  participa  avec  le  colonel  Colonieu  à  l'affaire  de 
Tendrara  contre  les  Djemba.Le  capitaine  Ben  Daoud  l'avait 
à  ses  côtés  lors(|u"il  s'agit,  à  Souf-el-Kesseur,  de  châtier  les 
Amour  et  les  Oulad  Djerir  (1877)  et  de  repousser  à  El 
Agueur  (1878;  les  Béni  Guil  et  les  Oulad  Sidi  Cheikh.  Au 
moment  de  l'insurrection  de  Bon  Amama,  il  fut  un  auxi- 
liaire précieux  pour  le  général  Delebecque  et  le  colonel  de 
Négrier  ;  la  croix  d'oflicier  de  la  Légion  d'honneur  fut  la 
récompense  de  son  dévouement  dans  cette  occasion. 

Caractère  droit  et  honnête,  El  lladj  Kaddour  ne  s'est 
jamais  départi  de  ses  sentiments  de  fidélité  à  notre  égard. 
Son  attitude,  toujours  très  digne,  fut  respectueuse  et  sou- 
mise. Bien  qu'il  n'eut  aucune  instruction,  ses  conseils 
pleins  de  sagesse  furent  écoutés  en  maintes  circonstances. 

El  Hadj  El  Habib  ould  Mebkhout  avait  contre  lui  une 
haine  profonde  ;  il  voyait  en  lui  un  rival  pour  le  comman- 
dement de  l'ensemble  des  Hamyan,  il  jugeait  néfaste  pour 
ses  propres  intérêts  la  confiance  que  nous  accordions  à  El 
Hadj  Kaddour  et  l'influence  qu'il  possédait.  H  estimait  que 
ce  chef  honnête,  probe  et  fidèle  était  trop  écouté  par  nous 
et  que,  par  suite,  il  ne  pouvait  pas,  lui,  El  Hadj  El  Habib, 
prétendre  se  poser  près  de  l'Autorité  française  comme 
l'homme  unique  et  indispensable  pour  organiser  et  admi- 
nistrer les  Hamyan. 

tiiiii  d'jissocialion  à  une  bmide  de  nialfiiifeiirs  et  de  complicité  dans  qnatre 
meurtres  suivis  de  vols  qualifiés. 

Il  fut  condamné  à  mort  par  jugement  du  i"  Conseil  de  guerre  en  date  du 
II  .janvier  1881.  Cette  peine  fut  commuée  en  celle  des  travaux  forcés  à  perpé- 
tuité, par  décision  présidentielle  du  ik  mars  1S81. 

Il  mourut  à  Cayenue.  Son  fils,  Abdesselem  ould  Abdallah,  condamne  à  dix 
ans  de  travaux  forcés,  l'avait  suivi  à  Cayenne  et  est,  actuellement,  rentré  clmz 
les  Bekakra. 


DOCl  MEMS  POl  II  SEH\  IH    \   I  HISTOIRE  DES  IIAMYW       167 

El  Iladj  Kaddour  ould  BoulVldja  n'avait  qu'une  iniluence 
peisoiinelle  mais  considérable  ;  elle  s'étendait  principale- 
nienl  sur  les  IJckukra,  les  Akerma,  les  Megan  et  les  Oulad 
Serour.  Elle  permit  de  modérer  celle  d'El  Hadj  El  Habib 
ould  Mebkhout.  11  jouissait  d'un  grand  prestige,  non  seu- 
lement aux  yeu\  des  membres  de  sa  famille,  mais  de  tous 
les  indigènes  ;  aussi  était-il  jalousé  pai-  de  nombreuses  per- 
sonnalités qui  trouvaient  sans  doute  qu'il  nous  servait  trop 
fidèlement.  C'est  le  meilleur  chef  indigène  que  nous  ayons 
eu  chez  les  Hamyàn. 

Il  donna  sa  démission  de  caïd  en  1888,  en  prétextant 
l'état  de  sa  santé,  mais  la  raison  véritable  de  son  départ 
volontaire  fut  la  suivante  : 

El  Hadj  Kaddour  ould  Boufeldja  se  trouvait  dans  le  Sud 
avec  le  chef  du  Bureau  arabe  de  Méchéria,  lorsqu'un  crime 
fut  commis  dans  sa  propre  famille.  Un  de  ses  parents  tua 
près  de  Touifza  19  kilomètres  au  Sud  de  Méchéria  i  un  indi- 
gène des  Bekakra. 

Son  khalifa,  qui  remplissait  les  fonctions  de  caïd  en  son 
absence,  voulut  sauver  le  meurtrier  et,  donnant  de  faux 
renseignements  à- l'Autorité  locale,  accusa  de  ce  crime  et 
fît  arrêter  un  Alarocain  de  passage. 

El  Hadj  Kaddour  ould  Boufeldja  rentra  du  Sud  et  apprit 
ce  qui  s'était  passé.  Indigné  de  la  façon  de  procéder  de  son 
khalifa  fqui  était  son  parent),  il  reprocha  vivement  à  ses 
enfants  et  à  ses  frères  d'aAoir  caché  la  vérité. 

Il  adressa  à  l'Autorité  locale  un  rapport  exact  sur  le  crime 
commis  et  le  véritable  meurtrier  fut  emprisonné  et  traduit 
en  conseil  de  guerre.  L'avocat  de  ce  dernier  trouva  le 
moyen  de  faire  planer  un  doute,  en  se  basant  sur  le  premier 
rapport  établi  à  l'encontre  du  Marocain  injustement  pour- 
suivi, et  le  lit  acquitter. 

Indigné  de  voir  solutionner  ainsi  cette  affaire,  El  Hadj 
Kaddoiu-  ould  Boufeldja  donna  sa  démission  et  demanda  à 
ce  que  son  successeur  ne  soit  pas  pris  parmi  ses  enfants. 

Il  lui  fut  donné  satisfaction  et  Mohammed  Ben  Amara, 
son  oncle,  fut  nommé  caïd  des  Bekakra,  en  même  temps 
qu'Ahmed  Bel  Kebir,  neveu  et  gendre  d'El  Hadj  Kaddour, 
était  désigné  comme  khalifa. 

Mais  en  1902, Mohammed  Ben  Amara, quiétaittrop  vieux 
pour  assurer  ces  fonctions,  démissionna  et  fut  remplacé 
par  Boufeldja  ould  El  Hadj  Kaddour,  l'un  des  fils  d'El  Hadj 
Kaddour. 

El  Hadj  Kaddour  ould  Boufeldja,  qui  avait  été  promu 


168        1)C)<:IMKMS  l'Ol   U  SKUSIU    \   l.'lllSlOIHK  DES  ll\MVAA 

commandeur  de  la  Légion  d'iionnein ,  fut  nommé  agha 
honoraire  en  igoH,  en  même  temps  (ju'EI  lladj  El  Habib 
ould  Mebkhout  était  nommé  aglia  des  Chafaa  (moins  les 
Bekakra). 

Bien  (]u'en  raison  de  son  Age  avancé,  il  ne  put  plus  jouer 
un  lole  actif,  il  était  encore  précieux  comme  homme  de 
sage  conseil. 

Il  fut  assassiné  en  juin  191/1,  vui  matin,  dans  une  rue  de 
Méchéria,  par  un  fou  de  la  tribu  des  Bekakra. 

A  la  suite  de  ce  meurtre,  son  fils,  Boufeldja  ould  El  Iladj 
Kaddoui-,  caïd  des  Bekakra,  fut  nommé  agha  des  llamvan 
Chafaa. 

Cette  nomination  amena  les  dilïicullés  tpie  nous  avons 
lelatées  plus  haut. 

Tayeb  Ben  Sliman.  —  Alors  cpi'El  lladj  El  Habib  et  El 
Hadj  Kaddour  rivalisaient  d'inlluence  chez  les  Chafaa,  un 
troisième  personnage  jouait,  au  même  moment  un  rôle 
important  chez  les  Djemba.  Tayeb  Ben  Sliman  était  ori- 
ginaire de  la  fraction  des  Oulad  Gheni  et  appartenait  à  une 
des  gi"andes  familles  des  Oulad  Serour.  C'est  lui  qui  contri- 
bua en  glande  partie  à  la  rentrée  des  Djemba. 

Il  occupa  les  fonctions  de  caïd  des  Oulad  Serour  d'une 
façon  intermittente  :  de  i85o  à  i852,  de  i853  à  i855,  de 
1857  à  18-3.  Ses  révocations  successives  étaient  causées  par 
son  caractère  remuant  et  par  ses  intrigues.  Il  était  l'ennemi 
personnel  de  Mebkhout  dont  il  ne  voulait  pas  reconnaître 
l'autorité  et  qui  demanda,  en  i855,  son  emprisonnement. 

En  avril  1867,  il  fut  nommé  caïd  des  caïds  des  Djemba, 
non  pour  les  commander,  mais  seulement  pour  assurer 
l'exécution  des  ordres  concernant  la  police  et  la  défense  du 
territoire. 

Excellent  cavalier  et  d'une  grande  bravoure,  il  fut  blessé 
le  II  mars  1866  de  trois  coups  de  feu  en  défendant  ses 
douars  et  un  douar  des  Oulad  Toumi  placé  près  des  siens. 
L'attaque  était  menée  par  un  parti  de  dissidents,  Bezaïna, 
Béni  Guil  et  Oulad  Serour.  Le  caïd  eut  en  outre  deux  che- 
vaux tués  sous  lui.  Après  cette  affaire,  il  fut  nommé  cheva- 
lier de  la  Légion  d'honneur. 

On  lui  retira,  en  août  1870,  son  titre  de  caïd  des  caïds 
pour  lui  laisser  le  commandement  de  sa  tribu.  L'année 
suivante,  ses  fils  allèrent  razzier  les  Béni  Mathar  ;  Tayeb 
Ben  Sliman  fut  l'objet  de  plaintes  pour  ne  pas  les  avoir 
retenus  et  pour  sa  mauvaise  volonté  ta  réunir  les  chameaux 
nécessaires  à  la  colonne  qui  fut  organisée  alors. 


DOCl  MEM'8  POl  R  SKK\  IH    \   LU  ISTOI  ME  UES  11  A  M  VA  \        I  '  »!  • 

(;•'  lui  eiisuilf  r(''p(>i|uc  des  délVclions  chez  les  Djeinba. 
Uévociué  011  1873,  l'cv-caïd  des  Oulad  Seiour  fut  signalé  par 
une  lettic  de  Scbdou  (1875)  comme  l'un  des  agitateurs  de 
ce  mouvement.  Renommé  néanmoins  le  18  août  1882,  il 
donna  sa  démission  en  1890,  en  faveur  de  son  lils  cadet  à 
(|ui  toule  la  fortune  appartenait.  Tayeb  Ben  Sliman  ne  pos- 
sédait rien  en  propre.  Trois  ans  après  il  fut  nommé  com- 
numdeur  de  la  l.égion  d'honneur  ;  il  mourut  en  1899. 

Au  point  de  vue  religieux,  il  était  le  serviteur  des  mara- 
bouts de  Guezini  (Oulad  Sidi  Abdallah  ben  Cheikh).  Son 
fils  Aïssa  était  un  mokaddem  fervent  de  Bou  Amama. 

Actnt^lJeiuent,  la  tribu  des  Oulad  Serour  <\st  commandée 
par  un  autre  de  ses  lils,  Larabi  ould  raycb,  (|ui  nou>- est 
tout  dévoué. 


CIIAPITIΠ XII 
LES  (  ONFKr:KIES  RELIGIEUSES  CHEZ  LES  HA3IYA\ 


Une  dizaine  de  confréries  religieuses  ont  des  adeptes  chez 
les  Hamyan. 

Le  seul  fait  d'avoir  un  nombre  aussi  considérable  d'or- 
dres différents  établit  que,  chez  ces  indigènes,  il  n'y  a  pas 
actuellement  une  seule  influence  maraboutique  sérieuse. 

Les  confréries  qui  ont  réussi  à  prendre  position  dans  la 
région  se  sont  généralement  efforcées,  par  une  lente  infil- 
tration, par  une  discrète  propagande,  d'augmenter  le  nom- 
bre de  leurs  affiliés  ;  certaines  d'entre  elles  y  ont,  à  diffé- 
rentes époques,  joué  un  rôle  important  et  nous  avons  lon- 
guement exposé  cette  question  au  début  de  ce  travail  ;  mais 
aujourd'hui  on  peut  presque  aftirmer  que  si  les  unes  et  les 
autres  parviennent  facilement  à  trouver  auprès  des  Hamyan 
un  accroissement  de  leurs  ressources  matérielles,  elles  n'ont 
plus  sur  la  direction  morale  de  ces  indigènes  la  même 
iniluence  que  jadis. 

Cependant,  hàtons-nous  d'ajouter  qu'il  y  a  sans  cesse  lieu 
de  nous  méfier  et  que,  lorsqu'il  s'agit  de  marabouts,  les 
revirements  d'idées  les  plus  subits  et  les  plus  inattendus 
peuvent  toujours  se  pioduire  chez  les  Hamyan. 

Le  succès  qu'eut  Bou  Amama  chez  eux  est  une  preuve  de 
ce  que  nous  avançons. 


170       UOCL  MEMS  l»Ol  R  SERMU  A  l/llISlOIRE  DES  HAMYAN 


* 


M.  Marchand,  jadis  officier  interprète  de  i™  classe,  et 
actuellement  Adminislraleur  des  ('olonies  détachéauMinis- 
tère,  à  la  Direction  des  AITaires  Musulmanes,  a  écrit  à  ce 
sujet,  en  190a,  ce  qui  suit  : 

((  Les  Ilamyan  sont  indépendants  par  tempéiament. 
((  Leurs  aspirations  vers  une  existence  en  dehors  de  toute 
«  rè^le,  au  ^ré  des  circonstances,  st)nt  encore  très  vives, 
((  bien  qu'en  partie  étouffées  pai'  notre  domination. 

((  C'est  un  legs  alavifjne,  le  patrimoine  moial  hérité  de 
«  ces  Sahariens,  leurs  ancêtres,  qui,  à  l'époque  du  bled 
<(  Siba,  s'assuraient  par  leur  bravoure  et  leur  audace  au 
«  milieu  des  aventures  et  des  dangers, une viesans  entraA^es. 

«  Ils  l'ont  reçu  avec  la  foi  naïve  et  superstitieuse  de  leurs 
((  pères  et,  comme  eux,  ils  sont  de  nos  jours  tourmentés 
(c  par  un  besoin  de  croyance  en  des  signes,  en  des  avertis- 
ce  sements  ou  des  présages  tirés  des  moindres  événements. 

«  Toutefois,  cette  crédulité,  cette  crainte  d'un  mystérieux 
((  inconnu  n'excluent  pas  un  certain  positivisme.  Les  pàs- 
«  leurs  des  Hauts-Plateaux  sont  peu  détachés  des  intérêts 
((  terrestres  et  la  vie  contemplative,  la  recherche  d'un  idéal 
((  mystique  ne  sont  guère  leur  fait. 

((  Adonnés,  pendant  longtemps  avant  notre  installation 
«  dans  la  région  de  leurs  parcouis,  à  une  existence  de  i^api- 
((  nés,  ils  se  pliaient  difllcilement  aux  préceptes  du  Coran 
«  touchant  le  respect  du  bien  d'autrui.  Et  les  exhortations 
(c  des  personnages  religieux,  clairsemés  au  milieu  de  ces 
((  pillards,  restaient  sans  écho.  Ils  ne  retenaient  des  pres- 
te criptions  du  dogme  que  les  {)lus  facilement  réalisables, 
((  les  moins  opposées  à  leurs  instincts  de  brigandage  ;  la 
<(  religion, la  morale  constituaient  à  leurs  yeux  un  superflu 
«  réservé  à  l'âge  des  abdications  physiques,  à  l'heure  pro- 
((  che  de  la  comparution  devant  cet  inconnu  qui  les 
«  troublait... 

«  Mais  si,  dans  le  cours  de  leur  vie  agitée,  ces  nomades  se 
((  montraient  rebelles  aux  préceptes  dont  l'observance  eut 
«  modifié  leurs  habitudes,  ils  ne  résistaient  pas  au  désir  de 
<(  se  concilier,  par  le  seul  intermédiaire  de  pieux  person- 
«  nages,  cet  infini,  ce  mystère  (pi'ils  redoutaient.  Ils  consi- 
<(  déraient  certains  hommes  renommés  par  leur  piété,  l'aus- 
«  térité  de  leurs  mœurs  comme  les  dépositaires  de  la  voie 
((  du  salut.  Et  ils  mettaient  leur  conscience  en  repos,  apai- 
<(   saient  leur  inquiétude  de  l'au  delà  en  s'assurant  par  leurs 


DOCl;.MEM'S  l'OI  K  SKIUIK    \   I ."  Il  IS  lOI  H  i:  l»KS  liwn  W        171 

<(  oiïrandes  à  ces  intermédiaires  une  parcelle  de  la  baiaka 
«  qui  jetterait  sur  leurs  fautes  le  voile  de  l'oubli. 

((  Aujourd'hui,  cette  recherche  d'une  intercession  en  vue 
«  de  la  \\c  l'uluic  existe  encore,  mais  elle  est  atténuée  par  le 
«  doute.  Nos  llamyan  ont  de  plus  en  plus  la  notion  des 
«  réalités  de  l'existence  et  la  [)romesse  d'un  avenir  meilleur 
<(  dans  l'autre  inonde  leur  pjuaît  d'une  réalisation  bien 
<(   lointaine... 

((  Ils  seraient  heureux  que  la  faveur  providentielle  se 
((  manifestât  sur  cette  terre  d'une  façon  moins  immatérielle 
<(  et  qu'elle  se  traduisit  en  une  augmentation  constante  de 
«  leur  cheptel,  en  une  réussite  assurée  de  leurs  entreprises. 

((  C'est  dans  cet  espoir  qu'ils  se  ménagent,  par  des  offrfin- 
«  des,  la  protection  des  marabouts  actuels,  bien  que  leur 
«  foi  en  la  vertu  d'une  baraka  héréditaire  soit  légèrement 
<(  ébranlée. 

((  Mais,  incertains  sur  son  inefllcacilé,  ils  n'osent  pas 
((  rompre  avec  des  pratiques  auxquelles  leurs  pères  étaient 
<(  d'ailleurs  fidèles.  Ce  respect  de  la  tradition  est  peut-être 
«  la  plus  forte  raison  de  leur  fidélité  aux  zaouïas  ;  il  s'aug- 
((  mente  de  la  répugnance  à  toute  innovation  qui  caracté- 
<(  rise  les  indigènes. 


(<  Les  esprits  éclairés,  agents  du  commandement  et  per- 
<(  sonnages  aisés,  n'ont  pas  comme  la  foule  ignorante,  à 
<(  l'égard  des  chefs  d'Ordres  religieux,  une  considération 
<(  inspirée  par  la  foi  en  leur  vertu  surnaturelle  ;  ils  les  tien- 
((  nent  pour  des  puissances  toutes  terrestres  qu'il  est  avan- 
ce tageux  de  se  concilier.  Toutefois  leur  soumission  inté- 
«  ressée  ne  résiste  guère  parfois  à  un  froissement  de  leur 
«  esprit  indépendant  et  frondeur.  L'un  des  caïds  les  plus 
«  intelligents  du  cercle  de  Méchéria  éprouve  un  jour,  par 
<(  snobisme  et  par  ambition,  le  désir  de  s'affilier  à  une  con- 
«  frérie.  Celle  des  Taybia  arrête  son  choix  ;  il  sait  qu'elle 
«  est  bien  vue  par  l'Autorité  française  et  qu'elle  compte 
<(  des  adeptes  parmi  les  Hamyan.  Il  se  soumet  donc  aux  for- 
ce malités  d'initiation  et  reçoit  le  chapelet  de  l'Ordre.  Quel- 
ce  que  temps  après,  notre  néophyte  se  rend  à  El-Aricha,  ofi 
ce  un  envoyé  d'Ouazzan  est  arrivé.  A  sa  demande  d'au- 
cc  dience,  un  serviteur  répond  que  le  cheikh  est  endormi. 

ce  Eh  bien  !  s'écrie  le  khouan  peu  convaincu, qu'il  dorme 
ce  en  paix.  »  Et  enlevant  son  chapelet,  il  le  rend  au  servi- 
ce teur  étonné,  puis  s'éloigne  en  disant  :  ce  A  d'autres  une 


17'2       DOCUME-MS  POUR  SERVIH  A  l'iIISTOIRE  DES  HAMYAiN 

<(  confrérie  dont   le   cheikh   sommeille   quand   les   affiliés 

<(  viennent  à  lui.  » 

«  Cette  anecdote  ne  constitue  pas  un  fait  isolé  ;  elle  caiac- 

«  térise  un  état  d'esprit  que  les  ancêtres  de  nos  Hamyan 

((  actuels  manifestaient  parfois  d'une  façon  moins  paisi- 

((  ble  ;  dès  que  leur  convoitise  était  en  éveil,  ils  oubliaient 

((  facilement  le  caractère  sacré  des  marabouts  et  n'hési- 

((  laient  pas  à  les  piller,   (Si  Ahmed  Tedjini  est  attaqué 

«  ainsi    un   jour,    dans   les   environs   de   Bou   Semghoun 

«  (cercle  de  Géry  ville),  par  un  groupe  de  Sendan  (Hamyan) 

«  et  reçoit  un  coup  de  feu  à  la  cuisse  ;  tout  son  convoi,  son 

((  cheval  même,  sont  razziés  par  les  assaillants.) 

<(  Les  Hamyan  répètent  complaisamment  que  les  person- 

<(  nages  religieux  redoutent  leur  versatilité  et  s'attendent 

«  sans  cesse  à  voir  leurs  plus  fidèles  affiliés  les  piller  à  l'oc- 

<(  casion  ;  ils  citent  cette  imprécation  d'un  marabout  qui 

<(  avait  eu  à  souffrir  de  leurs  rapines  : 

C'est  inciilir  (|u('  dire  :  ((  l'huile  est  un  condiment  ». 
C'est  meutir  que  dire  :  ((  les  Hamyan  sont  le  saJut  )>. 

«  Un  aulre  santon  a  stigmatisé  l'ingratitude  des  Hamyan 
«  en  un  quatrain  inspiié  par  une  razzia  opérée  par  eux 
«  sur  un  douar,  oi^i  l'hospitalité  la  plus  complète  leur  avait 
«  été  donnée  : 

Ne  versez   pas  vainement  l'eau  d'une  outre 
Et  ne  donnez  pas  davantage  à  manger  à  un  Hamyan. 
Si  vous  voyez  un  de  ces  chiens  dans  la  peine, 
Tuez-le  en  disant  :  «  C'est  comme  un  chrétien.  » 

«  Mais,  si  nos  Hamyan  ont  parfois,  sans  crainte  des  châ- 
«  timents  futurs,  pillé  les  personnages  religieux,  ils  leur 
«  ont  aussi  été  secourables  à  l'occasion. 

«  Un  appel  à  leur  générosité  ne  reste  jamais  vain  et,  dès 
«  que  leur  orgueil  est  en  jeu,  ils  se  prodiguent  sans  comp- 
«  ter,  donnant  et  leur  vie  et  leurs  biens. 


DOC-IMENTS  VOi   H  SKIUIM    V  l'ilISlOIRE  DES  ll\MV\N       173 

«  Les  luaiabouls  n'ont  eu  garde  de  négliger  ce  senti- 
«  ment  :  sachant  que  l'attachement  des  Hamyan  à  leur 
«  égard  ne  se  manifeste  qu'eux  présents,  ils  ont  soin,  cha- 
((  que  année,  de  venir  en  personne  réchauiïei-  le  zèle  de 
«  leurs  partisans. 

((  Ces  voyages  entraînent  pour  nos  indigènes  un  surcroît 
«  de  dépenses  ;  le  ll;un\ani  ne  sait  pas  lésister  aux  discrètes 
«  convoitises  du  marabout  et,  outre  l'offrande  tradition- 
((  nelle  d'un  mouton  par  tente,  ou  d'un  chameau  par  tiibu 
((  à  telle  ou  telle  confrérie,  il  donne  tantôt  un  tapis,  tantôt 
«  un  cheval.  Tout  est  propre  d'ailleurs  à  satisfaire  l'avidité 
((  des  chioukh  ou  de  leurs  représentants  :  sacs  de  blé,  outres 
«  vides  ou  pleines  de  beurre,  peaux,  etc.,  ils  acceptent' ou, 
«  plutôt,  demandent  tout. 

«  Nos  orgueilleux  nomades  se  laissent  dépouiller  dès  que 
((  leur  générosité  est  citée,  pour  les  besoins  de  la  cause, 
«  comme  article  de  foi.  Le  marabout  parti  et  leur  vanité 
((  assoupie,  ils  constatent  un  léger  vide,  soit  dans  leur 
((  troupeau,  soit  dans  leur  tente  ou  leur  bourse.  C'est  l'effet 
((   ordinaire  du  passage  des  gens  de  zaouïa. 

«  Tls  en  ont  bien  le  sentiment  formulé  dans  ce  dicton,  que 
((  répétait  souvent  le  vieil  agha  honoraire  El  Hadj  Kaddour 
«  ould  Boufeldja,  en  parlant  de  l'attitude  des  marabouts 
«  en  tribu  : 

La  main  dan?  le  plat,  ses  yeux  sont  dardés  de  tous  côtés. 
«  et  dans  cet  autre  : 

*     ^ jl — =i.    sjrj'f- — ^^     * 

Le  Zannï  (lioninie  de  zaouïa)  est  crenx.  (Il  n'y  a  rien  à  en  tirtM'. 
mai?  on  doit  l'emplir.) 

«  Toutefois,  malgré  ces  sarcasmes,  ils  continuent  à  se 
«  laisser  consciencieusement  dépouiller.  Quelques  chefs, 
<(  hésitant  à  témoigner  de  la  froideur  aux  marabouts  et, 
«  d'autre  part,  désireux  de  les  priver  de  ces  ziaras  qui 
«  pèsent  sur  la  tribu,  seraient  heureux  que  l'Autorité  inter- 
((  dît  les  tournées  des  chioukh  ou  de  leurs  mokaddems.  Ils 
((  seraient  débarrassés  ainsi  de  ces  gênants  personnages, 
((  dont  la  malédiction  s'abattrait  loin  d'eux,  sur  cette 
«  autorité. 

«  Dans  l'espoir  d'aiguillonner  sans  cesse  la  générosité 
((  chancelante  des  Hamyan,  les  marabouts  ont  institué  sur 


174     noc:i  MEMS  polr  servik  a  i 'iiisioire  ue»  hamvan 

({  place  des  mokaddems,  collecteurs  chargés  de  canaliser 
«  vers  la  zaoïiïa  les  dons  des  Odèles  ;  mais,  à  part  (jiieUfues 
((  personnalités  importantes,  ces  mokaddems  présentent 
<(  généralement  une  faible  surface  et  le  titre  dont  ils  sont 
«  investis  ne  leur  donne  pas,  aux  yeux  des  Hamvan,  une 
((  auloi'ilé  sufTisanle  pour  provoquer  au  pn^lit  des  zaouïas 
((  un  détachement  des  biens  de  ce  monde. 

((  Le  mokaddem  lui-même,  spéculant  sur  son  caractère 
((  sacré,  serait  disposé  à  vivi'e  aux  dépens  de  ses  coreligion- 
«  naires.  Mais  ceux-ci,  dans  l'ensemble,  se  montrent 
«  rebelles  à  cette  tendance  ;  ils  laissent  aux  rares  affiliés 
((  f[ue  comptent  dans  chacpie  tribu  les  diverses  confréries, 
((  le  soin  de  contribuer  à  la  subsistance  du  cheikh  et  de  ses 
«  nombreux  satellites.  En  ce  rpii  concerne  la  propagande 
«  au  point  de  vue  de  l'affiliation,  les  obligations  imposées 
«  aux  khouan  de  certains  Ordres  sont  en  opposition  trop 
«  évidentes  avec  l'esprit  indépendant  de  la  masse  et  nom- 
ce  bre  d'individus  sont  peu  soucieux  de  s'astreindre  à  une 
((  règle  nouvelle,  l'expansion  de  leur  amour  de  la  liberté 
«  étant  déjà  assez  contenue  par  l'Autorité. 

«  Ainsi,  les  confréries  religieuses  représentées  chez  les 
«  Hamvan  opèrent  deux  sortes  de  prélèvements  :  l'un  pério- 
«  dique,  le  plus  fructueux,  auquel  les  chioukh  eux-mêmes 
«  ou  des  envoyés  de  la  zaouïa  procèdent  ;  l'autre,  acci- 
<(   dentel,  œuvre  du  mokaddem. 

«  Le  développement  de  la  situation  économique  de  nos 
((  indigènes  est-il  entravé  par  les  prélèvements  sur  leur 
<(  fortune  ?  H  est  évident  que  le  chiffre  des  sommes  versées 
«  à  ce  titre  pour  chaque  individu  est  presque  égal  à  celui 
«  de  l'impôt.  H  y  aurait  certainement  avantage  à  ce  que 
<(  l'influence  des  chioukh  se  manifestât  d'une  façon  plus 
<(  désintéressée.  Mais  il  n'est  guère  possible  d'enrayer  des 
<(  habitudes  profondément  enracinées. 

«  Si  l'Autorité  intervenait  d'une  façon  quelconque,  on 
((  aurait  à  redouter  l'action  clandestine  des  chioukh  plus 
«  dangereuse,  au  point  de  vue  politique,  et  plus  ruineuse, 
((  au  point  de  vue  économique. 

"  En  ce  (pii  concerne  le  développement  des  confréries 
<(  leligieuses  chez  les  Hamvan,  il  est  permis,  tout  en  se 
<(  gardant  de  ces  alfirmations  prophétiques  auxquelles 
((  l'avenii-  inflige  parfois  des  démentis,  de  penser  que  le 
«  temps  continuera,  sur  la  foi  de  nos  indigènes,  son  œuvre 
«  de  désagrégation. 

"   Elle  s'enViic  déjà,  nous  l'avDfis  \  n,  ciilamée  pai-  l'esprit 


nOCUMEM'S  POLR  8EH\  ll<   \  I.  HISTOIRE  DES  HAMYAN        175 

«  de  criti([iie.  En  piésence  de  liuaiiilé  des  prédictions  de 
«  cerlains  maiaboiils,  devant  l'extension  de  notre  domi- 
«  nation  dans  l'Extrême-Sud  réalisée  en  dépit  des  obstacles 
«  surnaturels  (ju'ils  devaient  dresser  sur  notre  route,  nos 
«  indigènes  sentiront  de  plus  en  plus  l'imposture  des  agi- 
«  tateurs  religieux.  A  l'égard  des  confréries  qui  observent 
«  vis-à-vis  de  nous  une  attitude  soumise,  ils  se  montreront 
((  rhafjue  jour  davantage  plus  parcimonieux  de  leurs 
<(  deniers  et  l'on  peut  espérer  qu'ils  seront  un  jour  com- 
((  plètement  affranchis  de  croyances  opposées  au  dogme 
«  même  de  l'Islam  et  de  cette  craintive  naïveté,  cause  ini- 
«  tiale  de  leur  exploitation  par  les  zaouïas.  » 


Les  confréries  qui  exercent  à  un  degré  quelconque  leur 
influence  sur  les  tribus  de  la  confédération  des  Hamyan 
sont  les  suivantes  : 

Cheikhya,  adeptes  de  l'Ordre  des  Oulad  Sidi  Cheikh. 

Aniamia,  afTiliés  à  la  zaouïa  de  Bou  Amama. 

Taybia,  khouan  de  la  confrérie  d'Ouazzan. 

Derkaoua. 

Youcefia. 

Ziania. 

Kerzazia. 

Kadria. 

Tidjania. 

Si  Abdallah  ben  Cheikh,  de  Giierzim. 

Oulad  Sidi  Cheikh.  —  L'aïeul  de  Sidi  Cheikh,  Sidi  Sli- 
man  Bou  Smaha  avait  établi  sa  zaouïa  au  ksar  de  Chellala, 
et  comptait  les  Hamyan  parmi  ses  partisans  les  plus  dévoués. 

La  fidélité  de  ceux-ci  était  si  grande  que  le  saint  homme 
revendiqua,  sur  ses  derniers  jours,  la  faveur  de  se  dire 
((  Hamyani  ». 

A  ce  propos,  nous  citerons  une  légende  répandue  dans 
les  tribus  du  cercle  de  Méchéria.  Cette  légende  vient  d'ail- 
leurs à  rencontre  de  la  malédiction  attribuée  à  Sidi  Sliman 
Bou  Smaha  contre  d'autres  Hamyan,  les  Arabes  Moucha 
(voir  la  deuxième  partie,  Chap.  TI\  Sidi  Sliman  Bou  Smaha 
jouissait  d'une  large  aisance  ;  ses  troupeaux  étaient  consi- 
dérables ;  aussi  la  recherche  de  pâturages  abondants 
l'amenait-elle  parfois  jusqu'aux  environs  de  Figuig. 
Autour  d(^  lui  s'installaient  des  campements  de  Hamvan  et 
Trafi. 


176       DOCl  MliNTS  POLR  SfiERVlR  A  l'iIISTPIRE  DES  IIAMVAN 

Au  cours 'd'une  de  ces  migrations,  il  fut  l'objet  d'une 
tentative  d'agression  qui  échoua,  grâce  à  l'appui  que  les 
ïlamyan  lui  prêtèrent.  Le  souvenir  de  cet  incident  de  la  vie 
de  Sidi  Sliman  Bon  Smaha  s'est  pieusement  conservé  jus- 
qu'à nos  jours  ;  et  les  llamyan  s'enorgueillissent  d'avoir, 
par  leur  (idélité  au  saint  homme,  mérité  qu'il  revendiquât 
la  faveur  d'être  compté  au  nombre  des  leurs.  Sidi  Sliman 
avait  en  effet  ajouté  à  son  nom  le  titre  de  <(  Hamyani  »  qui 
figure  sur  les  actes  de  habous  déposés  à  la  zaouïa  de  Béni 
Ounif. 

V  l'époque  à  laquelle  se  rattachent  les  faits  qui  ont  donné 
naissance  à  la  légende  ci-dessous  rapportée,  un  célèbre  mal- 
faiteur des  Harrar,  Bel  Lazereg,  semait  la  terreur  parmi  les 
groupes  isolés  de  pasteurs  sahariens.  Les  riches  troupeaux 
de  Sidi  Sliman  Bon  Smaha  avaient  déjà  éveillé  sa  convoi- 
tise :  mais  les  nombreux  disciples  du  marabout  rendaient, 
par  leur  présence  autour  de  lui,  toute  attaque  impossible. 

Cependant  Bel  Lazereg  attendait  un  moment  favorable  ; 
à  la  tète  d'un  goum  composé  de  ses  meilleurs  compagnons 
de  rapine,  il  se  porta  sur  Figuig  où  Sidi  Sliman  Bou  Smaha 
était  campé  avec  ses  plus  proches  serviteurs,  tandis  que  ses 
suivants  habituels  se  trouvaient  sur  des  pâturages  éloignés 
des  ksour. 

Bel  Lazereg  se  présenta  au  marabout,  suivi  à  distance  de 
son  goum.  C'était  au  matin  de  l'Aïd  El  Kebir  ;  mais  le 
pillard  s'en  avisa  peu.  Il  ex])rima  sans  détours  à  Sidi  Sli- 
man le  but  de  sa  visite. 

Au  loin  se  dressaient  les  menaçantes  silhouettes  de  ses 
compagnons  ;  et  telle  était  la  renommée  de  Bel  Lazereg, 
que  la  nature  de  ses  exigences  ne  laissa  aucun  doute  au 
marabout  sur  l'identité  de  son  interlocuteur. 

Il  ordonna  donc  à  ses  serviteurs  de  désentraver  les  cha- 
meaux ;  mais  avant  que  le  malandrin  s'éloignât  avec  son 
butin,  Sidi.  Sliman  protesta  en  ces  termes  : 

Les  meilleurs  rameaux  sont  couverts  de  feuilles,  ô  Bel  Lazereg. 
Les  hommes  choisissent  leurs  cliefs  parmi  l'élite.  Nul  n'échappe 
au  feu  qu'il  a  alhimé. 


DOt;l  MEN'I'S  I>()1  R  SEH\  lU    \   I  ■||I>r01MK  DES  11 AMVA.N        I"7 

Le  marabout  faisait  allusion  à  sa  ruine,  dont  Bel  Lazoreg 
était  l'artisan,  et  (|ui  allait  le  transfoiiiKM-  en  un  homme 
sans  fortune,  en  «  un  rameau  sans  feuilles  ». 

Cependant  le  malfaiteur  s'éloignait,  indifïérent  aux 
exhortations  de  sa  vietime.  Alors  Sidi  Sliman  Bon  Smaha, 
dressé  devant  sa  tente,  le  bras  levé,  l'accompagna  de  ces 
mots  : 

• — ^        -       c   •- 

Puisse  Dieu  t'ag-iter  sans  cesse,  comme  la  hète  affolée  qui  fuit 
et  butte  de  roc  en  roc. 

Puisse-t-il  t'enfoiiir  sous  (erre,  comme  on  enfouit  un  trésor 
invisit)le. 

Puisse-1-il  te  l>royer,  te  pulvériser,  comme  le  grain  lencire  que 
l'on  effrite  entre  les  mains. 

Soudain  des  cavaliers  surgirent  ;  c'étaient  des  Ilamyan, 
venus  de  leurs  campements  du  Tafîlalet  pour  célébrer 
auprès  du  saint  homme  lAïd  El  Kebir. 

Sidi  Sliman  leur  montra  la  masse  des  voleurs  confondus 
avec  leur  butin  et  fuyant  à  l'horizon.  Les  Hamyan  s'élan- 
cèrent et  bientôt  Bel  Lazereg  et  son  goum  étaient  anéantis. 

Le  célèbre  chef  de  bande  avait  trouvé  la  mort  dans  le 
combat  et  reposait  parmi  les  cadavres  de  ses  compagnons 
auprès  d'une  touffe  d'alfa. 

Cependant  les  vainqueurs  s'assemblaient  autour  de  son 
corps,  et  tandis  que  l'un  d'eux  allumait  une  touffe  d'alfa, 
une  flamme  jaillit  soudain,  enveloppant  le  cadavre  qui  fut 
consumé  ;  ainsi  se  réalisait  la  malédiction  de  Sidi  Sliman. 

Les  Hamyan  ramenèrent  au  marabout  les  troupeaux 
repris  à  Bel  Lazereg,  et  Sidi  Sliman  Bou  Smaha  s'écria  à 
leur  vue  : 

Je  pensais  que  fous  les  hommes  étaient  les  défenseurs  de  Dieu. 
Je  sais  maintenant  que  les  défenseurs  de  Dieu  sont,  avant  tout, 
les  Hamvan. 


178       DOCIMEM'S  POI  R  SERNIH    \  1  'lITSIOlKE  DES  1I\-\1V\N 

et,  011  somt'uir  du  secours  providentiel  (|u"il  avait  reçu 
d'eux,  il  revendiqua  le  titre  de  «.  llamyani  »  que  ses  des- 
cendants lui  ont  conservé. 

Après  lui  et  en  souvenir  de  ses  vertus,  les  Hamyan  témoi- 
gnèrenl  la  plus  grande  vénération  à  Sidi  ('heikh  Abdelka- 
der,  le  fondateur  de  lOrdie  des  Cheikhva. 

* 
*  * 

Sidi  Cheikh  était  adonné  aux  j>rati(jues  de  la  plus  grande 
dévotion  et  avait  coutume  de  s'isoler  dans  des  cavernes. 
Deux  grottes  situées  à  Nebch,  à  i8  kilomètres  au  Nord- 
Ouest  de  Méchéria,  dans  le  Djebel  Antar,  et  au  chott  Gharbi, 
dans  le  cercle  de  Méchéria,  étaient,  il  y  a  encore  une  tren- 
taine d'années,  des  lieux  de  pèlerinage  où  les  Hamyan  fai- 
saient individuellement,  et  à  toute  époque,  des  sacrifices 
(fanimaux  dont  la  chair  était  donnée  en  aumône  aux 
pauvres. 


Bon  Amania.  —  Ce  marabout  appartient  à  la  branche  des 
Oulad  Sidi  Tadj.  On  connaît  ses  débuts,  la  lutte  qu'il  a  sou- 
tenue contre  nous  et  ce  qu'est  devenue  sa  zaouia,  à  sa  mort. 

Il  a  fondé  un  ordre  dérivé  des  Cheikhya  et  a  bénéficié  de 
la  confusion  créée  dans  l'esprit  de  certains  aiïiliés  à  la  con- 
frérie de  Sidi  Cheikh,  par  ce  fait  qu'il  prétendait  détenir 
la  baraka  de  son  fondateur.  En  effet,  Bon  Amama  repré- 
sentait aux  Cheikhya  qu'en  s'afïiliant  à  sa  zaouïa  ils  ne 
renonçaient  pas  à  leur  affiliation  premi-ère.  Parmi  ses  par- 
tisans, un  grand  nombre,  conscients  de  cette  équivoque, 
s'abritèrent  S(jus  le  titre  de  «  Cheikhya  »  pour  éviter  de  se 
signaler  aux  yeux  de  l'Autorité  française. 

Dans  les  tribus  Hamyan,  le  marabout  a  joui,  de  son 
vivant,  d'un  prestige  dont  la  manifestation  fut  contenue 
par  le  souci  de  nous  dissimuler  toute  attache  avec  le  rebelle. 
Mais  l'attitude  même  de  Bou  Amama,  son  insoumission, 
son  existence  en  dehors  de  notre  territoire,  lui  créèrent 
dans  l'esprit  des  indigènes  un  rôle  de  champion  de  la  foi 
islamique  et  de  victime  des  persécutions  chrétiennes. 

Si  les  visites  à  la  zaouïa  de  cet  agitateur  cessèrent  à  peu 
])rès  à  pari  il'  de  ipo.S,  ce  fut  uniquement  dans  la  crainte  de 
nous  déplaire,  mais  la  sympathie  vouée  par  une  partie  des 
Hamyan  au  marabout  se  traduisait  par  les  relations  cachées 


DOCIMEMS  POIR  SEH\  IH  A  t/iIISIOIRE  DES  IIAMYAN       179 

que  c'iTlains  eiilretciiaiciit,  j>ai'  di's  iiiroinialions  diverses 
qui  lui  élaient  adressées  clandestiiienienl,  etc. 

La  présence  de  Bou  Amania  non  loin  des  confins  de  notre 
territoire  fut  une  menace  permanente  d'agitation. 

Elle  ciéa  une  situation  d'autant  plus  dangereuse  que  le 
contrôle  des  progrès  de  son  inlluence  nous  échappait  en 
raison  du  caractère  clandestin  des  relations  de  nos  indi- 
gènes avec  sa  zaouïa. 

Aucun  signe  apparent  ne  décelait  en  effet  le  ((  Amami  »  ; 
il  était  ostensiblement  <(  Cheikhi  »  et  portait  en  sautoir  le 
cha|)elot  de  cet  Ordre  ;  la  seule  différence  dans  cet  insigne 
de  l'airiliation  à  l'Ordre  principal  ou  à  son  dérivé  résidait 
dans  la  place  d'un  grain  de  corail.  Chez  les  Cheikhya,  le 
corail  était  placé  après  le  cinquantième  des  grains  du  cha- 
pelet, tandis  que  les  fidèles  de  Bou  Amama  l'avaient  glissé 
après  le  vingt-cinquième.  La  «  Révélation  )i  s'était  mani- 
festée, paraît-il,  au  marabout  de  Mogliar  en  ce  point  même 
de  son  chapelet,  nn  jour  qu'il  l'égrenait.. . 

Le  dikr,  oraison  rituelle,  était  et  est  encore  peu  différent 
de  celui  des  Cheikhya  ;  nous  le  donnons  ci-dessous,  tel  qu'il 
se  récitait  au  moment  de  l'insurrection  de  1881    : 

Je  clien  lie  un  retu^e  auprès  de  Dieu,  qui  sait  et  entend  tout, 

contre  le  démon  lapidable. 

Au  nom  de  Dieu,  le  Clément  et  Miséricordieux. 

Louanges  à  Dieu.  .Maître  des  mondes,  etc.  (Sourate  I.  Fatiha.) 

Lorsque  viendra  la  victoire  de  Dieu,  etc.  (Sourate.) 

Mon  Dieu,  je  viens  à  toi,  je  viens  à  toi,  tu  n'as  pas  d'associé 

et  le  bien  se  répartit  entièrement  par  ta  main.  (2  fois.) 
.f "implore  le  pardon  de  Dieu  le  Magnifique,  (roo  fois.) 
Il  n'y  a  de  Dieu  que  Dieu,  la  vérité  évidente.  (100  fois.) 
Dieu  et  ses  anges  répandent  leurs  bénédictions  sur  le  Pro- 
phète. O  vous  qui  croyez,   priez  pour  lui  et  appelez  sur  lui  le 

salut,  (i  fois.) 

Mon  Dieu,  répands  tes  bénédictions  sur  le  Prophète  illettré, 

sur   sa    famille    et    ses    compagnons    et  accorde-leur    le    salut. 

(100  fois.) 

Mon  Dieu,  ine  voici,  me  voici,  me  voici.  Tu  n'as  pas  d'associé. 

Je  suis  ton  serviteur  humble  et  vil,  celui  qui  espère  ton  pardon 

et  qui  obéit  à  tes  ordres.  (3  fois.) 

Au  nom  de  Dieu,  le  Clément  et  Miséricordieux.  (100  fois.) 
J'rfittcste  qu'il  n'y  a  de  divinité  que  Dieu,  et  que  notre  Seigneur 

Mohammed  est  son  prophète,  que  Sidi  Bou  Àniama  Ben  Lnrbi 

est  l'ami  de  Dieu  ! 


180       DOCI   MKN  IS  POrU  SKU\  115    \   l.'llISTOIKE  DES  IIAMV\>- 

Ensuilr  lo  khouan  lécite  la  fatiha  et  dit  loo  fois  : 

0  très  bon.  Mon  espoir  est  en  Dieu  et  c'est  le  meilleur  inter- 
cesseur, (loo  fois.) 

J'atteste  qu'il  n'y  a  de  divinité  que  Dieu,  que  Mohammed  est 
son  envoyé  et  que  Sidi  Abdelkader  Ben  Mohammed  '  esl  l'ami 
de  Dieu,  que  Sidi  Bon  Amama  est  l'ami  de  Dieu. 

O  mon  Dieu,  par  les  mérites  de  Sidi  Abdelkader  Ben  Moham- 
med, fais  que  Sidi  Bon  Amama  nous  soit  favorable  el  ait  pour 
nous  la  faveur  de  la  miséricorde. 

l'uis  le  faciLiir  sincline  et  salue. 

l.es  mokaddems  du  Cheikh  étaient  porteurs  d'une  ins- 
truction noninioe  «  Yacouta  ».  Elle  déterminait  les  peines  à 
infliger  à  tout  khouan,  coupable  d'une  faute  quelconque 
vis-à-vis  d'un  autre  khouan  ;  une  malédiction  proférée 
contre  un  khouan  «  amami  »  entraînait  pour  son  auteur 
robligation  de  vei'ser  20  francs. 

Celui  qui  s'introduisait  sous  la  tente  d'autrui,  dans  un 
désir  de  fornication, était  astreint  à  la  remised'unchameau. 

Le  mokaddem  réunissait  les  diverses  amendes  frappées 
sur  les  khouan  et  les  faisait  parvenir  à  la  zaouïa. 

Tant  que  Bon  Amama  vécut,  la  grande  majorité  des 
ïlamyan  lui  fut  des  plus  fidèle  :  caïds,  notables,  khammès 
lui  multipliaient  à  l'envie  les  ziaras  et  le  renseignaient  à 
qui  mieux  mieux  sur  nos  moindres  faits  et  gestes. 

[,a  venue  des  caravanes  au  Gourara  était  une  occasion 
d'aller  visiter  le  marabout. 

Presque  tous  et  principalement  les  Akerma,  les  Oulad 
Messaoud,  les  Meghaoulia  et  les  Frahda  (Béni  Ogba)  lui 
conservèrent  leur  foi  jusqu'à  sa  mort. 

Depuis,  cet  enthousiasme  a  presqii'entièrement  disparu. 
Son  fils  Tayeb,  héritier  de  la  baraka,  s'est  allié  aux  Fran- 
çais ;  il  réside  sans  cesse  à  El  Aïoun  Sidi  Mellouk,  n'est  plus 
guère  orienté  vers  l'Algérie  que  pour  envoyer  ses  moutons 
et  ses  chameaux  pacager  sur  les  terrains  de  parcours  des 
Hamyan  et  des  Amour  et  n'a  pas  l'auréole  d'<(  invincible  » 
qu'on  attribuait  à  son  père. 

Cependant,  si  un  beau  jom%  Tayeb  ould  Bon  Amama 
évoluait  dans  un  sens  contraire  et  prêchait  l'insurrection, 
il  est  probable  qu'il  retrouverait  chez  les  Hamyan  la  même 
fidélité  et  la  même  dévotion  que  celles  qu'avait  su  susciter 
son  père. 


I   Sifli   Abdelkader  ben   Mohammed   est   le  prand   Sidi   Cb.eikh,   fondateur  de 
l'Ordre  des  Oulad  Sidi  Cheikh. 


DOCUMENTS  POUR  SERVIR  A  l'iIISTOIRE  DES  HAMYAN       181 

y  once  fia.  —  Si  Ahmed  Ben  Youcef,  fondateur  de  l'Ordre 
dont  le  tombeau  est  situé  à  Miliana,  a  laissé,  chez  les 
llamyan  Ghafaa  un  renom  de  sainteté  que  la  tradition  orale 
a  pieusement  conservé  avec  ses  dictons  et  boutades. 

Le  marabout  était  venu,  au  cours  de  ses  pérégrinations, 
dans  le  Sahara  de  la  province  d'Oran.  Il  s'en  éloigna  après 
un  très  court  séjour,  non  sans  avoir,  dans  une  brève  et 
virulente  improvisation,  exprimé  le  pou  d'attiait  de  ce 
pays  : 

^— Mk ^j    y^ — ^*i..=s.  I      is^ 

0  Saliara,  ton  souille  m'a  aveuglé, 
Ton  eau  ne  m'a  pas  purifié. 
Si  Ahmed  te  revoit  une  deuxième  fois, 
Qu'il  soit  considéré  comme  un  chrétien. 

Comme  il  traversait,  pour  gagner  le  Tell,  le  territoire 
occupé  alors  par  les  Hamyan  Chafaa,  l'hospitalité  qu'il 
reçut  chez  eux  l'engagea  à  s'installer  quelque  temps  au 
milieu  de  leurs  douars  et  à  les  initier  à  sa  doctrine.  La 
générosité  de  ses  hôtes,  leur  valeur  guerrière,  lui  inspirè- 
rent ce  propos  que  les  Hamyan  Chafaa  répètent  complai- 
samment  : 

Les  Chafaa  sont  utiles,  c'est  un  revenu  sans  frais  de  métayage. 

Les  Chafaa  versent  aux  descendants  de  Si  Ahmed  Ben 
Youcef,  les  Oulad  Miloud  fixés  à  Tiout,  une  redevance 
(Khedma)  annuelle  de  un  mouton  par  tente. 

C'est  à  Si  Mouley,  agha  d'Aïn-Sefra,  à  Si  El  Miliani,  ou 
à  leurs  frères  que  sont  remises  les  offrandes. 

En  très  grand  nombre,  les  Bekakra,  les  Béni  Metharef, 
les  Oulad  Mansourah,  5o  tentes  des  Akerma  Oulad  Salem, 
les  Oulad  Messaoud    sont  serviteurs  de  la  zaouïa  de  Tiout. 

Kerzazia.  —  L'Ordre  des  Kerzazia,  fondé  par  Ahmed  Ben 
Moussa  El  Hassaïn,  compte  de  nombreux  khouan  sur  le 
territoire  du  cercle.  Chaque  année,  au  printemps,  les  servi- 
teurs de  la  zaouïa  parcourent  les  tribus  Hamyan  oii  une 
ziara  d'un  chameau  leur  est  remise. 


14 


182       DOf:i  MEMS  l'Ol  U  SEKN  IH  A  I.IIISIUJRE  DES  IIAMÏAN 

Celle  confrérie  qui,  pendunl  la  conquêle,  nous  fut  hos- 
tile, a  toujours  montré  à  notre  égard,  depuis  l'occupation 
des  ksour,  une  altitude  correcte,  et  la  zaouïa  de  Kerzaz  a 
un  grand  renom  d'hospitalité  chez  les  Hamyan,  (jui  y  sont 
bien  accueillis. 

(Les  Oulad  Serour  sont  presfjue  tous  serviteurs  d'une 
zaouïa  peu  importante,  celle  de  Si  Abdallah  Ben  Cheikh, 
de  Guerzim.  C'était  Si  El  Bedri  ould  El  Mekki,  chef  de  la 
zaouïa,  qui  venait  chaque  année  rece^oir  la  ziara  d'un 
agneau  par  tente.  Les  Oulad  Serour  Cheraga  de  Géry ville 
sont  également  serviteurs  de  cette  zaouïa.) 

Ziania.  —  La  confrérie  des  Ziania  a  son  siège  à  Kenadsa, 
à  af)  kilomètres  de  Colomb-Béchar,  à  3o  kilomètres  de 
rOued  Guir.  Elle  a  été  fondée  par  Si  El  LIadj  Mohammed 
Ben  Abderrahman  Ben  Abou  Zian,  vers  la  fin  du  xvn"  siècle 
de  notre  ère.  Dans  ses  débuts,  la  zaouïa  de  Kenadsa  s'efforça 
d'assurer  la  sécurité  dans  une  contrée  oii  les  attaques  de 
caravanes,  les  pillages  étaient  fréquents.  La  protection 
donnée  par  les  Ziania  de  Kenadsa  aux  nomades  se  rendant 
au  Talilalet  ou  remontant  vers  le  Nord  leur  créa  une 
influence  assez  étendue  dans  les  tribus  des  Hauts-Plateaux 
et  du  Sahara  Oranais. 

Les  Hamyan  sont,  par  tradition,  dévoués  à  l'Ordre  des 
Ziania  ;  le  nombre  des  aiïîliés  à  cet  ordre  est  cependant 
assez  restreint. 

Mais  son  chef  actuel.  Si  Brahim  ould  Mohammed  Ben 
Abdallah,  l'aveugle,  jouit  d'une  grande  réputation  dans 
tout  le  cercle  de  Méchéria. 

C'est  le  médiateur  presque  toujours  écouté  des  familles 
ayant  des  querelles  intestines  à  régler.  1-1  tranche,  lors  de 
ses  tournées,  de  nombreux  différends  et  litiges  et  son  action 
bienfaisante  est  très  appréciée  par  la  majorité  des  Hamyan. 

Deikaoua.  - —  Entre  beaucoup  d'autres  étymologies,  on 
prétend  que  le  mot  «  Derkaoua  »  vient  de  'L.3j  ^  (Derqa), 
([ui  signifie  u  bouclier  »,  parce  qu'à  l'origine  l'Ordre  avait 
été  fondé  pour  réunir  des  combattants  devant  servir  de 
boucliers  contre  tous  les  envahisseurs  du  Maroc,  et  princi- 
palement les  Portugais. 

Secte  rigide,  détachée  des  biens  de  ce  monde,  ne  devant 
avoir  aucune  ambition  terrestre,  se  livrant  à  des  pratiques 
austères,  sa  raison  d'être  se  basait,  avant  tout,  sur  la 
xénophobie. 

On  a  dit  rpic  cette  confiérie  niait   toute  autorité  ;  cela 


UOCUME.NJ'S  POUR  8ERVIU  A  l'im.STOIHE  DES  II.A.MVAN       iHij 

ii'esl  [Jd>,  ciuyons-iious,  absoluniciil  <xacL,  eur,  pur 
exemple,  dans  leur  luUe  contre  les  Turcs,  ils  reconnais- 
saient l'aulorité  du  sultan  du  Maroc,  Moulay  Slinian.  (Voir 
Cliap.  m  (le  la  deuxième  partie  du  présent  Uavail.j 

Actuellement,  tout  en  criant  bien  haut  qu'ils  rejettent 
toute  autorité  temporelle  ne  faisant  pas  servir  sa  puissance 
à  la  propagation  et  à  la  glorification  de  l'Islam,  ils  mettent 
quelques  accomodements  à  cette  doctrine  farouche. 

Nous  sont-ils  ou  non  hostiles  ? 

Depuis  notre  commencement  d'emprise  sur  le  Maroc,  il 
s'est  produit  de  telles  évolutions  qu'on  ne  peut  guère  se 
prononcer. 

Si  Moulay,  agha  de  Tiout,  est  Derkaoui,  et  il  n'y  a  pas  de 
chef  indigène  qui  nous  soit  plus  dévoué. 

Un  jeune  chérif  des  environs  de  Fez,  de  haute  lignée 
Derkaoua,  est  venu  dernièrement  à  diverses  reprises  parmi 
nous  (1913-191/O,  à  Méchéria,  à  Aïn-Sefra,  à  Colomb- 
Béchar,  avec  le  colonel  Pein  et  le  général  Levé  ;  il  est  loin 
de  nous  être  hostile. 

Par  contre,  beaucoup  d'autres  nous  haïssent  réellement. 

La  branche  mère  des  Derkaoua  a  sa  zaouïa  à  Bon  Berih, 
tout  près  de  Fez. 

Ses  ramifications  les  plus  importantes  au  Maroc  sont  à 
Sefrou  et  au  Medagha  (Tafilalet). 

Dans  ce  dernier  district,  à  Ghamet  Allah  ou  à  Gaouz, 
résidait  l'un  de  nos  pires  ennemis,  Si  Mohammed  Bel  Larbi, 
grand  maître  des  Derkaoua  du  Tafilalet,  qui  était,  à  une 
certaine  époque,  considéré  comme  séparé  de  la  branche- 
mère. 

Ce  furent  les  Derkaoua  du  Tafilalet  qui  nous  suscitèrentà 
peu  près  toutes  les  difïicultés  qui,  pendant  de  nombreuses 
années,  surgirent  dans  le  Sud  Oranais. 

Si  Ahmed  El  Hachemi  Bel  Larbi,  décédé  au  Gaouz  en 
février  1892,  à  l'âge  de  98  ans,  ne  cessa  d'exciter  contre 
nous  les  Beraber  et  les  Béni  Guil. 

C'est  à  cette  zaouïa  du  Tafilalet  que  se  rendit  El  Hadj 
Ahmed  ould  Mebkhout,  décédé  étant  mufti  de  Méchéria 
et  mokaddem  des  Derkaoua  dans  la  région  de  Méchéria. 

Nous  avons  exposé  précédemment  le  rôle  joué  par  ce 
mokaddem,  nous  n'y  reviendrons  pas.  Nous  dirons  seule- 
ment que  son  importance  s'était,  à  la  fin  de  ses  jours,  fort 
réduite. 

Il  avait,  quoiqu'en  aient  voulu  dire  certaines  personnes, 
une  haine  profonde  pour  tout  ce  qui  était  chrétien,  ce  qui 


184       DOGUiMEiNTS  POUR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMYVN 

ne  l'empêchait  pas  d'accepter  de  nous  un  traitement  de 
1.-200  francs  par  an  comme  mufti  de  Méchéria,  alors  qu'il 
ne  savait  ni  lire  ni  écrire. 

Les  Derkaoua  sont  d'ailleurs  actuellement  relativement 
peu  nombreux  chez  les  llamyan  qui  estiment  trop  rigide  la 
doctrine  de  cet  Ordre. 

Jl  y  a  cependant  lieu  de  surveiller  de  très  près  les  agisse- 
ments de  cette  confrérie.  Elle  a  joué  un  rôle  dans  l'avè- 
nement de  Moulay  Hafid,  elle  est  intervenue  dans  l'exode 
d'un  certain  nombre  de  nos  contribuables  de  Tlemcen  en 
Syrie,  elle  a  pris  part  aux  formations  de  harkas  et  de 
djiouch  qui  nous  ont  assailli  tant  sur  nos  frontières  qu'au 
Maroc  même,  et,  en  ce  moment  (octobre  19 15),  elle  s'est 
reliée  à  la  branche  dissidente  des  Madanya,en  Tripolilaine, 
pour  faire  cause  commune  avec  les  Senoussia. 

Taybia.  —  L'Ordre  des  Taybia  compte  un  certain  nom- 
bre d'affiliés  dans  la  confédération  des  Hamyan.  Les  ziaras 
ne  sont  remises  qu'à  l'occasion  des  visites  sur  le  territoire 
du  cercle  de  représentants  de  la  zaouïa  d'Ouazzan. 

Or,  ces  visites  ne  sont  pas  régulières  et  se  produisent 
parfois  après  une  période  de  trois  années,  sans  tournée 
d'aucune  sorte. 

Kadria.  —  La  confrérie  des  Kadria  compte  un  petit  nom- 
bre d'adeptes  dans  le  cercle.  On  assure  qu'aucune  ziara 
n'est  remise  et  que  les  khouan  se  bornent  au  printemps  à 
égorger  un  mouton  dont  la  chair  est  distribuée  en  aumône 
aux  pauvres. 

Chez  les  Oulad  Amar,  fraction  du  douar  Oulad  Bou  Salem 
(Akerma),  on  marque  à  l'oreille,  chaque- année,  à  sa  nais- 
sance, un  agneau  par  tente.  C'est  le  <(  Kherouf  Sidi  Abdel- 
kader  ».  S'il  vit,  on  l'envoie  en  offrande  à  Si  Abdallah, 
représentant  de  l'Ordre  à  Chellala. 

Au  commencement  de  l'été,  pendant  quelques  jours,  les 
tentes  de  la  tribu,  par  groupes  de  dix,  égorgent  un  mouton 
au  nom  de  Si  Abdelkader  ;  la  chair  sert  à  la  confection  d'un 
repas  auquel  les  pauvres  sont  admis. 

Tidjania.  —  Les  Tidjania,  qui  étaient  jadis  peu  répandus 
parmi  les  llamyan,  prennent  depuis  quelques  années  un 
certain  développement. 

* 

*  * 

Indépendamment  des  ordres  importants  cités  ci-dessus, 
certaines  petites  confréries  ou  zaouïas  comptent  des  servi- 


DOGUMEMS  POUR  iSEll\  IJ4  A  LIIISTOIUE  DES  UA.MïAN        185 

tours  chez  les  Ilainyaii.  Les  Akcniia  di)iiiieiit  cliuqut'  année 
au  lepréscnlanL  des  Oulad  Sidi  Zion  El  Aïioch,  Clieuifa 
d'E]  Âïrecli,  une  brebis  ou  une  toison  par  tente.  Cette 
olïrande  est  traditionnelle.  I^lle  remonte  à  tleux  siècles 
environ  :  à  la  suile  d'un  pillage  elTeclué  par  les  llaniyan 
sur  les  troupeaux  des  Gheurfa  d'El  Aïrech,  ceux-ci  avaient 
appelé  sur  leurs  agresseurs  la  vengeance  divine  qui  se 
manifesta  soudain  :  deux  des  Hamyan  se  blessèrent  acci- 
dentellement et  les  chameaux  du  groupe  furent  tous  simul- 
tanément atteints  de  la  gale.  Anxieux,  s'attendant  à  de  nou- 
velles manifestations  du  courroux  céleste,  les  Hamyan  réso- 
lurent d'aj)aiser  leurs  victimes  ;  ils  leur  rendirent  le  b,utin 
précédemment  enlevé,  et  leur  versèrent  une  ziara,  s'cnga- 
geant  à  payer  chaque  année  la  même  redevance.  Le  groupe 
des  Hamyan  héros  de  cet  épisode  appartenait  à  la  tribu  des 
Akerma. 

Une  fraction  du  douar  Daaliz  (Akerma),  20  tentes  envi- 
ron, remettent  chaque  année  une  ziara  peu  importante 
(I  franc  par  tente)  aux  envoyés  de  marabouts  sans  grande 
notoriété,  les  Oulad  Sidi  Abdelmalek  Bou  Neggab,  Gheurfa, 
groupés  auprès  de  Taghit,  chez  les  Béni  Goumi.  G'est  plu- 
tôt une  aumône  faite  à  ces  personnages  renommés  pour 
leur  piété,  qu'une  ziara.  Au  douar  des  Oulad  Bou  Salem, 
10  tentes,  parmi  lesquelles  celle  du  caïd,  quelques  tentes 
des  Ghiatra  également  donnent  une  ziara  de  n  francs  par 
tente  et  un  pot  de  beurre  aux  Oulad  Ben  Abderrahman 
Saheli  i,  auxquels  les  Oulad  Sidi  Cheikh  eux-mêmes  don- 
nent en  ziara  chaque  année  une  esclave. 

G'est  à  la  suite  de  vœux  formulés,  soit  pour  l'augmenta- 
tion du  troupeau,  soit  en  vue  de  la  naissance  prochaine  d'un 
héritier,  que  chaque  chef  de  tente  donne  une  offrande  aux 
Oulad  Sidi  Ben  Abderrahman  Saheli, 

Dix  tentes  des  Béni  Metharef,  parmi  lesquelles  celle  du 
caïd,  donnaient  aussi  à  Si  Mohammed  Ben  Abid,  envoyé 
des  Oulad  Ben  Abderrahman  Saheli,  un  mouton  par  tente. 

Les  Megan  sont  en  partie  serviteurs  des  Oulad  Sidi  Bou 
Tkhil,  d'Aïn-Sefra,  mais  leurs  ziaras  sont  remises  au  caïd 
des  \rbaouat  (cercle  de  Géry ville). 

* 
*  * 

Koubbas  et  Zaoïiïas.  —  H  n'existe  aucune  zaouïa  sur  le 
territoire  du  cercle  de  Méchéria. 


I     Du  ksar  de  Snheli.  sur  le  Gtiir,  à  S  kilomètres  de  Bon  Denib. 


186       DOCUMEM:^  POLR  SEIU  lU    \  I.IIISIOIKK  DES  IIAMVAN 

Le  iiiiilli  l"l  llaclj  Ahmed  ould  iMc!)kii(mt  rcccv  ail  dans  sa 
denieuic  les  kliouan  clc  dilTéreiils  oïdies  (|iii  élaicnl  de  pas- 
sage. Une  école  indigène  existe  à  la  in()sf|née  ;  (^lle  fut 
dirigée  spiriluelienient  par  lui  ;  elle  iia  (|ue  l'orl  peu 
d'élèves. 

Il  y  a  dans  le  cercle  trois  koubbas  sans  imporlance  : 

i"  Celle  de  Sidi  Mohammed  Ben  M'hammed,  située  à 
environ  afi  kilomèlres  au  Nord  de  Méchéria,  près  d<>  Feka- 
rine  ;  elle  a  élé  élevée  en  l'honneur  d'un  marabout  de  Ker- 
zaz  d'abord  enterré  à  Slissifa  oii  une  koubba  lui  fut  cons- 
truite, puis  dont  le  corps  fut  transporté  à  Kerzaz. 

Le  mufti  El  Hadj  Ahmed  ould  Mebkhout  avait  placé  à 
celte  koubba  un  bouab  qui  ramasse  péniblement  (fuelrpTar- 
gent  des  fidèles  venus  pour  prier  ou  pour  prêter  serment  ; 

:>"  Celle  de  Sidi  Ahmed  Ben  Miloud,  bâtie  à  l'extrémité 
Est  du  chott  Gharbi  ;  cette  koubba  est  le  tombeau  de  Sidi 
Ahmed  Ben  Miloud,  marabout  originaire  de  Kerzaz  et  dont 
les  descendants  sont  acluelleinent  fixés  dans  les  environs 
d'Oudjda  ; 

?>"  Celle  élevée  à  Galloul,  en  19 1;^  par  des  gens  des 
Akerma,  des  Meghaovdia  et  des  Béni  Melharef,  soi-disaid 
«  pour  faire  tomber  la  pluie  >>,  mais  en  réalité  en  l'honneur 
de  Bon  Amama. 

* 
*  * 

En  résumé,  la  "  baraka  »,  celte  détention  pai'  un  humain 
de  la  faveur  divine,  divisible  à  l'infini  et  transmissible  à 
tous  les  hommes,  grâce  à  l'intermédiaire  de  son  détenteur, 
semble  avoir,  chez  les  Hamyan,  moin.s'  de  puissance  que 
jadis. 

Si,  dans  le  passé,  la  pureté,  l'austérité  des  mœurs  du 
marabout,  ont  permis  de  reconnaître  en  lui  les  attributs 
d'une  préférence  spéciale  d'Allah,  l'âpreté  actuelle  de  ses 
descendants,  leur  avide  attachement  aux  choses  tempo- 
relles, les  échecs  qu'ils  ont  subi  dans  leurs  luttes  contre 
nous,  ont  causé  dans  l'esprit  des  Hamyan,  une  désillusion 
favorable  au  «  doute  ». 

Composées  actuellement  d'éléments  d'origines  trèsdiver- 
ses,  ces  tiibus  n'ont  pas,  comme  dans  d'autres  régions,  des 
grandes  familles  maraboutiques  réunissant,  la  considéra- 
tion, le  respect  et  les  sentiments  religieux  de  toute  une 
population. 

Suivant  leur  ])iovenanc(\  ou  par  suite  de  circonstances 


UOCl  MLMS^  POIK  SEia  IK    \   l.'lll:> TUlUl-:  DES  IIANU  AN        l!^' 

quel(<)ii(|iic8,  ccriains  trenlre  eux  se  soiil  aHiliés  ù  (elle  ou 
telle  confiéiie. 

De  là,  dans  leurs  sentiments  religieux,  une  certaine  tié- 
deur r{ui  ne  les  enipèclu^  d'ailleurs  pas  de  remettre,  par  res- 
pecl  humain,  leuis  offrandes  aux  mokaddems,  (]uèteurs, 
ramasseiu's  de  ziaras  cl  aulres  nicndiauls  (pii  les  assaillent 
de  demandes. 

Mais,  excej)li<)n  failc  pour  les  Dcikaoua,  il  i\'\  a  jjas  lieu 
d(>  eraindre,  en  ce  moment,  chez  eux  l'accent  nation  du 
mouvement  panislamique  ;  la  théorie  du  «  plus  grand 
Islam  »  est  bien  ignorée  de  tous  ces  pasteurs  chez  lesquels 
le  souci  des  intérêts  matériels  présents  est  la  seule  véritable 
préoccupation. 

Tant  qu'il  en  sera  ainsi,  nous  pounons  espérer  que  leur 
état  d'es})rit  ne  se  laissera  pas  travaille)'  dans  un  sens  hostile 
aux  iiiléréts  français. 


CHAPITRE  \lll 
LES  REZAÏXA 


Les  Bezaïna  appartiennent  à  la  fraction  des  Tiali.  <  Voir 
sur  leurs  origines  la  première  partie  du  présent  travail.) 

Avant  l'occupation  française,  ils  disposaient,  sans  con- 
testation, de  tout  le  territoire  situé  au  Sud  du  chott  Chergui 
et  délimité  :  à  TEst,  par  une  ligne  allant  d'El  Hamia  es 
Souf  à  Tismouline  ;  au  Sud,  par  la  ligne  Tismouline-Touad- 
jeur  ;  à  l'Ouest,  par  le  Djebel  Antar,  Khebazza,  Fekarine  et 
Ang  el  Djemel  ;  au  Nord,  par  le  chott.  Ils  faisaient  boire 
leurs  troupeaux  aux  points  d'eau  d(^  Khadra,  Bedrous,  Haci 
el  Hadri,  Tismouline,  Sebaïn,  Touadjeur,  Méchéria,  El 
Biodh,  Fekarine,  Bir  Senia,  El  Hamra.  Le  ksar  de  Bon  Sem- 
ghoun  était  leur  point  principal  d'ensilotement. 

Ils  ne  formaient  qu'un  seul  groupement  qui  se  soumit 
pour  la  première  fois  à  notre  autorité  en  i845,  sous  la  con- 
duite d'Aïssa  ould  Abdelmalek,  lequel  n'amena  avec  lui 
que  le  tiers  des  tentes. 

En  iS46,  tous  les  autres  Rezaïna  vinrent  se  soumettre. 

L'année  suivante  (iS^y),  Aïssa  ould  Abdelmalek  étant 
vieux   et   aveugle,    Larbi    ould    Maamar   Ben    Cliekor   fut 


l!^8       DOCl  MlîMS  POl  R  8EKV1U  A  l.'lIlSTOlRE  DES  IIAMV.VN 

noiiinic  caïd.  8a  famille  avait,  sous  la  doiiiination  turque, 
{)resquc  toujours  coinmaiidé  à  rciisciuble  des  liezaïna. 

Kn  janvier  18/19,  Larbi  ould  Maamar  Ben  C^hekor  fut 
accusé  par  son  rival,  Djillali  Bou  Zella,de  vouloir  entraîner 
les  Rezaïna  dans  l'Ouest  à  la  suite  de  Si  Cheikh  Ben  Tayeb  i. 
Larbi  ould  Maamar  Ben  Chekor  fut  arrêté,  envoyé  en  pri- 
son à  Oran  cl  remplacé  {)ar  son  dénonciateur,  Djillali  Bou 
Zella. 

Ce  dernier  fut,  à  son  tour,  révocpié  le  20  avril  i85o,pour 
avoir  entretenu  des  rcliilions  avec  les  tribus  sahariennes 
qui  nous  étaient  hostiles. 

hes  Bezaïna  furent  alors  divisés  en  deux  caïdats,  les  Che- 
raga  et  les  Gheraba.  Les  lU'zaïna  Cheraga  furent  confiés  à 
Larbi  ould  Maamar  Ben  Chekor,  qui  sortit  de  prison,  et  les 
Rezaïna  Glieraba  eurent  pour  caïd  Ben  Moussa  oïdd 
Kouider. 

A  la  même  épo([uc,  les  Rezaïna  qui,  jusqu'alors  avaient 
dépendu  du  cercle  de  Mascara,  furent  mis  sons  l'autorité  de 
celui  de  Saïda. 

Rezaït)a  Cheraga.  —  Pendant  deux  ans,  Larbi  ould  Maa- 
mai'  Ben  Chekor  servit  bien  ;  mais,  dans  la  imit  du  i4  au 
i5  décembre  i852,  entraîné  par  Sidi  Cheikh  Ben  Tayeb,  il 
fît  défection  avec  toute  sa  tribu  pendant  que  nous  prenions 
l'oasis  de  Lag^houat  5. 

Il  rentra  avec  la  moitié  de  sa  tribu  en  i853  et  son  com- 
mandement lui  fut  laissé.  On  le  révoqua  l'année  suivante  à 
cause  des  relations  continuelles  qu'il  entretenait  avec  les 
Rezaïna  restés  en  dissidence  au  Maroc. 


I  Le  coliiiicl  Maissiat,  ciininiaiirlanl  la  Siibdivisiion  de  Mascara,  les  ramena  au 
Nord  du  cliotl  Chcrgul  et  les  rallaiha  ndmiiiistrativement  à  l'aghalik  de 
Frendah. 

s  En  iSSa,  les  Hezaïna  lurent  fortement  travaillés  par  Sidi  Cheikh  Ben 
Tayeb,  qui  poussait  déjà  Si  Hamza  à  la  révolte,  et.  par  un  chérif  nègre  nommé 
Si  Mohammed  Ben  Ali  «  Ben  Serour  »,  qui  se  faisait  appeler  le  Sultan  du 
Gourara.  En  même  temps,  ils  étaient  très  fatigués  et  mécontents  de?  nom- 
breuses réquisitions  de  chameaux  qu'ils  avaient  dû  fournir  pour  l'expédition 
de  Laghouat,  ce  qui  les  avait  empêchés  d'envoyer  leurs  caravanes  annuelles  au 
Gourara.  Ce  sont  tous  ces  motifs  réunis  qui  amenèrent  leur  défection.  Le 
sultan  Ben  Serour  ayant  été  tué  au  cours  d'une  razzia  sur  une  caravane  des 
Trafi,  les  Rezaïna  eurent  beaucoup  à  souffrir  des  tribus  marocaines  ;  c'est  pour 
cette  raison  que  la  moitié  des  Rezaïna  Cheraga,  avec  Larbi  ould  Maamar  Ben 
Chekor,  revinrent,  en.i853,  sous  notre  autorité. 

Révoqué  en  i854,  Larbi  ould  Maamar  Ben  Chekor  fut  replacé  à  la  tête  de 
sa  tribu  au  mois  de  juin  i86'i.  Il  fit  défection  le  aS  avril  suivant  et  vint  faire 
sa  soumission  au  mois  de  juin,  pour  nous  trahir  de  nouveau  le  i"  octobre, 
après  avoir  pris   p.iit   an  massacre  d'une  section   française  au   Kreider. 


DOCUMENTS  POUR  SERVIH  A  LllISTOIRE  DES  IIAMVAN       189 

Conmie  il  nous  était  impossible  de  trouver  dans  cette 
tribu  un  homme  qui  nous  fui  dévoué,  on  donna  le  pouvoir 
à  un  étranger,  El  Bagdadi  Bel  (ihaouli  ',  des  Oulad  Daoud. 
Ce  dernier  fut  révoqué  en  i864  pour  avoir  fourni  un  recen- 
sement faux  et  fut  remplacé  par  son  prédécesseur,  Larbi 
ould  Maaniar  Ben  Chekor. 

En  i864,  tous  les  Hezaina  tirent  défection  et  ne  rentrèrent 
qu  en  1872  -'.  On  dt)nna  pour  chef  aux  He/.aïna  (>heraga, 
Mohammed  Ben  Abbou,  homme  de  grande  tente  qui 
n'avait  pas  suivi  le  mouvement  général  en  1864.  H  fut  révo- 


1  El  Biigiliidi  Bel  Ghaouti  était  originaire  des  ()uhKl  Daoud  (Djafra  Cher^ga) 
auxquels  sa  famille  avait,  à  Tépoque  turque,  donné  des  caïds.  Il  nous  était 
toujours  resté  fidèle,  alors  que  tout  le  monde  partait  en  défection.  Il  avait  pris 
part  dans  nos  rangs  à  toutes  les  expéditions  qui  avaient  eu  lieu  dans  la 
Yacoubia.  Il  s'était  toujours  conduit  en  brave  et  intrépide  cavalier.  Pour  le 
récompenser,  on  avait  essayé,  en  i846,  de  l'installer  comme  caïd  chez  les 
Oulad  Daoud  qui  commençaient  à  rentrer.  11  ne  put  y  être  maintenu  que  quel- 
ques mois  par  suite  de  son  caractère  bouillant  et  emporté.  A  la  suite  de  diffi- 
cultés d'ordre  commercial  survenues  avec  ses  administrés,  il  fut  relevé  de  son 
commanderaient  et  même  emprisonné  quelques  jours  à  Mascara.  Il  fut,  un  peu 
phis  tard,  mis  à  la  tète  des  Rezaïna  Cheraga. 

2  Au  moment  où  éclata  l'insurrection  de  i8(34,  les  Rezaïna  étaient  campés 
au  Sud  du  chott  Chergui.  L'Autorité  voulut  les  réunir  au  Kreider,  mais  quel- 
ques tentes  seulement  obéirent  ;  les  autres  se  joignirent  aux  dissidents  qu'elles 
suivirent  au  Maroc,  à  l'exception  d'une  quarantaine  qui  se  réfugièrent  à 
Gén' ville  et  y  restèrent,  tandis  que  celles  qui  étaiient  venues  au  Kreider  allè- 
rent s'installer  chez  les  Hassasna  jusqu'en  187a,  époque  à  laquelle  les  Rezaïna 
dissiiieuts  firent,  après  l'affaire  de  Mengoub,  leur  soumission  à  Géry ville.  Leurs 
territoires  du  Sud  abandonnés  par  eux  et  fréquemment  parcourus  par  des 
partis  insurgés  ou  marocains,  furent  occupés  par  les  Hamyan  et  les  Trafi  quti 
prirent  bien  vite  l'habitude  de  les  considérer  comme  leur  propriété.  En  1872,  le 
Commandement  du  cercle  de  Géryville  proposa  d'incorporer  les  Rezaïna  à  ce 
cercle,  mais  l'Autorité  supérieure  ne  donna  pas  suite  à  cette  proposition.  Tous 
les  Rezaïna  furent  réunis  dans  les  environs  de  Sfîd,  au  Nord  du  chott  Chergui, 
et  soumis  à  une  surveillance  politique  qui  leur  interdit  de  s'approcher  du 
chott.  En  mars  1873,  ne  pouvant  que  diiflicilement  faire  subsister  leurs  mou- 
tons sur  le  territoire  où  ils  étaient  internés,  ils  demandèrent  la  restitution  de 
leurs  parcours  du  Sud.  La  fuite  de  Si  Sliman,  survenue  sur  ces  entrefaites, 
emi)êcha  de  donner  une  solution  à  cette  demande.  A  la  suite  de  cet  événement, 
les  Rezaïna  furent  exclusivement  cantonnés  au  Nord  du  chott  Chergui,  placés 
en  partie  sous  la  surveillance  des  Oulad  Daoud  et  des  Hassasna,  et  en  partie 
internés  dans  le  bachaghalik  de  Frenda. 

Leurs  anciens  parcours  du  Sud  furent  alors  entièrement  livrés  aux  incur- 
sions dos  d.issidents  et  de  leurs  alliés  et  ce  ne  furent  plus  les  Rezaïna  qui  allè- 
rent au  Sud,  mais  bien  les  Hamyan  et  les  Dehalsa  restés  soumis  qui  durent  se 
réfugier  au  Nord  pour  se  mettre  à  l'abri  des  coups  de  main. 

Cependant,  en  1876,  les  Rezaïna  se  rapprochent  de  la  rive  Nord  du  chott  et. 
comme  ,ils  ne  peuvent  y  vivre,  ils  sont,  en  1877,  autorisés  à  aller  à  Bedrous  et 
à  l'Est  de  ce  point.  Mais  la  situation  reste  troublée  dans  le  Sud. 

En  1S79-1880,  les  Hamyan  sont  encore  obligés  de  revenir  au  Nord  du  chott. 

En   1881.  l'insurrection  éclate  de  nouveau    :  les  Rezaïna  partent  encore  une 


inO       DOCIMENTS  POliR  SERVIR  A  l'hISTOIRE  DES  HAMVAIV 

que  on  187/1  P<^ur  n'avoir  pas  prévenu  assez  lot  l'Aulorité 
que  ses  adniinishés  avaient  pris  la  fuite.  Ces  derniers 
étaient  allés  jusipi'au  Sud  du  choit  Chergui,  oià  ils  avaient 
été  arrêtés  par  l'agha  des  Hassasna,  Kaddour  ould^Adda  i. 

Le  connaandement  des  Rezaïna  Cheraga  fut  alois  donné 
à  Sassi  ould  Kaddour,  de  la  famille  des  Oulad  Kouider, 
homme  dont  l'influence  s'élend-iil  non  seulement  sur  sa 
trihu,  mais  dans  tout  le  Sud  qu'il  connaissait  dans  ses 
moindres  détails. 

Kn  1881,  dans  les  circonstances  que  nous  avons  longue- 
ment relatées  précédemment,  alors  qu'il  commandait  le 
goum  de  la  colonne  de  Slid,  il  partit  en  dissidence  avec 
toute  sa  tribu.  Maintenu  dans  son  commandement  à  son 
retour,  il  fut  révoqué  en  1886  pour  des  causes  n'ayant  pas 
un  caractère  politique.  (Dissimulation  d'impôt.) 

11  fut  remplacé  par  El  Iladj  DjeJloul  ould  Abdallah,  de  la 
famille  des  Oulad  Djillali,  lequel  fut  à  son  tour  révoqué  le 
i5  février  igoS,  également  pour  dissimulation  de  matières 
imposables  et  pour  n'avoir  pas  renseigné  l'Autorité  sur  des 
faits  graves  (pii  s'étaient  passés  dans  sa  tribu. 

L'Autorité  supérieure,  désespérant  de  trouver  un  chef 
dévoué  et  sûr  chez  les  Rezaïna  Cheraga,  le  remplaça  par  un 

fois  au  Marne  d'où  ils  rcvieiuient  peu  après.  Ils  sont  de  nouveau,  à  leur  retour, 
internés  au  Nord  du  cliott  par  mesure  de  surveillance  politique.  Ils  dépendent 
du  cwrcle  de  Saïda  (lequel  est  successivement  transformé  en  annexe  de  Saïda 
et  ])oslc  du  Kreider).  Lorsque,  à  la  fin  de  l'année  ioo5,  les  territoires  situés 
au  Nord  du  cliott  Chergui  sont  remis  à  l'Administration  civile,  les  Rezaïna 
récupèrent  une  petite  partie  de  leurs  anciens  [)arcours  et  sont  rattachés  au 
cercle  de  Méchéria. 

Des  difficultés  se  produisent  à  la  suite  de  ce  rattachement.  Les  Rezaïna  veu- 
lent, tout  à  la  fais,  conserver  les  terrains  de  culture  qu'ils  ont  mis  en  valeur 
pendant  leur  internement,  dans  la  région  de  Sfid  et  d.'El  Beïda,  et  avoir  leurs 
tei'rains  de  parcours  du  Sud  du  chott. 

L'Administrateur  de  la  commune  mixte  de  Saïda,  qui  voit  en  eux  une  source 
de  richesses  au  point  de  vue  de  l'impôt,  cherche  à  les  attirer  vers  le  Nord. 
Pour  régler  la  question,  le  Gouverneur  Général  prescrit  une  enquête  et  chaque 
indigène  de  ces  tribus  est  appelé  à  opter  d'une  manière  définitive  pour  résider 
soit  dans  la  commune  mixte  de  Saïda,  soit  dans  le  cercle  de  Méchéria.  A  la 
suite  de  cette  enquâte,  iSg  tentes  des  Rezaïna  se  fixent  définitivement  dans  la 
commune  mixte  de  Saïda.  D'autre  part,  il  est  laissé  toute  facilité  aux  Rezaïna 
ayant  opté  pour  le  territoire  militaire,  pour  aller  chaque  année  temporairement 
s'employer  en  territoire  civil,  soit  aux  travaux  agricoles,  soit  à  la  cueillette  de 
l'alfa. 

I  Les  Rezaïna  avaient  formé  le  projet  d'enlever  l'agha  Kaddour  ould  Adda. 
L'agha  des  Hassasna  déjoua  leur  tentative  et  se  présenta  chez  eux  avec  son 
goum. 

A  la  suite  de  ces  incidents,  Mohammed  Ren  Abbnu,  destitué,  fut  interné 
pendant  quelque  temps  à  Frenda. 


DOCL MENTS  l>Ol   U  SKKN  lU    \   I.  IIISIOIUK  DES  ll\MV\N 


H>1 


étranger,  Tayeb  ould  Kaddour  Ik-l  Uula,  (iii«>iiiaire  de  la 
tribu-maghzen  des  Zmala,  qui  était  caïd  de  la  pelitc  tribu 
des  Oulad  Sidi  Khalifa  Gheral)a. 

Rezaïiia  (iheraba.  —  lA)rs(|uen  i85o,  on  partagea  les 
deux  tribus,  Ben  Moussa  Ben  kouider  fut  placé  à  la  tète  des 
Rezaïna  Gheraba.  Lors  de  la  défection  de  1862,  il  nous  resta 
fidèle  avec  son  douar,  composé  do  trente  tentes,  et  fit  tous 
ses  efforts  pour  empêcher  le  dépait  des  dissidents.  11  reprit, 
en  i85,H,  le  commandement  de  sa  tribu  lorsqu'elle  revint. 
On  eut  le  tort  immense  de  le  révoquer  le  18  janvier  i856, 
sous  le  prétexte  futile  qu'il  entretenait  des  relations  avec 
ses  frèi-es  restés  dans  l'Ouest.  Il  fut  remplacé  par  Smaïn 
ould  El  Malek,  qui  se  montra  incapable  de  conduire  sa 
turbulente  tribu  et  se  mit  complètement  à  la  remorque  de 
Bagdadi  Bel  Ghaouti,  caïd  des  Rezaïna  Cheraga. 

Il  fut  révoqué  le  -26  juin  1858  et  remplacé  par  Tayeb  ould 
Djillali,  qui  ne  donna  pas  non  plus  satisfaction. 

On  reprit  alors  Ben  Moussa  Ben  Kouider  en  1861.  Ce 
dernier  fit  défection  en  i864,  mais  il  revint  avec  sa  famille 
en  1868  et  fut  placé  dans  le  cercle  de  Géryville  où  il  resta 
jusqu'à  la  rentrée  des  Rezaïna,  en  1879.  On  lui  confia  de 
nouveau  le  commandement  des  Rezaïna  Gheraba.  Il  donna 
sa  démission  en  1874  et  fut  remplacé  par  son  fils,  El  Hadj 
Ben  Antar  Ben  Moussa.  Celui-ci  conduisit  bien  sa  tribu 
tant  que  son  père  vécut. 

A  la  mort  de  ce  dernier,  en  1876,  El  Hadj  Ben  Antar 
changea  sa  façon  de  commander.  Dur  pour  ses  gens,  les 
pressurant  outre  mesure,  il  causa  de  graves  désordres,  à  la 
suite  desquels  on  le  força  à  donner  sa  démission.  Il  se  retira 
chez  les  Rezaïna  Cheraga  et  créa  de  nombreux  embarras  à 
l'Autorité  locale.  Il  vit  actuellement  auprès  de  l'ex-caïd 
Sassi  oïdd  Kaddour  Ben  Kouider,  à  Sfid  (commune  mixte 
de  Saïda). 

El  Hadj  Ben  Antar  Ben  Moussa  fut  remplacé  par  Moham- 
med ould  Maamar  Ben  Chekor,  parent  de  LarbiBenChekor, 
ex-caïd  des  Rezaïna  Cheraga.  Il  partit  en  dissidence  avec 
Sassi  ould  Kaddour,  en  i88t.  11  mourut  peu  après  au  Maroc, 
près  de  Figuig. 

A  la  rentrée  de  dissidence  des  Rezaïna  (i883),  Moham- 
med Ben  Abbou  fut  nommé  caïd  des  Rezaïna  Gheraba  et 
fut  destitué  à  la  suite  d'un  vol  de  chameaux  commis  par  ses 
administrés  au  préjudice  d'Amour  internés  à  Saïda. 

A  partir  de  cette  époque,  l'Autorité  française  renonça  à 
chercher  un  caïd  originaire  de  la  tribu. 


192       DOCIMKMS  l'Oril  SEKN  IK  A  l'iIISIOIKE  DES  H  \MYAN 

Mohammed  lîoii  Alem,  ancien  maréchal  des  logis  de 
spahis,  ai)|)aitenaiit  à  une  famille  des  Oulad  Daoud,  rem- 
plaça Mohammed  Ben  Abbou.  Il  démissionna  à  la  suite 
d'une  affaire  de  dia  qui  s'était  produite  entre  les  llarrar  et 
les  Rezaïna  Gheraba  et  dont  il  n'avait  pas  rendu  compte. 

El  Habib  Ben  Abdelhakem,  ancien  brigadier  de  spahis, 
originaire  des  Oulad  Sidi  Khalifa  Gheraba,  lui  succéda, 
mais  mourut  huit  mois  après  sa  prise  de  commandement. 

Le  20  juin  1898,  El  Mir  Ben  El  Hadj  Naceur,  caïd  de  la 
tribu  des  Oulad  Sidi  Khalifa  Gheraba,  fut  mis  à  la  tète  des 
Rezaïna  Gheraba.  Très  fin  et  très  habile,  il  est  arrivé  à  s'im- 
poser et  à  ramener  le  calme  dans  cette  tribu  qui.  jus- 
qu'alors, avait  vécu  dans  le  désordre.  Une  opposilion  1res 
vive  lui  est  faite  par  Si  Larbi  Ben  Si  Larbi  Ben  Chekor,  des- 
cendant de  Larbi  ould  Maamar  Ben  Chekor,  dont  nous 
avons  parlé  aux  Rezaïna  Cheraga.  Si  Larbi  Ben  Chekor,  qui 
fut  longtemps  khalifa  du  caïd  El  Mir,  n'a  cessé  de  chercher 
à  le  renverser  pour  prendre  sa  place.  Il  est  actuelle- 
ment (1915)  chef  de  maghzen  à  Debdou  (Maroc  Oriental), 
mais  il  continue  toujours  ses  intrigues  en  vue  d'arriver  au 
but  qu'il  s'est  proposé. 

* 
*  * 

Tous  les  Rezaïna  se  sont  toujours  montrés  hostiles  à  notre 
domination.  Ils  furent  «  hommes  de  poudre  »  par  excel- 
lence, excellents  cavaliers,  menteurs  et  voleurs,  aimant 
l'intrigue  et  nous  détestant  cordialen)ent. 

Leur  séjour  dans  le  cercle  de  Saida  a  contribué  en  partie 
à  leur  donner  des  habitudes  de  travail  qui  ont  diminué  de 
beaucoup  leurs  qualités  guerrières.  C'est  ainsi  que  depuis 
quelques  années  un  grand  nombre  d'entre  eux  ont  vendu 
leurs  chevaux  pour  n'être  plus  appelés  à  participer  à  la 
formation  de  goums. 

Leurs  troupeaux  se  sont  développés  et  leur  bien-être  s'est 
augmenté.  Mais  ils  restent  toujours  amis  du  désordre  et 
sont  susceptibles  de  toutes  les  turpitudes. 

Ils  sont  pour  l'Autorité  locale  une  source  constante  d'en- 
nuis et  l'objet  d'une  surveillance  spéciale. 

Capitaine  A. -H.  NOËL, 

Chef  de  Bureau  des  Affaires  Indigènes. 


Les  Mosaïques  Gliréllennes  des  Béni-Radied 


C'est  le  général  Lapasset,  alors  Jicutenaiit-coloiiel,  qui, 
le  premier,  a  signalé  la  présence  de  <(  ruines  romaines 
d'une  assez  grande  impor lance  »  dans  le  territoire  des 
Béni-Raclied,sur  la  rive  droite  du  Chélif,  à  environ  i4  kilo- 
mètres au  Xord  d'Oued  Fodda  i.  On  en  tiouvcia  une  des- 
cription d'ensemble,  due  à  la  plume  de  M.  Reisser,  dans 
le  Bulletin  de  notre  Société  de  i8g8  2.  Les  trouvailles 
heureuses  du  directeur  de  lécole  indigène  des  Béni-Ra- 
ched,  M.  Gégot,  permettent  aujourd'hui  d'en  préciser 
certains  détails,  en  même  temps  qu'elles  en  ont  accru 
l'intérêt. 

Vers  le  milieu  du  mois  de  juin  igi^,  M.  Gégot  était  en 
train  de  créer  un  jardin  dans  le  terrain  situé  à  l'Est  de  sa 
maison  d'école,  quand,  à  sa  vive  surprise,  il  rencontra 
bientôt  sous  sa  pioche,  à  moins  d'un  mètre  de  la  surface 
du  sol,  une  mosaïque  antique.  Au  lieu  de  continuer  un 
travail  qui  eût  risqué  de  la  détruire,  M.  Gégot  ajourna  ses 
plantations,  et,  avec  autant  de  désintéressement  que  d'in- 
telligence, s'employa  exclusivement,  d'abord  par  ses 
propres  moyens,  ensuite  à  l'aide  des  modestes  subven- 
tions que  l'Inspection  des  Antiquités  put  lui  obtenir  du 
Gouvernement  Général  de  l'Algérie,  à  achever  de  son 
mieux  une  fouille  qu'il  avait  commencée  sans  s'en  douter, 
et  dont  mon  maître  M.  Paul  Monceaux  a  bien  voulu, 
d'après  les  notes  que  je  lui  avais  communiquées,  dégager 
devant  l'Académie  des  Inscriptions  et  Relies-Lettres  les 
principaux  résultats  3. 

Les  parties  subsistantes  de  la  mosaïque  '•  s'étendent,  à 
partir  du  mur  Est  du  logement  contigu  au  préau  de 
l'école,  sur  une  longueur  Est-Ouest  de   i4  mètres  et  sur 


1  Rendue  Africaine,  i,  p.  3.^1. 

2  Reisser,  Bulletin  Soc.  Géogr.  et  d'Arch.  d'Oran,  1S98,  pp.  212,  226,  245. 

3  C.  R.  Ac.  Inscr.,  1913,  pp.  663-666  et   1914,  pp.   126  et  126. 

4  Toute  cette  description  devrnit  être  rédigée  nu  passé,  car  la  mosaïque, 
enlevée  par  les  soins  de  l'excellent  mosaïste  du  Musée  des  Antiquités  Algé- 
riennes, n'est  plus  en  place.  Le  médaillon  de  l'abside  (PI.  IV,  fig.  2)  a  été 
attribué,  par  décision  de  M.  le  Gouverneur  Général,  au  Musée  des  Antiquités 
Algériennes,  à  Mustapha.  Les  autres  fragments  dignes  d'être  conservés  ont 
été  mis   à   l'abri  à   l'intérieur  de  l'école   indigène  des   Béni-Rached. 


15 


VM  i.Es    MO^Al\tLES    C11IŒT1E.\>ES    DES    BL.M-HACHED 

une  largeur  Nord-Sud  de  9'"90.  Elles  ont  grandement 
souffert  et  présentent  de  nombreux  trous  plus  ou  moins 
larges.  Néanmoins  le  plan  de  l'ensemble  et  l'agencement 
de  ses  dessins  se  laissent  aisément  reconnaître  :  sur  le 
pourtour,  plusieurs  compartiments  à  décoration  géomé- 
trique (cercles,  rinceaux)  se  détachant  en  noir  sur  fond 
blanc,  avec  des  traces  de  vert  ou  de  rouge  ;  au  centre,  un 
rectangle,  dont  la  longueur,  du  Nord  au  Sud,  est  de  3'"9o, 
tandis  que  la  largeur,  à  cause  des  lacunes,  ne  peut  en  être 
exactement  calculée.  Au  milieu  de  ce  rectangle  s'inscrit 
une  couronne  de  laurier  :  le  feuillage  qui  la  tresse  a  o"'25 
de  long  ;  son  diamètre  intérieur  est  de  i™2  2  ;  et  le  centre 
du  cercle  qu'elle  forme  est  placé  à  i  i^go  à  l'Est  de  la 
maison  d'école.  L'intervalle  entie  le  périmètre  du  rec- 
tangle et  le  bord  supérieur  de  la  couronne  est  rempli  de 
pampres  et  de  grappes.  La  composition  est  d'un  effet 
agréable  :  sur  un  fond  blanc  ressortent  harmonieusement, 
d'une  part,  les  branches  de  laurier  où  se  mêlent  les  verts, 
les  jaunes,  les  rouges  ;  d'autre  part,  les  vignes  avec  leurs 
feuilles  en  noir,  que  des  tiges  vertes  relient  par  de  souples 
inflexions  aux  raisins  rouges  soulignés  de  noir.  Dans  la 
couronne  est  disposée  une  inscription,  malheureusement 
incomplète  en  haut,  comme  toute  cette  partie  de  la  mosaï- 
que. Il  manque  deux  lignes,  d'ailleurs  très  courtes,  soit 
quatorze  à  seize  lettres.  Au-dessous  de  la  lacune,  se  succè- 
dent six  lignes  parfaitement  conservées.  Les  lignes  3  et  4 
de  l'inscription,  c'est-à-dire  les  deux  piemières  lignes 
conservées,  sont  en  cubes  noirs,  comme  les  deux  der- 
nières ;  les  lignes  5  et  6  sont  en  cubes  rouges.  Les  lettres 
sont  hautes  d'environ  o™i4.  (PL  IV,  iig.   1-2.) 

La  lecture   du   document   paraît   certaine.  En   voici  la 
transcription  : 


Cun    clero     tuo    floreas.     LH 
hoc    fieret    Deus    iussit, 
Flonis     et    Matrona     cun. 
omnes    filios    suos 
votu(m)     reddide- 
runt. 

L'achèvement    de   la    fouille    révéla    bientôt,  beaucoup 
plus  près  du  logement  de  l'instituteur,  une  autre  inscrip- 


LES    MOSAÏQUES    CURE  riE.NNES    DES    BÉ.M-RACUEU  H'5 

tiun  plus  coiutr,  mais  st-iiiblable.  Los  feuilles  de  laurier, 
polychromes,  qui  leiicadrenl,  mesurent  jusqu'à  o"35  de 
lariic,  mais  le  cercle  ([u'elles  forment  n'a,  iritérieureiufiit, 
que  o°'70  de  diamèlre.  Les  lettres  qui  s'y  détachent  en  noir 
sur  fond  blanc  nOnl  ([ue  i  i  centimètres  de  hani,  sauf  à  la 
premicie  lionr  oi'i  elles  atteignent  n"'!>o. 
On  ht  : 

Pax     (a)ec\c]lesiae  \  caloUc[a]e  se  lupcr. 

De  louti'  évidence,  les  deux  textes  se  rapportent  au 
même  édifice  :  une  église.  Le  premier  en  constitue  la  dédi- 
cace :  Florus  et  Matrona,  avec  leurs  enfants,  l'ont  élevée, 
conformément  à  la  volonté  divine  :  ut  hoc  jiercl  IJcns 
iussit,  en  exécution  d'un  vœu  :  vota(ni)  reddidenint.  Le 
deuxième  est  ime  acclamation  à  la  gloire  du  culte  au(jucl 
l'église  était  consacrée  :  le  donatjsme  hérétic|ue  en  était 
banni.  Elle  rayonnait  de  l'éternelle  véiité  que  revendique 
le  catholicisme  orthodoxe  :  (a)ec\c]lesiae  ca-^[h]olic[a]e 
sctnpev. 

11  est  à  noter  que  les  centres  des  médaillons  qui  enfer- 
ment les  deux  textes  ne  sont  pas  sur  la  même  ligne  :  celui  de 
l'acclamation  est  placé  à  9  mètres  à  l'Ouest  et  i^So  au  Sud 
du  centre  de  la  dédicace.  Ils  ne  sont  pas  non  plus  orientés 
de  la  même  façon.  Pour  lire  la  dédicace,  il  faut  regarder 
vers  l'Est.  Au  contraire,  l'acclamation  est  tournée  vers  le 
Nord,  dans  une  direction  exactement  perpendiculaire  à  la 
précédente.  Ces  deux  remarques,  unies  aux  constatations 
opérées  par  M.  Gégot  dans  la  suite  de  ses  fouilles,  vont 
nous  permettre  de  reconstituer  le  plan  primitif  de  l'église. 

On  sait,  en  effet,  que  suivant  une  règle  à  laquelle  les 
fouilles  pratiquées  en  terre  africaine  n'ont  pas  encore 
opposé  d'exception  véritable,  <(  le  grand  axe  des  églises 
primitives  était  dirigé  de  l'Ouest  à  l'Est,  la  façade  étant 
exposée  au  couchant  et  la  partie  réservée  au  clergé  au 
levant  ».  Or,  le  cadre  de  la  dédicace  est  le  dernier  vestige 
de  l'église  dont  on  ait,  vers  l'Est,  constaté  la  présence  cer- 
taine. Un  peu  plus  loin,  M.  Gégot  a  bien  dégagé  des  traces 
de  maçonnerie  ;  mais  elles  se  réfèrent  à  un  quadrilatère, 
séparé  de  l'église  par  une  véritable  solution  de  continuité, 
fermé  de  son  côté  par  un  mur  plein,  et  forcément  extérieur 
à  elle.  L'église  elle-même,  que  les  débris  de  mosaïque 
prolongent  vers  l'Ouest  jusqu'au  pied  de  lamaisond'école, 
ne  dépassait  donc  guère,  sur  la  face  opposée,  l'inscription 
de   Florus   et    Matrona.    Celle-ci,    par   conséquent,  devait 


196  LES    MOSVÏOUES    CHRETIENNES    DES    BEM-R ACHED 

appartenir  à  l'abside,  et  s'offrir  directement  aux  regards 
des  prêtres  appelés  à  y  pénétrer,  de  telle  sorte  que  l'axe 
de  la  couronne  de  lauiier  où  s'inscrivait  la  dédicace  coïn- 
cidait avec  l'axe  même  de  l'abside  et  le  grand  axe  de 
l'église  tout  entière. 

Or,  à  8  mètres  au  Nord  du  cenUe  de  la  dédicace, 
M.  Gégot  a  remis  au  jour  les  gros  blocs  presque  bruis  du 
mur  qui  le  fermaient  de  cecôté.  Pareillement,  à  8  mètres  au 
Sud,  il  a  relevé  des  traces  qui  ne  laissent  aucun  doute  sur 
l'existence  d'un  mur  parallèle.  D'oii  il  résulte  à  l'évidence 
que  l'église  des  Béni-Rached  mesurant  i6  m.  de  largeur 
entre  ces  murs  Nord  et  Sud,  devait,  pour  répondre  aux 
proportions  habituelles  des  basiliques  chrétiennes  d'Afri- 
que, telles  qu'elles  ressortent  non  seulement  de  l'examen 
des  constructions  subsistantes  i,  mais  de  la  description  con- 
temporaine de  saint  Augustin  2,  s'étendre  d'Ouest  en  Est 
sur  une  longueur  d'au  moins  un  tiers  plus  grande.  Dans 
ces  conditions,  pour  la  suivre  jusqu'à  son  entrée  princi- 
pale, il  eût  fallu  éventrer  les  bàtimenls  et  le  préau  de  la 
maison  d'école.  Du  moins  pouvons-nous,  de  l'acclamation 
tournée  vers  le  mur  Sud,  déduire  l'existence  d'une  entrée 
secondaire  à  laquelle  son  texte  faisait  également  face. 
Avec  juste  raison,  M.  Gégot  s'est  demandé  si,  tournant  le 
dos  à  cette  inscription  en  l'honneur  de  l'église  catholique, 
il  n'y  avait  pas  eu,  à  une  distance  du  mur  Nord  égale  à 
celle  qui  la  sépare  elle-même  du  mur  Sud,  une  inscription 
semblable.  Mais  ses  recherches  sur  ce  point  ont  amené 
un  résultat  négatif  ;  et  elles  n'ont  rendu  à  la  lumière,  sur 
l'emplacement  symétrique  de  celui  de  l'acclamation  pré- 
citée, que  la  continuation  du  décor  géométrique  dont  les 
deux  médaillons  sont  encadrés.  Il  est,  par  suite,  tout  à  fait 
probable  que  l'église  des  Béni-Rached,  s'écartant  du  type 
le  plus  répandu  des  anciennes  basiliques  africaines  ^, 
n'avait  qu'une  seule  porte  latérale  :  au  Midi. 

Au  surplus,  si  des  doutes  subsistent  sur  l'agencement 
de  ses  différentes  parties,  on  peut  se  prononcer,  avec  de 
grandes  vraisemblances,  sur  la  date  et  sur  le  caractère  de 
sa  construction. 

De  ses  fondations  à  sa  parure,  elle  s'affirme  comme  le 


1  Cf.    GsELL,   Monuments   Antiques   de   VAlçjérie,  n,   pp.    120-121. 

2  AuG.,  Quaestiones  in  Heptateuchum,  u,  177,  b  :  «  Oblonr/am  habeal 
quadraturum,  lateribus  longioribus,  brevioribus  pontihus  sicut  pleraeque 
basilicae    constiluentur   ». 

3  Cf.  GsELL,  ibid.,  p.    i33   ;  cf.  pp.    i5g  et   ifii. 


LES    MOSAÏQUES    CHRETIENNES    DES    BÉM-RACIIED  107 

produit  du  sol  sur  lequel  elle  s'érigea.  Ses  murs  extérieurs 
furent  bâtis  avec  une  pierre  de  calcaire  blanc  qui  provient, 
à  n'en  pas  douler,  de  carrières  situées  tout  près  de  là,  à 
l'Ouest  de  la  fraction  Oulad-Yousef  i.  Tous  les  cubes  de 
mosaïque  (jue  j'ai  soumis  à  l'examen  de  mon  savant  collè- 
gue de  la  Faculté  des  Sciences,  M.  Flamand,  sont  pareille- 
ment extraits  des  terrains  environnants  :  les  cubes  noirs 
sortent  des  strates  liasiques  du  Temoulga,les  cubes  jaunes 
portent  l'emijreinle  des  fossiles  miocènes  de  l'Oued-el- 
Arbi  ;  les  cubes  blancs,  celle  des  mélobésies  qui  caractéri- 
sent les  terrains  miocènes  de  l'Oued-ben-Arbeia,  tandis 
que  les  cubes  rouges  appartiennent  à  l'étage  inférieur  des 
grès  tertiaires  des  Ouled  Ali.  Considéré  isolément,  le  fait 
que  les  matériaux  du  gros  œuvre  ont  été  employés  là  où 
ils  ont  été  pris,  serait,  en  lui-même,  dénué  de  toute  sigm- 
fication.  Rapproché  de  la  révélation,  due  à  la  science  géo- 
logique, que  le  mosaïste,  au  lieu  d'apporter  de  très  loin  un 
tableau  tout  fait,  l'a  constitué  sur  place  avec  les  pierres  du 
pays,  comporte  la  preuve  péreniptoire  que,  pour  élever 
leur  basilique,  les  premiers  chrétiens  des  Béni-Rached 
n'ont  fait  appel  qu'à  eux-mêmes  et  à  leurs  propres 
ressources. 

Il  s'en  faut  de  beaucoup,  pourtant,  qu'elle  ait  gardé  un 
caractère  étroitement  local.  Bien  au  contraire,  l'une  des 
restitutions  auxquelles  on  peut  penser  pour  le  début  de 
sa  dédicace  en  fait  clairement  une  église  épiscopale.  On  ne 
peut,  en  effet,  rapporter  le  souhait  contenu  dans  le  sub- 
jonctif floreas  qu'à  deux  sujets  :  ou  bien  à  l'église  elle- 
même,  avec  le  clergé  qu'elle  renferme  :  [ecc/esia]  cu[m] 
clero  tuo  floreas  ;  ou  bien  au  chef  de  l'église  avec  le  clergé 
qu'il  dirige,  c'est-à-dire  à  l'évêque  :  [. . .  .episcope,]  cu[m] 
clero  tuo  floreas.  Dans  le  premier  cas,  on  doit  combler  la 
lacune  avec  le  mot  ecclesia  ou  les  mots  sancta  ecclesia,  et 
c'est  le  complément  qu'a  indiqué  l'éminent  architecte  en 
chef  du  service  des  ^lonuments  Historiques  dans  la  courte 
notice  qu'adoptant  pour  le  surplus  toutes  mes  lectures,  il  a 
consacrée  à  la  découverte  de  M.  Gégot  2.  Dans  le  deuxième 
cas,  il  faut  supposer  que  la  dédicace  commençait  par  le 
vocatif  du  nom  de  l'évêque  qui  commandait  alors  au  clergé 
groupé  autour  de  lui.  C'est  l'hypothèse  que  j'ai  envisagée 
tout  d'abord  et  à  laquelle  j'ai  eu  la  satisfaction  de  voir  se 


I   Constatation   de   M.    Gégot. 

r>  A.    Ballu,   Rapport   officiel,   etc.,   extrait   du   Journal  Officiel  du   20   jan- 
vier if|i'i.  P-   16  du  tirage  à  paiî.  «  Sois  florissante,  l'église,  avec  ton  clergé.  » 


198  LES    MOSAÏQUES    CIIRÉTïENNES    DES    BÉM-RACHED 

rallier  un  juge  aussi  compétent  que  M.  Paul  Monceaux. 
En  effet,  le  possessif  ((  ton  »  se  comprend  mal,  appliqué  à 
l'église  qui  n'abrite  pas  que  son  clergé  mais  rassemble  tous 
les  fidèles.  D'autre  part,  le  verbe  Jloiere  se  comprend  encore 
moins,  appliqué  aux  pierres  inanimées  de  l'église  maté- 
rielle :  dans  r(>xpression  flore[af  doimis]  de  l'épigraphe 
chrétienne  d'Henchir-Guesseiia,  dotniis  n'est  pas  une  mai- 
son faite  de  moellons  et  de  jnoilier,  tuais  une  famille,  une 
personnecollective'.  Parcontre,  une  invocation  qui  associe 
à  l'évêque,  qui  présida  la  cérémonie  de  la  dédicace,  le 
cortège  de  tout  son  clergé  est  tout  à  fait  à  sa  place  dans 
l'abside,  en  avant  du  banc  demi-circulaire  ori  s'asseyait 
d'ordinaire  l'évêque  au  milieu  de  ses  clercs  2.  Elle  y  faisait 
image,  et,  l'abside  une  fois  déserte,  y  dressait  à  leur  place 
le  souvenir  de  ceux  à  qui  elle  était  réservée. 

Reste  à  savoir  la  date  à  laquelle  la  fondation  de  notre 
église  ferait  remonter,  au  moins,  l'existence  de  cet  évêché. 

Les  églises  les  plus  rapprochées  des  Béni-Rached  datent 
du  IV*  siècle.  Vers  l'Est,  à  El  Kherba,  011  subsistent  les 
ruines  de  rancicnne  Tigava,  le  martyr  local  Tipasius  a  été 
supplicié  le  1 1  janvier  298  3.  En  outre,  nous  savons  qu'une 
église  baptistéiiale,  inséparable  de  la  présence  d'un  évèque, 
y  fut  détruite  en  870  ap.  J.-C,  lors  de  la  révolte  de  Firmus'i 
et  l'un  au  moins  des  fragments  antiques  qu'on  y  a  retrou- 
vés porte  le  monogramme  constantinien  5.  Pareillement, 
vers  l'Ouest,  à  Orléansville,  emplacement  moderne  du 
Castellum  Tingitanum,  la  basilique  probablement  élevée 
par  l'évêque  Marinus,  Marinus  Sacerdos^,  restaurée  à  coup 
sûr  par  l'évêque  Reparatus  7,  appartient  au  premier  quart 
du  iv^  siècle  ;  elle  est  sûrement  datée  par  une  inscription 
de  l'année  285  de  la  province  de  Maurétanie  césarienne, 
soit  de  82/1  ap.  J.-C.^.  1  priori  la  fondation  de  Béni-Rached 
devrait  être  rajîportée  à  la  même  époque  que  ces  fondations 
voisines,  et  ce  n'est  sans  doute  pas  un  pur  hasard  si,  par  le 
fini  et  l'excellence  de  ses  mosaïques,  par  le  choix  des  motifs, 
pampres  et  lauriers,  (pii  accompagnent  les  épigraphes 
qu'elles  comportent,  enfin  par  celle  de  ses  dimensions  que 

I  C.  /.  L.,  VIII,  2.335  :  Favente  deo  Gadiniana  fl,ore[at  domus]. 

1  Cf.  MoKCE.vux,  C.  l\.  Ac.  Inscr.,  igiS,  p.  665. 

3  P.    Monceaux,    Hisioire    littéraire    de    VAjriquc    chrétienne,    m,    p.    137. 

4  Mesnage,  Afrique   chrétienne,  p.   A57. 

5  C.  /.  L.,  VIII,   21.497. 

6  C.   /.   L.,  VIII,  9. 711. 

7  C.  I.  L.,  VIII,  9.709. 

8  C.   l.   L.,  VIII,  9.708. 


LES    MOSAÏQUliS    CIIRIÎ J1L:>>ES    DES    BEM-UACIIKD 


199 


nous  avons  [)u  évaluer  avec  exaeliliide  ',  réalise  des  Béiii- 
Hached  rappelle  jusqu'à  coiui)]èle  coïncidence  la  vieille 
basilique  chrétienne  d'Orléansvilie  2. 

Quant  aux.  indices  tirés  des  textes,  la  plupart  n'ont,  i)ar 
eux-mêmes,  aucune  \aleur  décisive.  11  n'y  en  a  qu'un  dont 
on  [)uisse  déduire  quelques  présomptions  :  elles  sont  en 
faveur  de  l'hypothèse  piécédemment  envisagée. 

Les  donatems,  Florus  et  Matrona,  sont,  natmellement, 
des  inconnus  ;  leurs  noms  apparaissent  fréquenunent  dans 
l'onomaslique  chrétienne  de  l'Afrique  du  Nord  ;  mais 
l'usage  ne  semble  pas  s'en  être  répandu  en  un  siècle  plutôt 
que  dans  un  autre  3.  En  outre,  le  fait  que  des  parents 
s'associent  leurs  enfants  dans  l'accomplissement  de  leur 
vœu,  est,  à  toutes  les  périodes,  d'une  banalité  qui  lui  enlève 
toute  signification^.  Les  incorrections  dont  leur  rédaction 
est  émaillée  n'ont  pas  d'âge  non  plus  :  le  barbarisme  c.un 
pour  cum  figure  déjà  dans  des  épigraphes  i3aïennes  5,  et, 
dès  le  règne  de  Septime  Sévère,  l'accusatif  se  substitue 
solennellement  à  l'ablatif  en  violation  des  règles  les  plus 
élémentaires  de  la  syntaxe  latine 6.  Pareillement,  l'emploi 
de  la  formule  votu(m)  j'eddiderunt  s'échelonne  sur  plu- 
sieurs siècles  consécutifs,  depuis  l'inscription  de  Tipasa, 
datée  de  p.38  ap.  J.-C.  7  jusqu'à  celle  d'Henchir  Akhrib, 
datée  de  543  ap.  J.-C.  s.  Enfin,  les  épis  qui  accostent  la 
deuxième  ligne  de  la  dédicace  sont  un  ornement  commun 
aux  documents  païens  9  et  aux  inscriptions  chrétiennes 
de  toutes  les  époques  1°. 


1  La  largeur  de  l'église  des  Béai-Rached  est  de  i6  mètres.  Les  dimeusione 
de  l'église  d'Orléansvilie  sont  de   26x16  mètres  (Mesnage,   op.   cit.,  p.   464). 

2  L'église  de  Duperré  (Oiipidum  Novum)  doit  pareillement  remonter  au 
début  du  iv'  siècle  (Gsell,  B.  A.  C,  1897,  p.  673). 

3  Les  inscriptions  chrétiennes  aux  noms  de  Florus  et  Matrona  (voir  au 
C.  I.  L.,  vni,  l'index  cognomitmm)  ne  se  laissent  pas  dater  avec  précision. 

4  Voir  en  dernier  lieu  Guemn,  Arch.  Miss.,  p.  loi  :  Maximinus  cum  suis 
et  p.  11)3,  Sabitli^wus  ima  cum  coniuge  et  filis. 

5  Cf.  C.  I.  L.,  vni,  2.977  et  7.166. 

6  C.  I.  L.,  vni,   2.557   ;   cf.   ibid.,   i32,   4.55t,  8.024,  etc. 

7  C.   /.   L.,  vni,  g. 289. 

8  GsELL,  Bull.  Com.,  1902,  ccxvi.  Entre  ces  deux  dates  extrêmes,  la 
formule  volum  reddera  apparaît,  au  ksar  Bellezma,  à  côté  du  monogramme 
constantinien  (C.  /.  L.,  vm,  18.621),  à  Mechera  Sfa  et  Sidi  Ferruch,  sur  des 
inscriptiions  respectivement  datées  de  4o8  et  45o  ap.  J.-C.  (C  /.  L.,  vni, 
9.271  et  2i.55i). 

0  C.  /.  L.,  ^iH,  21.017. 

10  On  les  trouve  sur  des  monuments  du  iv^  siècle  à  Renault  ((7.  /.  L.,  vni, 
21.517),  .\mm.i-\Ioiiça  (2i.53i),  Tipasa  (20.907,  20.90S),  à  Timgad  (Jér.   Car- 


"iUU  LE!>    MOSVÏol.KS    CHRÉT1E^^ES    DES    BÉ.M-RACHED 

Parcoiitie, l'acclamation  pax  (a)ec[c]lesiae  cat[h]olic[a]e 
seinper  esl  iiisliuclive  et  nous  ramène  à  notre  point  de 
départ. 

Ainsi  que  l'a  vu  M.  Paul  Monceaux,  le  mot  pax  dans  le 
langage  catholique  signifie  unitas  ',  il  est  jeté  au  dona- 
lisme  vaincu  coujme  un  cri  de  triomphe.  Il  évoque  forcé- 
ment l'une  des  périodes  où,  fort  de  l'appui  séculier,  le 
catholicisme  orthodoxe  l'emporta  sans  conteste  sur  l'héré- 
sie africaine  et  put  la  j)roscrire  expressément  en  vertu  des 
((  édits  d'union  ».  Rntre  ceux  rendus  par  Ilonorius  en  /uo 
et  cchii  que  signa  Constantin  à  la  lin  de  3i6  ou  au  com- 
mencement de  317,  il  est  ici,  faute  de  renseignements 
positifs,  permis  d'hésiter.  Je  crois  cependant  la  basilique 
de  Béni-Rached  beaucoup  plus  proche  de  celui-ci  (pie  de 
ceux-là.  C'est  qu'en  effet  l'acclamation  qu'on  y  lisait  se 
retrouve,  sous  une  forme  légèrement  différente,  mais 
avec  un  sens  identique  dans  les  églises  les  plus  voisines,  à 
Kherba  (ancienne  Tigava)  :  hic  pox  Christi  aelerna  inore- 
tur  ■'  ;  à  Orléansville  (Castelhnn  Tingitanum)  :  Sancta 
ccclesia  '^  ;  Semper  pax  ^.  Or,  si  la  date  de  l'inscription  de 
de  Tigava,  nécessairement  incluse  dans  les  limites  du 
iv^  siècle,  prête  pour  le  surplus  aux  conjectures  ■^,  celles 
d'Orléansville  remonlent,  comme  l'église  elle-même,  à 
SaA  6.  La  conclusion  la  plus  simple— et  la  plus  logique  — 
consiste  évidemment  à  rapprocher  ces  trois  églises  dans 
le  temps  comme  elles  sont  rapprochées  dans  l'espace.  A 
Béni-Rached,  comme  à  Kherba,  comme  à  Orléansville, 
elles  jaillirent  comme  autant  de  créations  simultanées  de 
la  foi  à  laquelle  la  protection  de  Constantin  venait  d'in- 
suffler une  vigueur  nouvelle. 

M.  Gégot  a,  d'ailleurs,  fait,  à  la  surface  des  mosaïques 
de  Béni-Rached,  une  petite  découverte  de  détail  qui  con- 
firme notre  interprétation  :  c'est  celle  d'un  moyen  bronze 

copI^o,  Revue  Afr.,  La  lable  de  patronat  de  Timgad,  igiS,  pp.  4  et  10  du  tirage 
à  pari).  Par  contre,  elle  appartient  au  v'  siècle  sur  un  document  à  Lamoricière 
(C.  /.  L..  vm,  21.77/i). 

I    Monceaux,    Histoire    littéraire    de    l'Afrique    rlirétienne,    iv,    pp.    449-^5i. 

■'  C.  /.  L.,  vni,  2i.'|f)S. 

3  C.   /.   L.,  vui,  9.710. 

/(   C.  I.   L.,  vni,  9.712. 

5  I.n  date  la  plus  basse  qui  ait  été  proposée  pour  cela  est  encore  assez 
haute,  puisque  «  de  peu  postérieure  à  ■  la  révolte  de  Firmus  »  (Monceaux, 
op.  cit.,  IV,  p.  45o).  Ce  qu'il  y  a  de  certain,  c'est  que  l'inscription  encadre 
un    monogramme    constantinien. 

'6  Cf.   supra. 


LES    MOSAÏQUES    CHRÉTIENNES    DES    BENI-RACHED  201 

très  effacé  où  j'ai  recoiiiui,  au  droit,  l'eiligie  de  Constan- 
tin, et  au  revers  la  représentation  du  soleil  personnifié, 
debout,  un  globe  dans  la  main. 

I.es  lettres  subsistantes  m'ont  permis  de  restituer  les 
légendes  aux  trois  quarts  effacées  :  au  droit,  Inip(erator) 
Constanfiiius  P(ins)  F(elix)  Au(j(ustus)  ;  au  revers,  SoU 
invicto  coiniti.  Les  sigles  qui  auraient  pu  révéler  l'atelier 
monétaire  ont  disparu.  Mais  celte  lacune  reste  sans  impor- 
tance, i)uisque  dans  tous  les  ateliers  de  l'empire  la  frappe 
des  monnaies  «  solaires  »  fut  arrêtée  à  la  chute  de  Lici- 
nius  (323  ap.  J.-C.)  i,  et  l'on  peut  affirmer,  en  toute  certi- 
tude, que  le  petit  bronze  de  Béni-Rached  est  antérieur  à 
cette  date.  Evidemment,  la  monnaie  a  pu  demeurer  en 
usage  nombre  d'années  après  sa  mise  en  circulation.  Il 
n'en  est  pas  moins  vrai  que  sa  présence  au-dessus  du 
niveau  de  l'église  nous  interdit  de  faire  descendre  la  cons- 
truction de  cette  dernière  plus  bas  que  le  iv""  siècle,  et  que 
le  rapprochement  est  tentant  qui  confronte  la  date  extrême 
des  possibilités  d'émission  d'un  pareil  type  monétaire 
(323  ap.  J.-C.)  avec  celle  de  la  construction  de  la  basilique 
d'Orléansville  (324  ap.  J.-C). 

Du  reste,  et  quoiqu'il  en  soit  des  résultats  chronologi- 
ques auxquels  il  me  paraît  conduire,  le  petit  bronze  des 
Béni-Rached  tire  du  lieu  de  sa  découverte  un  véritable 
intérêt.  Il  prouve  que  les  chrétiens  du  lieu,  si  nettement 
hostiles  aux  schismatiques  de  leurs  croyances,  n'éprou- 
vaient aucun  embarras  à  manier  dans  leur  église  des  mon- 
naies païennes,  soit  qu'il  ait  été  de  l'essence  de  leur  reli- 
gion de  préférer  l'infidèle  à  l'hérétique,  soit  que  la  dis- 
tinction de  Dieu  et  de  César,  alTirmée  dans  l'Evangile,  ait 
conservé  toute  sa  force  parmi  eux,  soit  enfin  que  des  néces- 
sités quotidiennes  de  la  vie  se  fût  déjà  dégagé  un  esprit 
d'accommodement  et  de  tolérance,  analogue  à  celui  qui 
maintient,  sur  le  même  emplacement,  l'harmonie  la  plus 
profonde  et  une  union  quasi  fraternelle  entre  l'école 
laïque  de  l'instituteur  français  et  le  bordj  voisin  du  caïd 
des  Béni-Rached. 


I  Cc.MONT,   V.   Sol,    flans    le    Dictionnaire    des    AnliquHés    de     Pottier    et 
Saclio,   fasc.    /i4,   p.    I.3S5. 


16 


202         LES    MOSAÏQUES    CHRÉTIENNES    DES    BENI-RACHED 

Ce  travail  était  terminé  quand  M.  Gégot  nous  informe 
qu'après  l'enlèvement  de  la  mosaïque,  en  continuant  les 
déblaiements,   il  a  découvert  l'inscription  suivante    : 


JÉRÔME  CARC0P1N(3, 

Inspecteur-Adjoint  des  Antiquités  de  l'Algérie. 


OBSERVATIONS    MKTKOHOLOGIOLES 


203 


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1 

BIBLIOGRAPHIE 

(()uv rages  offerts  à  lu  Société) 


RAPPORT  GÊSËRAL  SIR  LA  SITUATION  DU  PROTECTORAT  DU  MAROC 
AU  31  JUILLET  191'i,  dressé  par  les  Services  de  la  Résidence  Générale,  sous 
la  direction  de  M.  le  Général  LYAUTEY ,  Commissaire  Résident  Général  de 
la  République  Française  au  Maroc,  i  vol.  in-S"  de  xxvii,  5o2  p.  et  So 'de 
slalistiques,  3  cartes,  Rrsiticnce  Générale  de  la  Répiihliqne  Française,  Rabat. 

M.  le  (îénéral  Lyaiitey  vieni  de  faire  publier  une  mise  au 
point  de  la  situation  du  Protectorat  français  au  Maroc,  travail 
qui  embrasse  la  période  comprise  entre  le  début  de  notre  occu- 
pation effective  (mars  191 2)  et  le  i*'"  août  1914. 

Le  livre  n'étant  pas  dans  le  commerce,  nous  avons  cru  utile 
d'en  analyser,  aA'ec  quelques  détails,  au  moins  la  préface. 

L'impression  du  rapport  était  déjà  commencée  lorsque  la 
guerre  de  France  éclata  ;  les  événements  en  retardèrent  forcé- 
ment  la  publication. 

Ce  retard  a  permis  au  général  Lyaule\ .  en  dalaul  sa  préface 
du  iG  janvier  1916,  de  résumer  les  événements  qui  se  sont 
déroulés  au  Maroc  de  19T3  à  191 6. 

Le  rapport  débute  en  effet  par  une  préface  de  M.  le  Résident 
Général  qui  résume,  en  quelques  pages,  les  diverses  phases  de 
l'occupation  effective  et  les  résultats  obtenus  de  1912  à  jan- 
vier 191 6  par  l'œuvre  de  pacification.  Le  Général  rappelle 
d'abord  les  risques  que  sembla  courir  notre  occupation  lors  de 
la  déclaration  de  guerre  ;  il  passe,  trop  modeste,  sur  le  rôle 
qu'il  joua  à  ce  moment  en  demandant  au  Gouvernement  fran- 
çais de  lui  faire  confiance,  l'assurant  qu'il  se  maintiendrait  à 
l'intérieur  du  pays  malgré  les  prélèvements  faits  sur  l'armée 
d'occupalion. 

Non  seulement  les  limites  acquises  a^^  2  août  191 4  ont  été 
maintenues  intactes,  mais  encore,  depuis  un  an,  elles  ont  été 
avantageusement  déplacées.  La  jonction  effective  du  Maroc 
occidental  avec  l'Algérie  par  le  Maroc  oriental  est  aujourd'hui 
un  fait  acquis.  Si  la  vallée  de  l'innaouen  n'est  pas  encore  très 
sûre,  elle  sera  bientôt  complètement  pacifiée  par  le  rail. 

Après  une  revue  rapide  des  faits  les  plus  saillants  de  l'occu- 
pation militaire,  le  Général  résume  ce  qui  a  été  fait  au  point  de 
vue  de  l'organisation. 

Il  pose  d'abord  le  principe  de  la  politique  suivie  à  l'égard  des 
indigènes.  C'est  la  i)arlie  la  plus  intéressante  de  la  préface,  car 
elle  touche  à  une  (juestion  peu  connue  du  grand  public.  Ne 
pouvant  reproduire  en  entier  le  chapitre  qui  traite  des  relations 
politiques  de  la  France  avec  le  Maghzen,  nous  nous  bornerons 
à  citer  le  passage  principal  : 

<(   Le   Maroc   est    un    Protectorat.    Mais   ce   mol,   qui   contient 


bihlio(;hai'iiik  205 

((  poiirlaiil  une  (.looliiue  coloniale  grande  et  sini[jle,  est  regardé 
«  le  ()liis  souvent  comme  une  éliqueUe  et  non  comme  une 
((  \«''rilé  :  on  \  voil,  sinon  un  mensonge,  du  moins  une  l'ornnile 
((  lli»''ori((ue,  luic  formule  de  transilion  destinée  à  disparaître 
«  après  les  modalités  successives.  C'est  là  le  résultat  de  la  plu- 
ie part  de  nos  expériences  coloniales.  Et  ce  sentiment  est  telle- 
((  ment  fort,  qu'au  Maroc  comme  ailleurs,  avant  la  guerre,  on 
((  résistait  avec  peine,  et  déjà  prestpie  sans  conviction,  à  cette 
((  poussée,  que  heaucoup  cioient  jtiiale,  vers  le  gouvernement 
«  direct,  vers  l'annexion  précédant  l'annexion  légale.  La 
a  guerre  nous  a  fait  une  nécessité  polilique  absolue  de 
«  changer  de  voie  ;  et  celte  expérience  nouvelle,  commencée 
((  dans  un  sentiment  de  prudence,  a  pleinement  réussi.  Le 
«  Protectorat  apparaît  ainsi,  non  pas  comme  une  formule  théo- 
«  riipie  et  de  transition,  non  pas  même  comme  une  formule, 
«  mais  comme  une  réalité  dural)le  :  la  pénétration  économique 
«  et  morale  d'un  peuple,  non  par  l'asservissement  à  notre 
«  force  ou  même  à  nos  libertés,  mais  par  une  association 
«  étroite,  dans  latiuelle  nous  l'administrerons  dans  la  paix  par 
«  ses  propres  organes  de  gouvernement,  suivant  ses  coutinnes 
«  et  ses  libertés  à  lui.  C'est  dans  ce  sens  que  s'est  orientée  fran- 
((  chemcnt,  définitivement  notre  politique.   » 

L'application  de  ce  ()rincipe  politique  entraîne  forcément  des 
modifications  importantes  dans  l'organisme  administratif  ;  les 
directives  nouvelles  mises  en  pratique  sont  exposées  dans  le 
passage  suivant   : 

((  Partout,  dans  les  provinces,  on  s'est  efforcé  de  donner  aux 
«  indigènes,  non  pas  un  pouvoir  de  façade,  mais  une  part 
«  effective  dans  l'administration  et  une  véritable  autorité  par 
<(  la  garantie  de  leurs  coutumes  et  de  leurs  libertés....  Le  medj- 
«  less  de  Fez  doit  nous  servir  de  modèle.  Dans  cette  assemblée, 
«  en  effet,  les  indigènes  sont  entre  eux  ;  les  décisions  qu'ils 
«  prennent,  les  avis  qu'ils  émettent,  après  discussion,  repré- 
((  sentent  vraiment  leur  opinion,  et  ils  savent  qu'il  est  impos- 
ée sible  de  n'en  pas  tenir  compte.  Dans  les  assemblées  muni- 
«  cipales  des  autres  villes,  les  indigènes,  noyés  au  milieu  des 
((  Européens,  incapables  de  suivre  la  discussion  qui  se  poursuit 
((  en  français  et  dont  on  leur  donne  de  loin  un  résumé  hâtif, 
«  ont  le  sentiment  d'être  des  figurants,  et  ils  votent  d'autant 
((  plus  volontiers  avec  la  majorité  que  leur  vote  ne  signifie  rien 
u  pour  eux.  La  formule  à  laquelle  il  faut  tendre  est  celle  d'as- 
«  semblées  distinctes  pour  les  Européens  et  pour  les  indigènes 
«  (ou  peut-être  de  sections  distinctes,  siégeant  séparément, 
«  dans  vme  même  assemblée).  Cette  formule  seule,  à  l'heure 
«  actuelle,  peut  nous  assurer  une  représentation  sincère  des 
«  indigènes  et  une  indépendance  complète  de  leurs  avis.   » 

Nous  n'avons  pas  à  rechercher  les  motifs  d'ordre  politiqvie 
qui  ont  fait  adopter  cette  ligne  de  conduite.  Le  patriotisme  du 


206  BIBLIOGRAPHIE 

gt'uéral  Lyauley  esl  trop  éclairé  pour  que  nous  suspcriions  un 
seul  instant  qu'il  fait  fausse  roule.  ÎNous  ne  voulons  voir  dans 
ce  changement  d'orientation  qu'ime  récompense  au  loyalisme 
que  nous  a  ténioigiié  le  Alaglizen  pendant  la  guerre,  un  hom- 
mage de  la  France  reconnaissante  à  ceux  (jui,  sur  les  champs 
de  hataille  ont,  avec  elle,  scelle  de  leur  sang  un  pacte  tl'union 
indissoluble. 

Mais  cette  politirjue  ne  vaudia  que  par  ceux  qui  seront  char- 
gés de  la  diriger  (juand  le  Général  ne  sera  plus  là.  Elle  peut 
aboutir  à  lunisifier  le  Maroc,  à  trop  séparer  ses  intérêts  de  ceux 
de  l'Algérie. 

Aussi,  quelle  que  soit  la  politique  suivie,  nous  ne  cesserons  de 
répéter  qu'il  faut  viser  à  unifier  notre  Afrique  du  Nord  tant  au 
point  de  vue  des  intérêts  moraux  qu'à  celui  des  intérêts  écono- 
miques, et  en  faire  la  base  la  plus  solide  de  la  puissance  de  la 
France  en  Afrique  et  dans  la  Méditerranée. 

Et  le  Général,  toujours  prévoyant,  nous  montre  qu'il  entend 
assurer  l'avenir  par  l'influence  de  l'école  et  par  le  développe- 
ment de  l'action  économique,  non  seulement  avec  la  France, 
mais  aussi  avec  l'Algérie. 

Au  sujet  de  l'enseignement,  il  expose  tout  un  plan  d'organi- 
sation, création  de  nouvelles  et  nombreuses  écoles  françaises, 
franco-indigènes  et  indigènes.  Ce  plan  a  déjà  reçu  un  large 
commencement  d'exécution.  Puisse,  dans  cette  organisation, 
l'enseignement  du  français  prendre  le  pas  sur  celui  de  !a  lan- 
gue berbère.  L'école  indigène  doit  tendre  avant  tout  à  faire 
des  artisans,  des  collaborateurs  de  l'activité  agricole,  commer- 
ciale et  industrielle  et,  dans  la  mesure  la  plus  restreinte,  des 
fonctionnaires.  La  pratique  de  la  langue  française  facilitera  la 
tâche  à  accomplir.  II  est  permis  de  soutenir  que  nous  assimi- 
lerons plus  rapidement  les  indigènes  en  les  initiant  à  notre 
langue  qu'en  apprenant  avec  beaucoup  (Je  difficulté  la  leur. 

iMais  pour  que  l'enseignement  puisse  remplir  sa  noble  mis- 
sion, pour  qu'il  obtienne  des  résultats  tangibles,  il  ne  faut  pas 
lésiner  sur  les  crédits,  il  faut  faire  les  sacrifices  nécessaires 
pour  que  l'instituteur  népuise  pas  en  vain  ses  forces  dans  des 
classes  de  ho  à  80  élèves. 

Quant  à  l'action  économique,  le  Général  en  montre  toute 
l'étendue  bienfaisante,  i^ésume  les  résultats  obtenus  et  not.e 
surtout  les  progrès  rapides  que  vient  de  faire  l'outillage  du 
Maroc  en  ports,  routes,  chemins  de  fer,  travaux  urbains,  amé- 
liorations dont  la  guerre  a  imposé  «  pour  des  nécessités  poli- 
tiques de  tout  ordre,  l'exécution  rapide,  urgente  ». 

Cet  empiétement  sur  le  programme  futur  a  obligé  le  Maroc 
à  emprunter  ;  mais  cette  avance  de  fonds,  quelque  peu  gênante 
pour  le  moment,  sera  compensée  par  une  rentrée  anticipée  des 
bénéfices  à  recueillir. 

Ensuite,  le  Général  s'arrête  sur  le  problème  de  la  colonisation 


BIRI.lOGRVPiriE  207 

agricole  dont  le  développement  doit  être  le  but  suprême  de 
l'œuvre  de  pacification  entreprise  au  .Maroc. 

Les  difficultés  rencontrées  par  les  premiers  colons  paraissent 
aujourd'hui  surmontées  ou  tout  au  moins  bien  atténuées.  Et 
à  ce  sujet,  les  lignes  suivantes  rassureront  certainement  ceux 
qu'attire  le  Maroc. 

((  Une  des  plus  grosses  entraves  apportées  au  développement 
«  agricole  du  pays  était  la  complexité,  l'embarras,  l'insécurité 
«  du  régime  foncier.  Elle  est  levée  aujourd'hui.  Le  régime  de 
«  de  l'immatriculation  des  terres  fonctionne,  en  fait,  depuis 
«  le  mois  de  mai  dernier  (191 5)....  » 

Les  divers  services  devant  favoriser  et  aider  le  développe- 
ment agricole  sont  créés  et  seront  d'autant  plus  utiles  que  le 
Maroc  profitera  de  l'expérience  acquise  en  Algérie. 

Le  Général  termine  sa  préface  par  une  brève  conclusion  : 

«  Tels  sont,  d'une  manière  très  rapide  et  très  générale,  les 
«  idées  et  les  faits  actuels  qu'il  faut  connaître,  avant  de  lire  un 
«  rapport  qui  a  déjà  18  mois  de  date.  Dix-huit  mois  représen- 
c  tent  déjà,  pour  une  colonie  en  crise  de  croissance,  une  période 
«  de  développement.  Dix-huit  mois  de  guerre  représentent 
«  beaucoup  plus  encore  pour  le  Maroc  :  un  développement  et 
(i  une  avance,  une  évolution  et  une  anticipation.  Il  était  impos- 
c(   sible  que  le  lecteur  l'ignorât.   » 

Le  rapport  qui  fait  suite  à  la  préface  comprend  ^92  pages  de 
texte  et  80  pages  de  statistiques.  Le  cadre  de  cette  notice  ne  nous 
permet  pas  d'en  présenter  un  aperçu  même  très  résumé. 

Que  ceu.x  qui  s'intéressent  à  l'avenir  de-  notre  Protectorat 
lisent  ce  livre,  ils  se  rendront  compte  une  fois  de  plus  de  la 
grandeur  de  l'œuvre  que  la  France  a  accomplie  au  Maroc  ;  ils 
mesureront  les  étapes  rapidement  parcourues,  les  progrès 
réalisés. 

Admirant  les  résultats,  leur  pensée  se  reportera  vers  le  général 
Lyautey,  vers  ce  grand  colonial  dont  le  génie  organisateur  aura 
assuré  l'avenir  de  l'une  des  plus  belles  colonies  françaises. 

Ils  n'oublieront  pas  toutefois  de  confondre  dans  le  même 
sentiment  de  reconnaissance  les  collaborateurs  immédiats  du 
commandant  en  chef,  dignes  émules  de  leur  maître,  les  troupes 
d'Afrique  qui  firent  la  conquête  et  qui  encore,  avec  les  vieux 
territoriaux  de  France,  en  conservent  les  fruits,  et  cet  admirable 
corps  d'officiers  du  Service  des  Renseignements  qui  assure  la 
lâche  écrasante  de  l'organisation. 

Certes  l'œuvre  est  loin  d'être  menée  à  bonne  fin  ;  mais  lors- 
que rentrera,  couverte  de  lauriers  et  rayonnante  de  gloire, 
l'héroïque  Division  Marocaine,  la  clé  de  voûte  de  l'édifice  ne 
tardera  pas  à  être  posée. 

F.  DOUMERGUE. 


PROCÈS-VERBAUX  DES  RÉUNIONS 

de    la    «  Société    de    Géographie    et    d'Archéologie    d'Oraii  » 


RËUNION  MENSUELLE  DU  COMITÉ  ADMINISTRATIF 

Séance  du  3  Avhil  1916 


Présidence  de  M.  Doumergue,  président 


La  séance  est  ouverte  à  5  heures  et  demie. 

Sont  présents  au  Comité  :  MM.  Doumebgue,  Pock,  Tournier, 
DA^GLEs,  DÉCHAUD,  DupuY,  Abbé  Fabre,  Kriéger,  Lemoisson, 
Pellet,  Pérez,  Flaiiault. 

Absents  excusés  :  MM.  Général  BaschUjNg,  Bérenger,  Aram- 
BOURG,  HuoT,  DE  Pachtere,  Roux-Freissineng,  lïiobilisés  ; 
René-Leclerc. 

Absents  :  MM.  Lamur,  Pointet,  D''  Sandras. 

Le  Président  rappelle  que  la  Société  vient  d'être  frappée  d'un 
nouveau  deuil  en  la  personne  de  M®  Mesrine,  avoué  à  Oran.  Le 
Comité  s'associe  aux  regrets  exprimés  par  le  Président  et  aux 
sentiments  de  condoléance  dont  il  s'est  fait  l'interprète  auprès 
de  la  famille  de  notre  regretté  confrère. 

Le  Président  rappelle  ensuite  la  mort  glorieuse  du  général 
Largeau,  l'un  des  plus  brillants  parmi  nos  officiers  de  l'armée 
d'Afrique,  le  pacificateur  et  l'organisateur  de  la  région  du 
Tchad.  Le  général  a  été  frappé  glorieusement  parmi  les  défen- 
seurs de  Verdun.  Sa  mort  sera  douloureusement  ressentie  par 
tous  ceux  qui  s'intéressent  au  progrès  et  à  l'avenir  de  l'Afrique 
française. 

Des  félicitations,  auxquelles  s'associent  les  membres  du 
Comité,  sont  adressées  par  le  Président  à  M.  l'Abbé  Fabbk, 
récemment  promu  à  la  dignité  de  chanoine. 

Est  admis  comme  membi'e  titulaire  :  M.  Cambboi%  présenté  à 
la  dernière  séance  du  Comité. 

Est  proposé  comme  membre  titulaire  :  M.  René  Barber,  Aice- 
consul  d'Angleterre  à  Oran,  présenté  par  MM.  Dupuy  et 
Sabôurct. 

La  Société  Royale  de  Géographie  de  Madrid  nous  a  fait  con- 
naître qu'elle  allait  célébrer  les  26  et  27  mars  le  lio^  anniver- 
saire de  sa  fondation.  Elle  convie  notre  Société  aux  solennités 
qui  auront  lieu  à  cette  occasion.  Par  suite  des  retards  des  cour- 


PROCÈS-VERBAUX   DES   RÉ  [NIONS  DE    LA   SOCIÉTÉ  209 

ri^rs,  cette  invitation  nous  est  [)arvenue  la  veille  des  fêtes.  Il 
en  eût  été  aiitroineiil  que,  dans  le?  circonstances  actuelles, 
nous  ne  pouvions  répondre  à  cette  invitation.  Nos  regrets  seront 
exprimés  à  la  Société  madrilène,  à  laquelle  sont  adressés  les 
félicitations  cl   le  salut  cordial  de  notre  Société. 

M.  Louis  Giraud  a  offert  à  la  Bibliothèque  de  la  Société  la 
21^  année  du  BiiUedn  Astronomique  de  France.  Des  remercie- 
ments lui  sont  votés. 

L'ordre  du  jour  étant  é[)uisé,  la  séance  esl  levée  à  G  h.   1/2. 

Pour  le  Secrétaire  gênerai,  Le  Président, 

Si^né  :  FLAHAULT.  Si£?né  :  DOUMERGUE. 


RPX-MON   MENSUELLE  DU  COMIÏË  ADMINISTRATIF 

Séance  du  t^''  Mai  191 G 


Présidence  de  M.  Doumergie,  président 


La  séance  est  ouverte  à  5  heures  et  demie. 

Sont  présents  au  Comité  :  MM.  Dolmergue,  Pock,  Tournjer, 
DupuY,  Abbé  Fabke,  Kriéger,  Pérez,  Flahault. 

Absents  excusés  :  MM.  Général  Baschung,  Bérenger,  Aram- 
bourg,  IIuot,  Lemoisson,  de  Pacutere,  Roux-Freissineng, 
mobilisés  ;  Dangles,  Pellet.  René-Leclerc. 

Absents   :  MM.   Déchaud,  Lamur,  Pontet,  D""  Sandras. 

Avant  d'aborder  l'ordre  du  jour,  le  Président  rappelle  la 
perte  cruelle  que  vient  d'éprouver  la  Société  par  le  décès  de 
M.  le  docteur  Duzan,  maire  de  Saint-Leu,  et  l'un  de  nos  plus 
anciens  confrères.  Le  Comité  s'associe  aux  sentiments  de  con- 
doléance exprimés  par  le  Président. 

Des  félicitations  sont  adressées  à  M.  le  général  Henrys,  com- 
mandant les  territoires  du  Nord  du  Maroc,  promu  grand  officier 
de  la  Légion  d'honneur.  C'est  la  juste  récompense  des  services 
signalés  que  le  général  a  rendus  au  Maroc  dans  la  période  la 
plus  critique,  au  moment  de  la  déclaration  de  guerre. 

Notre  dévoué  Secrétaire  général,  le  commandant  Bérenger, 
vient  d'être  cité  à  l'Ordre  de  l'Armée  d'Orient  et  décoré  de  la 
Croix  de  guerre  avec  palme.  Le  Comité  est  heureux  d'appren- 
dre celte  bonne  nouvelle  et  prie  le  Président  de  transmettre  au 
commandant  les  félicitations  et  le  souvenir  affectueux  de  tous 
ses  collègues. 


210  PROCÈS-VERBAUX  DES   RÉLMONS  DE    LA   SOCIETE 

KsI  admis  comme  membre  litulaiic  :  M.  Baubeu,  présenté 
dans  la  dernière  séance. 

Le  Président  fait  coni'.aîlre  (jiie  M.  Fouque  rnainlienl  ses 
condilions  pour  l'impression  du  Bulletin  de  la  Société  ;  elles 
se  traduisent  par  lélévation  prochaine  à  33%  de  l'augmentation 
fixée  précédemment  à  ao  %.  Le  taux  de  33  %  sera  arrêté  pour 
une  série  de  fascicules  dont  M.  Fouqjie  charge  son  fondé  de 
pouvoirs  de  nous  fixer  le  nombre,  en  se  basant  sur  l'approvi- 
sionnement du  pa[)ier  en  magasin  el  destiné  à  notre  publication, 
La  leHre,  datée  du  '\  avril,  n'a  pas  encore  été  suivie  de  la  note 
comi)lémentaire. 

II  est  donné  lecture  d'une  note  de  M.  Pellet  sur  les  fouilles 
de  Mina  que  l'auteur  n'a  pu  venir  nous  soumettre  lui-même. 
Celte  question  sera  reprise  lors  de  la  prochaine  séance. 

La  Société  a  reçu  pour  sa  Bibliothèque  : 

De  M.  le  Gouverneur  Général  de  rAfricjue  Occidentale  fran- 
çaise :  Le  Rapport  annuel  sur  l'état  de  la  Colonie  pendant 
Vannée  1913.  Comme  les  années  précédentes,  ce  travail  est  du 
plus  haut  intérêt  et  marque  les  nouveaux  progrès  accomplis 
dans  l'Afrique  Occidentale. 

Il  a  été  acquis  par  voie  d'achat  le  2"  Cahier  d'Archéologie 
Tunisienne  ;  cette  acquisition  complète  heureusement  cette 
publication,  dont  le  l^'',  le  2^  et  le  ^^  Cahiers  avaient  été  adressés 
à  la  Société  par  la  Direction  générale  de  l'Enseignement  en 
Tunisie. 

Le  Comité  arrête  la  composition  du  Bulletin  du  a®  semestre. 

L'ordre  du  jour  étant  épuisé,  la  séance  est  levée  à  6  h.  45. 

Pour  le  Secrétaire  général,  Le  Président, 

Signé  :  FLAHAULÏ.  Signé  :  DOUMEBGUE. 


BÉUNION  MENSUELLE  DU  COMITÉ  ADMINISTRATIF 
Séance  du  5  Jui.\  iqi6 


Présidence  de  M.  Doi  merci  e,  président 


La  séance  est  ouverte  à  5  heures  el  demie. 

Sont  présents  au  Comité  :  MM.  Doi  meugle,  Pock.  Tourmer, 
Arami'.olrg,  Khiéger,  Lemoisso.N,  Pellet,  Pérez,  Flauault. 

Absents  excusés  :  MM.  Général  Bascuung,  Bérenger,  Huot, 
DE  Pachtere,  Roux-Freissixeng,  mobilisés;  Dangles,  DÉrnAUD, 
Dlt>ly,  René-Leclerc. 


PROCÈS-VERBAUX   DES   RELMONS   DE    LA   SOCIÉTÉ  211 

Al)Sonfs  :  MM.  Abbé  Fahiœ,  Lamlr,  Pontet,  D""  Sandras. 

Le  procrs-vorliiil  de  la  séance  du  i^""  mai  est  lu  et  adopté. 

En  ouvrant  la  séance,  le  Président  rappelle  la  perte  que  vient 
de  faire  la  France  en  la  personne  du  général  Galliéni.  II  se  fait 
un  devoir  de  saluer,  au  nom  de  la  SociiHc  de  Géographie  d'Orun, 
la  mémoire  de  ce  grand  colonial,  (pii  fut  le  véritable  initiateur 
des  procédés  de  colonisation  que  la  France  a  applicpiés  dans  ses 
nouvelles  colonies  et  ses  protectorats. 

Le  Président  souhaite  ensuite  la  bienvenue  à  notre  collègue, 
M.  Arambourg,  lieutenant,  commandant  une  compagnie  de 
mitrailleuses  à  l'armée  de  Salonique,  pour  quelques  jours  en 
permission  à  Oran.  Il  lui  renouvelle  les  félicitations  du  Comité 
à  l'occasion  de  sa  citation  à  l'Ordre  de  l'Armée  et  de  la  .Croix 
de  guerre  avec  palme,  qui  lui  a  été  décernée.  Tous  les  membres 
présents  joignent  leurs  cordiales  félicitations  à  celles  du 
Président. 

Sont  proposés  comme  membres  titulaires  : 

M.  le  baron  Louis  de  Mesnard,  i,  boulevard  Lescure,  à  Oran, 
pi'ésenté  par  MM.  Pock  et  Martinez. 

M.  Studler,  ancien  professeur  au  collège  d'Oran,  en  retraite, 
présenté  par  ^IM.  Kriéger  et  Pock. 

M.  Brunel,  topographe  en  retraite,  ayant  offert  sa  ilémis- 
sion,  le  Comité  refuse  de  l'accepter  et  décide  que  le  service  du 
Bulletin  continuera  à  être  fait  à  notre  estimé  collègue,  à  titre 
gracieux,  en  considération  des  services  qu'il  a  rendus  jadis  à  la 
Société.  M.  Bruxel  envoie  à  la  Société  pour  la  Bibliothèque  son 
ouvrage  La  Question  indigène  en  Algérie.  Des  remei'ciements 
lui  sont  adressés  à  ce  sujet. 

Le  Président  informe  le  Comité  que  le  Haut  Commissaire  du 
Maroc  Oriental,  M.  Varmer,  a  bien  voulu  lui  faire  parvenir 
pour  la  SociéJé  une  subvention  de  .'ioo  francs.  Il  s'est  empressé 
de  transmettre  à  M.  le  Haut  Commissaire  les  remerciements  de 
la  Société. 

Le  Président  communique  un  vœu  de  la  Société  de  Géogra- 
phie de  Marseille  relatif  à  la  situation  que  la  France  devrait 

s'assurer  en ,  à  la  suite  ele  la  guerre  actuelle.  Après  examen 

de  la  ejuestion,  le  Comité  estime  eju'il  serait  prématuré  de  s'oc- 
cuper eles  modifications  ejui  pourront  être  apportées  à  la  carte 
du  moneie,  il  elécide  d'ajourner  à  plus  tard  l'examen  du  vœu 
formulé  par  la  Société  de  Géographie  de  }[arseiUe. 

Le  Présieient  remercie  M.  Pellet  pour  les  recherches  qu'il  a 
bien  voulu  faire  à  Belizane  sur  les  résultats  archéologiques  des 
fouilles  ele  Mina,  ainsi  que  pour  la  note  qu'il  a  adressée  à  ce 
sujet  au  Comité,  et  qui  a  été  lue  au  cours  de  la  dernière  séance. 
II  prie  M.  Pellet  de  vouloir  bien,  dans  la  limite  du  possible, 
compléter  ce  travail  par  la  copie  des  inscriptions  et  le  dessin 
des  docimients  lapidaires  les  plus  importants,  afin  d'en  rendre 
la  publication  au  Bulletin  plus  intéressante. 


212  PHOClKïS-VERBAl  X   DES   RÉUM0>S  DE   LA   SOCIETE 

Le  Pré?ulont  annonce  la  découverte  dans  la  région  de  Taza, 
par  M.  le  capitaine  de  Cardaillac,  d'un  atelier  de  l'âge  de  la 
pierre  polie.  Il  présente  quelques  échantillons  d'ébauches, 
envoyés  par  l'inventeur,  dont  la  série  insuffisante  ne  permet  pas 
de  juger  de  la  valeur  exacte  de  cette  importante  découverte. 

M.  Flauailt,  faisant  fonctions  de  Secrétaire  général,  pré- 
sente le  rapport  annuel  lu,  d'ordinaire,  à  l'Assemblée  géné- 
rale de  mai.  Ce  rapport  est  approuvé  et  le  Comité  vote  des  féli- 
citations à  M.  Flahaui.t,  qui,  avec  tant  de  dévouement,  supplée 

M.    BÉRENGER. 

Le  Trésorier  remet  le  Compte  Administratif  de  l'exercice  191 5, 
dont  les  chiffres  sont  approuvés.  Le  Comité,  après  en  avoir  pris 
connaissance,  remercie  le  Trésorier  de  son  zèle  et  de  son  dévoue- 
ment, il  décide  qu'en  raison  du  déficit  à  prévoir  pour  l'exer- 
cice 1916,  le  reliquat  de  1916  (provenant  en  grande  partie  de 
dépenses  non  effectuées  et  qui  le  seront  plus  tard)  sera  attribué 
aux  recettes  de  191 6,  et  placé  en  Bons  de  la  Défense  Nationale 
à  court  terme,  afin  de  [)ouvoir  en  disposer  au  fur  et  à  mesm'e 
des  besoins. 

La  Société  a  reçu  pour  sa  Bibliothèque  : 

De  M.  le  Résident  Général  au  Maroc,  le  Rapport  général  sur 
la  situation  du  Protectorat  du  Maroc. 

Une  notice  bibliographique  sera  consacrée  à  ce  remarquable 
mémoire. 

L'ordre  du  jour  étant  épuisé,  la  séance  est  levée  à  7  heures. 

Pour  le  Secrétaire  général,  Le  Président, 

Signé  :  FLAHAULT.  Signé  :  DOUMERGUE. 


Rapport  sur  les  Travaux  de  la  Société 
pendant  Vannée   1915-1916 


Messieurs  et  chers  collègues, 

11  est  du  devoir  de  votre  Bureau,  malgré  l'état  de  guerre  qui 
continue  à  empêcher  la  réunion  de  nos  Assemblées  générales 
annuelles,  de  vous  rendre  compte  des  travaux  de  la  Société,  de 
vous  dire  les  efforts  qui  ont  été  faits  pour  maintenir  son  exis- 
tence et  son  activité,  et  le  résultat  de  ces  efforts. 

L'année  191 0-191 6  vient  de  se  clore  pour  nous  ;  elle  a  été 
marquée  par  de  grandes  tristesses,,  des  deuils  nombreux. 

La  guerre  a  fait  parmi  nous  de  glorieuses  victimes  : 
MM.  le  chef  d'escadron  d'artillerie  Jeanney  et  le  lieutenant 
de  réserve  d'artillerie  Pagan  tués  par  un  même  obus,  M.  le  chef 


PJIOCKS-VKKBALX   DES    UÉl MNIOiNS   DE    LA   SOCIETE  213 

de  l)ataill(iii  Bi:iniio.N  frap[)é  à  mort  dcvanl  Sedd-ri-Hahr. 
Saluons  avec  respect,  admiration  et  reconnaissance  ces  confrères 
qui  ont  dc)nné  leur  vie  en  rançon  de  la  France,  et  qui  sont 
entrés  dans  rimmortalité. 

Ayons  aussi  un  souvenir  énni  [)our  les  excellents  confrères 
que  la  mort  nous  a  enlevés  au  milieu  de  leurs  travaux,  MM.  An- 
gélique Capifah,  Pierre  Cahu\fang,  Léopold  Français,  Désiré 
Heintz  fds,  Mauchanu,  Cli.  Mesrine,  Pousseur,  Jean-Noël 
Roman,  Louis  Say,  Ililaire  Soipteur,  Gustave  Vallois.  Nous 
avons  [)erdu  aussi  notre  ancien  confrère  M.  Henry  Gillot,  qui 
fut  pendant  dix  ans  notre  dévoué  vice-président. 

La  Société  tout  entière  s'associera  aux  sentiments  bien  vifs 
de  condoléance  qui  ont  été  exprimés  à  leurs  familles. 

Coiuité  adininisinitif.  —  Le  souci  principal  de  votre  Comité 
a  été  de  sauvegarder  l'activité  de  la  Société.  Malgré  l'absence 
d'un  tiers  de  ses  membres  mobilisés,  le  Comité  s'est  trouvé  en 
nombre  à  toutes  ses  réunions  mensuelles,  ayec  une  moyenne  de 
neuf  présences,  soit  plus  de  la  moitié  des  membres  non 
mobilisés. 

Effectif.  —  Les  vides  occasionnés  par  les  nombreux  décès 
signalés  plus  haut  ont  été  comblés,  grâce  à  des  adhésions  nou- 
velles. L'effectif  de  la  Société  paraît  se  maintenir  à  environ 
lioo  membres. 

Bulh'tiii.  —  La  pulilication  du  Bulletin  de  la  Société  a  ren- 
contré des  difïîcuités  matérielles  considérables  :  absence  de  très 
nombreux  sociétaires  mobilisés,  d'oîi  réduction  du  montant  des 
cotisations,  suppression  des  subventions  des  administrations 
publiques,    élévation   considérable   des    frais   d'impression. 

Le  Comité  est  parvenu  cependant  à  publier  régulièrement 
son  Bulletin,  en  trois  fascicules,  comme  il  avait  été  fait  en  191/i- 
191 5,  et  ce  Bulletin  a  pu  être  distribué  à  peu  près  aux  dates 
d'usage.  Les  trois  fascicules  forment  un  volume  de  4i4  pages, 
accompagné  de  gravures  et  d'une  carte. 

Passons  en  revue  les  principaux  travaux  publiés  : 

M.  Ferdinand  Blanche,  instituteur,  nous  a  donné  une  très 
intéressante  Monographie  de  la  Commune  d'Aïn-el-Turk,  que 
la  Société  a  honorée  d'une  médaille  d'argent.  Il  serait  désirable 
que  l'exemple  donné  par  l'auteur  fût  plus  souvent  imité  par  ses 
collègues. 

M.  le  capitaine  Petit,  dans  une  note.  De  la  Frontière  Ora- 
naise  à  Taza,  nous  a  décrit,  avec  un  croquis  de  l'itinéraire  suivi, 
une  région  encore  peu  connue.  Cette  étude  a  été  fort  goûtée,  et 
fait  honneur  à  son  auteur,  qui  sait  consacrer  ses  instants  de 
loisir  à  faire  connaître  les  pays  qu'il  parcourt,  en  soldat  et  en 
touriste,  et  rend  ainsi  double  service  au  pays. 

M.  le  capitaine  Noël  a  donné  au  Bulletin  des  Documents  pour 


21-i  PKOCÈS-VEKBALX   DES   KÉLMONS  DE    LA   SOCIETE 

servir  ù  l'Hisloire  des  Ihtniyan  et  de  ht  région  qu'ih  occupent 
actuellement.  Ce  mémoire  très  important,  dont  la  publication 
n'est  pas  terminée,  est  un  travail  de  premier  ordre  ;  par  sa 
solide  documentation  et  sa  bonne  forme  littéraire,  il  se  classe 
dans  les  premiers  rangs  parmi  les  éludes  relatives  à  l'histoire 
de  l'Algérie. 

Le  docteur  ^^"ATEAl■  a  publié  la  Liste  des  végétaux  recueillis 
pendant  la  reconnaissance  de  M.  le  capitaine  Martin  dans 
l'Erg  Iguidi  (Sahara)  en  nuos-avril  1913.  Cette  liste  des  plantes 
récoltées  dans  les  pâturages  de  printemps  du  Sahara,  est  d'au- 
tant plus  intéressante  qu'aux  indications  de  géographie  bota- 
nique elle  joint  la  synonvmie  des  noms  indigènes  des  plantes 
citées. 

A  titre  de  Contribution  à  l'élude  de  l'industrie  pastorale  en 
Algérie,  M.  C.  Ben  Da\ou  a  [)ublié  :  i°  Llne  \ote  sur  le  rôle 
jnécanique  des  vents  dans  la  répartition  des  fourrages  steppiens. 
Comment  densifier  les  herbages  ?  ;  2°  Des  nappes  d'halfa  et 
de  leur  rôle  au  pays  du  mouion.  Utilisation  du  bouss  d'halfa 
pour  la  nourriture  du  cheptel  des  Hauts-Plateaux. 

Dans  ces  deux  notes,  'SI.  Ben  Daxou,  vétérinaire  clavelisateur 
à  Méchéria,  a  continué  à  publier  le  résultat  de  ses  études  sur 
l'élevage  dans  le  Sud  Oranais.  De  ces  notes,  très  intéressantes 
et  qui  sont  le  fruit  d'une  longue  et  judicieuse  expérience,  celle 
relative  au  bouss  d'alfa  mérite  une  attention  toute  spéciale.  Le 
Comité  de  la  Société  a  émis  à  ce  sujet  un  vœu  que  le  Service  des 
Territoires  du  Sud  a  bien  voulu  prendre  en  considération.  Il 
est  à  souhaiter  que,  dès  ce  printemps,  soient  entreprises  les 
expériences  permettant  d'établir  si  la  jeune  tige  florifère  de 
l'alfa  peut  fournir  un  fourrage  d'hiver,  et  comme  conséquence 
une  augmentation  de  la  production  de  viande  sur  les  Hauts- 
Plateaux.  M.  Bex  Danou  est  un  véritable  apôtre  et  la  Société  est 
heureuse  de  lui  apporter  son  concours  moral. 

.M.  G.  Djian,  dans  son  carnet  de  route  Vers  le  Tchad,  a  donné 
au  Bulletin  lui  ti'ès  intéressant  récit  de  son  voyage  de  Bordeaux 
à  Fort-Lamy,  à  travers  le  Kanem,  le  Borkou  et  l'Ouadaï,  dans 
l'Afrique  Equatoriale  française.  Son  travail,  attachant  pour  le 
lecteur  ordinaire,  est  d'un  intérêt  réel  pour  ceux  (pii  seraient 
appelés  à  parcourir  les  régions  décrites. 

M.  \.  Toi  RMER  a-  bien  voulu,  comme  tous  les  ans,  nous 
df)nn(r  le  Mouvement  de  la  ^'avigalion  dans  les  ports  du  dépar- 
tement d'Oran,  et  le  Mouvement  Commercial  durant  l'an- 
née it)i'i. 

Knfin  MM.  Giillaume  et  Luxili^ier  ont  publié  les  Observa- 
tions météorologiques  de  la  Station  de  Santa-Cruz  d'Oran  pen- 
dant l'année  191 5. 

Le  Bulletin  est  complété  par  des  Notices  bibliographiques  de 
MM.  Cour,  Déchaitd,  Doimergue,  Abbé  Fabre  et  Flahault, 
et,  hélas   !  par  treize  notices  nécrologiques. 


PROCÈS-VERBAUX  DES   RÉUMONS  DE   LA   SOCIÉTÉ  215 

En  résumé,  le  Bulletin  de  191 5  ne  dépai'era  pas  la  collection 
de  nos  publications.  Il  reste  à  exprimer  le  souhait  que  la  Société 
continue  à  bénéficier  de  la  confiance  de  ses  précieux  et  savants 
collaboralem's,  et  puisse,  malgré  les  difiicultés  rencontrées, 
publier  en  191 6  un  Bulletin  digne  de  ses  devanciers. 

-Mais  il  est  une  diiïicidté  cpi'il  n'est  pas  facile  de  surmonter, 
c'est  celle  l'elative  à  la  pénurie  des  manuscrits  présentés.  La 
plupart  de  jios  collaborateurs  étant  au  front  ou  absorbés  par 
les  œuvres  de  guerre,  sont  obligés  d'interrompre  leurs  études 
et  de  nous  priver  momentanément  de  leur  concours. 

Bibliothèque.  —  L'état  de  guerre  nous  a  obligés  à  limiter  à 
l'extrême  les  dépenses  d'achats  d'ouvrages,  qui  ont  été  réduites 
à  l'acquisition  de  quelques  livres  d'occasion,  mais  la  biblio- 
thèque s'est  augmentée  de  60  dons  d'auteurs. 

11  a  été  commencé  un  très  important  travail,  qui  consiste  en 
l'établissement  de  fiches  pour  les  travaux  contenus  dans  les 
publications  que  reçoit  la  Société.  Ce  travail  porte  à  5. 000  ou 
6.Û00  le  nombre  de  nos  fiches,  réparties  :  1°  Par  noms  d'au- 
teurs, 2°  Par  matières,  ce  qui  fournira  à  l'étude  d'inappréciables 
facilités  de  recherches. 

Situation  financière.  —  Un  grand  nondire  de  sociétaires 
mobilisés  n'acquittant  pas  leurs  cotisations  et  les  subventions 
les  plus  importantes  nous  faisant  défaut,  nous  avons  dû  réduire 
les  dépenses. 

En    1914,    nous   avions   dépensé 5.698^64 

En  1910,  nous  n'avons  dépensé  que..      3.845  08 

Réduction  des  dépenses 1.753*66 

Nous  avons  pu  ainsi  joindre  les  deux  bouts  et  noter  même 
un  excédent  assez  important. 

Cet  excédent  n'aurait  pu  être  réalisé  si  le  Conseil  général  ne 
nous  avait  pas  renouvelé  en  1915  la  subvention  annuelle  et  si 
nous  avions  publié  un  4^  fascicule  du  Bulletin. 

Mais  ce  boni  provisoire  sera  sans  doute  absorbé  en  191 6,  car 
le  déficit  sera  difficile  à  éviter,  le  montant  des  cotisations  et  des 
subventions  étant  appelé  à  diminuer  encore. 

Néanmoins,  notre  situation  reste  très  satisfaisante  et  nos 
réserves  sont  largement  suffisantes  pour  parer  à  toutes  les 
éventualités  ;  ce  qui  ne  doit  pas  nous  dispenser  de  porter  nos 
plus  grands  efforts  du  côté  du  recrutement,  en  attendant  que  le 
succès  final  de  nos  armes  permette  à  la  Société  de  reprendre, 
dans  sa  vie  normale,  un  nouAcl  essor. 

Le  Rapporteur, 
E.  FLAHAULT. 


Docteur  Jean  DUZAN 


Le  14  avril  ii)i6  s'est  éteint  à  Saint-Leu,  à  l'âge  de  66  ans, 
M.  le  docteur  Duzan,  maire  de  la  commune  et  un  de  nos  plus 
anciens  sociétaires.  La  brusque  disparition  de  notre  collègue 
fut  pour  nous  une  doidoureuse  surprise,  car  la  maladie  qui  le 
minail  m  paraissait  pas  avoir,  à  si  brève  échéance,  des  suites 
fatales. 

Venu  (Ml  Algérie  en  iSH'6,  le  docteur  Duzan  s'était  fixé  à  Saint- 
Leu  (piil  ne  devait  plus  quitter.  Il  acquit  rapidement  l'estime 
de  ses  cuncitoyens  qui,  l'année  suivante,  lui  confièrent  la  direc- 
tion des  affaires  communales  qu'il  a  conservée  jusqu'à  sa  mort. 

Il  ne  nous  appartient  pas,  à  cette  place,  d'énumérer  le^  ser- 
vices rendus  par  le  docteur  Duzan  à  sa  commune  ;  tous  ceux 
(pii  connaissent  Saint-Leu  ont  pu  les  apprécier.  Saint-Leu  est 
un  des  villages  les  plus  propres,  les  plus  coquets,  les  mieux 
dotés  en  établissements  communaux  du  déparlement  d'Oran  ; 
tout  y  indique  l'esprit  d'initiative  d'une  municipalité  intelli- 
gente, soucieuse  avant  tout  de  la  prospérité  du  village  et  du 
bien-être  de  ses  habitants. 

Le  docteur  Duzian  s'était  fait  inscrire  à  notre  Société  dès  son 
arrivée  en  Algérie.  Non  seulement  il  lui  resta  fidèle,  mais  encore 
il  lui  rendit  de  grands  services  en  s'intéressant  à  l'œuvre  qu'elle 
avait  créée,  le  Musée  d'Oran.  Le  docteur  Duzan  fut,  pour  ainsi 
dire,  le  conservateur  des  ruines  romaines  de  Saint-Leu  (Porfus 
Magnus).  Il  veilla  sur  ces  ruines  et  fut  en  relations  constantes 
avec  le  regretté  commandant  Demaëght.  Grâce  à  notre  dévoué 
collègue,  une  multitude  d'objets  et  de  ^documents  archéolo- 
gi({ucs  furent  sauvés  de  la  destruction  et  vinrent  enrichir  le 
Musée  d'Oran. 

Aussi,  c'est  avec  une  bien  sincère  affliction  ([ue  la  Société  de 
Géographie  et  d'Archéologie  d'Oran  renouvelle  à  sa  veuve  et  à 
ses  fils  l'expression  de  ses  condoléances  les  plus  attristées. 

F.  D. 


A  (^'f'6 


IV  O  ^J^  I  O  JB> 


SUR 


EL  KSflR  EL  REBIR  ET  LA  RÉGION  DU  KHLOTT' 


I.  —  Habitat  <lr  la  Tribu  dos  Kblott 

Exception  faito  pour  les  grandes  familles  bcibères,  pre- 
miers occupants  du  sol,  il  est  rare  de  rencontrer  au  Maroc 
des  tribus  bien  groupées  occupant  des  zones  nettement 
délimitées. 

Essentiellement  nomades,  peu  capables  de  s'attacher  à 
la  terre,  guerrières  et  pillardes  avant  tout,  les  tribus 
arabes  venues  pour  conquérir  le  Moghreb  devaient,  quoi- 
(jue  toutes  issues  d'une  même  souche,  s'éparpiller  bientôt 
dans  le  pays  tout  entier,  sans  aucun  ordre,  ni  aucune 
cohésion,  n'écoutant  dans  la  recherche  de  leur  habitat 
temporaire  que  le  désir  de  satisfaiie  des  intérêts  particu- 
liers. Cette  tendance  à  la  dissémination,  dépassant  les 
limites  de  la  tribu,  s'étendit  aux  familles  composant  la 
tribu  elle-même  et  celle-ci,  ainsi  morcelée,  devait  arriver 
non  seulement  à  occuper  des  étendues  de  territoire  hors  de 
proportion  avec  leur  peuplement,  mais  encore  à  voisiner 
sur  un  même  territoire,  parfois  dans  un  même  douar, 
avec  des  familles  descendant  de  tribus  différentes. 

Les  qualités  guerrières  de  la  race  ayant  décliné  et  le 
besoin  de  se  fixer  s'étant  fait  sentir,  les  fractions  restèrent 
aux  places  qu'elles  avaient  choisies.  De  là,  pour  une  même 
tribu,  l'éparpillement  actuel  qui  correspond  à  celui  de  la 
période  nomade,  mais  qui  est  définitif  maintenant.  De  là, 
aussi,  dans  une  même  zone,  les  contacts  souvent  intimes 
de  tribus  d'origine  différente,  de  mœurs  quelquefois  dis- 
semblables ;  enchevêtrement  touffu,  véritable  chaos  qui 
rend  souvent  très  difïîcile  de  fixer  sur  une  carte  les  limites 
exactes  de  l'habitat  d'une  tribu  donnée. 

La  tribu  des  Khlott  ne  fait  pas  exception  à  la  règle,  mais 
il  est  cependant  possible  de  limiter  à  peu  près  exactement 
son  habitat. 


I   Des  circonstanres  créées   par   l'état  de  guerre  ont   retardé   la  publication 
des  trois  premiers  mémoires  composant  le  fascicule  actuel.  (Note  du  C.  de  R.) 


17 


218      iNOTICE  SUR  EL  KSAR  EL  KÉBIR  ET  LA  RÉGIOiN   DU   KIILOTT 

Mélangée  sans  doute  à  de  pcliles  fraclions  Tlig,  Bedaoïsa 
ou  aulres  el,  quoique  ayaul  elle-même  quelques-unes  de 
ses  familles  émigrées  en  d'autres  régions  du  Maroc  i,  elle 
se  présente  encore  assez  bien  groupée,  au  Nord  et  au  Sud 
de  l'oued  Loukkos. 

Le  bassin  de  cette  rivière  est  son  véritable  habitat.  Elle 
y  est  chez  elle,  car  elle  en  impose  aux  autres  tribus  (pii 
vivent  à  son  contact  et  par  le  nombre  de  ses  ressortissants, 
et  par  l'étendue  des  terres  qui  sont  sa  propriété. 

La  tribu  des  Khlott  occupe  une  bande  de  territoire,  le 
«  Khlott  »,  situé  en  bordure  de  l'océan  Atlantique,  s'éten- 
danl  d'Arzila,  au  Nord,  jus(|u';i  la  merdja  Ez-Zerga  et  le 
Drader,  au  Sud  (,60  kilomètresj,  et  de  Larache,  à  l'Ouesl, 
jusqu'au  pied  du  Djebel  (montagne),  à  l'Est  (3o  kilomè- 
tres). La  superficie  occupée  par  la  tribu  est  en  chiffres 
ronds  de  2.000  kilomètres  carrés.  Sa  population  s'élève 
approximativement  à  3o.ooo  habitants,  Tlig  et  Bedaoua 
compris,  ces  derniers  d'ailleurs  n'entrant  que  pour  foil 
peu  dans  ce  total. 

La  ligne  de  délimitation  du  Khlott  part  à  peu  près  d'Ar- 
zila, (pi'elle  n'englobe  pas  et  qui  appartient  à  la  tribu  des 
Sahel,  suit  d'abord  l'oued  El  Alou,  qui  le  sépare  de  la 
R'harbia,  au  Nord,  s'infléchit  un  peu,  bordant  au  Nord- 
Est  la  fraction  des  Mçoura,  gagne  l'oued  El-Ayacha  et 
Souk  el  Arba  des  Bedaoua  (ou  Ayacha)  sur  cet  oued,  puis, 
prenant  une  direction  nettement  Nord-Sud,  arrive  au 
fleuve  Loukkos,  vers  dchar  Mallem,  côtoyant  la  montagne 
et  laissant  à  l'Est  les  tribus  Djebalas  des  Béni  Gorfet 
d'aboid,  puis  les  Ahl  Shérif.  Airivée  au  Loukkos,  la  ligne 
de  délimitation  épouse  les  courbes  de  ce  fleuve  sur  quel- 
ques kilomètres,  se  confond  avec  la  frontière  franco-espa- 
gnole qu'elle  quitte  au  djebel  Gheni,  passant  au  Sud  de 
cette  montagne,  atteint  le  djebel  Sarsar  (Djebalas)  qu'elle 
contourne,  descend  vers  le  village  d'Haridiyne  (Gharb) 
qu'elle  n'atteint  pas,  puis  se  dirigeant  presque  en  ligne 
droite  vers  l'Ouest,  passe  au  Sud  du  camp  français  d'Ar- 
baoua,  emprunte  le  cours  de  l'oued  Drader,  frontière  natu- 
relle entre  le  Khlott  et  le  Gharb  et,  coupant  enfin  en  deux 
la  merdja  Ez-Zerga,  se  termine  au  marabout  de  Moulay 
Bou  Selham  (Khlott)  sur  l'Océan. 

L'Allantique  borne  naturellement  à  l'Ouest  le  Khlott 
jusqu'à  Larache  mais,  à  hauteur  de  celle  ville,  la  limite 


I   On    trouve    quelques    fiiniillos    kliloli;!    sur    le    fli-tivr    Seboii,    au    lieu    dit 
liai]  des  Oulcd   DJelloul  el  dans  la   région  de  Mehedya. 


NOTICE  SUR  EL  KSAR  EL  KEBIR  ET  LA  REGION  DU  KIILOTT      219 

suit  le  Loukkos  pendant  (quelques  kilomètres,  contourne 
l'ancienne  ville  phénicienne  de  Li:ç«s(aujourd'huiTchem- 
mich;  et  remonte  eniin,  du  Sud  au  Nord,  suivant  une  ligne 
liclive  pour  rejoindre  son  point  de  départ  au  Nord-Est 
d'Arzila,  laissant  entre  elle  et  l'Océan  une  étroite  bande 
de  territoire  occupée  par  la  tribu  des  Sahel. 

La  frontière  lianco-espagnole  dont  nous  ne  connaissons 
pas  encore  le  tracé  déiinitif,  suivra  approximativement 
le  35*^  parallèle,  ligne  toute  conventionnelle,  coupant  le 
territoire  Khlott  en  deux  parties,  très  inégales  d'ailleurs, 
la  plus  grosse  part  ayant  échu  à  l'Espagne  avec  la  ville 
d'El  Ksar  El  Kebir.  Nous  ne  possédons  en  effet  dans  le  Sud 
du  territoire  Khlott  qu'une  bande  de  600  kilomètres  car- 
rés environ,  soit  le  quart  de  la  superficie  totale,  dont  le 
centre  le  plus  important  est  le  poste  militaire  d'Arbaoua 
ou  El  Ma  Bared  (l'eau  fraîche),  et  qui  est  peuplé  d'environ 
a. 000  habitants. 

Cette  division  de  la  région,  la  plaçant  sous  deux  pro- 
tectorats différents,  n'a  encore  influé  en  rien  sur  les  carac- 
téristiques du  pays.  Pour  les  Khloti,  il  n'y  a  pas  encore 
de  frontière  ;  qu'il  soit  Espagnol  ou  Français,  le  Khlott  est 
resté,  au  point  de  vue  de  sa  vie  intime  et  économique,  ce 
qu'il  était  avant  roccuj)alion  européenne.  Il  n'y  a  pas 
ici  de  Pvrénées. 


II.  —  Aperçu  Géographique 

Tout  en  comprenant  les  vallées  de  quelques  petits  oueds 
cotiers  se  jetant  directement  dans  la  mer  ou  dans  les 
merdjas  (marécages)  bordant  la  côte  océanique,  l'habitat 
de  la  tribu  du  Khlott  est,  comme  il  a  été  dit,  avant  tout,  le 
bassin  du  Loukkos  et  de  ses  afiluents,  depuis  sa  sortie  du 
Djebel  jusqu'à  Larache. 

Ce  bassin  possède  une  ceinture  à  peu  près  continue. 

Au  Nord-Ouest  et  au  Nord,  une  chaîne  de  petites  collines 
de  faible  altitude  et  une  suite  de  plateaux  sablonneux  le 
séparent  des  bassins  cotiers  des  oueds  Es  Sebt,  El  Alou  et 
El  Ayacha.  A  l'Est  et  au  Sud-Est,  il  est  isolé  par  la  haute 
muraille  du  Djebel  (Béni  Gorfet,  Ahl  Shérif  et  Sarsar), 
continuation  du  système  riffain  d'oii  provient  le  Loukkos 
qui  s'en  échappe  par  une  trouée  étroite  ménagée  entre 
les  monts  des  Ahl  Shérif  et  le  massif  du  Sarsar.  Au  Sud, 
les  plateaux  rocailleux  peu  élevés  de  la  région  d'Arbaoua 


220   NOTICE  SUR  EL  KSAR  EL  KÉBIR  ET  LA  RÉGION  DU  KHLOTT 

lui  assurent  sa  limite  avec  le  bassin  de  l'oued  M'da,  la 
glande  rivière  du  (Jharb.  A  l'Ouest  eiilin,  une  série  de 
soulèvements  sablonneux  et  rocailleux  se  terminant  par 
le  grand  plateau  de  Larache,  départage  entre  le  Loukkos 
et  les  oueds  côlieis  Soulieir  et  Drader,  les  eaux  de  la 
région. 

Tel  qu'il  est  constitué  avec  sa  ceinture  de  collines  et  de 
montagnes,  le  bassin  du  Loukkos  affecte  la  forme  d'un 
grand  cirque  dont  les  portes  sont  à  Larache  et  au  pied  du 
Sarsar,  jiortes  opposées  réunies  par  une  voie  diamétrale 
constituée  par  le  lleuve  lui-même. 

L'intérieur  de  ce  cirque  ne  présente  que  peu  de  parties 
vraiment  plates.  La  vallée  du  Loukkos  ne  comporte  en 
effet  de  plaines,  au  vrai  sens  du  mot,  qu'aux  abords  immé- 
diats des  rives  du  fleuve. 

Cette  plaine,  assez  étroite  dans  le  cours  supérieur  de 
l'oued,  s'élargit  en  cercle  à  la  hauteur  d'El  Ksar,  s'étend 
en  largeur  sur  une  dizaine  de  kilomètres,  puis  se  rétrécit 
peu  à  peu  pour  se  réduire  à  nouveau,  après  le  confluent 
(lu  Loukkos  et  de  l'oued  Mkhazen,  aux  seuls  abords  immé- 
diats du  fleuve,  jusqu'à  l'embouchure  à  Larache. 

Cette  plaine,  d'ailleurs,  est  occupée  dans  la  presque 
totalité  de  sa  superficie  par  des  marais  où  se  perdent  de 
ngmbreiix  petits  filets  d'eau  liés  des  collines  voisines. 
Ces  marais  sèchent  en  partie  l'été,  fournissant  de  bons 
pâturages,  mais  en  hiver  et  à  la  saison  des  pluies,  ne  pou- 
vant écouler  au  Loukkos  ou  à  ses  affluents  que  leur  trop 
plein,  ils  deviennent  souvent  impraticables  au  point 
d'arrêter  la  circulation  dans  le  pays. 

La  majeure  partie  du  relief  de  la  région  est  constituée 
|)ar  une  inlinilé  de  petits  mameloris  dont  l'altitude  décroit 
du  Djebel  vers  la  mer,  mamelons  rocailleux,  arrondis, 
dénudés  et  à  pentes  rapides,  disposés  sans  ordre  et  sans 
direction  bien  nette,  d'où  la  difiiculté  de  les  rattacher  à 
une  suite  montagneuse  déterminée.  Leur  altitude  ne 
dépasse  pas  en  généial  :>oo  mètres,  exception  faite  pour 
le  djebel  Gheni  (3oo  mètres)  situé  entre  El  Ksar  et 
Arbaoua  dont  l'arête  anguleuse  maïque  la  frontière  fi-an- 
co-espagiîole  et  qui  doit  d'ailleurs  orogia])hicpiemenl  être 
rattaché  au  système  du  Sarsar. 

Ces  mamelons  sf)nl  séparés  par  des  ravins  étroits,  au 
fond  dcscpiels  s'accunnile  la  terre  arable  entraînée  par  le 
ruissellement  —  d'où  leur  fertilité  —  et  où  serpentent 
d'innombrables  petits  cours  d'eau,    temporaires  ou  per- 


NOTICE  SUR  EL  KSAR  EL  KEBIR  ET  LA  REGION  DTl  KHLOTT      221 

manenls,  souvent  boueux  en  hiver  et  partant  diiïiciles  à 
traverser. 

Cette  disposition  spéciale  du  relief  du  sol  expli(pie  bien 
les  sinuosités  nombreuses  du  cours  des  oueds  de  la  région 
et  en  particulier  celles  du  î.oukkos  dont  les  méandres 
nombreux  et  la  forme  serp(>ntine  oui  suggéré  à  ranlicpiité 
la  légende  du  «Dragon  gardien  du  jardin  des  Hespérides». 

I/oued  1-oukkos  fl.ekkous-El  Kous),  le  Lixus  des  géo- 
graphes anciens,  est  la  grande  aitère  fluviale  de  la  région. 

Né  dans  le  Djebel,  près  de  Chechaouen  (tribu  des  Lakh- 
mes),  il  coule  d'abord  dans  les  ravins  de  la  montagne, 
puis,  un  peu  après  le  gué  de  Sebbab  et  le  dcliar  Mallem 
fAhJ  Shérif),  entre  dans  le  Khlott  j)iès  de  Kadjouka,  cou- 
lant au  milieu  de  beaux  jardins  de  figuiers,  dans  une 
direction  à  peu  près  Nord-Ouest,  passe  devant  la  djemaa 
des  Moujahidin  où  se  faisaient  autrefois  les  rassemble- 
ment de  guerriers  allant  attaquer  les  colons  chrétiens  de 
la  côte  (Guerre  sainte,  Djihad)  et  arrive  au  pied  du  djebel 
Gheni. 

Ayant  reçu  l'oued  El  Ma  Bared  par  l'intermédiaire  d'une 
merdja  de  la  plaine,  le  Loukkos  prend  alors  une  direction 
générale  S.-E.-N.-O.  qu'il  conserve  jusqu'à  son  embou- 
chure et  coule  d'abord  encaissé  dans  un  lit  profond,  limité 
par  des  berges  à  pic  ;  puis  les  berges  s'abaissent  peu  à  peu 
au  niveau  de  la  plaine  elle-même. 

Dans  cette  dernière  partie  de  son  cours,  le  Loukkos 
passe  à  Mechra-Es-Serracq  (Gué  des  Voleurs),  qui  permet 
d'éviter  El  Ksar  quand  on  se  dirige  du  Khlott  vers  le 
Djebel  et  vice-versa,  puis  au  gué  d'El  Ksar  distant  d'en- 
viron un  kilomètre  de  la  grande  agglomération  sur 
laquelle  nous  reviendrons  plus  loin.  Ce  gué  que  traverse 
la  grande  route  de  Tanger-Fez  est  praticable  seulement  en 
été  (o'"5o  d'eau  en  moyenne).  L'hiver,  lorsque  la  rivière 
est  grosse,  les  voyageurs  doivent  passer  un  peu  plus  en 
aval,  au  gué  des  Benatyin  où  fonctionne  un  bac  permet- 
tant la  traversée. 

Poursuivant  sa  route  à  travers  les  jardins,  le  Loukkos 
arrive  au  gué  d'El  Merissa  où  la  route  d'été  de  Larache  à 
El  Ksar  le  traverse  et  jusqu'où  se  fait  sentir  la  marée, 
passe  à  Mechra  El  Habat  où  il  cesse  d'être  navigable  et 
atteint  Mechra  En  Nedjma.  Là  commencent  les  adirs  du 
Sultan,  vastes  étendues  de  terrains  où  se  pratique  l'élevage 
des  bestiaux  et  surtout  des  chevaux  et  mulets  appartenant 
à  Sa  Majesté  Chérifienne. 


222   NOTICE  SUR  EL  KSAR  EL  KEBIR  ET  LA  REGION  DU  KHLOTT 

Un  peu  avant  la  koubba  de  Sidi  Ouaddar,  le  Loukkos 
reçoit  l'oued  Mkhazen  grossi  de  l'oued  Ouarrour.  Le  con- 
fluent des  deux  rivières  se  fait  au  milieu  d'une  vaste 
nierdja,  près  de  laquelle  se  livra  en  1578  ap.  .I.-C.  la 
fameuse  bataillé  des  <(  Trois  Rois  ». 

Après  ce  conlluent,  le  Loukkos  marque  la  limite  du 
Khlott  et  du  Sahel,  passe  à  l'ancienne  ville  phénicienne 
de  Lixus  (Tchemmich)  et  arrive  à  Larache  (Ll  Araïch)  où 
il  se  jette  dans  l'Océan  par  une  embouchure  assez  large 
fermée,  comme  la  plupart  des  estuaires  au  Maroc,  par  une 
barre,  d'ailleuis  le  plus  souvent  franchissable  pour  les 
bateaux  de  tonnage  moyen. 

Les  principaux  affluents  du  Loukkos  en  territoire  Khlott 
sont  :  à  droite,  l'oued  El  Mkhazen,  qui  naît  dans  les  Béni 
Arous  auprès  du  célèbre  marabout  de  Moulay  Abdesselam 
Ben  M'Cliich,  coule  dans  une  vallée  très  fertile,  passe 
après  son  entrée  dans  le  Khlott  à  Sidi  Ali  Rou  Loufa,  Souk 
El  Djemaa  et  Tolba,  Kanoura  et  se  jette  dans  le  Loukkos 
à  El  Ameir,  réputé  par  des  melons  très  appréciés  du 
Maghzen. 

11  reçoit  lui-même  à  droite,  au  niveau  de  Souk  El 
Djemaa  et  Tolba  l'oued  El  Ameir,  puis  l'oued  Magrouel, 
l'oued  fmmer,  au  confluent  duquel  on  remarque  les  rui- 
nes de  deux  ponts  romains  et  enfin  l'oued  Raïçana  (pii 
passe  à  l'important  marché  du  même  nom,  le  Souk  El 
Tleta  Er  Raïçana. 

A  gauche,  le  Mkhazen  reçoit  l'oued  Ouarrour  qui  des- 
cend du  Djebel,  torrent  pres(]iie  à  sec  en  été  dont  un  sous- 
affluent  de  gauche  porte  le  nom  au  moins  inattendu  de 
oued  Frechk  Aoua  (de  l'espagnol,  agua  fresca). 

A  gauche,  le  Loukkos  reçoit  l'oued  El  Ma  Bared  (eau 
fraîche)  ()ui  passe  au  bas  du  plateau  occupé  par  le  camp 
français  d'Arbaoua  et  coule  dans  de  superbes  jardins 
d'orangers,  dont  |)]usi('nrs  sont  la  propriété  des  Choifa 
d'Ouezzan  ;  l'oued  Akhfacha,  et  enfin  le  ruisseau  de 
Smid-El  Ma  et  l'oued  Sakhsok,  ces  deux  derniers  limitant 
les  adirs  du  Sultan. 

Parmi  les  oueds  côtiers  cpii  arrosent  le  Khlott,  il  con- 
vient de  ciler,  au  Nord  du  Loukkos,  l'oued  El  Alou  rpii 
sépare  le  Khlott  de  la  R'haibia,  l'oued  Es  Sebt  qui  passe 
près  de  l'ancienne  station  lomaine  de  Tahertme  CT>alla  Al 
Djilalya)  et  au  souk  de  Sidi  El  Yamani,  enfin  au  Sud  du 
Loukkos,  l'oued  Souheir  qui  se  jette  dans  la  merdja  de 
Gla,    voisine   des   ruines   romaines   de   Frigidac  et  l'oued 


J 


NOTICE  SUR  EL  KSAR  EL  KEBIR  ET  LA  REGION  DU  KHLOTT   223 

Diader  qui  sépare  le  Khlott  du  Gharb,  passe  au  douar 
iinportanl  de  Sidi  El  llaouari  et  à  Mechra  El  llader,  où  la 
roule  de  Mehedya  à  Larache  le  traverse,  pour  se  jeter  enliii 
dans  la  iiierdja  Ez-Zerga, 

La  plupart  de  ces  petits  oueds,  grâce  à  la  proximité  des 
réservoirs  de  la  montagne,  conservent  même  pendant 
l'été  des  eaux  courantes  ;  certains  se  réduisent  à  un  mince 
filet  d'eau,  mais  la  fraîcheur  maintenue  aux  abords  de 
leur  lit  préserve  le  pays  de  l'apparence  désolée  que  les 
fortes  chaleurs  donnent,  au  Maroc,  aux  sols  les  plus  fer- 
tiles, aux  régions  les  plus  riches. 


III.  —  Nature  du  Terrain 

Le  territoiie  du  Khiolt  est  foimé  de  terrains  tertiaires 
(néogène  marin). 

Le  Khlott  représente  le  fond  et  les  plages  de  l'ancien 
détroit  sud-riffain  fjui  faisait  communiquer  l'Allantique 
et  la  Méditeiranée  et  qui,  aujourd'hui,  constitue  la  trouée 
de  Taza.  Le  Djebel  qui  limite  le  Khlott  à  l'Est  et  au  Sud- 
Est  représentait  les  fahiises  du  détroit. 

Sur  le  bord  de  la  mer  le  terrain  est  sablonneux,  parsemé 
de  dunes. 

Dans  l'intérieur,  les  multiples  collines  qui  constituent 
le  relief  du  sol  sont  formées  de  sable  argileux,  parfois  de 
grès,  supportés  par  des  couches  de  marne  fortement  cal- 
caire. Quelquefois  le  grès  se  montre  en  masses  compactes, 
comme  dans  le  djebel  Gheni,  par  exemple.  En  d'autres 
points  apparaissent  des  conglomérats  de  galets  d'épaisseur 
variable,  avec  ciment  gréseux.  Ces  diverses  formations 
peuvent  être  attribuées  à  l'étage  tortonien. 

Les  ravins  qui  limitent  les  collines,  ainsi  que  les  plaines, 
sont  couverts  d'alluvions  provenant  de  l'érosion  des  pentes 
et  des  inondations.  Ces  terrains  contiennent  en  général 
une  forte  proportion  de  matières  organiques  (végétaux 
décomposés  par  l'eau),  ce  qui  explique  leur  très  grande 
fertilité  (terrains  «  touars  »). 

La  pierre  à  bâtir  est  rare  dans  le  Khlott  ;  l'argile,  par 
contre,  très  abondante,  d'où  l'habitude  qu'ont  prise  les 
Khlott  de  bâtir  en  <(  mokdar  »  (briques  séchées  au  soleil) 
leurs  maisons  qu'ils  couvrent  de  chaume. 

Dans  le  Khlott,  on  ne  trouve  pour  ainsi  dire  pas  de  mai- 
sons en  pierres.  (Voir  §  XVII.) 


224      NOTICE  SUR  EL  KSAR  EL  KEBIR  ET  LA  RÉGION  DU  KHLOTT 

Hydrologie.  —  Le  Kliloll  est  particulièrement  bien 
arrose,  l'eau  y  est  abondante  et  douce,  d'où  la  beauté  des 
jai'dins  de  la  répion.  On  trouve  quelques  oueds  salés, 
allluents  du  Loukkos  dans  son  cours  supérieur,  descendant 
du  Sarsar  où  exi^leiil  des  gisements  de  sel  gemme. 

Mines.  —  11  n'a  pas  été  signalé,  encore,  de  gisements 
miniers  dans  la  région. 


IV.  —  Climatologie 

Le  climat  du  Khlott  est  en  général  tempéré  et  procède 
du  climat  marin  :  la  température  toiidx*  rarement  à  o°  en 
hiver  et  ne  dépasse  généralement  pas  80°  en  été. 

La  région  est  bien  ventilée.  Les  vents  dominants  sont 
les  vents  du  Nord  (beau  temps).  Les  vents  d'Ouest  (vents 
océaniques)  amènent  des  orages  et  des  bourrasques  sou- 
vent violentes.  Le  sirocco  y  souille  rarement. 

Il  pleut  enlin  fré(juemment  dans  la  région  au  cours  de 
l'année,  surtout  de  septembre  à  fin  mars. 

Les  observations  météorologifjues  n'ont  été  relevées 
qu'à  partir  du  i^""  janvier  1914  : 


ÂHNËE  1914 

MOIS 

TKMI'KRATURE 

PRESSION  ATMOSPHÉRIQUE 

VENT 

l'LUIF, 

Miolina 

Mailma 

Moyenne 

HlDlma 

Maxlnia 

Moyenne 

Direction 
dominante 

FORCE 

Janvier 
Février. 
Mars  .... 

Avril  .... 

-   1 
+  6 
+  5,5 
+  6 

420 

+  25 
+  25 

+  10 
+  11,5 
+  13,5 
+  15,5 

745 
716 
748 
746 

764 
765 
765 

760 

749 
755 
757 
754 

S.-O. 

S.-O. 
N.-N.-O 
N.-N.-O. 

violent  (1  jour) 
violent  (9  jours) 
violent  (1  jour) 
violent  (4  jours) 

l'2  jours 
13  jour.'; 
9  jours 
9  jouis 

y.  —  Valeur  Sanitaire  du  Pays 


La  région  du  Khlott  est  très  saine  dans  les  parties  élevées, 
sur  les  collines.  L'absence  d'eaux  stagnantes  et  la  ventilation 
énergique  expliquent   celte   salubrité.    Malheureusement, 


NOTICE  SUR  EL  KSAR  EL  KEBIR  ET  LA  REGION  DU  KHLOTT   225 

il  n'en  est  pas  de  même  dans  les  légions  basses,  oii  les 
merdjas  ou  marécages  favorisent  tout  particulièiement  la 
pullulation  des  moustitpies  el  par  consé(|uent  le  dévelop- 
pement du  paludisme. 

La  variole  est  nalurellement  endémitpie  dans  la  région, 
comme  dans  toutes  les  agglomérations  arabes  du  Nord  de 
l'Afrique,  mais  n'est  pas  à  craindre  pour  les  Européens 
qui  ont  pris  la  précaution  de  se  faire  vacciner. 

On  constate  enfin  de  temps  en  temps  quelques  petites 
poussées  de  typhus  et  de  peste  comme  dans  toutes  les  par- 
ties du  Maroc.  11  n'est  pas  douteux  que  peu  à  peu  les 
mesures  d'assainissement  et  de  prophylaxie  feront  dispa- 
raître ou  tout  au  moins  rendront  très  rares  toutes  ces 
affections. 

YI.  —  Végétation,  Ciiltures 

La  région  du  Khlott  est  particulièrement  fertile  et  pro- 
pice à  la  grande  culture.  Les  céréales  viennent  bien  dans 
les  terrains  d'alluvions,  les  abords  des  merdjas  donnent  de 
très  bons  pâturages  pour  le  gros  bétail  et  les  parties  cail- 
louteuses des  collines  fournissent  une  nourriture  suffi- 
sante pour  les  moutons.  (Voir  §  XIX.) 

Les  jardins  sont  très  nombreux  dans  le  Khlott,  aux 
abords  des  ruisseaux  ou  rivières  ;  ils  sont  coquets  et  très 
riches.  On  y  trouve  les  arbres  fruitiers  les  plus  divers  : 
l'oranger,  le  citronnier,  le  cognassier,  l'amandier,  l'abri- 
cotier, le  grenadier,  le  figuier,  etc.,  etc.  La  vigne  et  l'oli- 
vier y  poussent  très  bien.  Il  existe  en  particulier  autour 
d'EI  Ksar  des  jardins  de  grande  valeur,  et  devant  de  telles 
richesses,  on  s'explique  bien  la  légende  antique  du  <(  Jar- 
din des  Hespérides  si  jalousement  gardé  par  le  Dragon  ». 

Enfin,  en  certaines  régions,  vers  Larache  notamment, 
s'étendent  des  forêts  de  chênes-liège,  d'ailleurs  assez  peu 
exploitées  jusqu'à  ce  jour. 

Vn.  —  Routes 

On  ne  saurait  parler  ici  de  routes  proprement  dites. 

Le  Khlott  n'est  sillonné  que  par  de  nombreuses  pistes 
qui  n'ont  encore  reçu  aucun  entretien.  En  territoire  fran- 
çais, on  commence  à  les  aménager  en  attendant  de  pouvoir 
les  remplacer  par  de  véritables  routes. 


226   NOTICE  SUR  EL  KSAR  EL  KÉBIR  ET  LA  REGION  DU  KHLOTT 

Presque  toutes  les  pistes  du  Khlotl  se  croisent  à  El  Ksar. 

l.es  principales  sont  : 

1°  Les  lieux  routes  de  Tanger  à  FI  KsiU',  sur  l'une  des- 
fpicllcs  s'cinbranclic  la  [)islc  d'VA  Ksar  à  Tétouan  et  (pii  se 
(•(intinuc  vcis  le  Sud  dans  la  diieclidu  dr  Iv/.  ; 

:i°   Les  pistes  de  Larache  à  Oue/zan  pai'  VA  Ksar  ; 

?)°  La  i)iste  de  Larache  à  Tétouan  qui  croise  les  louti-s 
de  Taugei'  au  niveau  du  Tleta  de  Raïçana  ; 

'\°   La  piste  de  Larache  à  Arzila  ; 

5°  Les  pistes  de  Larache  à  Souk.  VA  Arba  de  Sidi  Aïssa 
(Gharb)  et  de  Larache  à  Mehedya,  celle-ci  parallèle  à  la 
côte. 

Le  chemin  de  fer  de  Tanger-Fez  traversera  la  région  du 
Nord  au  Sud.  Son  tracé  n'est  pas  encore  définitivement 
décidé  et  plusieurs  projets  sont  en  présence.  Celui  (pii 
paraît  avoir  le  plus  de  chances  d'aboutir  fait  suivre  à  la 
voie  ferrée  les  pistes  actuelles  de  Tanger  à  FI  Ksar,  la  diii- 
geant  ensuite  sur  Arbaoua,  puis  sur  Souk  FI  Aiba  de  Sidi 
Aïssa.  C'est  la  plus  directe.  Les  Espagnols  désireraient  que 
la  ligne  passe  à  Arzila  et  Larache,  d'où  elle  rejoindrait  à 
FI  Ksai'  le  premier  tracé.  Outre  (pi'elle  desservirait  ainsi 
deux  villes  importantes,  elle  passerait  dans  une  région  plus 
sûre  que  la  première,  du  moins  dans  les  circonstances 
actuelles.  Enfin  certains  colons  du  Gharb  voudraient  lui 
faire  éviter  Arbaoua,  (|ui  n'a  somme  toute  pas  giande 
importance  commerciale,  pour  la  conduire  d'El  Ksar  à  Sidi 
Aïssa,  par  le  gros  marché  de  Lalla  Mimouna  dans  le  Gharb. 

11  seia  sans  doute  diiïîcile  de  concilier  des  désirs  si 
divers  qui  correspondent  sans  nul  doute  à  des  intérêts 
indiscutables. 

Quel  que  soit  en  tous  cas  le  tracé  qui  seia  ado[)té,  il  est 
inutile  de  dire  que  la  voie  ferrée  rendra  d'immenses  ser- 
vices <à  cette  riche  région  de  culture  et  d'élevage,  à  laquelle 
elle  assurera  des  débouchés  rapides. 


VIII.  —  Hisf(»riqiie 

Nous  sommes  fteu  renseignés  sur  les  premiers  occupants 
du  bassin  du  I.oukkos,  les  Mazices  et  Aulolotes,  peuplades 
berbères  dépendant,  d'a|)rès  Ibn-Khaldoun,  du  royaume 
des  Gomaras,  qui  s'étendaieiit  en  bordure  de  l'Atlantirpie 
depuis  Arzila  jusqu'à  Casablanca. 


NOTICE  SUR  EL  KSAR  EL  KEBIR  ET  LA  RÉGION  DU  KHLOTT   227 

Ces  populations  berbères  de  la  plaine,  refoulées  peu  à 
peu  dans  la  montagne  i^Djebel)  par  les  invasions  succes- 
sives, seraient  représentées  aujourd'hui  par  les  Djebalas 

Les  Phéniciens  ont  certainement  exploré  la  ccle.  On 
retrouve  encore  quelques  vestiges  du  port  de  Mulecha 
qu'ils  avaient  fondé  à  l'embouchure  du  canal  qui  relie  la 
merdja  Ez-Zerga  à  la  mer,  à  la  hauteur  du  marabout  actuel 
de  Moulay  Bou  Selham.  Ils  remontèrent  le  T.oukkos  sur 
quelques  kilomèlres,  fondèrent  Lixus,  mais  rien  n'établit 
qu'ils  aient  poussé  plus  loin  leur  exploration. 

Par  contre,  les  Grecs  semblent  avoir  pénétré  jusqu'à  El 
Ksar.  Une  inscription  grcccpie  gravée  sur  une  des  pierres 
du  minaret  de  la  grande  mosquée  de  cette  ville,  pierre 
tombale  ramassée  sans  nul  doute  à  proximité  par  les  cons- 
Iructeurs  de  l'édifice,  prouve  que  si  les  Hellènes  n'avaient 
pas  établi  dans  la  région  de  centres  importants  de  coloni- 
sation, ils  avaient  au  moins  parcouru  le  pays. 

L'occupation  romaine  a  laissé  des  traces  plus  signifi- 
catives. 

Le  Khlott  était  traversé  par  deux  routes  romaines, 
simples  pistes  d'ailleurs,  car  on  ne  trouve  aucune  trace 
d'aménagement. 

L'une  d'elles  venant  de  Tingis  Tanger),  Duco  (Aïn 
Dalla),  Zilis  (Arzila),  Ad  Meicurios  fDchar-Djcdid)  passait 
dans  le  Khlott  à  Tabetnae  (Lalla  Al  Djilalya)  où  ont  été 
retrouvés  les  murs  d'un  castrum,  traversait  le.  Loukkos  à 
lAxus,  gagnait  Frigidae  'Souheir),  qui,  près  de  la  côte,  au 
Sud  de  la  merdja  de  Gla,  devait  être  un  port  militaire, 
pour  de  là  se  diriger  sur  Salé  en  traversant  le  Sebou  à 
Banassa  (Sidi  Ali  Bou  Djenoun). 

L'autre  route  de  Tingis  à  Volubilis  (près  de  Meknès)  se 
détachait  de  la  première  à  Ad  MercuHos,  passait  dans  le 
Khlott  h  Ad  Novas  ('Sidi  El  Yamanj),  traversait  les  oueds 
Inimer  et  Mkhazen  sur  des  ponts  dont  on  peut  voir  encore 
de  beaux  restes,  gagnait  Oppidum  Novum  (El  Ksar  El 
Kebir)  et  se  dirigeait  enfin  sur  Volubilis  par  Tremulae 
(Baçra).  Ces  routes,  en  définitive,  traversaient  les  mêmes 
centres  importants  qu'aujourd'hui. 

Toutes  ces  stations  constituaient  une  solide  ligne  de 
postes  militaires  destinés  à  contenir  les  tribus  monta- 
gnardes, mais  leur  souvenir  n'a  que  peu  survécu,  excep- 
tion faite  pour  Oppidum  Novum  qui  a  été  identifié  avec 
l'actuel  El  Ksar  El  Kebir.  L'emplacement  de  ce  poste  indi- 


228   NOTICE  SUK  EL  KSAR  EL  KEBIR  ET  LA  RÉGION  DU  KHLOTT 

que  sur  rHinéraire  d'Antonin  comme  distant  de  6:^  milles 
de  Tingis  sur  la  route  Tinçiis-Volubilis,  coïncide  à  peu 
près  exactement  avec  l'ag-glomération  indigène  contem- 
poraine. D'autre  part,  il  est  à  remarquer  que  les  pierres 
taillées  qui  ont  servi  à  l'édification  du  minaict  de  la  grande 
mosquée  de  cette  ville,  ra[)pellent  pai  leur  foirne  la 
manière  romaine  cl  (|u'à  rintcricui'  de  l'édifice,  on  trouve 
dans  la  colonnade  deux  chapiteaux  d'ordre  corintliien, 
dont  les  restes,  dégradés  par  des  blanchiments  à  la  chaux 
réitérés,  sont  pourtant  caractéristiques  '. 

Tissot  dit  enfin  qu'on  aurait  trouvé  à  El  Ksar  des  objets 
antiques  et  même  une  statue. 

Quoi  qu'il  en  soit,  Oppidum  Novum  n'existait  plus  ou 
était  devenu  bien  insignifiant  lors  du  passage  d'Okba  Ben 
Nafi  (685!  ap.  T.-C.)  et  des  premiers  conquérants  arabes, 
Moulay  Idriss  et  ses  successeurs,  car  il  n'en  est  jamais 
question  dans  les  œuvres  des  historiens  de  la  conquête. 

La  ville  actuelle  d'El  Ksar  paraît  avoir  été  fondée  par 
une  fraction  de  l'importante  tribu  berbère  des  Ketama, 
d'où  le  nom  de  Ksar  Ketama  sous  lequel  elle  a  été  long- 
temps connue, 

Oiiginaire  de  la  province  de  Constantine,  celte  tribu 
berbère  est  venue  au  Maroc  au  x^  siècle  de  notre  ère,  à  la 
suite  des  conquérants  arabes  Fatimides  de  l'Ifrikia  (Âlgé- 
rie-Tunisie\  qu'elle  aida  à  renverser  la  dynastie  Tdrissite, 
alors  régnante.  Elle  s'installa  sur  les  bords  du  Loukkos  et 
fonda  la  ville. 

Cette  tribu  devait  d'ailleurs  s'éclaircir  assez  rapidement 
jusqu'à  disparaître  presque.  On  en  retrouve  cependant 
encore  quelques  descendants  installés  à  une  douzaine  de 
kilomètres  d'El  Ksar,  sur  les  bords  du  Loukkos,  mélangés 
à  la  tribu  Djebala  des  Ahl  Shérif  et  groupés  en  cinq  ou  six 
petits  villages  (zone  française),  dont  le  principal  répond 
au  nom  de  Ketama. 

El  Ksar  ou  Ksar  Ketama  ne  tarda  pas  à  devenir  florissant, 
mais  malgré  ses  prétentions  au  titre  de  capitale  du  Maroc 
septentrional,  ne  joua  jamais  de  rôle  sous  les  premières 
dynasties  marocaines. 

Sous  le  règne  du  khalife  almohade  Yacoub  El  Mançour 
(xi'  siècle),  El  Ksar  connut  les  faveurs  gouvernementales. 
Le  khalife  s'y  rendit  plusieurs  fois  pour  chasser,  recons- 
tiiiisit  la  ville  endommagée  par  des  inondations  et,  pour 


I  Michaux-Bellaire. 


NOTICE  SUR  EL  KSAR  EL  KEBIR  ET  LA  REGION  DU  KHLOTT   229 

la  défendre  contre  les  incursions  de  voisins  trop  entrepre- 
nants, la  fit  entourer  d'une  muraille  en  pisé  (tabia)  dont 
on  retrouve  encore  aujourd'hui  des  vestiges  bien 
conservés. 

C'est  sous  le  règne  de  ce  même  khalife  qu'arrivent  dans 
le  bassin  du  Loukkôs  les  premières  tribus  arabes,  les  Ryah. 

Il  serait  trop  long  et  sans  grande  utilité' d'entreprendre 
ici  l'histoire  des  Kyah  et  des  tribus  de  même  famille  Slian, 
Beni-Malek  et  Khlott,  que  nous  retrouverons  plus  loin. 
Qu'il  nous  suiïise  de  dire  pour  la  compréhension  des  faits, 
que  ces  tribus,  iilles  des  Beni-Hilal,  originaires  du  Hedjaz, 
furent  lancées  par  le  khalife  El  Mostancir  (loôo  ap.  J.-G.) 
sur  rifrikia  révoltée  où  elles  s'installèrent  après  avoir 
réprimé  la  révolte.  (Invasion  hilalienne.) 

Ces  tribus,  turbulentes  et  indisciplinées,  ne  tardèrent 
pas  à  entrer  elles-mêmes  en  rébellion  contre  l'autorité  des 
Almohades  qui,  les  ayant  réduites,  décidèrent  de  les  trans- 
planter au  Maroc  ;  c'est  ainsi  que  le  khalife  El  Mançour 
établit  les  Byah  dans  le  bassin  du  Loukkos  et  le  Gharb, 
tandis  qu'il  dirigeait  vers  le  plateau  du  Tamesna  et  l'Oum 
Er  Rebia  les  autres  tribus  hilaliennes,  les  Khlott  en  parti- 
culier (i  187-1188  ap.  J.-C). 

Une  partie  seule  des  Ryah  ainsi  transplantés  devait  ren- 
trer dans  le  pays.  Dans  les  dernières  années  du  xi"  siècle, 
une  notable  partie  de  la  fraction  s'échappa  et  retourna  en 
Tripolitaine.  Ceux  qui  restèrent  soutinrent  la  cause  des 
derniers  Almohades  contre  la  puissance  naissante  des 
Merinides.  Vaincus  en  laaS  ap.  J.-C.  par  les  Béni  Akrin, 
ils  durent  ainsi  que  les  habitants  d'El  Ksar  payer  tribut  à 
Othman  le  Borgne.  Ils  se  rallièrent  d'ailleurs  à  la  nouvelle 
dynastie. 

A  peu  près  tranquilles  pendant  quatre-vingts  ans,  quoi- 
que ayant  donné  asile  vers  1260  aux  Ouled  Idriss  révoltés 
contre  le  sultan  Yacoub  Ben  Abdelhakk,  les  Ryah  furent 
ainsi  qu'Eî  Ksar  placés  en  1288  sous  le  gouvernement  des 
Ach  Quiioula  qui,  de  pères  en  fils,  assurèrent  l'adminis- 
tration de  la  région  pendant  près  d'un  siècle. 

En  i>Ho7,  dernier  soulèvement  des  Ryah.  Ce  soulèvement 
fut  réprimé  avec  une  extrême  rigueur  par  le  khalife  Abbou 
Tabed.  Les  Ryah  furent  décimés  au  point  qu'il  ne  reste 
plus  actuellement  de  cette  tribu  que  quelques  représen- 
tants disséminés  dans  les  marais  de  la  côte. 

Les  Khlott  vinrent  alors  les  remplacer  dans  le  bassin  du 
Loukkos.  Ils  y  sont  encore. 


230    ^oTICE  SUR  el  ksab  ei.  kebir  et  la  région  nu  kiiiott 

Nous  avons  laissé  les  kliloll  en  1188  ap.  J.-C.  sur  los 
bords  de  l'Ouni  Kr  Hebia  oTi  ils  avaicnl  élé  installés  pat"  le 
sultan  El  Manvour.  (lucnieis  lurbulcnls,  incapables  de 
s'attacher  à  la  lenc  (pii  leur  avait  élé  donnée,  les  Khlolt, 
pendant  un  siècle,  turent  en  contiiuielle  effervescence, 
embrassant  tantôt  la  cause  des  Alinoliades,  tantôt  la  cause 
des  Merinides,  suivant  (pie  leurs  frètes  hilaliens  —  mais 
ennemis  irréconciliables  —  les  Slian,  prenaient  paiti  pour 
les  sultans  régnants  ou  leurs  compétiteurs. 

Tantôt  vainqueurs,  tantôt  battus,  ils  avaient  vu  décliner 
leur  puissance  réelle  à  l'époque  de  leur  arrivée  sur  l'Oum 
Er  liebia,  mais  ils  constituaient  encore  en  i3o8  un  véri- 
table danger  pour  la  dynastie  régnante.  Aussi  le  sultan 
Abbou  Tabed  se  décida-t-il  à  les  réduire  définitivement. 
Vaincus,  il  les  envoya  sur  les  bords  du  Loukkos  remplacer 
les  Ryah  anéantis.  Définitivement  ralliés  aux  Merinides, 
ils  restèi'ént  fidèles  à  la  dynastie  jusqu'à  sa  chute,  malgré 
la  défaite  du  prétendant  Abbou  Salem  sous  les  murs  d'El 
Ksar  en  iSôp.  Toutefois,  lors  de  l'avènement  des  Saadiens, 
ils  reconnurent  sans  trop  de  difTicidtés  la  dynastie 
nouvelle. 

Leur  docilité  fut  de  courte  durée,  car  lors  de  la  tentative 
que  fit  le  Merinide  Abbou  llassoun  (dont  la  mère  était 
Khlolia)  pour  ressaisi)'  le  pouvoir,  ils  embrassèrent  le  parti 
du  prétendant  et  l'aidèrent  à  battre  le  sultan  saadien  El 
Mahdi  ;  mais  celui-ci,  ayant  repris  le  dessus,  se  vengea  des 
Khlolt.  De  tribu  «  guich  »,  c'est-à-dire  exem[)le  d'impôts, 
et  astreinte  seulement  à  fournir  des  contingents  en  cas  de 
guerre,  il  la  rabaissa  au  rang  de  tribu  «  naïba  »  soumise 
à  l'impôt. 

En  i5o3,  les  Portugais  déjà  installés  à  Earache  depuis 
une  cinquantaine  d'années,  remontèrent  le  Loukkos  jus- 
qu'à El  Ksar  qu'ils  surprirent  une  nuit,  mais  011  ils  ne 
purent  se  maintenir.  Attirés  par  la  richesse  de  la  région 
et  son  importance  commerciale  comme  voie  de  pénétra- 
tion vers  l'intérieur,  les  Portugais  tentèrent  à  plusieurs 
reprises  de  s'installer  dans  le  pays  ;  leurs  tentatives  ne 
furent  jamais  suivies  de  succès,  et  la  dernière  même  devait 
être  désastreuse. 

En  1578,  en  effet,  le  roi  de  F^ortugal  Dom  Sébastien, 
aidé  du  prétendant  Mohammed  XI,  remontait  le  Loukkos 
à  la  tête  d'une  armée  de  :>o.ooo  hommes,  rencontrait  au 
confluent  de  ce  fleuve  avec  l'oued  Mkhazen,  à  trois  heures 
au  Nord  d'El  Ksar,  l'armée  marocaine  commandée  par  le 


NOTICE  SUR  EL  KSAR  EL  KEBIR  ET  LA  REGION  DU  KHLOTT   231 

isultan  Abd  El  Malck  et  se  faisait  oomplètomont  battre  par 
les  Marocains.  Son  armée  était  anéantie  et  lui-même  se 
noyait  dans  l'oued  Mkhazen.  Son  allié  et  son  vainqueur 
n'avaient  i)as  été  d'ailleurs  plus  heureux  ;  Mohammed  XI 
s'était,  au  cours  de  l'action, noyé  lui  aussi  dans  le  Loukkos, 
tandis  que  le  sultan  Abd  El  Malek  malade  mourait  dans 
sa  litière  ;  il  fut  enterré  sur  le  lieu  même  de  la  bataille,  où 
l'on  peut  encore  voir  son  tombeau. 

Telle  fut  la  bataille  de  l'oued  Mkhazen,  dont  le  souvenir 
est  encore  très  vivant  dans  le  Khlott,  où  elle  est  connue 
sous  le  nom  de  ((  Bataille  des  Trois  Rois  ». 

El  Ksar  devint  dès  lors  le  point  de  rassemblement  des 
((  Moujahidin  »  (soldats  de  la  guerre  sainte)  qui,  pendant 
de  longues  années,  firent  une  guerre  sans  merci  aux  colo- 
nies européennes  et  chrétiennes  installées  sur  la  côte.  Un 
de  leurs  chefs  les  plus  célèbres  fut  le  caïd  R'aïlan,  gou- 
verneur de  la  ville  (1660). 

Les  Khlott  s'étaient  courageusement  battus  h  l'oued 
Mkhazen.  Pour  les  récompenser,  le  sultan  El  Mançour  en 
réintégra  une  partie  dans  son  guich  et  distribua  aux  autres 
de  riches  terres  dans  le  Gharb,  ^u  voisinage  du  Sebou. 
Mais,  incorrigibles,  ils  recommencèrent  bientôt  leurs 
pillages  aux  dépens  des  tribus  limitrophes,  si  bien  que  le 
Sultan  dut  leur  imposer  une  forte  contribution.  11  voulut, 
pour  les  occuper,  les  envoyer  guerroyer  dans  le  Sud  du 
Maroc.  Les  Khlott  refusèrent  et  ce  refus  leur  attira  une 
sanglante  leçon  (i584). 

Vers  i63i,  lors  de  la  marche  du  marabout  El  Ayachi 
contre  les  colonies  chrétiennes  de  la  côte,  les  Khlott  res- 
tèrent sourds  aux  appels  de  la  guerre  sainte.  Bien  mieux, 
lorsque  le  marabout,  battu  par  les  Berbères  en  i64o,  se 
réfugia  chez  eux,  ils  le  décapitèrent. 

Vers  164 1  apparaît  dans  le  bassin  du  Loukkos  une  nou- 
velle peuplade  arabe,  les  Bedaoua.  D'abord  installée  par  le 
Sultan  saadien  dans  la  tribu  des  Béni  Mesguilda,  cette 
tribu,  composée  en  grande  partie  de  chameliers,  se  dis- 
persa bientôt,  s'éparpillant  non  seulement  dans  la  plaine 
du  Loukkos,  parmi  les  Khlott,  mais  encore  dans  le  Gharb, 
au  Nord,  et  dans  le  Gharb,  au  Sud,  donnant  un  exemple 
de  cette  dissémination  dont  nous  avons  déjà  parlé. 

De  1660  à  1673,  El  Ksar  et  le  Khlott  devinrent  le  centre 
de  la  rébellion  du  célèbre  caïd  U'aïlan,  leur  gouverneur, 
contre  les  sultans  de  la  dynastie  Eilala.  Grisé  par  ses  suc- 
cès contre  les  chrétiens,  l'ancien  mojahed  voulut  s'em- 


232   NOTICE  SUR  EL  KSAB  EL  KEBIR  ET  LA  REGION  DU  KHLOTT 

parer  de  Fez  et  se  faire  proclamer  Sultan.  Après  sa  défaite, 
il  revint  à  El  Ksar  dont  il  fit  sa  capitale  du  Nord  maro- 
cain ;  il  en  fut  d'ailleurs  bientôt  chassé  par  le  sultan  Mou- 
lay  Ar  liachid. 

Obligé  de  fuir  en  Algérie,  il  revint  avec  des  troupes  tur- 
ques, mais  fut  encore  battu  à  Kl  Ksar  par  Moulay  Ismaïl, 
iils  du  précédent.  Le  caïd  fut  décapité  et  El  Ksar  vit  raser 
ses  murailles. 

Pendant  toute  la  Un  du  xv!!*"  siècle  et  la  première  moitié 
du  xviif,  le  Khlott  fut  le  théâtre  des  luttes  incessantes  des 
sultans  régnants  contre  les  prétendants.  Les  Khlott  fiuciit 
presque  toujours  les  adversaires  du  gouvernement  établi, 
malgré  les  répressions  souvent  dures  qu'ils  s'attirèrent. 

De  sanglantes  rencontres  eurent  lieu  à  El  Ksar.  En  1748, 
en  particulier,  le  gouverneur  de  la  ville  Ahmed  Ben  Akbou 
y  fut  battu  et  tué  par  le  sultan  Moulay  Abdallah  (Bataille 
du  Hinsah). 

En  1747,  la  harka  Khlott,  Tlig"  et  Bedaoua,  commandée 
par  le  pacha  Ahmed  RifTi,  fut  taillée  en  pièces  sur  les  bords 
même  du  Loukkos  et  son  chef,  fait  prisonnier,  décapité 
par  le  même  sultan.    ^ 

Vaincus,  mais  non  encore  réduits  à  l'impuissance,  les 
Khlott  se  faisaient  battre  encore  quelques  années  plus  tard 
à  Dar  Debibagh,  près  de  Fez,  par  le  sultan  Abdallah  et, 
poursuivis,  étaient  obligés  de  s'enfuir  à  Larache  et  de  se 
rendre  après  trois  mois  de  siège. 

Le  dernier  soulèvement  des  Khlott  et  d'El  Ksar  date  de 
iS^T),  sous  le  règne  de  Moulay  Abderrahmane.  Il  fut  motivé 
par  la  nomination  d'un  gouverneur  impopulaire  étouffé 
par  le  caïd  nègre  Farad ji. 

Depuis  cette  date  jusqu'à  nos  jouis,  la  tribu  des  Khlott 
n'a  cessé  d'être  calme  et  fidèle  aux  Sultans.  Elle  faisait 
partie  du  »  Bled  Maghzen  »  lorsqu'Espagnols  et  Fiançais 
vinrent  occuper  la  région  2. 


1  Les  Tlig,  tribu  arabe,  sont  intimement  mélangés  aux  Khlott.  A  quelle 
époque  sont-ils  venus  dans  le  bassin  du  Loukkos,  à  quelle  fraction  arabe 
appartiennent-ils  ?  Autant  tle  questions  auxquelles  il  n'est  pas  possible  de 
répondre,  les  historiens  arabes  étant  mtiets  à  leur  égard.  On  admet,  re  qui 
est  vraisemblable,  qu'ils  sont  hilaliens,  c'esl-à-dire  très  proehes  parents  des 
Khlott  dont  ils  partagent  depuis  fort  longtemps  la  fortune,  mais  là  s'arrêtent 
les  liypothèses.  Les  Tlig  sont  disséminés  dans  la  région,  on  en  trouve  cepen- 
dant quelques  groupements  assez  bien  marqués  au  Nord  vers  l'oued  Ayacha 
et  surtout  en  zone  française  au  pied  du  Sarsar,  dans  la  région  d'Arbaoua. 

2  Par  «  Bled  Maghzen  »  on  entend  l'ensemble  des  tribus  reconnaissant 
l'autorité  absolue  du  Sultan,  spirituelle  et  temporelle.  Ces  tribus  ont  accepté 


NOTICE  SUR  EL  KSAR  EL  KEBIR  ET  LA  REGION  DU   KRLOTT      2^3 


IX,  —  Les  Khlott  actuels 

Malgré  des  croisements  inévitables  avec  les  différentes 
races  habitant  l'Afrique  du  Nord,  notamment  les  Berbè- 
res, croisements  effectués  au  cours  de  leur  traversée  de 
la  Tunisie  et  de  l'Algérie,  et  depuis  leur  installation  au 
Maroc,  les  Khlott  et  les  Tlig  ont  conservé  jusqu'à  nos 
jours  le  type  arabe  assez  pur. 

L'homme  est  en  général  grand,  robuste  ;  la  femme  de 
taille  moyenne  et  bien  proportionnée.  Le  teint  est  brun, 
les  yeux,  la  barbe  et  les  cheveux  noirs,  le  visage  ovale,  le 
nez  fort.  Le  type  représente  en  somme  toutes  les  caracté- 
ristiques de  la  race  sémite. 

A  rencontre  de  ce  que  l'on  observe  dans  de  nombreuses 
régions  du  Maroc  oii  les  esclaves  noirs  sont  particulière- 
ment prisés  des  Marocains,  les  métis  nègres  sont  très 
rares. 

Au  point  de  vue  de  sa  mentalité,  le  Khloti  a  les  qualités 
et  les  défauts  de  l'Arabe  en  général,  les  uns  et  les  autres 
tellement  connus  qu'il  n'y  a  pas  lieu  d'insister  ici.  Ses 
mœurs  sont  celles  de  toutes  les  tribus  arabes  du  Maroc,  à 
peu  de  variantes  près. 

Cette  peuplade  autrefois  turbulente  et  indisciplinée, 
({ui  à  pu,  d'après  certains  historiens,  Marmol  et  Léon 
l'Africain  en  particulier,  mettre  en  ligne  jusqu'à  cinquante 
mille  hommes  dont  huit  mille  cavaliers,  et  qui  fut  assez 
puissante  pour  tenir  tète  aux  Sultans,  quelquefois  même 
victorieusemennt,  non  seulement  est  aujourd'hui  consi- 
dérablement réduite  comme  population,  mais  encore  est 
une  des  tribus  les  plus  pacifiques  du  Maroc,  complètement 
adonnée  à  la  culture  et  à  l'élevage,  âpre  au  gain  et  beau- 
coup plus  occupée  de  ses  intérêts  matériels  que  travaillée 
d'idées  belliqueuses. 

De  sa  valeur  guerrière  d'autrefois,  il  ne  lui  reste  plus 
grand  chose,  hormis  une  aptitude  au  vol  à  main  armée 
très  particulièrement  marquée,  si  tant  est  que  cet  amour 


inijoiiid"hui  la  domination  européenne,  puisque  celle-ci  représente  l'autorité 
(lu  Sultan.  Par  contre  le  «  Bled  Siba  »  comprend  les  tribus  qui  reconnaissent 
le  Sultan  comme  chef  religieux,  mais  non  comme  chef  politique.  Ce  sont 
celles  qui  n'admettent  pas  notre  protectorat  D'où  les  expressions  couram- 
ment employées  au  Maroc,  être  en  «  siba  »  Cètre  en  dissidence),  partir  en 
«  siba  »   (partir  en   dissidence   après   avoir  été   soumis). 


18 


234      NOTICE  SUR  EL  KSAR  EL  KEBIR  ET  LA  RÉGION  DU  KIÎLOTT 

de  la  rapine  puisse  être  considéré  comme  un  reliquat  de 
sa  combalivilé  d'antan  ;  au  surplus,  même  pour  le  vol,  le 
Khloti  monUe  généralement  peu  de  courage,  évitant  dans 
ses  expéditions  de  s'attaquer  à  qui  peut  se  défendre  avec 
quelques  chances  de  succès. 

Naguère  voisins  dangereux  pour  les  tribus  limitrophes 
qu'ils  rançonnaient  continuellement,  les  Khlott  étaient 
devenus  à  leur  tour,  avant  l'occupation  européenne,  la 
proie  des  montagnards  berbères  Ahl  Shérif  surtout,  qui 
les  razziaient  sans  pitié,  leur  enlevant  périodiquement 
femmes,  troupeaux  et  argent.  Cette  situation  précaire  n'a 
cessé  que  devant  la  présence  dans  le  pays  des  troupes  espa- 
gnoles et  françaises. 

Une  telle  déchéance  tient  à  de  multiples  causes  dont 
l'étude  n'est  pas  du  cadre  de  ce  travail,  simple  notice.  Les 
Khlott  ont  en  définitive  participé  à  la  déchéance  générale 
de  toutes  les  peuplades  arabes  de  l'Afrique  du  Nord,  déca- 
dence qui  a  fait  de  ces  peuplades  des  adversaires  peu 
sérieux  de  notre  pénétration,  nos  plus  redoutables  ennemis 
aujourd'hui  au  Maroc,  comme  autrefois  en  Algérie,  étant 
avant  tout  des  tribus  de  race  berbère  qui  ont  su  conserver 
intactes  jusqu'à  nos  jours  leur  vigueur,  leur  énergie  et 
leur  combativité. 

Les  Khlott  ne  devaient  pas,  cela  se  comprend  aisément, 
constituer  un  obstacle  sérieux  à  l'établissement  du  Pro- 
tectoiat  européen  sur  leur  territoire. 

La  conquête  du  pays  s'est  faite  sans  coup  férir,  tant  du 
côté  espagnol  que  du  côté  français,  et  si,  actuellement, 
dans  leur  zone  les  Espagnols  éprouvent  des  difficultés, 
celles-ci  ne  proviennent  que  peu  des  Khlott  et  beaucoup 
des  Djcbalas. 

Ont-ils  jamais  eu  d'ailleurs  des  velléités  de  résistance  ? 
On  ne  saurait  l'affirmer,  car,  malgré  les  nombreux  pala- 
bres motivés  par  l'approche  des  troupes  européennes, 
palabres  au  cours  desquels  ils  avaient  décidé  la  ruine  des 
chrétiens,  les  Khlott  n'ont  jamais,  du  moins  en  fait, 
esquissé  la  moindre  défense.  Peut-être,  ainsi  que  le  fait 
remarquer  très  humoristiquement  M.  Michaux-Bellaire, 
pai'lant  des  Beni-Malek  et  des  Sfian,  avaient-ils,  comme 
leurs  frères  arabes  du  Gharb,  compté,  pour  exterminer 
l'envahisseur,  beaucoup  plus  sur  la  puissance  surnaturelle 
des  marabouts  illustres  enterrés  dans  leur  pays  que  sur 
leur  propre  valeur  guerrière  :  <(  Voyant  que  les  marabouts 
ne  manifestaient  aucune  colère  et  semblaient  considérer 


NOTICE  SUR  El.  KSAR  EL  KEBIR  ET  LA  REGION  DU  KIILOTT      235 

ce  qui  se  passait  comme  émanant  de  la  volonté  divine  à 
laquelle  il  faut  se  soumettre...  (ils)  ont  fait  comme  eux'.  » 


X.  —  L'Occupation  Européenne 

On  ne  peut  considérer  comme  une  occupation  euro- 
péenne la  présence  dans  le  Sud  du  territoire,  au  milieu  de 
l'année  iQoy,  d'une  méhalla  chérifienne  commandée  par 
des  officiers  français  (Mission  militaire  française).  Il  n'était 
nullement  encore  question  de  conquête  ou  de  protectorat, 
et  cette  méhalla,  campée  à  Souk  El  Arba  du  Gharb,  se  con- 
tentait de  surveiller  la  région,  sans  jamais  passer  le 
Loukkos. 

L'occupation  européenne  date  de  l'arrivée  des  Espa- 
gnols. Ceux-ci  prenant  acte  de  notre  marche  sur  Fez, 
ayant  prétexté  l'insécurité  de  la  région,  troublée  par  les 
attaques  continuelles  d'El  Ksar  par  les  Djebalas,  débar- 
quaient à  Larache  le  lo  juin  191 1,  et  de  là  marchaient  sur 
El  Ksar  011  ils  arrivaient  le  12. 

El  Ksar  possédait  une  garnison  de  troupes  chérifiennes 
toute  disposée  à  s'opposer  à  la  marche  des  Espagnols. 
Cette  garnison,  800  askris  environ,  sous  les  commande- 
ments des  caïds  Abdessalam  El  Kholti  et  Ben  Dahan,  aurait 
eu  sans  nul  doute,  du  moins  au  début,  la  partie  belle  contre 
le   petit   détachement  espagnol   (environ    260   hommes), 
mais    leurs    chefs    ayant    demandé    des    instructions    au 
célèbre  caïd  Raisouli,   gouverneur  de  la  province,  reçu- 
rent l'ordre  de  ne  pas  bouger.  Les  Espagnols  purent  donc 
s'établir  dans  la  ville  sans  obstacle.  Toutefois,  la  méhalla 
chérifienne  s'enferma  dans  sa  caserne  et  refusa  de  quitter 
la    ville,    malgré    les    menaces    des    Espagnols.    Le    caïd 
Abdessalam  El  Kholti,  vieux  soldat  difficile  à  émouvoir, 
espérait  que  le  tabor  de  Souk  El  Arba  commandé  par  des 
officiers  français  viendrait  lui  porter  secours,  ne  pouvant 
admettre  qu'El  Ksar  dût  rester  au  pouvoir  des  Espagnols  ; 
à  toutes  les  sommations  d'avoir  à   évacuer,    il   déclarait 
qu'il    ne   quitterait   pas    El    Ksar   tant   qu'il    n'en    aurait 
reçu  l'ordre  du  Maghzen,  seule  autorité  dont  il  relevât. 
L'ordre    arriva    bientôt    au    moment    où    les    Espagnols 
allaient  employer  la  force.  La  méhalla  fut  dissoute  et  son 
caïd  se  réfugia  auprès  de  la  «  Mission  française  ». 


I  Michaux-Bellaire.  —  Notes  sur  le  Gharb  (R.   du  M.   M.,  tome  xxi). 


236      NOTICE  SUR  EL  KSAR  EL  KÉBIR  ET  LA  REGION  DU  KIILOTT 

Quelques  mois  après,  à  l'organisation  de  notre  zone,  il 
fut  nommé  caïd  du  Khlolt  français  en  récompense  de  son 
attachement  à  la  cause  française. 

La  méhalla  de  Souk  El  Arba,  à  la  nouvelle  de  l'occupa- 
tion d'El  Ksar,  s'était  mise  en  roule  vers  le  Nord.  Elle 
s'arrêta  à  Bou  Djenaa,  à  égale  dislance  d'El  Ksar  et  d'Ar- 
baoua.  La  raison  de  cette  marche  ne  pouvait  être  la  reprise 
d'El  Ksar  aux  Espagnols,  comme  l'avait  espéré  le  caïd 
Abdessalam.  La  mission  de  la  inéhalla  était  de  s'appro- 
cher du  Loukkos  et  de  mar(iuer  ainsi  la  limite  au  delà  de 
laquelle  les  Espagnols  ne  devaient  plus  empiéter.  Un 
comi)romis  entre  les  deux  nations  intéressées  étant  inter- 
venu el  la  frontière  avant  été  fixée  au  35''  parallèle,  la 
méhalla  rétrograda  et  vint  s'installer  à  Arbaoua  :  elle 
devait  y  marquei"  l'emplacement  du  poste  français  actuel 
el  y  laisseï'  un  pénible  souvenir. 

Quehjue  temps  en  effet  après  les  «  Journées  sanglantes 
de  Fez  »,  cette  méhalla  se  révoltait  contre  ses  chefs  et 
une  partie  déscitait.  La  répression  de  cette  révolte  motiva 
l'arrivée  des  premières  troupes  françaises  (juin  191 1),  qui 
fondèrent  le  poste  actuel  d' Arbaoua  dont  le  ressoil  admi- 
nistratif comprend,  en  attendant  l'occupation  d'Ouezzan, 
notre  part  du  Khlotl  et  celle  du  Djebel,  cjue  nous  ont 
donné  les  traités  (Sarsar,  Masmouda,  quelques  fractions 
des  Ahr Shérif).  La  garnison  du  poste  est  d'environ  deux 
cent  ciiKiuante  hommes,  effectif  très  suffisant  pour  tenir 
le  pays  dans  la  tranquillité  la  plus  absolue. 

A  leur  arrivée  à  El  Ksar,  les  Espagnols  y  trouvèrent  le 
caïd  Haisouli,  gouverneur  du  Khlott.  Celui-ci  ne  leur  fit 
aucune  opposition,  comme  nous  l'avons  vu,  mais  quitta 
la  ville  et  alla  s'installer  à  Arzila.  Pendant  quelque  temps, 
la  concorde  parut  régner  entre  le  chérif  et  les  nouveaux 
venus,  mais  elle  ne  devait  pas  durer,  les  exactions  de  ce 
caïd  par  trop  rapace  ayant  forcé  les  Espagnols  à  exercer 
un  coiitnMe  sur  son  adminisliation.  Peu  à  peu  la  brouille 
s'accentua.  Elle  devait  aljoutir  à  une  rupture  complète. 
Raisouli  s'enfuit  à  Tanger,  puis  gagna  le  Djebel  qu'il  sou- 
leva et  commença  ouvertement  la  lutte.  Elle  dure  encore. 

S'étant  réservé  le  Khlott  et  le  Djebel,  pendant  que  les 
Riffains  portent  leurs  effoits  contre  Télouan  et  les  ports 
de  la  côte  méditerranéenne,  depuis  plus  d'un  an,  Raisouli 
et  ses  Djebalas,  auxquels  sont  venus  se  joindre  quelques 
fiactions  Khlott  parties  en  dissidence,  tiennent  le  pays 
depuis  Sidi   El  Yamani  et  le  Tleta  de  Raïçana,   théâtre 


NOTICE  SUR  EL  KSAR  EL  KEBIR  ET  LA  REGION  DU  KHLOTT   237 

d'engagements  fréquents  et  meurtriers,  jusque  dans  les 
montagnes  des  :\hl  Shérif,  en  dépit  des  postes  établis  en 
ces  deux  points  par  les  Espagnols.  Malgré  l'effort  réel, 
sinon  suivi  de  succès,  qu'ont  tenté  ces  derniers  dans  la 
région,  la  route  de  Tanger-El  Ksar  est  encore  à  l'heure 
actuelle  complètement  coupée  par  les  rebelles  et  les  rela- 
tions avec  Tanger  sont  devenues  des  plus  dilïiciles,  sans 
qu'il  soit  possible  de  prévoir  quand  pourra  prendre  fin 
cette  situation  désastreuse  pour  le  développement  écono- 
mique du  pays.  Seule  la  zone  côtière  reste  calme. 

La  ville  d'El  Ksar  jouit  actuellement  d'une  tranquillité 
relative  qui  se  borne  d'ailleurs  à  ses  environs  immédiats 
et  qu'elle  doit  sans  doute  à  la  présence  d'une  importante, 
garnison,  qui,  à  certains  moments,  a  été  portée  jusqu'à 
8.000  hommes.  Il  n'en  a  pas  toujours  été  ainsi  au  cours  de 
de  l'année  dernière. 

Le  7  juillet  iqiS,  en  effet,  les  Djebalas  tentèrent  de  sur- 
prendre la  ville  au  petit  jour  et  arrivèrent  jusqu'à  ses 
portes.  Vne  vigoureuse  offensive  de  la  garnison  leur  fit 
lâcher  pied.  Les  assaillants  poursuivis  se  retirèrent  dans 
la  montagne  et  si,  depuis  cette  date,  ils  n'ont  plus  renou- 
velé leur  tentative,  ils  n'ont  pas  désarmé  pour  cela. 
Actuellement  encore,  toujours  travaillés  par  Raisouli,  ils 
sont  rassemblés  en  plusieurs  points  du  Djebel  à  une  ving- 
taine de  kilomèlres  tout  au  plus  d'El  Ksar,  n'attendant 
que  l'occasion  d'attaquer  à  nouveau,  pendant  que  les  frac- 
tions Khlott  dissidentes  occupent  la  région  du  Tleta  de 
T^aïçana,  pas  encore  dégagée.  Comme  nous  le  disions  plus 
haut,  si  El  Ksar  jouit  actuellement  d'une  certaine  tran- 
quillité,  cette  tranquillité  n'est  que  relative. 


XI.  —  El  Ksar  El  Kehir  (Alcazarquivir  des  Espagnols) 

Les  populations  du  Khlott  sont  assez  disséminées,  et,  en 
dehors  d'El  Ksar  qui  est  une  ville  d'une  certaine  impor- 
tance, on  ne  trouve  dans  le  pays  que  de  petites  agglomé- 
rations accrochées  aux  flancs  des  coteaux  et  atteignant 
rarement  3oo  habitants.  Les  centres  où  se  tiennent  les 
marchés  ne  sont  eux-mêmes  que  des  points  de  rassemble- 
ments hebdomadaires  auprès  desquels  vivent  quehjues 
douais,  simples  hameaux. 

El  Ksar  El  Kebîr  est  loin  d'être  aujourd'hui  aussi  floris- 
sante qu'au  siècle  passé.  Sans  cesse  mutilée  par  les  inon- 


238       NOTICE  SUR   EL  KSAR   EL  KEBIR  ET  LA   REGION   DU  KIILOTT 

dations  du  Loukkos,  (pii  la  traversait  au  niveau  du  souk 
actuel  et  que  les  habitants  ont  dû  détourner  de  son  cours 
pour  remédier  à  ses  ravages  péiiodiques  i,  la  ville  occu- 
pait autrefois  une  superficie  double  de  celle  qu'elle  occupe 
actuellement  ainsi  qu'en  témoignent  les  ruines,  exis- 
tantes encore,  des  muiailles  qui  l'encerclaient. 

«  Etalée  au  milieu  d'une  vaste  plaine. (elle)  se  prê- 
te sente  aux  voyageurs  venant  de  Tanger,  comme  une 
((  oasis  de  verdure  au  sortir  du  territoire  dénudé  où  vit  la 
«  tribu  de  Khlott.  Une  ceinture  de  jardins,  clos  en  bri- 
«  qiies  rouges,  de  jardins  d'oliviers,  d'orangers  et  de  gre- 
«  nadiers,  donne  au  premier  abord  à  la  petite  ville  un  air 
«  de  gaîté  et  de  prospérité.  Mais  l'impression  favorable 
«  cesse  dès  qu'on  pénètre  à  travers  le  réseau  de  rues 
«  étroites,  tortueuses  et  malpropres.  T.a  réalité  du  présent 
('  ne  justifie  plus  le  nom  d'El  Ksar  El  Kebir  (grand  châ- 
«  teau),  souvenir  d'un  passé  glorieux.  ^  » 

Quoi  qu'il  en  soit,  El  Ksar  est  encore  une  agglomération 
importante  d'environ  8.000  habitants,  placée  à  un  croi- 
sement de  routes  très  fréquentées  dont  l'occupation  espa- 
gnole a  fait  en  outre,  dans  ces  dernières  années,  une 
grosse  garnison. 

El  Ksar  affecte  la  forme  d'un  8  dont  l'étranglement  est 
occupé  par  le  souk  (marché).  Cette  disposition  fait  que  la 
ville  se  divise  en  deux  parties  bien  distinctes,  Âch-Charia 
(ville  des  gens  de  loi)  au  Nord,  Bab  El  Oued  Ha  porte  du 
fleuve)  au  Sud, 

La  première  comprend  surtout  les  habitations  particu- 
lières, c'est  le  quartier  aristocratique,  terme  qui  paraît 
quelque  peu  exagéré  peut-être  pour  qui  connaît  la  ville. 

Bab  El  Oued  est  le  quartier  des  commerçants,  des  maga- 
sins et  du  Mcllah  fpartie  du  quartier  réservée  aux  juifs). 

El  Ksar  est  complètement  ouverte,  les  murs  des  anciens 
remparts,  d'ailleurs  assez  éloignés  de  la  ville  actuelle,  ne 
pouvant  constituer  une  défense,  pas  plus  que  les  amas 
séculaires  d'immondices,   ou  zabalas,   souvent  hauts  de 


1  Un  barrage  «  Es  Soud  »  a  été  construit  à  environ  un  kilomètre  et  demi 
en  amont  d'El  K?ar.  L'oued  coule  maintenant  au  Sud  de  la  ville.  Ce  nouveau 
bras  qui  porte  le  nom  d'oued  Djeddid  (nouvelle  rivière)  rejoint  l'ancien  par- 
cours un  peu  en  aval  d'El  Ksar,  au  gué  des  Benatyin.  L'ancien  lit  du  Loukkos 
existe  encore,  nettement  marqué,  et  lorsque  le  fleuve  est  très  grossi,  au 
moment  des  pluies,  le  trop  plein  suit  l'ancien  lit  d'où,  à  l'heure  actuelle 
encore, des  inondations, mais  beaucoup  moins  dangereuses  que  précédemment. 

2  Michaux-Bellaire. 


à 


NOTICE  SUR  EL  KSAR  EL  KEBIR  ET  LA  REGION  DU  KIILOTT 


239 


quatre  ou  cinq  mètres  qui  s'élèvent  à  son  pourtour  immé-. 
diat.  Quoiqu'il  n'existe  plus  rien  des  anciennes  portes,  les 
rues  venant  déboucher  directement  sur  la  campagne, 
l'habitude  a  prévalu  de  dénommer  ainsi  les  issues  de  la 
ville.  Elles  sont  nombreuses.  On  en  compte  en  effet  qua- 
torze pour  Ach-Charia  et  seize  pour  Bab  El  Oued.  Toutes 
ces  portes,  excepté  celles  qui  donnent  sur  le  souk,  vien- 
nent s'ouvrir  sur  une  route  circulaire,  espèce  de  boulevard 
extérieur  qui  entoure  la  ville  en  passant  entre  elle  et  les 
zabalas  déjà  décrites. 

Lorsqu'on  traverse  El  Ksar  pour  la  première  fois,  on 
éprouve  quelque  peine,  comme  dans  toute  ville  arabe,  à 
se  diriger  dans  ce  dédale  de  ruelles  étroites,  tortueuses, 
sombres  —  parce  que  le  plus  souvent  couvertes  de  chaume 
—  et  se  ressemblant  toutes.  L'habitude  aidant,  il  est 
cependant  possible  par  la  suite  de  discerner,  dans  ce  lascis 
d'apparence  inextricable,  quelques  rues  dont  la  direction 
générale  permet  de  traverser  la  ville  en  longueur  et  en  lar- 
geur, par  le  chemin  le  plus  court  ;  artères  principales  sur 
lesquelles  viennent  se  greffer  les  voies  latérales. 

C'est  ainsi  qu'Ach-Charia  est  parcourue  par  une  rue  à 
peu  près  centrale  qui,  partant  du  souk,  entre  dans  le 
quartier  par  le  Bab  Es-Souika  (porte  du  petit  marché), 
traverse  le  souika,  suit  la  rue  des  Nyarin  (fabricants  de 
peignes  à  tisser),  arrive  à  la  place  d'El  Mers,  prend  ensuite 
la  ruelle  qui  mène  à  la  djemaa  Es-Saïda  (la  mosquée  heu- 
reuse) et  de  là,  sortant  par  la  porte  du  même  nom,  côtoie 
la  Hara  (hôpital  musulman  ruiné,  peut-être  ancienne 
léproserie)  et  bifurquant  en  deux  tronçons,  gagne  d'un 
côté  la  route  de  Larache  près  du  marabout  de  Moulay  Ali 
Bou  Ghaleb,  patron  d'El  Ksar,  et  de  l'autre  la  route  de 
Tanger  après  avoir  frôlé  le  camp  espagnol  installé  au 
Minzah. 

La  place  d'El  Mers  est  un  quadrilatère  assez  vaste  qui 
contenait  autrefois,  comme  son  nom  l'indique,  des  silos 
aujourd'hui  comblés.  De  cette  place  partent,  outre  les 
lues  que  nous  venons  de  décrire,  trois  ruelles  qui  la 
mettent  en  relations  avec  l'extérieur  à  l'Est  et  à  l'Ouest  du 
quartier. 

Bab  El  Oued  est  desservie  par  deux  rues  principales 
partant  toutes  deux  du  souk  et  rejoignant  la  route  d'El 
Ksar  à  Fez. 

La  première,  celle  de  droite,  emprunte  la  rue  des 
Chtaouyta  (fabricants  de  tamis),  sépare  les  quartiers  d'At 


240      NOTICE  SUR  ET.  KSAR  EL  KEBIR  ET  LA  REGION  DU  KlILOTT 

Tabya  cl  d  Al  Kiilliiiiiyn,  airiv(>  au  souk.  Es  Srir  devant  la 
grande  mosquée  pour  rejoindre  la  route  de  Fez  par  Bab 
El  Khanzira  (la  porte  immonde)  et  le  dar  Dabbar 
(tannerie). 

La  deuxième,  qui  constitue  la  grande  artère  commer- 
ciale, partant  du  souk,  emprunte  la  rue  El  Attarin  (é|)i- 
ciers),  passe  à  la  Kassaria  (magasin  des  étoffes),  devant 
le  fondouk  du  Sultan,  devient  la  rue  Al  Diouan,  laisse  la 
prison  à  droite  et  l'entrée  du  mellah  à  gauche  et,  arrive 
à  une  place  sur  hupielle  on  remarcjue  le  sanctuaire  de  Sidi 
Abdallah  El  Kniksy.  Là  se  trouve  l'ancien  palais  du  caïd 
R'aïlan  qui,  restauré  et  devenu  magasin  des  subsistances 
espagnoles,  faillit,  le  7  juillet  1913,  être  pris  par  les 
Djebalas.  Puis  la  voie  rejoint  la  roule  de  Fez  par  le  dar 
Dabbar. 

Le  souk  (marché)  qui  sépare  les  deux  quartiers  est  une 
place  à  peu  près  rectangulaire,  traversée  par  l'ancien  lit 
du  Loukkos,  sous  une  voûte  en  briques.  C'est  l'emplace- 
ment du  marché  hebdomadaire,  où  le  dimanche  (el  had), 
les  gens  de  la  région  viennent  vendre  leuis  produits.  Du 
souk  partent  différentes  voies  de  communications  le 
reliant  aux  routes  de  Tanger,  Fez  et  Ouezzan. 

Les  maisons  d'EI  Ksar  bâties  en  briques  cuites,  les 
parois  crépies  à  la  chaux,  sont  toutes  du  même  modèle, 
dont  les  caractéristiques  sont  :  la  monotonie,  l'aspect 
sale,  le  délabrement  et  l'air  de  vétusié.  11  n'y  a  en  effet 
que  de  vieilles  constructions  à  El  Ksar.  Inlérieurement, 
elles  procèdent  toutes  dé  la  manière  arabe,  comprenant  un 
patio  central  sur  lequel  s'ouvrent  des  chambres  rectangu- 
laires, véritables  boyaux  et  dont  l'entrée  sur  la  rue  est 
disposée  de  façon  à  intercepter  les 'regards  du  passant. 

Quelques-unes  de  ces  maisons,  la  minorité  d'ailleurs, 
montrent  un  certain  luxe  de  décorations  intérieures, 
telles  les  maisons  des  familles  algériennes  Chaouch  et 
Otta,  le  pied  à  terre  des  Cherfas  d'Ouezzan  et  la  demeure 
d'EI  Khalkhali,  ancien  gouverneur  d'EI  Ksar  et  du  Khiott 
dont  la  famille  ruinée  a  quitté  la  ville  et  qui  dans  ces  der- 
nières années  a  eu  son  heure  de  notoriété. 

Ayant  fait  retour  au  Maghzen,  à  la  rhort  du  gouver- 
neur, cette  maison  fut  vendue  par  le  sultan  Moulay  El 
Hafid,  un  peu  avant  son  abdication,  à  notre  agent  consu- 
laire de  l'époque,  M.  Boisset.  A  leur  arrivée,  les  Espagnols 
contestèrent  la  validité  de  cette  vente.  Moulay  fïafid  ayant 
fait,    ici    comme   ailleurs,    argent   des   biens    nationaux, 


NOTICE  SUR  EL  KSAR  EL  KEBIR  ET  LA  REGION  DU  KHLOTT   241 

comme  s'ils  étaient  biens  personnels  ;  ils  expulsèrent  de  la 
maison  assez  brutalemeiit  le  nouveau  propriétaire  pour  y 
installer  le  bureau  m-lilaire  des  Henseignements,  d'où 
réclamations  de  M.  Boisset,  discussions  et  démarches 
dont  il  n'est  encore  sorti,  depuis  quatre  ans,  aucune  solu- 
tion définitive,  remise  de  la  maison  ou  paiement  d'une 
indemnité. 

Les  magasins  d'El  Ksar  sont  de  petits  éventaires  à  la 
mode  arabe  ou  juive.  Ils  sont  tous  dans  le  quartier  de  Bab 
El  Oued  oii  ils  sont  groupés  par  professions  et  corpora- 
tions dirigées  par  les  amins  (experts)  sous  la  haute  autorité 
du  mohtaseb.  Les  fondouks  sont  nombreux,  appartenant, 
(pielfjues-uns  au  Maghzen,  les  autres  à  des  particuliers  ou 
à  des  zaouïas. 

El  Ksar  possède  une  trentaine  de  mosquées,  nombre  qui 
témoigne  d'un  islamisme  beaucoup  phis  fervent  qu'au- 
jourd'hui ;  beaucoup  sont  très  endommagées.  Elles  sont 
disséminées  dans  la  ville  ou  à  son  pourtour.  Trois  seule- 
ment méritent  d'être  signalées,  ce  sont  les  principalos  où 
se  fait  la  prière  du  vendredi,  la  Djemaa  El  Kebir  (grande 
mosquée),  la  Djemaa  Es  Saïda  (mosquée  heureuse)  qui 
com.mémore  la  victoire  des  musulmans  sur  les  chrétiens 
à  Larache  en  i68g  ap.  J.-C,  et  la  Djemaa  de  Sidi  Ali  El 
Azmiri  (le  syriote),  personnage  qui  n'a  laissé  aucun  sou- 
venir de  lui,  mais  dont  le  sanctuaire  est  surtout  fréquenté 
par  l'aristocratie  ksarienne. 

Les  mosquées  de  second  ordre  ne  sont  que  des  sanc- 
tuaires de  quartier  dédiés  à  des  saints  dont,  pour  la  plu- 
part, les  faits  et  gestes  sont  tombés  dans  l'oubli.  Toutes 
les  mosquées  appartiennent  aux  Habous. 

El  Ksar  fut  autrefois  un  centre  intellectuel.  La  médersa 
de  Djemaa  El  Kebir  était  très  florissante  au  xv®  siècle.  Il 
ne  lui  reste  plus  rien  de  son  ancienne  splendeur.  Rares 
sont  aujourd'hui  les  Ksariens  lettrés.  On  ne  s'occupe  plus 
de  sciences  ni  de  lettres  à  El  Ksar  et  l'instruction  des 
musulmans  se  borne  à  étudier  quelque  peu  le  livre  saint 
dans  des  écoles  coraniques  de  quartiers. 

La  population  d'El  Ksai-  est,  cela  se  comprend,  fort 
mélangée.  Elle  est  en  majeure  partie  composée  de  Khlott, 
mais  on  y  trouve  encore  des  Djebalas,  des  Riffains  origi- 
naires de  Tétouan,  des  gens  de  Fez,  représentants  de  mai- 
sons de  commerce  importantes  de  la  capitale,  et  des  juifs 
assez  nombreux,  qui  ne  présentent  pas  de  caractéristiques 
spéciales  et  qui  pratiquent  fort  librement  leur  commerce. 


242      NOTICE  SUR  EL   KSAU  EL  KEBIR  ET  LA   RÉGION   DU   KllLOTT 

A  signaler,  une  colonie  algérienne  assez  importante, 
dont  les  membres  venus  au  Maroc  lors  de  la  conquête  de 
l'Algérie  par  la  France,  comptent  aujourd'hui  parmi  les 
plus  riches  propriétaires  fonciers  de  la  ville.  Ils  sont  d'ail- 
leurs tous  sujets  français,  l'un  d'eux  même,  Abdelkrim 
Chaouch,  est  le  représentant  accrédité  de  notre  nation. 

La  population  européenne,  assez  peu  dense  avant  l'arri- 
vée des  troupes  espagnoles  (ii  Espagnols,  2  Français, 
I  Anglais,  i  Italien)  n'a  augmenté  que  pour  la  nationalité 
espagnole  qui  est  représentée  actuellement  par  un  assez 
grand  nombre  de  sujets,  petits  marchands,  dont  beau- 
coup ont  été  attirés  d'ailleurs  par  l'importance  de  la  garni- 
son. Les  intérêts  européens  sont  aux  mains  d'agents  con- 
sulaires de  la  plupart  des  grandes  puissances. 

En  dehors  de  la  poste  espagnole,  El  Ksar  possède  un 
bureau  des  postes  françaises  et  une  ligne  télégraphique 
qui  la  relie  à  Tanger  par  Larache  et  Arzila.  Tout  derniè- 
rement ce  réseau  télégraphique  a  été  soudé  au  réseau 
français  qui  se  terminait  à  Arbaoua.  Toutes  les  régions 
des  deux  zones  marocaines  sont  donc  maintenant  en  com- 
munication télégraphique  avec  l'Europe  par  Tanger.  Le 
service  télégraphique  est  ouvert  au  public. 

La  garnison  espagnole,  forte  de  4ooo  hommes  environ, 
est  installée  dans  un  vaste  camp  qui  occupe  au  Nord  d'EI 
Ksar  la  plus  grande  partie  du  Minzah,  cimetière  011  l'on 
enterre  encore,  installation  qui  n'était  pas  nécessitée 
par  des  besoins  stratégiques,  mais  qui,  par  contre, 
a  été  une  double  faute  hygiénique  et  politique,  les  musul- 
mans ayant  vu  non  sans  mécontentement  violer  leur 
nécropole. 

En  dehors  des  postes  assez  nombreux,  simples  postes 
de  surveillance  relevés  tous  les  jours,  il  n'y  a  que  peu  de 
troupes  espagnoles  casernées  dans  la  ville  même.  Une 
petite  fraction  d'infanterie  occupe  seulement  un  bâtiment 
nouvellement  construit  à  l'entrée  d'EI  Ksar,  près  de  la 
grande  mosquée.  Un  tabor  marocain,  semblable  à  nos 
troupes  chcii Tiennes,  a  été  placé  enfin  près  du  souk  dans 
un  ancien  fondouk  appartenant  au  Maghzen. 

L'occupation  espagnole  ne  paraît  pas  avoir  beaucoup 
amélioré  la  situation  matérielle  d'EI  Ksar.  La  ville  est 
toujours  aussi  mal  tenue,  et,  à  part  quelques  travaux  de 
voirie  absolument  indispensables,  il  n'a  rien  été  fait  de 
nouveau  et  aucune  amélioration  n'a  été  apportée  à  ce  qui 
existait.  Seule  une  école  hispano-arabe  a  été  construite, 


NOTICE  SUR  EL  KSAR  EL  KEBIR  ET  LA  RÉGION  DU  KHLOTT   243 

encore  assez  peu  fréquentée,  et  il  y  a  quelques  jours  i  le 
gué  du  Loukkos  a  été  aménagé  pour  permettre  le  roulage, 
aménagement  d'ailleurs  tout  provisoire. 

Au  point  de  vue  scolaire,  il  convient  de  signaler  l'inté- 
ressante tentative  faite  par  l'Alliance  Israélite  Universelle. 
Son  école,  qui  a  fort  bien  réussi,  marche  de  succès  en 
succès,  et  nous  ne  saurions  trop  féliciter  les  organisateurs, 
car  s'ils  enseignent  les  deux  langues,  espagnole  et  fran- 
çaise, ils  apprennent  surtout  à  leurs  nombreux  élèves  à 
aimer  la  France  et  à  l'admirer. 


XII.  —  La  Tie  Religieuse  du  Khlott 

Quoique  musulmans  de  la  première  heure,  puisque 
originaires  du  Hedjaz,  les  Khlott  ne  paraissent  pas  avoir 
été  autrefois  très  fanatiques.  Nous  avons  vu  en  particu- 
lier qu'ils  étaient  souvent  restés  sourds  à  l'appel  de  la 
guerre  sainte  et  que,  sauf  de  rares  exceptions  (lors  de  la 
bataille  des  «  Trois  Rois  »),  ils  ne  se  firent  en  général  pas 
remarquer  par  leur  ardeur  à  combattre  les  chrétiens. 

Les  descendants  actuels  de  la  tribu,  sans  doute  très  atta- 
chés à  leur  religion,  sont  cependant  d'un  islamisme  doux 
et  conciliant.  D'ailleurs  leur  religion  penche  beaucoup 
plus  vers  le  culte  des  saints  de  l'Islam  que  vers  celui  de 
Dieu  lui-même,  d'oii  le  nombre  élevé  de  mosquées  d'El 
Ksar  dédiées  aux  saints  et  l'énorme  quantité  de  marabouts 
et  de  koubbas  que  l'on  rencontre  sur  le  territoire  occupé 
par  la  tribu.  Il  en  existe  au  moins  cent  trente  disséminés 
dans  le  Khlott,  dont  trente  pour  la  ville  d'El  Ksar  seule. 
Une  dizaine  de  ces  marabouts  rappellent  la  mémoire 
d'hommes  ou  de  femmes  célèbres  par  leurs  vertus,  leur 
piété  ou  leurs  talents,  quelques-uns  recouvrent  les  restes 
de  ('  moujahidin  »  tombés  dans  les  batailles  contre  les 
chrétiens,  les  autres,  enfin,  et  c'est  la  majorité,  portent 
des  noms  n'évoquant  plus  aucun  souvenir  chez  les  Khlott 
eux-mêmes  qui  ignorent  tout  de  leur  origine  et  de  leurs 
faits  et  gestes  historiques. 

Parmi  les  plus  vénérés  il  convient  de  citer  le  marabout 
de  Moulay  Ali  Bon  Ghaleb,  personnage  très  savant  et  très 
vertueux,  docteur  en  théologie,  né  en  Andalousie  au 
vi"  siècle  de  l'hégire,  mort  à  El  Kgar,  dont  il  est  devenu  le 

I  Mai  TQiA. 


244   NOTICE  SUR  EL  KSAR  EL  KEBIR  ET  LA  REGION  DU  KHLOTT 

protecteur,  dctiônant  lancicn  patron  de  la  ville  Sidi  Bou 
Ahmet,  autre  lettré.  Un  autre  niaiabout  très  connu  est 
celui  de  Lalla  Kalma  El  Andalousia,  sœur  de  Bou  Ghalcb, 
(jui  s'élève  à  El  Ksar. 

Sidi  Albarek  Ben  Amrame,  dont  le  tombeau,  véritable 
mosquée,  s'élève  sur  les  bords  du  Loukkos,  à  la  pointe 
extrême  du  Sahel,  peu  après  le  confluent  de  ce  fleuve 
avec  l'oued  IMkhazen  est.  lui  aussi,  l'objet  d'une  grande 
vénération,  car  il  a  la  réputation  de  guérir  les  maladies 
nerveuses  et  de  féconder  les  femmes  stériles.  Mais  tous 
cèdent  le  pas  iî  Moulay  Bou  Selham,  le  saint  le  plus  vénéré 
des  tribus  Khlott  et  du  Charb,  sur  lequel  nous  revien- 
drons, car  il  mérite  mieux  qu'une  simple  mention. 

T.es  confréries  religieuses  sont  plus  ou  moins  bien 
représentées  dans  le  Khlott  et  à  El  Ksai-.  On  y  compte  les 
Aïssaouas,  disciples  de  Sidi  Mohammed  Ben  Aïssa,  dont 
la  zaouïa  mère  est  à  Meknès  et  que  leurs  exercices  bien 
connus  ont  rendu  célèbres  ;  des  Hamadcha,  disciples  de 
Sidi  Ali  Ben  Ilamadouch,  né  en  Ahl  Shérif,  dont  les  rites 
se  rapprochent  de  ceux  des  Aïssaouas  et  dont  le  seul  exer- 
cice consiste  à  se  frapper  le  crâne  avec  les  instruments  les 
plus  diveis  et  les  plus  résistants  ;  des  Thouama,  disciples 
de  la  confrérie  d'Ouessan  ;  des  Derqaoua  en  nombre  très 
restreint,  enfin  et  surtout  des  Djilali,  disciples  de  Moulay 
Abd(*lkader  El  Djilali,  plus  C(^nnu  hors  du  Maroc  sous  le 
nom  de  Qadiia  et  dont  le  culte,  au  moins  chez  les  adeptes 
de  la  campagne,  a  versé  dans  la  superstition,  vestige  du 
paganisme  antéislamique  :  le  saint  est  considéré  par 
eux  ccmime  le  chef  des  esprits  et  des  démons.  De  ce  chef 
se  réclame  aussi  une  autre  confrérie,  plus  superstitieuse 
encore,  celle  des  Guennaoua,  la  plupart  nègres,  dont  le 
nom  provient  peut-être  d'une  origine  guinéenne. 


XIII.  —  :»ïoiilay  Bou  Seliiam 

Sidi  Abbou  Saïd  El  Miçry  dit  Moulay  Bou  Selham, 
«  le  pèi'c  au  manteau  »,  est  le  saint  le  plus  vénéré  du 
Maroc,  depuis  Tanger  jiis(|u'au  Sebou.  Les  données  histo- 
riques sur  ce  personnage  si  célèbre  son!  |)lus  que  suc- 
cinctes et  nous  devons  nous  contenter  des  légendes  qui 
le  concernent  et  dont  la  plus  répandue  est  ra[)portée  par 
M.  Miehaux-Bellaire. 

((  Originaire    d'Egypte,    d'où    son    nom    d'El    Miçry 


NOTICE  SUR  EL  KSAR  EL  KEBIR  ET  LA  RÉOION  DU  KHLOTT   245 

u  (l'Egyptien),  Abbou  Saïd  se  serait  signalé  très  jeune 
u  par  des  miracles  et  aurait  quitté  son  pays  natal,  à  la 
((  suite  d'une  aventure  fâcheuse  avec  le  Sultan  de  son 
u  époque.  Parti  dans  la  direction  du  couchant  avec  l'idée 
«  fi\e  d'allelndre  la  «  petite  porte  »  Bab  Es  Serir  (chenal 
((  qui  réunit  la  nierdja  Ez-Zerga  à  l'Océan)  ermitage  oii 
«  était  enterré  Joseph,  fils  d'Aristote  et  qui  lui  était  indi- 
«  ([ué  comme  le  rendez-vous  des  Sages,  il  aurait  mené  une 
((  vie  errante  et  misérable  à  travers  l'Afrique  du  Nord, 
u  s'arrêtant  d'abord  à  Tunis,  puis  repartant  avec  son 
u  compagnon  Abdeljalil  At-Ta\yar,  qu'il  devait  laisser 
(<  malade  à  Masmouda  (Djebala)  jusqu'à  ce  qu'il  ait 
((  atteint  les  ruines  de  Tchemmich  (temple  du  soleil).  Al 
«  Araich,  où  il  aurait  rencontré  le  cheikh  Al  Arag  (aux 
«  yeux  bleus),  puis  Al-Tayyar  lui-même  en  train  de 
«  pêcher  dans  la  mer.  Il  aurait  été  enseveli  avec  ses  deux 
«  compagnons  sur  les  bords  de  la  merdja  Ez-Zerga.  » 

Par  suite  de  quelles  circonstances  ce  personnage  obs- 
cur est-il  devenu  lun  des  saints  les  plus  vénérés  du 
Maroc  ?  U  est  difiicile  de  répondre.  M.  Michaux-Bellaire 
pense  que  sa  célébrité  doit  tenir  au  «  souvenir  des  anciens 
Moujahidin  qui  étaient  placés  sous  la  protection  du 
marabout  égyptien  et  qui  avaient  choisi  la  vaste  plaine 
qui  l'avoisinc  comme  un  de  leurs  lieux  de  réunion  ». 

Quoi  qu'il  en  soit,  la  légende  lui  prête  des  miracles 
extraordinaires  tel  que  celui  d'avoir  entraîné  un  jour  la 
mer  à  sa  suite,  pour  démontrer  sa  puissance  à  son  com- 
pagnon At-Tayyar  encore  incrédule.  Ce  miracle  aurait 
eu  sans  nul  doute  les  effets  les  plus  désastreux  si  Lalla 
Mimouna  Taguenaout  n'était  arrivée  à  temps  de  Fez, 
accompagnée  de  jeunes  filles  de  la  capitale,  pour  arrêter 
le  flot  envahisseur.  Elle  accomplissait  par  là  la  prophétie 
du  marabout  lui-même  qui  avait  déclaré  que  la  mer  lan- 
cée à  sa  suite  ne  s'arrêterait  que  lorsque  les  jeunes  filles 
de  Fez  seraient  venues  s'y  baigner.  C'est  ainsi  que  les 
gens  du  pays  expliquent  la  formation  de  la  merdja  Ez- 
Zerga. 

Tous  les  ans,  les  tribus  du  Khlott,  du  Gharb  et  même 
des  Béni  Hassen  et  du  Djebel  se  réunissent  à  une  époque 
déterminée,  pour  faire  un  pèlerinage  au  tombeau  du 
saint,  pèlerinage  (moussem)  qui  est  l'occasion  de  grandes 
fêtes. 

Ces  fêtes  se  déroulent  d'abord  au  souk  de  Lalla 
Mimouna,  puis  à  Mechra  El  Hader  et  enfin  au  marabout 


246      .NOTICE  SUR  EL  KSAR  EL  KEBIR  ET  LA  REGION  DU  KHLOTT 

de  Moulay  Bou  Selham  lui-même.  La  réunion  est  souvent 
très  considérable,  surtout  aux  périodes  de  prospérité, 
comme  en  1914,  et  pendant  les  quatre  jours  du  Moussem 
on  dépense  les  économies  de  bien  des  semaines. 

Cette  ville  de  toile  subitement  née,  ce  camp  de  milliers 
de  tentes  qui  semblent  plantées  çà  et  là  au  gré  de  la  fan- 
taisie individuelle,  donne  une  surprenante  impression  de 
discipline  et  laisse  entrevoir  les  mystérieux  instincts  de  la 
foule. 

Personne  n'a  rien  organisé,  aucun  programme  n'a  été 
fixé,  mais  chacun  s'est  mis  pourtant  à  la  place  qui  peut 
être  la  sienne.  Des  souks  se  sont  formés, où  voisinent  les 
marchands  de  Fez  et  ceux  de  Salé.  Une  grande  place  libre, 
large  piste,  a  été  aménagée  pour  les  fantasias,  et  tout  à 
l'entour  se  groupent,  s'échelonnent  les  imposantes  tentes- 
koubbas  des  grands  caïds,  les  tentes  plus  simples  des 
notables,  une  foule  d'autres  plus  modestes  encore,  toute 
la  gamme,  jusqu'aux  plus  rudimentaires  abris,  vagues 
haïks  hâtivement  cousus,  dressés  sur  deux  branches 
ramassées  çà  et  là,  ou  tendus  d'un  buisson  à  l'autre  entre 
les  touffes  de  datura. 

Les  bruits  de  la  fête  montent,  assourdissants  :  noubas 
de  tambourins  et  de  ghaïtas  (hautbois)  qui  accompagent 
les  personnages  de  marque,  derboukas  et  chants  aigus 
des  chikhat  ;  tebels  et  flûtes  des  Aïssaouas,  des  Hamad- 
cha,  et  leurs  cris  rythmés  et  monotones.  Puis  dominant 
le  tout,  les  rafales  de  la  fantasia,  sans  cesse  reprise, 
interminable. 

Et  cette  foule  de  120.000  indigènes  et  plus,  qui  ne  sont 
venus  là  que  pour  prier  —  et  surtout  s'amuser  —  s'amuse 
de  tout,  du  spectacle,  du  mouvement,  de  l'idée  même 
qu'elle  est  en  fête.  Point  de  rixes,  point  de  disputes  ;  les 
tribus  ennemies,  les  caïds  rivaux,  les  plaideurs  en  procès 
se  rencontrent,  se  frôlent,  oubliant  leur  haine  dans  cette 
atmosphère  de  joie  i. 


XIV.  —  Organisation  Administrative 

Tribu  maghzen,  le  Khlott  avant  l'arrivée  des  Européens 
(1911)  a  subi  le  contre-coup  de  toutes  les  vicissitudes  par 


I  Pour  de  plus  amples  détails  sur  Moulay  Bon  Selham  et  son  Moussem 
cf.  Michaux-Beli.aire,  Les  tribus  arabes  de  la  vallée  du  Loukkos,  in  Archives 
Marocaines,  tome  iv,  1906. 


.\OTICF  SUR  EL  KSAR  EL  KEBIR  ET  LA  REGIOiN  DU  ERLOÏT 


247 


lesquelles  passait  le  Maghzen  lui-même.  Les  combinai- 
sons politiques,  la  puissance  tour  à  tour  accrue  ou  dimi- 
nuée des  chefs  indigènes  qui  le  commandaient,  ont  réuni 
ou  séparé  le  Khlott  d'El  Ksar. 

Tantôt  le  Maghzen  favorisant  un  gouverneur  d'El  Ksar 
ou  un  caïd  du  Khlott,  lui  confiait  ville  et  tribu,  tantôt 
appliquant  la  devise  ((  diviser  pour  régner  »  (|ui  était  bien 
la  sienne,  il  attribuait  à  plusieurs  caïds  diverses  fractions 
du  Khlott.  Tantôt  devant  des  besoins  d'argent  qu'un  per- 
sonnage puissant  pouvait  aider  à  satisfaire,  le  Khlott  et 
El  Ksar  sont  ensemble  ou  séparément  attribués  au  pacha 
de  Larache,  qui  leur  nomme  des  khalifats.  La  même  rai- 
son en  d'autres  périodes  poussait  à  la  division.  A  certains 
moments  encore,  le  Khlott  a  été  rattaché  aux  tribus  du 
Djebel. 

Parmi  les  gouverneurs  les  plus  connus  de  la  tribu,  on 
peut  citer  Ar-Reiss,  Achquiloula  et  ses  descendants,  le 
caïd  R'aïlan,  Ahmed  Rilli,  les  Astot,  puis  dans  des  temps 
plus  récents,  les  caïds  Guenouari,  Khalkhali,  El  Hadj  Bou 
Selham  Remiqui  et  enfin  le  célèbre  caïd  Raisouli. 

C'est  ce  dernier  qui,  au  moment  de  l'arrivée  des  Espa- 
gnols en  191 1,  étendait  son  autorité  sur  le  Khlott  et  tout 
le  pays  environnant.  Depuis,  le  Khlott  a  été  divisé  entre 
les  zones  d'inlluence  française  et  espagnole  et  les  deux 
parties  ont  suivi  un  sort  différent.  La  rupture  entre  les 
Espagnols  et  Raisouli  a  amené  le  remplacement  de  celui- 
ci  par  Remiqui,  ancien  caïd  du  Khlott,  tandis  que  dans  le 
Khlott  français  était  instauré  un  nouveau  caïd,  Abdessa- 
lam  El  Kholti,  ancien  commandant  des  troupes  chéri- 
fiennes  à  El  Ksar  dont  nous  avons  déjà  parlé. 

D'un  côté  comme  de  l'autre  de  la  fiontière  provisoire, 
puisque  le  tracé  n'en  est  point  encore  complètement 
décidé,  les  deux  nations  européennes  exercent  le  contrôle 
des  autorités  indigènes,  d'après  la  formule  de  l'adminis- 
tration indirecte.  Un  bureau  indigène  «  Olicina  indigena» 
est  chargé  à  El  Ksar  des  affaires  de  la  tribu  en  zone  espa- 
gnole, tandis  qu'à  peu  de  distance  le  chef  du  Rureau  des 
Renseignements  d'Arbaoua  et  le  contrôleur  civil  de  Souk 
El  Arba  de  Sidi  Aïssa  remplissent  les  mêmes  fonctions 
vis-à-vis  du  Khlott  français.  Le  Khlott  espagnol  fait  partie 
d'une  région  '  Larache-El  Ksar,  le  Khlott  français  dépend 


I   La    région   d'El    Ksar-Larache    comprend    trois    cercles    :    Larache,    Arzila, 
El  Ksar. 


248      NOTICE  SUR  EL  KSAR  EL  KEBIR  ET  LA  RÉGION  DU  KIILOTT 

du  cercle  du  Sebou  et  du  contrôle  civil  de  Kenitra,  ratta- 
chés tous  deux  à  la  région  de  Kabat. 

Quant  à  la  ville  d'El  K:sar  elle-même,  après  avoir  eu 
une  administration  du  Maghzen,  sous  la  direction  de  ses 
divers  gouverneurs,  elle  possède  actuellement  une  muni- 
cipalité organisée  par  les  autorités  espagnoles.  Cette 
municipalité  est  composée  d'Esf)agnols  et  d'un  seul  Maro- 
cain, le  caïd  Hemi(|ui,  lequel  est  presque  toujours  rem- 
placé par  son  naïb  (représentant).  Le  consul  d'Espagne 
en  a  la  présidence  et  s'occupe  de  toutes  les  questions  con- 
cernant la  ville. 

La  justice  musulmane  en  zone  espagnole  fonctionne 
sous  la  surveillance  des  Espagnols  ;  elle  est  rendue  par 
deux  cadis,  l'un  pour  El  Ksar  ville,  l'autre  pour  la  tribu 
même  des  Khlott. 

En  zone  française,  les  affaires  sont  soumises  au  cadi  de 
Mechra  Bel  Ksiri. 


XV.  —  Commerce,  Industrie,  Marchés 

Le  mouvement  commercial  dans  le  pays  des  Khlott  est 
d'une  certaine  activité,  due  en  partie  à  la  proximité  du 
port  de  Larache  qui  sert  de  débouché  à  la  jégion,  mais 
surtout  aux  relations  constantes  des  gens  de  la  tribu  avec 
leurs  voisins  de  la  montagne.  Les  souks  locaux  en  sont  la 
manifestation  la  plus  importante, 

La  réunion  des  montagnards  vêtus  de  djellabas  brunes, 
venus  à  pied  de  leurs  villages  haut-perchés,  des  femmes 
berbères  qui,  les  jambes  protégées  par  des  molletières  de 
cuir,  ont  suivi  les  rudes  sentiers  et  traversé  les  broussailles 
pour  apporter  l'huile  ou  des  œufs,  des  Arabes  du  bas  pays 
qui,  à  pied  ou  plutôt  à  âne,  échelonnant  sur  les  pistes  leur 
délilé,  ont  amené  au  souk  leur  grain  ou  leurs  bestiaux  et 
qui  restent  immobiles  en  attendant  l'acheteur,  enveloppés 
dans  leurs  vêtements  blancs,  le  mélange  des  produits 
différents  des  deux  régions,  le  contraste  des  deux  races, 
tout  cela  donne  aux  souks  du  Khlott  un  caractère  original 
et  pittoresque. 

Il  existe  chez  les  Khlott  six  marchés  dont  un  à  El  Ksar. 
Ce  sont  par  ordre  d'importance  : 

Souk  El  Tleta  Er  Raïçana  (mardi). 

Souk  El  Had  d'El  Ksar  ^dimanche). 

Souk  El  Thine  de  Sidi  El  Yamani  (lundi). 


NOTICE  SUR  EL  KSAll  EL  KEBIR  ET  LA  RÉGION   DU   KllLOTT      249 

Souk  El  Djemaa  el  Tolba  (vendredi). 

Souk  El  Tnine  Smid  El  Ma  (lundi). 

Souk  El  Tleta  d'Arbaoua  (mardi)  en  zone  française  '. 

Le  Tleta  Er  Raïçana,  fréquenté  par  les  Khloit,  les  Béni 
Gorfet,  les  gens  du  Sahel  et  les  Ahl  Shérif,  se  tient  sur 
l'oued  Raïçana  (route  d'El  Ksar  à  Tanger).  C'est  le  plus 
gros  marché  de  la  région.  Le  commerce  de  grains  et  d'ani- 
maux y  est  très  actif.  Les  transactions  atteignent 
700.000  p.  h.  environ  par  an. 

Le  souk  El  Had  est  un  marché  urbain  qui  sert  à  l'appro- 
visionnement d'El  Ksar.  La  présence  d'une  garnison  assez 
nombreuse  aurait  pu  en  faire  croître  l'importance,  mais 
les  montagnards  s'abstiennent  en  général  d'y  assister,  par, 
hostilité  ou  par  crainte  de  quelques  représailles. 

D'ailleurs  les  officiers  espagnols,  les  soldats,  l'Inten- 
dance n'achètent  rien  à  El  Ksar.  Tout  vient  d'Espagne  2. 

Il  en  est  un  peu  de  même  pour  les  autres  souks  et  de  ce 
fait  le  mouvement  de  la  région  a  plutôt  souffert  que  pro- 
fité de  l'occupation  espagnole. 

Le  Tnine  de  Sidi  El  Yamani,  à  l'embranchement  des 
routes  d'El  Ksar  à  Tanger  est  fréquenté  par  les  mêmes 
tribus  que  le  Tleta  de  Raïçana,  mais  moins  assidûment. 

Le  Djemaa  et  Tolba  visité  par  les  Ahl  Shérif,  le  Tnine 
de  Smid  El  Ma  et  le  Tleta  d'Arbaoua  sont  des  marchés 
locaux  assez  peu  actifs.  Le  Tnine  de  Smid  El  Ma,  situé  sur 
la  rive  gauche  du  Loukkos  et  qui  tire  son  nom  de  l'oued 
qui  coule  à  proximité,  réputé  pour  l'excellente  qualité  de 
ses  eaux,  ne  peut  lutter  avec  le  très  important  souk  El 
Djemaa  de  Lalla  Mimouna  qui  se  tient  à  peu  de  distance. 

A  ces  marchés  tant  ruraux  qu'urbains  sont  apportées 
toutes  les  denrées  qui  figurent  habituellement  sur  les 
souks  marocains  :  on  n'y  rencontre  pas  de  spécialités.  Les 
Djebalas  y  vendent  des  olives,  de  l'huile,  du  bois,  du 
charbon,  du  sel,  des  figues  sèches,  des  poulets,  des  œufs, 
des  fruits  suivant  la  saison,  des  oranges  et  surtout  des 
raisins,  un  peu  de  coton.  Les  Khlott  vendent  des  grains, 
du  bétail,  des  peaux  et  cpielques  poteries  grossières. 

En  dehors  d'El  Ksar,  les  Européens  ne  fréquentent  pas 


1  En  dehors  de  leurs  propres  marchés,  les  Khloft  fréquentent  les  princi- 
paux marchés  d'alentour,  ce  sont  :  Souk  El  Arba  (Ahl  Shérif,  mercredi)  ; 
Khemis  de  Bou  Djediam  (Ahl  Shérif,  jeudi)  ;  Sebt  des  Béni  Gorfet  (samedi)  ; 
Khemis  du  Sarsar  (jeudi)  ;  Tnine  de  Sidi  Amor  El  Habi  (Gharb,  lundi)  ; 
Arba  de  Sidi  Aïssa  (Gharb,  mercredi)  ;  Djemaa  de  Lalla  Mimouna  (vendredi). 

2  Michaux-Bellaire.  —  R.    du   M.   M.,  tome  xxi. 


19 


250      NOTICE  SUR  EL  KS  VR  EL  KEBIR  ET  LA  RÉGION  DU  KIILOTT 

ces  marchés,  qui  tous,  sauf  ceux  de  la  rive  droite,  sont 
en  zone  peu  sûre. 

La  perception  des  droits  de  marché  a  été  réglementée 
par  les  autorités  espagnoles.  Ces  droits  payés  par  le  ven- 
deur varient  suivant  les  marchandises  entre  5  %  et  lo  % 
du  prix  d'achat.  Ils  ont  été  fixés  à  4  p.  h.  pour  les  bœufs 
et  o  p.  h.  5o  pour  les  chèvres  et  les  moutons. 

A  El  Ksar,  concurremment  avec  les  droits  de  place  et 
de  marché,  on  paie  à  l'entrée  de  la  ville  un  droit  de  porte. 
(Les  portes  sont  tombées,  les  droits  sont  restés.)  Un  amin 
nommé  par  le  Sultan  est  chargé  de  les  percevoir  et  reçoit 
6o  réaux  hassani  d'appointements  mensuels.  Avant  l'éta- 
bUssement  du  monopole  pour  la  vente  du  kif  et  du  tabac, 
il  en  avait  le  privilège. 

Les  droits  perçus  sont  de  i  p.  h.  par  mule,  kidar  (cheval 
de  bât)  ou  chameau  chargé  et  de  o  p.  h.  5o  par  âne.  En 
échange  de  cette  somme  est  délivré  un  reçu  qui  exempte 
des  droits  de  marché. 

A  El  Ksar  même,  le  commerce  est  celui  de  toute  ville 
indigène.  Quelques  tisserands  fabriquent  des  djellabas 
blanches  assez  fines,  on  trouve  des  belras  grossières  faites 
sur  place  ;  mais  presque  toutes  les  marchandises  viennent 
de  l'intérieur,  d'Europe  par  Larache  (étoffes,  bougies, 
thé  et  sucre,  quincaillerie,  etc.),  de  Fez  pour  tous  les  pro- 
duits de  l'industrie  marocaine.  Il  y  a  dans  la  place  un 
certain  nombre  de  commerçants  en  gros  qui,  en  échange 
des  objets  manufacturés  européens,  exportent  les  grains 
et  les  laines. 

Une  seule  maison  de  commerce  française  et  une  maison 
allemande  (banque  et  commission)  représentent  l'élément 
européen.  Les  Espagnols  ont  de  petites  entreprises  :  quin- 
caillerie, menuiserie,  bâtiment,  commerce  de  détail. 


XTI.  —  Mesures 

A)  Mesures  itinéraires.  —  Comme  dans  tout  le  reste  du 
Maroc,  les  mesures  itinéraires  sont  inconnues.  Cependant, 
sur  les  routes  les  plus  fréquentées,  le  décompte  par  heure 
de  marche  est  assez  souvent  employé. 

B)  Mesures  de  longueur.  —  Les  mesures  de  longueur 
sont  : 

Le  draa  ou  coudée  :  o"5o  environ. 


NOTICE  SUR  EL  KSAR  EL  KEBIR  ET  LA  RÉGION  DU   KIILOTT      251 

Le  qala,  la  coudée  plus  deux  phalanges. 

La  gania,  ou  brasse  :  i"62  environ. 

Le  kheloua  ou  pas  :  o'"75  environ. 

Draa  et  (|ala  s'emploient  poui'  les  mesures  des  étoffes,  la 
gama  aussi  ;  la  gama  sert  à  estimer  les  hauteurs  (cons- 
tructions) et  les  profondeurs  (puits). 

C)  Mesures  de  superficie.  —  On  calcule  les  superficies 
d'après  les  quantités  de  grains  nécessaires  pour  l'ense- 
mencer ou  d'après  le  nombre  de  charrues  employées  dans 
les  labours. 

La  grande  charrue  (charrue  attelée  de  bœufs)  vaut  lo  à 
12  hectares  et  prend  i4  à  i5  mouds  de  semence. 

La  moyenne  charrue  (chevaux  et  mulets)  vaut  8  à 
lo  hectares  et  prend  7  à  8  mouds  de  semence. 

La  petite  charrue  (âne)  vaut  6  à  8  hectares  et  prend  4  à 
5  mouds  de  semence. 

D)  Mesures  de  capacité.  —  Comme  mesure  de  capacité 
pour  les  grains  on  utilise  le  «  moud  »  dont  la  valeur  est 
très  variable  suivant  les  localités,  mais  les  récipients  qui 
représentent  cette  mesure  sont  très  répandus  et  les  habi- 
tants en  connaissent  les  valeurs  relatives. 

A  El  Ksar,  l'amin  en  fixe  et  en  vérifie  les  dimensions. 
Le  «  moud  »  d'El  Ksar  contient  !iô  kilos  de  blé.  Celui  de 
Tleta  de  Raïçana  vaut  les  trois  quarts  du  précédent,  soit 
environ  3v^  kilos.  Dans  le  Djebel,  le  «  moud  »  n'est  que  de 
22  kilos  environ.  On  emploie  les  fractions  de  moud  :  1/2, 
i/!i,  1/8,  jusqu'à  1/16  et  i/Sa  (nous-tomni,  robia,  tomni). 

Pour  le  sel  en  grains,  les  mêmes  mesures  sont  utilisées  ; 
le  sel  gemme  se  vend  au  morceau  de  gré  à  gré. 

Le  seul  liquide  qu'on  ait  à  mesurer  est  l'huile.  Sur  les 
marchés  on  la  vend  sans  mesure  fixe  à  prix  débattu  et 
par  très  petites  quantités  (^par  kas,  verre)  ;  on  la  pèse  à 
El  Ksar. 

E)  Mesures  de  poids.  —  Ces  mesures  varient  avec  les 
denrées.  On  distingue  le  retal  el  attari  (livre  d'épicier)  qui 
équivaut  au  poids  de  20  réaux  hassani,  soit  5oo  grammes; 
le  retal  el  bakkali  (livre  de  matières  grasses),  utilisé  pour 
le  savon,  le  beurre,  l'huile,  le  miel,  qui  équivaut  au  poids 
de  3o  réaux  hassani  ;  le  retal  el  khaddari  (livre  de  légu- 
mes) qui  équivaut  à  ho  réaux  hassani. 

A  El  Ksar,  les  bouchers  emploient  la  «livre  de  boucher» 


252      NOTICE  SLR  EL  KSAR  EL  KÉBIR  ET  LA  REGION  DU   KIILOTT 

égale  à  la  précédente,  tandis  que  sur  les  marchés  la  viande 
s'achète  par  morceau  de  gré  à  gré. 

Toutes  ces  mesures  sont  vérifiées  et  surveillées  à  El  Ksar 
par  un  molhasseb  qui  est  également  chargé  de  l'établis- 
ment  de  la  mercuriale. 

La  charge  de  mothasseb  était  autrefois  achetée  au 
Maghzen  par  le  paiement  d'une  somme  de  3  à  /j.ooo  réaux 
hassani.  Un  traitement  de  2  réaux  hassani  lui  était  servi 
sur  le  budget  des  habous.  11  va  sans  dire  qu'il  prélevait 
sans  contrôle  les  droits  les  plus  arbitraires  ;  actuellement 
il  touche  90  léaux  hassani  par  mois  et  il  se  borne  à  fixer 
les  prix. 

Dans  la  ville,  les  boutiques  sont  soumises  à  une  patente, 
les  marchands  d'huile,  savon,  etc.,  paient  i  peseta  has- 
sani par  semaine,  les  boulangers  2  pesetas  hassani,  les 
bouchers  2  pesetas  hassani  par  mouton  et  12  à  iT)  pesetas 
hassani  par  bœuf. 

XYII.  —  Habitation 

Les  Khlott  étant  une  tribu  de  pasteurs  habitent  sous  la 
la  tente  '  plus  fréquemment  qu'il  n'est  d'usage  dans  les 
tribus  voisines.  Pourtant  l'étendue  relativement  faible 
des  terrains  de  pacage  leur  permet  une  certaine  stabilité, 
qui  explique  la  présence  dans  leurs  douars  de  nouala  =, 
mêjne  de  maisons.  Ces  maisons  sont  des  construc- 
tions très  simples  dont  les  murs  en  briques  séchées  au 
soleil  floub)  sont  protégées  par  un  toit  de  chaume  très 
incliné. 

Quelques  riches  propriétaires  possèdent  une  ou  deux 
maisons  5  une  pièce  bâtie  en  briques  cuites  (dar  El  Hadj 
Bou  Selham  El  Bou,  dar  El  Harrak,  dar  douar  Haoura, 
dar  Sldi  Djelloul  El  Ilesbahi  à  Gla,  dar  El  Bou  Djena  sur 
la  route  d'Arbaoua  à  El  Ksar,  dar  El  Bouhati  sur  le  Djebel 
Gheni,  etc.). 

La  pierre  de  construction  manque  à  peu  près  totalement 
chez  les  Khlott  ;  c'est  ainsi  que  la  ville  elle-même  d'El  Ksar 


1  Les  tentes  sont  faites  de  flij,  bandes  de  haïdelli  (fibre  de  palmier  nain 
tressée)  de  o°6o  de  large  qui  valent  o  p.  h.  5o  la  coudée. 

2  Les  nouala  sont  des  huttes  constituées  par  un  canevas  de  roseaux  recou- 
vertes d'un  toit  de  jonc.  Rondes  ou  carrées,  ces  huttes  peuvent  être  assez 
confortables.  Leur  mobilité  relative,  leur  prix  assez  modique  (12  r.  h.  en 
moyenne)   en   font  un   mode   d'habitation  tout  à   fait  pratique. 


NOTICE  SUR  EL  KSAR  EL  KEBIR  ET  LA  RÉGION  DU  KIILOTT      253 

est  toute  entière  bâtie  en  briques  cuites.  Ces  briques  peu 
épaisses  (longueur  o™2o,  largeur  o™i2,  épaisseur  o"o2) 
sont  fabriquées  sur  place  au  prix  de  7  p.  h.  le  mille. 

Le  sable  est  abondant  dans  quelques  carrières  et  surtout 
dans  l'oued  Loukkos  et  ses  affluents.  La  chaux  est  faite 
autour  d'El  Ksar  avec  des  pierres  provenant  du  Djebel 
Gheni,  elle  vaut  4  p.  h.  à  4  P-  h.  5o  le  quintar  ou  le 
((  chouari  »  (60  à  80  kilos).  Elle  sert  à  faire  les  enduits 
des  murailles  tant  à  l'intérieur  qu'à  l'extérieur,  car  les 
revêtements  en  plâtre,  assez  répandus  dans  certaines 
régions,  sont  ignorés  ici. 

Les  maisons  sont  recouvertes  en  tuiles  courbes  qui  rap- 
pellent de  très  près  celles  qui  sont  utilisées  en  Provence, 
et  les  toits  en  tuiles  à  fortes  pentes  d'El  Ksar,  les  nids  de 
cigogne  qui  s'élèvent  en  grosses  touffes,  les  cigognes  elles- 
mêmes  perchées  sur  les  pignons,  donnent  à  la  ville  un 
aspect  tout  particulier  et  unique  au  Maroc. 


XTin.  —  Loyers 

Les  loyers  des  maisons  dans  El  Ksar  varient  entre  8  et 
20  r.  h.  par  mois  ;  la  plupart  des  maisons  sont  à  un  étage, 
desservies  par  un  escalier  intérieur  donnant  sur  la  cour 
ou  patio.  Dans  toutes  il  y  a  un  puits  (eau  à  9  mètres)  et 
dans  quelques-unes  une  citerne.  Les  puits  sont  maçon- 
nés, le  prix  de  leur  construction  varie  de  120  à  i3o  r.  h.  i. 

Les  boutiques  se  louent  suivant  le  quartier  de  2  à  5  r.  h. 
Comme  partout  au  Maroc,  ce  sont  de  simples  cases  larges 
de  2  mètres  à  S'^ôo  et  élevées  de  o™5o  au-dessus  du  sol,  oîj 
les  commerçants  ne  séjournent  que  pendant  les  quelques 
heures  consacrées  aux  affaires. 


XIX.  —  Production  Agricole  du  Pays 

V 

Ainsi  qu'il  a  été  exposé  au  paragraphe  YI,  la  région  du 
Khlott  convient  très  bien  à  la  plupart  des  cultures,  tant 
par  le  climat  tempéré  dont  elle  jouit,  que  par  la  nature 
de  ses  terrains. 

La  culture  dominante  est  celle  du  «  dra  »,  sorte  de  sor- 


I  A  cause  de  la  qualité  sélénlteuse  de  l'eau  des  puits,  l'eau  de  citerne  est 
préférée  pour  les  travaux  de  la  maison  (lavage,  etc.). 


254   NOTICE  SUR  EL  KSAU  EL  KÉBIR  ET  LA  REGION  DU  KULOTT    ^ 

gho  qui  réussit  particulièrement  bien  dans  les  parties 
<(  fraîches  »  des  tenains  touars. 

L'orge,  le  maïs  et  le  blé  sulïîsent  pour  nourrir  la  tribu, 
tandis  que  le  sorgho  s'exporte  en  grande  quantité  vers 
l'intérieur  (Cherarda,  Béni  Ahsen,  etc.).  Quelques  cour- 
tiers en  achètent  sur  les  marchés  pour  en  faire  la  vente  ou 
l'exportation  par  mer  à  Larache,  mais  ce  mouvement  est 
insignifiant  par  rapport  à  celui  de  l'intérieur. 

Les  autres  produits,  plus  ou  moins  abondants  au  Maroc, 
mil,  fèves,  pois  chiches,  coriandre,  fenugrec,  ne  se  ren- 
contrent que  peu  dans  le  Khlott,  où  ils  sont  comme  le  blé 
et  l'orge  réservés  à  la  consommation  locale. 

Les  jardins  nombreux  et  très  beaux,  déjà  signalés, 
donnent  de  bonnes  oranges  ',  des  grenades,  des  figues  et 
quelques  légumes,  mais  l'abondance  des  jardins  aux  envi- 
rons de  Larache,  les  faibles  besoins  d'Ll  Ksar,  ravitaillé 
déjà  par  les  montagnards,  la  grande  distance  des  autres 
agglomérations  et  la  lenteur  des  communications  ne  per- 
mettent pas  actuellement  le  développement  plus  grand 
des  cultures  maraîchères. 

Quant  au  bétail,  qui  constitue  une  des  richesses  du  pays, 
on  ne  peut  plus  comme  autrefois  le  diriger  sur  Tanger 
pour  l'exportation.  L'insécurité  de  la  route  a  rejeté  vers 
l'intérieur  la  surproduction  assez  abondante  et  les  bœufs 
du  Khlott  approvisionnent  surtout  les  marchés  ruraux 
d'oii  les  acheteurs  en  gros  les  envoient  sur  Meknès,  Rabat 
et  les  ports  de  la  côte.  Le  mouvement  par  Larache  est  rela- 
tivement faible. 


XX.  — :  Colonisation  Européenne.  Avenir  du  Pays  Khlott 

Peu  de  régions  actuellement  occupées  du  Maroc  parais- 
sent plus  désignées  à  la  colonisation  que  le  Khlott,  pays 
éminemment  propre  à  la  grande  culture  et  à  l'élevage, 
pays  dont  la  population  pacifique  et  âpre  au  gain  est 
accessible  à  des  idées  nouvelles. 

Jusqu'ici,  malheureusement,  la  situation  politique  de 
la  zone  espagnole,  qui  comprend  la  plus  grande  partie  du 
Khlott,  n'a  pas  encore  permis  la  mise  en  valeur  par  les 
Européens  de  cette  riche  contrée. 


I  Les    oranges    se    vendent    en    gros    avant    la    récolte    au    prix    moyen    de 
7  p.  h.  5o  par  arbre. 


NOTICE  SUR  EL  KSAR  EL  KEBIR  ET  LA   REGION  DU  KIILOTT      255 

Sans  doute  les  Khlotl  sont  soumis,  mais  les  Djcbalas 
ont  longtemps  tenu  la  campagne,  leur  menace  plane  tou- 
jours sur  le  pays,  et  l'on  comprend  que  dans  ces  condi- 
tions, les  tentatives  de  colonisation  soient  difficiles  sinon 
impossibles. 

Quelques  Européens  ont  fait  des  essais  d'association 
avec  les  indigènes  du  Khlott  pour  l'élevage  du 
bétail  ;  essais  timides  et  à  juste  titre  !  Quelles  garanties 
espérer  contre  le  vol  dans  un  pays  si  voisin  des 
montagnards  farouchement  hostiles,  dont  les  bandes, 
hier  encore,  parcouraient  la  région,  malgré  la  présence 
des  ro.ooo  soldats  espagnols  de  Larache,  Arzila  et  El  Ksar. 

Echappant  à  la  convoitise  des  montagnards,  protégés 
contre  les  rapines  par  l'horreur  religieuse,  les  troupeaux 
de  porcs  peuvent  se  développer  en  toute  sécurité  et  l'éle- 
vage du  porc,  entrepris  par  quelques  colons,  est  particu- 
lièrement florissant. 

Des  sociétés  importantes  possèdent  entrée  El  Ksar  et 
Larache  des  propriétés  qu'elles  n'exploitent  pas,  attendant 
des  temps  meilleurs  pour  les  mettre  en  valeur  ou  les 
revendre.  Mais  ce  que  peuvent  faire  des  Sociétés  à  gros 
capitaux,  des  particuliers  ne  peuvent  se  le  permettre,  aussi 
la  petite  colonisation  n'existe-t-elle  pas  encore  dans  la 
région  du  Khlott  espagnol. 

En  zone  française  du  moins  le  calme  est  complet  et  la 
sécurité  absolue,  mais  celte  zone  est  si  peu  étendue  qu'on 
ne  peut  lui  demander  un  grand  développement  de  la 
colonisation. 

Toute  la  vie  du  pays  est  en  zone  espagnole.  Espérons 
que  les  efforts  de  nos  voisins  arriveront  bientôt  à  rendre 
la  liberté  à  une  région  qui  ne  demande  qu'à  vivre  et  à 
produire,  à  qui  son  sol  et  son  climat  promettent  un  avenir 
d'exemplaire  prospérité  i. 

Arbaoua,  le  i6  mai  igi/i. 
D'  Gustave   BERTRAND,  Etienne   DELHOMME, 

Médecin  Major  de  2^  classe.  Capitaine  d'Infanterie  H.  C, 

Chef  du  Service  médical  indigène  Chef  du  Bureau  des  Renseignements 

du  district   d'Arbaoua.  d'Arbaoua. 


I  Voir  Bibliographie,  p.  266. 


256   NOTICE  SUR  EL  KSAR  EL  KÉBIR  ET  LA  REGION  DU  KHLOTT 


Documents  et  Ouvrages  consultés 


Archives  du  Bureau  des  Renseignements  d'Arbaoua. 
As-Slaouy.  —  Kitab  cl  Istisca  (Trad.  Houdas). 
Aubin.  —  Le  Maroc  d'aujourd'hui. 

Besnier.  —  Géographie  ancienne  du  Maroc  (Archives  Maro- 
caines, tome  i). 

—  Recueil    des    inscriptions    anciennes    du    Maroc    (Archives 
Marocaines,  tome  i). 

De  Cuevas.  —  Etude  sur  la  géographie  du  Pachalik  de  Larache 

(en  espagnol). 
El  Bekri.  —  Description  de  l'Afrique  septentrionale  (Trad.  de 

Slane,  Journal  Asiatique,  tome  i). 
Edrissi.   —  Description   de   l'Afrique   et  de  l'Espagne   (Trad. 

Dorey  et  Genje). 
EzziANi.  —  Le  Maroc  de  i63i  à  1818  (Trad.  Houdas). 
De  Foucauld.  —  Reconnaissances  au  Maroc. 
Ibn  Khaldoun.  —  Histoire  des  Berbères  (Trad.  Slane), 
LÉON  l'Africain.  —  Description  de  l'Afrique. 
Marmol.  —  L'Afrique. 
Michaux-Bellaire  et  Salmon.  —  Les  tribus  arabes  de  la  vallée 

du  Loukkos  (Archives  Marocaines,  tome  iv,  igoB). 
Michaux-Bellaire.  —  Notes  sur  le  Gharb  (Revue  du  Monde 

Musulman,  tome.xxi,  191 2). 
Michaux-Bellaire.  —  Le  Gharb  (Archives  Marocaines,   igiS). 
Miller.  —  Mélanges  de  philologie  et  d'épigraphie. 
MouLiÉRAS.  —  Le  Maroc  inconnu. 
Miller.  —  Claudii  Ptolemei,  géographie. 
Noshet  El  Hadi.  —  Xrad.  Houdas. 
TissoT.  —  Recherches  sur  la  géographie  comparée  de  la  Mau- 

rétanie  Tingitane. 

—  Itinéraire   de   Tanger  à   Rabat  (Bulletin   de   la   Société   de 
Gcographie  de  Paris,  1875). 


HOTE  SÛR  liES  TOlViUliI  ET  QÛEliQUES  RUlflES 

des  Environs  d'El  Aïoun  Sldi  MellouK  (Maroc  Oriental) 


LES   TOIILI 


Le  présent  travail  fait,  en  quelque  sorte,  suite  à  ceux 
que  j'ai  déjà  eu  l'occasion  de  publier  sur  les  tumuli  de  la 
région  d'Oudjda  i. 

Les  anciens  tumuli  sont  fort  nombreux  aux  environs 
d'El  Aïoun  Sidi  Mellouk  2  et  il  eût  été  désirable  de  fouiller 
quelques-uns  d'entre  eux.  Lorsqu'en  igiS  j'ai  sillonné 
cette  région,  mes  occupations  ne  m'ont  malheureusement 
pas  permis,  d'entreprendre  des  travaux  qui,  pour  être 
menés  à  bien,  auraient  exigé  des  stationnements  d'une 
certaine  durée.  Dans  ces  conditions,  je  n'ai  pu  prendre 
que  des  notes  sommaires  sur  les  tumuli  rencontrés  et  dont 
la  liste  est  donnée  ci-après. 

La  plupart  des  tumuli  sont  de  forme  circulaire  et  ont 
un  faible  relief  ;  leur  diamètre  dépasse  rarement  6  mètres- 
et  il  est  souvent  très  inférieur  à  ce  chiffre.  Aux  alentours 
de  l'Ain  Tameur  il  y  a  un  tumulus  en  forme  de  croissant  ; 
ce  type  est  tout  à  fait  exceptionnel. 

Emplacement   des  Tumuli 

Les  tumuli  figurant  sur  la  liste  suivante  sont  répartis 
en  sept  gToupes  correspondant  à  des  zones  distinctes  ; 
dans  chaque  groupe  leur  énumération  est  faite  de  l'Est  à 


r  I,.  VoiNOT.  —  Les  tumuli  d'Oudjda  et  .Yo/e  sur  les  tumuli  et  quelques 
vestiges  d'anciennes  agglomérations  de  la  région  d'Oudjda,  in  Bull.  Soc.  de 
Géogr.  et  d\Arch.  d'Oran,  igio  et   1910. 

9.  On  trouve  également  un  (.ertain  nombre  de  tumuli  aux  environs  de 
Taourirt  et  dans  la  Tafrata,  entre  Taourirt,  Debdou  et  la  Moulouya  ;  il  ne 
paraît  pourtant  pas  y  exister  des  groupements  aussi  importants  que  ceux 
constatés   en   quelques   points   des   régions   d'Oudjda   et   d'El   Aïoun. 


20 


258     TLMULI  ET  RUINES  DES  ENVIRONS  d'eL  AÏOIJN  SIDI  MELLOUK 

l'Ouest,  en  indiquant  les  particularités  de  ceux  qui  diffè- 
rent de  l'habituel  tas  de  pierres  à  peu  près  informe. 

Les  indications  fovnnies  sur  les  emplacements  des 
tumuli  doivent  permettre  de  les  retrouver  facilement  sur 
le  terrain,  à  condition  bien  entendu  de  prendre  un  guide 
du  pays  ;  la  carte  du  Maroc  (3riental  au  1/200.000^  (feuille 
Oudjda-Taourirt)  peut  d'ailleurs  être  utilement  consultée, 

1°  Extrémité  ouest  de  la  plaine  dWngad  : 

Un  grand  tumulus  en  mauvais  état,  dit  Kerkour  el 
Youhdi  I,  au  sommet  d'un  monticule  bien  connu  situé 
entre  Naïma  et  l'oued  Bouredim,  à  environ  deux  cents 
mètres  au  Sud  de  la  piste  carrossable  d'Oudjda  à  El  Aïoun 
Sidi  Mellouk. 

Très  nombreux  tumuli  au  lieu  dit  Blad  Djouhal  2.  Blad 
Djouhal  se  trouve  à  hauteur  de  Kerkour  el  Youhdi,  entre 
la  piste  carrossable  d'Oudjda  à  El  Aïoun  et  les  hauteurs 
obliques  à  cette  piste  qui  forment  vers  l'Est  l'amorce  de 
la  colline  de  Megacem.  C'est  au  pied  de  ces  hauteurs  que 
les  tumuli  sont  les  plus  denses  ;  quelques-uns  ont  de 
grandes  dimensions  et  beaucoup  sont  en  mauvais  état. 

Un  tumulus  plat  à  environ  un  kilomètre  au  Nord  de  la 
gare  dite  de  l'Oued  Bouredim  (elle  se  trouve  en  réalité  sur 
l'oued  Atchane)  et  à  deux  cents  mètres  au  Sud-Ouest  des 
ruines  du  lieu  dit  Djeboub  ^. 

Un  tumulus  à  la  pointe  ouest  de  l'ondulation  située 
entre  Djeboub  et  la  cuvette  dite  Feidet  Roumana,  à  proxi- 
mité de  l'oued  Alchane  et  sur  sa  rive  droite. 

Deux  tumuli  au  Nord  et  près  de  la  voie  ferrée,  à  environ 
un  kilomètre  à  l'Ouest  de  la  gare  dite  de  l'Oued  Bouredim. 

Plusieurs  tumuli  peu  nets  à  côté  et  à  l'intérieur  des 
ruines  d'Ighqour,  à  Ras  Bouredim. 

Un  tumulus  vers  la  lisière  sud-ouest  de  la  plaine  d'An- 
gad  et  au  Nord  du  djebel  Bou  Ladjeraf ,  au  pied  d'un  petit 
monticule  dit  Ilarich  el  Abada. 

2°  Djebel  Bon  Ladjeraf  et  pied  de  cette  montagne  à  la 
lisière  sud  de  la  plaine  d'Angad  : 

Un  petit  tumulus  sur  la  rive  gauche  de  l'oued  Bou  Lad- 
jeraf, entre  les  deux  falaises  les  plus  élevées  de  la  monta- 


1  Kerkour  el  Youhdi,  signifie  le  tas  de  pierres  du  juif. 

2  Blad  Djouhal  ;  le  territoire  des  païens  de  l'époque  antéislamique. 

3  Djeboub   :  mot  arabe  qui   signifie  citerne.   Il   y   a  en  effft  une   ancienne 
citerne  en   cet  endroit. 


TUMULl  ET  RUINES  DES  ENVIRONS  d'eL  AÏOUN  SIDI  MELLOUK     259 

gne  de  même  nom,  sur  le  territoire  de  la  fraction  des 
Haddiine  de  la  tribu  des  Béni  bou  Zeggou. 

Un  tumulus  au  débouché  nord  du  Teniet  el  Hamra, 
près  de  la  berge  gauche  du  ravin  dit  Châabet  el  Hamra  ». 

Assez  nombreux  tumuli  sur  le  sommet  et  les  flancs  des 
contreforts  nord  du  Bou  Ladjeraf,  contreforts  dénommés 
Koudiet  Hadjate  par  les  Berbères  et  Koudiet  El  Ariana  par 
les  Arabes.  Quelques-uns  de  ces  tumuli  sont  très  grands  ; 
certains  ont  été  violés. 

3°  Ligne  de  hauteurs  au.  Nord-Ouest  de  la  plaine  d'An- 
gad  entre  cette  plaine  et  l'oued  Bouredim  : 

Deux  tumuli,  dont  l'un  dit  Kerkour  Mohammed  ben 
Sliniane,  au  sommet  d'un  monticule  à  l'Est  de  la  colline 
de  Megacem. 

Un  tumulus  à  Teniet  Ghenem  2  dans  le  Megacem. 

4°  Plaine  ondulée  autour  d'El  Aïoun  Sidi  Mellouk  : 

Plusieurs  tumuli,  dont  un  très  grand,  dans  un  col  du 
flanc  droit  de  la  vallée  de  l'oued  Bouredim,  à  côté  du  sen- 
tier dit  Mehadj  Gleb  et  Tsour  et  à  hauteur  du  point  de  la 
rivière  appelée  Gueltet  es  Souk. 

Trois  tumuli  sur  une  ondulation  au-dessus  de  Djorf  el 
Abiod,  sur  la  rive  gauche  de  l'oued  Bouredim. 

Un  tumulus  sur  une  ondulation  entre  la  dépression  dite 
Hofret  en  Nâàma  et  l'oued  Bouredim. 

Deux  tumuli  dans  un  petit  col  de  la  même  ondulation, 
à  côté  du  sentier  dit  Trik  Chouala.  Un  de  ces  tumuli  était 
constitué  par  un  simple  cercle  fait  d'une  rangée  de 
grandes  dalles  fichées  ;  quelques-unes  de  ces  dalles  seule- 
ment restent  debout. 

Deux  tumuli  sur  la  même  ondulation,  à  la  pointe  d'un 
saillant  qui  domine  la  vallée  de  l'oued  Bouredim,  au  lieu 
dit  El  Hadab,  près  et  à  l'Est  d'un  sentier  conduisant  d'El 
Aïoun  Sidi  Mellouk  à  Massine  chez  les  Béni  Mahiou.  Un 
de  ces  tumuli  est  surmonté  d'une  haouïta  en  pierres 
sèches  élevée  ultérieurement  par  les  populations  musul- 
manes de  la  région. 

Un  tumulus  au  sommet  de  la  même  ondulation,  entre 
les  précédents  et  le  mekam  de  Sidi  Slimane,  lequel  paraît 
d'ailleurs  avoir  été  construit  sur  un  ancien  tumulus. 


1  Tenir!  el  Hamra  :  le  col  rouge. 

2  Teniel  Ghenem  :  le  roi  du  troupeau  de  moutons. 


260     TUMULI  ET  RUINES  DES  ENVIRONS  d'eL  AÏOUN  SIDI  MELLOUK 

Trois  luniuli  au  sommet  d'une  ondulation  située  dans 
l'angle  nord-est  formé  par  la  piste  d'El  Aïoun  Sidi  Mellouk 
à  Massine  par  l'Ain  Deila  et  le  thalweg  de  l'Ain  Délia. 

Un  cercle  de  grosses  pierres  au  pied  d'une  petite  falaise 
du  flanc  sud  de  la  précédente  ondulation. 

Un  tuiimlus  à  l'Est  de  la  piste  d'El  Aïoun  Sidi  Mellouk 
à  Massine  par  l'Ain  Defla,  entre  cette  source  et  l'ondula- 
tion qui  est  au  Sud-Ouest  du  mekam  de  Sidi  Slimane. 

Un  tumulus  sur  la  berge  droite  de  l'Ain  Délia,  dite  aussi 
Ain  Ilamdoun  >,  près  de  la  piste  conduisant  à  El  Aïoun 
Sidi  Mellouk. 

Une  dizaine  de  tumuli  sur  la  berge  gauche  de  l'Aïn 
Deila,  certains  entourés  de  dalles  fichées  ;  trois  de. ces 
tumuîi  se  trouvent  à  l'Ouest  de  la  piste  d'El  Aïoun  Sidi 
Mellouk,  les  autres  sont  à  l'Est. 

Un  petit  tumulus  sur  la  piste  conduisant  d'El  Aïoun 
Sidi  Mellouk  aux  montagnes  des  Zekara,  à  environ  deux 
cents  mètres  au  Sud-Est  de  la  voie  ferrée,  à  hauteur  du 
passage  à  niveau  d'Ain  El  Hadjar. 

Deux  tumuli  sur  une  ondulation  du  flanc  gauche  de 
Saheb  cd  Dib,  au  Sud-Est  d'El  Aïoun  Sidi  Mellouk  et  près 
d'Aïn  El  Hadjar. 

Un  tumulus,  dit  Redjem  el  Hadab,  sur  une  petite  ondu- 
lation au  Sud  et  à  environ  un  kilomètre  de  l'oued  Boure- 
dim,  un  peu  à  l'Ouest  de  la  piste  d'El  Aïoun  Sidi  Mellouk 
à  Massine  par  l'Ain  Délia. 

Un  tumulus  sur  une  légère  ondulation  de  direction 
Nord-Sud,  qui  se  trouve  à  l'Ouest  d'El  Aïoun  Sidi  Mellouk 
et  à  hauteur  de  l'Ain  Defla  sur  l'emprise  de  la  future  voie 
ferrée.  (La  ligne  télégraphique  est  construite  sur  le  bord 
de  cette  emprise,  elle  ne  suit  pas  les-  sinuosités  de  la  voie 
provisoire  de  0^60. ) 

Un  tumulus  violé  sur  une  ondulation  de  direction  Est- 
Ouest,  au  Sud  de  la  piste  d'El  Aïoun  Sidi  Mellouk  à  l'Ain 
Tameur  et  sensiblement  au  milieu  de  l'intervalle  séparant 
ces  deux  points. 

Deux  tumuli  sur  une  ondulation  de  la  rive  gauche  de 
l'oued  Bouredim,  au  Nord  de  l'Ain  Tameur. 

Trois  tumuli  au  sommet  du  flanc  droit  du  ravin  de  l'Aïn 
Tameur,  au-dessus  de  la  source. 


I   Du  nom  du  caïd  de  la  tribu  des  Spdjnn,  qui  a  rn'é  le?  jnrdins  voisins  de 
celle  source. 


TUMULI  ET  RUINES  DES  ENVIRONS  DEL  AÏOUN  SIDI  MEIXOUK     2(31 

Un  tumiilus  violé,  au  sommet  du  flanc  gauche  du  ravin 
de  l'Ain  Tamcur,  en  face  des  précédents. 

Deux  petits  tumuli  sur  une  ondulation  pierreuse,  entre 
le  ravin  de  l'Ain  Tameur  et  l'oued  Bouredim  et  vers  leur 
confluent. 

Deux  tumuli  au  pied  sud-est  des  hauteurs  dites  Chebket 
Aïn  Tameur. 

Un  tumulus  sur  la  berge  droite  de  l'oued  Ouararia.  On 
appelle  ainsi  la  partie  de  l'oued,  figurant  sur  les  cartes  sous 
le  nom  d'hsane,  qui  se  trouve  en  aval  des  jardins  de 
Mahiriz. 

Trois  tumuli  sur  une  petite  arête  rocheuse  au  milieu  des 
jardins  de  jNIahiriz  ;  il  y  a  une  haouïta  en  pierres  sèches 
sur  l'un  d'eux. 

5"  Région  très  coupée  au  Sud  de  la  plaine  d'El  Aïoun 
Sidi  Mellouk,  entre  cette  plaine  et  les  montagnes  des  Béni 
bou  Zeggou  : 

Trois  tumuli,  dont  un  violé,  sur  la  crête  à  l'Est  de  l'oued 
Teghanimt  (oued  Israne  des  cartes),  à  hauteur  de  la  colline 
de  Ouefa  Mâalla,  que  la  carte  au  1/200.000®  dénomme  à 
tort  Kef  Mahalla. 

GrouiDe  de  six  tumuli  à  environ  deux  cents  mètres  de  la 
berge  droite  de  l'oued  Teghanimt,  à  hauteur  de  Quefa 
Mâalla. 

Un  tumulus  sur  la  berge  droite  de  l'oued  Teghanimt, 
à  hauteur  de  la  pointe  est  de  Quefa  Mâalla. 

Assez  nombreux  tumuli, dont  beaucoup  en  très  mauvais 
état,  sur  les  pentes  est  de  Quefa  Mâalla,  à  proximité  d'an- 
ciens vestiges  d'agglomération. 

Quelques  tumuli  sur  l'ondulation  de  la  rive  droite  de 
l'oued  Irsane,  à  Ras  Irsane. 

Tumuli  douteux  dans  les  ruines  de  Kerkour  Aghrem, 
au  Sud  de  Ras  Irsane  ^. 

Quelques  tumuli  peu  nets  dans  les  ruines  de  Ras  Irsane  ; 
il  y  a  doute  également  et,  pour  être  fixé,  il  faudrait  faire 
des  fouilles  '. 

Deux  tumuli  près  de  la  croisée  de  la  piste  d'Azelaf  à  El 
Aïoun  Sidi  Mellouk  et  de  celle  dite  Trik  Hacira.  Le  plus 
petit  a  une  bordure  de  pierres  enchâssées  à  plat  dans  le 
sol,  le  plus  grand  est  entouré  de  dalles  fichées. 


I  V.  infra,  Emplacement  et  nature  des  vestiges  d'anciennes  agglomérations. 


262     ÏIMULI  ET  RUINES  DES  ENVIRONS  d'eL  AÏOUN  SIDI  MELLOUK 

Assez  nombreux  lumuli  sur  les  pentes,  à  la  pointe  ouest 
de  Quefa  Màalla. 

Quelques  tumuli  au  pied  des  pentes  est  du  Rich  el 
Hammam. 

Quelques  tumuli  au  pied  nord  du  Rich  cl  Hammam.  ^ 

Un  tumulus  violé  sur  le  sommet  est  de  la  hauteur  dite 
Tafezate,  au  Nord  du  Rich  el  Hammam. 

Un  tumulus  avec  bordure  de  grosses  pierres  enchâssées 
dans  le  sol,  sur  le  flanc  droit  du  ravin  d'Ain  Diab,  un  peu 
en  amont  de  la  source. 

Un  tumulus  sur  la  hauteur  au-dessus  et  au  Sud  d'Ain 
Diab  :  il  semble  en  exister  d'autres  en  cet  endroit,  mais 
les  amoncellements  de  pierres  sont  si  informes  qu'on  ne 
peut  pas  l'allirmer  avec  certitude. 

Quelques  tumuli,  pas  très  nets,  sur  les  hauteurs  entre 
les  lieux  dits  Rokna  et  Takhellabt. 

Deux  tumuli  au  sommet  du  flanc  gauche  de  l'oued  Met- 
lili,  au  Nord  et  près  de  la  piste  carrossable  d'El  Aïoun  Sidi 
Mellouk  à  Mestigmar. 

6°  Ride  rocheuse  fermant  vers  VOuest  la  plaine  d'El 
Aïoun  Sidi  Mellouk  : 

Plusieurs  tumuli  sur  le  liane  est  de  Chebket  Aïn 
Tameur,  face  à  la  source.  L'un  d'eux  a  la  forme  d'un  crois- 
sant ;  la  bordure  est  constituée  par  deux  rangées  de  pierres 
plantées  de  champ  qui  rappellent  les  vieux  murs  berbères. 

Un  tumulus  au  sommet  de  la  pointe  nord  de  la  hauteur 
dite  Tazenaït,  au-dessus  de  l'oued  Rouredim  et  sur  sa  rive 
gauche,  au  Nord  de  Chebket  Aïn  Tameur. 

Trois  tumuli,  dont  un  violé,  sur  la  même  hauteur,  au- 
dessus  de  la  piste  d'El  Aïoun  Sidi  Mellouk  à  la  zaouïa  de 
Mouley  Tayeb. 

Deux  tumuli  violés  à  côté  de  la  dite  piste,  au  pied  de  la 
hauteur  de  Tazenaït. 

Un  tumulus  sur  la  pointe  nord  de  Chebket  Aïn  Tameur, 
au-dessus  de  la  même  piste  ;  ce  tumulus  se  trouve  à  mi- 
pente. 

Un  tumulus  au  sommet  de  Chebket  Aïn  Tameur,  à  côté 
d'une  haouïta  en  pierres  sèches  dite  Roudet  Sidi  Ahmed. 

Quatre  tumuli  à  une  cinquantaine  de  mètres  à  l'Est  de 
Zebboudj  Rema  ;  cet  olivier  est  situé  sur  la  piste  allant  de 
l'oued  Bouredim  à  Teniet  Dokkara  chez  les  Béni  Mahiou, 
un  peu  à  l'Est  de  la  hauteur  de  Tazenaït. 


ÏUMULI  ET  RUINES  DES  ENVIRONS  d'eL  AÏOUN  SIDI  MELLOUK     263 

Un  tumulus  à  quelques  centaines  de  mètres  à  l'Ouest  de 
Zebboudj  Rema,  sur  la  même  piste. 

Deux  tumuli  sur  la  berge  gauche  de  l'oued  El  Ham- 
mam, au  pied  nord  de  la  gara  Sba. 

Deux  tumuli  au  pied  sud  de  la  même  gara. 

7°  Vallée  de  l'oued  Clieriâa  ^  et  du  cours  inférieur  de 
l'oued  Bouredim,  vers  le  confluent  de  ces  deux  rivières  : 

Deux  tumuli  violés  sur  une  ondulation  rocheuse  au 
Nord  -Est  de  Haouïtet  Sidi  Mokhfi  (maisonnette  en  maçon- 
nerie), à  la  lisière  du  Bled  Màader. 

Deux  tumuli  sur  une  crête  rocheuse  au  milieu  d'El  Màa- 
der, au  Sud-Ouest  de  Haouïtet  Sidi  Mokhfi. 

Un  tumulus  sur  les  pentes  est  du  même  mouvement  de 
terrain. 

Deux  tumuli  au  sommet  est  de  Koudiet  Sidi  Lakhdar, 
hauteur  qui  se  trouve  au  Sud  d'El  Màader. 

Sept  tumuli,  certains  violés,  sur  l'ondulation  rocheuse 
dite  Ragueb  Haouïtet  Sidi  Lakhdar,  entre  la  haouïta  et 
l'oued  Bouredim. 

Un  tumulus  sur  la  crête  entre  Koudiet  Derbane  et 
Hachiet  el  Bekkaya,  sur  la  rive  droite  de  l'oued  Bouredim 
et  à  hauteur  des  jardins  de  Cheriaa. 

Quelques  tumuli  dans  la  plaine  de  rive  gauche  de  l'oued 
Bouredim  dite  Kessaria,  à  TEst  des  jardins  de  Cheriâa. 

Remarcjiies  Générales 

La  plupart  des  tumuli  des  environs  d'El  Aïoun  Sidi  Mel- 
louk  sont  établis  sur  les  flancs  des  hauteurs  rocheuses,  au 
sommet  d'ondulations  de  natiue  analogue  et  sur  des 
berges  d'oueds  ;  au  milieu  des  plaines  peu  accidentées  il 
est  très  rare  d'en  trouver  dans  les  bas-fonds. 

Les  tumuli  sont  presque  toujours  situés  au  voisinage 
immédiat  ou  à  proximité  des  sources  et  des  oueds  à  eau 
courante,  sauf  dans  l'Angad  et  sur  la  lisière  de  cette  plaine 
où  les  points  d'eau  sont  espacés.  Autour  d'El  Aïoun  Sidi 
Mellouk  les  tumuli  sont  particulièrement  denses,  car  cette 
zone  est  largement  pourvue  en  eau. 


I  L'oued  Cheriâa  est  la  partie  inférieure  du  cours  de  l'oued  appelé  Irsane 
à  sa  source.  La  réunion  de  l'oued  Cheriâa  et  de  loued  Bouredim  forme  l'oued 
Ksob,   affluent   de   droite   de   la   Moulouva. 


264     TUMVLl  ET  RUINES  DES  ENVIRONS  d'eL  AÏOUN  SIDI  MELLOrK 


LES  VESTIGES   D'AX  lENNES   A(-i(iL()Mï:RATIONS 


Il  existe,  vers  El  Aïoun  Sidi  Mcllouk,  des  vestiges  d'an- 
ciennes agglomérations  semblables  à  ceux  déjà  signalés 
dans  la  région  d'Oudjda  '  ;  les  observations  faites  sur  cette 
nouvelle  série  de  ruines  sont  exposées  dans  les  pages  qui 
suivent. 

Les  fondations  des  murs  ont  été  exécutées  d'après  le 
même  procédé,  qui  consistait  à  planter  dans  le  sol  des 
pierres  de  champ,  en  les  disposant  sur  deux  rangées  paral- 
lèles plus  ou  moins  espacées.  Les  quelques  variantes  ren- 
contrées dans  certaines  ruines  semblent  pouvoir  être  con- 
sidérées comme  des  perfectionnements  du  procédé  pri- 
mitif ;  elles  marquent  sans  doute  l'acheminement  vers  le 
mode  de  construction  moderne. 

Emplacement  et  iVatiire  des  Testiges 

Ighqour.  —  Les  ruines  de  ce  nom  sont  situées  au  lieu 
dit  Ras  Bouredim,  entre  la  voie  ferrée  et  le  Trik  es  Soltane 
(route  carrossable  d'Oudjda  à  El   Aïoun   Sidi  Mellouk). 


I  L.  VoiNOT.  —  Noie  sur  les  iuniuU  et  quelques  vestiges  d'anciennes  agglo- 
mérdlions  de   la  région  d'Oudjda,   loc.   cil. 

J'ajouterai  que,  depuis  l'époque  de  cette  publication,  j'ai  aperçu  une 
meule  au  sommet  du  Doif  cl  Akhdar,  sur  la  rive  gauche  de  l'oued  Isly,  à 
environ  cinq  kilomètres  au  Nord-Ouest  d'Oudjda.  Elle  se  trouve  à  une  dizaine 
de  mètres  du  bord  de  la  falaise  et  à  hauteur  du  rentrant  qui  en  marque  sensi- 
blement le  milieu. 

La  meule,  taillée  dans  une  roche  noirâtre,  est  brisée  en  deux  ;  les  mor- 
ceaux ont  l'un  le  tiers,  l'autre  les  deux  tiers  du  volume  total.  La  patine  est  très 
accusée,  le  travail  grossier  et  la  forme  peu  régulière  ;  le  trou  est  pourtant 
percé  à  peu  près  au  centre. 

Les  dimensions  moyennes  sont  les  suivantes  :  diamètre  de  la  meule,  o'°46  ; 
épaisseur,  o^aô  ;  diamètre  du   trou  central,  o'°i3 

Cette  meule  a  beaucoup  d'analogie  avec  celle  d'El  Djemdjem,  chez  les 
Zekara,  mais  elle  est  plus  petite. 

J'ai  cru  distinguer  quelques  traces  d'anciens  murs  aux  abords  de  )a  meule, 
mais  c'est  si  peu  net  qu'il  ne  m'est  pas  possible  d'être  afTirmatif.  Les  tumuli 
sont  d'ailleurs  très  nombreux  sur  le  Djorf  el  Akhdar.  (Voir  L.  Voinot,  Les 
tumuli  d'Oudjda,  loc.  cit.) 

Enfin,  j'ai  également  rencontré  d'autres  vestiges  d'anciens  murs  dans  la 
cuvette  d'Oudjda,  à  l'Est  et  à  proximité  des  jardins,  en  travers  de  la  piste 
qui  conduit  de  Bab  Sidi  Abdelouahab  à   Zoudj  el  Beghal. 


TUMLLI  ET  RLINES  DES  ENVIRONS  d'eL  AÏOUN  SIDI  MELLOUK     265 

L'agglomération  qui  a  existé  en  ce  point  était  assez  impor- 
tante, car  les  ruines  couvrent  une  dizaine  d'hectares  sur 
une  ondulation  de  la  rive  gauche  de  l'oued  Bouredim,  à 
environ  cinq  cents  mètres  de  l'endroit  où  apparaît  l'eau. 


N.M 


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Fig.  I.  —  Croquis  au  1/4.000'  des  Ruines  d'Ighqour 


Ces  ruines  sont  informes  ;  en  les  examinant  avec  atten- 
tion on  y  distingue  néanmoins  une  sorte  d'enceinte,  dont 
le  tracé  est  très  irrégulier  et  qui  présente  à  l'Est  une  lacune 
d'environ  quatre-vingts  mètres  (fig.  i).  Sur  certains  points 


266     TUMULI  ET  RUINES  DES  ENVIRONS  d'eL  AÏOUN  SIDI  MELLOUK 

de  l'enceinte  et  à  l'intérieur,  en  B.  il  y  a  de  gros  amas  de 
pierres  et  des  vestiges  de  fondations  qui  se  recoupent  en 
tous  sens  ;  en  G  les  traces  de  constructions  sont  rares,  on 
voit  un  fouillis  de  pierres  paraissant  séparé  de  l'enceinte 
principale  et  au  milieu  duquel  il  semble  exister  des  ves- 
tiges de  maisons.  Un  puits  comblé  se  trouve  dans  la 
partie  C,  où  sont  également  quelques  térébinlhes  déchar- 
nés appelés  par  les  indigènes  Botmat  Khaterana. 

Les  murs  de  l'agglomération  d'Ighqour  sont  complète- 
ment détruits  ;  d'autre  part  les  fondations  ne  sont  pas 
toujours  bien  nettes,  parce  que  les  pierres  avec  lesquelles 
elles  ont  été  construites  sont  généralement  de  faible 
dimension  ;  on  rencontre  pourtant  de  ci  de  là  quelques 
très  grandes  dalles.  L'épaisseur  de  la  muraille  qui  semble 
avoir  servi  d'enceinte  varie  de  o™6o  à  i  mètre  ;  elle  était 
très  irrégulièrement  bâtie.  Les  fondations  de  cette  muraille 
ont  parfois  une  disposition  particulière  (fîg.  2)  ;  sur  l'un 
des  parements  les  dalles  sont,  comme  à  l'ordinaire,  mises 
de  champ  et  bout  à  bout,  tandis  que  du  côté  opposé  elles 
sont  également  placées  de  champ  mais  perpendiculaire- 
ment aux  premières. 


Fig.   2.  —  Plan  au    il  ko'  de   Fondations  a  Ighqour 

Il  y  a  quelques  anciens  tumuli  à  l'intérieur  et  aux  abords 
des  ruines  d'Ighqour. 


Ain  Defla  ou  Aïn  Hamdouii.  —  Au  pied  du  flanc  droit 
du  ravin  de  l'Ain  Defla,  en  face  de  la  source,  on  aperçoit 
des  traces  très  effacées  d'anciennes  constructions  ;  paral- 
lèlement au  thalweg  les  ruines  paraissent  s'étendre  sur 
une  centaine  de  mètres,  leur  largeur  ne  dépasse  pas  une 
vingtaine  de  mètres. 

Les  fondations  comportent  deux  rangées  de  pierres 
complètement  enchâssées  dans  le  sol  ;  il  n'existe  pas  de 
dalles  fichées  faisant  saillie. 


TUMULI  ET  RUINES  DES  ENVIRONS  d'eL  AÏOU.N  SIDI  MELLOUK      267 

Les  anciens  tumuli  sont  assez  nombreux  à  l'entour  de 
ces  ruines. 

.4m  Tameur.  —  Les  ruines  se  trouvent  sur  la  rive  droite 
de  l'oued  Aïn  Tameur,  légèrement  en  aval  de  la  source  et 
sur  l'ondulation  couronnée  par  la  haouïta  en  pierres 
sèches  dite  Sbâa  Rouadi  ;  de  nombreux  chiffons  sont  pla- 
cés sur  cette  haouïla  en  guise  d'ex-voto. 

Il  existe  en  cet  endroit  des  vestiges  de  murs  très  peu 
visibles  ;  les  labours  ont  tout  bouleversé  et,  actuellement, 
la  terre  recouvre  en  partie  les  pierres  avec  lesquelles  elle 
forme  des  bourrelets  qui  jalonnent  la  direction  de  ces 
murs.  Les  pierres  faisant  saillie  sont  fortement  patinées. 

L'agglomération  d'Aïn  Tameur  s'étendait  à  l'Est  du 
monticule  de  Sbâa  Rouadi,  mais,  de  ce  côté,  les  travaux 
de  culture  ont  fait  disparaître  les  ruines  ;  il  subsiste  pour- 
tant un  petit  fragment  très  net  de  fondations  en  dalles  de 
champ,  le  long  d'une  canalisation  servant  à  l'irrigation 
des  jardins. 

On  voit  quelques  anciens  tumuli  auprès  des  ruines 
d'Aïn  Tameur. 

Monticule  au  Sud  de  i'Aïii  Tameur.  —  Ce  monticule  est 
situé  au  Sud  des  jardins  voisins  de  la  source  et  à  environ 
six  cents  mètres  de  ces  jardins  ;  on  remarque  au  sommet 
du  monticule  les  vestiges  d'une  petite  enceinte  rectangu- 
laire ayant  approximativement  vingt-cinq  mètres  de  lon- 
gueur sur  vingt  mètres  de  largeur. 

Les  fondations  sont  identiques  à  celles  existant  près  de 
l'Ain  Detla.  Les  pierres  affleurent  le  sol,  leurs  alignements 
sont  réguliers  et  les  assises  des  faces  opposées  de  chaque 
mur  sont  parfois  presque  jointives  ;  une  fouille  rapide 
effectuée  en  travers  des  fondations  fait  néanmoins  recon- 
naître deux  rangées  de  pierres  distinctes,  dont  l'intervalle 
est  rempli  avec  du  gros  gravier.  Les  fondations  ont  beau- 
coup d'analogie  avec  celles  de  certaines  maisons  des  vil- 
lages berbères  actuels. 

Quefa  Mâalla.  —  Les  ruines  sont  à  la  pointe  nord-est  de 
la  colline  de  Quefa  Mâalla,  entre  deux  ravineaux  qui  con- 
vergent vers  le  bas  des  pentes  ;  elles  affectent  la  forme 
d'un  triangle  irrégulier  d'environ  trois  cents  mètres  de 
base  sur  deux  cents  mètres  de  hauteur  :  le  sommet  de  ce 


268     TVMVLI  ET  RUINES  DES  ENVIRONS  d'eL  AÏOUN  SIDI  MELLOIK 

triangle  fait  face  à  l'oued  Teghanimt,  dans  lequel  il  y  a 
de  l'eau  courante  à  deux  ou  trois  kilomètres  en  aval. 

On  ne  distingue  pas  toujours  très  nettement  les  vestiges 
des  murs,  dont  la  largeur  était  en  moyenne  de  o"8o  ;  en 
plan  leurs  lignes  avaient  une  certaine  régularité.  Ces  murs 
semblent  avoir  appartenu  à  des  maisons  et  à  des  cours  ; 
une  de  ces  dernières  était  d'assez  grandes  dimensions  et 
formait  im  carré  d'environ  trente  mètres  de  côté.  Dans  la 
partie  basse  des  ruines  il  existait  probablement  quelques 
maisons  isolées. 

Les  fondations  étaient  en  pierres  de  champ,  ainsi  que 
le  montrent  les  doubles  rangées  de  dalles  visibles  en  plu- 
sieurs points  ;  à  la  place  des  dalles  on  trouve  quelquefois 
de  petits  blocs  de  rochers  qui,  en  raison  de  leur  épaisseur, 
couvrent  toute  la  surface  du  mur.  Les  pierres  des  ruines 
de  l'agglomération  de  Quefa  Mâalla  sont  fortement 
patinées. 

En  dehors  de  cette  agglomération  on  observe  égale- 
ment, sur  la  croupe  située  à  l'extrémité  est  de  la  colline, 
les  restes  d'une  ancienne  maison  ;  les  dalles  des  fonda- 
tions sont  en  partie  arrachées  mais  l'une  d'elles,  qui  est 
encore  en  place,  mesure  environ  o"8o  de  haut  sur  plus 
d'un  mètre  de  long. 

11  y  a  d'anciens  tumuli  à  proximité  et  peut-être  à  l'inté- 
rieur des  ruines  de  Quefa  Mâalla. 

Ain  Diab. —  La  source  sourd  au  fond  d'un  thalweg  dont 
les  flancs,  de  nature  pierreuse,  sont  en  pente  douce.  Sur 
le  flanc  droit,  à  une  centaine  de  mètres  en  aval  du  point 
d'émergence  de  l'eau,  on  aperçoit  des  vestiges  de  cons- 
tructions qui  s'étendent  parallèlement  au  thalweg  ;  ces 
ruines  ont  une  longueur  d'environ  quatre  cents  mètres  et 
une  largeur  maxima  de  cent  mètres. 

Les  murs  ont  été  construits  sur  des  fondations  en  dalles 
fichées  ;  leur  tracé  est  en  général  très  sinueux.  Quelques- 
uns,  d'allure  plus  régulière,  ont  des  fondations  faites  avec 
deux  rangées  de  larges  pierres  ;  un  mur  de  ce  genre,  per- 
pendiculaire au  thalweg,  se  trouve  à  l'extrémité  ouest  des 
ruines.  La  plupart  des  murs  ont  servi  à  enclore  des  cours, 
sauf  dans  la  direction  de  la  source  où  il  y  avait  un  groupe 
de  maisons  au  sommet  de  l'ondulation. 

D'anciens  tumuli  existent  aux  environs  des  ruines 
d'Ain  Diab. 


ÏUMULI  ET  RUINES  DES  ENVIRONS  d'eL  AÏOl  N  SIDI  MELLOUK     269 

Mahii'iz.  —  Une  petite  arête  rocheuse,  à  côté  de  laquelle 
passe  la  piste  conduisant  à  Gheriàa,  pointe  au  milieu  des 
jardins  irrigués  de  Alahiriz,  sur  la  rive  gauche  de  l'oued 
de  même  nom  qui,  à  son  origine,  est  appelé  oued  Irsane. 
Sur  le  glacis  nord  de  cette  arête,  glacis  couvert  de  dalles 
luisantes,  on  observe  des  vestiges  épais  d'anciens  murs 
revêtus  d'une  forte  patine. 

Les  fondations  sont  :  partie  en  dalles  de  champ,  partie 
en  larges  pierres  enchâssées  dans  le  sol,  qui  ne  laissent 
aucun  intervalle  entre  les  deux  rangs  destinés  à  supporter 
les  assises  supérieures  du  mur  ;  ce  dernier  procédé  tend  à 
se  rapprocher  de  celui  actuellement  en  usage  chez  les  Ber- 
bères. Au  pied  nord-est  de  l'arête,  on  reconnaît  les  traces 
de  deux  maisons  et,  un  peu  plus  loin,  le  long  d'une  cana- 
lisation, il  subsiste  encore  des  fragments  de  fondations  en 
pierres  levées. 

Auprès  des  ruines  de  Mahiriz  il  y  a  quelques  anciens 
tumuli. 

Ras  Irsane.  —  Les  ruines  sont  situées  au  bord  de  l'oued 
Irsane,  entre  la  berge  droite  de  cette  rivière  et  la  crête  de 
l'ondulation  voisine  ;  elles  forment  une  bande  étroite, 
étranglée  vers  le  milieu,  qui  commence  à  la  haouïta  de 
Sidi  Mohammed  et  s'étend  jusqu'à  environ  quatre  cents 
mètres  en  aval.  A  Ras  Irsane,  l'oued  coule  sur  une  certaine 
distance. 

Sur  toute  la  surface  des  ruines  il  y  a  d'assez  grandes 
quantités  de  pierres,  mais  les  empiacements  des  murs  sont 
difficiles  à  retrouver  parce  que  la  charrue  a  dispersé  leurs 
débris  ;  il  semble  néanmoins  que  cette  agglomération 
était  constituée  par  de  grandes  cours  dans  lesquelles  se 
trouvaient  peut-être  quelques  maisons.  A  la  pointe  nord- 
est  des  ruines,  des  fondations  en  grandes  dalles  fichées 
restent  encore  debout  à  côté  d'un  vieux  silo  ;  elles  ont 
appartenu  à  un  mur  d'angle. 

Quelques  tas  de  cailloux  informes,  qui  font  saillie  au 
milieu  des  ruines  de  Ras  Irsane,  paraissent  être  d'anciens 
tumuli. 

Kerkour  Aghrem.  —  Kerkour  est  un  mot  arabe  qui 
désigne  les  tas  de  pierres  servant  de  signaux  ou  bien  ceux 
élevés  dans  un  but  religieux  ;  Aghrem  est  un  mot  berbère 
employé  dans  quehiues  dialectes,  mais  pas  dans  la  région 
d'El  Aïoun  Sidi  Mellouk,  qui  signifie  agglomération  de 


270     Tl  MILI  ET  RUINES  DES  ENVIRONS  d'eL  AÏOUN  SIDI  MELLOUK 

maisons,  village  ;  Kerkour  Aghrem  peut  donc  se  traduire  : 
les  tas  de  pierres  du  village. 

Les  ruines  de  cette  ancienne  agglomération  s'étalent 
sur  le  sommet  de  la  pointe  sud  d'une  large  ondulation  de 
la  rive  gauche  de  l'oued  Irsane,  à  environ  un  kilomètre  et 
demi  au  Sud-Est  de  la  haouïta  de  Sidi  Mohammed  et  par 
conséquent  des  ruines  de  Ras  Irsane.  Sur  l'emplacement 
de  Kerkour  Aghrem  il  n'y  a  pas  d'eau  ;  les  habitants 
devaient  sans  aucun  doute  aller  s'approvisionner  à  la 
rivière.  Dans  leur  ensemble,  les  ruines  ont  à  peu  près  la 
forme  d'un  triangle  de  quatre  cents  mètres  de  base  sur 
trois  cents  mètres  de  hauteur  ;  le  sommet  de  ce  triangle 
est  tourné  vers  l'Ouest. 

A  Kerkour  Aghrem,  il  existe  des  amas  de  pierres  très 
importants  provenant  des  murs  éboulés  et  qui  cachent 
souvent  les  fondations  ;  le  tracé  de  ces  murs  manque  de 
régularité.  La  muraille  qui  paraît  avoir  été  utilisée 
comme  enceinte  décrit  de  nombreuses  sinuosités  ;  elle  a 
quelquefois  plus  d'un  mètre  d'épaisseur.  Les  ruines  com- 
prennent une  majorité  de  cours  entourées  de  murs  de  o"8o 
de  largeur  moyenne  ;  on  y  distingue  aussi  des  vestiges  de 
maisons  de  petites  dimensions,  dont  les  murs  n'ont  que 
o^oo  à  o"6o  de  large.  Des  traces  d'ouvertures  faisant  com- 
muniquer les  cours  entre  elles  sont  encore  visibles  de  ci 
de  là.  A  la  lisière  est  des  ruines,  il  y  a  plusieurs  vieux  silos. 

Bien  que  cela  n'apparaisse  pas  toujours  nettement,  les 
fondations  ont  été  faites  par  le  procédé  de  la  double  ran- 
gée de  pierres  de  champ  ;  en  divers  points  les  dalles  sont 
d'ailleurs  restées  debout  et,  sur  l'enceinte,  on  en  voit  quel- 
ques-unes qui  sont  très  grandes.  On  trouve  également  des 
fondations  en  pierres  très  épaisses,  mais  ces  pierres  sont 
placées  sur  deux  rangs  comme  les  dalles. 

Certains  tas  de  pierres  de  Kerkour  Aghrem  sont  proba- 
blement d'anciens  tumuli. 

Ksir  Aadja.  —  Cette  agglornération  porte  le  même  nom 
que  celle  déjà  signalée  dans  la  région  d'Oudjda,  sur  le 
haut  oued  Isly,  au  pied  est  de  la  montagne  des  Zekara  i. 
Dans  la  région  d'El  Aïoun  Sidi  Mellouk,  on  prononce  plu- 
tôt Ksir  que  Ksar  (un  ksar  est  un  village  fortifié)  ;  le  sens 
du  mot  Aadja  n'est  pas  connu.  Les  ruines  sont  situées  sur 


I  L.  VoiNOT.  —  Note  sur  les  tumuli  et  quelques  vestiges  d'anciennes  agglo- 
mérations de  la  région  d'Oudjda,  loc.   cit. 


TUMIILI  ET  RUINTS  DES  ENVIRONS  D  EL  AlOt  N  SIDI  MELLOUK 


271 


le  sommet  et  au  pied  d'un  piton  rocheux  de  la  rive  gauche 
de  l'oued  Chéri Aa,  à  environ  deux  cents  mètres  en  amont 
du  pont  de  la  voie  ferrée  de  o^ôo  (fig.  3)  ;  l'oued  Cheriàa, 
qui  est  la  partie  inférieure  de  l'oued  Irsane,  est  largement 
pourvu  en  eau. 


i/ue  et  d 'après 
la  cdrte  provisoi- 
re   au    i/eooooo^ 


Echelle 


EO.OOO 


Fig.  3.  —  Les  Ruines  dites  Ksir  Aadja 


Le  petit  village  supérieur  occupait  deux  plates-formes  A 
et  B,  inclinées  vers  le  bas  de  la  hauteur  et  s'étendant  sur 
une  soixantaine  de  mètres  de  part  et  d'autre  de  la  crête  ; 
ces  plates-formes  ont  été  aménagées  de  main  d'homme  et 
leur  largeur  est  d'environ  vingt  mètres  pour  celle  du  Sud 
et  dix  mètres  seulement  pour  celle  du  Nord.  Les  maisons 
ont  complètement  disparu  ;  lorsqu'elles  se  sont  éboulées, 
les  matériaux  ont  dû  rouler  le  long  des  pentes.  Un  mur 
d'enceinte,  ayant  au  moins  un  mètre  d'épaisseur,  proté- 
geait les  maisons  ;  on  en  voit  les  vestiges  en  D,  dans  une 
sorte  de  col,  où  ils  forment  un  important  amoncelle- 
ment de  pierres,  et  en  F,  à  la  pointe  est  de  la  plate-forme 
nord,  où  il  ne  subsiste  que  des  traces  de  fondations. 

Le  village  inférieur  C  E,  beaucoup  plus  grand  que  le 


272     TIMULI  ET  RUINES  DES  ENVIRONS  d'eL  AÏOUN  SIDI  MELLOUK 

précédent,  était  bâti  entre  la  berge  gauche  de  l'oued 
Cheriâa  et  les  pentes  nord  du  piton  ;  la  surface  couverte 
par  les  ruines  mesure  environ  deux  cents  mètres  de  long 
sur  soixante  mètres  de  large,  avec  un  étranglement  à 
hauteur  d'un  coude  brusque  de  la  rivière.  Les  vestiges  de 
murs  sont  très  nombreux,  mais  leur  saillie  est  faible  ;  les 
pierres,  fortement  patinées,  ont  été  dispersées  en  tous 
sens.  Le  tracé  des  murs  est  suHîsamment  régulier  et  les 
angles  sont  à  peu  près  droits  ;  ces  murs,  dont  l'épaisseur 
moyenne  est  de  o"'6o,  sont  sensiblement  perpendiculaires 
ou  parallèles  à  la  direction  générale  de  l'oued  Cheriâa  ; 
leur  réseau  montre  qu'il  existait  en  ce  lieu  une  agglomé- 
ration assez  dense  de  maisons  accolées  les  unes  aux  autres 
et  que  les  grandes  cours  étaient  peu  nombreuses. 

Dans  les  fondations,  on  ne  trouve  pas  de  dalles,  celles- 
ci  sont  remplacées  par  de  gros  blocs  de  pierre,  qui  parais- 
sent avoir  été  systématiquement  placés  sur  deux  rangs  et 
légèrement  enfoncés  dans  le  sol  ;  certains  de  ces  blocs 
mesurent  environ  o"6o  x  o^ôo  x  o'"^©  et  ils  doivent  peser 
au  moins  trois  cents  kilogs.  Lorsque  les  blocs  sont  très 
épais,  ce  qui  est  fréquent,  il  ne  reste  pas  d'intervalle  libre 
au  centre  de  la  fondation  ;  en  E,  à  la  pointe  nord-est  des 
ruines,  on  aperçoit  les  fondations  d'un  mur  de  o"8o  de 
largeur  qui  présentent  cette  disposition. 

Vers  le  milieu  des  ruines,  les  fondations  ne  sont  pas 
visibles  ;  les  alluvions  ont  recouvert  la  partie  inférieure 
des  murs  qui  a  été  ainsi  protégée. 

Un  mur  de  ©""Go  de  large  a  été  dégagé  sur  une  longueur 
de  deux  mètres,  au  moyen  de  deux  tranchées  de  o"8o  de 
profondeur  qui  ont  découvert  la  maçonnerie  jusqu'au 
pied  des  fondations.  Ce  travail  a  permis  de  reconnaître 
que  ces  fondations  sont,  comme  en  E,  constituées  par 
deux  rangées  de  blocs  enchevêtrés  ;  au-dessus  des  blocs, 
la  maçonnerie  est  faite  avec  des  pierres  plus  petites  posées 
à  plat  et  ayant,  la  plupart  du  temps,  leur  grand  côté  per- 
pendiculaire à  la  direction  du  mur.  Les  parements  du  mur 
n'offrent  pas  une  très  grande  régularité. 

Une  fouille  pratiquée  à  peu  de  distance  de  la  précédente, 
à  l'intérieur  d'une  maison  et  dans  l'un  des  angles,  a  mis 
à  jour  un  foyer  ;  au  milieu  des  cendres  de  ce  foyer,  il  y 
avait  des  , morceaux  de  charbon  de  bois,  des  fragments 
indéfinissables  d'ossements  d'animaux  et  des  débris  de 
poteries.  Ces  derniers  proviennent  de  marmites  ayant  été 
longtemps  au  feu  et  à  pùte  complètement  noire,  ainsi  que 


TUMULI  ET  RUINES  DES  ENVIRONS  d'eL  AÏOUN  SIDI  MELLOUK     273 

de  vases  à  pàtc  fine,  de  couleur  ocre  clair,  dont  la  forme 
ne  peut  pas  être  exactement  déterminée,  mais  qui  semblent 
pourtant  avoir  eu  leur  base  arrondie,  comme  celle  des 
cruches  modernes,  et  qui  ont  probablement  servi  aux 
mêmes  usages. 


Origine  proluible  des  Anciennes  Agglomérations 

Les  indigènes  du  pays  attribuent  la  construction  de  la 
plupart  des  anciennes  agglomérations  aux  Béni  Merine  et 
aux  Béni  Ouattas  ;  ces  derniers  n'étaient  d'ailleurs  qu'une 
fraction  de  la  tribu  des  Béni  Merine  (Berbères  Zénètes), 
lesquels  ont  fondé  une  dynastie  marocaine  dont  la  domi- 
nation s'est  étendue,  à  plusieurs  reprises,  sur  les  terri- 
toires situés  entre  la  Moulouya  et  Tlemcen,  à  la  fin  du 
xni*  siècle  de  notre  ère  et  au  commencement  du  xiv®.  Cette 
tradition  ne  s'appuie  sur  aucun  fait  précis  ;  elle  ne  paraît 
pas  admissible  pour  les  vestiges  de  constructions  avec 
fondations  en  dalles  de  champ,  ainsi  que  je  l'ai  exposé 
dans  une  étude  antérieure  sur  les  ruines  de  la  région 
d'Oudjda  i.  Les  conclusions  de  la  dite  étude  au  sujet  de 
l'origine  de  ces  constructions  sont  les  suivantes  :  elles 
semblent  avoir  été  édifiées  au  cours  de  la  période  comprise 
entre  le  if  siècle  av.  J.-C.  et  le  vuf  siècle  de  notre  ère  par 
les  Berbères  Senhadja  ;  ces  indigènes  appelés  Massésy- 
liens  par  les  Romains,  appartenaient  au  moment  de  l'in- 
vasion zénète  aux  tribus  des  Béni  Fatene,  des  Koumia  et 
des  Mediouna. 

Les  données  historiques  sur  lesquelles  est  basée  l'hypo- 
thèse ci-dessus  concernent  également  la  région  d'El  Aïoun 
Sidi  Mellouk,  il  s'ensuit  que  les  ruines  de  même  nature  de 
cette  région  doivent  avoir  une  origine  commune  ;  c'est  le 
cas  d'une  partie  de  celles  d'Aïn  Diab  et  de  Mahiriz  et  peut- 
être  aussi  des  ruines  d'Ain  Tameur  et  de  Ras  Irsane. 

A  Ighqour,  Quefa  Mâalla  et  Kerkour  Aghrem,  le  tracé 
des  murs  est  assez  irrégulier  et  les  fondations  sont,  dans 
l'ensemble,  du  type  à  double  rangée  de  dalles  fichées.  Ce 
qui  différencie  un  peu  ces  ruines  des  précédentes,  c'est 
que  l'on  y  observe,  en  certains  points,  des  éléments  de 
murs  dont  les  fondations  affectent  une  autre  disposition. 
Ces  anomalies,  qui  ont  été  signalées  lors  de  la  description 


I  L.  VoiNOT.  —  Loc.  cit. 


274     TUMULl  ET  RUIiNES  DES  ENVIRONS  d'eL  AÏOUN  SIDI  MELLOUK 

des  vestiges  d'agglomérations,  peuvent  provenir  des  diffi- 
cultés rencontrées  par  les  constructeurs  pour  s'approvi- 
sionner sur  place  en  matériaux  du  modèle  courant;  il  n'est 
d'autre  part  pas  impossible  qu'elles  marquent  des  tenta- 
tives de  perfectionnement  du  procédé  primitif,  cela  est 
même  fort  probable  pour  Ighqour.  Dans  ces  conditions,  il 
semble  logi(]ue  d'admettre  que  les  agglomérations  d'Igh- 
qour,  Quefa  Mâalla  et  Kerkour  Aghrem  ont  été  créées  par 
des  Berbères  Senhadja,  pendant  la  période  déjà  envi- 
sagée, mais  plutôt  vers  la  fin  de  cette  période,  c'est-à-dire 
entre  le  f  et  le  vnf  siècle  de  notre  ère. 

Les  ruines  d'Aïn  Dolla,  du  monticule  d'Ain  Tameur  et 
une  partie  de  celles  d'Ain  Diab  cl  de  Mahiriz,  dont  les 
murs,  presque  droits,  ont  été  établis  sur  des  fondations 
moins  frustes,  proviennent  évidemment  d'aggloméra- 
tions bâties  à  une  époque  plus  récente  ;  néanmoins, 
comme  ces  fondations  paraissent  dériver  du  type  à  double 
rangée  de  dalles  fichées,  il  est  à  présumer  que  les  agglo- 
mérations en  question  sont  également  l'œuvre  des 
Senhadja,  qui  auront  continué  à  transformer  leurs  pro- 
cédés de  construction  au  contact  des  Zenata. 

C'est  à  la  fin  du  vn^  siècle  ou  au  commencement  du  vni' 
que  les  Zenata,  branche  plus  jeune  de  la  race  berbère, 
apparurent  autour  de  Tlemcen  ;  la  puissante  tribu  des 
Béni  Ifrene,  qui  marchait  à  l'avant-garde  de  l'invasion,  ne 
tarda  pas  à  occuper  tout  le  pays  situé  à  l'Est  de  la  Moulouya. 
Après  des  fortunes  diverses,  les  Béni  Ifrene  se  formèrent 
en  confédération  avec  leurs  frères  les  Maghraoua  vers  le 
milieu  du  x*  siècle  ;  ce  groupement  ayant  été  battu  par  les 
Senhadja,  les  Béni  Ifrene  et  Maghraoua  se  disputèrent  la 
prépondérance  mais,  en  1079,  ils  furent  écrasés  par  les 
Almoravides.  Pendant  ces  luttes,  les 'Senhadja  avaient  été 
refoulés  ;  néanmoins  ils  tenaient  toujours  la  région  s'éten- 
dant  au  Nord-Ouest  de  Tlemcen  jusqu'à  la  Moulouya  ;  les 
Zenata  les  absorbèrent  ensuite  peu  à  peu  et  finirent  par 
les  submerger,  si  bien  qu'au  xni®  siècle,  lors  de  l'installa- 
tion des  Béni  Merine  et  des  Abdelouadites,  les  Senhadja 
devaient  être  presque  complètement  dispersés  '. 

D'après  les  indications  précédentes,  on  peut  placer  la 
création  des  agglomérations  qui  nous  occupent  dans  la 
période  comprise  entre  le  \nf  et  le  xuf  siècle.  Les  cons- 


1  L.   VoiNOT  —  Oudjda  el   VAmaial,   in   Bull.   Soc.   de   Géogr.   et   d'Arch. 
d'Oran,   1911-1912  ;  tirage  à   part,  pp.   2^1   à   aBg. 


i 


TUMULI  ET  RL'IiNES  DES  ENVIRONS  d'eL  AÏOLN  SIDI  MELLOUK     275 

tiuctions  de  Ksir  Aadja,  qui  paraissent  les  moins  ancien- 
nes, ont  peut-être  été  élevées  à  l'époque  des  Béni  Merine, 
mais  rien  ne  prouve  qu'elles  soient  dues  à  ceux-ci  ;  les 
Béni  Merine  ayant  fait  sentir  leur  action  sur  le  pays  plutôt 
comme  détenteurs  du  pouvoir  que  comme  occupants  du 
sol,  il  y  aurait  au  contraire  lieu  de  supposer  que  Ksir 
Aadja  a  été  bâti  par  les  populations  mêlées  formées  de 
Senhadja  et  de  Zenata,  cpii  habitaient  alors  la  région  d'El 
Aïoun  Sidi  Mellouk.  D'aucuns  ont  voulu  voir  à  Ksir  Aadja 
des  vestiges  de  ruines  romaines,  à  cause  de  la  régularité 
de  certaines  lignes.  Cette  opinion  ne  paraît  pas  soutenable; 
c'est  un  vieux  ksar  berbère  et  rien  de  plus. 

Bien  entendu,  les  conclusions  auxquelles  conduit  la 
discussion  des  données  historiques  ne  constituent  que  des 
probabilités.  Dans  l'état  actuel  de  la  question,  et  notam- 
ment en  l'absence  de  tout  document  géographique,  on  ne 
saurait  rien  affirmer  quant  à  l'époque  de  la  construction 
des  anciennes  agglomérations.  La  seule  chose  qui  semble 
hors  de  doute  est  qu'elles  sont  d'origine  berbère. 

Des  tumuli  se  trouvent  au  voisinage  de  la  plupart  des 
agglomérations  ;  on  en  voit  même  à  l'intérieur  des  ruines 
d'Ighqour  et  il  semble  qu'il  en  existe  aussi  dans  celles  de 
Quefa  Mâalla,  Ras  Irsane  et  Kerkour  Aghrem.  Si  ce  fait 
était  nettement  établi,  il  tendrait  à  confirmer  l'ancienneté 
de  ces  agglomérations,  puisque  les  Berbères  ont  cessé 
d'inhumer  leurs  morts  sous  des  tumuli  après  leur  islami- 
sation, par  conséquent  vers  le  ix"  ou  le  x^  siècle,  mais  ils 
n'ont  très  probablement  pas  renoncé  de  suite  à  cette  cou- 
tume de  leurs  ancêtres. 


LES  RUINES  DE  COXSTKl  CTIONS  EN  PISÉ 
OU  EN  MAÇONNERIE  A  LA  CHAT  X 


Doseriptiou  des  Ruines 

Djehoub.  —  Les  ruines  sont  situées  dans  une  petite 
dépression  au  Nord  de  la  gare  établie  sur  l'oued  Atchane 
et  qui  porte  le  nom  de  gare  de  l'Oued  Bouredim,  à  environ 
cinq  cents  mètres  au  Sud  du  Trik  es  Soltane  (route  impé- 


276     TUMULI  ET  RUINES  DES  ENVIRONS  DEL  AÏOUN  SIDI  MELLOUK 

riale)  conduisant  d'Oudjda  à  Fez,  à  proximité  du  lieu  dit 
Kefit  er  Remana.  Ces  ruines  comprennent  des  construc- 
tions et  une  citerne  ;  c'est  d'ailleurs  pour  désigner  les 
citernes  que  les  indigènes  emploient  le  mot  djeboub. 

La  citerne  est  bâtie  au  fond  de  la  dépression  ;  c'est  un 
ouvrage  en  maçonnerie  à  la  chaux,  avec  couverture  voû- 
tée, qui  mesure  environ  trente  mètres  de  long  sur  cinq 
mètres  de  large  et  devait  contenir  de  deux  cents  à  deux 
cent  cinquante  mètres  cubes  d'eau.  La  maçonnerie  paraît 
vieille  ;  la  voûte  est  crevassée  en  plusieurs  endroits  mais 
les  pieds-droits  sont  en  bon  état. 

Sur  le  flanc  gauche  du  vallonnement  et  près  de  la 
citerne,  on  voit  les  ruines  d'une  enceinte  ayant  la  forme 
d'un  carré  d'environ  soixante  mètres  de  côté.  Cette 
enceinte  était  sans  doute  occupée  par  une  garnison,  ou 
bien  elle  servait  à  abriter  les  passagers,  comme  les  noualas 
modernes  du  Maroc.  La  maçonnerie  est  en  bon  pisé  de 
tuf  mélangé  de  chaux  et  les  murs  ont  au  moins  un  nriètre 
d'épaisseur  ;  quelques  pans  restent  encore  debout. 

A  environ  cent  mètres  au  Nord  de  la  citerne,  au  sommet 
du  flanc  droit  de  la  dépression,  il  y  a  en  outre  les  restes 
d'une  maison  en  pisé  analogue  à  celui  de  l'enceinte.  Cette 
maison,  qui  commande  la  citerne  et  l'enceinte,  était  pro- 
bablement une  sorte  de  blockhaus  destiné  à  empêcher  que 
ces  ouvrages  ne  soient  battus  à  courte  portée.  La  dite 
construction  mesure  environ  quinze  mètres  de  long  sur 
dix  mètres  de  large  ;  elle  est  divisée  en  deux  parties  par 
un  mur  de  refend  placé  dans  le  sens  de  la  longueur  ; 
l'épaisseur  des  murs  est  d'environ  o™8o. 

Djeboub  ouJad  Bon  Aalein.  —  Cette  citerne  se  trouve 
sur  le  territoire  des  Béni  bou  Zeggoù,  sensiblement  à  mi- 
chemin  entre  les  gares  de  Semmouna  et  de  Mestigmar  et 
au  voisinage  du  Trik  es  Soltane  ;  je  ne  l'ai  pas  visitée, 
mais,  au  dire  des  indigènes,  elle  serait  de  tout  point  sem- 
blable à  celle  décrite  plus  haut. 

Tiqesbine.  —  Tiqesbine  est  le  pluriel  du  mot  berbère 
taqsebt,  qui  signifie  fortin  ;  les  ruines  ainsi  appelées  par 
les  Berbères  sont  connues  chez  les  Arabes  sous  le  nom  d'El 
Kasba,  lequel  a  le  même  sens. 

Ces  ruines,  que  je  n'ai  également  pas  vues,  couronnent 
les  hauteurs  au  Sud  de  la  gare  de  Semmouna.  D'après  les 
gens  du  pays,  il  y  aurait  eu  autrefois  sur  ces  hauteurs  une 


TUMULI  ET  RUI^iES  DES  ENVIRONS  D  EL  AlOUN  SIDI  MELLOUK 


277 


eiggloniération  très  inipoilanlc  ;  il  ne  resterait  plus 
aujourd'liui  que  des  traces  à  peines  visibles  des  murs  qui 
élai^^nt  les  uns  en  pierres,  les  autres  en  pisé. 

Origine  probable  des  Ruines 

Suivant  les  traditions  locales,  Tiqesbine  aurait  été  bâti 
par  les  Béni  Merine  et  les  Béni  Ouallas  ;  c'est  toujours 
l'éternelle  légende  que  l'on  applique  indistinctement  et 
sans  preuves  à  toutes  les  ruines  d'orig'ine  inconnue.  Néan- 
moins, dans  le  cas  [)articuJier,  il  n'est  pas  impossible  que 
cette  assertion  soit  fondée,  car  les  Béni  Merine  ont  élevé 
des  fortifications  en  pisé  sur  plusieurs  points  de  la  région 
s'étendant  à  l'Est  de  la  Moulouya,  au  cours  des  xuf  et 
xiv''  siècles.  Si  l'aggloméiation  de  Tiqesbine  n'est  pas 
l'œuvre  des  Béni  Merine,  elle  doit  avoir  été  édifiée  vers 
la  même  époque  par  d'aulies  Zenata  ;  les  ruines  paraissent 
en  effet  semblables  à  celles  de  cette  origine  dont  l'histoire 
est  parvenue  jusqu'à  nous,  autant  que  l'on  peut  en  juger 
à  l'aide  des  renseignements  indigènes. 

D'après  la  nature  et  l'aspect  de  la  maçonnerie,  les 
citernes  semblent  dater  d'une  épocjue  plus  récente  ;  leur 
construction  est  attribuée  au  Sultan  Moulay  Ismaïl,  qui 
a  régné  sur  le  Maroc  de  1672  à  1727.  Cela  paraît  très  vrai- 
semblable, parce  que  ce  souverain  s'est  efforcé  d'assurer 
la  sécurité  des  principales  routes  de  l'empire  et  que,  dans 
ce  but,  il  a  fait  construire  ou  restaurer  des  kasbas  pour  les 
garnisons  échelonnées  le  long  de  ces  routes  ;  il  ne  serait 
donc  pas  étonnant  qu'il  ait  complété  cette  organisation  en 
installant  des  citernes  aux  points  dépourvus  d'eau,  afin  de 
faciliter  la  circulation  des  troupes  préposées  à  la  garde  des 
voies  de  communication.  Les  ruines  en  pisé  existant  à 
côté  des  citernes  auraient  évidemment  la  même  origine  K 

Mai  igi4. 

Capitaine  L.  VOINOT. 


I   Voir     notamment    :     Aboulqacem     bbn     Ahmed     Ezziani,     El     Tordjman 
(Le  Maroc  de   1631   à   1812),  traduction   G.   Houdas,  Paris,    1886. 


21 


EXCURSION  AUX  GROTTES  DE  MOULAI  AHMED  OU  DU  ZEGZEL 

(lnlaroc    Oriental) 


Stationnant  à  Berkane  j'ai  eu  l'occasion,  le  i5  avril  igiô, 
de  me  rendre  à  Talforalt  par  les  gorges  du  Zegzel.  Le  che- 
min y  est  véritablement  délicieux  et  l'on  ne  peut  rien 
rêver  de  plus  pittoresque  et  de  plus  imprévu.  Serpentant 
au  creux  du  ravin,  traversant  souvent  l'oued  à  gué,  le  sen- 
tier suit  la  berge  pour  monter  brusquement  à  flanc  de 
coteau,  pour  continuer  en  corniche,  ou  en  déblai,  pour 
aller  s'égarer  sous  les  arbres  ou  aboutir  à  un  gué. 

Il  y  a  de  la  verdure,  beaucoup  de  verdure,  les  hautes 
collines,  très  abruptes,  sont  d'un  vert  uniforme  percé  çà 
et  là  par  les  plaques  rougeâtres  du  sol  ou  la  masse  rousse 
d'un  rocher  émergeant  de  ce  fouillis  de  plantes  et 
d'arbustes. 

Ces  petites  montagnes,  dont  les  formes  varient  à  l'in- 
fini, changent  encore  constamment  d'aspect  avec  l'éclai- 
rage et  l'état  de  l'atmosphère,  en  sorte  que  l'on  peut  faire 
vingt  fois  l'excursion  sans  se  douter  que  l'on  a  parcouru 
deux  fois  le  même  trajet.  Ce  chemin  est  d'ailleurs  assez 
connu  des  touristes  et  les  gorges  du  Zegzel  sont  un  but 
fréquent  d'excursion.  On  y  va  soit  à  mulet,  soit  à  cheval, 
car  la  nécessité  de  traverser  souvent  l'oued  rend  la  pro- 
menade à  pied  difficile.  De  Berkane  aux  grottes  le  trajet 
est  d'environ  lo  kilomètres  i. 

Jusqu'à  Takerboust  les  gorges,  sauvages  à  l'entrée, 
semblent  lutter  contre  l'envahissement  des  jardins  qui 
empiètent  sur  leurs  flancs  ;  d'énormes  quartiers  de  roc 
tombés  depuis  des  éternités  rendent  la  cultuie  impossible, 
et  il  n'est  pas  rare  de  voir,  accrochée  à  la  montagne,  la 
masse  menaçante  d'un  rocher  qui  semble  prêt  à  tomber 
sur  les  audacieux  aventurés  sous  sa  base. 

Après  un  coude  brusque  lo  ravin  s'élargit  ;  les  ksour  de 
Takerboust,    acciochés    au   coteau,    semblent,    avec   leur 


I   Voir   Carte    Etat-iMajor   frontière    algéro-marocaine    au    i/ioo.ooo*. 


EXCURSION  AUX  GROTTES  DE  MOULAI  AHMED  OU  DU  ZEGZEL 


279 


teinte  grisâtre,  de  gigantesques  tortues  d'eau  se  chauffant 
au  soleil  sur  un  rocher.  I.e  terrain  s'étage  en  jardins  artis- 
tement  aménagés  par  l'ingéniosité  des  indigènes  ;  le 
figuier  de  Barbarie  fait  place  à  l'oranger  et  une  délicieuse 
senteur  arrive  de  ces  vergers  fleuris.  Puis,  l'oued  se  res- 
serre, redevient  sauvage,  et,  jusqu'à  la  zaouïa  de  Moulai 
Ahmed,  le  chemin  serpente  à  liane  de  coteau. 

Près  de  la  zaouïa  l'oued  se  divise  en  deux  branches  : 
l'une  va  vers  Tafforalt,  l'autre,  au  Sud,  vers  Ain  Safsaf. 
C'est  dans  cette  dernière  branche  de  l'oued  Zegzel  que  se 
déverse  une  source  assez  importante  qui  sort  de  terre  par 
une  grctte. 

De  nombreuses  légendes  courent  sur  celte  grotte.  Com- 
prenant mal  l'arabe,  je  n'ai  pas  pu  les  enregistrer,  toute- 
fois j'ai  pu  comprendre  que  des  démons  l'habitaient.  Les 
uns  prétendent  qu'elle  s'enfonce  sous  la  montagne  pour 
sortir  à  Ain  Sfa,  d'autres  disent  qu'elle  est  habitée  par  des 
serpents  d'eau  énormes  et  que  des  roumis  sont  restés  cinq 
heures  à  errer  sous  ses  voûtes. 

Je  résolus  d'explorer  cette  grotte  et,  dans  ce  but,  je  me 
suis  rendu  à  Moulai  Ahmed. 

Deux  explorations  m'ont  permis  d'en  dresser  le  plan 
d'ensemble  (PI.  V)  et  d'en  faire  une  courte  description 
accompagnée  de  quelques  coupes  (PI.  VI). 

L'entrée  de  la  grotte  se  trouve  élevée  de  deux  nîètres  au- 
dessus  du  niveau  d'un  petit  bassin  très  profond  situé 
devant  l'ouverture  et  qui  reçoit  les  eaux  sortant  de  la 
grotte  et  tombant  en  cascade.  On  peut  facilement  accéder 
à  la  grotte  par  une  rampe  qui  longe  le  bassin  ;  on  se  trouve 
aussitôt  dans  un  long  boyau  inondé,  haut  de  voûte  et 
accusant  une  profondeur  d'eau  de  deux  à  trois  mètres. 
C'est  comme  une  sorte  de  réservoir  allongé,  large  de  trois 
à  quatre  mètres,  dont  le  trop  plein  s'écoule  en  cascade 
dans  le  bassin  extérieur.  L'eau  de  ce  bassin  est  très  nette- 
ment bleue,  les  parois  sont  en  pierre  lisse  et  jaune,  très 
douce  au  toucher,  portant  quelques  stalactites  et  stalag- 
mites vers  la  cascade  C"  où  se  termine  le  canal  i  ;  le  fond 
en  est  rocheux.  La  cascade  C"  peut  avoir  un  mètre,  elle 
fait  communiquer  l'eau  de  2  avec  i. 

La  chambre  2  qui  s'ouvre  ensuite  est  large,  haute  de 
plafond  et  ne  contient  pas  beaucoup  d'eau  ;  on  en  a  à 
peine  jusqu'aux  genoux  ;  elle  est  encore  éclairée  par  la 
lumière  du  jour.  C'est  tout  ce  que  je  vis  la  première  fois, 
car  celte  chambre  se  continue  par  un  couloir  étroit  où  la 


280     EXCURSION  AUX  OROTTKS  DE  MOULAI  AHMED  OU  DU  ZEGZEL 


EXCURSION  AUX  GROTTES  DE  MOULAI  AHMED  OU  DU  ZEGZEL      281 


PI.    VI 


J''^ncl    oif    l'oued 


t:^.  9 


Grottes  de  Moulai  Ahmed  :  Quelques  Coupes 


282   RXCURSION  AUX  GUOTTES  DE  MOULAI  AHMED  OU  DU  ZEGZEL 

lumière  ne  pénètre  pas  et  oîi  l'on  n'a  pas  pied  dans  l'eau 
profonde.  Je  dus,  pour  m'y  aventurer,  faire  un  petit 
radeau  sur  lequel  je  plaçai  une  lanterne  et  des  bougies. 

Les  parois  du  couloir  (jui  fait  communi(juer  la  cham- 
bre 2  avec  la  chambre  V  sont  d'une  autre  structure  que 
celles  du  bassin  de  l'entrée  ;  la  pierre  y  est  plus  rude  au 
toucher  et  de  nombreuses  colonnettes,  sur  les  parois,  lui 
donnent  un  aspect  particulier  ;  il  y  a  même  des  réunions 
de  colonnettes  formant  lustre  accrochées  çà  et  là  contre 
les  parois.  Le  couloir  est  long  d'une  trentaine  de  mètres 
et  très  variable  de  hauteur  ;  il  débouche  dans  une  salle  V 
où  l'on  prend  pied  (PI.  V  et  PL  VI,  fig.  i),  mais  il  continue 
à  traverser  la  salle  et  l'on  arrive,  en  3',  contre  une  paroi  à 
pic  empêchant  de  continuer.  Je  n'ai  pas  pu  voir  de  trou 
à  la  base  de  cette  paroi  où  l'eau  est  très  profonde. 

En  explorant  la  salle  V  dont  la  coupe  ss'  est  donnée  par  la 
figure  5,  j'ai  trouvé  une  petite  caverne  E;  puis,  en  montant 
une  pente  faite  d'éboulis,  de  travertins,  de  tufs,  on  arrive 
à  une  sorte  de  carrefour  d'où  partent  trois  galeries  A,  B  et 
C.  La  galerie  \,  à  sol  teneux,  est  très  haute  de  voûte  et 
assez  régulière,  elle  flnil  brusquement  ffig.  7)  à  une  cin- 
quantaine de  mètres  et  s'ouvre  dans  une  grande  caverne. 
N'ayant  pas  apporté  de  cordes  je  ne  pus,  ce  jour-là,  aller 
plus  loin  dans  cette  direction.  Je  me  suis  contenté  d'ex- 
plorer les  autres  galeries  :  la  galerie  B  à  fond  de  terre  irré- 
gulier n'a  qu'une  vingtaine  de  mètres  et  se  termine  assez 
rapidement  par  une  voûte  surbaissée  rejoignant  le  sol. 
La  terre  de  ces  galeries  paraît  être  une  espèce  de  terre 
sableuse  rendue  noirâtre  par  les  excréments  des  chauves- 
souris  qui  vivent  en  grand  nombre  dans  ces  grottes.  Ce 
sont  d'ailleurs  les  seuls  animaux  que  j'y  aie  rencontrés. 

On  accède  à  la  galerie  C  par  un  chemin  en  corniche  sur 
quelques  mètres  et  assez  élevé  au-dessus  du  niveau  de 
l'eau  (fig.  3  à  5).  Cette  galerie  est  de  beaucoup  la  plus 
curieuse,  elle  présente  deux  puits  assez  profonds  dans  les- 
quels je  me  proposais  de  me  faiie  descendre,  lorsque  j'ai 
trouvé  la  galerie  F  (ûg.  3  à  5).  Les  parois  de  la  galerie  C 
sont  ornées  de  belles  concrétions  stalagmitiques,  de  colon- 
nes, de  lustres  ;  dans  le  milieu  de  la  galerie,  en  S,  se  dresse 
une  pierre  blanche  imitant  assez  exactement  un  homme 
debout,  vêtu  d'un  suaire  ou  d'un  burnous.  La  galeiie  C  se 
termine  comme  B  en  cul-de-sac.  On  trouve,  à  gauche,  un 
étroit  couloir  rempli  de  petites  stalactites  et  stalagmites, 
très  curieux,  où  l'on  passe  en  rampant  et  qui  conduit  à 


KXCURSION  AUX  GROTTES  DE  MOULAI  AHMED  OU  DU  ZEGZEL      283 

une  salle  assez  vaste  D.  La  coupe  y  -'•  montre  la  disposi- 
tion des  trois  galeries  C,  D  et  F.  Le  double  trou  de  la  gale- 
rie D  tient  à  ce  qu'il  y  a  un  tunnel  dans  le  bout  de  la 
salle  D  qui  n'a  pas  d'issue. 

J'ai  trouvé  là  des  pierres  en  forme  d'obus,  dressées, 
imitant  assez  bien  des  stalagmites  et  simplement  posées 
sur  la  terre.  Aucune  trace  de  pas  sur  le  sol  très  meuble,  ce 
qui  prouve  que  ce  n'est  pas  le  fait  d'un  homme,  mais  bien 
une  bizarrerie  de  la  nature.  Dans  un  autre  endroit  il  y  a 
des  stalagmites  très  bien  constituées,  alors  que  la  voûte 
au-dessus  (qui  est  à  peine  à  un  mètre)  est  absolument  lisse 
et  ne  présente  aucune  trace  de  stalactites. 

La  galerie  F  prend  ouverture  sur  la  salle  V,  mais,  à  peu 
de  hauteur  au-dessus  du  sol  qui  borde  l'eau,  elle  court  4e 
long  et  au-dessous  de  C  ;  elle  est  à  peu  près  horizontale 
comme  niveau  moyen,  mais  très  irrégulière  comme  lar- 
geur, comme  hauteur  de  voûte  et  comme  surface  du  sol, 
lequel  est  constitué  par  du  sable  fin.  Cette  galerie  pré- 
sente absolument  l'aspect  d'un  lit  d'oued  semé  de  gros 
rochers  provenant  de  la  voûte  :  en  effet,  à  l'extrémité,  on 
trouve  de  l'eau,  ce  qui  prouve  qu'en  temps  de  crue  cette 
galerie  est  parcourue  par  un  torrent  (fîg.  8\ 

Quelques  jours  après,  je  suis  revenu  dans  ces  grottes 
avec  des  cordes  solides  pour  descendre  au  bout  de  la  gale- 
rie A.  Le  sol  de  la  salle  G,  dans  laquelle  je  suis  descendu, 
est  environ  à  douze  mètres  au-dessous  du  niveau  de  A. 
J'ai  atterri  sur  un  rocher  P  (v.  Plan")  qui  présente  une  arche 
de  pont.  A  droite  et  à  gauche  se  trouvent  deux  petits  lacs 
R  et  U  ;  le  bassin  R  est  plein  d'eau  saumùtre  recouverte 
d'une  couche  de  plantes  très  petites  et  verdâtres  prouvant 
bien  que  l'eau  est  stagnante.  J'ai  d'ailleurs  nagé  dans  ce 
lac  qui  ne  présente  aucune  issue.  Le  boyau  d'eau  lim- 
pide L',  non  plus  n'a  pas  d'issue.  Après  avoir  dépassé  un 
coude  assez  prononcé,  je  me  suis  heurté  à  une  muraille 
lisse  et  très  haute.  Cette  salle  G  a  une  voûte  très  élevée, 
car  notre  lanterne  ne  pouvait  pas  l'éclairer.  On  voit  sur 
les  parois  dé  grosses  concrétions  globuleuses  imitant  assez 
bien  des  champignons. 

Ce  qu'il  y  a  de  certain  c'est  que  ces  grottes  se  terminent 
là  et  n'ont  pas  d'autre  issue  que  le  trou  d'entrée. 

Chose  assez  remarquable  :  dans  la  salle  V,  dont  la  voûte 
est  très  élevée,  on  voit  le  joiu'  par  une  grande  fenêtre 
inaccessible  située  à  trente  ou  quarante  mètres  de  hau- 
teur ;  c'est  le  fond  d'une  grotte  qui  se  trouve  dans  la  mon- 


284     EXCURSION  Alix  GROTTES  DE  MOITLAÏ  AHMED  OU  DU  ZEGZEL 

taj^no  et  qui  est  l'objet  de  pèlerinages  de  la  part  des 
indigènes. 

Voilà  résolue,  une  fois  pour  toutes,  la  légende  du 
fameux  souterrain  qui,  si  on  en  croy'iil  les  diics  des  indi- 
gènes, aurait  vingt-cinq  kilomètres  de  longueur   ! 

Telle  est  la  description  sommaire  des  excavations  que 
j'ai  visitées. 

Un  problème  intéressant  reste  à  résoudre.  Comment  est 
alimentée  la  cascade  extérieure  qui  coule  à  l'état  perma- 
nent ?  Lors(|ue  je  fis  l'exploration  des  lieux  le  débit  était 
approximativement  de  soixante  mètres  cubes  à  l'heure 
avec  une  vitesse  de  chute  de  S^.So  à  la  seconde.  L'écoule- 
ment étant  permanent,  il  est  évident  que  l'alimentation 
est  elle-même  permanente,  cv  (|ui  ne  paraît  pas  résulter 
de  la  desciiption  des  lieux.  11  faudrait  se  trouver  dans  la 
chambre  V  lors  d'un  orage  pour  reconnaître  les  diverses 
venues  d'eau.  Ce  qu'il  y  a  de  certain  c'est  que  tous  les 
bassins  1,2,  3-3'  communiquent  entre  eux  de  tout  temps. 
L'eau  vient  de  V  très  certainement,  mais  je  ne  sais  com- 
ment elle  y  arrive.  Tl  est  probable  qu'il  y  a  communication 
souterraine  entre  V  et  une  nappe  deaii  située  légèrement 
plus  haut,  ce  qui  donnerait  en  coupe  la  disposition  de  la 
figure  9.  En  effet,  en  V,  tout  près  de  3',  on  n'observe  pas 
de  courant  superficiel  en  rapport  avec  la  vitesse  qu'il  a  un 
peu  plus  loin  vers  la  sortie,  ce  qui  semblerait  indiquer 
que  l'eau  arrive  par  le  fond  de  3'. 

Quant  à  l'alimentation  pai'  les  voûtes  des  excavations 
exploiées  elle  est  insignifiante,  le  suintement  étant  tout 
à  fait  réduit. 

Tout  ce  qui  peut  se  produire  en  temps  de  pluie  c'est 
un  apport  d'eau  par  la  galerie  E  ou,E.  Celle  f(ui  se  trouve 
au-dessus  de  C  est  très  humide  et  il  y  a  de  l'eau  à  l'extré- 
mité. Entre  G  et  V  je  ne  vois  pas  de  communication  pos- 
sible autrement  que  par  infiltration. 

.Te  regrette  que  mon  instabilité  présente  m'empêche  de 
retourner  à  la  grotte  :  mais  j'espère  que  ces  premiers 
jalons  permettront  à  d'autres  de  faire  des  observations 
plus  précises. 

Avril  1915. 

R.  JOANNIS, 

Sous-Licutenant  au  2"  Spahis. 


NOTE  SUR  LES  RUINES  DE  MINA 


Sur  le  désir  exprimé  par  le  Comité  de  la  Société  de  Géo- 
graphie d'Oraii,  je  suis  allé,  le  17  avril  dernier,  visiter  les 
fouilles  faites  sur  l'emplacement  de  l'antique  Mina  par  la 
Compagnie  du  Cliemin  de  fer  de  l'Etat,  dans  le  but  de  se 
procurer  les  terres  nécessaires  à  un  grand  remblai  exécuté 
au  passage  supérieur  franchissant  la  voie  P.-L.-M,  Ces 
fouilles  ont  été  faites  sur  le  versant  d'un  contrefort  au  pied 
duqu(>l  passe  la  ligne  Relizane-Tiaret  par  Fortassa,  à 
]  kilomètres  environ  au  Sud-Est  de  la  première  de  ces  loca- 
lités. Elles  ont  mis  à  découvert  des  pierres  tombales,  des 
pierres  de  taille,  des  ti'onçons  de  colonne,  des  socles,  des 
chapiteaux,  une  auge,  une  fontaine,  des  jarres  et  une 
quantité  de  menus  objets.  Beaucoup  de  ceux-ci,  m'a-t-on 
afTirmé,  ont  été  emportés  pendant  les  travaux  par  les 
ouvriers  et  les  visiteurs  qui  les  ont  conservés  ou  vendus. 

Les  pierres  transportables,  offrant  de  Tintérêt,  ont  été 
entreposées  à  la  gare  de  l'Etat  par  les  soins  de  M.  Martin, 
chef  de  district.  Les  plus  lourdes  sont  restées  sur  place. 
Je  n'ai  pas  retrouvé  deux  pierres  déjà  relevées.  Peut-être 
ont-elles  été  retournées,  c'est-à-dire  l'inscription  placée 
sur  le  sol. 

M.  Martin  a  recueilli,  en  outre,  des  pièces  de  monnaie 
en  cuivre  à  l'effigie  de  Fausta,  de  Dioclétien,  des  lampes 
funéraires  dont  anelques-unes  ornementées.  L'une  d'elles, 
près  de  l'orifice  d'alimentation,  présente  un  sanglier  :  une 
deuxième,  une  croix  à  branches  larges.  Les  inscriptions 
sont  peu  déchiffrables.  M.  Martin  possède  encore  un  os  de 
mouton  enjolivé  de  croix  tracées  à  la  pointe  du  couteau, 
portant  l'inscription  «  Fortnna  bibas  »  :  un  stylet  en 
ivoîi^.,  une  aie-uille  à  tricoter  (?)  en  os  de  mouton  ;  de 
petits  vases  en  terre  cuite,  à  lona^  col,  qui  devaient,  je  crois, 
recevoir  de  l'huile  parfumée  dont  on  s'oignait  le  corps  ; 
les  débris  d'une  casserole  en  cuivre,  des  morceaux  de  belle 
poterie  avec  marque  de  fabrique  ;  une  clochette  ressem- 
blant beaucoup  à  une  sonnaille  contemporaine  pour  bœuf, 
trouvée  cependant  à  s^Bo  du  sol  ;  des  débris  de  creuset  et 
autres  objets. 


286 


NOTE  SUR  LES  RUINES  DE  MINA 


M.  Martin  a  fait  transporter  à  la  gare  une  colonne  com- 
plète de  5  mètres  de  hauteur,  dont  le  fût  mesure  en 
moyenne  o'"5o  de  diamètre,  un  moulin  à  grains,  des  pier- 
res écrites,  enjolivées  de  dessins,  une  fontaine  (fig.  i)  pré- 
sentant deux  serpents  et  une  tête  de  ruminant  près  de 
l'orifice  de  sortie  de  l'eau.  Il  a  l'intention  de  disposer  tous 


Fig.  I 


Hauteur  o^Gd  ;  largeur  :  h  la  base  o^Oô,  en  haut  et  sur  le  côté  o"37 


ces  objets  dans  un  jardin  qu'il  se  propose  de  créer  près  de 
la  maison  qu'il  habite  dans  la  gare.  Il  en  prendra  soin. 
C'est  tout  ce  que  nous  pouvons  lui  demander  pour  le 
moment. 

Les  inscriptions  gravées  sur  les  pierres  ne  sont  pas  nom- 
breuses ;  elles  sont  grossières.  Le  plus  grand  nombre  sont 
illisibles,  parce  que  toutes  ces  pierres  sont  en  grès  rouge 
qui  s'effrite  à  l'air  et  à  l'humidité.  Beaucoup  avaient  dû 
déjà  disparaître  avant  d'être  ensevelies.  La  première 
inscription  représentée  par  la  figure  2  peut  être  considérée 


NOTE  SUR  LES  RUINES  DE  MINA 


287 


I   ■  I  VLIA'     l  Cici  TAT 
■    V  IX  -AN'  -  P-|v\  -XXX 


-ITEM-  IVLIAt  - 
.    Coiv5o8Ri/v/At 
/     -   P  -  M  -    X 


Fig.  2 
Longueur  i  mètre,  hauteur  o"45,  épaisseur  o"5o 

comme  à  peu  près  exacte,  mais  la  deuxième  (fig.  3)  prête  à 
trop  d'interprétation  pour  lui  accorder  la  moindre  valeur. 


Fig.  3 
Longueur  o'°7r),  hauteur  o^ôa 


Quelques  pierres  tombales  intéressantes  sont  représen- 
tées par  les  figures  /j,  5  et  6. 

On  voit,  au  premier  plan  des  fouilles,  les  vestiges  d'un 
assez    grand   bâtiment,    un    temple    probablement,    dont 


288 


NOTE  SUR  LES  RUINES  DE  MINA 


l'emplacement  est  délimité  par  dos  bases  de  piliers  restées 
debout.  C'est  do  là  quo  vient  certainement  la  bollo  colonne 
de  5  mètres  do  hauteur  rccu(Mllio  par  M.  Martin. 


Fig.  4 


Hauteur   i°i2,  largeur  o"52 


L'emplaceuioul  de  Mina  devait  se  trouver  sur  le  contre- 
fort qui  domino  la  ligne  ferrée  do  Tiarol,  dont  la  pente 
regarde  l'Ouest.  C'est,  du  reste,  sur  ce  plateau  (pi'aboutit 
une  conduite  d'eau  dont  on  aperçoit  des  tronçons.  Elle 
était  à  air  libre,  maçonnée,  d'une  section  de  i  mètre  sur 
o™7o,  on  chiffres  ronds.  Elle  venait  de  la  direction  de  Zem- 
mora,  alimentée  par  la  source  de  l'oued  Denseur. 


NOTE  SUR  LES  RUINES  DE  MINA 


289 


Fiff.    5 


Fig.  6 


Hauteur  i"io,  largeur  o^ôô, 
épaisseur   o°25 


Hauteur  i°8o,  largeur  o°55, 
épaisseur   o"3o 


Sur  le  versant  nord  existent  les  ruines  d'une  construc- 
tion assez  importante  On  voit,  sortant  du  sol,  les  maçon- 
neries des  fondations  de  o^ôo  d'épaisseur.  Le  bâtiment 
devait  être  divisé  en  cinq  locaux  ;  deux  plus  grands  que 
les  trois  autres.  C'était,  peut-être,  des  entrepôts  et  des 
logements  formant  les  dépendances  de  la  basilique  dont 
on  voit  les  restes  en  contre-bas. 

Cette  basilique,  de  3o  mètres  sur  20  environ,  ne  pré- 
sente aujourd'hui  que  des  pans  de  murs,  principalement 
dans  les  angles.  On  remarque  que  les  habitants  du  pays 
l'ont  fouillée  sur  toutes  ses  faces  pour  se  procurer  des 
moellons  durs  qui  manquent  dans  la  région.  Derrière 
l'édifice,  l'on  voit  les  ruines  de  thermes  de  moyenne 
importance  dont  la  piscine  est  très  apparente. 


290  NOTE  SUR  LES  RUINES  DE  MINA 

D'après  les  renseignements  recueillis,  des  vestiges  de 
vannes  de  répartition  existent  en  amont,  du  côté  de  la 
rivière.  Une  dérivation  de  l'oued  Mina  amenait  donc  l'eau 
par  des  canaux  d'irrigation  dans  la  grande  plaine  qui 
s'étend  devant  la  cité  romaine. 

Il  serait  intéressant  de  faire  classer  par  le  Gouvernement 
Général  les  ruines  de  Mina,  ne  serait-ce  que  pour  empê- 
cher les  carriers  de  les  exploiter  comme  ils  le  font  depuis 
longtemps. 

Pour  terminer,  il  nous  est  très  agréable  de  remercier 
notre  collègue  M.  iîister,  interprète  à  Relizane,  d'avoir 
bien  voulu  nous  envoyer  les  croquis  joints  à  cette  note  et 
dus  à  la  plume  de  son  fils  René. 

H.  PELLET. 


GONTRIBOTION  A  L'ETDDE  DE  L'INDDSTRIE  PASTORALE  EN  ALGÉRIE  &  AD  ÏAROC 


NOTE  SUR  LES  LAINES  OU  SUO  ORANAIS  ET  OU  MAROC 


F»I=IEFAGE 


Cher  Monsieur  et  Ami, 

C'est  avec  le  plus  vif  intérêt  que  j'ai  pris  connaissance 
de  votre  nouveau  travail  sur  les  laines  du  Sud  Oranais  et 
du  Maroc. 

Cet  opuscule  apporte  un  contingent  nouveau,  non  des 
moins  appréciables,  à  Télude  de  l'industrie  pastorale  en 
Algérie. 

Elle  complète  heureusement  et  naturellement  les  remar- 
quables travaux  que  vous  avez  déjà  présentés  sur  la 
question. 

Vous  désireriez,  avec  raison,  voir  modifier  un  certain 
nombre  d'usages  commerciaux,  en  ce  qui  concerne  l'éle- 
vage et  la  présentation  des  troupeaux  du  Sud,  le  choix  des 
espèces,  en  vue  de  la  boucherie  comme  en  vue  de  la  pro- 
duction lainière,  et  surtout  certaines  méthodes  employées 
dans  les  achats  et  les  transactions. 

Je  pense,  comme  vous,  qu'il  y  aurait  encore  de  grands 
progrès  à  réaliser,  dès  que  les  temps  auront  changé,  et 
l'Administration  supérieure  aidant,  nous  verrons,  à  la 
période  agitée  que  nous  traversons,  succéder  une  ère  de 
tranquillité  plus  propice  aux  choses  de  l'agriculture  et  à 
celles  de  l'industrie.  Nous  connaîtrons,  à  n'en  pas  douter, 
ces  jours  plus  heureux,  notre  beau  département  pourra 
donner  à  ce  moment  un  essor  nouveau  aux  études  écono- 


292  PRÉFACE 

iiii(iues  qui  sont  sa  raison  d'être  dans  le  concert  des  peu- 
ples de  l'Afrique  du  Nord. 

Bien  situé  entre  le  département  d'Alger,  si  riche,  et  la 
région  marocaine  dont  l'expansion  économique  nous 
étonne  chaque  jour,  avec  le  réseau  de  voies  ferrées  qui 
s'améliore,  malgré  la  tourmente  actuelle,  et  qui  déverse 
vers  ses  trois  ports  tous  les  produits  de  son  sol,  le  dépar- 
tement d'Oran  est  un  expi^rtaleur  par  excellence. 

Personne  n'ignore  (^ue  lOranie  a  aidé  puissamment  au 
ravitaillement  de  toutes  nos  armées,  et  que  si  elle  a  donné 
au  i)ays  le  plus  pur  du  sang  de  ses  enfants,  elle  a  coopéré 
et  coopère  chacpic  jour  de  toute  la  foice  de  ses  moyens  au 
succès  final,  par  ses  envois  considérables  de  blé,  d'orge, 
d'avoine,  de  moutons,  de  vin,  de  laines,  de  peaux,  de  crin 
végétal,  d'alfa,  etc.,  envois  qui  se  sont  pouisuivis  depuis 
deux  années  avec  une  régularité  absolument  méthodique, 
grâce  au  concours  de  toutes  les  bonnes  volontés. 

Pour  terminer,  et  dût  votre  modestie  en  souffrir  légère- 
ment, je  tiens  à  vous  exprimer,  en  mon  nom  propre,  tous 
mes  remerciements  pour  l'aide  si  précieuse  que  vous  nous 
avez  donnée  lorsqu'il  a  fallu  effectuer  dans  le  Sud  de  con- 
sidérables achats  de  laines. 

Oran,  le  3i  août  1916. 

TOUPNOT, 

DirecleuT  de  Vlitierdance  de  la  Division  d'Oran. 


CONTRIBUTION  A  L'ÉTUDE  DE  L'INDUSTRIE  PASTORALE 

EN  ALGÉRIE  ET  AU  MAROC 


NOTE  SDB  LES  LAINES  DU  SUO  OBANAIS  ET  DU  MABOG 


La  laine  est  le  revêtement  pileux  du  mouton.  L'en- 
semble de  la  laine  d'un  mouton  s'appelle  toison.  Les  brins 
qui  constituent  la  toison  se  groupent  en  petites  touffes  ou 
mèches  qui  se  juxtaposent  et  donnent  à  la  toison  un  aspect 
nettement  fermé  ou  au  contraire  ouvert  ou  bien  franche- 
ment chevelu. 

Dans  le  dernier  cas,  les  brins  poussent  côte  à  côte  sans 
pour  cela  s'enchevêtrer  et  constituer  des  mèches  (çouf 
zouléï).  Par  suite,  nous  pouvons  d'ores  et  déjà  distinguer 
les  laines  en  deux  catégories  qui  sont  comme  les  pôles 
opposés  de  la  variabilité  des  laines. 

A.  —  Les  toisons  composées  de  mèches  ou  touffes  à 
brins  fins,  soyeux,  tirebouchonnés  (çouf  ratba) . 

B.  —  Les  toisons  sans  mèches,  composées  de  brins  recti- 
lignes,  implantés  côte  à  côte  ne  s'encllevêtrant  pas.  Ces 
toisons  sont  dites  criniformes  (çouf  zouleï). 

Entre  ces  deux  types  extrêmes,  se  classent  toutes  les 
autres  variétés. 

Quand  les  brins  de  laine  composant  une  mèche  sont 
d'égale  longueur,  les  mèches  ont  une  forme  régulière, 
quasi-cubique  et  se  juxtaposent  assez  parfaitement,  les 
unes  aux  autres.  L'ensemble  donne  alors  l'impression 
d'un  feutrage  fermé,  où,  cependant,  les  mèches  se  devi- 
nent, car  aux  mouvements  du  mouton,  on  voit  la  toison 
se  diviser  en  tranches  transversales  par  des  sillons  pro- 
fonds. De  telles  toisons  sont  dites  closes  ou  fermées.  On 
les  rencontre  chez  les  moutons  à  laine  fme,  soyeuse  (çouf 


Ç'2 


294         CONTRIBUTION   A   L  ETUDE   DE   l'iNDUSTRIE    PASTORALE 

ratha)  ou  à  laine  moyenne  dont  les  brins  sont  plus  ou 
moins  ondulés  (çouf  harcha)  ou  (çouj  toussimet). 

Quand  les  brins  sont  inégaux  en  longueur,  les  mèches 
qui  en  résultent  sont  irrégulières  et  de  forme  quasi-coni- 
que. On  conçoit  aisément  que  des  mèches  conif ormes 
ainsi  plantées  base  à  base,  ne  s'appliquent  pas  du  tout  les 
unes  contre  les  autres  et  laissent  entre  elles  des  espaces 
vides.  De  pareilles  toisons  sont  ouvertes  ou  mècheuses 
(toussimet)  ou  bouffantes. 

Enfin,  il  est  une  variété  de  toisons  où  les  brins,  longs 
et  spirales,  s'enchevêtrent  entre  eux  et  forment  de  vraies 
cadenettes  (mèches  en  spire,  cylindriques,  du  diamètre 
d'un  porteplume).  Ces  mèches  cylindroïdes,  indépen- 
dantes les  unes  des  autres,  retombent  de  chaque  côté  de 
la  ligne  du  dos  formant  une  raie  dorsale  partageant  nette- 
ment la  toison  en  deux  portions.  Ce  type  de  toison  se  ren- 
contre paiticulièrement  dans  le  cercle  de  Géryville,  chez 
les  moutons  terfaoui  ou  des  Trafis. 

Toutes  ces  toisons  peuvent  être  plus  ou  moins  parse- 
mées de  jarre.  Le  jarre  est  un  poil  blanc,  brillant,  rigide, 
qui  croît  parfois  à  côté  des  brins  de  laine  et  qui,  à  l'inverse 
de  ces  derniers,  est  dépourvu  de  toute  élasticité,  de  toute 
souplesse  et  ne  prend  pas  la  teinture. 

Ce  défaut  de  souplesse  fait  que,  dans  l'opération  du 
filage  le  jarre  demeure  rebelle  à  V enroulement,  à  la  torsion 
que  subissent  les  brins  de  laine  ;  il  s'échappe  le  long  du 
///,  de  la  cordelette  obtenue  et  forme  des  bavures. 

Dans  la  fabrication  des  tissus  destinés  à  la  teinture  fran- 
che ou  uniforme,  le  jarre  échappe  à  l'action  des  matières 
colorantes  et  marcpie  de  fils  blancs  d'argent,  plus  ou  moins 
nombreux,  les  tissus  dans  lesquels  il  se  rencontre. 

Les  toisons  jarreuses  sont,  pour  ces  deux  raisons,  fort 
dépréciées  pai-  elles-mêmes,  et  déprécient  tous  les  lots  de 
laine  qui  en  contiennent. 

Véjarrage  a  pour  objet  d'expurger  les  toisons  jarreuses 
du  jarre  qu'elles  renferment. 

Dans  les  peignages  et  les  filatures,  on  ne  procède  pas  à 
Véjarrage  des  toisons.  C'est  une  opération  peu  piatique, 
pour  ne  pas  dire  peu  économique. 

11  est  à  remarquer  que  le  jarre,  qui  est  en  somme  un 
poil  grossier,  se  rencontre  d'autant  plus  facilement  que 
les  toisons  sont  plus  ordinaires. 

Les  toisons  très  fines,  très  soyeuses,  en  sont  générale- 
ment exemptes.  On  peut  s'expliquer  ainsi  pourquoi  toutes 


CONTRIBUTION   A  l'ÉTI  DE   DE   l'iNDUSTRIE   PASTORALE  -95 

les  opérations  qui  tendent  à  raniélioiation  des  toisons 
(par  la  sélection  des  reproducteurs  à  belle  laine)  amènent 
vite  la  disparition  totale  du  jarre. 

Dans  les  pays  de  grosse  production  du  mouton  (Austra- 
lie, Cap,  Argentine),  pour  ne  citer  que  ceux-là,  l'infusion 
du  sang  mérinos  et  du  lincoln  n'a  pas  peu  contribué,  non 
seulement  à  absorber  les  laines  autochtones,  mais  encore 
à  faire  disparaître  le  jarre  d'une  façon  totale,  absolue. 
Pour  cela,  d'ailleurs,  l'utilisation  de  races  améliorées  n'est 
pas  nécessaire  ;  il  suffît  que  les  géniteurs  employés,  pris 
dans  le  pays  même  où  l'on  opère,  offrent  des  toisons  sans 
jarre. 

Les  laines  des  sujets  issus  de  géniteurs  améliorateurs 
étrangers,  sont  dites  croisées. 


Bourre.  —  Duvet.  —  Blousse 


Dans  une  toison,  tout  n'est  pas  utilisé  pour  la  filature. 
A  côté  des  brins  de  laine,  plus  ou  moins  longs,  il  y  a,  en 
plus,  en  quantité  variable,  une  matière  laineuse  très 
courte,  qui  reste  adhérente  aux  peignes  pendant  l'opéra- 
tion du  peignage.  Cette  matière  prend  le  nom  de  blousse, 
bourre  ou  duvet.  C'est  le  terme  blousse  qui  est  le  plus 
communément  employé. 

Le  produit  du  peignage,  c'est-à-dire  l'ensemble  des 
brins  de  laine  assez  longs  pour  être  utilisés  à  la  filature, 
prend  le  nom  de  cœur.  De  sorte  que,  dans  une  toison, 
on  a  : 

A.  —  Le  cœur,  qui  est  la  partie  utilisable  pour  la  fila- 
ture. Les  Arabes  l'appellent  sdà  et  tââma. 

B.  —  La  blousse,  qui  est  en  quelque  sorte  un  déchet 
relatif,  sorte  de  bourre  laineuse  d'aspect  cotonneux, 
retenue  par  les  peignes.  Les  Arabes  désignent  cette  bourre 
ou  blousse  sous  le  nom  de  iendguïa. 

Le  sdà  est  composé  des  brins  les  plus  longs,  il  est 
employé  à  la  fabrication  des  fils  de  chaîne  qui  portent 
d'ailleurs  le  nom  de  sdà.  Ces  fils  sont  filés  à  la  quenouille. 
La  fileuse  se  tient  debout.  Le  poids  de  la  quenouille  et  la 
hsfuteur  à  laquelle  elle  se  trouve  suspendue,  fait  que  la 
torsion  des  brins  de  laine  se  trouve  poussée  à  un  degré 


296  CONTRIBUTION    A    I/ETinK    DK    I.'lNDlS  IIUK    PASTORALE 

assez  forl  v[  1rs  (ils  obtenus  n'en  sonl  que  plus  denses  et 
plus  résistants. 

La  fâânia  eompiend  les  brins  de  laine  trop  eourts  pour 
former  des  iiibans.  Tandis  que  les  dents  du  peigne  suiïi- 
sent  pour  paralléliser  les  brins  du  sdo,  les  brins  courts  de 
la  tàdina  sont  parallélisés  par  la  carde.  Les  fils  émanant 
de  la  tââina  sont  filés  en  station  assise  ;  ils  sont  plus  gros 
que  les  fils  de  chaîne,  moins  denses,  plus  moelleux  si  l'on 
peut  dire,  moins  résistants  à  la  traction.  Tandis  que,  sur 
le  métier  à  tisser,  les  fils  de  chaîne  ou  sdà  sont  perpendi- 
culaires, les  fils  de  trame  ou  tââina  sont  horizontaux.  Ce 
sont  les  fils  de  tââma  qui  donnent  aux  tissus  de  laine  de 
l'industrie  arabe  leur  moelleux.  Dans  certains  tissus, 
tapis  ras,  gh'raras,  flidj,  amaras,  il  n'y  a  que  des  fils  de 
sdà  ou  de  chaîne,  tantôt  en  laine  pure,  tantôt  composés 
de  brins  de  laine,  de  poil  de  chèvre  et  de  brins  de  laine  de 
chameau. 


Le  suint.  —  L.aines  en  toisons  ou  en  suint 

La  peau  du  mouton  sécrète,  ou,  plutôt,  sécrète  et  excrète 
deux  sortes  de  matières  : 

L'une,  le  sébum,  qui  donne  leur  onctuosité  à  certaines 
régions  de  l'épiderme,  l'autre,  la  sueur, dont  la  production 
varie  avec  la  température  ambiante  et  l'état  de  fatigue  ou 
de  repos  de  l'animal.  Le  mélange  de.  ces  deux  matières 
dont  l'une  est  produite  en  quantité  à  peu  près  invariable 
(le  sébum)  et  l'autre  (la  sueur)  dont  le  quantum  est  sujet 
à  lluctuations,  prend  le  nom  de  suint.  Le  suint  (vuda'h) 
imprègne  les  brins  de  laine  et  les  met  à  l'abri  tant  de  la 
sécheresse  que  de  l'humidité.  Les  toisons  sont  plus  ou 
moins  suinteuses  ou  grasses,  suivant  la  saison  et  l'état  des 
sujets  considérés.  C'est  en  été  surtout  ([ue  le  suint  est  le 
plus  abondant.  Il  est  réduit  pendant  les  autres  saisons  de 
l'année.  L'anémie,  l'inanition,  l'état  de  maladie  du  mou- 
ton réduisent  et  suppriment  parfois  la  production  du 
suint,  liviant  ainsi  la  peau  à  la  pullulation  des  parasites 
les  plus  divers  (gales,  poux,  tiques,  etc.). 

La  sueur  est  seule  soluble  dans  l'eau. 

Le  sébum  (ouda'h)  ne  cède  qu'à  l'action  des  savonneux 
ou  des  produits  qui  le  dissolvent. 

De  sorte  que  dans  le  lavage  des  laines  à  l'eau  claire,  une 


CONTRIBUTION    A    l'kJ  l  DE    DE    l'iNDI  STHIK    PASTORALE  297 

partie  seulement  du  suint  (la  sueur)  ou  portion  sudorale 
disparaît,  tandis  que  la  portion  sébacée  reste. 

Nous  avons  dit  tout  à  l'heure  que  la  production  sudorale 
est  fonction  de  la  température  de  l'air  et  de  l'état  de  repos 
ou  de  fatigue  du  sujet.  Ce  fait  est  mis  à  profit  par  les 
fraudeurs  pour  assurer  une  plus  complète  adhérence  des 
poussières  aux  toisons  à  dos  qu'ils  veulent  maquiller 
^fraude  des  laines).  Quand  la  laine  est  normale,  c'est-à- 
dire  telle  qu'elle  résulte  de  la  tonte,  on  la  dit  laine  en  toi- 
son ou  en  suint .  Ke  sujet  n'ayant  subi  avant  la  tonte  aucun 
lavage  préalable,  la  laine  renferme  les  excrétions  normales 
de  la  peau  ;  c'est  la  laine  brute  en  un  mot. 


Les  corps  étrangers 

Une  toison,  indépendamment  de  ses  qualités  de  finesse, 
de  sa  teneur  en  jarre,  et  de  sa  richesse  plus  ou  moins 
grande  en  suint,  est  plus  ou  moins  pure,  suivant  la  quan- 
tité plus  ou  moins  grande  de  matières  étrangères  qu'on  y 
rencontre. 

Nous  appellerons  matières  étrangè7'es  tout  ce  qui,  dans 
une  toison,  ne  résulte  pas  de  l'activité  vitale  du  mouton. 

Le  jarre,  le  suint,  sont  des  produits  naturels  de  la  peau, 
tandis  que  tout  ce  qui,  dans  une  toison,  ne  résulte  pas  de 
l'activité  vitale  du  mouton,  constitue  ce  que  nous  appelle- 
rons les  matières  étrangères  à  la  toison.  Les  principales 
matières  étrangères  sont  :  les  poussières,  le  sable,  le  gra- 
vier, les  chardons  et  surtout  le  liaska,  fruit  épineux  de  la 
luzerne  ridée,  denticulée.  Cette  luzerne  est  très  commune 
dans  la  zone  saharienne  du  cercle  de  Géryville. 

Dans  cette  région,  lorsque  les  troupeaux  hivernent  au 
Sud  d'El  Abiod  Sidi  Cheikh,  leurs  toisons  se  chardonnent 
sous  le  ventre,  au  niveau  des  coudes,  des  cuisses.  Les 
épines  du  jujubier  sauvage  fsedra)  se  rencontrent  égale- 
ment dans  les  toisons.  Les  moutons  du  Tell  n'en  sont  pas 
exempts,  car  cet  arbuste  est  fréquent  dans  les  plaines  de 
cette  zone. 

Les  matières  colorantes  d'aniline  utilisées  pour  le  mar- 
quage des  troupeaux  sont  aussi  des  corps  étrangers  et,  à 
ce  titre,  leur  proportion  au  sein  des  toisons  doit  être  res- 
treinte le  plus  possible. 

Parmi  les  impuretés  qui  souillent  ou  surchargent  les 


298  CONTRIBLTION    A    l'ÉTLDE    DK    l'i.NOI'SI  UIE    TA^TOKALE 

ioisons,  il  en  est  qui  sont  iiiliéronles  au  mode  de  vie 
imposée  aux  troupeaux;  d'autres  sont  intentionnellement 
surajoutées  et  relèvent  de  la  fraude.  C'est  pourquoi,  si  l'on 
veut  porter  sur  une  laine  une  appréciation  juste,  il  est  bon 
de  savoir  faire  le  départ  entre  une  laine  naturellement  salie 
et  une  laine  intentionnellement  fraudée.  Pour  cela,  voyons 
comment  se  comportent  les  moutons  nomades  qui  four- 
nissent les  toisons  dites  de  (ji'ands  pacages  et  les  moutons 
élevés  en  bergerie  et  dont  les  laines  sont  dites  laines  colon 
ou  de  stabulation. 


Laines  de  jjraiuls  pacages  et  laines  de  stabulation 

Les  troupeaux  de  moutons  devraient  vivre,  en  général, 
partie  en  plein  air,  partie  sous  des  abris. 

Mais  en  Algérie,  et  notamment  dans  la  région  des  Hauts 
Plateaux  et  dans  une  portion  de  la  zone  saharienne,  les 
moutons  vivent  continuellement  dehors,  exposés  à  toutes 
les  intempéries,  sans  jamais  être  abrités.  Celte  rude  exis- 
tence qui  leur  est  imposée  depuis  d'innombrables  géné- 
rations, a  contribué  à  faire  des  moulons  d'Algérie  en 
général,  et  des  moutons  du  Sud  en  particulier,  des  sujets 
d'une  rare  sobriété  et  d'une  étonnante  résistance.  11  a  bien 
fallu,  au  prix  d'hécatombes  incalculables,  que  nos  ovins 
s'adaptassent  aux  conditions  du  milieu,  sans  quoi  ils 
n'auraient  jamais  pu  faire  souche  et  se  perpétuer  jusqu'à 
nous. 

Ce  qui  nous  intéresse,  pour  le  moment,  d'une  façon 
plus  particulière,  c'est  l'adaptation  tégumentaire.  Nous 
devons  envisager  nos  troupeaux  fcomme  s'ils  vivaient 
absolument  à  l'état  de  natuie,  l'intervention  des  pasteurs 
nomades  indigènes  ayant  été  de  tous  temps  presque  négli- 
geable. D'ailleurs,  la  sélection  naturelle  a  pu  faire  son 
œuvre  sans  être  aucunement  contrariée.  Veut-on  envi- 
sager quelle  est  la  qualité  de  la  laine  qui  répond  le  mieux 
à  tel  ou  tel  milieu,  on  arrive  à  cette  conclusion  : 

1°  A  climat  sec,  oi!i  les  extrêmes  de  température  se  ren- 
contrent, correspond  une  laine  fine,  soyeuse,  quasi- 
mérine  en  un  mot,  la  laine  saharienne,  çouf  ratba  ; 

2°  A  climat  humide,  tempéré,  correspond  la  laine  sans 
mèche,  chevelue,  zouléï  en  un  mot. 

Mais,  en  réalité,  si  l'on  tient  compte  de  l'intervention 


CONTRIBUTION   A   l'ÉTUDE    DE    l'iNDUSTRIE    PASTORALE  299 

de  l'homme  (lui  trouble  souvent  à  son  profit  les  lois  les 
plus  harmoniques,  ou  qui,  par  son  laisser-aller  incons- 
cient, comme  nos  éleveurs  du  Sud,  contribue  à  créer  celte 
désharmonie,  (jue  voyons-nous  ? 

Les  accouplements  désordonnés  entre  troupeaux  à  laine 
fine  et  troupeaux  à  laine  giossière  ont  amené  la  produc- 
tion de  sujets  à  toisons  mitigées,  mélangées,  et  par  suite 
à  la  production  des  variétés  les  plus  disparates,  suscep- 
tibles de  trouver  leur  classement  entre  les  deux  types  de 
laine  signalés  plus  haut  :  entre  le  type  fin,  soyeux  (çouf 
ratba)  et  le  type  chevelu,  grossier  (çouf  zouléïV 

De  plus,  la  variation,  ou  plutôt  l'adaptation  de  la  laine 
aux  conditions  du  milieu  n'étant  pas  fatalement  une  con- 
dition indispensable,  sous  peine  de  mort  ou  de  disparition 
inéluctable  du  sujet,  les  toisons  réalisées  se  sont  mainte- 
nues. Mais  il  n'en  est  pas  moins  vrai  que,  sous  un  climat 
sec,  marqué  par  des  variations  thermométriques  extrêmes, 
les  toisons  fermées,  denses,  à  mèches  serrées,  à  brins  fins 
et  soyeux,  apparaissent  comme  les  plus  en  harmonie  avec 
le  milieu  considéré. 

Sous  un  climat  humide,  mais  tempéré,  les  toisons 
ouvertes,  chevelues,  répondent  mieux  aux  conditions 
thermo-hygrométriques  d'un  pareil  milieu. 

Nous  verrons  plus  loin  que  sur  les  Hauts  Plateaux  et 
dans  le  Sahara,  le  type  de  laine  le  plus  adéquat  au  climat 
et  aux  conditions  météoriques  de  ces  régions,  c'est  le  type 
qui  se  rapproche  de  la  laine  mérine.  Et  c'est  à  ce  type  de 
laine  qu'il  y  aura  lieu  de  recourir,  chaque  fois  qu'il  sera 
question  de  modifier  nos  laines  du  Sud.  Hàtons-nous 
d'ajouter  qu'il  n'est  pas  indispensable  de  recourir  à  la 
race  mérinos  pour  choisir  les  géniteurs  améliorateurs,  les 
groupements  ovins  du  Sud  renferment  de  merveilleux 
spécimens  de  moutons  lanigères,  c'est-à-dire  porteurs  de 
toisons  fines  bien  supérieures  aux  toisons  du  mérinos  pur, 
parce  qu'en  outre  de  la  finesse  du  brin,  elles  possèdent, 
à  l'inverse  du  mérinos,  des  mèches  longues,  fournies  et  du 
bouffant. 

En  résumé,  un  mouton  à  toison  fine  et  soyeuse,  fermée, 
réussira  mieux  en  pays  sec  à  variations  thermométriques 
extrêmes,  qu'un  congénère  à  laine  ouverte,  chevelue, 
grossière.  Il  luttera  mieux  contre  la  sécheresse  de  l'atmos- 
phère car  sa  toison  emprisonne  dans  l'enchevêtrement  de 
ses  mèches  et  de  ses  brins,  un  certain  volume  d'air  qui 
constitue  le  meilleur  des  isolants  contre  l'action  dessé- 


300       co>ri\iBL"ïio>  A  l'étude  de  l'industrie  pastorale 

chante  du  milieu  ;  il  soia  mieux  protégé  contre  les  varia- 
tions thcimométiiques,  car  l'action  protectrice  de  l'air 
emprisonné  dans  la  toison  s'ajoute  à  l'action  de  la  laine 
qui  est  adiathermane ,  c'est-à-dire  sinon  absolument 
imperméable,  du  moins  très  difficilement  perméable  à  la 
chaleur. Quele rayonnement  du  calorique  émane  du  corps 
du  mouton  vers  r<'xlérieur,  ou  qu'il  prenne  sa  source 
dans  le  milieu  ambiant  pour  aller  imprest^ionner  la  peau, 
la  toison  fermée,  avec  l'air  emprisonné  dans  ses  mailles, 
joue  bien  le  rôle  d'écran  à  double  fond,  protecteur  contre 
le  refroidissement  et  contre  l'échauffement. 

Cependant,  il  ne  faut  pas  perdre  de  vue  que  la  vie  au 
dehors,  sur  les  Hauts  Plateaux,  imprime  tout  de  même 
une  certaine  rudesse  aux  brins,  car,  hiver  comme  été,  le 
mouton  doit  se  défendre  contre  le  froid  hivernal  et  la  fraî- 
cheur estivale  des  nuits. 

La  peau  également  s'épaissit  ou  s'affine  selon  les  varia- 
tions thermométriques  du  milieu. 

Cette  existence  de  perpétuel  nomadisme,  à  travers  les 
immenses  steppes  du  Sud,  expose  les  moutons  à  toutes  les 
souillures. 


Le  crottaçe  des  toisons 
Les  crotteux  ou  toisons  crottées 

Lors  du  renouveau  de  la  végétation,  ou  lors  de  coups 
de  froid,  ou  bien  lorsque  les  herbes  sont  absorbées  cou- 
vertes de  gelée  blanche,  les  animaux  purgent  {içeyyeho, 
selon  l'expression  des  indigènes),  les  moutons  sont  meflou- 
tine  ou  relâchés  ;  en  un  mot,  ils  ont  de  la  diarrhée. 

Les  déjections  herbeuses,  le  flux  diarrhéique,  souillent 
les  régions  postérieures  du  corps,  s'y  agglomèrent  en 
pelotes  plus  ou  moins  volumineuses,  de  forme  sphérique, 
qui  se  dessèchent  sur  les  mèches  qu'elles  emprisonnent, 
elles  déterminent  ce  qu'on  est  convenu  d'appeler  crottes 
ou  (kâàl)  selon  l'expression  des  indigènes  et  qui  signifie 
(queue)  ou  plutôt  'caudales). 

Les  toisons  qui  offrent  de  telles  souillures  sont  dites 
crottées.  Dans  le  langage  consacré  par  l'usage,  les  crot- 
teux sont  les  toisons  crottées. 

Le  crottage  des  toisons,  dans  les  exploitations  euro- 
péennes, peut  être  évité  si  l'on  fait  subir  aux  moutons 


COMRIBIITION   A   l'ÉTIDE   DE   l'iNDUSTRIE   PASTORALE  301 

l'amputation  de  la  queue  et  la  toilette  des  abords  de  l'anus, 
par  enlèvement  ou  laceourcissement  des  mèches  «{ui  sont 
exposées  aux  souillures  fécales. 

Malgré  cela,  les  moutons  peuvent  crotler  leurs  toisons 
sur  le  sol  des  hangars,  abris,  lorsque  les  litières  ne  sont 
pas  sullisamment  renouvelées,  ou  que  le  sol  des  bergeries 
ne  répond  pas  par  sa  déclivité  aux  conditions  imposées 
par  1  hygiène  ;  les  crottins  se  diluent  dans  les  mares  d'urine 
et  le  purin  qui  en  résulte  souille  largement  les  moutons 
qui  s'y  couchent.  Le  crottage  des  laines  de  stabulation 
dépend  donc  du  mauvais  enlietien  des  enclos  ou  des  abris 
bergeries.  Il  intéresse  en  outre,  non  seulement  les  régions 
postérieures  du  corps,  mais  encore  les  régions  qui 
touchoMl  le  sol  dans  le  décubitus,  c'est-à-dire  la  région 
sternale,  le  ventre,  les  faces  latérales  des  cuisses.  Il  en 
résulte  que,  même  à  taux  égal  de  crolteux,  les  laines  de 
stabulation  sont  plus  dé|)réciées  que  les  laines  dites  de 
grands  pacages. 

Les  souillures  par  la  boue  disparaissent  après  dessica- 
tion  ;  mais  les  souillures  par  les  crottes  communi(|ucnt 
aux  brins  de  laine  une  teinte  herbeuse  confinant  au  jaune 
verdàtie,  grâce  aux  matières  chlorophyliennes,  et  difficile 
à  faire  disparaître. 

Donc,  toute  toison  est  d'autant  plus  dépréciée  qu'elle 
est  plus  ou  moins  crottée. 

Après  la  tonte,  il  est  indiqué  d'enlever  tous  les  crotteiix 
et  de  les  emballer  à  part,  car  ils  peuvent  déteindre  sur  lés 
toisons  qui  les  emprisonnent  et  amener  une  grosse  dépré- 
ciation du  lot  tout  entier. 

A  côté  des  crottes  d'origine  stercorale,  provenant  des 
déjections,  et  que  nous  appellerons  crottes  stercovales  ou 
herlicuses,  il  y  a  lieu  de  distinguer  les  crottes  sébacées 
cc^nstituées  par  un  agglomérat  de  suint  emprisonnant  des 
mèches.  Ces  crottes  sont  de  couleur  marron,  chocolat,  et 
elles  peuvent  atteindre  un  volume  assez  notable.  On  les 
trouve  sur  les  bords  postérieurs  des  cuisses,  aux  aisselles, 
partout  oii  le  frottement  facilite  l'enroulement  des  mèches 
et  leur  emprisonnement  dans  le  suint  qui  finit  par  se  des- 
sécher. Les  crottes  sébacées  se  rencontrent  aussi  au  niveau 
des  testicules  et  jusque  sous  le  ventre  ;  elles  sont  englo- 
bées dans  les  kronches  ou  mèches  souillées  ventrales.  Les 
crottes  formées  par  le  suint  concrète  autour  des  mèches 
diminuent  le  rendement  ou  poids  d'une  toison;  l'industrie 
en  tire  quelque  chose  à  la  rigueur  ;  elle  utilise  aussi  le 


302  CONTRIBUTION   A   l'ÉTIDE    DL    l'inDUSTKIE    PASTORALE 

suint  non  concrète  qui  innprègnc  tout  le  reste  des  brins, 
car  cette  sécrétion  sert  à  faire  du  savon  et  ne  détériore  en 
aucune  façon  les  mèches  qu'elle  enrobe. 

Par  suite,  les  crottes  à  suint  ou  sébacées  déprécient 
moins  une  toison  (jue  les  crottes  d'origine  intestinale. 
Mais  il  est  préférable  que  le  taux  des  crottes  des  deux  caté- 
gories (herbeuses  et  sébacées)  soit  réduit  au  minimum. 

A  cet  égard,  et  quel  que  soit  ce  taux,  on  peut  penser 
que  nos  laines  d'Afrique,  qui  perdent  au  lavage  la  moitié 
de  leur  poids,  gagneraient  à  être  exportées  préalablement 
lavées.  L'utilisation  du  suint  par  l'industrie  ne  saurait 
sûrement  compenser  l'excès  des  frais  de  transport  qu'en- 
traîne la  laine  brute,  c'est-à-dire  non  lavée.  Le  fret,  on  le 
comprend,  est  deux  fois  plus  élevé  pour  une  laine  en  suint 
que  pour  cette  même  laine  préalablement  débarrassée  de 
oo  %  des  impuretés  qui  la  surchargent. 

Mais,  comme  nous  le  verrons  plus  loin,  le  lavage  préa- 
lable des  toisons  avant  leur  exportation  n'est  point  pra- 
tique. Le  lavage  à  dos,  seul,  avant  la  tonte,  pourrait  être 
utilisé. 


Laines  souillées  par  des  corps  étrangers 

Nous  avons  déjà  vu  que  la  toison  des  moutons  au  pacage 
pouvait  se  charger  de  terre,  de  sable,  de  gravier,  de  boue, 
de  haska,  de  sedra.  Il  est  évident  que  l'adjonction  à  la 
toison  d'une  plus  ou  moins  grande  quantité  de  ces  corps 
élrangeis  en  fait  varier  la  valeur. 

Un  berger  soigneux  peut  débarrasser  ses  moutons  des 
brindilles  de  sedra.  Le  haska  s'enlève  au  peignage  ;  mais 
si  le  nombre  de  gousses  est  élevé,  comme  cela  a  lieu  sur- 
tout pour  les  laines  sahariennes,  le  peignage  provoque  la 
rupture  des  brins.  Une  bonne  laine  ne  doit  pas  présenter 
plus  d'un  chardon  (haska)  par  vingt  mètres  de  ruban 
peigné. 

Quant  aux  autres  corps  étrangers  :  terre,  sable,  leur 
proportion  dans  une  toison  varie  avec  la  nature  des  ter- 
rains de  parcours,  avec  les  mouvements  atmosphériques 
et  les  conditions  climatériques. 

Ces  matières  augmentent  évidemment  le  poids  de  la 
toison  ;  l'état  hygrométri(jue  de  l'air,  également.  En  pays 
humide,  une  laine  normale  pèse  davantage  qu'en  pays 
sec,  mais  en  plein  été,  même  en  pays  sec,  l'équilibre  est 


CONTRIBUTION   A   l'ÉTUDE   DE    L'iNDUSTRIE    PASTORALE  303 

rétabli  grâce  à  une  sécrétion  plus  abondante  du  suint 
(oudah)  qui  imprègne  les  brins  et  leur  donne  plus  de 
poids. 

D'ailleurs,  il  est  de  notion  courante  que  les  laines  qui 
traversent  la  mer  se  chargent  d'humidité  et  pèsent  davan- 
tage. Nous  verrons  dans  le  chapitre  des  fraudes  que  les 
liquides  (eau,  petit  lait)  sont  employés  non  seulement 
pour  surfaire  le  poids  des  toisons,  mais  encore  pour  assu- 
rer l'adhérence  des  corps  étrangers  aux  mèches. 

Les  couleurs  d'aniline  et  le  goudron  employés  pour  le 
marquage  à  dos  des  moutons  déprécient  les  laines  mais 
n'en  font  guère  varier  le  poids. 

En  résumé,  une  toison  varie  de  poids  et  de  prix  et  pos- 
sède une  utilisation  différente  suivant  : 

1°  Son  plus  ou  moins  grand  degré  de  finesse  de  brin; 

2°  Sa  plus  ou  moins  grande  teneur  en  jarre  ; 

3°  Sa  teneur  en  cœur  ; 

[\.°  Sa  teneur  en  blousse  ; 

5°  Sa  richesse  en  suint  ; 

6°  Sa  teneur  en  crottes  ; 

7°  Sa  teneur  en  chardons  ; 

8°  Sa  teneur  en  eau  ; 

9°  Sa  teneur  en  terre  ou  gravier  ; 

io°  Sa  teneur  en  matières  colorantes  ou  coaltarées. 

D'après  cette  énumération,  on  conçoit  que  le  rendement 
et  la  valeur  des  laines  sont  très  variables. 


Du  rendement 

Une  toison  (laine  brute  ou  en  suint)  donne  deux  sortes  de 
rendements  : 

1°  Un  rendement  en  lavé  à  fond  ; 
2°  Un  rendement  au  peignage. 

Le  lavage  de  la  toison  en  élimine  d'abord  une  grande 
partie  des  corps  étrangers  :  suint,  gravier,  terre,  matières 
colorantes  solubles. 

Mais  après  ce  lavage,  la  laine  a  retenu,  malgré  tout,  une 
certaine  quantité  d'eau.  Si  l'on  veut  donc  connaître  son 
rendement  absolu,  api-ès  lavage  à  fond,  on  la  débarrasse 
de  toute  trace  d'humidité  en  la  desséchant  dans  le  vide. 


304       coNïKirti  rioN  a  l'étldf  de  l'industrie  pastorale 

On  a  ce  qu'on  appelle  alors  le  rendement  en  lavé  ù  fond. 
Le  poids  d'eau  ainsi  enlevé  peut  êlie  évalué  à  i8  %. 

Le  peifjnage  débairasse  les  mèches  des  corps  étrangers 
végétaux  qui  s'y  trouvent  accrochés  et  donne  la  quantité 
de  brins  utilisables  pour  la  filature,  déduction  faite  de  la 
blousse,  du  duvet,  de  la  bourre,  retenus  dans  les  peignes. 

L'opération  du  lavage,  avec  desséchage  dans  le  vide, 
fournit  le  rendement  absolu  commercial,  en  tant  (jue 
matière  première  piise  en  bloc. 

Le  peignage  donne  le  n>ndemenl  industriel  à  la  filature. 

L'opération  ultime  du  lavage  (déshydratation  dans  le 
vide,  rend  donc  inutile  la  tentation  d'alourdissement  de 
la  laine  pratiquée  par  certains  vendeurs  peu  scrupuleux. 

Dans  ce  but,  ces  vendeurs  mouillent  leurs  laines  ou  se 
contentent  de  les  emmagasiner  dans  des  locaux  humides 
oij,  en  raison  de  leur  propriété  hygrophile,  les  brins  de 
laine  se  chargent  de  Ihumidité  de  l'air. 

De  tels  procédés,  en  plus  de  leur  caractère  déloyal,  sont 
aisément  éventés  et  il  en  résulte  une  baisse  de  prix  sur  la 
marchandise  '. 

Quand  il  s'agit  de  laines  plus  ou  moins  chargées  en 
sable,  l'acheteur  éprouve  des  diiïicullés  pour  établir  le 
prix  à  offrir,  alin  d'éviter  une  perte,  ce  qu'en  terme 
de  métier  on  appelle  éviter  la  coiffe,  c'est-à-dire  Ferreur 
d'évaluation. 

Les  prix-limites  imposés  aux  acheteurs  par  les  indus- 
triels s'entendent  toujours  en  lavé  à  fond. 

La  taxe  pour  déterminer  le  prix  en  lavé  à  fond  est  don- 
née par  la  perte  de  poids  qu'après  lavage  subissent  loo  kil. 
de  laine  en  suint. 

Ainsi  loo  kilos  de  laine  en  suint  à  i  fr.  20  le  kilo,  taxés 
à  3o  %  en  lavé  à  fond,  mettront  la  laine  à  4  francs  le  kilo. 
En  effet,  les  100  kilos  bruts  coûtent  120  francs,  mais  le 
lavage  à  fond  ne  rendant  que  3o  kilos,  ces  .3o  kilos  coûtent 
120  francs.  Le  kilo  revient  donc  à  à  francs. 

On  voit  que,  pour  obtenir  une  laine  lavée  à  fond  à 
Il  francs  le  kilo,  il  ne  faut  pas  que  la  laine  en  suint 
rendue  à  l'usine,  soit  payée  plus  de  i  fr.  20  le  kilo.  Il  est 
des  laines  dont  la  taxe  après  séchage  et  déshydratation 
dans  le  vide  est  inférieure  à  3o  %. 

On    voit   que   ce   n'est   pas   toujours    chose   aisée   que 


T   Hiipporl  (le  M.   Diitlidit,  expert  près  le  Syndical  des  peigneurs  de  Croix- 
Roubaix,   Tourcoing. 


CONTRIBUTION   A    l'ÉTLDE    DE    L'iNDUSTRIE    PASTORALE  î^îOo 

d'acheter  à  bon  es(>icnt,  car  par  suite  de  la  moindre  erreur 
d'appréciation,  la  coiffe  peut  prendre  des  proportions 
exagérées. 

Nos  laines  d'AIVique,  en  raison  de  leur  mélange,  des 
fraudes  dont  elles  sont  susceptibles  d'être  l'objet,  et  de 
tous  les  corps  étrangers  qu'on  peut  y  rencontrer,  des  pro- 
portions variables  en  jarreuses  et  en  gris,  sont  1res  dilTi- 
ciles  à  taxer.  Aussi  les  piix  olïerls  sont  toujours  bas.  Pour- 
tant certaines  maisons  d'exportation  d'Algérie  consentent 
à  ne  vendre  qu'au  conditionneincnt.  Leurs  laines  sont 
lavées  à  l'usine  n'éme,  séchées  et  le  calcul  du  rendement 
établi  ;  l'acheteur  pouvant  alors  faire  des  offres  sur  une 
base  solide,  la  transaction  ne  lui  léserve  aucune  surprise. 
Mais  tous  nos  exportateurs  ne  peuvent  accepter  pareilles 
conditions  et  nos  laines  restent  dépréciées  fatalement,  car 
les  industriels  de  la  Métropole  veulent  éviter  la  coiffe. 

Lorsque  le  rendement  est  calculé  au  peignage,  il  est 
naturellement  inférieur  au  rendement  en  lavé  à  fond, 
parce  que  le  peigne  enlève  la  blousse. 

D'ailleurs  les  déchets  au  peignage  sont  d'autant  plus 
forts  que  la  laine  est  moins  résistante  à  la  traction.  Si  les 
brins  cassent  facilement,  ce  qui  est  retenu  par  les  peignes 
s'en  accroîtra  d'autant  et  le  rendement  en  sera  diminué. 

Etant  donné  le  prix  en  lave  à  fond,  on  peut  calculer- le 
prix  de  revient  au  peignage.  Il  sulïit  pour  cela  d'ajouter  à 
ce  prix  en  lavé  à  fond  :  0.02  au  kilo  brut  ;  o.4o  au  kilo 
peigné  (façon  peignage),  augmenté  de  la  perte  de  valeur 
résultant  des  blousses  et  déchets  sur  le  prix  du  lavé  à  fond 
et  de  la  dépréciation  des  écarts  pendant  le  triage  en  brut. 

Le  triage  en  brut  d'une  quantité  de  laine  déterminée, 
consiste  à  en  écarter  les  jarreux,  les  gris  et  les  toisons 
cassantes.  Tout  ce  qui  est  ainsi  prélevé  comme  inférieur, 
prend  le  nom  d'écart,  pendant  le  triage  en  brut. 

Avant  le  lavage,  la  laine  en  suint  est  triée  en  prime, 
fine,  semi-fine,  jarreux,  crotteux.  Tous  ces  écarts  doivent 
entrer  en  ligne  de  compte  pour  l'évaluation  du  prix  après 
le  peignage,  connaissant  le  prix  du  lavé  à  fond.  Nous  ver- 
rons plus  loin  que  le  classement  et  le  triage  en  brut  des 
toisons  n'est  pas  une  opération  à  la  portée  de  tout  le 
monde,  car  chaque  toison  offre  au  moins  six  qualités  de 
brins  et  chacune  de  ces  qualités  correspond  à  une  région 
bien  déterminée  de  la  surface  du  corps.  Pour  fixer  les 
idées,  nous  donnons  ci-après  le  schéma  d'une  toison 
avec  toutes  ses  divisions. 


306 


CONTRIBUTION   A   L  ETUDE   DE   L  INDUSTRIE    PASTORALE 


Schéma  d'une  toison  étalée, 
divisée  en  régions  suivant  finesses 


Extra-prime  :  Epaules. 

i"  Finesse  :  Flanc,  Bas  d'épaule,  Longée  du  cou. 

2"    Finesse  :  Bas  de  flanc,  Avant-cuisses. 

3*    Finesse  :  Garrot,  Gorge,  Ventre,  Cuisses. 

k^    Finesse  :  Dos,  Colleret,  Bas  de  cuisse. 

5*    Finesse  :  Queue,  Têtard. 

6*    Finesse  :  Pattelcttes  (à  part). 

Déchets  :  Crotteux  (à  part). 

Déchets  :  Pissottes  (à  part). 


CONTRIBUTION   A    l'ÉTUDE   DE    l'iNDUSTRIE   PASTORALE  307 

Mais,  nous  le  répétons,  l'acheteur  métropolitain,  en 
achetant  nos  laines  d'Africjue  aussi  bien  que  celles  d'Aus- 
tralie, du  Cap  ou  de  l'Argentine,  offre  son  prix  en  suint 
rendu  à  Vusine  en  prenant  pour  base  le  rendement  en  lavé 
à  fond  suiv(utt  la  taxe  qui  lui  est  imposée,  comme  nous 
l'avons  montré  plus  haut. 


Coloration  des  laines 
Laines  blanches,  laines  naturelles,  laines  grises 

En  général,  les  moutons  sont  blancs,  sauf  dans  la  région 
faciale  qui  est  parfois  blanche  aussi  (chegueur) ,  mais  qui 
offre,  en  Algérie,  tantôt  une  couleur  acajou,  tantôt  fro- 
ment, tantôt  fruitée  souvent  envahie  par  le  blanc. 

La  coloration  blanche  du  corps  domine  et  elle  est  main- 
tenue, dans  les  régions  grosses  productrices  de  bétail  à 
laine,  grâce  à  une  sélection  constante  et  rigoureuse.  Mais 
en  Algérie,  la  surveillance  et  le  choix  des  reproducteurs 
sont  illusoires,  le  pasteur  nomade  indigène  s'en  désinté- 
resse presque  complètement.  De  plus,  la  vie  d'errance 
imposée  aux  troupeaux  dans  les  immenses  régions  qui 
leur  servent  de  parcours,  la  transhumance  qui  oblige  les 
moutons  les  plus  divers  à  passer  d'une  zone  à  une  autre, 
les  luttes  (accouplements)  qui  sont  livrées  au  hasard  du 
rut  et  des  saisons,  tout  cela  contribue  non  seulement  à 
masquer  le  type  morphologique  (c'est-à-dire  la  forme)  de 
tel  ou  tel  mouton,  mais  encore  donne  lieu  à  la  production 
d'un  grand  nombre  de  variétés  de  laines,  comme  lon- 
gueur de  brins,  finesse,  frisure  et  influe  même  sur  la  colo- 
ration des  toisons. 

On  rencontre  des  toisons  qui  sont  franchement  noires, 
marron  ou  rousses.  Elles  constituent  des  particularités. 
Ces  laines  sont  dites  laines  bien  naturées. 

Assez  souvent,  la  distribution  du  noir,  du  marron,  du 
roux,  du  froment,  de  l'acajou,  n'est  que  l'empiétement 
de  la  couleur  fondamentale  de  la  face  sur  le  cou,  parfois 
sur  le  poitrail  et  jusqu'au  milieu  du  thorax.  De  telles  toi- 
sons sont  dites  (drââ) . 

De  toutes  façons,  la  couleur  faciale  a  une  tendance 
nettement  marquée  vers  le  blanc  absolu  qui  est  l'aboutis- 
sant définitif  de  la  coloration  des  toisons. 

L'albinisme  tégumentaire  pileux  (c'est-à-dire  le  blan- 


308  COMRIBVTIO.N   A   l'iÎTI'DE    DE    L'iNDUSTRIE    PASTORALE 

chiment  des  poils  el  do  la  laine)  envahit  donc  les  toisons 
bien  fiaturées,  la  teinte  fondamentale  de  celles-ci  est 
refoulée  progressivement  vers  les  extrémités  des  mem- 
bres, de  la  queue,  autour  des  orbites  et  au  bout  des  oreilles. 
La  coloration  ainsi  refoulée  et  reportée  vers  les  régions 
que  nous  venons  d'énumérer,  est  dite  centrifuge  quand 
elle  tend  à  disparaître  devant  l'envahissement  d'une  autre 
couleur  ;  son  caractère  centrifuge  se  traduit  par  ses  ten- 
dances à  se  localiser  aux  extrémités.  La  couleur  envahis- 
sante,  (pii  en  refoule  une  autre  peut  occuper  une  surface 
restreinte  par  rapport  à  cette  dernière,  et,  cependant, 
c'est  elle  qui  persistera  dans  la  descendance,  si  les  accou- 
plements sont  bien  conduits,  et  qui  supplantera  l'autre 
au  cours  des  générations. 

On  dit  que  la  coloration  de  la  toison  est  amorcée  vers 
la  coloration  blanche  quand  c'est  le  blanc  qui  est  envahis- 
sant ;  vers  le  noir,  quand  c'est  le  noir  qui  refoule,  et  ainsi 
de  suite. 

Les  moutons  clrââ,  chez  qui  la  coloration  fondamentale 
de  la  tête  a  empiété  sur  le  cou  et  parfois  sur  une  partie  de 
la  poitrine,  sont  fréquents  dans  les  troupeaux  bérabers 
dont  la  laine  grossière  est  excellente  pour  la  matelasserie. 

Ainsi,  les  troupeaux  des  Ouled  Khlif,  des  Ouled  Man- 
sourah,  des  Beni-Metharef,  qui  voisinent  avec  ceux  de  la 
frontière  marocaine,  ont  produit  des  mélanges,  le  cheptel 
de  ces  tribus  renfermant  un  pourcentage  assez  notable  de 
moutons  draâ. 

L'industrie  textile,  disons-le  tout  de  suite,  recherche 
surtout  les  toisons  blanches,  parce  qu'elles  se  prêtent  à 
toutes  les  teintures.  Seules,  les  toisons  uniformément 
colorées,  bien  naturées,  sont  acceptées  et  triées  comme  les 
blanches. 

Toutes  les  laines  colorées  (bi  ou  tri-colores)  sont  englo- 
bées sous  le  nom  de  gris.  Ces  toisons  mitigées  sont  dépré- 
ciées par  elles-mêmes  d'abord  ;  et,  suivant  le  taux  qu'elles 
leprésentent  dans  un  lot, elles  le  déprécient  plus  ou  moins. 
Un  lot  de  toisons,  au  point  de  vue  constitution,  devra 
donc  renfermer  le  moins  possible  de  gris. 

Lors  du  premier  triage  en  brut,  les  gris  sont  débarrassés 
de  leur  portion  colorée,  au  moyen  des  ciseaux.  La  portion 
blanche  seule  est  classée.  Malgré  cela,  souvent,  après  le 
peignage,  il  peut  subsister  dans  les  peignés  des  points 
noirs  (surfaces  de  section  des  brins  colorés)  et  cela  rend 
ces  peignés  impropres  à  une  bonne  teinture.  La  laine  qui 


CONTRIBUTION   A   l'ÉTUDE   DE    L'iNDUSTRIE   PASTORALE  tî09 

présente  ces  points  est  dite  piquée.  Les  filateurs  la  refu- 
sent lorsqu'il  s'agit  de  l'utiliser  à  la  confection  de  dra- 
peries à  teintes  uniformes,  franches. 

Dans  les  laines  d'Afrique,  le  taux  des  gris  dans  un  lot 
est  évalué  en  moyenne  à  i5  ou  17  %.  C'est  énorme.  Un 
meilleur  choix  des  reproducteurs  diminuerait  cette  quan- 
tité et  même  en  amènerait  la  disparition  totale. 

Nous  ne  saurions  donc  trop  recommander  à  nos  pro- 
ducteurs directs  et  à  nos  exportateurs  de  ne  pas  entasser 
dans  un  même  lot  toutes  les  variétés  de  toisons,  mais  de 
les  classer  en  : 

1°  Toisons  fines  (çouf  ratba)  utilisées  pour  la  confec- 
tion des  burnous  fins  (kessoua)  ; 

2°  Toisons  demi-fines  (çouf  harcha)  ; 

3°  Toisons  grossières  (zouléï)   ; 

4°  Toisons  jarreuses  (renfermant  zerebel  kelb,  ou  poil 
de  chien,  nom  donné  au  jarre  par  les  indigènes)  ; 

5°  Les  gris  (laines  multicolores,  drââ). 

Les  crotteux  ou  crottes,  détachés  soigneusement,  seront 
emballés  à  part,  de  même  que  les  bouts  de  mèches  pro- 
venant des  pattes,  ventre,  base  de  la  queue,  testicules, 
formant  le  bechiine. 

Voici  quelques  tableaux  relatifs  au  classement  des  laines 
en  brut,  par  ordre  de  qualités  décroissantes,  selon  leur 
teneur  en  jarreux,  gris,  déchets  et  crottes.  Cette  division, 
ce  classement  sont  accessibles  aux  gens  qui  s'occupent 
des  laines  et  nous  leur  conseillons  instamment  d'y 
procéder. 

Le  producteur  nomade  indigène,  à  la  longue,  pourra 
arriver  à  classer  ses  toisons  comme  nous  allons  l'indiquer, 
Efiais,  en  attendant,  le  commerce  d'exportation  devra  le 
faire  pour  lui. 

D'ailleurs,  l'indigène  ne  possède  pas  toujours  person- 
nellement assez  de  laine  pour  trouver  dans  ce  classement 
un  aA^antage  quelconque. C'est  donc  au  négociant  qui  accu- 
mule de  gros  stocks  dans  ses  dépôts,  à  procéder  à  cette 
opération. 

La  laine  prime  est  la  laine  surfine,  de  qualité  supérieure. 
Sa  proportion  dans  un  lot  est  variable.  Après  la  prime 
viennent  par  ordre  de  finesse  les  n°*  i,  2,  3  et  4- 


23 


310  CONTRIBUTION   A  l'ÉTUDE  DE   L'iNDUSTRIE   PASTORALE 


Classement  des  laines  en  brut 

1°  Laines  du  Sud  des  trois  départements  algériens  Cpar 
loo  kilos)   : 


Prime   2à    3% 

N''     I     22  à  25  % 

N°  2   3oà32% 

N°  3   i5  à  i8  % 


N°  4   loà  12  % 

Jarreux  et  gris.     i5  à  17% 
Déchets,  crottes.  3% 


2°  Laines  des  Hauts  Plateaux,  du  Tell  et  laines  dites 


colon  (par  100  kilos)  : 

Prime    2  % 

N°   I    10  à  18  % 

N°  2    3o  à  32  % 

N°  3   23  à  25% 


N°^  4  et  5 loà  i5% 

Jarreux  et  gris.  i5  % 

Déchets,  crottes.  3% 


Les  chiffres  comparatifs  ci-dessus  nous  montrent  que 
les  laines  du  Sud  renferment  un  tiers  pour  cent  en  prime 
de  plus  que  les  laines  du  Tell,  de  4  à  10  %  en  n°  i  de  plus  ; 
7  à  8  %  en  moins  en  n°  3  ;  environ  3  %  en  moins  en  laine 
n°  II.  Elles  sont  donc,  de  toutes  façons,  plus  appréciables 
que  les  laines  du  Tell.  L'équivalence  des  crottes  et  déchets 
n'est  que  superficielle  ;  mais  nous  savons  que  les  laines 
du  Tell  et  les  laines  dites  colon  sont  pour  les  raisons  indi- 
quées plus  haut  inégalement  dépréciées,  quoique  leurs 
pourcentages  respectifs  en  crottes  paraissent  égaux. 


Rendement  en  peigné  (cœur  et  blousse) 


Laines  du  Sud  des  trois  provinces  algériennes  : 


Peigné    20  à  27  % 

Blousse    4  à    6  % 


Bourre,   duvet. .        i  à    2  % 
Chardon   3  à    4  % 


Laines  du  Tell  : 

Peigné    .......     33  à  35  %  I  Bourre,   duvet. .        i  à    2  % 

Blousse   5à    7%|  Chardon i  à    2  % 


co^TRIBUTIo^  A  l'étude  de  l'industrie  pastorale       311 


Le  marqiiai^e  des  moutons 

Les  moutons,  pour  ne  pas  être  confondus,  volés  ou 
égarés,  sont  nécessairement  marqués. 

Le  marquage  se  fait  :  i°  Par  le  feu  (cautérisation)  ; 
2°  par  les  couleurs  d'aniline  ;  3"  par  le  goudron  coaltaré  ; 
4°  par  la  mutilation  partielle  des  oreilles. 

Marquage  an  feu.  —  Ce  marquage  se  pratique  en  impri- 
mant, soit  sur  la  face  (chanfrein),  soit  de  préférence  sur  le 
cornage,  une  empreinte  au  moyen  d'une  marque  métal- 
lique chauffée  au  rouge.  Cette  empreinte  peut,  au  gré  dû 
propriétaire,  représenter  un  dessin,  des  chiffres  ou  des 
initiales. 

Cette  marque  a  l'avantage  d'être  indélébile,  car,  à  sa 
place,  si  elle  intéresse  la  peau,  succède  une  cicatrice  blan- 
che reproduisant  le  signe  imprimé.  Sur  la  base  des  cornes 
la  cautérisation  est  faite  assez  profondément.  Lorsqu'il 
s'agit  de  moutons  désarmés,  c'est-à-dire  sans  cornage  ou 
fartasses,  la  marque  au  feu  est  apposée  sur  le  front  ou  sur 
le  chanfrein. 

Marquage  par  mutilatioîi  partielle  des  Oi'eilles.  —  Les 
indigènes,  qui  n'aiment  guère  les  complications,  mar- 
quent aussi  leurs  moutons  en  leur  mutilant  les  oreilles 
(tantôt  les  deux,  tantôt  une  seule)  de  façons  diverses  : 

1°  Par  amputation  du  bout  ;  2°  en  fendant  l'oreille  sur 
deux  ou  trois  centimètres  ;  3°  en  y  pratiquant  un  trou  au 
feu  ou  un  nombre  déterminé  de  perforations  à  l'emporte- 
pièce.  Parfois  les  trois  sortes  de  mutilations  se  rencontrent 
associées  sur  la  même  oreille. 

Enfin,  certains  enlèvent,  en  tranche  de  melon,  une  ou 
plusieurs  portions,  soit  sur  le  bord  antérieur  de  l'oreille, 
soit  sur  le  bord  postérieur. 

Marquage  aux  couleurs  d'aniline. —  Ce  marquage  utilisé 
surtout  par  l'acheteur  devrait  être  proscrit.  Mais  les  expor- 
tateurs, qui  ont  souvent  dans  une  même  région  jusqu'à 
quarante  ou  cinquante  troupeaux,  recourent  au  marquage 
à  dos  par  les  couleurs  d'aniline  pour  bien  particulariser 
chaque  troupeau  et  pour  permettre  à  chaque  berger  de 
distinofuer  ses  moutons. 


312  COUTHIBUTIOM   A   l'ÉTUDE    DE   l'iNUUSTRIE   PASTORALE 

L'empreinte  adoptée  est  appliquée  à  tous  les  moutons 
du  môme  lot.  Lorsque  cette  empreinte  est  unique  pour 
plusieurs  troupeaux,  la  région  du  corps  où  elle  est  apposée 
varie  avec  chaque  lot.  Tel  berger  aura  ses  moutons  mar- 
qués d'un  cœur  par  exemple  sur  la  croupe  ;  tel  autre  sur 
l'épaule  droite,  etc. 

Le  simple  cercle  est  souvent  adopté.  Le  culot  d'une  bou- 
teille trempé  dans  une  solution  d'aniline,  fait  l'office  de 
marque. 

Au  point  de  vue  des  commodités  pour  le  berger,  natu- 
rellement le  marquage  à  l'aniline  est  économique,  rapide 
et  parfait.  Le  berger  dont  un  ou  plusieurs  moutons  auront 
disparu  dans  un  lot  voisin,  les  retrouvera  à  première  vue, 
sans  avoir  besoin  de  dénombrer  le  troupeau  soupçonné  de 
renfermer  les  manquants. 

Dans  le  marquage  à  l'aniline,  une  simple  averse  fait 
disparaître  les  contours  de  la  marque  adoptée,  la  rend 
floue,  et  la  tache  d'aniline  s'étend  en  perdant  de  sa  netteté. 

Les  bergers  prétendent  remédier  à  cet  inconvénient  en 
marquant  les  sujets  à  leur  façon,  c'est-à-dire  en  prélevant 
sur  chaque  unité  une  poignée  de  laine. 

A  cinquante  grammes  par  mouton,  le  berger  recueille 
ainsi  pour  son  bénéfice,  suivant  le  nombre  de  moutons 
dont  il  a  la  garde,  une  quantité  plus  ou  moins  notable  de 
laine. 

Les  couleurs  d'aniline,  lors  du  lavage,  se  dissolvent  en 
partie  dans  le  bain  et  colorent  ainsi  plus  ou  moins  les 
toisons.  Donc,  quelque  pratique  que  puisse  être  le  mar- 
quage à  dos  par  l'aniline,  il  sera  bon,  quand  on  le  pourra, 
de  ne  pas  y  recourir,  toute  toison  colorée  par  l'aniline  ou 
toute  autre  teinture  étant  fatalement  dépréciée. 

Marquage  au  coaltar.  —  Le  coaltar  mélangé  au  goudron 
produit,  lors  du  marquage,  des  empreintes  indélébiles  qui 
emprisonnent  les  mèches,  les  agglutinent  et  rendent  abso- 
lument inutilisable  toute  laine  souillée. 

Les  toisons  coaltarées,  lors  du  peignage,  exposent  les 
peignes  à  se  fausser  et  peuvent  provoquer  des  détériora- 
lions  notables  dans  les  machines.  C'est  pourquoi,  lors  du 
triage  en  brut,  les  ciseaux  du  trieur  traitent  les  toisons 
coaltarées  ou  anilinées  comme  les  gris  ;  les  parties  coalta- 
rées sont  élaguées,  détachées  et  constituent  autant  de 
déchets  absolument  inutilisables. 

Donc,    dans  leur  intérêt,   les   exportateurs,   qui   tirent 


CONTRIBUTION   A   l'ÉTTjDE   DE   L,'lNDUSTRIE    PASTORALE  313 

profit  des  toisons  de  leurs  troupeaux,  devront  proscrire  le 
marquage  au  coaltar  ;  seul  le  marquage  au  feu  ou  par  muti- 
lation des  oreilles  devrait  être  adopté. 


La  tonte 

Sur  les  Hauts  Plateaux,  et  notamment  dans  le  cercle  de 
Méchéria,  la  tonte  s'effectue  dans  la  seconde  moitié  de 
mars.  Cependant,  en  raison  des  iluctuations  thermométri- 
ques  qui  marquent  ce  mois  de  l'année,  beaucoup  d'éle- 
veurs attendent  la  première  et  même  la  deuxième  quin- 
zaine d'avril.  Les  exportateurs  qui  tiennent  à  vendre  leurs 
moutons  dès  le  mois  de  mai,  les  tondent  fin  mars  ;  les 
animaux  tondus  ont  quelque  peu  froid  et  sont  incités  à 
absorber  davantage  d'aliments,  ils  gagnent  en  poids  assez 
vite,  plus  vite  même  que  des  animaux  laines  circulant  dans 
les  mêmes  parcours.  Le  négociant  n'a  en  vue  que  la  viande 
qu'il  pourra  céder  dans  un  ou  deux  mois  ;  mais  l'éleveur 
qui  en  a  le  temps,  laisse  la  température  s'élever,  la  sécré- 
tion du  suint  est  plus  forte,  la  toison  s'imprègne,  s'alour- 
dit et,  à  la  récolte,  elle  a  gagné  cinq  à  six  cents  grammes. 
On  voit  que  le  négociant  comme  l'éleveur  ont  raison,  tout 
en  se  plaçant  l'un  et  l'autre  à  des  points  de  vue  différents. 

La  tonte  se  poursuit  jusqu'en  juin-juillet.  Les  houalas 
(i4  à  i8  mois)  sont  débarrassés  de  leur  laine,  ainsi  que  les 
sujets  mâles  au-dessus  de  cet  âge.  Les  brebis  vierges  ou 
stériles,  celles  qui  n'allaitent  pas,  sont  également  tondues. 

Les  brebis  laitières,  en  période  de  sécrétion  lactée,  ne 
sont  tondues  que  tout  à  fait  en  fin  de  saison,  car  les  débar- 
rasser de  leur  toison  c'est  exposer  la  surface  de  la  peau  à 
une  évaporation  plus  active,  au  détriment  de  la  sécrétion 
mammaire.  Le  nomade  pasteur,  qui  est  un  excellent 
observateur,  le  sait,  aussi  se  garde-t-il  bien  de  procéder  à 
une  opération  préjudiciable  à  ses  intérêts. 

On  a  reproché  à  nos  indigènes  de  tondre  à  trop  de  dis- 
tance de  la  peau.  En  opérant  ainsi,  en  effet,  ils  récoltent 
moins  de  laine  et  obtiennent  des  mèches  raccourcies. 
Malgré  la  perte  résultant  de  cette  pratique,  nos  éleveurs  du 
Sud  restent  logiques  en  ne  tondant  pas  trop  près  de  la 
peau.  Si  leur  méthode  de  tonte  entraîne  une  perte  notable 
de  laine  laissée  à  dos,  par  contre,  le  mouton  ne  se  trouve 
pas  tout  à  fait  démuni  de  son  vêtement  naturel  pour  lutter 


314  COMHIBLTION    A    l'ÉTUDF    DE    l'iNDI'STRIE    PASTORALE 

lanl  coiilie  la  cljalcur  diurne  que  contre  les  gelées  noc- 
turnes. On  sait  (pie  dans  les  régions  pastorales  de  l'Algérie 
si  le  soleil  est  chaud,  très  chaud  le  jour,  le  rayonnement 
nocturne  est  considérable  ;  de  plus,  les  moulons  vivant 
en  plein  air  et  sans  abri  par  tous  les  temps,  il  est  rationnel 
de  les  laisser  armés  pour  résister  ;  le  feutrage  qu'on  leur 
abandonne  sur  le  corps  constitue  un  écran  à  double  fin  : 
il  protège  l'animal  contre  le  refroidissement  et  empêche 
l'action  brûlante  des  rayons  solaires  d'atteindre  l'épiderme 
très  sensible  chez  le  mouton. 

Si  nous  approuvons  la  prévoyance  de  l'indigène  len 
cette  matière,  nous  désapprouvons,  par  contre,  les  pro- 
cédés employés  pour  tondre  les  moutons.  Pour  cette  opé- 
ration, les  indigènes  se  servent  de  faucilles.  Ceitains,  fort 
adroits,  tondent,  ou  plutôt  fauchent  la  laine  assez  propre- 
ment sans  trop  massacrer  le  mouton  ;  mais  la  plupart 
blessent  le  sujet  d'une  manière  souvent  atroce.  En  outre, 
la  tonte  à  la  faucille,  à  part  les  boutonnières  qu'elle  fait  à 
la  peau,  est  irrégulière,  en  escaliers. 

Néanmoins,  quand  celte  tonte  irrégulière  n'a  pas 
entraîné  de  dommages  pour  le  sujet  qui  l'a  subie,  l'état 
d'embonpoint  consécutif  amène  en  peu  de  temps  sur  le 
même  plan  les  différentes  lignes  de  coupe  ;  les  indigènes 
appellent  cela  égalisation  du  filet  (idreb  cl  chchka)  ;  c'est 
pour  eux  un  signe  que  l'animal  est  fin  gras. 

Disons  en  passant  qu'à  Marseille,  les  commissionnaires 
semblent  avoir  une  prédilection  marquée  pour  les  mou- 
tons tondus  à  la  faucille,  ils  y  voient  non  seulement  la 
preuve  de  leur  provenance  (du  Sud),  mais  encore  un 
avantage  pécuniaire,  les  dépouilles  plus  lainées  étant  plus 
rémunératrices  que  des  peaux  rasées. 

Depuis  quelque  temps,  les  ciseaux  à  ressort  ou  forcés 
sont  assez  habilement  maniés  par  quelques  indigènes  ; 
mais  dans  les  tribus  c'est  la  faucille  seule  qui  demeure 
préférée.  Â  cela,  il  y  a  plusieurs  raisons  : 

La  faucille  peut  être  maniée  par  le  premier  venu, 
sans  aucun  apprentissage  préalable.  A  l'époque  de  la  tonte, 
il  est  d'usage  chez  les  indigènes  d'aller  les  uns  chez  les 
autres  aider  à  tondre  et  cela  sans  rémunération  aucune  ; 
ils  sont  tout  simplement  hébergés  pendant  tout  le  temps 
qu'ils  prêtent  leur  concours.  C'est  la  seule  raison  qui  expli- 
que pourquoi  la  faucille,  cjui  est  jusqu'à  ce  jour  à  peu 
près  le  seul  instrument  utilisé  pour  la  tonte,  persistera 
encore  en  tribu.  En  outre,  pour  le  prix  d'une  paire  de 


CONTRIBUTION   A   l'ÉTUDE    DE    l'iNDUSTRIE    PASTORALE  315 

ciseaux  à  ressort,  on  a  un  certain  nombre  de  faucilles  que 
le  premier  charron  venu  peut  fabiiqucr  sans  difficulté. 

Les  ciseaux  à  ressort,  maniés  habilement  par  quelques 
indigènes  entraînés,  sont  utilisés  pour  la  tonte  des  trou- 
peaux d'exportation.  Comme  les  indigènes  qui  ont  appris 
l'usage  des  ciseaux  se  font  payer  leur  travail,  la  faucille 
aura  longtemps  encore  la  préférence  en  tribu. 


La  coupe  des  mèches.  —  Le  cisaillement 

Certains  tondeurs  ont  tendance  à  manier  les  ciseaux  en 
cisaillant,  à  la  manière  des  coiffeurs.  Les  brins  de  laine 
sont  ainsi  inutilement  saisis  à  plusieurs  reprises  et  sec- 
tionnés en  petits  bouts.  Ces  petits  bouts  eussent  davantage 
profité  au  mouton  s'ils  étaient  restés  implantés  sur  sa 
peau  ;  ils  ne  profitent  pas  davantage  à  l'industriel  qui  n'en 
saurait  rien  tirer. 

La  section  sur  chaque  mèche  ou  groupe  de  brins  doit 
être  unique  et  non  multiple,  repetita,  étagée  sur  cette 
même  mèche.  Cela  n'a  pas  d'inconvénient  chez  le  coiffeur 
dont  le  but  est  de  régulariser  la  surface  de  la  coupe  des 
cheveux,  tandis  que  chez  le  mouton  il  y  a  un  double 
objectif  à  atteindre  : 

i"  Un  objectif  d'ordre  hygiénique  qui  consiste  à  débar-. 
rasser  le  sujet  de  sa  toison  pour  lui  permettre  de  mieux 
lutter    contre    la    chaleur,    sans    toutefois    le    dénuder 
totalement  ; 

2°  Un  objectif  d'ordre  économicjue  consistantà recueillir 
une  toison  d'un  seul  tenant,  à  mèches  régulièrement  cou- 
pées pour  lui  conserver  sa  valeur  maxima  et  tout  son 
rendement. 

Aussi  les  intéressés  qui  font  tondre  doivent-ils  surveiller 
de  près  les  opérateurs  pour  empêcher  le  cisaillement  des 
mèches  et  éviter  ainsi  des  pertes  bien  inutiles. 

La  faucille,  il  faut  le  reconnaître,  si  elle  coupe  irrégu- 
lièrement, ne  se  prête  pas  aux  divagations  des  ciseaux 
maniés  par  des  mains  nerveuses  qui  hachent  le  brin  au 
détriment  du  mouton  qu'ils  dénudent  et  de  la  toison  qu'ils 
diminuent  ;  aussi,  la  tondeuse  (mécanique  ou  à  main) 
permettrait-elle  d'éviter  les  inconvénients  de  la  faucille 
et  des  ciseaux  mal  maniés. 


316  CONTRIBUTION   A   l'ÉTUDE   DE   l'iNDUSTRIE   PASTORALE 

Malheureusement,  ces  instruments  perfectionnés  n'au- 
ront, de  longtemps  encore,  pas  droit  de  cité,  ou  plutôt 
droit  de  bled,  en  pays  indigène. 

L'enroulement  des  toisons 

Lorsque  la  toison  est  détachée,  autant  que  possible  en 
une  seule  pièce,  elle  est  enroulée  sur  elle-même,  surface 
interne  en  dehors,  et  nouée. 

Malheureusement  nos  tondeurs  ne  conservent  pas  aux 
toisons  la  forme  qu'elles  devraient  présenter  une  fois  éta- 
lées ;  en  effet,  une  toison  bien  tondue,  bien  enlevée, 
devrait  reproduire,  étalée,  la  surface  de  la  peau  qu'elle 
recouvrait  avant  la  tonte.  Il  faut  qu'on  puisse  y  repérer 
aisément  les  régions  du  cou,  des  épaules,  du  dos,  des  cuis- 
ses, des  flancs,  etc.  Grâce  à  ce  repérage  facile,  les  trieurs 
peuvent  prélever  dans  chaque  secteur  les  mèches  corres- 
pondantes, car  chaque  région  offre  des  brins  de>  qualité 
différente.  Nos  tondeurs  ne  laissant  pas  toujours  aux  toi- 
sons leur  forme  première  normale,  il  en  résulte  que  le 
triage  en  brut  de  nos  laines  d'Afrique  est  difficile  à  réaliser. 

Dans  le  centre  de  la  toison,  le  nomade  introduit  les 
mèches  crottées  provenant  des  pattes,  du  ventre,  etc.,  de 
façon  à  ne  perdre  aucun  brin  de  laine. 

Si  les  crotteux  ne  sont  pas  présentés  à  part,  hors  des  toi- 
sons, il  n'y  a  pour  les  acheteurs  qu'à  baisser  les  prix.  En 
somme,  la  présence  de  mèches  crottées  dans  une  toison 
constitue  plutôt  une  malfaçon,  un  manque  de  jugement, 
qu'une  manœuvre  délictueuse.  Aussi,  les  fraudes  dont  les 
laines  peuvent  être  l'objet  relèvent-elles  d'autres  facteurs 
que  nous  examinerons  plus  loin. 


Influence  de  l'état  de  santé  du  troupeau 
sur  l'état  physiolog:ique  et  l'état  physique  des  laines 

Il  est  à  noter  que  l'état  de  souffrance  des  moutons  (ali- 
mentation parcimonieuse,  anémie,  affections  parasitaires 
internes)  ont  une  répercussion  nette  et  bien  marquée  sur 
la  peau.  Dès  que  la  santé  revient,  que  le  sujet  s'alimente 
mieux,  toutes  les  fonctions  se  réveillent  ;  la  peau  se 
reprend  à  sécréter  ;  les  mèches  deviennent  onctueuses  ; 
les  poux  qui  ont  pu  s'installer  dans  la  toison  disparais- 


CONTRIBUTION   A  l'ÉTUDE   DE   l.'lNDUSTBIE    PASTORALE  317 

sent  ;  Ja  laine  récupère  sa  souplesse  ;  mais  l'enchevêtre- 
ment des  brins  a  conservé,  emprisonnées,  nombre  d'im- 
puretés, notamment  de  larges  croules  épidermicjues,  sur- 
tout au  niveau  des  reins,  du  dos,  du  sacrum.  Les  mau- 
vaises toisons  qui  commençaient  à  s'en  aller  en  lambeaux 
font  place  à  une  pousse  laineuse  nouvelle.  Les  régions  des 
toisons  correspondant  à  la  face  externe  de  la  cuisse  se 
montrent  peu  souillées  ;  et  cela  tient,  on  le  comprend,  à 
ce  que  les  impuretés  ne  peuvent  stagner  sur  un  plan  quasi- 
perpendiculaire  et  qui,  plus  est,  se  trouve  constamment  en 
mouvement  lors  de  la  progression  ;  tandis  que  le  plan 
formé  par  la  ligne  du  dos,  des  reins,  du  sacrum  reste  pres- 
que toujours  horizontal  quelle  que  soit  l'attitude  du  mou- 
ton. En  outre,  les  régions  sacro-lombaires  sont  presque 
totalement  à  l'abri  des  frottements  et  des  atteintes  de  la 
corne  et  des  dents  ;  les  impuretés  qui  viennent  s'y  échouer 
n'ont  rien  qui  les  sollicite  à  choir,  pour  peu  que  les  brins 
de  laine  y  soient  enchevêtrés. 

Et  les  indigènes  le  savent  bien,  car  ils  reconnaissent  une 
laine  à  peu  près  normale,  c'est-à-dire  non  maquillée,  à  ce 
que  les  impuretés  naturelles  se  trouvent  généralement 
localisées  sur  la  ligne  dorso-sacro-lombaire,  tandis  que 
les  régions  de  la  toison  appliquées  sur  les  épaules,  les 
cuisses,  le  thorax,  présentent  une  surface  de  coupe  natu- 
rellement propre. 

Lorsque  l'indigène  «  sale  »  sa  toison,  c'est-à-dire  sau- 
poudre la  surface  de  section  des  mèches  avec  de  la  terre, 
il  ne  respecte  pas  plus  les  régions  naturellement  chargées 
que  celles  qui  ne  le  sont  ordinairement  pas.  Il  explique 
que  dans  le  bled,  l'obligation  de  tondre  à  même  le  sol  jus- 
tifie dans  ses  toisons  la  présence  de  terre  (surajoutée) 
qu'on  y  découvre. 

Mais  les  indigènes  soigneux  et  consciencieux  n'hésitent 
pas  à  tondre  sur  un  sol  préalablement  nettoyé,  ou  même 
sur  des  nattes,  pour  éviter  le  contact  du  sol. 


Les  fraudes 

Le  fraudeur  d'une  toison  a  pour  but  de  surfaire  le  poids 
primitivement  normal  de  cette  toison.  Pour  cela,  il  la 
maquille  en  y  ajoutant  des  matières  étrangères,  surtout 
de  la  terre  ou  du  sable,  et  des  liquides  pour  assurer  l'adhé- 
rence de  ces  substances  aux  brins. 


318       coNTRiBi  riON  A  l'étudk  de  l'industrie  pastorale 

Toute  toison  fraudée  est  fatalement  humide,  car  le 
suint  ne  sutïit  pas  toujours  pour  assurer  l'adhérence  des 
impuretés  aux  brins  ;  le  concours  d'un  liquide  (eau  ou 
leben)  est  souvent  indispensable.  Par  suite,  toute  toison 
qui  donne  la  sensation  du  mouillé  est  suspecte,  à  moins 
qu'il  n'ait  plu  et  que  les  sacs  exposés  aient  été  détrempés  ; 
dans  ce  ra-^,  on  doit  attcndie  que  les  toisons  aient  séché. 


l/huniidifieatioii  spontanée  des  laines  entassées 

Les  laines  sont  hygrophiles  par  excellence,  c'est-à-dire 
qu'elles  fixent  l'humidité  de  l'air  avec  la  plus  grande 
facilité. 

Inversement  lorsqu'on  les  place  en  milieu  sec,  elles  se 
déshydratent  aussi  aisément  qu'elles  se  sont  imprégnées. 

C'est  la  raison  pour  laquelle  nos  laines  du  Sud  subissent 
lors  de  leur  transport  un  déchet  de  route  par  déshydrata- 
tion qui  peut  se  chiffrer  par  1/2  à  2  %  ;  mais  en  raison  de 
leur  aiïinité  pour  l'humidité,  cette  perte  de  1/2  à  2  %  est 
largement  récupérée  dès  que  les  saches  pénètrent  en  zone 
tellienne  où  le  degré  hygrométriciue  de  l'air  est  notable. 

La  propriété  hygiophile  de  la  laine  a  été  mise  à  contri- 
bution par  certains  cultivateurs-éleveurs  de  la  Métropole, 
pour  surcharger  leur  laine  d'humidité.  La  veille  de  la 
tonte,  le  troupeau  est  enfermé  dans  la  bergerie  après 
abreuvenient.  Durant  la  rmit,  la  chaleur  animale,  la  clô- 
ture hermétique  du  local,  les  émissions  d'urine,  la  suda- 
tion, amènent  rapidement  la  saturation  de  l'atmosphère 
et  les  toisons  absorbent  cette  vapeur  d'eau  et  leur  poids 
augmente  en  proportion.  Le  lendemain,  la  tonte  se  fait  de 
bonne  heure,  l'acheteur  qui  a  prélevé  lui-même  ou  sous 
son  contrôle  les  échantillons  à  dos,  se  croit  à  l'abri  de 
toute  fraude,  mais  dans  le  poids  de  la  laine  ainsi  achetée, 
il  emporte  quelques  centaines  de  kilos  d'eau  qui  s'est 
spontanément  fixée  dans  les  mèches,  grâce  aux  manœu- 
vres pratiquées  par  le  vendeur.  On  le  voit,  la  fraude  existe 
sous  toutes  les  latitudes.  Elle  n'est  pas  monopolisée  par 
une  seule  région. 

En  raison  de  ses  affinités  pour  l'humidité,  la  laine 
entassée  dans  un  local  donne,  au  bout  d'un  certain  temps, 
l'impression  du  mouillé.  Il  n'y  a  pas  dans  ce  cas  de  fraude 
intentionnelle  ;  il  suffît  d'aérer  les  toisons,  de  les  sortir  un 
instniil  pour  qu'ollos  reprennent  leur  aspect  normal. 


CONTRIBUTION    A   l'ÉTUDE    DE   L'iNDUSTRIE    PASTORALE  -^9 

Mais  la  sensation  de  mouillé  que  l'on  rencontre  dans  les 
couches  profondes  du  tas  de  laine  ne  doit  pas  être  non 
plus  taxée  de  fraude  humide.  C'est  à  l'expert  compétent  à 
juger  s'il  y  a  lieu  de  considérer  tel  ou  tel  lot  comme  réelle- 
ment fraudé  ou  simplement  spontanément  surchargé 
d'eau  grâce  à  l'hygrophilie  de  la  laine. 

Dans  un  dépôt  de  laines,  lorsque  la  manipulation  des 
toisons  entraîne  de  la  poussière,  c'est  un  signe  favorable, 
à  condition  (pie  cette  poussière  ne  soit  pas  abondante  et  ne 
relève  pas  dune  tentative  de  fraude  sèche. 


La  répression  des  fraudes 

Les  pouvoirs  publics,  pour  combattre  les  manœuvres 
délictueuses  dont  les  laines  peuvent  être  l'objet,  ont  édicté 
une  série  de  mesures  visant  fraudeurs  et  acheteurs,  car 
ceux-ci  devenaient  complices  de  ceux-là  en  acquérant  des 
marchandises  maquillées.  L^ne  circulaire  gouvernemen- 
tale, émise  à  la  date  du  19  septembre  1910,  par  application 
de  la  loi  du  i"  août  iç)o5,  renferme  à  cet  égard  les  indi- 
cations nécessaires  ;  malheureusement,  les  fraudeurs  ont 
beau  jeu  et  peuvent  impunément  exercer  leurs  pratiques 
à  l'abri  des  lois. 

En  effet  ((    le  délit  de  fraude  ne  peut  être  constaté 

«  que  si  la  marchandise  maquillée  est  vendue  ou  exposée 
((  en  vente  sur  un  marché  ou  tout  autre  lieu  public. 

((  Les  fondoucks,  sauf  des  circonstances  exceptionnelles, 
«  peuvent  être  assimilés  à  des  lieux  publics.  ^ 

((  Les  fraudes  ne  sauraient  échapper  à  l'action  pénale 
«  que  si  les  laines  occupaient  dans  les  fondoucks  un 
«  emplacement  réservé  qui  constituerait  alors  l'entrepôt 
«  non  public  du  vendeur  ou  de  l'intermédiaire. 

((  Sur  les  quais  des  ports,  considérés  comme  lieux 
((  publics,  le  délit  de  fraude  peut  être  constaté,  à  condi- 
«  tion  cependant  que  la  transaction  n'ait  pas  précédé  le 
«  transport,  c'est-à-dire  que  la  vente  n'ait  pas  été  préala- 
{(  blemcnt  consommée. 

«  Il  peut  arriver  que  les  manœuvres  déloyales  employées 
«  pour  frauder  la  laine  soient  effectuées  dans  les  entrepôts 
u  par  certains  intermédiaires  contre  lesquels  il  n'est  pas 
(>  toujours  possible  à  l'administration  d'agir. 

«  La  loi  du  i'"'"  août  igoô  ne  prévient  le  délit  de  fraude 
«  et  n'autorise  les  poursuites  qu'autant  que  le  vendeur  a 


320  CO.NTRIBITION   A   l'ÉTUDE    de    L'iNDUSTRlt:    PASTORALE 

«  trompé  ou  tenté  de  tromper  l'acheteur.  Cette  condition 
«  n'est  réalisée  que  si  la  marchandise  est  offerte  publi- 
«  qjiement  en  vente  ou  a  été  vendue. 

«  Dans  le  premier  cas,  il  y  a  poursuite  d'oiïice.  Dans  le 
«  deuxième  cas,  les  poursuites  ne  peuvent  être  engagées 
<(  que  si  l'acheteur  dépose  une  plainte  au  parquet.  » 

Nous  ne  voyons  pas  très  bien  dans  quel  cas  l'acheteur 
(qui  devrait  être  englobé  dans  les  poursuites)  sera 
inquiété.  Si  la  vente  est  réalisée,  même  sur  un  lieu  public, 
l'action  répressive  ne  peut  s'engager  (jue  s'il  y  a  plainte 
de  la  part  de  l'acheteur. 

Par  suite,  l'agent  chargé  d'appliquer  les  dispositions  de 
la  circulaire  du  19  septembre  1910  par  application  de  la 
loi  du  i"""  août  igoÔ,  se  trouve  désarmé  s'il  arrive  trop  tard. 

La  marchandise  fraudée,  qu'il  pourrait  ou  devrait  saisir, 
lui  échappe  dès  l'instant  qu'elle  a  été  vendue  et  que  l'ache- 
teur l'a  acceptée. 

En  outre,  n'importe  quel  fiaudeur  pourra,  dans  un 
entrepôt  particulier  ou  dans  un  coin  réservé  du  fondouck 
lui  tenant  lieu  d'entrepôt,  traiter  la  laine  en  vue  de  la 
fraude,  sans  qu'il  soit  possible  de  le  poursuivre. 

La  loi  du  i*""  août  1905  est  nette  à  cet  égard  :  on  a  le 
droit,  ou  plutôt  on  peut,  en  toute  liberté,  maquiller  des 
toisons  chez  soi,  dans  un  entrepôt  non  public  ;  on  peut 
vendre  des  laines  fraudées  dans  l'entrepôt  ;  dès  l'instant 
que  la  vente  n'a  pas  été  publique,  que  l'acheteur  ne  s'est 
pas  plaint,  l'action  judiciaire  est  impuissante  à  s'exercer, 
ou,  si  elle  s'exerce,  elle  est  nulle  et  sans  effet. 

Est-ce  que  l'acheteur  qui  accepte  une  telle  marchandise 
ne  devrait  pas  être  poursuivi,  ainsi  que  le  fraudeur  dont  il 
encourage  les  manœuvres  déloyales  ? 

Mais  l'acheteur  n'achète  que  pour  vendre  à  son  tour,  il 
n'a  donc  pas  logiquement  à  juger  le  délit  de  son  vendeur, 
puisqu'il  va  de  son  côté  frauder  un  peu  plus  sa  laine. 

11  ne  faut  pas  non  plus  s'attendre  à  ce  que  les  industriels 
de  la  Métropole  portent  plainte  au  Parquet  lorsque  les 
laines  qu'ils  reçoivent  se  trouvent  être  fraudées,  car,  dans 
ce  cas,  qui  impliqueraient-ils,  si  ce  n'est  les  exportateurs 
du  Tell  ?  Or,  on  ne  peut  songer  un  seul  instant  à  rendre 
ces  derniers  responsables  des  fraudes.  Ces  exportateurs 
sont  les  auxiliaires  les  plus  précieux  des  filateurs  métro- 
politains, ils  exposent  souvent  leurs  propres  capitaux, 
mais  ils  ne  peuvent  personnellement  opérer  tous  leurs 
achats,  car  ils  n'ont  pas,  que  nous  sachions,  le  don  d'ubi- 


CONTRIBUTION   A   l'ÉTUDE   DE   l'i.NDUSTRIE    PASTORALE  321 

quité.  Ils  ont  des  représentants  dans  les  centres  lainiers  les 
plus  divers  ;  ceux-là  ont  à  leur  tour  des  courtiers  qui  vont 
chercher  les  laines  dans  les  tribus  du  territoire  sud  oranais 
et  même  au  Maroc. 

Les  achats  se  font  au  comptant  en  quelque  point  qu'on 
les  effectue.  Par  suite,  l'exportateur  qui  concentre  dans 
ses  entrepôts  du  Tell  les  arrivages  de  laines  des  prove- 
nances les  plus  diverses,  est  obligé  d'agréer  la  marchan- 
dise sous  peine  de  ne  pas  rentrer  dans  ses  débours.  C'est 
lui  qui  est  la  cheville  ouvrière  du  commerce  lainier,  et 
c'est  la  raison  pour  laquelle  les  filateurs  ne  songeiont 
jamais  à  l'inquiéter.  Ils  baissent  leurs  prix,  se  font  une 
idée  peu  flatteuse  du  commerce  algérien  et  c'est  tout. 

Est-on  pour  cela  désarmé  totalement  pour  atteindre  la 
fraude  à  sa  source  ?  Nous  ne  le  pensons  pas.  Il  faudrait 
recourir  : 

1°  A  l'organisation  d'un  service  tcchni(|ue  df  la  répres- 
sion des  fraudes  des  laines  ; 

2°  A  l'organisation  syndicale  de  la  production  et  de  la 
vente  des  laines. 


Organisation  d'un  service  technique  de  surveillance 
et  de  répression  des  fraudes  sur  les  laines 

Les  circulaires  renfermant  les  dispositions  répressives 
à  l'égard  des  fraudes  des  laines  dénotent  de  la  part  des 
pouvoirs  publics  le  souci  de  protéger  le  commerce  hon- 
nête et  ceux  qui  le  pratiquent  contre  les  manœuvres 
déloyales  qui  tendent  à  le  ruiner  et  à  le  déconsidérer. 

Mais  s'il  est  d'une  sage  administration  de  dicter  des  ins- 
tructions, autre  chose  est  de  les  voir  appliquer  de  façon 
légale,  opportune  et  motivée,  surtout  lorsqu'il  s'agit  d'une 
question  spéciale. 

Le  sens  pratique  dans  n'importe  quel  domaine  ne  s'ac- 
quiert pas  dans  les  écrits.  Les  exposés  théoriques  ont  certes 
leur  valeur  ;  mais  il  ne  suffît  pas  de  les  posséder  pour  se 
croire  technicien 

La  science  bibliographique  pure  peut  donner  un  instant 
le  change  sur  les  aptitudes  de  celui  qui  la  possède  grâce  à 
une  grande  mémoire,  mais  de  la  théorie  à  la  pratique 
vraie,  il  y  a  souvent  loin. 

Dans  le  domaine  des  laines,  par  exemple,  le  bon  élève 


322       CONTRIBUTION  \  l"éti  oi:  DE  l'industrie  pastorale 

qui  sera  ferré  sur  la  composition  chimique,  les  propriétés 
physiques  des  toisons,  sur  les  usages  nombreux  de  ce  tex- 
tile, fera  piètre  figure  dans  un  triage  en  brut,  aux  côtés  du 
simple  trieur  inculte  et  illettré.  Mais  en  général  cela  ne 
l'empêchera  pas  de  se  croire  supérioiu'  à  ce  dernier  et  de  le 
classer  dans  les  échelons  inférieurs  de  la  hiérarchie  sociale. 
Cela  ne  veut  pas  dire  que  la  théorie  qui  éclaire,  ou  plutôt 
qui  ne  doit  être  (pie  la  dissection  méthodique  de  la  pra- 
tique, doive  être  négligée,  mais  nous  prétendons  que  la 
chaire  du  professeur  et  la  compilation  bibliographique  ne 
doivent  pas  exclure  l'expérience  manuelle  que  l'on 
acquiert  dans  les  usines,  dans  les  ateliers,  sur  le  terrain. 

Malheureusement  les  exercices  pratl<]ues  qui  sont  le 
corollaire,  l'illustration  des  cours  théoriques,  sont  géné- 
ralement peu  en  honneur.  Le  scientili(iue  s'isole  trop  dans 
sa  tour  d'ivoire,  qui  est  le  laboratoire  ou  le  musée,  et  lors- 
qu'il lui  arrive  parfois  d'en  sortir  pour  se  rapprocher  de 
l'artisan  expérimenté,  du  réalisateur,  il  n'établit  pas  avec 
lui  des  relations  suffisantes  et  répétées. 

11  ne  faut  pas  oublier  que  tout  réalisateur,  à  quelque 
degré  de  la  hiérarchie  sociale  qu'on  le  considère,  est  dépo- 
sitaire d'une  ou  de  plusieurs  parcelles  de  vérité  qu'il  s'agit 
de  savoir  discerner.  L'homme  cultivé,  instruit,  peut  y 
trouver  des  données  utiles,  susceptibles  d'être  largement 
appliquées  et  perfectionnées. 

L'indigène  l'a  reconnu  depuis  longtemps  ;  témoin  cet 
adage  oriental  :  «  Consulte  l'homme  d'expérience,  et  non 
pas  le  savant.  » 

Sans  admettre  l'adage  dans  toute  l'expression  du  terme, 
nous  estimons  qu'au  lieu  de  pousser  les  sciences  théori- 
ques à  l'analyse  la  plus  minutieuse  des  détails  les  plus 
infimes,  il  serait  beaucoup  plus  profitable  de  considérer 
les  établissements  industriels,  où  les  principes  scientifiques 
sont  pratiquement  exploités,  réalisés,  comme  le  pendant 
normal  de  nos  laboratoires  et  de  nos  chaires  spéciales. 

En  matière  de  zootechnie,  en  élevage,  si  l'on  préfère, 
ne  serait-il  pas  logique  de  considérer  les  triages,  les  lave- 
ries, les  peignagcs  et  les  filatures  comme  les  laboratoires 
d'exercices  pratiques  oii  sont  illustrés  les  cours  sur  les 
laines  ?  Est-ce  que  l'exploitation  d'un  fermier  qui  s'oc- 
cupe du  mouton  ne  serait  pas  une  école  merveilleuse  oiî 
le  zootechnicien  verrait  en  pratique  ce  que  le  maître  lui  a 
enseigné  sur  l'élevage  des  ovins,  la  tonte  des  moutons, 
l'utilisation  des  sous-produits,  des  peaux,  etc. 


CONTRIBUTION   A   l'ÉTUDE    DE   l'iNDUSTRIE    PASTORALE  323 

L'usine  où  les  matières  premières  sont  utilisées  serait 
aussi  pour  le  zootechnicien  qui  veut  s'instruire  pratique- 
ment, le  meilleur  des  laboratoires,  le  plus  instructif  des 
musées.  Il  est  temps  que  l'enseignement  professionnel 
inculque  un  peu  mieux  le  sens  des  réalités,  qu'il  reprenne 
dans  notre  organisation  scolaire  la  place  importante  qu'il 
aurait  dû  conserver. 

Quels  merveilleux  progrès  n'enregistrerait-on  pas,  si 
tous,  ingénieurs,  zootechniciens,  savants,  faisaient  des 
usines,  des  exploitations  agricoles,  leurs  vrais  laboratoires 
de  recherches,  avec,  pour  collaborateurs  et  même  pour 
initiateurs  inconscients,  les  ouvriers,  les  contremaîtres, 
les  bergers  eux-mêmes,  les  trieurs,  les  filateurs,  les  tan- 
neurs, etc.,  etc.  Et  il  faut  qu'on  en  arrive  là  un  jour  pour 
le  plus  grand  profit  de  la  science  et  le  progrès  des  réali- 
sations industrielles. 

Cette  trop  longue  parenthèse  étant  fermée,  nous  allons 
reprendre  notre  exposé  au  point  interrompu. 

Nous  disions  donc  que  la  manipulation  et  la  connais- 
sance des  laines  relèvent  d'une  technique  exigeant  un 
certain  apprentissage  et  des  notions  indispensables. 

Aussi,  à  l'heure  actuelle,  si  les  pouvoirs  publics  font 
montre  de  sollicitude  pour  les  intérêts  commerciaux  de  la 
Colonie  en  édictant  des  mesures  répressives  des  fraudes 
sur  les  laines,  on  peut  avec  juste  raison  se  demander  quels 
seront  les  techniciens  chargés  de  surveiller  et  d'examiner 
les  toisons. 

Si  l'on  peut,  sans  inconvénient,  charger  un  agent  quel- 
conque d'assurer  la  sécurité  des  rues,  on  ne  peut  lui  con- 
fier le  soin  d'inspecter  les  lots  de  laines  et  de  faire  le  départ 
entre  une  toison  normale,   sale,   et  une  toison  fraudée. 

L'excès  de  zèle  d'un  agent  inexpérimenté  chargé  d'une 
mission  aussi  délicate,  peut  faire  peser  la  rigueur  des 
lois  sur  un  innocent  ou  faire  déserter  un  marché  par  les 
nomades,  en  faveur  d'autres  centres  où  la  surveillance  est 
plus  tolérante  ou  même  inexistante. 

Cette  surveillance,  somme  toute,  demeure  de  toutes 
façons  illusoire.  Malgré  leur  réel  désir  de  dépister  les 
fraudes,  les  autorités  locales  n'ont  pas  toujours  sous  la 
main  des  agents  compétents.  Ces  agents  existent  cepen- 
dant ;  ce  sont  les  vétérinaires  qui,  de  par  leurs  fonctions, 
s'occupent  des  questions  pastorales. 

L'étude  des  laines,  des  peaux,  des  beurres  et  de  tout  ce 


324  COMRIBUTION   A   l'ÉTUDE    DE    l'oUUSTRIE    PASTORALE» 

qui  provient  du  mouton  n'est  pas  un  champ  inaccessible 
pour  eux.  Leurs  études  biologiques  et  zootechniques, 
quoique  lointaines  pour  les  plus  anciens,  ne  les  disposent 
pas  moins  à  fouler  un  sol  qui  n'est  pas  du  tout  nouveau 
povH'  eux. 

Il  y  aurait  lieu  d'envisager  la  possibilité  d'accorder  à 
ceux  d'entre  ces  praticiens  qui  en  exprimeraient  le  désir, 
l'autorisation  de  se  rendre  dans  les  centres  industriels 
lainiers  (Koubaix,  Tourcoing,  Castres,  Mazamet,  etc.)  pour 
y  faire  un  stage  pratique  de  un  ou  deux  mois,  afin  de  se 
familiariser  avec  tout  ce  qui  concerne  les  manipulations, 
la  valeur  de  nos  laines  d'Afrique. 

A  leur  retour  dans  leurs  centies  d'action,  les  vétéri- 
naires vaccinateurs  ayant  réellement  le  feu  sacré  seraient 
en  mesure  de  compléter  leurs  connaissances  par  l'obser- 
vation, ils  pourraient  par  la  suite  éclairer  plus  efficace- 
ment l'administration,  qui  ne  demande  qu'à  être  rensei- 
gnée de  la  façon  la  plus  exacte  et  la  plus  conforme  aux 
intérêts  du  pays.  Dès  lors,  les  pouvoirs  publics  auraient 
sous  la  main  des  agents  techniques,  qualifiés,  compétents, 
capables  de  faire  appliquer  à  bon  escient  les  dispositions 
légales  concernant  les  fraudes  ou  les  mesures  tendant  à 
l'amélioration  de  la  production  lainière.  11  sera  nécessaire 
d'étendre  la  zone  de  surveillance  et  l'action  de  ces  agents 
techniques,  afin  qu'ils  puissent  atteindre  les  fraudeurs  sur 
tous  les  marchés  à  laine,  sinon  les  acheteurs  malhonnêtes 
déserteraient  un  marché  pour  aller  dans  un  autre  où  la 
fraude  serait  moins  surveillée. 

Et  la  fraude  aura  vécu. 

Dans  les  régions  à  moutons,  oii  le  commerce  de  la  laine 
représente  un  chiffre  respectable,  il  appartiendra  aux 
comnmnes  intéressées  de  faire  édifier,  en  des  points, choi- 
sis, des  hangars  vastes  et  dallés  attenant  à  des  parcs  où  la 
tonte  puisse  s'opérer  propiement. 

Enfin,  il  faudrait  que  la  surveillance  puisse  s'exercer 
jusque  dans  les  entrepôts.  Car  la  loi  du  i"  août  1906  et  les 
dispositions  contenues  dans  la  circulaire  du  19  sep- 
tembre 19 10  sont  à  l'heure  actuelle  fort  insuffisantes. 

Cependant,  si  l'on  ne  peut  attaquer  le  mal  de  front,  il 
existe  encore  un  moyen  de  le  réduire  dans  une  très  large 
mesure,  sinon  de  le  supprimer  totalement.  Ce  moyen 
consiste  à  organiser  la  production  syndicale  et  la  vente  de 
nos  laines. 


CONTRIBUTION   A   L  ETI:DE    DE    L  INDUSTRIE    PASTORALE 


325 


Organisation  syndicale  de  production  et  de   vente 
des  laines  d'Afrique 

Pour  lutter  contre  la  fraude,  il  faudrait  arriver  à  sup- 
primer les  intermédiaires,  car  c'est  dans  le  conflit  des 
intérêts  du  producteur  et  des  intermédiaires  que  la  fraude 
prend  naissance. 

Le  producteur,  le  nomade  en  l'espèce,  s'il  avait  toujours 
eu  affaire  à  des  acheteurs  loyaux,  serait  lui-même  demeuré 
loyal,  mais  s'il  traite  avec  un  intermédiaire  qui  doit  le 
voler  sur  la  bascule,  il  rétablit  l'équilibre  en  ajoutant  des 
substances  étrangères  à  sa  laine,  ce  qui  en  augmente  plus 
ou  moins  le  poids.  Il  pratique  ce  que  nous  avons  dénommé 
dans  un  premier  travail  sur  les  fraudes,  la  fraude  en 
retour.  Il  se  défend  par  des  moyens  illégaux,  c'est  entendu, 
mais  il  y  a  été  amené  par  la  force  des  choses.  La  bascule, 
dont  il  ignore  la  manipulation,  lui  est  dev'enue  odieuse  ; 
il  s'en  méfie  et  préfère  vendre  au  jugé  ;  il  pousse  même 
ses  moyens  de  défense  un  peu  loin,  puisqu'il  refuse  d'ou- 
vrir ses  gh'raras  ou  sacs  renfermant  ses  toisons.  Les  cour- 
tiers achètent  donc  en  quelque  sorte  les  yeux  fermés  puis- 
qu'ils se  contentent  de  soupeser  les  sacs  hermétiquement 
clos,  à  en  évaluer  le  poids  et  à  deviner  selon  le  poids  pro- 
bable accusé,  si  la  laine  a  été  ou  non  fraudée. 

C'est  dans  ces  conditions  qu'en  1900-1906  se  pratiquait 
dans  le  Sud  Oranais  le  commerce  des  laines.  Petit  à  petit, 
des  modifications  ont  été  apportées  ;  une  surveillance  fut 
exercée  qui  amena  les  nomades  à  ouvrir  leurs  saches  ; 
c'était  un  premier  pas  ;  mais  s'il  y  avait  lieu  de  protéger 
l'acheteur  et  de  le  mettre  en  mesure  de  juger  les  toisons 
non  plus  en  soupesant  un  sac  fermé,  mais  en  palpant  et 
en  voyant,  il  était  nécessaire  en  revanche  de  mettre  le 
vendeur  à  l'abri  des  vols  à  la  pesée.  Et  dans  ce  but,  une 
bascule  communale  fut  installée  où  les  nomades  étaient 
libres  de  faire  contrôler  les  pesées  effectuées  sur  des  bas- 
cule? particulières. 

En  outre  de  ces  tromperies  à  la  bascule,  le  nomade  pro- 
ducteur de  laines  avait  encore,  sous  un  autre  rapport,  à 
se  soustraire  à  la  rapacité  des  courtiers.  Voici  dans  quelles 
conditions.  En  automne  l'indigène  est  harcelé  par  les  com- 
merçants qui  le  tentent  en  lui  faisant  en  numéraire  des 
avances  sur  la  récolte  prochaine  de  ses  laines.  Ils  lui  don- 


24 


326  COMIUBLTION    A   l'ÉTUDE   DE   l'iNDUSTRIE    PASTORALE 

nent  par  exemple  5o  ou  60  francs  et  lui  font  signer  un 
engagement  aux  termes  duquel  il  reconnaît  avoir  reçu  en 
marchandises  une  somme  bien  supérieure,  et  qu'il  s'en- 
gage à  rembourser  en  laine.  A  la  récolte,  si  les  cours  sont 
élevés,  le  malheureux  nomade  est  navjé  de  céder  ses  toi- 
sons à  60  fr.  les  100  kilos  par  exemple,  alors  qu'il  pourrait 
les  vendre  sur  le  marché  à  100  ou  120  francs.  S'il  cherche 
à  se  dégager,  il  est  lié  par  son  billet  et  passible  de  pour- 
suites ;  dura  leœ  sed  lex.  Il  en  est  réduit,  en  raison  de  sa 
mentalité  souvent  fruste,  à  frauder  affreusement  ses  toi- 
sons. L'acheteur,  pour  rentrer  dans  ses  fonds,  accepte  une 
telle  marchandise  et,  pour  éviter  des  pertes  à  son  tour,  il 
la  fraude  davantage  et  ainsi  de  suite. 

Le  remède  à  un  si  lamentable  état  de  choses  consiste  à 
soustraire  le  nomade  aux  courtiers  prêteurs  qui  pratiquent 
cette  usure  d'un  nouveau  genre. 

La  question  serait  résolue  si  le  pasteur  indigène  pouvait 
céder  ses  toisons  directement  à  l'industrie. 

A  part  quelques  rares  chefs  indigènes,  la  majorité  des 
éleveurs  ne  sont  guère  possesseurs  d'assez  forts  troupeaux 
pour  tenter  d'expédier  individuellement  leurs  laines,  les 
frais  de  transport  étant  trop  onéreux  lorsqu'ils  s'appli- 
quent à  de  faibles  envois. 

Voudraient-ils  même  le  faire,  qu'ils  ne  le  pourraient 
pas  ;  ils  sont  illettrés  et  ne  sauraient  pas  correspondre  avec 
les  usines.  Les  intermédiaires  et  les  courtiers  ne  tarde- 
raient pas  à  prendre  leur  revanche,  s'ils  faisaient  de  sem- 
blables tentatives. 

L'expédition  des  laines  exige  des  saches,  un  entrepôt 
où  la  marchandise  puisse  être  placée,  à  portée  d'une  gare 
expéditrice,  en  attendant  la  vente,  une  bascule,  des  mar- 
ques pour  signaler  et  classer  par  catégories  les  ballots, 
une  correspondance  épistolaire  et  télégraphique,  etc.,  etc. 
Comment  fera  le  producteur  possesseur  de  dix  ou  vingt 
saches  seulement  .»*  Tous  les  frais  généraux  grèveront  singu- 
lièrement le  prix  de  sa  laine. 

En  admettant  que  certains  indigènes  soient  aptes  à  ces 
tiansactions  commerciales,  le  remède  est  tout  de  même 
dans  l'association,  dans  le  syndicat.  Ce  que  le  pasteur 
nomade  ne  peut  entreprendre  seul,  il  peut  le  réaliser  par 
le  groupement. 

Les  Hamyan  pourraient  avoir  à  Méchéria  un  entrepôt 
central  où  ils  déposeraient  leurs  laines,  leurs  dattes,  leur 
beurre  et  les  peaux  de  bêtes  mortes  par  accident  ou  abat- 


COiNTRIBUTION   A   l'ÉTLDE    DE   l'inDUSTRIK   PASTORALE  '^'2^ 

tuos  pour  la  consoiniiialion.  Ces  entrepôts  fonctioiine- 
raieiil  sous  la  surveillance  des  autorités  locales.  De  même 
qu'il  y  a  un  officier  préposé  à  la  police  judiciaire,  il  y 
aurait  un  olficier  cliaigé  de  toutes  les  (piestions  pastorales 
qui  sont  la  base  des  (piestions  économiques  de  ces  régions. 
Un  agent  civil  serait  chargé  de  la  correspondance,  de  la 
comptabilité  et  des  ventes  directes,  sous  le  contrôle  d'un 
conseil  d'administration.  Les  frais  généraux  locatifs,  de 
correspondance,  de  matériel,  de  transport  et  les  émolu- 
ments de  l'agiMit  directeur  de  l'entrepôt,  seraient  répartis 
entre  les  tribus,  au  piorata  de  leurs  contributions  en  pro- 
duits pastoraux  ou  autres.  Les  adhérents  se  soumettraient 
à  certaines  règles  pour  que  leurs  produits  soient  normaux 
et  de  qualité  marchande.  Les  bénéfices  réalisés  en  cours 
de  campagne  seraient  répartis  entre  les  intéressés,  selon 
leur  apport,  déduction  faite  de  tous  frais  généraux,  en 
proportion  naturellement  de  leur  contribution.  Une  por- 
tion des  bénéfices  pourrait  être  atîectée  à  une  caisse  dite 
d'avance. 

Pour  qii'ini  pareil  entrepôt  puisse  fonctionner,  il  fau- 
drait créer  de  toute  nécessité  une  caisse  susceptible  de 
désintéresser  les  indigènes  au  fur  et  à  mesure  de  Ventrée 
de  leurs  marchandises  en  magasin.  L'indigène  ne  peut 
attendre  ;  il  vit  au  jour  le  jour  et  veut  être  payé  sur  le 
champ.  La  caisse  ferait  également  les  avances  nécessaires 
pour  les  frais  de  location  ou  d'édification  de  l'entrepôt,  la 
manipulation  et  le  transport  des  marchandises. 

Quand  les  producteurs  nomades  auraient  l'assurance  de 
pouvoir  vendre  tous  leurs  produits,  lorsqu'ils  sauraient 
que  l'entrepôt  leur  fera  les  avances  dont  ils  auront  besoin, 
qu'en  fin  de  campagne  ils  auront  encore  quelques  béné- 
fices à  toucher,  ils  s'appliqueront  à  améliorer  leurs  mou- 
tons, à  récolter  proprement  leurs  laines,  à  ne  plus  faire  fi 
des  peaux  de  leurs  animaux  morts  ou  abattus,  à  soigner 
la  fabrication  de  leur  beurre,  etc.  Non  seulement  la  situa- 
tion matérielle  du  nomade  deviendra  de  plus  en  plus 
satisfaisante,  mais  encore  son  commerce  actjuerra  de 
l'importance  et  du  renom. 

Dès  lors  toutes  les  améliorations  concernant  la  laine 
préconisées  dans  les  circulaires  et  dans  les  publications 
particulières  deviendront  réalisables.  Nous  les  résumerons 
dans  le  programme  suivant  : 


328         CONTRIBUTION   A   l'ÉTIDE   DE   L'iNDUSTRIE    PASTORALE 


Laiiie!>i  (tonte,  eusachajçe) 

Les  adhérenls  seront  avisés  à  l'époque  de  la  tonte  qu'à 
telle  date  ils  devront  concentrer  leurs  troupeaux  en  un 
point  choisi  du  parcours,  pour  les  y  faire  tondre,  ou  bien 
ils  s'entendront  pour  faire  savoir  qu'ils  désirent  tondre. 

Une  tondeuse  mécanique  transportable,  fonctionnant 
à  l'aide  d'un  moteur  à  pétrole  et  pouvant  tondre  au  moins 
de  dix  à  vingt  moutons  en  même  temps,  sera  mise  à  leur 
disposition.  A  défaut,  on  enverra  une  équipe  de  tondeurs. 

Les  toisons,  proprement  cUiachées,  secouées,  décrot- 
tées, seront  mises  dans  des  gh'raras,  pesées,  plombées, 
marquées  et  dirigées  sur  l'entrepôt. 

Chaque  intéressé  recevra  le  prix  de  sa  laine,  qui  demeu- 
rera acquise  au  dépôt. 

Le  triage  des  toisons  se  fera  au  magasin  ainsi  cpie  le 
classement. 

Les  déchets  et  les  crottes  seront,  mi  s  à  part.  Naturel- 
lement les  prix  offerts  aux  intéressés  seront  en  rapport 
avec  le  degré  de  pureté  de  leurs  laines. 

Les  indigènes  apprendront  ainsi  à  choisir  leurs  mou- 
tons non  seulement  pour  leur  viande,  mais  encore  pour 
leur  laine. 

L'entrepôt  central  des  LTamyan  pourra,  à  l'exemple  de 
certaines  maisons  de  commerce,  avoir  sa  marque  parti- 
culière et  les  prodivits  livrés  seront  emliaUés  et  plomfjés 
pour  éviter  par  la  suite  des  manipulations  délictueuses. 

Donc,  dans  l'entrepôt,  triage  et  catégorisation  des  toi- 
sons en  lots  de  qualités  différentes,  emballage  en  saches 
autant  que  possible  en  laine,  plombage  portant  la  marque 
et  le  poids. 

La  tonte  se  fera  sous  le  contrôle  môme  de  l'entrepôt. 
D'ailleurs  les  indigènes  finiront  par  apporter  à  la  récolte 
de  la  laine  la  plus  grande  attention,  car  leurs  intérêts 
seront  en  jeu. 

Amélioration  des  laines  africaines 

Les  laines  africaines  indépendamment  des  souillures 
naturelles  ou  parfois  surajoutées,  et  susceptibles  de  les 
déprécier,  sont-elles  en  réalité  aussi  inférieures  que  cer- 
tains le  prétendent  ? 


CONTRIBUTION   A   l'ÉTLDE   DE   l'iNDLSTRIE    PASTORALE  329 

Il  est  ceilain  (juilk's  ne  peuvent  soutenir  un  parallèle 
avec  les  laines  de  Hanibouillet  ;  mais  comme  on  ne  doit 
comparer  que  les  choses  comparables,  nous  ne  pouvons 
pas  dire  que  nos  laines  soient  supérieures  ou  inférieures 
à  telle  ou  telle  autre  laine.  Telles  (ju'on  les  rencontre,  elles 
sont  le  résultat  d'une  sélection  naturelle  sévère  qui  les 
rend  précieuses,  puisqu'elles  répondent  aux  conditions  du 
fuHieu.  En  outre,  telles  (ju'elles  s'offrent,  elles  ont  des 
qualités  réelles  pour  l'usage  auquel  on  les  destine,  et  où 
nulle  autre  laine  ne  peut  les  suppléer.  Elles  ont  les  mèches 
longues  et  bouffantes,  elles  ne  sont  jjoint  plates  comme 
les  imstraliennes  et  les  argentines.  Pour  la  bonneterie  et 
la  couverture,  elles  sont  remarquablement  constituées  et 
sont  d'un  prix  abordable.  Jamais  les  laines  fines  uniformes 
ne  les  supplanteront  dans  la  bonneterie.  Pour  la  matelas- 
serie  qui  exige  des  toisons  bouffantes,  nerveuses,  élasti- 
ques, les  laines  grossières  d'Afrique  et  spécialement  les 
toisons  mècheuses,  criniformes  parfois  des  ovins  berabers 
sont  merveilleuses.  Ces  dernières,  grâce  à  leurs  qualités 
incontestables  de  nervosité  et  d'élasticité,  ont  été  essayées 
sur  nos  indications  dans  la  fabrication  des  tapis  du  Sud  à 
haute  laine.  Les  résultats  ont  été  remarquablement  pro- 
bants ;  le  feutrage  qui  constitue  la  caractéristique  des 
tapis  à  haute  laine  est  demeuré  rebelle  au  piétinement, 
tandis  que  des  lapis  semblables,  mais  où  l'on  avait  fait 
usage  de  laine  fine,  ont  été  en  peu  de  temps  aplatis  ;  la 
haute  laine  s'est  couchée  sous  les  foulées.  Nous  avons 
cependant  tenté  de  les  modifier  en  infusant  à  un  lot  d'essai 
du  sang  mérinos. 

A  la  suite  des  résultats  que  nous  avons  obtenus  dans  le 
troupeau  d'expériences  croisement  des  brebis  du  cercle 
de  Méchéria  avec  des  béliers  mérinos),  nous  avons  abouti 
à  cette  conclusion  :  c'est  qu'en  une  ou  deux  générations, 
les  pioduits  issus  de  mérinos  offrent  de  superbes  toisons 
fines  ayant  la  délicatesse  de  brin  du  mérinos  et  la  longueur 
de  mèche,  le  bouffant  et  le  touffu  des  moutons  du  cercle. 

Mais,  comme  sujets  de  boucherie,  les  produits  de  croi- 
sement n'ont  pas  été  très  satisfaisants.  Le  hamyan  qui, 
jusqu'au  même  degré  que  le  beni-guill,  est  remarquable 
par  la  rondeur  de  son  arrière-train,  par  le  globuleux  de  ses 
gigots,  déchoit  dans  son  descendant.  Il  tend  à  perdre  sa 
bonne  conformation  lorsqu'il  s'accouple  avec  le  mérinos. 
Mais  si  l'on  s'en  tient  au  croisement  industriel,  c'est-à-dire 
qu'on  ne  produit  que  des  croisés  de  première  génération, 


330  CONTRIBUTION   A    l'ÉTUDI:   DE    l'iNDI  STUIE    PASTORALE 

sans  pousser  à  l'absorption  du  haniyan  par  le  mérinos,  on 
obtient  rarement  des  déboires. 

Mais,  nous  le  répétons,  nos  laines  du  Sud  ne  sont  pas 
aussi  inférieures  qu'on  se  plaît  à  le  répéter  ;  elles  ont  droit 
à  une  réhabilitation  ;  les  acheteurs,  pour  les  payer  à  bas 
prix,  les  dénigrent  et  nous  avons  souvent  le  tort  de  leur 
emboîter  le  pas  et  de  faire  chorus  avec  eux.  Il  est  vrai 
que  la  fraude,  la  malfaçon  ont  semblé  donner  raison  aux 
détracteurs  de  nos  laines,  mais  lorsque  les  toisons  d'Afri- 
que leur  sont  offertes  proprement  sous  la  dénomination 
de  laines  colon,  nous  voyons  aussitôt  les  prix  se  relever  et 
devenir  rémunérateurs. 

Dans  nos  troupeaux,  les  sujets  lanigères  délite  ne  sont 
pas  rares  et  il  n'y  aurait  qu'à  les  séparer  pour  les  élever  au 
rang  d'améliorateurs,  sans  qu'il  soit  nécessaire  pour  cela 
de  recourir  à  l'infusion  d'un  sang  étranger.  Certes,  le 
mérinos  a  fait  ses  preuves  sur  tous  les  champs  d'élevage 
du  monde  ;  mais  ie  mérinos  est  surtout  amorcé  du  côté 
laine.  En  Algérie,  on  obtient  facilement  des  croisés  mieux 
toisonnés,  mais  inférieurs  sous  le  rapport  de  la  production 
de  la  viande.  L'inconvénient  ne  compense  pas  l'améliora- 
tion obtenue  du  côté  laine.  En  Algérie,  le  troupeau  est 
surtout  exploité  pour  la  boucherie. 

Cependant,  on  peut  en  faire  un  animal  à  double  fin  : 
bon  sujet  à  laine  et  bon  sujet  de  boucherie. 

Comme  sujets  de  boucherie,  le  hamyan  et  son  voisin  le 
beni-guill  sont  non  seulement  remarquables,  mais  encore 
ceux  porteurs  de  toisons  susceptibles  de  figurer  dans  les 
primés  sont  nombreux.  11  ne  s'agit,  comme  nous  l'avons 
dit,  il  y  a  un  instant,  que  de  les  séparer  et  de  les  utiliser 
comme  reproducteurs.  En  peu  d'Unnées  sûrement,  on 
obtiendrait  d'excellents  résultats. 


La  pratique  -des  laines  brutes 
Manipulation.-  Catégorisation.-  Evaluation  du  rendement 

Pour  manipuler  les  laines  en  suint,  une  certaine  pra- 
tique est  indispensable,  ainsi  que  des  connaissances  élé- 
mentaires sur  les  toisons. 

Un  lot  de  laines  brutes  vaut  par  la  proportion  des 
finesses  qu'on  recherche  et  par  le  rendement  qu'on  en 
obtient  en  lavé  à  fond.  En  d'autres  termes,  plus  un  lot 


CONTRIBUTION    A    L  ETUDK.  DE    L  INDUSTRIE    PASTORALE 


331 


renfermera  de  laines  fines,  plus  il  aura  de  valeur  ;  plus  il 
rendra  en  lave,  plus  il  sera  avantageux. 

Les  finesses.  Leur  proportion  dans  uti  lot.  —  Les  laines 
d'Afrique  n'offrent  pas  l'homogénéité  que  l'on  rencontre 
dans  les  laines  françaises  ou  d'outre-AUantique.  Dans  la 
Métropole  et  dans  les  pays  moutonniers  d'Argentine  ou 
d'Australie,  les  éleveurs,  par  un  choix  judicieux  des  repro- 
ducteurs, par  une  sélection  rigoureuse,  sont  parvenus  à 
obtenir  des  produits  d'un  modèle  déterminé.  Il  en  est 
résulté  que  l'on  sait  désormais  que  telle  région  produit 
telle  catégorie  de  laine  de  telle  finesse  ;  telle  autre  région, 
'  telle  autre  laine  de  telle  autre  finesse,  et  ainsi  de  suite. 

Les  transactions,  dans  ces  conditions,  se  trouvent  faci- 
litées et  les  acheteurs  n'ont  plus  à  exercer  leur  sagacité, 
leur  sens  réellement  pratique,  que  sur  le  rendement. 

Tel  lot  en  suint  lavé  à  l'usine,  séché  dans  le  vide,  ren- 
dra tant  au  quintal.  C'est  ce  tant  au  quintal  que  l'acheteur 
expérimenté  devra  savoir  dégager  d'une  façon  sinon 
absolue,  du  moins  extrêmement  approchée,  pour  éviter  les 
mécomptes  ou,  pour  employer  le  terme  consacré,  éviter 
la  coiffe.  Et  cette  coiffe,  cette  erreur  d'appréciation,  lors- 
qu'il s'agit  de  centaines  de  milliers  de  balles,  peut  attein- 
dre de  grosses  proportions.  C'est  donc  dans  l'évaluation 
du  rendement  que  réside  la  plus  grosse  difficulté  et  la 
mission  la  plus  délicate  de  l'acheteur. 

Car  le  rendement  varie  d'année  en  année  avec  les  condi- 
tions d'ambiance  qui  ont  influencé  les  troupeaux.  Intem- 
péries, tempêtes  de  sable,  bref  toutes  circonstances  ayant 
favorisé  la  surcharge  des  toisons.  L'acheteur  doit  aussi 
tenir  compte  de  la  résistance  des  mèches  et  des  brins,  résis- 
tance qui  peut  varier  avec  l'état  de  santé  des  troupeaux. 
Telle  laine,  fort  légère,  peu  chargée,  aura  un  bon  rende- 
ment au  lavé,  mais  déchètera  au  peignage,  car  les  brins 
étant  peu  résistants  casseront  ;  le  rendement  en  peigné 
sera  donc  amoindri  d'autant.  L'acheteur,  tout  en  soupe- 
sant les  toisons,  en  éprouvant  la  solidité,  la  résistance  des 
brins  et  des  mèches,  en  examinant  leur  degré  de  finesse, 
devra  asseoir  son  jugement  définitif  en  donnant  à  cha- 
que lot  le  coefficient  mérité.  Durant  son  expertise,  il  est 
bon  qu'il  ne  soit  distrait  par  rien  et  qu'il  soit  tout  à  son 
affaire. 

C'est  pourquoi  l'expert,  qui  a  ime  mission  des  plus  diffi- 
ciles  et  des   plus   délicates   à   remplir,    ne   doit   pas   être 


332       co.^TKlBLTIO^  a  l'étude  de  l'industrie  pastorale 

influencé  par  la  présence  des  intéressés  et  surtout  par  leurs 
réflexions  d'ordre  mercantile.  Le  cerveau  à  ce  moment  ne 
doit  obéir  qu'aux  impressions  visuelles  et  tactiles  déter- 
minées par  l'aspect  des  toisons,  leur  poids,  le  diamètre  des 
brins,  la  résistance  des  mèches,  etc.  Ce  sont  là  impres- 
sions qu'on  ne  saurait  décrire  et  communiquer,  mais  qui 
résultent  d'une  gymnastique  fonctionnelle  si  l'on  peut 
dire,  d'un  entraînement,  d'une  éducation  de  l'œil  et  des 
doigts.  Ces  aptitudes  ne  peuvent  s'acquérir  ni  dans  les 
ouvrages  les  mieux  faits,  ni  dans  les  descriptions  les  plus 
littéraires. 

Nos  laines  d'Afrique,  en  général,  sont  très  difliciles  à 
manipuler,  elles  sont  hétérogènes  en  ce  sens  qu'on  trouve 
dans  un  même  lot  des  laines  d'une  belle  finesse  à  côté 
d'autres  fort  grossières.  D'autre  part,  les  toisons  sont 
«  amorphes  »,  c'est-à-dire  la  plupart  du  temps  sans  forme 
nette  ;  mal  tondues,  mal  détachées,  mal  nouées.  Lors- 
qu'on les  déploie  et  qu'on  tente  de  les  étaler,  on  s'y 
retrouve  diflicilement  ;  les  régions  des  épaules,  des  cuis- 
ses, des  flancs,  ne  se  distinguent  plus  les  unes  des  autres 
ou  fort  difïicilemerit  ;  de  sorte  que  le  triage  en  brut  qui 
précède  nécessairemen-t  le  lavage,  constitue  lorsqu'il  s'agit 
de  nos  laines  d'Afrique,  une  opération  des  plus  difficiles, 
des  plus  énervantes,  et  rares  sont  les  trieurs  qui  arrivent  à 
s'y  retrouver  et  à  mener  leur  besogne  à  bonne  fin. 

Si  l'isolement  des  laines  de  finesses  différentes  pouvait 
se  pratiquer  facilement,  nos  laines  trouveraient  des  utili- 
sations multiples  selon  leur  degré  de  finesse  et  par  suite 
de  bons  prix.  Mais  le  triage  en  brut  étant  difficile,  fati- 
gant, n'aboutit  le  plus  souvent  qu'à  un  résultat  piteux  ; 
tel  lot  qui  a  donné  un  mal  inouï  n'a,  en  fin  de  compte, 
fourni  qu'une  proportion  dérisoire  de  laine  fine  et  une 
proportion  énorme  de  laine  grossière.  Beaucoup  de  temps 
et  de  peine,  par  conséquent  d'argent  auront  été  malencon- 
treusement perdus.  Aussi,  nos  laines  sont-elles  surtout 
utilisées  pour  la  grosse  draperie,  pour  la  bonneterie,  pour 
la  couverture  et  pour  la  matelasserie. 


Une  toison  n'est  pas  également  fine  dans  tontes  ses  parties 

Dans  une  toison  se  rencontrent  au  moins  six  degrés  de 
finesses  et  chaque  finesse  est  localisée  dans  une  région  bien 
déterminée. 


CONTRIBUTION   A   l'ÉTUDE    DE   l'iNDUSTRIE   PASTORALE  333 

Lorsque  la  toison  est  à  dos,  avant  la  tonte  du  mouton, 
il  est  aisé  de  se  rendre  compte  que  la  laine  des  épaules 
diffère  de  la  laine  des  cuisses,  laquelle  n'est  plus  la  même 
que  la  laine  du  dos  ou  des  flancs,  du  cou  ou  de  la  queue. 
11  en  résulte  que  dans  un  lot  de  laines  homogènes,  le  trieur 
verra  sa  besogne  facilitée,  car  il  n'aura  qu'à  prélever  sur 
chaque  toison  les  différentes  laines  et  à  les  jeter  dans  des 
paniers  différents  ;  laines  des  épaules  avec  laine  des 
épaules,  laine  des  cuisses  avec  laine  des  cuisses  et  ainsi  de 
suite 

Notons  en  passant  que,  sauf  en  Afrique,  les  toisons  déta- 
chées en  suint,  lorsqu'elles  sont  déployées  reproduisent  la 
forme  de  la  peau  étalée  du  mouton  ;  dans  ces  conditions^ 
le  repérage  des  laines  par  région  est  très  facile.  Lorsqu'il 
s'agit  de  nos  laines,  ce  triage  en  brut  devient  un  casse-tête 
chinois.  Les  bons  trieurs  parviennent  cependant  à  s'y 
retrouver. 

En  Algérie,  si  la  proportion  dans  les  finesses  peut  être 
envisagée,  on  n'en  tient  pas  un  très  grand  compte,  et  c'est 
l'évaluation  du  rendement  qui  acquiert,  dans  l'apprécia- 
tion des  lots,  l'importance  primordiale.  En  général,  nos 
laines,  en  dehors  des  fraudes  dont  elles  peuvent  être 
l'objet,  sont  très  lourdes,  très  chargées  en  matières  étran- 
gères. Et  cela  d'autant  plus  qu'elles  sont  plus  fines,  plus 
vrillées,  plus  spiralées,  car  elles  retiennent  mieux  dans 
l'enchevêtrement  de  leurs  mèches  les  impuretés  provenant 
du  dehors.  11  en  résulte  que  tel  ou  tel  lot,  cependant  fin, 
subit  une  légère  dépréciation  du  fait  de  sa  trop  grande 
lourdeur,  que  son  rendement  est  fatalement  déficitaire. 

En  règle  générale,  il  est  admis  que  nos  laines  perdent 
au  lavage  5o  à  60  %  de  leur  poids. 

Ces  chiffres  sont  une  directive,  mais  ils  peuvent  varier 
en  plus  ou  en  moins  selon  les  lots  considérés. 

Nos  acheteurs  algériens  pensent  d'ordinaire  que  les 
laines  tondues  aux  ciseaux  '^genre  colon)  sont  fatalement 
supérieures  et,  par  suite,  plus  chères  que  les  laines  dites 
arabes  provenant  du  bled  et  tondues  à  la  faucille.  C'est  un 
peu  vrai,  mais  pas  dans  tous  les  cas.  11  est  certain  que  la 
coupe  aux  ciseaux  est  plus  régulière,  donne  des  toisons  à 
mèches  relativement  égales  et  exemptes  tout  au  moins 
des  impuretés  ultimes  provenant  du  sol  où  la  tonte  a  eu 
lieu.  Mais  il  y  a  laine  et  laine.  Telles  toisons  dites  arabes, 
c'est-à-dire  détachées  à  la  faucille,  à  même  le  sol,  un  peu 
chargées,  seront  cependant  supérieures  à  un  lot  de  même 


334  COMRIBl  TION    A    l'ÉIIDE    DE    L'I^UI:STRIE    PASTORALE 

poids,  mais  composé  de  toisons  grossières  (juoique  légères 
et  propres.  La  qualité  importe  également.  Lorsque  tout  à 
l'heure  nous  avons  noté  que  l'expert,  à  propos  des  laines 
d'Afrique  doit  surtout  se  préoccuper  du  rendement,  nous 
n'avons  pas  voulu  dire  par  là  qu'il  devait  faire  //  des  pro- 
portions dans  les  finesses. 

Ce  que  nous  voulons  faire  ressortir  ici  c'est  qu'une  laine 
genre  colon  n'est  pas  forcément  supérieuie,  parce  que 
genre  colon,  et  qu'une  laine  dite  arabe  n'est  pas  fatalement 
mauvaise  et  inférieure  de  par  sa  provenance. 

C'est  de  là  que  vient  l'erreur  de  nos  acheteurs  algériens 
qui  sont  fascinés  par  la  légèreté  des  toisons,  à  l'exclusion 
de  leurs  qualités  de  finesse  qui  sont  pourtant  un  facteur 
non  négligeable.  Et  l'on  comprend  pourquoi,  lors  des 
achats  de  laines  récemment  faits  par  l'Intendance,  on  a 
vu  des  négociants  cruellement  déçus  par  les  prix  fixés 
pour  leurs  laines  alors  que  ces  laines  avaient  été  détachées 
aux  ciseaux  et  rentraient  dans  la  catégorie  des  laines  dites 
colon.  Rien  d'ailleurs  ne  fixe  mieux  les  idées  que  des 
chiffres  : 

Voici  un  lot  léger,  à  fort  rendement,  mais  où  la  propor- 
tion des  fines  et  des  grossières  est  en  faveur  des  laines 
grossières. 

Ce  lot  en  suint  pèse  je  suppose  loo  kilos.  Il  est  peu 
chargé  et  donnera  sûrement  au  lavage  42  %.  Les  fines  sont 
dans  la  proportion  de  20  %  seulement,  les  semi-fines  et 
les  grossières  dans  la  proportion  de  80  %.  Cette  laine  lavée 
à  fond  devra  fournir  une  laine  fine  taxée  à  4  fr-  20  le  kilo, 
et  une  laine  secondaire  taxée  à  3  fr.  26  le  kilo.  Quel  sera 
le  prix  du  lot  en  suint,  tel  (ju'il  aurqi  été  présenté  ?  Refai- 
sons les  calculs  déjà  faits  plus  haut  : 

Les    20  kilos  en  lavé  à  4  fr.  25  =     85  fr. 
Les    80  kilos  en  lavé  à  3  fr.  25  =  260  fr. 


Les  100  kilos  en  lavé 345  fr. 

Le  kilo  en  lavé  revient  à  3  fr.  45. 

Les  100  kilos  rendant  42  kilos  coûteront  donc  : 

42   X    3  fr.  45  =   i44  fr.  90 
Prenons  un  lot  de  100  kilos  bien  plus  chargé,  c'est-à-dire 


CONTJlIBimON    A    l'ÉTIDE    DE    l/lNDUSTHIE    PASTORALE    '     335 

ayant  un  icndenKiil  de  .Hç)  %.  Supposons  les  fines  repré- 
sentées par  5o  %  et  les  grossières  par  5o  %.  Nous  aurons  : 

5o   X    [\  fr.  25  =  2  12  fr.  5o 
5o  X   3  fr.  25  =   162  fr.  no 


100  3-5  fr. 

Le  kilo  en  lavé  vaut  3  fr.  7;")  ;  les  39  kilos  valent  : 
3  fr.  75   X   39  =  i/|6  fr.  25 

Pour  l'acheteur  algérien,  le  premier  lot  qui  était  supé- 
rieur se  trouve  taxé  à  ikk  fr.  90  et  le  deuxième  lot,  qu'il 
appréciait  peu,  se  trouve  atteindre  i46  fr.  20.  Il  arrive  qiîe 
cet  écart  en  faveur  des  laines  non  colon  se  trouve  être  assez 
fort  pour  que  les  intéressés  se  montrent  mécontents  et 
vouent  les  experts  aux  gémonies. 

Si  le  rendement  lorsqu'il  s'agit  de  lots  homogènes  est 
primordial,  il  demeure  encore  important  dans  l'appré- 
ciation des  lots  hétérogènes  ;  mais  il  n'est  pas  tout,  et, 
dans  l'évaluation,  les  proportions  dans  les  finesses  doivent 
entrer  en  ligne  de  compte. 

Lorsque  les  lots  examinés  sont  fraudés  ou  chardonnés, 
le  rendement  doit  subir  une  diminution  de  2  à  3  %  surtout 
lorsque  les  laines  sont  humides. 

Laines  du  territoire  d'Aïu-Sefra 

De  Béchar  à  Géryville,  en  passant  par  Méchéria,  on 
trouve  trois  groupes  de  laines  : 

Les  laines  bérabers,  zouléï  ou  de  Béchar,  laines 
mècheuses,  lisses,  à  brins  rectilignes,  rappelant  la  toison 
des  lincoln  grossiers.  Laines  pour  la  matelasserie  par  excel- 
lence et  pour  la  fabrication  des  tapis  à  haute  laine,  très 
recherchées  pour  les  fils  de  chaîne,  utilisées  en  mélange 
avec  la  laine  du  chameau  (oubeur)  et  les  poils  de  caprins 
pour  la  confection  des  fiidjs,  des  gh'raras,  des  smatt',  des 
amara,  des  h'mels,  des  cordages  plats,  etc.  Ces  laines  sont 
ordinairement  très  propres,  légères,  grâce  à  la  rectilignité 
de  leurs  brins,  laquelle  rend  difficile  toute  adhérence 
d'impureté. 

Malgré  cela,  les  toisons  de  Béchar  offertes  au  commerce 
sont  souvent  lourdes  parce  que  fraudées. 


336  CONTRIBUTION   A   l'ÉTUDE   DE   l'iNDUSTRIE    PASTORALE 

A  Ounif,  on  retrouve  cette  même  variété  de  laine  ainsi 
que  celle  des  Bciii-Guill,  qui  est  boulïante,  à  mèches  fort 
nerveuses,  à  brins  parfois  très  fins  et  vrillés,  mais  dont  la 
finesse  n'égale  pas  celle  des  laines  hamyan  (cercle  de 
Méchéria). 

A  Aïn-Sefra,  en  outre  des  laines  précédentes,  on  trouve 
des  laines  jarreuses,  à  brins  cassants,  très  lourdes,  souvent 
fraudées. 

A  Méchéria,  la  proportion  de  finesse  est  très  forte,  les 
brins  sont  beaux,  soyeux  et  très  propres  à  la  fabrication 
des  draps  satin  ou  des  étoffes  légères.  A  côté  de  cette  caté- 
gorie fine,  il  y  a  des  laines  zouléï  ou  lisses  et  des  laines 
moyennes  excellentes  pour  la  grosse  draperie. 

A  Géryville,  les  toisons  sont  très  étendues,  à  mèches  bien 
fournies,  naturées,  avec  moins  de  finesse  qu'à  Méchéria, 
mais  admirablement  belles  pour  la  confection  des  draps 
de  troupe.  Très  résistantes  aussi. 

En  certaines  années,  elles  sont  très  chardonnées.  La 
proportion  des  jarreux  et  des  gris  y  est  notable. 


Le  transport  des  laines  (ensachaiî:e,  pressaiçe,  lavage) 

Les  laines  sont,  en  Algérie,  ensachées  dans  de  grands 
sacs  de  chanvre  ou  de  jute  ;  chaque  sac  de  laine  pèse  de 
80  à  120  kilos,  selon  la  propreté  des  toisons. 

L<^s  saches  de  chanvre  abandonnent  souvent  aux  laines 
des  filaments  de  chanvre  difficiles  à  retirer  ensuite  et  qui, 
à  l'instar  du  jarre,  sont  rebelles  à  la  teinture.  Cela  paraît 
de  peu  d'importance  et  cependant  l'inconvénient  qui  en 
résulte  doit  être  notable,  puisque 'les  industriels  de  la 
Métropole  s'en  sont  préoccupés  et  ont  envisagé  les  moyens 
de  supprimer  le  chanvre  dans  les  toiles  d'emballage. 

A  un  autre  point  de  vue,  l'usage  des  saches  fait  que  la 
laine  expédiée  représente  un  volume  assez  élevé,  qu'il  y 
a  lieu  d'examiner  au  point  de  vue  de  la  question  des  trans- 
ports par  voie  de  terre  et  de  mer. 

La  location  des  wagons  de  A  à  5. 000  kilos,  par  exemple, 
devient  onéreuse  quand  le  chargement  trop  volumineux 
n'atteint  pas  ce  tonnage.  Tandis  que  s'il  était  possible  de 
réduire  le  volume  par  tassement,  le  chargement  en  serait 
plus  économique  parce  qu'on  pourrait,  sous  un  moindre 
volume,  charger  dans  un  wagon  un  poids  plus  élevé.  Il  en 
serait  de  même  sur  le  bateau  transporteur. 


CONTRIBIÎTION   A   L  ETUDE    DE    I.  INDUSTRIE    PASTORALE 


337 


On  réduirait  considéiablement  le  cubagrc  occupé  par  le 
même  stock  ensaché  si  l'on  voulait  utiliser  le  pressage  au 
moyen  de  presses  hydraulicpies  ou  de  presses  mues  par 
traction  animale.  L'Amérique  du  Sud,  l'Australie,  le  Cap 
expédient  leurs  laines  en  Europe  en  balles  pressées  de  450 
à  5oo  kilos  chacune,  et  jamais  les  industriels  n'ont  eu  à 
reprocher  au  pressaiîo  le  moindre  inconvénient  :  ni  la 
résistance  des  mèches,  ni  l'élasticité  des  brins  n'en  sont 
modifiées.  Il  y  aurait  lieu,  à  notre  avis,  de  recourir  au 
pressage  des  laines  tout  comme  s'il  s'agissait  d'expédier 
de  la  paille  ou  du  foin. 

Mais  si,  sous  le  rapport  du  cubage,  le  pressage  est  éco- 
nomique et  lalionnel, le  poids  du  stock  transporté  demeure 
le  même,  il  ct)mprend  le  poids  de  la  laine  d'abord,  plus 
le  poids  de  toutes  les  impuretés  et  du  suint  qu'elles  ren- 
ferment. Il  s'ensuit  que  l'on  continue  à  transporter  des 
inutilités  au  même  prix  que  la  matière  laine.  Et  si  l'on  se 
rappelle  que  les  impuretés  (corps  étrangers,  suint,  pous- 
sières) représentent  5o  à  60  %  du  poids  global,  on  est  con- 
duit à  se  demander  pourquoi  on  n'a  pas  songé  par  un 
lavage  du  stock  à  réduire  le  poids  au  strict  raisonnable. 

A  ce  sujet  une  question  se  pose  : 

Y  a-t-il  avantage  à  laver  les  laines  avant  leur 
exportation  ? 

Nous  répondrons  tout  de  suite  non  ! 

Le  lavage  préalable  des  toisons  destinées  à  être  expor- 
tées serait  non  seulement  une  opération  inutile,  mais 
encore  onéreuse  par  ses  conséquences,  pour  ne  pas  dire 
désastreuse. 

Nous  avons  montré  plus  haut  que  dans  une  seule  et 
même  toison,  le  trieur  peut  prélever  au  moins  six  portions 
différentes  par  leur  finesse  et  leurs  qualités.  Si  le  triage  en 
brut  est  fort  aisé  sur  une  toison  en  suint  non  lavée,  il 
devient  impossible  dès  que  la  toison  a  été  lavée  ;  car  lors 
de  l'opération  du  lavage,  les  mèches  sont  détachées,  tri- 
turées, mélangées  et  toute  distinction  devient  dès  lors 
impossible.  Notons  que  l'industriel,  qui  fait  opérer  les 
classements  en  suint,  lave  ensuite  chaque  catégorie  à  part, 
car  chaque  finesse  a  une  destination  et  un  usage  déter- 
minés. Les  peignés  obtenus  ont  des  prix  d'autant  plus 
élevés  que  les  brins  en  sont  plus  fins  et  plus  homogènes. 
Telle  laine  peignée  donnera  178.000  mètres  de  fil  au  kilo- 
gramme, telle  autre  8.000  mètres  seulement.  On  conçoit 
que  l'écart  de  prix  entre  ces  deux  types  rendrait  une  opé- 


338  CONTRIBUTION   A   l'ÉTUUH   DE   l'iNDUSTBIE   PASTORALE 

ration  désastreuse  si  un  utilisait  des  peignés  mélangés. 
L'industriel  a  besoin  de  faire  trier  en  brut,  en  suint,  avant 
tout  lavage  ;  c'est  pourquoi  le  lavage  préalable  de  nos 
laines  avant  leur  expédition  dans  la  Métropole  serait  de 
toutes  façons  onéreux,  car  d'un  lot  qui  eût  fourni  des  caté- 
gories de  choix  à  coté  de  catégories  grossières,  il  ferait  un 
méli-niélo  bon  pour  bourrer  des  matelas  ou  pour  fabri- 
quer des  tapis  et  des  carpettes. 

Le  lavage  des  débris  serait  parfaitement  logique,  parce 
que  les  débris  ne  sont  pas  triés  ;  on  les  lave  en  bloc  et  on 
les  carde  pour  la  fabrication  des  tapis  et  des  carpettes  ou 
même  des  grosses  couvertures. 

Les  débris  proprement  dits  sont  parfois,  en  raison  de 
leur  prix  abordable,  utilisés,  après  lavage,  pour  la  mate- 
lasscrie  ;  mais,  à  l'épocjue  piéscnte,  les  substances  textiles 
ont  acquis  une  plus-value  énorme  et  l'industrie  du  vête- 
ment a  tendance  à  tout  absorber. 

En  pays  indigène,  apiès  la  tonte,  les  femmes  et  les 
enfants  glanent  les  débris  cTes  toisons  et  les  mettent  de 
côté.  Généralement  ce  sont  les  Kabyles  ambulants  qui  les 
collectent  en  échange  de  marchandises  variées  et  de  paco- 
tille. Dans  les  débiis  provenant  des  toisons  se  trouvent 
parfois  des  rognines  de  burnous,  ou  de  haïks  ;  mais  dans 
les  centres  indigènes  oii  l'on  tisse  beaucoup,  les  rognures 
de  tissus  sont  amassées  et  cédées  à  part. 


* 


En  Fiance,  le  troupeau  ovin,  déjà  en  décroissance  avant 
la  guerre,  a  été  fort  entamé  dejîuis  le  début  des  hostilités, 
des  mesures  ont  été  heureusement  prises  pour  parer  à  sa 
ruine,  mais  sa  reconstitution  sera  lente  ;  il  est  vrai  de  dire 
que  pour  l'industrie  textile  nos  usines  étaient  tributaires 
de  l'Argentine,  de  l'Australie  et  du  Cap  ;  aussi  malgré  la 
maîtrise  des  mers  et  notre  alliance  avec  l'Angleterre,  la 
guerre,  en  élevant  les  frets,  a-t-elle  entraîné  dans  le  prix 
des  laines  une  hausse  notable  ;  il  a  donc  été  nécessaire 
pour  nous  de  songer  à  réserver  à  notre  usage  exclusif  le 
produit  total  en  laines  de  notre  colonie  nord  africaine. 
Mais  la  matelasserie  continue  à  absorber  un  stock  énorme 
de  laines  et  le  moment  est  venu  de  songer  à  utiliser  des 
produits  nouveaux  dont  la  valeur  et  les  propriétés  étaient 
jusqu'ici  négligées  ou  même  insoupçonnées. 


CONTRIBUTION   A   l'ÉTUDK   DE   L'INDUSTRIE    PASTORALE  ÎÎ39 

Le  kapok,  dans  l'avanl-guerre,  commençait  déjà  à  faire 
ses  preuves  en  matelasserie  ;  malgré  sa  combustibilité  ou 
plus  exactement  son  inflanmiabilité  excessive,  il  n'a  donné 
lieu,  depuis  son  emploi,  à  aucun  inconvénient. 

11  a  été  utilisé  en  matelasserie  pour  les  édredons,  les 
couvertures,  les  dessus  de  lit  (lesquels  ne  sont  autre  chose 
que  des  édredons  étalés,  réduits  à  l'épaisseur  d'une  grosse 
couverture  et  qui  renferment  une  couche  de  ka{)ok). 

Or,  nous  possédons  dans  le  Sud  Oranais,  ainsi  que  dans 
les  régions  lacustres  de  l'Algérie,  un  duvet  végétal  pro- 
venant de  l'inllorescence  d'une  plante  aquatique  (la  mas- 
sette,  Typha  iatifolia)  qui,  dans  la  confection  des  oussadas 
ou  plutôt  dans  le  rembouirage  des  coussins,  a  manifesté 
des  propriétés  remarquables  de  légèreté  et  d'élasticité. 
Malgré  cela,  nous  ne  la  préconiserions  pas  pour  la  mate- 
lasserie, car  elle  ne  se  manipule  pas  aisément  et  ne  peut 
se  laver.  Elle  est  constituée  par  de  petits  llocons  duveteux 
fort  légers,  qui  s'éparpillent  dans  l'air  avec  la  plus  grande 
facilité,  à  tel  point  que,  pour  la  mettre  en  coussins,  on  est 
obligé  d'opérer  avec  précaution,  sous  un  drap,  pour  en 
éviter  l'éparpillement  dans  l'atmosphère.  Mais,  une  fois 
enfermé  dans  le  coussin,  l'édredon  ou  le  dessus  de  lit,  ce 
duvet  manifeste  ses  propriétés  de  légèreté,  d'athermanéité 
et  d'élasticité  (sans  conserver  la  moindre  déformation)  de 
façon  très  remarquable.  La  plante  qui  le  fournit  pousse 
abondamment  dans  l'Oued-Béchar  i  et  son  extension  natu- 
relle pourrait  être  facilitée  et  exploitée  largement. 

Nous  avons  pensé  à  utiliser  ce  duvet  végétal  là  où  le 
lavage  et  la  réfection  ne  s'imposent  pas  comme  pour  les 
matelas. 

D'aucuns  penseront  que  la  fin  des  hostilités  ne  saurait 
encore  être  trop  éloignée,  et  que  la  paix  obtenue  par  la 
victoire  de  nos  armes  nous  dispensera  de  recourir  à  des 
utilisations  que  seules,  les  circonstances  actuelles  peuvent 
suggérer.  Nous  ne  partageons  pas  leur  avis  et  nous  esti- 
mons que  rien  ne  doit  être  négligé  qui  peut  utilement  et 
économiquement  suppléer  à  une  matière  première  plus 
coûteuse.  Si  cette  guerre  a  semé  des  ruines  et  des  deuils, 
elle  a  réveillé  chez  nous  cet  esprit  d'initiative  et  de  réali- 
sation (jui,  en  s'exerçant  dans  le  domaine  de  la  défense 


I   La  masselte  croît   clans  presque  tous   les  marécages  et  oueds  marécageux 
de  l'Algérie. 


340         CONTRIBUTION   A   l'ÉTLDE    DE    LINDUSTRIE    PASTORALE 

nationale  (alors  qu'on  nous  le  déniait  complètement),  a 
étonné  le  monde. 

Il  est  nécessaire,  indispensable,  (jue  ce  renouveau 
d'énergie  ne  retombe  pas  en  sommeil,  sinon  nous  suc- 
comberons dans  la  terrible  lutte  économique  qui  succé- 
dera à  l'horrible  lutte  par  les  armes. 

* 

Notre  mission,  en  ce  qui  concerne  la  question  des  laines, 
est  momentanément  terminée.  Nous  avons  eu  surtout  pour 
but  d'apporter  notre  modeste  contribution  à  l'étude  des 
sous-produits   de    notre   industrie   pastorale.    Nous    nous 
sommes  efforcé  de  faire  connaître  à  ceux  que  l'avenir  de 
notre  colonie  intéresse  le  problème  si  complexe  que  sou- 
lève la  question  lainière.   Nous   nous  sommes  placé  au 
point  de  vue  algérien  et  nous  n'avons  fait  que  tracer  un 
programme,  un  plan  qui  nous  servira  ultérieurement  à 
une  élude  plus  complète.  Les  idoines  en  la  matière  sont 
généralement  des  courtiers   ou   des   négociants   qui   ont 
acquis  leurs  connaissances  par  une  longue  pratique  ;  on 
ne  peut  s'attendre  à  les  voir  livrer  au  papier  ce  qu'ils  ont, 
pour  ainsi  dire  à  leur  insu,  péniblement  acquis  ;  les  neuf 
dixièmes  ne  sauraient  le  faire  utilement  et,  en  supposant 
qu'ils  y  songent,  ils  ont  autre  chose  à  faire  qu'à  écrire. 
Nous  avons  cru  utile  de  le  faire  à  leur  place.  Exerçant 
depuis  douze  ans  au  Pays  du  Mouton,  nous  étant  attaché 
spécialement  à  l'étude  de  ce  petit  ruminant,  dont  l'élevage 
est  si  plein  d'intérêt,  nous  n'avons  pas  dédaigné  de  nous 
occuper  de  ses  sous-produits,  de  leur  utilisation,  des  tran- 
sactions et  des  fraudes  dont  ils  sont' parfois  l'objet.  Notre 
connaissance  de  la  langue  du  pays  et  des  mœurs  et  pro- 
cédés commerciaux  de  ses  habitants,  ont  singulièrement 
facilité  notre  tâche,  en  sorte  que  nous  nous  sommes  trouvé 
dans  les  meillemes  conditions  possibles  pour  mener  cette 
étude  à  bonne  fin.  Si  ces  notes  peuvent  être  un  jour  de 
quelque  utilité  dans  l'étude  générale  de  notre  industrie 
pastorale,  nous  en  serons  pleinement  satisfait. 

C.  BEN  DANOU, 

Ancien  Préparateur  d'Hygiène  el  de  Zooitchnie 

à  l'Ecote  Nationale  d'Agriculture  de  Montpellier. 

Vétérinaire   Vaccinateur  à  Méchéria   (Sud  Oranais). 


OBSERVATIONS    METEOROLOGIQUES 


341 


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OnSRRVATOIHE    DE    SANTA-CRUZ 


Étude  des  Vents  du  l*""  Juin  au  30  Novembre  1916 


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MOUVEMENT  DE  LA  NAVIGATION 


DANS    LES 


PORTS 

du    IDéjDa.r»t.em.ent,   d'Oran 


MOUVEMENT     COMMERCIAL 


-*- 


344 


MOUVEMENT   DE    LA   NAVIGATION 


Mouvement  de  la  Navigation  du  port  d'ORAN,  par  pavillon,  pendant  l'année  ISf! 


ENTUÉES 

SOKTIES 

Entrées  el  Snrlics  rniiiiesj 

INDICATION 





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NOMBHE 

.NO.MIIHK 

NOMUKK 

de 

Tiinnnpe 

(le 

Tonnnjïe 

(le 

Toiiiinfrc 

PAVILLON 

navires 

OMvires 

ti:ivir(s 

Français 

1.666 

1.114.791 

1.668 

1.117.681 

3.334 

2.232.472 

Anglais 

667 

1.561.520 

677 

1.575.710 

1.344 

3.137.23( 

Grec 

270 

149 

490.064 
145.241 

270 
150 

489.888 
144.313 

540 

299 

979. 95S 
289.55^ 

Italien 

Norvégien    

60 

84.366 

57 

83.325 

117 

167.691 

Espagnol 

216 
43 

64.102 
43.049 

211 
39 

62.636 
41.259 

427 

82 

126. 73Î 
84.30Ï 

Danois 

Américain  (D.  S.  A.)- 

7 

23.562 

t 

23.562 

14 

47.12^ 

Suédois    

19 

12 

3 

22.119 

18.372 

9.245 

19 

12 

3 

22.124 

18.372 

9.245 

38 

24 

6 

44.241 

36.74-< 
18. 19( 

Belge 

Japonais 

Russe 

4 
2 

8.068 
4.514 

4 
2 

8.068 
4.514 

8 
4 

16.13( 
9.02Î 

Hollandais 

Brésilien  .    

1 

1.605 

1 

1.605 

2 

3.21( 

Argentin    

1 

1.041 

'  1 

1.041 

2 

2.08Î 

Persan 

1 

1.038 

1 

1.038 

2 

2.07e 

Portugais 

~ 

957 

8 

1.106 

15 

2.06i 

Australien 

1 

64 

1 

64 

2 

12f 

Totaux  en  1915. 

3.129 

3.593.718 

3.131 

3.605.551 

6.260 

7.199.26S 

—      en  1914. 

3.240 

3.557.302 

3.231 

3.558.036 

6.471 

7.115.33e 

Différence  1915. 

—  111 

4-  36.416 

-  100 

-|-  47.515 

"■'" 

-L  83.931 

1 

MOUVEMENT 

DE 

LA 

NAVIGATION 

345 

Relevé  total  du  Moiivemeot  des 

ports 

du  département  d'Oran,  pendant  l'anuèe  1915 

(En 

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15 

STATISTIQUE  DU  MOUVEMENT  COMMERCIAL  DES  PORT, 

du  département  d'Oraii,  pendant  l'année  lî)15 

comparé  au  mouvement  de  l'année  1914,  et  par  nature  de  marchandises 


EXPORTATIONS 


XATl'RE  DES  JIABCI1A\»ISES 

UNITÉS 

A      DESX 

INATION 

(le    l'Étranger 

et 
(les  Colonies 

Tolaui  en  1915 

Toiaiix  en  1 

(le  Fiiince 

[  Ijùtes  de  somme. . 
Aiiim;iii\    \              ,          ,    ■ 

1            f  .ovine  et  antres 

Tète 

1.385 

1.989 

3.374 

3.6 

» 
» 

4.350 
497.008 

6.262 
1.714 

10.612 
498.722 

9.4 
323.  C 

Peaux  irutes  Iralcùes  ou  sècùes  • . . 

Kilog. 

1.037.400 

17.000 

1.054.400 

935.0 

Laiiii'  011  masse 

" 

3.289.500 

24.â00 

3.313.800 

2.590.1 

n^.     .,,..,  (    liais 

396  100 

402  500 

798  600 

161  1 

Poissons  > 
de  mer    (    gjjgg  g^  cODSerVÉS.. 

» 

258. 600 

287.600 

546.200 

600.5 

Os,  sabots,  cornes  de  })étail 

» 

)) 

ij 

» 

836.5 

froment    

Quintal 

588.899 

13.066 

601.965 

628.3 

Céréales     ^    avoine.   .      .. 

420.820 
150.936 

31.346 
25.572 

452.166 
176.508 

581.9 
419.3 

uraiiis        f    ortie 

maïs  . .           . . 

» 
» 

1.920 
43.334 

104 
64.351 

2.024 
107.685 

13. c 

128.7 

Farine  de  froment 

Semoules  en  gruau 

Kilo-. 

70.100 

1.097.100 

1.167.200 

4.608.S 

Légumes  secs  et  leurs  farines 

» 

3.268.900 

1.417.900 

4.716.800 

2.784.e 

Pommes  de  terre 

» 
» 

173.600 
9.257.100 

1.486.700 
969.800 

1.860.300 
10.226.900 

2.206.5 
9.268.C 

Fruits  frais  de  table 

Marcs  de  raisin  et  moûts  . 

» 

» 

» 

'> 

2.027.1 

Fruits  secs  ou  tapés 

» 

476.400 

201.800 

678.200 

631.0 

Graines  et  fruits  oléagineux 

» 

» 

» 

0 

80.8 

TaVjac  en  feuilles 

1.400 
810.600 

402.300 
1.412.600 

403.700 
2.313.200 

58.6 
1.661.5 

—            fabriqué 

Huile  fixe  d'olives 

» 

173.400 
12.820 

138.700 
92.200 

312.100 
105.020 

363.1 

—    de  graines  grasses. . . 

MOUVEMENT  COMMERCIAL 

347 

EXPORTATIONS 

A      DESX 

NATION 

NATORE  DES  MARCHANDISES 

UNITÉS 

(le  Kiaiicc 

lie  l'Ktranjier 

et 
ries    Coloiiip.^ 

Tolaui  en  Vi\'d 

Tolaui  fil  i'JU 

lîésines  et  produits  résineu.x 

Kilog. 

200 

1.000 

1.200 

330.400 

Racines,  HerDes  et  Ilenrs  médicinales. 

» 

11.000 

7.000 

18.000 

29.800 

Li.\ire 

1) 

22.200 

17.000 

39.200 

199.000 

Coton 

« 

» 

200 

200 

5.000 

Crin  véii^étal 

» 

4.826.900 
36.800 

9.890.700 
74.597.000 

14.717.600 

74.633.800 

■ 

26.529.100 
76.633.100 

Alfa 

Écorces  ù  taii 

0 

4.111.800 

145.000 

4.256.800 

2.464.600 

Légumes  frais 

)) 

4.834.500 

725.700 

5.560.200 

10.357.100 

Fourrages  

» 

0 

27.028.300 

27.028.300 

34.015.800 

Son 

" 

» 

> 

» 

11.040.300 

Dnllrs    

» 

664.500 

110.900 

775.400 

783.600 

Mistellcs 

Litre 

1.056.700 

100 

1.056.800 

4.063.900 

Vin  ordinaire 

0 

û 

219.688.400 
285.000 
975.100 

11.560.400 
136.900 
159.800 

312.248.800 

421.900 

1.174.900 

150.176.200 
552.500 
783.400 

—   de  lii|iieur's 

Eaux-ûa-Vle  et  spiritneux  (alcool  puri 

Esprits  de  toutes  sortes. . . . 

1) 

680.400 

20.800 

701.200 

390.100 

Kilog. 

0 

» 
519.900 

7.000 
3.375.200 

7.000 
3.895.100 

271.800 
830.100 

Kaolin,  terre  à  int'usoires  . . 

Bripes,  plâtre,  cHaux,  ciments  . . . 

0 

» 

66.500.000 

66.500.000 

2.820.000 

Goudron  minéral 

» 

0 

» 
» 

0 

6.000.000 
1.000 

1.700 
255.701.000 
» 

1.700 
261.701.000 
» 
1.000 

10.000 
581.954.000 
» 
7.000 

l    de  fer 

*   de  cuivre 

MlXEKAI 

j   de  plomb 

de  zinc 

» 

374.000 

463.000 

837.000 

1.702.000 

S.M  brut  et  raffiné 

Quintal 

12.400 

7.470 

19.870 

64.094 

Lie  de  vin 

Kilog. 
« 

1.466.800 
448.500 
294.600 

» 
600 
71.800 

1.466.800 
449.100 
366.400 

1.580.600 
437.100 
625.800 

Tartre  brut      

Ouvrage  en  sparterie 

Nombre 

90.154 

7.629 

97.783 

85.749 

Id 

Kilog. 

533.994 

46.274 

580.268 

503.267 

348 


MOUVEMENT  COMMERCIAL 


IMPORTATIONS 


NATURE  DES  MAIICHANDISES 


Animaux' 
vivaiils  )  Bestiaux 


bêtes  de  somme.  . . . 


race  boviin'. . 


ovine  et  au  tics 

Viandes  salées  et  conservées 


Graisses     animales     autres 
que  de  poissons 


Beurre  et  fromages 

Poissons  fle  mer  salés  ou  conservés 

Céréales  en  grains 

Farines 

Semoules  et  pâtes  d'Italie.. 
Riz 

Légumes  secs  et  leurs  farines 

Mairons  et,  cliàtaignes.    .    . 
Pommes  de  terre  ......... 


frais , 


Fruits 
DE  TABLE  r    secs OU  tapés. 

Sucres  .... 

Cafés 

Chocolat. . . 


UNITES 


Poivre,  cannelle,  muscaûe,  clous  de 
girofle,  macis  et  vanille 


Thés 

TaDacs  en  feuilles  ou  en  côtes  — 

Tabac  fabriqué   

Huile  fixe  d'olives 

Huiles  de  graines  grasses. . 

Bois  à  construire 

Merrains  de  chêne  et  autres 


Tête 


Kilog. 


Quintal 


Kilot 


PROVENANT 


1.000  K. 
Kilog. 


de  Krance 


46 
405 

153.100 

95.700 

310.500 

405.800 

612 

1.461 

349.100 

2.986.300 

287.700 

511 .300 

7:415.700 

411.600 

213.000 

26.939.600 

400 

494.500 

5.500 

1.000 

» 

7.600 

24.300 

4.725.700 

7.096 
3.900.000 


de  rt;iranger 
et  (tes  Colonies 


99 

57 

49.574 

61.000 

240.400 

230.400 

227.300 

87.687 

27 

1.600 

948.900 

17.300 

2.900 

2.412.100 

3.314.400 

174.400 

1.756.900 

4.093.200 

2.300 

142.700 
678.000 

1.789.000 
163.600 
311.600 

1.077.900 
» 

1.130.000 


Tolaiix  en  1915 


145 

462 

49.574 

214.100 

336.100 
540.900 
678.100 
88.299 
1.488 
350.700 

3.935.200 
305.000 
514.200 

9.827.800 

3.726.000 

360.400 

28.696.500 

4  093.600 
496.800 

148.200 
679.000 

1.789.000 
171.200 
335.900 

5.803.600 
7.096 

5.030.000 


Toiaux  en  1914 


3.063 

1.087 

119.852 

309.000 

463.900 
1.617.200 
1.376.000 

295.509 

20.152 

1.732.100 

2.313.100 

5.154.000 

509.500 
9.497.800 
3.713.200: 

941.000 

23.521.800 

3.827.600 

506.600 

185.500 

343.600 

1.388.300 

135.900^ 

270.100 

6.872.300 

22.174 

1.479.700 


l 

MOUVEMENT   COMMERCIAL 

349 

IMPORTATIONS 

PROVENANT 

PIATIRE  DES  MARCHANDISES 

UNITÉS 

(le  Franco 

de  lÉlranffer 
1,1  (les  Colonies 

Totaux  en  lîll.'t 

Totaux  en  l!lll 

Légumes  frais  ou  conservés 

Kilog. 

72.100 

210.700 

282.800 

669.400 

Vins  ordinaires 

Litre 

255.800 

27,200 

283.000 

315.200 

Vins  de  liqueur 

484.200 

31.200 

515.400 

517.200 

Alcool,     eau.\-de-vie      et 
esprits  de  toutes  sortes.. 

» 

597.100 

9.000 

606.100 

2.452.300 

Eaux  minérales 

Kilog 

» 

1.167.600 
29.428.000 

1.000 
1.345.000 

1.168.600 
25.773.000 

1.881.400 
64.642.800 

Matériau.x  de   construction 

Soufre 

Quintal 

3.608.000 
2.860 

» 
5.365.840 

3.608.000 
5.368.700 

3.706.000 
4.241.140 

Houille  crue  et  agglomérée 

Huiles  minérales  raffinées. 

Hcctol. 

18.600 

12.701 

31.301 

51 . 055 

Huiles  lourdes 

Kilog. 

1.179.100 

161.100 

1.340.200 

6.461.500 

Fers,  tontes  et  aciers..    .. 

» 

2.434.400 

10.551.400 

12.985.800 

30.277.300 

Carbure  de  calcium   ...... 

» 

1.117.600 

1) 

1.117.600 

1.720.900 

Sulfate  de  cuivre 

» 

208.700 

5.600 

214.300 

316.000 

Snperpliospliates  et  engrais  

>j 

669.400 

» 

669.400 

5.930.700 

Savons  de  parfumerie  et  autres . . . 

u 

6.390.300 

5.500 

6.395.800 

5.905.400 

ClilcorÉe  Drûlée  ou  moulue 

». 

234.900 

5.600 

240.500 

407.100 

Bougies  de  toutes  sortes  . 

» 

1.472.900 

400 

1.473.300 

1.509.200 

Poteries,  faïences  et  porcelaines.  . 

1) 

957.600 

204.500 

1.162.100 

4.592.000 

Verres  et  cristau.x 

» 

887.900 

141.100 

1.029.000 

2.854.900 

Fils,  ficelles  et  cordages.. 

» 

561.400 

345.100 

906.500 

1.607.500 

Sacs  vides  en  jute 

» 

1.876.500 

389.900 

2.266.400 

2.039.300 

Tissus  de  lin  et  de  chanvre 

» 

39.800 

300 

40.100 

151.400 

—      de  coton 

» 

1.645.100 

646.100 

2.291.200 

2.373.000 

—      de  laine 

» 
» 
» 

37.800 

2.300 

190.500 

43.400 
37.500 

81.200 

2.300 

228.000 

189.400 

4.600 

360.300 

— ■      de  soie 

.  Vêtements  et  lingerie 

Papier  et  ses  applications.. 

0 

3.917.500 

410.400 

4.327.900 

5.239.900 

Peaux  et  pelleteries  ouvrées 

u 

289.700 

56.400 

346.100 

574.400 

350 


MOUVEMENT  COMMERCIAL 


IMPORTATIONS 


PROVENANT 

NATURE  DES  MARCHANDISES 

UNITÉS 

de  France 

de  rEti-ans?er 

et 
des  Colonies 

Totaux  en  1915 

Totaux  l'ii  191-' 

Bijouterie  et  horlogerie... 

Kilog. 

7.300 

600 

7.900 

42.58C 

Machines  et  mécaniques.. 

» 

801.600 

564.500 

1.366.100 

3.825. lOC 

Autres  ouvrages  en  métaux 

» 

4.028.000 

325.000 

4.353.000 

9. 774. toc 

Meubles  et  ouvrages  en  bois 

» 

574.000 

127.000 

701.000 

5.052.90C 

Ouvrages   de  vannerie,  de 
sparteric  et  de  corderie.. 

0 

127.000 

164.000 

291.000 

468. 60C 

Carrosserie 

» 

92.300 

2.000 

94.300 

372. 30C 

Bimbeloterie,  tabletterie  et  Irosserie 

» 

136.000 

4.200 

140.200 

257. 20C 

Colis  postaux 

Nombre 
Kilog. 

151.522 

1.148.287 

4.294 

28.685 

155.816 
1.176.972 

274.045 
2.094.151 

Id 

A.  TOUKNIER. 


BIBLIOGRAPHIE 

(Ouora(jes  offerts  à  la  Suciété) 


R.M-POUT  PU£:^1:ME  W  NOM  DE  LA  SOUS-COMMl:SSIO!\  CMMiGËE  DES 
QUESTIONS  HELATIVES  AU  COMMERCE  ET  AU  RÉGIME  DOUANIER 
ALGÉRO-MAROCAINS,  par  Kil.  Déciiaud,  i  vol.  broch.  in-/r,  laô  p.  Oran, 
D.   Heintz  et  fils. 

Par  arrêté  du  lo  novembre  igiB,  M.  le  Gouverneur  Général 
de  l'Algérie  a  constitué  une  Commission  chargée  d'étudier 
les  diverses  questions  économiques  intéressant  l'Algérie  en 
vue  des  modifications  que  vont  nécessiter  les  événements 
actuels.  Il  s'agit  surtout  de  prévoir  les  conditions  dans  lesquelles 
l'Algérie  sera  traitée  au  point  de  vue  douanier  vis-à-vis  du 
Maroc. 

Pour  faciliter  la  tâche  de  la  grande  Commission,  il  a  été  créé 
d(s  Sous-Commissions  locales  qui  ont  été  chargées  d'enquêter 
sur  place  et  de  transmettre  les  résultats  de  leurs  délibérations 
à  la  Commission  centraU*  qui  établira  le  rapport  d'ensemble. 

La  Sous-Commission  constituée  à  Oran  se  mit  aussitôt  à  l'ou- 
vrage et,  sous  l'impulsion  de  la  Chambre  de  Commerce  d'Oran, 
qui  ne  néglige  aucune  occasion  de  prendre  la  défense  des  inté- 
rêts économiques  de  l'Oranie,  une  enquête  approfondie  a  eu 
lieu.  Les  travaux  terminés,  M.  Ed.  Déchaud,  le  distingué  secré- 
taire général  de  la  Chambre  de  Commerce,  fut  chargé  d'établir 
le  rapport  à  transmettre  à  la  Commission  centrale  d'Alger. 

Il  serait  trop  long  d'étudier  en  détail  le  magistral  rapport  de 
M.  Déchaud,  travail  (jui  témoigne  chez  son  auteur  d'une  con- 
naissance profonde  des  qTiestions  économiques  algéro-maro- 
caines.  Nous  ne  pouvons  non  plus  reproduire  les  avis  des  per- 
sonnes compétentes  qui  ont  bien  voulu  remplir  consciencieu- 
sement leur  rôle  de  commissaire.  Tontes  ont  été  d'accord  pour 
déclarer  qu'il  était  nécessaire,  indispensable,  politique,  de  lais- 
ser, autant  qiie  le  permettent  le?  traités  franco-anirlais  et  franco- 
espagnol,  la  porte  ouverte  entre  le  Maroc  et  l'Alfrérie. 

Toutefois  considérant  que  la  loi  du  17  juillet  7.^67  doit  être 
forcément  modifiée,  afin  d'empêcher  que  les  produits  d'industrie 
étrangère  pénétrant  au  Maroc,  ou  fabriqués  sur  place  par  des 
étrangers,  ne  viennent  concurrencer  les  produits  français  tran- 
sitant par  l'Algérie,  —  la  Sous-Commission  a  estimé  qu'il  y 
avait  lieu  de  sauvegarder  les  intérêts  du  commerce  national. 


352  BIBLIOGRAPHIE 

Sur  ce  point  tout  le  monde  est  d'accord.  Il  n'en  est  pas  de 
nit'mc  pour  certaines  questions  de  détail.  De  sérieuses  diver- 
gences d'opinion  se  sont  manifestées  au  sein  de  la  Sous-Com- 
mission, en  ce  qui  concerne  les  marchandises  fabriqnres  par 
transformation  directe  de  certains  produits  naturels  du  sol  : 
vins,  farines,  semoules,  etc.,  mais  principalement  le  vin.  La 
question  du  vin  a  dominé  tout  le  débat,  comme  elle  a  pris 
d'ailleurs  la  plus  grande  iuiportancc  à  la  Commission  des 
Douanes  du  Parlement,  où  j\I.  Barthe,  député  de  l'Hérault,  a  été 
chargé  de  rapporter  le  projet  relatif  à  l'abrogation  et  à  la  modi- 
fication de  la  loi  de  1867.  La  réglementation  proposée  ne  tend  à 
rien  moins  qu'à  restreindre,  à  paralyser  la  culture  de  la  vigne 
au  Maroc. 

Au  sein  de  la  Sous-Commission  d'Orari,  le  représentant  le  plus 
autorisé  du  commerce  des  vins,  M.  Kruger-Nissolle,  a  protesté 
énergiquement  contre  l'adoption  de  mesures  qui,  en  gênant 
le  commerce,  favorisent,  dans  certains  cas,  non  seulement  la 
spéculation,  mais  aiissi  le  commerce  étranger.  Lorsque  le  Midi 
viticolo  aura  obtenu  satisfaction  en  ce  qui  concerne  le  Maroc,  il 
demandera  à  cor  et  à  cri  l'application  du  même  régime  à 
l'Algérie. 

L'opinion  de  M.  Kruger  n'a  pas  été  partagée  par  tous  ses  col- 
lègues. Il  nous  paraît  pourtant  que  ce  n'est  pas  aux  colons  algé- 
riens à  réclamer  pour  les  colons  marocains,  souvent  leurs 
enfants,  des  mesures  prohibitives  qu'ils  ont  jugé  vexatoires, 
antilibérales,  impolifiques  même,  quand,  à  maintes  reprises, 
la  Confédération  Viticole  du  Midi  en  demandait  l'application  à 
l'Algérie. 

Mais,  étant  donné  les  tendances  du  Gouvernement  et  de  la 
Commission  des  Douanes  du  Parlement,  la  Sous-Commission  a 
estimé  qu'il  serait  peut-être  nécessaire  de  faire  des  concessions 
et,  si  les  Chambres  le  proposaient,  de  se  rallier  au  principe  du 
contingentement.  On  l'appliquerait  au  Maroc,  comme  on  l'a  fait 
pour  la  Tunisie.  Quant  à  l'Algérie,  en  attendant  qu'elle  subisse 
le  même  sort,  elle  se  trouvera  enserrée,  au  moins  au  point  de  vue 
économique,  entre  deux  protectorats  français  qui  seront  pour 
elle  des  Etats  étrangers. 

Ce  n'est  pas  pour  être  ensuite  traités  en  parias  que  Tunisiens, 
Algériens  et  Marocains  (colons  et  indigènes)  versent  sans 
compter  le  plus  pur  de  leur  sang  sur  la  terre  de  France. 

Il  est  évident  qu'il  est  d'une  nécessité  absolue  de  protéger 
l'agriculture,  l'industrie  et  le  commerce  français  contre  la  con- 
currence étrangère  ;  mais  étendre  le  protectionnisme  à  nos  pos- 
sessions coloniales  nous  paraît  un  non-sens. 

En  présence  de  pareilles  tendances,  on  en  arrive  à  se  demander 
pourquoi  la  France  a  acquis  des  colonies,  organisé  des  protec- 
torats, si  les  Français  intrépides  qui  vont  y  coloniser  sont  esclaves 
de  lois,  de  règlements  qui  les  empêchent  de  tirer  le  meilleur 


BIBLIOGRAPHIE 


353 


parti  possible  des  terres  qu'ils  arrosent  de  leur  sueur  et  fertili- 
sent de  leurs  os. 

Pour  ce  qui  concerne  le  vin,  il  est  permis  d'espérer  que  le 
rapport  de  AI.  Barthe,  établi  avant  la  guerre,  sera,  le  moment 
venu,  sérieusement  retouché.  Sur  le  front  les  poilus  perdent  le 
goût  de  ralc(K>l  pour  prendre  celui  du  ((  pinard  ».  T(>us,  après 
la  paix,  voudront  continuer  à  boire  du  vin  ;  mais  ils  ne  le  pour- 
ront (pie  s'ils  le  paient  à  un  prix  raisonnable.  Il  est  donc  d'un 
intérêt  national  de  ne  pas  en  restreindre  la  production  et,  par 
suite,  l'importation  sur  le  marché  français. 

F.  DOUMERGUE. 


LEGLISE  DU  PRETRE  ALEXANDER  DECOUVERTE  A  BULLA  REGIA  EN 
19t^f,  par  le  D'  Caiiton,  correspondant  de  l'Institut  (Extrait  des  Comples 
rendus  (les  séances  de  VAcadémie  des  Inscriptions  et  Bellcs-Lellres,  I9i5, 
p.   iiti). 

Continuant  les  fouilles  qui  ont  déjà  donné  de  si  magnifiques 
résultats  à  Bulla  Régla,  le  docteur  Carton  a  fait  une  nouvelle  et 
intéressante  découverte.  Il  s'agit  d'un  monument  déblayé  dans 
la  périphérie  de  la  ville  et  qui  était,  selon  toute  vraisemblance, 
une  église,  l'église  du  prêtre  Alexander. 

Ce  monument  comprend  une  nef,  longue  de  o"i5,  large  de 
4  mètres,  flanquée  de  deux  bas-côtés  de  2™6o  de  largeur.  Les 
murs  qui  séparent  la  nef  des  bas-côtés  présentent  chacun  six 
auges. 

Le  qiiadratum  populi,  réservé  aux  fidèles,  était  séparé  du  pres- 
byteriuin  par  une  longue  marche.  Celle-ci  portait  deux  hautes 
colonnes  à  beaux  chapiteaux,  retrouvés  sur  place,  l'un  byzantin, 
l'autre  à  feuilles  d'acanthe.  Le  presbyteriiim  n'est  pas  ici  en 
abside  :  il  est  rectangulaire,  particularité  qui  n'est  pas  rare  en 
Afrique. 

L'intérêt  de  la  découverte  consiste  surtout  dans  la  multitude 
et  la  variété  des  objets  trouvés.  Dans  le  sanctuaire,  M.  le  docteur 
Carton  découvrit  un  reliquaire  de  plomb  «n  forme  de  cassette, 
abrité  sans  doute  sous  le  ciboriuni  dont  les  débris  de  colonnes 
jonchaient  le  sol. 

Les  secretaria  qui  flanquaient  le  presbytej'iuin  offraient  toutes 
sortes  d'ol)jets  comestibles  calcinés  :  grains  de  blé,  haricots, 
amandes,  noyaux  de  cerises,  d'olives,  etc.  Une  de  ces  sacristies 
contenait  surtout  des  débris  de  coupes  en  verre  et  parmi  des 
amphores  encore  debout,  trois  croix  de  métal  dont  l'une  porte 
le  nom,  en  lettres  grecques,  du  prêtre  Alexander. 


354  BIBLIOGRAPniE 

M.  le  docteur  Carton  décrit  les  vases,  les  grandes  amphores  et 
surtout  certains  vases  peints,  en  tout  semblables  aux  poteries 
puniques  et  plus  tard  kabyles.  (Vest  une  preuve  de  la  survivance, 
parmi  les  Kabyles  de  l'art  piuii(pio,  que  l'iulluence  romaine  n'a 
pu  anéantir. 

Les  auges  seraient  des  aménagements  pour  les  agapes  et  pour 
recueillir  les  aumônes  des  fidèles  en  faveur  des  pauvres. 

Enfin,  d'après  M.  Carton,  ce  mommient  aurait  été  élevé  vers 
la  fin  du  \f  siècle. 

Cette  brochure  apporte  lUie  nouvelle  contribution  à  l'histoire 
des  églises  de  l'vVfrique  romaine  et  de  telles  découvertes  doivent 
grandement  encourager  M.  le  docteur  Carton  dans  la  tâche  qu'il 
accomplit. 

Abbé  FABRE. 


PROCÈS-VERBAUX  DES  RÉUNIONS 

de    la    «  Société    do    Géographio    et    d'Archéologie    d'Oran  » 


RÉUNION  MENSUELLE  DU  COMITÉ  ADMINISTRATIF 

Séance  du  3  Juillet  191 6 


Présidence  de  M.  Doumergue,  président 


La  séance  est  ouverte  à  5  heures  et  demie. 

Sont  présents  au  Comité  :  MM.  Doumergue,  Pock,  Tournier, 
Daxgles,  Dupuy,  Abbé  Fabre,  Pellet,  Pérez,  Flahault. 

Absents  excusés  :  MM.  Gé.néral  Baschung,  Bérexger,  Aram- 
bourg,  Huot,  Lemoisson,  de  Pachtere,  Roux-Freissineng, 
mobilisés  ;  René-Leclerc. 

Absents  :  MM.  Déchaud,  Kriéger,  Lamur,  Pontet,  Docteur 

SviNDRAS. 

Le  procès-verbal  de  la  séance  du  5  juin  est  lu  et  adopté. 

Avant  d'aborder  Tordre  du  jour,  le  Président  annonce  la  mort 
récente  de  M.  Onésime  Reclus.  Il  rappelle  que  le  savant  auteur 
de  France,  Algérie,  Colonies,  fut  un  grand  admirateur  de  notre 
terre  africaine  ;  que,  vers  1901,  Oncsime  Reclus  vint  à  Oran  et 
fit  partie  de  notre  Société. 

Sont  admis  comme  membres  titulaires  :  MM.  le  baron  de 
Mesnard  et  Studler,  présentés  à  la  dernière  séance. 

M.  Brunel  remercie  le  Comité  du  témoignage  de  sympathie 
dont  il  a  été  l'objet  à  la  dernière  séance  et  qui  lui  permet  de 
rester  membre  titulaire  de  la  Société. 

Le  Président  communique  une  lettre  de  M,  le  commandant 
BÉRENGER,  actuellement  à  Corfou,  et  qui  sait,  malgré  de  très 
prenantes  occupations  militaires,  trouver  un  moment  de  loisir 
pour  nous  donner  de  ses  nouvelles.  Le  Président  est  chargé  de 
renouveler  à  notre  dévoué  Secrétaire  général  le  souvenir  amical 
et  les  meilleurs  souhaits  de  tous  ses  collègues. 

Le  Comité  accepte  l'échange  de  publications  qui  lui  est  pro- 
posé par  la  Société  d'Histoire  Naturelle  d'Alger. 


356  PROCÈS-VERBAUX  DES  RÉUNIONS  DE   LA  SOCIÉTÉ 

La  Société  a  reçu  pour  sa  Biljliothôque  : 

De  M,  Ed.  Dcchaud  :  Happoil  présenté  au  nom  de  la  Sous- 
Comniission  chanjée  de  l'examen  des  questions  relatives  au 
commerce  et  au  régime  douanier  algéro-marocains.  Des  remer- 
ciements sont  votés  à  notre  collègue. 

Au  sujet  du  rapport  de  M.  Déciiaud,  M.  Dupuy,  membre  de 
la  Sous-( Commission,  fait  un  inléressant  exposé  de  la  question 
douanière  algéro-marocaine.  Il  fait  connaître  les  desiderata  de  la 
Chambre  de  Commerce,  aux  vues  de  laquelle  se  range  le  Comité 
de  la  Société  de  Géographie.  Liée  par  le  traité  d'Algésiras,  la 
France  n'a  pas  les  mains  très  libres  ;  mais  dans  la  limite  des 
traités,  elle  doit  faire  tout  ce  qui  est  possible  pour  que  le  sang 
versé,  l'or  dépensé  ne  l'aient  pas  été  entièrement  pour  le  béné- 
fice du  commerce  étranger.  La  solution  se  trouve  surtout  dans 
l'amélioration  des  moyens  de  transport  et  la  réduction  des 
tarifs. 

Mais  pour  cela  il  est  nécessaire  que  l'Algérie  fasse  les  sacrifices 
nécessaires,  il  faut  qu'en  Oranie  certains  intérêts  commu- 
naux cessent  de  se  dresser  en  travers  des  intérêts  généraux.  Et, 
puisque  le  seul  remède  paraît  être  dans  l'amélioration  des  voies 
ferrées,  il  faut  à  tout  prix  prolonger  la  voie  large  jusqu'à  Fez 
et  relier  Marnia  à  Oran  |)ar  le  chemin  le  plus  court,  ce  qui, 
avec  l'abaissement  des  tarifs  de  pénétration,  permettra  à  notre 
commerce  de  soutenir  la  lutte  contre  la  concurrence  étrangère 
que  favorise  le  ^xtrt  franc  de  Melilla. 

L'ordre  du  jour  étant  épuisé,  la  séance  est  levée  à  7  heures. 

Pour  le  Secrétaire  général,  Le  Président, 

Signé  :  FLAHAULT.  Signé  :  DOUMERGUE. 


RÉUNION  MENSUELLE  DU  COMITÉ  ADMINISTRATIF 
SÉANCE  DU  2  Octobre  191 6 


Présidence  de  M.  Doumergue,  président 


La  séance  est  ouverte  à  5  heures  et  demie. 

Sont  présents  au  Comité  :  MM.  Doumergi'e,  Pock,  Tournier, 
Dangles,  Abbé  Fabre,  Kriéger,  Lemoisson,  Pellet,  Pérez, 
Flahault. 


PROCÈS-VERBAUX   DES   REUNIONS   DE    LA   SOCIÉTÉ  357 

Absents  excusés  :  MM.  Général  Baschung,  Bérenger,  Aram- 
BOURG,  HuoT,  DE  Pachtere,  Roux-Freissineng,  nfiobilisés  ; 
DÉcuAUD,  DupuY,  Re>é-Leclero,  D"^  Sandras. 

Absent  :  M.  Pomet. 

Le  procès-verbal  de  la  séance  du  3  juillet  est  lu  et  adopté. 

Le  Président,  avant  d'aborder  l'ordre  du  jour,  annonce  le 
décès  de  deux  de  nos  sociétaires  :  M.  le  capitaine  Maurice  Petit, 
décoré  de  la  Croix  de  guerre,  au  Maroc,  parti  pour  le  front 
français  à  la  fin  de  juin  dernier,  tué  à  l'ennemi  à  M...., 
le  i3  aoîit  191 6  et  M.  Louis  Lamur,  conseiller  général  et  délégué 
financier,  président  de  la  Société  d'Agriculture  d'Oran,  décédé 
subitement  le  25  septembre  191 6. 

Le  Président  rappelle  cpie  M.  le  capitaine  Petit,  travailleur 
infatigable,  a  donné  au  Bulletin  des  notes  sur  la  préhistoire  qui 
ont  été  remarquées  ;  que  M.  Lamur  avait  toujours  mis  son 
influence  au  service  de  la  Société.  Des  condoléances  ont  été 
adressées  aux  veuves  et  aux  familles  de  nos  confrères,  et  le 
Comité  s'y  associe  très  vivement. 

Le  Président  annonce  aussi  le  décès  de  M.  Marie-Eugène 
Gallois,  voyageur,  publiciste  et  conférencier,  décédé  à  Paris, 
le  29  juin  dernier.  M.  Gallois  n'était  pas  un  inconnu  pour  les 
membres  de  la  Société  qui  n'ont  pas  oublié  la  belle  conférence 
qu'il  fit,  en  1910,  sur  son  voyage  au  Spitzberg.  Le  Comité 
adresse  un  souvenir  ému  à  l'intrépide  voyageur  géographe. 

Le  Président  rappelle  que  notre  collègue  M.  le  capitaine 
HuoT  a  été  promu  chef  de  bataillon  et  maintenu  au  poste  de 
confiance  que  lui  a  valu  sa  longue  pratique  du  Service  des 
Affaires  Indigènes. 

Le  Président  transmet  au  Comité  le  bon  souvenir  de  M.  le 
commandant  Bérenger,  notre  secrétaire  général,  venu  à  Oran 
en  permission  pendant  les  vacances.  Il  l'a  chargé  d'exprimer  à 
ses  collègues  ses  regrets  de  n'avoir  pu  les  voir  tous  pendant  son 
trop  court  séjour  en  Oranie. 

Le  Président  donne  aussi  des  nouvelles  de  M.  le  commandant 
Paul  AzAN,  qui  a  été  deux  fois  blessé  à  l'ennemi  et  cette  fois 
assez  grièvement.  Les  meilleurs  vœux  lui  sont  renouvelés. 

M.  le  Gouverneur  Général  a  bien  voulu  remarquer  le  travail 
de  M.  le  capitaine  Noël  sur  les  Hamyans  publié  dans  notre 
Bulletin  ;  il  a  chargé  le  Président  de  transmettre  ses  félicita- 
tions à  l'auteur. 

Pendant  les  vacances,  M.  le  Président  de  la  Chambre  de  Com- 
merce de  Mf)Staganem  nous  a  demandé  des  renseignements  sur 
les  documents  que  la  Société  possède  sur  la  région  de  Mosta- 
ganem.  Notre  bibliothèque  a  été  mise  à  sa  disposition. 

Le  Président  communique  de  la  part  de  M.  le  lieutenant 
Campardou  une  photographie  de  la  grotte  de  Taza. 

Le   Comité   autorise    le   Trésorier   à   consacrer   au    prochain 


26 


358  PROCÈS-VERBAUX  DES   RÉUNIONS   DE   LA   SOCIETE 

Emitrunt  nalional  une  somme  de  8.000  francs  devenue  dispo- 
nible par  suite  de  placements  arrivés  à  échéance. 

Un  de  nos  sociétaires  a  proposé  au  Comité,  pour  le  Bulletin, 
un  travail  sur  des  Stations  rupestres.  Le  Président  lui  a  fait 
entrevoir  qu'il  serait  difficile,  dans  les  conditions  actuelles, 
d'engager  la  dépense  considérable  qu'exigerait  la  reproduction 
des  «  nombreuses  »  photographies  que  comporte  ce  travail.  Il 
a  demandé  à  notre  distingué  collègue  de  communiquer  ses  plan- 
ches au  Comité  qui  décidera. 

M.  HiRN,  sociétaire,  a  bien  voulu  offrir  à  la  Bibliothèque  : 
Excursions  dans  les  Pyrénées,  Voyage  en  Indo-Chine,  par 
J.  B.  H.  Bonadona.  Le  Comité  l'en  remercie. 

M.  Flahault  annonce  de  la  part  de  notre  collègue  M.  Bister 
que  le  fils  de  ce  dernier  a  dessiné  quelques  monuments  et 
inscriptions  des  ruines  de  Mina  et  les  a  fait  parvenir  au  Prési- 
dent. Ces  dessins  seront  joints  à  la  note  de  M.  Pellet. 

L'ordre  du  jour  étant  épuisé,  la  séance  est  levée  à  6  h.  45. 

Pour  le  Secrétaire  général,  Le  Président, 

Signé  :  FLAHAULT.  Signé  :  DOUMEBGUE. 


RÉUNION  MENSUELLE  DU  COMITÉ-  ADMINISTRATIF 

Séance  du  6  Novembre  iqi6 


Présidence  de  M.  Doumergue,  président 


La  séance  est  ouverte  à  5  heures  et  demie. 

Sont  présents  au  Comité  :  MM.  Doumergue,  Pock,Tournier, 
DÉCHAUD,  Kriéger,  Lemoisson,  Pérez,  D""  Sandras,  Flahault. 

Absents  excusés  :  MM.  Général  Baschung,  Bérenger,  Aram- 
BOURG,  HuoT,  Roux-Frei&slneng,  mobilisés  ;  Dangles,  Dupuy, 
Abbé  Fabre,  Pellet. 

Absent  :  M.  Pontet. 

Le  Président  rappelle  les  nouveaux  deuils  qui  viennent  de 
frapper  la  Société  :  M.  de  Pachtere,  sous-lieutenant  de  zouaves, 
tué  à  l'assaut  de  Florina,  et  M.  le  lieutenant  Suquet,  du  2*  Zoua- 
ves, mort  à  l'Hôpital  d'Oran  d'une  maladie  contractée  à  l'Armée 


PROCÈS-VERBAUX  DES  REUNIONS  DE  LA  SOCIETE  -iSO 

d'Oiiciif.  Le  Coinilé  s'assofio  aux  stnliuit'iits  de  condoléances 
exprimés  par  le  Président  aux  familles  de  nos  rcgretlés  et  glo- 
rieux confrères. 

Le  Président  annonce  aussi  la  mort  sur  le  front  de  M.  le 
lieutenant  François  ue  Lamotue,  tué  dans  la  Somme  d'un  éclat 
d'obus,  à  l'âge  de  21  ans.  Les  condoléances  de  la  Société  ont  été 
adressées  à  son  père  le  général  de  Lamotiik,  notre  confrère. 

Le  Président  fait  connaître  enfin  le  décès  à  Alger  de  M.  Emile 
iMaupas,  l'un  des  premiers  naturalistes  qui  se  soient  intéressés 
à  l'Algérie,  et  dont  des  études  sur  la  Biologie  des  Foraminifères 
lui  valurent  un  grand  prix  de  l'Institut.  M.  Emile  Maupas  était 
depuis  de  longues  années  conservateur  de  la  Bibliothèque  natio- 
nale d'Alger. 

Nos  confrères  le  lieutenant  Garoby,  grièvement  blessé  -en 
Tvmisie,  a  été  décoré  de  la  Croix  de  guerre  et  nommé  chevalier 
de  la  Légion  d'honneur  ;  M.  Voi\ot  a  été  promu  chef  d'escadron 
d'artillerie.  Des  félicitations  sont  votées  à  nos  deux  distingués 
confrères. 

Le  Président  donne  de  bonnes  nouvelles  de  M.  le  comman- 
dant Paul  AzAN  qui.  quoique  non  encore  suffisamment  guéri, 
a  pu  reprendre  du  service. 

Des  félicitations  sont  adressées  à  M.  Flahault  au  sujet  de  la 
Croix  de  guerre  décernée  à  son  fils,  sergent  du  génie. 

Enfin,  le  Président  donne  les  meilleures  nouvelles  et  transmet 
l'aimable  souvenir  de  notre  Secrétaire  général  le  commandant 
BÉRENGER,  rentré  à  son  poste  à  Corfou  en  exc-ellente  santé. 

L'ordre  du  jour  est  ensuite  abordé. 

Le  Comité  décide  d'appuyer  un  vœu  présenté  par  M.  Aram- 
BouRG  père  et  proposé  par  la  Chambre  d'Agriculture  d'Oran. 
Les  pluies  ayant  été  très  rares  dans  le  Sud  Oranais  jusqu'au 
2^  octobre,  les  pâturages  manquent  ;  les  brebis  n'ayant  pas 
de  lait,  les  agneaux  périssent,  et  5oo.ooo  moutons  sont  exposés 
à  mourir  de  faim  et  de  misère.  Dans  ces  conditions,  M.  Aram- 
BOURG  et  la  Chambre  d'Agriculture  demandent  que  les  trou- 
peaux du  Sud  soient  autorisés  provisoirement  à  transhumer 
dans  les  forêts  du  Tell.  Le  Comité  s'associe  à  ce  vœu. 

La  Société  «  Les  Amis:  du  Mont  Saint-Michel  »,  pi'éoccupée 
de  conserver  au  Mont  Saint-Michel  son  cadre  naturel  et  son 
caractère  d'insularité,  proteste  contre  les  retards  apportés  à  la 
suppression  des  digues,  pré^^nte  un  projet  de  travaux  propres 
à  éviter  l'ensablement  tout  en  assurant  une  communication 
constante  entre  la  côte,  et  k  Mont. 

Le  Comité,  estimant  qu'au  moment  011  tant  de  nos  richesses 
archéologiques  disparaissent,  détruites  par  le  vandalisme  alle- 
mand, il  importe  de  préserver  les  monuments  qui  font  la  gloire 
de  la  France,  s'associe  au  vœu  des  «  Amis  du  Mont  Saint- 
Michel  ». 


360 


riiOGES-VERBAUX  DES   REUMOiNS  DE    LA   SOCIETE 


Le  Président  annonce  qu'il  va  recevoir  pour  le  Bulletin  un 
travail  sur  des  tribus  marocaines. 

En  fin  de  séance,  M.  Déciiald  donne  quelques  aperçus  sur  le 
voyage  qu'il  vient  de  faire  au  Maroc  à  l'occasion  de  la  foire  de 
Fez.  Ce  qui  a  le  plus  frappé  la  caravane  c'est  le  développement 
inouï  de  la  ville  de  Casablanca.  Ce  qui  l'a  le  plus  déçue  c'est  le 
contraste  frappant  entre  la  richesse  du  sol  du  Maroc  occidental 
et  l'aspect  misérable  de  celui  du  Maroc  oriental  dans  le  parcours 
d'Oudjda  à  Taza. 

Le  Comité  a  reçu  pour  la  Bibliothèque  : 

De  M.  Augustin  Bernard  :  Nos  grandes  colonies  et  la  guerre. 
Algérie.  —  L'effort  de  l'Afrique  du  Nord  pendant  la  guerre: 

L'ordre  du  jour  étant  épuisé,  la  séance  est  levée  à  7  heures. 

Pour  le  Secrétaire  général,  Le  Président, 

Signé  :  FLAHAILT.  Signé  :  DOUMERGUE. 


RÉUNION  MENSUELLE  DU  COMITÉ  ADMINISTRATIF 

SÉA^CE   DU   fl   DÉCEMBRE    1916 


Présidence  de  M.  Doumergue,  président 


La  séance  est  ouverte  à  5  heures  et  demie. 

Sont  présents  au  Comité  :  MM.  Doumergue,  Pock,  Tourmer, 
DupuY,  Abbé  Fabre,  Lemoisson,  Pellet,  Pérez,  Fi.ahault. 

Absents  excusés  :  MM.  Général  Basciiung,  Bérenger,  Aram- 
ROURG,  HuoT,  Roux-Freissine.ng,  mobilisés  ;  Dangles,  Kriéger, 
Reiné-Leclerc. 

Absents  :  MM.  Déchaud,  Pontet,  D""  Sandras. 

Le  procès- verbal  de  la  séance  du  6  novembre  est  lu  et  adopté. 

Le  Président  informe  le  Comité  que  M.  René  Cag.nat,  membre 
de  l'Institut,  membre  d'honneur  de  notre  Société,  vient  d'être 
élu  Secrétaire  perpétuel  de  l'Académie  des  Inscriptions  et 
Belles-Lettres.  Les  archéologues  algériens  ne  peuvent  que  se 
féliciter  de  ce  choix,  qui  est  un  hommage  rendu  aux  magnifi- 
ques travaux  de  M.  Cagnat  sur  l'archéologie  et  l'épigraphie  de 


PHOCÈS-VElXliA[  X  UHS  KiaMONS  l)K  I,A  SOCIÉTÉ  -i^)! 

l'Africjue  du  .Nonl.  Le  Cnniitt-  chiirge  le  Président  de  tiaii^incltre 
ses  IV'licilalions  à  M.  Gagnât. 

Notre  jeune  collègue  M.  Camille  Aramholrg  vient  d'être 
promu  capitaine  sur  le  front  d'Orient.  Le  Comité  est  heureux 
d'apprendre  cette  bonne  nouvelle  et  souhaite  une  fois  de  plus 
de  voir  bientôt  revenir  parmi  nous  notre  distingué  confrère. 

Le  Président  conimuni(pie  au  Comité  le  premier  bulletin  de 
la  SocùHé  lie  CiiKjrdpliic  du  Mdvoc,  dont  le  siège  est  à  Casa- 
blanca. Celle  Société  a  eu  i)our  premier  président  M.  le  com- 
mandant Cire,  (jui,  ayant  quitté  le  Maroc,  a  cédé  le  fauteuil  à 
M.  le  capitaine  de  Segonzac,  que  nos  confrères  ont  eu  le  plaisir 
d'écouler  et  d'applaudir  lors  du  Congrès  d'Oran  en  1902.  Nul 
doute  que  sous  rimi)ulsion  de  ce  brillant  explorateur  et  avec 
l'appui  moral  et  financier  du  géïiéral  Lyauley,  président  d'hon- 
neur, la  jeune  Société,  qui  s'intitule  modestement  Société  de 
Géographie  du  Maroc,  voie  s'ouvrir  devant  elle  une  carrière 
féconde.  Nous  souhaitons  à  la  Société  de  Géographie  du  Maroc 
tout  le  succès  dont  le  début  semble  être  le  garant. 

Le  Comité  décide  que  les  litres  représentant  le  capital  de  la 
Société  seront  déposés  en  banque  afin  de  les  mettre  à  l'abri  de 
l'incendie  ou  de  toute  autre  cause  qui  pourrait  les  faire  dispa- 
raître. Il  examinera  dans  la  prochaine  séance  les  mesures  défi- 
nitives à  prendre  dans  ce  but. 

Il  a  été  acquis  d'occasion  pour  la  Bibliothèque  des  ouvrages 
de  iMM.  Babelon,  Collignon,  Paris,  Lenormant  et  Nordenskiold, 
dont  les  titres  sont  donnés  dans  le  Mouvement  de  la 
Bibliothèque. 

Le  Président  dépose  sur  le  bureau  le  manuscrit  de  M.  le  lieu- 
tenant Campardou  sur  la  grotte  de  Kifan  el  Ghomari.  11  en  sera 
rendu  compte  dans  la  prochaine  séance. 

Le  Président  annonce  qu'après  un  mois  et  demi  d'arrêt,  par 
suite  d'un  accident  de  machine,  la  composition  du  Bulletin 
vient  d'être  reprise.  Il  espère  que  le  fascicule  sera  prêt  avant  la 
fin  du  mois. 

A  propos  du  Bidletin,  le  Président  exprime  ses  craintes  au 
sujet  de  la  pénurie  de  manuscrits  qui  se  fait  de  plus  en  plus 
sentir.  Presque  tous  nos  collaborateurs  étant  mobilisés  ou 
absorbés  par  d'importantes  occupations  imposées  par  l'état 
de  guerre,  les  travaux  présentés  sont  de  plus  en  plus  rares.  Il 
est  donc  nécessaire  que  tous  ceux  qui  peuvent  encore  travailler 
apportent  leur  précieuse  collaboration  au  Bulletin. 

La  séance  est  levée  à  6  heures  et  demie. 

Pour  le  Secrétaire  général,  Le  Président, 

Signé  :  FLAHAl  LT.  Signé  :  DOUMERGUE. 


MOUVEMENT  DE  LA  BIBLIOTHEQUE 

lei-  et   2«   Semestres    1910 


1      PERIODIQUES 

Pour  les  publications  périodiques,  voir  la  Liste  den  Sociétés 
correspàintanfes.  (Bull,   i''''  trimestre  igiS,  p.   19.) 


2°    NOX     PERIODIQUES 

(Don^  et  Achnts) 


GÉNÉRALITÉS 


Babelon  (Ernest).  ■ —  La  gravure  sur  pierres  fines,  camées  et 
intailles,  i  vol.  in-i2°,  820  p.  Paris,  A.  Picard  et  Kaan,  1894. 

GuÉBHARD  (O*"  Adrien).  -^  Sur  une  petite  mais  importante 
amélioration  à  apporter  aux  signes  de  la  légende  paléoethnolo- 
gique (Extr.  des  Comptes  rendus  du  Congrès  internationid  d'an- 
thropologie et  d'archéologie  préhistorique) ,  l»roch.  in-8°,  3  p. 
Genève,  191 2. 

—  Applications  nouvelles  de  la  radiographie  à  l'histoire 
naturelle.  La  microradiograpliie  de  M.  Goby  (Extr.  de  la  Feuille 
des  jeunes  naluralistes),  hroch.  in-8°,  4  P-,  4  pL  Rennes,  Ober- 
thur,   1914. 

GiiiGXET  (E.)  et  Ed.  Garmer.  —  La  céramique  ancienne  et 
moderne  :  sa  fabrication  et  son  histoire,  i  vol.  in-S",  3ii  p. 
Paris,  Félix  Alcan,  1899. 

HiiET  (M.  J.)  —  Les  bovidés  (Extr.  de  la  Rei'ue  des  sciences 
naturelles  appliquées),  broch.  in-8°,  3r  p.  Paris,  Imp.  de  la 
Société  d'acclimatation  de  France,  1892. 

—  Les  ovidés  et  les  capridés  (Extr.  de  la  Bévue  des  sciences 


MOUVEMEM'    DE    LA     BIHLIOTIIEQUE 


363 


nulurelles  applUiuces),    Inxich.   in-8°,   /)5   p.    Paris,   Inip.   d(t   la 
Société  d'acclimatation  de  Fiance,   1891. 

Lenobmant   (Fr.)  —   Monnaies   et   médailles,    i    vol.    in- 12', 
828  p.  Paris,  A.  Picard  et  Kaan,  1896. 

Paris  (Pierre).  —  La  sculpture  anticpie,  i  vol.  in-i2°,  352  p. 
Paris,  A.  Picard  et  Kaan,  1894. 


EIKOPE 


AuBREY  Straiian,  N.  F.  Mackenzu:,  h.  R.  Mill  and  J.  S. 
OwotNS.  —  The  investigation  of  ri  vers  (Publ.  de  la  Société 
Royale  de  Géographie  de  Londres),  broch.  in-8°,  98  p.,  9  pi. 
London,  Williams  Clowes  and  Sons,  191 6. 

Bonadona  (J.  t.  h.)  —  I.  Excursions  dans  les  Pyrénées. 
II.  Voyage  eu  Indo-Chine,  broch.  in-12"',  178  p.  Dole,  Joseph 
Jacques,   1912. 

CoLLiGNON  (Maxime).  —  Mythologie  figurée  de  la  Grèce,  i  vol. 
in-i2°,  352  p.  Paris,  Alcidc  Picard  et  Kaan,  1907. 

GuÉBiTARD  (D''  Adrien).  —  Carte  structurale  détaillée  au 
1/80.000''  des  environs  de  Castellane  (Basses-Alpes)  (Extr. 
du  Bulletin  de  la  Société  Géologique  de  France),  broch.  in-8°, 
60  p.  Mâcon,  Protat  frères,  rg-i^. 

—  Tectonique  des  environs  de  Castellane  (Basses-Alpes) 
(Extr.  des  Comptes  rendus  de  l'Académie  des  Sciences),  broch, 
in-8°,  4  p.  Pari's,  Gauthier- Villars,  i9i4- 


AFRIQUE  DU  NOlîU  (Algérie,  Maroc,  Tunisits  Sahara) 


Béguet  (L.)  et  M.  Simon.  —  Algérie  :  Gouvernement,  Admi- 
nistration, Législation  (Répertoire  du  droit  administratif),  3  vol. 
in-8°.  Paris,  Paul  Dupont,  i883. 

Bel  (Alfred).  —  Note  sur  une  inscription  de  i846  figurant 
sur  le  pont  de  Négrier  (Tlcmcen)  (Extr.  de  la  Revue  Africaine), 
broch.  in-8°,   i4  p.  Alger,  Adolphe  Jourdan,  1911. 

Ben  Danoi!  (C.)  —  Contribution  à  l'étude  de  l'industrie  pas- 


364  MOUVEMENT    UE    I.A    HIHLIOTIlÈQUE 

toralc  on  Al-^'ôrio.  Laines  orano-niaroraines,  broch.  in-8°,  27  p. 
Oran,  P.  Payan,  1905. 

—  Des  nappes  d'hall'a  el  de  leur  rôle  au  pays  du  mouton. 
Utilisation  du  houss  d'hall'a  (Extr.  du  Bull,  de  la  Soc.  de  Géo- 
graphie d'Oraf}),  broch.  in-8°,  16  p.  Oran,  L.  Fouque,  igiô. 

Bernard  (Augustin).  —  Nos  grandes  colonies  et  la  guerre 
(Extr.  de  la  lieinie  des  Sciences  politiques),  broch.  in-8°,  3i  p. 
Paris,  Félix  Alcan,  191 6. 

—  L'effort  de  l'Afrique  du  Nord,  broch.  in-S",  82  p.  Paris, 
Blond  et  Guy,  1916. 

BoîjRiniKiNAT.  - —  Histoire  du  Djebel  Tliaya  et  des  ossements 
fossiles  recueillis  dans  la  grande  caverne  de  la  Mosquée,  1  vol. 
in-8°,  108  p.,  i3  pi.  Paris,  1870. 

Bugeaud  (Maréchal).  —  Exposé  de  l'état  actuel  de  la  société 
arabe,  du  gouvernement  el  de  la  législation  (pii  la  régit,  i  vol. 
in-8°,   169  p.  Alger,  Imp.  du  Gouvernement  Général,   18^^. 

Gagnât  (R.)  —  La  frontière  militaire  de  la  Tripolitaine  à 
l'époque  romaine  (Extr.  des  Mémoires  de  l'Académie  des  Ins- 
criptions et  Belles-Lettres),  broch.  in-4°,  87  p.  Paris,  Imp.  Natio- 
nale, 1912. 

Garcopino  (Jérôme).  —  Note  sur  une  mosaïque  récemment 
découverte  à  Tipasa  (Extr.  du  Bulletin  de  la  Société  Archéolo- 
gique), broch.  in-8°,  21   p.  Paris,  Imp:  Nationale,    1915. 

—  Mélanges  d'épigraphie  algérienne  (Extr.  de  la  Revue  Afri- 
caine), broch.  in-8*',  82  p.  Alger,  Ad.  Jourdan,  igi-i. 

—  Deux  inscripfifms  du  département  de  Gonstantine  récem- 
ment publiées  (Extr.  du  Bulletin  de  la  Société  Archéologique), 
broch.  in-8°,  12  p.  Paris,  Imp.  Nationale,  191 5. 

—  Du  droit  de  cité  accordé  par  les  Romains  aux  peuples  con- 
quis. De  ses  effets  (Extr.  des  Annales  Universitaires  de  V Algé- 
rie), broch.  in-i2°,  7  p.  Alger,  Ad.  Jourdan,  1916. 

—  Les  mosaïques  chrétiennes  des  Beni-Rached.  (Extr.  du 
Bull,  de  la  Soc.  de  Géographie  d'Oi-an),  broch.  in-8°,  12p.,  i  pi. 
Oran,  L.  Fouque,  191 6. 

Garton  (D''  L.)  —  L'église  du  prêtre  Alexander  découverte  à 
Bulla  Regia  en  191/1  (Extr.  des  Mémoires  de  l'Académie  des 
Inscriptions  et  Belles-Lettres),  broch.  in-8°,  12  p.  Paris,  Auguste 
Picard,  191 5. 

—  Les  fabriques  de  lampes  dans  l'ancienne  Afrique  (Extr.  du 
Bail,  de  la  Soc.  de  Géographie  d'Oran),  broch.  in-8°,  45  p.,  3  pi. 
Oran,  L.  Fouque,  191  fi. 

Déciiaud  (Ed.)  —  Rapport  présenté  au  nom  de  la  sous-com- 
mission  chargée  de   l'examen   des  questions  relatives  au  com- 


MOUVEMENT  DE  LA  BIBLIOTHEQUE 


365 


merce  et   an   n'-^'-imi'  (Ir)iuiiiicr  iil^'m-marocains,    hrftcli.    in-8°, 
ia3  p.  Oran,  D.  Heinlz  et  fils,  19 16. 

CnENEH  (. Mohammed  ben).  —  Classe  des  savants  de  rilri(|ya, 
texte  arabe  (Pid)licalion  de  la  FocuHé  des  Lettres  d'Alger),  Paris, 
E.  Leroux,  1910. 

Dji.w  (Georges).  —  Vers  le  l'ebad  (Extr.  du  lin  IL  de  la  Soc. 
de  Géographie  d'Oran),  broch.  in-8°,  55  p.  Oran,  L.  Fouciue, 

J()IO. 

Gentil  (Louis).  —  Notice  sur  la  cousiruction  de  la  carte  à 
l'échelle  de  i/i.ooo.ooo*  et  index  bibliographique  précédé  d'une 
vue  d'ensemble  sur  le  relief  du  Maroc,  Itroch,  in-S*,  ^8  p.  Paris, 
Henri  Barrore,  iQiS. 

—  La  recherche  scientifique  au  Maroc  (Extr.  de  la  Revue 
Générale  des  Sciences),  broch.  in-8°,  27  p.  Paris,  Armand 
Colin,  1914. 

—  Esquisse  hydrologique  de  la  région  de  Meknès  (Extr.  du 
Bull,  de  la  Société  de  Géographie  commerciide  de  Paris),  brneh. 
in-8°,  i5  p.  Paris,  igi/i- 

—  Notes  de  géologie  marocaine,  v""  et  vi®  séries  (Extr.  des 
Comptes  rendus  des  séances  de  l'Académie  des  Sciences), 
2  broch.  in-8*',  27  p,  Paris,  Gauthier-Villars,  igi/i-1915. 

Gentil  (L.)  et  Pereira  de  Sousa.  —  Sur  les  effets  au  Maroc  du 
grand  tremblement  de  terre  au  Portugal  de  1755  (Extr.  des 
Comptes  rendus  de  V Académie  des  Sciences),  broch.  in-8°,  3  p. 
Paris,  Gauthier-Villars,  1918. 

Gouvernement  Général  de  l'Algérie.  —  Rapport  sur  l'ins- 
truction publique  présenté  par  M.  le  docteur  Abadie,  d'Oran,  au 
nom  de  la  Commission  des  finances  des  Délégations  financières, 
broch.  in-8°,  89  p.  Alger,  V.  Heintz,  1910. 

—  Discours  prononcé  par  M.  le  Gouverneur  Général  à  l'ou- 
verture de  la  session  ordinaire  des  Délégations  Financières, 
broch.  111-8",  21  p.  Beaugency,  René  Barillier,  1916. 

—  Rapport  sur  le  fonctionnement  de  l'Office  du  Gouverne- 
ment Général  en  1910,  broeh.  in-8°,  86  p.  Beaugency,  René 
Barillier,  1916. 

Herbillon  (Général).  —  Insurrection  survenue  dans  le  Sud 
de  la  province  de  Constantine  en  18/19.  l^elation  du  siège  de 
Zaatcha,  broch.  in-8°,  208  p.,  3  pi.  Paris,  J.  Dumaine,   i803. 

HÉRON  DE  Villefosse,  (Ant.)  —  Rapport  sur  une  mission 
archéologique  en  Algérie,  broch.  in-8°,  120  p.  Paris,  Imp. 
Nationale,  1878. 

NoÉ  (Vicomte  de).  —  Les  bachibozouks  et  les  chasseurs  d'Afri- 
que, broch.  in-8°,  20^  p.  Paris,  Michel  Lévy  frères,  1861. 

Noi^L  (Capitaine  A.  H.)  —  Documents  pour  servir  à  l'histoire 


366  MOUVEMENT    DE    LA    BIBLIOTHEQUE 

des  Hamyan  et  de  la  région  qu'ils  occupent  actuellement  (Extr. 
du  Bull,  de  la  Soc.  de  Géographie  d'Oran),  broch.  in-8°,  270  p., 
2  cartes.  Oran,  L.  Fouque,  191 6. 

OiLD  Kadi  (Si  Ahmed).  —  Impressions  du  voyage  à  Paris  de 
Sidi  Ahmed  ould  Kadi,  bach-agha  de  Frenda,  broch.  in-S*",  46  p. 
Alger,  A.  Boyer,  1878. 

Renault  (J.)  —  Cahiers  d'archéologie  tunisienne,  nouvelle 
série,  à  vol.  in-^".  Tunis,  Imp.  Rapide,  1910-1914. 

RoTSCHiLD  (Lord).  —  A  preliminary  account  of  the  lepidop- 
terus  faunas  of  Guelt-es-Stel  (Central  Algeria)  (Extr.  de  Novi- 
tates  Zo(jlogicaœ),  broch.  in-/j°,   7  p.,   1910. 

Société  de  Géographie  du  Makoc  (Bulletin  de  la).  —  i**"  Fas- 
cicule, broch.  in-S",  77  p.,  i  carte.  Casablanca,  J.  Mercié  et  C'^, 
1916. 

VoiNOT  (Capitaine  L.)  —  Les  actes  d'hostilité  des  émigrés  et 
des  Marocains,  surtotit  des  Beni-Snassen,  et  les  opérations  elTec- 
tuées  par  les  Français  notamment  en  i856  (Extr.  de  la  Revue 
Africaine),  broch.  in-8'',   112  p.  Alger,  Ad.  Jourdan,   1914. 

Voyage  de  S.  M.  ^'apoléon  III  en  Algérie,  avec  notice  histori- 
que et  géographique,  i  vol.  in-S",  36o  p.  Alger,  Bastide,  i865. 


AFRIQUE 


Delhaise  (Charles).  —  Ethnographie  congolaise.  Chez  les 
Warundi  et  les  Wahorohoro  (Extr.  du  Bulletin  de  la  Société 
royale  belge  de  géographie),  broch.  in-8°,  64  p.  Bruxelles, 
Typo-lithographie  générale,  1908. 

—  Chez  les  Wabemba  (Extr.  du  Bulletin  de  la  Société  royale 
belge  de  géographie),  broch.  in-8*',  81  p.  Bruxelles,  Typo-litho- 
graphie générale,  1908. 

Galli  (H.)  —  La  guerre  à  Madagascar.  Histoire  anecdotique 
des  expéditions  françaises  de  i885  à  1895,  i  vol.  in-8°,  964  p., 
i4  cartes  et  itinéraires.  Paris,  Garnier  frèrts,  1896. 

Goi:VER.NEME.NT  GÉNÉRAL  DE  l' AFRIQUE  OCCIDENTALE  FRANÇAISE. 

—  Discours  prononcé  par  M.  Clozel,  gouverneur  général,  à 
l'ouverture  de  la  session  ordinaire,  broch.  in-8'',  9  p.  Corée, 
Imp.  du  Gouvernement  Général,  1915. 

—  Rapport  d'ensemble  annuel  (année  191 2),  i  vol.  in-8°, 
948  p.  Paris,  Emile  Larose,  1916. 


MOUVEMENT  DE  LA  BIBLIOTHÈQUE  -î^i' 

Office  Colonial.  —  Guide  du  coinm<  rte  et  de  la  rnlrinisalicin 
à  la  Côte  d'Ivoire,  broch.  iii-8°,  257  p.,  tj  cartes,  l'aris,  I,.  \N  alter 
frères,   1910. 


ASIE 


Bhemeh,  Martin  de  Flacolrt,  Crev(jst  et  Levèqle.  —  Les 
principaux  oléajirineux  de  l'Indo-Chine  (Extr.  du  Bulletin  éco- 
nomique de  rindo-C.hine),  brocli.  in-8",  i5j  p.  Hanoï,  F.  H. 
Schneider,  1906. 

Poi  CHAT  (Jacques).  —  L'industrie  des  jossticks  au  Tonkin 
(Extr.  de  la  Bévue  Indo-Chinoise),  broch.  in-8°,  56  p.  HaHOï, 
Inip.  d'Exlrènie-Orient,  1911. 

Douakche  (L.)  —  Les  bovidés  du  Tonkin  (Extr.  du  Bulletin 
économique  de  l'Indo-Chine),  broch.  in-S°,  173  p.  Hanoï, 
F.  H.  Schneider,  1906. 


A3IÉRIQUE 


NoRDENSKiOLD  (A.  E.)  —  La  seconde  expédition  suédoise  au 
Grônland  (l'Inlandsis  et  la  Côte  orientale),  traduction  Ch.  Rabat, 
broch.  in-A",  492  p.,  5  cartes.  Paris,  Hachette  et  C'^,  1888. 


Le  Bibliothécaire, 

A.  TOURMER. 


Capitaine    Maurice    PETIT 


Mort  au  Champ  d'Honneur  I 

Le  i3  août  191 6  est  tombé  à  M....  (Somme)  un  de  nos  plus 
dévoués  sociétaires,  M.  le  capitaine  Marie-Joseph-Maurice  Petit. 

Né  le  a5  février  1871  à  Gizaucourt  (Marne),  Maurice  Petit 
s'engageait  à  dix-huit  ans  au  i"*"  Bataillon  de  Chasseurs  à  pied. 
Rengagé,  il  entrait  en  1896  à  l'Ecole  Militaire  d'Infanterie  et,  le 
i®""  avril  1897,  ^'"  sortait  sous-lieutenant. 

Affecté  d'abord  à  l'Infanterie  de  Ligne,  il  passa  ensuite  à  la 
Légion  étrangère,  puis  aux  Zouaves,  pour  revenir  à  la 
Légion  et  finir  au  9^  Zouaves  de  marche.  Partout  il  se  montra 
un  soldat  d'élite.  Il  combattit  au  Sahara,  à  Madagascar,  en 
Tunisie,  tout  récemment  au  Maroc  oriental  et  enfin  contre 
l'Allemagne.  Hors  de  France  il  avait  pris  part  à  douze  combats. 

Cité  deux  fois  à  l'Ordre  du  jour  au  Maroc,  la  Croix  de  guerre 
lui  avait  été  attribuée,  d'abord  avec  étoile,  plus  tard  avec  palme. 

Capitaine  adjudant-major,  chevalier  de  la  Légion  d'honneur, 
titulaire  de  la  Croix  de  guerre,  de  diverses  décorations  colo- 
niales, officier  d'Académie,  Maurice  Petit  aurait  pu  attendre  à 
l'arrière  sa  promotion  au  grade  de  chef  de  bataillon.  Mais, 
comme  presque  tous  ses  camarades  retenus  au  Maroc  par  la 
nécessité  impérieuse  de  défendre  notre  conquête,  il  ne  cessait  de 
demander  son  envoi  sur  le  front  français  pour  y  accomplir  un 
plus  grand  devoir. 

Vers  la  fin  du  mois  de  juin  1916,  satisfaction  lui  fut  accordée 
et,  dans  les  premiers  jours  de  juillet,  il  s'embarquait,  heureux 
et  fier  d'avoir  vu  ses  vœux  exaucés. 

Ce  ne  fut  pas  sans  émotion  que,  pour  la  dernière  fois,  je  lui 
serrai  les  mains,  à  la  Bibliothèque  de  la  Société,  où  il  se  plaisait 
à  venir  me  retrouver  lorsqu'il  venait  à  Oran.  Ce  ne  fut  pas  sans 
un  pénible  serrement  de  cœur  que  je  vis  ce  beau  soldat,  à 
l'allure  martiale,  familiarisé  avec  les  balles,  aller  affronter  les 
obus. 

Hélas  I  je  ne  devais  plus  le  revoir.  Le  3  août  il  m'écrivait 
encore,  le  i3,  il  tombait  mortellement  frappé  en  accomplissant 
témérairement  son  devoir  ainsi  qu'en  témoigne  la  belle  citation 
suivante  à  l'Ordre  de  l'Armée  : 

((  Officier  de  haute  valeur  et  d'un  courage  à  toute  épreuve,  a 
tenu  à  aller  s'assurer  que  la  liaison  avec  une  unité  voisine  était 
bien  établie  malgré  la  violence  du  bombardemeiit.  A  été  tué  au 
cours  de  sa  mission.  » 

Ainsi  mourut  pour  la  France  le  capitaine  Maurice  Petit. 


NÉCROI>OGlE  369 

Mais  la  vie  de  soldat  n'avait  pas  suffi  à  l'activité  de  l'officier. 
Travailleur  infatigable,  collectionneur  passionné,  notre  collègue 
avait  consacré  les  loisirs  des  camps  à  des  recherches  d'archéo- 
logie préhistorique  dont  notre  Bulletin  a  donné  quelques-uns 
des  résultats  dans  les  publications  suivantes  : 

En  igoô  :  Note  sur  les  tumuli  d'Aïn-Sefra.  En  igi^i  :  i\ote  sur 
la  stalion  préhislorique  de  Goutiiir  (Maroc  Oriental).  En  igiô, 
une  étude  géographique  intéressante  :  De  la  frontière  oranaise 
à  Taza.  II  se  proposait  de  publier  après  la  guerre  le  résultat  de 
ses  dernières  recherches  au  Maroc  Oriental. 

Si  notre  Société  [)leure  le  soldat,  ses  regrets  vont  aussi  au 
modeste  savant  chez  lequel  l'amour  de  la  Science  était  insépa- 
rable de  celui  de  la  Patrie. 

Au  nom  de  la  Société,  je  salue  la  mémoire  du  capitaine  Petit 
et  renouvelle  à  sa  veuve  et  à  sa  famille  l'expression  denos 
condoléances  les  plus  attristées. 

F.  DOUMERGUE. 


Félix-Georges   de   PACHTERE 


Mort  au  Champ  d'Honneur  I 

Dans  les  premiers  jours  d'octobre  parvenait  au  Lycée  d'Oran 
une  bien  triste  nouvelle  :  notre  ancien  collègue  F.  G.  de  Pach- 
tere  avait  été  tué  en  Macédoine,  le  24  septembre  1916.  Frappé 
d'une  balle  en  plein  front,  notre  ami  venait  de  s'inscrire,  en 
lettres  de  sang,  à  la  suite  de  cette  pléiade  de  jeunes  savants  dont 
le  «  Livre  d'Or  »  des  Morts  pour  la  Patrie  sera  l'éternelle  gloire 
de  l'Ecole  Normale  Supérieure. 

Né  à  Paris  le  20  avril  1881,  G.  de  Pachtere  se  destina  à  l'en- 
seignement. Entré  à  l'Ecole  Normale  Supérieure  en  igoS,  il  en 
sortit  agrégé  d'histoire  en  1907.  Ses  brillants  succès,  ses  remar- 
quables aptitudes  pour  l'archéologie  romaine  le  désignèrent 
pour  l'Ecole  française  de  Rome  dont  il  fut  membre  de  1907 
à  1910. 

A  sa  sortie  de  l'Ecole  il  fut. nommé  professeur  d'histoire  et  de 
géographie  au  Lycée  d'Oran. 

Tout  en  se  consacrant  consciencieusement  à  ses  fonctions, 
G.  de  Pachtere  mit  aussitôt  en  chantier  la  thèse  dont  il  avait 
déjà  établi  le  plan  ;  il  commença  à  classer  les  nombreux  docu- 
ments qu'il  avait  recueillis  en  parcourant  l'Italie,  la  Tunisie  et 
l'Altcérie. 


370  NÉCROLOGIE 

Doué  d'une  vive  intelligence,  dune  mémoire  très  fidèle  et, 
par  dessus  tout,  d'une  grande  puissance  de  travail,  il  menait  de 
front  la  préparation  de  sa  thèse  et  l'étude  de  diverses  ques- 
tions d'histoire,  d'arcliéologie,  d'épigraphie.  Longue  était  déjà 
la  liste  de  ses  publications.  Toutes  portent  l'empreinte  de  la 
sûreté  de  sa  documentation,  de  la  précision  de  sa  méthode  et  de 
la  rectitude  de  son  jugement. 

La  modestie  du  jeune  maître  égalait  son  talent.  Très  sévère 
pour  ses  propres  œuvres  dont  il  était  le  premier  critique,  il 
tenait  en  piètre  estime  les  publications  dans  lesquelles  le  souci 
de  provoquer  l'admiration  des  profanes  l'emporte  sur  celui  de 
faire  œuvre  de  vérité. 

Manquant  de  livres,  de  Pachtere  demanda  et  obtint  une  chaire 
au  Lycée  d'Alger  d'où  il  ne  tarda  pas  à  regagner,  comme  bour- 
sier d'études,  l'Ecole  Normale  Supérieure,  ce  qui  lui  permit  de 
se  retrouver  près  de  ses  maîtres  et  de  se  consacrer  tout  entier  à  sa 
thèse. 

Hélas  !  le  décret  de  mobilisation  vint  l'arracher  à  ses  rêves 
d'avenir. 

Sergent  aux  Zouaves,  il  fut  bientôt  sur  la  ligne  de  front,  à 
l'arrière  de  laquelle  il  aurait  pu  rester  en  arguant  de  sa  myopie. 
Blessé  à  la  tète  aux  Eparges,  il  revint  en  convalescence  en 
Algérie.  Promu  sous-lieutenant,  il  fut  envoyé  aux  Dardanelles, 
d'oii  il  passa  à  Salonique. 

Là  sur  cette  terre  de  Macédoine  qui  lui  rappelait  ses  classi- 
ques, il  puisa  dans  son  amour  du  travail  le  stimulant  qui  le 
préserva  de  la  dépression  morale  qu'engendrait  une  trop  longue 
oisiveté.  Il  mit  à  profit  ses  loisirs  pour  faire  des  recherches 
archéologiques  et  rendit  compte  à  l'Académie  des  Inscriptions 
et  Belles-Lettres,  dont  il  était  Correspondant,  des  découvertes 
faites  en  creusant  les  tranchées. 

La  reprise  des  opérations  le  ramena  vers  les  lignes  bulgares 
d'oii  il  ne  devait  plus  revenir.  Parti  avec  une  première  vague 

d'assaut  à  l'attaque  de  F ,  il  tombait  pour  ne  plus  se  relever. 

Aujourd'hui  de  Pachtere  dort  son  dernier  sommeil  sur  cette 
terre  de  Grèce  qui,  ayant  été  un  des  berceaiix  de  la  civilisation, 
semble  destinée  à  en  devenir  le  tombeau. 

La  mort  glorieuse  de  de  Pachtere  ne  doit  pas  seulement  nous 
inciter  à  admirer  et  à  regretter  le  soldat  et  le  savant  ;  nous 
devons  aussi  nous  rappeler  que  notre  collègue  fut  vm  des  mem- 
bres les  plus  distingués  de  notre  Compagnie.  Membre  de  la 
Société  dès  son  arrivée  à  Oran,  de  Pachtere  ne  tarda  pas  à  être 
élu  au  Comité,  où  sa  place  était  marquée  d'avance.  Nommé 
Secrétaire-adjoint  pour  la  section  d'archéologie,  il  traita  avec  la 
plus  grande  compétence  toutes  les  questions  d'histoire,  d'ar- 
chéologie et  d'épigraphie  romaines  concernant  notre  déparle- 
ment. Il  fut  et  demeura  un  des  plus  précieux  collaborateurs  du 
Bulletin  de  la  Société. 


NECROLOGIE 


:{71 


Aussi  {■'(■si  avec  un  scMliiiiciit  dr  \i\c  icconnaissance  pour  les 
services  rendus  tjue  la  Socirlc  ilc  CiCixjnipliie  et  d'Archcdlnijie 
d'Oraii  adresse  un  souvenir  ému  au  savant  qui  a  consacré  sa  vie 
au  service  de  la  Science  v{  au  soldai  jLflorieux  (jui  est  mort  pour 
la  Patrie. 

Au  nom  de  la  Société,  en  mon  nom  personnel,  je  renouvelle 
à  Sa  jeune  veuve,  à  sa  famille  l'i'xpression  de  nos  plus  sincères 
condoléances. 

F.  DOUMERGUE. 


Louis    LAMUR 


Le  25  septembre  191 6,  une  triste  nouvelle  se  répandait 
comme  une  traînée  de  poudre  dans  la  ville  d'Oran.  Louis  Lamur 
était  subitement  décédé  dans  la  force  de  1  âge.  Ce  fut  dans  la 
population  une  consternation  générale.  Enfant  d'Oran,  Lamur 
en  était  aussi  un  des  citoyens  les  plus  estimés.  Son  indépen- 
dance de  caractère,  sa  loyauté,  son  franc-parler,  son  dévoue- 
ment à  la  chose  publique,  sa  grosse  si.tuation  de  forttme  lui 
avaient  acquis  la  sympathie  et  l'estime  de  ses  concitoyens. 

Très  actif,  Louis  Lamur  apportait  son  concours  à  toutes  les 
œuvres  qui  contribuaient  à  la  prospéi'ité  de  l'Algérie  et  de  la 
Mère-Patrie.  Quoique  très  adonné  aux  choses  de  la  vie  publique, 
Lamur  était,  avant  tout,  agriculteur  ;  il  gérait  avec  une  grande 
compétence  les  riches  vignobles  qu'il  avait  constitués  dans  la 
banlieue  d'Oran  ;  il  les  cultivait  en  agronome,  prêchant 
d'exemple  dans  l'application  des  méthodes  scientifiques  dou{  il 
était  le  fervent  apôtre. 

Partout  il  coml)attait  la  l'outine  et  ne  cessait  de  proclamer 
que  le  progrès  agricole  est  entièrement  subordonné  au  progrès 
scientifique. 

Président  pendant  dix-huit  ans  de  la  Société  d'Agriculture,  il 
apporta  une  inlassable  énergie  à  défendre  les  intérêts  agricoles 
de  l'Oranie,  à  favoriser  les  initiatives,  à  préconiser  les  méthodes 
de  culture  qui  marquent  quelque  progrès  sur  la  routine.  Aux 
Délégations  Financières,  où  il  présida  la  section  des  Colons,  il 
apporta  le  fruit  de  son  expérience,  il  s'employa  à  stimuler  des 
activités  engourdies  et  ne  recula  jamais  devant  les  initiatives  à 
prendre  pour  réformer  certains  errements. 

Membre  de  la  Société  de  Géographie  et  d'Archéologie  d'Oran, 


372  NÉCROLOGIE 

L.  Lamur  avait  bien  voulu  accepter  de  faire  partie  du  Comité. 
Tout  son  concours  était,  acquis  aux  intérêts  de  notre  Compagnie. 
Au  nom  de  la  Société  et  en  mon  nom  personnel,  je  salue  bien 
bas  la  mémoire  de  notre  très  regretté  collègue  et  renouvelle  à 
sa  veuve,  à  ses  enfants  et  à  la  famille  l'expression  de  nos  condo- 
léances les  plus  attristées. 

F.  DOUMERGUE. 


Pierre    SUQUET 


Le  lo  octobre  19HÎ,  un  de  nos  confrères,  M.  Suquet  Pierre, 
mourait  à  l'Hôpital  iMilitaire  d'Oran  des  suites  d'une  maladie 
contractée  sur  le  front. 

Après  avoir  fait  une  partie  de  sa  carrière  d'ingénieur  dans 
notre  grande  colonie  d'Asie,  M.  Suquet  était  venu  il  y  a  quel- 
ques années  à  Oran,  en  qualité  de  chef  de  service  de  l'impor- 
tante maison  Alar,  Clamens  et  Fourneron  Bey,  entrepreneurs 
de  travaux  publics  à  Marseille,  pour  y  diriger  la  constnjction 
de  l'usine  électrique  de  Mers-el-Kébir  et  d'autres  grands  travaux. 
La  guerre  le  surprit  en  pleine  activité. 

M.  Suquet,  quoique,  dégagé  de  toute  obligation  militaire, 
n'hésita  pas.  Ancien  officier,  il  obtint  d'être  réintégré  avec  son 
grade  de  lieutenant,  et  fut  affecté  au  2''  régiment  de  Zouaves. 
Parti  sur  le  front,  il  vécut  les  rudes  combats  des  Dardanelles,  et 
de  là  fut  transféré  en  Macédoine  ;  il  y  contracta  la  maladie  de 
laquelle  il  ne  devait  pas  se  relever. 

Evacué  à  Oran,  il  y  continua  son  service  dans  les  bureaux  de 
l'Etat-Major  jusqu'au  jour  où  son  mal  lui  'interdit  tout  travail 
et  l'obligea  à  rentrer  à  l'hôpital  ;  il  ne  tarda  pas  à  y  succomber. 

Son  caractère  tout  de  droiture  et  de  franchise,  son  énergie 
tempérée  par  une  parfaite  courtoisie  et  les  meilleurs  dons  du 
cœur  lui  avaient  ac(juis  l'estime  générale  et  l'amitié  de  ceux  qui 
l'approchaient  de  plus  près. 

Au  vaillant  et  glorieux  soldat,  nous  offrons  l'hommage  de 
notre  admiration  ;  à  sa  veuve  et  à  la  famille  dont  il  était  le  sou- 
tien et  le  guide,  nous  renouvelons  l'expression  de  nos  condo- 
léances les  plus  vives. 

E.  F. 


TABLE   DES  MATIÈRES 


SOCIETE   DE   GEOGRAPHIE   ET   D'ARCHEOLOGIE 


P  R  O  V  I  X  C  K      D  '  O  R  A  X 


TOME   XXXVI.   —  1916 


Pages 

Bureau  et  Comité  administratif  de  la  Société    3 

Procès-verbaux  des  réunions  de  la  Société    io8,  208,  355 

Itapport  sur  les  travaux  de  la  Société  pendant   l'année   if(i5-if)i6   ....  212 

Mouvement   de   la   Bibliothèque    363 

Noël  (Capitaine).  —  Documents  pour  servir  à  l'iiistoire 
des  Hamyan  et  de  la  région  qu'ils 
occupent  (Cartes  i  et  2)   5,     117 

D""  L.  Cartox.  —  Les  fabriques  de  lampes  dans  l'ancienne 

Afrique  (PI.  I,  II  et  III)   61 

Jérôme  Carcopino. —  Les  mosaïques  chrétiennes  des  Béni- 

Rached  (PI.  IV)  igS 

A.  Guillaume.  —  Observations  météorologiques  faites  à  la 

station  de  Santa-Cruz    2o3 

D""  Gustave  Bertrand  et  Etienne  DtmoMMK.  —  Notice  sur 
Kl  Ksar  El  Kebir  et  la  région  du 
khiott    217 

L.  VoiNOT  (Capitaine).  —  Note  sur  les  tumidi  et  quelques 

ruines  des  environs  d'El 
Aïoim  Sidi  ÎMellouk  (Maroc 
Oriental   (avec   figures)    . . .      267 


374  TABLE    DES    MATIERES 

Pages 

R.  JoANMS  (Sous-Lieutenant).  —  Excursion  aux  grottes  de 

Moulai  Ahmed  ou  du 
Zegzel  (Maroc  Orien- 
tal) (PI.  V  et  VI,  avec 
figures)     278 

H.  Pellet.  —  Note  sur  les  ruines  de  Mina  (avec  figures).     285 

C.  Ben  Danou.  —  Contribution  à  l'étude  de  l'industrie 
pastorale  en  Algérie  et  au  Maroc. 
Note  sur  les  laines  du  Sud  Oranais 
et  du  Maroc    291 

Guillaume  et  Liiuillier.  —  Observations  météorologiques 

faites  à  la  station  de  Sanfa- 
Cruz  du  i^""  juin  au  3o  no- 
vembre  1916    34 1 

A.  TouRiNTER.  —  Mouvement  de  la  navigation  dans  les 
ports  du  département  d'Oran  pen- 
dant l'année  191 5.  Mouvement  com- 
mercial          343 


BIBLIOGRAPHIE 


A.   Cour.  —  Mélanges  africains  et  orientaux,   par  René 

Basset    io4 

—  Les  actes  d'hostilité  des  émigrés  et  des 
Marocains,  surtout  des  Béni  Snassen,  et 
les  opérations  effectuées  par  les  Français, 
notamment  en  i856,  par  le  capitaine 
L.   VoiNOT    io5 

Abbé  Fabre.  —  I.  Du  droit  de  cité  accordé  par  les  Romains 
aux     peuples    conquis    et    ses    effets  ; 

II.  Deux   inscriptions   du   département 
de    Constantine    récemment    publiées  ; 

III.  Mélanges  d'épigraphie  algérienne  ; 

IV.  Note  sur  une  mosaïque  récemment 
découverte  à  Tipaza,par  M.  J.Carcopino     106 


TABLE    D!£S    MAIIKUKS  375 

F.  DoLMERGUE.  —  Rappoit  général  sur  la  situalion  «in 
Proteclorat  du  Maroc  au  3i  juil- 
let i()i'i,  drossé  par  les  Services  de 
la  Hésidcnce  Générale,  sous  la 
diretiion  de  M.  le  général  Lyaitey, 
Commissaire  Résident  Général  de 
la  Hépiilili(|H('  Française  au  Maroc.      2o4 

—  Rapport  [tréscnlé  ati  nom  de  la  Sous- 
Commission  chargée  des  questions 
relatives  au  commerce  et  au  régime 
douanier  algéro- marocains,  par 
Kd.   Dr.cHAiu     35 r 

Ahhé  FvBRE.  —  L'église  du  [urlrc  Alexandcr  dérouvfMte  à 

Bulla  Regia  en  1914,  par  le  D''  Cartox.     353 


NÉCROLOGIE 


Commandant  Paul   Berthon    1 14 

Léopold  Français 1 1 5 

M®  Charles  Mesrine  1 1 5 

Docteur  Jean  Duzan   216 

Capitaine  Maurice  Pdit    368 

Félix-Georges  de  Pachterc   369 

Louis  Lamur   371 

Pierre   Suquet    372 


DT  Société  de  geogrtphie  et 

298  d'î^rcheologio  de  11   province 

08S622         d'Or^n 

t.  35-36        ^  Bulletin  trimestriel  de 
geogrtiphie  et  d'fiPchoologie 


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